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Editeur responsable : M-C Leleux - Rue Jean Vinois 15a - 7890 Ellezelles n° 66 - Eté 2018 Dans le cadre des Journées du Patrimoine, ouverture de « l’insolite » Jardin de Watkyne le samedi 8 et le dimanche 9 septembre 2018, de 14h à 18h. Editorial Cee ouverture nous permet de remere à l’honneur ce jardin secret créé par la seule imaginaon de Jacques Vandewayne alias Watkyne. A travers deux arcles, nous consacrons ce bullen à cet endroit parculier. En 2000, notre ami Jacky Legge avait consacré un arcle aux œuvres de Jacques Vandewayne dans le paysage pour la plaquee « Sur les traces de Watkyne ». Et en 2009, à la suite de son excellent mémoire de licence sur les « Construcons et environnements hors normes de Wallonie », Sarah Kokot nous avait fait un résumé de la pare consacrée au Jardin de Watkyne mais aussi à d’autres jardins. Malheureusement, pour des raisons de sécurité, la pete maison ne sera pas accessible aux visiteurs. Pet événement dans l’évènement et avis aux colleconneurs, nous merons en vente des affiches de Jacques Vandewayne à l’occasion de cee ouverture 2018, sous réserve de condions météorologiques. Exceponnel vous avez dit ! Nous nous sommes déjà enthousiasmé sur le travail de Shirley Dumont mais maintenant c’est à son tour de nous transmere ses émoons sur la personnalité et l’œuvre de Watkyne. Deux bonnes nouvelles pour terminer cet éditorial. L’important travail d’archivage des documents familiaux desnés aux Archives de l’Etat à Tournai commencé en 2014 est enfin terminé. Chaque document ou objet archivés a été inventoriés avant d’être envoyé aux Archives de l’Etat à Tournai. Suite à sa présentaon au collège communal d’Ellezelles par Nicolas Plouvier de l’ASBL Maison du Tourisme, le projet de requalificaon du parcours -spectacle de l’espace Watkyne a été approuvé par les autorités communales ellezelloises. Il a été retenu dans le cadre du Programme Wallon d’Invesssement PWI. C’est évidemment une excellente nouvelle. Nous en profitons pour remercier les autorités communales et plus parculièrement Eenne Buidin, échevin du tourisme qui « milite » depuis des années pour ce projet qui permerait de lancer une dynamique propre à Ellezelles, l’Etrange. Et n’oubliez pas de connuer à nous soutenir en renouvelant votre cosaon car 2019 sera riche en événements en hommage à la disparion, il y a 20 ans déjà, de Jacques Vandewayne. Nous vous invitons à lire notre appel à cosaon au verso de ce numéro. Le Conseil d’Administraon Sommaire Editorial 1 Le Jardin des Pierres et autres constructions et environnements hors normes de Wallonie, Sarah Kokot 2-4 Jacques Vandewattyne dans le paysage, Jacky Legge 5-7 Watkyne, un diamant artistique, Shirley Dumont 7-8 Les enquêtes inédites de Jacques. (3) 9-11 Appel aux cotisations 12 DIGITAL

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Editeur responsable : M-C Leleux - Rue Jean Vinois 15a - 7890 Ellezelles

n° 66 - Eté 2018

Dans le cadre des Journées du Patrimoine, ouverture de « l’insolite » Jardin de Watkyne le samedi 8 et le dimanche 9 septembre 2018, de 14h à 18h.

Editorial

Cette ouverture nous permet de remettre à l’honneur ce jardin secret créé par la seule imagination de Jacques Vandewattyne alias Watkyne. A travers deux articles, nous consacrons ce bulletin à cet endroit particulier. En 2000, notre ami Jacky Legge avait consacré un article aux œuvres de Jacques Vandewattyne dans le paysage pour la plaquette « Sur les traces de Watkyne ». Et en 2009, à la suite de son excellent mémoire de licence sur les « Constructions et environnements hors normes de Wallonie », Sarah Kokot nous avait fait un résumé de la partie consacrée au Jardin de Watkyne mais aussi à d’autres jardins.

Malheureusement, pour des raisons de sécurité, la petite maison ne sera pas accessible aux visiteurs.

Petit événement dans l’évènement et avis aux collectionneurs, nous mettrons en vente des affiches de Jacques Vandewattyne à l’occasion de cette ouverture 2018, sous réserve de conditions météorologiques. Exceptionnel vous avez dit !

Nous nous sommes déjà enthousiasmé sur le travail de Shirley Dumont mais maintenant c’est à son tour de nous transmettre ses émotions sur la personnalité et l’œuvre de Watkyne.

Deux bonnes nouvelles pour terminer cet éditorial. L’important travail d’archivage des documents familiaux destinés aux Archives de l’Etat à Tournai commencé en 2014 est enfin terminé. Chaque document ou objet archivés a été inventoriés avant d’être envoyé aux Archives de l’Etat à Tournai. Suite à sa présentation au collège communal d’Ellezelles par Nicolas Plouvier de l’ASBL Maison du Tourisme, le projet de requalification du parcours-spectacle de l’espace Watkyne a été approuvé par les autorités communales ellezelloises. Il a été retenu dans le cadre du Programme Wallon d’Investissement PWI. C’est évidemment une excellente nouvelle. Nous en profitons pour remercier les autorités communales et plus particulièrement Etienne Buidin, échevin du tourisme qui « milite » depuis des années pour ce projet qui permettrait de lancer une dynamique propre à Ellezelles, l’Etrange.

Et n’oubliez pas de continuer à nous soutenir en renouvelant votre cotisation car 2019 sera riche en événements en hommage à la disparition, il y a 20 ans déjà, de Jacques Vandewattyne. Nous vous invitons à lire notre appel à cotisation au verso de ce numéro.

Le Conseil d’Administration

Sommaire

Editorial 1

Le Jardin des Pierres et autres constructions et environnements

hors normes de Wallonie, Sarah Kokot 2-4

Jacques Vandewattyne dans le paysage, Jacky Legge 5-7

Watkyne, un diamant artistique, Shirley Dumont 7-8

Les enquêtes inédites de Jacques. (3) 9-11

Appel aux cotisations 12

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Le Jardin des Pierres

Et autres constructions et environnements hors normes de Wallonie

Si le Jardin peut être vu comme la conclusion logique du Sentier, À chaque Paradis son Jardin…

Pas de Jardin d’Eden au Paradis de Wodecq, hameau où

Jacques Vandewattyne et son épouse avaient élu

domicile, mais Le Jardin des Pierres. Celui-ci, aussi nommé

Jardin de Watkyne, était sous-titré « Plus brousse que jardin »

par son auteur lui-même.

Jardin des Pierres… car Watkyne en a incorporé un grand

nombre dans les sculptures aux formes et matériaux variés

dispersés sur la parcelle acquise en bordure de son

habitation. Plus brousse que jardin… car la nature a toujours

gardé son droit sur les sculptures qu’elle accueille, comme

dialoguant avec celles-ci.

L’énergie de l’artiste des collines a tout d’abord investi l’habitation en L qui surplombe cette

parcelle s’étendant à flanc de coteau. Les murs de celles-ci se parent de décors divers avec

comme leitmotiv, des visages. Tantôt modelés dans le mortier, tantôt en céramique, en terre cuite

ou en pierre, ils sont humains ou fantastiques, avec une récurrence du personnage du diable.

Le jardin, quant-à-lui, présente des installations aux formes variées essentiellement constituées de

ciment, béton et mousse de polyuréthane auxquels sont intégrés pierres et éléments de

récupération. Dans ce tintamarre merveilleux, cohabitent chouettes, diables, sorcières, et autres

êtres fantastiques. Autant de regards qui s’entrecroisent et semblent observer le visiteur…

Certaines sculptures ressortent davantage. Parmi celles-ci, citons Le Robertus Neanderthalis,

monticule de mortier dans lequel est intégré quantité de silex. Plus bas, c’est le mausolée de

Watkyne qui attire l’attention, autoportrait en béton posé au sol et gagné par la mousse qui

recueille les cendres de l’artiste.

Mais les installations les plus impressionnantes sont sans doute les sculptures habitables. L’une d’elle

est celle de Justin et Justine, le diable et la sorcière, deux énormes visages creux accessibles par

leur bouche.

En contrebas, une autre sculpture habitable se matérialise

sous la forme de Dolorès, la femme qui accouche dans la

douleur… Celle-ci, recouverte de vaisselle cassée, arbore

une chevelure constituée de liens de ballots de paille. L’on

entre par une ouverture dans le flanc de cette géante

semi-allongée, pour en ressortir entre ses jambes.

Surnageant de l’ensemble, le portrait du créateur continue,

imperturbable, de contempler son œuvre. Dernière

réalisation de Watkyne, une impressionnante tête en trois

dimensions surplombe une structure de treillis. Cette œuvre

inachevée nous rappelle que, jusqu’à la fin, le Jardin était en perpétuelle évolution.

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Sur le Sentier qui mène au Jardin…

Le Jardin des Pierres, par l’intégration d’assemblages et de

sculptures dans le paysage, n’est pas sans rappeler

l’œuvre plus connue de Watkyne qu’est Le Sentier de

l’Etrange. Ce parcours de six kilomètres à travers la

campagne Ellezelloise était déjà dédié aux sorcières,

diables et autres loup-garou, thèmes mystérieux issus des

contes et légendes recueillis auprès d’anciens.

Le Jardin ayant été entamé en 1984, année de l’inaugura-

tion du Sentier, nous pouvons véritablement parler de

filiation entre les deux œuvres. Le Jardin s’impose comme

une version condensée de son prédécesseur.

Le Jardin des Pierres ne fait pas seulement écho au Sentier de l’Etrange, mais à l’activité globale

menée par Jacques Vandewattyne. Hétéroclite, à l’image de la pluridisciplinarité qui définit

l’homme, le Jardin semble synthétiser l’ensemble de ses préoccupations. S’y retrouvent l’amour

pour le folklore, pour les anciens contes et légendes, l’humour et la dérision. Ajoutons que la

diversité des techniques adoptées rappelle les médiums variés employés par l’artiste, de la

gravure à la sculpture en passant par la peinture ou la céramique, parfois même inventant de

nouvelles techniques.

Considérant cette capacité à synthétiser l’ensemble de l’activité de Jacques Vandewattyne et le

fait que cette œuvre occupa les dernières années de sa vie, d’aucuns voient Le Jardin des Pierres

comme l’aboutissement de son œuvre, son « chef-d’œuvre ».

Il est également le résultat d’autres influences.

Jacques Vandewattyne avait en effet décidé de s’inspirer de l’œuvre du Facteur Cheval quand il

acheta la maison et le terrain voisins de son habitation, se laissant également inspirer par La

Maison Picassiette. Le Palais Idéal du Facteur Cheval, impressionnant monument de ciment bâti

entre 1879 et 1912 dans la Drôme, mêle architecture d’influence occidentale et orientale. Ce

gigantesque Palais était pourtant modestement parti de l’association d’une pierre de forme

étrange et du songe de ce facteur rural. C’est, pour sa part, dans les années 30 que Raymond

Isidore, balayeur du cimetière de Chartres bien vite surnommé Picassiette, commença à recouvrir

son habitation de vaisselle cassée pour finir par en recouvrir le moindre recoin.

Ces sites constituent les deux exemples les plus connus d’Europe francophone du type de

création auquel appartient Le Jardin des Pierres. Ces constructions et environnements, qui ne

connaissent pas de nom les définissant sans équivoque, ont en commun leur souci d’originalité ;

forme et symbolisme y prennent le pas sur la fonctionnalité. Ajoutons que leur auteur, le proprié-

taire lui-même, n’est pas architecte de métier et se situe en marge du circuit traditionnel de l’art.

Si les deux exemples les plus connus de ce type de sites, que nous avons choisi de nommer « hors

normes », se situent en France, la Belgique n’est pas en reste de ces installations insolites.

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Le site des Pagodes de Wahenge est aussi reculé de l’agitation de la ville

que peut l’être le Jardin des Pierres. Dans cette prairie de Beauvechain,

l’artiste Julos Beaucarne, davantage connu pour son œuvre musical, a em-

pilé des bobines industrielles comme autant d’éléments d’un jeu de

construction. De cette manière, il traduit dans l’espace la philosophie qui

habite ses chansons. Y agit comme leitmotiv, « l’unité de tout le vivant »,

auquel les Pagodes – superposition de bobines de taille décroissante évo-

quant la forme d’antennes – permettent d’envoyer des messages

télépathiques…

Le minéral, élément omniprésent – jusque dans son nom – dans Le Jardin

des Pierres, tient fréquemment une place de choix dans ces œuvres.

A Eben-Emael, l’imposante Tour d’Eben-Ezer arbore un parement de silex

sur ses sept niveaux. D’apparence défensive, cette tour crénelée

surmontée de quatre sculptures monumentales émane de l’imagination

de Robert Garcet. Ce dernier, s’appuyant sur les mesures de la

Jérusalem Céleste, y traduit sa propre interprétation de l’Apocalypse de

Jean. L’auteur veut également imposer son édifice comme un

monument à la paix. Il voit d’ailleurs le silex comme matériau idéal à

cette fin, puisqu’il n’a jamais servi à construire ni caserne ni prison.

Le Jardin des Pierres intègre également beaucoup d’éléments de

récupération. Il s’agit d’un autre trait récurrent de ces environnements hors

normes, qui est particulièrement présent chez Jeannine Lejeune, à Ouffet.

Les Chapiteaux consistent en un assemblage à grande échelle d’objets

variés recouvrant les murs intérieurs de la modeste habitation de l’auteur.

En sauvant ces objets au bord de la poubelle, elle dénonce la « société du

jetable ».

Il s’agit d’une présentation non exhaustive des œuvres de ce type que

recèle notre pays. On trouve notamment à Lierneux The Valley of

Shangrilah dans lequel son auteur matérialise sa conception du paradis terrestre, à Crupet

l’impressionnante Grotte Saint-Antoine, à Thorembais-les-Béguines un environnement dédié à la

Vierge Marie et à la famille royale belge…

Il est également de nombreuses œuvres que l’on sait avoir existées mais qui sont aujourd’hui

détruites. Ce fait attire notre attention sur le caractère éphémère d’un grand nombre de ces

constructions et environnements hors normes, réalité qui renforce certainement la fascination que

ces sites éveillent chez leurs visiteurs…

Sarah Kokot, Constructions et environnements hors normes de Wallonie, mémoire de licence en

histoire de l’art, UCL, janv. 2008.

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Jacques Vandewattyne dans le paysage

Quel que soit l'itinéraire que vous empruntez au Pays des

Collines, vous vous retrouvez à un moment donné face à

une œuvre de Jacques Vandewattyne. Une peinture

murale à même une cabine électrique, un élément

décoratif sur une façade de magasin, une affiche

d'annonce du Sabbat des Sorcières…

L'artiste a exploré en autodidacte un nombre important de

techniques, de supports, de matières. Il faisait de l'art un

élément de la vie quotidienne : du tableau accroché solennellement au mur à l'autocollant collé négli-

gemment sur le hayon arrière de la voiture. L'art c'est la vie ; c'était toute la vie de Jacques

Vandewattyne.

S’il a exploré l'abstraction, son thème de prédilection a été le Pays des Collines, le réel et l'imaginaire. Il

s'est fondu dans ce territoire pour mieux en révéler la personnalité.

Par son action incessante dans la vie locale, ses recherches historiques et archéologiques, sa collecte

d'anecdotes et de légendes, ses créations artistiques, ses inventions, les habitants de cette région ont

mieux pris conscience d'un territoire familier qui leur était particulier. Un paysage morcelé et variant se-

lon les saisons, un habitat dispersé plus soucieux de points d'eau que d’axes de « reliance », des

chouettes et des hiboux troublant la nuit et les esprits trop tranquilles des saules têtards tentant

vainement d'assécher les terres gorgées d'eau…

Le « Sentier de l'Etrange » est une des œuvres majeures de Jacques Vandewattyne. Il s'agit d'un

itinéraire de sept kilomètres traçant une boucle dans Ellezelles. Il est bordé de sculptures ou

d’interventions dans la nature : une tache de couleur, la fixation d'un clou dans un pli de l'écorce de

l'arbre révèlent une figure grimaçante de mégère. Une sorcière et un joueur de cornemuse sont figés

dans le ciment. Des éléments anciens d'un véhicule agricole assemblés et soudés deviennent le coq

réveillant le matin. Ce périple constellé d'œuvres voyantes ou discrètes crée un rapport actif avec le

paysage qui devient porteur d'imaginaire.

Le jardin des pierres

La maison voisine et son écrin de verdure accrochés à flanc de

coteau, au Paradis à Wodecq, avaient été acquis et

transformés en « Atelier du potier Watkyne », du pseudonyme de

l’artiste. Les murs extérieurs enduits, petit à petit, de terre à

céramique, se muaient en une voisine rocaille du XIXe siècle,

avec la pose de figurines à divers endroits ; une forme de mise

en bouche pour le chef-d’œuvre de Jacques Vandewattyne :

« Le Jardin des pierres », appelé aussi « Le Jardin de Watkyne ».

Cet espace est fascinant parce qu’il marie l’élément naturel et

les interventions de Jacques Vandewattyne et qu’il correspond à sa fièvre créatrice constante. Même

un regard attentif ne vous permet pas d’embrasser toutes les interventions de l’artiste.

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Vous êtes accueilli par un étrange personnage juché sur un diable

quadrupède, tandis qu’un autre Satan rouge aux yeux catadioptres

surgit d’entre deux massifs végétaux. A ses pieds, un chien de béton

monte une garde permanente. Un peu plus loin, une brouette

contient l’équipement abandonné de quelques cosmonautes et

astronautes en manque de voyages intérieurs. Vous longez une

façade garnie de tessons de poteries colorées et de coquillages en

attente patiente de fossilisation, tandis qu’un nouveau diable nu à

califourchon sur un balai poursuit sans cesse un amour de sorcière.

Vous foulez des dalles de béton qui gardent l’empreinte des pieds et

des mains des proches, une preuve de plus de l’attachement de

Jacques Vandewattyne à sa famille. Vous frôlez le conteur français

Claude Segniolle, figé en meneur de loups.

Un véritable poil de sa barbe est confondu dans la structure, paraît-il. Vous vous recueillez devant le

mausolée de l’esprit de l’artiste, un visage géant aux yeux mosaïques et aux pupilles en billes de

verre, clin d’œil à l’esprit d’enfance dont il ne se départit jamais. Le mausolée comporte des silex,

des morceaux de tuyaux de pipe en terre, des minéraux trouvés le long de sentiers, dans les

champs ou ramenés de Bretagne et d'ailleurs. A deux pas, se dresse le four à pain - le pain de la vie

et du partage - décoré de pierres diverses ramenées par des amis, à la demande du sculpteur

« ornemaniste ». Arizona, l’animal fantastique et familier, semble goûter la chaleur du four, même

éteint, aux jours les plus froids de décembre.

Au centre du jardin, une maisonnette que l’artiste occupait parfois comme autre atelier, à la belle

saison. Mais, comme toujours chez lui, Jacques Vandewattyne débordait du chevalet pour envahir

le moindre centimètre carré : les meubles se sont mués en sculptures « domestiques », les murs ont

disparu sous le carton-pâte, les objets déposés ou incrustés et les coulées de couleurs se sont

prolongés en œuvres murales, bref une immense création pénétrable - proche du labyrinthe -,

baptisée Justin & Justine.

A deux pas : les toilettes doubles, devenues lieu de sociabilité

et de conversation, dont les portes sont équipées de

poignées-sexes.

Ou, encore, des créations tridimensionnelles : « Le monument

à l’humanité », une colonne faite de silex surmontés de

morceaux de tuiles romaines sur lesquels sont disposés des

tessons de poterie du Moyen Age ; une boîte de limonade

en métal attaquée par le temps et les intempéries

surmontant le tout ; « La bête à sept têtes », l’arbre métamor-

phosé ; les porteurs du Fiertel et les processionnaires

paralysés dans leur marche ; la chèvre unicorne, cousine germaine du narval ; Robertus

Néandertalus ; « La cabane des conteurs », une construction équipée d’un castelet, d’un espace

pour raconter, de marionnettes déposées avec une négligence incitative à la manipulation,

d’éléments qui peuvent devenir décors et accessoires et d’un coffre à faconde, renfermant mille

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Watkyne, un diamant artistique, par Shirley Dumont

Lors de ma cinquième secondaire à l’Académie des Beaux-Arts, Léonard Defrance, à Liège, les

rofesseurs nous préparâmes doucement à choisir notre artiste en vue de la réalisation de notre

travail de fin d’études qui nous prendrait toute notre année scolaire de sixième secondaire. Ayant

vécue dans la région du pays des Collines, de

l’autre côté linguistique, à savoir sur la

commune de Brakel et plus précisément à

Zegelsem que mes parents « francophones »

avaient élu domicile pendant 13 années, (la

famille paternelle de mon papa est originaire

d’Ellezelles. Son grand-père, Robert Dumont

habitait au Breucq.) et faisant partis des

terribles « Chorchîles », mon choix s’est

naturellement porté sur leur « père adoptif »,

Jacques Vandewattyne alias « Watkyne ».

Mon papa l’a eu comme professeur lors de sa

dernière année professorale en 1986-1987 à

l’Athénée Royal d’Anvaing et dont il nous a si

souvent parlé.

fantaisies dont le maniement éveillera une cascade d’histoires

enfouies au tréfonds ou surgies d’un imaginaire en mal de

public…

Paradoxe, ces créations se trouvent sur un terrain privé, ce qui

permettait à Jacques Vandewattyne de choisir les personnes qui

pouvaient visiter ce lieu « sacré », des élus. La découverte faisait

l'objet d’un protocole, d’un rite. L'invité devait, ainsi, se coiffer

d’un blanc bonnet de dentelle pour pénétrer dans la structure-

sculpture « Dolorès », une géante assise, les vêtements découpés

dans des assiettes... L'épreuve était une nouvelle naissance, une

initiation à sa propre découverte, sous le regard goguenard de

l'artiste et des têtes en céramique qui parsèment l’intérieur du

corps.

Le jardin et le sentier n’ont de sens qu’avec leur visite.

Echafaudés par un créateur toujours sur le chantier, soucieux des

autres, ils appartiennent au registre de l’art public, donc avec

une responsabilité citoyenne par rapport à ces réalisations. Une responsabilité dont il est indispen-

sable que les pouvoirs publics soient des partenaires, garants de l’entretien, de la mise en valeur, de

la pérennité de ces éléments du patrimoine commun.

Jacky Legge, Maison de la Culture de Tournai.

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Je présentai mon artiste à mon professeur d’histoire de l’Art mais celle-ci refusa catégoriquement

car cela était trop « folkore » à son goût. Elle avait la crainte qu’il n’y ait pas assez de

documentation, de courants artistiques afin que je puisse réaliser mon travail le plus complet

possible. Je terminai ma cinquième avec un goût amer et totalement déçue. Ma maman me

conseilla d’effectuer des recherches sur Jacques concernant son panel artistique et de le

représenter à mon professeur dès le début de l’année scolaire. À nouveau, mon professeur refusa.

Ma maman m’encouragea à envoyer un mail à mon professeur en lui indiquant qu’elle devait me

laisser relever ce défi car Jacques est un grand artiste et il est malheureusement trop méconnu.

Il est triste d’avoir un grand artiste si près de chez nous et que l’on ne puisse pas s’enrichir de ses

œuvres et d’aller parfois si loin en découvrir d’autres… Elle me répondit de vive voix le lendemain

que vu ma volonté et ma persévérance, elle accepta que je prenne Jacques comme artiste.

Enfin…

Ayant expliqué ma démarche à Christian, fils « spirituel et artistique » de Jacques, il fut enthousiaste

et me soutint tout au long de mon travail. Aussi, Christian me renseigna les coordonnées de Claude,

fils de Jacques avec qui je pris très vite contact et qui fut lui aussi enthousiaste et qui me soutint

aussi tout au long de mon travail. Claude et Christian furent d’un enrichissement immense de par

leurs explications, leurs anecdotes que certains ne connaissent pas, leurs apports de livres, DVD,

etc.

Durant des mois, j’allais de découvertes en découvertes. Jacques a un panel artistique très riche, à

savoir qu’il fut graveur, caricaturiste, peintre (avec diverses techniques), dessinateur, céramiste et

tant d’autres.

À la présentation de mon TFE, le jury (étant composé de mon prof

de français, histoire de l’Art, mon guide étant mon professeur de

peinture, et deux personnes extérieures) fut agréablement surpris

et admiratif. Mon guide était époustouflé et dit avec joie que cela

fut enrichissant. Qu’il était fier de voir qu’un de ses élèves prit

l’initiative de leur faire découvrir un artiste méconnu…

Ma professeure d’histoire de l’art conclut qu’elle fut heureuse de

m’avoir laisser « travailler » sur Watkyne et un peu attristée de ne

pas l’avoir accepté plus tôt.

Ayant appris que j’allais être publier dans les « Amis de Watkyne »,

et lui demandant, elle prit joie de m’écrire un petit mot en

transmettant son ressenti.

Voici son petit mot :

« En tant qu’enseignante, des moments forts jalonnent les liens que tisse au quotidien avec mes

élèves. L’un de ceux-ci est certainement la joie intense qui a traversé les yeux de Shirley, le jour où

j’ai, enfin, accepté qu’elle entame son travail de fin d’études sur Watkyne ! Au fil des mois, mon

élève prouvait qu’elle avait eu raison d’insister auprès de moi ! Lors de la défense orale, Shirley a

déployé une force de conviction qui rayonnait dans l’assemblée ! »

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Les enquêtes inédites de Jacques. (3) Petit rappel, dans notre numéro 60, nous parlions déjà des geutelingen en reprenant de Jacques :

« A la Sainte-Apolline, on fait des geutelingen dans les hameaux flamands d’Ellezelles et de

Flobecq, de Renaix à la Zwalm. On prie Sainte Apolline pour les maux de dents. Avec de mauvaises

dents, l’on parvient à savourer cette délicieuse pâtisserie. En réalité, ce sont de grosses crêpes

cuites sur la sole du four à pain.

1 kg de farine, 100 g de levure, 1 l de lait tiède, 8 œufs et un peu de sel et un rien d’huile pour

empêcher qu’elles ne collent sur la sole du four.

Avec une louche à long manche, verser la pâte directement sur la sole du four entre deux rangées

de braises, laisser gonfler, retirer et mettre à refroidir sur de la paille. »

Pour nos amis de Elst, la geutelingen est l’expression des Ardennes flamandes : la tradition, le goût,

la culture, la nature et le calme. Les geutelingen sont préparés avec du lait, de la farine, des œufs,

de la levure, un peu de sel et une pincée de canelle. Les geutelingen sont versés sur un carrelage

en glaise dans un four brûlant. A cause de la chaleur énorme, la geuteling obtient sa saveur et une

odeur typique.

Kriekelingen

Recette d’une boucherie d’Everbecq.

Pour confectionner le saindoux, on fait fondre la panne et ce qui reste ce sont les kriknotjes. Mettre

les kriknotjes dans une casserole, ajouter de l’eau, un oignon émincé. En tournant à la louche en

bois, faire évaporer l’eau. Assaisonner. Mettre dans une jatte.

Des tripes

A Ellezelles, on appelle tripes ou crâs bouyaus, les gros boyaux du

cochon. En allant vers Leuze, le mot tripes, prend une autre

signification. On fait cuire le poumon et le cœur du cochon en même

temps que la tête. Hacher finement, ajouter des prunes et des

pommes, assaisonner. Laisser cuire longtemps.

Le boucher d’Ellezelles, Jules Milète, ne faisait du boudin blanc qu’à la

Noël.

Le premier repas, après le tuage du cochon, était constitué de la

cervelle, de la rate et des rognons. ON grillait les pattes sur le feu.

Certains mangeaient les oreilles « vertes » (non cuites) ainsi que la

queue. Pour recevoir la queue, les gamins du hameau devaient

mettre leur nez dvé l’trau dou cu dou pourcheau !

Pour les amateurs, les geutelingen sont disponibles de mi-janvier à mi-mars. Le seul point de vente est la boucherie De Koekelaere à Elst.

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Jambon cuit, jambon de ducasse.

Servi au petit déjeuner des organisateurs de la ducasse Jean-Jean dou Ballon.

On utilise un jambon légèrement fumé et on le cuit dans un bouillon avec sauge, thym, laurier,

céleri, 2 poireaux, oignons, carottes, ail, sel et poivre. Ajouter un verre de vinaigre à la fin de la

cuisson. Laisser refroidir dans le jus. 3/4 h de cuisson par kg de viande.

Peutotes au roux

Rôtir des navets avec des oignons. Quand tout est bien brun, ajouter de l’eau et de la farine.

Mettre les pommes de terre. Thym et laurier.

Pommes de terre grillées

Couper les pommes de terre en fines tranches, à cuire su l’buse de l’eustûf + sel

Stuvè d’poûs

Petits pois étuvés et lardons.

Cidre

2kg ½ de pommes séchées pour 50 l d’eau. Après 10 à 12 jours cela ne fermente plus. Transvaser

dans un autre tonneau. Faire fondre 2 kg et demi de sucre dans de l’eau chaude, laisser refroidir et

verser dans le tonneau.

Pour éclaircir le cidre, y mettre un blanc d’œuf battu.

Petit Jésus

Cougnole à deux têtes grossièrement modelées, décorée d’un patacon en plâtre, que l’on donne

aux enfants à la Noël.

Caramels

Faire fondre du sucre cristallisé sur une platine, couper en carré pour consommer avec le café.

Chauffer plus fort et on obtient du caramel. On versait le sucre caramélisé sur de vieilles cartes à

jouer que l’on donnait à lécher aux enfants. Et l’hygiène dans tout cela ?

Chiroup

Sirop de betteraves fabriqué en 14-18 et encore en 40-45.

A no méson, on a tuè no pourchau…

Menu traditionnel: soupe de tîte, ochaus

carottes, boudins chafâ (composte), târte

au ris ou tâte à maton.

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L’augustine (liqueur des Sœurs augustines)

Semences :

Ecraser les semences au pilon, puis les faire macérer 5 ou 6 jours, sur 4 litres de bon genièvre à 40

degrés.

Pour distiller, on ajoute à ce produit macéré 8 litres d’alcool à 90 degrés + 4 litres d’eau. On soutire

8 à 9 litres même plus tant que c’est clair. Après distillation, faire bouillir 2 kg de bon sucre blanc en

morceau dans deux litres d’eau + 6 litres d’eau bouillie.

On mélange tout quand c’est encore chaud, mais pas bouillant, filtrer et mettre en bouteilles,

si c’est clair sinon laisser reposer dans les grosses bouteilles.

En 1918, au mois de février, Sœur Julie avait préparé 72 grosses bouteilles !!!L’augustine conserve,

Sœur Julie est décédée à l’âge de 99 ans.

Tarte fine

Pour 10 tartes moyennes :

4kg de farine,

3 kg de beurre,

½ kg de saindoux, gros comme 2 noix d’alcali bien écrasé,

3 pintes d’eau un peu plus ou moins suivant que la farine est plus ou moins sèche.

20 gâteaux

40 kg de farine, 80 œufs,

2 litres de lait,

2 ½ kg de beurre,

1 kg de levure (recette à l’échelle de l’Hôpital Notre Dame à la Rose).

On met souvent du beurre de pot, mais du frais donne un goût plus fin au gâteau.

Pour un gâteau plus fin :

5 œufs, 200 g de beurre frais,

2 kg de farine,

1 ½ pinte de lait,

175 g de levure sèche.

angélique : 45g,

Anette : 60g,

anis : 30g,

carvi : 60g,

carottes : 30g,

coriandre : 60g.

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Bulletin réalisé par Les Amis de Watkyne – Coordination : Pascal Hyde

Avec des articles de : Shirley Dumont, Sarah Kokot, Jacky Legge, Claude Vandewattyne,

Jacques Vandewattyne. .

Crédits photographiques : Edouard Bellemans, Anne-Claire Brucher, Shirley Dumont,

Pascal Hyde, Claude Vandewattyne .

Afin que vous puissiez être mis au courant de nos activités, nous vous invitons à nous communiquer

votre adresse courriel sur [email protected]

Appel aux cotisations

En 2019, on commémore les 20 ans du décès de Jacques Vandewattyne. Une exposition sera

organisée à l’Hôpital Notre-Dame à la Rose à Lessines. Celle-ci devrait être enrichie par un volet

littéraire autour de la réédition de « Collines mystérieuses ».

A côté de cela, l’archivage des documents collectés ou produits pendant plusieurs décennies par

Jacques et précieusement conservés par Solange est toujours en cours. Cet important travail

permettra de les sauvegarder grâce à la donation faite par Pierre, Jean et Claude Vandewattyne

aux Archives de l’Etat à Tournai. Le gîte « Un petit coin de Paradis » accueille régulièrement des

hôtes qui repartent particulièrement heureux d’avoir découvert cette maison d’artiste, concept

particulièrement rare si pas unique en Wallonie. Il faut dire que l’accueil de Francine contribue

beaucoup à ce succès.

Comme vous pouvez le constater, c’est grâce à vous que nous pouvons mener ces projets. Autant

dans nos expositions que dans nos activités diverses, nous tenons à garder l’esprit «watkynien » cher

à l’artiste. L’ouverture de son jardin cette année en sera un bon exemple. L’entretien, la

conservation, la restauration et la valorisation de celui-ci ainsi que du Sentier de l’Etrange sont des

projets à long terme. À ce sujet, espérons que l’évolution positive du projet de revalorisation du

parcours-spectacle permettra aussi de relancer la dynamique autour du Sentier de l’Etrange. Il en a

grand besoin !

Comme vous le savez, l’essentiel de notre travail se fait bénévolement et nous ne bénéficions

d’aucun subside public régulier. Votre aide est donc très précieuse. Pour la première fois depuis la

création de l’asbl, en 1997, nous devons malheureusement augmenter les cotisations à 15€

(membre adhérent) et 30€ (membre effectif).

Un petit geste mais qui a beaucoup d’importance pour nous. Si vous ne l’avez pas encore fait c’est

le moment

Vous pouvez verser votre cotisation au IBAN : BE 70 0682 4464 3525

BIC : GKC CBEBB

Vous pouvez nous contacter :

Siège social de l’asbl : Les Amis de Watkyne, Paradis, 17 à 7890 Ellezelles

Photo de fond prise le 05/08/2018 sur le champ de la moisson de Lahamaide en direction du moulin du Cat Sauvage