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Appendice 1 Les forces terrestres du Commonwealth défendant la Malaisie et Singapour Malaya Command : General Officer Commanding, Lieutenant-général Arthur Percival III e Indian Corps : Lieutenant-général Sir Lewis Heath 9 e Division Indienne, Major-général AE Barstow : - 8 e Brigade [Brigadier BW Key], - 21 e Brigade [Brigadier CJ Weld], - 22 e Brigade [Brigadier G Painter] - 88 e Field Regiment Royal Artillery 11 e Division Indienne, Major-général DM Murray-Lyon : - 6 e Brigade [Brigadier WO Lay], - 15 e Brigade [Brigadier KA Garrett], - 28 e Brigade (Gurkha) [Brigadier W St-John Carpendale] - 3 e Cavalry Regiment - 137 e Field Regiment Royal Artillery - 155 e Field Regiment Royal Artillery 17 e Division Indienne, Major-général H.V. Lewis : - 44 e Brigade (6/1 er , 6/14 e et 7/8 e Punjab Rgts), - 45 e Brigade (4/5 e Jat Rgt, 5/18 e Royal Garwhal Rifles et 7/6 e Rajputana Rifles), - 46 e Brigade (3/7 e Gurkha Rifles, 7/10 e Baluch Rgt et 5/17 e Dogra Rgt) 1 18 e Division d’Infanterie britannique, Major-général Merton Beckville-Smith : - 53 e Brigade, Brigadier CLB Duke (2/Cambridgeshire Rgt, 5 et 6/Royal Norfolk Rgt) - 54 e Brigade, Brigadier EKW Backhouse (4/Royal Norfolk Rgt, 4 et 5/Suffolk Rgt) - 55 e Brigade, Brigadier JB Coates (1/Bedfordshire & Hertfordshire Rgt et 1,5/Sherwood Foresters Rgt) – Deux brigades d’infanterie britannique, reformées en Angleterre spécialement pour illustrer le soutien de la Métropole aux Colonies : - 137th (Staffordshire) Brigade (South and North Staffordshire Rgt et Prince of Wales’ Own Staffordshire Rgt) - 138th (Lincoln & Leicester) Brigade (Lincoln Rgt et Leicester Rgt) II e Australian Corps (AIF) : Lieutenant-général J. Northcott 8 e Division d’Infanterie australienne (AIF), Major-général H. Gordon Bennett : - 22 e Australian Infantry Brigade [Brigadier H.B. Taylor] - 23 e Australian Infantry Brigade [Brigadier E.F. Lind] - 27 e Australian Infantry Brigade [Brigadier N. Marshall] 1 ère Armoured Division australienne (AIF) [éléments], Major-général H.C.H. Robertson : trois bataillons, les 2/5 e , 2/6 e et 2/7 e Armoured Regiments 7 e Armoured (Queen’s Own) Hussars : “emprunté” à la 7 e Armoured Brigade britannique, dont le gros est resté en Inde. 1 La 17 e Division Indienne vient d’arriver de Birmanie, où elle a été relevée par la 8 e Division Indienne du Major-général Harvey (17 e Brigade Gracey, 18 e Brigade Lochner, 19 e Brigade Ford).

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Appendice 1

Les forces terrestres du Commonwealth défendant la Malaisie et Singapour

Malaya Command : General Officer Commanding, Lieutenant-général Arthur Percival

IIIe Indian Corps : Lieutenant-général Sir Lewis Heath– 9e Division Indienne, Major-général AE Barstow :- 8e Brigade [Brigadier BW Key], - 21e Brigade [Brigadier CJ Weld], - 22e Brigade [Brigadier G Painter]- 88e Field Regiment Royal Artillery– 11e Division Indienne, Major-général DM Murray-Lyon :- 6e Brigade [Brigadier WO Lay], - 15e Brigade [Brigadier KA Garrett], - 28e Brigade (Gurkha) [Brigadier W St-John Carpendale]- 3e Cavalry Regiment- 137e Field Regiment Royal Artillery- 155e Field Regiment Royal Artillery– 17e Division Indienne, Major-général H.V. Lewis :- 44e Brigade (6/1er, 6/14e et 7/8e Punjab Rgts), - 45e Brigade (4/5e Jat Rgt, 5/18e Royal Garwhal Rifles et 7/6e Rajputana Rifles), - 46e Brigade (3/7e Gurkha Rifles, 7/10e Baluch Rgt et 5/17e Dogra Rgt)1

– 18e Division d’Infanterie britannique, Major-général Merton Beckville-Smith :- 53e Brigade, Brigadier CLB Duke (2/Cambridgeshire Rgt, 5 et 6/Royal Norfolk Rgt)- 54e Brigade, Brigadier EKW Backhouse (4/Royal Norfolk Rgt, 4 et 5/Suffolk Rgt)- 55e Brigade, Brigadier JB Coates (1/Bedfordshire & Hertfordshire Rgt et 1,5/SherwoodForesters Rgt)

– Deux brigades d’infanterie britannique, reformées en Angleterre spécialement pour illustrerle soutien de la Métropole aux Colonies :- 137th (Staffordshire) Brigade (South and North Staffordshire Rgt et Prince of Wales’ OwnStaffordshire Rgt)- 138th (Lincoln & Leicester) Brigade (Lincoln Rgt et Leicester Rgt)

IIe Australian Corps (AIF) : Lieutenant-général J. Northcott– 8e Division d’Infanterie australienne (AIF), Major-général H. Gordon Bennett :- 22e Australian Infantry Brigade [Brigadier H.B. Taylor]- 23e Australian Infantry Brigade [Brigadier E.F. Lind]- 27e Australian Infantry Brigade [Brigadier N. Marshall]– 1ère Armoured Division australienne (AIF) [éléments], Major-général H.C.H. Robertson :trois bataillons, les 2/5e, 2/6e et 2/7e Armoured Regiments

– 7e Armoured (Queen’s Own) Hussars : “emprunté” à la 7e Armoured Brigade britannique,dont le gros est resté en Inde.

1 La 17e Division Indienne vient d’arriver de Birmanie, où elle a été relevée par la 8 e Division Indienne duMajor-général Harvey (17e Brigade Gracey, 18e Brigade Lochner, 19e Brigade Ford).

– Forteresse de Singapour, Major-général F.K. Simmons :- 12e Brigade d’Infanterie Indienne, Brigadier Archibald Paris (5/2 e Punjab Rgt, 4/19e

Hyderabad Rgt et 2e Argyll & Sutherland Highlanders)- 1ère Brigade d’Infanterie Malaise (ou 1ère Brigade Malaya), Brigadier G. C. R. Williams(2nd/Loyal Rgt - North Lancashire, 1st/Malay Rgt, 2nd/Malay Rgt)- 2e Brigade d’Infanterie Malaise (ou 2e Brigade Malaya), Brigadier F. H. Fraser(1st/Manchester Rgt, 2nd/Gordon Highlanders, 2nd/17th Dogra Rgt)- Straits Settlements Volunteer Force (SSVF), colonel R.G. Grimwood- Hong Kong and Singapore Royal Artillery (HKSRA)- Troupes d’appui, génie, artillerie de forteresse…

Appendice 2

Le rapport Brooke-Popham (envoyé en Europe par le commandant en chef britannique en Asie du Sud-Est le 10 décembre 1941)

DestinatairesCinC Delhi War CabinetIHQ LondonHQ Algiers

Pour informationGOC IndiaGOC BurmaGOC ANZAC AreaFOC Indo-ChinaFOC French Pacific

La situation en Malaisie au 10 décembre 1941Evaluation rapide d’état-major pour le GOC Malaya

Le major-général Percival (acting lieutenant-général), est l’expert de l’Armée sur la Malaisie.Il a préparé le plus gros de cette évaluation rapide et doit être crédité des préparationsdéfensives qui ont aidé à arrêter les Japonais au nord de Jitra et sur la frontière à l’est de Kroh.

Province de KedahLes premières poussées japonaises sont contenues au nord de Jitra et à l’est de Kroh, sur lafrontière. Sur chacun de ces deux axes, la pénétration en Kedah est d’une force supérieure à ladivision.Du côté de Kroh, l’attaque est confinée par le terrain à un front de deux ou trois bataillons (auplus) contre nos trois bataillons. Les forces qui suivent les premiers assaillants font une cibleparfaite pour l’artillerie et l’aviation, car il n’y a qu’une route étroite avec peu de possibilitésde la quitter et très peu de zones de dispersion en raison du terrain – toutes les routes deMalaisie sont bordées par des fossés (4 à 6 pieds de large, 6 à 8 de profondeur) pour évacuerles eaux de la mousson. A Kroh, l’artillerie est en train de recevoir des renforts, et prend dubon temps contre un aussi merveilleux objectif. Le fait de n’avoir pas plus tôt approuvél’Opération Matador a été compensé localement sous la forme de bunkers et de casematesconstruits à Kroh et Jitra. Ces fortifications montrent à présent leur utilité et garantissent desflancs absolument sûrs.Le combat se déroule bien à l’est de l’endroit où la route de Grik rejoint la route Kroh-Betong. Les défenses sont disposées en profondeur et comprennent des fortificationsconstruites dans les règles sur l’ordre de Percival depuis le début de l’année. Il s’agit surtoutde nids de mitrailleuses et de bunkers pour canons antichars. La zone entre la frontière etKroh et jusqu’à Grik est bien défendue, mesurée par les artilleurs sous tous les angles. LesJaponais ont été arrêtés à la limite de cette zone. Il y a des défenses beaucoup plus solidesavant le croisement routier vital, et d’autres couvrent les localités de Kroh et de Grik elles-mêmes. Ces dernières forment la ligne principale de défense.Les Japonais ont également été arrêtés au nord de Jitra, à la limite de la zone défendue. Celle-ci se trouve dans une vallée encadrée de hauteurs très élevées, très accidentées et couvertesd’une jungle dense. Les défenses sont très similaires à celles de la région Kroh-Grik. La ligne

de défense principale se trouve à environ dix miles au sud de l’endroit où nous avons stoppéla principale poussée japonaise. Elle est extrêmement forte, une ligne de bunkers et casematesderrière un terrain très largement marécageux, avec un excellent couvert pour nos troupes etformations, et très peu pour celles de l’attaquant. Les flancs sont ancrés sur les collines, avecdes positions bien installées, dotées d’un réseau de sentiers pour les soutenir. Ces sentiers ontété tracés par les planteurs de caoutchouc et les chasseurs de tigre locaux et sont pleins desites d’embuscades déjà préparés. La position ne peut être tournée, sauf le long de la voieferrée, à l’ouest des hauteurs. Celle-ci est aussi défendue par des ouvrages fixes entre leshauteurs et le marais côtier, et c’est ce qui se prête le mieux aux manœuvres des tanks enMalaisie. Le sol est ferme, avec des champs d’hévéas et autres, et des rizières à la limite desmarais. Toute tentative de débordement par ce flanc est attendue avec impatience par lesblindés australiens, qui ont reçu des Français de nombreuses informations sur les aptitudes deschars japonais.

Qualité des troupes en présence– Les Japonais ont démontré qu’ils étaient des adversaires de première classe, biensupérieurs aux Italiens2 et à égalité avec les meilleures troupes allemandes. Dès les premierscontacts, leur infanterie s’est montrée solide et très disciplinée, bien entraînée et bien armée.Leurs chars sont à la fois de médiocre qualité et mal utilisés. Ils coordonnent assez bien leursefforts avec ceux de leur infanterie, mais il est évident qu’ils n’ont combattu que desadversaires manquant de blindés et de toute arme antichar.L’artillerie britannique a prouvé sa supériorité sur celle des Japonais. Leurs capacités decontre-batterie sont très faibles et ils épuisent rapidement leurs munitions. Leur utilisation desmortiers est en revanche impressionnante. Ils sont capables de mettre en œuvre très en avantdes mortiers légers mais efficaces, et cela s’est fait sentir sur le front.Les combats en Chine n’ont pas préparé les Japonais à combattre une armée dotée de chars debonne qualité et d’une artillerie nombreuse. Ce fait est compensé par les qualités d’uneinfanterie très expérimentée, avec une indifférence dédaigneuse pour ses pertes. Soncomportement est cependant barbare. Les réfugiés du nord du Perlis ont rapporté denombreux massacres, visant notamment les Chinois, mais un comportement brutal quelle quesoit la race apparaît standard. De tels récits sont d’habitude à ignorer, mais nous avons vuarriver de nombreux survivants portant des blessures faites par des baïonnettes, et nos agentssur place ont confirmé certains massacres sur des témoignages oculaires et, dans deux cas, surles preuves photographiques d’actes véritablement révoltants. Ces méfaits ont un avantage : làoù ces histoires se répandent, il nous est plus facile d’obtenir l’aide des indigènes pour réaliserdes ouvrages de défense. Les clans chinois sont en particulier bien plus coopérants.Le FECB m’a demandé de donner des ordres pour faire le plus possible de prisonniers. Lesquelques-uns que nous avons faits jusqu’ici n’ont apparemment jamais reçu d’instructions surce qu’ils devaient faire en cas de capture. Ils disent à nos hommes du renseignement tout cequ’ils savent. C’est d’une très grande valeur ; après interrogatoire, ils seront envoyés à Delhipour une exploitation plus en profondeur.– Nos troupes ont un moral élevé. Elles ont stoppé net les attaques japonaises, quoique lespertes aient été sévères dans certaines unités, en particulier dans quelques unités d’infanterieengagées dans des combats très intenses et dans la compagnie blindée équipée d’A-10, sur lafrontière devant Kroh. Il est encore difficile de préciser comment les chars ont été perdus,alors qu’ils opéraient en défense, en coopération avec l’infanterie et les fortifications. Seloncertaines informations, des “équipes suicides” utilisant des charges de démolition sontresponsables d’au moins une partie de nos pertes.

2 NDE – Rappelons que l’Air Marshal Brooke-Popham n’a pas participé à la campagne d’Afrique Orientale.

Les blindés jouent un rôle clé en Malaisie comme en Indochine française. Les Japonais n’ontpas grand-chose à opposer au Valentine et rien au Matilda. Il est important de nous envoyer denouveaux renforts avec des chars d’infanterie solidement blindés. Les Français ont rapportéque les chars légers peu blindés sont très vulnérables aux tactiques d’embuscade japonaise enterrain clos, mais que leur char moyen Sav-41 est pratiquement invulnérable aux canonsantichars et aux chars japonais. Cela confirme nos premières expériences à Kroh et Jitra.Néanmoins, je demande aussi que le plus possible de chars légers Tetrarch armés d’un 2pdrnous soient envoyés. Ils ont une faible pression au sol et sont assez légers pour utiliser mêmeles ponts kampung. Ils seront très utiles pour contrer les très légères tankettes japonaisesopérant avec leur infanterie dans les zones marécageuses et les rizières. Ces tankettes n’ontque des mitrailleuses. Mes Mk VI peuvent s’en occuper, mais sont très vulnérables aux fusilsantichars japonais. Le Tetrarch est à l’épreuve de ces armes et conserve même une chancecontre le canon antichar japonais de 37 mm.

La situation aérienneUn facteur important pour le moral a été la présence de la RAF et de la RAAF au-dessus duchamp de bataille. Leurs pertes ont été extrêmement lourdes et les Japonais commencent à lesrepousser vers le sud en multipliant les attaques contre les terrains du Kedah, mais leurprésence est pourtant essentielle. La cause de ces pertes n’est pas encore pleinement éclaircie.Trop d’avions ont été détruits au sol en raison d’un manque de zones de dispersion et d’unemédiocre protection. Ces problèmes sont en train d’être résolus sur tous les terrains, sauf surcelui d’Alor Sétar, où l’état du sol et la petite taille de la base l’interdisent.Nos forces aériennes ont un besoin critique de renforts. Les avions de réserve étaient trop peunombreux et ont été rapidement épuisés. Le besoin en pilotes ayant l’expérience du combatest encore plus aigu. Les pilotes de l’EATS sont courageux mais peu entraînés. Rares sontceux qui survivent au premier combat tournoyant avec les chasseurs japonais. Il est visible, àvoir les premiers pilotes japonais capturés, qu’il s’agit de vétérans ayant une grandeexpérience du combat. Pulford a noté que nos squadrons commencent à changer de tactiquepour exploiter la plus grande vitesse du Hurricane contre les chasseurs japonais. Il devient eneffet apparent que ceux-ci sont un peu plus lents que les Hurricane, mais beaucoup plusmanœuvrables.J’ai exprimé à l’AVM Pulford ma préoccupation devant l’aptitude des Japonais à attaquer nosterrains et à détruire nos avions au sol malgré notre couverture radar, alors que nous semblonsincapables de leur en faire autant bien que, selon le FECB, ils n’aient pas de radars. Pulfordm’a affirmé que lui et son équipe travaillent énergiquement là-dessus. Il m’a aussi indiquéqu’il y avait quelque chose de très inhabituel dans la succession des attaques japonaises surButterworth. Il l’étudie avec le FECB. Il est probable qu’il existe un réseau d’agents japonaisdans la région. Le FECB a commencé à s’en prendre aux agents japonais à Singapour et àJohore, avec un succès déjà considérable.Pulford m’a aussi conseillé de demander des pilotes expérimentés pour entraîner les pilotes del’EATS et des renforts urgents et substantiels pour tous les types d’avions utilisés ici.– Il nous faut deux nouveaux squadrons de chasseurs bimoteurs à long rayon d’actionBeaufighter. Ces appareils sont essentiels pour escorter nos bombardiers à longue distance etmener des attaques surprises à basse altitude sur les terrains japonais, pour détruire leursavions au sol. Les deux squadrons de Beaufighter actuellement disponibles ici appartiennentau Coastal Command et sont assignés à des missions essentielles d’appui de la flotte. – Nos Spitfire sont conservés au sud pour couvrir les terrains des bombardiers dans le sud (deYong Peng à Mersing) et pour protéger la flotte. Il nous en faudrait davantage.

– Nous avons un besoin critique de Hurribombers pour remplacer les Fairey Battle et lesBristol Blenheim I. Les Battle et les Blenheim ne peuvent survivre de jour au milieu deschasseurs japonais, en dépit des bons résultats qu’ils ont obtenus jusqu’ici.

Province de KelantanJusqu’à présent, aucune offensive majeure n’a été lancée au Kelantan. Nous nous y attendonscependant d’un moment à l’autre. Là encore, la région dispose de défenses le long de la côteet le long du Sungei Kelantan. La base aérienne de Machang est très bien couverte par unezone défendue semblable à celles qui couvrent efficacement Kroh, Grik et Jitra.

Province de PenangConserver le Penang est vital tant pour la défense du Kedah que pour les importations de riznécessaire à nourrir la population civile. Il est évident que les Japonais le savent, car lePenang est violemment attaqué par voie aérienne. Ces attaques sont pour le momenttolérables, car tant qu’ils bombardent le Penang, ils laissent tranquilles les ports du Perak etdu Détroit de Malacca. Cependant, il est important de renforcer la défense anti-aérienne duPenang, pour que l’ennemi doive payer pour ses attaques. Cette défense est liée à celle duKedah, j’en ai déjà parlé.Par ailleurs, nous avons déjà pris des dispositions avec les Hollandais pour l’utilisation desaérodromes de Sumatra. Des arrangements sont en cours pour commencer à préparer cesterrains en y transférant des unités terrestres. En effet, les défenses hollandaises de Sumatrasont lamentablement inadaptées.

Iles Andaman, Nicobar et SabangCes régions sont d’une importance vitale pour l’accès au Penang et le contrôle des approchesdu Détroit de Malacca. Elles doivent être tenues mais n’ont qu’un seul terrain, à Sabang. Leterrain de la Pointe Victoria, en Birmanie, n’est qu’à une courte distance de la frontière thaïeet sera sous peu aux mains des Japonais, car il est indéfendable. C’est notre terrain de transitpour les monomoteurs venant de l’Inde par la Birmanie. Les Andaman, Nicobar et Sabang ont une garnison d’une compagnie renforcée, mais c’estinsuffisant. Des renforts sont prévus, mais sont eux aussi insuffisants. Une telle garnisonpourrait être débordée par un bataillon de parachutistes japonais. Il est si urgent de lesrenforcer que j’ai ordonné que deux compagnies de vieux chars Mark VI (avec des équipagesde fortune) et deux compagnies indiennes soient envoyées de Singapour même. Ces troupesseront divisées entre Car Nicobar et Port Blair, ce dernier devant être renforcé d’abord. Mêmeces quelques chars dépassés renforceront de façon considérable la défense des îles contre desparachutistes, car ceux-ci n’ont aucune arme antichar, en dehors peut-être de quelques fusilsantichars.La construction de terrains à Port Blair et Car Nicobar est urgente et essentielle. Mais nousn’avons aucune ressource en Malaisie ou à Singapour à y consacrer, même les ouvriers sonten nombre insuffisant. L’AVM Pulford a indiqué que la construction de ces terrainsdemanderait deux à trois mois pour qu’ils soient opérationnels, qu’ils devraient disposerd’une garnison suffisante et d’une protection aérienne dès le début et que le contrôle aériendes approches du Détroit de Malacca est capital. Il a proposé les mesures suivantes, àconsidérer d’urgence :- envoi immédiat d’unités de garnison et de construction d’aérodromes à Port Blair et CarNicobar.- installation immédiate de flottilles d’hydravions à Port Blair.- envoi immédiat du HMS Albatross, avec 3 Walrus, à Port Blair (les 6 autres Walrus resterontà Penang pour patrouilles côtière et ASM et harcèlement nocturne).

- envoi immédiat des HMS Athene et Engadine rejoindre l’Albatross à Port Blair avec lesquelques hydravions Spitfire (type 355) disponibles et tous les hydravions légers debombardement disponibles (il pense à des modèles modernes et rapides de Northrop, mais àdéfaut, des hydravions Swordfish sont disponibles). Il sera ainsi possible de disposer d’uneforce aérienne d’urgence pour couvrir la zone pendant la construction des terrains.- transfert immédiat de deux squadrons de Saro Lerwick à Port Blair, pour protection à longrayon d’action du trafic naval et éventuelle utilisation comme bombardiers.- installation immédiate d’une unité mobile de radar et d’un SADOC transportable à PortBlair pour diriger les chasseurs.L’AVM Pulford reconnaît que cette installation d’une flottille d’hydravions modernes pourcouvrir la construction du port et du terrain et lutter contre une attaque de parachutistes est unnouveau concept, mais non moins nécessaire. Il reconnaît aussi que le Lerwick n’est pas unappareil très efficace en Europe, mais cela le rend d’autant plus disponible sans compromettrela défense des Iles Britanniques, et l’avion trouvera à Port Blair un climat qui lui sera bienplus favorable. Enfin, c’est le CO du squadron de Spitfire de Singapour qui l’a informé sur leSpitfire hydravion, dont il a essayé un exemplaire.Je soutiens pleinement cette requête.

La situation navaleDu point de vue naval, le HMS Hermes ne peut être renfloué sans détourner les ressourceslocales de tâches plus importantes. Le HMS Ramillies est trop gravement endommagé pourêtre réparé sur place sans absorber trop de ressources et sera simplement remis en état denaviguer, puis envoyé outre-mer pour y être réparé. Ses munitions de 15 pouces et quelques-uns de ses canons anti-aériens seront auparavant prélevés pour être utilisés sur place. Labonne nouvelle est que, lorsque vous lirez ce rapport, le chantier naval de Singapour auraremis le HMS Rodney en état de combattre.Le vice-amiral Phillips fait cependant remarquer qu’il a perdu un porte-avions (le Hermes),qu’il fait face à une force supérieure en nombre, et que la situation ne fera que s’aggraver. LeFECB confirme cette analyse. Pour l’instant, l’existence même de la Flotte empêche lesJaponais de faire passer des convois vers la Thaïlande pour renforcer leur armée. Phillips ademandé à l’Amirauté des renforts aéronavals et un remplaçant pour le Ramillies. Il s’attend àde durs combats, et pour bientôt. Il pense que les Français se sont bien comportés contre lesJaponais dans la récente bataille du Golfe du Tonkin. En dépit de leur bravoure bien connue,la performance des Américains a été médiocre, probablement du fait que tous leurs naviresétaient d’un type dépassé.

ConclusionGlobalement, la situation est sérieuse, mais nous semblons capables de retenir les Japonais surla frontière ou à proximité, quoique je sois inquiet à propos du Kelantan. Nos ennemis n’ontmontré aucune capacité inhabituelle, mais ce sont des adversaires de première classe.La 12e Division Africaine est-elle disponible ? Ils sont bien reposés depuis la Campagned’Ethiopie, et des troupes expérimentées seraient les bienvenues sur ce théâtre d’opérations(voir là-dessus le Rapport Complémentaire).La situation aérienne exige l’attention la plus urgente.Mais au bout du compte, tout dépend des capacités de la Flotte à garder le contrôle du Golfede Siam et à empêcher les Japonais de renforcer la Thaïlande (voir les propositions duRapport Complémentaire).

(signé)Air Marshal Sir Robert Brooke-Popham, G.O.C. Far East Command

Rapport stratégique des Etats-Majors des Services combinésD’après la réunion commune des Etats-Majors des Services tenue à la Base Navale de Singapour le 10 décembre 1941.Pièce jointe au Résumé du Journal de Guerre, Recommandations et Appréciation rassemblées pour le Commandement en Malaisie par le Lt-Général (faisant fonction) A.E. Percival, au nom de l’Air Marshal Sir Brooke-Popham, G.O.C. Far East Command.

Ce rapport est basé sur la supposition que les rapports sur les dommages subis par l’US Navyà Pearl Harbor et par l’USAAC à Pearl Harbor et aux Philippines sont exacts.

1 – Avec la neutralisation de la Pacific Fleet, il faut considérer que ce n’est qu’une question detemps avant que la suprématie navale sur les mers autour de la Barrière Malaise passe auxJaponais. Il serait déraisonnable et stratégiquement malsain de considérer que l’Eastern Fleetpuisse redresser la situation à court terme face à la puissante Flotte Principale japonaise.

2 – Si le point 1 est accepté, le présupposé pour la défense de Singapour qui voit dans la basenavale la pièce maîtresse de la Barrière Malaise couvrant les sorties de l’Océan Indien et lesapproches de l’Australie est maintenant à revoir. Si la stratégie de la Barrière Malaise n’estplus réalisable, Singapour doit être considérée comme un puissant avant-poste défensif de laBirmanie. La perte de la Birmanie, en dehors de la perte du pétrole, du bois et de l’étain, seraitdésastreuse, car la famine pourrait être provoquée au Bengale par la perte du riz birman. C’estdonc le Détroit de Malacca et non le Détroit de la Sonde qui sera la voie maritime clé.Sumatra devra remplacer Java comme l’extension clé du système de défense de Singapour. Lachaîne d’îles avec bases aériennes à défendre courra vers le nord à partir de Sumatra et nonvers l’est à partir de Java, comme prévu auparavant. Ainsi, la défense à long terme de Medan,sur la côte est de Sumatra, devient vitale en raison de son port, de son aérodrome et, surtout,de sa raffinerie de pétrole pour le ravitaillement en essence d’aviation. La défense dePalembang est importante pour les mêmes raisons, mais la probabilité que cette défense soitpossible une fois Java tombée est très réduite.

3 – Le moyen le plus efficace et les plus rapide de consolider la défense de la Malaisie, deSumatra et de Java est l’arrivée immédiate d’un grand nombre de chasseurs modernes et debombardiers anti-navires. De plus, des garnisons seront requises pour Sumatra et les îlesassociées, car les forces hollandaises sont entièrement inadéquates.

4 – Si les points 1 et 2 sont corrects, alors les forces disponibles pour la défense de Johoresont inadaptées. Si des renforts terrestres nombreux et de qualité n’arrivent pas promptement,une réévaluation complète de la défense de la Malaisie et de Singapour sera nécessaire. Lesforces actuelles sur la côte est reposent sur l’estimation que les Japonais devraient débarquerdans un environnement maritime contesté. Une grande partie de nos forces en Malaisie, sous-entraînées, sous-équipées et peu mobiles, ne sont adaptées qu’à des opérations défensives.L’exigence d’une prompte clarification des priorités stratégiques est vitale. Cela ne concernepas seulement le déploiement des forces de Sa Majesté, mais aussi de possibles difficultésimpliquant les Gouvernements des Etats-Unis d’Amérique (au nom de la Communauté desPhilippines), de l’Indonésie Hollandaise et de l’Australie. Il faut accepter de considérer lesforces déjà promises aux Hollandais et aux Australiens pour la défense de la Barrière Malaisecomme une mise initiale sacrifiée, le prix diplomatique d’un changement de stratégie.

(signé) Contre-amiral Palliser – Major-général Percival (f.f. de Lt-Gén.) – Air Vice-Marshall Pulford

Appendice 3

Le rapport Decoux (envoyé en Europe par le Haut-Commissaire en Indochine le 12 décembre 1941)

URGENT

A : M. le Ministre de la Guerre, Vice-Président du Comité de Défense Nationale, Général Charles de Gaulle.De : Amiral Decoux, Haut-Commissaire en Indochine.

12 décembre 1941, 19h00, heure locale

Voici ma plus récente évaluation de la situation de nos forces en Indochine. Cette évaluation aété effectuée après une réunion à laquelle ont participé :le Général Martin, commandant opérationnel de l’Armée de Terrele Colonel Schlesser, commandant délégué pour le Cambodge et la Cochinchine le Colonel Devèze, commandant les forces de l’Armée de l’Air

(1) Au sol, la bataille se développe sur quatre fronts différents, soumettant aux plusextrêmes contraintes nos capacités à réagir aux initiatives ennemies.(a) Au Tonkin, la bataille se poursuit sur la frontière. A ce jour, nos troupes se sont montrécapables de retarder significativement l’ennemi. L’offensive japonaise a été arrêtée à LangSon. Les pertes des attaquants ont été extrêmement lourdes et une partie de l’artillerie àlongue portée des Japonais a été détruite par l’aviation. Cependant, le potentiel de combat deséléments de la Légion Etrangère engagés à Lang Son commence à s’épuiser. En raison de lamenace pesant sur la route côtière, il est impossible de lancer nos dernières réserves dans cettebataille. La perte de Cao Bang, si elle est localement notable, ne menace pas pour le momentla frontière nord-est, car le DMT s’est opposé avec succès à l’avance ennemie à Bac Can. Lamobilisation des forces locales doit être accélérée, mais le manque d’artillerie de campagne eten particulier de canons de 75 mm limite de façon très gênante le potentiel de combat de nosforces. En revanche, les stocks de munition n’ont pas été notablement réduits jusqu’à présent.Enfin, les bombardiers légers ont apporté depuis le premier jour une contribution importante àla bataille terrestre. Cependant, leur attrition est marquée. (b) La principale zone menacée a jusqu’à ces dernières heures été le Cambodge, oùl’ennemi exerce une forte poussée sur les deux rives du lac Tonlé Sap. Le GBMS a remportéde grands succès et a pu arrêter l’attaque de l’équivalent d’une division renforcée autour deSiem Réap. Les unités blindées japonaises ont été engagées à plusieurs reprises, mais leschars Type-95 ou 97 ont été incapables de faire face à notre Sav-41. Cependant, le manqued’artillerie a obligé nos troupes à évacuer la ville et à établir une seconde ligne défensive à 12km de Siem Réap. Les pertes civiles ont été très élevées dans la ville, créant chez lapopulation un profond sentiment anti-japonais.(c) La bataille dans le Sud-Laos a été livrée pour l’essentiel par nos forces territoriales etnos garde-frontières. Paksé a dû être évacuée mais, grâce au soutien de la DINAZO, lestroupes nippo-thaïlandaises sont maintenant enfermées dans cette ville et incapables deprogresser vers Phnom-Penh. Une nouvelle poussée vers Savannakhet est à prévoir. Nosforces n’ayant pas la capacité de défendre l’ensemble de la région, nous avons l’intention decréer une forte position défensive autour de Saravane et des Bolovens.(d) La situation la plus difficile a été créée par le débarquement japonais à Tourane. Lesmouvements ennemis vers Hué ont été arrêtés. Cependant, en dehors de l’équivalent d’unbataillon en sous-effectif, la route côtière vers le sud n’est pas défendue. Nous espérons

pouvoir utiliser des unités territoriales créées dans la région de Saigon pour établir unenouvelle ligne de défense à 10 km au nord de Cam Ranh. A la suite des violentsbombardements de nos installations navales, la base de Cam Ranh n’a plus de réel intérêt pournos unités de surface. Elle reste cependant importante pour nos sous-marins.

(2) La bataille pour le contrôle de l’espace aérien indochinois est marquée par uneconsidérable asymétrie entre la Cochinchine et le Tonkin. (a) Au Tonkin, la combinaison de l’American Volunteer Group et de nos deux GB a jusqu’iciempêché l’ennemi d’affirmer sa supériorité dans les airs. Son activité aérienne a été trèsréduite ces dernières 24 heures et nos bombardiers ont pu effectuer des attaques aériennescontinues contre les forces terrestres japonaises. Néanmoins, le délégué du général C.L.Chennault m’a appris que l’AVG ne dispose plus que de 63 avions, dont seulement 51 en étatde vol. Nous ne possédons plus que 31 bombardiers Martin, dont 27 “bons de guerre”. LesPotez 63/11 et les Wirraway australiens souffrent considérablement des tirs de la DCA légère.Même si les avions parviennent à rentrer après leurs missions, les réparations limitentbeaucoup la cadence de leurs activités. Par ailleurs, le général Chennault m’a averti que les forces japonaises pourraient être en traind’introduire un nouveau chasseur, probablement d’origine allemande. Cet avion, doté d’unmoteur en étoile, semble être le même que celui que la RAF rencontre depuis le mois denovembre au-dessus de la Manche.(b) En Cochinchine, les Curtiss Hawk-75 ont beaucoup souffert du rythme très élevé desopérations ennemies. Nous ne disposons plus que de 41 avions en état de vol, dont 28 basés àPhnom-Penh. Le squadron de chasse de la RAF opérant de Tan-Son-Nhut n’a plus que 11Hurricane. Si l’ennemi transfère davantage d’avions de combat sur le terrain de Tourane, lasituation aérienne en Cochinchine va devenir très difficile. Le Hawk-75 est incapable decombattre le nouveau chasseur de la Marine japonaise d’égal à égal. Son rendement est bienmeilleur face aux chasseurs de l’Armée japonaise.(c) Au Laos, les opérations aériennes sont plus équilibrées. Nos patrouilles de protectiontiennent en respect l’aviation thaï, qui semble être notre principal adversaire sur ce théâtre.

(3) Le moral de nos troupes et de la population civile est bon. Les hommes savent qu’ilsaffrontent un ennemi dangereux, mais ne le surestiment pas. Les colonnes blindées japonaisesont été jusqu’ici aisément repoussées. L’infanterie japonaise est bonne, mais l’organisation deses attaques est prévisible. La population locale a été choquée par les attaques aériennesjaponaises contre Phnom-Penh, Siem Réap et Saigon. Après quelques mouvements depanique, est apparue de la colère contre les Japonais. La population européenne soutientadmirablement nos forces.

(4) Au total, en dépit de nos premiers succès défensifs, il semble douteux que nous puissionsdéfendre la Cochinchine.La situation au Tonkin pourrait être stabilisée si des troupes chinoises nous étaient envoyéesde Kunming. La voie ferrée est encore ouverte et opérationnelle. Une division et une brigaded’artillerie devraient suffire pour nous aider à stabiliser le front sur la frontière nord-est et àdégager des réserves pour une contre-offensive en Annam, de Hué vers Tourane.Des renforts aériens en Cochinchine seraient essentiels pour espérer une stabilisation danscette région. Sans couverture aérienne, la DINAZO pourrait être incapable d’empêcherl’ennemi de traverser le Mékong, une fois épuisées les forces du GBMS.

(signé)Amiral Decoux

Appendice 4

Les rapports Barstow (14 décembre 1941)

Rapport sur la situation à Kuantan à 04h30, 14 décembre 1941

A : Air Marshal Brooke-Popham, G.O.C. Far East Command

Les 15e et 22e Brigades Indiennes n’ont rapporté aucune activité ennemie. Nos forces sont maintenant déployées pour défendre le terrain de la RAF contre les attaquespar mer ou par air. Comme notre force aérienne paraît diminuer, le déploiement de nos forcesterrestres, destiné à protéger la base pour pouvoir l’utiliser, ne devrait-il pas être ajusté au butd’empêcher son utilisation par l’ennemi ? En effet, défendre la base pour en conserver l’usageentraînerait un grave risque d’encerclement de l’ensemble de la 9 e Division, pour un gainminime, étant donné la faiblesse de nos forces aériennes. Même un déploiement simplementdestiné à interdire la base aérienne à l’ennemi pourrait être très dangereux.Notre position exige que nous soyons avertis de l’approche ennemie afin d’ajuster notredéploiement pour faire face à la menace. Nous avons une ligne de postes de veille au nord etau sud, mais en mer et, idéalement, le long de la route de la côte nord, des reconnaissancesaériennes sont nécessaires.Je pose ces questions car, comme vous le savez, les communications de la division passent parune unique route exigeant la traversée d’au moins un fleuve important par un lent ferry pourvéhicules (ou punt). Les unités déployées du côté nord de Kuantan ont aussi une rivière àtraverser, également par un punt.

Votre dévoué serviteur,Major Général A.E. Barstow, G.O.C. 9e Division Indienne

………

Rapport sur la situation à Kota Bharu à 04h30, 14 décembre 1941

A : Air Marshal Brooke-Popham, G.O.C. Far East Command

Les 13e et 16e Brigades Indiennes n’ont rapporté aucune activité ennemie. Ce fut une grandeet heureuse surprise, mais je ne pense pas que ce sera bien longtemps le cas, car je soupçonneles Japonais de nous préparer un mauvais coup.Le programme d’interdiction a été effectivement mené à bien à Kota Bharu. Les installationsportuaires et ferroviaires ont été complètement détruites. Le Sultan, sa famille, les membresdu gouvernement local et leurs familles, ainsi que les familles des Volontaires de Kelantan etde Tengganu ont déjà été évacués. De nombreux civils de toutes races sont eux aussi déjàpartis par le train, y compris les non-combattants de la communauté européenne. Leurévacuation était nécessaire de crainte que les Japonais n’exercent des représailles sur eux enraison de leur collaboration au programme d’interdiction dans les plantations et à d’autrestravaux. Le contenu de quelques entrepôts de la RAF a aussi été envoyé au sud. Toutes lesunités ont été réduites à leur personnel combattant et tous les non-combattants de la garnisonont été évacués avec les équipes de la RAF en surplus.A moins que la situation stratégique ne l’exige, je recommande le retrait de la brigade de KotaBharu à Machang. Comme les deux ponts de chemin de fer à partir de la frontière thaïlandaise

ont été détruits, la brigade de défense de la frontière devrait aussi se replier sur Machang. Si ladéfense de Machang reste d’importance vitale, il faut tenir la ville en force. Sinon, mieux vautnous replier maintenant et non lorsque nous serons attaqués, car le mouvement de repli nepourra se faire que par un chemin de fer à voie unique, grâce à des relais de train et enutilisant, là où elles existent, des voies secondaires d’entretien. Je crains que même dans descirconstances favorables, nos pertes en matériel et équipement soient élevées. Ce qui peut nous sauver est le fait que les Japonais, pour des raisons logistiques, auront besoinde la voie ferrée dans un aussi bon état que possible. Donc, si nous endommageons la lignesuffisamment pour retarder la poursuite, mais sans la dévaster, leurs bombardements sur notrevoie de retraite seront très limités. En revanche, s’ils constatent que, de toute façon, nous nouspréparons à rendre la ligne irréparable, ils ne restreindront pas leurs bombardements. Lesnuages, la pluie et le tracé de la voie dans des vallées encaissées au milieu des montagnesseront notre seule défense contre la coupure de la ligne. Si celle-ci est inutilisable, ce sera unetrès longue marche à pied et à dos de mule. Pour parer à toute éventualité, nous avonsdissimulé des dépôts de ravitaillement pour que nos forces restent opérationnelles, mais enl’absence de trains, la marche prendra des semaines et nos pertes en hommes seront élevées.

Votre dévoué serviteur, Major Général A.E. Barstow, G.O.C. 9e Division Indienne

Appendice 5

Le rapport du contre-amiral Spooner (16 décembre)

A : Gouverneur Sir Shenton Thomas Air Marshal Brooke-Popham, G.O.C. Far East CommandAmiral Sir Thomas Phillips

Le flux de réfugiés arrivant par la chaussée qui relie la Malaisie à l’île de Singapour augmentequotidiennement. Pour l’instant, ce n’est qu’un petit ruisseau, mais je crains qu’il ne deviennebientôt une marée. Les derniers raids sur Kuala-Lumpur ont été particulièrement destructeurset les réfugiés se dirigeant vers le sud sont devenus assez nombreux pour gêner par momentsles mouvements de troupes.Pour l’instant, les autorités civiles se contentent de laisser les gens acheter leurs propresbillets aux compagnies de navigation s’ils désirent quitter Singapour. Mais je crains que ceproblème ne devienne très vite important. Transporter, loger et nourrir une grande masse deréfugiés pourrait causer des problèmes de communications et de ressources aux autoritésciviles et militaires de l’Ile.Je recommande que toutes les familles des personnels civils et militaires dont la présence neserait pas nécessaire au service soient évacuées. De même pour ce qui est des familles despersonnes dont l’efficacité serait améliorée par le fait de savoir que leurs proches sont ensécurité, par exemple les volontaires locaux, les personnalités pro-britanniques et toute autrepersonne concernée. En effet, certaines personnes quittent déjà leur travail après chaque raidaérien pour aller s’assurer que leurs familles vont bien. Bien entendu, nous ne pouvons nouspermettre de laisser paraître une quelconque préférence raciale ; chaque bateau devrait doncemmener des passagers d’origines sociales et ethniques diverses.Je propose que l’évacuation soit conduite à la capacité maximale de tous les navires quittantSingapour ; l’achat de l’ensemble des billets et leur distribution par le gouvernement devraitêtre la méthode préférentielle, et non l’achat individuel de ces billets.Beaucoup d’Européens, notamment, donnent un mauvais exemple aux Asiatiques, enconsidérant qu’on travaille comme d’habitude et qu’il n’y a rien d’autre à faire que de laisserles militaires “montrer aux Japs de quel bois on se chauffe” avant de retourner au pays fairede l’argent. Je crains que cette impression de tranquillité et de sécurité que nous avons surl’Ile ne devienne la cause d’un problème majeur.Par ailleurs, les entrepôts de Keppell Harbour et les Bond Stores contiennent d’énormesquantités de produits de luxe, dont du whisky et du tabac. Ces biens devraient être saisis etexportés pour aider à payer le coût de l’évacuation et, ce qui est plus important, pour libérerun espace de stockage vital pour améliorer l’efficacité du port. Nous devons aussi exportertout le caoutchouc, l’étain, etc. que nous avons entreposés, car les bombardements etl’encombrement du port peuvent nous en empêcher par la suite. Il faut aussi dégager le portpour accélérer le déchargement rapide et la rotation des bateaux car, si l’on en juge par latendance actuelle, l’aviation japonaise va tenter d’empêcher le débarquement des renforts etdu ravitaillement militaire à leur arrivée.

J’ai l’honneur d’être votre dévoué serviteur, Contre-amiral SpoonerOfficier Général de la Base Navale de Singapour et des Défenses locales

Appendice 6

Le désastre de l’Escadre du Détroit de Malacca… vu par les Japonais

De : Service “Y”, Singapour19 décembre 1941, 11h30 (heure de Singapour)

Trafic radio décodé d’une base aérienne japonaise en Thaïlande au GQG Navalà Tokyo et aux commandants de Flotte. Traduit du japonais, circonlocutionsfleuries et romantiques supprimées et conversion des dates Showa.

Accès : Restreint – Secret maximal ULTRA

Rapport sur les attaques aériennes menées contre la flotte britannique le 17 décembre 1941, dans l’après-midi

Repérage de deux cuirassés, trois croiseurs et quatre destroyers.

Première attaque, 14h15 : 1 impact de bombe sur un cuirassé.

Deuxième attaque, 16h50 : 6 impacts de bombe sur le Repulse, un croiseurcoulé par trois bombes, trois destroyers coulés par des bombes.A la fin de cette attaque, l’ennemi apparaît en deux formations. Lapremière se dirige vers le sud-ouest à 20 nœuds et comprend un cuirassé etdeux destroyers. Ces vaisseaux semblent intacts. La seconde formation sedirige vers le nord à 24 nœuds, avec un cuirassé endommagé, en feu, uncroiseur et un destroyer émettant un rideau de fumée.De l’examen des vitesses, caps et positions indiqués, on peut déduire quela force britannique, certainement en mission de bombardement côtier,comportait un vieux cuirassé de classe Revenge et le Repulse, avec descroiseurs et des destroyers en soutien. Après que cette force ait étéfortement attaquée et que tout espoir de surprise ait été perdu, lecommandant britannique a ordonné au cuirassé lent de se retirer, pendantqu’il poursuivait sa mission avec le croiseur de bataille rapide Repulse.L’identification du Repulse a été confirmée par une photo montrant sesgrands mâts tripodes et ses deux cheminées. L’important incendie visibleprès de ses cheminées semble indiquer que son hangar d’aviation a pris feu.L’incendie est alimenté par l’essence d’aviation et par les munitions descanons anti-aériens placés sur le toit du hangar. Un autre incendie brûlesur la plage arrière, alimenté par le poste d’équipage en dessous.

Troisième attaque, 18h05 : le Repulse est repéré cap au nord-est, filant 27nœuds, escorté par un destroyer. Le Repulse a éteint ses incendies etmanœuvre facilement. Il est touché par deux torpilles et est vu perdant dela vitesse. Alors qu’une nouvelle attaque se prépare, un hydravion depatrouille signale qu’il est stoppé et ne semble pas sombrer, mais quel’équipage abandonne le navire. Des patrouilles aériennes de nuit lançantdes fusées éclairantes n’ont pas pu le retrouver, mais ont repéré destaches huileuses sur l’eau, des épaves flottantes et des centaines d’hommesdans des bateaux de sauvetage, sur des radeaux et dans l’eau. On ne peutque supposer que les six bombes avaient créé assez de dommages internespour que les deux torpilles suffisent à le couler. Même ainsi, il a misdeux ou trois heures pour sombrer.

(Signé)(Nom incompréhensible)Commandant de la (??) Flottille Aérienne de la Marine Impériale

Appendice 7Rapport aux Lords Commissaires de l’Amirauté sur la perte des vaisseaux de Sa Majesté Frobisher, Hawkins, Despatch, Cattistock et Holderness au large de Penang, le 17 décembre 1941 [extraits]

Résumé d’une session de Cour MartialeComme c’est la coutume du service, tous les commandants ayant perdu leur navire sontpassés en cour martiale. La cour a estimé qu’aucune action n’était requise contre eux etqu’aucune faute n’était retenue contre les équipages ou les bâtiments. La cour a félicité lesofficiers, les hommes et leurs commandants pour leur persévérance et leur belle conduite dansdes circonstances exigeantes et éprouvantes. Aucune observation n’a été faite au contre-amiralCrace. La cour a considéré que les coups reçus se situaient dans le cadre des hasards de laguerre et pouvaient être considérés comme une succession de malchances provoquées parl’habileté apparemment exceptionnelle des pilotes ennemis. La cour était plus intéressée etpréoccupée par les dommages dus aux coups et par la facilité apparente avec laquelle lesnavires avaient coulé.

Liste des Annexes à venirAnnexe A : liste des officiers et matelots dont les actions méritent d’être particulièrement relevées.Plusieurs hommes, survivants ou tués, ont déjà été recommandés à Vos Seigneuries pour qu’Ellesdemandent à Sa Majesté le Roi de les citer et de les décorer. Annexe B : liste des pertes subies par les équipages.Annexe C : liste des recommandations techniques (réunie par le Superintendant du Chantier Naval, lesresponsables mécaniciens et les officiers opérationnels de la Flotte et par l’état-major de la Flotte) pourun meilleur fonctionnement des navires de Sa Majesté.Annexe D : commentaires concernant l’intervention d’une tierce partie haut placée à Londres dans ledéploiement quotidien des navires de Sa Majesté, allant à l’encontre du jugement de la Flotte et descommandants sur le terrain.

L’action du 17 décembre 1941 (note : heures locales de Singapour)Après avoir échoué à établir le contact avec l’ennemi dans la nuit du 16 au 17, l’escadrecommandée par le contre-amiral Crace, constituée des croiseurs lourds anciens Frobisher(amiral) et Hawkins, des croiseurs légers anciens Danae et Despatch, et des destroyersd’escorte (classe Hunt) Atherstone, Cattistock, Garth e t Holderness, se dirigeait versSingapour à 24 nœuds quand Crace reçut un ordre direct de Londres de se porter au secoursde l’Armée « à tout prix ». Après avoir demandé confirmation à Singapour, il fit faire demi-tour à son escadre à 11h20 et monter à 27 nœuds. Il n’avait aucune illusion quant à la naturesymbolique de sa mission, mais ignorant la gravité de l’état dans lequel se trouvait l’Armée, ilne pouvait que marcher et faire confiance à la chance. A 14h15, 12 bombardiers bimoteurs japonais effectuèrent une attaque en vol horizontal sansmettre de coup au but.A 16h50, l’escadre fut attaquée par 17 bombardiers en piqué de la Marine japonaise basés àterre. Les résultats furent dévastateurs. Le Frobisher fut touché trois fois, le Despatch deuxfois, la Danae trois, les Cattistock et Holderness une fois chacun. Jamais dans toute sonhistoire la Royal Navy n’avait subi un coup aussi fatal porté par des avions. Durant cetteaction, la force s’était dispersée. Quand les appareils ennemis se retirèrent, les survivantsformèrent deux groupes. Le Hawkins escorté du Garth, tous deux intacts, réduisirent leurvitesse pour porter assistance aux navires endommagés. Il apparut que les Japonais s’étaientconcentrés sur les autres navires, car le Hawkins et le Garth avaient eu la bonne fortuned’entrer dans un grain à un moment critique et de ne plus être aperçus jusqu’à ce que toute

l’action soit finie et qu’ils aient changé de cap. Pendant que la Danae et l’Atherstonerécupéraient les survivants des navires coulés et coordonnaient les secours avec l’aide deshydravions britanniques et hollandais et des petits bateaux présents dans le secteur, le contre-amiral Crace transféra son pavillon sur le Hawkins, qui accéléra à 28 nœuds avec le Garth.A 18h05, cinq bombardiers torpilleurs de la Marine japonaise basés à terre attaquèrent leHawkins. Il fut touché une fois, mais gravement. Comprenant que, d’une façon ou d’uneautre, le Hawkins était condamné, Crace ordonna au Garth de se charger des blessés et d’unepartie de l’équipage et de rejoindre la Danae.

Après l’actionLe décodage des messages ennemis a révélé par la suite que la séparation de la formationdurant l’attaque principale avait convaincu les Japonais qu’ils se trouvaient en face de deuxgroupes de combat. De plus, n’ayant pas vu couler le Frobisher, ils furent convaincus que lesHMS Frobisher et Hawkins étaient le même vaisseau – et rien moins que le Repulse.

Rapports de dommagesPerte du HMS Frobisher– 1 bombe a frappé près de la tourelle Y et explosé sur le pont blindé, les éclats provoquant denombreux incendies localisés et de petites voies d’eau. L’ébranlement a détruit le moteur dugouvernail et le support A de l’arbre d’hélice intérieur gauche. – 1 bombe a frappé près de la cheminée avant, traversé le pont blindé et explosé dans la salledes machines avant. Le souffle et les éclats ont mis hors service quatre chaudières sur six,envahissant la zone de vapeur brûlante, obligeant à l’évacuer. L’explosion a aussi brisédiverses canalisations, mais surtout une valve d’entrée d’eau, provoquant une grave voied’eau qui ne fut pas découverte avant que la température n’ait baissé dans la salle. – 1 bombe est tombée tout près à bâbord, en avant de la salle des machines actionnant lesdeux arbres d’hélice externes. Le dommage principal a été l’ébranlement des pieds de turbine,qui a désaxé les turbines par rapport aux arbres d’hélice. Cette perte d’alignement étaitminime, mais toute tentative pour utiliser ces deux hélices provoquait d’intenses vibrations etune petite voie d’eau. La gravité des dommages par ébranlement est due au fait que le navireétait en train d’abattre brutalement et était incliné sur tribord au moment de l’impact, ce qui apermis à l’énergie de la bombe de se dissiper sur la quille. Les dommages causés aux arbresd’hélice réduisaient la vitesse à 13 nœuds. Aucun dommage ne menaçait la sécurité du navire,mais l’ensemble le réduisait à l’état de simple cible. En effet, les dommages cumulatifs auxarbres d’hélice et au gouvernail rendaient le navire ingouvernable dans les conditions de merdu moment. La houle le déviait irrésistiblement vers le nord-est et le rivage ennemi. Il fut dèslors décidé de le saborder, car il était hors de question de risquer d’autres bateaux et leurséquipages pour le secourir. Les blessés et une partie de l’équipage furent transférés surd’autres navires. Par bonheur, tous les canots et radeaux de sauvetage ont pu être mis à l’eau.Ayant tout le temps nécessaire, les officiers purent brûler ou détruire et jeter à la mer matérielet documents secrets. Des barils furent remplis d’eau, de nourriture et de matériel médical,fermés et attachés aux canots de sauvetage. Les Royal Marines eurent même le temps derécupérer leurs armes légères et leurs munitions et de démonter les mitrailleuses Lewis et lescanons de 20 mm. Les canots à moteur remorquèrent les autres embarcations vers la côtemalaise, près de Gurun.

Perte du HMS Hawkins– 1 torpille aérienne de 18 pouces a frappé le flanc bâbord au niveau de la chaufferie arrière,près de la cloison la séparant de la chaufferie avant. La chaufferie arrière fut très vite envahiepar l’eau, et la chaufferie avant commença lentement, mais inexorablement, à être elle aussi

inondée, les pompes ayant été partiellement mises hors d’usage. Le chef mécanicien avisa lecapitaine et le contre-amiral Crace que le naufrage était inévitable. Le sachant, l’abandon dunavire put être organisé de façon presque identique à celui de son jumeau. Une fois lesmatériels secrets détruits et l’équipage en sécurité, la fin du navire fut hâtée par sabordage.Comme il est de règle, le contre-amiral Crace laissa la situation entre les mains du capitaine etde son équipage, le seul ordre qu’il donnât étant de demander au Garth d’assurer l’évacuationdes blessés et d’une partie de l’équipage et de se mettre en sûreté. Les autres survivantstouchèrent terre 25 miles au sud d’Alor-Setar. Le contre-amiral Crace fut conduit à l’état-major du IIe Corps pour aider à organiser l’évacuation des hommes sous son commandement,dispersés le long de la côte.

Perte du HMS Despatch– 1 bombe a frappé à l’arrière du canon de 6 pouces n°4 et perforé le pont, détonant dans lachambre des machines avant. L’explosion a dévasté le compartiment, mais par bonheur, l’effetde souffle s’est en grande partie dissipé par les bouches d’aération situées juste au dessus dela détonation, ce qui a réduit les dommages structuraux subis par le navire. Malheureusement,les gaz libérés ont tué l’équipe d’alimentation en munitions du canon n°4. – 1 bombe a frappé près du canon de 6 pouces n°5 et a dû pénétrer dans la soute à munitionsarrière, juste sous ce canon. La position exacte de l’impact et les dommages provoqués nepeuvent être qu’estimés, car très peu d’hommes ont survécu dans cette partie du navire. Noussavons qu’il y a eu une violente explosion et que le navire s’est enfoncé rapidement par lapoupe. Les chauffeurs ont rapporté que toute communication avec les machines était coupée.La passerelle a signalé que le gouvernail ne répondait plus et qu’il était impossible decommuniquer avec la moitié arrière du navire. Le bâtiment poursuivait pourtant sa route,antennes et épaves diverses traînant derrière lui.Le capitaine ordonna à tout l’équipage de se rassembler sur l’avant et de se préparer àabandonner le navire. Ce n’est que lorsque le vaisseau eut ralenti et que le danger de voir lesmarins quittant le navire être entraînés par les épaves traînant dans l’eau eût diminué quel’ordre d’abandonner le navire fut donné. Le Despatch coula par la poupe dix minutes après lepremier coup et moins de cinq après le second. Grâce aux radeaux lancés par les autresnavires et à la tiédeur de l’eau, un peu plus de la moitié de l’équipage fut sauvé (aucun descanots et bien peu des radeaux du navire avaient pu être lancés).

Perte du HMS Cattistock– 1 bombe a frappé en plein milieu, mettant les machines hors service et provoquant d’autresdommages. Pourtant, malgré sa petite taille, le navire ne risquait pas de couler. Hélas, lesexigences de la situation obligèrent à le saborder après avoir tenté de le remorquer, mais il estimpossible de critiquer cette décision.

Perte du HMS Holderness– 1 bombe a frappé le jumelage de 4 pouces arrière. Elle a provoqué l’explosion desmunitions préparées pour ces canons et des grenades ASM, causant de graves dommages quiont entraîné le naufrage du navire en 20 minutes.Le seul point intéressant de cette enquête est l’explosion des munitions, qui ne pouvait queprovoquer de graves dégâts et de nombreux morts. Le Bureau des Munitions doit s’enpréoccuper, car les obus de 4 pouces utilisent une cartouche solidaire de la coiffe et lesgrenades ASM n’ont pas été directement touchées. Cependant, il n’est pas impossible que lestémoins se soient trompés quant au point d’impact précis de la bombe et quant à l’existenceou non d’un incendie avant l’explosion des munitions. Ce n’est pas une critique, car la vitesseà laquelle se déroulent de tels événements et la proximité d’une telle explosion, provoquant

étourdissement et désorientation, peuvent perturber la mémoire. Il faut ajouter que lesconcepteurs et constructeurs de ce navire peuvent être fiers qu’après de tels dommages, un deces petits navires ait pu rester à flot pendant vingt minutes.

Dommages subis par le HMS Danae– 1 bombe a frappé devant la passerelle, tuant les servants des canons de 6 pouces n°1 et 2 etdétruisant les canons. Les éclats ont atteint la passerelle, où la plupart des officiers ont été tuésou blessés. La bombe a aussi allumé un incendie sur le pont des équipages et, par précaution,les soutes à munitions avant ont été noyées. Un autre incendie a détruit les livres de code etles tableaux de signalisation. Les transmissions du navire ont alors été obligées de recourir àune combinaison des plus improvisées de références sociales et sportives.– 2 petites bombes ont frappé près de la cheminée arrière, provoquant un incendie qui adétruit les canots de sauvetage, les radeaux et la boulangerie du navire. Cet incendie n’étaitpas violent et ne représentait pas une grave menace, en dehors de son emplacement. Parprécaution, les torpilles ont été éjectées et les munitions préparées pour les canons de 4pouces AA voisins ont été jetées à la mer. L’incendie a été rapidement sous contrôle, mais lafumée a gêné un moment la visibilité de la position de contrôle arrière. Le navire est pourtantresté opérationnel, a évité d’autres bombes et a secouru des naufragés, ce qui témoigne de lacompétence et du dévouement de ses officiers et matelots.

Adaptation des navires à la missionPour une action de surface ou un bombardement côtier, la bordée totale de onze 7,5-poucestirant des obus de 200 livres et douze 6-pouces tirant des obus de 100 livres pouvait êtreefficace contre des cibles assez lentes. On redoutait cependant que les Japonais envoient desvedettes lance-torpilles, car seuls les Hunt auraient pu leur opposer une défense efficace.La capacité anti-aérienne de l’escadre était réduite. Le Hawkins n’avait que 4 x 4-pouces, 8 x2-livres et 8 x 0,5-pouces. Le Frobisher avait 5 x 4-pouces, 8 x 2-livres et 8 x 20mm. LaDanae et le Despatch avaient chacun 3 x 4-pouces et 2 x 2-livres seulement. Seuls les 3destroyers de classe Hunt avaient une capacité AA moderne avec direction de tir à longue etcourte portée.– La classe Hawkins a été conçue et construite pour la protection lointaine des naviresmarchands. Ces croiseurs sont rapides, ont un long rayon d’action, une bonne tenue à la meret des canons à longue portée. Ils n’ont pas été conçus pour une action de nuit contre desforces légères, surtout près d’une côte ennemie. Leur haute silhouette, leur grande taille etleurs canons à faible cadence de tir leur imposeraient dans cette situation un lourd handicap. – Les croiseurs légers de classe D ont été construits pour combattre la Marine Impérialeallemande dans les eaux froides de la Mer du Nord et sont complètement hors de leur élémentdans les eaux chaudes de l’Extrême-Orient, deux décennies plus tard, contre la MarineImpériale japonaise. Ces navires ont fait partie de la mobilisation de la Reserve Fleet d’août1939 et ont donc des équipages de réservistes réguliers un peu âgés et de jeunes volontairesenthousiastes. Ces petits bâtiments obsolètes ont passé beaucoup de temps dans des eauxlointaines, mais leurs équipages ont noué des liens étroits et bénéficient d’un moral élevé.– Les destroyers d’escorte de classe Hunt sont de petits navires modernes, construits avecun total mépris pour les équipements du temps de paix. Leurs équipages sont presqueentièrement composés d’hommes engagés pour la durée des hostilités. Ils ont une attitudecavalière envers les codes d’avant-guerre et respectent rarement les règlements avec rigueur.En fait, ces équipages ressemblent à ceux des sous-marins ou des vedettes rapides, dévoués àleur tâche et parfaitement conscients de la vulnérabilité de leurs fiers petits bâtiments.

Autres éléments (rassemblés pour un appendice confidentiel spécial)

Notes d’une réunion informelle tenue à Singapour en vue de la dissolution de la ChinaStation et de la formation officielle de l’Eastern Fleet.– L’amiral Sir Tom Phillips (futur Commandant en Chef de l’Eastern Fleet) livre un brefrésumé de la situation stratégique mondiale et donne une consigne générale de prudence.Alors qu’il était en fonction comme chef d’état-major adjoint de la marine, lui-même et lePremier Lord de la Mer, Sir Dudley Pound, ont été obligés à plusieurs reprises d’intervenirdans les opérations à la mer, quotidiennement et parfois heure par heure. Mais beaucoup desmessages envoyés sous leurs noms n’étaient en vérité que la retransmission des ordres duPremier Ministre, exerçant ses prérogatives de ministre de la Défense, et qui supervisaitd’extrêmement près les opérations qui l’intéressaient plus particulièrement. Pour lescommandants à la mer, il fallait donc se souvenir que l’ennemi n’était pas le seul à écouter lesmessages, l’Amirauté aussi.– Le vice-amiral Sir Geoffrey Layton (commandant sortant de la China Station) donne un brefaperçu de la situation navale locale.– Le contre-amiral Spooner (Contre-Amiral Malaisie) présente l’état de préparation desétablissements à terre et le niveau de l’approvisionnement en carburant et en munitions.– Suit une discussion générale que la stratégie et la tactique, en fonction de l’expériencerassemblée jusque là. Le vice-amiral Layton a commandé une escadre de croiseurs pendant lacampagne de Norvège. Le contre-amiral Spooner a commandé le Repulse pendant cette mêmecampagne. Tous deux ont été témoins des résultats des attaques aériennes sur une flotte. Lecontre-amiral Palliser a commandé le Malaya en Méditerranée et a été le témoin d’actions desurface et de bombardements prolongés et précis. Le Commodore Collins (R.A.N.) acommandé le Sydney en Méditerranée et a la même expérience. Seul le contre-amiral Cracen’a pas vu le feu dans cette guerre, car il avait jusqu’alors commandé l’escadre australienne.L’opinion générale est que la puissance aérienne ennemie sera extrêmement dangereuse pourla flotte, jusqu’à ce qu’une couverture aérienne suffisante soit disponible sous la forme dechasseurs à long rayon d’action basés à terre ou d’au moins deux porte-avions d’escadrearmés de chasseurs modernes. Un débat s’ensuit sur l’utilisation tactique des vaisseaux et desescadres, et sur les possibles performances tactiques des navires et des avions japonais. Laplupart des officiers présents s’accordent pour penser que si les avions anti-navires desJaponais sont aussi bons que les meilleurs avions italiens utilisés en Méditerranée (et il n’y apas de raison pour penser qu’ils leur sont inférieurs), la situation est très inquiétante, car lemanque de réussite des Italiens a été davantage dû à la supériorité aérienne alliée (voire à lamalchance) et qu’à un manque d’adresse, de détermination ou de courage.– L’amiral Phillips explique son plan d’organisation de la flotte.(i) Eastern Fleet – L’escadre de bataille rapide, y compris les porte-avions rapides. (ii) Cruiser Striking Force – Croiseurs légers rapides et destroyers, pour attaquer etdésorganiser les convois ennemis.(iii) China Force – L’ancienne China Fleet, pour escorter les convois et coopérer avec lesHollandais.(iv) Third Battle Squadron – Les cuirassés lents, chargés de soutenir l’Eastern Fleet etd’escorter les convois de troupes.

Notes générales – A la suite des événements du 17 décembre, les amiraux et les autresofficiers soutiennent Crace comme un seul homme. Tous considèrent qu’il a été envoyé audésastre, seule l’importance des pertes surprend les participants.Selon divers commentaires, « Churchill a fait un discours bien comme il faut, louant lesacrifice de la Navy pour soutenir l’Armée dans les moments difficiles… » et « Crace devraendurer la gêne de recevoir une décoration pour un désastre. »

Appendice 8

Le rapport Sainteny du 17 décembre

A : M. le Président du Conseil, Paul ReynaudM. le Ministre de la Guerre, Général Charles de GaulleM. le Ministre de la Marine et des Colonies, Henri de Kérilis

Vous trouverez ici un rapport sur la situation actuelle en Indochine. La plupart de ses élémentsont été réunis par les états-majors du général Martin et du colonel Devèze.

(1) La situation militaire, qui s’était significativement dégradée ces quatre derniers jours,semble se stabiliser. Nos forces tiennent solidement au Tonkin et au Cambodge, et la descentejaponaise sur la route côtière vers Saigon a été arrêtée. L’ennemi a subi des pertessignificatives et aura probablement besoin de deux ou trois jours pour se reconstituer avant dereprendre une offensive quelconque. La menace d’un complet effondrement en Annam a étéparée grâce à l’action résolue des forces blindées du colonel Schlesser.

(2) Cependant, à moyen terme, la situation apparaît extrêmement inquiétante, pour deuxraisons.La première est l’épuisement presque complet de toutes nos réserves de soldats entraînés. Ladiminution rapide de nos forces blindées du fait de l’utilisation d’équipes suicides anticharspar l’infanterie japonaise devient elle aussi un réel problème.La seconde raison, et sans doute la plus grave, est la supériorité aérienne quasi totale quepossèdent les forces japonaises. Le colonel Devèze m’a envoyé les chiffres suivants à proposde nos forces aériennes disponibles :a/ Chasseurs – En Cochinchine et au Cambodge, 13 Hawk-75A4 (dont 7 à Phnom-Penh) et 4Hurricane (Sqn 243 de la RAF) sont en état de vol. On pourrait y ajouter 7 Morane MS-410,opérationnels dans les Escadrilles de Protection du Laos, mais cela laisserait nos forcesterrestres près de Pakse sans aucune couverture aérienne. Au Tonkin, l’AVG est en bien meilleur état, avec 47 chasseurs, dont 34 en état de vol. Lesavions de l’AVG ont joué un rôle décisif dans l’évacuation en bon ordre de Lang Son et lastabilisation du front à Thai Nguyen. Dans une certaine mesure, ils ont compensé la réductiondrastique de notre force de bombardement.b/ Bombardiers – Nous ne disposons plus que de 17 Maryland en état de vol, dont 8 avec leGB I/62 en Cochinchine et les 9 autres dans la région d’Hanoi. L’officier commandant notreforce de bombardement, le colonel Pujeaud, a été gravement blessé en conduisant un raidcontre l’aérodrome de Tourane, tombé aux mains de l’ennemi. Selon un message duchirurgien militaire de l’hôpital d’Hanoi reçu par le colonel Devèze, il est clair que ses jourssont comptés.Les escadrilles de coopération avec l’Armée et d’appui rapproché disposent encore de 8Potez-63/11 et 5 Wirraway opérationnels (mais la plupart d’entre eux sont basés au Laos) etde 21 très vieux Potez-25 TOE, dont certains ont cependant déjà été utilisés pour des missionsd’appui tactique.

(3) La seule lueur d’espoir provient de la situation politique. Les bombardements aveuglesmenés par les Japonais contre des objectifs civils en Cochinchine et au Cambodge et ladescription d’atrocités commises par l’ennemi ont modifié l’état d’esprit de la populationlocale et de ses élites. Jusqu’ici, le comportement japonais a donc considérablement renforcéla résolution et le désir de combattre de la population locale. Cependant, ces sentimentsdépendent en grande partie de notre volonté de partager le pouvoir politique.

La légalisation des organisations nationalistes a considérablement amélioré leurs relationsavec notre administration. Le bagne de Poulo-Condor était une honte, comme je l’ai déclarédevant le Conseil de Défense Nationale avant de quitter Alger. La fermeture de cette vieille etbarbare prison était une obligation morale. De plus, cette mesure a eu un impact politique trèsfavorable. Si un gouvernement de coalition pouvait être constitué sous la direction de S.M.Bao Daï, avec la participation des différents groupes nationalistes (y compris, j’y insiste, lespro-communistes), une mobilisation générale pourrait être mise en œuvre. Le général Martinm’a assuré que nos réserves actuelles d’armes et de munitions pourraient nous permettred’armer 50 000 hommes et de les approvisionner pendant au moins six mois. Leurentraînement serait cependant une contrainte majeure. Certains dépôts de la Légion Etrangèrepourraient être utilisés pour la formation initiale, ainsi que le centre d’entraînement destroupes de montagne. Le personnel naval libéré par l’abandon des installations de Cam Ranhpourrait être utilisé pour l’encadrement.

(4) Renforcer nos unités aériennes en Cochinchine est cependant de la plus haute importancepour mettre en œuvre quelque plan de défense que ce soit. A l’heure qu’il est, notre force dechasse en Cochinchine et Cambodge est presque épuisée. Le général C.L. Chennault a dit aucolonel Devèze que, si on le lui ordonnait, il pourrait envoyer à Saigon un squadron (le 2 e del’AVG), mais qu’il doute sérieusement de l’efficacité d’un tel mouvement. Transporter àSaigon les pièces détachées et le matériel de réparation des Hawk-81 de l’AVG serait difficile.Au demeurant, l’importance militaire de la dizaine de chasseurs ainsi transférés seraitdouteuse. Qui plus est, amoindrir l’AVG pourrait rompre l’équilibre actuel au Tonkin. J’ai ditpersonnellement au colonel Devèze que je préférerais voir l’AVG combattre dans sonintégralité pour la défense du Tonkin. Nous ne pouvons espérer aucun renfort de Malaisie, carla RAF là-bas semble dans une situation très difficile. La seule solution serait d’envoyerrapidement au moins 30 chasseurs modernes dans la région de Saigon. Pour être efficace, cedéploiement devrait se faire aussi vite que possible.

Votre dévoué

(signé)Jean SaintenyHaut commissaire pour l’Indochine

Appendice 9

Le rapport Schlesser du 18 décembre

A : M. Le Ministre de la Guerre, Général Charles de GaulleGénéral Delestraint, Inspecteur Général de la Cavalerie et des Forces BlindéesGénéral Martin, Commandant en Chef des Forces Terrestres en Indochine

Je suis heureux de rapporter que jusqu’à présent, les idées qui ont conduit à la création duGroupement Blindé Mobile que j’ai l’honneur de commander ont pleinement démontré leurbien-fondé à l’épreuve du feu. Le GBMS a réussi à repousser avec succès des forces ennemiesbeaucoup plus nombreuses par une combinaison de mouvement et de feu. Le jumelage deschars moyens et de l’infanterie mécanisée est à coup sûr une combinaison gagnante. Disposerd’une artillerie autopropulsée pour créer des “poches de feu” très mobiles est très coûteuxpour un ennemi en train d’avancer.Dès le premier jour, le GBMS a été constamment engagé, soit au Cambodge soit, plusrécemment, sur la route côtière. Nos pertes ont été très notables, en particulier lorsque nousavons repoussé les troupes japonaises sur la route côtière. L’ennemi a utilisé des escouadessuicides comme armes antichars, ses canons étant le plus souvent inefficaces. Ces escouadessont composées de groupes de 4 ou 5 hommes, utilisant des bouteilles d’essence ou descharges de démolition. En général, ils se cachent sur le côté de la route ou des axes les plusprobables d’avancée des chars, se redressent à moins de 20 mètres d’un char et le chargentsans tenir compte des tirs de protection. Jusqu’alors, 19 SAV-41 ont ainsi été détruits, sanscompter ceux qui ont été détruits par des canons de campagne de 100 mm utilisés en tir direct.Ces tactiques suicidaires de l’ennemi ont choqué nos hommes, mais en dépit des pertesrécentes, leur moral reste élevé. Nos troupes ont confiance dans leur capacité à utiliser lemouvement et le feu pour infliger de lourdes pertes à l’ennemi et le forcer à battre en retraitechaque fois que le GBMS peut être utilisé en nombre.

Les principales leçons tactiques apprises depuis dix jours sont les suivantes :

(a) Le SAV-41 est un splendide outil de combat, bien protégé, mobile et doté d’une armedévastatrice contre les chars ennemis. Même en tenant compte de la minceur du blindage deschars japonais, chaque coup au but a en général entraîné la destruction d’un char ennemi.Certains tirs ont été efficaces à une portée de 800 à 1000 mètres. Il est donc de la plus grandeimportance de maintenir la supériorité dont jouit actuellement le SAV-41 avec son canon de47 mm mod.37. Cependant, si les obus perforants (AP) ont été extrêmement efficaces et lesobus à mitraille utiles, les obus explosifs (HE) sont trop légers.Comme il faut s’attendre à ce que l’ennemi se dote tôt ou tard de chars plus lourds et mieuxprotégés, et comme nos propres chars doivent être capables d’engager des objectifs nonprotégés et de l’infanterie en fortifications de campagne légères à une distance d’au moins1 500 mètres, un canon de 75 mm avec une vélocité initiale d’au moins 700 m/sec doit êtreadopté pour nos futurs chars moyens.La bonne combinaison entre protection et mobilité est aussi un sujet majeur. Lors des bataillesau Cambodge, ou contre l’offensive sur la route côtière, ce qui a compté n’était pas seulementque le blindage du SAV-41 était absolument invulnérable aux canons antichars et à ceux desblindés ennemis, mais qu’il fournissait une protection suffisante sans alourdir le véhicule aupoint de limiter sa mobilité. Je dois souligner que la mobilité tout-terrain n’implique passeulement une faible pression au sol et un bon rapport puissance/poids, mais aussi un véhiculede dimensions modérées. Le simple fait que le SAV-41 ait une largeur de 250 cm est un atout

considérable pour traverser certains ponts, mais aussi pour se frayer un chemin le long dedivers chemins et sentiers.

(b) Une coordination étroite avec l’infanterie mécanisée est absolument vitale pour un emploiefficace des chars, tant en défense qu’en attaque.L’infanterie mécanisée doit être protégée contre l’artillerie ennemie et en particulier contre lesobus à déclenchement retardé. Le fait même que les half-tracks américains que nous utilisonssoient découverts limite sérieusement leur emploi. Par ailleurs, l’infanterie mécanisée doitavoir ses propres armes organiques, utilisables aussi bien pour le tir anti-aérien que pour le tirde suppression. La mitrailleuse lourde que nous utilisons actuellement (la M2 américaine de12,7 mm) est particulièrement efficace. Cependant, il arrive que cette arme manque de portéeet de pouvoir destructeur. Une tourelle fermée dotée d’un canon automatique de 20 mm, voirede 25 mm, serait parfaite.

(c) Le soutien d’artillerie est aussi un problème très important.Les mortiers utilisés, qu’ils soient de 81 mm ou de 120 mm, sont des armes à courte portéetrès utiles. Ils sont mobiles et très efficaces contre les armes antichars ennemies. Ils peuventposer très vite un écran de fumée en cas de besoin. Cependant, leur portée est faible.Une faiblesse dans l’arsenal du GBMS est le manque d’un obusier autopropulsé de 105 mmou même de 155 mm. Les unités blindées pouvant pénétrer profondément dans le dispositif dedéfense ennemi, il est important que l’artillerie organique puisse suivre les unités de pointe etengager l’artillerie ennemie en contre-batterie. Une combinaison d’obusiers de 105 mm ou decanons-obusiers et d’un canon similaire à notre 155 mm GPF sur un affût automoteur seraitprobablement la formule optimale.

(d) Les unités blindées sont appelées à devenir les cibles prioritaires de l’aviation ennemie.Leur fournir des canons anti-aériens autopropulsés, avec une possible polyvalence pour le tirantichar et le tir de suppression, serait un apport d’une valeur considérable.

Votre dévoué Colonel SchlesserOfficier commandant le Groupement Blindé Mobile

Appendice 10

Le rapport Percival du 23 décembre 1941

Recommandations et appréciations réunies pour le Commandement de Malaisie par lelieutenant-général (faisant fonction) A.E. Percival pour le compte de l’Air Marshal Brooke-Popham, Commandant en chef en Malaisie, en coopération avec les Etat-Majors combinésréunis à la base navale de Singapour, le 23 décembre 1941.

Ce rapport est basé sur les rapports quotidiens des autorités civiles et militaires, dont laprécision varie en fonction des circonstances et de la charge de travail sur le terrain que leséquipes rencontrent à présent. Sont également inclus de brefs états sur les conséquences deschangements de stratégie.

Comité des Chefs d’Etat-MajorContre-amiral Palliser, Royal Navy, Chef d’Etat-Major du Commandant en Chef de l’Eastern FleetMajor-général Percival (faisant fonction de Lieutenant-Général), Chef d’Etat-Major des forces terrestres en MalaisieVice-maréchal de l’Air Pulford, Royal Air Force, Chef d’Etat-Major du Commandement des Opérations Aériennes en Malaisie

Egalement présentsContre-amiral Spooner, Royal Navy, Contre-Amiral en Malaisie, commandant les installations côtièresContre-amiral Grace, Royal Navy, officier commandant la “China Force”Commodore Collins, Royal Australian Navy, Etat-Major de l’Eastern FleetMajor-général I.S.O. Playfair, Chef de l’Etat-Major général du Commandement de MalaisieBrigadier G.C. Eveleigh, Directeur délégué des services de l’intendanceBrigadier R.G. Moir, TransmissionsBrigadier T.K. Newbigging, officier responsable de l’administrationBrigadier I. Simpson, commandant des Royal Engineers du Commandement de MalaisieBrigadier K.S. Torrance, de l’Etat-Major général du Commandement de MalaisieBrigadier A.W.G. Wildey, défense anti-aérienne de la Royal ArtilleryBrigadier C.H. Stringer, Directeur délégué des services médicaux du Commandement de MalaisieBrigadier C.D.K. Seaver, Directeur délégué des services médicaux du 3 e Corps indien

Situation généraleLa victoire du 2e Corps australien au Kedah a annihilé la première tentative majeure desJaponais pour envahir la Malaisie. Ce fut toutefois une victoire à la Pyrrhus sur certainsaspects. Le 2e Corps australien a consommé des ressources considérables et peut être à présentconsidéré comme une unité épuisée.Le 3e Corps indien attend une attaque japonaise d’envergure dans le Kelantan. Comme cetteattaque ne sera certainement pas stoppée sur la frontière (Kota Bahru n’a pas les fortesdéfenses naturelles et artificielles de Jitra et ne peut être ravitaillée en aucun cas), un plandétaillé a été mis au point pour reculer par étapes le long de la voie ferrée entre des positionsdéfensives pré-établies. Le but est de retarder et de saigner les Japonais, tout en allongeantleurs lignes de ravitaillement. La ligne de chemin de fer sera détruite, car elle est abandonnée.Toutes les infrastructures de la zone de Kota Bahru ont été détruites. Nous n’avons ni le désirni la possibilité de tenir Machang. L’aérodrome a été miné pour être complètement démoli ettout le matériel d’aviation a été évacué.La situation logistique s’aggrave. Les Japonais attaquent systématiquement par avion leréseau ferroviaire de la côte ouest. Cela dégrade progressivement notre capacité à déplacerrapidement des forces importantes. Avant-guerre, il fallait environ trois jours pour déplacerune division de Singapour à Alor Sétar. Il en faudrait à présent quatre si le mauvais tempsempêchait la plupart des attaques diurnes ennemies. Etant donné que la météo n’arrête

environ que la moitié des attaques, déplacer une division sur cette distance prendraitactuellement quatre jours et demi à cinq jours.La Navy a en grande partie perdu le contrôle du Détroit de Malacca, du fait de la présenced’une unité anti-navires de l’aviation de la Marine japonaise. Le contrôle local autour dePenang est toujours disputé dans la journée par la garnison maritime et les forces légères de laRoyal Australian Navy. Nous contrôlons le Détroit de Malacca la nuit. L’Air Force attaque lesaérodromes ennemis de nuit. Les Manchester conduiront des raids diurnes à grande vitessechaque fois que ce sera possible. La force Rose sera également utilisée. Ces mesures devraientuser l’unité anti-navires japonaise.La situation aérienne est critique. Le contrôle du nord de la Malaisie a été perdu, le contrôledu centre du pays est contesté. Nous perdons la bataille aérienne par manque d’avions. Lesrenforts aériens arrivent, mais celui qui gagne est celui qui reçoit ses renforts le plusrapidement. Les avions ennemis sont au moins aussi bons que ceux de la Luftwaffe. A l’heureactuelle, leurs pilotes sont généralement mieux entraînés que ceux de la Luftwaffe. MaisLondres refuse toujours de croire à cet état de fait – sauf à l’Amirauté. Cependant, le systèmede guidage de la chasse par radar fonctionne à présent plutôt bien. Les pilotes se sont adaptésà de nouvelles tactiques contre les avions japonais d’une manière darwinienne : ceux quitentent un combat tournoyant meurent.Les préparations défensives continuent au Johore, en particulier dans les zones de Kuantan,Endau et Mersing. L’excavatrice à tranchées de la Navy a travaillé continuellement pourrenforcer les défenses. Le HMS Adventure a posé des champs de mines défensifs devant cestrois zones. Ils ont été posés de nuit, à une profondeur plus grande que celle des filets despêcheurs locaux (8 pieds) ; nous pensons que l’ennemi ne soupçonne pas leur présence.La décision de Lord Gort, prise le 19, de ne pas tenir compte des longues formalitésdemandées par le Colonial Office avant de relever la paye des travailleurs a tranché d’un seulcoup le nœud gordien de la disponibilité d’une force de travail pour les besoins militaires. Sadécision du mois d’août de faire venir 8 000 ouvriers de l’armée indienne a également étéd’un grand bénéfice. Les puissantes défenses de Gurun, Kroh, Grik et le long de la voie ferréede la côte est n’auraient pas pu être construites sans ces unités d’ouvriers.La décision de prendre le contrôle local de l’évacuation des civils et des matériauxstratégiques a été un succès majeur : 50 000 civils et 300 000 tonnes ont été évacués à cettedate et seule la moitié du tonnage disponible pour les réfugiés a été utilisée. Une cadence del’ordre de 60 000 évacuations et 150 000 tonnes d’exportation de matériaux stratégiques parsemaine est à présent atteinte. L’absence d’attaque ennemie sur Singapour même a fortementcontribué à nous permettre d’atteindre cette cadence. Les navires les plus petits vont en Indeou à Ceylan, les plus grands à Fremantle, environ la moitié des personnes évacuées et descargaisons vont vers chacune de ces destinations.

Actions probables de l’ennemi et réponses possibles de notre partL’ennemi ne retardera pas longtemps son attaque de la côte est du Kelantan. A ce moment (ouavant), le 2e Corps australien devra attaquer pour réoccuper au moins la ligne avancée de Jitraet si possible Kangar, de manière à pouvoir rétablir ses défenses. L’objectif est limité (du faitdes réserves disponibles) à une attaque de diversion.………L’ennemi doit renforcer son armée au Siam pour compenser ses pertes et se ravitailler enmunitions et équipements. Nous pouvons donc prévoir un convoi majeur de renforts ennemisdans un avenir proche. L’ennemi doit nous arracher le contrôle de la Mer de ChineMéridionale. On peut s’attendre à ce que sa flotte soit utilisée pour frayer le passage de ceconvoi de renforts. Alors, la Navy pourra se battre ou fuir.

Si l’ennemi utilise toute sa force de porte-avions mise en ligne contre Pearl Harbor, la Navyn’aura pas d’autre choix que de fuir. Cette “Flotte Combinée” est trop puissante.S’il n’utilise que l’importante force vue au large de la baie de Brunei (4 à 5 cuirassés, 1 à 2porte-avions et 6 à 10 croiseurs), nous devrons l’affronter.En supposant que nous nous battions et détruisions le convoi de renforts, la Navy seraittoujours obligée de fuir si la flotte de Pearl Harbor se présentait dans sa totalité (si nousn’avions à en affronter qu’une fraction, la Navy et l’Air Force pourraient être en mesure des’y opposer). Cette flotte détruirait probablement nos forces aériennes.Dans ce cas (ou dans le cas d’une défaite infligée par la flotte de la Baie de Brunei), nouspouvons nous attendre au débarquement par l’ennemi d’une division renforcée à Endau-Mersing. Ainsi, l’armée doit prévoir de couvrir cette zone. Davantage de blindés et d’artilleriesont nécessaires pour ce faire.………Le Strike Wing du Coastal Command est notre arme secrète. Elle doit être préservée pourassister la flotte lors de ce qui serait une action désespérée.L’ennemi semble avoir une arme similaire. Ses bombardiers-torpilleurs basés à terre ont déjàcoulé l’USS Boise en Mer de Chine Méridionale. Il est pour le moment impossible de savoirdans quelle mesure ces avions spécialisés pourraient dominer cette zone.Certains d’entre eux semblent être une variante spécialisée de leur bombardier moyenMitsubishi G3M. Cet avion est connu sous sa variante civile de compétition, le J-BACINippon, qui a battu le record du tour du monde en 1939. Les services de renseignement de laRAF estiment que cet avion est équivalent à notre Wellington Mk I. Si tel est le cas, son rayond’action opérationnel une fois armé d’une torpille anti-navire serait de moins de 500 millesnautiques. Toutefois, cela ne correspond pas aux rapports en provenance des autoritéschinoises et américaines, qui affirment qu’un tel bombardier est capable de transporter unecharge militaire significative jusqu’à 750 nautiques de sa base.Un nouvel avion, décrit par les survivants de l’USS Boise comme « en forme de cigare »,semble avoir également été mis en service. Propulsé par des moteurs en étoile refroidis par aircomparables à nos Hercules, on estime son poids autour de 20 000 livres en charge. Un telavion aurait un rayon d’action opérationnel allant jusqu’à 900 nautiques avec une torpilleanti-navire standard. Les services de renseignement de la RAF ne croient pas l’industriejaponaise capable de produire un tel appareil, au moins en nombre important. Une fois deplus, cette opinion est contredite par les rapports chinois, français et américains que nousavons pu obtenir jusqu’à présent.Se procurer de meilleures informations sur les nouveaux matériels utilisés dès à présent parl’ennemi est d’une urgence absolue. Les services de renseignement de la RAF en Malaisie ontdéjà été incapables de prédire l’apparition d’un avion de reconnaissance bimoteur plus rapideque nos chasseurs Hurricane II et au moins aussi rapide que notre nouveau Spitfire V.

Situation aérienne au 23 décembre 41La situation aux PhilippinesLes forces américaines dans l’archipel ont été aisément et largement défaites, apparemmentaprès des combats brefs et peu intenses et par des forces inférieures en nombre (ce dernierpoint n’est pas confirmé). Des informations à peu près sincères obtenues auprès d’officiersaméricains de haut rang font état d’opinions qui placent la performance du commandant enchef américain aux Philippines au-dessous de celle du général Graziani en Libye l’annéedernière. Etant donné que les forces de Graziani ont livré des combats courageux et violentsavant d’être repoussées puis d’autres avant d’être submergées, et que cela n’a pas été le cas àce jour des forces américaines aux Philippines, cette appréciation pourrait même êtreconsidérée comme généreuse.

Les seuls avions américains encore disponibles sur ce théâtre d’opérations sont dix B-17D etun B-17C à Batchelor Field, près de Darwin : ce sont les restes du 19e Bombardment Group.Sur ces onze avions, 2 à 9 sont disponibles par intermittence pour des opérations, surtout auxPhilippines. Pour cela, ils doivent faire étape à l’aérodrome de Del Monte, dans le nord deMindanao, et ne peuvent embarquer que quatre bombes de 500 livres. Les pilotes del’USAAF font preuve de combativité, mais de peu de capacité de combat coordonné au-dessus du niveau individuel.Au total, 16 P-40 et 4 P-35A ont été redéployés à Bataan, mais ils manquent de piècesdétachées, d’outillage et de munitions. L’abandon de grandes quantités de matériel militaireaméricain intact aux mains des Japonais, alors que l’armée américaine battait en retraite versune région sauvage dépourvue de lignes de ravitaillement, est incompréhensible.Le contre-amiral Hart a été informé après coup que le commandant en chef des Philippinesavait décidé l’évacuation de sa base principale. Il a été forcé de se replier sur Batavia pourcontinuer la lutte.L’US Navy a livré une action de nuit, son premier combat depuis 1898.

Les chaînes d’envoi de renfortsTrois d’entre elles commencent à opérer. La chaîne franco-anglaise se divise en deux enBirmanie. Elle fonctionne, avec des avions qui commencent à affluer d’aussi loin que leRoyaume-Uni. La branche française suit la chaîne chinoise : les avions sont envoyés duBengale en Birmanie, puis en Chine, mais continuent ensuite jusqu’au Tonkin. La branchebritannique s’étend jusqu’à Singapour. Elle alimente également l’Australie par bateau dans lecas des avions monomoteurs, sauf s’ils possèdent ou peuvent obtenir un grand rayon d’action.La chaîne américaine est en train d’être établie, mais n’est pas encore fonctionnelle. Elletraverse le Pacifique jusqu’à Darwin.– Chaîne de renforts britanniqueCette chaîne est solide, étant donné qu’elle est alimentée par plusieurs sources et estredondante. Elle permet sans difficulté le convoyage en vol de monomoteurs entre Gibraltar etSingapour. Ceux-ci commencent à affluer, mais les lourdes pertes subies à Medan nous ontforcés à réexaminer cette escale. Ce réexamen est en cours. Pour le moment, les monomoteursont besoin d’un ravitaillement entre Rangoon et Singapour. Les bimoteurs peuvent faire leparcours d’une seule traite.– Chaîne de renforts françaiseLa majorité des avions de l’Armée de l’Air proviennent des Etats-Unis. Leur chaîne derenforts diverge de la chaîne anglaise au Bengale. Les avions sont ensuite convoyés jusqu’auTonkin, par la Chine. Cette voie fonctionne régulièrement. L’amiral Decoux nous a confirméque l’officier en charge de la chaîne de renforts au sein de l’Armée de l’Air prévoitd’améliorer les infrastructures dans le nord de la Birmanie.Les Français prévoient de se “raccrocher” à la chaîne américaine du Pacifique pour alimenteren avions leurs possessions du Pacifique.– Chaîne de renforts américaineLes Etats-Unis font des efforts acharnés pour mettre sur pied cette chaîne. Cela demande untravail considérable et elle ne sera pas utilisable par autre chose que des B-17 et deshydravions Clipper avant la fin de janvier 1942. Les monomoteurs devront arriver par mer,probablement dans des ports australiens, pour y être assemblés. L’USAAF a été forcée defaire retraite en Australie, avec l’évacuation des restes du 19 e Bombardment Group (14e, 28e,30e et 93e Bombardment Squadrons) à Batchelor (près de Darwin).Les plans américains actuels prévoient de reconstituer ce Groupe en Australie pour desopérations contre les Japonais au fur et à mesure de l’avancée de ces derniers. Les Australiensfont des efforts frénétiques pour agrandir l’aérodrome de Darwin et les terrains à proximité

afin d’y installer une plaque tournante pour la logistique et les opérations aériennes del’USAAF. Celle-ci a informé le ministère de l’Air de la formation d’un Groupe de chasseprovisoire, le 24e Pursuit Group, qui doit être reconstitué à Darwin, cette unité ayant étédétruite aux Philippines. Il comprendra les 3e, 17e, 20e, 21e, 34e et 6e (Philippines AF) PursuitSquadrons. Au fur et à mesure de la reconstitution des squadrons, ceux-ci seront envoyés aucombat aux Indes Néerlandaises. L’USAAF a indiqué que 116 chasseurs Curtiss P-40E seronten Australie fin janvier ; 160 autres sont en route et devraient arriver fin février.

Le problème australienIl faut signaler que la volonté américaine de reconstituer les Forces Aériennes des Philippines(même sous la forme d’un simple squadron de chasse) a entraîné quelques problèmes aveccertains journalistes australiens et même avec des membres du gouvernement du Dominion.Ces personnalités ont fait des objections à l’arrivée de pilotes philippins et de leursmécaniciens, survivants du squadron philippin, qui avaient été envoyés en Australie à bord dedeux vieux bombardiers B-10B. Le gouvernement australien a dû être officiellement informéde façon catégorique que l’Australie aura l’obligation d’accueillir pendant toute la guerre,pour le bien de la cause alliée, un nombre indéterminé de personnes non-blanches, enparticulier de sujets de Sa Majesté Impériale évacués de Singapour et de Malaisie. Legouvernement australien a donné son accord, en précisant que les objections n’avaient étéformulées que par « quelques irresponsables ».Pour régler définitivement ce problème et pour inciter le gouvernement australien à autoriserle déploiement de l’AMF (Australian Militia Force) hors d’Australie, celui-ci a été informéque l’on envisageait d’envoyer la 12e Division d’Infanterie Africaine en Australie, si l’AMFn’était pas autorisée à se déployer outre-mer.

Le problème hollandaisLes Hollandais se battent bien. Toutefois, ils sont si peu nombreux que leur force ne peut quedécliner. La Force Aérienne des Indes Néerlandaises basée à Bornéo a été quasiment annihiléeet celle basée à Sumatra sévèrement réduite. L’AOC est pessimiste sur les chances desHollandais. Leurs unités aériennes sont courageuses et bien conduites, leurs pilotes sont bons,mais cela ne fera aucune différence. Leurs forces déclinent, car elles ne peuvent remplacer lespilotes perdus. Pour y remédier, l’Ecole de l’Air des Indes Néerlandaises est en cours detransfert en Australie avec ses instructeurs, et tout pilote allié parlant hollandais, sans tenircompte de son arme ou de sa nationalité, pourra être versé dans la Force Aérienne des IndesNéerlandaises pour l’aider à affronter la terrible épreuve qui l’attend.Le ministère de l’Air a lancé un appel aux Etats-Unis, par l’intermédiaire du cabinet duPremier Ministre, pour obtenir que le gouvernement des Indes Néerlandaises reçoive toutel’assistance possible. Celui-ci n’avait pas été écouté avec beaucoup d’attention à Washington,du fait de la confusion qui y règne actuellement. Mais le problème est que, pour le moment,les Etats-Unis ont peu à donner. Seul des modèles anciens, en nombres limités, sontdisponibles. Le Président Roosevelt a offert ce qu’il a pu, vu l’état d’urgence actuel.– Les commandes hollandaises déjà passées seront honorées. Il s’agit de :8 chasseurs Curtiss P-36, reliquats d’une commande (20 déjà livrés).17 chasseurs Buffalo.5 Curtiss CW-21B Demon, reliquats d’une commande (22 déjà livrés). Une autre commandede 48 avions a été reçue, la livraison est prévue pour juin 1942, elle sera accélérée.38 chasseurs Curtiss P-40 E/F (en cours de livraison).48 bombardiers Douglas DB-7 Boston.18 bombardiers B-25C.18 hydravions Vought Kingfisher.

200 chars légers M3 (les 50 premiers doivent être livrés fin février, avec un mois d’avance).– Comme on peut le constater, ces commandes ne seront pas d’un grand secours. Les Etats-Unis ont proposé la livraison des avions suivants pour la fin janvier 1942 :40 chasseurs P-40 E/F.20 hydravions PBY Catalina (pour compenser les pertes).20 Lockheed Hudson.20 Douglas B-23 de bombardement et reconnaissance (retirés des unités de combat et mis àdisposition pour des missions de servitude en août 1940, mais pas encore affectés).80 Curtiss SBC-4 Helldiver (par petits groupes de janvier à juin 1942, au fur et à mesurequ’ils seront retirés du service dans l’US Navy et remis en condition).Différents avions venant des dépôts ou affectés à des missions de servitude (pour compenserles pertes en Martin M-139WH-1/2 et 3/3A) : 30 B-18A (les quatre premiers sont arrivés le 21décembre au VLG-VI à Brisbane) et 30 Martin B-10, B-12 et B-14 (pour l’entraînementopérationnel).Enfin, la RAAF a offert ses 48 chasseurs Buffalo, car ils sont remplacés par des Hurricane etpar des Boomerang II construits en Australie.

Les décisions du ministère de l’AirLe ministre de l’Air a officiellement renforcé la priorité du théâtre d’Extrême-Orient en ce quiconcerne l’attribution des renforts. C’est pourquoi les dépôts sont ratissés dans tout le théâtredu Moyen-Orient, car ce dernier est la source d’avions la plus proche. Par ailleurs, le systèmede convoyage des avions à partir du Moyen-Orient et de Grande-Bretagne est bien au point.– Chasseurs(i) Le Fighter Command a approuvé l’envoi d’un grand nombre de Hurricane à partir desdépôts et des lignes de production. Il s’est également engagé à maintenir deux squadrons deSpitfire et un de Defiant comme défense locale pour la Flotte, quel que soit l’endroit où sesitue sa base principale, si cette base est à portée des attaques ennemies.De surcroît, tout un Wing de chasse destiné au Moyen-Orient a été redirigé vers l’Extrême-Orient. Il s’agit du 267e Wing (Sqn 17, 135, 136 et 232), prévu à l’origine pour la Perse. Il estembarqué à bord du convoi de l’opération Long Sword. Les personnels sont à bord destransports Strathallan, Durban Castle et Duchess of Bedford.Le 266e Wing (Sqn 242, 258 et 605), dont le détachement a été un moment envisagé, fournitactuellement la plus grande partie de la couverture aérienne de Malte et se trouve tropfortement engagé au combat pour être envoyé ailleurs.En dernier recours, un second Wing complet de Hurricane sera détaché du théâtre deMéditerranée Orientale pour renforcer l’Inde.A ce propos, bien que l’emploi de ces chasseurs sur ce théâtre relève de Lord Gort, le ministrede l’Air fait remarquer que les aérodromes du Commandement de Malaisie-Singapour et leursinfrastructures de soutien n’ont pu être achevés avant la guerre, donc que ces aérodromesseront rapidement encombrés si tous les squadrons actuellement déployés reçoivent la totalitéde leur dotation en avions.(ii) Considérant la modernité surprenante des chasseurs japonais rencontrés jusqu’à présent,les Hurricane IIB à 12 mitrailleuses du 267e Wing, modifiés pour le désert, ont vu leurs grandsfiltres à poussière externes Vokes retirés (ils ne sont pas nécessaires pendant la saison humideen Birmanie et au Bengale ou en Malaisie), ainsi que quatre mitrailleuses. Ils sont ainsiallégés de 1 100 livres et retrouvent 40 mph de vitesse.(ii) Le Fighter Command a approuvé l’envoi immédiat du Sqn 96 d’Angleterre en Inde etBirmanie pour y créer une chasse de nuit. Ce squadron équipé de Defiant est à présentparfaitement entraîné et prêt à l’action, mais il a passé plusieurs mois à opérer sans succès, carle Defiant est trop lent pour arrêter les Ju 88 maintenant utilisés par les Allemands pour leurs

intrusions nocturnes (il sera remplacé par le Beaufighter au début de l’année prochaine).Cependant, les grands succès remportés de nuit par les Defiant du Sqn 27 contre lesbombardiers japonais, plus lents que le Ju 88, ont été remarqués. C’est pourquoi la RAAF aété informée que, si possible, des Defiant seront aussi envoyés en Australie, par bateau, ennombre suffisant pour constituer un squadron de chasse de nuit.(iii) Notre demande de nouveaux squadrons de Beaufighter pour l’Extrême-Orient n’a pu êtreapprouvée. Aucun n’est disponible, seuls deux squadrons opérationnels existent et ils sonttous deux déployés en Mer Egée.– Bombardiers-torpilleursDeux squadrons de bombardiers-torpilleurs Hampden, les Sqn 144 et 455 (RAAF), en coursde transfert et en entraînement opérationnel à Ceylan. Nous suggérons de former un secondStrike Wing avec les Sqn 137, 263, 144 et 455 (RAAF), car les Sqn 137 et 263 sont entraînésà la navigation au-dessus de la mer. Cette force ne sera cependant pas prête à combattre avantdébut février au mieux.– Bombardiers lourdsLe Bomber Command a noté la demande urgente de bombardiers lourds par le gouvernementaustralien, mais aucun appareil quadrimoteur n’est disponible. L’Armée de l’Air absorbe toutela production de Consolidated. Les Stirling et les Halifax mènent des opérations contre laproduction de pétrole et l’industrie de guerre allemandes. Le gouvernement américain ainformé le ministère de l’Air qu’aucun appareil Boeing n’est disponible, au vu de ses propresbesoins.Toutefois, le Bomber Command a approuvé l’envoi de tous les bombardiers Wellington dontil pourra se passer.De plus, le Bomber Command a décidé d’affecter en Malaisie tous les bombardiers AvroManchester disponibles, compte tenu du transfert à la RAAF du Sqn 50, doté de Hampden eten cours de conversion sur Manchester (son personnel doit rester mixte, anglo-australien). LeSqn 50 sera envoyé dans la région de Darwin, en accord avec un récent mémorandum“Action-this-Day” (Action Immédiate) du Premier Ministre. Une unité de maintenance de laRAF l’accompagnera et formera une seconde unité spécialisée pour entretenir le moteurVulture en Extrême-Orient. Ces décisions concentrent l’utilisation et la maintenance desManchester sur ce théâtre, car seuls ces deux squadrons utiliseront les Manchester.Ces mesures ont été prises pour que l’USAAF ne soit pas seule à mettre en ligne desbombardiers à long rayon d’action en Australie. L’Air Vice-Marshal Harris a noté que leprestige impérial est en jeu ici, mais il est effaré par le manque d’avions capables d’équilibrerl’influence de l’USAAF sur ce théâtre : nous ne disposerons ici d’aucun bombardierquadrimoteur moderne dans un avenir prévisible. Toutefois, l’AVM a également noté que lesWhitley seront remplacés en première ligne en Europe dans les cinq prochains mois. Il a parconséquent commencé à envisager la création de deux Wings de bombardement de nuit (l’undestiné à l’Inde et l’autre mis à la disposition de la RAAF), utilisant des Whitley Mk V neufsou récents, équipés de réservoirs souples amovibles placés dans la soute à bombes pourétendre leur autonomie de 1 650 à 2 500 nautiques avec 3 000 livres de bombes.

Calendrier des renfortsLes renforts ci-dessus ajouteront six squadrons de chasse et un de bombardement auxforces du théâtre d’Extrême-Orient et Pacifique4 squadrons de Hurricane (17, 135, 136, 232) constituant le 267e Wing2 squadrons de chasseurs de nuit Defiant (Sqn 96, plus un squadron de la RAAF, encore nonformé)1 squadron de bombardiers lourds Manchester (Sqn 50, à reverser à la RAAF).

Autres renforts prévusLe ministère de l’Air a décidé de livrer à la RAAF dans un délai de trois à six mois un certainnombre d’avions :– Cent à 150 Hurricane (en plus du flux normal de remplacements), destinés à former 4 à 6squadrons.– Un nombre substantiel de chasseurs P-39 de fabrication américaine. La RAF en acommandé 505 en 1940. Les premiers ont été livrés en juillet 1941. La RAF ne les a utilisésqu’au sein du Sqn 601, et ils sont un échec pour les opérations d’attaque de l’autre côté de laManche. Environ 300 restent dans les dépôts au Royaume-Uni. Il est prévu d’en envoyer unecentaine en Australie et le reste (environ 200) en Inde.

Inde et Birmanie– Mouvements des squadrons de bombardiers(i) Sqn 40 (RAF), 16 Wellington (Moulmein). Basé à Alconbury. 16 avions détachés à Malteen octobre 1941, où le détachement a été détruit. Déployé en Inde en septembre 1941, puis àMoulmein en novembre 1941.(ii) Sqn 104 (RAF), 16 Wellington (Moulmein). Basé à Driffield. 15 avions détachés à Malteen octobre 1941 et détruits. Déployé en Inde en septembre 1941, puis à Moulmein ennovembre 1941.(iii) Sqn 99 (RAF), 16 Wellington (Delhi). Basé à Mildenhall, puis déplacé en Inde ennovembre 1941.(iv) Sqn 139 “Jamaica” (RAF), 16 Blenheim IV (Akyab).(v) Squadrons de bombardiers-torpilleurs :Sqn 144 (RAF) équipé de Hampden depuis 1939. Transféré au Coastal Command endécembre 1941 et rebasé à Ceylan en janvier 1942 pour conversion, entraînement etfamiliarisation.Sqn 455 (RAAF), formé à Williamtown (Nouvelle-Galles du Sud) le 23 mai 1941 surWellington. Envoyé au Royaume-Uni, où il devient le premier squadron de la RAAF formé auRoyaume-Uni (le 6 juin 1941 à Swinderby, sur Hampden), première mission le 29/30 août1941 contre Francfort. Transféré au Coastal Command en décembre 1941 et rebasé à Ceylanen janvier 1942 pour conversion, entraînement et familiarisation.– Localisations en décembre 1941Ces chiffres sont fournis pour illustrer la puissance aérienne injectée sur ce théâtre.(i) Chasseurs du “Burma Wing”Sqn 5 (RAF), 16 Hurricane II (Rangoon)Sqn 67 (RAF), 16 Hurricane II (Rangoon)Sqn 146 (RAF), 16 Hurricane II (Moulmein)Sqn 155 (RAF), 16 Hurricane II (Moulmein).(ii) Chasseurs en route, localisations non précisées4 squadrons de Hurricane (17, 135, 136 et 232) constituant le 267e Wing(iii) BombardiersSqn 139 “Jamaica” (RAF), 16 Blenheim IV (Akyab)Sqn 40 (RAF), 16 Wellington (Moulmein)Sqn 104 (RAF), 16 Wellington (Moulmein)Sqn 40 “Madras Presidency” (RAF), 16 Wellington (Delhi)(iv) Bombardiers-torpilleursSqn 144 (RAF), déploiement à Ceylan en janvier 1942Sqn 455 (RAAF), déploiement à Ceylan en janvier 1942– Appareils en cours de transfert au commandement d’Inde pour des tâches de seconde ligne :21 Gloster Gladiator retirés des unités de Communication et Météorologie du Moyen-Orient

12 Hawker Nimrod retirés des unités de Communication du Moyen-Orient16 bombardiers légers Blenheim I des dépôts et unités de transport ad-hoc du Moyen-Orient.Ces avions sont usagés, mais ils libéreront d’autres appareils du sous-théâtre d’Inde-Birmaniepour les tâches de première ligne.

Appendice 11

Le rapport du Centaure, 23 décembre 1941

De : Capitaine de corvette Chevallier, officier commandant le sous-marin Le Centaure

A :(a) Officier commandant la Force Sous-marine, Singapour(b) Officier de liaison de la Marine Nationale, Singapour

Rapport de combat III/12/41Attaque à la torpille au large du Golfe de Lingayen (Philippines), le 23 décembre 1941

Nous étions à deux jours de la fin de notre patrouille. Nous avions d’abord fait route jusqu’àla zone P3E, avant de patrouiller dans la zone PI9W le jour précédant la réception du signal02112/SF5.Après avoir été informés que des navires ennemis étaient présents au large du Golfe deLingayen pour soutenir le débarquement se déroulant dans cette zone, j’ai manœuvré pournous placer au nord-ouest de celle-ci, dans un secteur où des navires japonais partant vers lesParacel ou Hainan devraient passer. Avant la tombée de la nuit, nous avons dû plonger à13h15, puis 16h10, du fait de la présence d’avions ennemis. Des hydravions ont été aperçusau périscope, patrouillant à basse altitude au-dessus de l’entrée du Golfe de Lingayen.Nous avons fait surface vers 19h10 et nous sommes rendus compte rapidement que la meragitée et une forte houle rendaient l’observation difficile du kiosque du sous-marin. La vitessea dû être réduite à 12 nœuds, mais les accumulateurs tournaient à plein régime. Nous roulionsalors comme un dragueur de mines et j’ai ordonné de virer au 195. Vers 20h15, avec lerenforcement du vent et des conditions d’observation sur le pont de plus en plus difficiles, j’aiordonné de plonger à 30 mètres, puis 50 mètres pour trouver des eaux plus calmes.A 20h34, l’opérateur de l’hydrophone a signalé de nombreux bruits d’hélices sur bâbord, puissur tribord et j’ai fait mettre aux postes de combat. A 20h41, au moins deux navires rapides degrande taille ont été identifiés sur tribord, se rapprochant. J’ai ordonné une immersionpériscopique et j’ai aperçu, sur un horizon relativement dégagé, un groupe de grandsbâtiments faisant route au 340. D’autres bruits d’hélice se sont fait entendre, venant cette foisde navires rapides et à haut régime moteur identifiés comme des destroyers, ce qui signifiaitque nous étions près de l’escorte d’une importante escadre ennemie.À 20h55, j’ai ordonné de virer à tribord et de faire route au 250 pour nous mettre en positionde tir. Les portes des tubes avant ont été ouvertes à 20h57 et les deux affûts orientablespréparés. J’ai fait une nouvelle observation au périscope vers 21h01 et identifié un navirecomme étant un grand croiseur ou un cuirassé rapide de classe Kongo, légèrement sur bâbordavant, à une distance de 4 500 m et se rapprochant rapidement. À 21h08, une forte lamed’étrave fut aperçue venant vers nous et identifiée comme un possible destroyer naviguant àtribord du cuirassé. Ce destroyer ne semblait pas nous avoir détectés et n’accélérait pas ; j’aidonc effectué de nouvelles observations courtes (30 secondes) en relevant et abaissant lepériscope pour affiner la solution de tir. À ce moment, l’opérateur de l’hydrophonedénombrait au moins 15 et peut-être 20 navires ennemis à portée d’écoute.Je sortis le périscope à 21h18 pour une dernière estimation et le second lieutenant recherchaitla meilleure solution de tir, lorsque l’opérateur de l’hydrophone nous avertit que le destroyer

en approche, maintenant à moins de 600 mètres, était en train d’accélérer. J’ai immédiatementordonné de lancer les torpilles avant (par 16°54’ nord / 119°50’ est) sur le cuirassé et nousavons plongé à 70 mètres en accélérant au tiers (6,5 nœuds) et en virant vers le destroyer.Nous atteignions la profondeur désirée lorsque le destroyer passa à notre verticale et nouspûmes entendre le bruit des charges de profondeur qu’il lançait. Il avait visé notre positionprécédente, mais le bâtiment fut sérieusement secoué par les grenades, dont six ont explosé enmoins de 90 secondes. Toutefois, le destroyer ne fit pas de tentative pour virer de bord ouacquérir un contact Asdic (ou son équivalent japonais) et il a maintenu son cap.À 21h23, j’ai ordonné une remontée à immersion périscopique et réduit la vitesse et lapuissance. À 21h24, nous avons tous entendu, dans le poste principal, une explosion fortemais lointaine. Le décalage était trop important pour que nous pensions avoir touché notrecible, que nous pouvions voir s’éloigner vers le nord. Toutefois, une lumière brillante étaitvisible plus loin et nous en avons déduit que nos torpilles avaient pu toucher un autre navire etque l’escadre japonaise avait adopté une formation en deux colonnes. Quelques fuséeséclairantes furent tirées, ainsi que des obus éclairants, peut-être parce que l’ennemi pensaitque nous allions faire surface pour donner le coup de grâce. La formation ennemie étaitsemble-t-il en train de se déployer, car nous percevions l’explosion d’autres charges deprofondeur et des bruits d’hélices un peu partout.Nous faisions alors toujours route au 160 et j’ai ordonné de revenir au 250, espérant merapprocher d’une autre cible. Alors que nous prenions notre nouveau cap, j’ai aperçu aupériscope un grand navire arrivant en sens inverse de l’ancien cap, donc au 340. J’ai ordonnéd’orienter l’affût orientable central à 90° sur tribord. Nous avons lancé les trois torpilles del’affût central à 21h29, à une distance n’excédant pas 600 mètres et sans doute inférieure.Moins de 20 secondes plus tard, nous avons entendu une puissante explosion et le bâtimentfut secoué comme par une main de géant. Le maître gyro-compas a été mis hors d’usage etl’éclairage est passé en mode secours, car les lampes principales étaient en court-circuit. Lematelot Le Goff, en charge du panneau de contrôle des ballasts, a été projeté contre le puits dupériscope et sérieusement blessé (fracture du bras gauche). J’ai demandé au second lieutenantd’examiner les batteries et de signaler immédiatement toute fuite d’acide. Pendant que nousfaisions le bilan des dégâts, personne, y compris Le Goff, n’a prononcé une parole qui ne fûtpas strictement nécessaire pour le bien du bateau.À 21h34, il était clair que les dégâts apparents se limitaient principalement au maître gyro-compas et à quelques ampoules. J’ai ordonné de ressortir le périscope et j’ai rapidementaperçu un grand navire en flammes. J’ai commencé à estimer la distance pour une autre salve,cette fois-ci en utilisant l’affût orientable arrière. Toutefois, une forte lame d’étrave indiquantun destroyer approchant rapidement était visible sur bâbord et l’opérateur de l’hydrophoneestimait la distance à moins de 500 mètres. J’ai ordonné une plongée à 60, puis 80 mètres. Cedestroyer s’est montré beaucoup plus insistant que le précédent. Il a ralenti à 12 nœuds et parmoments sans doute à 5 nœuds, essayant de nous écouter. Il larguait ses charges deprofondeur selon un schéma régulier, par séries de quatre (4) à huit (8). Vers 22h08, il futrejoint par un autre destroyer et, à eux deux, ils nous envoyèrent pas moins de 48 charges deprofondeur, certaines désagréablement proches. Nous nous sommes mis en navigationsilencieuse et j’ai envoyé les hommes d’équipage non indispensables s’allonger sur leurscouchettes pour diminuer le bruit et économiser l’air.Nous avons essayé de nous rapprocher du navire en flammes à 21h54, 22h28 et 22h41, maischaque fois, un des deux destroyers nous attaquait en larguant des charges de profondeur. A23h27, comme il n’y avait pas eu de nouvelle attaque depuis près d’une demi-heure, j’aiordonné la remontée à immersion périscopique pour évaluer la situation. Le navire que nousavions touché brûlait toujours et semblait secoué par des explosions secondaires. Le secondlieutenant jeta un coup d’œil et nous sommes tombés d’accord pour estimer que les incendies

étaient clairement hors de contrôle. Un des deux destroyers qui nous avait contre-attaqués sesilhouettait sur l’incendie et je décidai de lui rendre la monnaie de sa pièce avec l’affûtorientable arrière. Toutefois, à 23h45, il disparut avant que nous nous soyons mis en positionde tir.À 23h57, nous avons aperçu un autre bâtiment, de la taille d’un destroyer, par bâbord arrière.Il se pouvait que ce fût le second destroyer ou un autre, mais, quoiqu’il en soit, c’était uneproie rêvée. À 00h12, je tenais ma solution de tir. Toutefois, une minute avant de lancer, nousavons découvert que l’affût arrière ne pouvait pas pivoter de plus de 25° par rapport à laproue, que ce soit avec l’engrenage principal ou l’engrenage de secours. Même le systèmemanuel ne fonctionnait plus. Etant donné que l’affût central avait parfaitement fonctionné etque l’arrière avait été utilisé au cours des exercices, j’en ai conclu que le mécanisme derotation avait été endommagé par une des charges de profondeur qui nous avait manqué depeu ou par l’onde de choc d’une de nos propres torpilles. Sous un tel angle, il y était possiblequ’une torpille soit aspirée par nos propres hélices, j’ai donc annulé l’attaque. Vers 00h29, nous avons entendu une très forte explosion, que nous avons attribuée aux soutesà munitions du navire en flammes. Toutefois, l’opérateur de l’hydrophone affirme avoirentendu un faible bruit de torpille, sur un bruyant fond sonore. Il est possible qu’un autresous-marin allié ait été présent ou que l’ennemi ait lui-même détruit le navire à la torpille.Comme aucune autre cible ne put être repérée, nous avons rompu le contact à 02h54, faitsurface à 04h15 et fait route au sud vers Singapour, une partie de notre armement étantinutilisable.

Votre dévoué serviteurCapitaine de corvette Chevallier

Annexe I – Utilisation de l’armementLes tubes lance-torpilles de 550 mm de proue et orientables ont bien fonctionné durant lesdeux attaques. L’affût arrière orientable a été mis hors service par les chocs subis et n’a puêtre orienté à un angle suffisant pour pouvoir tirer en toute sécurité. L’affût a été inspecté ensurface par le troisième lieutenant et deux hommes, qui ont constaté que le pivot supérieurétait tordu de 55 mm. L’affût a été légèrement déplacé vers l’avant et son carénage supérieurbloque toute tentative de l’orienter de plus de 25° de chaque côté. Il est impossible de dire sice dommage est survenu lors d’un grenadage ou de l’ébranlement provoqué par l’explosiond’une de nos torpilles.Nos torpilles ont filé droit et aucune n’a marsouiné après le tir. Sur sept (7) torpilles tirées enaction, nous avons obtenu trois (3) coups au but. Envisageant une patrouille prolongée, nousavons quitté Cam Ranh sans les deux (2) torpilles de réserve pour les tubes de proue, afin delaisser plus d’espace vital à l’équipage. C’était une erreur. En guerre, les hommes savent quela vie à bord peut être inconfortable par rapport aux standards du temps de paix. Le troisièmelieutenant a observé qu’en modifiant quelque peu l’installation de la chambre des torpillesavant, nous pouvions emporter quatre (4) torpilles de réserve. Je recommande fortement cettemodification, qui pourrait considérablement améliorer notre endurance au combat.Les hydrophones et l’Asdic (en mode passif) ont bien fonctionné durant toute l’attaque etnous ont permis de prévoir les attaques des destroyers. Cependant, quand des navires bruyantsopèrent en nombre à faible distance, les hydrophones sont facilement saturés et la distance dedétection diminue.

Annexe II – Evaluation des dommages

En dehors des dommages causés à l’affût lance-torpilles arrière, décrits plus haut, LeCentaure a subi les dégâts suivants :(a) Le maître gyro-compas est tombé en panne et a été provisoirement réparé dans les 24heures. Cependant, il est de nouveau tombé en panne le jour suivant et devra être réparé etrévisé à Singapour. Je dois dire que ce n’est pas la première fois que, sur un navire de laclasse “Redoutable”, le maître gyro-compas tombe en panne à la suite d’un ébranlement sous-marin. Je suggère de signaler particulièrement ce point à l’Amirauté (Sous-marins) à Alger.(b) De petites fissures ont été repérées sur trois (3) cellules de batteries lors de l’inspectioneffectuée après le retour à Singapour. A aucun moment ces fissures n’ont été assez larges pourprovoquer une fuite d’acide. Je recommande cependant de changer ces cellules avant notrepatrouille suivante.(c) Le coupe-vent du kiosque a été tordu par un choc sous-marin (celui de l’explosion d’unegrenade ou d’une de nos torpilles). Nous l’avons réparé avant notre arrivé à Singapour.(d) Le système d’éclairage électrique a été mis partiellement hors service par un choc, mais avite été réparé.(e) Nous avons constaté que le ventilateur de refroidissement du moteur diesel bâbord avaitété endommagé, les supports métalliques de son carénage ayant été tordus. Nous avonseffectué une réparation de fortune pour permettre au Centaure d’utiliser son diesel à lapuissance maximum si besoin. Des réparations définitives seront faites à Singapour.(f) Les dommages les plus sérieux restent ceux subis par l’affût lance-torpilles orientablearrière. Un nouveau pivot doit être fabriqué à l’atelier du chantier naval sous peine de nepouvoir utiliser cet affût. Les ingénieurs du chantier naval de Singapour demandent unesemaine pour effectuer la réparation et les essais. Toutes les autres réparations peuvent êtrefaites en 48 heures. Si besoin, le bateau pourrait être renvoyé en mission sans son affût arrière.Néanmoins, celui-ci portant deux (2) de nos neuf (9) tubes de 550 mm et nos deux (2) tubesde 400 mm, cela réduirait sérieusement le potentiel offensif du bateau.

Annexe III – EquipageLes marins du Centaure sont animés par le meilleur esprit et ont montré de profondssentiments patriotiques. Durant les grenadages japonais, tout l’équipage et en particulierl’équipe de la salle de contrôle a fait preuve de la plus haute discipline et d’unprofessionnalisme exemplaire.Le matelot Rémy Le Goff a été sérieusement blessé quand il a été projeté contre le puits dupériscope par le choc de l’explosion d’une de nos propres torpilles. Il ne s’est jamais plaint et,avant d’accepter d’être envoyé à l’infirmerie, il s’est assuré que le matelot qui le remplaçaitau tableau de contrôle des ballasts était bien informé de l’état d’équilibrage du bateau.Notre officier de liaison, le sous-lieutenant RNVR Andrew Clark, qui nous a rejoints à CamRanh en novembre, est très apprécié par les officiers et les matelots du Centaure et s’estparfaitement intégré à l’équipage.

Appendice 12

Rapport de l’amiral Kondo sur les opérations de la 2e Flotte, 7 au 23 décembre 1941 [version du service des Archives de l’US Navy, 1946]

De : V.Am. Kondo, Commandant la 2e Flotte.A : Am. Yamamoto, Commandant la Flotte Combinée, V.Am. Nagumo, Commandant la 1ère Flotte Aérienne, V.Am. Takahashi, Commandant la 3e Flotte.Sujet : Découvertes et Recommandations sur de Récentes Opérations.

Rapport résumé et commenté sur les opérations du 7 au 23 décembre 1941Texte définitif 3

Invasion de l’Indochine françaiseLe débarquement a été bien conduit et sans anicroche. Il y avait dans la région des forcesnavales et aériennes ennemies notables et la Bataille au large de Hainan en a découlé.

8 décembre 19411. Opérations dans la zone de Tourane et Hué Sous la protection de la 2e Force d’Attaque Surprise (contre-amiral Nishimura), croiseur légerNaka, porte-hydravions Kamikawa Maru (8 F1M2, 2 E13A2, 2 E8N), Kimikawa Maru (6F1M2, 2 E13A1) et Mizuho (14 F1M2s, 8E13A1, 2 E8N), 7 destroyers (Murasame, Yudachi,Harusame, Samidare, Asagumo, Minegumo, Natsugumo), 6 dragueurs de mines, 9 chasseursde sous-marins, 6 cargos rapides ont débarqué à 09h45 une force combinée de la Marine et del’Armée près de Tourane. Les défenseurs locaux français ont très rapidement été repoussés.Les hydravions F1M2 ont fourni une couverture de chasse et abattu deux bombardiers légersMaryland français, stoppant une tentative menée par 6 bombardiers pour perturber ledébarquement. À midi, une contre-attaque française a été lancée. Nos hydravions ont fourniun puissant appui aérien et cette attaque a été défaite. Nos troupes ont pris l’aérodrome ainsique les stocks d’essence cette même nuit et les avions de l’Armée se sont posés le lendemain,ce qui a permis à la 2e Force d’Attaque Surprise de se retirer.

Enseignements – L’utilisation des forces combinées de grands porte-hydravions et de porte-hydravions auxiliaires est une grande réussite contre une opposition de force moyenne et doitêtre poursuivie. Un porte-hydravions et deux auxiliaires sont un minimum pour une telleforce. Le F1M2 est à peine suffisant en tant que chasseur. La conversion A6M2-N estnécessaire. Pour l’avenir, il faut poursuivre le développement de l’hydravion de chasse 15-ShiN1K1, capable d’affronter des chasseurs ennemis modernes basés à terre, et d’un hydravionde bombardement en piqué rapide, capable d’emporter une torpille (pour cette secondemission, une variante serait acceptable). En attendant, il nous faut un E13A2 avec un moteurplus puissant (peut-être le Kinsei 54 de 1 300 cv pour remplacer le Kinsei 43 de 1 080 cv) etdes points d’attache pour emporter une tonne de bombes ou une torpille 4.

3 NDE – Il s’agit ici de la version destinée à être archivée, non de la version dite provisoire, effectivement reçuepar les destinataires. En principe, ces versions ne différaient que sur des détails, mais des correctifs plusimportants n’étaient pas impossibles. La version dont nous disposons est une copie conservée dans les archivesde l’amiral Kondo, la version provisoire conservée à l’Amirauté à Tokyo ayant été détruite dans lesbombardements de 1945 (du moins selon les informations transmises par les autorités d’occupation soviétiques).4 NDE – Il est intéressant de constater comment l’amiral Kondo recommande, devant le succès d’une opérationentreprise contre un ennemi ne disposant que de forces limitées, de poursuivre dans l’impasse que représente enréalité le développement du porte-hydravions, solution qui n’avait été adoptée par la Marine Impériale que fautede disposer de porte-avions en nombre suffisant pour toutes les missions.

2. Panne mécanique sur le porte-avions Junyo au large de l’IndochineLa turbine bâbord du porte-avions Junyo est tombée en panne à 18h00, endommageantsérieusement les arbres de transmission et la machinerie. Cet incident a été attribué par l’Etat-Major de la Flotte à des erreurs d’assemblage et au manque d’expérience de l’équipe desmécaniciens, ces deux problèmes résultant d’une mise en service hâtive du bâtiment. Commele navire ne pouvait plus donner plus de 16 nœuds, il n’y avait pas d’autre solution que de lerenvoyer au chantier Mitsubishi de Nagasaki, avec deux destroyers pour escorte.

Enseignements – Envoyer au combat des navires mis en service rapidement, avec deséquipages novices, est rétrospectivement une erreur. Ce navire s’est bien comporté avec sesavions. Mais, avec le recul, il n’aurait pas dû être risqué. Ce type de navire est extrêmementvulnérable et doit être parfaitement rodé avant d’être envoyé au combat. Il présente égalementde nombreux défauts qui n’ont pas été mis en évidence en temps de paix 5.

3. Perte du porte-hydravions auxiliaire Kimikawa Maru et du destroyer Murasame au large de la côte d’Indochine, 8 décembre, 12h00Les éléments de la 2e Force d’Attaque Surprise, se retirant après leur mission, sont tombésdans une embuscade tendue par des sous-marins ennemis au sud de l’île de Hainan.La première attaque s’est traduite par un coup au but sur le porte-hydravions auxiliaireKimikawa Maru. La torpille a touché sans avoir été détectée à la hauteur de la cale n°2, enavant de la passerelle. Le bâtiment n’était pas en train de mettre en œuvre ses appareils, maisceux qui se trouvaient sur les catapultes avant étaient ravitaillés et armés. L’avarie en elle-même ne risquait pas de faire couler le navire, bien que la voie d’eau soit importante.Toutefois, l’explosion a provoqué un très violent incendie, du fait de la rupture du systèmed’alimentation en carburant. Le feu était si violent que les équipes de lutte anti-incendie n’ontpas été capables de le contenir, bien que la plupart de leurs hommes aient été tués ou brûlés.Leur équipement était inadéquat et il n’y avait aucun moyen d’isoler ou de rendre inoffensif lesystème d’alimentation en essence, qui avait été coupé et purgé, mais qui était encore remplide vapeurs explosives. Le commandant a stoppé immédiatement et commencé à catapulter lesavions déjà prêts vers Hainan. D’autres ont été mis à l’eau et ont ainsi pu décoller. Du groupeaérien, 4 F1M2 sur 6 et 1 E13A1 sur 2 ont été sauvés. L’incendie étant devenu incontrôlableet s’étendant à la superstructure et aux salles des machines par conduction, le contre-amiralNishimura a décidé à 22h30 qu’il était nécessaire de saborder le navire pour permettre à sonescadre de remplir sa mission de protection d’un autre débarquement. Je soutiens la décisionqu’il a prise. Le Kimikawa Maru était stoppé et largement illuminé par les flammes, tandisque les sous-marins ennemis continuaient à attaquer nos navires.Lors de la deuxième attaque, des torpilles destinées au croiseur léger Naka l’ont manqué.Lors de la troisième attaque, une torpille a touché le destroyer Murasame (classe Shiratsuyu).Le navire a été atteint au niveau de la passerelle et stoppé par une voie d’eau massive.Environ quatre minutes après avoir stoppé, le Murasame a commencé à se briser en deux,coulant environ 12 minutes plus tard. Les pertes dans l’équipage ont été légères.Un sous-marin ennemi a été localisé et attaqué. Les escorteurs ont revendiqué l’élimination dece sous-marin, sans avoir pu cependant recueillir des débris ou observer d’importantes taches d’huile en surface 6.L’ennemi a agi avec obstination, attaquant en groupes et de façon répétée 7.

5 NDE – Il s’agit d’une critique rétrospective de l’empressement va-t-en-guerre de l’Armée Impériale et dugouvernement Tojo. La Marine Impériale n’hésitera pas, par la suite, à hâter la mise en service d’autres navires.6 NDE – Façon polie de dire que la destruction du sous-marin est rien moins que certaine.7 NDE – Façon polie de donner la leçon aux sous-mariniers japonais.

Enseignements

– Kimikawa Maru. Le navire a été perdu à cause de l’incendie et cette perte était évitable. Lesleçons qui s’appliquent ici sont exactement les mêmes que pour la perte encore plus grave duporte-hydravions Chiyoda. Des dégâts sérieux mais non fatals ont été encaissés mais, du faitd’un système d’alimentation en essence dangereux, l’incendie a causé la perte du navire. Notre contrôle des incendies et des dommages est défaillant. Nos porte-aéronefs souffrent desérieux défauts, qui peuvent causer leur perte suite à des dégâts non fatals en eux-mêmes 8.Ces défauts ne pouvaient pas être anticipés avant la guerre. Ces points sont traités en détaildans la discussion sur le Chiyoda. Un rapport détaillé sur la perte du Kimikawa Maru a étéenvoyé séparément.– Murasame. La perte de ce navire doit être considérée comme une fortune de guerre. Sonéquipage n’aurait pu faire plus que ce qu’il a fait.– Opérations anti-sous-marines. Nos destroyers ont revendiqué la destruction de six sous-marins ennemis, tandis que l’aviation affirme de son côté en avoir détruit deux. L’efficacité denos actions anti-sous-marines peut cependant être améliorée.Problème 1. Les navires revendiquent une victoire après chaque attaque avec des charges deprofondeur, sans preuve. Nous ne disposons d’aucune procédure de confirmation, similaire àcelle que nous utilisons pour valider les victoires en combat aérien. J’ai ordonné la créationd’une telle procédure pour la 2e Flotte. Elle sera transmise au Commandant de la FlotteCombinée avec ma recommandation de le généraliser à toute la Marine Impériale 9.Problème 2. Nos chasses anti-sous-marines sont trop brèves. Un sous-marin ne peut resterimmergé qu’une journée. Nous ne les chassons pas suffisamment longtemps pour les forcer àfaire surface. J’ai ordonné à la 2e Flotte de chasser les sous-marins jusqu’à l’épuisement enorganisant des équipes de navires et d’avions 10.Problème 3. Nous avons besoin de nettement plus d’escorteurs. Ceux-ci doivent être simples àconstruire et à manœuvrer, peu coûteux et rapides à construire. De telles canonnières peuventprotéger les transports de troupes contre les sous-marins, être utilisés comme dragueurs demines, maintenir l’ordre dans les territoires nouvellement conquis et protéger les convoistransportant vers le Japon les ressources de la Sphère de Co-Prospérité 11.Problème 4. Les sous-marins ennemis traversent nos écrans facilement et effectuent desattaques réussies. Il est maintenant évident que nous sommes très vulnérables face à eux. Nosnavires manquent de charges de profondeur. Nos hydrophones sont bons, mais insuffisantspour repérer avec précision les sous-marins en plongée. Selon des rapports allemands,l’ennemi possède un système de détection ultrasonique très efficace. Les Allemands ontdéveloppé un système similaire. Il doit être acquis et fabriqué de façon urgente.Lorsque l’ennemi coulera des navires transportant des troupes de l’Armée – non pas s’il encoulait, mais quand il en coulera – l’embarras de la Marine Impériale sera extrême. Nous enavons la preuve par l’exemple de la perte de transports de troupes pendant la guerre de 1904-

8 NDE – Il est probable que, dans la version provisoire, les critiques aient été voilées (d’autant que Kondo devaitbien savoir que ces défauts de conception ne seraient pas corrigés du simple fait de les exposer crûment).9 NDE – Vœu pieux. En pratique, une telle procédure ne sera pas effectivement mise en œuvre avant 1944. Ilsemble que l’état-major japonais ne se soit pas soucié d’évaluer exactement les pertes infligées aux sous-marinsalliés. De plus, mettre en doute la parole d’un commandant d’escorteur revendiquant une victoire aurait été unaffront terrible : une épidémie de seppuku aurait menacé de ravager les rangs de ces officiers.10 NDE – En pratique, ces chasses ne pourraient se poursuivre que jusqu’à l’épuisement… de la faible provisionde grenades ASM dont disposaient les escorteurs japonais.11 NDE – Il est pratiquement certain que tout ce paragraphe a été nettement renforcé après coup, tant cettepriorité donnée à la construction d’escorteurs de convois contredit l’objectif japonais d’une guerre courte, envigueur en 1941 et au moins jusqu’au second semestre 1942.

1905 – l’amiral Kamimura reçut à l’époque un blâme personnel pour cette perte. Nous devonslancer d’urgence un programme pour pouvoir utiliser nos patrouilleurs (vieux destroyers),canonnières et mouilleurs de mines pour repérer, attaquer et détruire les sous-marins ennemisattirés par nos convois et nos escadres de navires de guerre. Ces navires devront bénéficierd’un entraînement spécifique aux techniques de chasse anti-sous-marine et être équipés pourrepérer les sous-marins ennemis en plongée de façon à pouvoir les attaquer.Comme mesure intérimaire, j’ai ordonné que les convois soient escortés de jour par l’aviation.Nous manquons également de moyens pour que nos avions puissent attaquer des sous-marins.En plus des bombes, il leur faut disposer de charges de profondeur modifiées pour pouvoirêtre larguées du haut des airs.Enfin, nous devons tout simplement déterminer à quelle profondeur les sous-marins ennemispeuvent plonger. Les Allemands nous ont affirmé que leurs sous-marins peuvent plongerjusqu’à 250 mètres. Nos grands sous-marins ne peuvent plonger que jusqu’à moins de 100mètres (certains jusqu’à 120 mètres, en prenant des risques), mais certains sous-marinsennemis sont plus petits. Peut-être traversent-ils nos écrans en plongée profonde. Nous avonsbesoin de charges capables d’atteindre de grandes profondeurs. Les nôtres ne peuvent pour lemoment être réglées plus bas que 100 mètres 12.

9-10 décembre 1941 – Bataille de HainanNos avions de reconnaissance m’avaient informé qu’une force ennemie avait pris la mer. Onsupposait qu’elle était composée de croiseurs français que nous savions basés en Indochine.Les sous-marins de la 6e Flotte avaient été positionnés pour couler ces navires à leur sortie duport. Ils ne les ont même pas repérés. Par contre, les transmissions radio ennemies montraientque leurs sous-marins avaient aperçu nos forces et les avaient signalées.

La force et de la position de l’ennemi étant inconnues, et ayant subi des pertes, le contre-amiral Nishimura a bien agi en demandant des renforts à la 2e Flotte. Je lui ai immédiatementenvoyé les croiseurs lourds Atago et Takao et les destroyers Nowaki et Hagikaze. Ces naviress’ajoutaient au croiseur léger Naka et aux six destroyers restant sous le commandement deNishimura. Il organisa cette force en deux colonnes protégeant le convoi de renforts del’Armée. Celui-ci était composé de 6 cargos, des deux porte-hydravions Mizuho et KamikawaMaru, de 6 dragueurs de mines et de 9 chasseurs de sous-marins.

L’aviation ennemie était active et deux bombardiers Lockheed Hudson ennemis ont étéabattus par des hydravions F1M2 du Mizuho. Un équipage a été sauvé et pris à bord du Takao.Ils ont indiqué appartenir à la “flottille E29 de l’Aéronavale”. Les prisonniers ont été sur monordre interrogés à propos de leurs sous-marins. Ils n’ont pas cherché à cacher, tant cela leur asemblé naturel, que les sous-marins français ont l’ordre d’attaquer tous les navires ennemisqu’ils aperçoivent, quel que soit leur type. Ceci constitue une grande surprise. Les prisonniersne connaissaient pas la profondeur de plongée de leurs sous-marins, ou l’ont dissimulé.Recommandations – J’ai transmis à la 6e Flotte le conseil d’envisager de permettre à nos sous-marins d’attaquer tout navire ennemi aperçu, ce qui n’est pas notre pratique actuelle. Jerecommande également que nous demandions à l’amiral Dönitz les informations suivantes : – son opinion sur cet ordre français et s’il diffère des ordres donnés à ses propres sous-marins,– les informations dont il dispose sur la profondeur de plongée des sous-marins ennemis,– les tactiques qu’il pense efficaces contre les sous-marins ennemis 13.

12 NDE – Les phrases concernant les procédures et les équipements allemands ont été ajoutées par la suite.13 NDE – Ces « recommandations », si elles avaient été transmises de la sorte à la 6 e Flotte, auraient sans douteprovoqué une crise grave. Là encore, ce passage a sans doute été considérablement révisé a posteriori.

On estimait que la force ennemie était composée d’un grand croiseur léger et trois petits croiseurs légers. Ces navires étaient très rapides et bien armés, mais peu blindés. C’est pourquoi le contre-amiral Nishimura avait l’intention d’utiliser le canon plutôt que la torpille comme arme principale contre l’ennemi.La force du contre-amiral Nishimura faisait route au 240 à 11 nœuds. Il avait placé troisdestroyers (Asagumo, Minegumo et Natsugumo) en avant-garde du convoi. Celui-ci étaitescorté sur bâbord par le croiseur léger Naka (amiral) et le croiseur lourd Atago, conduisantles destroyers Yudachi, Harusame et Samidare et sur tribord par le croiseur lourd Takao, ainsique les destroyers Nowaki et Hagikaze. J’ai fait l’éloge du contre-amiral Nishimura pour cetteformation, il a bien mené cette bataille. C’était une formation prudente, grâce à laquelle il a puattaquer et détruire les forces ennemies attirées par le convoi.À 23h26, le destroyer de tête aperçut deux formations ennemies et transmit l’information àtous les navires. La formation sur bâbord, la plus proche, était menée par un grand croiseur àquatre cheminées. Les destroyers réalisèrent qu’ils n’avaient pas encore été détectés etengagèrent immédiatement le combat à la torpille, puis virèrent sur tribord, vers la secondeformation ennemie, avec l’intention de l’engager au canon. L’ennemi aperçut les destroyersd’avant-garde et ouvrit le feu au canon. L’ennemi n’utilisait pas de poudre sans éclair et, dansla confusion, la seconde formation ennemie disparut. Le contre-amiral Nishimura avait déjàordonné au convoi de faire demi-tour. Les deux groupes sur les flancs se lancèrent dans lamêlée, le contre-amiral Nishimura voulant rejoindre son avant-garde et virant au 280 pourdémasquer les canons du Naka et de l’Atago. Le groupe du Takao était à ce moment-là à larecherche du second groupe ennemi. Le croiseur à quatre cheminées en tête de la formationennemie alluma ses projecteurs à 23h37, offrant une cible parfaite à nos canonniers. Lecroiseur ouvrit le feu sur l’Asagumo, le touchant de trois obus avant que le Naka et l’Atago nel’écrasent et ne le réduisent au silence. A 23h41, le croiseur ennemi (à présent clairementidentifié comme un croiseur américain de classe Omaha) avait été écrasé sous les obus et étaitdésemparé. Il fut alors touché par au moins une torpille (et sans doute deux, vu la vitesse àlaquelle il coula) et chavira à 23h51.Note – Les rescapés recueillis affirment que ce croiseur était le USS Marblehead et qu’il avaitété touché plus de quinze fois par des obus allant du 8 pouces au 5 pouces. Selon eux, lapasserelle avait été presque complètement détruite, la casemate de 6 pouces tribord avantavait été détruite (un coup direct d’un obus de 8 pouces suivi probablement par deux de 5,5 ou5 pouces), la tourelle arrière avait aussi été détruite et la salle des machines avait été atteintepar deux fois et la chaufferie avant mises hors service. La partie avant du navire devint laproie des flammes lorsqu’elle fut touchée par au moins une torpille sous le mât principal. Latorpille brisa l’échine du bâtiment et mit ses machines hors d’usage. Il chavira et coularapidement. Le commandant s’appelait Robinson, il périt avec son navire. D’autres survivantsont déclaré que le Marblehead était accompagné de quatre vieux destroyers américains, lesStewart, Parrott, Bulmer et Barker. La présence de cette force américaine n’était ni connue nienvisagée.Les destroyers ennemis ont engagé les destroyers de l’avant-garde au canon et à la torpille,ces dernières ratant leurs cibles. Nos destroyers infligèrent des dégâts importants à au moinsdeux destroyers ennemis. À 23h44, le contre-amiral Nishimura ordonna à ses navires de venirau 350, puis au 010, pour éviter de possibles torpilles et protéger le convoi. L’affrontementdes destroyers se poursuivit, le Samidare touchant un autre destroyer ennemi, mais les deuxformations de destroyers commençaient à perdre leur cohésion tactique.À 23h42, la seconde formation ennemie réapparut. Elle fut détectée à la fois par le groupe duTakao et par les destroyers d’avant-garde, étant située entre eux. Du fait de leur changementde cap, les destroyers croyaient avoir affaire au groupe Takao et le Takao pensait qu’ils’agissait des destroyers d’avant-garde. À 23h45, le navire ennemi de tête alluma un

projecteur, illuminant le Takao et ouvrant le feu sur lui. La portée était inférieure à 3 700mètres. A cette distance, les canons de 6 pouces firent des ravages et le Takao encaissadurement à l’avant, perdant ses trois tourelles de proue et voyant sa passerelle gravementatteinte, un incendie s’y déclenchant. À 23h48, le centre du navire fut sévèrement atteint, desobus pénétrant dans la chaufferie avant et d’autres touchant les hydravions, provoquant unincendie très violent attisé par le système d’alimentation en carburant des appareils. Le Takao,le Nowaki et le Hagikaze ne restèrent pas silencieux. Leur riposte, à très courte portée, réduisitau silence les canons de l’ennemi en moins de 11 minutes. Brûlant fortement, ce navire(identifié comme le croiseur Primauguet) disparut. On pensa à ce moment-là qu’il avait étécoulé, mais aucun survivant ne le confirma et un croiseur endommagé de même type futaperçu par la suite par nos avions.Pendant que cette action se déroulait, trois croiseurs légers ennemis similaires à notre Yubari(identifiés par la suite par des survivants comme étant le Lynx, le Tigre et le Léopard)affrontèrent les destroyers d’avant-garde endommagés. Leur feu concentré désemparal’Asagumo, déjà gravement touché. Vers 23h48, l’Asagumo était totalement désemparé etbrûlait à la poupe. Les croiseurs légers ennemis souffraient aussi, l’un d’entre eux était en feuà ce moment. À 23h50, l’un des croiseurs ennemis fut torpillé (on estime que le responsableétait le Nowaki, grâce à une torpille qu’il avait lancée contre le Primauguet) et coulaimmédiatement. Un second croiseur ennemi était au ralenti et se trouvait alors en feu. LeNatsugumo et le Minegumo l’avaient mis en pièces avec leurs canons et il stoppa. Ce navirefut identifié (à nouveau par le témoignage des survivants) comme le croiseur Léopard. Lecroiseur ennemi restant attaqua l’Asagumo, stoppé et en flammes, à la torpille. L’une d’entreelles toucha à 23h55 et l’Asagumo commença à couler par la poupe. Le Minegumo et leNatsugumo s’en prirent alors à ce navire, identifié plus tard comme étant le croiseur Lynx, quis’enfuit.A peu près au même moment, les destroyers américains furent localisés par le groupeAtago/Naka du contre-amiral Nishimura. L’ennemi faisait route au 045 à grande vitesse. Lesnavires de Nishimura les aperçurent à 23h45, mais ne purent pas les identifier en tantqu’ennemis avant 23h51, nos navires ouvrant alors le feu immédiatement. L’ennemi lança destorpilles et fit demi-tour pour fuir. L’Atago dut changer de cap aussi brutalement qu’undestroyer pour éviter ces torpilles. Les destroyers ennemis combattirent bravement sous le feunourri de nos deux croiseurs et trois destroyers. La formation ennemie se divisa en deux. Nosdestroyers poursuivirent les navires ennemis les plus rapides, l’Atago et le Naka seconcentrant sur les deux navires ennemis qui avaient été endommagés. Les rapports dessurvivants indiquent qu’il s’agissait du chef de flottille, l’USS Stewart (touché par un obus de8 pouces et trois de 5 pouces/40) et de l’USS Parrot (de nombreux impacts de 5,5 pouces). LeNaka et l’Atago tirèrent des torpilles contre eux. À 23h58, l’USS Parrott fut touché et mis enpièces par les impacts de torpilles. L’USS Stewart fut stoppé et coulé par les obus du Naka à00h17 (le 10 décembre). Les deux tiers environ de son équipage et les rares survivants del ’ U S S Parrott furent secourus par l’Atago. Les deux destroyers ennemis restantss’échappèrent, mais tous deux étaient endommagés et en flammes.

Les pertes reflètent bien la fureur de la bataille au large de Hainan. Le contre-amiralNishimura a perdu un destroyer (l’Asagumo, coulé), et un croiseur (le Takao) et un destroyer(l’Hagikaze) ont été si sérieusement endommagés qu’ils ont dû se rendre tous deux à Hainanpour premières réparations avant même de pouvoir rentrer au Japon.Toutefois, la totalité de la force ennemie a été coulée ou endommagée. L’ennemi a perdu ungrand croiseur léger (l’USS Marblehead), deux petits croiseurs légers (les MN Tigre etLéopard) et deux destroyers (les USS Stewart et USS Parrott). Plus important encore pour le

prestige de la Marine Impériale vis-à-vis de l’Armée, l’engagement n’a pas retardé le convoide plus de deux heures et aucun soldat n’a été perdu.Des quatre navires ennemis survivants connus (grand croiseur léger MN Primauguet, petitcroiseur léger MN Lynx et deux destroyers USN Bulmer et Barker), tous sont endommagés, laplupart sérieusement. La résistance navale ennemie en Indochine a cessé de représenter unemenace, du moins en surface, pour mes forces.Le contre-amiral Nishimura a fait l’éloge des navires ennemis pour leur persévérance dansleur attaque du convoi. Sa force a été prise par surprise par la présence de non pas une, maisdeux forces ennemies. La force américaine a combattu bravement, mais avec des tactiquesdépassées et a révélé ses positions avec des projecteurs et des poudres avec éclair. Les naviresfrançais se sont également bien battus, mais là aussi avec des tactiques dépassées et despoudres avec éclair. Toutefois, leurs obus faisaient de gros dégâts à courte portée lorsqu’ilsfaisaient mouche. L’analyse de leurs obus à partir des fragments et des munitions nonexplosées se poursuit. Les Français sont handicapés par la très faible cadence de tir de leurscanons. Nos destroyers ont été capables de submerger d’obus leurs petits croiseurs rapides, unpar un. L’ennemi est mal préparé aux actions nocturnes à courte portée.

Recommandations – Nos tactiques de combat nocturne ont été validées. Notre armement estexcellent et l’entraînement a bien préparé nos hommes au combat de nuit. Nous avonssystématiquement vu l’ennemi avant qu’il ne nous voie.Identification. Toutefois, nos capacités de reconnaissance des navires peuvent être améliorées.Nos hommes doivent être mieux entraînés à reconnaître et identifier les navires ennemis partype et par classe. Ceci a des implications tactiques importantes à tout moment, mais enparticulier de nuit. Ces recommandations s’appliquent à tout le personnel de la MarineImpériale, mais surtout aux officiers, aux vigies et aux équipages de notre Aviation.Incendie. L e Takao a été durement touché à courte distance par des obus ennemisétonnamment lourds (obus de 6 pouces de 124 livres) et en a fortement souffert. Ce fait auraitpu être prévu. Ce qui n’était pas prévisible était la vulnérabilité au feu de ce croiseur lourd,provoquée par les dégâts causés au système d’alimentation en carburant de ses hydravions. Sil’incendie s’était propagé aux torpilles, le navire aurait bel et bien pu être perdu. Nos naviressont trop vulnérables au feu. La 2e Flotte a reçu l’ordre d’utiliser toutes les ressources localeset celles des navires pour retirer les matériaux inflammables des bâtiments, pour improviserdes systèmes de gaz inertes pour les systèmes d’alimentation en carburant et pour améliorerleur capacité de lutte anti-incendie. Des procédures sont à présent en vigueur pour combler leslacunes dans la manipulation du carburant et le rangement impropre des munitions en dehorsdes magasins 14.

Invasion de Bornéo (Miri)

17 décembre 1941À l’aube, des avions de transport L2D2 ont largué 570 parachutistes sur Miri. L’assautaéroporté était coordonné avec un bombardement effectué par des bombardiers de la MarineG4M1 basés à Bin Dinh et les avions des Zuiho et Shoho. À 07h30, un régiment complet deTroupes Spéciales de Débarquement de la Marine a été débarqué par la force Takahashi. Lestroupes du Commonwealth stationnées à Miri furent empêchées de détruire la raffinerie et lesinfrastructures pétrolières associées. Vers 14h00, nos Troupes Spéciales contrôlaient Miri et

14 NDE – Il s’agit de vœux pieux, ce qui était faisable et ce qui était souhaitable sur les navires japonais (commesur les autres !) n’étant pas la même chose.

d’autres étaient débarquées en baie de Brunei. Les porte-hydravions Chiyoda et Kamoi étaienten train d’établir une hydrobase.Des bombardiers ennemis firent une première attaque vers midi. Aucun objectif important nefut touché. Une autre attaque, vers 16h00, fut interceptée par nos chasseurs (A5M4, A6M2 ethydravions F1M2), trois bombardiers hollandais furent détruits et deux autres endommagéspour la perte d’un A5M4 et un F1M2. Le transport Hie Maru fut touché par une bombe etincendié à l’avant. L’incendie fut éteint vers 17h00. Le navire n’était pas gravementendommagé.Des sous-marins alliés étaient présents dans la zone et menèrent plusieurs attaques. Bien queplusieurs sous-marins aient été donnés comme détruits, aucune preuve indiscutable, épave,survivants ou débris, n’a été découverte. Aucune poursuite de sous-marin par des navires desurface n’a été menée à son terme. Un E13N2 rapporte une destruction certaine près dumouillage et son équipage a été très insistant dans sa revendication. Elle doit être encorevérifiée, mais c’est actuellement la meilleure possibilité de destruction d’un sous-marin.

Perte du destroyer AsakazeÀ 18h55, le destroyer Asakaze fut frappé par une torpille et coula en 25 minutes. L’impact seproduisit à l’arrière. Son capitaine tenta de le rapprocher de la plage, mais fut dansl’incapacité de l’échouer. Il réussit néanmoins à le conduire en eaux peu profondes avant qu’ilne coule. Le navire pourrait être renfloué, car il se trouve en position quasi verticale dansseulement 20 mètres d’eau 15. Il a été touché par la torpille dans une zone où le fond setrouvait à seulement 30 mètres, mais le sous-marin responsable ne fut pas localisé.L’ennemi est capable de nous infliger des pertes en utilisant des sous-marins avec une totaleimpunité, même dans des eaux peu profondes dans lesquelles nos propres submersibles declasse I et même RO sont trop grands pour opérer. Les Hollandais ont revendiqué ce torpillagepar la suite.Recommandations – L’ennemi fait un bon usage de petits sous-marins dans les eaux côtières.Les sous-marins hollandais ne font que 600 tonneaux en surface. Nous avons prouvé que lessous-marins petits et rapides de type A sont très utiles en eaux peu profondes comme celles deSingapour, mais ces sous-marins de poche nécessitent un bâtiment de type I pour opérer. Nousavons donc besoin d’un sous-marin côtier de petite taille, peu coûteux et rapide, capabled’opérer sans le soutien des bâtiments de type I 16.

18 décembre 1941Les attaques ennemies dans la zone de Miri se sont poursuivies. Environ six bombardiersnéerlandais ont attaqué peu après l’aube. Trois furent aperçus s’écrasant après avoir été pris enchasse par des chasseurs A5M des Shoho et Zuiho. Une seconde attaque menée par troisbombardiers et quelques chasseurs Brewster se produisit dans l’après-midi. Ce raid futtotalement annihilé, un A5M4 et un F1M2 étant perdus. Le cargo Hiyama Maru fut touché etun incendie se déclencha à bord. Bien que fortement endommagé, le feu fut éteint et le navireancré avec succès dans des eaux peu profondes. Le porte-hydravions auxiliaire Sanuki Marufut endommagé par trois near misses, mais resta capable de faire manœuvrer ses appareils.

Perte du croiseur léger KumaVers le milieu de la journée, la force de couverture du vice-amiral Takahashi et les cargos enétat de prendre la mer quittèrent la rade de Miri, ayant débarqué toutes les troupes et toutl’équipement. À 11h53, le croiseur léger Kuma, appartenant à l’escorte, fut frappé par deux

15 NDE – Après bilan plus approfondi, les dégâts furent jugés trop étendus pour que le renflouement soit rentable.16 NDE – Il s’agit apparemment d’une façon de détourner l’attention de la perte d’un destroyer en soulignant lesinsuffisances de la flotte sous-marine japonaise.

torpilles lancées par un sous-marin ennemi. La première toucha sous la passerelle, sur tribord,alors que le navire était en train de zigzaguer. La seconde torpille toucha les salles desmachines quelques secondes après la première. Le navire stoppa très rapidement et prit unegîte de 15 degrés. Vers 00h15, la gîte était passée à 25 degrés, la plage arrière était inondée etil devint évident que le navire ne pouvait pas être sauvé. Il fut immédiatement abandonnéavec des pertes extrêmement faibles. Le Kuma chavira à 00h22 et coula peu après, sonéquipage étant secouru par les escorteurs. Bien que l’épave repose en eaux peu profondes, àseulement 30 mètres de profondeur, elle ne peut pas être renflouée, un plongeur ayant en effetsignalé qu’elle se trouve sur le flanc et que le fond est boueux.Problème – Une fois de plus, un sous-marin ennemi nous a infligé une perte sérieuse, et ce, eneaux peu profondes. Ce submersible n’a pas été poursuivi jusqu’à épuisement et il n’y aaucune preuve qu’il ait jamais été localisé, malgré toutes les charges de profondeur utilisées.La leçon est la même que précédemment. Notre capacité à localiser, attaquer et détruire unsous-marin ennemi en plongée est sérieusement défaillante, si ce sous-marin était bien enplongée. Mais comme la nuit était nuageuse, ce submersible peut très bien avoir été ensurface.Nous avons besoin de percer l’obscurité pour localiser des cibles telles que des sous-marinsen surface ou des navires ennemis situés hors de portée de vue de nos vigies. Les récentesinformations sur le développement des radio-détecteurs semblent prometteuses et doivent êtresuivies de près 17.

Perte du transport de l’Armée Hayo MaruNos forces commencèrent à débarquer dans le Golfe de Lingayen le 18 décembre 1941.L’opération toute entière fut un temps compromise à cause du mauvais temps. Nos patrouillesaériennes aperçurent dans la zone une grande partie de la trentaine de sous-marins américainsbasés aux Philippines, alors qu’ils essayaient d’intervenir. Toutefois, en prévision, nos forcesavaient été conduites dans des eaux très peu profondes. Malgré cette précaution, des sous-marins ennemis réussirent à pénétrer dans ces eaux. Le rapport de combat signale :« … à 06h45, un périscope fut aperçu par nos destroyers, mais il disparut. À 07h10, quatretorpilles manquèrent les transports de l’Armée. Les destroyers commencèrent le grenadage,l’eau n’étant profonde que de 25 mètres. À 07h59, deux torpilles touchèrent le transport del’Armée de 5 445 tonneaux Hayo Maru, qui explosa, provoquant de nombreux morts parmiles soldats. Les destroyers menèrent de nouvelles attaques. Ils détectèrent un sous-marinennemi grâce à leurs hydrophones et attaquèrent en fonction de ces relèvements. Comme lesous-marin se trouvait en eaux peu profondes (15 à 25 mètres de profondeur) et était audible,la chasse se poursuivit tout au long de la journée. Pourtant, le sous-marin s’échappa vers22h00 et ne fut plus détecté par la suite. Ce sous-marin ou un autre fut également actif lelendemain, lançant des torpilles contre le groupe du porte-hydravions Chiyoda. Cette attaquese produisit dans des eaux allant jusqu’à 60 mètres de profondeur. Là aussi, le sous-marin futpoursuivi grâce aux hydrophones pendant toute la journée, mais il s’échappa à nouveau… »Cette attaque est très préoccupante. Au moins un (et probablement deux ou trois) sous-marinsennemis ont opéré dans des eaux très peu profondes, à l’intérieur de notre mouillage, pendantdeux jours, menant au moins quatre attaques à la torpille et coulant un transport de l’Armée.Nous ne fûmes pas en mesure de couler un seul de ces sous-marins, malgré la faibleprofondeur de l’eau et malgré de nombreux navires de surface équipés d’hydrophones.

17 NDE – La dernière phrase a sans doute été ajoutée à la suite de l’examen des équipements récupérés sur lePrince of Wales.

Les leçons sont les mêmes que précédemment. Nous avons besoin de détecteurs de sous-marins, de charges de profondeur plus nombreuses et plus efficaces et d’un grand nombre decanonnières telles que décrites ci-dessus et nous en avons besoin de façon urgente 18.

23 décembre 1941Attaque sous-marine contre la 2e FlotteÀ 21h30, la 2e Flotte a été attaquée par plusieurs sous-marins ennemis.La première attaque était dirigée contre mon propre navire-amiral, le cuirassé rapide Haruna,qui évita quatre torpilles à 21h30. D’autres torpilles ont également été observées par d’autresnavires, mais il s’agissait probablement de celles que le Haruna avait évitées.La deuxième attaque se produisit à 21h32, lorsqu’un autre sous-marin toucha le porte-hydravions Chiyoda de deux torpilles. Le navire fut perdu (voir le rapport complet ci-après).Une troisième attaque sous-marine à 21h40 toucha le croiseur de type A Maya d’une torpille,à bâbord, au niveau de la tourelle 1. Le navire fut sérieusement endommagé et un incendie sedéclara. Bien que celui ne fût pas critique, la décision fut prise de noyer les magasins avantpar précaution. Le Maya fut capable de continuer vers les Paracel à vitesse réduite.[Note du service de traduction : il y avait un seul sous-marin, identifié à l’époque par l’officier deliaison de la Marine Nationale à Singapour comme le sous-marin français Le Centaure. Le sous-marin français Le Glorieux opérait plus au nord.]La quatrième attaque se produisit bien plus tard, vers 01h45, lorsque le porte-avions Shohoaperçut au moins quatre torpilles. Il réussit à virer pour les éviter, et les torpilles passèrent depart et d’autre. S’il ne les avait pas détectées, je pense que le bâtiment aurait été perdu.[Note du service de traduction : il s’agissait sans doute du sous-marin HMS Severn, qui affirma avoirlancé 6 torpilles à grande distance contre un cuirassé et un porte-avions à 01h45, malgré un angle detir défavorable.]Il s’agissait là d’une embuscade nocturne bien planifiée. Si l’ennemi avait été plus chanceux,nous aurions perdu le Haruna, le Maya, le Shoho et le Chiyoda en une seule nuit, sans infligeraucun dégât à la flotte ennemie ! Ce n’est pas acceptable. Nous n’avions aucune informationsur l’ennemi jusqu’au moment où nous avons vu ses torpilles. Nos navires n’ont jamais établile contact avec ne serait-ce qu’un seul sous-marin ennemi, pour toutes les raisons discutées ci-dessus.Si nous ne résolvons pas ce problème maintenant, les sous-marins ennemis pourront saigner notre flotte et les convois vitaux de navires marchands que nous devons envoyer dans la Zone de Ressources Sud et pour soutenir l’Armée.Bien évidemment, j’ai ordonné à tous nos navires marchands sur ce théâtre de naviguer enconvois. Mon état-major estime que si les transports de l’Armée avaient navigué isolément,les pertes infligées par les seuls sous-marins ennemis auraient été prohibitives 19.

Perte du ChiyodaÀ 21h32, le Chiyoda fut touché par deux torpilles. Celles-ci avaient été aperçues juste avantl’impact. Le navire était en train de virer sèchement au moment de l’impact pour essayer deles éviter. La première torpille fit mouche à bâbord au niveau de la tourelle n°1 à 21h32. Laseconde frappa à bâbord au niveau de la passerelle environ 5 secondes après la première. Lenavire fut stoppé immédiatement. Il prit une gîte de 12 degrés sur bâbord. Celle-ci fut réduiteà 6 degrés par contre-inondation vers 21h45.J’ai reçu ce rapport pendant que le gros de mes forces effectuait une manœuvre d’esquive.À 21h55, le Chiyoda signala qu’il était en route vers le Golfe de Lingayen à 4 nœuds.

18 NDE – Ce paragraphe ne figurait sans doute pas dans l’original. De toute façon, il n’était pas question fin 1941de donner priorité aux escorteurs de convois dans les chantiers navals japonais.19 NDE – En réalité, les ordres d’organisation des convois furent très inégalement suivis.

À 22h05, le Chiyoda signala que, parmi les avions positionnés sur son pont supérieur, les troisà la poupe avaient été endommagés par le soubresaut du navire lors de l’impact et qu’unecatapulte était hors service pour la même raison.À 22h12, le Chiyoda signala qu’il lançait des avions pour abaisser son centre de gravité. Lesavions avaient pour ordre de retourner à Lingayen. Cinq avions furent lancés. L’un emportaitle portrait de l’Empereur. Après avoir contribué à installer une hydrobase à Miri, le navireportait encore 6 F1M2, 4 E13A1 et 2 E8N. Trois E13A1 et 2 F1M2 furent sauvés. QuatreF1M2, 1 E13A1 et 2 E8N furent perdus avec le bâtiment.À 22h45, le reste de la 2e Flotte avait achevé une manœuvre d’esquive en huit à grande vitessevers le nord. Sur mon ordre, nous nous sommes rapprochés de la position du Chiyoda pourévaluer ses dommages et le localiser avec précision. Nous l’avions aperçu, avec son escorte, àenviron 8 000 mètres.À 22h47, une lumière brillante fut aperçue provenant du Chiyoda, qui disparut alors à notre vue. Nous avons su ensuite que la fumée de l’incendie l’avait masqué.À 22h49, le Chiyoda signala qu’il avait subi un incident interne. Au même moment, unviolent incendie en arrière de la superstructure était visible depuis le navire-amiral. Une boulede feu de couleur rouge fut aperçue en train de s’élever verticalement au-dessus du navire,avec des flammes s’élevant au-dessus de la cheminée.À 22h59, le Chiyoda signala qu’un incendie d’essence s’était déclenché et qu’il n’était paspossible de couper les pompes à essence élévatrices, qui déversaient du carburant dans lehangar, où elles alimentaient un incendie incontrôlable. Tous les efforts furent faits pourcouper le système de pompage du carburant, mais il fut impossible de contacter la salle desvalves et des pompes.Les communications furent brutalement coupées à ce moment et ne furent plus rétablies, saufpar projecteur.Aucun autre signal ne fut reçu du Chiyoda. Le navire amiral a pu observer le feu s’étendre enune minute ou deux tout le long du navire jusqu’à la poupe. L’équipage était incapable decombattre l’incendie.L e Chiyoda signala par projecteur qu’il n’avait plus que ses générateurs d’urgence, car lesmachines avaient dû être évacuées en raison de la chaleur et de la fumée. Il y eut une nouvelleexplosion, très violente, à 23h25, et la superstructure commença à brûler. L’équipage étaitforcé de se jeter à la mer, et le navire fut abandonné. J’ai donné l’ordre à 23h45 de le coulerau canon, ce qui fut fait par les batteries secondaires du Haruna 20.J’ai retenu le navire amiral pour recueillir les survivants, car je voulais connaître la cause decet incendie et savoir pourquoi le navire avait été perdu de façon si catastrophique. J’ai doncordonné que l’interrogatoire des survivants commence immédiatement. Cet interrogatoire adepuis permis de tracer un tableau complet des événements dans toutes les parties du navire.En effet, une grande partie de l’équipage a été sauvé, bien que son commandant, le KaigunDaisa [capitaine de vaisseau] Kaku Hadara 21 ait refusé d’abandonner le Chiyoda, choisissantla mort. Le portrait de l’Empereur fut sauvé.L’officier opérationnel Yomura (Chiyoda) a fourni de nombreuses informations, ainsi que leséquipages des avions et le personnel du hangar. Une compilation succincte de ce qui s’estpassé suit. L’ensemble des documents est envoyé à bord du Maya 22.

20 NDE – Curieuse contradiction : le premier rapport, envoyé peu après les faits, évoquait un torpillage par undestroyer, d’autant plus qu’il apparaît dans les archives japonaises que le Chiyoda n’a été ni torpillé ni canonné,mais, moins honorablement, sabordé. Cela ne fait que renforcer la présomption que le rapport dont nousdisposons a été quelque peu maquillé a posteriori.21 Les noms des Japonais sont donnés dans l’ordre occidental (prénom puis nom), à l’inverse de l’ordre japonais.22 NDE – En réalité, les morts étaient très nombreux dans les équipes de contrôle des dommages, qui auraient dûfournir le plus de renseignements. Le récit détaillé des événements est donc en partie le fruit de déductions.

Les dégâts occasionnés par les torpilles étaient sérieux, mais pas fatals. Le second impact étaitbeaucoup plus faible, soit que la torpille n’ait détonné que partiellement, soit qu’elle aitexplosé par sympathie avant de toucher le navire. Pourtant, ce fut le coup fatal, car ilprovoqua la rupture de réservoirs d’essence d’aviation dans le hangar et à bord des troisavions endommagés à l’arrière du pont supérieur. Les dommages les plus graves ne furent pasimmédiatement évidents, mais nous savons maintenant qu’au moins l’une des canalisationsdes pompes élévatrices de carburant venant des réservoirs inférieurs fut rompue. Cettecanalisation ne pouvait être isolée par des valves d’arrêt sur son trajet, ce qui est une faute deconception critique.Le pont supérieur fut nettoyé par des lances à incendie avant que les avions restantopérationnels ne soient lancés. L’essence dans le hangar ne put pas être nettoyée à la lance,mais dut être épongée avec du sable, qui fut ensuite jeté à la pelle. Deuxième faute deconception : il n’y avait aucun moyen de modifier la ventilation normale pour chasser l’air duhangar directement à l’extérieur sans passer par un local de ventilateur. Le système n’était pasconçu pour cela et il a été impossible de ventiler le hangar.Troisième faute de conception : il n’y avait aucun moyen de purger toutes les conduitesd’essence et les réservoirs traversant le hangar jusqu’au pont supérieur.Mais la pire faute de conception fut qu’il n’y avait aucun moyen de remplir le systèmed’alimentation en essence par un gaz ininflammable.Cette accumulation de fautes de conception causa la perte du Chiyoda. Il faut se souvenir quece vaisseau était neuf, conçu selon les plus récents standards de la Flotte. Les mêmes défautsexistent donc sur tous les porte-aéronefs de la Marine Impériale, et doivent être éradiquésd’urgence 23.Une détonation caractéristique d’une explosion de vapeur d’essence se produisit dans lescanalisations du système de ventilation juste à l’avant du hangar. Ceci ouvrit une brèche dansla cloison du hangar avant, ainsi que dans le plafond de la salle des machines. L’explosion seproduisit dans un petit ventilateur et fut extrêmement puissante pour le volume réduit de celocal. Selon l’Ingénieur de la Flotte, des vapeurs d’essence à concentration suffisante peuventavoir une puissance explosive égale au tiers de celle d’un volume semblable de TNT. Cetteexplosion avait donc la puissance d’une à deux tonnes de TNT.L’incendie se répandit immédiatement à l’extrémité avant du hangar et des débris enflammésfurent projetés sur toute la longueur de celui-ci. L’équipe du hangar utilisa immédiatement seslances à incendie, mais sans effet. Le feu progressa au-dessus de leurs têtes le long du plafonddu hangar, avec la puissance d’un tsunami. Nous savons maintenant qu’il était alimenté parles conduites d’essence, qui était sans doute à ce moment en pression positive. La chaleurirradiée était si importante qu’elle mit le feu aux avions situés dans le hangar et forçal’équipage à se replier. Tous souffraient de brûlures par irradiation du haut du corps. En moinsde deux minutes, le hangar devint un enfer de feu [litt. : comme s’il faisait partie d’une maison dedémons]. D’autres explosions suivirent dans le système de ventilation et l’incendie du hangardevint très violent. L’équipe de la salle de pompage de l’essence signala que, bien que lespompes soient coupées, la chaleur forçait l’essence à circuler dans le système en l’aspirant àpartir des réservoirs principaux. Les équipes de pont ne remarquèrent pas d’essence, celle-cidevait donc couler dans le hangar par des conduites rompues. Les seules vannes de coupureétaient dans la salle de pompage, dans laquelle il n’y a eu aucun survivant. Il ne semble pasqu’ils aient eu la possibilité de fermer les vannes avant d’être tués.

23 NDE – Il s’agit là, on s’en doute, d’une déclaration ajoutée sur le rapport définitif et surtout destinée àpermettre à Kondo de prendre position pour l’avenir – il devait fort bien savoir que les mesures qu’il préconisait,très louables, allaient à l’inverse de la conception des navires japonais, qui n’hésitait pas à faire passer lacommodité et la simplicité (donc souvent l’efficacité) avant la sécurité. Tout a un prix !

Le pont supérieur était à ce moment-là devenu si chaud qu’il rougeoyait à certains endroits.Un effort fut entrepris avec succès pour fermer les ascenseurs et les aérations extérieures versle pont du hangar. Ceci sembla isoler le feu, qui montra un court moment des signesd’étouffement. Le rougeoiement du pont supérieur cessa, mais des gaz très chauds filtraientautour de l’ascenseur. De façon regrettable, les avions sur le pont d’envol qui avaient étécatapultés avaient été armés et avaient dû être allégés pour pouvoir être catapultés, du fait dela gîte. Les bombes avaient été retirées et laissées sur le pont d’envol dans la hâte à lancer lesavions. Elles n’avaient pas été redescendues dans les magasins ou jetées par-dessus bord 24.Une ou plusieurs d’entre elles explosèrent à cause de la chaleur et plusieurs autres suivirent.Les explosions firent des trous dans le pont supérieur, ce qui rouvrit le hangar, permettant àl’air d’y pénétrer. L’incendie reprit avec une violence accrue. Les responsables de l’abandondes bombes sur le pont d’envol furent tués lorsqu’elles explosèrent. Peu de temps après,l’incendie provoqua l’abandon de la salle des machines à cause de la chaleur et de la fumée.Les moteurs Diesel continuèrent à fonctionner, mais le manque de lances à incendie et decombinaisons de protection signifiait que l’équipage ne pouvait que contenir les flammes,mais pas les repousser. Le contrôle de l’incendie ne fut jamais possible.La perte du Chiyoda n’aurait pas dû avoir lieu. Le navire a été perdu non pas du fait destorpilles, mais à cause de l’incendie. Ceci a pu se produire à cause de procédures défaillantes,d’une conception erronée et d’un manque d’équipement et d’entraînement anti-incendie.Le Chiyoda a été conçu selon les standards des porte-aéronefs modernes, et il était neuf. Sesdéfauts sont partagés par tous les porte-aéronefs. La liste suivante indique les améliorationsurgentes et impératives qu’il faut leur apporter.Aucun avion avec le plein d’essence ne devrait être maintenu dans le hangar.Tout le système d’alimentation en essence doit pouvoir être vidangé rapidement et doit remplipar du gaz inerte lorsqu’il n’est pas utilisé.Le système d’alimentation en essence doit pouvoir être utilisé partiellement, de telle sortequ’il ne faille pas remplir tout le système pour faire le plein d’un appareil.Il doit y avoir des valves de fermeture disposées dans de nombreux endroits. Il doit y avoirdes vannes de fermeture à distance sur le pont supérieur.Aucune munition ne doit être stockée en dehors des magasins à munitions, en aucun endroit eten aucune circonstance, en particulier sur le pont d’envol. Si une munition ne peut pas êtreremise en stock, elle doit être jetée par-dessus bord.Les hangars doivent être équipés d’arroseurs au plafond, ceux-ci doivent pouvoir êtreactionnés depuis l’intérieur du hangar et depuis le pont supérieur.Les hangars doivent être équipés de rideaux d’amiante ignifugés pouvant être fermésrapidement.Davantage de lances à incendie sont nécessaires pour combattre des feux d’essence.Tous les hangars doivent être équipés d’ouvertures pour évacuer les liquides vers l’extérieur(que ce soit de l’essence ou l’eau pour combattre l’incendie).Les équipes d’intervention du Chiyoda ont été employées dans leur totalité pour combattrel’inondation, ce qu’elles ont fait avec succès. Il ne restait personne pour les équipes spécialesanti-incendie. Des équipes d’intervention plus spécialisées sont nécessaires sur les porte-avions.Davantage d’équipements d’intervention sont nécessaires.Davantage de pompes portatives sont nécessaires à la fois pour combattre l’incendie et pourévacuer l’eau.Je recommande fortement qu’aucun porte-aéronefs qui n’est pas en mer actuellement ne soitautorisé à lever l’ancre avant que les recommandations vitales mentionnées dans ce message

24 NDE – Reproche assez injuste. Les ordres étaient de ne pas jeter les armes à la mer (pas de gaspillage) mais deles redescendre en soute, ce qui était bien difficile sur un navire venant d’être torpillé.

n’aient été mises en œuvre, au moins sous la forme de mesures provisoires prises avec lesressources locales. Les porte-aéronefs sous mon commandement font tous leurs efforts pourse conformer à toutes celles de ces recommandations que les ressources locales permettentd’appliquer. Ils doivent s’y conformer entièrement à la première occasion, même si cecirevient à les rendre temporairement indisponibles pour d’autres activités 25.

Enseignements tactiques de cette perteUne leçon majeure des premiers combats est le danger représenté par les sous-marinsennemis, pour nos navires de guerre comme pour nos transports.Il est connu que des avions sont capables de forcer des sous-marins ennemis à plongerpendant le jour. Des patrouilles aériennes doivent donc être systématisées autour de tous nosports et aussi loin que peuvent être efficaces nos appareils de lutte ASM basés à terre 26.Nos destroyers ne sont pas adaptés à la lutte contre les sous-marins ennemis, car ils ont desmissions plus importantes. L’expérience du combat montre à présent la sagesse de la décisionde construire les kaibokan de classe Shumishu et Etorofu. Beaucoup d’autres kaibokan et dechasseurs de sous-marins de type CH-13 doivent être construits pour détruire les sous-marinsennemis. Des moyens de détection des sous-marins ennemis en plongée comme en surface denuit doivent être installés sur ces navires, et ils doivent être dotés d’un armement ASMabondant 27.

25 NDE – Ce qui veut dire que, pour se conformer aux vœux de Kondo, qui étaient loin d’être tous réalistes (il lesavait sans doute fort bien), chacun devait faire son possible pour assurer la sécurité des navires. Mais àl’impossible nul n’est tenu : si un malheur devait arriver, chacun ayant fait au mieux (à commencer par Kondo),personne ne serait à blâmer.26 NDE – En 1941, Kondo ne pouvait pas recommander la construction de porte-avions d’escorte à l’Amirauté !Ces petits bâtiments n’étaient évidemment pas prioritaires. Même les riches Américains, à la même époque,décidèrent de se passer de quatre de ces petits navires (déjà en construction) pour récupérer les deux porte-avionslégers promis aux Français. Jamais les Japonais n’eurent assez de coques disponibles pour fabriquer un nombresignificatif de porte-avions d’escorte.27 NDE – Les deux dernières phrases sont certainement des ajouts. Le Japon n’avait pas les moyens d’ajouter àson programme de constructions navales de l’époque une kyrielle d’escorteurs. Des décisions stratégiques aussiessentielles attendraient près d’un an avant que le gouvernement japonais ne se résolve à les prendre.

Appendice 13

Le rapport soviétique du 28 décembre 1941

Note du traducteur (22 juin 2005)Ce qui suit est la transcription d’un fichier du “Dossier Ramsay” des Archives MilitairesCentrales de la Fédération Russe, Moscou.Les nouvelles règles de déclassification de ces Archives autorisent la mise à la disposition dupublic des dossiers qui ont été fermés depuis au moins 60 ans. Cela ne signifie pas que lesdocuments inclus ont « seulement » 60 ans, car certains dossiers ont été considérés comme« administrativement » ouverts jusqu’à une date bien plus tardive que les documents qu’ilscontiennent. Avant d’être déclassifiés, dossiers et documents doivent être examinés par leBureau de la Sécurité du Service de Renseignements Militaires russe (le GRU), qui peutdécider de caviarder certaines parties du matériel déclassifié.Le “Dossier Ramsay”, qui a suscité un grand intérêt dans la communauté des spécialistes del’histoire militaire, est disponible depuis quelques semaines. La transcription ci-dessouscorrespond à une transmission radio de “Source Ramsay” à “Centre Moscou” (CM) parl’intermédiaire de “Wiesbaden”, en date du 28 décembre 1941.“Ramsay” était le nom de code du réseau de Richard Sorge, mais aussi celui de Sorge lui-même. “Wiesbaden” était le nom de code de la station de radio du GRU opérant près deVladivostok. “Otto” était le nom de code d’Hosumi Ozaki, bras droit de Sorge et conseillerdu Prince Konoye. A l’automne 1941, Ozaki avait été nommé au Comité de MobilisationIndustrielle. A ce titre, il participa à des réunions tenues à partir de décembre 1941 et jusqu’àson arrestation. “Showa” était le nom de code utilisé pour l’Ambassadeur d’AllemagneEugen Ott qui, en 1939, avait demandé à Sorge de devenir son conseiller privé.

Le 28/12/41De : RamsayA : CMVia : WiesbadenDirection : (numéro caviardé)Statut : Extrêmement Important

Texte :Premiers enseignements tirés par le Japon

sur la première période de la guerre et leurs implications

Sources : Otto et Showa

(1) Les opérations militaires des trois dernières semaines ont démontré unsérieux déséquilibre entre les capacités des forces navales et terrestresd’atteindre les objectifs fixés.Seule l’opération contre les forces américaines aux Philippines se déroule plus viteque prévu. L’offensive contre les colonies françaises en Indochine est maintenant enretard d’environ une semaine sur le calendrier fixé. Le pire retard est survenu dansles opérations contre les forces britanniques en Malaisie.Les opérations amphibies ont été jusqu’ici réussies et elles ont permis aux forcesjaponaises de contourner les principaux points de résistance ennemis et de prendrel’initiative à la fois stratégique et opérationnelle. Cependant, l’exploitation d’undébarquement réussi n’a pas toujours été elle-même couronnée de succès, et lacoopération entre la Marine Impériale et l’Armée Impériale a souvent laissé à désirer.

La doctrine de l’Armée, qui repose sur l’esprit offensif des troupes, n’a pas pleinementdémontré son bien-fondé. Le rapport de forces entre les attaquants et les défenseurss’est souvent révélé trop bas et les concentrations de troupes n’ont pas été assezimportantes pour permettre les percées prévues. L’envoi de renforts substantiels aété décidé lors d’une réunion spéciale entre le commandement de la Zone Sud-Ouest etles autorités de la Marine Impériale. D’autres déséquilibres ont été identifiés dans ladoctrine comme dans la structure des forces engagées. Des améliorations majeuressont nécessaires dans :(a) L’utilisation des chars et la lutte antichar.Il est visible que l’Armée Impériale n’a pas assimilé les leçons de sa défaite à Khalkhin-Ghol. Le fait que des blindés français ou britanniques en nombre inférieur aient nonseulement infligé des pertes tactiques significatives aux unités de l’Armée Impériale,mais aient réussi à modifier le rapport de forces local est considéré comme une bonneindication que le potentiel des unités blindées a été sous-estimé. Le matériel blindé del’Armée laisse très sérieusement à désirer.(b) L’appui au sol par les unités de l’aviation de l’Armée.La comparaison avec la doctrine des opérations aériennes tactiques de la Luftwaffe adémontré que l’Armée Impériale manque d’une véritable doctrine de l’appui au sol.(c) La préparation d’artillerie et le tir de contre-batterie.En Malaisie, l’artillerie britannique s’est montrée supérieure.

L’Etat-Major de l’Armée Impériale prévoit actuellement de :(i) Créer des formations blindées spécifiques au niveau de la division et améliorer laqualité de ses chars et de ses antichars.(ii) Développer des unités aériennes spécifiques pour l’appui tactique rapproché etpour l’interdiction aérienne dans la zone du front.

Quoique plus réussies, les opérations de la Marine Impériale semblent elles aussi avoirconduit à diverses réévaluations de la doctrine et du matériel.(a) La lutte anti-sous-marine est de mauvaise qualité.(b) Les procédures de contrôle des dommages laissent sérieusement à désirer.(c) Le matériel destiné aux débarquements amphibies s’est parfois révélé inadapté àune mise à terre rapide des équipements lourds.

L’Etat-Major de la Marine Impériale cherchera à remédier autant que possible à cesdéfauts.

(2) L’Etat-Major Impérial a décidé le transfert d’un nombre d’unités significatifde l’Armée du Kwantung à la Zone Sud-Ouest.Pas moins de six régiments d’infanterie des 14e et 57e D.I., une brigade d’artillerie decampagne (deux régiments) et une brigade blindée sont en cours de transfert par merde Port-Arthur à Hainan. Au moins 80 chasseurs et 60 bombardiers sont aussiredéployés.On peut déduire de ces transferts que l’Armée du Kwantung sera incapabled’opérations autres que défensives durant l’été 1942. L’Etat-Major Impérial considèrece fait comme une nécessité stratégique. Il estime aussi que l’affaiblissement del’Armée du Kwantung pourrait améliorer le contrôle politique sur son état-major etempêcher des provocations non autorisées contre l’Union Soviétique. Legouvernement impérial considère actuellement que l’amélioration des relationsdiplomatiques avec l’URSS est une priorité de première importance.Par ailleurs, une grande offensive en Chine contre Chungking a été retardée jusqu’àl’automne 1942 en raison du transfert de nombreuses unités aériennes en Thaïlande.

(3) La mobilisation industrielle doit être accélérée pour faire face à l’usure desmatériels lourds et permettre l’introduction de nouveaux matériels.(a) Avions – Au dernier Comité de Mobilisation Impérial, les chiffres suivants ont étéprésentés pour la production d’avions en 1941 (premier chiffre, sûr, pour le premiersemestre, second chiffre, prévisionnel, pour le second semestre) :Chasseurs : 540 / 650 - Total 1 190Bombardiers : 730 / 870 - Total 1 600Reconnaissance : 320 /380 - Total 700Entraînement : 750 / 900 - Total 1 650Autres : 220 / 260 - Total 480Production totale : 5 620.En 1942, la production doit atteindre 9 500 avions, dont au moins 3 300 chasseurs et2 700 bombardiers. Le fonctionnement des écoles de l’air doit être parallèlementaccru.Les états-majors des forces aériennes de l’Armée et de la Marine Impériales ontrecommandé l’accélération des programmes suivants :(i) Chasseurs lourds. Ce sont les Ki-44 et Ki-61 pour l’IJAAF et le prototype du 14-Shien construction à l’usine Mitsubishi, dont 500 ont déjà été commandés sur la plancheà dessin, pour l’IJNAF. Par ailleurs, la production du chasseur bimoteur Kawasaki Ki-45 doit être accélérée.(ii) Avion anti-sous-marin spécifique correspondant à la spécification 17-Shi. Cet aviondoit être développé par les entreprises Watanabe et doit utiliser des matériaux nonstratégiques.(iii) Hydravions avancés : deux projets de chasseurs (un par Nakajima, l’autre parKawanishi), une variante avancée du Aichi 12-Shi de reconnaissance et d’attaque, etl’Aichi 14-Shi, capable de faire du bombardement en piqué. Les hydravions de combatsont considérés comme des multiplicateurs de forces efficaces lors des opérationsamphibies.(iv) Variante de bombardement en piqué du chasseur Ki-45, utilisant un moteur de1 500 chevaux. Avant sa mise au point, 500 bombardiers en piqués navals Aichi D3A1doivent être achetés comme bouche-trou par l’IJAAF. (v) Deux planeurs d’assaut. L’un, en développement par Kokusai à partir dutransport léger bimoteur Ki-59, est annoncé comme capable de porter 20 soldatséquipés ou un canon de campagne. Il doit être mis en service au printemps 1942. Unmodèle plus gros pourrait porter un char de 8 tonnes.

(b) Chars – L’état-major de l’Armée a autorisé la production d’un nouveau char moyenappelé “Type-97 à nouvelle tourelle (Shinhoto)”, qui doit être armé d’un canon de 47mm à haute vélocité et remplacer le Type-97 Chi-Ha. Mitsubishi a promis deslivraisons rapides dès mars 1942 et jusqu’à mille chars doivent être produits pourrééquiper deux compagnies dans chaque régiment blindé. En 1943, ce char doit faireplace à un autre, le Type-3 Chi-Nu, doté d’un canon de 75 mm à vélocité moyenne 28. Ceprogramme semble être une réponse directe aux problèmes rencontrés par l’ArméeImpériale avec ses chars actuels contre les engins blindés britanniques et français.Mitsubishi a proposé un projet de char lourd qui a été refusé par l’Armée parce quetrop long à développer, trop lourd pour être facilement transporté par bateau et tropgros pour la guerre dans la jungle.La Marine doit acheter une variante amphibie du char léger Type-95 Ha-Go (doté d’uncanon de 37 mm) pour accroître la puissance de feu du premier échelon lors desdébarquements amphibies.

28 NDE – Ces promesses et prévisions se révèleront quelque peu optimistes, non tant dans la rapidité de leur miseen œuvre que, surtout, dans les rythmes de production et les quantités produites.

(c) Navires – Le chef d’état-major de la Marine a présenté une requête spéciale pourla production rapide des navires de guerre suivants, qui doivent s’ajouter à ceux déjàcommandés ou prévus :(i) Douze escorteurs de classe “Etorofu”, en plus des quatre déjà en construction.L’artillerie anti-navires des nouveaux bateaux doit être réduit pour accroître lenombre de grenades anti-sous-marines emportées.(ii) Vingt-quatre “Etorofu simplifiés” avec trois canons de 120 mm et cent grenadesASM, devant tous être lancés avant juin 1943.(iii) Quarante chasseurs de sous-marins de classe “CH-28”, en plus des huit déjà enconstruction. Ce programme doit être terminé à la fin de 1942.(iv) La production des sous-marins de seconde classe de type K6 doit être accélérée.Ils doivent recevoir des moteurs diesel moins puissants, mais des moteurs électriquessimilaires à ceux des bâtiments de type B1 et peut-être une transmission diesel-électrique pour faciliter la production à grande échelle 29 .

(4) Coopération avec l’Allemagne.Le Japon doit demander l’assistance technique allemande sur les points suivants :(a) Conception et tactiques des sous-marins.(b) Utilisation des chars et lutte antichar.(c) Equipements de détection aérienne. Le Japon a demandé au gouvernementallemand son accord pour la vente de quatre équipements de détection aérienne àlongue portée connus sous le nom de Freya et de six à huit équipements de directionde tir connus sous le nom de Wurzburg. Ils doivent être livrés en février-mars 1942, etil est prévu de demander la permission du gouvernement soviétique pour le transitferroviaire de tels équipements.(d) Armement des avions. Le Japon a demandé à l’Allemagne la documentation et lalicence de construction du canon d’aviation MG-151 30.

29 NDE – Ces programmes de construction se heurteront à d’importantes difficultés. Techniques, d’une part, pourles sous-marins, en raison notamment de la mauvaise qualité des batteries japonaises de l’époque. Stratégico-industrielles, d’autre part : la construction d’un nombre important d’escorteurs, envisagée avec réticence carétrangère au concept de la bataille flotte de guerre contre flotte de guerre, devait s’ajouter aux programmes déjàcommandés ou prévus – or ces derniers mobilisaient l’essentiel des capacités des chantiers japonais.30 NDE – Si les deux derniers points, purement matériels, déboucheront rapidement sur des commandes et deslivraisons (de février à avril 1942), les deux premiers points, supposant une supériorité des doctrines et desprocédures allemandes, poseront des problèmes épineux : les Allemands ne demanderont pas mieux que defournir ces informations, mais les Japonais trouveront une foule de bonnes raisons de ne pas les utiliser.

Appendice 14

Le rapport Hara du 30 décembre 1941

Rapport du contre-amiral Hara, commandant la Première Force d’AttaqueSurprise

À bord du navire de Sa Majesté Impériale Nagatsuki, le 30 décembre 1941

Mission : Protection de transports de l’Armée au cours du débarquement de Kuching

Forces impliquées– Couverture à distance : Première flotte aéronavale du vice-amiral Nagumo avec les porte-avions Akagi, Kaga, Shokaku et Zuikaku, les cuirassés Hiei et Kirishima, les croiseurs lourdsTone et Chikuma et les destroyers Tanikaze, Urakaze, Isokaze, Hamakaze, Kasumi, Arare,Kagero, Shiranuhi et Akigumo.– Force de couverture lourde au large : Deuxième Flotte du vice-amiral Kondo avec lescuirassés Haruna, Kongo, Fuso, Yamashiro, Ise et Hyuga, le croiseur lourd Atago, les porte-avions Zuiho (16 chasseurs A5M4 et 12 bombardiers-torpilleurs B5N2) et Shoho (16 A5M4 et12B5N2) et 10 destroyers.– Force de soutien : Troisième Flotte du vice-amiral Takahashi (croiseur lourd Ashigara,porte-hydravions Chiyoda (12 F1M2, 8 E13A1, 4 E8N), destroyer Matsukaze, ravitailleurd’hydravions (transport converti) Sanyo Maru (6 F1M2 et 2 E8N).– Forces d’escorte rapprochée- Première force d’attaque surprise du contre-amiral K. Hara (croiseur léger Natori, destroyersFumitsuki, Satsuki, Nagatsuki, Minatsuki, Harukaze et Hatakaze, 2 dragueurs de mines, 9chasseurs de sous-marins et 6 navires de transport).- Deuxième force d’attaque surprise du contre-amiral S. Nishimura (croiseur léger Naka,porte-hydravions Kamikawa Maru (8 F1M2, 2 E13A2, 2 E8N), destroyers Harusame,Samidare, Minegumo et Natsugumo, 6 dragueurs de mines, 9 chasseurs de sous-marins et 16navires de transport).– Force de débarquement de Kuching : 8 000 hommes des forces navales spéciales d’assaut.– Force aéroportée spécialeLe débarquement a été préparé à l’aube par un posé d’assaut dirigé sur l’aérodrome, lorsque42 avions de transport L2D2 ont largué 615 parachutistes de l’Armée.Simultanément, 15 Mitsubishi Ki-57-I, embarquant chacun 11 hommes, se sont posés surl’aérodrome, prenant par surprise les défenseurs. Tous les Ki-57 ont été endommagés par desarmes légères ennemies. Cinq avions ont été totalement détruits ou abattus.Simultanément, 27 bombardiers G4M1 ont effectué un bombardement très précis de la villede Kuching pour désorganiser la structure de commandement et de communication del’ennemi. Les avions de transport et les bombardiers avaient fait le vol à partir de l’aérodromede Bin Dinh, sur la côte d’Annam.Peu après l’assaut aéroporté, des avions des porte-avions Zuiho et Shoho ont procédé à despasses de bombardement et de mitraillage sur les positions ennemies à proximité del’aérodrome.

Forces ennemiesLa force ennemie présente dans la zone du débarquement et dans les positions proches estconnue sous le nom de “SARFORCE”. Elle équivaut grossièrement à un régiment auto-

suffisant (4 000 hommes) et est composée de 2 bataillons d’infanterie, 1 bataillon mixted’artillerie comprenant des canons anti-aériens et côtiers et diverses autres unités.

Le début des opérations navales– Le débarquement a commencé avant l’aube avec l’entrée des dragueurs de mines dans labaie de Kuching pour éliminer les mines ennemies. Aucune n’a été trouvée dans les zonesd’approche choisies. Un champ de mines important a été localisé par la suite et signalé pardes bouées.– Les porte-hydravions ont lancé leurs appareils pour la défense aérienne locale et l’attaque ausol, tandis que les premières troupes débarquaient. C’est une formule très efficace, car letemps de réaction est très réduit. De plus, nos porte-hydravions ont à présent développéd’excellentes communications avec les troupes de débarquement et l’aviation. Nos E13A1 etF1M2, bien que non conçus pour le soutien rapproché au sol et la défense aérienne, ontprouvé leur utilité dans ces rôles contre une opposition d’un niveau faible à moyen. À cetteoccasion, la résistance ennemie a été bien plus forte. Leurs forces au sol ont combattu trèsdurement.– Vers 08h30, les cuirassés Ise et Hyuga ont été appelés en renfort pour fournir un appui-feu,engageant avec leurs canons de 14 pouces les points forts britanniques. Ceci s’est révéléessentiel pour surmonter la forte résistance ennemie. Je dois louer la sagesse du commandantde la Flotte Combinée d’avoir demandé des obus de 14 pouces à faible coque (HE, hautementexplosifs) pour les bombardements côtiers, après une étude détaillée de la valeur des canonsdes cuirassés contre des cibles à terre, comme l’ont démontré les actions navales des Anglaiset des Français en Méditerranée depuis deux ans. Les obus perforants (AP) traditionnelsauraient pu ne pas exploser au contact d’un sol mou. Cependant, n’embarquer des munitionsHE que jusqu’à 33% de la capacité des soutes à munitions pourrait ne donner qu’une capacitéde bombardement trop limitée si les positions ennemies étaient plus développées qu’elles nel’étaient à Kuching.– Le croiseur léger Naka avait combattu les canons de 6 pouces de la défense côtière, mais ilallait manifestement perdre cet engagement. Le Naka a été touché quatre fois en huit minutes.Les dégâts les plus important ont été provoqués par un coup au but au niveau du pont desquartiers avant, qui a déclenché un incendie limité, mais dégageant beaucoup de fumée. Il aégalement encaissé un obus dans sa troisième cheminée, un autre a endommagé le mâtprincipal et un quatrième a traversé toute la passerelle sans exploser.– Les deux canons côtiers ont été rapidement réduits au silence par le feu des croiseurs lourdsAshigara et Atago, dès que le Naka a demandé une assistance.– Leur feu ainsi que celui des cuirassés a stoppé une forte contre-attaque ennemie surl’aérodrome vers 09h15. La ville de Kuching a commencé à être la proie des flammes à partirde 09h00. Les forces de débarquement navales ont fait la jonction avec les unités aéroportéesde l’Armée vers 13h30. Vers 14h00, les deux cuirassés sont partis rejoindre la force du vice-amiral Kondo.

L’attaque aérienne ennemie– Une attaque aérienne ennemie très puissante est arrivée au-dessus de la zone dedébarquement à 15h30. Cette attaque comportait environ une cinquantaine d’appareilsennemis, répartis de façon équivalente entre un modèle récent de bombardier bimoteur et unmodèle de chasseur bimoteur très puissant et totalement inconnu de nous. Au moins certainschasseurs portaient également des bombes légères d’un poids d’environ 50 kg.– Il y avait alors 8 F1M2 en patrouille de protection aérienne et 4 E13A1 qui attaquaient lespositions ennemies. Les F1M2 ont immédiatement attaqué l’ennemi. Quatre d’entre eux ontété abattus et tous les autres endommagés. Nos avions ont été totalement dépassés. Le seul

avion ennemi abattu a été détruit au-dessus de la plage par un F1M2, lequel a été égalementabattu. Les chasseurs ennemis ont aussi abattu trois des E13A1 et fortement endommagé lequatrième, puis mitraillé la plage, les navires et les barges de débarquement, en coulant troiset en endommageant une douzaine d’autres. Leur puissance de feu est très importante. Ce sontdes avions dangereux.– Plusieurs d’entre eux s’en sont pris au Kamikawa Maru avec leurs canons et leurs bombeslégères. Malheureusement, sur le porte-hydravions, deux E8N étaient sur le point d’êtrelancés pour une patrouille anti-sous-marine. Ils ont pris feu immédiatement. Le systèmed’alimentation en carburant a été tout de suite coupé, mais il était toujours plein d’essence.Deux bombes ont probablement touché le navire, également à l’arrière. Elles ont rompu lesystème d’alimentation. Ceci a condamné le bâtiment. Les feux sont devenus incontrôlables.Dans un effort pour sauver son navire, le commandant l’a approché de la plage et fait ouvrirles portes étanches et valves Kingston. Le bateau s’est posé sur le fond dans environ 12 piedsd’eau une heure après avoir été touché. Malheureusement, le carburant fuit de ses réservoirsles plus bas et il devra se consumer en totalité. Le feu brûle toujours et le navire est totalementcalciné au-dessus du niveau de l’eau. Ses machines n’ont pas brûlé. Les officiers survivantsassurent qu’il serait possible de sauver le navire, mais qu’il sera nécessaire de démolir entotalité tout ce qui se trouve au-dessus des cales supérieures 31.Je note avec inquiétude que, chaque fois, nos porte-aéronefs semblent vulnérables à ce typed’incendie. Malgré l’incontestable dévouement du corps des architectes navals de la MarineImpériale, les risques induits par les feux d’essence d’aviation à bord semblentinsuffisamment pris en compte.– Les chasseurs lourds ennemis ont aussi attaqué le Fumitsuki. Le navire a été endommagépar l’impact de quatre bombes, un mitraillage important et plusieurs bombes qui l’ont raté depeu. Alors qu’il prenait fortement l’eau par l’arrière, son commandant l’a échoué, pourempêcher le naufrage. Il est à présent submergé en totalité en arrière de la salle des machines.Sa chaufferie avant, également inondée, a été asséchée. Une fois qu’un remorqueur sera surplace, le navire sera facilement remis à flot 32.– Les bombardiers-torpilleurs ennemis ont été très efficaces. À ce stade, tous les naviresmanœuvraient à pleine vitesse. Un grand nombre de ces bombardiers se sont concentrés surmon navire-amiral, le Natori, et ont attaqué. Le commandant du Natori a très bien manœuvréson navire, évitant de nombreuses torpilles ennemies. Vers environ 15h40, le navire a étéattaqué simultanément par quatre avions. Tous menèrent leur attaque jusqu’à environ 800mètres. Le Natori a été touché simultanément par deux torpilles. Celles-ci ont ont frappé enmême temps le côté bâbord au niveau de la cheminée n°2. Des observateurs ont remarquédeux panaches bien distincts et, par coïncidence, un photographe officiel était en train defilmer toute la scène depuis un transport proche. Le Natori s’est immédiatement cassé endeux. La proue a chaviré. J’ai réussi à m’échapper de la passerelle, mais malheureusement, lamoitié de mon état-major n’a pas eu cette chance.La poupe est restée à flot quelques heures, son extrémité avant reposant sur le fond dansenviron 80 pieds d’eau, ce qui a permis à la majorité des hommes dans cette partie du navirede s’échapper. Le navire peut être rayé des listes, il ne peut plus être utilisable que pour laferraille. J’ai donné l’ordre de récupérer les canons disponibles pour s’en servir pour ladéfense côtière. L’épave n’est pas un danger pour la navigation.

31 NDE – Les Japonais envisageront en effet un renflouement, mais devant les difficultés d’une pareille opérationtrès loin d’une base navale et le fait que la réparation du Kamikawa Maru occuperait les ouvriers, les matériauxet la place qui pourraient être consacrés à la construction d’un navire neuf, ils y renonceront.32 NDE – Contrepoint de la note précédente : le destroyer, véritable navire de guerre, aura droit à unrenflouement, à un remorquage et à des réparations, mais il est probable que les efforts exigés par sa remise enservice en 1943 auraient pu être employés plus utilement.

– L’ennemi s’en est également pris aux transports. Heureusement, ces derniers se trouvaientdans des eaux peu profondes et il semble que de nombreuses torpilles aient frappé le fond.Les navires perdus sont le Katori Maru (9 848 t) et le Hiyoshi Maru (4 943 t). Les deux ontcoulé sans chavirer en eaux peu profondes. Les deux peuvent être sauvés 33.

Attaques de sous-marins et autres attaques ennemies– Environ 30 minutes après la fin du raid aérien, un E8N a signalé un sous-marin ennemi.Deux E13N2 se sont joints à la chasse. Ils ont attaqué un périscope à 16h15 avec deux chargesde profondeur chacun. Un sous-marin ennemi a fait surface peu après, la poupe submergée. Ila essayé de s’échapper du mouillage. Les Minegumo et Natsugumo l’ont attaqué et coulé aucanon, puis ont récupéré les survivants. Ils nous ont appris que le sous-marin était leHollandais K-XVI. D’autres sous-marins ennemis pouvant se trouver dans la zone, lestransports ont été rapprochés du rivage et une forte patrouille anti-sous-marine établie.– À 20h00, le transport Tosan Maru (8 666 t), ancré, a été frappé par deux torpilles sur lesquatre tirées contre lui. Il a coulé, mais avec seulement six pieds d’eau sous la quille. Leschasseurs de sous-marins ont repéré les sillages, marqués par une forte phosphorescence, et ilsont immédiatement commencé à lancer des charges ASM. Le fond dans cette partie de la baien’est pas à grande profondeur (pas plus de 20 mètres) et les hydrophones ont permis depoursuivre le pistage et l’attaque pendant la nuit. À 03h45, un certain nombre de survivantsont été recueillis par les chasseurs de sous-marins. Ceux-ci appartenaient au sous-marinhollandais K-XVII. C’était lui qui avait torpillé le Tosan Maru. Les attaques continuelles ontendommagé le sous-marin progressivement, provoquant finalement une voie d’eau et sonnaufrage sur le fond. Environ 25 membres d’équipage ont réussi à s’en échapper. L’épave aété signalée par des bouées.– Il y a eu d’autres activités aériennes de l’ennemi pendant la soirée. À 18h30, un avionmonoplace très rapide a survolé Kuching. De nombreux bombardiers lourds ennemis ontattaqué la ville à 22h00. Cette attaque a fortement touché l’aérodrome, mais aucun de nosavions n’y était basé. Plusieurs des transports Ki-15 qui étaient encore sur place ont été ànouveau endommagés, trois sont à considérer comme détruits (ce qui porte les pertes à 8appareils sur 15).

Résumé des points importants1. Nos porte-aéronefs sont trop vulnérables aux incendies 34.2. L’idée selon laquelle les attaques contre les sous-marins doivent être poursuivies jusqu’àépuisement semble valable. Les chasseurs de sous-marins se comportent bien contre un sous-marin ennemi détecté en eaux peu profondes. Leurs hydrophones ont fonctionné, mais un bienmeilleur équipement de détection sous-marine est nécessaire 35.3. L’attaque des bombardiers-torpilleurs ennemis a été une surprise. Je n’avais pas idée quel’ennemi en possédait. Ces avions étaient bien pilotés, ils ont largué leurs torpilles à bassealtitude et à une vitesse relativement lente. Ils constituaient ainsi de bonnes cibles pendant

33 NDE – Leur sort final sera celui du Kamikawa Maru : abandon après constatation que le renflouement seraitun gaspillage de ressources.34 NDE – Conclusion pertinente, mais il était difficile aux Japonais d’en tirer des conséquences pratiquesimmédiates : la construction même de beaucoup de leurs unités était fautive ; quant à leurs équipes de contrôledes dommages, leur organisation était marquée par des dispositions profondément ancrées dans les traditions dela Marine Impériale et peut-être plus difficiles encore à modifier que l’architecture des vaisseaux nippons.35 NDE – Là encore, observations pertinentes – mais la tâche des chasseurs de sous-marins avait été facilitée parleur nombre et la faible profondeur de la baie. Quant à la nécessité de s’acharner longtemps contre un sous-marindétecté, elle est évidente, mais la plupart des escorteurs japonais de l’époque n’avaient tout simplement pas assezde munitions ASM pour cela !

leurs attaques. Toutefois, aucun n’a été abattu par notre DCA. J’ai interrogé à ce sujet lescommandants des navires de la 1ère FAS. Leurs observations sont les suivantes :– La tourelle double de 5 pouces de nos destroyers a une vitesse de rotation trop lente poursuivre des avions rapides proches des navires. Il lui faudrait un moteur plus puissant.– Nos armes légères, canons de 25 mm et mitrailleuses de 12,7 mm et 7,7 mm, sont trop peupuissantes et en nombre insuffisant. Une arme de 37 mm ou 40 mm serait d’un grand secours.Le canon de 25 mm reste utile à courte portée. Les armes plus légères sont un gaspillage depersonnel, même si elles sont utiles pour le moral.4. Les F1M2 et E13A2 sont trop vulnérables face à des avions modernes. Des A6M2-N sontnécessaires comme hydravions de chasse 36.

36 NDE – Cette fois, ces observations de bon sens se heurteront aux insuffisances de l’appareil productifjaponais : sommé de produire à la fois de nouveaux moteurs de tourelle de destroyer, des canons de DCA de37 mm et des hydravions de chasse modernes (en plus de tout le reste), il n’en avait pas les moyens.