Bilan LOTI Paris-Granville

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Mai 2009 Bilan LOTI de l'aménagement de Paris Granville Rapport

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Mai 2009

Bilan LOTI de l'aménagement de Paris Granville

Rapport

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SOMMAIRE

Résumé et conclusions............................................................................................ 5

1. Introduction...................................................................................................... 11

2. Historique du projet......................................................................................... 13

2.1. Rappel des principales étapes ....................................................................... 13

2.2. Les objectifs du projet .................................................................................... 16

2.3. Les points sensibles du projet ........................................................................ 17

3. Description de l’opération lors de la décision de lancement ...................... 18

3.1. Principales caractéristiques physiques du projet............................................ 19

3.2. Le trafic et les recettes ................................................................................... 22

3.3. Les coûts........................................................................................................ 23

3.4. La rentabilité économique (pour la SNCF) ..................................................... 26

3.5. La rentabilité socio-économique (pour la collectivité) ..................................... 27

4. Les conditions de réalisation du projet ......................................................... 28

4.1. Les évolutions du projet après le DAM........................................................... 28

4.2. Le délai de réalisation de l’infrastructure ........................................................ 28

5. Analyse des écarts .......................................................................................... 29

5.1. La mise en place de l’offre ............................................................................. 29

5.2. La réponse de la demande............................................................................. 36

5.3. L'impact sur l'environnement.......................................................................... 44

5.4. Développement économique et aménagement du territoire........................... 45

5.5. Les bilans économiques pour la SNCF et pour la collectivité......................... 54

6. Remarques méthodologiques ........................................................................ 57

Annexe : principaux éléments chiffrés du bilan .................................................. 61

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Résumé et conclusions

La modernisation de la ligne Paris Granville de 1999 visait à améliorer la desserte ferroviaire de la partie Sud de la Basse-Normandie, territoire très rural et en régression démographique avec plusieurs villes petites ou moyennes. Les efforts faits pour développer l’activité économique et touristique avaient besoin d’être confortés par des liaisons de meilleure qualité pour gagner en accessibilité alors même que la route n’apporte pas de solution convenable. Les perspectives de trafic ne permettant pas à l’opération d’être rentable financièrement, le Contrat de Plan Etat SNCF 1990-1994 prévoyait dans son article 26 que des subventions apportent un concours financier afin de ne pas dégrader les comptes de la SNCF. Dans les conventions signées avec la SNCF le 27 juin 1994, la Région de Basse - Normandie a finalement décidé de participer à la fois au financement de la modernisation de l’infrastructure à hauteur de 116 M€2004

1 (environ 85% du total) et à l’acquisition de matériel roulant plus performant pour 72 M€2004 (environ 85% du total également). La ligne Paris-Granville par Dreux, l’Aigle, Surdon, Argentan, Flers, Vire, Villedieu-les-Poêles et Folligny est longue de 328 km 2 et électrifiée sur 81 km entre Paris et Dreux (1 500 V continus de Paris à Plaisir-Grignon et en 25 kV ensuite). Au-delà de l’Ile-de-France, elle traverse successivement les départements de l’Eure-et-Loir, de l’Eure, de l’Orne, du Calvados et de la Manche. L’aménagement consistait principalement à relever les vitesses limites de 110 à 140 km/h jusqu’à 140 et 160 km/h en améliorant le tracé. Ceci était réalisé de manière économique à l’intérieur des limites de la plate forme existante en passant de la double voie à la voie unique à commande centralisée sur 95 km entre Argentan et Granville. La vitesse est portée à 160 km/h sur environ 90 km, à 150 km/h sur 52 km et à 140 km/h sur 40 km. Seuls 4 points singuliers (sans compter l’arrivée à Granville) subsistent avec une vitesse réduite à 130 ou 120 km/h (la recherche du 160 km/h aurait été très coûteuse pour un gain de temps marginal faible). A ces travaux s’ajoutaient l’adaptation des installations de signalisation pour circuler à 160 km/h (blocks automatiques3, postes d’aiguillages, etc.), ainsi que celle des passages à niveau et la mise en œuvre de la radio sol train.

L’objectif des élus régionaux était d’améliorer la liaison ferroviaire en partenariat avec la SNCF. L’introduction de voitures Corail depuis 1990 et la création d’une circulation supplémentaire en week-end avaient apporté des résultats appréciés mais limités. Aussi, à l’exemple de ce qui était en cours de réalisation pour Paris-Cherbourg avec l’électrification et le relèvement des vitesses, mais en tenant compte du trafic nettement moindre, la Région de Basse-Normandie avait demandé à la SNCF une solution conduisant à des progrès très significatifs :

– améliorer nettement le confort des voyageurs,

– diminuer sensiblement la durée du trajet Paris-Granville à moins de 3 heures (le meilleur temps était de 3h25, et le vendredi avec 10 voitures Corail le trajet durait 3h46),

– augmenter la fréquence de la desserte en fin de semaine où la demande est la plus importante

– éviter que les solutions d’amélioration retenues ne soient remises en cause dans le cas d’une électrification ultérieure de la ligne.

1 Le déflateur utilisé est l’indice des prix du PIB.

2 Dont 195 km en Basse - Normandie

3 Systèmes permettant de régler automatiquement l’espacement des trains.

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Les gains de temps des usagers pour favoriser le développement économique de la Région constituaient l’objectif principal. En revanche, les avantages relatifs à l’environnement (réduction de la pollution de l’air et des émissions de gaz à effet de serre due au report de trafic de l’automobile) n’étaient pas mis en avant à l’époque. La ligne étant déjà existante, la procédure d’enquête d’utilité publique n’était pas nécessaire, mais le projet a été approuvé en mai 1995 par le ministre chargé des Transports (dossier d'approbation ministérielle DAM), conformément au cahier des charges de la SNCF qui prévoyait en outre une évaluation de la rentabilité sociale des opérations. Les travaux ont été engagés en 1994 et la mise en service a eu lieu en 1999. Le premier nouvel automoteur X 72500 a été livré en septembre 1998, suivi de deux autres par mois jusqu’en avril 1999. Des travaux complémentaires de modernisation ont aussi été réalisés de 1997 à 1999 entre Dreux et l’Aigle. Le bilan réalisé est différentiel, ce qui permet de rendre compte des impacts nets. La situation de référence a priori et a posteriori, en l’absence d’aménagement, suppose le maintien en l’état des installations et des dessertes ferroviaires avec des rames tractées par des locomotives Diesel BB 67400 limitées à 140 km/h. La desserte fret est supposée inchangée en situation de référence comme en situation de projet. Elle est très réduite et en diminution. Le périmètre du bilan ne comprend pas les suppressions de passages à niveau, qui ont été demandées et financées par les collectivités territoriales, ni les améliorations réalisées en complément en Haute Normandie sur la section Dreux l’Aigle financées par les deux régions normandes4. Le gain de temps est inférieur à 5 minutes mais profite à toute la desserte Paris Granville. Le coût de l’aménagement s’élève à 123 M€2004. Il est en économie de 14 M€2004 par rapport aux estimations du budget initial, soit 10% du coût initial.

en millions d'€ (2004) Coût total infra Dont subvention

Ex ante 137 M€ 116 M€ (85%)

Ex post 123 M€ (-10%) 116 M€

Les écarts proviennent à la fois de l’affinage effectué lors de la phase projet et des économies de réalisation lors de l’exécution des travaux. Le coût de la modernisation de la partie de la ligne située en Haute Normandie entre Dreux et l’Aigle est de 16 M€2004 entièrement financés par subvention des deux régions normandes. Les délais ont été respectés. Les travaux ont duré 5 ans, de 1994 à 1999. L’investissement dans les 15 automoteurs X 72500 tri-caisses plus performants est de 79 M€2004. L’économie d’environ 10% par rapport au dossier DAM (87 M€2004) est compensée par la mise en circulation de quatre automoteurs supplémentaires en décembre 2007 pour un montant de 19 M€2004 afin de renforcer la fiabilité et de permettre des passages en atelier plus fréquents.

4 Relèvements de vitesse à 160 km/h, mise en place du block automatique à cantons longs (BAPR) à la place du cantonnement téléphonique, etc.

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Les investissements éludés concernent des renouvellements de voie ancienne et en mauvais état qui auraient été réalisés en l’absence de projet. Leur coût est estimé à 6,1 M€2004 répartis sur la période 1999 2003. Les gains de temps sont légèrement inférieurs à ce qui était attendu, mais l’objectif de moins de 3 heures est atteint sur Paris Granville. Un avantage est aussi l’accélération des circulations de la pointe hebdomadaire grâce aux automoteurs remplaçant la plupart des rames tractées Diesel.

Meilleurs temps Hiver 1993/1994

Situation projet DAM

Situation Projet Ex post Hiver

2007/2008

Gains de temps DAM

Gains de temps Ex post

Paris Granville 3h26 2h54 2h59 0h32 0h27 Source SNCF

Les temps de parcours deviennent ainsi très favorables au train entre Paris et Granville.

Comparaison des temps routiers et ferroviaires en 2008

Temps de parcours

routiers (centre à centre)

Temps de parcours ferroviaires

(meilleurs temps gare à gare)

Paris Granville par A13

3h50 pour 341 km 2h59

Paris Granville par Dreux

5h00 pour 322 km 2h59

Sources : Mappy, SNCF

Si, entre 1997 et 2008, les temps de parcours n’ont pratiquement pas varié, le cadencement (desserte répétitive) à 30 minutes de la desserte Paris Dreux a provoqué une dégradation des temps de parcours entre Paris et Granville (+ 3 minutes en moyenne, mais + 13 minutes pour un train du vendredi). La fréquence des dessertes a été améliorée. Avant le projet, 4 dessertes quotidiennes étaient assurées, complétées par une desserte supplémentaire de pointe hebdomadaire. L’opération a permis d’ajouter une desserte en semaine avec toujours une desserte complémentaire pour la pointe hebdomadaire. La ponctualité (% de trains arrivant avec moins de 5 minutes de retard) s’est détériorée en perdant 4 points depuis 2005 pour atteindre 78% de trains à l’heure en 2008. L’augmentation des retards est majoritairement imputable au matériel roulant. En effet, les autorails X 72500 à trois caisses de technologie nouvelle qui ont remplacé les rames tractées par des locomotives Diesel BB 67400 avec 4 à 8 voitures Corail se sont révélés peu adaptés aux longs trajets et fragiles. Les opérations de maintenance réalisées dans les ateliers de Caen (hors du parcours naturel des engins) et de Granville posent des problèmes de mise en qualité. Par ailleurs, la centaine de kilomètres de voie unique entre Argentan et Granville qui retire de la souplesse à l’exploitation (croisements), ainsi que les problèmes de capacité aux abords de la capitale, rendent plus difficile le rattrapage des retards. Cette mauvaise qualité de service est très critiquée par les voyageurs et par les élus, qui veulent des mesures précises d’amélioration. Par ailleurs, la couverture des voies de la gare principale de Paris-Montparnasse a conduit la SNCF à interdire les circulations Diesel sous la dalle à cause des nuisances auditives et olfactives. En conséquence, l’arrivée des trains Paris Granville à Vaugirard (Paris Montparnasse 3) impose aux voyageurs un trajet terminal allongé vers la gare principale afin d’accéder au métro parisien. La demande des élus et des voyageurs

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est donc d’arriver dans la gare principale, ce qui soulève les questions de capacité de la gare Montparnasse et de mode de traction. Les économies de coûts d’exploitation sont estimées à 1,6 M€2004 par an. Elles concernent l‘entretien de la voie pour 0,9 M€2004 (mise à voie unique sur 95 km) et les dépenses de personnel (fusions de postes d’aiguillages et blocks automatiques) pour 0,7 M€2004.

En 2007, le trafic de l’axe Paris Granville (Ile de France / Evreux et au-delà5) s’est élevé à 0,726 million de voyageurs6. Il est un peu supérieur aux prévisions réalisées en 1994 pour le dossier d'approbation ministérielle (0,682 million soit +6,5 %). Les effets de l'opération n’apparaissent pas très clairement à partir de 1999, année de mise en service. Il n’y a pas de trafic détourné de l’avion car la concurrence aérienne est négligeable. On ne dispose pas d'information pour distinguer dans le trafic nouveau le trafic détourné de la route du trafic induit par l'accroissement de la mobilité.

Aménagement de Paris Granville Trafic IDF vers Granville

0,8 0,80,7

0,7 0,7

0,6 0,60,6

0,6 0,6 0,60,6

0,7 0,7 0,7 0,70,7

0,7 0,7 0,7

0,0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,9

1,0

1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006

Millions de voyageurs

Source : SNCF Direction du Développement

Le tableau ci-dessous synthétise les principaux chiffres a priori et a posteriori, en référence et en projet, en année pleine (année de mise en service) et en 2007.

Trafic de référence

(approbation ministérielle)

Trafic de référence (estimé a posteriori)

Trafic en situation

aménagement (approbation ministérielle)

Trafic réel avec aménagement

Gain de trafic (approbation ministérielle)

Gain de trafic réel

Axe IDF vers Granville Année pleine (1999)

0,682

0,595

0,682

0,614

0,000

0,019

IDF vers Granville (2007)

0,682

0,605

0,682

0,726

0,000

0,122

Source : SNCF Calculs RFF (Millions de voyageurs)

5 Trafics entre l’Ile de France et Verneuil, l'Aigle, Surdon, Alençon, Argentan, Briouze, Vire, Folligny et Granville.

6 Le trafic total de l’axe (Grandes Lignes et TER) est de 1,4 million de voyageurs en 2007.

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Les produits moyens ferroviaires (ou recettes moyennes au voyageur-km) n'augmentent pas a posteriori du fait de l'aménagement, conformément aux prévisions. Le supplément annuel de recettes d’exploitation était négligeable dans le dossier d’approbation ministérielle. Les recettes supplémentaires a posteriori sont déterminées en calculant les recettes en situation de projet et en situation de référence à partir des trafics et des produits moyens. On obtient la première année 0,4 M€2004. En matière d’environnement, les impacts semblent avoir été globalement maîtrisés. Ils interviennent surtout au moment des travaux et sont limités car les aménagements ont été réalisés sur la plateforme des lignes ferroviaires existantes. L’ouvrage public n’ayant pas été sensiblement modifié, il n’y a pas eu d’étude d’impact. Par ailleurs, l’aménagement a eu des effets positifs sur l'environnement : pollution des locomotives Diesel évitée par les automoteurs X 72500 plus modernes, report sur le chemin de fer de trafics routiers et diminution de la pollution et des émissions de CO2. Mais des locomotives Diesel subsistent encore pour les rames tractées assurant certaine dessertes de pointe. La modernisation de Paris Granville est une opération d’aménagement du territoire qui vise à obtenir des dessertes ferroviaires de meilleure qualité avec Paris. Les avantages de l’opération pour le trafic régional de voyageurs (TER) sont considérés comme étant du second ordre par rapport à ceux offerts aux trains de Grandes Lignes. Elle a été financée en grande partie par la Région de Basse - Normandie, car l’exploitation de la ligne n’est pas rentable financièrement. Ses caractéristiques (absence de pôles urbains importants, faible densité de population) sont peu favorables à une desserte fine par fer. Mais les entretiens réalisés pour ce bilan montrent que les aménagements effectués, qui ont permis de diminuer les temps de parcours vers Paris, sont avant tout considérés comme une simple remise à niveau de l’équipement de la ligne. Les retombées positives sont ternies par les nombreux problèmes de retards. Ainsi, l’image que la population peut avoir de cet axe de communication est détériorée. L’utilisation du train pour les déplacements domicile-travail reste faible par rapport à la route. Face à cette situation et aux demandes des élus régionaux, l’Etat va poursuivre cette politique d’aménagement du territoire et a présenté en avril 2009 un grand plan d’amélioration de la desserte ferroviaire en Basse - Normandie. Sur la ligne Paris Granville, les négociations engagées avec la SNCF en vue du renouvellement du matériel roulant par du matériel neuf bi mode (traction électrique et traction Diesel) à l’horizon 2013 seront encouragées. Des aménagements de double voie sur des tronçons à voie unique entre Argentan et Granville pour améliorer la capacité et la régularité sont étudiés pour une réalisation en 2015.

La rentabilité économique pour la SNCF (valeur actuelle nette et taux de rentabilité interne pour la fraction des investissements financée par l’établissement) recalculée sur la base des données disponibles à ce jour est la suivante :

Taux d'actualisation: 8% (durée 20 ans)

Avec déduction de la subvention

Taux de rentabilité économique pour SNCF ex ante

12,0%

Valeur actualisée pour SNCF ex ante

6,1 M€2004

Taux de rentabilité économique pour la SNCF ex post

Non calculable

Valeur actualisée pour la SNCF ex post

45,9 M€2004

(Taux réels hors inflation) Les évaluations a priori et a posteriori portent sur une période d’exploitation de 20 ans avec prise en compte de valeurs résiduelles pour les investissements dont la durée de vie est supérieure. Le calcul a priori a négligé les investissements en matériel roulant, en considérant qu’ils étaient compensés par des économies de locomotives Diesel.

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La valeur actuelle nette calculée au taux de 8%7 sur la chronique de 20 ans de l'excédent brut d’exploitation (EBE) et des coûts d'investissement nets des coûts éludés, de la valeur résiduelle et de la subvention est de 45,9 M€2004 au lieu de 6,1 M€2004 prévus. L’écart s’explique par les gains de trafics et les recettes nouvelles plus importantes a posteriori et aussi par le calcul de la valeur résiduelle. La participation financière de la SNCF n’a pas dégradé ses comptes. Comme il n’y a pas de taux d’actualisation qui annule la valeur actuelle nette, compte tenu de l’importance relative des subventions, le TRI économique de la SNCF n’est pas déterminé8. La rentabilité socio-économique pour la collectivité est la suivante :

A posteriori

Dossier d’approbation ministérielle

TRI socio économique 0,9% nd

La particularité de cet investissement est qu’il avait fait l’objet d’une étude socio économique dans le cadre de la mission confiée en 1990 au CGEDD (ex CGPC) par le ministre chargé des Transports (rapport de M. Portiglia). La Région de Basse - Normandie a par la suite souhaité s’engager dans une opération plus ambitieuse en assumant les conséquences financière de ses choix. De ce fait, la SNCF a décidé de ne pas procéder pour l’approbation ministérielle à une nouvelle étude socio économique. La rentabilité pour la collectivité de l’aménagement est a posteriori de 0,9%. L’opération n’atteint pas le seuil de rentabilité socio-économique fixé à 8% par l’ex Commissariat Général du Plan pour les investissements publics au moment du bilan a priori. Il faut néanmoins noter que l’évaluation socio-économique est centrée sur la prise en compte des seuls éléments quantifiables et monétaires et doit être mise en regard des autres effets attendus par la Région de Basse - Normandie et décrits dans ce rapport, comme l’aménagement du territoire, le développement économique régional ou les effets sur le tourisme qui ne sont pas monétarisés. Pour conclure, la justification économique de la modernisation de la ligne Paris Granville réside essentiellement dans la réduction des temps de parcours, dans l’amélioration des dessertes et dans les gains d’accessibilité pour désenclaver le Sud de la Basse Normandie et le relier à Paris. Entre Paris et Granville, le train met en théorie une heure de moins que la route, mais son image est ternie par le manque de fiabilité. L’opération n’est pas rentable car elle est menée dans des territoires à faible densité de population, sans pôle urbain dominant et avec des perspectives de trafic modestes. La Région de Basse - Normandie a pris la décision politique de consentir un effort financier important pour réaliser cette opération d’aménagement du territoire malgré des conditions défavorables au développement du trafic.

7 Coût de la ressource financière pour le début de période du bilan.

8 Hors subvention -0,5% a posteriori et -4 ,5% a priori.

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1. Introduction

Ce rapport constitue le bilan a posteriori (bilan LOTI) de l'aménagement de Paris – Granville. Il a été établi sous la responsabilité de Réseau Ferré de France conformément à l’article 14 de la loi d’orientation des transports intérieurs (LOTI) du 30 décembre 1982 qui prévoit que les grandes opérations d’infrastructures réalisées avec le concours de financements publics doivent faire l’objet d’un bilan des résultats économiques et sociaux, qui est rendu public. L'opération a été étudiée et réalisée par la SNCF, maître d’ouvrage jusqu’à la création de RFF en 1997 et maître d’ouvrage délégué ensuite. La SNCF a donc fourni l’essentiel des données nécessaires. Elle doit être remerciée pour son importante contribution à ce rapport. En application de ces dispositions, le bilan de l'aménagement de la ligne Paris – Granville a été lancé en octobre 2008 en même temps que celui de l'électrification de Paris – Cherbourg car ces deux opérations concernent la Région de Basse - Normandie et sont proches dans le temps (mises en service respectivement en 1999 et en 1996). Les travaux ont été réalisés par la direction de l’Audit de RFF avec l’appui du prestataire extérieur Egis Mobilité, sous l’égide d’un comité de pilotage composé de l’administration de tutelle (Direction Générale des Infrastructures, des Transports et de la Mer, CGEDD ex CGPC), de RFF et de la SNCF. En outre, un comité scientifique a été mis en place par RFF pour veiller à la rigueur de la méthodologie utilisée.

Les informations proviennent :

• des documents disponibles concernant la préparation du projet et la situation ex ante, en particulier :

- rapport du CGPC de 1991 sur l’amélioration de la liaison ferroviaire Paris-Granville rédigé par M. Portiglia9,

- rapport du CGPC de 1994 sur l’Avant Projet Sommaire de la modernisation de Paris-Granville rédigé par M. Roux10,

- notes aux membres du Conseil d'administration de la SNCF, - dossier d'approbation ministérielle, - lettre d'approbation du ministre chargé des Transports (mai 1995).

• des données a posteriori et des notes fournies par la SNCF (SNCF Proximités et SNCF VFE11) et par RFF.

Un bilan LOTI est une évaluation de politique publique qui mesure les écarts entre la réalité constatée et les objectifs de départ et qui vise à en tirer les enseignements. Pour les LGV, le dossier utilisé dans les bilans LOTI pour l’évaluation initiale est le dossier d’enquête publique, qui a servi à l’information des citoyens et a fondé la décision publique. Comme les

9 Rapport de M. Portiglia sur l’amélioration de la liaison ferroviaire Paris-Granville. CGPC n°90-452, 12 mars 1991

10 Rapport de M. Roux sur l’avant-projet sommaire de la liaison ferroviaire Paris-Granville, CGPC Affaire n°94004, 30

mai 1994 11 L’activité Grandes Lignes de la SNCF s’est scindée en 2005 en deux entités VFE (TGV et grandes radiales) et TIR

(Trains interrégionaux). En 2006, cette dernière est devenue Corail Intercités, de la branche SNCF Proximités (avec Transilien et TER) et compte Paris Cherbourg et Paris Granville dans son portefeuille de relations. Selon la SNCF, Paris Cherbourg (Grandes lignes) est bénéficiaire d’une dizaine de millions d’€ par an alors que Paris Granville est déficitaire.

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aménagements de lignes existantes ne donnent pas lieu à enquêtes publiques, c’est le dossier d’approbation ministérielle (DAM), constituant la décision de lancement, qui a été utilisé comme référentiel.

Ce bilan LOTI reprend, comme il est prévu, l’ensemble des rubriques figurant dans l’évaluation initiale et mesure les écarts avec la réalité constatée. Il est réalisé pour la SNCF supposée encore intégrée comme dans les dossiers ex ante et ne distingue pas le transporteur et le gestionnaire d’infrastructure. Le rapport comprend deux grandes parties. Dans la première, des chapitres 1 à 4, un historique couvre les réflexions, les études antérieures et l’analyse des documents de base. Il donne les principales étapes, les objectifs de l’opération et les points sensibles (chapitre 2). La description du projet lors de la décision de lancement passe en revue les principales caractéristiques physiques, les prévisions de trafics, de recettes et de coûts d’investissement et d’exploitation. Elle rappelle aussi la rentabilité économique (pour la SNCF opérateur intégré) et pour la collectivité qui avaient été annoncées a priori (chapitre 3). Les conditions de réalisation du projet terminent cette partie avec les évolutions après l'approbation ministérielle et les délais (chapitre 4). La seconde partie constituée des chapitres 5 et 6 fait le constat des écarts et de leurs conséquences en ce qui concerne la mise en place de l’offre, la réponse de la demande, l’impact sur l’environnement, le développement économique, l’aménagement du territoire et la rentabilité pour la SNCF et pour la collectivité (chapitre 5). Elle se termine par des remarques méthodologiques (chapitre 6). L’annexe rappelle dans une série de tableaux synthétiques les principaux éléments chiffrés du bilan. Un dossier technique séparé a été établi avec les documents détaillés et les notes de méthodologie ou de calcul.

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2. Historique du projet

2.1. Rappel des principales étapes

La modernisation de l’offre ferroviaire de la ligne Paris-Granville et la diminution des temps de parcours étaient des préoccupations majeures des collectivités territoriales de Basse - Normandie. La SNCF a engagé en 1990 des études préliminaires avec l’objectif de gagner un quart d’heure entre Paris et Granville (3h15 au lieu de 3h30 pour les meilleurs temps). L’électrification avait été écartée compte tenu du niveau insuffisant du trafic. La solution proposée consistait à relever la vitesse à 160 km/h (au lieu de 110 à 140 km/h) sur une grande partie du parcours grâce à une amélioration du tracé à l’intérieur de la plate-forme existante en passant de la double voie à la voie unique avec commande centralisée12 sur 170 km des 328 km de la ligne (entre L’Aigle et Surdon et entre Argentan et Granville). Seule la section Surdon Argentan commune avec la ligne Caen Tours devait rester à double voie. Le coût total de l’opération était estimé à 48 M€2004

13. Les locomotives BB 67400 devaient être remplacées par dix machines Diesel CC 72 000 puissantes aptes à 160 km/h14. A la demande du ministre chargé des transports, M. Michel Portiglia, ingénieur général des Ponts et Chaussées, a étudié ce scénario. Son rapport remis en 1991 concluait à une rentabilité intéressante pour la collectivité. Les perspectives de trafic ne permettant pas à l’opération d’être rentable financièrement, le Contrat de Plan Etat SNCF 1990-1994 prévoyait dans son article 26 que des subventions apportent un concours financier afin de ne pas dégrader les comptes de la SNCF. La Région de Basse - Normandie voulait une amélioration plus nette. Elle décide alors de s’engager dans une opération plus ambitieuse. La convention du 5 février 1992 entre la Région et la SNCF décide la poursuite des études avec «des objectifs de gain de temps maximal et d’anticipation de l’électrification»15. La SNCF établit sur ces bases un avant-projet sommaire de modernisation du tronçon l’Aigle Granville nettement plus cher (février 1994). M. Hubert Roux ingénieur général des Ponts et Chaussées, sollicité par la Région pour en faire ressortir les anomalies éventuelles et proposer s’il y a lieu des économies conclut dans son rapport (mai 1994) que la concertation a été suffisante pour que la Région sache ce qu’elle paie et pourquoi.

Il fallait à la fois moderniser l’infrastructure et remplacer les matériels roulants par des engins plus performants. Le projet prévoit un temps de parcours d’un peu moins de 3 heures entre Paris et Granville pour un montant d’investissement de 137 M€2004. Il comporte des travaux de voie avec relèvements de vitesse jusqu’à 160 km/h, l’adaptation des installations de signalisation et des passages à niveau, ainsi qu’un équipement en radio sol-train et la mise en câbles souterrains de l’artère aérienne. L’électrification de Dreux à Granville est à ce moment là estimée à environ 100 M€2004, sans gain de temps significatif. Dans les conventions signées avec la SNCF le 27 juin 1994, la Région de Basse - Normandie a finalement décidé de participer à la fois au financement de la modernisation de l’infrastructure à hauteur de 116 M€2004

16 (environ 85% du total) et à l’acquisition de matériel roulant plus performant pour 72 M€2004 (environ 85% du total également).

12 Comme les lignes de la Tarentaise et de Toulouse à St Sulpice sur le Tarn qui donnaient satisfaction.

13 Le déflateur utilisé est l’indice des prix du PIB.

14 Locomotives Diesel de ligne les plus puissantes jamais mises en service par la SNCF.

15 Rapport de M. Roux sur l’avant projet sommaire de la liaison ferroviaire Paris-Granville, mai 1994

16 Le déflateur utilisé est l’indice des prix du PIB.

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Comme la Région de Basse-Normandie assumait les conséquences financières du choix d’un aménagement plus ambitieux que le projet évalué en 1990, la SNCF a décidé de ne pas procéder à une nouvelle étude socio-économique. La ligne étant déjà existante, la procédure d’enquête d’utilité publique n’était pas nécessaire, mais le projet d’infrastructure a été approuvé par le ministre chargé des Transports en mai 1995 (dossier d'approbation ministérielle DAM), conformément au cahier des charges de la SNCF qui prévoyait en outre une évaluation de la rentabilité sociale de l’opération. Le courrier pointe d’ailleurs l’absence d’éléments «sur le taux de rentabilité retenu pour la part que [la SNCF] finance, et sur la rentabilité économique et sociale de l’ensemble du projet ». Une réponse sur la rentabilité financière de la contribution de la SNCF a été fournie par cette dernière en septembre 1995. Les travaux se sont déroulés entre 1994 et 1999. En complément, la partie de la ligne située en Haute Normandie entre Dreux et l’Aigle a également été modernisée (relèvements de vitesse à 160 km/h, mise en place du block automatique17 à cantons longs (BAPR) à la place du cantonnement téléphonique, etc.). Les 16 M€2004 d’investissement ont été entièrement financés par subvention des deux Régions normandes. Les travaux ont été réalisés de 1997 à 1999.

17 Système permettant de régler automatiquement l’espacement des trains.

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Calendrier de l’aménagement de Paris-Granville

Date Faits saillants

23 juillet 1990 Demande du ministère chargé des Transports d’étudier les conditions d’améliorations de la relation ferroviaire entre Paris et Granville

12 mars1991 Rapport CGPC (M.Portiglia) sur l’amélioration de la liaison ferroviaire Paris-Granville

5 février 1992 Signature d’une convention entre la Région Basse-Normandie et la SNCF pour la poursuite des études préliminaires.

21 octobre 1993 Avant Projet Sommaire présenté par la SNCF à la demande de la Région Basse-Normandie.

30 mai 1994 Rapport du CGPC (M.Roux) à la Région sur l’avant projet sommaire de Paris Granville

27 avril 1994 Approbation de l’opération par le Conseil d’Administration de la SNCF

27 juin 1994 Signature de deux conventions entre la SNCF et le Conseil Régional de Basse-Normandie pour la modernisation de l’infrastructure et l’acquisition d’automoteurs X 72500.

15 mai 1995 Approbation ministérielle pour l’aménagement de Paris-Granville

Février 1997 Création de RFF qui devient maître d’ouvrage du projet

Septembre 1998 Début de la livraison des automoteurs (jusqu’à avril 1999).

Octobre 1998 Relèvement de vitesse sur la section Surdon-Vire.

Mai 1999 Relèvement de vitesse sur les sections L’Aigle-Surdon et Vire-Granville.

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2.2. Les objectifs du projet

La ligne Paris-Granville traverse la partie Sud du territoire bas-normand, très rurale avec plusieurs villes petites ou moyennes (l’Aigle, Argentan, Vire) et où les efforts pour développer l’activité économique et touristique ont besoin d’être confortés par des dessertes de qualité. Sur cet axe, le désenclavement est mal assuré par la route en raison de la longueur des temps de parcours. La desserte ferroviaire souffrait d’insuffisances en termes de :

– temps de parcours peu compétitifs,

– trains fréquemment en retard,

– niveau de confort et de propreté des voitures peu satisfaisant en raison d’un matériel hétéroclite,

– insuffisance des liaisons certains jours et notamment durant les pointes de fins semaine.

L’objectif des élus régionaux était donc d’améliorer la liaison ferroviaire en partenariat avec la SNCF. L’introduction de voitures Corail depuis 1990 et la création d’une circulation supplémentaire en week-end avaient apporté des résultats appréciés mais limités. Aussi, à l’exemple de ce qui était en cours de réalisation pour Paris-Cherbourg avec l’électrification et le relèvement des vitesses, mais en tenant compte du trafic nettement moindre, la Région de Basse-Normandie avait demandé à la SNCF une solution conduisant à des progrès très significatifs :

– améliorer nettement le confort des voyageurs,

– diminuer sensiblement la durée du trajet Paris-Granville à moins de 3 heures (le meilleur temps était de 3h25, et le vendredi avec 10 voitures Corail le trajet durait 3h46),

– augmenter la fréquence de la desserte en fin de semaine où la demande est la plus importante

– éviter que les solutions d’amélioration retenues ne soient remises en cause dans le cas d’une électrification ultérieure de la ligne.

Les préoccupations liées à l'environnement n’étaient pas encore celles d’aujourd’hui. C’est pour cela que, bien que la réduction de la pollution et des émissions de gaz à effet de serre soient un objectif actuel, les avantages relatifs à l’environnement n’avaient pas été mis en avant à l’époque.

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2.3. Les points sensibles du projet

2.3.1. La réception des trains à Montparnasse

La couverture des voies de la gare principale de Paris-Montparnasse a conduit la SNCF à interdire les circulations Diesel sous la dalle à cause des nuisances auditives et olfactives. Une dérogation a été accordée une fois par jour pour deux voies partiellement couvertes pour les trains Paris-Argentan. La SNCF avait deux possibilités :

– changer de locomotive à Dreux joindre Paris en traction électrique, mais la perte de temps est trop importante (perte d’1/4h), et les surcoûts d’exploitation ne sont pas négligeables

– recevoir les trains à Paris Vaugirard.

C’est la deuxième solution qui a été retenue et le projet n’est pas revenu sur cette situation qui est critiquée car elle rallonge les temps de parcours terminaux en gare.

2.3.2. La desserte d’Alençon

Le trajet entre Alençon, préfecture de l’Orne située sur la ligne Caen Le Mans, et Paris n’est pas direct compte tenu du potentiel de trafic insuffisant et se fait par changement à Argentan, à Surdon ou au Mans via le TGV Atlantique. C’est un inconvénient hérité de l’histoire de la construction de la ligne Paris Rennes au 19ème siècle où, entre Alençon et Le Mans, deux villes à mi chemin du parcours, c’est la seconde qui a été choisie pour le tracé.

2.3.3. Les passages à niveaux et la phase de travaux

115 passages à niveaux existaient entre l’Aigle et Granville. L’adaptation de leurs équipements au relèvement de vitesse était prévue dans l’avant projet et donc dans l’estimatif des coûts associés. Par ailleurs, des suppressions des passages à niveau ont été réalisées pour améliorer la sécurité et la circulation routière à l’occasion du projet, à la demande et avec la participation financière des collectivités locales. Ces dernières opérations n’ont certainement pas été sans gêner les utilisateurs, qui, dans l’attente du rétablissement des communications routières, ont dû emprunter des itinéraires de substitution. De plus, les travaux importants sur la ligne existante (mise en voie unique, rectifications de tracés, etc.) ont perturbé les dessertes ferroviaires

2.3.4. La croissance des trafics et la rentabilité de l’opération

Un rapport d’audit de la SNCF sur l’évaluation de la conduite du projet de modernisation souligne en 1996 « l’absence d’étude commerciale pour l’accroissement du trafic à envisager avec la diminution des temps de parcours ». Comme la Région assumait les conséquences financière de ses choix, la SNCF a décidé de ne pas procéder à une étude socio économique. Elle a calculé à la demande du ministre chargé des Transports la rentabilité financière des seuls capitaux qu’elle avait investis. Cependant, le probable déficit commercial attendu sur la ligne pose le problème de la répartition des charges financières à venir entre la Région et la SNCF pour l’exploitation. La convention de financement de 1994 avec la SNCF recommandait une évaluation par un organisme indépendant au lancement du projet et 5 ans après. C’est l’objet du présent rapport.

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3. Description de l’opération lors de la décision de lancement

Ce chapitre rappelle les principales caractéristiques techniques, économiques, commerciales et financières du projet d’aménagement de Paris-Granville. Le périmètre de ce bilan LOTI correspondant au projet approuvé par le ministre chargé des Transports concerne les modernisations réalisées sur la section l’Aigle Granville. Il ne comprend pas les suppressions de passages à niveau, qui ont été demandés et financés par les collectivités territoriales, ni les améliorations réalisées en complément en Haute Normandie sur la section Dreux l’Aigle financées par les deux régions normandes18. Le gain de temps est inférieur à 5 minutes mais profite à toute la desserte Paris Granville. Le bilan réalisé est différentiel, ce qui permet de mesurer l’impact net de l’opération pour l’entreprise gestionnaire et pour la collectivité. La situation de référence a priori et a posteriori, en l’absence d’aménagement, suppose le maintien en l’état des installations et des dessertes ferroviaires avec des rames tractées par des locomotives Diesel BB 67400 limitées à 140 km/h.

La desserte fret est supposée inchangée en situation de référence comme en situation de projet. Elle est très réduite et en diminution.

Nombre moyen de circulations fret par jour (2 sens) Paris Granville

Dreux Surdon Surdon Argentan Argentan Flers Flers Folligny Folligny Granville

1996 0,8 8,9 1,9 1,1 1,6

2004 2,0 9,9 0,4 0,4 0,5

2007 0,9 4,2 0,1 0,1 0,1

Source : SNCF

Les avantages de l’opération pour le trafic régional de voyageurs (TER) sont considérés comme étant du second ordre par rapport à ceux offerts aux trains de Grandes Lignes.

18 Simplification des installations dans les gares ; relevage des voies avec ripage des courbes pour relever la vitesse

à 160 km/h ; 10 km de renouvellement de voie (RVB) et de remplacement de rail ; installation du BAPR à la place du cantonnement téléphonique ; mise en place d’un poste d’aiguillage moderne à Verneuil ; pose d’un câble de télécommunication.

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3.1. Principales caractéristiques physiques du projet

3.1.1. La ligne Paris Granville

La ligne à moderniser est représentée sur la carte ci-dessous.

Légende (après modernisation)

La ligne Paris-Granville par Dreux, l’Aigle, Surdon, Argentan, Flers, Vire, Villedieu-les-Poêles, Folligny est longue de 328 km 19 et électrifiée sur 81 km entre Paris et Dreux (1 500 V continus de Paris à Plaisir-Grignon et en 25 kV ensuite). Au-delà de l’Ile-de-France, elle traverse successivement les départements de l’Eure-et-Loir, de l’Eure, de l’Orne, du Calvados et de la Manche.

Comme le montre le tableau ci-dessous, son profil est assez accidenté avec des déclivités de 10 pour mille (12 pour mille à l’Aigle).

19 Dont 195 km en Basse - Normandie

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L’aménagement consistait principalement à relever les vitesses limites de 110 à 140 km/h jusqu’à 140 et 160 km/h en améliorant le tracé. Ceci était réalisé à l’intérieur des limites de la plate forme existante en passant de la double voie à la voie unique à commande centralisée sur 95 km entre Argentan et Granville. La vitesse est portée à 160 km/h sur environ 90 km, à 150 km/h sur 52 km et à 140 km/h sur 40 km. Seuls 4 points singuliers (sans compter l’arrivée à Granville) subsistent avec une vitesse réduite à 130 ou 120 km/h (la recherche du 160 km/h aurait été très coûteuse pour un gain de temps marginal faible).

Carte des vitesses

A ces travaux s’ajoutaient l’adaptation des installations de signalisation pour circuler à 160 km/h (blocks automatiques, postes d’aiguillages, etc.), ainsi que celle des passages à niveau et la mise en œuvre de la radio sol train. A la différence de la première étude de 1990, le projet maintient une double voie entre l’Aigle et Argentan (entre l’Aigle et Surdon puis entre Surdon et Argentan20). Au total la ligne est mise à voie unique banalisée à commande centralisée sur 95 km entre Argentan et Granville21.

Lignes à une seule voie banalisée Km

Argentan à Briouze 23

Flers à Viessoix 18,9

Vire à Granville 53,4

Total 95,3 Deux zones à double voie banalisée sont conservées entre Argentan et Granville (Briouze Flers et Viessoix Vire). Au total la ligne est mise à voie unique sur 95 km. Le détail des aménagements réalisés peut être classé en trois catégories (travaux de voie, génie civil et bâtiments ; installations de sécurité ; installations de télécommunication). Il est présenté dans le tableau suivant.

20 La section Surdon Argentan, commune avec la ligne Caen-Tours, était aussi maintenue à double voie en 1990.

21 La section Argentan Granville est sous l’autorité de l’agent circulation de Granville. Argentan télécommande les

installations de sécurité situées entre Briouze et Folligny (postes d’aiguillages de Briouze, Flers, Viessoix, Vire et Villedieu-les-Poêles).

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Catégories d'opération Opération Localisation

Travaux de voie, génie civil et bâtiments

Travaux de voie Rectifications de courbes L'Aigle Granville

Relevage de voies L'Aigle Granville

Mise à voie unique Argentan Granville

Modernisation de l'armement des voies L'Aigle Granville

Isolement de la voie L'Aigle Granville

Mise au plan étoilé des gares • L’Aigle-Surdon : L’Aigle, Sainte Gauburge,

Nonant le Pin, Surdon

• Surdon-Argentan : Argentan, bifurcation de

Sainte Anne

• Argentan-Granville : Ecouché, Briouze, Flers,

Viessoix, Vire, Villedieu les Poêles, Folligny,

Granville

Génie civil Terrassements pour modification du tracé des voies Surdon, bifurcation de Sainte Anne, Ecouché, Folligny

Ouvrages en terre

Passerelles voyageurs L’Aigle, Saint Gauburge, Le Merlerault, Nonant le Pin,

Surdon, Briouze, Vire

Ponts routes

Bâtiments Bâtiments pour les installations de sécurité • Salle à relais : Surdon, Argentan, Sainte Anne,

Briouze, Flers, Verssoix, Vire, Villedieu, Folligny,

Granville

• Salle pour tableau optique et télécommande des

gares : Argentan

Adaptation des quais Le Merlerault, Nonant le Pin, Surdon, Ecouché, Flers,

Argentan (réception des rames tractées de 12

voitures)

Adaptation du dépôt de Granville

Installations de sécurité

Blocks automatiques (BAPR) L'Aigle Granville

Installations des gares L’Aigle, Surdon, Argentan, Saint Hilaire de Briouze,

Flers, Viessoix, Vire, Veilledieu, Folligny, Granville

Télésurveillance PN et gares

Système d’annonce automatique des Argentan Granville

programmés (SAATP)

Adaptation des PN L'Aigle Granville

Installations de télécommunication

Mise en câble L'Aigle Granville

Téléphonie des gares Surdon, Argentan, Saint Hilaire de Briouze, Flers,

Viessoix, Vire, Veilledieu, Folligny

Radio sol train

Réseau Maintenance Incident Travaux (MIT)

3.1.2. Le matériel roulant

La modernisation de la ligne s’accompagne de l’acquisition de 15 automoteurs TER d’avenir X 72500 d’Alstom (ou XTER) en version tri-caisses (720 places) aptes à 160 km/h afin de tirer le meilleur parti des investissements dans l’infrastructure. Ces automoteurs remplacent les rames tractées par des locomotives Diesel BB 67 440. Des rames tractées sont néanmoins maintenues les jours de pointe exceptionnelle.

3.1.3. Temps de parcours et fréquences

L’objectif du projet est d’améliorer les temps de parcours. Le projet dans sa première variante ne permettait qu’un gain de temps d’environ un quart d’heure entre Paris et Granville. Il a par la suite été remanié afin d’obtenir « un gain de temps maximal » avec moins de trois heures sur la relation.

Meilleurs temps

Hiver 1993/1994

Situation projet DAM

Gains de temps DAM

Paris Granville

3h26

2h54

0h32

Les temps de parcours en fonction des arrêts devaient aussi être plus homogènes avec le nouveau matériel roulant plus performant.

Les fréquences des dessertes étaient de 4 allers et retours en semaine et une fréquence était ajoutée les fins de semaine.

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3.2. Le trafic et les recettes

3.2.1. Trafic dans le dossier d’approbation ministérielle

Pour le trafic des voyageurs, le DAM considère le trafic Grandes Lignes à longue distance, qui bénéficie le plus du projet, et le trafic régional (TER) est négligé. La prévision de trafic lors de la mise en service de l’opération (année de plein effet) était de 0,682 million de voyageurs. Le supplément de trafic est considéré comme négligeable. Les trafics en situation de référence et en situation de projet restent constants pendant toute la durée du bilan.

3.2.2. Les recettes supplémentaires

Le DAM ne prévoit pas de recette supplémentaire du fait du projet.

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3.3. Les coûts

Pour permettre les comparaisons, dans les tableaux ci-dessous comme dans l’ensemble du rapport, les valeurs exprimées en francs ou en euros ont été converties en euros de 2004 en utilisant l’indice des prix du PIB publié par l’INSEE.

3.3.1. Coût de construction

Le coût d’investissements en infrastructure présenté le dossier d’approbation ministérielle est de 137 M€2004.

DAM M€2004

Voie, génie civil, bâtiments 79

Installations de sécurité* 42

Installations de télécommunication 17

Total 137

* Dont adaptation PN 12 Les dépenses d’investissements se répartissent sur six années de 1993 à 1998

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Le montant total des travaux prévus a été multiplié par 2,8 entre les études de 1990 et l’avant projet sommaire de 1994, conformément à la demande de la Région qui souhaitait un projet plus ambitieux. Dans la version finale du projet de 1994, les travaux de voie représentent plus de la moitié de l’investissement.

APS 1994

M€04 MF 93

Travaux de voie 71 403,8 51,6%

Terrassements, 2 10,3 1,3%

ouvrages en terre

Ouvrages d'art 2 12,3 1,6%

Installations de 42 238,4 30,5%

sécurité*

Installations de 17 95,5 12,2%

télécommunication

Bâtiments 3 15,0 1,9%

Quais 1 4,6 0,6%

Aménagement du 0 2,1 0,3%

dépôt de Granville

Total 137 782,0 100,0%

* dont adapt.PN 12 67,0

Paris Granville

Coût des travaux

Etude SNCF 1990

M€04 MF 1/90 Delta 94/90

Travaux de voie 19 99,6 3,8 38,7%

Terrassements,

ouvrages en terre

Ouvrages d'art 0 0,0 0,0%

Installations de 24 128,4 1,7 49,9%

sécurité

Installations de 6 29,3 3,0 11,4%

télécommunication

Bâtiments 0 0,0%

Quais 0 0,0%

Aménagement du 0 0,0%dépôt de Granville

Total 48 257,3 2,8 100,0%

Par ailleurs, le projet réserve une éventuelle électrification ultérieure de la ligne. Les solutions d’amélioration retenues doivent être compatibles avec l’électrification. Ces mesures conservatoires spécifiques ont été chiffrées à 2,79 M€2004 par la SNCF.

22

Investissements éludés Des renouvellements de voie ancienne et en mauvais état étaient nécessaires au maintien de l’axe dans sa situation initiale ont été éludés du fait de l’aménagement. Leur coût était estimé à 6,14 M€2004 répartis sur la période 1999 2003.

22 L’avant projet de 1994 chiffre l’électrification de la ligne entre Dreux et Granville à environ 100 M€2004 sans gain de

temps significatif supplémentaire. Cette perspective est d’ailleurs déconseillée par le rapport Roux.

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3.3.2. Coût d’investissement en matériel roulant

Le projet validé par le DAM prévoit l’acquisition de matériel roulant TER : 15 automoteurs X 72500 tri-caisses pour un montant prévisionnel de 87 M€2004. Cependant le projet prévoit de continuer à utiliser des rames tractées les jours de pointe exceptionnelle.

3.3.3. Coûts et économies d’exploitation

Le bilan économique réalisé en complément du dossier DAM (courrier du 19 septembre 1995 en réponse à la lettre d’approbation ministérielle) indique que la « modernisation permettra à la SNCF de réduire les dépenses d’exploitation de la ligne ». Ces économies, supposées constantes sur toute la durée du bilan, sont de 1,6 M€2004 par an dont 0,9 M€2004 pour le coût d’entretien de la voie (mise à voie unique sur 92 km) et 0,7 M€2004 pour les dépenses de personnel (postes d’aiguillages supprimés, blocks automatiques).

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3.4. La rentabilité économique (pour la SNCF)

La rentabilité économique de l’opération pour la SNCF se distingue de la rentabilité financière pour deux raisons :

- elle est établie en monnaie constante alors que les calculs financiers sont en monnaie courante avec une hypothèse d’inflation,

- elle n’ajoute pas les frais financiers intercalaires durant la phase de construction, à la différence de l’évaluation financière. Le mode de financement n’intervient pas et c’est la rentabilité intrinsèque de l’opération que l’on mesure comme pour une évaluation financière. Six thématiques sont soulignées dans le calcul de la rentabilité économique :

- les investissements - les investissements éludés par le projet - les investissements en matériel roulant - les économies d’entretien - les économies de personnel - les recettes nouvelles.

On peut les résumer de façon classique par :

- le différentiel d’investissement (investissements prévus – investissements éludés) - la différence entre l’excédent brut d’exploitation (EBE) en situation de projet et celui de la

situation de référence (économies d’entretien et de personnel + recettes nouvelles). Toutes les valeurs sont exprimées en monnaie constante. Le taux d’actualisation du Plan à l’époque des études est de 8% (à partir de fin 1985)23. La valeur actuelle nette (VAN) est calculée sur une période de 20 ans après la mise en service. La date de référence pour l’actualisation est 1998. La valeur résiduelle des matériels et équipements dont la durée de vie n’est pas épuisée à la fin du bilan est portée au crédit du projet. Ces calculs ont conduit aux prévisions suivantes.

Rentabilité économique de la modernisation dans le dossier d'approbation ministérielle (infrastructure seule)

VAN à 8% sur 20 ans avec subvention

de la Région

Taux de rentabilité économique SNCF avec subvention

VAN à 8% sur 20 ans sans subvention

de la Région

Taux de rentabilité économique SNCF sans subvention

L’Aigle Granville

6,1 M€2004

12,0%.

- 135 M€/2004

-4,5%

En l’absence de subvention, le taux de rentabilité économique de l’opération pour la SNCF était négatif et la perte actualisée en 1998 à 135 M2004. En prenant en compte cette subvention, le TRI économique est de 12%. Cette estimation ex ante réalisée par la SNCF en complément du dossier DAM comme demandé dans le courrier d’approbation ministérielle du 15 mai 1995 négligeait les investissements en matériel roulant, en considérant qu’ils étaient compensés par des économies de locomotives Diesel.

23 Pris à l’époque comme coût de la ressource financière de la SNCF (avec la prime de risque).

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3.5. La rentabilité socio-économique (pour la collectivité)

L’amélioration de la ligne Paris-Granville avait fait l’objet pour sa première variante d’une étude socio-économique dans le cadre de la mission confiée au CGPC (rapport Portiglia de 1991). Il ressort de cette étude un taux de rentabilité pour la collectivité de 5,7%.

La Région de Basse-Normandie ayant par la suite souhaité s’engager dans une opération plus ambitieuse en assumant les conséquences financières de ses choix, la SNCF a décidé de ne pas procéder à une nouvelle étude socio économique du projet modifié.

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4. Les conditions de réalisation du projet

4.1. Les évolutions du projet après le DAM

Le projet n’a pas connu d’évolution sensible entre sa définition au moment de la décision de lancement (DAM) et sa configuration définitive.

4.2. Le délai de réalisation de l’infrastructure

Les délais ont été respectés. Les travaux ont duré 5 ans, de 1994 à 1999. Le premier automoteur X 72500 a été livré en septembre 1998, suivi de deux autres par mois jusqu’en avril 1999.

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5. Analyse des écarts

5.1. La mise en place de l’offre

5.1.1. La qualité du service offert

Le dossier d'approbation ministérielle ne fixait pas d’objectifs de qualité de service. Il prévoyait que l'opération permettrait des gains de temps de parcours d'environ 30 minutes pour effectuer Paris Granville en moins de 3 heures. En réalité, l’évolution du temps de parcours a été la suivante.

Meilleurs temps Hiver

1993/1994 Situation projet DAM

Situation Projet Ex post Hiver

2007/2008

Gains de temps DAM

Gains de temps Ex post

Paris Granville 3h26 2h54 2h59 0h32 0h27

Les gains de temps sont légèrement inférieurs à ce qui était attendu (malgré les quelques minutes supplémentaires gagnées entre Dreux et l’Aigle), mais l’objectif de moins de 3 heures est atteint sur Paris Granville. Entre 1997 et 2008, les temps de parcours n’ont pratiquement pas varié. Les gains de temps moyens d’un jour de la semaine (jour ouvrable de base) sont du même ordre et le projet profite à tous les trains quels que soient leurs arrêts.

Jour ouvrable de base

Hiver 1993/1994 Meilleur temps

Hiver 1993/1994

Temps moyen

Situation Projet Ex post Hiver

2007/2008 Meilleur temps

Situation Projet Ex post Hiver

2007/2008 Temps moyen

Gains de temps Ex post Temps moyen

Paris Granville 3h26 3h36 2h59 3h13 0h23

Source : SNCF

Un avantage est aussi l’accélération des circulations de la pointe hebdomadaire grâce aux automoteurs remplaçant la plupart des rames tractées Diesel. En décembre 2008, le cadencement des horaires des trains (dessertes répétitives) mis en œuvre à la demande des autorités organisatrices des transports n’a pas été appliqué sur l’axe Paris Granville, compte tenu du faible nombre de circulations.

Nombre moyen de circulations voyageurs TER et GL par jour (2 sens)

Dreux Surdon Surdon Argentan Argentan Flers Flers Folligny Folligny Granville

1996 13,4 26,8 9,9 9,3 9,3

2004 17,5 30,5 12,5 12,5 12,5

2007 17,3 30,0 12,0 12,0 12,1

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Mais le cadencement à 30 minutes de la desserte Paris Dreux a provoqué une dégradation des temps de parcours entre Paris et Granville (+ 3 minutes en moyenne, mais + 13 minutes pour un train du vendredi).

La fréquence des dessertes a été améliorée.

Avant le projet, 4 dessertes quotidiennes étaient assurées, complétées par une desserte supplémentaire de pointe hebdomadaire.

L’opération a permis d’ajouter une desserte supplémentaire en semaine avec toujours une desserte complémentaire pour la pointe hebdomadaire.

(Correspondance) Source : SNCF

La ponctualité au terminus (% de trains arrivant avec moins de 5 minutes de retard24) évolue comme suit :

� 2005 : 82,1 %

� 2006 : 77,9 %

� 2007 : 79,1 %

� 2008 : 77,7 %

Sur les dernières années, la ponctualité observée sur l’axe Paris-Granville s’est détériorée : elle a perdu 4 points pour atteindre 78% de trains à l’heure en 2008. Pour comparer, le taux de ponctualité de l’ensemble des TGV et Corails de VFE était au seuil de 5 mn de 82,3% en 2007 et 82,8% en 2008 (89,3% et 89,5% au seuil de 10 mn). Les causes de l’augmentation des retards sont diverses mais majoritairement imputables au matériel roulant. En effet, les autorails TER X 72500 d’Alstom à trois caisses de technologie nouvelle qui ont remplacé les rames tractées par des locomotives Diesel BB 67400 avec 4 à 8 voitures Corail se sont révélés peu adaptés aux longs trajets et fragiles (leur parcours annuel de 15 000 km est le plus élevé de la série, la moyenne sur les 14 régions d’affectation étant de 10 000 km par an). Les opérations de maintenance réalisées dans les ateliers de Caen (hors du parcours naturel des engins) et de Granville posent des problèmes de mise en qualité. Par ailleurs, la centaine de kilomètres de voie unique entre Argentan et Granville qui retire de la souplesse à l’exploitation (croisements), ainsi que les problèmes de capacité aux abords de la capitale, rendent plus difficile le rattrapage des retards.

24 Pour les Grandes Lignes (TGV, Corails de VFE), c’est habituellement le seuil de retard supérieur à 10 mn qui est

retenu. La branche SNCF Proximités retient le seuil de 5 mn plus exigeant compte tenu des temps de parcours plus courts de ses trains.

Fréquences/j (aller et retour)

Hiver 1993/1994

Situation Projet Ex post

Hiver 2007/2008

Paris Granville 4 (0) 5,5 (0,5)

Page 31: Bilan LOTI Paris-Granville

31/63

Cette mauvaise qualité de service est très critiquée par les voyageurs et par les élus, qui demandent des mesures précises d’amélioration. Pour le matériel roulant, Corail Intercités a mis en circulation en décembre 2007 sur cet axe quatre automoteurs X 72500 supplémentaires. Ils sont principalement destinés à renforcer la fiabilité et à permettre des passages en ateliers de maintenance plus fréquents. La rotation pour chaque automoteur passera ainsi d’une fois toutes les 3 semaines à une fois toutes les

semaines.

Les prix de transport A priori comme a posteriori, il n'y a pas de hausse des tarifs spécifiquement liée à l'opération. Les produits moyens (recette moyenne au voyageur-km) restent quasiment stables (en monnaie constante) de 1999 à 2002 pour augmenter ensuite de 1% par an.

Aménagement de Paris Granville

Evolution des produits moyens (€ constants)

100,0

100,7

99,8 99,8

100,1

101,4

103,1

104,3

104,8

105,2

99

100

101

102

103

104

105

106

1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007

Indice 100 en 1998

Source : SNCF

La hausse constatée après 2002 est certainement liée à des effets de structure de la clientèle qui s’est répartie différemment après la convention SNCF Région et l’amélioration de la desserte TER. Il faut aussi noter, outre l’absence de concurrence aérienne, la modération de la concurrence routière, avec un trajet autoroutier à péages nécessitant un détour par Caen. Desserte d’Alençon, préfecture de l’Orne Alençon (28 500 habitants en 2006) est située sur la ligne Caen Le Mans. Le trajet Paris Alençon nécessite une correspondance. Il peut se faire via Le Mans par TGV ou via Surdon par la ligne Paris Granville. Le temps de parcours du trajet via Le Mans (TGV) est de 1h47, contre 2h13 via Surdon (meilleurs temps 2009). Le trajet Alençon Paris par la route est plus long (environ 2h30), mais la rupture de charge imposée par le ferroviaire est pénalisante.

Page 32: Bilan LOTI Paris-Granville

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A destination de Granville le trajet depuis Alençon dure 2h16 en train (avec une rupture de charge à Argentan) contre 2h20 par la route.

Relation Fréquences / j (allers et retours)

Meilleur temps Type de dessertes

Trajet par la route

Paris Alençon via Le Mans (TGV)

2 1h47 TER puis TGV

2h30

(196 km)

Paris Alençon via Surdon

3 2h13 TER puis Corail

2h30

(196 km) Alençon Granville via Argentan

3 2h16 TER puis Corail

2h23 (153 km)

Sources : SNCF, Michelin;

La problématique de l’arrivée à Vaugirard Pour les voyageurs, la gare Montparnasse est composée de trois espaces disjoints comportant chacun un hall des pas-perdus et des guichets de vente et de renseignements : - la gare principale (porte Océane) accessible depuis la place Raoul Dautry et l'avenue du

Maine, qui donne accès au Nord des quais principaux et est reliée directement au métro - la gare Pasteur (Montparnasse 2), qui donne accès au Sud des quais principaux - la gare Vaugirard (Montparnasse 3), située au sud du boulevard Pasteur accessible

également depuis la gare principale par un tapis roulant. En raison de la couverture des voies de la gare principale de Paris-Montparnasse, les circulations de trains Diesel sont interdites sous la dalle (nuisances sonores et olfactives). Seuls les trains Paris Argentan ont été maintenus à Montparnasse par dérogation. Les trains Paris-Granville sont par conséquent reçus à la gare de Vaugirard (Paris Montparnasse 3). L’arrivée des trains Paris-Granville à Vaugirard impose donc aux voyageurs un trajet terminal allongé vers la gare principale afin d’accéder au métro parisien. La demande des élus et des voyageurs est donc d’arriver dans la gare principale, ce qui soulève les questions de capacité de la gare et de mode de traction.

Situation de la gare Vaugirard dans le quartier Montparnasse

Page 33: Bilan LOTI Paris-Granville

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5.1.2. Le coût de l’investissement dans l’infrastructure

Les coûts de l’aménagement

Le montant réel des coûts d’investissement pour le projet s’élève à 123 M€2004. Il est en économie de 14 M€2004 par rapport aux estimations du DAM, soit 10% du coût initial.

en millions d'€ (2004) Coût total infra Dont subvention

Ex ante 137 M€ 116 M€ (85%)

Ex post 123 M€ (-10%) 116 M€

Les écarts proviennent à la fois de l’affinage effectué lors de la phase projet et des économies de réalisation lors de l’exécution des travaux.

Coûts des travaux de modernisation25

M€ 2004 Ecarts

Lots Ex ante Ex post M € 2004

1-Argentan St Hilaire de Briouze 15,6 12,8 -2,8 Economies sur travaux

2- Hilaire de Briouze Viessoix 26,2 22,6 -3,6 Economies sur travaux

3-Viessoix Villedieu 17,1 16,6 -0,5

4-Villedieu Granville 17,4 17,5 0,1 PRCI et station-service de Granville

5 -Argentan Surdon 14,2 16,7 2,5 Pjets compl (Isolement Surdon et st. service Argt.)

6- Surdon L'Aigle 31,1 23,4 -7,8 Limites différentes lots 5 et 6

7- Mise en câble Arg Granville 7,1 5,9 -1,3 Economies

8- Mise en câble L'Aigle Arg 3,7 2,9 -0,8

9- Radio Sol train 4,1 3,5 -0,610- Réseau 0,8 1,4 0,6

Total 137,3 123,1 -10,3%

Globalement, le coût de la modernisation s'est élevé à environ 0,6 M€2004 par km

26.

M€/2004 Coût

d'investissement Km Coût par km

L’Aigle Granville

123

195

0,6

Les coûts d’investissement sont en économie d'environ 10% par rapport au budget initial, de 137 M€2004 à 123M€2004.

25 Lors de la phase projet, l’aménagement a été divisé en 10 lots de travaux, pour lesquels les estimatifs ont été

réalisés et les coûts réels suivis tout au long des travaux. 26 Le coût total au km peut être comparé à ceux de l’électrification de Rennes Brest (0,95 M€2004 et de Rennes

Quimper (1,15 M€2004) mises en service de 1987 à 1992 (Bilan LOTI de l’électrification de la Bretagne RFF Juin 2008), ainsi qu’à celle de Paris Cherbourg (0,95 M€2004).

Page 34: Bilan LOTI Paris-Granville

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Les coûts totaux

Le projet inclut l’adaptation des passages à niveau aux relèvements de vitesse pour 12 M€2004 (annonces des trains). En revanche, il ne comprend pas la suppression de 60 passages à niveau demandés et financés par les collectivités territoriales27. Il reste en 2009 79 passages à niveau entre Dreux et Granville, tous automatiques. Le montant de la modernisation et des relèvements de vitesse jusqu’à 160 km/h réalisés en même temps en Haute Normandie sur la section Dreux L’Aigle (16 M€2004) n’est pas non plus au compte de l’opération.

Les coûts de gros entretien

Il n’y a pas de coûts de gros entretien (renouvellement) de l’infrastructure dans le cadre du DAM étant donné qu’ils interviendront au-delà de la période du bilan.

Les durées de vie qui ont été considérées sont :

– 20 ans pour les télécommunications,

– 25 ans pour les installations de sécurité

– 30 ans pour la voie et le ballast.

Les coûts de gros entretien n’interviennent donc pas durant la période des bilans de 20 ans.

27 Les travaux ont été réalisés sous la maîtrise d’ouvrage des Départements qui se sont chargés de rassembler les

fonds (pour la Région et la SNCF les participations financières étaient respectivement de 6 et de 2 M €2004).

Page 35: Bilan LOTI Paris-Granville

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5.1.3. Le coût d'investissement en matériel roulant

Le dossier DAM prévoyait l’achat de 15 automoteurs X 72500 tri-caisses pour un coût unitaire de 5,78 M€2004 soit un montant total de 87 M€2004. A posteriori, les 15 automoteurs X 72500 tri-caisses ont été achetés et mis en place sur l’axe Paris-Granville pour 79,1 M€2004 (prix unitaire de 5,27 M€2004). Ils faisaient partie d’une commande de la SNCF de 105 X72500 livrés de 1997 à 2000, avec une livraison complémentaire en 2002. Quatre automoteurs supplémentaires X 72500 ont été mis en circulation sur l’axe en décembre 2007 pour un montant28 de 19 M€2004 afin de renforcer la fiabilité et de permettre des passages en atelier plus fréquents. La rotation pour chaque automoteur passe ainsi d’une fois toutes les 3 semaines à une fois toutes les semaines.

en millions d'€ (2004) Coûts du matériel

roulant TER

X 72500

Dont subvention

Ex ante 87 M€ 72 M€ (83%)

Ex post * 79 M€(-10%) 72 M€

* + 4 éléments en décembre 2007 (19 M€)

Le niveau de la subvention au matériel roulant confirme l’effort financier très important de la Région pour l’ensemble du projet.

5.1.4. Les investissements d'infrastructure éludés

Les hypothèses ex ante sont conservées (renouvellements de voie ancienne et en mauvais état pour 6,14 M€2004 répartis sur la période 1999 2003.

5.1.5. Les coûts d'exploitation

Economies d’entretien de la voie et de personnel Les estimations ex ante d’économies pour les personnels des gares (postes d’aiguillages supprimés, blocks automatiques) et l’entretien de la voie (mise à voie unique sur 95 km) sont conservées, faute de données plus précises29.

28 Valeur résiduelle estimée

29 Les archives ont 15 ans pour le dossier d’approbation ministérielle et 10 ans pour l’évaluation ex post.

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5.2. La réponse de la demande

La prévision de trafic de la modernisation de l’axe Paris Granville (Ile de France / Verneuil et au-delà30) réalisée en 1994 pour le dossier d'approbation ministérielle était de 0,682 million31 de voyageurs l'année de mise en service (plein effet). Le trafic réel s'est élevé à 0,614 million de voyageurs en 1999, année de mise en service, et à 0,726 million en 2007. Il est inférieur aux prévisions de 10% en 1997 et un peu supérieur (+6,5 %) en 200732.

Trafics prévus et réels

avec l'aménagement de Paris Granville

(Millions de

voyageurs)

IDF vers Granville

1999

IDF vers Granville

2007

Trafic réel (situation de projet)

0,614 0,726

Trafic prévu DAM (situation de projet)

0,682 0,682

Ecart réel/prévu

-10,0% +6,5%

Le graphique suivant met en évidence les évolutions constatées depuis 1988 avant la mise en service33. Les effets de l'opération n’apparaissent pas très clairement après 1999, année de mise en service.

30 Le trafic total de l’axe (Grandes Lignes et TER) est de 1,4 million de voyageurs en 2007.

31 Chiffre reconstitué à partir des éléments du dossier d’approbation ministérielle.

32 Trafics entre l’Ile de France et Verneuil, l'Aigle, Surdon, Alençon, Argentan, Briouze, Vire, Folligny et Granville.

33 Les systèmes d'informations de la SNCF pour les données 1988 – 1992 d’une part et 1996 – 2007 d’autre part

sont différents (Infocentre puis Aristote). Entre les deux, les données des trois années 1993 (récession économique), 1994 et 1995 (grèves importantes) sont manquantes et ont été reconstituées à partir du trafic total du réseau principal SNCF.

Page 37: Bilan LOTI Paris-Granville

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Aménagement de Paris Granville Trafic IDF vers Granville

0,8 0,80,7

0,7 0,7

0,6 0,60,6

0,6 0,6 0,60,6

0,7 0,7 0,7 0,70,7

0,7 0,7 0,7

0,0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,9

1,0

1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006

Millions de voyageurs

Source : SNCF Direction du Développement

Le niveau de trafic étant faible, la représentation en indice (100 en 1998 avant la mise en service) montre mieux que le regain du trafic avait commencé dès 1996 en épousant les tendances nationales du trafic du réseau principal de la SNCF. On retrouve le niveau du trafic de 1990 en 2007.

Aménagement de Paris Granville

Trafic IDF vers Granville

90

95

100

105

110

115

120

125

130

1988 1992 1996 2000 2004

Indice 100 en 1998

(voyageurs)

Page 38: Bilan LOTI Paris-Granville

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5.2.1. L'environnement économique et la concurrence

Cette opération ayant été réalisée il y a une dizaine d'années, il est utile de remettre en perspective les évolutions passées de l’ensemble du trafic ferroviaire, qui ont concerné également l’axe Paris Granville, comme on l’a vu ci-dessus. Sur ce dernier, une amélioration significative des services ferroviaires était demandée depuis plusieurs années par les collectivités locales. Le graphique suivant montre qu'on peut distinguer trois grandes périodes aux évolutions contrastées.

Evolution comparée du trafic SNCF réseau principal

et de la consommation des ménages

0

50

100

150

200

250

300

1970 1972 1974 1976 1978 1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006

Indice 100 en 1970

Trafic

CM

- La période 1970 – 1985, au cours de laquelle la consommation finale des ménages (CFM),

qui est un déterminant du trafic, progressait de plus de 3 % par an. Le mode ferroviaire et plus particulièrement le transport de voyageurs a pu se développer, grâce à des efforts de modernisation du réseau (électrification, généralisation des LRS34, …) et du matériel roulant (introduction du matériel Corail, de services nouveaux plus rapides tels les turbotrains ou le Capitole puis à partir de 1981 du TGV entre Paris et Lyon).

- La période 1985 – 1996 ou 1997, au cours de laquelle le trafic ferroviaire de voyageurs a

stagné malgré la mise en service du TGV Atlantique (1989 et 1990) et des TGV Nord (1993), Rhône-Alpes (1992 1994) et Interconnexion en IDF (1994 1996). Au cours de cette période, l’évolution de la consommation finale des ménages s’est ralentie ; cependant, la stagnation du trafic ferroviaire constitue une forme de décrochage par rapport à l’évolution de la consommation des ménages et d’une manière plus générale par rapport aux principaux indicateurs macro-économiques. Plusieurs phénomènes contribuent à cette rupture : le contre choc pétrolier (à partir de 1986), la politique tarifaire de la SNCF lors des mises en service des LGV Atlantique et LGV Nord, la démocratisation du transport aérien qui s’est probablement accentuée avec une libéralisation et des politiques tarifaires plus agressives pour les modes concurrents.

34 Longs rails soudés qui évitent les joints des barres normales.

Page 39: Bilan LOTI Paris-Granville

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- La période 1997 – 2005 (qui s’est poursuivie en 2007) à nouveau en rupture par rapport à la précédente permettant de retrouver un trend positif de croissance. La croissance du trafic ferroviaire a été de 2,9 % par an, proche de celle enregistrée pour la CFM.

Taux annuel Trafic CFM

de 1970 à 1985 2,9% 3,2% de 1985 à 1997 0,0% 1,9% de 1997 à 2005 2,9% 2,8%

Source : SNCF – Direction du Développement

Le taux de croissance moyen a posteriori du trafic de l’aménagement de Paris Granville est de 2,4 % par an entre la mise en service de 1999 et 2007. Le trafic de l'axe Paris Granville se développe à un rythme inférieur à celui de l’ensemble du trafic ferroviaire, et reste à un niveau modeste. Il est ainsi supposé croître de 0,2% par an après 2007, compte tenu de cette analyse des évolutions passées35. Dans les dossiers ex ante, ce taux était nul. La concurrence routière Le réseau routier national est structuré en grande partie autour de l’agglomération caennaise suivant trois axes :

- Rouen Caen Cherbourg par l’autoroute de Normandie (A13) et la RN13

- Caen Avranches Rennes par l’autoroute des estuaires (A84) puis prolongé par la RN175

- Autoroute A88 vers Argentan et l’A28 (Le Mans Rouen).

35 L'élasticité du trafic au PIB est de 0,1, proche de 0 et en bas de la fourchette des trains classiques. (Voir la note

d’Alain Sauvant « Le transport ferroviaire de voyageurs en France : enfin un bien « normal ? » Notes de synthèse du SES 7/8 2002). L'hypothèse de croissance du PIB après 2007 est de 1,9% par an. On a ainsi 0,19 % = 0, 1 * 1,9%.

Page 40: Bilan LOTI Paris-Granville

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Les principaux investissements routiers depuis 1999 sont les suivants.

Axe Projet Mise en service

A88/N158 Entre Caen et l’A28 via Falaise et Argentan, création de la future A88 avec la mise progressive aux normes autoroutières avant une future mise en concession

1999 (mise en service partielle)

A84 Réalisation de l’axe autoroutier A84 sur 170 km 2003

N174 Passage à 2x2 voies de la liaison entre l’A84 et la N13 par St-Lô avec la réalisation du contournement de St-Lô

2006

Le trajet le plus rapide entre Paris et Granville se fait au prix d’un détour par Caen d’une vingtaine de km par l’autoroute de Normandie (A 13) et l’autoroute des estuaires Caen Rennes (A84). Le temps de parcours est de 3h50 environ pour 341 km et le coût du péage de 20,50 €. Le chemin le plus court suit l’axe de la voie ferrée par Dreux, Argentan, Vire et Flers et représente 322 km. Pour un gain d’une vingtaine de km, le temps est rallongé de plus d’une heure (5h de trajet). Cet itinéraire est en revanche sans péage autoroutier. La concurrence routière est donc modérée.

Page 41: Bilan LOTI Paris-Granville

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Comparaison des temps routiers et ferroviaires en 2008

Temps de parcours

routiers (centre à centre)

Temps de parcours ferroviaires

(meilleurs temps gare à gare)

Paris Granville par A13

3h50 pour 341 km 2h59

Paris Granville par Dreux

5h00 pour 322 km 2h59

Sources : Mappy, SNCF

Le trafic de l’automobile est estimé en 2006 à partir d’enquêtes et de comptages à environ 3 millions de voyageurs entre l’Ile de France et l’Orne et 2 millions entre l’Ile de France et La Manche. Les parts de marché du transport ferroviaire sont respectivement d’environ 15% et 25%36, en liaison avec les temps de parcours. La concurrence aérienne La Basse Normandie est desservie par trois aéroports à Caen, Cherbourg et Deauville. Il n’existe pas de concurrence aérienne pour l’axe ferroviaire Paris Granville, compte tenu de la proximité de l’Ile de France et des populations concernées. Le total des trafics des aéroports de Caen, de Cherbourg et de Deauville est inférieur à 200 000 passagers en 2007 (195 000).

5.2.2. La situation de référence a priori et a posteriori

Les évaluations a priori et a posteriori sont différentielles et se font par comparaison avec une situation de référence optimisée en l'absence de projet pour mesurer les impacts nets. La reconstitution du scénario de référence est un point clef de l'évaluation a posteriori. Définition de la situation de référence

La situation de référence a priori et a posteriori, en l’absence d’aménagement, suppose le maintien en l’état des installations et des dessertes ferroviaires. Les prix en situation de référence Le dossier d'approbation ministérielle retient des prix stables sur toute la période du bilan. Analyse de l’évolution des trafics

La prévision des trafics retenue dans le dossier ex ante en situation de référence supposait le trafic constant. Le trafic de référence a été reconstitué a posteriori sur la base d'une élasticité du trafic à la croissance économique (PIB) de 0,1 à partir de l’année 199837.

36 Modèle national voyageurs de RFF.

37 Dernière année avant l’aménagement de la ligne.

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Le tableau et le graphique ci-après résument l'évolution des trafics sur la période du bilan.

Taux de croissance annuelle moyen

Situation de référence IDF vers Granville

A priori 0,0 %

A posteriori 0,2 %

Trafics de référence

Aménagement de Paris Granville

0,0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,9

1,0

1989 1995 2001 2007 2013

Millions de voyageurs

IDF vers Granville A priori

IDF vers Granville A posteriori

Les données a posteriori du graphique sont réelles jusqu’en 1998 et prévisionnelles de 1999 à 2018. Le trafic de référence a été surestimé d'environ 15% compte tenu de la stagnation globale du trafic voyageurs de la SNCF de 1985 à 1997.

Page 43: Bilan LOTI Paris-Granville

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5.2.3. Les gains de trafic a priori et a posteriori

Le gain de trafic lié à la mise en service de l’aménagement a deux origines : le trafic reporté de la route (il n’y a pas de concurrence aérienne) et le trafic nouveau induit par l’amélioration de l’offre.

• Le dossier d'approbation ministérielle ne prévoyait pas de gain de trafic.

• Les gains de trafic réels sont repris dans le tableau synthétique suivant :

Trafic de référence

(approbation ministérielle)

Trafic de référence (estimé a posteriori)

Trafic en situation

aménagement (approbation ministérielle)

Trafic réel avec aménagement

Gain de trafic (approbation ministérielle)

Gain de trafic réel

Axe IDF vers Granville Année pleine (1999)

0,682

0,595

0,682

0,614

0,000

0,019

IDF vers Granville (2007)

0,682

0,605

0,682

0,726

0,000

0,122

Source SNCF Calculs RFF (Millions de voyageurs) Les gains de trafic apportés par le projet l'année de mise en service sont modestes (19000 voyageurs soit +3,2%). Ils deviennent ensuite plus importants car a posteriori le trafic croît plus rapidement en situation de projet qu'en référence. On ne dispose pas a posteriori d'information pour distinguer le trafic reporté de la route du trafic induit.

Le trafic de l’axe Paris Granville (Ile de France / Verneuil et au-delà vers Granville) s'est élevé à 0,7 million de voyageurs en 2007, chiffre un peu supérieur (+6,5 %) aux prévisions. Les effets de la modernisation de la ligne sur les trafics ne sont pas très nets.

5.2.4. Les recettes

Le dossier d’approbation ministérielle ne prévoyait pas d’accroissement des trafics ni des recettes.

Les recettes supplémentaires a posteriori sont déterminées en calculant les recettes en situation de projet et en situation de référence à partir des trafics et des produits moyens. On obtient la première année 0,4 M€2004

Page 44: Bilan LOTI Paris-Granville

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5.3. L'impact sur l'environnement

L'impact environnemental est limité car l'opération est intervenue sur la plateforme de la ligne ferroviaire existante. Comme il n'y a pas eu d'expropriation, il n'y a pas eu d'enquête d'utilité publique. La réduction des impacts sur l'environnement n'a pas fait l'objet engagement de la part du maître d'ouvrage. Par ailleurs, l’ouvrage public n’ayant pas été sensiblement modifié, il n’y a pas eu non plus d’étude d’impact. Les effets négatifs sont intervenus au moment des travaux. L’aménagement a eu des effets positifs sur l'environnement : pollution des locomotives Diesel évitée par les automoteurs X 72500 plus modernes, report sur le chemin de fer de trafics routiers et diminution de la pollution et des émissions de CO2.. Mais des locomotives Diesel subsistent encore pour les rames tractées assurant certaine dessertes. La pollution olfactive et surtout sonore de ces engins chauffant dans la gare de Granville encaissée est une gêne pour les riverains.

Globalement, les effets de la modernisation de la ligne sur l'environnement semblent avoir été globalement maîtrisés.

.

Page 45: Bilan LOTI Paris-Granville

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5.4. Développement économique et aménagement du territoire

La modernisation de Paris Granville visait à améliorer la desserte ferroviaire de la partie Sud de la Basse-Normandie, territoire très rural et en régression démographique avec plusieurs villes petites ou moyennes. Les efforts faits pour développer l’activité économique et touristique avaient besoin d’être confortés par des liaisons de meilleure qualité pour améliorer l’accessibilité alors même que la route n’apporte pas de solution convenable. L’objectif était aussi de susciter de nouvelles implantations industrielles ou commerciales créatrices d’emplois et contribuant ainsi à réduire ou annuler l’exode des populations, celles notamment du bocage normand. Le rapport Roux du CGPC précisait aussi que « sur le plan des infrastructures, on peut espérer que ce projet entraînera un plus grand intérêt des collectivités territoriales pour les gares qui peuvent aussi devenir à leur échelle un pôle de modernisation à l’image de ce qu’on voit à Paris et dans plusieurs grandes agglomérations. Pour le voyageur, la décision de prendre le train s’inscrit dans un cadre plus large que la seule considération du prix et du temps ; la commodité des services offerts et l’aménagement urbain ont, aussi, un rôle à jouer.»

5.4.1. Préambule

Les effets de l’aménagement de la ligne Paris Granville sur l’aménagement du territoire, les activités économiques et l'emploi sont très délicats à mettre en évidence pour plusieurs raisons :

• L’évaluation a posteriori des effets d’une opération ferroviaire présente un certain nombre de difficultés car une infrastructure s’inscrit dans un système socio-économique spatialisé complexe, avec une structure, un fonctionnement et une dynamique qui lui sont propres. Il est toujours difficile de séparer les impacts spécifiques d'une infrastructure de transport sur le développement économique régional et l'aménagement du territoire des autres effets qui se seraient produits de toute façon.

• Le dossier d’approbation ministérielle, qui constitue le référentiel de cette évaluation, ne comporte que des analyses succinctes de cette thématique.

• L’opération n’a pas entraîné une amélioration très importante de l’offre ferroviaire et ses effets sont donc forcément limités.

• Aucun suivi systématique avec des indicateurs mesurables ex post des éventuels effets de l’opération n’a été réalisé.

Afin d’évaluer autant que faire se peut les effets en matière d’économie et de développement territorial de l’aménagement de la ligne Paris Granville, les approches quantitatives et qualitatives ont été conjuguées. Les analyses se sont basées sur :

• L’exploitation de statistiques (INSEE, UNEDIC, DIACT, Comités départementaux du tourisme)

• Une série de cartographies.

• Une série d’entretiens auprès d’acteurs institutionnels, économiques et politiques (une vingtaine).

Page 46: Bilan LOTI Paris-Granville

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Liste des entretiens conduits auprès des acteurs économiques et politiques locaux

Organisme Fonction

Conseil Régional de Basse-Normandie Directeur du service Transport

Délégation Régionale au tourisme - Basse-Normandie Délégué Régional au Tourisme

DRE Basse-Normandie Responsable Déplacements

CCI de Caen Responsable du bureau d'étude de la CCI de Caen

CCI de Flers-Argentan Président de la Chambre de Commerce de Flers - Argentan

CCI de Cherbourg-Cotentin Responsable du Développement Economique

CCI Centre et Sud Manche Service Développement économique

Conseil Général de la Manche Direction Générale Adjointe des Infrastructures et des Transports

Conseil Général du Calvados Chef du service Transport, Développement économique

Conseil Général de l'Orne Responsable du Service Transport

Communauté Urbaine de Cherbourg Direction de l'Economie et de l'Enseignement Supérieur

Communauté Urbaine de Caen la Mer Directeur de l'Economie et de l'Enseignement Supérieur

Communauté de Communes Cœur Côte Fleurie Chef du service Urbanisme et Habitat de la Communauté de Communes Cœur Côte Fleurie

Communauté d'Agglomération du Pays de Flers Service Développement économique

Communauté de Communes du Pays Granvillais Président de la Communauté de Communes du Pays Granvillais - Maire de Granville

Comité Départemental du Tourisme de la Manche Responsable de l’Observatoire du Tourisme de la Manche

Comité Départemental du Tourisme du Calvados Responsable de l’Observatoire du Tourisme du Calvados

Fédération Nationales des Associations d'Usagers des Tr. Président de l’Association pour la Défense et la Promotion de la Ligne Caen-Rennes

RFF Ex-Directeur Régional SNCF de Normandie

DIREN Basse-Normandie Responsable de l’Unité impacts, aménagements et évaluation

Les analyses ont visé à :

• recueillir les principales caractéristiques socio-économiques de la Région Basse-Normandie, et en particulier des territoires concernés par la ligne Paris-Granville, tant pour ce qui concerne la situation actuelle (situation en 2007) que l’évolution passée38.

• présenter les principaux effets socio-économiques liés à l’aménagement de la ligne Paris-Granville.

5.4.2. Principales caractéristiques socio économiques de la Basse - Normandie et leur évolution

Population. La Basse-Normandie, qui demeure une région à forte empreinte rurale, compte en 2008 1,4 million d’habitants répartis sur trois départements d’une superficie totale de 17500 km2, soit une densité de 82 h/ km2, une des plus basses de France. Le Calvados représente 46% de la population, la Manche 34% et l’Orne 20%. Le long de la ligne Paris-Granville s’égrène un chapelet de villes petites et moyennes de 20 000 à 30 000 habitants (L’Aigle, Argentan, Flers, Vire, Granville). 350 000 habitants sont directement desservis. Il y a peu d’étudiants (une dizaine de lycées, environ 2000 étudiants).

C’est une région assez peu dynamique du point de vue démographique. Le taux moyen de croissance de la population est de 0,3% par an entre 1999 et 2007, sensiblement en retrait par rapport à l’évolution nationale de 0,8% par an. La cause principale est le départ de la population de moins de 30 ans. Le tableau détaillé ci-dessous montre que l’Orne est nettement le département le moins dynamique.

38 Cette analyse a fait l’objet d’une monographie détaillée reprise dans le dossier technique séparé

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La carte d’évolution de la population met en évidence plusieurs phénomènes :

- Un vif processus d’étalement urbain à partir de la Région Ile-de-France, qui se manifeste

de façon d’autant plus forte le long des principaux axes de communication dont fait partie la ligne Paris-Granville.

- Une résorption, au cours de la période 1982-2008, des zones en difficulté démographique

(notamment le Sud-Manche l’Orne) même si persistent encore au cours de la période 1999-2008 des territoires en perte de population (Argentan, etc.).

- Une densification de population le long du littoral, de la même façon que sur les côtes

bretonnes et vendéennes. - Le long de la ligne Paris-Granville, le secteur de Granville et la côte confirment leur

attractivité amorcée au cours des années 1990. La partie Ouest du territoire (Villedieu les Poêles, Vire, Flers) renoue avec la croissance démographique depuis 1999. La partie Est (l’Aigle, Argentan) continue à perdre de la population.

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Emplois. La Basse-Normandie comptait 350 000 emplois en 2007, dont 50% dans le Calvados, 30% dans la Manche et 20% dans l’Orne (source UNEDIC). Sur le tracé de la ligne Paris-Granville, qui dessert environ 130 000 emplois, Granville et l’Aigle enregistrent une évolution de l’emploi plus favorable depuis 1999 par rapport à la période 1993-1999. En revanche, les autres pôles présentent une moindre croissance de l’emploi ou des difficultés plus importantes (Villedieu-les-Poêles, Vire, Flers, Argentan et d’Alençon), après les crises passées (Moulinex, industrie automobile).

Croissance économique. Depuis 1990, la Région se situe toujours au 18ème rang dans la création de richesse nationale (PIB), mais son poids dans le total des 22 régions a diminué de 2,0 % à 1,9%. Elle connaît en effet de 1990 à 2006 une croissance économique inférieure à celle de la France (1,5% par an en moyenne contre 1,8% par an).

Au cours de la même période, l’évolution croisée des évolutions de la population et de la croissance économique montre que la Basse - Normandie fait partie des régions en retrait par rapport à la moyenne nationale.

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Le tourisme. Un des atouts de la Basse - Normandie est le tourisme, en particulier culturel et historique, compte tenu de la richesse de son patrimoine (le Mont Saint-Michel est le premier site culturel de province avec 1,2 million de visiteurs en 2007). Le littoral bas-normand accueille aussi un grand nombre de visiteurs venus pour les activités balnéaires ou liées à la plaisance. D’après le Comité Départemental du Tourisme de la Manche, Granville se trouve parmi les premiers sites français pour l’enseignement des sports nautiques, notamment grâce au Centre Régional du Nautisme.

La proximité géographique a une nette influence sur l’origine des touristes se rendant en Basse - Normandie. Les habitants de Bretagne, des Pays-de-la-Loire, du Nord de la Région Centre sont nombreux à passer leurs vacances dans la région. Cependant, c’est l’Ile de France qui est la première région d’origine des touristes séjournant en Basse - Normandie (41% des nuitées générées au sein de la région en 2007). En 2007, les touristes français ont représenté en Basse-Normandie 3,4 millions de nuitées dans les hôtels et 1,4 million dans les campings. Au total, près de 7,3 millions de nuitées ont été enregistrées en 2007, dont environ 33% de visiteurs étrangers (Britanniques, Néerlandais, Belges notamment).

5.4.3. Analyse des effets de l’aménagement de la ligne Paris-Granville

La présentation du territoire bas-normand et de son évolution a permis de mettre en évidence le positionnement de la région dans le territoire national, ses spécificités et ses disparités. Les données chiffrées ont permis d’étayer les analyses.

La plupart des acteurs s’accorde à dire qu’il est difficile d’établir des liens entre l’évolution du territoire et l’aménagement de la ligne Paris-Granville. Certains résultats ressortent cependant, s’appuyant davantage sur le ressenti des acteurs que sur des données étayées par des chiffres. Ils sont présentés ci-dessous.

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Effets généraux sur la population et la société

La ligne Paris-Granville est considérée comme un lien indispensable vers Paris pour les territoires desservis. Or, pour une très large majorité des acteurs interrogés, la qualité de service offerte sur cet axe ferroviaire n’est pas suffisante et les retards nombreux pénalisent largement l’utilisation du fer par la population. Le matériel roulant est jugé inadapté et générateur de nuisances sonores dans les gares. Les aménagements réalisés sur la ligne Paris-Granville ne semblent pas avoir apporté de changements majeurs dans les pratiques territoriales de la population. Le manque de fiabilité est pointé du doigt. Par ailleurs, le problème de l’éloignement entre la gare de Montparnasse Vaugirard (gare d’arrivée de la ligne Paris-Granville) et la station de métro la plus proche, qui résulte de l’impossibilité de faire circuler et stationner des trains à traction Diesel sous la dalle couvrant la gare, subsiste. Les aménagements réalisés sont davantage perçus comme une mise à niveau de l’infrastructure que comme une véritable amélioration du réseau. Pour la plupart des acteurs rencontrés, ce sont avant tout les infrastructures autoroutières qui ont participé, depuis une dizaine d’années, au désenclavement de la Région Basse-Normandie. Le recours à la voiture particulière reste dominant pour les déplacements domicile-travail, même si le rail semble être plus utilisé pour les loisirs que par le passé. Ainsi, la CCI Centre et Sud Manche (Granville) fait état d’une hausse de l’utilisation de la ligne pour les déplacements domicile-travail entre Granville et Villedieu-les-Poêles. Les aménagements réalisés sur la ligne Paris-Granville n’ont pas remis en cause le fonctionnement du territoire et les relations entre les pôles. Il semblerait cependant que Granville et L’Aigle soient les deux pôles ayant le plus profité de l’aménagement de la ligne.

Il est difficile d’établir un lien avec l’évolution démographique des territoires. Enfin, les acteurs locaux sont nombreux à souligner le fait qu’une plus grande fiabilité de la liaison ferroviaire pourrait contribuer à améliorer l’image et la qualité de la desserte.

Effets sur les quartiers-gares et l’immobilier

L’aménagement de la ligne s’est accompagné d’une modernisation de plusieurs gares, comme Argentan ou Granville. Différents projets (Granville et Flers notamment) témoignent d’un possible développement du quartier-gare dans le cadre de requalifications de friches urbaines. Ces espaces pourraient voir l’installation de bureaux, de services et de logements. Selon le Conseil Général de l’Orne, la réelle valorisation des quartiers-gares et leur tertiarisation seront rendues possibles si la fréquentation des gares augmente, grâce à une offre de transport de qualité. En outre, les aménagements de la ligne Paris-Granville ont pu contribuer au déplacement vers l’Ouest des franges franciliennes. Par exemple, la commune de L’Aigle est aujourd’hui presque intégrée dans l’aire parisienne. Les déplacements domicile-travail entre ces franges éloignées et Paris tendent donc à se multiplier. Cette influence de l’Ile-de-France a entrainé la hausse des prix du foncier et de l’immobilier sur le territoire concerné. Par ailleurs, la ligne Paris-Granville est une voie d’accès au littoral Ouest du Cotentin. Cette zone touristique compte de nombreuses résidences secondaires, qui appartiennent pour l’essentiel à des franciliens et à des étrangers (Britanniques).

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Effets sur les activités économiques

D’après de nombreux acteurs du territoire, l’aménagement de la ligne Paris Granville n’a pas généré de développement économique particulier. Il n’a pas non plus facilité l’accès à l’emploi. De plus, les gains de temps permis par les aménagements sont très souvent imperceptibles en raison des retards et des problèmes de fiabilité. La tertiarisation des quartiers-gares est davantage un projet qu’une réalité. Comme le souligne la Communauté d’Agglomération du Pays de Flers, les impacts des aménagements réalisés sur le tissu économique des territoires traversés semblent limités, notamment en termes d’accessibilité et d’attractivité. Les axes autoroutiers qui desservent le territoire sont davantage mentionnés par les acteurs locaux pour contribuer au développement de l’économie locale. L’utilisation de la ligne ferroviaire par des chefs d’entreprises et le personnel administratif se rendant à Paris semble être un phénomène fréquent, même si les nombreux retards limitent le développement du fer pour les déplacements professionnels. Effets sur le tourisme

La Basse-Normandie bénéficie d’une bonne attractivité en matière de tourisme. Elle figure au 4ème rang national pour le tourisme de courts séjours. On y compte parmi ses atouts le Mont Saint-Michel, qui bénéficie d’une renommée mondiale. La région se situe à proximité de plusieurs grands bassins de population, dans un rayon de 300 km : région parisienne, Nord de la France, Angleterre, Belgique. La moitié des touristes sont originaires de la région parisienne. Chaque fin de semaine donne lieu à une importante migration Paris-Province puis Province-Paris. Les effets les plus significatifs de l’aménagement de la ligne Paris-Granville concernent l’activité touristique. Ils varient en fonction du potentiel touristique des territoires concernés. Au cours de la décennie 1998-2008, le département de l’Orne n’a pas assisté à un décollage du tourisme sur son territoire. L’aménagement de la ligne Paris-Granville n’a pas changé les pratiques touristiques et n’a pas permis d’augmenter la fréquentation. Différents projets sont à l’étude. Un hôtel est en cours de construction à proximité de la gare de Flers (CCI de Flers-Argentan) et le Conseil Général de l’Orne mentionne un projet d’utilisation de la ligne Paris-Granville pour desservir le Mont Saint-Michel et la constitution d’un réseau de voies vertes depuis certaines gares. Selon la CCI Centre et Sud Manche (Granville), la liaison ferroviaire est décrite comme un équipement indispensable au maintien et au développement de l’activité touristique. En permettant de rejoindre Paris, la ligne a ouvert la voie à un regain de fréquentation touristique sur le littoral du Cotentin. Dans le même temps, un accroissement des courts séjours s’est produit, notamment les week-ends. Il a été accompagné de la construction de résidences secondaires, dont une part importante appartient à des franciliens. Ces derniers sont nombreux à utiliser le rail pour passer quelques jours sur le littoral avant de regagner la région parisienne pour y travailler. Dans la Communauté de Communes du Pays Granvillais, l’offre d’hébergement s’est étoffée au début des années 2000, et la création d’un hôtel de standing est prévue dans le Plan Local d’Urbanisme. Selon la Communauté de Communes du Pays Granvillais, l’affluence touristique a augmenté sur la période 1998-2008. Cette évolution serait en partie imputable aux aménagements réalisés sur la ligne Paris-Granville.

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Organisation des transports

Pour l’ensemble des interlocuteurs rencontrés, la ligne Paris-Granville est un axe de communication majeur car elle permet de rejoindre la capitale. Cependant, les retombées positives, liées aux différents aménagements de la ligne Paris-Granville, sont ternies par les nombreux problèmes de retards. Ainsi, l’image que la population peut avoir de cet axe de communication est détériorée. La politique de rénovation des gares, menée par le Conseil Régional de Basse-Normandie, a parfois fait coïncider modernisation des gares et développement de l’offre multimodale. Le plus souvent, l’offre multimodale dans les gares desservies par la ligne Paris-Granville met en correspondance l’offre de transport régional (réseau TER…), le réseau de transport départemental (réseau Manéo dans le département de la Manche…) et le réseau urbain s’il existe. La clientèle La répartition de la clientèle Grandes Lignes en fonction des destinations et des motifs permet de mieux comprendre à qui profitent directement les aménagements réalisés et de vérifier les analyses précédentes. Cinq relations représentent presque 60 % du trafic total avec l’Ile de France. Granville est la première destination, avec une prépondérance des motifs privés loisirs (poids du tourisme). L’importance des motifs domicile travail montre l’intégration de Dreux et de l’Aigle dans l’aire parisienne.

Clientèle de la ligne Paris Granville (Grandes Lignes) Relations de Paris à

% du trafic total

Motif Privé/loisirs

Motif professionnel

Motif Domicile travail

Granville

14,7 73 11 16

Flers

11,7 64

Dreux

11,2 44

L’Aigle

10,7 58 9 33

Argentan 8,4

Source : Enquête SNCF Octobre 2008

5.4.4. Conclusion

La modernisation de Paris Granville est une opération d’aménagement du territoire qui vise à obtenir des dessertes ferroviaires de meilleure qualité avec Paris. Elle a été financée en grande partie par la Région de Basse - Normandie, car l’exploitation de la ligne n’est pas rentable financièrement. Ses caractéristiques (absence de pôles urbains importants, faible densité de population) sont en effet peu favorables à une desserte fine par fer.

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Mais les entretiens réalisés montrent que les aménagements effectués qui ont permis de diminuer les temps de parcours vers Paris, sont avant tout considérés comme une simple mise à niveau de l’équipement de la ligne. Les retombées positives, sont ternies par les nombreux problèmes de retards. Ainsi, l’image que la population peut avoir de cet axe de communication est détériorée. L’utilisation du train pour les déplacements domicile-travail reste faible par rapport à la route. Face à cette situation et aux demandes des élus régionaux, l’Etat va poursuivre cette politique d’aménagement du territoire et a présenté en avril 2009 un grand plan d’amélioration de la desserte ferroviaire en Basse - Normandie. Sur la ligne Paris Granville, les négociations engagées avec la SNCF en vue du renouvellement du matériel roulant par du matériel neuf bi mode (traction électrique et traction Diesel) à l’horizon 2013 seront encouragées. Des aménagements de double voie sur des tronçons à voie unique entre Argentan et Granville pour améliorer la capacité et la régularité sont étudiés pour une réalisation en 2015.

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5.5. Les bilans économiques pour la SNCF et pour la collectivité

5.5.1. Rentabilité économique pour la SNCF

Les calculs de rentabilité ont été réalisés sur la base des données et des notes fournies par la SNCF et RFF. La SNCF a été considérée comme un opérateur intégré, avec l’infrastructure, comme au moment de l'approbation ministérielle. La rentabilité économique pour la SNCF (valeur actuelle nette et taux de rentabilité interne39) recalculée sur la base des données disponibles à ce jour est la suivante :

Taux d'actualisation: 8% (durée 20 ans)

Sans déduction de la subvention

Avec déduction de la subvention

Taux de rentabilité économique pour SNCF ex ante

-4,5% 12,0%

Valeur actualisée pour SNCF ex ante

-135 M€ 6,1 M€

Taux de rentabilité économique pour la SNCF ex post

-0,5% Non calculable

Valeur actualisée pour la SNCF ex post

-167 M€2004 45,9 M€2004

Cette évaluation porte sur une période d’exploitation de 20 ans comme dans le DAM, sur la base d’hypothèses de coûts d’investissement et d’exploitation, de trafics et de tarifs explicités dans les chapitres précédents. Par ailleurs le mode de calcul de la valeur résiduelle utilisé pour le calcul a posteriori est celui de la méthode classique à savoir la valeur résiduelle actualisée (calcul au prorata du temps dans les dossiers ex ante). Les perspectives de trafic ne permettant pas à l’opération d’être rentable financièrement, le contrat de Plan Etat SNCF 1990 1994 prévoyait dans son article 26 un concours financier de subventions, afin de ne pas dégrader les comptes de la SNCF. La Région de Basse - Normandie a décidé de participer à la fois au financement de la modernisation de l’infrastructure à hauteur de 116 M€2004 (environ 85% du total) et à l’acquisition de matériel roulant plus performant pour 72 M€2004 (environ 85% du total également). La valeur actuelle nette calculée au taux de 8%40 sur la chronique de 20 ans de l'excédent brut d’exploitation (EBE) et des coûts d'investissement nets des coûts éludés, de la valeur résiduelle et de la subvention est de 45,9 M€2004 au lieu de 6,1 M€2004 prévus. L’écart s’explique par les gains de trafics et les recettes nouvelles plus importantes a posteriori et aussi par le calcul de la valeur résiduelle qui inclut ex post le matériel roulant. La participation financière de la SNCF n’a pas dégradé ses comptes. Le graphique ci-dessous montre qu’il n’y a pas de taux d’actualisation qui annule la valeur actuelle nette, compte tenu de l’importance relative des subventions. Le TRI économique de la SNCF n’est pas déterminé41.

39 Valeur du taux d'actualisation qui annule la valeur actuelle nette calculée sur la chronique sur 20 ans de l'EBE et

des coûts d'investissement nets des coûts éludés, de la valeur résiduelle et des subventions. 40 Coût de la ressource financière pour le début de période du bilan.

41 Hors subvention -0,5% a posteriori et -4 ,5% a priori.

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Calcul du TRI SNCF

(avec subvention)

0,0

10,0

20,0

30,0

40,0

50,0

8% 13% 18% 23% 28%

Taux d'actualisation

VAN M

€2004

Dans l’approbation ministérielle, ce TRI était de 12,0% en prenant en compte les données relatives à la seule infrastructure. Il négligeait les investissements en matériel roulant, en considérant qu’ils étaient compensés par des économies de locomotives Diesel. A l’inverse, on considère a posteriori qu’il n’y a pas d’économie de matériel roulant et que les locomotives Diesel, dont la construction est interrompue, sont utilisées les jours de pointe exceptionnelles ou sur d’autres lignes. Les estimations ex ante d’économies pour les personnels des gares (postes d’aiguillages supprimés, blocks automatiques) et l’entretien de la voie (mise à voie unique sur 95 km) ont été conservées ex post, faute de données plus précises. Le tableau ci-dessous donne les éléments du bilan sur 20 ans et met en évidence les causes d'écart.

Aménagement de Paris Granville Eléments des bilans économiques (sur 20 ans)

Ecart

M€ 2004 Ex ante Ex post %

(1) (2) (2)/(1)

Investissements

nets en infra -131 -117 -11%

Investissements

en MR 0 -98

Coûts

d'entretien infra 18 18 0%

Coûts

d'exploitation 14 14 0%

Recettes

nouvelles 0 43

Valeur résiduelle 27 122 345%

Total

(non actualisé) -72 -19 -74%

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5.5.2. Rentabilité socio-économique (collectivité)

La particularité de cet investissement est qu’il avait fait l’objet d’une étude socio économique dans le cadre de la mission confiée en 1990 au CGEDD (ex CGPC) par le ministre chargé des Transports (rapport de M. Portiglia déjà cité). La Région de Basse - Normandie a par la suite souhaité s’engager dans une opération plus ambitieuse en assumant les conséquences financière de ses choix. De ce fait, la SNCF a décidé de ne pas procéder pour l’approbation ministérielle à une nouvelle étude socio économique. La rentabilité pour la collectivité recalculée sur la base des données disponibles à ce jour est la suivante :

Taux de rentabilité socio économique ex ante

(rapport CGPC 1991)

5,7%

Taux de rentabilité socio économique ex post 0,9%

Valeur actualisée des avantages

socio économiques ex post

-142,6 M€2004

Dans l’évaluation socio-économique ex post, le bilan de la SNCF à prendre en compte est le bilan économique explicité au point précédent et le bilan des usagers est celui résultant des gains de temps. Les gains pour la collectivité en termes d'environnement (pollution locale, effet de serre, bruit) et de congestion ne sont pas valorisés, car ils ne l'étaient pas à l'époque des évaluations ex ante. Mais ils ne modifieraient pas sensiblement les résultats. Comme le trafic reporté de l’automobile, les économies d’émissions de CO2 sont négligeables. La rentabilité pour la collectivité de l’aménagement est a posteriori de 0,9%. L’opération n’atteint pas le seuil de rentabilité socio-économique fixé à 8% par l’ex Commissariat Général du Plan pour les investissements publics au moment du bilan a priori. Il faut néanmoins noter que l’évaluation socio-économique est centrée sur la prise en compte des seuls éléments quantifiables et monétaires et doit être mise en regard des autres effets attendus par la Région de Basse - Normandie et décrits dans ce rapport, comme l’aménagement du territoire, le développement économique régional ou les effets sur le tourisme qui ne sont pas monétarisés.

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6. Remarques méthodologiques

Les bilans LOTI ont deux objectifs principaux : l’information du public et l’amélioration des méthodes. Jusqu’en 2001, le seul bilan LOTI effectué concernant une infrastructure ferroviaire était celui du TGV Atlantique42. RFF a été désigné en 2003 pour réaliser tous les bilans LOTI ferroviaires, y compris ceux des opérations menées par la SNCF avant RFF en 1997. Depuis, une dizaine de bilans ont été produits et publiés sur le site internet de RFF www.rff.fr Le présent bilan LOTI s’appuie sur l’expérience acquise avec le bilan a posteriori de l’électrification de la Bretagne qui était la première évaluation de ce type réalisée et publiée par RFF en septembre 2008. En effet, l’aménagement d’une ligne correspond globalement aux seuls investissements connexes qui accompagnent les électrifications pour moderniser les infrastructures et profiter du nouveau mode de traction. Ce rapport vise à contribuer au retour d'expérience, à la fois pour les futurs bilans des aménagements de ligne et pour les méthodes d'évaluations socio économiques de ce type d'investissement.

Les enseignements pour les futurs bilans LOTI Moment de la réalisation Le présent rapport a été établi avec cinq ans de retard par rapport au délai prévu par la loi. Le rapport du CGPC de septembre 2002 et l’avis de juin 2003 ont recommandé de respecter l’obligation de réaliser les bilans trois à cinq ans après les mises en service et fournissent des principes et des méthodes de travail. La réalisation aurait été plus facile, car les acteurs ayant la mémoire de l'opération seraient encore en poste et les archives plus accessibles. Suivi des éléments du bilan La collecte des informations nécessaires doit être organisée par le maître d’ouvrage dès la réalisation du projet. Pour les opérations réalisées avant 1997, date de création de Réseau Ferré de France, la SNCF fournit les dossiers des études ayant servi de base à la déclaration d’utilité publique et les données sur la situation a posteriori. Cela a été encore le cas pour ce bilan, même si après 1997 la SNCF avait formellement une délégation de maîtrise d’ouvrage (et la maîtrise d’œuvre). Les travaux d’élaboration du présent bilan ont montré que la recherche des documents, des hypothèses et des modalités de calcul n’allait pas de soi et que la qualité de l’archivage conditionnait la bonne réalisation. La SNCF a pu fournir l’essentiel des informations nécessaires mais après un effort assez important dont elle doit être remerciée. Le recueil des données a posteriori nécessite la mise en place d’un suivi avec des indicateurs mesurables ex post. L'instruction ministérielle du 27 mai 2005 a d'ailleurs complété dans ce sens l'instruction - cadre du ministre de l'Equipement du 25 mars 2004 relative à l'évaluation des grandes infrastructures, en rappelant la nécessité de ce suivi des éléments de base du bilan a posteriori dans la vie du projet. On peut distinguer deux catégories de données. Les premières sont quantitatives et relatives au bilan pour la collectivité qui constitue le noyau central de l’évaluation, comme les coûts, les prix

42 Voir le bilan LOTI du TGV Atlantique (CGPC 2001)

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et les trafics, etc., ainsi que les effets quantifiables sur la qualité de service, l’environnement (bruit, pollution, effet de serre), la sécurité et les gains de temps des usagers. Il faut noter que l’origine du trafic supplémentaire reste mal connue. Pour l'avenir, un suivi avec des enquêtes s’avère nécessaire pour être plus précis, car la mesure des trafics détournés de la route (la concurrence aérienne est ici négligeable) permettrait de répartir les avantages du projet entre les différents acteurs et d'évaluer les impacts sur l'environnement (gains de sécurité, de pollution, d'émissions de CO2, etc.). Les autres données concernent les effets des opérations sur le développement économique régional, l’aménagement du territoire ou l’emploi. Elles apportent un éclairage essentiel sur les effets externes des projets non valorisés dans les bilans. Ces dernières données sont difficiles à recueillir et nécessitent, pour les futurs bilans LOTI, de mettre en place une batterie d'indicateurs pour un suivi systématique des impacts des opérations. Cette qualification des effets externes apparaît incontournable dans le cadre de projets de ce type eu égard aux niveaux de subventions publiques apportées par les collectivités locales. Pour ce bilan, des entretiens approfondis avec les acteurs locaux et des analyses socio économiques de ces territoires ont été menés pour tenter d’approcher ces effets liés aux gains d’accessibilité.

Dossier a priori pour la mesure des écarts avec la réalité constatée

A la différence des bilans LOTI des grands projets d’infrastructure, il n’y a pas de dossier d’enquête publique auquel se référer pour mesurer les écarts entre les réalisations et les objectifs annoncés. Le dossier d'approbation ministérielle est utilisé comme référentiel. Le formalisme de présentation des objectifs est moins encadré, ce qui complique l'évaluation ex post. Dans le cas présent, il n’y a pas eu d’évaluation socio économique ex ante.

Périmètre des bilans

La modernisation d’une ligne est généralement accompagnées d’autres opérations d’amélioration et d'adaptation des installations (citons dans ce bilan les suppressions de passages à niveau et les aménagements sur la section de Dreux à l’Aigle). Il faut veiller à bien définir le périmètre des bilans pour effectuer les comparaisons avant après.

Présentation

La logique de transparence de la loi impose de réaliser des documents simples et accessibles à tous avec des comparaisons claires entre le projet décidé et la réalisation. En revanche, le souci de valoriser et de diffuser le retour d’expérience pousse à des développements plus techniques. Le présent rapport a tenté un compromis entre ces deux contraintes.

Effets sur le trafic régional de voyageurs (TER)

Le dossier d'approbation ministérielle ne chiffrait pas les avantages de l’opération pour le trafic régional de voyageurs, en considérant qu'ils étaient du second ordre par rapport à ceux offerts aux trains de Grandes Lignes. Comme les bilans LOTI mesurent les écarts par rapport aux dossiers ex ante, la variante centrale du présent bilan reprend cette approche. Mais il est possible de fournir quelques éléments sur cette question.

La radiale Paris Granville accueille également des circulations régionales TER. Les TER permettent une desserte plus fine du territoire avec un service de cabotage que ne peuvent offrir les trains de Grandes Lignes. Les effets des investissements de 1999 sur les trafics en termes de temps de parcours ne peuvent pas être séparés des autres actions d’amélioration engagées par la Région Basse - Normandie durant la première convention SNCF Région 2002 2008 (la convention a été renouvelée jusqu’en 2014) :

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- lancement de nouvelles dessertes, - modifications du matériel roulant, - programme important de rénovation des gares lancé en 2004 (amélioration du confort,

développement de l’intermodalité, nouveaux services aux usagers, accessibilité PMR), politique tarifaire adaptée aux usagers réguliers (travailleurs, étudiants, etc.),

- amélioration de l’information aux voyageurs, - etc.

Le réseau ferroviaire TER de Basse-Normandie repose sur 6 axes :

- Lisieux – Caen – Cherbourg - Lisieux - Trouville/Deauville - Dives/Cabourg - Caen – Alençon - Le Mans - Caen - Saint Lô – Rennes - Caen – Rouen - Granville – Argentan - Paris

Ces axes représentent 699 km de lignes et desservent 48 gares et 26 points d’arrêt pour une offre globale de 3,8 millions de trains-kilomètres en 2007.

En 2007, la fréquentation du réseau TER ferroviaire de Basse-Normandie atteint 160 millions de voyageurs-kilomètres soit une hausse de 18% par rapport à 2001. L‘axe le plus fréquenté est l’axe Caen-Rennes qui cumule 30% du trafic régional. L’axe Argentan Granville en représente moins de la moitié et se situe à l’avant dernier rang, avant Lisieux Trouville Cabourg. La baisse du trafic de 8% entre 2001 et 2007 sur l’axe Granville Argentan s’explique par un report des clients occasionnels (hors abonnés) sur les trains de Grandes Lignes (Corails Intercités CIC) après l’augmentation de la fréquence (création d’un 5ème aller retour) et le repositionnement de certains trains CIC en mi journée en 2003.

Trafics des axes TER

Axe VK 2007 %Evol

2001/2007

Caen - St Lô - Rennes 48 200 30% 19%

Caen - Rouen 33 600 21% 29%

Lisieux - Caen - Cherbourg 28 300 18% 26%

Caen - Alençon - Le Mans 22 466 14% 19%

Granville – Argentan - Paris 19 200 12% -8%

Lisieux - Trouville/Deauville - Dives/Cabourg 8 900 6% 14%

Total 160 666 100% 18%

Source : SNCF (Milliers de vk)

Le graphique suivant montre l’évolution du trafic des différents axes depuis 2001.

Page 60: Bilan LOTI Paris-Granville

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Evolution trafic par axe (VK 2001-2006)

0

5 000 000

10 000 000

15 000 000

20 000 000

25 000 000

30 000 000

35 000 000

40 000 000

45 000 000

50 000 000

2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007

Caen - St Lô - Rennes Caen - Rouen Lisieux - Caen - Cherbourg

Caen - Alençon - Le Mans Granville – Argentan - Paris Lisieux - Trouville/Deauville - Dives/Cabourg

Pour conclure, le bilan coûts avantages de la modernisation de Paris Granville pour le trafic régional est très difficile à établir pour deux raisons. D'abord, il faudrait séparer les effets propres de l'aménagement de ceux de la régionalisation des TER et du conventionnement (loi du 13 février 1997), qui ont eu des impacts positifs sur le trafic. La définition de la situation de référence sans projet se pose. Ensuite, compte tenu de l'ancienneté de l’opération, les données de coût d'investissement en matériel régional neuf et de coût d'exploitation supplémentaires manquent.

Les enseignements concernant les méthodes d’évaluation

Pour ce bilan, faute de données, c’est la SNCF opérateur intégré (ensemble SNCF-RFF) qui a été considéré. Les principales problématiques mises en évidence par ce bilan LOTI de l’aménagement de Paris Granville sont les suivantes :

• L’opération visait à améliorer les dessertes en diminuant les temps de parcours d’environ une demi-heure entre Paris et Granville (trajet de moins de 3 heures). La mauvaise ponctualité des trains remet en cause cet objectif43. Une étude de sensibilité montre que la rentabilité collective baisse de 0,5 point si on augmente les temps de parcours de 10 minutes. A l’inverse, la fréquence est passée de 4 à 5 allers et retours par jour de semaine, ce qui diminue le temps d’attente et donc le coût généralisé du transport. On a considéré que les effets des retards et des fréquences se compensaient globalement.

• Les effets favorables à l'environnement en terme de diminution du trafic de l’automobile (pollution évitée et réduction des émissions de CO2), qui sont un objectif actuel des investissements ferroviaires, n'ont pas été valorisés puisque les dossiers ex ante ont été produits avant les travaux des groupes du Plan présidés par M. Boiteux (en 1994 et 2001) qui proposent les bases de la monétarisation des effets socio économiques. La rentabilité pour la collectivité est donc sous estimée de ce point de vue.

43 Les temps de retard doivent être affectés d’un coefficient de pénibilité de l’ordre de 1 à 3 compte tenu de leur

caractère imprévisible (Voir E.Quinet. Principes d’économie des transports. 1998)

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Annexe : principaux éléments chiffrés du bilan

Tableau 1: Coûts d'infrastructure en millions d'€ (2004) Coût total infra Dont subvention

Ex ante 137 M€ 116 M€ (85%)

Ex post 123 M€ (-10%) 116 M€

Tableau 2: Coûts du matériel roulant en millions d'€ (2004)

Coûts du matériel

roulant TER

X 72500

Dont subvention

Ex ante 87 M€ 72 M€ (83%)

Ex post * 79 M€(-10%) 72 M€ * + 4 éléments en décembre 2007 (19 M€)

Tableau 3: Coûts d'entretien et d'exploitation Économie d'entretien et d'exploitation en millions d'€ 2004/an

Ex ante -1,6 M€

Ex post -1,6 M€

Tableau 4: Investissements d’infrastructure éludés Opérations de maintenance lourde évitées de 1999 à 2003

en millions d'€ 2004

Ex ante 6,1 M€

Ex post 6,1 M€

Tableau 5: Temps de parcours Meilleurs temps Hiver

1993/1994 Situation

projet

DAM

Situation

Projet

Ex post

Hiver

2007/2008

Gains de temps DAM

Gains de temps Ex post

Paris Granville 3h26 2h54 2h59 0h32 0h27

Page 62: Bilan LOTI Paris-Granville

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Tableau 6: Fréquences

(Correspondance)

Tableau 7 : Taux d’évolution du trafic Modalités de calcul du trafic

Référence Projet

Ex ante Base + 0% par

an

0% par an

Ex post Elasticité du

trafic

à la croissance

du

PIB de 0,1

De 1999 à 2007, trafic réel constaté

Après 2007 élasticité du trafic à la

croissance

du PIB (1,9%) de 0,1: 0,19% par an

Tableau 8: trafics Paris Granville (Grandes Lignes) Paris Granville Trafic

référence ex ante

Trafic projet ex ante

Gain trafic ex ante

Trafic Référence ex post

Trafic projet ex post

Gain trafic ex post

Année pleine (1999)

0,682 0,682 0 0,595 0,614 0,019

Année 2007 0,682 0,682 0 0,605 0,726 0,122

Tableau 9: Recettes Recettes supplémentaires en année pleine en millions d'€ 2004/an

en millions d'€ 2004/an

Ex ante 0 M€

Ex post 0,4 M€

Fréquences/j (aller et retour)

Hiver

1993/1994

Situation

Projet

Ex post

Hiver 2007/2008

Paris Granville 4 (0) 5,5 (0,5)

Page 63: Bilan LOTI Paris-Granville

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Tableau 10: rentabilité économique pour la SNCF Rentabilité économique pour la SNCF

Taux d'actualisation: 8% durée 20 ans

Sans déduction de la

subvention

Avec déduction de la

subvention

Taux de rentabilité économique pour SNCF ex ante

-4,5% 12,0%

Valeur actualisée pour SNCF ex ante

-135 M€2004 6,1 M€2004

Taux de rentabilité économique pour SNCF ex post

-0,5% nd

Valeur actualisée pour SNCF ex post

-167 M€2004 45,9 M€2004

Tableau 11: Rentabilité socio économique Rentabilité socio économique Taux d'actualisation: 8% durée 20 ans

Taux de rentabilité socio économique ex ante*

Pas de calcul

Taux de rentabilité socio économique ex post 0,9%

Bénéfice actualisé des avantages socio économiques ex post

-143 M€2004

*Estimée à 5,7% dans le rapport CGPC 1991 (projet de 1990)