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    PREMIRE SECTION

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    (Requte no27013/10)

    ARRT

    STRASBOURG

    3 septembre 2015

    Cet arrt deviendra dfinitif dans les conditions dfinies larticle 44 2 de la

    Convention. Il peut subir des retouches de forme.

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    En laffaire Srvulo & Associados - Sociedade de Advogados, RL etautres c. Portugal,

    La Cour europenne des droits de lhomme (premire section), sigeanten une chambre compose de :

    Isabelle Berro,prsidente,Khanlar Hajiyev,Mirjana Lazarova Trajkovska,Julia Laffranque,Linos-Alexandre Sicilianos,Erik Mse,juges,Paulo Saragoa da Matta,juge ad hoc,

    et de Sren Nielsen,greffierde section,Aprs en avoir dlibr en chambre du conseil le 7 juillet 2015,

    Rend larrt que voici, adopt cette dernire date :

    PROCDURE

    1. lorigine de laffaire se trouve une requte (no 27013/10) dirigecontre la Rpublique portugaise et dont une socit civile davocats responsabilit limite, Srvulo & Associados - Sociedade de Advogados,RL, et quatre ressortissants de cet tat, MmeTeresa Serra, M. Jos LoboMoutinho, M. Ricardo Guimares et M. Pedro Duro ( les requrants ), ont

    saisi la Cour le 30 avril 2010 en vertu de larticle 34 de la Convention desauvegarde des droits de lhomme et des liberts fondamentales ( laConvention ).

    2. Les requrants ont t reprsents par les deuxime et quatrimerequrants, avocats Lisbonne. Le gouvernement portugais ( leGouvernement ) a t reprsent par son agente, Mme M. F. da GraaCarvalho, procureure gnral adjointe.

    3. Les requrants allguaient que la perquisition et la saisie dedocuments et donnes informatiques dans leurs locaux professionnelsavaient mconnu leur droits garantis par larticle 8 de la Convention.

    4. Par une dcision du 10 janvier 2012, une chambre de lanciennedeuxime section a dclar la requte partiellement irrecevable et les griefstirs de larticle 8 de la Convention ont t communiqus au Gouvernement.Aprs un remaniement de la composition des sections, laffaire a tattribue la premire section.

    5. la suite du dport de M. Paulo Pinto de Albuquerque, juge lu autitre de Portugal, la prsidente de la chambre a dsign, sur une listesoumise au pralable par le gouvernement portugais, M. P. Saragoa daMatta pour siger en qualit de juge ad hoc(articles 26 4 de la Conventionet 29 du rglement).

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    EN FAIT

    I. LES CIRCONSTANCES DE LESPCE

    6. La premire requrante est une socit davocats ayant son sige Lisbonne. Les deuxime, troisime, quatrime et cinquime requrants sontns respectivement en 1948, 1963, 1975 et 1974 et rsident Lisbonne.

    A. La gense de laffaire

    7. Les deuxime, troisime, quatrime requrants [personnes physiques]sont avocats membres (scios) et le cinquime [requrant personne

    physique] est associ (associado) de la socit requrante.8. En aot 2006, le Dpartement central denqute et action pnale(Departamento central de investigao e ao penal- DCIAP ) ouvritdes poursuites contre plusieurs ressortissants portugais et allemands pour leschefs de corruption, prise illgale dintrts et blanchiment dargentconcernant lachat, le 21 avril 2004, de deux sous-marins par legouvernement portugais un consortium allemand.

    9. Ces poursuites donnrent lieu deux enqutes pnales, la premirerelative lachat mme des sous-marins (procdure interneno56/06.2TELSB puis procdure interne no222/11.9TELSB) et la seconde(procdure interne no125/08.4TELSB) concernant les contreparties

    prtendument fournies par le consortium allemand en faveur de certainessocits portugaises. Le DCIAP souponnait des agents de ltat davoirobtenus des avantages patrimoniaux au cours de ces ngociations audtriment de ltat.

    10. Les deux enqutes furent conduites sous le contrle du jugedinstruction (juiz de instruo criminal), C.A. qui tait, au moment desfaits, le seul juge du Tribunal central dinstruction criminelle ( TCIC ).

    11. La premire procdure a t conclue par une ordonnance declassement sans suite du DCIAP du 17 dcembre 2014 (voir ci-aprs).Quant la seconde procdure, par un jugement du tribunal de Lisbonne du14 fvrier 2014, confirm par un arrt de la cour dappel de Lisbonne du 19

    mars 2015, les accuss furent tous acquitts des chefs qui leur taientreprochs.

    12. La premire requrante avait t mandate par le ministre de laDfense du Portugal pour lassister et le reprsenter dans le cadre desngociations ayant men aux contrats relatifs lachat des deux sous-marins. Matre B.A tait lavocat au sein de la socit qui avait coordonnlaccompagnement juridique du dossier. Suite au dpart de cet avocat de lasocit, le dossier fut repris par le quatrime requrant.

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    B. La perquisition dans les locaux professionnels des requrants et lasaisie de documents et de donnes informatiques dans le cadre de

    lenqute pnale

    13. Le 24 septembre 2009, le DCIAP saisit le juge dinstruction duTCIC dune demande visant la ralisation dune perquisition dans les locaux

    professionnels de trois cabinets davocats, dont celui de la premirerequrante, et la saisie de tout document pertinent pour lenqute en cours. lappui de sa demande, le DCIAP exposa :

    - que la socit requrante avait t engage par le ministre de laDfense pour lassister dans les ngociations portant sur lachat des sous-marins ;

    - que MeB.A. qui nexerait plus son activit professionnelle dans ladite

    socit avait t en charge du dossier ;- que la majeure partie des documents concernant les contrats navait pas

    t retrouve au ministre de la Dfense et quil tait possible quils setrouvent dans les locaux de la socit requrante ;

    - quil existait de forts indices que la socit requrante ait particip, travers notamment de ses avocats, des agissements frauduleux ;

    - que des lments importants pour lenqute pouvaient se trouver dansles bureaux concerns, notamment dans les ordinateurs et les serveursinformatiques de la socit requrante et quil y avait lieu de procder desrecherches sur la base dune liste de 35 mots cls. Sur celle-ci figurait, entreautres :

    - le nom du quatrime requrant,- le nom de MeB.A,- les noms des socits allemandes qui avaient vendu les sous-marins,- le nom du ministre de la Dfense en fonction lpoque des

    ngociations ayant men aux contrats relatifs lachat des sous-marins,actuel vice-premier ministre au Portugal,

    - les noms des banquesBanco Esprito Santo et Crdit Suisse Boston,- dautres mots tels que contreparties , financement , spread1

    ou swap2.14. Les 25 et 29 septembre 2009, le juge dinstruction du TCIC dlivra

    deux mandats de perquisition concernant les locaux professionnels de lasocit requrante situs deux adresses diffrentes Lisbonne. Fixant laralisation des oprations au 29 septembre 2009, il dclara que celles-ciseraient prsides (presididas) par un juge dinstruction. En raison dunempchement, il demanda tre remplac, le jour des oprations, par deux

    juges dinstruction du tribunal dinstruction criminelle de Lisbonne.

    1Le spread est lcart entre l'offre et la demande d'un actif financier2Le swap ou l'change financier est un contrat d'change de flux financiers entre deux

    parties, gnralement des banques ou des institutions financires.

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    Les mandats autorisaient laccs tous les bureaux de la socitrequrante ayant t occups ou utiliss par les avocats qui avaient

    accompagn les ngociations de lachat des sous-marins et les contrepartieset ordonnaient :

    - que soient saisis tout document, objet et autres lments, notamment ensupport informatique, en rapport avec les crimes faisant lobjet de lenqute,

    - que soit lev le secret de la correspondance, indiquant que laccs auxfichiers informatiques devait tre fait sur la base des 35 mots cls indiqus

    par le DCIAP.- que les fichiers couverts par le secret professionnel soient copis dans

    un support numrique autonome et lui soient prsents conformment larticle 179 3 et larticle 188 1 et 4 du code de procdure pnale( CPP ).

    Pour finir, le juge dinstruction sollicita la prsence dun reprsentant delOrdre des avocats pendant les oprations conformment aux articles 177 3 du CPP et 70 du statut de lOrdre des avocats.

    15. Le 29 septembre 2009, lavocat Me B.A fut mis en examen(constitudo arguido) du chef de prvarication dans le cadre de lenqute

    portant sur lachat des sous-marins.16. Le mme jour, de 13h05 21h00, les oprations eurent lieu dans les

    locaux professionnels de la socit requrante, soit aux deux adressesindiques dans les mandats de perquisition. La perquisition ladresse

    principale fut prside par la juge A.C.S., juge dinstruction du tribunaldinstruction criminelle de Lisbonne, en prsence dun reprsentant delOrdre des avocats ainsi que des deuxime, troisime et cinquimerequrants.

    17. Avant que les recherches ne dmarrent, se prvalant de larticle 72du statut de lOrdre des avocats, les requrants formrent une opposition la perquisition devant le prsident de la cour dappel de Lisbonne. Ilsinvoqurent le secret professionnel et soulignrent quaucun des avocats ducabinet navait t mis en examen, dans le cadre de la procdure en cause cequi allait lencontre de larticle 71 4 du statut de lOrdre des avocats. Ilssoutinrent galement que lutilisation de termes couramment utiliss dans lecadre de ngociations, comme contreparties et financement pour

    procder la recherche informatique pourrait conduire une perquisition etune saisie disproportionnes.Constatant qu lexception de lancien avocat associ de la socit

    requrante, Me B.A, les avocats de la socit navaient pas t mis enexamen dans le cadre des enqutes en cause, la juge dinstruction acceptalopposition et ordonna la mise sous scells, sans consultation, et latransmission de tous les documents qui seraient saisis au prsident de lacour dappel de Lisbonne afin quil se prononce sur la validit delinvocation du secret professionnel conformment larticle 72 2 et 3 dustatut de lOrdre des avocats.

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    18. La perquisition dmarra alors dans les locaux de la socitrequrante. Elle fut conduite par lun des procureurs chargs de lenqute,

    assist de neuf agents des forces de lordre.19. lissue des oprations, un procs-verbal fut dress et sign par

    toutes les personnes prsentes, lexception dun agent qui avait dsabsenter avant la fin des oprations. Une liste des documents et picessaisis fut jointe au procs-verbal. Il y tait indiqu quil avait t saisi dansle bureau du quatrime requrant les lments suivants :

    - quatorze botes et chemises de classement contenant des documents ;- les fichiers informatiques et botes de courriers lectroniques extraits

    de lordinateur du quatrime requrant et des diffrents serveurs du cabinetdavocats, slectionns sur la base des mots-cls indiqus dans le mandat de

    perquisition et gravs sur quatre DVD-ROM ;

    - un disque dur externe contenant des archives.- le disque dur de lordinateur portable qui avait t utilis par MeB.A et

    qui se trouvait dans les installations informatiques de la socit.20. Tous les documents et donnes informatiques saisis furent mis sous

    scells lintention du juge dinstruction du TCIC aux fins de la procduredevant le prsident de la cour dappel de Lisbonne.

    21. Par une ordonnance du 6 octobre 2009, le quatrime requrant,M. Ricardo Guimares, fut mis en examen au motif quil tait apparu aucours de la perquisition que celui-ci avait galement assist ltat dans lecadre des ngociations et des contrats qui faisaient lobjet de lenqute.

    22. Le 8 octobre 2009, les requrants dposrent au TCIC leur mmoireadress au prsident de la cour dappel de Lisbonne.

    Ils dnonaient la saisie, au moyen de mots cls frquents dans toutcontexte juridique, des documents, fichiers informatiques et messagerieslectroniques partir du poste de travail du quatrime requrant et desserveurs de la socit requrante. Ils se plaignaient aussi de la saisie desdeux disques durs.

    Ils faisaient galement valoir que le nombre de documents et de donnesinformatiques saisis tait tel que des lments couverts par le secret

    professionnel avaient ncessairement t emports, notamment lacorrespondance davocats nayant pas t mis en examen dans le cadre de la

    procdure ou des documents qui concernaient dautres procdures pnalespendantes devant le TCIC et dans lesquelles les requrants agissaient enqualit davocats. titre dexemple, ils citrent deux procdures dans lecadre desquelles les troisime et cinquime requrants intervenaient commereprsentants des accuss.

    Les requrants soulignaient qutant le seul juge dinstruction au sein duTCIC, le juge C.A prendrait ncessairement connaissance dlmentscouverts par le secret professionnel. Ils demandaient ainsi au prsident de lacour dappel douvrir et de slectionner lui-mme les documents et donnesinformatiques mis sous scells et de ne pas envoyer au juge C.A. ceux qui

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    taient couverts par le secret professionnel et qui ntaient pas lis auxenqutes concernant les sous-marins, sous peine de violation du droit la

    protection de la vie prive, du domicile et de la correspondance garanti parla Constitution.

    Pour finir, les requrants slevaient contre la mise en examen duquatrime requrant, estimant quil sagissait l dun moyen de contournerla lgislation applicable en matire de protection du secret professionnel,aucun fait ne lui ayant t imput ni avant ni au moment de sa mise enexamen.

    23. Le 14 octobre 2009, le juge dinstruction du TCIC adressa larclamation au prsident de la cour dappel. Dans ses observations, le jugedinstruction du TCIC ritra que tous les lments saisis taientsusceptibles de constituer des moyens de preuve dans le cadre des enqutes

    en cours.24. Le 19 octobre 2009, le quatrime requrant saisit le juge

    dinstruction du TCIC dune demande en nullit de sa mise en examen. Ildnonait le fait de ne pas avoir t entendu en qualit daccus et de ne pasavoir t inform des faits qui lui taient reprochs. Il faisait galementvaloir que sa mise en examen avait seulement pour but de justifier la saisiedes donnes informatiques qui avait eu lieu.

    25. Le 21 octobre 2009, les requrants adressrent une requte auprsident de la cour dappel de Lisbonne. Ils contestaient nouveau la miseen examen du quatrime requrant. Invoquant le secret professionnel, ilsritraient quil appartenait au prsident de la cour dappel de prendre lui-mme en main louverture et la slection des lments saisis au motif que le

    juge dinstruction du TCIC tait lunique juge dinstruction en charge des grandes affaires dans le pays.

    26. Par une dcision du 29 octobre 2009, le vice-prsident de la courdappel de Lisbonne rejeta la rclamation des requrants prsente le8 octobre prcdent. titre prliminaire, il rappela que son intervention enlespce tendait vrifier sil existait un risque flagrant et disproportionnde porter atteinte au secret professionnel. Ensuite, il exposa que :

    - lavocat Me B.A et le quatrime requrant avaient particip auxngociations qui faisaient lobjet de lenqute ;

    - la saisie des donnes informatiques partir du poste de travail duquatrime requrant tait conforme larticle 71 4 du statut de lOrdre desavocats tant donn que celui-ci avait entretemps t mis en examen et queces donnes navaient en outre pas auparavant t consultes vu leur misesous scells aprs la prsentation de lopposition au titre de larticle 72 dustatut de lOrdre des avocats ;

    - la question de la nullit de la mise en examen du quatrime requrantchappait son domaine dintervention dans le cas concret, lequel relevaituniquement de larticle 72 du statut de lOrdre des avocats ;

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    - aprs ouverture et visualisation, tous les documents et fichiersinformatiques saisis semblaient revtir un intrt, direct ou indirect, pour

    lenqute en cause, et elle seule, la saisie litigieuse ne portait pas, premire vue, atteinte au secret professionnel des avocats ;

    - les mots cls utiliss pour procder aux recherches semblaient enrapport avec lenqute en cours et, mme sils avaient pu permettredaccder dautres matires, il appartenait au juge dinstruction de levrifier ;

    - dans la mise en balance des intrts en jeu dans le cas concret,ladministration de la justice et la dcouverte de la vrit prvalaient sur lesecret professionnel des avocats.

    Le vice-prsident de la cour dappel en conclut que la saisie desdocuments et fichiers informatiques tait proportionne au but recherch,

    savoir ladministration de la justice concernant des affaires dune grandecomplexit et quil ny avait eu aucune violation du principe constitutionneldu respect de la vie prive. Jugeant que les craintes exprimes l gard du

    juge dinstruction du TCIC taient hasardeuses et que la loi ne prvoyait pasquil soit loign pour les raisons invoques, cette question n tant en outre

    pas de son ressort dans le cas concret, il ordonna, conformment la loi, laremise sous scells des documents saisis et leur transmission au TCIC.

    27. Par une ordonnance du 3 novembre 2009, le juge dinstruction duTCIC rejeta la demande en nullit dpose le 19 octobre prcdent par lequatrime requrant concernant sa mise en examen. Ce dernier attaqua cetteordonnance devant la cour dappel de Lisbonne.

    28. Le 12 novembre 2009, les requrants dposrent un recoursconstitutionnel devant le Tribunal constitutionnel contre la dcision du29 octobre 2009 du vice-prsident de la cour dappel de Lisbonne. Entreautres, ils invoquaient le secret de la correspondance et le droit la vie

    prive de leurs clients, dnonant la mise en examen du quatrime requrantet le pouvoir du juge dinstruction du TCIC.

    29. Dans une requte dpose le 17 dcembre 2009 auprs de la courdappel de Lisbonne, les requrants dclarrent quils renonaient, surindication du ministre de la Dfense, la partie de leur recoursconstitutionnel concernant la saisie des documents papiers portant sur les

    ngociations entreprises entre ltat portugais et le consortium allemand envue de lacquisition des sous-marins. Ils demandaient alors louverture deces documents et leur transmission au juge dinstruction du TCIC. Ilsdclarrent quils maintenaient nanmoins la partie du recours portant sur lasaisie des donnes informatiques contenues dans les deux disques durssaisis et celles qui avaient t graves dans les quatre DVDs.

    30. Par un arrt du 15 avril 2010, la cour dappel de Lisbonne annula ladcision du 3 novembre 2009 du juge dinstruction du TCIC, jugeant que lamise en examen du quatrime requrant tait illgale. Elle estima que la loine permettait pas quune mise en examen soit ordonne postrieurement

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    une perquisition, pour justifier la saisie de documents professionnels. Outrelannulation de la mise en examen du quatrime requrant, la cour d appel

    ordonna la restitution de toute la correspondance le concernant qui avaitt saisie.

    31. Le 14 juillet 2010, le Tribunal constitutionnel pronona son arrtconcernant le recours qui avait t form par les requrants. Il dcidadabord que, sagissant de la saisie de la correspondance concernant lequatrime requrant, le recours constitutionnel tait dpourvu dutilit, lacour dappel de Lisbonne ayant dj ordonn la restitution de toutecorrespondance saisie qui le concernait. Quant la question portant sur lasaisie des documents et donnes informatiques et le pouvoir du juge duTCIC, le Tribunal constitutionnel dclara le recours irrecevable, considrantquaucune question dinconstitutionnalit normative navait t souleve de

    manire adquate par les intresss, les requrants ayant uniquement mis encause les dcisions judiciaires prises dans le cadre de la procdure.

    32. Le 10 novembre 2010, le juge dinstruction du TCIC procda louverture des scells, en prsence des deuxime, quatrime et cinquimerequrants, de deux procureurs, dun greffier du DCIAP et de trois expertsinformatiques.

    33. Faisant droit la demande des procureurs, le juge dinstructionordonna que, dans la mesure o ils prsentaient un intrt pour lenqute,tous les documents papiers soient joints au dossier de lenqute pnale, lexception dun classeur et dune lettre, lesquels furent rendus auxrequrants.

    34. Le juge dinstruction ouvrit ensuite les scells des quatre DVDs surlesquels avaient t gravs les fichiers informatiques et les botes decourriers lectroniques extraites de lordinateur du quatrime requrant etdes diffrents serveurs du cabinet davocats, aprs avoir t slectionnessur la base des mots-cls indiqus dans le mandat de perquisition (voir ci-dessus paragraphe 19). Aprs audition des parties, le juge d instructionordonna que les deux botes de messageries lectroniques de lavocatMeB.A et les fichiers informatiques prsentant un intrt pour lenqute quiavaient t gravs sur ces DVDs soient copis et mis sous scells et que lesDVDs originaux soient rendus la socit requrante. Il dclara ensuite que

    le TCIC procderait au visionnage des lments copis dans un dlai desoixante jours.35. Tous les fichiers informatiques identifis comme correspondance

    du quatrime requrant furent rendus celui-ci.36. Sagissant des deux disques durs qui avaient t saisis, il ordonna la

    ralisation, par des experts informatiques, dune opration visant laslection de fichiers informatiques sur la base des mots cls qui avaient tutiliss lors de la perquisition.

    37. Le 17 janvier 2011, les experts informatiques remirent au DCIAPdeux rapports, accompagns des deux disques durs et de leurs copies

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    respectives. Ils annexrent galement un troisime disque dur contenant lescopies des fichiers slectionns, partir des deux disques durs, sur la base

    des mots cls utiliss dans le cadre de lenqute. Le matriel fut remis sousscells lintention du juge du TCIC.

    38. Par une ordonnance du 2 fvrier 2011, le juge dinstruction prit noteque les experts informatiques avaient conclu lanalyse des fichiersinformatiques des disques durs et que les fichiers (messagerieslectroniques) slectionns au moyen des mots cls avaient t copis sur undisque dur spar et mis sous-scells. Il ordonna que cette copie soit gardesous coffre, en attendant quil fixe une date pour le visionnage des contenusrespectifs et llimination des fichiers relevant de la vie prive des

    personnes vises.39. Les 1er 4, 5, 6 et 11 avril 2011, le juge dinstruction du TCIC

    procda louverture des scells des DVDs. Il visionna les fichiersinformatiques qui y avaient t copis (voir ci-dessus paragraphe 34),ordonnant la suppression des fichiers prsentant des informations decaractre personnel, couverts par le secret professionnel ou ne concernant

    pas les personnes mises en examen conformment larticle 188 6 alinasa) c) du CPP, comme suit :

    - Sance du 1eravril 2011 (matin) : il visionna 4 500 fichiers dont 115fichiers furent supprims ;

    - Sance du 1er avril 2011 (aprs-midi : il visionna 4356 fichiers dont100 furent supprims ;

    - Sance du 4 avril 2011 (matin) : il visionna 2698 fichiers dont16 fichiers furent limins ;

    - Sance du 5 avril 2011 (aprs-midi) : il visionna 4946 fichiers dont 260furent supprims ;

    - Sance du 6 avril 2011 (aprs-midi) : il visionna 6802 fichiers et 336furent limins ;

    - Sance du 11 avril 2011 (aprs-midi) : il visionna 1504 fichiers et 36furent limins. Il visionna ensuite 3539 fichiers du deuxime DVD,estimant quaucun lment ntait supprimer.

    lissue de la sance du 11 avril, le juge d instruction ordonna que lesfichiers informatiques du premier DVD jugs pertinents pour lenqute

    soient copis sur un support autonome, ce qui ft fait le 12 avril 2011. Cettecopie fut alors mise sous scells.40. Au cours de la sance du 4 avril 2011, le juge dinstruction conclut

    galement le visionnage des messages lectroniques qui avaient tslectionns partir des disques durs (voir ci-dessus paragraphes 37-38).Aprs une analyse sommaire de leur contenu, il considra quils necontenaient pas dinformations caractre personnel, couvertes par le secret

    professionnel ou concernant des personnes autres que celles qui avaientmises en examen conformment larticle 188 6 alinas a) c) du CPP.

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    Par consquent, il ordonna quils soient envoys au DCIAP afin que soitfaite la slection des lments pertinents pour lenqute.

    41. Par une ordonnance du 21 juin 2011, le DCIAP estima ncessairedautonomiser lenqute concernant les faits par rapport auxquels lavocatMeB.A. ntait pas intervenu, comme suit :

    (...)

    Le noyau des faits faisant lobjet de la prsente enqute, pour autant quil sagissede la personne mise en examen, B.A., concerne laccompagnement quil a fait desngociations et conclusion des contrats (...), faits susceptibles dintgrer, entre autres,la pratique du crime de prvarication (...).

    (...) ces faits ont fait lobjet dune enqute commune avec lensemble desinvestigations concernant lexcution du Programme relatif lacquisition des sous-marins (PRAS), seulement pour des questions de clrit et dconomie

    procdurales.En effet, bien quon puisse admettre lexistence dun lien avec les faits faisant

    lobjet des investigations mentionnes, il est certain que laccus B.A. na eu aucuntype dintervention par rapport celles-ci.

    (...) le ministre public considre que lon devra procder lautonomisation delenqute portant sur les faits qui ne concernent pas lintervention de laccus B.A.,tout en garantissant lexercice de ses droits de dfense, prservant et permettantnanmoins la poursuite de lintrt public une enqute efficace et rapide des faits ci-dessus.

    (...)

    (...) afin quune enqute soit ouverte pour investiguer de faon autonome les faits

    relatifs aux circonstances dans lesquelles ont t ngocis les contrats avec le GSCconcernant lacquisition des sous-marins, les contreparties et le financement, il estdemand M. le juge dinstruction quil autorise lextraction du prsent dossierdenqute et des annexes 54, 58, 62, 63, 70, 73 82, 86, 87, 89, 90, 91, 92, 94, 95, 97et 98.

    (...)

    42. Par une ordonnance du 24 juin 2011, le juge du TCIC fit droit lademande du DCIAP, comme suit :

    (...)

    En ce qui concerne la sparation des procdures, au vu des lments indiqus par le

    ministre public/DCIAP qui, en loccurrence et quant la substance de la questionpose, a reu laccord crit de laccus Me B.A, nous accueillons la demande,lautorisant dans ses termes prcis et exacts et nous la reproduisons ici danslintgralit (mme si nous ne connaissons pas la teneur entire des pices

    procdurales (annexes) qui y sont indiques).

    (...)

    43. Le 1er juillet 2011, le DCIAP ordonna quune copie soit faite despices du dossier demandes dans le but douvrir une nouvelle enquteconcernant les autres suspects et activits. Celle-ci fut enregistre sous lenumro de procdure no222/11.9TELSB.

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    44. Le 17 mai 2012, les agents du DCIAP terminrent lanalyse de89 000 fichiers informatiques et de 29 000 messages lectroniques saisis

    dans les quipements informatiques de la socit requrante et dans larsidence de MeB.A et tablirent un rapport concernant la participation delavocat Me B.A aux ngociations qui faisaient lobjet de lenqute.

    45. Le 4 juin 2012, le DCIAP classa lenqute ouverte lencontre delavocat Me B.A sans suite. Il considra quaucun lment du dossier ne

    permettait de prouver que celui-ci avait commis les crimes qui lui taientimputs. Le DCIAP tint, entre autres, compte de messages lectroniqueschangs entre MeB.A et des reprsentants du ministre de la Dfense etdautres avocats. En labsence de tout recours, cette ordonnance devintdfinitive.

    46. Le 6 juin 2012, les deux disques externes durs qui avaient t saisis

    furent rendus la socit requrante.47. Le 15 juillet 2013, constatant que le classement sans suite de

    lenqute qui portait sur lavocat MeB.A. tait devenu dfinitif, le DCIAPordonna que les pices dont la copie avait t demande soient simplementextraites du dossier et jointes celui de lenqute concernant les autressuspects et faits (procdure no222/11.9TELSB).

    48. Par une ordonnance du DCIAP du 17 dcembre 2014, cette dernirefut classe sans suite.

    II. LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS

    A. Sur la procdure pnale en gnral au Portugal

    49. Au Portugal, la conduite de lenqute appartient au ministre public,lequel se trouve sous lautorit du Procureur-gnral de la Rpublique.

    50. Au sein du ministre public, le Dpartement central denqute etaction pnaleest lautorit qui coordonne et conduit toute enqute portantsur la criminalit hautement organise ou particulirement complexe (article46 de la loi no 47/86 du 15 octobre 1986 dans la rdactionintroduite par laloi no60/98 du 27 aot 1998).

    51. On entend par instruction (instruo), le contrle judiciaire de

    lenqute par le juge dinstruction. cet gard, dans ses parties pertinentes,larticle 286 du CPP stipule :

    1. Linstruction vise le contrle judiciaire de la dcision dinculper (acusar) ou declasser une enqute sans suite (arquivar) dans le but de renvoyer ou non la cause en

    jugement.

    2. Linstruction est facultative.

    (...)

    En outre, larticle 32 4 de la Constitution dispose :

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    Toute instruction est de la comptence dun juge qui peut, aux termes de la loi,dlguer toute autre entit la pratique des actes dinstructions qui ne portent pasdirection sur les droits fondamentaux.

    52. Sil appartient au ministre public de diriger lenqute, aveclassistance des organes de police criminelle (article 263 du CPP), certainsactes ne peuvent tre raliss que par le juge dinstruction et dautresrequirent son autorisation. cet gard, les dispositions pertinentes du CPPse lisent ainsi :

    Article 17Comptence du juge dinstruction

    Il est de la comptence du juge dinstruction de procder linstruction, de dciderle renvoi en jugement (pronncia) et dexercer toutes les fonctions juridictionnelles

    jusqu ce que laffaire soit transmise aux fins du jugement, aux termes prescrits dansce code.

    Article 268Actes relevant de la comptence du juge dinstruction

    1. Au cours de lenqute, il est de la comptence exclusive du juge d instructionde :

    a) Procder au premier interrogatoire judiciaire dun accus dtenu ;

    b) Procder lapplication dune mesure de contrainte ou de garantiepatrimoniale (...) ;

    c) Procder aux perquisitions et saisies dans un cabinet davocats, un cabinet

    mdical ou un tablissement bancaire (...) ;d) Prendre connaissance en premier lieu de la correspondance saisie aux termes de

    larticle 179 3 ;

    e) Dclarer la perte, en faveur de ltat, de tout bien saisi en cas de classement sanssuite dune affaire par le ministre public (...) ;

    f) Raliser tout acte expressment rserv par la loi au juge dinstruction.

    2. Le juge accomplit les actes indiqus au paragraphe prcdent, la demande duministre public, de lautorit de la police criminelle en cas durgence ou risque deretard, de laccus ou de lassistente (auxiliaire du ministre public).

    (...)

    Article 269Actes devant tre ordonns ou autoriss par le juge dinstruction

    1. Au cours de lenqute, il est de la comptence exclusive du juge d instructiondordonner ou dautoriser :

    a) La ralisation dexpertises (...) ;

    b) La ralisation dexamens (...) ;

    c) Les perquisitions au domicile aux termes et dans les limites de larticle 177 ;

    d) La saisie de correspondance, aux termes de larticle 179 1 ;

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    e) Linterception, lenregistrement ou le registre de conversations ou decommunications, aux termes des articles 187 et 189 ;

    f) La ralisation de tout acte dont la loi prvoit qu il dpende de lordre oulautorisation du juge dinstruction.

    (...)

    Dans un arrt du 18 mai 2006 (procdure no54/2006-9), la cour dappelde Lisbonne a observ :

    (...)

    Lenqute comprend un ensemble de dmarches visant investiguer sur lexistencedun crime, identifier ses agents et leurs responsabilit et dcouvrir et recueillir des

    preuves aux fins de la dcision portant sur les rquisitions (acusao) (...).

    Il revient au ministre public de la diriger, avec l assistance des organes de police

    criminelle (...).Lenqute est donc une procdure relevant du ministre public et non du juge, il

    appartient donc au premier, et non ce dernier, de slectionner et recueillir la preuve.

    Il est incontestable que linvestigation criminelle appartient au ministre publicdurant lenqute, le juge dinstruction tant, nanmoins, par impratif constitutionnel,comptent en ce qui concerne les actes qui ont directement voir avec les droitsfondamentaux.

    (...).

    Par consquent, dans la mesure o le juge dinstruction est le juge des liberts et desgaranties, il lui appartient peine dassurer (...) que la collecte des preuves- dontla slection, nous le rappelons, est de la comptence du ministre public- seffectue

    lgalement (et constitutionnellement).

    (...)

    53. Larticle 399 du code de procdure pnale pose le principe gnralen matire de recours en matire pnale, disposant ce qui suit :

    Il est permis de faire appel des arrts, jugements et ordonnances dont le caractreinattaquable nest pas prvu par la loi.

    B. Sur la procdure de perquisition et saisie

    54. Concernant la procdure de perquisition et de saisie, le code deprocdure pnale prvoit ce qui suit :

    Article 174Conditions

    1. Sil existe des indices quune personne dissimule sur elle-mme des objetsayant un lien avec un crime ou pouvant servir de preuve, une fouille corporelle estordonne.

    2. Sil existe des indices que les objets mentionns lalina prcdent, ou si lapersonne mise en examen (arguido) ou une autre personne devant tre dtenue, puisse

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    se trouver dans un lieu rserv ou ntant pas librement accessible au public, uneperquisition est ordonne.

    3. Les fouilles corporelles et les perquisitions sont autorises ou ordonnes par uneordonnance de lautorit judiciaire comptente, celle-ci devant, dans la mesure du

    possible, prsider lopration.

    4. Lordonnance prvue lalina prcdent est valable pendant 30 jours, souspeine de nullit.

    5. Les exigences prvues lalina 3 ne sappliquent pas aux fouilles corporelles etaux perquisitions effectues par un organe de la police criminelle dans les cas :

    a) De terrorisme, criminalit violente ou hautement organise, lorsqu il y a desindices fonds de la commission imminente dun crime pouvant mettre gravement endanger la vie ou lintgrit physique dune personne ;

    b) O les personnes vises donnent leur consentement (...) ;

    c) Au moment dune dtention en flagrant dlit pour un crime auquel sappliqueune peine de prison.

    6. Dans les cas indiqus la lettre a) de l alina prcdent, la ralisation delopration est, sous peine de nullit, immdiatement porte la connaissance du jugedinstruction qui doit lapprcier afin de pouvoir la valider.

    Article 176Formalits de la perquisition

    1. Sauf dans les cas indiqus lalina 5 de larticle 174, avant de procder laperquisition, loccupant du lieu concern reoit une copie de lordonnance ayantdtermine celle-ci indiquant :

    - quil peut assister lopration et

    - se faire accompagner ou remplacer par une personne de sa confiance ;

    - quil se prsente sans attendre.

    2. Si les personnes indiques lalina prcdent sont absentes, une copie est, dansla mesure du possible, remise un membre de la famille, un voisin, un concierge ou la

    personne qui le remplace.

    (...)

    Article 177Perquisition

    (...)5. La perquisition dun cabinet davocats (...) est, sous peine de nullit, prside

    (presidida)par le juge en personne, lequel informe au pralable le prsident du conseillocal de lOrdre des avocats (...) afin que celui-ci ou une autre personne agissant enson nom soit prsent.

    (...)

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    Article 178Objets pouvant tre saisis et sous quelles conditions

    1. Sont saisis les objets ayant servi ou tant destins servir commettre uncrime, ceux qui en sont le produit, le bnfice, le prix ou la rcompense et tous lesobjets laisss par lauteur du crime sur les lieux, ainsi que tout autre pouvant servir de

    preuve.

    2. Les objets saisis sont verss au dossier de la procdure (...).

    3. Les saisies sont autorises, ordonnes et valides par ordonnance de lautoritjudiciaire.

    4. Les organes de police criminelle peuvent faire des saisies au cours des fouillescorporelles ou des perquisitions lorsquil y a urgence ou risque de perte en cas deretard (...).

    (...)

    6. Les propritaires des objets ou les titulaires des biens saisis peuvent demander aujuge dinstruction la modification ou lannulation de la mesure. (...)

    (...)

    Article 179Saisie de correspondance

    1. Sous peine de nullit, le juge peut autoriser ou requrir, par ordonnance, lasaisie (...) de lettres, paquets, valeurs, tlgrammes ou tout autre correspondance silexiste des raisons fondes de croire que :

    a) La correspondance a t expdie ou reue par le suspect (...) ;

    b) Est en cause un crime pouvant tre puni dune peine suprieure trois ans deprison ;

    c) Lacte se rvle dun grand intrt pour la dcouverte de la vrit ou pour lapreuve.

    2. Sous peine de nullit, il est interdit de saisir ou dexercer un contrle, sous uneautre forme, de toute correspondance entre laccus et son dfenseur, sauf si le juge ades raisons fondes de croire que celle-ci constitue lobjet ou llment dun crime.

    3. Le juge ayant autoris ou ordonn lacte est la premire personne prendreconnaissance du contenu de la correspondance saisie. Sil considre quelle prsenteun intrt aux fins des preuves, il la fera joindre au dossier de la procdure ; dans lecas contraire, il la rend qui de droit, celle-ci ne pouvant tre utilise comme moyende preuve, il reste alors li au secret par rapport tout ce dont il a pris connaissance etqui ne prsente pas dintrt pour la preuve.

    Article 180Saisie dans un cabinet davocats ou mdical

    1. Ce qui est prvu lalina 5 (...) de larticle 177 sapplique aux saisies ralisesdans un cabinet davocats (...).

    2. Il est interdit, sous peine de nullit, de saisir des documents couverts par le secretprofessionnel (...) sauf si ces documents ont eux-mmes servi en tant quobjet oulment dun crime.

    3. Ce qui est prvu lalina 3 de larticle prcdent sapplique en consquence.

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    Article 183Photocopie et copies certifies conformes (cert ides)

    1. Il est possible de joindre une photocopie des documents saisis au dossier de laprocdure (autos), loriginal devant tre rendu. Sil est ncessaire de conserverloriginal, il est possible den faire une photocopie ou une copie certifie conforme(certido)et de remettre celle-ci qui appartenait loriginal. (...)

    (...)

    Article 184Mise sous scells et ouverture des scells

    Dans la mesure du possible, les objets saisis sont mis sous scells. Louverture desscells est faite, si possible, en prsence des personnes qui taient prsentes aumoment de leur apposition, celles-ci vrifiant si les scells nont pas t viols et queles objets saisis nont pas t changs.

    Article 186Restitution des objets saisis

    1. Les objets saisis sont restitus qui de droit ds quil apparat que le maintiende la saisie aux fins de la preuve nest plus ncessaire.

    2. Ds que le jugement devient dfinitif, les objets saisis sont rendus qui de droitsauf sils ont t dclars perdus en faveur de ltat.

    Article 187Admissibilit [coutes tlphoniques]

    1. Linterception et lenregistrement de conversations ou communications

    tlphoniques ne peuvent tre utiliss pendant un enqute que sil existe des raisonsde croire que cette mesure est indispensable la dcouverte de la vrit ou si la preuveserait, dune autre faon, impossible ou trs difficile obtenir, par une ordonnancefonde du juge dinstruction et sur demande du ministre public, sagissant de crimes :

    a) punis par une peine de prison suprieure, dans son dlai maximum, trois ans ;

    b) relatifs au trafic de stupfiants ;

    c) de dtention darme interdite ou de trafic darmes ;

    d) de contrebande ;

    e) dinjure, menace, contrainte, intrusion dans la vie prive ou perturbation de lapaix et de la tranquillit, lorsquils sont commis par la voie du tlphone ;

    f) de menace de crime ou dabus et simulation de signes de dangers ; oug) dvasion, lorsque laccus a t condamn un des crimes prvus aux lettres

    prcdentes.

    (...)

    4. Linterception et lenregistrement (...) ne peuvent tre autoriss (...) qulencontre de :

    a) Un suspect ou une personne mis en examen;

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    b) Une personne utilise comme intermdiaire, par rapport laquelle il existe desraisons fondes qui permettent de croire quelle reoit ou transmet des messagesdestins ou provenant dun suspect ou dune personne mis en examen ou ;

    c) La victime dun crime, avec son consentement (...).

    5. Linterception et lenregistrement de conversations ou de communications entreune personne mise en examen et son dfenseur sont interdits, sauf si le juge a desraisons fondes de croire quelles constituent lobjet ou un lment du crime.

    (...)

    7. Sans prjudice de ce qui est prvu larticle 248, lenregistrement deconversations ou de communications ne peut tre utilis dans une autre procdure, encours ou instaurer, que sil rsulte de linterception dun moyen de communicationutilis par une personne indique lalina 4 et dans la mesure o il est indispensable

    pour prouver un des crimes figurant lalina 1.

    8 Dans les cas prvus lalina prcdent, les supports techniques desconversations ou des communications et les ordonnances qui ont fond lesinterceptions respectives sont joints, par ordonnance judiciaire, la procdure pourlaquelle elles doivent tre utilises comme lment de preuve, une copie devant treextraite si ncessaire.

    Article 188Formalits des oprations [coutes tlphoniques]

    (...)

    6. (...) le juge ordonne la destruction immdiate des supports techniques et desrapports manifestement trangers la procdure :

    a) Qui concernent des conversations o ne sont pas intervenues les personnesindiques lalina 4 de larticle prcdent ;

    b) Qui portent sur des domaines couverts par le secret professionnel, defonctionnaire ou de ltat ; ou

    c) Dont la divulgation peut porter gravement atteinte aux droits, liberts etgaranties ;

    (...).

    Article 248Communication de la notitia crimini s

    1. Les organes de police criminelle qui ont eu connaissance dun crime, par leurs

    propres moyens ou aprs une dnonciation, transmettent cette information auministre public dans le dlai le plus court, lequel ne peut dpasser dix jours.

    (...)

    Article 189Extension

    1. Les dispositions prvues aux articles 187 et 188 sont applicables auxconversations ou communications transmises par nimporte quel autre moyentechnique autre que le tlphone, notamment le courrier lectronique (...).

    (...)

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    55. Dans un arrt du 23 octobre 2002 (procdure n o 125/00), la Coursuprme a considr quil fallait distinguer les connaissances relevant dune

    enqute (conhecimentos de investigao) des connaissances fortuites (conhecimentos fortuitos). Dans le premier cas, les informations ont tobtenues dans le cadre de la propre enqute en cours, il existe donc plus oumoins une certaine proximit entre les situations recherches (il sagit parexemple du concours rel dinfractions, des cas de coparticipations). Dansde telles situations, rien nempche et il est mme justifi que les donneslgalement obtenues travers des coutes tlphoniques concernant certainsfaits soient utilises pour prouver dautres faits prsentant avec elles unecertaine affinit. Dans le second cas de figure, les informations sontobtenues de faon latrale et sont sans rapport avec lenqute en cours. Lesinformations obtenues de faon fortuite dans le cadre dcoutes

    tlphoniques peuvent tre admises dans le cadre dune autre procdure sicelles-ci ont t ralises conformment la loi, si le crime faisant lobjet delautre procdure fait partie de la liste des crimes indiques larticle 187 1 du CPP, si les informations prsentent un intrt pour la dcouverte dela vrit ou la preuve dans la procdure vers o elles sont transfres, silaccus a la possibilit de contrler ou contredire les rsultat obtenus parcette voie.

    Dans un arrt du 29 avril 2010 (procdure no128/05.0JDLSB-A.S1), laCour suprme a relev que par connaissances fortuites , il fallait entendreles informations recueillies de faon lgale au cours notamment delenregistrement de conversations tlphoniques, ne concernant pas le crime lorigine de ce moyen dobtention de preuves.

    C. Sur la conservation des dossiers relatifs une procdure pnale

    56. Au moment des faits, en ce qui concerne la conservation dessupports techniques de conversations ou de communications tlphoniquesenregistres dans le cadre dune enqute pnale, lalina 3 de la directive du

    procureur gnral de la Rpublique du 9 janvier 2008 prvoyait ce qui suit :

    (...)

    Les supports techniques de conversations ou de communications tlphoniquesenregistres dans le cadre dune enqute pnale ayant fait lobjet dune ordonnancefinale de classement sans suite sont conservs, pour la dure correspondante au dlaide prescription de lenqute pnale, ds lors que la rouverture de lenqute se montre

    possible dun point de vue juridique (...)

    Adopt le 24 dcembre 2013 par larrt ministriel (Portaria)no 368/2013, le rglement sur la conservation aux archives des tribunaux

    prvoit la conservation et le versement aux archives de tout dossier duneprocdure pnale relative une enqute pnale classe sans suite jusquauterme du dlai de prescription du crime qui faisait lobjet de lenqute.

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    Conformment larticle 118 1 a) et c) du code pnal (dans sardaction issue de la loi no 32/2010 du 2 septembre 2010), les dlais de

    prescription sont les suivants :- 15 ans en ce qui concerne les crimes de corruption, prise illgale

    dintrts et blanchiment dargent ;- 10 ans pour le crime de prvarication.

    D. Sur la saisie de donnes informatiques

    57. Entre en vigueur le 15 octobre 2009, la loi sur la cybercriminalit(approuve par la loi no 109/2009 du 15 septembre 2009) transpose danslordre juridique portugais la directive du Conseil de lUnion europenneno 2005/222/JAI du 24 fvrier 2005 relative aux attaques visant les systmesdinformations. Les dispositions pertinentes de cette loi se lisent ainsi :

    Article 15Recherche de donnes informatiques

    1. Lorsquau cours dune procdure il devient ncessaire, pour produire unepreuve, en vue de la dcouverte de la vrit, dobtenir des donnes informatiquesspcifiques et dtermins, stocks dans un systme informatique, lautorit judiciairecomptente autorise ou ordonne par ordonnance quune recherche soit effectue dansce systme informatique, et doit, dans la mesure du possible, prsider (presidir) cetteopration (diligncia).

    2. Sous peine de nullit, lordonnance prvue lalina prcdent a une dure de

    validit pouvant aller jusqu 30 jours.(...)

    Article 16Saisie de donnes informatiques

    1. Si au cours dune recherche informatique ou dun tout autre accs lgitime unsystme informatique, sont dcouverts des donnes ou des documents informatiquesncessaires pour produire une preuve en vue de la dcouverte de la vrit, lautorit

    judiciaire comptente autorise ou ordonne, par ordonnance, leur saisie.

    2. Lorgane de police criminelle peut effectuer des saisies, sans autorisationpralable de lautorit judiciaire, au cours dune recherche informatique ordonne defaon lgale aux termes de larticle prcdent, ou bien lorsquil existe une urgence ouun risque de perte en cas de retard.

    3. Si des donnes ou des documents informatiques saisis contiennent des lmentspersonnels ou intimes, pouvant mettre en cause la vie prive de la personne respectiveou dun tiers, ceux-ci sont, sous peine de nullit, prsents au juge, qui dtermineraleur jonction au dossier de lenqute en tenant compte des intrts du cas concret.

    4. Les saisies effectues par un organe de police criminelle sont toujours sujettes validation de lautorit judiciaire, dans un dlai maximum de 72 heures.

    5. Les saisies relatives aux systmes informatiques utiliss dans le cadre delexercice de la profession davocat et des activits mdicales ou bancaires sont

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    sujettes, avec les adaptations ncessaires, aux rgles et formalits prvues dans le codede procdure pnale (...).

    (...)7. Les saisies de donnes informatiques (...) peuvent notamment prsenter les

    formes suivantes :

    a) Saisie du support o est install le systme ou saisie du support o sont stocksles donnes informatiques, ainsi que les dispositifs ncessaires leur lecturerespective ;

    b) Ralisation dune copie des donnes, en support autonome, qui sera verse audossier ;

    c) Prservation, par des moyens technologiques, de lintgrit des donnes, sansralisation dune copie ou retrait de celles-ci ; ou

    d) limination irrversible ou blocage de laccs aux donnes.(...)

    E. Sur le Tribunal central dinstruction criminelle

    58. La loi relative lorganisation des tribunaux judiciaires (loi no3/99,du 13 janvier 1999) prvoit dans son article 80 1 que, si lactivitdlictuelle a lieu dans des ressorts (comarcas) appartenant divers districts

    judiciaires, linstruction des affaires portant sur la criminalit violente,hautement organise ou particulirement complexe est de la responsabilitdu Tribunal central dinstruction criminelle. Aux termes du rglementdapplication de la loi dorganisation des tribunaux judiciaires (dcret-loin 186-A/99 du 31 mai 1999), ce tribunal a son sige Lisbonne. Aumoment des faits, il disposait dun seul juge dinstruction. Depuisseptembre 2014, il est compos de deux juges dinstruction.

    F. Sur le secret professionnel

    59. Larticle 87 du statut de lOrdre des avocats (Estatuto da Ordem dosAdvogados), approuv par la loi no15/2005 du 26 janvier 2005, dispose :

    1. Lavocat est tenu au secret professionnel concernant tous les faits dont il a

    connaissance tant donn ses fonctions et la prestation de ses services (...).(...)

    60. Les autres dispositions du statut de lOrdre des avocats pertinentessont les suivantes :

    Article 70(...) perquisitions (buscas) dans un cabinet davocats

    1. (...) les perquisitions (...) dans un cabinet davocats ou dans tout autre localdestin aux archives, linterception et lenregistrement de conversations oucommunications, par voie tlphonique ou lectronique, utiliss par lavocat dans

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    lexercice de sa profession, figurant dans le registre de l Ordre des Avocats, nepeuvent tre ordonns et prsids que par le juge comptent.

    2. (...) le juge doit convoquer, pour assister (...) aux recherches, lavocat concern,le prsident du conseil du district, le prsident de la dlgation ou le dlgu delOrdre des avocats, selon les cas, lesquels peuvent dlguer un autre membre duconseil du district ou de la dlgation.

    (...)

    4. Les membres de la famille ou les employs de lavocat concern peuvent aussiassister aux procdures indiques lalina 2 de cet article lorsquils se prsentent celles-ci ou si le juge les convoque.

    (...)

    6. Le procs-verbal de la procdure fait mention expresse des personnes prsentes,ainsi que de tout vnement survenu au cours de celle-ci.

    Article 71Saisie de documents

    1. Indpendamment du support utilis, il nest pas possible de saisir lacorrespondance relative lexercice de la profession.

    (...)

    3. Sont comprises dans la correspondance les instructions et les informations critessur lobjet de la dsignation [doffice] ou du mandat ou lavis demand.

    4. Est exclue la correspondance portant sur un acte criminel pour lequel lavocat at mis en examen.

    Article 72Rclamation

    1. Au cours [de la perquisition], lavocat concern (...) peut prsenter unerclamation.

    2. La rclamation ayant pour but de prserver le secret professionnel, le juge doitimmdiatement prendre en compte la demande pour ce qui est des documents ouobjets en cause ; le juge met de suite ces documents ou objets sous scells, sans leslire ou les examiner.

    3. Les motifs de la rclamation sont dposs, sous cinq jours, auprs du tribunal ola procdure est pendante ; le juge remet au prsident de la cour dappel, dans lemme dlai, la rclamation accompagne de son avis et, le cas chant, des documents

    ou objets mis sous scelles.4. Le prsident de la cour dappel peut, sous rserve du secret, procder

    louverture des scells, les retournant nouveau scells, avec sa dcision.

    G. Sur le recours en inconstitutionnalit

    61. Sagissant du recours en inconstitutionnalit, selon la jurisprudenceconstante et ritre du Tribunal constitutionnel, seules des questionsdinconstitutionnalit normative peuvent tre examines dans le cadre

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    22 ARRT SRVULO & ASSOCIADOS - SOCIEDADE DEADVOGADOS, RL ET AUTRES c. PORTUGAL

    dun recours constitutionnel, le recours direct en protection d un droitfondamental nexistant pas en droit constitutionnel portugais. Tout recours

    dirig contre la dcision judiciaire elle-mme est ainsi jug irrecevable parle Tribunal constitutionnel (voir, par exemple, les arrts du Tribunalconstitutionnel nos192/94 du 1ermars 1994, 178/95 du 5 avril 1995 et 18/96du 16 janvier 1996).

    H. Sur les socits davocats

    62. Les socits davocats sont des socits civiles formes par deux ouplusieurs avocats dans le but dexercer conjointement leur activitprofessionnelle et de rpartir entre eux les recettes (article 1 du dcret-loin 229/2004 du 10 dcembre 2004). Contrairement aux membres (scios),les associs (associados) ne disposent pas de parts sociales dans la socit etne participent pas ses assembles gnrales (article 6, 12, 13 et 25). Tousles membres dune socit sont tenus au respect du secret professionnel(article 5).

    EN DROIT

    I. SUR LA VIOLATION ALLGUE DE LARTICLE 8 DE LA

    CONVENTION63. Les requrants estiment que la perquisition et la saisie de fichiers

    informatiques et messages lectroniques du systme informatique de leurslocaux professionnels a port atteinte leur droits garantis par larticle 8 dela Convention, ainsi libell :

    1. Toute personne a droit au respect de sa vie prive et familiale, de son domicileet de sa correspondance.

    2. Il ne peut y avoir ingrence dune autorit publique dans lexercice de ce droitque pour autant que cette ingrence est prvue par la loi et quelle constitue unemesure qui, dans une socit dmocratique, est ncessaire la scurit nationale, la

    sret publique, au bien-tre conomique du pays, la dfense de l Ordre et laprvention des infractions pnales, la protection de la sant ou de la morale, ou laprotection des droits et liberts dautrui.

    64. Le Gouvernement rcuse la thse du requrant.

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    A. Sur la recevabilit

    1. Sur le non-puisement des voies de recours internes65. Le Gouvernement soulve une exception tire du non-puisement

    des voies de recours internes. Il souligne que le contrle effectu par leTribunal constitutionnel peut porter sur la manire dont une certaine normea t applique dans un cas concret. Pour cela, il aurait fallu que lesrequrants eussent soulev devant la cour dappel de Lisbonne une questionconcrte dinconstitutionnalit, ce quils nont pas fait. Pour leGouvernement, les intresss nauraient ainsi pas donn aux juridictionsinternes pour des raisons qui leur sont imputables loccasion de porterremde leurs griefs.

    66. Les requrants reconnaissent que les conditions de recevabilit deleur recours constitutionnel ntaient pas remplies tant donn que lerecours devant le Tribunal constitutionnel ne pouvait concerner quuneinconstitutionnalit normative. Ils estiment quaux fins de larticle 35 1, cerecours ntait donc pas puiser car il naurait pas permis de redresser laviolation allgue, soulignant que le recours direct en protection dun droitfondamental nexiste pas dans le droit constitutionnel portugais. Partant,larrt de la cour dappel de Lisbonne doit tre considr comme la dcisioninterne dfinitive dans le cas despce.

    67. La Cour rappelle que, selon larticle 35 1 de la Convention, elle nepeut tre saisie quaprs lpuisement des voies de recours internes. Tout

    requrant doit avoir donn aux juridictions internes loccasion que cettedisposition a pour finalit de mnager en principe aux tats contractants :prvenir ou redresser les violations allgues contre eux avant que cesallgations ne soient soumises aux organes de la Convention (voir, parexemple,Moreira Barbosa c. Portugal(dc.), no 65681/01, CEDH 2004-V,et Cardot c. France, 19 mars 1991, 36, srie A no 200). Cette rgle sefonde sur lhypothse objet de larticle 13 de la Convention, avec lequelelle prsente dtroites affinits que lordre interne offre un recourseffectif quant la violation allgue (voir, par exemple, Selmouni c. France[GC], no 25803/94, 74, CEDH 1999-V).

    68. La Cour rappelle en outre que larticle 35 de la Convention ne

    prescrit toutefois lpuisement que des recours la fois relatifs auxviolations incrimines, disponibles et adquats. Ces recours doivent exister un degr suffisant de certitude, non seulement en thorie mais aussi en

    pratique, sans quoi leur manquent leffectivit et laccessibilit voulues(voir, parmi beaucoup dautres, Vernillo c. France, 20 fvrier 1991, 27,srie A no 198, etDalia c. France, 19 fvrier 1998, 38,Recueil des arrtset dcisions1998-I).

    69. Se penchant sur la prsente espce, la Cour constate dabord quilnest pas contest que le recours constitutionnel au Portugal ne peutconcerner quune disposition normative et non pas une dcision

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    judiciaire (Colao Mestre et SIC Sociedade Independente deComunicao, S.A. c. Portugal(dc.), nos 11182/03 et 11319/03, 18 octobre

    2005). Dans son arrt du 14 juillet 2010, pour autant quil sagisse de lasaisie des documents et donnes informatiques, le Tribunal constitutionnel arelev que les requrants attaquaient, pour lessentiel, les dcisions

    judiciaires prises dans le cadre de la procdure et quil ntait pas comptentpour examiner les dolances leur gard.

    70. La Cour en conclut que le recours constitutionnel introduit par lesrequrants ntait donc pas de nature porter remde au grief qu ils ont

    port devant elle sagissant de la saisie des documents et donneinformatiques. Lexception souleve par le Gouvernement doit donc trerejete.

    2. Sur la qualit de victime des requrants personnes physiques

    71. Le Gouvernement conteste la qualit de victime des requrantspersonnes physiques. Il allgue que les deuxime, troisime et cinquimerequrants nont indiqu aucun fait les concernant personnellement, leurdroits se confondant ainsi avec ceux de la socit requrante. Pour ce qui estdu quatrime requrant, il observe que toute la correspondance luiappartenant lui a t rendue, conscutivement larrt de la cour dappel deLisbonne du 15 avril 2010 ayant ordonn lannulation de sa mise enexamen, celui-ci ntant donc plus victime en lespce.

    72. Les requrants personnes physiques allguent, quen leur qualit

    davocats de la socit requrante, ils ont lobligation dobserver le secretprofessionnel autant par rapport leurs propres clients que par rapport ceux de la socit. Ils soutiennent qutant avocats membres (deuxime,troisime et quatrime requrants) et associ (cinquime requrant) de lasocit requrante, les donnes informatiques saisies peuvent aussi lesconcerner personnellement puisquelles proviennent de deux disques dursappartenant la socit requrante, la saisie litigieuse ayant de cette faongalement port atteinte leur droit au respect de la vie prive et dudomicile.

    73. Le quatrime requrant reconnat que la correspondance lui a tretourne. Il observe, toutefois, qu linstar des autres requrants, la saisie

    des autres donnes informatiques se maintient toujours.74. La Cour rappelle que, pour se prvaloir de larticle 34 de la

    Convention, un requrant doit pouvoir se prtendre victime dune violationde la Convention. Selon la jurisprudence constante de la Cour, la notion de victime doit tre interprte de faon autonome et indpendante desnotions internes telles que celles concernant lintrt ou la qualit pour agir.Par ailleurs, pour quun requrant puisse se prtendre victime duneviolation de la Convention, il doit exister un lien suffisamment direct entrele requrant et le prjudice quil estime avoir subi du fait de la violation

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    allgue (voir Gorraiz Lizarraga et autres c. Espagne, no62543/00, 35,CEDH 2004-III, et les rfrences qui sy trouvent cites).

    75. La Cour rappelle en outre avoir tenu la fouille opre au cabinet dunavocat pour une immixtion dans la vie prive et la correspondance et, ventuellement, le domicile, au sens plus large quimplique le termefranais par rapport au texte anglais qui emploie le terme home (Niemietz c. Allemagne, 16 dcembre 1992, 29-33, srie A no251-B, etTamosius c. Royaume-Uni (dc.), no 62002/00, CEDH 2002-VIII ; voiraussi Sallinen et autres c. Finlande, no50882/99, 71, 27 septembre 2005,qui confirme que la fouille des locaux professionnels d un avocat portegalement atteinte son droit au respect de son domicile ). La Cour aaussi estim que la perquisition opre dans les locaux dune socitcommerciale portait atteinte au droit de celle-ci au respect de son

    domicile (Socit Colas Est et autres c. France, no37971/97, 40-42,CEDH 2002-III).

    76. La Cour a aussi considr la fouille et la saisie de donneslectroniques comme une ingrence dans le droit des requrants au respectde la correspondance au sens de larticle 8 (Wieser et Bicos

    Beteiligungen GmbH c. Autriche, no74336/01, 45, CEDH 2007 IV).77. Elle a soulign quen vertu de larticle 8, la correspondance entre un

    avocat et son client, quelle quen soit la finalit (la correspondancestrictement professionnelle tant incluse :Niemietzprcit, 32), jouit dunstatut privilgi quant sa confidentialit (Campbell c. Royaume-Uni,25 mars 1992, 46-48, srie A no 233 ; voir aussi, notamment, EkincietAkaln c. Turquie, no77097/01, 30 janvier 2007, 47 ; cela vaut, commeindiqu prcdemment, pour toutes les formes dchanges entre les avocatset leurs clients). Elle a en outre indiqu quelle accorde un poids singulierau risque datteinte au secret professionnel des avocats car il est la base dela relation de confiance entre lavocat et son client (Andr et autre c.

    France, no18603/03, 41, 24 juillet 2008 et Xavier Da Silveira c. France,no43757/05, 36, 21 janvier 2010) et il peut avoir des rpercussions sur la

    bonne administration de la justice (Wieser et Bicos, prcit, 65-66 ;Niemietz, prcit, 37, etAndr, prcit 41).

    78. En lespce, le Gouvernement ne conteste la qualit de victime que

    des requrants personnes physiques, acceptant ainsi uniquement celle de lasocit requrante.79. La Cour note que les requrants personnes physiques sont des

    avocats membres et un associ de la socit requrante, exerant au sein decelle-ci leur activit professionnelle. Elle observe quils ne se plaignent quede la perquisition et de la saisie de donnes informatiques figurant dans lesystme informatique de leurs locaux professionnels. Par consquent, laCour naperoit aucun motif de distinguer en lespce la situation desrequrants personnes physiques de la socit requrante, lappartenancedun avocat une socit ne le dispensant pas de ses droits et devoirs

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    dontologiques, en particulier en ce qui concerne lobligation dobserver lesecret professionnel envers ses clients.

    80. La Cour estime galement quil ny a pas lieu de faire une distinctionentre les requrants personnes physiques mme. En effet, ces derniers setrouvent tous concerns par cette saisie. Le fait que la correspondance concernant le quatrime requrant grave dans les DVDs lui ait t renduenest donc pas pertinente dans le cas despce. En effet, la saisie des autresdonnes informatiques est ici mise en cause, ces lments concernant tousles membres de la socit requrante.

    81. Au vu de ce qui prcde, lexception du Gouvernement tire delabsence de qualit de victime des requrants doit tre rejete.

    3. Conclusion

    82. La Cour constate que les griefs des requrants tirs de larticle 8 dela Convention ne sont pas manifestement mal fonds au sens de larticle 35 3 a) de la Convention. La Cour relve par ailleurs quils ne se heurtent aucun autre motif dirrecevabilit. Il convient donc de les dclarerrecevables.

    B. Sur le fond

    1. Thses des parties

    a) Les requrants83. Invoquant larticle 8 de la Convention, les requrants dnoncent la

    perquisition et la saisie de fichiers informatiques et messages lectroniquesdans le systme informatique de leurs locaux professionnels.

    84. Ils se plaignent que les recherches aient t conduites sur la base de35 mots cls et, en particulier, partir de mots courants, de surcrot dans lecadre dun cabinet davocats, comme contreparties , Banco EspritoSanto , swap, financement ou spread, ce qui a eu pourconsquence denglober des fichiers informatiques et des messageslectroniques sans rapport avec lenqute pnale.

    85. Les requrants font valoir que le juge dinstruction du TCIC de

    Lisbonne est lunique juge au Portugal charg des affaires criminelles lesplus complexes et que nombre dentre elles concernent certains de leursclients, citant cet gard deux affaires comme exemples. Ils affirment quentant la premire autorit prendre connaissance du contenu des donnessaisies comme le prvoit larticle 179 3 du CPP applicable en vertu delarticle 180 3 du CPP, le juge dinstruction accde des informationssans aucun rapport avec lenqute lorigine du mandat de perquisition etde saisie. Ils estiment quen consquence ce juge dinstruction peut avoiraccs des documents couverts par le secret professionnel, voire personnels

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    et qui, le cas chant, peuvent avoir un intrt pour dautres affaires quilinstruit. Selon eux, la rclamation devant le prsident de la cour dappel na

    pas constitu un mcanisme pour prvenir les abus car elle na pas permisdviter que le juge dinstruction du TCIC accde aux lments saisis. Ellelaurait t si le tri des fichiers avait t fait en premier lieu par le prsidentde la cour dappel.

    86. Ils dnoncent la non-restitution des copies des lmentsinformatiques saisies en dpit du classement sans suite de la procdure

    pnale qui avait t ouverte lencontre de MeB.A.87. Pour finir, ils exposent ensuite que des copies des fichiers

    informatiques et messages lectroniques saisis ont t extraites du dossier delenqute concernant Me B.A. qui se trouve prsent classe (procdureinterne no56/06.2TELSB) pour tre annexes lenqute ouverte

    lencontre des autres suspects (procdure no222/11.9TELSB). Ils allguentnotamment que des messages lectroniques privs ou professionnels,changs entre des avocats de la socit requrante et leurs clients, sansaucun rapport avec lenqute ouverte lencontre de lavocat Me B.A ontainsi t joints cette nouvelle procdure. Ces avocats nayant pas t misen examen dans le cadre dune quelconque enqute, ceci enfreint larticle 71 1 du statut de lOrdre des avocats et le secret professionnel.

    b) Le Gouvernement

    88. Le Gouvernement reconnat en lespce lexistence dune ingrence.

    Il fait valoir quelle tait prvue par la loi et poursuivait un but lgitime, savoir la prvention des infractions pnales, lenqute en cause portantnotamment sur des chefs de corruption et blanchiment dargent. Mme si lesrequrants navaient pas la qualit de personne mise en examen, il existaitdes raisons de croire quun ensemble dlments pertinents pour lenqute

    pnale se trouvaient dans les installations du cabinet davocats tant donnque les dossiers avaient t traits par MeB.A, ancien avocat de la socitrequrante, puis par le quatrime requrant et quaucun document navaitt retrouv au ministre de la Dfense. Le Gouvernement affirme quelingrence tait ncessaire dans une socit dmocratique et proportionneau but poursuivi, un juste quilibre ayant t mnag entre les intrts de

    lenqute et les droits des requrants. Certes, un nombre importantsdlments ont t saisis. Nanmoins, ceci sexplique par lampleur etlextrme complexit de lenqute. En outre, les recherches informatiquesont t faites sur la base de 35 mots cls en rapport avec lobjet de lenqutece qui a permis de cibler raisonnablement la recherche, minimisant ainsilingrence.

    89. Le Gouvernement souligne que la loi interne prvoit un ensemble degaranties procdurales spcifiques dans le cas dune perquisition dans uncabinet davocats, lesquelles ont toutes t respectes en lespce. Tous leslments saisis ont t mis sous scells la suite de la rclamation prsente

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    par les requrants. Un reprsentant de lOrdre des avocats et les quatrerequrants personnes physiques taient prsents pendant les perquisitions et

    les saisies. En outre, un juge dinstruction a autoris et prsid laperquisition et la saisie dans les installations de la socit requrante. cetgard, contestant largument des requrants, le Gouvernement souligne quele juge dinstruction au Portugal ne dispose pas de pouvoirs denqute

    pnale et quil nintervient au cours de la procdure que pour ralisercertains actes. Celui-ci agit de faon indpendante, comme garant desliberts individuelles afin dassurer le respect des droits individuels dansle cadre de toute enqute criminelle. En ce qui concerne, en particulier, le

    juge dinstruction du TCIC, il juge les craintes des requrants non-fondeset purement spculatives. Il souligne que celui-ci est tenu une obligationde confidentialit et au secret de linstruction comme tout magistrat. Pour

    finir, il souligne que les requrants ont bnfici dun recours effectif devantle prsident de la cour dappel de Lisbonne qui sest prononc sur la

    pertinence de la saisie pour les besoins de lenqute, conformment larticle 72 du statut de lOrdre des avocats.

    90. Le Gouvernement estime que les allgations concernant les donnesinformatiques saisies ayant t joints au dossier dune nouvelle enqute, nesont pas tayes, les requrants ne prcisant pas en quoi ils sont sans rapportavec lenqute portant sur lachat des sous-marins. Il ajoute que lesrequrants auraient d contester devant le juge du TCIC la saisie desdocuments prtendument personnels ou sans rapport avec lenqute, nelayant pas fait ils nont pas puis les voies de recours internes sur ce point.

    91. Sagissant la non-restitution des copies des fichiers informatiquessaisis, le Gouvernement affirme ne pas disposer dinformations cet gard.

    2. Lapprciation de la Cour

    92. titre prliminaire, la Cour note que les requrants ne dnoncentpas la perquisition en soi opre dans leurs locaux professionnels ; ils ne seplaignent pas davantage de la saisie des documents papiers. Ils senprennent uniquement aux recherches effectues dans leur systmeinformatique et la saisie de fichiers informatiques et de messageslectroniques, ce qui comme la Cour la dit ci-dessus (paragraphe 75)

    constitue une ingrence dans leurs droits au respect de la correspondance au sens de larticle 8 de la Convention. En loccurrence,slectionns sur la base de 35 mots cls, il sagissait de fichiersinformatiques et de deux botes de courriers lectroniques de lavocatMeB.A. ayant t extraits partir :

    - de lordinateur du quatrime requrant,- du disque dur de lordinateur portable qui avait t utilis par MeB.A.,- dun disque dur externe contenant des archives et,- des serveurs de la socit requrante (voir ci-dessus paragraphes 19

    et 34).

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    93. Une ingrence enfreint larticle 8 de la Convention, sauf si elle est prvue par la loi , dirige vers un ou des buts lgitimes au regard du

    paragraphe 2 et ncessaire, dans une socit dmocratique , pour le oules atteindre.

    a) Prvue par la loi

    94. La Cour rappelle quune ingrence ne saurait passer pour prvuepar la loi que si, dabord, elle a une base en droit interne. Dans le domainedu paragraphe 2 de larticle 8, le terme loi doit tre entendu dans sonacception matrielle et non formelle . Dans un domaine couvert parle droit crit, la loi est le texte en vigueur tel que les juridictionscomptentes lont interprt (Socit Colas Est et autres, prcit, 43, avecdautres rfrences, et Sallinen et autres, prcit, 77).

    95. Le Gouvernement affirme que les mesures litigieuses avaient unebase en droit interne, ce que les requrants ne contestent pas.

    96. La Cour constate quau moment des faits, cest--dire avant lentreen vigueur de la loi sur la cybercriminalit (voir ci-dessus paragraphe 57), ledroit portugais ne contenait pas de dispositions rgissant spcifiquement larecherche et la saisie de donnes informatiques. Les articles 174, 178 et 179du CPP qui sont toujours en vigueur prvoyaient nanmoins la perquisitionet la saisie dobjets et de la correspondance. En outre, la perquisition duncabinet davocats et la saisie de documents et de la correspondance lintrieur de celui-ci taient spcifiquement prvues par les articles 177 5

    et 180 2 du CPP et les articles 70 et 71 du statut de lOrdre des avocats. LaCour note enfin que larticle 183 du CPP prvoit la possibilit de joindreune photocopie des documents saisis au dossier de la procdure, l originaldevant, si possible, tre rendu. Lingrence tait donc bien prvue par laloi .

    b) But lgitime

    97. La Cour constate que, conformment larticle 174 3 du CPP etlarticle 70 1 du statut de lOrdre des avocats, la recherche et la saisie deslments informatiques dans le systme informatique de la socitrequrante ont t ordonnes dans le cadre dune enqute pnale ouverte

    lencontre de plusieurs ressortissants portugais et allemands pour les chefsde corruption, prise illgale dintrts, blanchiment dargent etprvarication, ce dernier chef concernant un ancien avocat de la socitrequrante, Me B.A.. Elles visaient donc un but lgitime, savoir la

    prvention des infractions pnales.98. La question qui se pose est donc celle de savoir si pareille ingrence

    tait ncessaire dans une socit dmocratique pour atteindre le butlgitime poursuivi dans les circonstances particulires de laffaire. En

    particulier, il sagit de vrifier si la lgislation et la pratique internes ontoffert des garanties suffisantes contre les abus et larbitraire.

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    c) Ncessaire dans une socit dmocratique

    i. Principes gnraux

    99. Selon la jurisprudence constante de la Cour, la notion de ncessit implique une ingrence fonde sur un besoin social imprieuxet, notamment, proportionne au but lgitime recherch. Pour dterminer siune ingrence tait ncessaire dans une socit dmocratique , la Courtient compte du fait quune certaine marge dapprciation doit tre laisseaux tats contractants (voir, parmi dautres arrts, Camenzind c. Suisse,16 dcembre 1997, Recueil des arrts et dcisions 1997VIII, 44).Toutefois, les exceptions que mnage le paragraphe 2 de larticle 8 appellentune interprtation troite, et leur ncessit dans un cas donn doit se trouvertablie de manire convaincante (voirBuck, prcit, 44).

    100. La Cour a toujours jug que les tats contractants peuvent estimerncessaire de recourir des mesures telles que des perquisitions et dessaisies pour tablir la preuve matrielle de certaines infractions. Ellecontrle alors le caractre pertinent et suffisant des motifs invoqus pour

    justifier pareilles mesures, ainsi que le respect du principe deproportionnalit susmentionn. En ce qui concerne ce dernier point, la Courdoit dabord veiller ce que la lgislation et la pratique pertinentesapportent aux individus des garanties adquates et effectives contre les abus.Elle doit ensuite examiner les circonstances particulires de lespce afin dedterminer si, in concreto, lingrence litigieuse tait proportionne au but

    recherch. Les critres que la Cour prend en compte pour trancher cettedernire question sont notamment les circonstances dans lesquelles lemandat a t mis, en particulier les autres lments de preuve disponibles lpoque, le contenu et ltendue du mandat, la faon dont la perquisition at mene, y compris la prsence ou non dobservateurs indpendants, etltendue des rpercussions possibles sur le travail et la rputation de la

    personne vise par la perquisition (voir Socit Colas Est et autres, prcit, 48 ; Buck c. Allemagne, no41604/98, 45, CEDH 2005-IV, Chappell c.

    Royaume-Uni, prcit, 46-48 ; Camenzind c. Suisse, prcit, 46 ;Funke,prcit, 57 ;Niemietz, prcit, 37 ; Smirnov c. Russie, no71362/01, 44,7 juin 2007 ; Robathin c. Autriche, no 30457/06, 44, 3 juillet 2012).

    Sagissant dun cabinet davocats, la prsence dun observateur indpendantest ncessaire afin que des documents couverts par le secret professionnelne soient pas soustraits (Niemietz, prcit, 37, et Tamosius, dcision

    prcite, voir aussi rfrences indiques ci-dessus au paragraphe 77). LaCour note galement que figure parmi ces garanties lexistence dun contrle efficace des mesures attentatoires larticle 8 de la Convention(Lambert c. France, 24 aot 1998, 34, Recueil des arrts et dcisions1998-V).

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    ii. Application la prsente espce

    ) Sur le caractre pertinent et suffisant des motifs invoqus

    101. En lespce, les recherches dans le systme informatique de lasocit requrante et la saisie des donnes informatiques ont t ordonnes

    par deux mandats du juge dinstruction du TCIC du 25 et 29 septembre2009, conscutivement la demande du DCIAP (voir ci-dessus

    paragraphes 13 et 14). Ceux-ci reposaient sur des soupons de corruption,prise illgale dintrts, blanchiment dargent, lencontre de plusieursressortissants portugais et allemands, concernant lachat de deux sous-marins par le gouvernement portugais un consortium allemand. Me B.Atait, quant lui, poursuivi du chef de prvarication au motif qu il avaitreprsent ltat dans le cadre des ngociations entre les parties alors qu il

    travaillait pour le compte de la socit requrante. Dans ces conditions, laCour est convaincue que les mandats de perquisition reposaient bien sur desmotifs plausibles de soupons (voir a contrario, Smirnov, 46 ; Andr,

    prcit, 46).

    ) Sur le contenu et la porte des mandats de perquisition et saisie

    102. En ce qui concerne le contenu et la porte des mandats deperquisition et saisie, la Cour note que les recherches et saisies dnoncespar les requrants ont t opres dans le systme informatique de la socitrequrante et bureaux des requrants et, plus particulirement :

    - dans lordinateur du quatrime requrant,- dans le disque dur de lordinateur portable qui avait t utilis parMe B.A.,

    - dans un disque dur externe qui contenait des dossiers archivs et- dans les serveurs du cabinet davocats.103. Mme si les enquteurs ne disposaient pas de pouvoirs illimits

    (voir cet gard, Robathin, prcit, 52 et aussi, mutatis mutandis, BernhLarsen Holding AS et autres c. Norvge, no24117/08, 159, 14 mars 2013),la Cour constate que les recherches dans le systme informatique de lasocit requrante ont t effectues sur la base de 35 mots cls, lesquelstaient en rapport avec lenqute. Parmi ceux-ci, elle note que figuraient

    quelques mots gnraux, tels que contreparties , financement , et desmots couramment utiliss dans un cabinet davocats spcialis dans le droitfinancier tels que les mots anglais swap ou spread (voir ci-aprs

    paragraphe 13). Par consquent, premire vue, ltendue des mandats deperquisition et de saisie apparat large.

    104. La Cour note quaprs le contrle du juge dinstruction du TCIC, lissue duquel environ 850 fichiers ont t supprims, le DCIAP a analys89 000 fichiers informatiques et 29 000 messages lectroniques saisis dansles quipements informatiques de la socit requrante et, en outre, dans larsidence de Me B.A (voir ci-dessus paragraphes 39 et 44). Il convient donc

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    de se demander si ltendue des mandats de perquisition et saisie a pu trecompense par des garanties de procdure adquates et suffisantes pour

    prvenir les abus ou larbitraire et protger le secret professionnel desavocats.

    ) Sur le caractre adquat et effectif des garanties contre les abus

    105. Avant tout, la Cour note quaux termes de larticle 70 1 et 4 dustatut de lOrdre des avocats, il est interdit de saisir les documents couverts

    par le secret professionnel des avocats (en dautres mots, par laconfidentialit des communications entre les avocats et leurs clients), sauf silavocat a t mis en examen dans le cadre de lenqute. Le code de

    procdure pnale et le statut de lOrdre des avocats prvoient en outre uncertain nombre de garanties procdurales en ce qui concerne les

    perquisitions et les saisies dans un cabinet davocats :a) lavocat concern doit tre prsent (Article 70 2 du statut de lOrdre

    des avocats) ;b) un reprsentant de lOrdre des avocats est requise (Article 70 2 du

    statut de lOrdre des avocats) ;c) un juge dinstruction doit personnellement prsider les perquisitions

    et saisies (Articles 177 5, 180 1 et 268 1 c) du CPP et Article 70 1 dustatut de lOrdre des avocat), il est la seule autorit pouvant autoriser ouordonner la saisie de correspondance et il est la premire personne prendreconnaissance de celle-ci (Articles 179 1 et 3 et 269 1 d) du CPP). Il est

    en outre tenu au secret professionnel par rapport toute information n tantpas en rapport avec lenqute comme lindique larticle 179 3 du CPP(voir ci-dessus paragraphe 54) ;

    d) lavocat intress peut prsenter une rclamation devant le prsidentde la cour dappel (Article 72 1 du statut de lOrdre des avocats) ;

    e) en cas de rclamation, les lments saisis doivent tre mis sousscells, sans consultation (Article 72 2 du statut de lOrdre des avocats) ;

    f) un procs-verbal est dress lissue des oprations avec mentionexpresse des personnes qui taient prsentes et de tout vnement survenuau cours de celles-ci (Article 70 6 du statut de lOrdre des avocats) ;

    g) le juge dinstruction doit ordonner la suppression de tout fichier

    caractre personnel, portant atteinte au secret professionnel ou neconcernant pas des personnes ayant t mises en examen dans le cadre delenqute en cause (Article 188 6 du CPP, applicable en vertu delarticle189 du CPP).

    106. Il reste savoir si ces garanties ont t appliques, en lespce, demanire concrte et effective et non pas thorique et illusoire, notamment eugard au grand nombre de documents informatiques et messageslectroniques saisis, ainsi lexigence renforce du respect de laconfidentialit qui sattache aux correspondances changes entre un avocatet son client.

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    107. Avant tout, la Cour note quun avocat qui travaillait auparavantpour le compte de la socit requrante (MeB.A) avait t mis en examen

    du chef de prvarication dans le cadre de lenqute pnale en cause. En cequi concerne le droulement des oprations, elle relve ce qui suit :

    - les deuxime, troisime et cinquime requrants taient prsents aumoment des oprations ;

    - un reprsen