Bilan d’une masse pelvienne chez la femme jeune

4
Imagerie de la Femme (2009) 19, 265—268 QUEL EST VOTRE DIAGNOSTIC ? Bilan d’une masse pelvienne chez la femme jeune Pelvic tumor of the young woman Benjamin Dallaudière a,, Yves Aubard b , Dan Toledano a , Vincent Hummel a , Antoine Maubon a a Service de radiologie et d’imagerie médicale, CHU Dupuytren, 2, avenue Martin-Luther-King, 87000 Limoges, France b Service de gynécologie, hôpital Mère-Enfant, 8, avenue Dominique-Larrey, 87042 Limoges cedex, France Available online 28 October 2009 Observation clinique Une femme de 35 ans a été envoyée dans le service de radiologie par son gynécologue pour bilan initial d’une masse pelvienne latéralisée à gauche, découverte lors du toucher vaginal dans le cadre de son suivi annuel gynécologique. Cette patiente est nullipare et se situe en première partie de cycle. Elle ne présente pas de méno- métrorragie, ni dysménorrhée. Son état général est conservé et le bilan biologique ne montre aucun syndrome inflammatoire, ni autre anomalie. L’échographie pelvienne réalisée par voie transpariétale et endovaginale est peu con- tributive : elle retrouve simplement un syndrome de masse hétérogène d’environ 4 à 5 cm, aspécifique. Une IRM pelvienne est pratiquée (Fig. 1—8). Auteur correspondant. E-mail address: [email protected] (B. Dallaudière). 1776-9817/$ — see front matter © 2009 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. doi:10.1016/j.femme.2009.09.007

Transcript of Bilan d’une masse pelvienne chez la femme jeune

Imagerie de la Femme (2009) 19, 265—268

QUEL EST VOTRE DIAGNOSTIC ?

Bilan d’une masse pelvienne chez la femme jeune

Pelvic tumor of the young woman

Benjamin Dallaudièrea,∗, Yves Aubardb,Dan Toledanoa, Vincent Hummela,Antoine Maubona

a Service de radiologie et d’imagerie médicale, CHU Dupuytren,2, avenue Martin-Luther-King, 87000 Limoges, Franceb Service de gynécologie, hôpital Mère-Enfant, 8, avenue Dominique-Larrey,87042 Limoges cedex, France

Available online 28 October 2009

Observation clinique

Une femme de 35 ans a été envoyée dans le service de radiologie par son gynécologue pourbilan initial d’une masse pelvienne latéralisée à gauche, découverte lors du toucher vaginaldans le cadre de son suivi annuel gynécologique. Cette patiente est nullipare et se situe enpremière partie de cycle. Elle ne présente pas de méno- métrorragie, ni dysménorrhée. Sonétat général est conservé et le bilan biologique ne montre aucun syndrome inflammatoire,ni autre anomalie.

L’échographie pelvienne réalisée par voie transpariétale et endovaginale est peu con-tributive : elle retrouve simplement un syndrome de masse hétérogène d’environ 4 à 5 cm,aspécifique. Une IRM pelvienne est pratiquée (Fig. 1—8).

∗ Auteur correspondant.E-mail address: [email protected] (B. Dallaudière).

1776-9817/$ — see front matter © 2009 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.doi:10.1016/j.femme.2009.09.007

266 B. Dallaudière et al.

Figure 1. IRM en séquence axiale T2, sans suppression de graisseni gadolinium.

FT

Figure 3. IRM en séquence coronale T2, sans suppression degraisse ni gadolinium.

igure 2. Coupe paramédiane droite. IRM en séquence sagittale2, sans suppression de graisse ni gadolinium.

FT

igure 4. Coupe paramédiane gauche. IRM en séquence sagittale1, sans suppression de graisse ni gadolinium.

Bilan d’une masse pelvienne chez la femme jeune 267

Figure 5. IRM en séquence axiale T1, avec suppression de graisse,sans gadolinium.

Figure 6. IRM en séquence axiale T1, avec suppression de graisse,

Figure 7. IRM en séquence coronale diffusion b1000.

avec gadolinium.

Figure 8. IRM en séquence axiale diffusion b1000.

Quel est votre diagnostic ?

2

D

Kd

ehTahdmO

mepnaz

gdmjde

D

Lglm[bi

tdstacr

epi

c

l•

68

iagnostic

yste dermoïde ou tératome mature unilatéral à point deépart ovarien gauche.

On retrouve en région latéro-utérine gauche une lésionstimée à plus de 5 cm de grand axe, bien limitée, de signalétérogène, de composante majeure en hypersignal T1 et2 (Fig. 1, 3 ,4), son signal étant annulé par la séquencevec suppression de graisse (Fig. 5). Il n’existe pas de francypersignal en séquence de diffusion (Fig. 7 et 8). Au seine la lésion, l’examen retrouve des portions charnues, nonodifiées par l’injection de produit de contraste (Fig. 6).n note un épanchement péritonéal libre significatif.

L’ovaire droit est de taille et de morphologie nor-ale, porteur d’un follicule dominant (lésion liquidienne

n hyposignal T1 et hypersignal T2) (Fig. 2). Il n’y aas d’adénomégalie régionale franchement individualisablei dilatation urétérale. L’utérus est de taille normale,ntéversé, antéfléchi, sans épaississement significatif de laone jonctionnelle, du myomètre.

Cette lésion semble donc à point de départ ovarienauche. Il s’agit donc d’une lésion unique à point deépart ovarien gauche, de composante mixte majoritaire-ent graisseuse, sans prise de contraste suspecte, chez une

eune femme, sans altération de l’état général. On se situeans la gamme diagnostique des tumeurs bénignes ovari-

nnes de la femme jeune.

iscussion

’hypersignal T1 avec chute du signal en suppression deraisse est un signe très important qui permet d’affirmera présence de graisse intralésionnelle, ce qui est forte-ent en faveur du diagnostic de kyste dermoïde mature

1,2]. L’absence d’hypersignal en séquence de diffusion1000 est également un indice en faveur d’une lésion annex-elle bénigne [3].

Les lésions ovariennes sont généralement asymptoma-iques. Cependant, elles peuvent, quelques fois, entraîneres douleurs dues à une hémorragie ou une torsion. Ellesont bilatérales dans 2 à 10 % des cas, le taux de complica-ion correspondant aux ruptures et à la péritonite chimiquevec des adhérences et une surinfection est faible [4]. Laroissance est lente, en moyenne 1,8 mm par an, avec unisque de dégénérescence maligne dans 2 % des cas.

Le traitement des cas non compliqués consiste en unexcision avec conservation d’une partie de l’ovaire. Certainsrônent une prise en charge non chirurgicale si la taille estnférieure à 6 cm du fait de la croissance lente.

Le pronostic est une récidive locale d’en moins de 1 % desas après excision.

C

A

R

[

[

[

[

[

[

[

B. Dallaudière et al.

Les principaux diagnostics différentiels des tumeursatéro-utérines de la femme jeune sont :

les endométriomes ovariens. Ces derniers se présententsous la forme de masse généralement à point de départovarien, avec un signal de forte intensité en hypersig-nal T1 qui ne disparaît pas en saturation de graisse. Enpondération T2, ces masses présentent des ombres avecdivers degrés de signaux d’intensité intermédiaire à faibleen fonction des différents stades de dérivés sanguins nom-més shading dans la littérature anglo-saxonne ;les kystes fonctionnels ou simples ovariens se présentantcomme des kystes folliculaires (hyposignal T1, hypersignalT2) avec une éventuelle prise de contraste en « anneau »en séquence T1 après injection de gadolinium, nommésring sign. Ils peuvent atteindre jusqu’à 5 cm et être mul-tiples et bilatéraux, souvent spontanément résolutifs [5] ;les kystes hémorragiques d’origine ovarienne peuventégalement prendre un aspect hémorragique (hypersignalT1) ne disparaissant pas sur la séquence avec suppressionde graisse. Le diagnostic différentiel avec un éventuelendométriome se fait par la prise de contraste pariétale(ring sign du kyste fonctionnel hématique, non présentdans le cadre des endométriomes ovariens) [6] ;le léiomyome pédiculé, d’origine utérine, beaucoup plusrare, de point de départ utérin [7] ;une origine intestinale peut également être évoquée de

manière clinique.

onflit d’intérêt

ucun.

eferences

1] Hricak H, Reinhold C, Asher SM, Pradel JL.Gynécologie : les100 principaux diagnostics. Paris: Maloine; 2005. p. 77—80.

2] Jung SE, Lee JM, Rha SE, Byun JY, Jung JI, Hahn ST. CT andMR-Imaging of ovarian tumors which emphasis on differentialdiagnosis. Radiographics 2002;22:1305—25.

3] Roussel A, Thomassin-Naggara I, Darai E, Marsault C, Bazot M.Évaluation de la séquence de diffusion pour l’étude des tumeursannexielles. J Radiol 2009;90:589—96.

4] Outwater EK, Siegelman ES, Hunt JL. Ovarians teratomas:tumors type and imaging characteristic. Radiographics2001;21:475—90.

5] Devred P, Panuel N, Raybaud C.Imagerie radiologique : radiopé-diatrie. Paris: Masson; 1997. p. 246—50.

6] Pouquet M, Lacheub K, Maubon A. Tumeurs ovariennes bénignesde la femme jeune. Paris: Journées francaises de radiologie;2008.

7] Rouanet JP, Maubon A. Cours de diplôme interuniversitaired’imagerie gynécologique. 2009.