Barazer_Claude_ Ulysse Nu Et Couvert de Boue

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" ULYSSE NU ET COUVERT DE BOUE Claude Barazer P.U.F. | Revue française de psychanalyse 2003/5 - Vol. 67 pages 1789 à 1794 ISSN 0035-2942 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-francaise-de-psychanalyse-2003-5-page-1789.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Barazer Claude, « " Ulysse nu et couvert de boue », Revue française de psychanalyse, 2003/5 Vol. 67, p. 1789-1794. DOI : 10.3917/rfp.675.1789 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour P.U.F.. © P.U.F.. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université d'Orléans - - 194.167.30.120 - 05/03/2013 11h31. © P.U.F. Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université d'Orléans - - 194.167.30.120 - 05/03/2013 11h31. © P.U.F.

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" ULYSSE NU ET COUVERT DE BOUE Claude Barazer P.U.F. | Revue française de psychanalyse 2003/5 - Vol. 67pages 1789 à 1794

ISSN 0035-2942

Article disponible en ligne à l'adresse:

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Barazer Claude, « " Ulysse nu et couvert de boue  »,

Revue française de psychanalyse, 2003/5 Vol. 67, p. 1789-1794. DOI : 10.3917/rfp.675.1789

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« Ulysse nu et couvert de boue »1

Claude BARAZER

Cette formule empruntée à G. Keller que Freud cite vers la fin du para-graphe de L’interprétation du rêve intitulé « Rêve d’embarras dû à la nudité »réunit les deux références essentielles de l’univers honteux : le dévoilement dela nudité et la souillure. Ou, en d’autres termes, les atteintes à la pudeur et àl’honneur. La citation se poursuit avec l’évocation d’un rêve fréquent chezcelui qui, comme Ulysse, exilé loin de sa patrie, rêve dans son sommeil duretour chez lui. Mais le rêve tourne au cauchemar : « Alors vous découvrezsoudain que vous errez en guenilles, nu et couvert de poussière. Une honte etune angoisse sans nom vous saisissent, vous cherchez à vous couvrir, à vouscacher et vous vous éveillez baigné de sueur. » Honte, mise à nu et souilluresont ici étroitement associées à une menace qui n’est pas précisémentd’exclusion mais plutôt de déchéance. C’est à l’instant où il rêve de réintégrersa communauté que l’homme « cauchemarde » qu’il s’y trouve destitué aurang de « déchet ». (Souvenons-nous qu’Ulysse, lorsqu’il débarque à Ithaque,n’est reconnu que par son chien.)

Cette même articulation : honte, mise à nu, souillure, déchéance, cons-titue le fil conducteur de la fameuse note de Malaise dans la culture2. Lahonte est d’abord envisagée par Freud comme contemporaine de cet « actede naissance » de l’être humain que réalise l’adoption de la position verticale.Et ses conséquences : la visibilité des organes génitaux, le « passage àl’arrière-plan des stimuli olfactifs intermittents au profit des stimuli visuelspermanents ». La honte intervient ici comme dispositif assurant unerégulation de cette sexualité devenue permanente en imposant un voi-

Rev. franç. Psychanal., 5/2003

1. Ou « de vase », selon la récente traduction dans les Œuvres complètes : L’interprétation durêve, in OCF-P, t. IV, Paris, PUF, 2003, p. 285.

2. Malaise dans la culture, in OCF-P, t. XVIII, Paris, PUF, 1994, p. 286.

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lement culturel et non plus une dissimulation physiologique des organesgénitaux.

Il faut souligner que le terme de « honte » définit ici ce qu’ailleurs Freuda désigné comme ces « digues » que la culture élève là ou précisément le refou-lement ne suffit pas, à lui seul, à assurer la civilisation des pulsions.

Et c’est dans cette même perspective qu’il envisage ensuite le rôle de lahonte dans « l’aspiration culturelle à la propreté » : La « transvaluation »imposée à l’enfant quant à la valeur de ses matières fécales (le passage de« haute valeur narcissique » à « répugnant-dégoûtant ») n’est possible quegrâce à leur forte odeur qui conduit l’érotisme anal à partager le destin qui estréservé aux stimuli olfactifs, soit le « refoulement organique ». Mais, là encore,la honte intervient comme facteur social supplémentaire : l’homme n’est pasdégoûté par ses propres excréments mais seulement par ceux de l’autre. C’est lahonte qui lui interdit de se conduire envers son prochain « comme un chien » etde le traiter de la sorte (c’est-à-dire qui interdit que ce soit l’homme qui puissedevenir lui-même l’objet de cette « transvaluation » au regard de l’autre). Maisc’est aussi la honte qui surgit comme « signal » et comme mémoire lorsque safonction de « gardienne » des exigences de la culture s’est montrée impuissanteà prévenir l’ « inconvenant ». Notons ici ce triple niveau de définition du termede « honte » (dispositif « préventif », affect-signal et mémoire) qui est souventsource de confusion dans les débats sur le sujet.

Cette « spéculation théorique », comme la désigne Freud, a en communavec le récit biblique de situer les origines de la honte « au seuil de la culturehumaine ». L’exigence de dissimulation qu’impose la honte, qu’elle concerne lanudité des organes génitaux ou le traitement des souillures corporelles, estindissociable du devenir humain. L’homme « s’élève » littéralement et méta-phoriquement au-dessus de la condition animale et la honte occupe une fonc-tion essentielle aussi bien comme « facteur social » participant à ce mouvement« vers le haut » que comme « signal » d’un risque de « chute ». En ce sens, lahonte est étroitement nouée à une question d’appartenance, d’inscription. Etsans doute, en premier lieu (honte primaire ?), solidaire des menaces qui peu-vent peser sur l’homme quant à la reconnaissance de son appartenance à« l’espèce humaine ». La fameuse phrase terminale du Procès : « Comme unchien !, dit-il ; c’était comme si la honte devait lui survivre », met l’accent sur lelien entre honte et franchissement régressif de la frontière qui sépare l’animalde l’humain, thème essentiel chez Kafka. La honte « primaire » définirait-ellecette menace ? La honte joue donc un rôle capital dans les pratiques du corpsdevenu corps humain en réglementant ce que l’homme, en fonction des circons-tance, se doit de soustraire au regard du prochain. Cette part soustraite dessineles contours concrets, physiques d’un espace d’intimité.

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Mais cet intime, ainsi créé grâce à des voiles, des écrans, des dissimula-tions, renvoie à un autre « intime » qui, lui, ne relève pas du perceptible :l’intime du désir humain, son opacité irréductible, qui fait de l’être parlant, àla différence de l’animal, un sujet « divisé », jamais réductible à ce qu’il donneà voir – cette forme de l’intime que la psychanalyse définit commel’Inconscient. Cet « intime »-là ne saurait être vaincu par aucun dévoilement« matériel », aucune mise à nu « physique » ; il relève d’une autre logique,celle du refoulement.

Pourtant il existe bien toujours un risque de « malentendu » – de réduc-tion de l’ « intime » à l’intime.

La pornographie en est une illustration.En « montrant tout », ou plutôt ce qu’elle désigne dans le leurre de sa

logique comme étant « le tout », elle prétend en finir avec le « manque àjouir », le retour inlassable du désir insatisfait, la « part d’ombre » irréductiblequi sépare le désir humain du besoin animal. La logique pornographique« fétichise » le voile (comme les idéologies naturistes dans une autre visée,celle de l’illusoire retour à un « rapport » naturel de l’homme avec son corps),puisqu’elle en fait la cause du manque et non le signe. L’illusion folle et vio-lente de la pornographie est de « venir à bout » du désir par arrachement desvoiles qui le limitent et non, comme dans l’érotisme, de jouer au montré/cachéavec les voiles dont l’humain s’enveloppe. Elle s’attaque aux enveloppeshumaines en prônant un dévoilement intégral qui se révèle être en réalité unetentative de déchéance de l’humain. Mise à nu qui se révèle mise à mort.

Cette logique pornographique est sans doute à l’œuvre dans d’autresdomaines que le sexuel au sens étroit du terme, chaque fois qu’un discours,une pratique (scientifique, idéologique) véhiculent de façon plus ou moinsavouée la prétention à un « dévoilement intégral » qui s’avère en réalité unevolonté de destitution : « Tu n’es rien d’autre que cette chose obscène offerteà mon regard, à mon savoir. Tu n’as plus de secret pour moi. » Message quiest sans doute le programme de toutes les formes de perversion.

N’est-ce pas avec des patients, dans l’histoire desquels on peut repérer larépétition de situations constituant des atteintes majeures à ces « frontièresmatérielles » de l’intime, que la psychanalyse est amenée à rencontrer des for-mes de honte susceptibles d’opposer un obstacle parfois insurmontable audéroulement de la cure1 ? Ou encore avec des patients, souvent les mêmes,« héritiers » des stigmatisations, humiliations et déchéances, subies par leursascendants ?

« Ulysse nu et couvert de boue » 1791

1. J’ai développé cette hypothèse dans un texte : « Tactique russe », in Champ psychosomatique,no 27, 2002, 113-122.

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De ce point de vue, c’est sans doute moins la honte « sartrienne » qui estsusceptible de concerner nos pratiques que la honte « kafkaïenne ». Moins cellequi s’exprime dans les coordonnées verbales et physiques qui nous sont familiè-res que celle qui ne se dit pas mais imprime profondément sa trace dans le psy-chisme ; se conserve selon des modalités qui ne sont pas forcément celles durefoulement dynamique, « survit » et se transmet au fil des générations.

Là où nous rencontrons de l’ininterprétable, de l’immobile et du désespé-rément répétitif.

Là où le déroulement du travail analytique se heurte à des postures ina-movibles, d’indépassables exigences de façade parfois trop vite assimilées àdes résistances narcissiques.

Là où la règle fondamentale semble ne pouvoir jamais peser que de peude poids face à d’autres mystérieuses exigences qui « plombent » la parole.

Là où prévalent des topiques singulières : enclaves, cryptes, cloisonne-ment, clivages, où des fragments psychiques semblent entretenir avec le restedu psychisme des rapports paradoxaux d’ « extériorité interne » (les « fantô-mes » de Nicolas Abraham et Maria Torok).

Là où le corps dans son organicité la plus concrète s’impose de façonmassive ; odeur, bruits, exsudation, traces sur l’enveloppe corporelle qui fontdouter des limites et du bien-fondé de nos possibilités interprétatives ou bien,à l’inverse, lorsque le corps est à ce point « effacé » de l’expérience analytiquequ’elle se fige dans de purs et stériles « jeux de l’esprit ».

Là encore où des actes, en marge de la cure, viennent inlassablementmettre en scène la souillure, la déchéance sociale et physique (l’alcoolisme, parexemple), ou, à l’inverse, s’acharnent à démontrer « en acte » qu’il n’y ajamais eu souillure et déchéance, ou bien qu’elle a été effacée, ou encorequ’elle a été retournée en objet de fierté.

La clinique que nous apporte ces patients est en quelque sorte à la mesurede la matérialité « enfantine »1 qui prévaut dans l’univers honteux : des écransmatériels qui séparent, protègent et dissimulent aux regards, des secrets assu-rés par le silence ou les discours de postures, des fautes identifiées à des impu-retés (taches, souillures) susceptibles, par une étrange économie matérielle, dese répandre, de diffuser, de se transmettre. Le recours à des actes d’alluremagique pour « nettoyer » l’impur.

Chez ces patients, l’analogie courante de l’expérience analytique avec uneentreprise de « dévoilement » et de « mise à nu » prend un relief de réalité qui

1792 Claude Barazer

1. En référence à cette période où l’enfant croit au regard « tout-puissant » des parents le pri-vant de toute intimité psychique, jusqu’à ce qu’il découvre le pouvoir du mensonge qui, outre son effi-cacité pratique vaut pour sa fonction symbolique de l’introduire à une autre dimension de l’intime quine relève pas de la dissimulation.

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fait de l’actualisation transférentielle de la honte le risque d’une répétition dumême davantage que de l’identique : le dévoilement de la « souillure » et ladéchéance qui en découle sous le « regard qui fait honte » de l’analyste.

De ce point de vue, il ne faut pas s’étonner que la psychanalyse se soittoujours « méfiée » de la honte car leurs logiques sont diamétralement oppo-sées : si la psychanalyse « croit » en la parole, aux effets thérapeutiques de lamise au jour d’une vérité jusque-là inouïe, la priorité absolue du honteuxquant à la parole est la « face » à ne pas perdre ou à sauver, la posture àconserver coûte que coûte, le secret à dissimuler. Pour lui, la parole risquetoujours de faire voir plus que de faire entendre et l’acte d’énonciation dereproduire à l’identique l’expérience honteuse dont il témoigne. Si la psycha-nalyse s’appuie dans ses possibilités interprétatives sur la condition métapho-rique du symptôme, dans la honte, à l’inverse, l’économie de la « tache », dela « trace », de la « souillure » s’imprime trop « matériellement » sur lecorps1, dans les conduites ou les singularités caractérielles et commandent enretour des actes qui « effacent », « nettoient », voire imposent l’auto-effacement du sujet tout entier identifié au déchet, comme en témoigne lesuicide du honteux.

C’est donc moins la honte-affect que l’on rencontre dans ces cures qu’unfaisceau de traits cliniques qui amènent l’analyste, pour peu que les coordon-nées de l’univers honteux soient disponibles dans son propre monde intérieur,à « penser » honte.

La mobilisation transférentielle de la honte-affect liée à l’exposition del’intime lorsqu’elle survient, revêt un caractère d’intolérable et menace lacontinuité de la cure. Elle semble traduire chez ces patients le surgissementd’une angoisse de nature spécifique (qui n’en exclut pas d’autres pour autant)que l’on peut désigner comme narcissique si l’on entend par là une menacequi porte sur l’appartenance du sujet à la communauté des humains2 (le« comme un chien » de Kafka).

Parmi les questions soulevées à la suite du rapport de Claude Janin, ilm’a semblé pouvoir repérer la convergence d’un certain nombre d’entre ellesqui, à partir de la clinique, posaient implicitement (la formule n’a pas à maconnaissance été prononcée) l’hypothèse d’une « honte inconsciente ». Je faisallusion à ce qui a pu être avancé en termes de honte « désubjectivée »,« négativée », « réprimée » ou encore « en creux ».

« Ulysse nu et couvert de boue » 1793

1. Certaines affections dermatologiques semblent obéir à cette identification littérale de la honteà la « tache ».

2. Le message que véhicule le regard des parents qui « fait honte » à l’enfant surpris en fautedont parle Freud dans les Trois essais pourrait-il tirer sa force coercitive de cette menace ? « Petitcochon ! », s’exclame une mère surprenant son fils en train de se masturber.

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Pourrait-on en effet, avec la honte, s’inspirer de la démarche clinique quia conduit Freud à déduire d’actes symptomatiques et de conduites répétitivesun sentiment inconscient de culpabilité ?

Sentiment inconscient de honte qui, si l’on poursuit le raisonnement,amènerait éventuellement à poser un « besoin de » sur le modèle du besoin depunition. « Besoin d’humiliation », pour reprendre la formule de ClaudeJanin ? Besoin de déchéance ? À quelle nécessité et logique « au-delà du prin-cipe de plaisir » répondrait ce besoin ?

Ou bien, dans une optique différente, pour penser le retour inlassable decertaines formations symptomatiques, peut-on poser l’hypothèse d’un sujet« porteur », comme cela a pu être évoqué à plusieurs reprises au cours du Con-grès, d’une honte « empruntée » (honte « héritée » ou encore « importée ») ?

Dans cette hypothèse, qui est celle vers laquelle, il faut le souligner,débouchent souvent les réflexions métapsychologiques sur ce thème, la répéti-tion de manifestations symptomatiques évocatrices d’une honte inconscientese réfère moins à un « besoin de » qu’à des modalités de transmission entregénérations qui, dans leur forme, apparaissent assez congruentes, il faut lesouligner, à cette « économie concrète » de la honte : contagiosité, diffusion,transmission de la « souillure » sur le modèle du « miasma » grec tel queDodds l’a décrit1. Les hontes des ancêtres sont « hébergées », par leur descen-dance, à leur insu, selon des formes cliniques qui « montrent » la « tache » ou,à l’inverse, la dénient.

Là où a sévi un « regard », un discours, des actes, porteurs, même aminima, d’un verdict de déchéance. Là où il y a eu stigmatisation, mise enquestion réelle ou imaginaire des appartenances communautaires, sur la basede critères physiques, ethniques, sociaux ou autres.

Il y a, me semble-t-il, autour de cette hypothèse d’une honte inconsciente,de ses expressions cliniques et de son statut métapsychologique, un domainede recherche d’un grand intérêt théorique et pratique pour la psychanalyse des« cas difficiles ».

Claude Barazer113, rue Monge

75005 Paris

1. On pense bien sûr aussi, à l’histoire de Noé qui maudit la descendance du plus jeune de sesfils qui l’a surpris dans sa nudité et sa déchéance alcoolique.

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