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1 Impact du télétravail sur le sentiment de proximité en PME Approche qualitative auprès de 10 PME belges Auteur(s) : Marialuisa CASA, Claire DUPONT Affiliation(s) : Université de Mons – Institut de recherche human Org Coordonnées : 20 Place du Parc – 7000 Mons (Belgique)

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Impact du télétravail sur le sentiment de proximité en PME

Approche qualitative auprès de 10 PME belges

Auteur(s) : Marialuisa CASA, Claire DUPONT

Affiliation(s) : Université de Mons – Institut de recherche human Org

Coordonnées : 20 Place du Parc – 7000 Mons (Belgique)

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IMPACT DU TÉLÉTRAVAIL SUR LE SENTIMENT DE PROXIMITÉ EN PME

APPROCHE QUALITATIVE AUPRÈS DE 10 PME BELGES

Le télétravail est généralement présenté comme une pratique offrant de multiples avantages. Il permettrait ainsi aux salariés de mieux concilier vies privée et professionnelle (Aguilera et al., 2016 ; Walrave, 2010 ; Filion, 2007), il leur conférerait une certaine flexibilité d’horaire (Ruiller et al., 2017 ; Farinelli, 2016) et contribuerait à réduire les déplacements (Mann et Holdsworth, 2003). Une meilleure productivité au travail (Aguilera et al., 2016 ; Taskin, 2006), une amélioration du bien-être du salarié (Aguilera et al., 2016), ou encore une meilleure liberté d’organisation seraient également évoqués (Dumas et Ruiller, 2014). Si les avantages sont nombreux, le télétravail n’est pas exempt pour autant d’inconvénients et l’un d’eux nous intéresse plus particulièrement dans ce papier. Le télétravail risque en effet de créer un sentiment de distance avec l’entreprise et les collègues, pouvant affecter le sentiment de proximité ressenti. Nous nous interrogeons sur un tel impact dans le contexte spécifique des PME.

Si 99,8% des entreprises belges étaient des PME en 2017, seules 16,87% d’entre elles pratiquaient du télétravail (Statbel, 2019). Les PME sont depuis longtemps décrites comme des lieux marqués par un phénomène de proximité hiérarchique (Boutary, 1998, in Boutary et al., 2016 ; Torrès, 2000) reflétant des relations de proximité entre les salariés et le dirigeant (Filion, 2007). En effet, l’entrepreneur est généralement très proche de ses salariés, qu’il connait souvent individuellement vu qu’ils travaillent dans les mêmes locaux et partagent les mêmes conditions de travail. Si les PME sont marquées par un fort sentiment de proximité, on pourrait penser que le fait de recourir au télétravail constitue un risque pour ce sentiment. En effet, l’introduction du télétravail en PME pourrait engendrer une réduction des interactions entre salariés, provoquant ainsi un isolement progressif, fortement redouté par les télétravailleurs (Walrave, 2010). Le manque de conversations en face à face dû au télétravail pourrait être perçu comme une perte du lien social avec les collègues et amener le télétravailleur à avoir le sentiment de ne plus appartenir à une équipe (Ollivier, 2017 ; Walrave, 2010).

Vu l’opposition manifeste entre la distance induite par le télétravail et la proximité inhérente aux PME, nous nous interrogeons sur l’impact que le télétravail pourrait avoir sur le sentiment de proximité en PME. Constitue-t-il une pratique qui pourrait mettre à mal le sentiment de proximité en PME ? S’agit-il d’une pratique qui pourrait, au contraire, renforcer ce sentiment ? Ou bien le télétravail tel que développé en PME ne présente-t-il aucune influence sur le sentiment de proximité ? Bien que le télétravail soit étudié depuis plus de trente ans, la littérature faisant référence simultanément aux trois notions clés de notre recherche, à savoir télétravail, PME et proximité, semble particulièrement lacunaire. Dickson et Clear (2005) et Parker et Castleman (2007) soulignaient déjà, il y a plus de 10 ans, le faible nombre d’écrits s’étant intéressés à la question du télétravail en PME. A notre connaissance, seuls Ward et Shabba (2001) ont étudié l’impact de facteurs psychologiques et sociaux liés au télétravail au sein de PME implantées à Birmingham entre 1986 et 1998. Notre recherche vise donc à réduire cette absence de documents. Dans un premier temps, nous expliciterons la notion de proximité et réfléchirons à l’impact que le télétravail pourrait avoir sur le sentiment de proximité, en nous attardant plus spécifiquement sur le cas particulier des PME. Dans un deuxième temps, nous présenterons notre méthodologie de terrain et les résultats provenant de l’analyse de 11 entretiens menés avec des télétravailleurs actifs dans 10 PME wallonnes. Enfin, nous discuterons de ces résultats.

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1. Télétravail, sentiment de proximité et PME

Le télétravail « est une forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon régulière et volontaire en utilisant les TIC dans le cadre d’un contrat de travail ou d’un avenant à celui-ci » (in Dumas et Ruiller, 2014, p. 72). Selon Taskin et Tremblay (2010, p.89), trois éléments fondamentaux le caractériserait : « la distance, soit une dispersion spatiale et/ou temporelle, la fréquence de l’arrangement et l’usage des TIC ».

Selon l’enquête sur les forces de travail (EFT) menée en 2017 par Statbel auprès de 123.000 personnes en âge de travailler (15 ans et plus), il ressort que 17,1% des répondants télétravaillaient en Belgique, à raison d’un ou deux jours par semaine.

On distingue généralement le télétravail régulier, mentionné dans le contrat de travail de l’employé, du télétravail occasionnel qui n’est pas stipulé dans le contrat de travail. Cette seconde forme de télétravail peut être exercée en cas de force majeure, de circonstances imprévues et indépendantes de la volonté du travailleur. Elle résultera généralement d’un accord tacite entre l’employeur et l’employé. En Belgique, le télétravail est régi par la convention collective de travail n°85 du 9 novembre 2005, modifiée par la convention collective de travail n°85bis du 27 février 2008. Le caractère volontaire est un principe de base dans l’implantation du télétravail, c’est-à-dire que l’employeur peut le proposer à son salarié qui est libre de l’accepter ou de le refuser, et inversement. Le télétravail n’est donc pas un droit pour le travailleur.

1.1. Le télétravail, une pratique affectant le sentiment de proximité ?

Même si le télétravail est généralement présenté comme une pratique offrant de nombreux avantages, tant pour l’entreprise que pour ses salariés, il présente aussi certains inconvénients. En effet, télétravailler peut engendrer une réduction des interactions entre les salariés, provoquant ainsi un isolement progressif (Walrave, 2010 ; Golden et al., 2008). Le manque de conversations en face à face pourrait être perçu comme une perte du lien social avec les collègues, et le sentiment de ne plus appartenir à une équipe (Billette de Villemeur, 2019 ; Ollivier, 2017 ; Walrave, 2010). Ainsi, « le télétravail éloigne physiquement les collaborateurs les uns des autres. Cette distance fait que les informations non formalisées circulent de façon moins naturelle […] Toutes ces informations, plus ou moins sérieuses, plus ou moins importantes, contribuent à la cohésion du groupe, à l’efficacité de chacun. Les collaborateurs en ont aussi besoin pour bien travailler, pour se sentir membres de l’équipe et de l’entreprise. […] le collaborateur ignorant des informations importantes se sent exclu, oublié, et de plus il peut lui manquer des informations importantes pour son efficacité professionnelle » (Billette de Villemeur, 2019, p.77). En 2001, Ward et Shabba évoquaient déjà les désavantages, principalement humains, du télétravail en termes d’isolement et de démotivation. Plus récemment, une enquête menée par la Fédération des Entreprises de Belgique (2020) durant la crise du covid-19 révèle l’inquiétude d’un tiers des 1.241 chefs d’entreprise et responsables RH interrogés quant aux liens avec les collègues et l’organisation si tout le monde est amené à travailler ailleurs. Il en va de même pour l’enquête menée en Belgique par Tempo-Team en mai 2020 auprès de 650 salariés : deux tiers des répondants indiquent que l'ambiance au travail et la présence des collègues leur ont le plus manqué durant le confinement. Plus d'un tiers des salariés regrettent aussi la présence de leur patron.

En télétravaillant, le salarié n’a plus l’opportunité d’exprimer son ressenti ou ses émotions. Il est alors privé de ces interactions « à caractère sensoriel », provoquant progressivement une distance émotionnelle et relationnelle (Ollivier, 2017 ; Walrave, 2010) et donc, des risques

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d’isolement. Il s’agirait du sentiment d’être « coupé des autres et de ne pas voir ses besoins de soutien et de compréhension rencontrés » (Golden et al., 2008, notre traduction). Le télétravail vient ainsi poser la question de la déspatialisation, soit « la distance non seulement physique du travailleur, mais aussi et surtout psychosociologique, liée à l'éloignement d'avec son environnement de travail au sens large (collègues, espaces communs, échanges informels et formels, etc.) » (Taskin, 2006, p.11).

Le concept de distance induit par le télétravail amène, dans le cadre de ce papier, à considérer aussi le concept de proximité émotionnelle ou psychologique qui se rapporte au « sentiment ressenti par un individu d’être proche de l’une ou l’autre personne » (Mencl et May, 2009, p.206, notre traduction). Il s’agirait d’un sentiment subjectif, variable d’une personne à l’autre. Selon la loi proxémique définie par Moles et Rohmer (1978, in Torrès, 2015, p.335), « fondamentalement, axiomatiquement, ce qui est proche est, toutes choses égales d’ailleurs, plus important que ce qui est loin, qu’il s’agisse d’un événement, d’un objet, d’un phénomène ou d’un être ». Cependant, une partie de la littérature (Ruiller et al., 2017 ; O’Leary et al., 2014) s’oppose à cette loi proxémique et affirme que la proximité physique (distance objective) entre deux individus n’influe pas nécessairement sur la proximité perçue. En effet, des personnes physiquement distantes pourraient avoir un sentiment de proximité élevé, notamment grâce à un usage approprié des technologies de l’information et de la communication. L’idée inverse peut également s’envisager. Dès lors, considérer proximité et distance comme des notions purement « physiques » risque d’offrir une vue particulièrement réduite de la façon dont les personnes expérimentent ces notions (Wilson et al., 2008).

Selon O’Leary et al. (2014) ou Wilson et al. (2008), deux facteurs influenceraient positivement le sentiment de proximité : l’identité partagée et la fréquence communicationnelle.

L’identité partagée amène un individu à s’identifier à une organisation ou autre personne quand ses croyances sur cette organisation ou personne concordent avec ses croyances personnelles (Pratt, 1998). Elle permet de créer un terrain d’entente commun, de compréhension mutuelle, propice au travail (Wilson et al., 2008). Le partage d’expériences en est un bon exemple. Elle contribuerait à accroître le sentiment de proximité et à réduire la distance psychologique. L’individu tendrait alors à se sentir membre d’un collectif (Ruiller et al., 2018). On peut donc voir l’identité partagée comme une connexion émotionnelle perçue par un individu envers un autre. Il s’agirait d’un facteur médiateur entre la proximité physique (distance objective) et la proximité perçue. Ainsi, « une identité partagée peut créer un lien psychologique entre des membres d’une équipe distants et cela peut les aider à relier la distance physique et contextuelle qui, autrement, les séparerait » (Hinds et Mortenson, 2005, in Wilson et al., 2008, p.987, notre traduction). Ce lien psychologique renverrait à la proximité perçue.

Ruiller et al. (2017) se sont interrogés sur la façon de maintenir un sentiment de proximité en situation de télétravail. Il ressort de leur enquête qu’à distance, l’identité partagée est ressentie différemment selon les individus. Cette perception variable s’explique par l’acceptation ou la réprobation du télétravail par le manager, influant ainsi sur son positionnement managérial (Ruiller et al., 2017). En effet, si ce positionnement est favorable (défavorable) au télétravail, cela sera ressenti par les salariés qui s’identifieront très fortement (faiblement) à l’équipe et à leur manager. L’identité partagée et le sentiment de proximité seront alors particulièrement élevés (faibles). « L’identité partagée se traduit ainsi par un sentiment d’appartenance fort entre les membres de l’équipe dispersée par le télétravail. Le e-leader y joue un rôle clé pour coconstruire avec son équipe, des manières de penser, de repenser l’organisation du travail » (Ruiller et al., 2017, p.15).

Si O’Leary et al. (2014) parlent de fréquence communicationnelle, la littérature élargit ce facteur à sa forme générique, la communication (Fortin, 2017 ; Ruiller et al., 2017 ; Gomez et

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al., 2011 ; Walrave, 2010) qui « se réfère à la fréquence, l’intensité (personnalisée et personnellement signifiante) et l’interaction communicationnelle (échange et proximité) » (Burgoon et al., 2002, in Ruiller et al., 2017, p.9). Les opportunités de communication, qui servent à améliorer notre représentation des autres, influenceraient les dimensions cognitives (estimation mentale de la distance semblant nous séparer d’un collègue (Wilson et al., 2008)) et affectives (sentiments de se sentir proche ou isolé d’un collègue (Wilson et al., 2008)) de la proximité perçue par la convergence de valeurs partagées (Ruiller et al., 2017). Ainsi, lorsque la communication devient plus fréquente, plus personnalisée et plus interactive, des collègues considérés comme distants physiquement paraîtraient plus proches (Wilson et al., 2008). Le fait de communiquer avec les collègues nous aiderait à créer des images contribuant à mieux nous les représenter dans leur contexte de travail. Nous les aurions davantage à l’esprit, renforçant par là notre sentiment de proximité à leur égard (Wilson et al., 2008). A l’opposé, une communication peu fréquente créerait doutes et incertitudes sur ces mêmes collègues, renforçant par là le sentiment de distance. En présentiel, la communication aura tendance à être formelle et informelle, se traduisant par des échanges directs et des contacts humains facilitant un sentiment de proximité aigu (Brunelle, 2009, in Fortin, 2017). En revanche, à distance, la communication serait plus formelle, basée sur une utilisation fréquente des technologies de l’information et de la communication (Fortin, 2017 ; Ruiller et al., 2017).

Ruiller et al. (2017) relèvent plusieurs risques de dé-proximité liés à la communication à distance : une réduction possible de la fréquence communicationnelle due à la crainte d’importuner le télétravailleur, ce qui pourrait mener à son isolement ; l’appauvrissement des échanges distants en raison d’une communication non verbale quasi inexistante ; des risques de malentendus ou confusions dans l’interprétation des messages communiqués à distance. Wilson et al. (2008) mettent aussi en garde contre les effets néfastes d’une communication trop fréquente, focalisée sur des sujets anodins ou visant à la surveillance, qui pourrait alors amener à percevoir la proximité comme insupportable.

Communication et identité partagée s’influenceraient l’une l’autre. Ainsi, les interactions développées entre les télétravailleurs au moyen d’outils technologiques pourraient créer chez eux le sentiment d’appartenir à l’organisation (Milton et al., 2017). La communication serait donc un moyen de développer cette identification à l’organisation (Parker et Haridakis, 2008, in Milton et al., 2017).

1.2. L’impact du télétravail sur le sentiment de proximité ressenti en PME

Le raisonnement précédemment émis relatif au télétravail et au sentiment de proximité nous amène à nous interroger sur le cas particulier des PME. Représentant 99,8% de l’ensemble des firmes européennes, les PME ont contribué, en 2017, aux deux tiers de l’emploi total dans l’UE des 28 et à un peu moins des trois cinquièmes de la valeur ajoutée (European Commission, 2018). En Belgique, les PME représentent plus de 99% des entreprises assujetties à la TVA. La plupart d’entre elles sont des micro-entreprises (96% des PME), avec un effectif inférieur à 10 employés.

Selon l’enquête sur les forces de travail (EFT) menée en 2017 par Statbel, le taux de télétravail dans les PME belges était de 16,87% en 2017. Sur base d’une enquête adressée à 2.000 travailleurs belges, le SPF Mobilité et Transports (2018) constate que la taille de l’entreprise aurait un impact sur le recours au télétravail. En 2005, Clear et Dickson observaient eux aussi que la probabilité de travailler « hors-site » augmentait avec la taille de l’entreprise.

Si très peu de recherches ont, à notre connaissance, été menées sur l’impact du télétravail sur le sentiment de proximité dans le contexte spécifique des PME, l’enquête qualitative eGap

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(Dickson et Clear, 2006 ; Clear et Dickson, 2005) révèle que le télétravail aurait encore une connotation négative, notamment en PME, en étant généralement associé à du temps libre. Il serait ainsi relié à une crainte d’inefficacité des travailleurs à distance, révélant un manque de confiance envers les salariés de l’entreprise et des doutes quant à leurs motivations de travail. Cela pourrait peut-être expliquer la faible proportion de PME recourant au télétravail.

En nous basant sur les caractéristiques spécifiques des PME et sur les apports de la littérature qui a abordé l’impact du télétravail sur le sentiment de proximité, nous pourrions envisager que le télétravail puisse affecter tantôt positivement, tantôt négativement le sentiment de proximité développé en PME.

1.2.1. L’impact positif du télétravail sur le sentiment de proximité en PME

Certaines spécificités des PME nous amènent à penser que le télétravail pourrait affecter positivement le sentiment de proximité ressenti en PME. Ainsi, Filion (2007) évoque la proximité hiérarchique propre aux PME en raison des relations de proximité entre le dirigeant et ses salariés. L’entrepreneur est en effet généralement très proche de ses salariés, qu’il connaît souvent individuellement vu qu’ils travaillent dans les mêmes locaux et partagent les mêmes conditions de travail. L’affect occuperait ainsi une place centrale dans les PME, ce qui pourrait contribuer au développement d’un climat de convivialité (Payre, 2017 ; Jaouen et Tessier, 2008).

Cette proximité favorise les échanges d’informations directs, oraux, personnels et informels d’une grande richesse pour la PME (Boutary et al., 2016 ; Filion, 2007 ; Torrès, 2000). Julien (1984, in Wtterwulghe, 1998) parle de circuits d’informations plutôt courts pour les PME. Ainsi, le dirigeant connaîtrait mieux son personnel et tendrait notamment à développer un mode de management orienté vers les tâches et les missions (Richomme-Huet et d’Andria, 2010). On pourrait associer aux PME un management de proximité (Jaouen et Torrès, 2008) qui aurait un impact sur la manière d’y gérer le personnel (Jaouen et Tessier, 2008). Grâce à ces relations de proximité interpersonnelles, le dirigeant serait plus à même d’expliciter directement à ses salariés tout changement organisationnel (Julien, 1984, in Wtterwulghe, 1998, p. 21).

Les PME présenteraient le meilleur environnement psychosocial de travail, caractérisé par des relations de proximité, et dépendant des valeurs du dirigeant (Hasle et Limborg, 2006). Le support social fourni notamment par les collègues y serait particulièrement important (DARES, 2017 ; Galabova et McKie, 2013 ; Bau et Downling, 2007).

Ces constats renvoient notamment au rôle primordial joué par le dirigeant dans sa PME (Laghzaoui, 2009 ; Levratto, 2009 ; Torrès, 2002). Wtterwulghe (1998, p. 22) qualifie ce dirigeant d’« homme-orchestre », assurant une gestion à la fois centralisée et personnalisée d’une entreprise dont il est bien souvent le propriétaire (Torrès, 2015, 2002, 2000 ; Laghzaoui, 2009 ; Levratto, 2009 ; Filion, 2007 ; Wtterwulghe, 1998).

Si l’introduction du télétravail au sein des PME met en relation des notions qui, par définition, se contredisent, la littérature laisse entendre que l’impact du télétravail sur le sentiment de proximité différera selon les styles de management développés à distance. Soulignons que cette littérature n’est pas forcément spécifique aux PME pour lesquelles il existe très peu de recherches s’intéressant spécifiquement aux impacts du télétravail sur le sentiment de proximité. Notre étude entend donc combler cette quasi absence de documents sur le sujet.

Les recherches menées par Ruillier et al. (2017), Karjalainen et Soparnot (2010) et Brunelle (2010), principalement auprès de grandes entreprises européennes, nous apprennent que le télétravail pourrait avoir un effet positif sur le sentiment de proximité si l’entreprise adopte un mode spécifique de management à distance. Celui-ci devrait être caractérisé par le rôle central de l’e-manager dans la co-construction d’une relation à distance, une confiance interpersonnelle

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forte entre les salariés et le manager, une autonomie totale accordée aux télétravailleurs. Cela nécessite donc une bonne connaissance des collaborateurs via par exemple une communication informelle grâce à une utilisation plus conviviale des TIC (par exemple, des pauses café téléphoniques (Brunelle, 2010)). Cet effet positif du télétravail sur le sentiment de proximité pourrait se ressentir si des rencontres ponctuelles en face à face sont organisées pour pallier l’absence de communication non verbale et éviter le désengagement de l’employé. Le dirigeant devrait également définir clairement les rôles incombant au télétravailleur et les attentes envers le travail. Grâce à ce management de proximité (Karjalainen et Soparnot, 2010), les travailleurs ne percevraient pas la distance objective envers leurs collègues. Le télétravail ne risquerait, dans ce cadre, pas de porter atteinte au sentiment de proximité pouvant prévaloir en PME.

Nous nous interrogeons sur l’existence d’un tel management au sein des PME et sur le rôle central que leur dirigeant pourrait y jouer. De par les relations interpersonnelles fortes développées entre le dirigeant et ses salariés, nous pourrions penser que la question de la confiance pourrait peut-être moins se poser en PME, facilitant ainsi l’adoption d’un tel management. De plus, vu le management de proximité développé dans les PME, la pratique du télétravail pourrait être telle que, malgré la distance physique qu’elle pourrait introduire entre les salariés et le dirigeant, elle ne serait pas forcément perçue comme un risque pour le sentiment de proximité qui y est développé.

1.2.2. L’impact négatif du télétravail sur le sentiment de proximité

La notion de distance qui pourrait être introduite par le télétravail paraît a priori contraire à la notion de proximité caractérisant les PME. La contradiction entre ces deux notions pourrait être d’autant plus forte en raison de l’effet de grossissement qui prévaut en PME (Mahé de Boislandelle, 1996, in Torrès, 2015). Ainsi, toute action qui pourrait revêtir un caractère local, sans véritable influence dans les grandes entreprises, revêt un caractère stratégique pour les PME en raison de cet effet de grossissement (Mahé de Boislandelle, 1996, in Torrès, 2015). Selon l’effet de proportion découlant de l’effet de grossissement, l’importance relative d’un individu au sein d’un effectif est inversement proportionnelle à la taille de cet effectif. En d’autres termes, « plus l’effectif pris en considération est réduit, plus la place d’un élément est proportionnellement élevée » (Mahé de Boislandelle, in Torrès, 2015, p.342). On pourrait donc penser que l’impact du télétravail sur le sentiment de proximité en PME pourrait être proportionnellement plus important que l’impact potentiel au sein d’une grande entreprise, accentuant ainsi la distance créée au sein des PME. Par opposition, la petite taille de la PME provoque également un effet de grossissement car l’importance relative de chaque individu est décuplée, intensifiant ainsi la proximité au sein des PME (Moles et Rohmer, 1978, in Torrès, 2015). Dès lors, nous pourrions supposer que le télétravail pourrait constituer un risque affectant l’une des caractéristiques spécifiques des PME, à savoir la proximité.

Aguilera et al. (2016) observent d’ailleurs que les interactions plus limitées avec les collègues suite au télétravail sont vues comme un inconvénient (très) important par 66% des 1.294 PME enquêtées de la région Bretagne, que celles-ci recourent au télétravail ou pas. D’après le baromètre Paris Workplace SFL-Ifop (2019, p.3) réalisé auprès de 1.619 salariés franciliens travaillant dans des entreprises de plus de 10 salariés, « le télétravail multiplierait par deux le sentiment d’isolement ».

Le télétravail pourrait affecter négativement le sentiment de proximité lorsque l’entreprise adopte un management à distance fondé sur une faible identification collective des travailleurs envers leur manager, sur un respect strict et formel de l’avenant au contrat de travail (plutôt lié au télétravail régulier), sur la fixation des objectifs et le contrôle des résultats au détriment des relations interpersonnelles (Karjalainen et Soparnot, 2010), et sur une communication réalisée essentiellement à distance et de manière formelle, ne véhiculant que des informations à

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caractère professionnel. Cette formalisation de la communication induite par le télétravail s’oppose aux mécanismes de communication courts, directs et informels au sein des PME. Les risques de dé-proximité s’intensifieraient ainsi en raison d’une communication à distance précaire et appauvrie, due à une baisse de la fréquence et de l’intensité communicationnelle (Ruiller et al., 2017). Cette dé-proximité pourrait aussi être liée au fait que le manager ne soit pas un télétravailleur et qu’il n’expérimente donc pas les mêmes risques de dé-proximité que ses collaborateurs. Les travailleurs percevraient négativement la distance objective (Karjalainen et Soparnot, 2010) en soulignant l’éloignement des collègues, leur frustration et leur isolement, en raison d’un management formel et purement à distance. Au vu des caractéristiques de ce style de management et sachant que le dirigeant de PME est généralement le nez dans le guidon et réagit plutôt dans l’urgence (Jaouen et Tessier, 2008), nous pouvons nous demander si celui-ci aurait la possibilité de développer à distance une communication qui sorte strictement du cadre professionnel et de construire une identité partagée susceptible d’influencer positivement le sentiment de proximité ressenti.

2. Partie empirique

Afin de mieux comprendre l’impact du télétravail sur le sentiment de proximité en PME et combler l’absence de littérature à ce sujet, nous avons réalisé 11 entretiens semi-directifs auprès de télétravailleurs actifs dans 10 PME de la province du Hainaut (Belgique) entre les mois de juin et août 2019. Une approche qualitative nous semblait se justifier sachant que le sentiment de proximité, comme indiqué précédemment, relève d’un ressenti plutôt subjectif et variable d’une personne à l’autre (Fortin, 2017). Il est, de plus, difficilement mesurable (Gahinet, 2014, in Labbé-Pinlon et al., 2016). Les PME ont été sélectionnées à partir d’une base de données recensant l’ensemble des entreprises de la région wallonne. Nous avons été attentives au respect des critères de définition d’une PME émis par la Commission Européenne. Nous nous sommes plus spécifiquement intéressées aux sociétés de services, plus à mêmes, selon nous, de pratiquer le télétravail, et localisées dans la province du Hainaut. Nous avons ainsi obtenu une liste de 265 entreprises que nous avons contactées. Malheureusement, une grande majorité d’entre elles ne pratiquaient pas le télétravail. Dix entreprises répondant aux conditions ont finalement accepté de participer à notre étude. Cinq entretiens ont été réalisés en face-à-face tandis que les six autres ont été menés par téléphone, à la convenance des répondants. Ces entretiens ont fait l’objet d’une analyse thématique. Tous les répondants, qui ont entre 25 et 49 ans, télétravaillent depuis leur domicile. Quatre d’entre eux occupent des fonctions de managers (trois parmi eux sont les fondateurs de l’entreprise) et les sept autres occupent des positions d’employés. Parmi nos répondants, six télétravaillent de manière régulière (avec un avenant au contrat de travail), d’un à cinq jours par semaine (le jour de télétravail étant généralement fixe). Les cinq autres répondants télétravaillent de façon occasionnelle (de moins de un jour par mois à deux jours par mois). Notons que les PME qui ont fait l’objet des entretiens sont actives dans les domaines de la consultance et de l’informatique. Trois d’entre elles sont des micro-entreprises, cinq d’entre elles des petites entreprises et enfin, les deux dernières sont des moyennes entreprises. Nous sommes conscientes que le secteur d’activités des PME de notre étude empirique et la fonction des personnes interrogées (notamment consultants) ont pu influencer les propos de nos répondants.

Dans la suite du texte, nous structurerons nos résultats en trois parties qui reflètent les thèmes abordés lors des entretiens : la perception du télétravail selon les répondants, le sentiment de proximité et enfin, l’impact du télétravail sur le sentiment de proximité en PME.

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2.1. La perception du télétravail

D’après nos répondants, excepté une communication de vive voix qui fait défaut dans un contexte de télétravail, les systèmes de communication au sein des PME prévalent autant en présentiel qu’à distance. « Quand j’ai besoin de mes collègues, je les appelle aussi. On communique par mail ou par téléphone. En fait, cela fonctionne vraiment comme si j’étais ici [au bureau], puisque quand je suis en interne, je communique soit par mail, soit par téléphone. Tout dépend du sujet qui doit être discuté » (Aurore, PME n°7). Indépendamment du télétravail, l’information est d’abord transmise de manière verbale, directe et peu formalisée au sein des entreprises interrogées (soit par téléphone, Skype, WhatsApp, …). Ensuite, cette même information est retranscrite dans un e-mail afin de maintenir une traçabilité de la communication orale. Taskin et Tremblay (2010) mettent eux aussi en avant cette idée de formalisation nécessaire de la communication et coordination en situation de télétravail, alors que ce processus est plutôt informel en situation de travail sur site.

La majorité des répondants estime que le télétravail permet de s’isoler à son domicile et éviter ainsi les interruptions fréquentes de collègues ou clients. Il est ainsi possible de mieux se concentrer sur la réalisation de tâches plus complexes qui nécessitent du calme. « J’aime bien le télétravail parce que je suis au calme, donc je peux traiter des dossiers un peu plus compliqués. Je suis quelqu’un qui aime travailler dans le calme. Comparativement à une plateforme où nous sommes plusieurs, le télétravail me permet vraiment d’être isolée et de me concentrer davantage sur mes projets. Je fais vraiment du télétravail pour être isolée, au calme et être plus productive » (Aurore, PME n°7).

Deux répondants voient aussi le télétravail comme un moyen de décompresser et de s’assurer une sorte de confort personnel. Ils modifient ainsi leur façon de travailler à distance pour avoir une journée un peu plus tranquille : « Le télétravail, je le vis comme une période un peu plus cool. Cela veut dire que j’ai organisé ma semaine différemment et je sais que cette journée là, je suis plus cool » (Simon, PME n°1).

Nos répondants sont conscients du fait que, si tout un chacun peut être apte à télétravailler occasionnellement, il est nécessaire d’avoir des caractéristiques individuelles spécifiques pour télétravailler de façon régulière. « Je ne suis pas sûr que le télétravail convienne à tout le monde et dans tous les cas ! Après si le télétravail est limité à une journée ou deux par semaine, cela peut convenir probablement à un large panel » (Robert, dirigeant PME n°3). Ainsi, sont notamment évoqués la rigueur et l’autodiscipline (capacité à se motiver sans la supervision d’une tierce personne, à savoir s’imposer des heures de début et de fin de travail, …), ainsi que l’autonomie de fonction (fait de pouvoir effectuer des tâches sans l’accord permanent d’une tierce personne). Wilson et al. (2008) estiment qu’il faudrait pouvoir sélectionner les salariés en fonction des caractéristiques qui les rendraient plus aptes à travailler à distance.

2.2. Le sentiment de proximité

La plupart de nos répondants disent ressentir un sentiment de proximité fort : « tout le monde se connait, on peut discuter entre nous et avoir des dérivations sur nos vies privées ! (…) Je sais très bien comment chacun travaille, comment chacun fonctionne et je me sens proche d’eux et eux aussi [se sentent proches d’elle] parce que la plupart du temps ils m’appellent moi avant d’appeler mon directeur, en me demandant mon avis, qu’est-ce que le directeur va en penser, comment il réagira » (Manon, PME n°4). Soulignons toutefois que certaines de nos PME sont des PME internationales : dans ce cas, si la proximité ressentie entre collaborateurs d’un même site est considérée comme forte, elle est perçue comme plus faible à l’égard des collaborateurs d’un autre site étranger.

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Nous avons demandé à nos répondants ce que faisait leur PME pour développer ce sentiment de proximité, indépendamment du contexte (en présentiel ou à distance). Ceux-ci ont évoqué des dispositifs s’apparentant aux e-management évoqués au point 1.2.1 et considérés comme ayant un impact positif sur le sentiment de proximité lorsqu’ils sont mis en place dans un contexte de télétravail. Ainsi, ils affirment bénéficier d’une pleine confiance et d’une totale autonomie de la part de leur employeur dans l’exercice de leur fonction, indistinctement en présentiel et à distance. Ils ne sont donc soumis à aucune supervision ou contrôle et aucune mesure supplémentaire ne leur est appliquée lorsqu’ils travaillent à distance. Cette absence de supervision ou d’un management spécifique à un contexte de télétravail s’explique par le fait que les objectifs de travail sont atteints et l’ouvrage fourni de qualité. De plus, le dirigeant peut aussi attester de l’efficience du salarié et ce, même à distance, grâce à, par exemple, des parties prenantes externes à l’entreprise. Cela le conforterait quant à l’autonomie et la confiance qu’il accorde à ses télétravailleurs. « Il y a un comptable externe qui vient tous les trois mois et ce comptable n’a rien à dire sur mon travail (…) Mon directeur a un retour en disant que le travail est bien fait ! Puis, le directeur le voit aussi au niveau du retour client ! Quand je fais le suivi des dossiers, il a un retour client positif aussi. Je pense que c’est tout cela qui a fait que la confiance s’est instaurée et que maintenant, je suis libre de mes actes ! » (Manon, PME n°4).

L’absence de barrières hiérarchiques dans les PME interrogées permet aussi de maintenir ce sentiment de proximité, même envers la sphère directive qui est beaucoup plus accessible. Sept de nos entreprises ont également instauré un management participatif fondé sur la co-construction et le co-développement en équipe. Ce type de management repose notamment sur le partage des idées et opinions individuelles, sur la définition d’objectifs clairs ou la contribution collective aux décisions de l’entreprise. Nos répondants estiment qu’un tel management peut renforcer ce sentiment de proximité. Ainsi, « je ne viens pas avec des décisions stratégiques que tout le monde doit exécuter, je construis la stratégie avec les personnes ! » (Robert, dirigeant PME n°3).

Les PME interrogées instaurent aussi des moments en présentiel obligatoires, prenant la forme de réunions ponctuelles : « on doit obliger les employés à venir plusieurs jours au bureau pour permettre de tisser ces liens, de créer ces liens […] On travaille parfois sur des projets en commun et donc si on fait du télétravail chacun de son côté, on n’est jamais ensemble et donc, c’est difficile de faire des réunions ou de parler d’un certain sujet par téléphone » (Simon, PME n°1). Ces réunions ponctuelles sont aussi l’occasion d’entretenir une communication informelle et privée : « parce qu’il y a aussi le fait qu’on s’entende bien, qu’on est content de se voir, de venir travailler. On ne parle pas que du boulot, on parle d’autres choses. Par exemple, « tiens, tu as vu sur Amazon, il y a cela en promo ». Plein de communications informelles qui ne sont pas liées à l’activité de la société. On se raconte un peu nos histoires » (Robert, dirigeant PME n°3). Des événements à caractère ludique sont également organisés (teambuildings, journées culturelles, repas, …), à l’initiative des collaborateurs ou de l’entreprise, afin de maintenir ce sentiment de proximité.

Enfin, deux de nos répondants estiment que le recrutement de collaborateurs partageant la même culture et la même vision du travail que celle véhiculée par leur PME est essentiel pour assurer le maintien de ce sentiment de proximité. La personnalité du dirigeant est également un facteur important : « il y a toujours ce côté humain qui prend le dessus et je pense que c’est cela qui fait que cette ambition est comme cela chez nous ! Je pense que si c’était un patron tyran, cela ne fonctionnerait pas de la même manière » (Manon, PME n°4).

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2.3. L’impact du télétravail sur le sentiment de proximité en PME

Nos répondants ont des avis mitigés quant à l’impact du télétravail sur le sentiment de proximité ressenti dans leur PME. Ainsi, ils se répartissent dans trois catégories : ceux qui pensent que le télétravail a un impact positif sur le sentiment de proximité (deux répondants), ceux qui voient plutôt un impact négatif du télétravail sur le sentiment de proximité (deux répondants1), et enfin, ceux qui estiment que l’impact du télétravail est neutre (sept répondants).

2.3.1. Le télétravail influence positivement le sentiment de proximité en PME

Les répondants justifient leur vision par le fait que le télétravail leur permettrait de prendre du recul par rapport aux collègues. Ainsi, ils estiment que si la proximité est omniprésente dans leur PME en raison de sa structure organisationnelle, elle peut vite devenir suffocante. Le télétravail leur permettrait alors de se distancer des collègues et de décompresser au calme : « Grâce au télétravail, on se supporte ! Si je travaillais du lundi au vendredi, face à face, je ne pourrais pas ! Mon directeur est quelqu’un de très dynamique, très nerveux. Moi quand je travaille j’ai besoin de calme (…) Si je travaillais 5 jours en direct avec lui, je deviendrais folle ! Il a trop d’énergie ! » (Manon, PME n°4). A la question de savoir si le télétravail pourrait influencer positivement ou non le sentiment de proximité, Simon (PME n°1) répond ainsi : « Ce n’est pas tout blanc ou tout noir ! Il est à la fois meilleur parce qu’on permet, à un moment donné, à l’employé de pouvoir s’évader dans sa bulle et de pouvoir travailler de chez lui au calme et de faire ce qu’il veut. Donc quand il va voir ses collègues, il ne va pas être sous pression parce qu’on voit tout le temps la même personne et à un moment donné il a envie de s’engueuler avec ou de lui taper sur la figure. Cela [le télétravail] permet de décompresser et cela est positif ».

2.3.2. Le télétravail influence négativement le sentiment de proximité en PME

Les deux répondants ressentant cet impact négatif télétravaillent ou télétravaillaient à temps plein (cinq jours par semaine), et étaient localisés dans un pays différent de celui de leur employeur. Aurore (PME n°7) justifie cet impact négatif ressenti dans une précédente expérience professionnelle notamment par son exclusion du système de management participatif : « la connaissance de la société m’a manqué ! Dans le sens où j’étais informée des décisions importantes mais je ne participais à aucune d’entre elles. Donc à ce niveau-là j’étais isolée ! Quand vous êtes à 100% à l’extérieur, on a tendance à [vous] oublier. Les communications importantes passent par vous mais vous ne participez pas aux décisions, vous ne donnez pas votre avis ». Yann (dirigeant PME n°8) regrette le manque d’informations lié à ce télétravail à temps plein exercé à une distance géographique conséquente de ses collègues et supérieurs : « l’information dans une entreprise est toujours plus chaude quand nous sommes à l’intérieur de l’entreprise plutôt qu’en externe, concernant les décisions qui sont prises ou le management … Quand on est consultant, qu’on vient de créer une société et qu’on a des clients, l’information est primordiale ! Ce que je veux dire c’est qu’il y avait des informations de management qui circulaient concernant des restrictions de budget et donc forcément tous ceux qui étaient au courant plus vite pouvaient prendre aussi des réactions adaptées plus rapidement. En somme, dès que vous avez une information de management qui descend, si vous n’êtes pas sur place… Je recevais alors les informations de manière décalée ».

Certains répondants, comme Nathan (PME n°6) ou Yann (dirigeant PME n°8), estiment que le télétravail pourrait aussi avoir un impact négatif sur le sentiment de proximité envers le client.

1 Parmi ces 2 répondants, une répondante (Aurore, PME n°7) évoque une expérience professionnelle antérieure (avant qu’elle ne travaille dans la PME n°7) dans laquelle elle avait ressenti un impact négatif du télétravail sur le sentiment de proximité

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« Quand on travaille chez le client, c’est très mal perçu de faire du télétravail parce qu’on est considéré comme un sous-traitant » (Nathan, PME n°6). Ils suggèrent alors d’être présents chez le client le plus souvent possible pour construire cette relation clientèle et valider continuellement leur position instable de sous-traitant auprès du client.

L’une de nos répondantes mentionne des initiatives privées lancées par ses collègues télétravailleurs réguliers, afin de réduire l’éventuel impact négatif du télétravail sur le sentiment de proximité : « certains de mes collègues font même du télétravail mais en groupe. Ils se réunissent et ils font des tournantes dans les maisons des uns des autres » (Emma, PME n°2).

2.3.3. Le télétravail n’a pas d’influence sur le sentiment de proximité en PME (impact neutre)

Nos répondants évoquent plusieurs raisons pouvant expliquer que le télétravail ne détériore, ni n’améliore la proximité perçue au sein de la PME.

Il faut noter que cinq des sept répondants2 ressentant cet impact neutre télétravaillent de manière occasionnelle. La faible fréquence de recours au télétravail est en effet un élément explicatif. Certains d’entre eux se montrent satisfaits d’une cadence de télétravail exceptionnelle (tout au plus mensuelle) tandis que d’autres estiment qu’une fréquence maximale de télétravail d’un ou deux jours non-consécutifs par semaine est optimale. « Je n’aimerais pas faire du télétravail tout le temps parce que j’aime bien aussi parler avec les collègues et avoir justement l’impression de faire partie d’une équipe […] à raison d’une fois par semaine, non [le télétravail n’impacte pas le sentiment de proximité] ! Cependant, si cela devait être plus d’une fois par semaine, je suis sûre que oui parce qu’alors, on n’a pas les discussions avec les collègues. Par exemple, je trouve que le temps de midi est parfois plus important ! Il y a certaines personnes qui ne mangent jamais avec nous le midi et du coup on les connait beaucoup moins bien » (Emma, PME n°2). Simon (PME n°1) insiste sur la spécificité des PME qui fait qu’un télétravail à temps plein ne pourrait pas y être envisagé : « si tu télétravailles tous les jours de la semaine, l’équipe n’est jamais au complet et donc, on n’a aucune cohésion. Dans une grosse boîte [entreprise], cela n’est peut-être pas dérangeant, mais dans une PME c’est très important parce qu’on communique beaucoup et on travaille beaucoup les uns avec les autres ».

Nous devons également souligner que la plupart des PME interrogées sont actives dans les domaines de la consultance et de l’informatique. Certains de nos répondants exercent donc la fonction de consultant qui les amène à ne pas être présents quotidiennement dans les locaux de l’entreprise, qu’ils télétravaillent ou non. Le télétravail n’impacterait donc pas réellement le sentiment de proximité car les salariés seraient déjà rodés à cette organisation de travail à distance due à la consultance. Il constituerait simplement une absence supplémentaire cumulée à l’organisation du travail des consultants. Notons toutefois que dans ces entreprises de consultance, la fréquence de télétravail ne peut pas être supérieure à un jour par semaine, au risque que le télétravailleur ne soit plus suffisamment présent dans les locaux de l’entreprise pour maintenir un sentiment de proximité intact.

Cet impact neutre ressenti par certains de nos répondants se justifie également par le fait qu’ils restent joignables rapidement pour interagir avec leurs collègues sur site, et inversement. « Quand je télétravaille, j’utilise Skype. Dès que j’ai une question, je vais l’envoyer à mon manager et je sais que dans les 10 min qui suivent, je sais d’office qu’il va me répondre soit par Skype, soit on va se téléphoner. Il est hyper disponible ! Je n’ai pas ce sentiment de n’avoir personne autour de moi quand je fais du télétravail en fait. Que ce soit mon manager ou les personnes avec qui je suis dans un projet » (Emma, PME n°2).

2 Nous retrouvons ici Aurore (PME, n°7) qui aborde cette fois son expérience de télétravail dans la PME n°7

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Enfin, cet impact neutre s’expliquerait aussi, pour certains de nos répondants, par le fait que la pratique du télétravail existait déjà dans l’entreprise avant leur arrivée. Ils ont dès lors construit directement des relations avec leurs collègues en prenant en compte le facteur télétravail.

Le tableau suivant récapitule les impacts possibles du télétravail sur le sentiment de proximité dans les PME analysées et les raisons expliquant cet impact :

Impact du télétravail sur le sentiment de

proximité

Nombre de répondants

Raisons associées

Positif 2 - Prise de recul par rapport aux collègues - Pouvoir décompresser à distance et au calme

Négatif 2

- Télétravail à temps plein - Distance géographique importante entre les

collaborateurs (si PME internationales) - Exclusion à distance du management participatif - Manque d’informations - Impact négatif du télétravail sur la relation client

Neutre 7

- Faible fréquence de télétravail - Fonction de consultant qui amène déjà à ne pas

être présent tous les jours - Joignabilité des collaborateurs en présentiel ou à

distance - Télétravail implémenté avant l’arrivée du

répondant

3. Discussion

Nous nous sommes demandé quel impact l’utilisation du télétravail pouvait avoir sur le sentiment de proximité cher aux PME (Filion, 2007 ; Jaouen et Torrès, 2008), sachant que le télétravail induit, par définition, une certaine distance.

Si la littérature semble avoir relativement bien documenté la question de l’isolement ressenti par les télétravailleurs, sans toutefois l’avoir appréhendé en PME, elle nous apprend qu’il faut pouvoir distinguer le sentiment de proximité de la notion de distance. Ainsi, si la notion de distanciation est marquée par une dimension objective, elle est aussi caractérisée par une dimension subjective renvoyant au sentiment de perception de soi et des autres. Selon Taskin et Raone (2014), ces deux dimensions seraient étroitement liées au sentiment d’isolement professionnel et social. Deux travailleurs proches physiquement pourraient en effet ressentir un très faible sentiment de proximité, et inversement (Ruiller et al., 2018). Comme le rappelle Taskin (2010, p.65), « l’isolement social n’est pas spécialement lié à un éloignement physique, même s’il est admis que celui-ci peut accentuer la perte de relations sociales ». Sur base de ce qui vient d’être dit, il serait donc possible que le sentiment de proximité davantage ressenti en PME soit maintenu malgré le contexte d’éloignement physique.

De notre approche qualitative, il ressort que le télétravail aurait principalement un impact neutre sur le sentiment de proximité, impact que la littérature ne semblait pas forcément considérer. Ainsi, le télétravail ne détériorerait pas les relations interpersonnelles mais ne les renforcerait

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pas pour autant. Certains facteurs seraient à la base de cet impact neutre : l’existence de modes de management ou pratiques de direction favorables au maintien du sentiment de proximité et ce, indépendamment du contexte (présentiel ou à distance), et une fréquence optimale de télétravail. Nos répondants pensent que l’absence de tels facteurs pourrait affecter négativement le sentiment de proximité ressenti en PME. Nos répondants considérant que le télétravail a un impact neutre sur le sentiment de proximité évoquent également la joignabilité des collaborateurs et du manager, travaillant sur site ou à distance, à tout moment. Or les PME sont généralement vues comme des établissements marqués par un support social important (DARES, 2017 ; Galabova et McKie, 2013 ; Bau et Downling, 2007).

Nos entretiens font également émerger des constats rejoignant en tout ou en partie la littérature sur le sujet. Ainsi, s’il est facile d’imaginer que l’isolement dû au télétravail ne pourrait avoir que des effets négatifs en étant imposé au télétravailleur, Taskin (2010) invite à la prudence quant à une telle conclusion. Au contraire, le salarié aurait le choix de travailler à distance, notamment pour « échapper au collectif de travail » (Taskin, 2010, p.67). Certains de nos répondants ont en effet évoqué cette idée en soulignant que le télétravail leur permettait de travailler plus au calme, d’éviter les interruptions et de pouvoir s’organiser une journée sans stress. Ces répondants perçoivent positivement l’impact du télétravail sur le sentiment de proximité. Dans ce cadre, l’isolement semble donc plutôt recherché. Le baromètre Paris Workplace SFL-Ifop (2019, p.5) révèle d’ailleurs que les difficultés de concentration et de stress sont principalement ressenties par les salariés échangeant avec plus de 20 collègues par jour. Toutefois, nos répondants semblaient unanimes : cet isolement recherché via le télétravail a des effets bénéfiques lorsqu’il est plutôt ponctuel et qu’il peut être compensé par des rencontres en face à face lors du travail sur site. Cela renvoie donc encore une fois à la fréquence d’utilisation du télétravail qui déterminerait, selon Taskin (2010), l’ampleur des conséquences de la déspatialisation.

En effet, les télétravailleurs occasionnels semblent se satisfaire d’une cadence de télétravail exceptionnelle, limitée à des besoins ponctuels. Les télétravailleurs réguliers estiment quant à eux qu’une fréquence d’un ou deux jours de télétravail par semaine serait optimale pour maintenir un sentiment de proximité, même à distance. Ce constat semble corroborer les dires de Schampheleire et Martinez (2006, in Dumas et Ruiller, 2014) ou de Ward et Shabba (2001) qui estiment que des formules de télétravail combinant travail à domicile et dans l’entreprise pourraient éloigner les télétravailleurs d’un risque d’isolement social. Ainsi, selon le baromètre Paris Workplace SFL-Ifop (2019, p.4), bien plus que le recours fréquent au téléphone ou e-mail, ce sont surtout les échanges en face à face qui ont un effet sur le sentiment d’isolement : « quand un collaborateur parle à plus de trois personnes en face à face dans une journée, la probabilité qu’il se sente « souvent isolé » est divisée par deux ».

Le caractère continu du télétravail risquerait en effet d’affecter négativement le sentiment d’appartenance du salarié à son entreprise (Dumas et Ruiller, 2014 ; Kurland et Cooper, 2002). C’est en tout cas ce qui a été souligné par nos deux télétravailleurs, qui télétravaillent ou télétravaillaient à temps plein. Ceux-ci considèrent que le télétravail peut dans ce cas être synonyme d’isolement et peut alors affecter négativement le sentiment de proximité. Cela corrobore les propos de Kurland et Cooper (2002) ou encore Taskin et Tremblay (2010).

En termes de modes de management favorables au maintien du sentiment de proximité, nos répondants sont nombreux à évoquer la pleine confiance et l’autonomie accordée par leur employeur, l’absence de barrières hiérarchiques, le développement d’un management participatif basé sur la contribution collective aux décisions de l’entreprise et le partage des idées, … . Tous ces dispositifs sont considérés par nos répondants comme des facteurs renforçant, dès le départ, le sentiment de proximité vis-à-vis de l’entreprise et des collègues. Ils sont peut-être aussi plus susceptibles d’apparaître en PME, selon notamment la vision et la

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philosophie de gestion de son dirigeant. Notons toutefois qu’ils sont sans doute étroitement liés au secteur, informatique et/ou de prestation de conseils aux entreprises, dans lequel évoluent les PME interrogées et aux fonctions de nos répondants (notamment des consultants). Taskin (2010) explique ainsi que le sentiment d’isolement risque d’être moins ressenti par des travailleurs mobiles (par exemple, des installateurs ou consultants), moins insérés dans des collectifs de travail stables, que par des télétravailleurs à domicile.

Ces dispositifs contribuent à assurer une identité commune ou partagée au sein du personnel et concourent aussi, pour certains d’entre eux, à la communication. Rappelons que ces deux dimensions, qui s’influencent l’une l’autre, peuvent impacter le sentiment de proximité (Milton et al., 2017 ; O’Leary et al., 2014). Ainsi, selon Milton et al. (2017), l’autonomie laissée aux salariés, les réunions en face à face, les activités sociales en présentiel, et la réactivité des managers sont autant de facteurs qui pourraient agir positivement sur l’identification à l’organisation. Indépendamment du contexte de télétravail, les répondants semblent en effet développer pour la plupart un sentiment de proximité fort à l’entreprise, lié notamment à un climat d’entraide et de solidarité, aidant à ce que chacun se sente proche de ses collègues. Rappelons que cette identification est vue comme un processus par lequel les salariés sont attachés à leur organisation, au point de comprendre et influencer les logiques organisationnelles à travers leur discours, incluant l’intégration des valeurs et objectifs de leur entreprise (Parker et Harikadis, 2008, in Milton et al., 2017). Nous pensons également que les PME, par leurs relations de proximité entre le dirigeant et ses salariés (Filion, 2007), sont peut-être un terrain davantage propice à la création de cette identité partagée. La contribution collective aux décisions de l’entreprise et le partage d’idées notamment contribuent elles aussi à cette logique d’identification. Les moments en présentiel, ainsi que les activités ludiques mises en place par les PME de nos répondants, participent à cette création d’une identité partagée en facilitant le travail en équipe mais aussi en permettant de tisser des liens, de partager des expériences, et de mieux se connaître (l’une des répondantes soulignait par exemple l’importance du temps de midi passé ensemble). Il s’agit également d’un support de communication important. Tant cette identité partagée que la communication semblent cruciales dans la génération d’un sentiment de proximité. Ainsi, une de nos répondantes, percevant l’impact négatif du télétravail sur le sentiment de proximité en raison de la distance géographique la séparant de son entreprise, reconnaissait être informée des décisions de l’entreprise mais déplorait de ne pas pouvoir y participer.

Nos entretiens semblent également nuancer certaines idées émises par la littérature. Ainsi, cette dernière laisse entendre que la communication participe à la création d’un sentiment de proximité et qu’elle serait donc utile en situation de télétravail. Ward et Shabba recommandaient déjà en 2001 d’utiliser un mix d’outils de communication, dépassant les e-mails mais incluant aussi des appels téléphoniques du manager visant à voir si le télétravailleur ne rencontre pas de problème. Cela s’apparenterait à ce que le manager pourrait faire lorsqu’il est au bureau avec les membres de son équipe. Cependant, certains répondants laissent entendre qu’il faut nuancer cette idée. Ainsi, ils reconnaissent que la communication telle que pratiquée à distance est généralement moins efficace qu’en face à face. Dès lors, et sachant que le télétravail est valorisé aussi pour éviter les interruptions des collègues telles qu’elles pourraient avoir lieu en présentiel, nos répondants tentent de ne pas trop s’importuner par des communications intempestives lorsqu’ils télétravaillent. Ruiller et al. (2017) y voient un risque de dé-proximité. Toutefois, nos répondants ne considèrent pas cela comme gênant vu que ce télétravail n’a lieu qu’une à deux fois par semaine et qu’ils auront tout le loisir de voir leurs collègues et de discuter avec eux les autres jours de la semaine.

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4. Conclusion

Notre article s’est intéressé à l’impact du télétravail sur le sentiment de proximité ressenti en PME, question pour laquelle la littérature semble particulièrement lacunaire (Parker et Castleman, 2007 ; Dickson et Clear, 2005).

Selon la littérature, le télétravail influence soit positivement, soit négativement le sentiment de proximité en entreprise. Ayant interrogé 11 télétravailleurs au sein de 10 PME wallonnes, notre étude fait émerger un autre impact : l’impact neutre. Ainsi, pour sept de nos répondants, le télétravail n’affecte ni positivement, ni négativement le sentiment de proximité ressenti à l’égard de leurs collègues, et plus globalement de l’entreprise. La littérature nous apprend que ce sentiment de proximité peut notamment être renforcé par des actions de communication, mais aussi des actions visant à créer une identité partagée. Nos répondants ont tous évoqué de telles actions (management participatif, confiance et autonomie accordées par la PME, partage d’idées, moments conviviaux, soutien des collègues et du manager en situation de télétravail, …). De telles actions, par leur existence avant même d’introduire le télétravail, ont un effet bénéfique sur le sentiment de proximité ressenti par les salariés. Elles s’inscrivent dans les e-management sensés soutenir le sentiment de proximité (Ruiller et al.,2017 ; Brunelle, 2010 ; Karjalainen et Soparnot, 2010). Sur notre terrain, l’impact neutre du télétravail sur le sentiment de proximité s’explique aussi par l’utilisation ponctuelle du télétravail. Des contacts en face à face avec les collègues sont donc maintenus et sont particulièrement valorisés. La PME serait peut-être, de par ses caractéristiques, un terrain davantage propice à la création de cette identité partagée et d’une communication accrue, contribuant au sentiment de proximité.

Cependant, la proximité spécifique aux PME peut aussi présenter des inconvénients. Elle pourrait en effet être à la base de perturbations multiples pour les salariés, constamment interrompus par leurs collègues. En contribuant à s’éloigner du site même de travail, le télétravail constituerait alors une bouffée d’oxygène tant qu’il est utilisé de façon ponctuelle et non continue. Dans ce cadre, l’isolement consécutif au télétravail serait alors perçu comme positif. Nos répondants nuancent le fait qu’en situation de télétravail, la communication est un moyen de maintenir ou renforcer le sentiment de proximité. Ainsi, une communication trop soutenue ou fréquente risque d’affecter négativement leur travail et d’anéantir les effets positifs attendus de ce retrait temporaire du site de travail.

Cela nous amène à recommander au manager de doser adéquatement son utilisation des outils de communication lorsqu’il s’adresse à ses télétravailleurs, en étant notamment attentif à la fréquence d’utilisation du télétravail. Si la communication contribue au développement du sentiment de proximité, un excès de communication risque d’être à l’origine d’un sentiment de dé-proximité qui pourrait être néfaste ou risque d’affecter la productivité des télétravailleurs. Nous recommandons également aux PME qui craindraient que le sentiment de proximité qui leur est spécifique soit perturbé par la pratique du télétravail de combiner, durant la semaine, des jours de travail sur site et des jours de télétravail, de façon à maintenir des contacts de proximité entre collègues. Cela est aussi important pour les non-télétravailleurs. Le développement de modes de management participatif et le soutien des collègues et du manager au télétravailleur semblent également des pratiques pouvant contribuer au maintien de ce sentiment de proximité.

Nous sommes conscientes des limites de notre étude. Notamment, nos entretiens reflètent la vision de nos répondants à un temps t et ne nous permettent pas de réaliser une analyse longitudinale. Réaliser de nouveaux entretiens avec ces répondants à d’autres moments dans le temps aurait peut-être permis de voir l’évolution de leur sentiment sur une période de temps plus longue. Nous sommes aussi conscientes du fait que le secteur d’activités de ces PME

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(informatique/prestation de conseils aux entreprises) peut affecter les propos de nos répondants. L’organisation du travail de ces PME, de par leur secteur d’activités, pourrait a priori être davantage propice à un contexte de télétravail. Enfin, nos entretiens auraient pu davantage se focaliser sur le rôle du dirigeant dans la création d’un contexte propice au télétravail et au sentiment de proximité, vu son influence primordiale dans la façon de gérer sa PME. Cela pourrait donc constituer un prolongement de notre recherche. A l’heure où nous avons tous vécu une situation inédite de télétravail à temps plein et où cette pratique risque de prendre de l’ampleur au sortir de la crise, nous espérons que ces quelques pistes pourront offrir un cadre de raisonnement utile à la pratique du télétravail en PME…

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