Affaiblissement du lien social, enfermement dans les ...

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Rapport au Premier ministre Affaiblissement du lien social, enfermement dans les particularismes et intégration dans la cité Juin 1997 Haut Conseil à l’intégration La documentation Française : Affaiblissement du lien social, enfermement dans les particularismes et intégration dans la cité : rapport au premier ministre / Haut conseil à l , intégration.

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Rapport au Premier ministre

Affaiblissementdu lien social,enfermementdans lesparticularismeset intégrationdans la citéJuin 1997

Haut Conseil à l’intégration

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Rapport officielDans la même

collection :

Premierrapportdu Haut Conseil àl’intégration

Pourun modèlefrançaisd’intégration

Conditions juridiqueset culturellesd’intégration

La connaissance del’immigrationet de l’intégration

Éditions 1991 et1992

Les étrangerset l’emploi

Liensculturels etintégration

© La documentation Française

«En application dela loidu 11 mars 1957

(art . 41) et du code dela propriétéintellectuelle du 1er juillet 1992,

toute reproductionpartielle ou totaleàusagecollectif de la présente

publication eststrictement interditesansautorisationexpresse del’éditeur

Il est rappeléà cet égard quel’usageabusif et collectif dela photocopie

met en dangerl’équilibre économiquedes circuits dulivre.»

ISBN 2-11-003782-2ISSN 0981-3764

DF 5 4266-0Paris, 1997

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Compositiondu Haut Consei là l’intégration(décret du 7 février 1994et du 20 décembre 1995)

Marceau Long, président du Haut Conseil, vice-président honoraireduConseil d’État

Jean-Marie Bockel, maire de Mulhouse

Pierre Chaunu, historien

Jean-Pierre Delalande,député du Val-d’Oise, maire de Deuil-la-Barre

Christian Delorme, prêtre

Philippe Farine, ancien conseiller de Paris

Jeanne-Hélène Kaltenbach,responsable d’associations

René Vandierendonck, maire de Roubaix

Patrick Weil, chercheurau CNRS

Rapporteurs

Rémy Schwartz, rapporteur général, maître des requêtesau Conseil d’État

Éliane Chemla, maître des requêtesau Conseil d’État

Patrick Quinqueton, maître des requêtesau Conseil d’État

Nathalie Destais, inspecteur, IGAS

Secrétaire généralChristiane Ducastelle

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Liste des personnalitésauditionnéespar le Haut Consei l

M. André, responsable d’un café-musique / Élancourt

M. Anton, principal / Aulnay-sous-Bois -Victor-Hugo

Mme Body-Gendrot, chercheur

M. Boubaker, FAS

M. Braouezec, député-maire/ Saint-Denis

M. Buttazzoni, adjoint au sport / Mulhouse

Mme Cadier, directeur du conservatoire demusique de la ville deSaint-Denis

Mme Cherifi, direction des Lycées et Collèges,ministère de l’Éducationnationale

M. Dru, directeur du centrepénitentiaire de Fleury-Mérogis

Mme Duplaix, proviseur / Saint-Denis -Paul-Éluard

M. Floch, député-maire deReze, rapporteur du budget de l’administrationpénitentiaireà l’Assemblée nationale

M. Frize, compositeur

M. Gasperi, principal / Saint-Denis -Pierre-de-Geyter

M. Genestier, chercheur

M. Giubilei, animateuren cité sociale/ Fameck

M. Kedadouche, conseiller technique,ministère de l’Intégration,anciensportif professionnel

M. Lazart, principal / Saint-Priest -Colette

Melle Lepine, psychologue/ Val-d’Oise

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M. Meilhac, éducateur,maisond’arrêt de Bois-d’Arcy

M. Rioux, inspecteur/ Éducation nationale/ Seine-Saint-Denis

M. Tigoulet, directeurde la maison d’arrêt de la Santé / Paris

M. Vieillard-Baron, chercheur

Mme Vignes, directrice / Aulnay-sous-Bois -Petits-Ormes

M. Zomer, adjoint au sport / Aubervilliers

Entretiens divers et déplacementsdu Haut Conseil

M. Moreau, directeur DPM(ministère de l’Intégration etde la Ville)

M. L. Wacquant, chercheur/ Berckeley(Californie)

Responsablesde fédérationssportives

Responsables de l’Observatoire del’intégration (Alsace)

Déplacement en région lyonnaise

Déplacement à Roubaix

Visite des maisonsd’arrêt de Fleury-Mérogis(91) et Loos-les-Lille (59)

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Sommai re

Première part ieAffaiblissement du lien social ,enfermement dans lespart icular ismese t intégration dans la cité 11

In t roduc t i on 13

Chapitre IL’intégration et la vie urbaine 19De l’incivilité à l’insécurité 20La recherched’identité ou les identitésde rechange 22Des pratiquesculturelles urbaines 24De nouvelles formes demédiation 25De la régulation àla représentation 27

Chapitre IIL’intégration dans les établ issementss c o l a i r e s 31L’école est enbutte à l’ensemble desdifficultésqui touchent les jeunes 31L’école est la seule institution présentedans certains quartiers 34L’école trouve dessolutionsadaptéespour des publics spécifiques 38

Chapitre IIILes prat iques spor t i ves e t l’intégration 45Le sport, élément deconstructiond’une vie sociale 45Des effortscertains,mais ponctuels, d e sinstitutions 46De la pratique informelle au sport dans lesclubs 47Les actionsd’aide à l’intégration desjeunespar le sport 48Privilégier une pratique sportive organisée 48

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Chapitre IVLe mil ieu pénitentiaire et l’intégration 51La place dumilieu pénitentiairedans uneréflexion sur l’intégration 51Des jeunesdétenus éloignés d’unedynamiqued’intégration 52Des effortsimportantsaccomplis enprisonen termes socio-éducatifs 53Des résultatscependantcompromispar les conditions d’organisation dela détention 54Une influence finalementfaible sur les parcoursindividuels 56

Chapitre VO b s e r v a t i o n s générales 5 7Une convergence desindices de précaritééconomique et sociale 57Une perte des repères et desrèglesde la vie sociale 59Restaurerla cohésion sociale : recommandations 62Le recours à la médiation 64

C o n c l u s i o n 65

A n n e x e s 6 7

Annexe 1Avis relatif au programme nationald’intégration urbaine 69Les publics auxquelsdoit aujourd’hui s’adresserune politiqued’intégration 70

Les territoiresauxquels s’applique unepolitiqued’intégration urbaine 70Les acteurs surlesquels s’appuietoute politiqued’intégration 70La détermination desobjectifs et moyensd’une politique d’intégration 71

Annexe 2Contribution d e s membres du HCI 73Jean-MarieBockel 73

Pierre Chaunu 75Christian Delorme 76Philippe Farine 78Jeanne-Hélène Kaltenbach 79René Vandierendonck 82

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Deuxième part ieLa c o n n a i s s a n c e d el’ immigration 85

Groupe statistique duHaut Conseil à l’intégration 87

Les chiffres desannées1994 et 1995 90Le bilan de l’immigration depuis 1990 104L’observation del’immigration en France 111

Tab le d e s matières 117

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Le Haut Conseil à l’intégration présente iciles réflexions destravaux qu’il a menésdepuis novembre1995, date à laquelleil a été saisi par le Gouvernement dusujet derapport ainsilibellé : « Affaiblissementdu lien social, enfermementdans lesparticularismes etintégration dans la cité ».

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Première partie

Affaiblissementdu lien social,enfermementdans lesparticularismeset intégrationdans la cité

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Introduction

Le thème sur lequelle Gouvernement nousa invités à réfléchira orienté nos recherches dansdeux directions :- qu’est devenue l’intégration que nous avons définie,il y a sept ans,dans notre premier rapport,et précisée,en 1993, dansla synthèse de nossix premiers rapports,sous le titre ambitieux de « l’intégration à lafrançaise » ? Six ans,c’est peudans le cheminement du temps ;ce peutêtre beaucoupsi la société a changérapidement ;- l’ouverture de notre conception française se concilie-t-elle, et comment,avec des risques d’éclatement, naissant d’unlien social affaibli ? Et, dèslors, la tendance au repli sur soi, à l’enfermement des différentescomposantes dela société n’est-elle pas devenueun obstacle redoutableà l’intégration telle quenous la concevons ?

Installé le 9 mars 1990,le Haut Conseilà l’intégration recevaitdu Premier ministrela double tâche, d’une part, declarifier les conceptset de cernerla réalité des fluxmigratoires et, d’autre part, dedéfinir leprocessus d’intégrationdans uneapproche prospective.

Le Haut Conseil s’estdonc efforcé de mieuxdéfinir, notam-ment, les notionsd’étranger, d’immigréet de personne d’origineétran-gère. Il a mis en place un groupe de travail statistique comprenant desreprésentants de différentes administrations,en mesure de dégager lesdonnéesindispensablesau débat public. Dès mars 1991, dans son premierrapport annuel,le Haut Conseila pu présenter l’ensemble desstatistiquesde l’immigration, issuesde différentes sources, réactualisées à l’occasionde la publication de chaque rapport. Les travauxréalisésdans ce cadreont incontestablementparticipé à l’amélioration de la connaissance,nonseulement desflux migratoires, mais encore du processus d’intégration,et contribué ainsià l’apaisement du débat.

Cependant,la nécessité depromouvoir surce sujet un débatpublic serein est plus que jamaisavérée ; aussi l’objectif fixé,le 25 mai1990, par le Premier ministre demeure-t-il d’actualité : « Dissiper lesfantasmes qui entourentla présence des étrangersen France,en substituantaux informations lacunaires -dispersées, parfois incohérentes ou toutsimplement inexistantes -une connaissanceaussi exacte que possible des

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donnéesrelatives aux flux d’immigration,à la présence évolutive età lasituation juridique desétrangers surle sol français. » Il convient dereconnaître que d’autres travaux contribuent fortementà cette progressionde la connaissance :il en est ainsi de l’enquête MGIS (mobilitégéographique et insertion sociale)conduite par l’INEDen 1992 et desnombreuses analyses qu’elleen a tirées depuis.

Le Haut Conseil,pour sa part, s’est efforcéde cernerles traitsde ce qui a été et demeurele « modèle » français d’intégrationdepuis quenotre pays, carrefourà l’extrémité de l’Europe où se sont mêléesdepuisplus de deux cents ansde multiples populations,a fait appel à l’immi-gration pour répondreà des besoinsen hommes,en main-d’oeuvre et ensoldats. Dèsle milieu du XIX e siècle et de façondiscontinue depuis lors,Belges, Polonais, Italiens, peuples del’Est européen, puisEspagnols,Portugais,Maghrébins,Africains, Asiatiquessont venus, les unsaprès lesautres, s’établir surle sol français.Si l’on chercheà décrire lespolitiqueset les législations françaises depuis plus de centcinquante ans, un traitmajeur se dégage :la Francea toujours refuséde reconnaître desdroitscollectifs spécifiquesà des groupeset minorités. C’està chaque homme,à chaque femme qu’ellea reconnu la plénitude des droitslui permettantde prendre individuellement saplace dansla société française. Égalitaireet laïc, le modèle français reconnaîtdonc à tous lesrésidents, quelle quesoit leur nationalité, les mêmes droits etla même identitéjuridique, à laseule exception des droitsciviques qui demeurent attachés,pour lesnon-ressortissantsde l’Union européenne,à l’acquisition de la nationalitéfrançaise, encore ouverte etaisée.Chacun, dansce processus individueld’intégration, reste cependantlibre de conserveret de vivre au quotidiendes particularismes culturels.

C’est dansce cadre qu’il faut situer les recommandationsduHaut Conseil. Ainsi,il a rappelé qu’il était nécessairede supprimer, enmatièrede prestations sociales, les discriminationsrésiduelles, injustifiées,voire illégales ou inconstitutionnelles. C’est dansla même logiqued’égalité et de respect desprincipesgénéraux de notredroit, et notammentdu droit de la personne humaine,de ses libertés,de sa dignité, que sesituent les propositions successivesdu Haut Conseil. Citons,parmid’autres, le réexamen desconditions de logement des étrangers dans lesfoyers, l’amélioration de l’accès à l’emploi des populations d’origineétrangère, la remise en cause de l’enseignement des langueset culturesd’origine étrangère dans les établissementspublics d’enseignement,lesoutien aux associationsoeuvrantdirectementen faveur de l’intégration,ou les effortspour lever desobstacles injustifiésà l’expressiondu cultemusulman dansle cadre d’une société laïquequi reconnaît et assurelaliberté deconscienceet d’exercice des cultes.

Dès son premier rapport,le Haut Conseil à l’intégration avaitrelevé queles difficultés d’intégration ne se limitaient pas aux seulespopulations d’origineétrangère. D’un côté,nombreux,et c’est heureux,sont les étrangersou immigrés qui n’ont pasde problèmes d’intégrationdans la société française. De l’autre,il est des Français qui ont desproblèmes d’intégration réels. «La société française -observions-nous -

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compte ses propres exclusou pour mieux dire... ses membresen voie demarginalisation.Et c’est bien la cohabitationexplosive,en de nombreuxquartiersou cités, entre desimmigrés récentset des populations françaisesen voie de marginalisation qui constitue actuellementl’un des problèmesgraves auquel notresociété est exposée. »

Ce constatde 1991 a bien plus de force encoreen 1997. Lasituation économique nouvelle, qu’on l’analyse comme une criseprolon-gée ou commeune entrée dansune ère post-industrielle bouleversantlesconditions etla rémunérationdu travail, a conduit à la marginalisationdegroupes sociaux aux origines lesplus diverses. La problématiquede lacohésion estaujourd’hui autantéconomique et sociale queliée à l’originedes hommes. Cette originepeut êtreun facteur aggravant, maisla questionmajeure est maintenantd’intégrer ou de réintégrer dansla vie sociale despersonnes sanstravail et souvent aux faibles ressources,marquées parlapaupérisation etla marginalisation. L’affaiblissement des liens sociauxtraditionnels laisse des hommes et des femmes endéshérence. Ils seretrouvent seuls, isolés,confrontésà leurs problèmes.Le travail, l’étude,l’effort et le mérite ne garantissentplus l’ascension sociale.

De plus, l’arrivée récentede populations immigrées venuesdezones ruralesde paysdu tiers-monde, peu adaptéesau modede vie urbaind’une société développée,a certainementrendu plus difficile le fonction-nement des mécanismes traditionnels d’intégration.Le risque apparaît quenos grands principesrelatifs à l’intégration, et à ce juste équilibreentreidentités individuelles et culture commune, ne soientdiscrédités paruntel contexte. Ils sont,à vrai dire, confrontésà deux tendances oudeuxtentations : l’individualismepousséjusqu’à l’anomie, d’unepart, le replisur les identitéscommunautaires, d’autre part.

Ce repli peut être une démarcherassurantepour les individusconcernés. Les pouvoirs publics eux-mêmes pourraientêtre tentésde« jouer cettecarte » afin derechercherà court terme un certain contrôledes comportements parl’amorce d’un dialogue avec des interlocuteursqui, apparemmentinfluents, leur sembleraient pouvoir servir de relais.

Des regroupements entre personnes d’unemême communautéont, certes, toujoursexisté en France et n’ont jamais empêché lesintéressés de s’intégrer dansla société. Aucontraire, ilsleur ont permis,par la constitution desolidarités, d’y trouverleur place. Associations dePolonais, de Portugais, d’Arméniens ontdéveloppé une intense vieculturelle et sociale qui dure encore. Leur participationà des communau-tés vivantes ne lesa pas entraînés,jusqu’ici, à un repli sur un groupefermé. Et même si la Francea acceptéla gestion collectivede certainesimmigrations,en liaison avec lesÉtats d’origine, elle n’a jamais acceptéun traitement « communautariste » des problèmes, c’est-à-direune ré-ponse politiqueet juridique modulée selon des « critèresethniques ».

L’autre voie serait fort hasardeuse. Les fondements incertainsde l’autorité et dela légitimité de relaiscommunautaires,la contrepartiede leur influence, leslimites insaisissables d’une approche discriminatoiredes politiques économiques ou sociales,la perception imprévisible de

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telles exceptions parle reste de la population françaiseconstituentautant de raisons qui invitentà la plus grandeprudence faceà toutetentation communautariste.À cet égard, la pression qui s’exerce enEurope pour une reconnaissancelarge et formalisée desdroits desminorités menaceles principes français. Le HautConseil considèrequ’il est plus que jamaisnécessaire et opportun d’y résister. Unetelleapproche des politiquesapparaît de surcroît en Franceparticulièrementinadaptée à la solution deproblèmes qui dépassent ungroupe ethniqueou une zone géographique. C’est pourquoile « modèle » républicaind’intégration, même s’il est sans douteplus difficile aujourd’hui àmettre enoeuvre,reste celui qui peut assurerla nécessaire cohésion denotre société. Devantl’affaiblissement dulien social et la tendanceàun enfermementdans lesparticularismes,il faut de nouveau poserlaquestion de l’intégration dansla cité.

Nous avons été conduits,dans l’élaboration de cerapport,à prêter unegrande attentionà la situation des jeunes, en particulierde ceux issus del’immigration. Ils sont, en effet, fortement affectéspar la moindre cohésion sociale et parla déstructuration desfamilles.De nombreux jeunes ouadolescents se retrouventdésemparés etsansrepère. Quepourra fairedemain la société si elle laissesansréagir cesgénérations livréesà elles-mêmes ? Lesresponsables locaux sontfréquemment confrontés à detrès jeunes délinquantsdont le compor-tement empoisonnela vie quotidienne des quartiers etlaisse leshabitantssans réponse.

Le HautConseil a décidéde circonscrireson champ d’analyse.Il a privilégié les lieux où se jouait l’intégrationau quotidien - l’institutionscolaire,le sport,la cité - etn’a pas vouluoublier ce milieu fort spécifiquequ’est le monde pénitentiaire.La question, pourtant déterminante, del’emploi n’a pas ététraitée parce qu’ellea déjà fait l’objet, en 1993, denotre rapportprécédent : « Les étrangerset l’emploi ». Elle estsi impor-tante et si complexe qu’ellemériterait de fairel’objet d’une nouvelleétudespécifique, notamment surl’accès des jeunesau marché dutravail.

Le Haut Conseil a entendu approcher la question de lareconstruction du lien socialà partir des lieux où elle sejouaitau quotidien. Lesenquêtes et lesauditions se rapportentà deszones très urbanisées de la régionparisienne (Saint-Denis,Aubervilliers, Bondy, Aulnay-sous-Bois), de la région lyon-naise et de l’agglomération deLille-Roubaix-Tourcoing.

Ce rapport neprétend donc pas à l’exhaustivité, autant enraison de la définition de son champ d’analyse que deszonesretenues.Il tente simplement une approche del’intégration desjeunes dans leszones urbaines où ilsrésident nombreux.

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Ainsi avons-nousessayéd’apporterà la difficile question quele Gouvernement nousa soumise uneréponse qui ne soit pas fondéeseulement sur des conceptsgénéraux, mais qui tiresa substance de plusd’une quarantaine devisites, d’auditions, d’entretiens avec des éluslocaux, instituteurs, professeurs, chefsd’établissements scolaires, respon-sables associatifs, responsables administratifsou socio-éducatifs desétablissements pénitentiaires,et autres acteurs locaux de nos villes.

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Chapitre I

L’intégrationet la vie urbaine

L’urbanisation est unphénomène ancien.En France, deuxtemps forts,portés parla croissanceéconomique et démographique, ontété l’occasion desdéplacements de populationsqui l’ont alimentée :d’unepart, la période 1850-1880, et d’autrepart, la période 1950-1970. Lesdifficultés rencontrées aujourd’hui dansla vie urbainene sont doncqu’unephase dansun processuslong.

L’urbanisation massivede l’après-guerre, avecson cortègede « grandsensembles »a posé, dès les annéessoixante, desproblèmestels qu’un néologisme a étécréé pour les caractériser :la « sarcellite »,en référence auxquartiers entièrement construitsex nihilo sur lacommunede Sarcelles. Ces difficultés ont été accentuéespar un certainnombre de déséquilibres, comme les lacunes dans l’organisation destransports publics,la persistance,voire l’accroissement, des tensionssur le logement ou l’absenced’activité économiqueautre que celle lesgrandes surfaces commerciales. Lacrise économiques’est traduite parl’appauvrissement de ces quartiers oùrésident denombreuses person-nes et familles touchées parle chômage.Enfin, la décentralisationaconduit à la fois à une multiplication des niveauxde décision età uncertain désengagement de l’Etat. C’est dans cecontexte que larecherche de solutionsa progressivement conduità la lente élaborationd’une politique des villes.

L’articulation entre la politique des villes et la politiqued’intégration des populations immigrées est complexe. Conçued’abordcomme une approche novatriceet expérimentale, dansle cadre desprocédures « habitatet vie sociale », puis comme la combinaison depolitiques spécifiques dansla prise en charge globale de populationssouffrant de handicaps, avec le «développement social desquartiers », lapolitique des villes a progressivementnécessitéun renforcement delacoordinationau niveau central, avecla création d’un ministèrede la Villeen 1990.

Depuis, la politique de la ville s’est constammentdévelop-pée. LePacte de relancepour la ville, présenté le 18 janvier 1996,àMarseille, par le Premier ministre, regroupe un ensemble demesuresvenant compléter lesdispositifs et lesprocédures précédemment misen place.

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Le Haut Conseil, quiavait été saisi d’une demanded’avis(*)

relatif au projet dePacte de relance,avait noté,à l’époque, lesapprochesdifférentes qui inspiraient politique d’intégration et politiquede la ville,alors que dans les territoiresd’application de l’une sont présentesennombre des populations auxquelles s’adressel’autre.

Les divers aspects dela politique de la ville devraient enprincipe créer lesconditions del’intégration. Mais cette dynamique estcontrariée par des facteurs socio-économiques défavorables.La présence,dans les quartierspériphériques, d’une populationjeune importante,notammentissue del’immigration, souvent privée detoute perspective deprogression personnelle, accentue les incompréhensionset multiplie lestensionsavecune population autochtone, vieillissante, etpeu satisfaite deses conditionsde vie.

De l’incivilité à l’insécurité

La perception des problèmes de sécurité est une desquestionsmajeures dela nouvelle vie urbaine.Les statistiques del’évolution de ladélinquance ne rendent, à cetégard, pascompte dela manière dontcelle-ciest perçue. En effet, si les atteintes aux biens sontsensiblementenaugmentation ces dix dernièresannées,ce n’est pasle cas des violencesà l’encontre des personnes.

Dès lors, on est conduità se demanderd’où vient cesentiment diffusd’insécurité, alors même quela Francereste, dans lemonde, un despays où la criminalité est très faible. Sans doutelamultiplication des incivilités, la régression durespect des autres,larelativisation de la frontière entre le « permis » et « l’interdit » ycontribuent-elles largement.

L’une des traductionslesplus fréquentes dece sentiment de peur,décrit dans les récits deshabitants, est celle des jeunes, souvent d’origineétrangère,qui, en bas d’une cage d’escalier, semblent menacerles gensplusâgés, par des propos ou des gestesqui relèventplus de l’incivilité que deladélinquance.Est-ceun problèmede relations entre les générations, ou -etce peut être plus grave - d’agressivitéliée à leur mal-êtrepar rapport à lacité dansson ensembleet aux gensqui les entourent ?

Sans doutele rajeunissement trèssensible des auteursd’actesviolents accentue-t-ilce sentiment d’inquiétude.Quelques signes,quicaractérisent nettement cette tendance, doiventêtre prisau sérieux. Les casde racket dans les établissements scolaireset à leurs portes nesont pasrares. Desaccidents ou desactes de violence mettanten cause desadolescentsarmés sont les signes de dérapagessérieux dansle contrôle de

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la commercialisationet la possession desarmes à feu. L’utilisation desmineurs, qui nerisquent pas de lourdescondamnations,dans le trafic dedrogue, serépand. D’une façon générale,on observe depuis vingt-cinqans, une lente augmentation dela proportion des mineurs parmi lespersonnes misesen causepour descrimes ou délits. Si les atteintes auxbiens dont ils serendentcoupables onttendanceà diminuer un peu, lesatteintes aux personnes augmentent, en oppositionavec l’évolutionglobaleconstatée par les statistiques. Plusieurs principaux decollèges ontfait partau Haut Conseil à l’intégration de leur soucien la matière, et de leuraction résoluepour réaffirmer la nécessité du respect dela règle commune.Des actions spécifiques, alliant l’information,la préventionet la répres-sion, sont, en effet,nécessaires faceà ces comportements de jeunesadolescents.

Paul Thibaud, dansun petit livre intitulé Et maintenant, s’essaieà une analyseen profondeur de l’insécuritécontemporaine : «Les menacespour la sécurité changent selon les régimeset les époques. L’insécuritépeutêtre le fait de la tyrannie [...], elle peut être aussi produite par l’anomie.C’est cetteinsécurité que l’on invoquele plus souvent denos jours. Maispour être la plus spectaculaire, sans douten’est-elle pas la plus profondeetla plus répandue. D’une certaine manière, c’estla société libérale elle-mêmequi est insécurisante, à causedu désétablissement des instances métaphysi-ques qui régulaient la société. Tocquevillel’a vu, la société démocratique,c’est la solitude parce que la mobilité sociale et la multiplication desinnovations rompent le lien de similitude entre lesgénérations,et qu’ildevient difficile de s’identifierà ses aïeuxet à ses enfants.[...] Qui plus est,cette intensification d’une temporalité que nous n’avonsplus guère demoyens dedominerfractionne les biographies, précarise lesstatuts..., imposeà beaucoup derefaire et de reprendre leurvie plusieursfois. » L’auteur penseque la politique a été le moyen principal de contrôler collectivement cettemodification de la perception du temps,à travers des notions commeleprogramme, le projet, la promesse,le progrès, la vision du monde. laconception de lasociété.Et il considère que «la crise contemporaine, plussensibleen France qu’ailleurs,tient à ce que la politique nepermet pluscettemaîtrise imaginaire du temps ».

Il est donc probable quede simples mesures techniquesneferont pas reculerle sentiment d’insécurité. L’Etata, d’ailleurs, réguliè-rement oscillé entre despolitiques spécifiques touchant lesquartiersdifficiles et des politiques globales delutte contre l’insécurité urbaine.Les politiques deprévention dela délinquance, depuisleur lancementen1982, traduisent cette tension.Leur intégration progressive dans lespolitiques dela ville est sans doutele signe qu’il est difficile de fairereculer ce sentiment.La portée desréorganisationsen cours dansla policeet la gendarmeriene doit pas être négligée.Il est probable que,si laprésence visible des forces de police que permetl’îlotage devait diminuerau profit d’un regroupement dans des commissariats ou desunités de plusgrandeéchelle, cela serait ressenti parla population commeun recul. Ya-t-il une certainecorrélation entre l’utilisationcroissante des forces del’ordre pour assurerl’ordre public et leur moindre implicationpour assurerla paix civile ?

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Mais le sentimentd’insécurité est, onl’a vu, bien autre choseque la simple traductionde la montéede la délinquance.L’affaiblissementdu lien social, qui est àl’origine de ce sentiment, traduitla recherche,par des personnes appartenantà des couches socialesde plus en plusfragmentées, d’une identité collective qu’ellesne trouvent plus danslanation. Cetteidentité peut s’affirmer contre d’autres personnes,soit surle mode duregroupementen bande et de l’agression verbale,soit sur lemode de la discrimination.

La recherche d’identitéou les identités de rechange

La discrimination à l’encontre des jeunes d’origine étrangère estune réalité de notre société.S’il ne s’agit pas de l’exagérer - les pratiquesvéritablement racistes restentle fait d’une minorité depersonnes - ,il ne fautpasnon plus la minimiser : l’emploi et le logement, outreles lieux de loisirs,sont les terrains d’une discrimination réelle.

Discriminations dans les entrepr ises

À l’entrée dans lesentreprises, beaucoup de formateurscons-tatent que les rares étudiantspréparantun baccalauréat professionnelouun brevet de technicien supérieur quine trouvent pasde lieu de stagesont toujours des jeunes d’origineétrangère.Plus simplement, lesagentsde l’ANPE et les responsables des entreprises de travail temporaire sevoient régulièrement proposer desoffres d’emploi discriminatoires,comme l’a souligné le Haut Conseil à l’intégration dansson rapport demars 1993.Dans les petites annonces, descodessont employéspour lesignifier et parfois même, commele FAS l’a observé, des rusessontutilisées aux mêmesfins, comme, en Alsace, l’obligation de parlerledialecte pour des métiersqui ne le nécessitent pas. Ces indicessontpréoccupants. Il faut préciserque, en cette matière, la discrimination netouche pas seulement les personnesétrangères, mais aussicelles qui sontou paraissentêtre d’origine étrangère, mêmesi elles sont de nationalitéfrançaise.

Discrimination dans l’accès au logement

L’accès au logement, dansle secteurprivé, fait aussi l’objetde tellespratiques. Les exemples de logements qui se retrouventsubite-ment occupésalors qu’un jeune d’origineétrangère, qui parleau téléphonesans accent, seprésentephysiquementau propriétaire ne sont pasrares.Mais la discriminationpeut aussi résulter dela simple affirmationselonlaquelle la présence decertaines populations feraitautomatiquement

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« perdre dela valeur » à un logement. Même desbailleurs, publics ouprivés, qui n’ont pasd’a priori dans ce domaine, setrouvent parfoisconfrontésà des choix presqu’impossibles lorsqu’ils cherchentà concilierl’accès de tous au logement etla paix civile, ou simplementle calme dansun immeuble d’habitation.

Face à de telles pratiques, il est probable quele travaild’explication - etla conviction - sont essentielles.Certesla sanction doitêtre la réponse aux cas les pluspatents, maisil faut d’abord comprendreles racines de tels comportements.Comme le sentiment d’insécurité,ladiscrimination est à la fois l’origine et l’une des conséquences del’inquiétude d’une partie croissantede la population quant à sa propreidentité. Ce sont despeurs qui sontà l’oeuvre.

Le repli sur d e s particularismesL’enfermement de certains jeunesdans leur propre particula-

risme contribueà nourrir cespratiques d’exclusion, etprobablement s’ennourrit aussi. Lephénomène des bandestraduit sans doutela recherche,par les jeunes de famillesdéracinées,à travers l’affirmation des «identitésde quartier »,d’un substitutà un avenir devenuopaque. Les flambées deviolence que connaissent,à intervalles réguliers,certains quartiers,sontle signe d’un besoin d’entendreparler desoi.

À l’extrême, cetterecherche de l’affirmation d’uneidentité està l’origine de la construction de ce que l’on pourrait appeler des« identités de rechange», c’est-à-dire d’identités artificielles destinéesàcombler un doublevide, celui dela citoyenneté et celui des convictionspersonnelles,par une identité artificiellementrecréée. C’est sans douteune raison du développement des sectes, qui traduitla recherche decertitudes dans un climat d’insécurité et regroupe deplus en plus depersonnes ensituation personnelleou professionnelle difficile, quelles quesoient leurs origines etleur nationalité. C’est aussile cas de l’islam radicalqui, à travers la revendication d’une identité contrele sentiment de rejetou d’humiliation, recrée pour les plus jeunes, d’origine maghrébine outurque, un islam qui n’a pas de racines historiques et entred’ailleurssouventen conflit avec l’islam quepratiquent les parents.D’un autrecôté,certainsde ceux qui s’inquiètentde la diversité de la France se cherchentune identité qui leurserve de défense, et croientla trouver en identifiantla nation à une ethnie : c’estla revendication d’une Francequi n’a jamaisexisté, par des personnes qui,privées parfois par la crise de leur utilitésociale, ont l’impressiond’être dépossédées de leuridentité et tententd’enretrouver une.

Cette identification artificielle s’affirme notamment par destentatives d’appropriation deslieux publics. L’objectif est de fairereconnaîtrecette nouvelleidentité dans l’espace urbain. Sans doute,unepartie des mouvementsorganisés pour inciterau port du « foulard » parles jeunes filles d’originemaghrébine ou turqueà l’école s’expliquent-ilsde cettefaçon. De leur côté, lestenants d’uneconception ethnique delanation, commeceux qui attisent la peur de « l’invasion », traduisent bien

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la même inquiétude touchantau contrôle de l’espace. De même,larevendication de lieux de prière par lesmusulmans est légitime, maislorsque lestenants d’un islam radical tentent d’en imposerla présencedans des centres sociaux, par exemple, commecertains témoignagesdevantle Haut Conseilà l’intégration en font état, on retrouve le mêmeressort.

Des pratiques culturelles urbaines

La culture est sans doutel’un des domaines où le liendialectique, et pourtantnécessaire, entre identitéet appartenanceà lacollectivité est mis en évidence. La ville est à la fois le lieu dudéveloppement des cultures spécifiques, et celui dela recherche d’uneculture pour tous.Le foisonnement des paraboles pourla réception dechaînes de télévision estintéressant : s’ymêlent la recherche d’uneculture d’origine, réelle oureconstruite,à travers la réception de chaînesdu paysd’origine de la famille, avec, dansle même temps, la possibilitéd’accéderà des imagesqui véhiculent un modèle culturel, à la fois pauvreet universel, celui des séries téléviséesqui, quel que soit leur pays defabrication - souvent lesÉtats-Unis - mettent en scène le même mondeirréel de gens fortunés et oisifs, offert en spectaclepour compenserlemal de vivre. Notons quece type de spectacle,aussi stéréotypésoit-il,n’en comporte pas moins l’avantage de parlerà tous le même langage.

Dans les lieux de diffusion culturelle, force est deconstaterque les publics ont tendanceà s’exclure les uns les autres.Ainsi, il estrare que lesamateurs de genresmusicaux différents fréquententun mêmelieu. Les maisons dela culture ont fait l’objet d’une appropriation de faitpar certainessphères intellectuelles.Si l’expérience decertains «cafésmusique » estintéressante, ils n’échappent pourtant pasau dilemme : oubien ils accueillentun public marginal qui risque de s’enfermer dans uneculture pauvreet isolée, ou bien ils élargissent leuroffre culturelle etvoient s’éloigner les plus défavorisés.

Outil relativement souple, largementaccessible,d’un coûtmodéré, labibliothèque est unlieu très apprécié. Lesbibliothèques dequartier ou de commune, serévèlent, en effet très favorables aux échangesentre générations,entre familles, et au sein des familles. L’ouvertureculturelle qu’elles symbolisenty est réelle, sousréserve d’une animationcompétenteet imaginative dulieu. Certainesrèglesy sont aussiaffirmées,tel le respect de l’autre, de son travailet du silence. Enfin, elles ont unebonne pratique des actions communesavec d’autres institutions etcontribuent à de nombreuses animations artistiques(théâtrales, cinémato-graphiques...).

Tenter la diffusion de la culture classique par des institutionstraditionnellesauprès d’un public défavoriséet majoritairement d’origineétrangèreconstitue uneautre approche del’intégration sociale.Ainsi en

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va-t-il d’un conservatoire de musique dela région parisienne,qui s’efforcede proposer des enseignementsà caractèreclassique touten veillant, parla procédure d’admission desélèves, à faciliter la présence des plusdéfavorisés. Il se heurte cependant, dans cetteambition, à plusieursdifficultés : le faible soutien culturel des familles, les horairestardifséprouvants pour les enfants, ou la localisation géographiqueen centre-ville, qui freine la participation d’enfants des quartierspériphériques.Enfin, le coût, pour une commune, d’un teléquipement limite sensible-ment sondéveloppementet ses possibilitésde coopération avecles écoleset collèges dela localité.

Encourager les échanges entre pratiques culturelles,élargirainsi l’horizon des auteurset des spectateurs, ne va cependant pas toujoursde soi. Il ne faut pourtant pasrenoncerà faire évoluer versl’ouverturedes cultures qui s’enfermentdans un mode d’expression exclusif et,souvent, de ce fait,limité. La « fête dela musique » est, par sonsuccèsrenouvelé dans beaucoupde villes et de quartiers, une manifestationintéressante de convivialitéet de rapprochement de tousceux que lamusique passionne,même s’il s’agit, comme bien souvent, plus dejuxtaposition de manifestations musicalesbien typées qued’ouvertureetd’initiation à des styles, des harmoniesou des rythmes différents. Desévénementsculturels forts, dans unelocalité, peuventêtre desoccasionsde rencontre entre personnes quin’ont pas lesmêmes goûtsartistiquesetpermettre de rassembler,fût-ce pour peu de temps, desénergies autourd’un projet commun.

La construction d’un « langagecommun », qu’il s’agisse demodes d’expression culturelle ou de lalangue réellementparlée, entre lespersonnes qui vivent dansun même lieu, est sans doutel’un des plusrudes défisà relever pour l’intégration.

De nouvelles formes demédiation

Les fonctions demédiateur connaissent depuis peuun déve-loppement rapide.Effet de mode ou réponseà un véritable besoin ?Leurefficacité paraît souventdémontrer la seconde hypothèse. Ladéfinitiondu concept n’estcependant pasaisée, tant cesfonctions sont diverses :médiateurs interculturels désignés parcertaines communes,dont lamission, parfois centréeà l’origine sur la liaison entre écoleset familles,a ensuite étéélargie aux relations entrecultures ainsi qu’aux relationsentre lesadministrationset leurs usagers ; médiateursdans les transportsen communou auprès d’officesHLM ; médiateursde quartiers,chargésde désamorcer les tensions, et de suivreau plus près l’évolution desrelations sociales sur cessecteurs ; femmesrelais : leur mission,claire-ment définie, estd’aider à l’intégration socialeet culturelle des popula-tions défavorisées,en particulier des populations d’origine étrangère.Apparues ily a quinze ansà partir d’initiatives du FAS, elles sontenviron

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300 femmes relais surtout le territoire, quiagissentau sein d’unecentained’associations. Cesmédiatrices sont souvent des femmes immigréesvenues en Franceà l’âge adulte, elles-mêmes intégrées etsouventbilingues. Sans se substituer aux travailleurssociaux, elles peuventpermettre l’évolution, voirela solution de multiples difficultés d’ordrerelationnel, familial, scolaireou administratif. Dans le même esprit, leministre de l’Éducation nationalea mandaté deux médiatricesdans lesaffairesde port du foulard à l’école parde jeunes musulmanes. Le travaild’écoute qu’elles effectuent est importantvis-à-vis des différentsprota-gonistes : lesjeunes filles concernées, leurs (grands) frères, leursparents,les enseignants, les chefsd’établissement, les imams.Il permet aussi demesurer les influencesdont lesjeunes filles concernées sont l’objet etleur margede manoeuvreréelle. L’intervention des médiatricesa souventpermis, parle dialogue et la persuasion,de trouver une solution.

Les figures du médiateursont infiniment variées, conformé-mentà leur vocation qui estd’apporterun discours, une attitude,un modede traitement desproblèmes adaptés auxsituations considérées etenmarge dufonctionnement traditionnel des institutions.

La plupart du temps, onreconnaît leur utilité, qu’ils’agissede présenter et d’expliquercertains cas particuliers aux administrations,de les informerprécisément et concrètement desituationslocales, ou depromouvoir un dialogue entre différentesparties aux logiques opposées.

Ces fonctionsn’en soulèvent pas moinsdiverses questions.Faut-il les pérenniserou au contraire les concevoirtoujours commeponctuelles dansle temps et l’espace ? L’intervention des médiateurspeut-elle modifierla conception qu’ont les administrationset les servicespublics de leur missionà l’égard du public, notamment quantau dialogueet à la pédagogie desexplications ? L’effetéventuel sera-t-il destimuler,ou de retarder,la réflexion desadministrationsà cet égard ?Comments’assurer de la légitimité des médiateurs,en termes, notamment, deneutralité personnelleet d’adhésion aux valeurs de notre république ? Ouencore, dans quelle mesure le médiateur désigné ou agréé par tellecollectivité publique est-il considérécomme un représentant de celle-ciauprès de sesinterlocuteurs ? Enfin, commentéviter les risques évidentsde clientélisme ? Comment empêcher quela médiation serve surtoutlanotoriété individuelledu médiateur ?

Autant de questions qui soulignent combienil est nécessaire,pour l’État et les autres collectivités publiques, d’être prudent danslapromotion des fonctions demédiateur, et vigilant dans le suivi despersonnes qui les exercent.

À travers la diversité des situations,demeurent quelquesconditions essentiellesqui doivent être respectéespour que cesfonctionsaient uneréelle utilité sociale.Afin de préserver leur capacitéd’adapta-tion, il faut se garder de transformer lesmédiateursen institution. Lesadministrationsne doivent pas abandonnerle souci d’une relation directeavec les usagers. Il est important de sélectionner des médiateursdont leprofil, dans chaque situation, soitadapté, ce quiexclut l’idée d’une liste

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générale, locale ou nationale, arrêtée unefois pour toutes. L’autoritédélégantene doit pas livrerà eux-mêmes les médiateursqu’elle a nomméset doit exercerun suivi réel de leur intervention.Il y a lieu, par ailleurs,de veiller au respect des principes républicains,en particulier la laïcité etl’indivisibilité de la nation,pour queles médiateursne sevoient pas érigésen représentantsde fait de communautés établies,nous engageant ainsidansun processus d’institutionnalisation toutà fait dangereux. Enfin, desenseignements doiventêtre tirés, enretour, des problèmes misen évidencepar les médiateurs quantau fonctionnement, à l’organisation, et auxmissions des administrationset des services publics,pour que ne secrééepas, en marge du droit commun, un ensembleincertain de principesdistincts applicablesà certaines personnesou à certains territoires.

Le code dutravail avait été amené, de longuedate, à définirdes modes de résolution de conflits sociaux nés desconditions de travail.Le détour par ces définitions peut être utilepour mieux cerner lesconcepts, notammentceux de conciliation etde médiation. Le livre V ducode décrit trois types de procédures.La conciliation consisteà mettreen présence les partiesau conflit, en présenced’un tiers, pour lesamenerà trouver les conditionsd’un compromis possible.La médiation, en casd’échec dela conciliation, estexercée par une autorité ou unepersonneacceptée par les deux parties, chargée d’écouter ce que celles-ci ontàdire quant aux termes du conflit et de faire des propositions desolution.L’arbitrage, en cas d’échec dela médiation, consisteà faire trancher leconflit par un arbitre, qui prononce une sentence arbitrale. Cette dernièrefonction est, dans les litigeset les difficultés dela vie quotidienne,lerôle des autoritéspubliques qui ne sauraient s’ydérober.La médiation,institutionnelle ou nonau sens courant du terme, oscille poursa part entrele rôle de conciliation et celui de la stricte médiation juridique. Encorefaut-il dans tous les cas,comme l’expérience des médiateursdans l’affairedes « sans-papiers » l’a montré, quele médiateur se soitau préalablefaitaccepter par lesdeux parties.

Sans céder aux modes,il est probable quela vie urbained’aujourd’hui, qui a fait disparaître un certain nombrede médiateurs« naturels » - ici, l’instituteur du village / secrétaire de mairie, là,un ancienparticulièrement respecté, ailleurs un ministre duculte - setrouve devantla nécessité d’enretrouver d’autres. C’est pourquoi ces expériences doiventêtre suivies avec attention.En fin de compte,la médiation nepeut jouerqu’un rôle de régulationet les institutions doiventconserverla place quileur revient, et assurerl’unicité des principesappliquéssur l’ensemble duterritoire.

De la régulation à la représentation

Si la multiplicité des types de conciliation et médiationcontribue à assurer une sorte derégulation souple de différends qui

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peuvents’élever entreacteurs et groupes sociaux dansla vie quotidienne,ne faut-il pas allerplus loin et assurerà certains de ces acteurs,au moins,une représentationofficielle dans les institutions ?

Cette dernière considérationestprimordiale.Elle dépassela seulequestion des médiateurs, et est applicableà l’ensemble des réponsespubliques aux problèmes sociaux. Grandeest aujourd’hui la tentation d’unesegmentation des dispositifsde réponseselon lespublics ou les territoires.Or celle-ci est risquée quandl’unité - ou le sentimentd’unité - de la nations’affaiblit, quand les identités se recomposent autour de références restricti-ves, comme le quartier, l’ethnie, l’âge,l’appartenancereligieuse,qui isolentles groupeshumains les uns des autresencore plus sûrement qu’ellesnerassemblent les individus. Aussi est-il important d’éviterle cloisonnementdes politiqueset la tentation d’approches par tropdiscriminantes.Il s’agitclairement de limiterle nombre des solutions spécifiques destinéesà tellecatégorie dela population, pour concevoir plus souvent,au contraire, desprogrammes pour tous, des offresgénérales,susceptibles de rendre auxpopulations intéresséesune unité qui dépasse leurs identités,tout en veillantà la participationà ces programmes des populations défavorisées, fragiles ouisolées.

Il importe aussi de ne pastout attendre des agents de servicespublics, surtout les travailleurs sociaux, ou descadres bénévoles desassociations. Lesdifficultés qu’ils rencontrentet leur mobilisation conti-nue se conjuguent parfoisà un manque de soutien et de moyens faisantnaître un début delassitude et descepticisme.En outre, imperceptible-ment, cesont ces cadres intermédiaires qui peuventen arriver à exprimerprogressivement les besoins et les attentes des gens,en lieu et place deceux-ci, avec lesmeilleures intentions :aussi est-il nécessaired’aider lesintéressésà dire eux-mêmes cequ’ils attendent sans transiter par cesintermédiaires.

L’hypothèse favorable seraitqu’un sursaut démocratique delapopulation vienne appuyer etcompléter le travail desinstitutions. On peuten trouver quelques exemples. Certainesinitiatives destinéesà répondreaux tensionset craintes qui traversentla population peuvent ainsinourrirdes liens sociauxet de citoyennetéforts. Le Haut Conseil à l’intégrationa observé, dans l’agglomération lyonnaise, deux initiatives,qui neconstituent en rien des exemples, maisplutôt des illustrations d’unerecherche quia lieu dans denombreusesvilles.

La première concerneun quartier périphérique de Lyon(« LaDuchère »),construit au début des années1960,initialement destiné auxfamilles mal logées ducentre-ville, mais où ont étéaccueillis, en fait, denombreux rapatriés d’Algérie, puis des familles étrangères,majoritaire-ment maghrébines.À l’occasion d’opérations de réhabilitation de loge-ments menéesà partir de 1986, des habitants de cequartier ont d’abordconstitué, puispérennisé,un « groupe detravail interquartiers ».Composéd’habitants, d’agents d’immeuble, dereprésentants d’associations, detravailleurs sociaux, de conseillersmunicipaux et de chefs de projetrelevant de la politique de la ville, ce groupe assurel’indispensablecoordinationentre les multiples acteurs sociaux dansdiverses circonstan-

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ces, par exemplepour l’organisation des vacances,et s’efforce d’apporterdes réponses aux besoins qu’ilidentifie. La participation,à cet effet, deshabitants et agents d’immeubleapparaîtessentielle,même si, malgrélavolonté desinitiateurs,elle n’est pasactuellementla plus facile.

La seconde,dans une commune proche de Lyon, Saint-Fons,née du découpage dela ville de Vénissieux au moment de l’industriali-sation des bordsdu Rhône, est aussi intéressanteà observer. Ily résideune population aux revenusparmi les plus faibles de l’agglomérationlyonnaise,très touchée par lesrestructurations industrielles locales, encorejeune, etissueen majorité de l’immigration. L’engagementde longue datede la municipalité en matière d’éducationet de culture, son attachementaux principesrépublicains etnotammentà celui de laïcité, viennent d’êtrecomplétés par une expériencerécente deconseils de quartier. Tenusselonun rythme trimestriel, ces conseils de quartier offrent deslieux d’échangesentre habitantset élus, dans lesquelss’expriment ouvertement les peurs,les volontés et les colères deshabitants. Ce dialogue direct estjugé utile,et ce d’autant plus que les conseilssont relayés,entre deux sessions, pardes groupements d’habitants. Ils permettentainsi d’aplanir nombre deproblèmes liés à la vie collective, aux relations de voisinage, ouàl’utilisation d’espacespublics, avecla participation des habitants.

L’expérience des structures de quartiers est anciennedans lavie municipale française. Ellea évolué dela fonction de simple relais del’action municipale, voire du parti politique au pouvoir dans certainesvilles de l’après-guerre,jusqu’à la recherche d’une formede démocratielocale décentralisée, malheureusement souventlimitée aux couches socia-les intellectuelles et militantes. Lesautorités locales ont recherché denouvelles méthodes pour mieuxremplir leur rôle fondamentalde garantde la cohésion dela population dont elles sont responsables, lorsque lespolitiques de développement social des quartiers, puisla politique de laville, ont accentué le besoin d’interlocuteurs locaux. Ces formes demobilisation - dont l’existence et l’utilité ne dépendent pas du seulvolontarisme des pouvoirspublics - sont précieuseset constructives. Ellessont susceptibles decompléter les réponses institutionnelles misesenoeuvre, qu’elles soient dedroit commun, ouspécifiquement destinéesàcertains publicsou certaines situations. Encore faut-il soulignercombienles groupes d’interlocuteurssont mouvantset leur mobilisation fragile.Ledialogueentre euxet les institutions municipalesnécessite, dela part deces dernières, souplesseet capacité d’adaptation. L’expérimentationsociale estutile mais reste toujoursà renouveler.

D’autres tentatives ontvisé à l’expressionet la représentationde la population d’origineétrangère. L’élection deconseils consultatifsdes populationsétrangères dans certaineslocalités avait pourobjectif dedonner au conseil municipal, représentant lescitoyens de nationalitéfrançaise, le point de vue de représentants dela population étrangère.Mais cesexpériencessont restées rares et ontrencontré deslimites, tantil est difficile de fractionnerla citoyenneté. Parmi les villesà fortepopulation d’origineétrangère,certainesmunicipalités ont plutôt cherché,récemment, defaçon volontariste,à faire participer à la liste, et donc au

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conseil lui-même, desconseillers municipaux issus del’immigration,ayant acquisla nationalité française. Ailleurs,une étape préalableconsisteà consulter des « conseilsde jeunes habitants » qui,pour des raisonsstrictement démographiques, setrouvent largement constituées dejeunesissus des populationsimmigrées. L’objectif d’intégration rejoint ainsiledynamismede la démocratielocale.

D’une façon générale, lesexpériencesde diversification etd’enrichissementde cette démocratiene doivent pas affaiblirla légitimitédu conseil municipal,issu du suffrage universel. Ici, comme sur chacundes terrainsétudiés,c’est en conservantcomme souci central, à traverstoutes les adaptations nécessaires,la mise en oeuvre,partout, des règlesapplicablesà tous, que peutle mieux seconcevoir l’intégration.

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Chapitre II

L’intégration dans lesétablissements scolaires

L’école est en butte à l’ensembled e s difficultés qui touchentles j eunes

Évoquer globalement la vie des établissementsscolairesexposesansdoute à être trèsschématique : des différencesimportantesséparent la réalité desétablissements selon leur niveau et leurlocali-sation. Maisil ressort de l’ensemble des auditionsauxquellesa procédéle Haut Conseil quelques évolutionsconvergentes. Elles illustrent dansun même mouvement l’affaiblissementdu lien social - notammentlaprogression dela violence quotidienneou les formesde développementde l’absentéisme - etl’enfermement dans lesparticularismes - etnotamment l’affirmation designes distinctifs d’ordre religieux,ou ledétournement parcertains parents desmesures imposées parla cartescolaire.

Des difficultés naissent de l’oublide règles élémentaires...

Quelques constats sont faits par beaucoupde chefs d’éta-blissement ausujet desenfants et adolescents accueillis, qui certes neconcernent pas l’ensemble desélèves, mais qui ont amené lesrespon-sablesà observer une augmentationde la proportion des enfants ayantdes difficultés relationnelles. Ilsévoquent « lesenfants en souffrancepsychologique qui ne savent pasvivre une relation normale degroupe ». Le respect mutuel, notamment, quipermet desrelationssociales acceptablesentre enfants et adolescentsrecule. Le principallangage de certains enfants sembleêtre celui de la violence. Lespédagogues opèrent unlien entre cetteréalité et la trop faible maîtrisedu langage. Quand l’enfantou l’adolescent n’arrive pasprogressive-ment à maîtriser le vocabulaire etla syntaxe,la « mise en mots » n’estpas possible etla force et la violence peuventdevenir les moyensd’expressionprivilégiés.

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Les règles de la viesocialeLa tentationde la délinquance danset hors de l’établissement

est présente. Les constatationsrécentes démontrent que c’estau niveaudu collège que les situationssemblent s’aggraver. Le principal d’uncollège de la banlieue parisienne,qui n’estime pas queson établissementsoit exceptionnel dece point de vue, évalueà 5 % la proportion de sesélèves qui sontdélinquants et à 40 %, celle des «hésitants ». Si laviolence et la délinquance restaient résolument extérieures aux établisse-ments scolaires, ce serait, certes,matière à réflexion, mais celan’oblige-rait pas l’écoleà se confronterà l’ensemble des problèmesde la société.Mais, si ces phénomènes restent marginaux, ils ontcependant unetendanceà se développerà l’intérieur et aux portes des écoleset surtoutdes collèges.

Les règles de lavie scolaireLes règles dela vie à l’école et de la vie en classene sont plus

considérées par les enseignants comme assimiléespar leurs élèves, alors quela réussite scolairen’est pas sanslien avecle respectde cesrègles.La clartéde ces règlesest la condition deleur respect. Or,si elles sont codifiéesdansle règlement intérieur de l’établissement, celles du fonctionnement delaclassesont plus implicites. Lorsqueleur connaissancen’est pas transmisepar les parents,les enseignants setrouvent seuls face à cette difficulté. Ilfaut d’ailleurs souligner,à cet égard,le problème spécifiquequi se pose àl’entrée en sixième :l’élève passe d’uncadresimpleet stable caractérisé parun enseignant unique(ou deux au maximum, s’ils travaillentà mi-temps)etpar un lieu unique qui est la classe,à un cadre pluscomplexe caractérisépar la multiplicité des professeurs,un découpagedu temps par matièresetsouvent des changements desalles selon les matières enseignées.Cechangement important est, sans doute,peu propiceau respect de règles dontl’expressionresteplus floue. La taille de l’établissementjoue aussiun rôle.En effet, à partir d’un certainnombred’élèves,il se développeun effet defoule ou de « meute »,selon le terme employé parun des enseignantsauditionnés, c’est-à-dire quele groupe d’élèves devient quelquepeu incon-trôlable du fait de l’impossibilité, pour les adultes travaillant dans l’institu-tion, de connaîtrepersonnellementceux-ci jusqu’à une date avancéedel’année scolaire.

L’ignorance dela règle dansl’école et dans la classe peut êtreillustrée par quelquesindices. Les faits graves de violence,comme il aété indiqué plushaut, existent,même s’il faut se garder d’enexagérerl’ampleur. Mais le simple sens de l’effortà fournir pour assimiler lessavoirs semblelui-même avoir parfois été perdu. Lesenseignants signalentle développementd’une «penséemagique », celled’élèves qui semblentpenser sincèrement que, malgré les difficultés qu’ilsrencontrent, ilsvontréussir sans avoir à mener d’action particulière,ni faire d’effort pourarriver au but. L’absentéismeprend desformes nouvelles :un proviseurde lycée évoque, pourcertainsélèves,la pratique d’un «lycée à la carte ».

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c’est-à-dire d’un absentéismeconscient et programmé, à partir d’uneanalyse parl’élève de ce qu’il croit utile.

Il est difficile de quantifier cesphénomènes.Un principal decollège estime que, sur les 600élèves de sonétablissement - dont plusde la moitié sontissus de l’immigration - , 10à 15 sonten révolte sociale,tandis que 30à 35 sonten grandedifficulté scolaire.Mais la plupart deschefs d’établissement entendus parle Haut Conseil soulignent qu’il suffitd’un nombre limité d’élèves perturbateurspour poser de sérieux problè-mes à l’établissement.

... d’autres difficultés naissentde la tentat ion du repl iementL’enfermementdans certainsparticularismes...Mais d’autres difficultés peuvent naître decertaines formes

d’enfermementdans les particularismes.Le refus de la règle communetrouve alorsà s’ancrer dans l’invocation de convictions personnelles. LeHaut Conseil a analysé,en particulier, l’expérience des médiatrices duministère de l’Éducation nationale pourtenter derésoudre les problèmesposés parle port du voile parcertaines jeunesfilles musulmanes.Il semblequ’en 1996un nombre moindre de jeunes filles soient concernéespar cespratiquesqu’il y a cinq ans. L’actualité duphénomène résideparadoxa-lement dans la médiatisation récente de décisions dejustice concernantdes événementsanciens de trois ou quatreans. Il est davantage lefait dejeunes filles dela deuxième ou dela troisième génération, c’est-à-dire defilles ou de petites-filles d’immigrés, car les jeunesprimo-arrivantesmontrent un souci affirmé d’intégration dansla société française.L’in-fluence de formes radicales de l’islam, organisées dans certainsquartiers,se fait sentir ici à travers l’affirmation d’un islam différent de celuitraditionnellement pratiqué par les parents. C’est ainsi que certainespressions subies par lesjeunes filles concernées s’inscrivent dans unecontestationtant dela mixité que de l’égalité dessexes.Il arrivent qu’ellesaboutissentà une contestation de quelques enseignements,tels que laphilosophie ou les sciences naturelles, oule refus depratiques sportivescomme la natation. En cette matière, lescertificats médicaux decomplai-sance posentproblème. comme autantd’acquiescements apparents delasociété au refus des programmes de l’enseignement.Il arrive que desjeunes filles, soumiseschez elles à des conflits familiaux aigus, manifes-tent unecertaineagressivité.

Beaucoup de ces situations sesont dénouées à partir d’uneréaffirmation dela laïcité de l’école, parl’intelligence desréactions deschefs d’établissementet des professeurset par l’intervention des média-teurs. Lorsque l’échec de la conciliation aboutit à une exclusion, lesétablissements concernés - outout au moins bien des enseignants,fût-ceà titre personnel - sepréoccupent del’avenir immédiat des élèvesexclus.Pour la plupart, elles s’inscrivent aux cours du Centrenational d’ensei-gnementà distance.Mais aprèscette période, l’écolene se soucie plusvraiment d’un ancienélève qui n’estplus dans ses effectifset l’on sait

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combien l’enseignementà distance, quelle quesoit sa qualité, exigedevolonté et d’effort de la part des élèves lorsqu’ilsne sont passoutenuspar le milieu familial ou assistés par des soutiensde tuteurs bénévoles.Quant à l’appui des structures du quartier,souvent surestimé,il estfinalement mince, voireambigu ou inquiétant dansles cas où il renvoiel’intéressé versle milieu religieux intégriste.Il est clair qu’il y a là desmenaces sérieuses pourla réussitedu processus d’intégration.

... et le refus desbrassages depopulationMais les pratiques qui viennentd’être évoquées nesont pas

les seules traductions des processusde refermement qui mettent encausele caractère intégrateur del’enseignement.Les multiples pratiques dedétournementde la carte scolaireen vue d’inscrire l’enfantdansun « bonétablissement »,parfois avec l’acquiescement desautorités de l’Éducationnationale, en sont un autreexemple :elles ne concernent pas,bien sûr,les mêmes populations mais constituent aussi,en fin de compte, lamanifestation dela volonté derester entre soi.Le bon établissementest,dans ce type de cas,celui dans lequella population seraplus homogèneet donc moins turbulente. Seul un réel brassagescolaire est pourtantsource d’intégration.

L’école est la seule institutionprésente dans certains quartiers

Les quartiers les plus défavorisés nesont pas, en général, ceuxoù les services publicssont les plus proches,en dépit des diverseffortsd’équipement favoriséspar la politique de la ville. Toutefois,même si leshabitants souffrent parfois deleur isolement dans ce domaine, il subsistetoujours dans chaque quartierune école, qui devient parfoisle seul lieu derencontre quotidienne entre les usagerset une institution d’État. Cettesituation porteuse de difficultéspour les acteurs de l’institutionscolaire,investis d’un rôle multiforme, a des aspectspositifs : l’école demeure,eneffet, une institution regardéecomme légitime et efficace, en dépit decritiques qui ne font, après tout, qu’exprimerl’attente généraleà l’égardd’une institutionqui semble représenter l’essentiel des forces d’intégration.

L’école reste dans cesconditions le lieu privilégié de laconstruction d’une relation citoyenne.Ce n’est pas pour elle un rôlenouveau : l’institution scolaire s’esttoujours attachée d’abordà formerdes citoyensen éduquant lesenfants. Les conditions difficilesprévalantdanscertains quartiers nefont que soulignerl’importance de cettemission.

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L’école, objet d’attentes mult iples

En raison même de son caractère visibleet de la confianceque lui conservela population,l’école se trouve faceà des demandes tropdiverses pourqu’elle puisse répondreà toutes.À écouter les critiques quis’adressentà elle, certains semblent attendred’elle qu’elle règle unensemble de questionssociales ou économiques dontil est clair, pourtant,qu’elles ne lui reviennentpas. Sion lui demande toujours d’apprendreaux enfants lessavoirs de base, deleur inculquer les notions essentiellesde la vie en collectivité,de leur donner les connaissancesnécessaires surl’organisation de la société dans laquelle ils vivent,on lui demande aussi,pêle-mêle, de veiller sur leur santé,de prévenir la délinquancedont ilspourraient devenir soitl’objet soit les acteurs,de les préparerà l’insertiondansla vie économique - alorsmêmed’ailleurs que les tendancesà venirdu marché de l’emploi sontmal déterminées - , de leuroffrir unenvironnementprotégé, sans toutefoisleur laisser ignorer lesproblèmesd’une réalité difficile, de leur tenir lieu tant d’éducateurs que de parents,d’exercer sur euxla pédagogiela plus avancéemais aussila surveillancela plus étroite... Les attentes des famillesface à l’école sont d’autantplusnombreuses, et parfois contradictoires, que ces familles,en butte à desdifficultés économiques et socialesqui les déstructurent, ne saventplusremplir auprès desenfants leur propre mission, alors, pourtant, quelaréussite desapprentissages scolairesne se conçoit que dans une continuitéd’efforts entre les enseignantset les parents.

Faceà la diversification des demandes qu’elle sevoit adresser,l’institution scolaire persiste,à juste titre, à renforcer prioritairement safonction traditionnelle,même sielle ne refuse pasd’aider à donner auxenfants d’autreséléments désormais nécessairespour l’accessionà unevie sociale harmonieuse.Ainsi lesenseignants sont-ilsamenésà conjuguerles apprentissages essentiels,dans des conditions rendues plus difficiles,notamment par l’ignorance dela langue qui n’est pastoujours pratiquéeà la maison dans les famillesd’immigration plus récente, avecun travailspécifique d’intégration désormaisindispensable.

Dans l’ensemble,l’école s’adapte avecsuccèsà cettesituation,et les acteursfont preuve d’une initiative et d’une inventivité qui ontpermis des résultats, sinonspectaculaires,du moins encourageants. Desexpériences lesplus réussies, on peutdégager, d’une part, lesgrandeslignes des missions nouvelles que sefixe l’institution, d’autre part, lesconditions indispensablesà la réussite de ceteffort.

Des missions nouvellesqui s e conjuguent avec sa fonctionde transmission de savoirsApprendred’abord à lire et écrire, puisassimiler les program-

mes des collèges et deslycées, suivrele cursus et sortir des établissementsscolaires avecun diplôme ou un niveau de formation performant sonttoujours les objectifsfixés aux élèves dans leurparcours scolaire.À cet

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égard, si les méthodes ontpu (et ont dû) évoluer,la tradition n’a pas étébouleversée.Mais la réussitene se conçoitplus comme devant résulterdu seul effort solitairede chaque enfant,aidé dansle meilleur des caspar un parent,un grand frère ou un proche.Les enseignants soulignentd’ailleurs la difficulté à laquelle ils se heurtent pour obtenir la collabo-ration, même élémentaire, des familles lesplus déstructurées, danslesquelles ils ontle plus grand mal à faire venir un des parents pours’entretenir aveclui des difficultés d’un enfant.En vue même del’acquisition des savoirs, l’école elle-mêmea donc à assumer désormaisun travail depréparation générale que lesparents ne sontplus toujours àmême de donner.

Restaurer lesrègles decivilitéLes enseignants et dirigeantsd’établissementsentendus parle

Haut Conseil ontinsistéde manière frappantesur la nécessité qui s’imposeà eux de restaurer les règlesessentielles permettantla vie en commun,faute de quoi c’est l’ensemble deleur travail qui resterait vain.Il s’agit,en effet, d’offrir aux élèves et auxenseignants une atmosphère depaixindispensableau travail, et de respect réciproque qui fait parfoisdéfautau départ.

L’effort est permanent etporte sur des éléments debase. C’estpourquoi d’ailleurs c’estl’école primaire, où les élèves sont face à uninterlocuteur uniqueet clairement identifié, que cetravail est le plusefficace. Une coupure est souventconstatéeau moment de l’entrée aucollège, l’enfantperdantce repère puissantpour se trouver devant diversenseignants.Aussi les résultats les pluspositif sont-ils enregistréslà oùun travail d’équipe permanentpermetde maintenir un dialogue univoqueentre l’élève et l’institution.

Dans l’ensemble, lesmaîtres sont amenésà des pratiques plusinterventionnistes que parle passé : il s’agit pour eux detraiter toutincident, même sans gravité, tel qu’une bagarredans la cour, dedédramatiser, de faire dialoguer les enfants,afin d’éviter qu’un désaccord,par surenchère, ne devienneopposition systématique. I,’instauration deconseils de classechargésde traiter eux-mêmes les incidentsdonne debons résultats. Les enfantsy apprennent à faire la part des diversévénements,à prendre un certain recul sans aller à l’affrontement, àaccepter l’arbitrage de leurs pairs autant quecelui desadultes.

Parfois la reprised’apprentissagesjusque-là délaissés, tels queles coursde moraleoù l’enfant s’entend confirmer les notionsde bien etde mal, renforceet oriente les diverses techniques de dialogue inventéessur le terrain, avecpour objectif communla clarification dans l’esprit desenfants dece qui est à maintenir et de ce qui està proscrire dansla vieen société.

Ils peuvent parvenir à cerésultat pardiverses voies qui leursont proposéespour tester l’efficacité des conduites qu’ilsadoptent :organisation d’unebibliothèque scolaire, qui supposede veiller sur leretour des livresprêtés, sur leurclassement, surla bonne tenue matérielle

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des ouvrages,ou mêmeorganisation des activités d’une courde récréation,qui nécessited’apprendreà partagerun espace età y faire régner lacoexistence entredivers groupes aux centres d’intérêts divergents.

Maintenir la volonté de réussirLorsque l’échecfamilial est trop grave,les parents se trouvent

hors d’état de soutenir la volonté de l’enfant de « s’en sortir ». L’enfantn’a plus d’autre lieuoù exercer son désirde progresser que l’école.Lespsychologues insistentpourtant surla nécessitéde la volonté de réussitedes parents pourleurs enfants, fautede quoi la réussitede ces derniersest compromise. Les enseignants setrouvent donc parfois amenésàremplir eux-mêmes cette fonction,afin de maintenir vivantce désir sanslequel la notion même d’intégrationperd toute signification.

Il faut souligner ici que l’implication personnelle qui estdemandée alorsaux enseignants est énorme.La difficulté est accrueparla mobilité des équipesenseignantes : c’est évidemmentlà où lesdifficultés sont maximales quela rotation estla plus rapide. Onconstated’ailleurs quede bons résultatssont obtenuslà où les équipes sont plusstables, lesdeux circonstances serenforçant mutuellement :là où l’équiperéussit, le désir de partir estmoins fort.

La pratique de méthodes pédagogiques adaptées, permettant desortir l’enfant d’unesituation d’échecqui ne ferait quetransformerà sesyeux l’histoire familialeen une fatalité, démontreà quel point des équipesmotivées peuvent innoveren la matière. En dépit de la supposée rigiditéde l’institution, de ses programmes et de ses cycles,le Haut Conseila puconstaterqu’il est possible de fairefonctionner dessystèmesd’apprentis-sage adaptés auxenfants :dans certains collèges, on leur permet deprogresserà des rythmesdifférents selon leur capacité dans telle outellematière, on metà leur disposition desenseignementsrenforcésen cas debesoin, on lesincite à se fixer desobjectifs progressifset à s’y tenir.Lorsque ce type d’organisationreste en place pendant une périodesuffisante pouren évaluer l’effet, les résultats sontexcellents. Detouteévidence, c’est uniquementgrâce à la volonté persévérante d’unchefd’établissement etla conviction d’uneéquipe enseignante, avecle soutiendes autorités territorialesen matière de locauxet d’autres questionsmatérielles que de tellesréussitespeuventêtre relevées.

Prendre en chargela vie périscolaireDans l’ensemble,nombre d’activités, notamment sportives,

sont ouvertes auxenfantsen dehors del’école. Toutefois la vraie questionest moinsd’occuper les enfants lorsqu’ilssortent de l’école que dedonnerune continuitéà leur activité scolaire et périscolaire, notammenten évitantde romprela chaîne des efforts quivise à les rendre conscients deleurrôle et responsablesd’eux-mêmes et des autres.Aussi les enseignantsinsistent-ils surla nécessitéde mener une véritable réflexion éducativesur les activités à proposer auxenfants.

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Nul ne nie l’importance de l’animation sportive, qui apporteaux enfants détente etrègles élémentairesde conduite. On doit toutefoissouligner que, quelle que soitl’activité proposée,sportive ou culturelle,les animateursne peuvent se bornerà un accompagnementou unesurveillance,mais sedoivent de fournir aux enfants une autre occasionde renforcer les éléments apportéspar l’école en matièred’apprentissagede la réflexion et de restaurationdes règles sociales.L’échec serait queles enfantsne trouvent dansles propositions qui leur sontfaites que despasse-temps différentsde l’école essentiellementpar l’amoindrissementde l’effort à fournir. Or le rôle que se sont fixéles équipesenseignanteset les dirigeants des établissements où lesélèves progressent estpourl’essentiel d’apporter une cohérence et une continuité dansla vie desélèves. Il reste doncà trouver commentfaire de la vie périscolaire unmoment d’un mêmeapprentissage déclinéde façondifférente mais tendantà un mêmeobjectif.

À cet égard,soulignons quel’apparition périodiquede nouvel-les méthodesou l’instauration de nouvelles règlesne présentent pasuniquement desaspectsfavorables.Si le souci de répondre auxnouvellesdifficultés est certes louable,la modification permanente des objectifs etdes propositionsa un effet déstabilisateur dansun domaine où touss’accordentà souligner l’importance essentiellede la persévérance desefforts. Outre que l’éducation desenfants se poursuit surle long terme,il est contre-productif derenforcer, par les modifications fréquentes, leurpropre tendanceà se détourner très vitede l’activité entrepriseet leurdifficulté à persévérer dans l’efforten se projetant dansle futur.

L’école trouve des solutionsadaptées pour d e s publ icsspécif iques

Les expériences différentes sontnombreuses dans l’éducationnationale et il n’est pas question d’en faireici un inventaire, ni uneanalyse exhaustive.Il s’agit plutôt, à partir de quelques exemples,decaractériser lesmoyens que sedonne l’institution scolaire vis-à-vis desélèves dontl’intégration scolaire estmenacée - les jeunes gens qui sonten situation de grand échec scolaire - et des élèves quimenacentl’intégration sociale - lesjeunes dontle comportement perturbe gravementl’enseignement.

L’organisation de l’écoleUn premier type deréponse réside dansla création declasses,

sectionsou cycles, adaptésà ces élèvesà l’intérieur de l’établissement.Par exemple,un lycée professionnelde Roubaix a mis en place un espace

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complémentaire pourla gestion des « décrocheurs », c’est-à-diredesélèves qui, comme le suggère le néologisme utilisé, ont véritablement« décroché » ducycle d’études qu’ils étaienten train de suivre. Ils fontl’objet d’un dossier particulierde suivi et bénéficient de programmesindividualisés. Parmi les initiatives prises parun collège de la régionlyonnaise, oncitera la classe dequatrième de découverte dumondeéconomique, avecun jour par semainepasséen entreprise,les classesdeconsolidation avecun effectif de quinze élèves, la classede quatrième« polytechnologique »,ou encore un projet interculturel pour les filles,fondé sur l’appréhensionde la situation des femmesici et ailleurs.

Un deuxièmetype de réponseconsisteen la création de structuresad hoc pour accueillir temporairementles élèvesen difficulté. L’« espaceintermédiaire » de Roubaix, rattaché à un collège de la ville, accueilletemporairement lesélèves de sixièmeet de cinquièmeen rupture aveclesystème scolaire, issus des trois collèges dela ville situés en quartierssensibles.Il est doté d’uninstituteurspécialiséet d’une éducatrice pourunedouzaine d’élèves.Il s’agit, par un travail d’enseignement adaptéà lasituation de refus scolaire et parun travail socialet éducatif incluantlafamille, de replacer les enfantsen classe « normale », l’annéesuivante.

Un troisièmetype de réponseconsisteà changerla structuredel’ensemblede l’établissement,pour la rendremieux à mêmed’accueillir desélèves différents.Ainsi un collège de Saint-Priesta organisé des classesàthème destinées à mettreen valeur les potentiels de réussite dechaque enfant,tournées vers les sciences,les langues,le sport, la découverte des musées,etc. Il a alors étéamenéà constater des ségrégations socialeset ethniquesde fait. Il a doncévolué vers l’organisation dedeux mini-collèges -littéraireet scientifique - qui semblent mieux éviter ce risque. La maison desTrois-Espacesà Saint-Fonsa, quant à elle, été conçue dèssa création pourassurer aux enfantsune continuité dansleur parcours scolaire (organisationde trois cycles detrois ans pour les enfants de deuxà douze ans) et dansleurs lieux de vie (architecture de l’école quipermetune large ouverture surla ville). Le Haut Conseila eu l’occasion d’observer queles équipesqui ensont à l’origine font preuvede beaucoup de volontéet d’énergie.Mais ellessoulignent elles-mêmesla difficulté d’évaluation des actions menéesdanslesétablissements sensibles, lorsque l’innovationest permanenteet que lesrepères manquent.

Pour l’ensemble de ces initiatives, des moyenssont nécessaires,même si cette conditionn’est pas suffisante.Les zones d’éducation priori-taires, crééesen 1982,y contribuent. Sansdouteun bilan précis de l’emploides moyensainsi mis àdisposition serait-il utile.L’existence de ces moyenssupplémentaires met cependanten évidencela persistance d’autresrigidités.Pour des initiationstrès innovantes,la rigueur des règles dela comptabilitépublique peut êtreun obstacle, dansla mesure où ces initiatives requièrentsouplesseet rapidité dans leurmise en oeuvre.Les règles de gestion delafonction publique peuvent aussi venir compliquer le recrutement d’unepersonne préciseet identifiée, nécessaireà la mise en place d’un projet.

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L’environnement de l’écoleLes initiatives d’aide aux devoirs sont multiples,notamment

pour les élèvesdes grandes classesde l’école primaire et pour ceux descollèges. Elles rendent possiblele soutien à un public limité,sans que cepublic soit identifié a priori commeétanten situation d’échec. Ces initiativespeuvent êtremunicipalesou associatives.La demandedansce domaineestforte. A Saint-Fons,où les activités périscolairesont été développéesdelonguedate avec desmoyensimportantspar la municipalité,une associationa néanmoins estimé nécessaire de lancerune aide aux devoirs,relayée enpartie depuis par desmoyensmunicipaux.Lespersonnesmisesà contributionpeuvent être diverses.Ainsi, dans un collège deSaint-Priest,une aide auxdevoirs estorganiséetous lessoirs, associant des animateursmunicipaux,des parentset des professeurs volontaires,et des appelés ducontingent. Ilpeut arriver que certaines pratiques associatives d’aide aux devoirsne soientpas dénuées d’arrière-pensées.Ainsi un exemple a été observé, dans uneville de la banlieue parisienne, d’une initiativequi s’est révélée êtreun foyerd’intégrisme religieux. Mais,en sens inverse,une associationà vocationreligieuse créée par les musulmansà Saint-Fons s’est scindée progressive-ment lorsqu’elle s’est lancée dansune telle activité, après avoir estimé quecelle-ci n’était pas du ressort d’une association religieuse. Ellea alors crééune autre associationà caractère laïque.La question dela compétence desintervenantsen matière d’aide aux devoirsse pose ; il y a lieu de prendreen compteautant les qualitésd’accompagnement des élèves quela maîtrisedes matières concernées.

Quelques condit ions nécessairesà la réussite de l’intégration à l’écoleMaintenir l’effort pour faire participer lesparentsL’école seule ne pourra pas faire desenfants des adultes

épanouis. Il n’est pas questionqu’elle remplace la famille, ce qued’ailleurs elle n’a pas l’intention ni la possibilité de faire. Aussi leséquipes enseignantes tentent-elles toujours,avec une réussite non négli-geable, d’impliquer les parents dansle suivi du parcours scolaire desenfants. Lorsque les parents ont de trop grandesdifficultés, notammentde langue,l’école setourne vers un «grandfrère » ou une «grandesoeur »susceptible decréer un lien entre l’école et la maison. Mais les maîtresn’hésitent pasà multiplier les convocations aux parents les plus passifs,pour tenter de les faire participerau projet éducatif. Certainesécolesutilisent avecsuccès un système de « mères-relais »bien implantées dansleur communauté ou leurquartier, susceptibles defaire circuler lesmessagesentre l’école et lesfamilles.

L’assimilation par les parents desrègles defonctionnement del’école est importante pourla réussite deleur enfant.À l’inverse, si l’écoleconcentre ses efforts surl’élève, elle n’en exerce pasmoins une influencebénéfique surla famille elle-même,à condition d’avoir pour objectif dene pasla laisserde côté.

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Limiter la taille des établissementsQu’il s’agisse del’école primaire, ducollège ou du lycée,le

gigantisme dela structurejoue systématiquement contre sa capacité deréussite. Pour inventerdes méthodes souples,il faut évidemmentagir dansun organisme quipuisse s’y prêter.Pourcréer des équipes soudées,encorefaut-il qu’elles ne soient pas tropnombreuses.Pour trouver des méthodesadaptées aux individus en difficulté, encore faut-il queleur nombresoitsuffisamment restreint.Aussi faut-il insister sur la nécessité,dans lesquartiers où se concentrent les populationsen difficulté, de s’en tenir àdes établissements de taille moyenne. Regrouper lesproblèmes n’estpas,cela estévident, un moyenefficace de lesrésoudre.

Préserver l’ordre et l’image du lieu scolaireUn établissement ne peut mettre enoeuvre les diverses tâches

qu’il souhaite assumersans disposer d’uneéquipe suffisante destinéeàveiller au calme. On saitqu’un très petit nombre d’élèves suffitàdésorganiserla vie d’un établissement. Dans ces conditions,on insisterasur la nécessité dedisposer d’uncorps de surveillantsdans l’établissementdont le rôle est de veiller à ce qu’aucun incident, soit nédansl’établissement, soit arrivant de l’extérieur, ne s’aggraveau point demettre en cause la sérénité nécessaire auxapprentissages.Si la sur-veillance des enfantsdans la cour est partie intégrante dutravail dumaîtreà l’école primaire, on a constaté,en effet, qu’aucune responsabilité dumême type ne s’exerce dans les cours decollèges, à cette échelle,alorsmême que lesrisquessont plus grands dufait de l’âge des élèves.

La qualité des locaux renvoie aussil’image de la valeuraccordée à l’institution. On a souventsignalé le plaisir des élèves àfréquenter des lieuxà la fois adaptéset beaux, alors que des locaux malentretenus encouragent lesactes dedégradation et portent auxélèves unmessagenégatif : ils auront naturellementtendanceà penser quel’impor-tance qu’on leur accorde,à eux-mêmeset à leur éducation, se mesureàla valeur des bâtimentsqu’on y consacre.Le parallèle entre la fonction-nalité et même la beauté des lieuxet la conduite deleurs occupants,déjàsouligné en matièred’habitat, joue ici de même.

Mieux préparer lestransitionsdans l’organisation scolaireLe passagede l’école au collège a souvent étédésignécomme

un moment de possible remiseen cause des acquis obtenus par lesmaîtres,du fait des changements profondsdans l’organisation dutemps scolaire.La désignation de professeurs commeréférents pour lesélèves (« profes-seurs principaux ») ou dessystèmes de tutorat n’est une réponse ques’ilss’y impliquent vraiment,et si leur rôle estpris en compte dansla marchede l’établissement. L’organisationd’équipes pédagogiques soudéeset lesformules ousystèmes de tutorat peuventconstituer d’autresréponses.

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Il reste encoreà imaginer une forme de liaisonentre l’écoleet le collège, voireentre le collège et le lycée, qui évite de fragmenterla vie des enfants, et qui maintienne, d’un niveauà l’autre, une qualitéde relations entrel’élève et son environnement. L’écolea déjà acquissuffisamment d’expériencesde partenariatavec d’autres institutionspourêtre à même de maintenir un dialogue à l’intérieur de ses propresstructures.

Coordonner lesinstitutionsconcernéespar l’enfantOn vient de le dire, les établissements scolaires ontappris à

coordonner leurs efforts avec ceuxd’autres intervenants.Il importe dediffuser cesexpériences.Les interlocuteursdu Haut Conseil ont insistésur l’importance d’un dialogue permanent entrel’école et les institutionsqui serventaussi de pivotà l’organisation sociale : c’est par cetteméthodequ’il est possiblede répondre à la demande multiforme faiteà l’école.Elle peut être le lieu où l’élève est orienté vers lesinstitutions responsa-bles de sa santé, physiqueou mentale. Elle peutcollaboreren permanenceavec des intervenants extérieurs agissant defaçon coordonnéedans lescas plus difficiles,pour éviterqu’une multiplicité d’intervenants(psycho-logues, éducateurs, professeurs,etc.) ne contribueà déstructurerdavantageles enfantssans repères, fautede continuité dansles objectifs poursuivis.

Enfin, il est également important que les établissementsscolaires entretiennent des rapports suivisavec lesservices de police.L’objectif est évidemment de les préserver autant que possible del’intrusion de la violence et dela délinquance présentesdans le quartier,mais aussid’éviter que, faute d’informationréciproque, desinterventionscontradictoiresne viennent davantage perturber desjeunes qui évoluentsur une marge étroiteentre apprentissage desrègles et révoltecontre touteautorité.

Privilégier l’initiative des acteursSoulignons,pour concluresur l’ensemblede ces conditionsde

réussite, qu’il nes’agit certespas, au terme de cetteénumération, deproposer decréer de nouvelles structures, de nouvellesrègles ou denouvelles méthodes qui seraient systématiquement instaurées.L’engage-ment très fort qui lie les équipes desétablissementset les élèves, et quidébouche sur les réussites lesplus remarquables, ne sauraitêtre institu-tionnalisé en bloc. Il s’agit seulementde le favoriser autant que possible,la plupart du temps simplementen s’abstenantd’y faire obstacle,et danscertains casen généralisant la diffusion d’innovations efficaces.Maisl’esprit d’initiative qui préside à ces réussites doit detoutes lesfaçonspossiblesêtre approuvéet encouragé.

On a souligné à plusieurs reprisesà quel point, en cettematière, la réussite dépend de l’implication des hommes qui s’yemploient.Il s’agit à la fois de leur permettre de valoriser leursefforts et d’y

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persévérer. Dansle cadrede diverses politiques spécifiques, des bonnifi-cations indiciaires ont étéaccordées aux enseignants des établissementsen difficulté. Ce soutien matérielde leur effort n’estpas inutile. Toutefoisune reconnaissanceplus large doitêtre perceptible.

Il est vrai que les enseignants jouissent,dans l’ensemble delapopulation, d’uneimage plutôtfavorable. C’est cequi résulteen tous casde la lecture desrésultats d’unsondagerécent surl’institution scolaire.Dans la vie quotidienne, toutefois, les professeursn’ont pas toujoursl’impression d’être suffisamment soutenus, et ilss’en plaignent parfois.Or, on a suffisamment insisté surla nécessitédu maintien d’équipesstables pour en conclure qu’il faut encourager les enseignantset lesdirigeantsd’établissements,non seulementà prendre des postesréputésdifficiles, maisaussià y rester assezlongtemps pour rendreplus fructueuxleurs efforts. Il est indispensable deleur renvoyer à cet effet une imageplus valorisante quecelle qu’ils reçoivent actuellement. Un soutiensanséquivoque de leurs efforts dela part dela hiérarchie, une publicité donnéeà leurs réussites,ainsi d’ailleurs qu’un répit dans des réformes imposéesqui viendraient périodiquement remettreen cause l’organisationqu’ils ontréussi à installer, semblent les contributions essentielles que l’institutionpeut apporter à ses acteurs.Sansnégliger le nécessaireeffort financierpour lesaméliorations indispensables, notammenten matière de bâtiments,c’est essentiellement par une attitude d’encouragement auxmodesd’or-ganisation souples et innovants que l’importance dela mission desenseignantset de leurs efforts sera clairement reconnue.

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Chapitre III

Les pratiques sport iveset l’intégration

Le sport, activité de loisir populaireentre toutes,a toujoursjoué un rôle significatif dans l’intégration despopulationsen difficulté,et plus spécifiquement des jeunes. Dans unepériode où ces derniers seheurtent à des problèmes aggravés, cerôle ne se dément pasmaisrencontre des obstaclesspécifiques.

L’affaiblissement des structures familiales et del’autorité desparents, les évolutionsconcomitantes des structures sociales traditionnel-les laissent parfois hors detout repère despré-adolescents etadolescents.L’absence d’une claire affirmation desrègles, la vie dans la rue sanssurveillance adultene les préparent pasà une vie sociale. Lanotiond’effort, l’importance dutravail comme clé dela réussite sontd’autantplus souvent absentes quele chômage ne permet plus de ressentir ce lien.Il n’en est queplus important de favoriser, partout où cela est possible,les activités et les institutionssusceptibles d’apporter aux jeunes lesapprentissages indispensables.

Le sport, élément de constructiond’une vie soc ia le

Il est vrai que lesjeunes,même lorsqu’ils sont réfractairesàd’autres pratiques socialesorganisées,conserventen règle générale unintérêt pour le sport, qui répond à leur besoin d’activité et demouvement,et canaliseleur besoin adolescent d’affirmation deleur puissance physi-que. Pour les jeunes desmilieux les moins favorisés, et notammentpourles jeunes issus de l’immigration, cet engouementest d’autant plus marquéque la réussite des champions venus des milieuxpopulaires et del’immigration, relayée parle spectaclequ’en offre la télévision, n’est pasrare. L’équipe de France de footballa toujours compté en son sein desjoueurs d’origine étrangèredont, au moins, deux furent sescapitaines.Aujourd’hui, par exemple,près de 90 jeunes issusde Seine-Saint-Denisévoluent dans des équipes depremière et deuxièmedivisions de football.D’autres sports onttrouvé leur élite parmi dejeunes sportifsissus de

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l’immigration. Ainsi, lors des derniers championnats du monde juniors dejudo, trois «beurs » sur septjudokas ontreprésentéla France tandis queDjamel Bouras est devenuchampion olympique danscette discipline.L’équipe deFrance deboxe françaiseet de savatecompte unemajoritéde combattants issus de l’immigration.Tout récemment encore, laconquête du titre de champion dumonde deboxe par Khalid Rahilouapu réjouir ses amis d’enfancede la banlieue parisienne. La réussiteexemplairede ces champions attire les jeuneset renforce leur goûtpourle sport, contribuantnotamment au succès desjeux les plusspontanémentappréciés, telsle basketou le football de rue.

Or, une pratique sérieuse dusport nécessiterigueur, effortetpersévérance.Sans l’acceptation del’autorité des moniteurset entraîneurset des règles qu’ils imposent,il n’est pas possiblede se perfectionnerdans unediscipline.Les compétitions obligentà être à l’heure, à se vêtircorrectement,à respecter lesrègles d’hygièneminimales,à se soumettreaux obligations communesà tous. Elles confrontentà la concurrence etdémontrent la possibilité de réussite parl’effort, qu’il soit individuel oucollectif. Le respect des règles du jeu et leur rappel éventuel parl’arbitresensibilisentà la nécessité de règles dela vie sociale. Pour toutes cesraisons,le sportpeut constituer pour les jeunesun facteur non négligeabled’intégration ou de réintégration.Sansen exagérerl’importance, onpeutaussi considérer les cas dans lesquelsla pratique d’un sport d’abordconsidéré commeun loisir débouche sur l’acquisitiond’un métier pourlequel lesaptitudes physiques développées serévèlent importantes.

Conscients de ces potentialités, les pouvoirspubl ics - enparticulier les municipalités - et lesfédérationssportives sesont efforcésde développerla pratique du sport.

Des efforts certains, maisponctuels, des institutions

C’est ainsi que des activités sont désormais fréquemmentproposées l’été auxjeunes qui ne partent pasen vacances, lescommunesmettant leurs équipementssportifs à leur disposition pendant lesvacancesscolaires. Desfédérations, notammentcelles de football, dejudo ou deboxe française, avec l’appui del’État et des collectivités locales, ontproposédans desquartiers des animations aux fins de valoriserla pratiquesportive et d’offrir des activités aux jeunes.

Tout en rencontrant l’approbation du publicintéressé, detellesopérations ponctuelles ont uneportée limitée.Si leur caractèrespectacu-laire, bien médiatisé, séduit lesjeunes, au risque même desemer desillusions, qu’il est bien difficile ensuite degérer, cesactions necontri-buent pas nécessairementà les amenerà une pratiquesportive assidue.En général, l’opération achevée, ilsreviennentà une pratique informelle

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et temporaire. Pour que celle-ci sepérennise et contribueà l’intégration,encore faudrait-il que les clubs puissentêtre associés auxactionsmenéesafin de prendre le relais lorsque l’opération s’achève car euxseuls,présents localement, peuvent assurerla continuité.

De la pratique informelleau sport dans les clubs

C’est lorsqu’ils pratiquentleur sport dans lesclubs que lesjeunes sontinitiés à l’apprentissage desrègles et de la discipline et qu’ilssont confrontésà d’autres milieux. Le sport « derue », le plus populaire,ne présente pas,en effet, les mêmes vertus quecelles de la pratiquesportive en club. Lesjeunes s’organisentà leur guise etcherchentde cettemanière à éviter lescontraintesdu sport en club et l’engagement durableque celui-ci suppose. Ilsy montrent peu depersévérance et se bornentàjouer épisodiquement.En outre, ils sonten général confinés sur leurlieude résidence, neconnaissant, pour jouer paréquipes, que les autreshabitants du quartier,parfois dela même origine, et répugnant à élargirles rencontres à un environnement inconnu ou étranger. De plus,il existeun danger que les rites depassage etd’initiation dont sont porteurs lessports d’équipe, maîtrisés par lesseuls adolescents, nedébouchent quesur des modes de relationtrès élémentaires, voire, dans certainessituations, violents. La pratique assidue d’une discipline sportive conduit,au contraire, à sortir de ces limites étroiteset facilite le brassage despopulations,élément essentielà l’intégration.

Mais si les acteurs quasi unanimes s’accordentà dire quel’intervention desfédérations et desclubs locaux estindispensable pourque la pratique sportive comporte des effetsbénéfiques, ilsconstatentenmême temps que les jeunes lesplus difficiles se tournent peuvers eux.Deux facteurs convergeants expliquentce phénomène.

Les jeunesen difficulté sont souventen rupture et cherchentà éviter encadrement,structureset autorité. C’est pourquoi la demandeinsistante qu’ils adressent auxresponsables municipaux porte, pourl’essentiel, surle sport de rue, où ils se sentent autonomes.Il est vraiaussi qu’en dépit de ceslimites, celui-ci peut créer,temporairement, desdynamismes nouveauxdans un quartier. Aussi lespolitiques dela villelui sont-elles,en général, favorables. Lesjeunes trouventainsi facilementprès dechez eux le type de pratiquesans contraintequ’ils recherchentspontanément.

Quant auxclubs locaux, leur forme associative,leur gestionpar des bénévoles qui n’ontsouvent ni le temps, ni la formationnécessaires pours’adresserà un public difficile ne les prédisposent pasàprendreen charge desproblèmes supplémentaires qu’ilsn’ont pastoujoursles moyens de résoudre.

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Ces contradictionspeuvent être résolues,à condition que soientcréés desliens entrele sport derue spontanément choisi et lesclubs.

Les act ions d’aide à l’intégrationdes jeunes par le sport

L’ensemblede la réflexion menéeà ce sujet indique qu’il seraitutile, en lieu et place d’opérations ponctuellesmédiatisées et souventcoûteuses, d’aiderau financementd’un travail de fond. Les pouvoirspublics pourraientencourager les clubsà mener des opérations de moyenterme, enmettantà leur disposition les moyens nécessaires à desactionspermanentes,décentraliséeset démultipliées. D’ores et déjà certainescommunes,ayant à faire faceà des populationsen difficulté d’intégrationont mis en place un encadrement adulte des sports de rue, touten amorçantdes liens avec lesclubs : c’est notammentle cas à Mulhouse etàSaint-Denis. Lesfédérations, grâceà la venuede sportifs de haut niveaudans ces quartiersen vue de démonstrations ou de promotion de leurdiscipline et des clubs locaux,peuvent apporter unatout complémentaire,que d’ailleurs certaines municipalitésn’hésitent pasà utiliser.

Privilégier une pratique sport iveorganisée

Diversesexpériences tendantà mettre en place des passerellesdestinéesà conduire les jeunesvers la pratiqueassidue deleur sport favoriont été menées avec succèset méritent d’être diffusées, sinon étendues.C’est ainsi quela ligue Île-de-France de footballa formé quarantejeunesissus des clubs qui serviront de tuteurspour créer dans leurquartier uneanimation régulière. L’objectif est d’encourager les jeunesà jouer et às’entraîner régulièrement et de les habituerà un encadrement,représentépar une personne reconnue et acceptée parla population locale. Parmi lesdifférents intervenants institutionnelsdans le quartier, l’animateursportifainsi préparé estsouvent le plus proche des jeunes quin’hésitent pas,d’ailleurs, à le choisir commeconseiller pour toutes sortes de problèmes.Cette formule de transition devrait faciliterl’intégration des jeunessportifs dansle réseau desclubs. Au surplus,la présenced’éducateurs oude formateurspourrait aider les jeunes fillesà s’engager dans une pratiquesportive.

Ailleurs, les activités périscolaires ontpu servir de « sas »d’accès vers unepratique sportiveplus classique. La commune deSaint-Fons a développé cette expérience depuis le début des années

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soixante-dix. Lebénéfice gratuit des activités culturelleset sportivesaété établien 1975avec le « passeport loisirs». Les activités périscolairesont lieu à l’intérieur du périmètre de l’école.Aussi permettent-ellesàl’enfant d’y trouver l’amorced’un cursus complet dela pratique du sport :initiation par les cours d’éducation physique, possibilité d’une pratiquesportiveéducative dansle cadre desactivités périscolaires,puis passagepossibleà l’apprentissage du sport decompétition dansun club. Lorsque,comme celan’est pas rare, lesanimateurs sportifspériscolaires sontaussianimateursdans un clubsportif, le lien s’en trouve renforcé.Il est vraique ce qui est possible dans une petite villequi dispose,en outre, dequelquesmoyens financiersn’est pas toujours facileà reproduire.

D’autres expériencesnous ont étésignalées commela consti-tution d’équipes sportives autour d’affinitésethniques.I,a compatibilitéde telles pratiques avecles objectifs d’intégrationn’est pas assurée.Onpeut affirmer que, même si dans certaines situations,l’appui sur lacommunauté constitueun facteur favorable,la recherchedu décloisonne-ment doit orienter les initiatives. Il importe,en effet, qu’une équipeinitialement composée sur un planethnique sache s’ouvrirà tous, danslaperspectivede s’ouvrir ensuiteà des joueurs venus d’autres horizons.

Il nous semble quec’est surtout auxfédérations sportivesdcréfléchir auxobstacles que rencontrent les jeunesen difficulté pour lesrejoindre. Il leur revient encore de trouver lesméthodes parlesquelleselles les attireront, car leur dynamismeet leur force intégratrice nesauraient subsister sans unetelle faculté d’adaptation.

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Chapitre IV

Le milieu pénitentiaireet l’intégration

La p lace du milieu pénitentiairedans une réflexionsur l’intégration

Après s’être penchésur divers lieux d’intégration, sur diversesformes delien social, le Haut Conseil à l’Intégrationa porté son attentionsur un milieu qui représenteà la fois la sanction de certains échecset denombreuses rupturessociales, maisqui peut aussi infléchirles parcoursindividuels :le milieu pénitentiaire.Il va de soi que,par sanature,ce milieuoffre aussi un miroir grossissant de certainstraits de notrevie sociale.Si lepassage parla prisonpeut initier celui qui en est l’objet àcertaines disciplinesqu’il n’a jamais connues,il peut cependantêtre lourd de risques.

Nous nous demandions dans quelle mesurela prison pouvaitréaffirmer une dynamiqueet des principes d’intégration auprèsd’individussouvent désorientés, ou pouvait,aucontraire, cristalliserchez euxuneculture« de la rupture sociale ». L’examen, certes parcellaire, que nousavons faitpermet,grâce aux analyses remarquablement convergentesqui en découlent,de mieux cerner les apportset les limites d’un passageen détention.

Le Haut Conseil a entendu plusieursresponsablesd’établisse-ments pénitentiaireset professionnelsau contact des détenus (sont concernéesles maisonsd’arrêt de Villefranche-sur-Saône, de Fleury-Mérogis, de Loos-les-Lille, et de la Santé, à Paris). Il s’est de surcroît rendudans lestroispremiers de ces établissements.Les caractéristiquesde ceux-ci pèsentnaturellementsur celles de leurs publics : il s’agit d’établissementspourcourtes peines,avec une forte proportion de détentions préventives(entre40 % et 60 %), accueillantun public très jeune (plus des deux tiers desentrants ontmoins de 30 ansà Loos-les-Lille commeà Fleury-Mérogis,untiers des détenusà Villefranche est âgé de moins de 26 ans).À Villefranche,Fleury-Mérogis et Paris, la proportion de détenus de nationalité étrangèredépasse 50 % ; elle avoisine 30% à Lille.

Ces chiffres méritent d’être complétés par lesstatistiquesnationales, qui confirmentla nécessité de prêter unegrande attentionàcette institution. Au 1er janvier 1996, l’effectif de la population détenueen métropole s’élèvait à 52 658personnes (dont 4 % de femmes).Il a

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connu une augmentation deprès de 50 % depuis1980, seules des mesuresde clémenceétant à l’origine de baissesponctuelles quine laissentqu’uncourt répit à la croissance(encore,ces chiffres dissimulent-ilsles mouve-ments liés à l’incarcération,qui s’établissaientà 82 860 sur l’année 1995).

Les motifs etle contexte de l’incarcérationconnaissentégale-ment une évolution marquée depuisquinze ans. Ainsi,la proportion decondamnésparmi les détenus esten légère croissance (de 54 %en 1980à 60 % en 1995), et la durée despeines accomplies s’allonge sensible-ment : au 1er janvier 1996, 32 % des détenus exécutant unepeinecorrectionnelleétaient condamnésà plus de trois ans, soitle double dela proportion constatéeen 1980 ;de même, les condamnésà une peinecomprise entre dixet vingt ans représententaujourd’hui 62% descondamnéscriminels, contre 38 %en 1980. Cette évolutionpeut êtreinterprétée de deux manières : elle illustre autant une aggravation desinfractions commisesdansla sociétéqu’une sévéritéaccrue de l’institutionjudiciaire dans les condamnations.La transformation dela nature mêmedes infractions -évoquéedans le chapitre «intégration et vieurbaine -peut constituer un autre facteurexplicatif.

Enfin la prison touche particulièrementles jeunes etles étran-gers : le taux de détention calculépar tranche d’âgeest le plus élevépourles tranches21-25 anset 25-30 ans (respectivement 274et 275 pour 100 000habitants),et tout à fait important pourla tranche d’âge des18-21 ans (tauxde détentionde 180pour 100 000habitants),le taux moyen pour l’ensemblede la population s’établissantà 90 pour 100 000 habitants. Aussi,au 1er

janvier 1996,49 % des détenusen métropole avaientmoinsde 30 ans (40 %ayantentre 21 et 30 ans).

Quant auxdétenus étrangers,leur nombrea plus que doubléau cours des quinzedernières années, et leurproportion dans l’ensembledes détenus est passée de 20 %en 1980 à 29 %au 1er janvier 1996.Cettesurreprésentation est évidenteau regard de la part des étrangersdansl’ensemble dela population résidanten France (soità peineplus de 6 %).L’interprétation en est à nouveau délicate : si l’on doit voir unecorrélation entre laproportion des jeuneset celles des étrangers(dans lamesure où ceux-là sont plus nombreux parmi ceux-ci queparmi lesFrançais),d’autres explications doiventêtre recherchées dans lestaux dedélinquanceeffectifs et dansle comportement des instancesrépressives.

En toute hypothèse,l’étude du milieu pénitentiaire nepeut êtreéludée dans une réflexionsur les processus d’intégration.

Des jeunes détenus éloignésd’une dynamique d’intégration

Il apparaît, tout d’abord, quele milieu pénitentiaire peutlaisserse reconstituer enprison les ségrégationset les conflits qui ont lieu à

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l’extérieur : elle estainsi, bien souvent,un lieu de partage conflictuel desterritoires entredétenus, suivant diverses logiques ségrégatives,le plussouvent spontanéesmais parfois aussitoléréespar l’administrationpéniten-tiaire. Ce cas de figure caractérisela « politique de peuplement » denombreux établissements, consistantà regrouperlesdétenusselondes critèresd’origine nationale ou ethnique, ou de religion.Il est vrai que desconsidérations pratiquesliées aux interdits alimentaireset aux modesde vie,poussenten ce sens ;les directeurs invoquentaussi le souci de faciliter latâche deleurspersonnels -surveillantsnotamment -en nombre réduit. Celane peut cependant que renforcer les particularismeset hypothéquerlesconvergences possibles entreindividus différents. D’autres formesde ségré-gation sont aussi observées : reconstitution de« bandes » de quartier;prosélytismemusulman -d’autant plusfort que les autorités représentativesd’un islam modéré sontplus effacéesen ceslieux ; oppositions entre groupesautour detrafics diverset de la drogue... Ces phénomènes engendrent ouentretiennent desformes de « caïdat» dans les relations entredétenus, caïdatque l’administration pénitentiaire n’encourageni ne reconnaît, naturellement,mais qu’elle tolère souvent. Les agissements de ces autorités « defait »troublent inévitablementtoute notion d’autorité légitime, déjà affaibliechezun grandnombrede jeunes détenus.

Leur comportement est,d’après lesobservations convergentes despersonnels travaillantà leur contact (surveillantset cadres socio-éducatifsnotamment),assez différent decelui des détenusplus âgés.La consciencede la faute commiseest souvent inexistante (ilen va de même lorsque desproblèmes disciplinairesseposenten prison) ; le jugementet la sanctionquiy sont attachéssont, dèslors, considérés comme incompréhensibleset nesont donc pas admis.Par ailleurs, les attitudes « consuméristes » sont trèsrépandues,et suscitent de nombreuses exigences dansla vie quotidienneenprison comme dans lesactivités socio-éducatives proposées,audétriment desefforts minimauxnécessairesà toute dynamique d’insertion.

Dans ce contexte, la prison semble exercerune influenceambiguë - à vrai dire souventnégative - sur les chanceset conditionsd’intégration desjeunesqu’elle a momentanémenten charge,et ce quelsque soient les efforts des responsablesà leur contact pour utiliser cettepériode de manière positive.

Des efforts importants accompl isen prison en termes socio-éducatifs

Suspensionmomentanée dans un parcourschaotique,la prisonpeut être, notammentpour lesjeunes,un temps de reposvoire d’apaise-ment, untempségalement d’écouteet de parole.Elle permet alorscertainsbi lans - en termes desanté, parexemple - et redonne une place auxdiscours et aux actesen matière desoins, deprévention sanitaire ou deformation. La détention est aussi parfois une occasion de rapprochement

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au sein des familles,si l’on en juge par le nombre élevé devisites decelles-ci en prison - mais les liens établisentre les familles et lesintervenantsmédicauxou socio-éducatifs demeurent faibles.

Les équipes socio-éducatives et les innombrablesassociationsintervenanten milieu pénitentiaires’efforcent,à travers l’accompagnementet les activités qu’elles proposent,de fonder de nouveaux lienssociaux,de réapprendre les principes d’organisationde la vie sociale, et decontribuer (modestement)à la réinsertion économique.

Un suivi individuel est ainsi proposéaux détenus surle plansocial et médical, plus rarement surle plan psychologique.Le rapproche-ment de l’organisation des soinsmédicaux avecle système de droitcommun constitue,à cet égard, un progrès trèsimportant, conforme ausouci d’intégration. Il laisse cependant entierle problème dutraitementde la toxicomanie desdétenus :un traitement parla méthadonene pouvantêtre initié en prison (seuls peuventêtre poursuivis lestraitementsengagésavant l’incarcération),c’est la souffranceliée au manquequi fait l’objetd’une priseen charge médicale ; celan’élimine pas,dans la perspectivede la libération, la dépendance àla consommation de drogue.

L’organisation des journéesen détention laisse une placeimportante au sport, mais aussi à des programmesde mise à niveauscolaire,ou de formation professionnelle qualifiante(avec l’appui d’or-ganismes extérieurs tels quele GRETA), ces programmes étant adaptéssur la base de bilans scolaires et professionnels individuels.

Un travail salarié peut également être effectué au sein del’établissement pénitentiaire,pour le compted’entreprisesprivées,en con-trepartie d’un « pécule », maisla qualification ainsi apportéeest négligeable(il s’agit, en effet, généralement, de tâches de manutention ou de façonnage).En termes culturels,la pratique théâtrale n’estpas rare, même si elle seheurteau manqued’assiduité des détenusimpliqués. Lesefforts particuliersmenés danscertainesmaisonsd’arrêt autourde la lecture méritent d’êtrementionnés ;ils ont permis, avecla collaboration de bibliothèques, desusciterun regain d’intérêt pour la lecture,de la part des détenus.

Ces activités diverses supposent des partenariats actifs avecdes institutions et associationsextérieures ; ellessupposent aussi uneadhésion des détenus eux-mêmes,qui est parfoisdifficile à obtenir enl’absencede toute valorisation des efforts accomplis dansce cadre.

Des résultats cependantcompromis par les condit ionsd’organisation de la détention

Dans l’ensemble, très peu de progrèssont cependantobservésen termes de dynamismeet d’autonomie personnels ou delien social. Un

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travail de fond avec lesdétenus, orienté vers l’intégration économique etsociale, se heurte,il est vrai, à plusieurs obstacles.

Tout d’abord, le manqued’effectifs deséquipes socio-éduca-tives est manifeste (par exemple, la maison d’arrêt de Loos-les-Lilledisposede neuf travailleurs sociauxpour environ 1 000 détenus).Celainduit mécaniquementune faible disponibilité des travailleurs sociauxpour chaquedétenu, et limitele degré d’individualisation desdémarchesengagées avec chacun d’eux.

Par ailleurs, les conditions objectives d’organisation dela déten-tion ne suiventpas toujoursune logique d’intégration, c’est-à-dire,dansunpremier temps, denormalisation -sans mauvaise interprétation de ce terme.

Ainsi, les regroupements fréquents des détenus par ethnie,lemélange,à l’inverse, de populations fort différentes tels les étrangersensituation irrégulièreet les véritables délinquants,la persistance entre détenusd’un caïdat « administré », l’effacement des autorités représentatives d’unislam modéré au profit de réseaux développantun islam prosélyte - quisavent assurerau sein des établissements un certain contrôle des comporte-ments - ,constituent autant de pratiquesqui, au lieu de rapprocherla prisondu droit commun,y reproduisent ou aggravent des phénomènes caractéristi-ques desquartiers dontsont issus les jeunes détenus.

Affecté par ce contexte, le travail social s’inscrit, en outre,dansune organisation assezlâchede la journée en détention. Les rythmesde vie collective sont,en effet, deportée limitée : en dehors des tempsde promenade et de sport, les heures delever et de sommeil,voire lestemps d’apprentissage, nesont pas respectés faute,notamment, desurveillants en nombre suffisantpour rendre cesobligations effectives.

La durée totale de détention d’un individuest elle-mêmealéatoire :à l’incertitude inévitable quantà la durée des détentions préven-tives, s’ajoutele problème des transferts d’un établissementà l’autre. Letransfert sanctionnegénéralement un problème decomportement ou derelation suscité parun détenu ; il en est mêmela principale conséquence.Ce faisant, il hypothèque tout travail deréflexion sur les problèmessurvenus, touttravail de reconstruction de liens sociauxet de projetspersonnels auprèsd’individus qui ont accumulé dansle passé lestentativesavortéeset les ruptures d’ordre familial, relationnel, scolaire, profession-nel et institutionnel. En sus des incohérences entre prisesen chargesuccessives, les transfertsfont peser uneincertitude sur l’horizonet laportée dela relation établie entrele détenu et l’équipesocio-éducative.

Enfin, l’apport de la prison en termes d’intégration estconsidérablementlimité par le manquede coordination entre les différentsintervenants. Toutd’abord, un manque de coordination entre profession-nels travaillant en milieu pénitentiaire et institutions opérant en milieuouvert (missions locales, ANPE, services d’aideau logement...) estgénéralement constaté,en dépit de quelques réussites isolées. Ceci laisseirrésolu l’épineux problème du suivi des détenus aprèsleur sortie deprison, alorsmême que cette étapeexige une autonomieet une responsa-bilité individuelles qui contrastent avecla protection, voire l’assistance

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prodiguées parle milieu carcéral. Undéfaut decoordination est égalementobservé entre professionnelsau sein desétablissements pénitentiaires(travailleurs sociaux, psychologues, psychiatres, enseignants,médecins),entre associationstravaillant auprèsd’un mêmepublic, de même qu’entreétablissementslors des transfertsde détenus. Lesadolescents subissent,de plus, la dissociation institutionnelle entresuivi des mineurs et suivides jeunes majeurs. Enfin,l’extrême rareté desrelations avec lesmagistrats, regrettée par les responsablesdu milieu pénitentiaire,mérited’être soulignée.

Cetteénumérationrend comptede la segmentationde la chaîned’action sociale. Les redondances etincohérences ainsi engendréessontnombreuses. Ellessont non seulement une source d’inefficacitéau regarddes objectifspoursuivis d’intégration, mais aussi,progressivement, unesourcede pertede crédit pour lesacteurs publicsou privés impliqués. Untel défaut de coordination institutionnelleet de suivi des individus n’estprobablement pasétranger aux difficultés rencontrées pournouer unerelation de type contractuel avec les détenus.

Ces obstacleset un certain sentimentd’impuissance se tradui-sent parle désarroi des équipes socio-éducatives, particulièrement vis-à-visdes jeunes (en-deça de 26ans). Leproblème est plus aigu encoreavec lesmineurs incarcérés - en nombre croissant - pour lesquels le régimejuridique et les modes d’action doivent recevoir lesadaptations nécessaires.

Une influence finalement faiblesur les parcours individuels

Finalement, laprison semble exercer,pour lesjeunes détenus,un effet bien faiblement dissuasif !La prise de conscience des raisons dela sanction ainsi subie etde sa signification n’est quepartielle. Ladétention n’offre guère l’occasion d’un rétablissement de lienssociaux.et ne parvient pasà restaurer des dynamiquesd’intégration individuelle.Elle apparaît plutôt, le plus souvent, commeune parenthèsedans unprocessusengagé depuis longtempsen marge desprincipes d’organisationde la vie sociale,marqué parune série deruptures, familiales,scolairesou professionnelles, quela prison prolonge. Ellefait même partie, pourcertains,d’un parcours initiatiquequi confère toute leur autorité auxchefsde bandes locaux.Il n’est, dès lors, passurprenant quele taux de récidivesoit très élevé (estimé, de manièreempirique,à quelque 70 %).

Il convient d’êtrebien conscient dela multiplicité d’initiativesprises par les responsablesau sein du milieu pénitentiaire ;leur chargeest énorme. Les problèmes de moyens qui se posentà eux renvoientauproblème plus vaste desmoyens alloués à la Justice dont le milieupénitentiaire n’est qu’un élément.... d’ailleurs insuffisammentrelié àl’ensemble de l’institution et aux magistratseux-mêmes.

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Chapitre V

Observations générales

Au cours de ses travaux, six ansaprès son premierrapport, leHaut Conseil a pu identifier deséléments favorablesà l’intégration : lemaintien des enfantsà l’école pendant unepériode assez longue quileurpermet d’assimiler, outre des connaissances debase, desprincipes delavie dans notresociété, la stabilisation du statut des étrangersrésidents parla délivrance de titres de séjour longs, les possibilités deregroupementdes membres dela famille sur le territoire, voire le partage d’unmêmefond de culture à travers lesgrands médias. Mais cesfacteurs positifssont neutralisés par l’aggravationde la précarité économique etsocialequi a considérablement affaiblicertains vecteurs traditionnels d’intégra-tion et de structuration dela société française. Ce constat,déjà fait en1991,peut être réitéré avec plus deforce encoreen 1997.

Une convergence des indicesde précarité économique et soc ia leLes solidarités p e r d u e sdu monde du travailC’est ainsi que, pendant longtemps, lemonde du travail et la

classeouvrière ont étéun vecteur essentiel d’intégration des étrangersetdes populations les plusdémunies.Le militantisme syndicalet politique,aux côtés de leurscamarades d’originesdifférentes, partageant lesmêmesvaleurs et les mêmesconditions devie, assurait leur intégration dans lecadre d’une solidarité ouvrière. Cette solidarité s’étendait au-delà del’entreprise, par exemple dansla pratique sportive ou musicaledans lesquartiers et la commune...

Or le chômage, la multiplication des emplois précaires ontconduit au délitement de ces structures et ont affaibli ces solidarités.Beaucoup ont perduréférenceset repères.Le rythme dela vie lui-mêmeest modifié : les enfants,dans certaines familles,sont les seulsà se leverle matin pour aller à l’école. Dans desquartiers difficiles de Roubaix-Tourcoing, laproportion d’inactifs parmi les parentsd’élèves peut ainsis’élever à plus de 50 %.

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L’affaiblissementdes structures familiales...La crise et le chômage ont déstabilisé lesfamilles. L’image

des parents inactifs peutêtre dévalorisanteaux yeux de leursenfants.Leurautorité peuten souffrir, et celaconduit à leur effacement.

Parallèlement,le nombre de famillesmonoparentaless’accroît,et les chefs de cesfamilles, isolés et confrontés aux difficultés de tousordres,n’ont pastoujours la force, le tempset l’autorité nécessairepoursuivre leurs enfants.Le principal d’un collègede la banlieue lyonnaiseévaluait à 40 % le nombre de ses élèves élevésdans une famillemonoparentale.

L’affaiblissementde la famille, dont le rôle social est décisif,peut laisser des jeuneslivrés à eux-mêmes : songeonsà ces trèsjeunesenfants qui restent dansla rue si tard le soir ! Dans certaines cultures,notamment africaines, le foyer est le domaine des seules femmes ;il n’estpas anormal à leurs yeux que les jeunes garçons vivent hors del’appartement,mais les rues d’ici nesont pasle village africain ; ils n’ysont pas soumisau regard familier des adultes du voisinage,maisapprennent d’autresmanières devivre, de se comporteravec lesautres,ou de les affronter parfois, qui nesont pascelles de la famille, ni del’école; on s’affirme dansla rue, on impose son autorité de manièrebienparticulière et parfois non recommandable ! Lorsque, par quelque trafic,ils gagnent del’argent alors que leurs parents sont sans emploi, lesrapportsau sein dela structure familialese trouvent inversés.

... et ses retentissementssur la vie des enfantsL’attention portée par les parentsau travail des enfants est

essentiellepour la réussitescolaire.Les enseignantssont lespremiers àconstater lesconséquences dela défaillance desfamilles, de leurmanqued’intérêt pour les résultats de leursenfants. Une telle attitudepeutconduire lesélèves à renoncer à tout effort. Lesétudes elles-mêmessontparfois dévalorisées auxyeux desplus jeunes, qui netrouvent plusle liendirect et quasi automatiqueespéré entre réussite scolaire et emploi.L’effort perd son sens lorsque les parents renvoient l’image de l’inaction.Il arrive aussi que desenfants serendent à l’école, privés dessoinsqu’exigerait l’hygiène élémentaire. Dans une écoleprimaire de la Seine-Saint-Denis,la directrice signalait que de telles carences atteignaientundixième des enfants. Leur vie chaotique lesrend, parailleurs, sujetsà destroubles de sommeil. Latélévision ou la rue sont parfois leur universnocturne. Ils souffrent souvent dedéséquilibres alimentaires, aggravéslorsqu’ils ne sont plus inscritsà la cantine.

Il n’est plus rare que des lycéens vivent hors de toutestructurefamiliale : un tiers des jeunes d’unlycée de Seine-Saint-Denis viventainsi, et ils sont près de 45 % à rechercher des « petits boulots »,essentiellement pour subvenirà leurs propres besoins.L’institution

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scolaire se trouve alorsen première ligne ; elle est souventla seuleautorité à laquelle sont confrontés ces jeunes,alorsqu’elle ne peut et nepourra jamais se substituer aux familles...

Une crispation réciproque

Une société devenueplus vulnérable estsouvent intolérante,notamment à l’égard des «nouveauxvenus ». Ils risquent d’êtred’autantplus mal perçusqu’ils arrivent au sein d’une population quipeut sesentir« en marge » elle-même. Et ce sont précisémenten des lieux où lesproblèmes sontdéjà grands qu’arrivent la plupart des immigrants. Laréaction est réciproque. La sociétéd’accueil se crispe, et ce malaise semanifestemêmeà l’égard de ceux qui,d’origine étrangère, sont désormaispartie intégrante d’elle-même,ayant acquis sanationalité. Les immigréset leurs enfants dela seconde ou troisième génération, quipeuvent seheurter à la même intolérance que lesnouveaux venus,souffrent alorsd’être ainsi regardés, paramalgame, comme «étrangers »dansleur pays.Ceux qui arrivent s’irritent eux aussià l’encontre dela sociétéd’accueilqu’ils perçoivent, à tort ou à raison, comme «discriminatoire » ou« raciste », même si, dans leurgrandemajorité, ils souhaitent s’yintégrer.

Une perte des repèreset des règles de la viesoc ia le

En tantqu’elle touche les jeunes, cetteperte de repèresproduitbien évidemment des effets considérablesau sein de l’institution scolaire.Les enseignants entendus parle Haut Conseil ontinsisté surla nécessitéde restaureren classe lesrègles fondamentales dela vie en collectivité,notammentle respect des autres,celui des règles dediscipline collectivesans lesquellesla vie en commun n’est paspossible, celuide l’autoritédes parentset des maîtres d’école,celui de l’autorité publique dela cité.Tout cela n’est pasnécessairement acquis par ces jeunes lorsqu’ilsarriventà l’école.

Cet affaiblissement dela transmission des valeursse manifestesurtout parla montée dela violence dans les établissementset la pertedu sens del’effort et du travail.

Des actes deviolence à l’écoleLes enseignants signalentune augmentation dunombre d’en-

fants en « souffrance psychologique » grave,qui se trouvent dansl’inca-pacité de vivre normalementen groupe.Leur violence exprimed’ailleursbien souventleur perte dela maîtrise dulangage :elle est signeet facteurà la fois de cette incapacité.Bien queconstituantune petite minorité, ces

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élèves troublentla vie de l’établissement.Les actes de violence dansl’établissementsont aussi le reflet de la délinquance qui se développeaudehors.Il n’est pasrare, dans les collèges et lycéesde quartiers difficiles,de voir des principauxet des proviseursévaluer le nombre demineursdélinquantsà 5 % de leur effectif : si la proportion n’est paseffrayante,elle est malheureusement significative.

Le refus de l’effort e t l ’absence de projetPlus alarmant et plusrépandu estle désintérêtpour l’effort et

le travail. L’acquisition de connaissanceset la réussite à l’école nesemblentplus être desobjectifs de ces jeunes. Toutau plus rêvent-ilssouvent d’obtenirà l’école, puis dansla vie, des résultats immédiatssansavoir à y investir leur travail. Réussite et travail, succès et effort sontdéconnectés.La satisfaction immédiate l’emporte surl’apprentissage, surl’action continue dansla durée, surle projet debâtir une vie.Nous avonsété frappés parce que nousa dit un proviseur quantà l’existence d’unesorte de «pensée magique » selon laquelle lesrêves - c’est tout autrechose que desprojets - seréaliseront, sans le moindre investissementpersonnelpour les transformeren réalité.

Les confl i ts de la vie urbaine

L’absence de «civilité » et la méconnaissance desquelquesrègles indispensablesà la vie en commun fragilisent les relationssocialeset suffisentà les rendre conflictuelles. Lesincivilités au quotidien mêlantprovocations, dégradations, nuisances sonores, concourent à la formationd’un sentimentd’insécurité et depeur dans lequel seconfondent parfoisle rejet des groupes de jeunesétrangers ou présumés étrangerset lesconflits classiques entregénérations.

Par ailleurs, on constate souvent laméconnaissance desprincipeset des règles du droit aux dépens des jeunes issus desquartiersdifficiles, surtout s’ils sont d’origine étrangère.En dépit del’interdictiondes discriminations, ils seheurtentà des refusinjustifiés d’embauche, destages, ou delogement. Les pratiques sont les mêmes lorsqu’ilsrecher-chent un logement. Comment transmettreà des jeunesle sens du respectde la règle, s’ils constatent qu’ellen’est pas respectéeà leur égard ? Detels manquements ontun effet encoreplus désastreux lorsqu’ils frappentces hommes et ces femmesissus depays marqués parle fait colonial etpar l’image d’humiliations anciennes qu’ilspeuventen avoir reçue au fildes générations.

La pratique d e s spor ts

La vie urbaine peut avoir ses propres repèreset ses codes.Ainsi les jeunes, qui ontun engouement naturel pour le sport, seretrouvent dansla rue pour jouer, notammentau basket ouau football.

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Mais, pour ces pratiques, ils ne sesoucientguère, en général, des règlesclassiquesdu jeu. Leur apprentissage sefait très difficilement lorsqu’ils’agit ensuite d’intégrer un club ou de se préparer au sport decompétition qui requiert, en effet, discipline,opiniâtreté, sensducollectif, hygiène etponctualité : la pratique de rue ne l’apporte pas.Aussi l’effort des fédérations sportives et des pouvoirs publics,notamment descollectivités territoriales, deleurs agentset animateurs,est-il nécessaire pour que ces deuxtypes de sport ne restent pasétrangers l’un à l’autre.

Les jeunes détenusFaute de respecter lesrègles dela vie en société, il arrive que

ces jeunes seretrouvent en prison. Les statistiques,si elles ne sont pasmauvaisesen ce qui concerne l’évolutiongénérale dela délinquance, sontinquiétantes s’agissantde celle desplus jeunes.

Sanction de certainséchecs,la prison pourraitêtre unmomentde prise de conscience,et notamment de rapprochementavec lesfamillesqui, en règle générale,n’abandonnent pas les leurs et viennent leur rendrevisite. Elle pourraitêtre le cadred’un réapprentissage dequelquesrèglesessentielles dela vie collective : selever à heure fixe pour travailler oufaire du sport,redécouvrir le lien social et ses obligations,apprendre lesrègles de l’hygiènecorporelle. Laréalité estloin de ces objectifs ! Tropsouvent, le séjour en prison fait entrer les jeunesdélinquants dans unecontre-société disposantde ses propresrègles, fondéesd’abord sur desrapports de forceet étrangères auxvaleurs dont la société seréclame.L’administrationpénitentiaire, dansle souci de maintenirun certain ordreune certaine paix, peut se trouver conduite à accepter, en fait,l’existence du «caïdat » quiaffirme la loi du plus fort. Lorsqu’enoutre,faute de moyens suffisants et pour des raisons d’organisationinterne,elle regroupe lesdétenus parethnie, elle enferme ainsi dans leurparticularisme ceuxqui voudraient s’en échapper !Si l’organisationvolontariste dela vie collective par l’administration pénitentiaire estinsuffisante, lesdétenus,et souvent les plus jeunes, se retrouventlivrésà eux-mêmes ouà ceux qui entendentrégner sur la prison, quel quepuisse être le dévouement des différents intervenantsde ce mondepénitentiaire. En outre, le manque de coordination entre lesdifférentsintervenants,notamment publics, contrariel’effort de réintégration desdétenus à leur libération.

Telle qu’elle fonctionne,la prison, loin d’être un temps etun lieu de réapprentissage derègles et devaleurs dela société, peutexposer les jeunesdélinquants à encore plus de marginalisation. Elleest malheureusementperçue par trop de jeunes comme unmoment,presque normal, ducycle d’une vie « degalère »,voire comme l’étaped’un parcours initiatique, qui n’interrompt pasle processus d’exclusionsociale.

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Restaurer la cohésion soc ia le :recommandations

Pour leur éviter de parcourir toutes les étapesde la margina-lisation jusqu’au point de renoncement,il est essentiel de nourriretvaloriser la volonté des jeunes,leur capacitéde menerà bien une ambitionet un projet. Ils ont besoin de constater quel’effort et le respect du jeusocial peuventêtre récompensés.

Le succès de ceux qui, issus desmilieux populaires etnotamment du monde de l’immigration, se sontfait un nom, a un effetd’entraînement certain. Lesport est un exempledansce domaine.Il n’estque de voir Djamel Bouras, champion olympiquede judo, affirmant safrancité et son attachementà ses origines, quene renie pas plus AbdelBenazzi, capitaine del’équipe de France derugby, ou la réussitetraditionnelle des joueurs del’équipe deFrance de football, nés de parentsétrangers oumême nésà l’étranger tel Djorkaeff, Zidane, Loko, Ba,Desailly... D’unemanière plus générale,la réussite detous ceux qui ontfait une carrière dansle monde de l’économie, duspectacle, dela danse,de la musique, ou encore les bons résultats que desjeunes des mêmesmilieux obtiennent aux concours des grandesécoles, doivent être mis envaleur. Non seulement lesjeunes en difficulté pourraient y trouver unmodèleet un espoir,mais la société françaisemesureraitmieux la richessede sa diversité.

L’importance du discours sur l’intégrationIl est important que les discours politiques soient une source

d’inspiration quant aux droitset devoirs de chacunet confortent laconfiance collective dela population en sa capacité d’intégrer lesnouveaux venus.Il est vrai que lesdoutes quela société française peutnourrir sur elle-mêmeont, defait, affaibli cette conviction. L’affirmationde la foi en notre pays doit permettre de surmonter les facteurs quiconduisent au repli sur la communauté.Il est possible,en France,des’affirmer comme individu, comme personnalité indépendante ayant sonoriginalité spécifique, dansle cadre d’unesociété oùchacunbénéficie desmêmes droits etdevoirs : il faut le réaffirmer pour conserver saforce au« modèle français »d’intégration.

Le refus des discriminationsliées aux originesEncore l’affirmation de l’égalité doit-ellese confirmer par sa

mise en oeuvre effective. Lorsqu’ils se heurtent à de tellesdiscriminations,les étrangerset les Français d’origine étrangèrene peuvent que douter desvaleurs affichéespar notresociété, car detels agissements sontincompatiblesavec elles.Les manquementsau droit doiventêtre sanctionnés, plusencore

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s’ils sont le fait de services publics, sous peine de saper les fondementsde la société française.

Les pratiques discriminatoires illégales ontsemblé au HautConseil suffisamment préoccupantespour l’inciter à suggérer qu’unprochain rapport traite de cettequestion.

Le discourssur l’intégration doit être confrontéà sa mise enoeuvre sur le terrain. Le Haut Conseil a pu constatercombien l’actiond’hommes et de femmes ayantfoi dans les capacités de notre pays,pouvaitêtre décisive. Élus locaux,enseignants, proviseurs, principaux,éducateurssportifs, travailleurs sociaux, intervenants dumonde pénitentiaires’effor-cent d’inculquer le respect desrègles communes qui s’imposent,au-delàdes différences dechacun. Ces acteurs ontbesoind’être aidés,encouragés,reconnus dansleur effort quotidien.

La création de structures adaptéesLa logique égalitaire n’exclut pasl’adaptation : même des

institutions profondémentancréesdans cettelogique peuvent trouver lesmoyens de donner au plus grand nombre des chances desuccès.L’institution scolairepeut être citéeen exemple. Certains établissementsont adaptéclasses, sections ou cycles auxdifficultés éprouvées par lesélèves. Unsuivi particulier desélèves en «perdition »,voire desstructurescréées à leur intention en cas de problèmemajeur, ont étémis en place.Certes des moyens importants doiventêtre mis en oeuvre,mais desrésultats positifs sont obtenus. Encore faut-il que les « sas »ainsi crééspermettent la réintégration des élèves concernés dansle cursus scolairenormal. Le danger serait,en effet, de pérenniserleur miseà l’écart et deles maintenir en marge. Ilne peut s’agir que d’une transition et d’unephase derattrapage.

De même, en matière sportive, il importe de favoriser lepassaged’un jeu spontané à une pratique organisée. Desanimateurssportifs, reconnus par lesjeunes, assurant des activitéspermanentes dansles quartiers, peuventy contribuer. Lavolonté, le soutien des municipa-lités et celui des fédérationssportives sont essentielsà la réussitedurablede cette transition. Lesgrandes opérations ponctuelles, souvent seulesàêtre médiatisées,ne sauraienty suffire.

Le développement dela délinquance des mineurs appelle,quant à lui, une révision ducadre législatif actuel quipeut donner àceux-ci le sentiment d’une quasi impunité. Devenus majeurs, ils seretrouvent souventen prison où, en dépit des efforts des personnelspénitentiaires, ils peuventse trouver pris dans les mailles d’unecontre-société, dont les règles sont la force et la violence. C’estbien à larecherche d’unmode desanction et de priseen charge spécifiques de cesjeunes pendantleur minorité qu’il faut travailler.

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Le recours à la médiation

Des modes de régulation des conflits diversqui peuvent naîtredans une cité, notamment en raison des incivilités répétées,devraientpermettre d’éviter autant l’impunité quela sanction disproportionnée. Les1 500 conciliateurslocaux s’attellentà cette tâche. Parfois l’actionconjointedes municipalitéset de la Justicepermet de créer des lieux de médiationentre les jeunes délinquantset leurs victimesoù un juge arbitre, semonceouréconforte,selon le cas...Dansbien des domaines, des systèmesde médiationse sontainsi crééspour aplanir au mieux les difficultés avant qu’elles nes’aggravent. Officiels ou officieux, cesmédiateurs agissent dans l’institutionscolaire ou dansles cités et contribuentà organiserle dialogue nécessaireàla préservationdu lien social. Les atoutsde ces médiateurs - souplessed’action, rapidité, intervention particulièrementadaptée - pourraient êtreremis en cause parune institutionnalisationde la fonction. La diversificationdes relaiset le refus dela « communautarisation » des médiationssont aussides facteurs de réussite.

Si une foule d’acteurs doivent s’engager surle territoire, il nefaut pas que leurs efforts puissent être compromispar des insuffisances despolitiques et des pratiques des administrationsqui ont parfois dela peine àcoordonnerleurs interventions. Deschefs d’établissements scolaireset desenseignants ontsu vaincre leurs réticences pour établir des relations avec lesautorités de police du voisinage. Des liaisonsplus étroites sont encoreà créerentre l’administration pénitentiaire,la police et la Justice,à l’échelon local.

Une société qui n’a pas deprojet collectif ambitieux, perd lesrepères autourdesquelspeut sefaire l’intégration. L’intégration neseraitpas possible demain dans une sociétédont les forcescentrifuges d’exclu-sion seraient pluspuissantes quele mouvementd’attraction. Il n’en estque plus important de réaffirmerla confiance quedoit garder la sociétéen elle-même, en les symboles qu’elleincarne,en la valeur des principesqu’elle a forgés au coursde sonhistoire. Le Haut Conseil à l’intégrationn’a souligné les difficultés que pourmieux rappeler la nécessité d’unsursaut et les chances de réussite.

En 1983, selon un sondage publiépar L’Express, 82 % despersonnes interrogées déclaraient se sentirbien en France. Elles étaient 92 %en 1993. Dansun sondage publié parle Nouvel Observateuren décembre1993, 71 % des jeunesissus de l’immigration déclaraient sesentir plusproches dela vie et de la culture françaisesque de celles deleurs parents.La volonté d’être pleinement citoyen françaisest réelle ; elle s’accompagnede la légitime revendication d’une absence dediscrimination. 35 000 jeunesde 16à 18 ans,nésen Francede parents étrangers, ont manifestéen 1994leur volonté d’être français,et ils étaientplus de 30 000 en 1995.

C’est à notre société deprofiter de cettevolonté devivre enFrance, de cette aspiration à uneégalité desdroits et des devoirs.

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Conclusion

La questionde fond qui étaitposéeau Haut Conseil à l’intégra-tion par le thème proposé à ses réflexions était finalementcelle-ci :l’intégration peut-ellese faire - et comment -dans une société, la nôtre,mais dans bien d’autres aussi, que l’évolution du monde oùnous vivonsfracture et fragmente ? N’ya-t-il pas là deux forcesdont les mouvementssemblent s’opposer :peut-on l’éviter,et par quelles politiques ?

Les fractures dessociétésne sont pas chose nouvelle.Cellesde l’Ancien Régime et celles du XXe siècle encore étaient éclatantes !C’est l’uniformisation,bien que relative,créée par deuxguerresmondialeset leurs après-guerres,qui nous rend plussensible aux fissures.Si cellesde la France d’aujourd’huisont devenuesun thème dudiscours politique,c’est qu’il existe unesorte de sismographe social quia enregistré quelquessecousses assez fortespour que lespolitiques, les citoyens, les chercheurss’en préoccupent...

Pour la part, modeste, qu’il estappelé à prendre danscetteinvestigation en ce qui concerne ces hommeset ces femmesdont lacondition doit appeler sa vigilance,le Haut Conseila essayé - etce n’étaitpas facile - de sedégager d’unscepticisme pesant assez lourdement surdes sujets, non pas interdits certes, mais dont onpréfère ne pastrop parler,à moins quece ne soit pour assener des certitudesen se dispensantdeles approfondir.

Nous ne pensons pas, puisque d’immigrationil s’agit, quenotre creuset aitentièrementfondu ! Il a simplement beaucoupchangé,comme lesréalités sociales, les institutions,et les hommes eux-mêmes...L’école reste -elle est plus quejamais - l’âme de cecreuset. Les enfantsy vont toujours plusjeunes, etla fréquentent toujours plus longtemps. Samission est, autant quela transmission du savoir, l’apprentissage dequelques principes essentiels du savoir-vivreen société : faut-il parlerd’éducation civique,d’éducation tout court, demorale sociale séparantnettement ce quel’on peut ou doit faire, et ce qu’il ne faut pasfaire ?S’il est un domaine oùl’on peut invoquer la Républiqueet ses principes,c’est bien celui-là ! Relisons ce qu’écrivaient les auteurs delivresscolairesà l’époque des «hussards » - etmêmeen faisant l’actualisation

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nécessaire -il en resterabeaucoup de «repères »dont nous nous désolonsde la disparition !

L’armée - et surtoutle service militaire - nesontplus au coeurdu creuset,comme elles l’ont étépendant si longtemps avec unetrèsgrande efficacité.Le travail, lui aussi, n’occupeplus la même place :l’accès à l’emploi est difficile ; la condition desalarié souvent précaire ;le monde des travailleurs, les syndicatset leurs militants, n’exerce plusla même emprise...Mais, face à ces reculs, les dernières décennies ontconsacré la prodigieuse avancée du mondeassociatif et de celui desmédias qui n’étaient que de modestes facteurs d’intégration,il y acinquante ans...Dira-t-on qu’ils sont là pour le meilleur comme pourlepire ? Il demeurequ’ils jouent un rôle essentiel dansla convivialité, laconnaissance de l’expression orale dufrançais, les initiations à laconnaissance denotre pays, aux différentes formes d’activitésociale,culturelle, professionnelle, sportive... Onpeut - et on doit souvent -leurdemanderplus ; notre regard sur eux doitêtre toujours vigilant, et critiqueparfois. Il reste qu’ils sont des piliersdu nouveaucreuset...

Mais la flamme de l’intégration, c’est à la fois chacunde nouset nous tous, et l’État; etl’État, c’est encore nous ! Il porte lesvolontésou les craintes, les forces ou les faiblesses, les convictions et les valeurs,ou les renoncements, quisont les nôtres.

Si nous ne pouvons nous satisfaire d’une cohabitation d’op-portunité économique, sociale, ouadministrative, dontse contenteraient,hélas, peut-êtrecertains de noshôtes, si nous voulons que ceux qui sontchez nous soient, parl’esprit et la sensibilité, aussi près quepossible denous, jusqu’à nous rejoindre, si nous voulons qu’ils croient à nosprincipes, essayons devivre les valeursauxquelles nouscroyons,et dontnous nous réclamons. Ce n’est pastoujours aisé pour nous qui ac-cueillons ; l’effort est souvent plus difficile pour ceux qui viennentd’autres mondes,et qui sont accueillis. Mais la rencontre desdeuxvolontés si, et lorsque, elle se produitdans l’infinité des circonstances dela vie de tous les jours,a une force exemplaire dont leseffets peuventêtre mesurés et appréciés aux jours oùnous vivons,et encore mieuxdansle « temps long ».

C’est la conviction de ne pouvoir agir que dans cettelongue durée quia conduit le Haut Conseilet ses membresà s’abstenirde prendreposition - dès lors quen’était pasmise en causela conceptionmême del’intégration - dans de grandsdébatspublics opposantpensées,sensibilités, idéologies,au sujet de l’immigrationet des immigrés - et ilsfurent nombreux dans les sept ans de vie duHaut Conseil. Il n’en restepas moins que cesdébats légitimes,en démocratie, et de plus en plusnécessaires,autour des politiques, des textes, desdifficultés, desincidentsou accidents auxquelsdonne lieu leurapplication,et que personne ne peutignorer si grande estleur médiatisation, peuventsurprendre, ralentirbienplus qu’accélérer le processus d’intégration. Nous ne pouvonsdoncqu’être trèsattentifs -surtout lorsqu’il s’agit de l’élaboration dela lo i -à tout ce qui pourrait toucherà telle ou telle des valeursauxquelles seréfère le « modèle » d’homme digne et libre que nous osonsproposer.

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ANNEXES

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Annexe 1

Avis relatifau programme nationald’intégration urbaine(extraits)

Par courrier du 14 décembre1995, le ministre chargé del’Aménagement du territoire, dela Ville et de l’intégration et le ministredéléguéà la Ville et à l’Intégration ont saisile Haut Conseilà l’intégrationd’une demanded’avis sur « les conséquencesdu Programme nationald’intégration urbaine (PNIU) surl’intégration despopulationsimmigrées ».

Le Haut Conseils’est réuni dèsle 20 décembrepour examinerle texte qui lui était soumis,et qui ne concernait que les mesuresarbitréeset décidéesà cette date.Le PNIU, dans saglobalité, qui devrait être rendupublic très prochainement comportera donc des mesures dontle HautConseil n’a paseu connaissance,et qui n’engagent pasle présent avis.

Le Haut Conseil pourrad’ailleurs se prononcer surce qu’ap-porteront au programme lesmesures nouvelles après quel’ensembleauraété rendu public.

L’élaboration d’unplan national d’intégration urbaine sejustifie par la volonté demaintenir une société solidaire d’égalité et defraternité sur l’ensembledu territoire national,en particulier sur ceuxdes espacesurbains aujourd’hui fragilisés.Le Haut Conseil à l’intégration,pour sa part, demeureattachéà uneconception del’intégration entenduecomme « la participationlibre et active à la société tout entière del’ensemble des femmeset hommes appelésà vivre durablement surnotresol, en acceptant que subsistent desspécificités, notamment culturelles,mais en mettant aussi l’accent sur lesressemblanceset les convergencesdansl’égalité desdroits et des devoirs ».Il s’agit d’une démarchepatiente,complexeet enrichissantequi appelleau premier chefla participation desintéressés et qui se distingue de l’assimilation mais s’opposeà lareconnaissance de statuts particulierset de droits spécifiques à des« communautés »ethniques ou culturelles.

Ce préambule regroupe plusieursobservations, d’ordregénéral,de natureà compléter et éclairer l’analyse - qui suit - du textemêmeprésentéau Haut Conseil à l’intégration.

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Les publics auxque lsdoit aujourd’hui s ’adresserune politique d’intégration

Parmi les habitants des quartiersen difficulté, les parents, toutautant queles jeunes, doivent êtreau coeur de la politique d’intégration.Alors que l’insertion professionnelle desjeunes est particulièrementdifficile, que nombre de parentsau sein de la population immigréeconnaissentun désarroigrandissantfaceà leurs enfants,la reconnaissancede la place et de la responsabilité essentielles desparents pourl’intégra-tion s’impose.La dimension intégratricede la famille, la préservationderepèresculturels, l’accomplissementde la mission éducativeà l’égard desplus jeunes comme des adolescents sont,en effet, en jeu désormaisdansces quartiersen déshérence,et justifient que la plus grande attentionsoitaccordée à cette génération quelque peu « oubliée » des politiquespubliques.

La promotion du rôle et de l’autorité des parents peuts’appuyer surle système éducatifet sur le tissu associatif.A cet égard,l’importance d’un mouvement associatif familial,bénéficiant d’une assiselarge et stable,doit être soulignée.

Les territoires auxquels s’appliqueune politique d’intégration urbaine

S’agissant del’échelle d’intervention, si la commune,voire lequartier, présenteun degré de proximitépertinent pour la participationdes populationsaux actions d’intégration,l’échelle intercommunale doitpermettre un traitementglobal des problèmes, notammentd’habitat, auniveau de l’agglomération.

L’adaptation aux réalités locales, la responsabilité desmaires à cet égarddoivent être pleinementreconnue. Il appartient,eneffet, à l’État d’intervenir en appui desinitiatives locales.

Les acteurs sur lesquelss’appuietoute politique d’intégration

L’État, dansla conception de ses interventions, doitavant toutreconnaître, saluer etencouragerl’oeuvre quotidienne des acteursprésentsauprès des populationsen difficulté, au premierrangdesquels lesautorités

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communales et les associations. Il convient, s’agissant de cesdernières,d’en tirer les conséquences : ainsi, lesrelations entre les personnespubliques et les associations devraientêtre aménagées defaçon à mieuxrespecter les principes declarté, de responsabilitéet de stabilité. Celasuppose également que soit recherchéela conclusionde contratsd’objec-tifs pluriannuels, concernanttant lesobjectifs à atteindre que les moyensà mettre enoeuvre,assortisde l’évaluation de l’impact des actions menées.Il faut infléchir en ce sens les conditionsde détermination etde versementdes subventionspubliques afin, notamment,qu’il n’y ait pas de retardsnécessitant des recours coûteuxà des prêts bancaires ;il importe égale-ment quel’exercice du contrôle financierauprèsd’institutions commeleFAS ne remette pas en causede tels principes.

De même, c’estavant touten identifiant et en soutenant lesinitiatives desentreprises que l’emploi - condition nécessairede l’inté-grat ion - pourra localement trouverune nouvelle dynamique. Cetteconviction s’appuie sur deuxconstats : onobserve,en effet, une discri-mination particulièrement forteà l’encontre des personnes d’origineétrangèredans l’accèsà l’emploi. L’intégration suppose d’abordun effortimportant decréation d’emplois dans les quartiers.Les obstacles existantde fait justifient que soient renforcées les incitationsà l’embauchedepersonnes présentantun certain nombrede difficultés d’insertion, quelleque soit leurorigine, et que soient implacablementréprimées lesdiscri-minations à l’embauche. Mais on constate, par ailleurs, qu’un nombrecroissant d’entreprises consentent deréels efforts en faveur de l’emploide personnesmal insérées, etqu’une mobilisation sur cethème dans lesquartiers en difficultés est aujourd’hui perceptible ;il serait souhaitabled’en tenir le plus grand comptedansla conception des interventions despouvoirs publics.

La détermination d e s object i fset moyens d’une politiqued’intégration

La volonté politique de promouvoir la cohésion et la paixsocialesainsi qu’un nouveaudynamisme socio-économiquedans certainsespacesurbains, le souci de l’intégration despopulationsen difficulté ontconduit, depuisle début des années1970,à une multiplication d’expé-riences. Cette continuité rend impératif un effort d’évaluation despolitiques menées depuisenviron vingt-cinq ans. L’évaluation apparaîtparticulièrement nécessairepour quelquespolitiques commela politiquede prévention dela délinquance ou pourcertains dispositifs comme lesmissions locales ou leszones d’éducation prioritaire. Parallèlementdevraitêtre effectuée uneanalyse précise et rigoureuse de l’évolution desproblèmes posés et appréhendésau cours de cette période.

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Une telle démarche méthodologiquedoit permettre, à partird’objectifs clairs, de compléter, de remplacer et de renforcer sélectivementles moyens existants.Ainsi, le Plan national d’intégration urbaine doitéviter absolumentde se traduire par une nouvelle multiplication, hâtive,de structuresou d’intermédiaires administratifs.

De surcroît, alors que se prépareun projet de loi contrel’exclusion, il est indispensable quesoient assurées l’articulation etlacohérence entre ses dispositions etcelles contenues dansle présent plan.

Enfin, l’importancedu discours ne doit pas êtresous-estimée.Ainsi, il convient de désignerclairement et simplement les problèmes quifont l’objet de ce plan national, sans taboude langageou de la pensée,et sans quesoient stigmatisés despopulationsou des groupes sociaux.

L’ensemble des propositions est favorablement accueilli parleHaut Conseil à l’intégration. Cependant,certainesméritent précisionsouréexamen.Nous nous attacherons uniquementà ces dernières.

Suivent ensuite un certain nombre de remarques serapportantà des mesuresprécises prévuesdans le projet dePacte de relance etconcernant :- l’amélioration du fonctionnement desservices publicsdans les quartiersdifficiles ;- le rétablissement dela paix publique ;- l’égalité des chances.

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Annexe 2

Contribution des membresdu Haut Conseil

Jean-Marie Bocke lMaire de Mulhouse, ancien ministre

« Quelle politique municipale pour l’intégration au-jourd’hui ? » Mulhouse est une ville dont l’essor démographique etéconomiquea été étroitement lié depuisla fin de la guerreà l’arrivée demigrants, notammentsous l’impulsion degrandes entreprises telles queles mines de potasse d’Alsace,la manufacture d’armes Manurhin,lafilature DMC et, en dernierlieu, l’installation des usines Peugeot. «Villeaux cent cheminées », Mulhouse recenseainsi unecentaine denationalitésparmi les quelques 20 %d’étrangersqui y habitent.D’où aussi,dans lecontexte alsacienà forte identité régionale, un fort taux de voted’extrêmedroite qui institutionnalise le Front national comme secondeforcepolitique locale.

Ville-centre de 110 000 habitantsau coeur d’une agglomérationqui en compte plus du double, Mulhouse concentreégalement lesdifficultés sociales consécutivesà la reconversion délicate de son tissud’industries traditionnelles.Le développementde l’agglomération s’esteffectué essentiellement cestrente dernières années parun phénomène derésidentialisation hors desmurs de Mulhouse,et explique les difficultésd’habitat qui se conjuguentà la mutation sociale dela « crise ». Ainsi,ces îlots insalubresqui jouent le rôle d’habitat social de fait,avec, pourconséquence, l’agrégationde populations issuesde l’immigration dans cessecteurs. Avecla concentration du patrimoine HLMdans la ville-centre,un taux de chômage (14 %) considéréà l’aune de celui de l’Alsace (8 %),la présence dela moitié des RMistes du département, Mulhouse estsouvent comparé à une « banlieue dansla ville ».

Face à ces constats, avecmon équipemunicipale, nous avonsdès 1989élaboré une politiqueambitieuse dedéveloppement socialurbain.C’est ainsi que plusieurs quartiers ontbénéficié des procédures DSQetd’OPAH, avec le soutien vigoureux dela municipalité totalement impli-quée dans unevolonté derequalification del’espace urbain. De même,un contrat de ville a été signé en 1994 avec l’État, la région et ledépartement, etle partenariat actif du FAS, dela CDC et de la CAF. Plusrécemment, nous avonsbénéficié duclassement du quartier des Coteaux

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en zonefranche urbaine. Municipalité responsableet respectueusede latradition historiquede Mulhouse,nous avonsdéveloppé en mêmetempsune politique municipalevisant à l’intégration des populations issuesdel’immigration. Ou, plus exactement, s’agissant des plus jeunes,la« deuxième génération » et celle quila suit déjà, unepolitique d’accom-pagnementde leur intégration,qui est pour beaucoupd’entre eux déjàréalisée, commeen témoignele développement des mariages mixtes, lesparcours d’exemplaritéde plus en plus nombreux.

Une conventiona été passée dans cette perspective dès1990avec le FAS. La procédure d’intervention s’estancrée autour de deuxaxes. L’un a privilégié une approche globaleen proposant des actionsdansle domainedu développement social urbainen général, quis’adresseà l’ensemblede la population caractérisée par des problématiquessocialessimilaires. L’autre axea été propre aux populations issues de l’immigra-tion, par des interventionsparticulières dans un certain nombre dedomaines : alphabétisation, formation, aspects culturels, démarginalisationde la question religieuse. Des moyensfinanciers spécifiques ont étéaffectés autour desobjectifs suivants : la détermination d’unepolitiquelocale d’insertion desimmigrés, la coordination del’action des différentsacteurs locaux del’intégration et la mise en cohérence,et l’améliorationde l’efficacité des aides publiques dansce domaine.

Ce dispositif a notamment permis de développer desprojetsinnovants, commela création d’une structurede scolarisation d’enfantsprimo-arrivants en partenariat avecl’Éducation nationale (baptisé « Es-pace Alpha »),la coordination des actionsd’alphabétisation à l’échelle dela ville et l’ouverture d’un lieu-ressource pour les formateurs.La créationd’un fonds « vie associativeet intégration » a permis de financer desmicro-projets portés par leshabitants ou les associations de quartier.Etdes postes de médiateursinterculturels ont été rattachés auxcentressociaux de trois quartiers retenuscomme prioritaires.

En direction des jeunes, de nombreuses actions ont étémêmelancées dans l’objectif d’une meilleure insertionau monde du travail(emplois de ville, partenariatsdansle cadre de l’insertion par l’économi-que, etc.) maisaussi de l’accèsà la culture,comme les sites pilotesinitiéspar le ministère dela Culture.

Constructiveet résolumentoffensive, une telle politique mu-nicipale, qui oeuvre à la cohésionsociale detous les habitants,doit enpermanencefaire l’objet d’une réflexion sur lessituations nouvelleset lesadaptations qu’elles supposent. Aujourd’hui, cette politiquebute sur desdifficultés nouvelles, quetous les élus de terrainconstatent.La perte derepèressociaux,liée à la déstructuration del’environnement familialet àl’image négative réfléchie parcertains parents,amènechez de nombreuxjeunes,et encore plus d’adolescents, une attitudequi engendre conflitetincompréhensionparmi nombre de nosconcitoyens. Simples «incivilités »ou violences urbainessont des phénomènes nouveaux perçuscomme desrefus d’intégration,et nous ne savons pas commenty répondre. Surtoutlorsque ces jeunes issus de l’immigration nousrétorquent quela sociétéles discrimine dansl’accès à l’emploi ou aux loisirs (lesdiscothèques...),

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et donc les refuse et remeten causela réalité de leur intégration, faitepar l’école de la République, parla pratique sportive, associative, voirepar suite de l’absencede transmission des référentsculturels de leursparents.

Ce sontprécisément ces questions sur lesquelles les gouver-nants, aujourd’huicomme demain, devront se pencher.Car, qu’on leveuille ou non, et cemalgré lesillusions qu’entretiennent les extrémismespour alimenterleur fonds decommerceélectoral, les populations issuesde l’immigration sont durablement surnotre territoire, s’intègrent, semélangent et... sont déjà pour beaucoup desFrançais de deuxièmegénération.

Pierre ChaunuHistorien

Comme les citoyens dupays que nousnousefforçons de servir,nous venons d’horizonsdifférents, et nos sensibilitésne sont pasidentiques. Pourtant,dans un domaine que nous nous sommesdonné latâche d’étudier et que nous avonsessayé decomprendre, sous laprésidence du président MarceauLong, nous sommesarrivés, sans tropde peine, à un compromis raisonnable. Jel’ai accepté; donc,je ledéfendrai.

Ce queje vais dire y est exprimé, impliqué, ounon contredit.La France,jusqu’à ce jour, n’a pas réussitrop mal l’intégration. Sansdoute, sommes-nousune des sociétés qui ontle mieux réussi : ceuxquinous rejoignent s’intègrent plus ou moins vite,et plus ou moinsheureusementà la communauténationale.

J’insiste surle fait que pour intégrer, il faut être deux et qu’ilfaut traiter autrement qu’avecexaspérationet mépris lescraintes et lesangoisses dela population qui reçoit. Elle a le droit à certainesexplications et à quelques apaisements. La seconde condition estunebonne maîtrise des flux ; par conséquent, qu’on veuillelaisser au pouvoirpolitique démocratiquementétabli la liberté d’action dans ce domainepour le bien commun. La troisième condition (c’est en fait la première)est de retrouver le chemin d’une vraiepolitique familiale adaptée quipermettrait le remplacement dela génération. Ce sont lesenfants qui,àl’école, intègrent lesarrivants.

Se rappeler que, dansle système français,il y avait l’école,une école où l’onapprenaitla langue, oùl’on acquerrait les connaissancesde baseet les règles dela civilité, et quelques valeurs communes.Il yavait aussi le service militaire où l’on achevait de former des citoyens.L’armée de métiers’impose peut-être, maisla fin de la conscription nefacilitera pas la tâche. Je doute quela laïcité laïcarde, produit de notre

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histoire, soit absolument intangible. Lesdifficultés de la deuxièmegénération desmigrants d’hier prouvent quela naturesociale a, elleaussi,horreur du vide.

Aider un Islam françaisà exister légalement et, peut-être,fairebénéficier les autres famillesspirituelles.. de droits qui ne sont pascontestés ailleurs, dans une Europeà laquelle nous avons décidéde nousjoindre. La libre expression de discourscohérentssur le sens,la mort, lavie pourrait... peut-être contribuerà faire pencher nos sociétésmorticolesen direction dela vie.

Christian DelormePrêtre du diocèsede Lyon

Ainsi qu’en témoignent les débatspolitiques, l’intégration desimmigrés est perçuecomme un des défis majeurs posésà notre société.Cependant,cette question estgénéralement abordée dansla plus grandeconfusion. Quemet-on, en effet, dansla catégorie « immigrés » ?Tropsouvent, malheureusement, onregroupe ensemble,sansdiscernement, nonseulement des immigrationstrès diverses, mais ony ajoute fréquemmentles enfants nés de l’immigration,lesquels ne se perçoivent pascomme« immigrés ». Régulièrement,dans des rencontres auxquellesje participe,j’entends ainsi les protestations de jeunes qui s’insurgent contrele faitqu’on parle d’eux comme d’une population «à intégrer ». «Nous avonsautant delégitimité à vivre en France, disent-ils, quetous ceux qui ontgrandi ici. Et ce n’est pas d’abord de notre fautesi nous ne trouvons pasd’employeurs,si l’on nous refusel’accès au logement,et si tant de gensnous regardent comme descorps étrangers ! »

Toutes les communautésissuesde l’immigration n’ont pas lesmêmes relations avec la culture et la nation françaises.D’aucunesdécouvrenttout juste celles-ciet n’ont pas forcémentd’attrait pour elles.D’autres, en revanche,et c’est particulièrementvrai pour les famillesimmigrées venues du Maghreb ou dela région dufleuve Sénégal, ont unetrès longue histoire avecla France, et ontélaboré, depuisdéjà desannées,des stratégies d’intégration ou,au moins, de « négociation » deleursfaçons de vivre aveccelles dela société françaisedominante. Commentpeut-on prétendretraiter leur adaptation dela même manière quecelle demigrants ne connaissantrien de la France ?

Avec certains groupesimmigrés, les plusgrandes difficultésde convivanceviennent surtout demodèles d’éducation différents desenfants, qui ne parviennent pasà s’adapterau contexte français. Ainsi,les cultures oùl’on sépare fortement les groupesmasculin et féminin onttendanceà laisser évoluerà l’extérieur de la maison les garçons.Dansles sociétés des paysd’origine, une prise en charge de ces garçons parl’environnementévite des déviances.En revanche,dans notre contexte

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urbain où personne (ou presque) nes’intéresseà ce que fait l’autre, lefait que desgarçons soient «lâchés » dans l’espace public sans contrôled’adultes ayantautorité sur euxaboutit, surtouten temps de chômagemassif des jeunes,à de sérieux problèmes de délinquance juvénile.

Notre société gagnerait sûrementà acquérir une meilleureconnaissance desdifférentes cultures véhiculées par les communautésimmigrées présentesen France.La société française, ainsi,est incroya-blement pauvre enmédiateursculturels, capablesde faciliter les adapta-tions des uns et des autres. Quia une bonne maîtrise des modèlesfamiliaux et éducatifs des famillesdu fleuve Sénégal ? Des gensbienpénétrésde ces cultures pourraient actuellementrendrede grands servicesdans de nombreusesmunicipalités dela région parisienneet dans nombred’établissements scolaires.

La peur se manifeste depuisquelquesannées qu’àtrop prendreen compte lesparticularismes culturels des différents groupes humainsprésents en Francenous favorisions l’émergence d’un communautarismecontraireà notre traditionet à nos idéaux républicains.Mais nouspouvonstrès biencontinuer d’affirmer très fort notre volonté de faireplaceà toutepersonne, d’assurerà chacunele droit de s’intégrer individuellement dansla société française,tout en reconnaissant l’utilitéde certains relaiscommunautaires.On sait, ainsi, que, dansun passé pas si ancien dessyndicatsétrangers comme des associations et desÉglises étrangères ontjoué un rôle non négligeable dans l’implantation définitive,dans la nationfrançaise, de populations immigrées entières (Italiens,Espagnols,Armé-niens...). Les regroupements communautairesprésententun danger pournotre modèle républicains’ils aboutissent à des enfermements et des replisagressifsà l’égard de l’environnement. Mais ils peuventêtre aussi despoints de passage entre desmodèles d’existence différents.

Certains replis communautaires,surtout lorsqu’ilssont encou-ragés par desdiscoursreligieux radicaux, doiventnous préoccuper,maisils se révèlent trèsminoritaires au sein desfamilles immigrées. L’aspira-tion massive des jeunes de ces familles, en effet, est de pouvoir se fondre(certes sans se diluer !) dans notresociété. Et les replis quel’on peutconstater aujourd’huidans lesquartiers lesplus en difficulté de nos villessont essentiellementliés à des phénomènesd’exclusion quenotre systèmeéconomique et socialsécrète.

Au vrai, le danger principal quimenace désormaisla cohésionde notre société est celui dela montée dela pauvretéchez desgroupesentiers de populations.Les immigrés et leursenfants nesont pas - loinde là ! - les seulesvictimes du chômage qui s’est installédurablementdans le fonctionnement économique de notre société.Mais ils sontdavantagetouchés encore que lesautres,et les enfants de l’immigrationvivent souvent cenon-accèsau marché du travailcomme une exclusionqui les marque collectivement. «Si tu t’appelles Mohammedet que tu asune gueule de bronzé, ne t’attends pasà trouver un travail ! », entend-ondire à travers tout le pays,et ce « verdict », malheureusement, sevérifiede plus en plus.

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Malgré nosidéaux d’égalité et de fraternité, nous avons laissése développeren Franceun certain nombrede mécanismesdiscriminatoi-res contre lesquelsil est urgentd’agir. Dans le domaine de l’emploi,pource qui concerne l’accèsau logement, pource qui serapporte, également,au fonctionnement des institutionsrépressivesde l’État (police, justice,prisons), il y a de graves atteintesà nos principes républicains. Ornotrepays, jusqu’ici,s’est montréquasiment incapable d’apporter des remèdes.Peut-être parce quela preuvede la discriminationsubie doit êtreapportéepar la victime, et que celle-cia bien du mal à la fournir. En Grande-Bre-tagne, un logeur qui a refusé un logement à une personneétrangèreou« decouleur » au motif que le logement étaitdéjà pris quandla demandelui a été faite, doit apporter la preuve de ce qu’il dit. Pourquoi un telsystèmene serait-il pas adopté enFrance ? Pourquoi,pareillement,nepourrait-on pas mettreen place des lieux (neserait-ce qu’un «numérovert » de téléphonecomme celui créé pour signaler les mauvaistraite-ments à enfants) où seraient reçueset vraiment prisesen compte lesprotestations contre les pratiques discriminatoires ?

L’intégration, il ne faut pas l’oublier, doitêtre un doublemouvement :la volonté pour un immigré des’adapter à la société quil’accueille et dontil doit respecter les règles du « vivreensemble », maisaussi la volonté de l’État qui le reçoit de lui faire la place qu’il mérite.Dans les annéessoixante, aux États-Unis,lorsqu’on parlait d’intégration,ce n’était pas dansle sens que les Noirs devaient faire desefforts pourêtre admis par lesBlancs, mais c’était dansle sens que les institutionsaméricaines devaient éliminer toutes lesdiscriminations qu’ellestoléraientou secrétaient.

D’ailleurs, on manque,en France, d’un vraidiscours politiquedisant aux familles immigrées : « Noussommesheureux quevous soyezvenues nous rejoindrepour participer ainsià la vie, au présentet au futurde notre pays.Voyons comment grandirensemble ! »Le discours politi-que, essentiellementcentré sur lesmenaces que feraientpeser surnousune immigrationirrégulière que l’on surévalueà plaisir et sur laquelle onraconte n’importequoi, néglige lesfamilles immigrées et les exposeenpermanenceà faire office de « boucsémissaires ».

Philippe FarineAncien conseiller de Paris

Quelques suggestions,en vrac, en désordre, et en styletélégraphique... Les difficultés (réelles) rencontréesaujourd’hui danslamise en oeuvre du modèle français d’intégrationapparaissent essentielle-ment liéesau chômage,à l’affaiblissement dulien social,à la dégradationurbaine età la crised’identité dela société française.Elles sontdavantageles conséquences de cetétat général dedélitement, plutôt que lamanifestationd’une crise propre de l’intégration despopulationsétrangè-

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res. Impossiblede traiter celle-ci sansla relier à l’ensemble. Impossiblede la traiter «à part ». Impossible deséparer les immigrés dureste delasociété.

Il n’en demeure pas moins qu’il existe des difficultés propresà la conditiond’immigré. En premier lieu,le développement despratiquesdiscriminatoires :comment parler d’intégration quandle faciès, le nom,la couleur constituentbien souvent des obstacles insurmontablesdans larecherched’un logementou la quête d’un emploi (liste non limitative...)?

D’où la nécessiténon seulement de sanctionner durement toutepratique discriminatoire,mais de veiller à ne pas encourager,ni mêmetolérer sous couvertde facilité (cf. les prisons) des méthodes,de fait,ségrégationnistes ; maisd’encourager et favorisertoute action oupratique« transculturelle », notamment dansle domaine dela vie associative,fût-ilnécessairede modifier pour cela les statutsdu FAS.

Il s’agit d’autrepart derestaurer un climatgénéral « porteur »et une politiqued’intégration. Or, des slogans(tenant lieu de politique !)du type « immigrationzéro », liésà des pratiques répressives renforcées,entretiennent unclimat de méfiance et desuspicion quipèse sur toutelapopulation étrangère (quelquesoit son statut)et qui est perçu comme telpar celle-ci. Suspicionne peut rimer avec intégration.La relance decelle-ci dépend, en partie, de l’attitude du pouvoir et de l’opinionà l’égardde « l’étranger ».

En conclusion de ces quelques lignes...Les difficultés actuellesne doivent pas faire changer de cap.Le Haut Conseil, à mon sens,doitmaintenir fermement comme objectifà proposerà la nation, l’intégration,telle que définie dans les rapportsprécédents.

Jeanne-Hélène KaltenbachResponsable d’associations

Un chiffreL’information la plus cuisante fournie lors de nosauditions est

un chiffre. Roubaix :5025 RMistes, dont 500 jeunes et, parmieux, 380bacheliersen charge de famille.Voilà 380 jeunes qui ne sont pasintégrésdansla cité, pour lesquelsle lien social est plusqu’affaibli, et qui risquentde s’enfermer dansleur particularisme (pour retournercomme unechaussettele titre du rapport decette année !).Si l’on examine le cas desPortugais dela première ou dela seconde génération,leur intégration surle marché du travail est meilleure quela moyenne nationale.La moitiédes jeunes Portugais nedépassent pasle CAP ou BEP, 20 % des Portugaisnés en France poursuivent desétudes supérieures(moyennenationale :32 %). Ce sont les moins qualifiés, nésau Portugal et défavorisés quant

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à la langue, qui sontcependantemployés à 93 % ; ceux qui sont nésiciont un taux de chômagequi se rapprochede la moyenne françaisesanstoutefois l’atteindre.Le mot « jeune » dans ce cas est un mot inappropriéautant qu’hypocrite.Ce dont il s’agit, c’esten fait de jeunes d’originemaghrébine et, souvent,disons-le, d’originealgérienne.La cause évidentede leur désoeuvrement,source de tous les vices comme ditle proverbe :la discrimination à l’embauche.La cause de cettediscrimination estaufond des reins et descoeurs. Tout se passe comme s’ily avait uncontentieuxalgérienqui s’éterniseen une sorte de guerre symbolique entredes Françaiset d’autres qui sont pourtantleurs enfants. Dansla violencede ce qu’il est convenud’appeler «banlieues »,sansdoute y a-t-il unequestion refoulée : «Père, pourquoi, après t’être battu,es-tu venu temettre en dette à l’égard de ton ennemi d’hier ? »Et chez le voisin depalier BBR (« Bleu-Blanc-Rougedemandé », lit-ondans lesannoncesd’embauche) unesymétrique rancoeur : « Jeunehomme,si tu ne m’aimespas, comment veux-tu queje t’aime etdonc queje t’emploie ? » Il faudraitune réponse politique aux jeunes humiliéset offensés desquartiers, uneréponse politique aux voisins BBR.Le pouvoir n’a pas trouvé lesmotspour en parler. L’un des messages politiques consisteraità aborderfranchement les ajustementsnécessairesconcernant l’islam.Aujourd’hui,tout commeil y aquatorze siècles, l’islamfait peur en Occident. Avouonsqu’il y a de quoi : otages, attentats,menaces,terrorisme aveugle... Lesactes de violence provoquent naturellement desréactions souventaussiexcessives. Ilfaut êtrePersan,comme monsieurFereydoun Hoveyda,pourécrire de telles évidences coupables, maispartagéestout bas par lamajorité des Français etla majorité des Maghrébins,bien entendu.Il fautenfin accepter etbanaliser l’islam, nouscomporteren somme comme nousle conseille le Constituant Rabaut Saint-Étienne dèsaoût 1789 (il suffitde remplacer dans son discours «non-catholiques » par «musulmans »).Je demande,Messieurs, tout ce que vous demandezpour vous, quetousles musulmans soientassimilés en tout et sansréserve aucune à tous lesautres citoyensparce qu’ils sont citoyens aussi et quela loi, et que laliberté, toujours impartiales, ne distribuentpoint inégalement les actesrigoureux deleur exacte justice [...] Je demande pour tous lesmusulmansce que vous demandez pourvous, l’égalité desdroits, la liberté de leurreligion, la liberté deleur culte, la liberté dele pratiquer dans desmaisonsconsacréesà cet objet, la certitude den’être pas plus troublés dans leurreligion que vous ne l’êtes dans la vôtre et l’assurance parfaited’êtreprotégéscomme vous, autant que vous,et de la même manière quevouspar la commune loi. Ne permettez pas quel’on vous cite l’exemple deces nations encore intolérantesqui proscriventvotre culte chez elles. Vousn’êtes pasfaits pour recevoir l’exemplemais pour le donner. Les jeunesde banlieue, les diables, les «hardos », les déboussolés ne veulentsansdoute plus seulement entendreparler de formationd’emploi, d’intégrationparce qu’il vivent un malaise spirituel profond.

Quant aux « BBR », ils ontbien compris désormais quelaFrance n’est plus le centre du monde et le modèle en tout, que lenon-occidentaln’est pas, dans l’ascensionlinéaire de l’esprithumain, unattardé dansle collectif, l’irrationnel, les ténèbres. Hélas, dans les vingt

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dernières années, une certaineélite fortement médiatisées’est littérale-ment enivrée descultures du monde sans lesquellesl’identité françaiseserait «passée et même dépassée »,nous disait-on.Il s’agissait d’unehumeur, d’une mode, d’uneinconséquence...Si l’intégration est encrise,c’est aussi parce que l’idée mêmed’une culture nationale semble releverdésormaisde la préhistoire. « Quandon n’intègre plusà rien, on n’intègreplus personne », ditAlain Finkielkraut. J’ajoutequ’à force de sous-estimerla solidité de la France, ona pris le risque del’humilier et de provoquerdes hainesréactionnelleschez des milliersde gens, un moment sansappartenance, sansfierté, quand ils n’étaient pas chargésde tous lespéchésdu monde. A ces gens-là, il faut relire leurs plus beaux textespolitiques à commencerpar celui de Rabaut Saint-Étienne.

À condition de se respecterelle-même, notre société nemeparaît guère menacée parle communautarisme.L’islam français enéclosion est autant source de chamailleries que d’unité, les zoulous sebastonnentavec les beurs; si les trois pays du Maghrebs’aimaientd’amour tendre, cela se saurait ; les quartiersen décousent, les lycéesaussi ; Constantinen’est pas Oranet Tizi Ouzou n’est pasAlger, leshommes ne sont pas les femmes, lesenfants nesont pas lesadultes...Enrevanche,à côté de l’évidenteffilochage vertical de la société françaiseen routiers, prothésistes-dentaires,maîtres-auxiliaires, traminots,infirmiè-res et ambulanciers,ce qui apparaîtsilencieusement dansce pays, c’estune fracture démographique entre jeunes etvieux. Le thème abordé cetteannée parle Haut Conseil accentuel’idée que noussommesen train denous confronter honteusementà des gamins. Commecertaines personnesâgées, notre sociétén’est-elle pasplutôt fatiguée et négative ?Peur duvol, de la pollution, dela neige en hiver, des inondationsà l’automne etde la sécheresse enété, de la drogue, de la concurrenceétrangère, del’immigration, de la jeunesse ! On chercheen vain les forces capablesd’éviter sur lesmarges l’extrême violence etau centre l’extrêmeatonie.

Un tout petit souvenirParmi toutes les auditions, toutes les visites,je garde person-

nellementle souvenir du jeune Sénégalaisincarcéréau centre des jeunesdétenus de Fleury-Mérogis et promu bibliothécaire.Il était plongé dansun ouvrage depoésie. Comme je l’interrogeais à propos de son choixlittéraire inattendu, il m’a répondu quetous les jeunesdévorent despoèmes pour agrémenterleur prose amoureuse, enflammer lesbillets douxenvoyés à leur « meuf » : « Je t’aime,bien plus qu’hier, et bien moinsque demain... »Pour JuliaKristeva, «la littérature est cetespace degrâce,où l’ironie rejoint la gravité pour dessineret défaire lescontoursmobilesde cet êtretout en discours qu’est, endéfinitive, la nation française ».Allez-y gamins ! RosemondeGérard, Verlaine, qu’importe ! Suivantl’exemple de leurs frères, une fille algérienne surquatre épouse unFrançais quand 2 % deTurques épousent un Allemand et 10 % dePakistanaisesépousentun Anglais. Voilà, la joyeuse réponseà la questiondu repli communautaire.

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René VandierendonckPremier vice-présidentde la Communautéurbainede Lille,conseiller régional et maire,

Le Haut Conseilà l’intégration, dansson premier rapport,avaitproposé une définitiondu modèle françaisd’intégration. Cette définitionnuancéea rappelé les principes fondateursdu modèle républicain déve-loppé par l’État-nationsanstomber dansune vision étroitementassimila-trice, dogmatique,ne laissant aucune place à la prise en compte despécificités culturelleset d’appartenances communautaires. Cette défini-tion était fidèle à l’histoire puisque, touten participant à la communauténationale,ceux qui vivent dansce pays sesont toujours inscrits dans descommunautésdiverses :territoriales, professionnelles, religieuses, d’ori-gines nationales,etc.

Ce n’est pas dansla négation desparticularismes que s’originele modèle républicain, mais dans unjuste équilibre entre la prise encompte de cesspécificités culturelles et l’existenced’une culture com-mune. Cette définition reste largement valable mêmesi plusieurs phéno-mènesviennent l’interroger.

En premier lieu, les difficultés vécues par lesjeunes issus del’immigration, et notamment dansleur rapport avec la police, leurexclusion économique et leurconcentrationdans desquartiers dereléga-tion ont fait porter la suspicion surle terme même d’intégration,à justetitre. Ils rappellent qu’ils sont intégrés,mais exclus. Par ailleurs,sil’intégration est le contraire de l’exclusion,la situation françaiseconduità dire que les personnesissues de l’immigration ne sont pas toutes ensituation d’exclusion et, surtout, nesont pas lesseulesà être en situationd’exclusion. L’évolution de la situation sociale et les blocages deprocessus d’intégrationpour les jeunes issus de l’immigration ontinduitun flou, une perte de crédibilité du terme même d’intégration.

Les doutes dela société française surelle-même, l’interroga-tion que chacun porte sur l’identité nationale confrontéeà la fois à lamondialisation et à la décentralisation, les difficultés del’école à« assurer » sesmissions élémentaires - commeen témoignent lesstatis-tiques persistantes sur l’illettrisme oule chômage des jeunes sortant del’école sans qualification - ont de fait affaibli la conviction collectivedans la force d’un modèle français d’intégration.C’est probablement parune remobilisation sur les enjeux del’école républicaine, une réappropria-tion d’une notion moderne d’identitéet de communauténationales dontla thématiquene doit pasêtre laissée auxseuls extrêmismesnationalistes,une mise en perspective dece modèle français d’intégration dans laconstructiond’un modèle européen d’intégrationque se reconstruira cetteconfiance collective.

On s’inquiète beaucoupen France d’un développement ducommunautarisme. Or l’analyse d’une situation telle quela ville deRoubaix ne conduit pasà cette conclusion,si l’on veut bien admettre que

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le lien communautairen’est pas ducommunautarismeet qu’il peut mêmeconstituer une étape intermédiaireet un point d’appui d’un processusd’intégration, notamment quantil assure aux membres dela communautédes liensde solidarité, des pointsde repère, en matière d’autoritéet devaleurs.

Rien n’indique qu’aujourd’hui une vague communautaristerenverseraitle cadre commund’un modèle français d’intégration. Certes,ici et là, le sentiment d’un rejet systématique parla société françaiseconduit à des attitudes dedéfense et de repli avecun retour desthématiques,y compris sur le mode fantasmatique, dela langue et de laculture d’origine et surtout un retourà l’adhésion à une communautéreligieuse. Cesphénomènesen soi ne sont pas inquiétantssi la sociétéd’accueil sait les maîtriser dansun rapport de force par rapportà ceuxqui parient aujourd’huisur le passageà une logique communautariste danslaquelle ils envisagent d’assurerun leadership idéologique et politique.Par contre,le danger est suffisamment important pour prendre des mesuresradicales pourréduire les risques de cettedérive communautariste.Ils’agit notamment dedévelopper desactions d’insertionéconomique desjeunesdiplômés de tellesorte quela réussite par l’école nedevienne pasun mensonge flagrant.La question de la lutte concrête quant auxdiscriminationsracialesà l’embauche, voireà l’accès au logement,doitêtre poséeen France.

L’école publique doit rester unedigue contre l’expression desparticularismes qui nese situeraient pas dansune référenceà une culturecommune. Dece point de vue,et sans sombrerdans une laïcité quioublierait le sens du dialogue et del’écoute et la prise en compte desparticularités des enfants, revivifierle concept delaïcité, rassurer leschefsd’établissements et les enseignantsdansl’affirmation quotidienne decettelaïcité estun enjeu très fort.

Une politique active dansle domaine cultureldoit pouvoir dansun même ensembleréserver desmomentset des lieux àl’expression departicularités, à des formes « d’entresoi » et des lieux où serecréent uneculture commune, unpartage, un souci de l’universel. C’est le principed’une action permanente telle que les « Transculturelles » à Roubaix.

En conclusion, le modèle français d’intégration estmenacépeut-être plusqu’autrefois pardeux tendances,l’individualisme - quidissout lessolidarités et les repèrescommuns -et la tentation au replicommunautaire - quiest d’abord le fruit d’une déceptionet non d’unrejet du modèle françaisd’intégration. Ce n’est pas par une attitudedéfensive qu’oncombattra cesdeux maux, maisen donnant la possibilitéaux personnesissues de l’immigration de se construireune subjectivitéoù elles s’affirmentà la fois comme individus eten relation dialectiqueavec une communautéou plutôt des communautés particulières.

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