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37 Le Soir Samedi 24 et dimanche 25 juin 2017 A u-delà du flot ininterrompu de mauvaises nouvelles vivent de nombreuses histoires d’espoir. Des récits de solutions concrètes. Des témoignages d’acteurs du changement, qui prennent à bras-le-corps certains des pro- blèmes les plus urgents dans le monde pour améliorer, grâce à leurs idées innovantes, le sort de millions de personnes. Des histoires qui méritent d’être lues et partagées pour non seulement rééquilibrer notre vision du monde, mais également inciter à reproduire les solu- tions existantes ailleurs sur la planète. Les médias peuvent jouer un rôle crucial en racontant ces histoires individuelles qui tissent un mouvement mondial. C’est pourquoi Spark- news invite depuis cinq ans des journaux à participer à l’Impact Journalism Day et à s’em- parer du pouvoir du journalisme collaboratif pour faire émerger ces histoires de change- ment. Chaque année, ces journaux explorent toute une palette de solutions novatrices et les publient le même jour dans un supplément spécial. En cumulant les suppléments papiers et les sections digitales, ils touchent quelque 120 millions de personnes. Conscientes de l’impact de ces articles, plusieurs publications intègrent désormais à leur couverture mondiale quotidienne des histoires riches en solutions. Pour la cinquième édition de l’Impact Journa- lism Day, les médias sont rejoints par des orga- nisations qui pensent, elles aussi, que ces histoires peuvent amorcer le changement. Parmi elles, l’Organisation des Nations unies (ONU) ainsi que One Young World, qui réunit chaque année 1.500 jeunes leaders du domaine social et du monde de l’entreprise impliqués dans des initiatives d’innovation positive. Une vaste communauté de personnalités et de citoyens ordinaires ont également joint leur voix et signé un manifeste pour affirmer que chacun – gouvernements, secteur privé, société civile, ONG et anonymes – peut intervenir pour façonner un avenir meilleur. Vous aussi pouvez prendre part à cet élan de transformation. Découvrez ceux qui ont réussi à apporter des réponses à des enjeux tels que l’accès à la santé ou à l’eau, la qualité de l’éducation, des conditions de travail décentes et l’énergie propre. Chacun illustre concrètement le pouvoir d’initiatives individuelles ou collectives contri- buant à se rapprocher des nouveaux Objectifs de développement durable de l’ONU : éradiquer la pauvreté, protéger la planète et garantir prospérité et santé pour tous. Nous espérons que vous aimerez découvrir ces histoires… et deviendrez vous-même une partie de la solution. Signez le manifeste (http:// sharestoriesofchange.org) et partagez les récits qui vous impressionnent le plus sur Face- book et Twitter (#ImpactJournalism, #StoryOf- Change, @Sparknews, @YourNewspaper). CHRISTIAN DE BOISREDON, FONDATEUR DE SPARKNEWS ET ASHOKA FELLOW & TOUTE L’ÉQUIPE DE SPARKNEWS AUJOURD’HUI, 50 JOURNAUX UNISSENT LEURS FORCES POUR METTRE EN AVANT DES HISTOIRES QUI CHANGENT LE MONDE Retrouvez les articles de l’Impact Journalism Day sur notre site internet plus.lesoir.be 60 histoires qui changent le monde

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Le Soir Samedi 24 et dimanche 25 juin 2017

A u-delà du flot ininterrompu de mauvaisesnouvelles vivent de nombreuses histoires

d’espoir. Des récits de solutions concrètes. Destémoignages d’acteurs du changement, quiprennent à bras-le-corps certains des pro-blèmes les plus urgents dans le monde pouraméliorer, grâce à leurs idées innovantes, lesort de millions de personnes. Des histoires quiméritent d’être lues et partagées pour nonseulement rééquilibrer notre vision du monde,mais également inciter à reproduire les solu-tions existantes ailleurs sur la planète.Les médias peuvent jouer un rôle crucial enracontant ces histoires individuelles qui tissentun mouvement mondial. C’est pourquoi Spark-news invite depuis cinq ans des journaux àparticiper à l’Impact Journalism Day et à s’em-parer du pouvoir du journalisme collaboratifpour faire émerger ces histoires de change-ment. Chaque année, ces journaux explorenttoute une palette de solutions novatrices et lespublient le même jour dans un supplémentspécial. En cumulant les suppléments papierset les sections digitales, ils touchent quelque

120 millions de personnes. Conscientes del’impact de ces articles, plusieurs publicationsintègrent désormais à leur couverture mondialequotidienne des histoires riches en solutions.Pour la cinquième édition de l’Impact Journa-lism Day, les médias sont rejoints par des orga-nisations qui pensent, elles aussi, que ceshistoires peuvent amorcer le changement.Parmi elles, l’Organisation des Nations unies(ONU) ainsi que One Young World, qui réunitchaque année 1.500 jeunes leaders du domainesocial et du monde de l’entreprise impliquésdans des initiatives d’innovation positive. Unevaste communauté de personnalités et decitoyens ordinaires ont également joint leurvoix et signé un manifeste pour affirmer quechacun – gouvernements, secteur privé, sociétécivile, ONG et anonymes – peut intervenir pourfaçonner un avenir meilleur. Vous aussi pouvezprendre part à cet élan de transformation.Découvrez ceux qui ont réussi à apporter desréponses à des enjeux tels que l’accès à lasanté ou à l’eau, la qualité de l’éducation, desconditions de travail décentes et l’énergie

propre. Chacun illustre concrètement le pouvoird’initiatives individuelles ou collectives contri-buant à se rapprocher des nouveaux Objectifsde développement durable de l’ONU : éradiquerla pauvreté, protéger la planète et garantirprospérité et santé pour tous.Nous espérons que vous aimerez découvrir ceshistoires… et deviendrez vous-même une partiede la solution. Signez le manifeste (http://

sharestoriesofchange.org) et partagez lesrécits qui vous impressionnent le plus sur Face-book et Twitter (#ImpactJournalism, #StoryOf-Change, @Sparknews, @YourNewspaper).

CHRISTIAN DE BOISREDON, FONDATEUR DE SPARKNEWS ET

ASHOKA FELLOW& TOUTE L’ÉQUIPE DE SPARKNEWS

AUJOURD’HUI, 50 JOURNAUX UNISSENT LEURS FORCES POUR METTRE EN AVANT DES HISTOIRES QUI CHANGENT LE MONDE

Retrouvez les articles de l’Impact Journalism Day sur notre site internet plus.lesoir.be

60 histoires qui changent le monde

Le « Solarpak » permet aux enfants qui vivent dans des villages privés d’électricité d’étudier après le coucher du soleil. © MASHAL SHOOTING

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grâce  à  lui  que  les  enfants  ont  accèsau  Palais  de  justice  un  samedi  ma-­tin.  Le  procureur  général  expliqueaux   enfants   le   cas   qu’ils   auront   àdélibérer :   « Cinq   jeunes,   dont   unmajeur  –  qui  sera  traité  comme  unadulte  –  ont  racketté  un  adolescentde  14  ans.  Plus  grave :  lors  d’un  desrackets,   ils   ont   menacé   la   victimeavec   un   couteau.   La   victime   a   eutellement   peur   qu’elle   ne   voulaitplus  aller  à  l’école. »

1.000 jeunes d’ici 2020Au  départ  de  cette  initiative,  une

femme :  Sofie  Foets.  Elle  travaillaitpour  le  cabinet  d’un  député  euro-­péen   quand   elle   a   entendu   parlerde  l’association  hollandaise  « IMCWeekenschool » :   « J’ai   tout   desuite  pensé :  mais  c’est  ça  qu’il  fautpour  Bruxelles ! » Elle  plaque  toutet  fonde  alors  TADA,  grâce  au  sou-­tien  d’entreprises  privées  convain-­cues  par  le  projet.  « Pour  moi,  c’estun   super   exemple   de   comment   lasociété   civile   peut   contribuer   àl’émancipation   de   notre   jeunesseissue   des   quartiers   défavorisés »,raconte   Sofie.   Mais   pourquoi   nepas  offrir  cette  possibilité  à  tous  lesenfants ?  « Tout  le  monde  dit  à  cesenfants-­là   qu’ils   doivent   bien   tra-­vailler   à   l’école   pour   réussir   plustard, explique   la   fondatrice. Mais

de  Bruxelles.  Une  fierté  malicieuserayonne   de   leur   visage.   La   fierté,pour  ces  gamins  de  10,  11  ans  issusd’un   quartier   précarisé   deBruxelles,  de  se  métamorphoser  letemps   d’une   matinée   en   d’impor-­tants  avocats.  Tous  les  samedis,  ilssont  300  à  participer  aux  activités

M esdames,   Messieurs :   laCour ! » La   tête   haute,   le

torse  bombé  sous  leur  robe  d’avo-­cat  trop  grande,  Bilal,  Ghalia  et  lesautres  investissent  la  Cour  de  cas-­sation,   la   plus   haute   instance   dupays   et   l’une   des   salles   les   plusprestigieuses   du   Palais   de   justice

de  l’association  TADA,  pour  « Toe-­komst  –  Atelier  de  l’Avenir ».  Ins-­piré   de   l’initiative   hollandaise« IMC   Weekendschool »,   ce   pro-­gramme   bilingue   (français/néer-­landais)   vise   à   « élargir   les   pers-­pectives   d’avenir »   d’enfants   entre9  et  12  ans  issus  des  quartiers  diffi-­ciles   de   la   capitale   européenne.Comment ?  En  leur  faisant  décou-­vrir  toutes  sortes  de  métiers.  Tousles  samedis,  pendant  trois  ans,  lesjeunes  rencontrent  des  profession-­nels   passionnés   et   s’initient   audroit,  à  la  médecine,  à  la  construc-­tion,  mais  aussi  aux  arts,  aux  tech-­nologies,  à  l’hôtellerie…

Ce   jour-­là,   l’un   des   groupes   del’antenne  de  Saint-­Josse  clôture  lecycle  sur  la  justice.  Les  bénévoles,qui  viennent  présenter  leur  métieraux  enfants,  participent  préalable-­ment  à  un  briefing  avec  l’équipe :  ils’agit  de  se  roder  pour  que  les  acti-­vités   roulent,   mais   aussi   d’être   àmême   d’animer   un   groupe   d’en-­fants.  « Vous  vous  souvenez,  la  se-­maine  dernière,  on  a  expliqué  quele   code   pénal,   c’est   un   peu   commeun   Menu   Mc   Do,   avec   les   infrac-­tions  et  les  tarifs  à  côté » :  DamienVandermeersch,  procureur  généralà  la  Cour  de  Cassation,  est  rompu  àl’exercice.   Depuis   des   années,   ilparticipe  au  projet.  C’est  d’ailleurs

ils  ne  savent  pas  ce  que  ça  veut  dire“plus   tard”.   Leur   réseau,   leur   fa-­mille  n’est  pas  à  même  de  leur  pré-­senter   ce   qui   est   à   leur   portée.   Cesjeunes-­là   ont   besoin   d’un   coup   depouce   pour   rester   motivés.   Notrebut   est   d’en   faire   des   citoyens   res-­ponsables.  Et  de  leur  dire :  ici,  c’estchez  vous  aussi ! »  Ce  matin-­là,  parexemple,  de  nombreux  enfants  dé-­couvrent   pour   la   première   fois   lecentre   de   Bruxelles,   et   le   quartierLouise,   proche   de   la   célèbre   ave-­nue   de   magasins   de   luxe.   Jusque-­là,   ils   n’étaient   jamais   vraimentsortis  de  leur  quartier.

Sofie  rappelle  les  enquêtes  PISA,qui   révèlent,   invariablement,   àquel   point   la   Belgique   franco-­phone   se   distingue   comme   l’unedes   championnes   européennes…des   inégalités   à   l’école.   Or,   l’expé-­rience   du   projet   hollandais,   actifdepuis  plus  de  15  ans,  s’avère  plu-­tôt   positive :   « Des   recherches   ontcomparé   des   enfants   de   quartiersdifficiles   qui   ont   participé   à   laIMC   Weekenschool   et   d’autres   quin’y  ont  pas  pris  part.  Les  premiersévoluent  différemment  dans  la  vie,s’intègrent   mieux   au   marché   dutravail,   à   leur   société. » Et   lors-­qu’on  s’étonne  de  la  rigueur  de  ga-­mins   qui,   pendant   trois   ans,suivent  ces  activités  tous  les  same-­

Quand les enfants de quartiers précarisésrêvent leur avenir en plus grand

Grâce à TADA, des jeunes issus de quartiers défavorisés ont pu simuler un procès au Palaisde Justice de Bruxelles.© DOMINIQUE DUCHESNES

L e  petit  Michel  Koutouan  estfélicité   par   ses   parents,

pour   ses   notes   en   classe   qui   sesont  encore  améliorées.  De  cinqsur   dix   de   moyenne,   il   s’est   re-­trouvé   à   sept.   Même   si   Michou,comme   l’appellent   affectueuse-­ment   ses   parents,   reçoit   desovations  de  part  et  d’autre  de  safamille,   il   avoue   lui-­même   qu’ildoit   cette   progression   au   car-­table   solaire   dénommé   « Solar-­pak ».  Vivant  dans  un  foyer  sansélectricité   à   Songon   village,   àl’ouest   d’Abidjan,   cet   écolier   aeu  la  chance  d’être  parmi  les  bé-­néficiaires   des   cinquante   sacsdistribués   dans   la   zone.   A   l’ins-­tar   de   Michel   Koutouan,d’autres   élèves   du   village   deGrand   Aféri   (département   d’Af-­fery,   dans   le   sud-­est   de   la   Côted’Ivoire),   comme   Bessekon.   F,qui   ont   également   reçu   le   car-­table,   ont   aussi   amélioré   leursrésultats  scolaires.

Derrière   ces   sacs   solaires,   secache   un   nom :   Evariste   Akou-­mian,  auteur  de  cette  invention,la  trentaine.  L’idée  lui  est  venuelors   d’une   livraison   de   matérielinformatique   et   de   fournituresde   bureau   à   l’intérieur   du   pays.En   escale   dans   un   village   nonélectrifié,   il   a   observé   qu’unefois   la   nuit   tombée,   les   enfantsavaient   du   mal   à   apprendreleurs   leçons   et   à   faire   leurs   de-­voirs.   « Nous   nous   sommes   ditqu’en   Afrique,   nous   avons   gra-­tuitement   le   soleil,   alors   pour-­quoi  ne  pas  réfléchir  à  une  solu-­tion   plus   simple   pour   aider   cesenfants   afin   qu’ils   puissentavoir   de   meilleurs   résultats   sco-­laires », explique-­t-­il.   A   l’encroire,   avec   le   sac   solaire,   l’en-­fant   est   autonome.   « L’écolierpeut   gérer   son   temps   d’étude.

Alors   que   la   lampe   tempête   estgénéralement   utilisée   par   lesmembres   de   la   famille   pourleurs   besoins   dans   la   maison,elle   est   même   parfois   en   posses-­sion   du   père   de   famille,   pertur-­bant   les   moments   d’étude   del’enfant », affirme  Evariste.

Combler le manque d’accès à l’électricité

En   réalité,   sans   grandsmoyens,   comme   il   l’admet   lui-­même,   cette   start-­up   squatte,dans  la  commune  de  Cocody,  lesbureaux   de   Thierry   Doffou,   unautre   jeune   inventeur   qui   aconçu   « Quelasy »,   une   tabletteéducative  favorisant  la  moderni-­sation   et   l’apprentissage   de   laformation.   C’est   en   ce   lieu   qu’ilconçoit  les  cartables  solaires  do-­tés   d’une   plaquette   solaire   de   3watts   et   sur   laquelle   est   incor-­porée   une   batterie   qui   se   re-­charge   à   la   lumière   du   jour   ouau   rayon   du   soleil.   L’énergieemmagasinée   tout   le   long   de   lajournée   permet   d’avoir   de   la   lu-­mière,   à   travers   une   lampe   Ledqu’on   connecte   à   un   port   USBrelié   à   la   plaquette   solaire.   Pré-­cisons   que   cette   lumière   a   unedurée  de  trois  heures.

Cependant,   pour   arriver   àcette   création,   il   soutient   qu’il   amis  deux  ans  de  recherche  et  sixmois   de   test   sur   le   terrain.   Puisune  distribution  gratuite  de  500sacs   solaires   dans   quatre   locali-­tés   de   la   Côte   d’Ivoire.   « Ce   quej’ai   injecté   dans   Solarpak,   cesont   les   bénéfices   de   mon   entre-­prise   de   vente   de   matériels   in-­formatiques.  Nous  avons  investià   peu   près   plus   de   50   millionsde   Fcfa   [76   000   €] »,   racontenotre   interlocuteur.   Qui   afficheune   grande   ambition :   combler

le   manque   d’accès   à   l’électricitéqui   concerne   encore   700   mil-­lions   d’habitants   en   Afrique.   Cedéfi,  Evariste  Akoumian  est  bienconscient   qu’il   n’est   pas   facile   àatteindre.   Mais,   « ce   n’est   pasparce  que  c’est  difficile  qu’il  fautbaisser   les   bras.   Au   contraire,   ilfaut   avoir   de   la   persévérance,du   courage.   Car,   rien   n’est   fa-­cile »,   insiste-­t-­il.

Aujourd’hui,   il   séduit   bonnombre   d’autorités.   Parmi   elles,la  ministre  de  l’Education  natio-­nale   Kandia   Camara   ou   encorele   groupe   Magic   System.   Visi-­blement   très   sollicité   -­son   télé-­phone   ne   cesse   de   sonner   lorsde   notre   conversation   –,   Eva-­riste  Akoumian  affirme  avoir  étéfinaliste  de  la  Global  social  ven-­

ture   compétition   (Gsvc)   franco-­phone.   Une   distinction   qui   l’aconduit   à   la   finale   internatio-­nale  du  concours  en  avril  2017  àBekerley   (Etats   Unis).   Figurantparmi   les   10   premiers   de   ceprestigieux   prix   américain,   cejeune   inventeur   juge   cette   placesatisfaisante   pour   une   premièreparticipation   à   un   si   grand   évé-­nement   réunissantplus   d’une   cinquan-­taine  de  pays.

En   dépit   de   l’actede   générosité   del’ambassade   desÉtats-­Unis   en   Côted’Ivoire  qui  a  pu  re-­layer   son   initiative,Evariste   Akoumiann’a,   pour   l’instant,

aucun   soutien   financier   pouraccroître   son   activité   et   vendreplus   de   sacs,   dont   l’unité   coûte12.000   Fcfa   [18€]   TTC.   Pourl’instant,   il   importe   les   sacs   etles   petits   panneaux   solairesd’Asie   pour   les   monter   en   Côted’Ivoire,   mais   il   espère   relocali-­ser  la  production  dans  son  pays-­.« Nous   comptons   lever   des

fonds   pour   implanter   une   usined’assemblage   qui   s’occupera   ducôté   textile,   ce   qui   va   donner   del’emploi   aux   jeunes », prévoit   lejeune   entrepreneur   qui   a   soussa  direction  une  dizaine  de  per-­sonnes,   dont   un   technicien,   descommerciaux,   un   directeur   decommunication,  un  directeur  derelations   publiques,   un   respon-­sable  achats  et  des  designers  quis’occupent   de   la   conception   dessacs. ■

KAMAGATÉ ISSOUF

http://www.solarpak.net/

L'éducation des enfants ivoiriens illumine leurs foyersgrâce à leurs cartables solaires

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dis  –  hors  vacances  scolaires –,  So-­fie   a   la   réponse :   « Ces   enfants-­là,le  samedi,  ils  n’ont  rien.  Aucune  ac-­tivité.   Sauf,   peut-­être,   la   mosquée.Alors  ils  adorent  venir !  A  cet  âge,un   enfant   veut   tout   savoir   sur   lemonde ! »

A  l’heure  actuelle,  TADA  comptetrois  antennes  sur  Bruxelles :  une  àMolenbeek  (en  néerlandais),  une  àSaint-­Josse  (bilingue)  et  une  à  An-­derlecht   (en   français).   Quelque300   enfants   répondent   présentstous   les   samedis.   Chaque   année,l’association   ouvre   de   nouvelles« classes »  qui  entament  alors  descycles  de  trois  ans.  Malgré  cela,  ellen’arrive   pas   à   répondre   à   la   de-­mande.   TADA   espère   toucher1.000  jeunes  en  2020.  

Les  magistrats  en  herbe  rendentleur   verdict.   Le   prévenu   se   verrainfliger  une  peine  de  travail...  Maisen  sera  exempté  le  samedi,  afin  depoursuivre   son   parcours   aux   ate-­liers  de  l’avenir!   ■

ELODIE BLOGIE

Informations : toekomstatelierdelavenir.be

Quand les enfants de quartiers précarisésrêvent leur avenir en plus grand

I nauguré  en  2010  par  AhmadNaser  Sarmast,   l’Institut  Na-­

tional  de  Musique  d’Afghanistan(ANIM)  s’inscrit  dans  une  tradi-­tion  d’enseignement  musical  fra-­gilisée   par   l’histoire   récente.   Ilenseigne  aujourd’hui  la  musiqueclassique  occidentale  et  orientaleà  250  élèves,  dont  75  filles.

Elles   se   sont   rassemblées   en2014   pour   former   l’OrchestreZohra,   le   premier   orchestre   af-­ghan  exclusivement  féminin.  Il  acommencé   son   activité   sur   uneidée   originale   d’une   jeune   étu-­diante  nommée  Mina  qui  y  avaitappris   la   trompette.   Cependant,lorsqu’elle  est  partie  dans  sa  pro-­vince  natale,  sa  famille  ne  l’a  plusautorisée  à  revenir  à  Kaboul.

400 candidats pour 50 placesConstitué   d’une   trentaine   de

filles   âgées   de   12   à   21   ans,   l’Or-­chestre  Zohra  a  participé  à  diffé-­rents   programmes   à   l’extérieurdu  pays,  comme  le  forum  de  Da-­vos  en  Suisse,  avec  pour  objectifde   montrer   une   image   positivede  l’Afghanistan  et  de  sa  cultureau  monde.

Chaque   année,   entre   300   et400   demandeurs   passent   leconcours   d’entrée   à   l’institut,   etseulement   50   d’entre   eux   sontpris.  50 %  des  candidats  sont  des

enfants   vivant   dans   les   rues   oudans  des  orphelinats  et  sont  pré-­sentés   par   les   ONG   travaillantsur  le  droit  de  l’enfant  en  Afgha-­nistan.   En   dehors   de   l’orchestreZohra,  onze  autres  groupes  sontactifs  au  sein  de  l’Institut. ■

HASSAN KARIMI

Les filles qui jouentleurs rêves

On dénombre 75 jeunes fillesparmi les 250 élèvesde l’orchestre Zohra. © D. R.

A vec   son   association   Lirec’est   partir,   l’éditeur   « low-­

cost »   Vincent   Safrat   révolu-­tionne  le  marché  de   l’édition  envendant  aux  plus  défavorisés  deslivres  pour  enfants.

Ce   trublion   du   secteur   quivend  les  livres  comme  des  petitspains,  au  prix  du  pain,  en  a  ainsiécoulé   2,5   millions   d’exem-­plaires   en   2016   en   France.   Sonsecret ?  Son  prix  unique,  80  cen-­times  d’euro,  le  prix  moyen  d’unouvrage   jeunesse   étant   de   7   eu-­ros.   Un   pari   relevé   en   assurantlui-­même  la  distribution,  qui  re-­présente   60 %   du   prix   d’un   ou-­vrage.  Car  l’impression  ne  coûteque  30  centimes.

Un éditeur autodidacte« J’ai   l’impression   que   la   lec-­

ture   peut   remplacer   les   études.D’où   mon   idée   de   faire   lire   ceuxqui   ne   lisent   pas »,   explique   cetautodidacte  originaire  de  la  ban-­lieue  parisienne.

Vincent  Safrat  a  commencé  en1992  à  faire  la  tournée  des  mai-­sons   d’édition   pour   récupérerleurs   invendus   et   les   distribuergratuitement   dans   les   cités   debanlieue  défavorisées.  Puis  a  im-­primé   lui-­même   ses   ouvrages   àbas  coût.  Et  choisi  comme  canalde   distribution   principal   lesécoles,  qui  achètent  des  ouvragespour   leurs   élèves   ou   organisentdes  ventes  ouvertes  aux  parents.Sans   jamais   avoir   demandé   lamoindre   subvention   aux   pou-­voirs  publics. ■

CAROLINE DE MALET

Des livresqui se vendent commedes petits pains

Les livres édités par VincentSafrat sont vendus au prixunique de 80 centimes.© VINCENT BOISOT / LE FIGARO

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C onfrontée   depuis   quelquesdécennies   à   une   baisse

constante  de  la  pluviométrie,  cou-­plée  d’une  forte  pression  démogra-­phique,  la  région  du  Nord  du  Bur-­kina   Faso   subit   une   dégradationprogressive   de   l’environnement   etune   régression   des   rendementsagricoles.   Selon   les   données   del’Observatoire   national   de   l’envi-­ronnement   et   du   développementdurable  (ONEDD),  en  juin  2011,  larégion   constituait   l’une   des   troiszones   où   la   dégradation   des   solsétait   la   plus   forte,   avec   un   indicede  3,1  sur  5,  et  le  rythme  de  dégra-­dation  des  terres  est  élevé.  Notonsque,   toujours   selon   l’ONEDD,   enjuin  2013,  74,1 %  des  273.828  km2

de   superficie   que   compte   le   payssont  des  terres  affectées  par  la  dé-­sertification,   la   dégradation   desterres  et  la  sécheresse.

Comment cette zone peut-elleabriter une forêt ?

L’œuvre  est  de  Yacouba  Sawado-­go,   80   ans,   connu   comme« l’homme   qui   arrêta   le   désert ».Pour   cette   tâche   herculéenne,   il   atrouvé   une   idée   innovante :   le« zaï ».   D’où   lui   est   venue   cettetechnique ?   Pour   M.   Sawadogo,c’est  en  apprenant  de  la  terre.   « Àla   fin   des   années   1960,   des   prédi-­cateurs   ont   annoncé   que   nous   fe-­rions  face  à  une  sécheresse  sans  pa-­reille  dans  notre  localité.  Face  à  cemalheur   annoncé,   j’ai   décidé   de

laisser   tomber   mon   commerce   depièces  détachées  afin  de  me  mettreà  l’agriculture.  Afin  de  comprendrecomment  la  nature  se  régénère,  j’aimis  deux  ans  à  sillonner  les  terresde   mon   village,   souvent   à   pied,souvent  à  cheval ».

C’est  au  bout  de  ces  deux  ans  de« communion »   avec   la   terre   quelui  est  venue  l’idée  du  « zaï »,  unetechnique   qui   consiste   à   préparerle   sol   en   saison   sèche.   Pour   cefaire,  il  y  creuse  de  petits  trous,  lesremplit   de   débris   organiques.   Cesdébris   à   leur   tour   attirent   les   ter-­mites,   naturellement   présentesdans  cet  environnement.  En  s’ins-­tallant  dans  les  petites  cavités,   lestermites   creusent   des   galeries,   cequi   permet   de   retenir   l’eau   depluie  lors  de  la  saison  des  pluies.  Ilne   reste   plus   qu’à   semer   lesgraines.

Mais  l’innovation  ne  s’arrête  paslà.  Au  fil  des  saisons,  Yacouba  Sa-­wadogo   est   passé   maître   dans   latechnique   du   zaï.   C’est   désormaisde  la  matière  organique  composéede  compost  ou  de  fumier  associé  àdes  tiges  de  mil  concassé  qu’il  met

Le « zaï », la pratique qui a stoppé le désert

C’est en 1970 que Yacouba Sawadogo a entamé le reverdissement du dé-sert. Âgé à l’époque de 40 ans, cet ancien commerçant de pièces détachéesde motos au grand marché de Ouahigouya se lance dans l’agriculture. Ob-jectif : reverdir la terre dégradée et aride dans son village. 40 ans après, cepari fou est gagné et sa technique a révolutionné le monde agricole.© L’ECONOMISTE DU FASO

A u   Bangladesh,   la   majoritéde   la   population   vit   en   mi-­

lieu  rural,  où  l’accès  à  l’électricitéest   restreint.   Plus   de   70 %   desBangladais  vivent  dans  des  mai-­sons  en  tôle  ondulée,  qui  ampli-­fient   la   chaleur   du   soleil.   L’été,les   températures   peuvent   at-­teindre  45  degrés.

Grey   Dhaka,   la   filiale   bangla-­daise   de   l’agence   américaine   depublicité   et   marketing   Grey,   apeut-­être  trouvé  une  manière  in-­génieuse   d’aider   les   habitantsdes   zones   pauvres   du   pays   à   af-­fronter  les  chaleurs  caniculaires.

L’entreprise   a   présenté   Eco-­Cooler,   le   tout   premier   climati-­seur   au   monde   à   marcher   sansélectricité.   Fabriqué   à   partir   debouteilles   ou   cannettes   de   sodarecyclées,   Eco-­Cooler   est   peucher,  respectueux  de  l’environne-­ment  et  simple  à  assembler.

Les   bouteilles   en   plastiquesont   coupées   en   deux   et   fixéessur  un  panneau  ou  une  grille  quise   place   sur   le   cadrant   de   la   fe-­nêtre,   les   goulots   dirigés   versl’intérieur   de   la   pièce.   L’airchaud   qui   entre   dans   chaquebouteille   est   compressé   au   ni-­veau   du   goulot,   ce   qui   le   rafraî-­chit   avant   qu’il   n’entre   dans   lapièce.  Eco-­Cooler  peut  réduire  latempérature  de  cinq  degrés.

En   collaboration   avec   Gra-­meen  Intel  Social  Business  Limi-­ted,   Grey   distribue   Eco-­Coolergratuitement   dans   les   villages   àtravers  le  pays.

Aujourd’hui,   plus   de   25.000

foyers   au   Bangladesh   disposentd’un   Eco-­Cooler.   L’inventionsoulage  la  vie  de  milliers  de  per-­sonnes,  qui  bénéficient  d’un  peude   confort   grâce   à   ce   procédéaussi  simple  qu’innovant.  « Eco-­Cooler   a   dès   le   début   été   conçupour   être   fabriqué   et   distribuépar  tous  –  en  favorisant  l’utilisa-­tion  de  produits  durables  qui  ontle   plus   faible   impact   environne-­mental  possible.  Il  a  été  créé  pourapporter   un   peu   de   secours   auxcommunautés   les   plus   pauvresdu   pays », explique   Ashis   Paul,l’inventeur  de  Eco-­Cooler. ■

NAHELA NOWSHIN

http://grey.com/apac/work/key/eco-cooler/id/12475/

Des bouteillesen plastique font officede climatiseur

L’air chaud qui entre dans chaque bouteilleest compressé au niveau du goulot, ce qui lerafraîchit avant qu’il n’entre dans la pièce.© GREY GROUP.

A nke   Domaske   a   lancé   sonaventure  scientifique  et  entre-­

preneuriale   lorsque   son   beau-­pèrea   développé   une   leucémie,   en2009.

«   En   raison   de   son   système   im-­munitaire  très  faible,  il  ne  trouvaitrien  à  porter  car  sa  peau  réagissaità   toutes   les   matières   »,   expliqueAnke   Domaske,   depuis   son   usinede  Hanovre,  en  Allemagne.

Microbiologiste,  Anke  Domaske,qui   a   aujourd’hui   35   ans,   com-­mence   ses   expériences   avec   pourpoint  de  départ  une  technique  desannées   1930   pour   créer   des   fibresen  caséine,  la  protéine  du  lait.

«  Au  final,  nous  avons  testé  plusde  3.000  recettes  »,  explique-­t-­elle,car  elle  voulait  un  processus  natu-­rel  qui  utilise  en  abondance  le  laitgaspillé   en   Allemagne,   mais   peud’eau  et  aucun  produit  chimique.

Son   processus,   en   cours   de   bre-­vetage,  est  simple  dans  les  grandeslignes   :   prenez   du   lait,   laissez-­letourner,  séchez-­le  pour  obtenir  unepoudre   de   protéine   comme   celleutilisée  par  les  athlètes,  mélangez-­la   à   de   l’eau   et   autres   ingrédientsnaturels,  extrudez  le  tout  pour  dé-­gager   une   substance   duveteusecomme  une  boule  de  coton,  puis  fi-­lez-­la.

En  raison  des  normes  sanitaires,les  éleveurs  allemands  jettent  prèsde  2  millions  de  tonnes  de  lait  paran   –   de   quoi   remplir   770   piscinesolympiques.

QMilk  n’utilise  que  1.000  tonnesde   lait   mis   au   rebut   par   an   :   lamarge   de   progression   est   impor-­tante.  Le  tissu  soyeux  et  antibacté-­rien  d’Anke  Domaske  est  déjà  utili-­sé   par   des   stylistes   de   mode.   EnItalie,  une  entreprise  en  fait  mêmedu  papier  toilette.

La   possibilité   d’utiliser   les   excé-­dents  de  lait  n’est  pas  non  plus  res-­treinte   à   l’Allemagne   ou   aux   paysoccidentaux.   Anke   Domaske   ob-­serve   qu’en   Inde,   par   exemple,   lachaîne   du   froid   n’est   pas   toujoursimpeccable   et   il   n’est   pas   rare   quele  lait  tourne.  «  D’énormes  quanti-­tés   de   lait   sont   gaspillées   dans   lemonde  »,  regrette-­t-­elle. ■

NICK SPICER

http://www.qmilk.eu/?lang=en

Du lait au tissu, une affairetout en douceur

Une biologiste allemande révolu-tionne l'univers du textile encréant une fibre à partir de laitpérimé. © DELO

L e  Safe  Water  Cube,  créé  parun  ingénieur  français,  est  un

système   de   purification   de   l’eausale.  Une  vingtaine  de  ces  boîtesont  déjà  été  installées  au  Maroc,en  Inde,  en  Haïti.

Ce  cube  en  inox  de  1,20  mètrede  côté  contient  cinq  filtres  diffé-­rents   (au   sable,   à   charbon...).   Ilrend  potables  toutes  les  eaux  desurface,   même   boueuses,   selonson   créateur,   Jean-­Paul   Auge-­reau.  Il  détruit  aussi  «  tous  les  vi-­rus   et   bactéries   causant   diar-­rhées,   dysenterie,   choléra   et   hé-­patites,   sans   détruire   les   miné-­raux   » et   traite   jusqu’à   1.000litres   par   heure,   sans   besoind’énergie.   La   fontaine   coûte3.500   euros.   Elle   est   vendue   enpriorité   aux   organisations   hu-­manitaires   et   aux   autorités   lo-­cales   (villes,   régions...).   Selonl’ONU,   10%   de   la   populationmondiale   n’a   pas   accès   à   l’eaupotable.   Beaucoup   d’humainsdoivent  parcourir  des  kilomètrespour  trouver  une  source.  Chaquejour,   quelque   3.000   enfantsmeurent   de   maladies   diar-­rhéiques  liées  à  une  eau  de  mau-­vaise  qualité. ■

R. VEDRENNE

Ce cube rend l’eausale... potable

A Antananarivo   la   capitalemalgache,  la  grande  majori-­

té  des  habitants  utilisent  des  toi-­lettes  qui  ne  sont  pas  équipées  dechasse  d’eau,  alors  que  beaucoupd’autres   n’utilisent   tout   simple-­ment  pas  de  toilettes,  déféquantà  l’air  libre.

Selon   les   chiffres   publiés   parl’ONG   internationale   WaterAidsur   l’accès   aux   toilettes   dans   lemonde  en  2015,  Madagascar  estle   4e pays   au   monde   où   il   est   leplus   difficile   de   trouver   des   toi-­lettes.

Face   à   cet   enjeu,   l’entrepriseLoowatt  Ltd  s’est  lancée  dans  lafabrication   de   toilettes   sèchessans   odeur,   sans   eau   et   sanscontact.   Des   films   plastiquesbiodégradables   recueillent   lesexcréments   et   « un   systèmequ’on   actionne   après   les   sellespermet  ensuite  au  sac  de  se  refer-­mer   et   de   tomber   dans   une   car-­touche   étanche   et   hermétiqueplacée  juste  au-­dessous  de  la  cu-­vette », explique  Caroline  RakotoRose   Soloarivololona,   adjointeau   directeur   général.   Les   excré-­ments  y  seront  alors  stockés  jus-­qu’à  leur  vidange  qui  se  fait  sui-­vant  les  capacités  du  récipient  et

la  fréquence  d’utilisation.D’après  leur  site,   la  principale

innovation   proposée   par   Loo-­watt   réside   en   fait   dans   sa   pré-­sence  dans  « toutes  les  chaînes  devaleur  de  l’assainissement ».  Sesactivités  vont  alors  de  la  fourni-­ture  de  toilettes  propres  à  la  pro-­duction  d’engrais,  en  passant  pardes  services  de  vidange  de  quali-­té   et   de   traitement   des   bouespour   produire   du   biogaz   et   del’électricité.

Prochain   objectif :   la   mise   envente   fin   2017   de   10.000   toi-­lettes   sèches.   L’entreprise   Loo-­watt   a   d’ailleurs   conclu   des   ac-­cords   avec   l’établissement   quiassure   les   services   de   voirie   deAntananarivo   qui   prendra   encharge   le   traitement   des   bouesde   vidange   qu’elle   aura   collec-­tées. ■

LOVA RABARY-RAKOTONDRAVONY

https ://loowatt.com/global-sanitation-madagascar-toilets/

Des toilettes sans eauqui produisentde l’énergieà Madagascar

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Le Soir Samedi 24 et dimanche 25 juin 2017

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dans   ses   petits   trous.   En   plus   desgraines  pour  son  champ,  il  y  ajoutedes  graines  d’arbres.

Le  coup  de  poker  devient  un  vé-­ritable   coup   de   maître.   La   petiteexpérience   de   Yacouba   se   trans-­forme   peu   à   peu.   En   bordures   deson   champ   s’érige   désormais   uneforêt.  Elle  s’étend  sur  25  à  27  hec-­tares,   selon   des   estimations   GPS.Celle-­ci   attire   de   nombreux   oi-­seaux  qui  rapportent  à  leur  tour  denouvelles  graines  et  contribuent  àla   diversification   faunique.   C’estainsi  qu’on  y  retrouve  des  espècesvégétales   locales   courantes.   « J’aientrepris   de   semer   des   grainesd’arbres  qui  avaient  disparu  de  larégion.   Des   experts   viennent   de   lacapitale   afin   d’étudier   ces   arbresaujourd’hui   présents »,   annonceavec  fierté  Yacouba  Sawadogo.

Les   animaux   ne   sont   pas   enreste.  Au  fil  de  la  promenade  danscette  forêt,  on  remarque  des  petitscanaris  déposés  çà  et  là.  Il  s’agit  enfait   d’abreuvoirs   pour   oiseaux,rongeurs,  reptiles  et  autres  lièvresque   la   forêt   abrite.   Un   véritableécosystème  au  milieu  de  cet  espacearide.

La forêt de Gourga menacéeAfin   de   pérenniser   cet   acquis,

M.Sawadogo  décide  de  partager  satechnique   autour   de   lui.   Ainsi   estcréée   dans   son   village   natal,   àGourga  (4km  à  l’Ouest  de  Ouahi-­gouya),   une   mini-­foire   « marché

zaï ».   Une   manifestation   qui   aconnu  la  présence  de  producteursvenus  des  quatre  coins  du  pays.  Ysont  présentées  des  variétés  et  desoutils   adaptés   au   zaï,   et   deséchanges   sont   organisés   sur   desthématiques  et  des  innovations  enmatière   de   production   agricole,mais   aussi   sylvo-­pastorale.   Uneinitiative  qui  a  abouti  à  la  créationde   « l’Association   des   groupe-­ments  Zaï  pour  le  développementdu  Sahel ».

Cependant   une   menace   planesur  cette  réserve.  « Aujourd’hui,  jelance  un  cri  du  cœur  aux  autoritésde   ce   pays.   Le   lotissement   est   entrain   de   détruire   cet   écosystème »,déplore   M.   Sawadogo.   Depuisquelques   années,   la   ville   a   rejointle  village  de  Gourga  et  l’urbanisa-­tion  a  atteint  la  forêt.  Des  parcellesà   usage   d’habitation   ont   été   dé-­coupées  à  l’intérieur  de  la  forêt  etles  travaux  de  construction  de  cer-­taines  ont  débutées.  Une  calamité,selon   l’innovateur   qui   espère   êtreentendu  des  autorités. ■

SANDRINE SAWADOGO

Le « zaï », la pratique qui a stoppé le désertLa technique du zaïLa culture par zaï permet deconcentrer l’eau et le compostdans des petits trous creusés àcet effet. Ces trous sont creu-sés à la daba pendant la saisonsèche. Entre 30 et 40 cm dediamètre pour 10-15 cm deprofondeur, répartis en quin-conce tous les 80 cm sur lepérimètre souhaité. Cettetechnique permet de récupérerle sable et les matières orga-niques transportés par l’har-mattan (vent chaud d’Afriquede l’Ouest) dans les trous.L’astuce consiste à déposerdeux poignées de résidus dematières organiques séchéesau soleil dans chaque micro-bassin juste avant ou dès lespremières pluies. Ces dernièresvont attirer les termites quicreusent des galeries jusqu’à lasurface et permettre ainsil’infiltration de l’eau et la for-mation de poches d’eau enprofondeur.Le paysan recouvre le tout d'unpeu de terre afin que les ma-tières organiques ne soient pasemportées par le ruissellementdès les premières pluies impor-tantes. En même temps, plu-sieurs graines sont seméesdans chaque poquet.

MODE D’EMPLOI

Ce cube rend l’eausale... potable

Ce cube en inox de 1,20 mètre de côté contientcinq filtres différents et traite jusqu’à 1.000litres par heure. © SAFE WATER CUBE.

I nvisible  à  l’œil  nu  mais  conçupour   produire   de   l’énergie

propre,   Invisible   Solar   est   unmodule  photovoltaïque  innovantdéveloppé   par   Dyaqua,   une   en-­treprise   de   Vicence,   pour   ré-­pondre   aux   besoins   des   villes   etzones  historiques  soumises  à  descontraintes   esthétiques   particu-­lières.

Les   modules   ne   peuvent   êtrevus   car   ils   sont   cachés   dans   uncomposé   polymère   opaque   àl’œil   humain,   mais   transparentpour   les   rayons   du   soleil.   Ilspeuvent   être   transformés   pourressembler  à  n’importe  quel  ma-­tériau   de   construction   –   terrecuite,   pierre,   ciment   ou   bois   –afin  de  se  fondre  dans  l’architec-­ture   du   bâtiment.   La   premièreligne   de   production   de   tuilesphotovoltaïques  a  connu  un  suc-­cès  tel  que  l’inventeur  de  la  tech-­nique,  Giovanni  Quagliato,  a  dumal   à   honorer   toutes   les   com-­mandes.

Les   bardeaux   photovoltaïquespeuvent  servir  à  couvrir  un  toit  àl’identique   des   bâtiments   alen-­tours,  en  parfaite  harmonie  avecla   vue   d’une   ville   historique.Rien  n’indique  qu’il  s’agit  en  faitd’un  toit  photovoltaïque,  à  l’effi-­cacité   énergétique   légèrement

inférieure   à   celle   des   panneauxsolaires   traditionnels.   La   tech-­nologie  Invisible  Solar,  testée  parles   scientifiques   de   l’Agence   na-­tionale   italienne   pour   les   nou-­velles  technologies,  l’énergie  et  ledéveloppement  économique  du-­rable,  s’applique  à  d’autres  maté-­riaux  de  construction,  tels  que  lapierre.  C’est  le  cas  à  Capri,  où  unsystème   photovoltaïque   a   étéinstallé   avec   des   modules   deDyaqua  semblables  à  la  pierre  etintégrés   à   un   mur.   GiovanniQuagliato,   à   l’origine   un   artistecréant   des   œuvres   en   résineépoxy,  a  lancé  sur  Indiegogo  unecampagne   de   crowdfunding,toujours  ouverte,  afin  d’augmen-­ter  sa  capacité  de  production. ■

ELENA COMELLI

http://www.dyaqua.it/

Secrètement solaire

Les tuiles photovoltaïques fontpénétrer les rayons du soleil, àtravers leur matière transpa-rente, jusqu’aux cellules so-laires. © CORRIERE DELLA SERA.

U n   projet   de   Rucher-­écoleest   né   dans   le   Djurdjura

(nord   de   l’Algérie)   à   l’initiativede  l’Association  de  promotion  del’apiculture   de   montagne(APAM).   L’association   est   baséeà   Aïn   el   Hammam,   à   quarante-­cinq  kilomètres  au  sud-­est  de  Ti-­zi   Ouzou   et   organise   régulière-­ment   depuis   2010   des   forma-­tions  d’apiculture  avec  le  soutiendu   Programme   des   Nationsunies   pour   le   développement(PNUD)   et   de   l’ONG   AMSED(l’Association  migration  solidari-­té   et   échanges   pour   le   dévelop-­pement).

Les   stages   sont   destinés   auxamateurs  du  métier,  notammentles  femmes  rurales.  Pas  moins  dedix-­huit   femmes,   issues   de   AïnEl  Hammam  et  d’autres  localitésde   la   wilaya   de   Tizi   Ouzou   ontpris   part   aux   différentes   forma-­tions   animées   par   des   profes-­sionnels   du   métier,   notammentceux  venus  de  France.

Des  ruches  ont  même  été  dis-­tribuées  par  l’APAM  aux  femmesdésirant   se   lancer   dans   l’apicul-­ture  grâce  à  l’apport  du  PNUD  etde   l’AMSED.   Le   projet   ambi-­tieux   a   pour   but   de   promouvoirl’apiculture  en  montagne  tout  engarantissant  un  produit  bio  et  dequalité.

L’APAM   a   élargi   son   champd’action   pour   assurer   d’autresformations  régulières  dans  diffé-­rents  métiers  de  l’agriculture,  cequ’elle   a   d’ailleurs   intégré   danssa   dénomination   pour   devenirl’Association   de   promotion   del’agriculture  de  montagne. ■

TASSADIT CHIBANI

Les abeillesqui permettent aux femmes algériennesde s’émanciper

Pas moins de dix-huit femmes ont pris part aux différentes formations. © EL WATAN.

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Le Soir Samedi 24 et dimanche 25 juin 2017

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Beam, c’est un petitécran fixé sur un mon-tant qui se déplacegrâce à trois roues. Onvoit Yusuf dessus et,bien qu’il soit assischez lui, il participeactivement à la classe-.© JANUS ENGEL.

Sur une population de 4.671 personnes, le village de Kalisari compte 250 fabricants de tofu. © KOMPAS.

D es   volutes   de   fumées’échappent   de   la   cuisine

de   Tumirah,   52   ans.   Cette   habi-­tante   de   Kalisari,   un   village   deBanyumas,   dans   le   centre   deJava   (Indonésie),   fabrique   dutofu.   Le   soja   mijote   au   feu   debois   dans   un   grand   chaudronque  les  locaux  nomment  kawah,ou   cratère.

En   un   jour,   Tumirah   peuttransformer   80   kilos   de   soja   entofu  jaune  et  obtenir  au  passage30   baquets   (600   litres)   d’eauécumante  et  malodorante.  L’eaude   cuisson   était   auparavant   je-­tée.   Aujourd’hui,   un   tuyau   ladéverse   dans   un   conteneur   à300  mètres  de  la  maison  de  Tu-­mirah   pour   y   être   transforméeen   biogaz.   Celui-­ci   revient   en-­suite   dans   un   tuyau   plus   petitchauffer   le   chaudron   où   sontcuits   les   plats   du   jour.

Tumirah   raconte   que   sa   fa-­mille   cuisine   au   biogaz   depuistrois   ans,   à   la   place   du   gaz   depétrole   liquéfié   (GPL).   « Lesflammes   sont   belles   et   je   préfèrele   biogaz   aux   bonbonnes   deGPL   qui   risquent   d’exploser ».Sans   compter   les   économiesque   cela   l’aide   à   réaliser,   puis-­qu’il   lui   suffit   de   canaliser   l’eau

de   cuisson   du   tofu   et   de   payer15.000   rupiah   par   mois   (envi-­ron   1   euro)   à   l’installateur   debiogaz   pour   la   maintenance   descanalisations   et   la   gestion   duprocessus.

Centre de production réputéSelon   Aziz   Masruri,   chef   de

Kalisari,   le   village   est   un   centrede   production   de   tofu   réputédepuis   les   années   1970.   Il   pro-­duit   une   variété   molle,   com-­pacte   et   douce   au   goût.

Sur   une   population   de   4.671personnes,   le   village   compte250   fabricants   de   tofu.   Enmoyenne,   chacun   transformeune   cinquantaine   de   kilos   desoja   et   produit   1.500   blocs   detofu   par   jour.   La   proportiond’eau   usée   peut   atteindre   septlitres   par   kilo   de   soja.

Rifda   Naufalin,   professeureen   sciences   et   technologies   ali-­mentaires  à  la  Faculté  d’agricul-­ture   de   l’Université   du   GénéralSoedirman,   explique   que   l’eaude   cuisson   du   tofu   contient   desprotéines   végétales,   du   vinaigreet   de   l’acide   organique.   Sontaux   de   pH   est   légèrementacide.   « Si   la   matière   organiquefermente,   le   méthane   produit

peut   être   utilisé   pour   cuisiner »,dit-­elle.

Selon   Rifda   Naufalin,   le   pHdes  eaux  de  cuisson  non  traitéesest   de   4   ou   5 :   assez   pour   tuerdes  poissons  et  nuire  aux  plantsde   riz.   Si   elles   ne   sont   pas   trai-­tées   correctement,   les   matièresorganiques   se   décomposent   etproduisent   un   gaz   ammoniacnauséabond.

Avant,   les   fabricants   de   tofudu   village   déversaient   les   eauxde   cuisson   dans   la   rivière,   lapolluant   gravement :   l’eaus’opacifiait,   moussait   et   déga-­geait   une   mauvaise   odeur.   « Larivière   était   devenue   sale.   Enplus   d’être   laide,   elle   sentaitfort »,   se   souvient   Aziz   Masruri.En   un   jour,   70.000   litres   d’eaude  rebut  pouvaient  y  être  déver-­sés.

Le   problème   de   pollution   aété   réglé   par   la   construction   decinq   sites   de   traitement   deseaux   usées   entre   2010   et   2014.Des   institutions   telles   que   leMinistère  de  la  recherche  et  destechnologies,   l’Agence   de   l’envi-­ronnement  du  centre  de  Java,  legouvernement   du   kabupaten   deBanyumas   et   la   communautélocale,   y   ont   contribué.

« Aujourd’hui,   142   des   250fabricants  de  tofu  du  village  ca-­nalisent   leurs   eaux   de   cuissonvers   les   digesteurs,   qui   génèrentdu  biogaz  pour  210  foyers », es-­time   Aziz   Masruri.

Rifda   Naufalin   pense   que   laproduction   de   biogaz   écolo-­gique   doit   s’accompagner   deformations   pour   étendre   lescompétences   des   habitants   à   lagestion   des   sites   de   traitementdes   eaux   usées.   Aujourd’hui,cinq   équipes   se   chargent   de   lagestion   des   sites   de   traitementdes   eaux   usées   Biolita   I   à   Bioli-­ta   V.

Optimiser la maintenanceAziz   Masruri   reconnaît   que   la

coordination   et   le   managementdes   équipes   pourraient   êtreaméliorés   pour   optimiser   lamaintenance  des  installations  etl’utilisation   du   biogaz.   « Parexemple,   plusieurs   tuyaux   deBiolita   III   sont   cassés   ou   abî-­més.   Le   village   a   alloué   8   mil-­lions   de   rupiah   [535   euros]pour   les   réparer », explique-­t-­il.

C’est   également   l’avis   de   Ta-­ryo,  54  ans.  Ce  fabricant  de  tofurelié  au  site  Biolita  I  transforme75   kilos   de   soja   par   jour   depuis

deux   ans,   mais   il   n’a   plus   accèsau   biogaz   car   les   canalisationsse   sont   détériorées.   « Nous   necuisinons   plus   au   biogaz.   Lesconduits   vers   le   digesteur   sesont   bloqués   il   y   a   deux   mois »,regrette-­t-­il.

Wardoyo,   42   ans,   qui   gère   lesite   de   traitement   Biolita   IV,admet   que   les   problèmes   sontfréquents   du   fait   de   la   grandequantité   de   terre,   de   bois   et   defeuilles   dans   les   conteneurs.« Les   détritus   doivent   être   enle-­vés   car   ils   peuvent   boucher   lestuyaux   et   encrasser   les   conte-­neurs ».

Cependant,   de   nombreux   vil-­lageois   continuent   d’utiliser   lebiogaz  pour  leurs  besoins  quoti-­diens.  Tumirah,   la  fabricante  detofu,   en   fait   la   démonstration :elle   ouvre   l’arrivée   de   gaz   sousle   chaudron,   tourne   un   boutonet   gratte   une   allumette.   Uneflamme   bleue   régulière   jaillitinstantanément.  

« Parfois,   je   fais   frire  des  bou-­lettes   de   viande   pour   le   déjeu-­ner », dit-­elle.   « C’est   pratiquepour  cuire  les  légumes  et  accom-­pagnements,   ou   pour   fairebouillir   l’eau ». ■

DEFRI WERDIONO

L’énergie cachée du tofu

des   trois   broyeurs.   Il   s’ensuit   desclaquements   et   au   bout   d’un   en-­tonnoir   des   matières   de   dimen-­sions   réduites   sont   récupérées.Après   le   broyage,   c’est   le   lavage.Entre   les   ateliers,   les   granulésblancs   et   bleus   sont   exposés   surdes  toiles  entre  les  ateliers.

Réduire les gaz à effet de serreAu  bout  de  la  chaîne  se  trouve  le

dernier   atelier   de   tamisage.   Desfemmes   et   des   hommes   extraientdes   derniers   corps   étrangers   desgranulés   répandus   sur   les   tami-­seuses.  « C’est  la  dernière  étape  durecyclage.   Nous   avons   des   granu-­lés.  Nous  les  écoulons  au  Sénégal  etparfois  en  Europe »,  explique  Ma-­madou   Faye,   le   chargé   de   la   pro-­duction.   Ces   plastiques   sont   demoins  en  moins  incinérés  dans  desdécharges,  dans  des  quartiers  et  ausein  des  entreprises  grâce  au  mar-­ché  créé  par  Proplast  qui  a  permisd’éviter   l’émission   de   273   tonnesde  CO2 en  2008.  C’est  une  contri-­bution   locale   à   l’effort   global   delutte  contre  le  changement  clima-­tique.   « En   2008,   lorsque   nousavions   fait   notre   bilan   carbone,nous   avions   273   tonnes   d’équi-­valent  de  CO2 évitées.  Nous  avionsprésenté   un   dossier   pour   la   com-­pensation.   Et   nous   avions   venduces   tonnes   d’émissions   évitées   aucabinet   français   Espere » dit   Ma-­coumba  Diagne.

L’unité  fournit  de  la  matière  auxusines   de   transformation   implan-­tées  au  Sénégal  et  parfois  aux  en-­treprises  étrangères.  « La  quantitéde   matière   recyclée   revendue   dé-­pend   de   la   demande,   tantôt   elleaugmente   tantôt   elle   diminue.Mais  il  nous  arrive  que  des  clientsfassent   une   demande   d’une   ma-­tière  que  nous  ne  parvenons  pas  à

satisfaire   car   il   peut   arriver   quenous   n’ayons   pas   des   matièresbrutes   demandées   par   l’entre-­prise »,  explique  la  directrice  com-­merciale,  Maguette  Samb.

Les déchets disparaissentDe  l’entrée  de  la  ville  de  Thiès,  à

son   centre-­ville,   jusqu’au   quartierSilmang   où   l’unité   est   implantée,des  recycleurs  font  fortune  dans  lacollecte   des   déchets   plastiquesdont  la  tonne  s’échange  à  100.000francs   Cfa   (environ   150   euros).« Nous   sommes   conscients   quenous   avons   contribué   à   la   luttecontre   le   péril   plastique   au   Séné-­gal »,   affirme   fièrement   le   direc-­teur  technique  qui  accompagne  lesfemmes  depuis  1997.  En  amont  dela   chaîne,   la   filière   s’organise.   Acertains  coins  de  rue  de  Dakar,  deskiosques  de  vente  des  déchets  sontouverts.  C’est  la  phase  expérimen-­tale.   L’extension   est   programméedans   un   avenir   proche.   Ceskiosques   seront   des   points   de   ra-­chat   des   déchets   plastiques   et   devente   des   produits   finis   fabriquésavec   des   déchets   plastiques   recy-­clés.   « Nous   sommes   en   traind’installer  des  kiosques  “récuplast”pour   collecter   et   distribuer   despoubelles,  des  corbeilles,  des  tablesde   jardin,   des   fosses   septiques   fa-­briquées  avec  la  matière  plastiquerecyclée »,   révèle   MacoumbaDiagne,   de   la   société   Proplast   quiprojette  d’investir  300  millions  defrancs   Cfa   pour   racheter   300tonnes   de   déchets   chaque   annéedans  le  cadre  de  la  campagne  zérodéchets  plastiques  au  Sénégal. ■

IDRISSA SANE

traitement.   « Nous   gagnons   notrevie  dignement  grâce  à  ce  travail »,nous  souffle-­t-­elle.  Plus  d’une  cen-­taine   de   femmes   temporaires   etpermanentes   gagnent   leur   vie   surcette   plateforme.   Parmi   elles,   cer-­taines  ont  tourné  le  dos  aux  maraî-­chages  ou  au  petit  commerce  pourinvestir  le  créneau.  « Actuellementles   salaires   sont   de   loin   meilleursque   lorsque   nous   démarrions   en1997 »,   dévoile   la   directrice   ad-­jointe,  Germaine  Faye.  Elle  est  unedes  14  pionnières  du  recyclage  desdéchets  plastiques  à  Thiès.

Aujourd’hui,  le  secteur  est  deve-­nu   un   terreau   fertile   des   emploisindirects   au   Sénégal.   La   plate-­forme   tourne   jusqu’à   21   heures.Contrairement   à   l’atelier   de   tri,dans   l’atelier   de   broyage,   des   ma-­chines   ronronnent.   Des   hommesau  nez  couvert  d’un  masque  videntdes   sacs   dans   des   réservoirs   d’un

L a   benne   d’un   camion   remplide  ballots  de  déchets  est  collée

à  la  grande  porte  de  la  société  Pro-­plast,   au   quartier   Silmang   deThiès.   A   l’intérieur   de   celui-­ci,   lejour  de  notre  visite,  des  monticulesde   déchets   emballés   encombrentle  quai  de  débarquement.  Entre  5et   6   tonnes   de   déchets   environsont   débarquées   chaque   jour   surcette   plateforme.   « Nous   recevonsdes   déchets   en   vrac   ou   triés.   Nousavons  du  Polyéthylène  Haute  Den-­sité  (PE-­HD),  le  Polyéthylène  BasseDensité   (PE-­BD)   et   le   Polypropy-­lène   (PP) »,   détaille   le   chargé   dupersonnel,  Papa  Samba  Bâ.  A  l’ate-­lier   de   tri,   des   femmes   prélèventdes   morceaux   de   sceaux,   de   bi-­dons,   de   bouteilles…   Elles   les   ob-­servent  et  les  jettent  dans  des  bas-­sines  en  fonction  de  leur  intensitéet  de  leur  couleur.  Fatou  Bâ  Faye  adéjà  passé  3  ans  sur  cette  unité  de

Des femmes à la base d’une révolution

Plus d’une centaine defemmes temporaires etpermanentes gagnentleur vie sur cette plate-forme. © LE SOLEIL.

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Le Soir Samedi 24 et dimanche 25 juin 2017

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seignants  danois  exceptionnels.Sur   l’écran,   le   visage   de   Yusuf   a

rétréci.  Une  vidéo  YouTube,  où  l’onvoit   qu’on   charge   un   grand   ca-­mion,   remplit   désormais   presquetout   l’écran,   pour   le   plus   grandamusement  de  ses  amis  Faizaan  etZain.  « Le  bénéfice  de  cette  techno-­logie,  c’est  qu’on  constate  que  Yusufse   comporte   exactement   comme   ille   faisait   lorsqu’il   était   physique-­ment   présent.   C’est   toujours   unpeu  un  fauteur  de  troubles »,   sou-­ligne  Morten  Jacobsen.  Au  départ,Yusuf   ne   pouvait   participer   quelorsque   les   cours   avaient   lieu   àl’école  puisque  Beam  nécessite  uneconnexion   Internet.   Désormais,Morten   et   Francis   se   sont   assurésque  Beam  et  Yusuf  sont  connectésà   Internet   à   l’aide   d’un   modemportable.   « Lorsque   nous   sommesallés   à   l’Experimentarium   [uncentre   dédié   à   la   science],   nousavons  pris  la  voiture  en  attachantle   robot   avec   la   ceinture,   de   sorteque   Yusuf   fasse   le   voyage   avecnous.  Et  lorsque  nous  sommes  allésau   bowling,   Francis   a   placé   laboule  par  terre,  et  Yusuf  a  conduitle  robot  et  a  poussé  la  boule  sur  lapiste », raconte   Morten.   Récem-­ment,  lorsque  les  élèves  ont  donnéun  concert  pour  leurs  parents,  Yu-­suf   a   chanté   avec   eux   grâce   àBeam.   Comme   toujours,   il   resteavec  ses  amis.  Lorsque  l’alarme  in-­cendie  s’est  déclenchée,  Yusuf  s’estdirigé   en   roulant   dans   la   cour   del’école,  comme  le  reste  des  élèves.

Les  deux  développeurs  du  robotont   récemment   entrepris   l’étapesuivante   de   son   développementpour  s’assurer  que  Beam  est  adap-­té   aux   enfants   ayant   d’autres   be-­soins :  ceux  qui  ne  peuvent  pas  serendre  à  l’école  à  cause  de  longues

son   école   située   à   Frederiksberg,un   quartier   résidentiel   à   Copen-­hague,  il  participe  activement  à  laclasse.

Depuis   sa   maison,   Yusufcontrôle  grâce  à  son  ordinateur  lerobot  qui  s’appelle  « Beam ».  Bienqu’il   souffre   d’une   maladie   géné-­tique  qui  provoque  des  tumeurs  etexige  qu’il  soit  à   l’abri  des  risquesd’infection,   Yusuf   peut   continuerl’école.

Morten   Jacobsen,   professeurd’informatique,   et   Francis   Nør-­gaard,   professeur   des   écoles,   sontles  cerveaux  de  ce  projet,  qui  a  per-­

Y usuf  Warsame,  âgé  de  13  ans,est  allé  à  l’école,  bien  qu’il  n’y

ait   pas   été   physiquement   présent.Ses  camarades  et  lui  sont  en  traind’apprendre   les   120   mots   les   plusutilisés  en  danois,  et  les  sept  élèvesreçoivent   chacun   un   petit   papierrose  avec  un  mot  écrit  dessus.  Onleur  demande  de  le  placer  quelquepart  dans  les  locaux  de  l’école.

« Plaçons  le  papier  ici. »Ces  mots  proviennent  d’un  petit

écran   fixé   sur   un   montant   qui   sedéplace  grâce  à  trois  roues.  On  voitYusuf  sur  l’écran  et,  bien  qu’il  soitassis  chez  lui,  à  trois  kilomètres  de

mis   à   Yusuf   de   participer   active-­ment  aux  discussions  de  sa  classe.Depuis   que   l’école   a   introduit   lerobot   pour   la   première   fois   il   y   adeux   ans,   les   deux   hommes   ontpris  le  temps  de  continuer  son  dé-­veloppement   et   de   l’adapter.   Aulieu  de  se  contenter  d’observer,  Yu-­suf  peut  désormais  écrire  sur  le  ta-­bleau  blanc  interactif  et  participerà   des   jeux   de   société.   Grâce   àl’usage   qu’ils   ont   fait   du   robot« Beam »  et  à  son  développement,Morten   Jacobsen   et   Francis   Nør-­gaard  ont  été  sélectionnés  pour  leprix   Politikens,   attribué   à   des   en-­

maladies,  ceux  qui  souffrent  d’an-­xiété   ou   de   phobies   ou   bien   ceuxqui   se   sont   simplement   cassé   lajambe.   « Les   robots   sont   des   mo-­dèles  standards,  il  est  donc  impor-­tant   de   les   développer   et   de   nousassurer   que   tous   les   enfantspuissent   en   bénéficier.   Nous   nousintéressons   aux   défis   auxquelssont  confrontés  les  enfants  et  nouscherchons   le   moyen   d’améliorerleurs   conditions   de   vie », noteMorten  Jacobsen.

De   retour   en   classe,   les   élèvessont   occupés   à   chercher   les   petitspapiers   roses.   Mais   comme   Yusufne  peut  voir  que  devant  lui,  ce  n’estpas  une  tâche  aisée  pour  lui.  Yusuffait  partie  des  derniers  à  trouver  lepapier  mais  il  n’en  fait  pas  une  his-­toire.   Lorsque   la   cloche   signale   larécréation,   le   robot   file   vers   laporte.   « Si   j’avais   un   peu   plus   depossibilités   pour   calibrer   le   robot,je  désactiverais  probablement  You-­Tube   et   je   réduirais   sa   vitesse »,déclare  en  riant  Morten  Jacobsen.

Potentiel mondialMorten   Jacobson   et   Francis

Nørgaard  ont  également  été  félici-­tés  pour  leur  travail  sur  un  secondrobot   appelé   Zeno,   décrit   commeune  marionnette  électronique.  Ze-­no   est   capable   de   répondre   à   desquestions   programmées   dans   lesystème,   et   il   aide   ainsi   les   élèvessouffrant  de  troubles  de  l’attentionà  rester  concentrés.

L’école   publique   de   Yusuf   estéquipée  de  deux  robots  Beam,  dé-­veloppés   par   Suitable   Technolo-­gies,  qui  coûtent  chacun  2.000  et4.700   euros.   Les   prix   dépendentnormalement  de  la  durée  de  vie  dela   batterie.   Zeno,   développé   parRobokind,   a   coûté   5.400   euros.

Les  robots  Beam  et  Zeno  ont  été  fi-­nancés  par  l’école  et  la  municipali-­té  de  Frederiksberg.  Les  deux  pro-­fesseurs   prévoient   un   grand   essorà  l’échelle  mondiale  de  l’utilisationde   robots   dans   les   écoles,   et   ilssouhaitent  vivement  partager  leurexpérience,   parce   qu’ils   veulentque   d’autres   puissent   en   profiter.« Nous   sommes   en   contact   avecSingularityU   Denmark,   une   par-­tie  de  la  communauté  d’apprentis-­sage  et  d’innovation  de  Singulari-­ty  University,  soutenant  les  start-­up  qui  essaient  de  trouver  des  solu-­tions   aux   grands   défis   de   notreépoque.   La   branche   danoise   a   ou-­vert   récemment   et   nous   discutonsavec   Kris   Østergaard,   le   directeurde   l’innovation   et   de   l’apprentis-­sage,   pour   savoir   comment   les   sy-­nergies   et   le   partage   de   savoirpourraient   inspirer   d’autres   per-­sonnes »,   explique   Morten   Jacob-­sen.

Pendant  la  récréation,  l’écran  deYusuf  devient  noir.  Alors  que  Mor-­ten  Jacobsen  est  en  train  de  brico-­ler   Beam,   quelqu’un   appelle   de-­puis   l’escalier.   Yusuf   a   pris   lecontrôle   de   l’autre   robot   Beam,rangé  dans  la  salle  du  personnel.

« Il  faut  faire  attention  pendantla  fête  de  Noël  du  personnel  et  véri-­fier  qu’il  ne  se  connecte  pas  soudai-­nement »,  plaisante  Morten,  avantque  Yusuf  et  lui  ne  se  dirigent  versla   classe   pour   retrouver   les   élè-­ves. ■

METTE DALGAARD

www.mortenjacobsen.com

Beam le robot fait vivre en direct la journée d'école aux enfants immobilisés

« Souvent   les   gouvernementsétrangers   achètent   des   appareilsfabriqués   en   Europe   ou   auxEtats-­Unis   ou   les   reçoivent   endon,   sans   avoir   budgété   le   coûtde  la  maintenance  et  sans  avoirle   personnel   pour   l’assurer, ex-­plique   le   fondateur   BertrandKlaiber.  Notre  modèle  prévoit  sixans  de  garantie  inclus.  Une  offreunique   en   son   genre.   Uneconnexion  Internet  permettra  defaire   une   surveillance   de   l’étatdes   appareils   à   distance   et   d’of-­frir  du  support  au  personnel  lo-­cal  pour  effectuer  des  opérationsde  maintenance  préventive.  Celapermettra   également   d’implé-­menter  des  services  de  téléradio-­logie,   ce   qui   peut   être   vital   pourdes   pays   qui   manquent   cruelle-­ment  de  spécialistes ».

Concrètement,  son  projet  pré-­voit  à  moyen  terme  de  créer  prèsde   400   emplois   rien   qu’enAfrique,   contre   25   postes   enSuisse.   Un   investisseur   africainet  un  autre  suisse  sont  déjà  mon-­tés   dans   le   navire   Pristem.   Lastart-­up  a  besoin  de  10  millionspour   mettre   son   produit   sur   lemarché :   il   lui   reste   toujours   lamoitié  à  trouver. ■

CÉCILE DENAYROUSE BERTRAND BEAUTÉ

http://www.pristem.com

dans  les  pays  émergents  ne  sontpas   calibrés   d’après   leurs   stan-­dards  et  tombent  rapidement  enpanne,   mal   préparés   aux   chutesde   tension   du   réseau   électrique,à  l’humidité,  à  la  poussière,  à  lachaleur…

En   Afrique   subsaharienne,jusqu’à   70 %   de   l’équipementmédical  est  ainsi  non-­opération-­nel.   La   start-­up   lausannoisePristem  a  donc  développé  un  ap-­pareil   de   radiologie   robuste,high-­tech   et   low-­cost,   baptiséGlobalDiagnostiX,   adapté   auxconditions  difficiles  des  hôpitauxdu  Sud.

L’innovation  réside  aussi  dansle   type   de   contrat   proposé.

Q uel   est   le   point   communentre  un  accident  de  la  cir-­culation,   une   pneumonie

ou   une   fracture   à   la   jambe ?   Sivous  en  êtes  victime,  votre  méde-­cin   aura   besoin   de   recourir   àl’imagerie   médicale   pour   poserle   bon   diagnostic.   Sauf   que   lesrares   appareils   que   l’on   trouve

Pristem met enfin la radiologie à la portéedes pays du Sud

GlobalDiagnostiX estun appareil de radiolo-gie robuste, high-techet low-cost, adapté auxconditions difficiles deshôpitaux du Sud.© PRISTEM.

Sur une population de 4.671 personnes, le village de Kalisari compte 250 fabricants de tofu. © KOMPAS.

L’énergie cachée du tofu

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C ’est   l’été   2015.   Depuis   le   début   del’année,   près   de   856.000   migrants

ont   déjà   traversé   ces   mêmes   eaux   desîles   des   Cyclades,   situées   entre   la   Tur-­quie   et   la   Grèce.   Lorsque   2015   s’achè-­vera,   ce   chiffre   aura   dépassé   le   millionde  personnes  mettant  pied  sur  le  sol  eu-­ropéen   en   quête   d’un   avenir   meilleur.Des  hommes,  des  femmes,  des  enfants.Fuyant   le   conflit   en   Syrie,   mais   aussil’Afghanistan,   le   Nigeria,   l’Iraq,   l’Ery-­thrée  et  d’autres  pays  d’Afrique  et  d’Asieravagés   par   la   guerre,   la   famine   ou   ladictature.

En   2016,   suite   à   l’accord   signé   entrel’Europe  et  la  Turquie  et  la  fermeture  dela  route  des  Balkans,  les  arrivées  ralen-­tissent :   370.000,   moitié   moins   qu’enGrèce.  Mais  la  traversée  de  la  Méditer-­ranée  coûtera  la  vie  à  5.000  personnes,

soit  plus  qu’aucune  autre  année  aupara-­vant  (1).

La  mer  et  les  personnes  qui  l’ont  tra-­versée,   poussées   à   la   fois   par   le   déses-­poir  et  l’espoir,  ont  changé  la  vie  de  Mi-­chael.  Ce  responsable  informatique,  an-­cien  capitaine  de  l‘armée  suisse,  n’avaitaucune   expérience   dans   l’humanitaire.Il   se   voyait   comme   une   personne   ordi-­naire,   jusqu’à   ce   qu’il   « se   retrouve   aucœur  de  cette  réalité  et  en  soit  affecté,  nepouvant  accepter  que  des  êtres  humainssoient   traités   de   cette   manière,   aujour-­d’hui,   en   Europe ». Il   s’apprêtait   à   re-­tourner  à  Kiesen,  une  localité  de  moinsde  1.000  habitants  au  sud  de  Berne,  enSuisse,  lorsque  ce  qu’il  voit  à  Athènes  lebouleverse.   « Ce   jour-­là,   j’ai   vu   dejeunes  garçons  sortir  du  métro  avec  dessacs   à   dos   presque   plus   gros   que   leursfines  silhouettes.  Après  les  avoir  rencon-­trés,  il  fallait  que  je  fasse  quelque  chose.La  distance  qui  nous  aveugle  habituel-­lement  s’était  évanouie ».

La tradition humanitaire suisseDeux   jours   suffisent   à   Michael   pour

se   décider   et   convaincre   Rahel   qu’iln’était  plus  question  de  rentrer.  Puis  luiest   venue   l’idée   de   créerwww.schwizerchrüz.ch (swisscros-­shelps).  « Quand  ma  femme  me  l’a  sug-­géré,  je  ne  pensais  pas  que  le  nom  de  do-­maine  serait  disponible…  Pour  nous,  ce-­la   représente   la   tradition   humanitairesuisse,   celle   que   nous   aimerions   voir   sepropager ».   Schwizerchrüz   n’est   ni   uneassociation,  ni  une  organisation  carita-­tive,  insiste  Michael.  C’est  un  réseau  de500   citoyens   et   bénévoles   venant   deSuisse,  d’Allemagne  et  d’autres  pays  eu-­ropéens.   Ces   deux   dernières   années,Michael  est  resté  actif  sur  la  page  Face-­

book  qu’il  a  créée.  Il  a  réussi  à  lever  desfonds,   cuisiner   et   porter   secours   à   desembarcations   chargées   de   migrants   endétresse,  a  pu  distribuer  des  milliers  depaires   de   chaussures   dans   le   camp   demigrants  d’Idomeni  (fermé  depuis),  et  amême  loué  un  espace  pour  les  migrantssur  l’île  de  Lesbos.

Portée   sur   les   droits   fondamentaux,son   approche   est   simple   et   efficace,comme  le  montre  le  centre  communau-­taire   One   Happy   Family   (Une   familleheureuse)   de   Lesbos.   « Ce   sont   les   mi-­grants   qui   ont   construit   ce   centre   et   cesont  eux  qui  le  gèrent.  Cela  leur  permetde   se   sentir   davantage   chez   eux.   Pourqu’ils  puissent  devenir  indépendants  etautonomes,   il   est,   selon   nous,   essentielqu’ils  soient  respectés  et  que  leurs  droitssoient   reconnus.   Le   débat   est   ouvertavec   les   grandes   organisations,   quifondent  leurs  opérations  sur  les  besoinsplus   que   sur   les   droits.   Elles   se   foca-­lisent  sur  les  besoins ;  nous  voulons  res-­tituer   leurs   droits   aux   migrants.   Celaleur   permettra   de   prendre   soin   d’eux-­mêmes ».

L’histoire   d’Hanas,   un   jeune   Syrien,montre  que  cette  approche  leur  permetnon   seulement   de   se   prendre   en   mainmais   aussi   de   venir   en   aide   aux   nou-­veaux   migrants.   « Hanas   était   un   mi-­grant   parmi   beaucoup   d’autres   aucamp  de  Salonique,  où  il  a  commencé  àtravailler   avec   nous.   Quand   l’expé-­rience   s’est   terminée,   il   a   proposé   unnouveau  centre  à  Athènes  pour  hébergerdes  mères  isolées ». Aujourd’hui,  le  pro-­jet  est  lancé,  a  reçu  des  fonds  et  bénéfi-­cie  du  soutien  de  militants.

Un  autre  effet  tout  aussi  positif  sur  lelong   terme,   explique   Michael,   est   que« nous  avons  commencé  à  changer  le  re-­

gard   souvent   porté   sur   les   migrants   enleur   donnant   la   possibilité   de   montrerleurs  talents,  utiliser  leurs  ressources  etfaire  preuve  d’indépendance ».

En  ce  moment-­même,  Michael  est  enSuisse  avec  son  épouse.  Ils  attendent  lanaissance  de  leur  fils.  Michael  va-­t-­il  re-­prendre   le   cours   de   sa   vie   à   Kiesen ?« Je  ne  pense  pas  que  je  vais  retourner  àmon   projet   d’entreprise,   ni   en   Grèce,dans   un   avenir   proche.   Heureusement,beaucoup   d’amis   et   de   volontaires   surplace   et   nous   pouvons   les   aider   à   dis-­tance,  en  les  accompagnant  et  en  levantdes  fonds ».

« Attendez-vous à ce que nous gagnions ! »

Face   à   cette   crise   sans   précédent,beaucoup   se   demandent   ce   qu’ilspeuvent  faire.  « On  peut  aider  les  opéra-­tions  de  secours  en  donnant  de  l‘argent.On  peut  aller  en  Grèce  comme  bénévole,ou  offrir  de  l’aide  à  une  personne  ou  unefamille  de  migrants  en  Suisse.  Ces  gensviennent   souvent   d’un   pays   en   guerre,et  ne  connaissent  rien  de  l’endroit  où  ilsatterrissent.  Le  simple  fait  de  connaîtrequelqu’un   fait   une   différence   énorme.Être   ce   quelqu’un   peut   être   le   débutd’une  évolution  positive ».

La   devise   de   Michael ?   « Nous   nousbattons  pour  l’humanité.  Attendez-­vousà  ce  que  nous  gagnions ! »   ■

CLAUDIO LO RUSSO

(1) Source : Office du haut commissaire desnations unies pour les réfugiéshttp://www.swisscross.org/de/

Se battre pour une question d’humanité

Michael Räber et sonépouse Rahel ont fondéle centre communautaire« One Happy Family » àLesbos. Ce sont les mi-grants qui le gèrent. Celaleur permet de se sentirdavantage chez eux. Pourqu’ils puissent devenirindépendants et auto-nomes, disent-ils. Lesenfants s’y sentent bien.© SCHWIERCHRÜZ.CH.

M erry  se  lève  d’ordinaire  avantle   lever   du   soleil   pour   être

conduite  à  son  travail  avec  onze  deses   collègues.   Ils   travaillentquelques   heures,   somnolant   en   at-­tendant   leur   tour.   La   mission   deMerry,  détecter   les  mines  et  autresrestes  explosifs  de  guerre  (REG)  en-­fouis   dans   le   sol,   nécessite   uneconcentration   sans   faille.   Peser   unkilo  aide  également :  légère,  elle  nedéclenche  pas  les  détonateurs.

Originaire   d’Afrique,   Merry   estun  cricétome  des  savanes,  aussi  ap-­pelé  rat  de  Gambie  ou  rat  géant,  unrongeur  extraordinairement  intelli-­gent  et  doté  d’un  odorat  supérieur.Elle  fait  partie  d’une  équipe  de  He-­roRATs   –   des   rats   héroïques   –   éle-­vés,   entraînés   et   déployés   parl’ONG  belge  APOPO,  basée  en  Tan-­zanie.  Une  fois  sa  mission  de  détec-­tion   de   mines   accomplie   au   Mo-­zambique   et   en   Angola,   l’organisa-­tion  a  noué  en  2015  un  partenariatavec  le  Centre  cambodgien  d’actioncontre  les  mines.

Le  Cambodge  est  l’un  des  pays  lesplus   exposés   aux   REG   dans   lemonde.   L’impact   sur   les   commu-­nautés  est  absolument  dévastateur.Le   Système   d’information   sur   lesvictimes  des  mines  et  REG  au  Cam-­bodge   dénombre   plus   de   64.000accidents  entre  1979  et  février  2017.

Reliés   à   un   câble   tendu   entredeux  dresseurs,   les  HeroRATs  s’ac-­tivent   nez   au   sol,   à   la   recherched’odeurs   de   TNT.   Ils   sont   capablesde  vérifier  une  surface  équivalente  àun  terrain  de  tennis  en  30  minutes,soit  bien  plus  vite  qu’une  personnemunie  d’un  détecteur.

« L’impact   est   important »,   dé-­clare   Vendeline   Shirima,   supervi-­seur   international   des   rats   détec-­teurs   de   mines   chez   APOPO,   enTanzanie.  « Avec  les  rats,  on  ne  rateaucune  mine ». ■

LAUREN CROTHERS

www.apopo.org.

Un sacré flair pour les problèmes

Reliés à un câble tendu entre deuxdresseurs, les HeroRATs s’activent nezau sol, à la recherche d’odeurs de TNT.© LAUREN CROTHERS.

A Delhi,   en   Inde,   un   couplemarié   sans   domicile   a   été

séparé  pendant  six  ans.  Forcé  devivre   chacun   de   son   côté.L’époux   était   hébergé   dans   unrefuge  communal  pour  hommeset   l’épouse   dans   un   autre,   pourfemmes.   L’an   dernier,   ils   ontpour  la  première  fois  pu  emmé-­nager  chez  eux.

Leur  nouveau  «  chez  eux  »  estune   tente.   Conçue   par   l’ONGsingapourienne   billionBricks,elle   peut   être   montée   par   unepersonne  en  15  minutes,  sans  au-­cun  outil.  Elle  résiste  aux  intem-­péries   et   protège   des   tempéra-­tures   extrêmes   qui   accablent   laville,   oscillant   entre   5   et   45   de-­grés.  Enfin,  elle  est  suffisammentspacieuse   pour   recevoir   une   fa-­mille  de  deux  adultes  et  trois  en-­fants.  Le  couple  désuni  a  mêmepu   y   installer   un   lit,   expliquePrasoon   Kumar,   fondateur   debillionBricks.

Plus  de  20  familles  sans  domi-­cile  ont  testé  la  tente  à  Delhi  et  àMumbai.   Le   manque   de   loge-­ments   adéquats   est   un   énormeproblème   dans   le   monde.   L’Or-­ganisation   des   nations   unies   es-­time  que  près  de  100  millions  depersonnes   étaient   sans   toit   en

2005,   date   de   la   dernière   en-­quête  mondiale  à  ce  sujet.  Beau-­coup   meurent   d’avoir   été   expo-­sées   à   des   températures   exces-­sives.

Pour  y  remédier,  la  tente  wea-­therHYDE  imaginée  par  un  stu-­dio   de   design   à   Singapour   estconçue  pour  résister  aux   intem-­péries.   L’hiver,   ses   trois   couchesisolent   du   froid,   tandis   que   lamatière   réfléchissante   à   l’inté-­rieur   retient   la   chaleur   corpo-­relle.  A  l‘inverse,  l’été,  la  face  in-­terne   réfléchit   les   rayons   du   so-­leil   pour   aider   ses   occupants   àrester   au   frais.   Lutter   contre   leséléments   n’est   qu’un   des   avan-­tages   de   weatherHYDE   compa-­rée   aux   refuges   et   tentes   clas-­siques,   dit   M.   Kumar.   Facile   àmonter   et   n’exigeant   pas   d’êtrearrimée   au   sol   par   des   piquets,elle   peut   être   utilisée   en   milieuurbain  –  un  environnement  sou-­vent  exposé  aux  catastrophes  na-­turelles. ■

PRISCILLA GOY

https://www.billionbricks.org/

La tente miraculeuse qui protègeles réfugiés de toutes les situations

La tente weatherHYDE estconçue pour résister aux intem-péries, hiver comme été.© BILLIONBRICKS.