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    GABRIEL DELANNE

    LEVOLUTION ANIMIQUE

    ESSAIS DE PSYCHOLOGIEPHYSIOLOGIQUE

    SUIVANT LE SPIRITISME

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    INTRODUCTION

    Le spiritisme est constitu par un ensemble de doctrines philosophiques rvles par les Esprits,cest--dire par des intelligences ayant vcu sur la terre. Son tude peut se scinder en deux parties

    distinctes :1 Lanalyse des faits tablissant la communication entre les vivants et ceux improprementappels les morts ;2 Lexamen des thories labores par ces intelligences dsincarnes.

    La fin de ce sicle est caractrise par une volution radicale dans les ides. Partis dumatrialisme, des hommes de sciences dune haute envergure sont arrivs se convaincre que lenihilisme intellectuel est la plus creuse des utopies.Cette hypothse, en contradiction avec toutes les connaissances que nous avons acquises surlme, nexplique rien de la nature, et na pour rsultats que le dcouragement profond,labtardissement des intelligences, quelle place en face du nant.

    Les anciennes croyances en limmortalit, qui sappuyaient sur lenseignement religieux, ontpresque disparu, et nous assistons aux lamentables consquences qui rsultent, pour la socit,dun manque didal. Il est temps de ragir vigoureusement contre les sophismes des pseudosavants qui ont orgueilleusement dcrt que la mort tait inconnaissable, et, brisant toutes lesentraves arbitraires quon voulait imposer la recherche de lau-del, nous pouvons affirmeraujourdhui que la survivance et limmortalit du principe pensant sont des vrits dmontresavec une rigueur irrsistible.Le spiritisme est venu son heure. Devant les ngations dun scepticisme grossier, lme sestaffirme vivante, aprs la mort, par des manifestations tangibles, quil nest plus possible decontester maintenant, sans se voir tax, juste titre, dignorance ou de parti pris. Cest en vainque lon a tent, dabord, de combattre la nouvelle doctrine par la raillerie. Tous les sarcasmes

    ont t inefficaces, car la vrit porte en soi un cachet de certitude quil est difficile de ne pasreconnatre ; aussi, adoptant une autre tactique, les ngateurs ont espr triompher de cette jeunescience, en organisant autour delle la conspiration du silence.Malgr les recherches nombreuses tentes dans ce domaine, par des physiciens et des chimistesmrites, la science officielle a ferm obstinment les yeux et les oreilles ses assertions, et lona feint de croire que le spiritisme tait mort. Cest l une illusion quil faut perdre, car il est, lheure actuelle, plus florissant que jamais.Commenc par le mouvement des tables, ce phnomne a pris des proportions vritablementextraordinaires, rpondant, chacune des critiques formules contre lui, par des faits tablissantpremptoirement la fausset des hypothses imagines pour lexpliquer.A la thorie des mouvements naissants et inconscients, prconise par des autorits comme

    Babinet, Chevreul, Faraday, les Esprits ont oppos le mouvement dobjets inanims, se dplaantsans contact visible de la part des oprateurs, ainsi que le constate le rapport de la SocitDialectique de Londres. A la ngation dune force manant du mdium, William Crookes rponden construisant un appareil qui mesure mathmatiquement laction, distance, de la forcephysique1. Pour dtruire largument favori des incrdules : lhallucination, les individualits delespace se font photographier, dmontrant ainsi, dune manire irrfutable, leur objectivit.

    1 Mise hors de doute par les recherches rcentes de MM. Richet, Dariex, de Rochas, Lombroso, Carl du Prel, etc.VoirlExtriorisation de la Motricit , de M. de Rochas.

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    Il est possible encore davoir des moules reproduisant des parties dun corps fluidique,temporairement form, mais qui disparat ensuite, ces empreintes matrielles restant comme destmoins authentiques de la ralit de lapparition. Entre temps, les Esprits donnaient la mesure deleur pouvoir sur la matire, en produisant de lcriture, en dehors de tous les moyens usits pourcela, en transportant, sans les endommager, travers cloisons et murailles, des objets matriels,

    enfin, ils ont tmoign de leur intelligence et de leur personnalit par des preuves absolues,tablissant quils ont vcu antrieurement sur la terre.On a fait bien souvent le procs du spiritisme, mais tous ceux qui lont tent nont pu le dtruire,et il sort agrandi, chaque fois, du baptme de la critique.Tous les anathmes, toutes les ngations intresses ont t forces de disparatre, devantlinnombrable multitude de documents entasss par la tnacit des chercheurs. Le fait spirite aconquis des adeptes dans toutes les classes de la socit.Des lgislateurs, des magistrats, des professeurs, des mdecins, des ingnieurs nont pas craintdaffirmer la foi nouvelle, rsultant pour eux dun examen attentif et dune longueexprimentation ; il ne manquait plus aux manifestations que la conscration de la science, elleslont obtenue par la voix de ses plus clbres reprsentants. En France, en Allemagne, enAngleterre, en Italie, en Russie, aux Etats-Unis des savants illustres ont donn ces recherchesun caractre si rigoureusement positif quil nest plus permis aujourdhui de rcuser lautorit deces affirmations, mille fois rptes.La lutte a t longue et acharne car les spirites ont combattre les matrialistes dont cesexpriences anantissent les thories, et les religions qui sentent vaciller leurs dogmes sculairessous la pousse irrsistible des individualits de lespace.Nous avons expos mthodiquement dans un prcdent ouvrage2, le magnifique dveloppementatteint par lexprimentation. Nous avons discut point par point toutes les objections desincrdules, nous avons tabli linsanit des thories imagines pour rendre compte de ces phnomnes, soit par les lois physiques actuellement connues, soit par la suggestion oulhallucination, et, de notre examen impartial, sest dgage lirrsistible certitude quils sont dusaux mes des hommes qui ont vcu sur la terre.A lheure actuelle, aucune cole philosophique ne peut fournir une explication adquate aux faits,en dehors du spiritisme. Les thosophes, les occultistes, les mages et autres vocateurs du passont vainement tent dexpliquer ces phnomnes en les attribuant des tres imaginaires appels Elmentals ou Elmentaires, ou coques astrales, ou inconscient infrieur toutes ceshypothses ne rsistent pas un examen srieux, ne rendent pas compte de toutes les exprienceset nont dautre rsultat que de compliquer la question sans ncessit.Aussi, tous ces systmes nont pu se propager et ont t aussi oublis que produits. La survivancede ltre pensant sest affirme, dgage de toutes ces scories, avec une magnifique splendeur ; legrand problme de la destine future est rsolu, la mort a dchir ses voiles, et, travers cettetroue sur linfini, nous voyons rayonner dans limmortalit nos amours que nous croyionsvanouies jamais.Nous nexaminerons donc pas nouveau toutes les preuves que nous possdons de la survivancede lme, nous estimons que cette dmonstration est faite ; notre but dans cet ouvrage estdtudier lesprit pendant lincarnation terrestre, en tenant compte des enseignements si logiquesdu spiritisme et des dernires dcouvertes de la science. Les connaissances nouvelles, que nousdevons aux intelligences extraterrestres, nous aident comprendre toute une catgorie de

    2Le Phnomne spirite, tmoignage des savants. Chamuel , diteur.

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    phnomnes physiologiques et psychiques qui sont inexplicables sans elles. Les matrialistes, enniant lexistence de lme, se sont volontairement privs de notions indispensables lacomprhension des phnomnes vitaux de ltre anim, et les philosophes spiritualistes enemployant le sens intime comme unique instrument de recherche, nont pas connu la vritablenature de lme, de sorte que jusqualors on na pu concilier, dans une explication commune, les

    phnomnes physiques et mentaux.Le spiritisme, en faisant connatre la composition de lesprit, en rendant tangible la partiefluidique de nous-mmes, a projet une vive lumire sur ces difficults en apparenceinsurmontables, car nous pouvons embrasser, dans une vaste synthse, tous les faits de la viecorporelle et intellectuelle, et en montrer les rapports qui taient inconnus jusquici.Afin de mieux faire comprendre notre pense, il est utile de rappeler, en quelques mots, lesnotions nouvelles que nous avons acquises sur lme, elles mettront en relief loriginalit et lagrandeur de la nouvelle doctrine.Lenseignement des Esprits a t coordonn avec une remarquable hauteur de vues et uneirrfragable logique par Allan Kardec3. Ce profond philosophe a expos mthodiquement unesrie de problmes relatifs lexistence de Dieu, de lme et la constitution de lUnivers. Il adonn une solution claire et rationnelle la plupart de ces difficiles questions, cartant avec soinla mtaphysique de ses raisonnements. Cest pourquoi nous le prenons pour guide dans ce rsumsuccinct.Lme, ou esprit, est le principe intelligent de lunivers. Elle est indestructible, au mme titre quela force et la matire ; son essence intime nous est inconnue, mais nous sommes obligs de luireconnatre une existence distincte, car ses facults la diffrencient de tout ce qui existe. Le principe intelligent, duquel toutes les mes manent, est insparable du fluide universel4,autrement dit : de la matire sous sa forme originelle, primordiale, cest--dire ltat le plusquintessenci.Tous les Esprits, quel que soit le degr de leur avancement, sont donc revtus dune enveloppeinvisible, intangible et impondrable. Ce corps fluidique est appel prisprit. Ici, le spiritismeapporte des vues neuves, un enseignement nouveau.Contrairement lopinion commune, il dmontre que lme nest pas une pure essence, une sortedabstraction idale, uns vague entit, comme le croient les spiritualistes. Cest, au contraire, untre concret possdant un organisme physique parfaitement dlimit.Si, ltat ordinaire, lme est invisible, elle peut cependant apparatre, dans des conditionsdtermines, avec assez de ralit pour impressionner nos sens. Les mdiums la voient, danslespace, sous la forme quelle avait en dernier lieu sur la terre ; mme parfois elle se matrialisesuffisamment pour laisse des souvenirs durables de son intervention ; en un mot, on peutaffirmer, dans ce cas, que, bien quelle chappe aux sens, elle est aussi relle et agissante quelhomme terrestre.Nous verrons, dans le cours de cette tude, que, malgr sa matrialit, le prisprit est cependant sithr que lme ne pourrait agir sur la matire sans le secours dune force laquelle on a donnle nom de fluide vital.Lme a pour but de dvelopper toutes les facults qui sont en elle. Pour y parvenir, elle estoblige de sincarner un trs grand nombre de fois sur la terre, afin de donner leur essor sesfacults morales et intellectuelles, en apprenant matriser et gouverner la matire. Cest par

    3 Allan Kardec , le Livre des Esprits, le Livre des Mdiums, le Ciel et lEnfer, lEvangile selon le Spiritisme, laGense et surtout les revues qui renferment des tudes du plus haut intrt sur une multitude de points.4 Matire cosmique primitive,protyle de Crookes.

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    rflexes du systme nerveux auxquelles ils sont dus. Nous mettrons le plus possible en videncela caractristique psychique de ces actes, en montrant quils ont tous une finalit intelligente, ence sens quils concourent la conservation de lindividu. Ceci nous acheminera vers ltude desfacults proprement dites. Nul nignore les inextricables difficults dans lesquelles se sont dbattus les philosophes,

    lorsquil sest agi dexpliquer laction du physique sur le moral ou de lme sur le corps.La connaissance du prisprit supprime radicalement ce problme. Il jette sur les processus de lavie mentale une vive clart, en permettant de comprendre nettement la formation et laconservation de linconscient, physiologique ou psychique ; il montre les nuances progressivesqui relient linstinct lintelligence ; il fait saisir, sur le vif, le mcanisme des actions crbraleset les connexions qui existent entre elles ; il explique pourquoi lme garde son unit et sonidentit travers les vies successives ; il donne, sur les conditions dans lesquelles lesrincarnations saccomplissent, les indications les plus prcises ; enfin, il se rvle linstrumentindispensable pour comprendre laction des Esprits dans les manifestations spirites.On voit donc que louvrage que nous prsentons au lecteur a un double objectif. Premirement, ilvise dmontrer que la doctrine spirite saccorde avec les thories modernes de la science ; ensecond lieu, il a lambition de faire connatre le rle physique dun organe essentiel la vie delme et du corps, dont le public ignorait lexistence, et de montrer limportance considrable decette dcouverte.La nature mme de nos recherches nous imposa le devoir de faire des emprunts nombreux auxtravaux les plus rcents des savants contemporains, et nous aimons reconnatre que les effortsde ces exprimentateurs aux mthodes prcises, ont fait faire un pas immense nosconnaissances. La dtermination, de plus en plus exacte, du fonctionnement vital des tresanims, nous fournit des renseignements prcieux pour notre tude mais si nous nadoptons pasles conclusions matrielles qui rsultent pour ces savants de leurs recherches, cest que nousavons des faits irrfutables qui dmontrent, avec certitude, que leurs dductions sont errones.Le spiritisme nous fait connatre lme, la science nous apprend les lois de la matire vivante. Ilsagit donc, pour nous, de runir ces deux enseignements, de montrer quils se prtent un mutuelsecours, quils se compltent, quils sont insparables pour la comprhension des phnomnes dela vie physique et intellectuelle, et quil rsulte de leur accord la plus magnifique certitude quilsoit donn lhomme dacqurir ici-bas. Nous sentons bien notre insuffisance pour une pareilletche, mais quelque imparfaite que soit lbauche que nous livrons au public, nous avons lespoirquelle dterminera peut-tre un homme de science reprendre ce travail, et lui donner toute lavaleur quil comporte.La chose essentielle tablir, cest quil ny a pas incompatibilit entre les dcouvertes moderneset lexistence des Esprits ; autrement dit, que le surnaturel nexiste pas, et que lexistencedesprits, revtus dune enveloppe matrielle, peut se concevoir naturellement, linfluence quilsexercent sur le corps tant la rsultante logique de leur constitution.Nous nignorons pas que les thories que nous dfendons auraient besoin de stayer sur desdmonstrations exprimentales, pour tre absolument irrfutable, nous avons mme la certitudequelles seront institues un jour ; mais il nous suffit actuellement de prsenter des hypothseslogiques, ne heurtant aucun enseignement scientifique, expliquant tous les phnomnes, pourmontrer la grandeur de la synthse quon obtient, lorsquon combine les connaissances humainesavec les rvlations spirituelles.Ce nest pas trop de lintervention de la physique, de la chimie, de la mcanique et de la biologiepour expliquer les faits spirites, car ces manifestations, en apparence si simples, exigent, pour trecomprises, lemploi de presque toutes les connaissances humaines. Le spiritisme touche aux

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    problmes les plus difficiles de la physiologie et de la psychologie, dans ltude dufonctionnement crbral du mdium, pendant la communication des esprits.La nature particulire des forces qui entrent en jeu dans les matrialisations, est un profond sujetde mditation pour le savant, car le mode daction des invisibles sur la matire diffreradicalement de ce que nous connaissons jusqualors.

    Le jour o la science sera persuade de la vracit de notre doctrine, une vritable rvolutionsoprera dans les mthodes jusqualors employes. Les recherches, qui avaient pour uniqueobjectif la matire, slveront jusqu lme, et lhumanit, rgnre par une foi raisonne,savancera la conqute de tous les progrs quelle ne peut quentrevoir aujourdhui.Il scroulera, sans doute, encore bien du temps avant que cet espoir se ralise, mais nous avonsle devoir de prparer la route aux gnrations futures.Essayons donc de nous servir des dcouvertes modernes, afin de les adapter notre doctrine.Pntrons dans les profondeurs de ltre humain, la suite de la physiologie et la lueur duspiritisme.Rendons palpable linfluence que lme exerce, tantt ltat conscient, tantt ltatinconscient, sur tous les phnomnes vitaux. Scrutons minutieusement les rapports si dlicats et siimportants du physique et du moral. Tentons de dterminer les connexions de la vie psychiqueavec les phnomnes de lorganisme. Cherchons dans quelle partie de lhomme subsiste lidentitde ltre, et le sige des facults de lme ; enfin, rsumant toutes ces observations, essayons deconcilier, dans une vue d'ensemble qui embrasse le corps et lme, tous les rsultats auxquelsnous serons arrivs.Ce sont ces considrations qui nous ont guid en crivant ce livre. Nous navons pas la prtentionde croire que nous avons fait la lumire complte sur toutes ces questions, mais nous croyonsapporter des documents nouveaux, prsenter, sous un jour plus comprhensible, des faits jusqualors obscurs ou inexpliqus, et surtout nous esprons quil ressortira, de ce travail, laconviction que le spiritisme est bien une vrit, puisquil nous donne la clef de ce que la sciencehumaine est impuissante dcouvrir5.

    5 Gray, le 10 aot 1895.

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    CHAPITRE I - La Vie

    Sommairetude sur la vie. Destruction organique. Cration organique. Proprits gnrales des tres vivants.

    Conditions gnrales du maintien de la vie. Lhumidit. Lair. La chaleur. Conditions chimiquesdu milieu. La force vitale. Pourquoi on meurt. Lutilit physiologique du prisprit. Lidedirectrice. Le fonctionnement organique. Le rle psychologique du prisprit. Lidentit. Lesystme nerveux et la force nerveuse ou psychique. Rsum.

    En commenant cette tude, il est utile de sentendre sur le sens de cette expression : la vie, qui at prise dans des acceptions bien diffrentes.Parfois on lui donne une signification gnrale, abstraite, pour dsigner lensemble des chosesexistantes : on parle de la vie de lunivers. On sen sert plus souvent pour caractriser les tresanims. En physiologie, par exemple, le mot vie correspond quelque chose de prcis ; cest,pour ltre anim, la proprit de rpondre par un mouvement une excitation extrieure. Maisles philosophes qui discourent sur la vie de lme, attachent ce mot une toute autre signification,

    ils entendent par l indiquer sa spontanit, ce qui est loppos de la dfinition prcdente.Afin dviter toute confusion, nous ferons une distinction essentielle entre les manifestations delme pendant son incarnation terrestre, et celles quelle accuse dans son existence incorporelle.Les facults de lesprit sont bien toujours les mmes : mais sur la terre elles sont subordonnes,dans leur exercice, des conditions organiques qui sont elles-mmes troitement dpendantes dumilieu extrieur, comme nous allons le constater dans un instant ; tandis que, dans lespace, nulleentrave ne vient restreindre le jeu normal de ces facults animiques.La vie sera donc pour nous la caractristique des tres organiss qui naissent, vivent et meurent.Nous lattribuons une modification spciale de lnergie : la force vitale, dont nous aurons soinde bien dfinir la nature, et nous reconnatrons sa prsence, comme les physiologistes, chaquefois que nous constaterons quun tre rpond par un mouvement une excitation extrieur, en un

    mot quand il sera irritable.Daprs notre manire de voir, la vie nappartient qu la matire organise ; il est impossible dela dcouvrir ailleurs, et lon peut dire sans paradoxe que lme, nest pas vivante ; elle est plus etmieux, elle a lexistence intgrale, car, ntant pas organise, elle nest pas soumise la mort.La vie, avec ses innombrables aspects, a toujours t un problme passionnant pour leschercheurs. Les diffrentes coles philosophiques qui se sont succds dans le monde, ont tour tour cherch pntrer cette difficile question, et suivant les ides qui avaient cours leurpoque, elles en ont donn les solutions bien diffrentes.Ce nest gure que depuis le sicle dernier que les progrs accomplis dans toutes les branches desconnaissances humaines, ont permis daborder cette recherche dune faon srieuse, et dendterminer les limites. Une revue rapide des conditions ncessaires au maintien et au

    dveloppement de la vie simpose, afin que nous puisions savoir exactement si elle est due unprincipe spcial, ou si elle nest que le rsultat des forces naturelles, sans cesse en action dans lemonde.

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    tude de la vie

    Nous allons rsumer les travaux les plus rcents sur cette question6.La vie rsulte pour tous les tres vivants des rapports qui existent entre leur constitution physiqueet le monde extrieur. Lorganisme est prtabli, puisquil provient des anctres, par filiations ;au contraire, laction des lois physico-chimiques varie suivant les circonstances ; cette opposition

    est appele conflit vitalpar Claude Bernard7

    . Ce nest point par une lutte contre les conditions cosmiques, dit-il, que lorganisme sedveloppe et se maintient, cest tout au contraire par une adaptation, un accord avec celles-ci.Ltre vivant ne constitue pas une exception la grande harmonie naturelle qui fait que les chosessadaptent les uns aux autres ; il ne rompt aucun accord ; il nest ni en contradiction ni en lutteavec les forces cosmiques gnrales ; bien loin de l, il fait partie du concert universel deschoses ; et la vie de lanimal, par exemple, nest quun fragment de la vie totale de lunivers. Ce conflit vital dtermine deux ordres de phnomnes :

    1 Des phnomnes de destruction organique, cest--dire de dsorganisation oudsassimilation ;

    2 Des phnomnes de cration organique, appels indiffremment : organisation,

    synthse organique ou assimilation.Destruction organiqueChose curieuse, ce sont les faits de destruction, parce quils sont les plus apparents, auxquels onattache gnralement lide de la vie. La destruction organique est dtermine, en effet, par lefonctionnement de ltre vivant. Quand chez lhomme et chez lanimal un mouvement survient,une partie de la substance active du muscle se dtruit ou se brle ; quand la sensibilit et lavolont se manifestent, les nerfs susent ; quand la pense sexerce, le cerveau se consume. Onpeut ainsi dire quejamais la mme matire ne sert deux fois la vie.Lorsquun acte est accompli, la parcelle de matire vivante qui a servi la produire nest plus. Sile phnomne reparat, cest une matire nouvelle qui lui a prt son concours.

    Lusure molculaire est toujours proportionne lintensit des manifestations vitales.Laltration matrielle est dautant plus profonde ou considrable que la vie se montre plusactive.La dsassimilation rejette, de la profondeur de lorganisme, des substances dautant plus oxydespar la combustion vitale, que le fonctionnement des organes a t plus nergique. Ces oxydationsou combustions engendrent la chaleur animale, donnent naissance lacide carbonique quisexhale par les poumons, et diffrents produits qui sliminent par diffrents autresmonctoires de lconomie. Le corps suse, prouve une consomption et une perte de poids quitraduisent et mesurent lintensit de ses fonctions. Pourtant, en un mot, la destruction physico-chimique est unie lactivit fonctionnelle et nous pouvant regarder comme un axiomephysiologique la proposition suivante : toute manifestation dun phnomne dans ltre vivant est

    ncessairement lie une destruction organique8

    .Cette destruction est toujours due soit une combustion, soit une fermentation.

    6Consulter un livre trs bien fait de M. Ferrire, la Vie et lAme. Bien que cet auteur ne partage pas nos ides, nouscroyons devoir le recommander aux lecteurs, car son travail renferme une quantit de faits bien coordonns ; nousaurons loccasion de le citer assez souvent dans la suite de cet ouvrage.7 Cl. Bernard, les Phnomnes de la Vie, t. 1 p 167.8 Cl. Bernard, la Science exprimentale, p. 188.

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    Cration organique

    Les phnomnes de cration organique sont des actes plastiques qui saccomplissent dans lesorganes au repos et les rgnrent. La synthse assimilatrice rassemble les matriaux et lesrserves que le fonctionnement doit dpenser. Cest un travail intrieur, silencieux, cach,nayant rien qui le trahisse au dehors.

    Lclat avec lequel se montrent lextrieur les manifestations de destruction organique nousrend victimes dune illusion ; nous les appelons les phnomnes de la vie, en ralit ce sont ceuxde la mort, puisquils se produisent en dtruisant les tissus. Nous ne sommes pas frapps par lesphnomnes de la vie. La rgnration des tissus et des organes sopre silencieusement, lintrieur, hors des regards. Seul lembryogniste, en suivant le dveloppement de ltre vivant,saisit des changements, des phases, qui lui rvlent ce travail sourd. Cest, ici, un dpt dematire ; l, une formation denveloppe ou de noyau ; l, une division ou une multiplication, unernovation. Au contraire, les phnomnes de destruction, ou de mort vitale, sautent aux yeux aussi est-cepar eux que nous sommes amens caractriser la vie. Et cependant, quand un mouvement seproduit et quun muscle se contracte, quand la volont et la sensibilit se manifestent, quand la

    pense sexerce, quand la glande scrte, alors la substance des muscles, des nerfs, du cerveau, seconsume ; ce sont bien l des phnomnes de destruction et de mort9. .Pendant la vie entire, ces destructions et ces crations sont simultanes, connexes etinsparables. Ecoutons toujours lminent physiologiste : Les deux ordres de phnomnes de destruction et de cration ne sont divisibles et sparablesque pour lesprit, dans la nature ils sont troitement unis ; ils se produisent chez tout tre vivantdans un enchanement quon ne saurait rompre. Les deux oprations de destruction et desparation sont absolument connexes et insparables, en ce sens que la destruction est lacondition ncessaire de la rnovation ; les actes de destructions sont les prcurseurs et lesinstigateurs de ceux par lesquels les parties se rtablissent et renaissent, cest--dire de ceux dernovation organique. Celui des deux types de phnomne qui est pour ainsi dire le plus vital, le

    phnomne de cration organique, est donc en quelque sorte subordonn lautre, au phnomnephysicochimique de destruction.

    Proprits gnrales des tres vivants

    Les proprits gnrales des tres vivants, celles qui les distinguent de la matire brute des corpsinorganiques, sont au nombre de quatre : lorganisation, lagnration, la nutrition et lvolution.De ces quatre proprits fondamentales, la science nen explique clairement quune : la nutrition,et encore le phnomne par lequel les cellules choisissent, dans le sang, les matriaux qui leursont utiles, nest pas bien tudi. Nous allons voir, tout lheure, que lorganisation et lvolutionne peuvent se comprendre par le seul jeu des lois physico-chimiques. Quant la reproduction, sion en connat le mcanisme, elle reste tout fait mystrieuse dans la cause.

    Conditions gnrales au maintien de la vie

    Tous les tres vivants, pour manifester leur existence, ont besoin des mmes conditionsextrieures, et rien ne dmontre mieux lunit vitale, lidentit de la vie chez les tres organiss,vgtaux ou animaux, que la ncessit pour tous, des quatre conditions suivantes : 1 lhumidit,2 la chaleur, 3 lair, 4 une certaine composition chimique du milieu.

    9 Cl. Bernard,Phnomne de la Vie, p. 148 et suivantes.

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    Lhumidit

    Leau est indispensable la constitution du milieu dans lequel volue ltre vivant : elle entrecomme principe constituant dans la composition des tissus, et, de plus, elle sert dissoudre ungrand nombre de substances sans lesquelles les ractions chimiques incessantes dont le corps estle thtre ne pourraient seffectuer.

    Lutilit du rle de leau a t bien mise en vidence par les jeneurs clbres : Merlatti, Succi etle docteur Tanner, qui ont pu rester des priodes de temps trs longues (30 40 jours) sansmanger, mais en buvant de leau distille. Des expriences faites sur des chiens ont montr queces animaux rsistaient pendant 30 jours la privation de nourriture, la condition de leur donner boire. La soustraction de leau amne, chez certains infusoires et chez les rotifres, des phnomnes curieux de vie latente : ces animaux, convenablement desschs, perdent touteproprit vitale, au moins en apparence et peuvent rester ainsi des annes entires ; mais dsquon leur rend un peu deau, ils recommencent vivre comme auparavant, pourvu quon naitpas dpass un certain degr dans cette dessiccation. Chez lhomme, la quantit deau contenuedans le corps est denviron 90 pour 100, cest dire limportance de son rle.

    LairLair, ou plutt loxygne qui en compose la partie respirable, est ncessaire au plus grandnombre des tres vivants, mme chez les animaux infrieurs, comme les levures ou mycodermes.M. Pasteur a montr que les organismes microscopiques donnent naissance aux fermentations, ensemparant de loxygne. Des expriences faites sur des lapins ont tabli quils succombaientlorsque la propagation de loxygne, au lieu dtre de 21 pour100 tombait de 3 5 pour 100.

    La chaleur

    La chaleur est la troisime condition de lentretien des corps vivants. On sait que la vie desvgtaux est en relation intime avec la temprature extrieure. Un froid trop intense gle lesliquides de lorganisme et dsorganise les tissus. Il y a de mme, pour chaque animal, une

    temprature moyenne qui correspond au maximum de vie. Les lments du corps, chez lesanimaux suprieurs, sont trs dlicats et les limites extrmes, entre lesquelles la vie peut semaintenir, sont assez rapproches. La temprature intrieure de lorganisme ne peut descendreau-dessous de 20 degrs, ni slever au-dessus de 50 pour les oiseaux. Ainsi il existe chez lesanimaux suprieurs une temprature moyenne, qui se maintient constante, grce un ensemble demcanisme gouvern par le systme nerveux. Sans cette fixit, la fonction vitale ne sauraitsexcuter.

    Conditions chimiques du milieu

    Pour bien comprendre toute la porte de cette condition, il ne faut pas oublier que nous appelonsorganisme vivantaussi bien la cellule qui compose les tissus des plantes et des animaux, que ces

    plantes et ces animaux eux-mmes. En effet, la cellule est vritablement un tre vivant, ellesorganise, se reproduit, se nourrit et volutionne comme un animal suprieur.Depuis les mmorables travaux de Schleiden en 1838, de Schwann en 1839, de Prvost et Dumasen 1842, de Kolliker en 1844, et plus tard de Max Schultze, on sait que, depuis la cellule libre etunique appele plastide par Hoeckel jusqu lhomme, tous les corps vivants ne sont que desassociations de cellules, chacune dune nature identique comme composition, mais jouissant deproprits diffrentes, suivant la place quelle occupe dans lorganisme.

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    Ainsi les tissus les plus divers du corps: les os, les nerfs, les muscles, la peau, les ongles, lescheveux, les tissus de loeil, etc., sont forms par des runions de cellules. Nous verrons, par lasuite, que la nature nous offre tous les degrs de complexit dans lassemblage de ces cellulesultimes de lorganisme de tous les tres anims. Ceci bien compris, revenons la quatrimecondition.

    Outre la chaleur, lair, leau il est indispensable que le milieu liquide qui baigne les cellulescontienne certaines substances, sans lesquelles elles ne pourraient se nourrir.On a cru pendant longtemps que ce milieu variait beaucoup suivant la nature de ltre vivant,mais les recherches contemporaines ont permis de constater quil tait uniforme pour tous lesorganismes vivants. Il doit contenir :

    1 Des substances azotes formes dazote, de carbone, doxygne, dhydrogne ;2 Des substances ternaires, cest--dire dans la composition desquelles il entre trois

    lments : carbone, hydrogne, oxygne.3 Des substances minrales, telles que les phosphates, la chaux, le sel, etc.

    Le fait retenir, cest que ces trois sortes de substances, quelles que soient les formes quellespuissent revtir, sont indispensables lentretien de la vie. Avec ces matires premires, lesorganismes fabriquent tous ce qui est utile la vie du corps.Les conditions que nous venons dtudier doivent tre ralises dans les milieux entourantimmdiatement la particule vivante qui doit entrer en conflit avec lui. Ceci nous conduit distinguer deux milieux :

    1 Le milieu cosmique ambiant ou extrieur, avec lequel sont en relation les treslmentaires ;

    2 Le milieu intrieur, qui sert dintermdiaire entre le monde extrieur et la substancevivante.Si lon veut bien considrer les parties vraiment vivantes des tissus, cest--dire les cellules, onremarquera quelles sont garanties des influences ambiantes ; elles baignent dans un liquideintrieur qui les isole, les protge et sert dintermdiaire entre elles et le milieu cosmique. Cemilieu intrieur, cest le sang. Non pas la vrit le sang tout entier, mais le plasma sanguin,c'est--dire sa partie fluide, qui comprend tous les liquides interstitiels, source et confluent detous les changes endosmotiques.Il est bien vrai de dire que lanimal arien ne vit pas en ralit dans lair atmosphrique, le poisson dans leau, le ver dans la terre. Latmosphre, les eaux, la terre sont une secondeenveloppe autour du corps, mais le sang est la premire, car il entoure immdiatement les vraislments de la vie : les cellules. Ce nest donc pas directement que lextrieur influence ces trescompliqus que sont les animaux suprieurs, comme il agit sur les corps bruts ou sur des tresvivants plus simples. Il y a un intermdiaire forc qui sinterpose entre lagent physique etllment anatomique. Aussi est-ce dans le milieu intrieur que rsident les conditions physiquesde la vie10.Ce que venons de voir suffit montrer que la vie physique est dpendante du milieu extrieur, etque le vieil adage mens sana in corpore sanos (une me saine dans un corps sain) est dune vritabsolue : il faut lintgrit de la substance corporelle pour que lme puisse, sans contrainte,manifester ses facults.

    10 Ferrire, la Vie et lAme, voir la premire partie. Consultez les Tissus vivants, par Claude Bernard, qui est lepremier qui ait signal limportance de ce milieu intrieur.

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    Similitude du fonctionnement vital chez tous les tres vivants vrifier

    Comme nous verrons que le principe intelligent a probablement parcouru tous les organismesvivants jusqu lhumanit, il est urgent de constater la grande loi dunit des manifestationsvitales dans toute la nature.Nous ne pouvons tudier, ici, les phnomnes de destruction et de reconstruction des tissus

    organiques, mais nous devons signaler que les actions physiques ou chimiques qui entrent en jeu,sont les mmes que dans la nature organique. On a cru longtemps que les corps vivantsjouissaient cet gard dun privilge spcial, mais nous savons aujourdhui quil nen est rien, etque les phnomnes physiques et chimiques sont identiques, soit dans la matire brute, soit dansles corps organiques ; ce qui change ce sont les procds mis en oeuvre, mais les rsultats sont lesmmes. On peut affirmer aussi qu tous les degrs de lchelle des tres vivants, les oprationsde la digestion, de la respiration sont les mmes, ce qui varie ce sont les appareils qui sontappels produire ces rsultats. Le mode de reproduction est aussi identique pour tous les tresvivants, et cette remarquable similitude du fonctionnement organique tient ce quils doiventtous leurs proprits un lment commun : leprotoplasma.On appelle ainsi le contenu vivant de la cellule, cest lui qui en est la partie essentielle, vraiment

    vivante ; cest donc dans le protoplasma seul quil faut chercher la raison des proprits de tousles tissus. En lui rsident toutes les modalits possibles, il les renferme toutes ltat latent,quand il est isol sous la forme primitive de la monre et cest en diffrenciant, en sparant sesproprits, que nous les retrouvons isoles chez les tres suprieurs. Le protoplasma est lagentde toutes les reconstitutions organiques, cest--dire de tous les phnomnes intimes de nutrition.En outre, le protoplasma se contracte sous linfluence des excitants, et prside ainsi auxphnomnes de la vie de relations.On peut signaler encore le sommeil comme une ncessit qui simpose tous les tres vivants. Laplante sendort comme lanimal et de mme que, chez celui-ci, les fonctions de la respiration, dela circulation et de lassimilation saccomplissent pendant quil dort, de mme elles sepoursuivent chez les vgtaux lorsquils sommeillent.

    Le sexe et le mariage sont les conditions qui prsident dans le monde vgtal la reproduction.Les tamines sont lorgane masculin, le pistil est lorgane fminin, lovaire est lorgane o seforment les graines.Enfin les anesthsiques, qui agissent si puissamment sur les animaux, produisent les mmes effetssur les plantes, ce qui prouve quil existe dans les vgtaux un principe rudimentaire desensibilit.Tous ces faits dmontrent avec vidence le grand plus unitaire suivi par la nature. Sa devise est:unit dans la diversit et il rsulte de lemploi des mmes procds fondamentaux une variationinfinie, qui tablit la fcondit inpuisable des conceptions de la nature, en mme temps quelUnit de la vie.

    La force vitale

    Jusquici, nous avons tudi seulement le fonctionnement de la vie, la manire dont lorganismevivant entre en conflit avec son milieu, mais nous ne savons encore rien quant la nature mmede cette vie. Si nous comprenons parfaitement comment, par exemple, saccomplissent lesfonctions de la digestion, il faut remarquer que cest dans un appareil vivantquelles ont lieu,cest--dire dans un organisme qui a produit, par ses procds spciaux, les matires ncessaires cette combinaison chimique, et si les lois des affinits sont les mmes dans le laboratoire vivant

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    que dans le moule extrieur, cest par des procds particuliers, tout fait diffrents de ceux quiagissent dans la matire brute, que la vie opre.Voici, en effet, ce que dit Claude Bernard, bon juge en ces matires : Bien que les phnomnesorganiques manifests par les lments des tissus soient tous soumis aux lois de la physico-chimie gnrale, ils saccomplissent cependant toujours laide de procds vitaux qui sont

    spciaux la matire organise, et diffrent constamment, sous ce rapport, des procdsminraux qui produisent les mmes phnomnes dans les corps bruts. Je considre cette dernireproposition physiologique comme fondamentale.Lerreur des physico-chimistes a t de ne pas faire cette distinction, et de croire quil fallaitramener les phnomnes des tres vivants, non seulement aux mmes lois, mais encore auxmmes procds, aux mmes formes qui appartiennent aux corps bruts11 .La vie a donc une manire spciale, vivante, de procder pour maintenir son fonctionnement ; ilexiste dans ltre organis quelque chose qui nexiste pas dans les corps inorganiques, qui opreavec les mthodes particulires, sui generis, et non seulement fabrique des organes, mais lesrpare. Ce quelque chose nous lappelons la forme vitale.Cette remarque a t faite dj par bien des naturalistes.Stahl imaginera, pour expliquer la vie, une force vitale, extrieure la matire vivante, cest--dire une sorte de substance immatrielle, lme12, qui est la cause fondamentale de la vie et desmouvements qui sy rattachent ; cest en partant de lide fausse que les forces naturelles sont enantagonisme avec le corps vivant, quil crut que le pouvoir de rsister ces influencesdestructives rsidait dans cette force animique. Quoique Descartes et Van Helmon eussent djsoutenu des doctrines assez analogues, Stahl dveloppa et poussa si loin cette thorie, quil doittre regard comme le fondateur de lanimisme en physiologie.Stahl avait tabli une diffrence radicale entre les phnomnes de la nature brute et ceux de lanature vivante.La force vitale dont nous parlons se rattache cette dernire manire de voir, car nous croyons,en effet, quil y a une force dune nature spciale qui donne la matire organise ce qui nexistepas dans la matire brute : lirritabilit mais elle sen spare bientt, car nous ne voyons danscette force quune modalit de la force universelle, au mme titre que la chaleur, llectricit oula lumire ; nous nen faisons pas une entit immatrielle qui serait apparue un jour sur la terresans antcdent, autrement dit une cration surnaturelle. Nous diffrons encore des vitalistes, carnous ne voyons entre les animaux et lhomme quune diffrence de degr, et non de nature.Tout ce qui existe sur la terre provient des modifications innombrables de la force et de lamatire, la force vitale doit rentrer dans le cadre des lois gnrales ; cest nous savoir rendrevidente sa prsence chez les tres vivants.Flourens semble de cet avis, lorsquil crit : Au-dessus de toutes les proprits particulires etdtermines, il y a une force, un principe gnral et commun que toutes les propritsparticulires supposent et impliquent et qui, successivement, peut tre isol, dtach de chacune,

    11 Cl. Bernard,Rapport sur les Progrs de la Physiologie.12 Il ne faut pas entendre ici, bien entendu, le mot me dans le sens des thologiens ou des philosophes, cest une me

    physiologique. On conserva ce fait intressant, mais la thorie de lme fut abandonne. On eut recours ladmissiondune autre force fondamentale, de laquelle dpendent toutes les manifestations de la vie, dans les plantes commedans les animaux, et quon dsigna sous le nom de force vitale ou principe vital. Cette force, qui ragit tous les

    phnomnes vitaux, donne lirritabilit aux parties contractiles des plantes et des animaux, cest--dire, comme nouslavons vu, la proprit dtre affects par des irritants extrieurs. On admettait encore chez les animaux lme deStahl, qui, de concert avec le principe vital, prsidait aux phnomnes intellectuels. Cette thorie eut pour principauxdfenseurs Barthez, en France, Hufeland et Blumenbach, en Allemagne.

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    sans cesser dtre. Quel est donc ce principe ? Quel quil puisse tre, il est essentiellement un ; ily a une force gnrale et une, dont toutes les forces particulires ne sont que des expressions oudes modes13 .

    Pourquoi on meurt

    Nous avons constat, avec Claude Bernard, loriginalit des procds de la matire organisepour fabriquer les substances qui sont ncessaires son fonctionnement vital, et nous avonsattribu ces proprits aux organes, dous dune vertu spciale que lon ne constate pas dans lescorps bruts. Mais lexistence dune force animant lorganisme devient bien plus vidente encore,si lon examine lvolution de tous les tres vivants.Tout ce qui a la vie nat, crot et meurt ; cest un fait gnral qui ne souffre presque pasdexceptions14. Mais pourquoi meurt-on ? En exceptant les cas daccidents ou de maladies quidtruisent irrmdiablement les tissus, comment se fait-il que, maintenant constamment lesmmes conditions gnrales indispensables lentretien de la vie : cest--dire leau, lair, lachaleur et les aliments, ltre dcline cependant jusqu la dissolution totale ?Dire que les organes susent, cest indiquer simplement une phase de lvolution, cest constater

    un fait. Mais pourquoi susent-ils alors quils se maintiennent parfaitement pendant lge mr etquils augmentaient de puissance pendant la jeunesse ? La science matrialiste reste muettedevant ces points dinterrogation. Une explication peut cependant tre fournie, et nous allonslexploser.Si nous admettons quil y a dans la cellule fconde une quantit dtermine de force vitale toutdevient comprhensible. La vie totale dun individu est le rsultat dun certain travail accomplir. Les reconstitutions incessantes de la matire use par le fonctionnement vitalmesurent ce travail et la force qui est ncessaire peut tre considre comme une fonctioncontinue qui croit, passe par un maximum et revient zro.Si nous jetons une pierre en lair, la force qui tait dans les muscles a t communique lapierre ; elle slve rapidement, malgr lattraction qui lattire vers le centre de la terre ; il arrive

    un moment o ces deux forces sont gales et de sens contraires, il y a quilibre ; puis lattractionprdomine, et la pierre retombe ; lorsquelle est revenue son point de dpart, toute lnergiequon lui avait communique a disparu.On peut concevoir quil se passe quelque chose danalogue dans ltre vivant. Le rservoirdnergie potentielle, provenant des parents, qui se trouve dans la cellule originelle, se transformeen nergie actuelle au fur et mesure quil organise la matire ; cette action est trs nergique audbut : lassimilation, le groupement des molcules, est plus rapide que la dsassimilation, ltregrandit ; puis lquilibre stablit entre les pertes et les gains, cest lge mr, le corps reste stable; enfin, pendant la vieillesse, la force vitale spuisant, les tissus ne sont plus suffisammententretenus, la mort survient, ltre se dsagrge, et la matire retourne tout entire au mondeinorganique.

    13 Flourens, Considrations gnrales sur lanalyse organique.14 Nous disons que presque tous les tres meurent, car les organismes infrieurs comme la monre, qui est une simplecellule, ne se dtruisent jamais, sauf accident. En effet, lorsque, par suite de la nutrition, leur corps a atteint uncertain volume, il se spare en deux parties, et ces deux segments deviennent deux tres distincts qui vont crotre leur tour, et en engendrer dautres par le mme procd. Dans ce cas, il ny a pas de mort, on ne peut distinguer lamre de la fille, ni savoir dans laquelle rside lindividualit ; elles sont donc rellement immortelles.

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    Ainsi donc, nous croyons quil existe une certaine quantit de force vitale, dpartie toutecrature qui parat sur la terre ; comme la gnration spontane nexiste pas notre poque 15,cest par filiation que cette force est transmise, et elle nexiste que chez les tres anims.Les proprits de la matire vivante ne rsident pas seulement dans la matire ou dans sonarrangement, il faut encore supposer laction dune force vitale pour la rnovation de cette

    matire, cest--dire la rfection des parties dtruites ; cest pourquoi les savants, qui se figurenttrouver le secret de la vie en faisant la synthse de la matire organique, sont dans une erreurabsolue.Supposons, en effet, que, par suite de manipulations chimiques aussi compliques, aussi savantesquon voudra les supposer, en faisant agir tous les agents physiques : chaleur, lectricit,pression, protoplasme, ce produit aura-t-il la vie ? Non, car ce qui la caractrise, cest la nutritionconstante rparant lusure.Cette masse de protoplasma sera inerte, ne rpondra pas aux excitations extrieures, comme leferait une mme masse vivante, mais, en supposant quelle le fit, ce serait aux dpens de sastructure intime, en se dtruisant ; elle pourrait le faire un certain nombre de fois, jusqu ce queses rserves soient compltement puises ; ce moment, elle ne saurait spontanment en fairedautres, elle ne serait pas vivante. Nous avons cit le protoplasma parce quil est la matireessentiellement simple, mais si nous avions pris une cellule, le problme devenait dunecomplication beaucoup plus grande, car la cellule a une forme dtermine, et la science est tout fait incapable dexpliquer cette forme, comme nous allons le constater dans un instant.Il est ncessaire ici de prciser notre pense, afin que notre conception soit bien claire.Le corps humain est une machine dlicate et complique, les tissus dont il est form sont dus des combinaisons chimiques trs instables, cause du nombre de composants, et nous nignorons pas que ce sont les mmes lois naturelles qui rgissent le monde inorganique et les tresinorganiss. Ainsi, dans un organisme vivant, nous savons trs bien que le travail mcanique dunmuscle peut se traduire en un quivalent de chaleur, que la force dispense nest pas cre parltre, quelle a sa source au dehors, quelle provient des aliments, en comprenant loxygneparmi ceux-ci, et que le rle du corps physique consiste transformer lnergie reue, la logerdans des combinaisons instables, qui la restitueront la moindre excitation approprie, cest--dire sous laction de la volont, ou par le jeu des irritants spciaux des tissus ou des actionsrflexes.Jusque-l, rien que de trs explicable par les lois physico-chimiques. Mais lorsquune de cesactions vient davoir lieu, lorsque la substance du muscle qui a fonctionn est dtruite, cest alorsque la force vitale intervient pour la reconstitution du tissu, la rflexion des cellules qui ont servi la manifestation vitale. Cest justement ce qui diffrencie absolument ltre animal de la matirebrute. Il existe quelque chose de plus dans la plante la plus infime, que dans le minral, et cequelque chose ne rpare pas toujours le corps dans les mmes conditions ; suivant lge, cetterfection est plus ou moins variable : complte dans la jeunesse, elle est incomplte dans lavieillesse ; cest une force qui va diminuant jusqu ce quelle steigne.Il y a donc pour nous une force vitale, totalement diffrente de celles que nous connaissons, maisqui nest quune modification de lnergie universelle, comme llectricit se distingue de la

    15 Les expriences de Pasteur ont tabli avec la dernire vidence que, de nos jours, tout individu vivant provientdun autre semblable lui.. Mais rien ne prouve quil en a t ainsi lorigine, les conditions vitales ayant tellementvari depuis ces poques lointaines, que la monre est devenue, par volutions successives et ascendantes, lhommeactuel.

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    chaleur ou du magntisme, bien que ces deux forces ne soient aussi que des modalits de lamme nergie.Cette force vitale, seule, nengendrerait rien, si lintelligence ne lui tait associe depuis sesmanifestations les plus rudimentaires, jusquau plus haut degr de complexit : jusqu lhomme.Tout tre vivant possde une certaine somme dintelligence, aussi rudimentaire que possible dans

    les premires formes vitales, mais qui va en saugmentant et se spcifiant, au fur et mesurequon gravit la chane des tres, pour spanouir dans lhumanit. Nous aurons loccasion derevenir sur ce sujet si important, quand nous aurons tabli le rle du prisprit chez les tresanims.La forme vitale est elle-mme insuffisante pour expliquer la forme, qui est la caractristique detous les individus vivants, elle ne peut faire comprendre non plus la hirarchie systmatise detous les organes, leur synergie en vue dun effort commun, pourquoi ils sont la fois autonomeset solidaires ; cest ici que nous voyons intervenir la ncessit absolue du prisprit, cest--diredun organe qui possde les lois organiques qui maintiennent la fixit de lorganisme, au milieudes incessantes mutations des molcules matrielles.

    Lutilit physiologique du prisprit

    Nous avons tabli, par les expriences spirites, que les Esprits avaient la forme humaine. Nonseulement ils en ont le type, mais le prisprit renferme tout un organisme fluidique qui est lemodle suivant lequel la matire sorganisera, pour la confection du corps physique.Nous allons tablir cette grande vrit en tudiant le dveloppement immuable de chaque tre,suivant son type particulier, puis en montrant la ncessit du double fluidique pour hirarchiser lamatire, et en diffrencier les proprits, suivant les besoins diffrents des organes.Voyons, en premier lieu, la forme qui modle la matire.

    Lide directrice

    Dans chaque tre, ds lorigine, on peut constater lexistence dune force qui agit dans la

    direction fixe et invariable suivant laquelle sera difi le plan sculptural du nouveau venu, enmme temps que son type fonctionnel.Dans la formation de la crature vivante, la vie ne fournit comme contingent que la matireirritable du protoplasma, matire amorphe dans laquelle il est impossible de distinguer le moindrerudiment dorganisation, le plus petit indice de ce que sera ltre vivant. La cellule primitive estabsolument la mme chez nous les vertbrs, rien en elle nindique quelle donnera naissance tel individu plutt qu tel autre, puisque sa composition est identique pour tous. Il faut doncadmettre ici lintervention dun nouveau facteur qui dtermine dans quelles conditions seraconstruit ldifice vital.Cest au prisprit quil faut avoir recours, car il contient en lui le dessein arrt, la loi toute-puissante qui servira de rgle inflexible au nouvel organisme, et lui assignera, daprs le degr de

    son volution, la place quil doit occuper dans lchelle des formes. Cest dans lembryon qualieu cette action directrice. Voici, en effet, suivant Cl. Bernard, la marche du phnomne : Quand on considra lvolution complte dun tre vivant, on voit clairement que son existenceest la consquence dune loi organognique qui prexiste dans une ide prconue et qui setransmet par tradition organique dun tre lautre. On pourrait trouver, dans ltudeexprimentale des phnomnes dhistogense et dorganisation, la justification des paroles deGoethe qui compare la nature un grand artiste. Cest quen effet la nature et lartiste procdentde mme dans la manifestation de lide de leur oeuvre.

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    Nous voyons dans lvolution de lembryon apparatre une simple bauche de ltre avant touteorganisation.Les contours du corps et des organes sont dabord simplement arrts, en commenant par leschafaudages organiques provisoires qui serviront dappareils fonctionnels temporaires du foetus.Aucun tissu nest alors distinct. Toute la masse nest alors constitue que par des cellules

    plasmatiques et embryonnaires. Mais dans ce canevas vital est trac le dessin idal dunorganisme encore invisible pour nous, qui a assign chaque partie et chaque lment sa place,sa structure et ses proprits. L o doivent tre des vaisseaux sanguins, des nerfs, des muscles,des os, etc., les cellules embryonnaires se changent en globules de sang, en tissus artriels,veineux, musculaires, nerveux et osseux. Ailleurs, lillustre physiologiste prcise ainsi sa pense : Ce qui est essentiellement du domainede la vie qui nappartient ni la chimie, ni la physique, ni rien autre chose, cest lidedirectrice de cette action vitale.Dans tout germe vivant il y a une ide directrice qui se dveloppe et se manifeste parlorganisation. Pendant toute sa dure, ltre reste sous linfluence de cette mme forme vitalecratrice, et la mort arrive lorsquelle ne peut se raliser Cest toujours ma mme ide quiconserve ltre en reconstituant les parties vivantes, dsorganises par lexercice ou dtruite parles accidents ou les maladies16 .Prenons, en effet, plusieurs graines despces diverses.Si nous en faisons lanalyse chimique, il nous est impossible de trouver entre elles la plus petitediffrence de composition, elles sont absolument semblables.Plantons ces graines dans le mme terrain, et chacune delles va tre soumise une ide directricespciale, diffrente de celle de ces voisines. Pendant toute la vie de la plante, cette ide directriceconservera la forme caractristique de la plante, renouvellera les tissus suivant ce plan prconu,suivant le type invariable qui lui a t assign ds lorigine.La matire premire tant la mme pour toutes ces plantes, et la force vitale identique pour tousles individus, il faut donc quil existe une autre force qui donne et maintienne la forme ; nousdisons que cest le prisprit qui joue ce rle, aussi bien dans le rgne vgtal que chez lanimal.Cette ide directrice, nous la trouvons ralise tangiblement dans lenveloppe fluidique de lme.Cest elle qui incorpore la matire, qui veille au remplacement des parties uses ou dtruites, quiprside aux fonctions gnrales, et qui maintient lordre et lharmonie au milieu de ce torrent dematire sans cesse renouvele.

    Le fonctionnement organique

    Nous appelons tout particulirement lattention du lecteur sur cette partie, peut-tre un peuabstraite, mais qui est dune importance capitale pour notre thorie.Si, ds avant la vie foetale, nous constatons la ncessit du prisprit pour imprimer son empreinte la matire, nous comprendrons encore mieux son importance, en examinant lensemble desfonctions de lorganisme animal, leur autonomie, et la solidarit qui les runit toutes dans unesynergie deffort qui a pour but la conservation de ltre vivant.Lirritabilit, qui est le signe distinctif de la vie, appartient au protoplasma de la cellule ; dans lasuite des tres qui se sont succd, depuis la monre jusqu lhomme, la cellule primitive sestdiversifie, spcifie, de manire que chaque tissu a mis en vidence une des proprits latentesde ce protoplasma. Mais les actes et les fonctions de la vie nappartiennent qu des organes et

    16 Cl. Bernard,Introduction la Mdecine.

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    des appareils, cest--dire des ensembles de parties anatomiques. La fonction est une sriedactes ou de phnomnes groups, harmoniss en vue dun rsultat obtenir.La digestion, par exemple, ncessite lintervention dune srie dorganes tels que: la bouche,loesophage, lestomac, lintestin, etc., qui sont mis successivement en action en vue dun but :celui de transformer les aliments.

    On voit donc que, pour lexcution de la fonction, interviennent les activits dune multitudedlments anatomiques ; mais la fonction nest pas la somme brutale des activits lmentairesde cellules juxtaposes ; ces activits composantes se continuent les unes par les autres ; ellessont harmonises, concertes, de manire concourir un rsultat commun. Le rsultat entrevupar lesprit fait le lien et lunit de ces phnomnes composants ; cest lui qui fait lafonction.La fonction est donc quelque chose dabstrait et dintellectuel qui nest matriellement reprsentpar aucune des proprits lmentaires. Il y a une fonction respiratoire, une fonction circulatoire ;mais il ny a pas, dans les lments multiples qui y concourent, une proprit respiratoire ou uneproprit circulatoire. Il y a une fonction vocale dans le larynx, mais il ny a pas de propritsvocales dans les muscles, etc.Le corps dun animal suprieur est un organisme complexe, form par un agrgat de cellulesdiversement assembles, dans lequel les conditions de la vie de chaque lment sont respectes,et dans lequel le fonctionnement de chacun est cependant subordonn lensemble ; autrementdit : indpendance individuelle, mais obissance la vie totale.Chaque organe a sa vie propre, son autonomie ; il peut se dvelopper et se reproduireindpendamment des autres tissus. Il est autonome, en ce quil nemprunte ni des tissus voisins,ni de lensemble, les conditions essentielles de sa vie ; il les possde en lui-mme, par suite de sanature protoplasmique. Dautre part, il est li lensemble par sa fonction, ou le produit de safonction.Une comparaison fera mieux comprendre ce double caractre des organes.Reprsentons-nous ltre vivant complexe, lanimal ou la plante, comme une cit ayant soncachet spcial qui la distingue de toute autre. Les habitants de cette cit y reprsentent leslments anatomiques dans lorganisme ; tous ces habitants vivent de mme, se nourrissent,respirent de la mme faon et possdent les mmes facults gnrales, celles de lhomme(autonomie des organes quant aux conditions essentielles de la vie).Mais chacun a son mtier ou son industrie, ou ses aptitudes ou ses talents, par lesquels il participe la vie sociale et par lesquels il en dpend (subordination de chaque organe lensemble parson fonctionnement).Le maon, le boulanger, le boucher, lindustriel, le manufacturier, fournissent des produitsdiffrents et dautant plus varis, plus nombreux et plus nuancs, que la socit dont il sagit estarrive un plus haut degr de fonctionnement. Tel est lanimal complexe.Lorganisme, comme la socit, est construit de telle faon que les conditions de la vielmentaire ou individuelle y soient respectes, ces conditions tant les mmes pour tous ; maisen mme temps chaque membre dpend dans une certaine mesure, par sa fonction et pour safonction, de la place quil occupe dans lorganisme, dans le groupe social. La vie est donccommune tous les membres ; la fonction seule est distincte.Ces fonctions si diverses, qui sharmonisent pour concourir la vie totale, sont ncessairementdiriges par une force consciente du but remplir. Ce nest pas le hasard qui prside cettesavante multiplicit, cette coordination, car les mmes organes : les glandes, par exemple, bienque, constitutivement, tout fait semblables entre elles, fournissent cependant des scrtionsvaries, suivant la place quelles occupent dans lorganisme.

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    Il y a donc une hirarchie dans ces appareils, un ordre prtabli qui se maintient rigoureusementpendant toute la vie. Or ce statut vital nest pas imprim dans la matire muable, changeante,incessamment renouvele, il rside dans cette partie fixe, invariable, que lon nomme le doublefluidique. Ce prisprit, dont lexprience nous a dmontr lexistence, est indispensable pourmaintenir la stabilit de ltre vivant. Au milieu de la complexit extrme des actions vitales,

    dans cette effervescence perptuelle qui rsulte de la chane non interrompue des dcompositionset recompositions chimiques dont lactivit ne sarrte jamais ; dans lcheveau enchevtr desnerfs, des muscles, des glandes, circulent, se croisent, se mlent, se pntrent des liquides et desgaz, dans un apparent dsordre, duquel sortira cependant la plus admirable rgularit.Les grandes oprations de la digestion, de la respiration, des scrtions ; les actions si varies dessystmes nerveux moteurs, sensitifs ou ganglionnaires, ne seront pas troubles. Cooprant sansrelche lentretien du milieu organique, elles lui fournissent incessamment les matriaux de lasynthse assimilatrice, et toutes ces actions si multiples, si diverses, et cependant si constantes,saccomplissent malgr le renouvellement ininterrompu de toutes les molcules qui forment cesorganes varis.La matire nouvelle, apporte par les aliments, semble tmoigner vritablement duneintelligence parfaite, relativement au but raliser ; mais quand on songe que toutes cesmolcules sont passives, dpourvues de toute spontanit, on est conduit ncessairement sedemander quelle force dirige ces innombrables produits chimiques, et utilise leurs propritsparticulires, pour produire la grandiose harmonie de loeuvre vitale. Reprenant lexempleprcdent, cest comme si chaque individu, maon, boucher, boulanger, etc., mourait aprs avoirfait une seule fois son travail, et quil fut immdiatement remplac par un homme quelconque ; ilfaudrait bien que quelquun indiqut au nouveau venu ce quil doit faire, lui apprt le genre detravail auquel il est destin ; mais ce qui, dans la socit, ne pourrait se faire quaprs uneducation pralable, la nature le ralise demble. Toutes les molcules organiques, semblablesentre elles, accompliront cependant des travaux diffrents, suivant la place quelles occuperontdans lorganisme. Cest que la fonction appartient un ensemble et non aux units qui lecomposent ; cet ensemble est une loi qui est lie sa structure propre, et celle-ci est maintenuepar lide directrice qui a donn la forme extrieure et intrieure de lindividu : par le prisprit.Une remarque capitale, quil ne faut jamais perdre de vue, cest que, rellement et positivement,toutes les parties du corps sont changes sans cesse, il nexiste pas dans ltre humain la plusminime parcelle de tissu qui ne soit lobjet dun remplacement, dune renaissance perptuelle.Nous lavons dj dit, jamais la mme matire ne sert deux fois la manifestation vitale, et, aubout de peu dannes, toute la matire a t renouvele intgralement.Pas une molcule ancienne ne subsiste, tous les membres de cette rpublique ont fait place leurssuccesseurs, et cependant les fonctions nont jamais t interrompues, la vie continue engendrer, dans le mme ordre imperturbable, les phnomnes de son volution. Car sa loiorganique rside dans ce corps incorruptible et impondrable qui ne change jamais, dans leprisprit.Il est vritablement trange de constater combien de puissants esprits en viennent des pauvretslogiques, lorsquils se heurtent ces phnomnes quil ne leur est pas possible dexpliquer, enrestant dans leurs ides prconues. En voici un, et non des moindres, Maudsley, qui se trouvenez nez avec lidentit personnelle, persistant travers le tourbillon vital : examinons commentil se tire de cette difficult : Si lon vient massurer quil ny a pas une seule particule de moncorps qui soit la mme quil y a trente ans, que sa forme a entirement chang depuis, quil estpar consquent absurde de parler de son identit et quil est absolument ncessaire de le supposerhabit par une entit immatrielle qui maintient lidentit personnelle au milieu des perptuels

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    Nous navons envisag jusqualors que le ct matriel de la question, mais, au point de vueanimique, la ncessit du rle prisprital saccuse avec une autorit que lon ne saurait rcuser,comme il est facile de sen convaincre en tudiant la vie intellectuelle de lhomme.

    Le rle psychologique du prisprit - lidentit

    La vie psychique de tout tre pensant prsente une continuit qui lassure de son identit. Cestparce que nous ne sentons pas de lacune dans notre vie mentale que nous sommes assurs quecest toujours la mme individualit qui rside en nous. La mmoire relie dune manireininterrompue tous les tats de conscience, depuis lenfance jusqu la vieillesse. Sous forme desouvenirs, nous pouvons voquer les vnements de notre vie passe, leur donner une vie factice,en juger les phases, nous rendre compte que, malgr toutes les vicissitudes, les luttes et lesdchirements moraux, les dfaillances ou les triomphes de la volont, cest toujours le mme moiqui a ha ou aim, joui ou souffert, en un mot que nous sommes identiques.Dans quelle partie de ltre rside cette identit ?Evidemment dans lesprit, puisque cest lui qui sent et qui veut sur la terre, les facultsintellectuelles sont lies, dans leurs manifestations, un certain tat du corps, et le cerveau est

    lorgane par lequel la pense se traduit lextrieur. Mais celui-ci change perptuellement, lescellules de ses tissus sont incessamment branles, modifies, dtruites par les sensations qui leurarrivent de lintrieur et de lextrieur ; plus que dautres, elles sont soumises une dsagrgationrapide, et, dans une priode assez courte, elles ont t remplaces toutes. Comment se fait-il alorsque la mmoire se conserve, et, par suite, lidentit ?Nous nhsitons pas croire que le prisprit joue encore ici un grand rle, et que sa ncessit estvidente, car les arguments que nous avons fait valoir pour le mcanisme physiologique,sappliquent encore mieux au fonctionnement intellectuel, bien plus intense et bien plus vari queles actions de la vie vgtative ou animale. Il rsulte de ces deux ordres de faits bien constats : lerenouvellement incessant des molcules et la conservation du souvenir, que les sensations et lespenses qui sont enregistres, ne le sont pas seulement dans le corps physique, mais aussi ce qui

    ne change pas : dans lenveloppe fluidique de lme. Voici comment on peut se reprsenter lephnomne.Tout le monde sait que, pour que nous ayons une sensation, il faut quun des organes des senssoit excit par un mouvement vibratoire, capable dirriter le nerf qui y correspond. Lbranlementreu se propage jusquau cerveau, o lme en prend connaissance, par un phnomne appel laperception. Mais nous savons quentre le cerveau et lme il y a le prisprit ; cet branlement doitdonc le traverser et y laisser une trace.En effet, en mme temps que la sensation est perue, ce qui se produit linstant o la cellulecrbrale entre en vibration, le prisprit, qui a transmis ce mouvement lesprit, la enregistr ; lacellule peut disparatre, elle a accompli son oeuvre. Celle qui la remplacera sera forme par le prisprit, qui lui imprimera le mme mode de mouvements vibratoires quil a reu ; parconsquent, la sensation sera conserve, prte reparatre lorsque lesprit le voudra.Il faut ncessairement quil en soit ainsi, car la certitude du travail molculaire du cerveau estabsolue ; on peut mme mesurer lintensit de lactivit intellectuelle par llvation detemprature des couches corticales, et par les dchets excrmentiels caractristiques, qui sont lersultat. Le substratum matriel est sans cesse dtruit et reconstitu. Si le prisprit ntait pas unesorte de phonographe naturel, enregistrant les sensations pour les reproduire plus tard, il seraitimpossible dacqurir des connaissances, car ltre nouveau, celui qui sans cesse remplacelancien, ne connat rien du pass. Il est donc logique dadmettre que le prisprit a une bien

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    grande importance au point de vue psychique, et ceci na rien qui doive nous surprendre, puisque,en somme, il fait partie de lme et lui sert de truchement avec la matire.

    Le systme nerveux et la force nerveuse ou psychique

    Nous avons constat, dans lhomme, lexistence dune norme quantit dactions vitales

    saccomplissant simultanment, chaque organe travaillant dune manire autonome, mais en vuede la communaut, et solidaires de lensemble auquel ils appartiennent.Cette coordination dlments si divers sobtient au moyen des diffrents systmes nerveux, dontle rseau embrasse le corps entier. Il serait inutile de rappeler longuement que tous les organes dela vie vgtative, le coeur, les vaisseaux, le poumon, le canal intestinal, le foie, les reins, etc., sitrangers quils soient les uns aux autres, si absorbs quils paraissent chacun dans sa besognepropre, sont relis cependant par une troite solidarit, elle est due au systme nerveux grandsympathique et ganglionnaire, dont laction rgulire est soustraite la volont. Il faut, pour queles fonctions saccomplissent sans relche, une stabilit qui saccorde mal avec la mobilit quicaractrise les actes volontaires.Cependant, ce systme nest pas isol dans ltre, il se rvle lesprit par des sensations

    gnrales de bien-tre ou de malaise : comme la faim ou la soif, et parfois aussi par desimpressions plus nettes, lorsque lun des organes est atteint par la maladie.Les phnomnes gnraux de la vie organique ont pour rgulateur le systme nerveux crbro-spinal, cest--dire les nerfs sensitifs, les nerfs moteurs, la colonne vertbrale et le cerveau. Laphysiologie a tudi toutes les parties du systme, et a montr leurs fonctions diverses. On estarriv isoler chacun deux, par des procds diffrents, et reconnatre que la vie psychique aun territoire bien dtermin. Dans quelle partie de lorganisme sige lactivit psychique ?Lexprience nous donne cet gard des indications prcises.Prenons un vertbr infrieur quelconque, une grenouille, par exemple. Nous la voyons sauter,coasser, chercher fuir ; son activit intellectuelle, si restreinte quon la suppose, sexerce par desmouvements de lutte, de dfense, par une agitation incessante. Eh bien ! nous pouvons

    instantanment supprimer toutes ces manifestations.Il nous suffit de dtruire avec un stylet son systme nerveux central17.Aussitt la scne change. Cet animal qui criait, sautait, se dbattait, se dfendait, est devenu unemasse inerte, quaucune incitation ne peut rveiller. Il na plus de mouvements, ni spontans, nirflexes, et cependant le coeur continue battre, les nerfs et les muscles moteurs sont excitablespar llectricit : tous les appareils, tous les tissus sont vivants, sauf lappareil nerveux centralquon a dtruit. On a supprim lappareil servant aux manifestations intellectuelles, le principeintelligent ne peut plus sen servir, les phnomnes psychiques ont disparu.Le nerf moteur, qui met en rapport le cerveau avec les muscles, doit conduire quelque chose de lacellule centrale un muscle qui se contracte sous son influence ; de mme, la sensation qui estapporte par la fibre nerveuse sensible, doit tre transmise par quelque chose qui modifie ltat dela cellule centrale. Ce quelque chose, pouvons-nous en dterminer la nature et dire ce que cest ?On sest bien des fois pos cette question sans pouvoir la rsoudre. Pour se tirer dembarras, onappelle dordinaire laction du nerf : laction nerveuse, ce qui ne nous apprend pas grande chosesur la nature de cette action. Mais les physiciens ont voulu rduire cette influence un autre agentphysique, et cest llectricit qui se prsentait tout naturellement, car, lorsquon a soustrait unmuscle linfluence de la volont qui se transmet par le nerf moteur, on peut trs bien remplacercette action par llectricit. Cependant cette thorie nest pas dmontrable dans ltat actuel de la

    17 Richet,Essai de Psychologie gnrale, p.27 et suivantes.

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    science18. Si lon interrompt le filet nerveux par une section, le courant lectrique sera encoretransmis par les parties conductrices voisines, tandis que la moindre lsion, physiologique ouanatomique, empche linfluence nerveuse de se transmettre au muscle.Linfluence nerveuse est donc une action spciale, un agent physiologique distinct de tout autre.Il diffre de la force vitale, comme nous lavons vu dans lexprience de la grenouille, dont la vie

    vgtative et les mouvements automatiques continuent malgr la suppression de linfluencenerveuse psychique ; cest ce qui a lieu dans un membre paralys qui continue vivre, bien quilsoit soustrait linfluence de la volont.Les travaux modernes de Crookes et de M. de Rochas ont dmontr exprimentalementlexistence de cette force nerveuse. Le clbre physicien anglais a publi les recherches quil afaites en compagnie de Home19. En employant des instruments de mesure, la fois prcis etdlicats, il a mesur cette force, sexerant sur les objets inanims, sans contact visible. Nousavons vu, avec M. de Rochas, comment cette force peut sextrioriser, cest une confirmation desexpriences de Crookes obtenue dune manire indpendante.Il y a donc une remarquable progression entre lvolution du principe intelligent et les forces quilui servent, dans lorganisme vivant, pour se manifester. Chez les tres infrieurs, o il ny a pasde fonctions diffrencies, la force vitale seule se montre, mais avec le dveloppement delorganisme et la spcification des proprits du protoplasma, apparat le rgulateur, lecoordinateur des actions vitales : le systme nerveux ganglionnaire, toujours actionn par la forcevitale. Enfin, lvolution se poursuivant, les phnomnes de la vie psychique prennent de plus enplus dimportance, le systme nerveux crbro-spinal sorganise, et une diffrenciation spcialede lnergie apparat : la force nerveuse, qui sera spcialement affecte la vie intellectuelle.Nous verrons, plus tard, le rle quelle joue dans la vie psychique, et comment ses modificationsdterminent les tats somnambuliques et des modifications dans la personnalit.

    Rsum

    En somme, il rsulte des tudes partielles de ce chapitre que, suivant lnergique expression des

    thologiens, lme informe le corps, cest--dire quelle le modle suivant un plan prconu, etquelle en dirige les rouages au moyen du prisprit. La forme humaine, en dpit des changementsapports par lge, reste constante dans son type, malgr le flux de matire qui passe sans cessedans le corps ; elle ressemble un filet entre les mailles duquel passent les molcules. Certiculum fluidique contient aussi les lois du mcanisme vital, et il reste stable travers letourbillon des actions physico-chimiques, qui dmolissent et reconstruisent incessammentldifice organique.Ltre humain se compose donc de trois choses distinctes : lme, avec son prisprit, la forcevitale et la matire.La force vitale joue ici un double rle : elle donne au protoplasma ses proprits gnrales, et auprisprit le degr de matrialit ncessaire pour quil puisse manifester les lois quil recle, en unmot, quelles passent de la virtualit lacte.La grande autorit de Claude Bernard, que nous avons plusieurs fois consult, vient encore iciconfirmer notre manire de voir. Voici comment il sexprime dans son livre: Recherchez sur lesproblmes de la Physiologie : Il y a, dit-il, comme un dessin vital qui trace le plan de chaquetre et de chaque organe ; en sorte que si, considr isolment, chaque phnomne de lorganisme

    18 Cl. Bernard,Leons sur les Tissus vivants, p. 262.19 Delanne, le Phnomne spirite, p. 65 et suivantes.

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    est tributaire des forces gnrales de la nature, ils paraissent rvler un lien spcial ; ils semblentdirigs par quelque condition invisible dans la route quils suivent, dans lordre qui lesenchane.Ainsi les actions chimiques synthtiques de lorganisation et de la nutrition se manifestentcomme si elles taient animes par une force impulsive gouvernant la matire, faisant une chimie

    approprie un but et mettant en prsence les ractifs aveugles des laboratoires, la manire duchimiste lui-mme.Cest cette puissance dvolution immanente lovule, que nous nous bornons noncer ici, quiseule constituerait le quid proprium de la vie, car il est clair que cette proprit volutive deloeuf qui produira un mammifre, un oiseau ou un poisson, nest ni de la physique, ni de lachimie. La vie rsulte donc bien de lunion de la force vitale et du prisprit ; lune donnant la vieproprement dite, lautre les lois organiques, et lme la vie psychique. De ces trois facteurs, unseul est toujours et partout identique : cest la vie ; lesprit, en passant travers la matire vivantedepuis les premiers ges du monde, a, petit petit, amen le changement de plus en plus perfectionn des organismes, nous croyons quil est lagent de lvolution des formes, cestpourquoi le prisprit en a gard les lois. Cest lentement, progressivement, quelles se sontincrustes dans sa texture, et nous verrons comment un mouvement, volontaire dabord, peutdevenir habituel, puis machinal, enfin automatique et inconscient Ceci est le ctphysiologique. Il en est de mme pour les manifestations intellectuelles, car les deux volutionssont parallles.Il est difficile, au premier abord, de se reprsenter une matire fluidique, invisible, impondrable,agissant sur la matire pour la disposer selon des lois ; cependant, nous pouvons trouver desanalogies qui nous permettent de nous faire une ide assez approche de ce genre daction.On connat, en physique, un instrument appel lectroaimant, qui va nous servir de comparaison.Il se compose essentiellement dun cylindre de fer doux, repli en forme de fer cheval, et autourduquel senroule, droite sur une branche et gauche sur lautre, un long fil de cuivre isol. Lesextrmits du fer se nomment les ples de llectro-aimant.Lorsque lon fait passer un courant lectrique dans le fil de cuivre, le fer saimante, et il conservecette proprit aussi longtemps que dure laction lectrique. Alors, si on retourne lappareil demanire ce que les ples soient en lair, en posant dessus une mince feuille de carton que lonsaupoudre dune couche de limaille de fer, celle-ci se dispose, spontanment, suivant certaineslignes rgulires, en formant des dessins variables suivant la forme des ples. On a donn cesfigures le nom defantme ouspectre magntique, et, aux agglomrations de limaille qui formentces figures, le nom de lignes de force, car elles traduisent objectivement laction des forcesmagntiques.Nous avons un exemple matriel de ce qui se passe dans tout tre anim. Une force invisible,impondrable : le magntisme, agit sans contact sur la matire : la limaille de fer. Dans notreexemple, llectricit joue le rle de la force vitale, llectro-aimant celui du prisprit, et lalimaille reprsente les molcules qui composent les tissus de lorganisme. Il peut se former danslaimant des ples secondaires que lon a nommspoints consquents, de sorte quils produisentaussi des spectres secondaires qui, se mlangeant aux premiers, dterminent la cration de figurestrs compliques. Le magntisme est bien une force impondrable, puisquun aimant qui peutporter jusqu vingt-trois fois son propre poids, ne pse pas plus quavant dtre aimant.En comparant laction du prisprit sur la matire laction exerce par llectro-aimant sur lalimaille, on peut donc se faire une ide de son mode daction On conoit quil lui soit possible demodeler la substance de ltre embryonnaire, de manire lui imprimer la forme extrieure qui

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    sera le type spcifique, et lintrieure, de faonner les organes divers : poumons, coeur, foie,cerveau, etc., qui serviront aux fonctions vitales.Le spectre magntique ne forme quun dessin sur le carton, ce dessin figure une coupe faite dansla sphre dinfluence magntique mais si on pouvait disposer une srie de cartons autour desples, en ventail, on verrait que le spectre magntique stend dans tous les sens, et quil forme

    un champ magntique dans toutes les directions ; il en est de mme pour le prisprit, sauf que seslignes de forces sont internes ; en un mot, dans cette comparaison, le corps physique est le spectremagntique du prisprit.Les dessins forms par les ples de llectro-aimant sont simples, parce que le fer a unmouvement molculaire simple, mais, dans lenveloppe fluidique, ce mouvement est trscompliqu ; de l une diversit trs grande chez tous les tres vivants. De mme que lactionmagntique se maintient tout le temps que le courant lectrique circule dans le fil de cuivre, demme le corps est vivant aussi longtemps quil y a de la force vitale pour animer le prisprit.Lanalogie peut mme aller encore plus loin.Les proprits magntiques du fer doux sont ltat latent, aussi longtemps que llectricit neles a pas rveilles en orientant les molcules du mtal ; de mme aussi les propritsorganogniques prispritales sommeillent, pour ainsi dire, pendant le sjour de lme danslespace ; elles ne deviennent actives que sous linfluence de la force vitale. Cest pourquoi, dansles manifestations spirites, les Esprits peuvent reconstituer un corps temporaire, en actionnant lemcanisme prisprital, lorsquun mdium leur fournit la force vitale et la matire indispensables ce genre daction.En somme, une force impondrable : llectricit, dtermine par induction la naissance duneautre force impondrable : le magntisme, qui a une action directrice sur la matire brute ; dansltre vivant, la force vitale agit sur le prisprit, et celui-ci peut alors dvelopper ses proprits,qui sont, comme nous lavons vu, la formation et la sparation du corps physique. Comme leprisprit est de la matire, quil a une forme bien dtermine, quil est indestructible, nouspourrons concevoir des modifications successives de son mouvement atomique, correspondant des modifications et des complications de plus en plus grandes dans son mode opratoire,autrement dit : quorganisant dabord des formes trs rudimentaires, il ait pu, par une trs longuevolution demandant des millions dannes et des rincarnations sans nombre, diriger ensuite desorganismes de plus en plus dlicats et perfectionns, pour arriver finalement jusqu ceux delhomme.Lme et le prisprit forment un tout indivisible, leur ensemble constitue la partie active etpassive, les deux faces du principe pensant. Lenveloppe est la partie matrielle, celle qui a pourfonction de retenir tous les tats de conscience, de sensibilit ou de volont ; cest le rservoir detoutes les connaissances, et comme rien ne se perd dans la nature et que lenveloppe estindestructible, lme a une mmoire intgrale lorsquelle se retrouve dans lespace.Le prisprit est lide directrice, le plan impondrable de la structure des tres. Cest lui quiemmagasine, enregistre, conserve toutes les perceptions, toutes les volitions, toutes les ides delme : non seulement il incruste dans sa substance tous les tats de lme dtermins par lemonde extrieur, mais il est aussi limmuable tmoin, le receleur indfectible des penses les plusfugitives, des rves peine entrevus ou formuls.Cest lui le gardien fidle, le texte indestructible de notre pass.Dans sa substance incorruptible se sont fixes les lois de notre dveloppement ; il est parexcellence le conservateur de notre personnalit, car cest en lui que rside le souvenir. Jamaislme nabandonne son enveloppe, cest la tunique de Nessus, mais cest aussi le baumeconsolateur.

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    Depuis les priodes milles fois sculaires o lme a commenc ses prgrinations terrestres, sousles formes les plus humbles de la cration, pour slever par degr jusquaux plus parfaites, leprisprit na cess de sassimiler dune manire indlbile les lois qui rgissent la matire,puisquau fur et mesure des progrs raliss, les crations si diverses de la pense forment unbagage qui va sans cesse grossissant, comme un trsor aliment sans relche. Rien ne se dtruit,

    tout saccumule dans cet imprissable prisprit, aussi incorruptible que la force ou la matirepremire dont il est sorti. Les merveilleux spectacles que notre me a contempls, les harmoniessublimes entendues dans les espaces, les splendeurs de lart sont jamais fixs en nous, et, pourtoujours, nous possdons ce que nous avons pu acqurir ; le moindre effort tent est portmcaniquement notre actif, car rien ne se perd, et cest ainsi que lentement, mais srement,nous gravissons lchelle ardue du progrs.A la mort de lhomme terrestre, quand sa dpouille mortelle se dcompose, lorsque les lmentsdont elle est forme rentent dans luniversel laboratoire, lme existe entire, complte,conservant ce qui fait sa personnalit, cest--dire la mmoire, et non plus seulement celle de ladernire existence, mais celles des vies successives quelle a parcourues. Cest un panoramaimposant et svre qui se droule ses yeux, dans lequel elle peut lire les enseignements dupass, et discerner ses devoirs pour lavenir.Nous voulons tablir maintenant comment le prisprit a pu acqurir ses proprits fonctionnelles.Cest par les rincarnations sans nombre ici-bas quil y est parvenu, en passant par toutes lestamines de lanimalit. Il faut donc que nous dmontrions lunit du principe pensant chezlhomme et les animaux, que nous tablissions quil ny a pas de transitions brusques entre eux etnous ; que la loi de continuit nest pas interrompue ; que lhomme ne forme pas un rgne partdans la nature et que cest par une volution continue, par des efforts sans cesse ritrs, quil estarriv occuper le point culminant de la cration.

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    CHAPITRE II - Lme animale

    SommaireLes sauvages. Identit du corps humain et de celui des animaux. tude des facults intellectuelles et

    morales des animaux. La curiosit. Lamour-propre. Limitation intelligente. Labstraction. Lelangage. Lidiotie. Amour conjugal. Amour maternel. Amour du prochain. Le sentimentesthtique. La gradation des tres. La lutte pour la vie. Rsum.

    La question de lorigine de lhomme est une des plus difficiles quil soit donn daborder ici-bas.Placs comme nous le sommes au milieu dune civilisation avance, il nous semble quun abmespare notre race de tous les tres vivants. Lhomme a conquis la royaut du monde ; il a plisous sa volont la nature entire, perant les montagnes, unissant les mers, desschant les marais,dtournant les cours deau, dirigeant la vgtation dans le sens le plus profitable ses besoins ou son agrment, domptant les animaux capables de se plier son service, il a su utiliser toutes lesforces vivantes pour augmenter son bien-tre. Les chemins de fer le transportent au loin sansfatigue ; llectricit fait parvenir sa pense dans les confins les plus loigns de son domaine etse plie tous les usages domestiques ; le ballon lui permet dexplorer les hauteurs delatmosphre, tandis que la mine le fait pntrer jusque dans les entrailles du sol. Devant lagrandeur des rsultats enfants par son gnie, lhomme est dispos ce croire dune essencesuprieure celle des animaux, qui paraissent incapables de tout progrs20.Les religions, qui ne sont, en somme, que des rveries anthropomorphes, ont navementencourag ces tendances, en faisant de lhomme limage matrielle de la divinit et de lme unprincipe, une cause spciale, compltement diffrente de tout ce qui existe ici-bas.Cependant, y regarder de plus prs, cette magnifique intelligence est bien loin dtre parfaite, etil faut une certaine somme de partialit et dorgueil pour se figurer que les tres qui se dchirentavec frocit dans de sanglants combats, qui nont dautre idal que de semer la mort et la

    dsolation chez leurs voisins, sont les reprsentants de lintelligence infinie qui gouverne lecosmos.Les splendeurs de nos progrs matriels ne doivent pas nous faire oublier notre modeste origine.Les enseignements de lhistoire sont l pour montrer que le dveloppement intellectuel a tsurtout loeuvre des sicles. La nuit morne du moyen ge a cess depuis trop peu de temps, pourque nous ne nous souvenions pas du pass, et, dailleurs, si une partie du genre humain avidemment march, il existe encore assez de nos semblables qui croupissent dans lignorance, labestialit, en proie aux plus mauvaises passions, pour montrer le chemin que lhumanit aparcouru dans son volution.

    Les sauvages

    Cte cte avec la civilisation, vivent des tres dgrads auxquels on hsiterait donner le nomdhomme21. Parmi ces peuplades caractrises par un degr dinfriorit inoue, on donne parfois

    20 Voir Richet,LHomme et lIntelligence.21 Vianna de Lima, lHomme suivant le Transformisme. La salet des Diggers dpasse tout ce que lon peut imaginer.De mme les Indiens de la baie de Motka (les Quadro et Vancouvert), qui laissent sentasser devant leurs misrableshuttes toutes les immondices. Kolben dit, en parlant des Huttentots, quil ny a aucun mammifre aussi sale queux.Plusieurs peuplades sont indomptables et dune grande frocit. Dalloux rapporte, au sujet des Abors, quils ne

    peuvent vivre deux dans une hutte sans se dtruire ; ils se comparent eux-mmes des tigres.

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    la triste prminence aux Diggers (Pau-En