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Je ne bouge que la partie droite de mon corps. Je suis

hémiplégique. J’ai peur, peur de ne plus pouvoir marcher, peur de ne plus pouvoir respirer, peur de ne plus pouvoir manger. Mes fonctions vitales sont atteintes. Je me sens seul au monde. Je ne reconnais personne de familier, je vois seulement des infirmières qui s’agitent autour de moi. Je ne comprends pas ce qui m’arrive. Je respire à l’aide d’une machine, je mange grâce à une sonde gastrique placée dans mon nez. Je comprends alors que je me trouve à l’hôpital de Garches, après avoir séjourné un temps à l’hôpital Necker où j’ai subi une intervention chirurgicale.

Soudain un visage familier apparaît, c’est celui de ma mère qui entreprend la lourde tache de m’expliquer ce qui m’est arrivé. Je reste seul le matin dans ma chambre à méditer sur mon sort. Après, les visites se succèdent. Je reconnais Sion mon ami de toujours et Cyril avec lequel mes souvenirs sont merveilleux.

Ma mère vient à 13 heures et repart vers 20 heures de l’hôpital. J’attends ce moment avec une impatience tellement fébrile que la porte de ma chambre est ouverte dés 7 heures du matin. Un psychologue me rend alors visite, à l’évidence pour tester mes facultés intellectuelles. Il me pose une série de questions telles que: qui est le président de la République française ? Je réponds de façon arrogante Giscard D’estaing. La matinée s’étire lentement, c’est même interminable. J’apprécie néanmoins beaucoup le moment où les aides soignantes me lavent. Ma peur se focalise sur les courtes périodes pendant lesquelles le respirateur artificiel – une horrible machine – est débranché.

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L’après midi, je passe le plus clair de mon temps à respirer seul, sans l’aide de la machine. Les heures sans respirateur se succèdent. J’arrive à respirer librement et sans assistance pendant 11 heures par jour, mais je suis pris de panique la nuit. C’est alors que ma mère, après avoir reçu l’autorisation du médecin, décide de passer la nuit avec moi afin de m’encourager. Quand le jour se leva, nous avions vaincu et je n’avais plus besoin du respirateur artificiel. Ma mère exténuée, émue, comblée pouvait alors rentrer chez elle relater ce bienheureux événement à mon angoissé de père.

Je n’arrive pas encore à déglutir, c’est la deuxième épreuve qu’il me faut surmonter pour sérieusement m’installer sur le chemin du rétablissement On m’apporte alors une mousse au chocolat pour vérifier que la nourriture une fois déglutie, n’emprunte pas de fausses routes, ce qui peut occasionner de graves dommages. Le résultat est concluant. Le jour qui suivit, quelle ne fut pas la stupéfaction de mes parents de me voir manger tranquillement assis sur mon lit aux cotés d’une infirmière.

Désormais, les séances de kinésithérapie peuvent avoir lieu. Je suis très motivé car je ne veux en aucun cas pas rester sur un fauteuil roulant durant toute ma vie.

Je garde un immense respect pour le personnel hospitalier de Garches qui m’a petit à petit ramené à la vie. Je voue une profonde admiration à ces infirmières et aides soignantes qui se dépensent jour et nuit pour atténuer les souffrances et la détresse des malades.

Début septembre 2001, mon transfert vers un centre de rééducation et de réadaptation est imminent.

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J’ai déjà passé trois mois dans les hôpitaux et ce n’est pas fini. J’attends avec impatience mon départ. Le grand jour arrive, une ambulance vient me chercher à Garches pour me transférer à l’Institut national des Invalides à quelques dizaines de mètres du tombeau de Napoléon. Dix minutes après, le médecin chef de service m’ausculte sans dire le moindre mot. Après la visite, l’attente est interminable car je reste dans l’ignorance la plus complète de mon état de santé. Une heure après, mes parents viennent me rejoindre et je les assaille de questions. Ma voix est très rocailleuse et méconnaissable et, j’ai beaucoup de mal à articuler de longues phrases.

Mes journées aux Invalides sont rythmées par deux séances de kiné, une séance d’ergothérapie ( travail de la main) et une séance d’orthophonie.

Mais au fait, qu’en est il de la chirurgienne qui m’a opéré et mis dans cet état ? Elle continue à sévir à l’hôpital Necker. Cette chirurgienne à qui je voue un profond ressentiment m’a pourtant promis que je reprendrai le travail deux mois après l’opération. Je la déteste et la tiens entièrement responsable de ce qui m’arrive. Effectivement par négligence ou par inadvertance, elle a laissé une bulle de gaz se logeait dans le tronc cérébral provoquant des dommages importants.

Pourtant, elle m’a opéré du cœur à quatre reprises avec succès d’une maladie congénitale:la tétralogie de Fallot ou maladie bleue. Durant mon enfance et adolescence je n’eus aucune séquelles et menais une vie tout à fait normale.

Les visites d’amis et de membres de la famille s’enchaînent; je suis bien entouré. J’attends avec impatience ma première permission. Rentrer à la

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maison le week-end constitue pour moi une première victoire. Je me souviendrais toute ma vie du moment où les brancardiers vinrent me chercher en voiture à l’hôpital des Invalides pour me conduire chez moi. je me sentais tellement ému et apaisé que je n’arrivais pas seul à boucler la ceinture de sécurité de la voiture.

Le dimanche soir, à la fin du week end passé à domicile, je réintègre l’hôpital et la vue des brancardiers constitue un véritable calvaire. J’ai honte de mon sort et veux me suicider, et mes crises de dépression sont très fréquentes, J’avais cependant une satisfaction: c’était de me retrouver seul dans ma chambre d’hôpital le dimanche soir afin de visionner le film érotique de M6.

Je n’aime pas la piscine et pourtant je sais pertinemment que ma guérison passe par cette séance de rééducation journalière. Un jour, je reçois un fax d’une amie qui veut à tout prix me revoir mais il n’est pas question de la recevoir dans cet état et surtout en chaise roulante.

Je dois persévérer et me raccroche au bon vieux temps et à ma famille. A la cafétéria de l’hôpital, car je ne veux absolument pas sortir dans la rue, je rencontre des gens très mal en point et qui me racontent avec beaucoup de lucidité leur accident sans s’appesantir sur leur sort. J’écoute leurs histoires avec beaucoup d’attention et admire leur courage et leur bravoure.

Diplômé d’une école de commerce, je suis pourtant cloué dans un lit. Je me rappelle de ces années passées à l’école de commerce de Toulouse où je ne me souciais guère du lendemain et où un tas de souvenirs se bousculent.

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Avant mon accident, j’étais stagiaire analyste technique dans une grande banque. Mon travail consistait à étudier n’importe quel graphique et à proposer à mes clients, par téléphone, des analyses sur l’évolution des marchés financiers. J’avais la chance de connaître, Philippe Cahen, réputé en France pour ses talents de chartiste et sous l’autorité duquel j’avais effectué mon stage de fin d’études. C’était devenu un ami cher, et il m’apportait pendant mon hospitalisation, des graphiques pour stimuler mon intelligence et ma capacité de reflexion.

je continue péniblement à progresser. Je marche maintenant seul en boitant beaucoup et en m’accrochant à tous les murs qui se trouvent sur mon chemin. Pour les longues distances, j’utilise un déambulateur que ma mère prénomme Arthur pour détourner mon attention.

Je m’entendais très bien avec ma kinésithérapheute, la bien nommée Hélène, elle était belle, jeune et dynamique. Je suis infinniment reconnaissant du temps qu’elle a consacré à s’occuper de mon corps meurtri par la souffrance.

J’ai programmé mon départ de l’hôpital le jour de mes vingt six ans, c’est-à-dire le onze décembre 2001. Il me reste donc 4 mois à passer dans cet hôpital. Mon objectif est desormais clair : accomplir des progrès selon une courbe exponentielle d’ici la sortie de l’hôpital.

Je n’aime pas le mardi matin car c’est le jour de la visite hebdomadaire de l’équipe médicale avec ses rites et son cérémonial. J’attendais avec une grande impatience le diagnostic qu’ils allaient porter sur mon état de santé.

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L’inactivité me rend nerveux et pour tuer le temps, je prend un café hebdomadaire avec Laurence une compagne des Invalides qui avait été percutée par une voiture et qui ne peut poser le pied par terre sans subir une décharge électrique. A l’hôpital des Invalides, il y a une machine de marche infernale qui reproduit exactement les sensations et les impressions de la vrai marche. On me place donc sur cette machine diabolique en espérant que mon cerveau puisse reconstituer le schéma de la marche.

C’est dans ce genre de situation que l’on compte ses vrais amis. J’en ai deux: Sion et Cyril. Avec Cyril, je partis en vacances de nombreuses fois et lors d’un week end à Londres, nous fîmes la connaissance d’une jeune anglaise qui nous invita d’abord au restaurant le plus chic de Londres et ensuite dans une discothèque très branchée où la bière coulait à flot. Il a fallu après que je m’emploie de mon mieux afin qu’elle amortisse ses nombreuses dépenses.

Avec Sion, il y a quelques années j’organisais des soirées dans une discothèque parisienne où l’alcool était gratuit. Je me souviens d’un événement survenu en présence de Sion et Cyril. Lors de nos sorties nocturnes, nous rencontrâmes une femme mariée qui s'empressa de nous amener dans sa maison. Quelle ne fut pas notre surprise quand elle nous sollicita tous les trois pour assouvir ses nombreux besoins sexuels durant toute la nuit. Une fois aussi, complètement imbibés d’alcool, nous embrassâmes tout trois, dans un tunnel de discothèque, une fille hyper consentante.

Mais que ce bon vieux temps est loin, et que le temps me paraît maintenant long et pénible !

Je ne crois plus beaucoup en Dieu, pourquoi ma t-il fait subir cette épreuve ? Les séquelles morales de