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1 Introduction 1. Lutte microbiologique par les champignons entomopathogènes Les champignons pathogènes d’insectes occupent une place particulière en pathologie des invertébrés et dans la recherche d’organismes capables de réguler les pullulations d’invertébrés nuisibles, en santé végétale, humaine ou animale. Néanmoins, ces champignons bien qu’efficaces ont souvent une activité très dépendante des conditions environnementales notamment climatiques (Ferron et al., 1991 ; Lacey et al., 1996). Le facteur climatique peut être extrêmement limitant dans le développement des entomomycoses et présente dans ce cas un véritable obstacle à leur utilisation en lutte microbiologique, en particulier dans le cadre d'un développement agronomique durable. Paradoxalement, les études jusqu’alors développées se sont surtout penchées sur des aspects plutôt écopathologiques et morphologiques. Elles ont négligé ou se sont peu intéressées aux contraintes climatiques par exemple à travers des approches écologiques ou génétiques. La dépendance de ces pathogènes aux contraintes climatiques est à prendre en considération dans le choix et la sélection d’isolats (mycoinsecticides) à introduire dans des zones où le climat est souvent différent de celui d’où ces champignons sont originaires. Par ailleurs, une amplification des phénomènes d’émergence et de ré-émergence de certains bioagresseurs est l'une des conséquences du changement climatique. Ces ravageurs invasifs présentent un haut potentiel d’adaptation à leur nouvel environnement et un remarquable pouvoir de résistance aux insecticides. Ils sont souvent mal connus par les agriculteurs des zones nouvellement infestées et mal maîtrisés par les stratégies de lutte classiques employées. Ceci mène alors à un véritable contexte de crise phytosanitaire, problème d’autant plus grave quand ces ravageurs touchent à des cultures stratégiques et économiquement importantes. 2. Problématique et axes de l’étude Une connaissance approfondie des interactions du champignon entomopathogène avec les différentes composantes biotiques du milieu d’introduction et les populations fongiques entomopathogènes indigènes (concurrence, croisement, coexistence) s’avère indispensable pour mieux comprendre le fonctionnement de ces pathosystèmes complexes. C'est dans ce cadre que s'inscrit l'étude réalisée au cours de ce stage. Le but de cette étude consiste en une simulation de l’introduction d’un isolat exogène (mycoinsecticide) dans une région donnée présentant de nouvelles conditions géoclimatiques et comportant un ou des isolats déjà localement adaptés. Il s'agira de suivre en fonction des contraintes thermiques le devenir de cet isolat exogène et de ses éventuels impacts et interactions avec l'isolat local. Des essais écopathologiques de mono et co- infection, appuyés par des méthodes biométriques et des méthodes de typage moléculaire de deux isolats fongiques différents, permettront d'appréhender la coexistence et/ou leur compétition éventuelle dans l’hôte de ces deux isolats phénotypiquement et génotypiquement différents. Le modèle biologique choisi est le couple Bemisia tabaci (insecte-hôte) et Paecilomyces fumosoroseus (champignon entomopathogène). Les deux isolats de P. fumosoroseus choisis pour cette étude sont végétativement incompatibles (a priori pas de recombinaison mitotique possible) et sont isolés de zones géoclimatiques et d’hôtes différents. Pour suivre l’évolution de ces deux isolats, il a été choisi de soumettre le pathosystème (Pfr-B. tabaci) à trois régimes thermiques différents de façon à simuler trois climats d’éventuelles régions d’introduction. Le premier régime appliqué est le régime basses températures (20°C le jour-13°C la nuit), qu’on peut par exemple trouver à Paris, Katmandu ou Perpignan au printemps. Il correspond au type de climat de la région où l'un des deux génotypes étudiés a été isolé (Ile de France). Le deuxième régime correspond à des températures élevées (32°C le jour et 20°C la nuit), qu'on peut rencontrer actuellement dans des villes comme Multan (Pakistan), au sud des Etats-Unis (Californie, Texas,

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Introduction 1. Lutte microbiologique par les champignons entomopathogènes

Les champignons pathogènes d’insectes occupent une place particulière en pathologie des invertébrés et dans la recherche d’organismes capables de réguler les pullulations d’invertébrés nuisibles, en santé végétale, humaine ou animale. Néanmoins, ces champignons bien qu’efficaces ont souvent une activité très dépendante des conditions environnementales notamment climatiques (Ferron et al., 1991 ; Lacey et al., 1996). Le facteur climatique peut être extrêmement limitant dans le développement des entomomycoses et présente dans ce cas un véritable obstacle à leur utilisation en lutte microbiologique, en particulier dans le cadre d'un développement agronomique durable. Paradoxalement, les études jusqu’alors développées se sont surtout penchées sur des aspects plutôt écopathologiques et morphologiques. Elles ont négligé ou se sont peu intéressées aux contraintes climatiques par exemple à travers des approches écologiques ou génétiques. La dépendance de ces pathogènes aux contraintes climatiques est à prendre en considération dans le choix et la sélection d’isolats (mycoinsecticides) à introduire dans des zones où le climat est souvent différent de celui d’où ces champignons sont originaires. Par ailleurs, une amplification des phénomènes d’émergence et de ré-émergence de certains bioagresseurs est l'une des conséquences du changement climatique. Ces ravageurs invasifs présentent un haut potentiel d’adaptation à leur nouvel environnement et un remarquable pouvoir de résistance aux insecticides. Ils sont souvent mal connus par les agriculteurs des zones nouvellement infestées et mal maîtrisés par les stratégies de lutte classiques employées. Ceci mène alors à un véritable contexte de crise phytosanitaire, problème d’autant plus grave quand ces ravageurs touchent à des cultures stratégiques et économiquement importantes.

2. Problématique et axes de l’étude

Une connaissance approfondie des interactions du champignon entomopathogène avec les

différentes composantes biotiques du milieu d’introduction et les populations fongiques entomopathogènes indigènes (concurrence, croisement, coexistence) s’avère indispensable pour mieux comprendre le fonctionnement de ces pathosystèmes complexes. C'est dans ce cadre que s'inscrit l'étude réalisée au cours de ce stage. Le but de cette étude consiste en une simulation de l’introduction d’un isolat exogène (mycoinsecticide) dans une région donnée présentant de nouvelles conditions géoclimatiques et comportant un ou des isolats déjà localement adaptés. Il s'agira de suivre en fonction des contraintes thermiques le devenir de cet isolat exogène et de ses éventuels impacts et interactions avec l'isolat local. Des essais écopathologiques de mono et co-infection, appuyés par des méthodes biométriques et des méthodes de typage moléculaire de deux isolats fongiques différents, permettront d'appréhender la coexistence et/ou leur compétition éventuelle dans l’hôte de ces deux isolats phénotypiquement et génotypiquement différents.

Le modèle biologique choisi est le couple Bemisia tabaci (insecte-hôte) et Paecilomyces fumosoroseus (champignon entomopathogène). Les deux isolats de P. fumosoroseus choisis pour cette étude sont végétativement incompatibles (a priori pas de recombinaison mitotique possible) et sont isolés de zones géoclimatiques et d’hôtes différents. Pour suivre l’évolution de ces deux isolats, il a été choisi de soumettre le pathosystème (Pfr-B. tabaci) à trois régimes thermiques différents de façon à simuler trois climats d’éventuelles régions d’introduction. Le premier régime appliqué est le régime basses températures (20°C le jour-13°C la nuit), qu’on peut par exemple trouver à Paris, Katmandu ou Perpignan au printemps. Il correspond au type de climat de la région où l'un des deux génotypes étudiés a été isolé (Ile de France). Le deuxième régime correspond à des températures élevées (32°C le jour et 20°C la nuit), qu'on peut rencontrer actuellement dans des villes comme Multan (Pakistan), au sud des Etats-Unis (Californie, Texas,

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Floride) ou estimées dans quelques années dans certaines villes méditerranéennes (Perpignan en 2040). C'est aussi le type de climat de la région où l'autre génotype étudié a été isolé (Pakistan). Le troisième régime correspond aux températures intermédiaires (25°C le jour-20°C la nuit) comme celle trouvée à Perpignan l’été. Le choix de deux climats extrêmes suppose que le régime basses températures (20-13°C) est favorable à l'isolat francilien et que le régime hautes températures (32-20°C) l'est pour l'isolat pakistanais. On part ici de l’hypothèse développée par Vidal et al. (1997) et par Fargues et Bon (2004) respectivement sur le modèle Pfr/milieu synthétique et Pfr/Galleria mellonella que seul l'isolat placé dans son régime thermique préférentiel peut s’exprimer au niveau de l'insecte infecté. On aurait donc un résultat homogène pour la co-infection avec l’apparition au final d’un seul génotype (l’isolat peu thermophile, soit le français, pour le régime basses températures ou l’isolat thermophile, le pakistanais, pour le régime hautes températures. Le corollaire de cette hypothèse est que pour le régime températures intermédiaires (25-20°C), à la fois favorable au premier et au deuxième isolat, une coexistence des deux isolats est attendue avec l'apparition des deux génotypes. Le suivi de l'évolution de ces deux isolats est assuré par l'étude des caractéristiques des sporées développées en surface des cadavres après mono- et co-infections. Trois approches ont été développées. Elles sont basées sur : (i) l’estimation des taux de mortalité des insectes et de sporulation des deux isolats, (ii) la mesure du caractère microscopique : taille des spores (iii) la caractérisation des spores par typage moléculaire basé sur l’analyse des profils ITS-RFLP obtenus. Les deux isolats correspondent à deux haplotypes ITS (Internal Transcribed Spacers) différents.

Avant d’exposer les travaux réalisés pendant ce stage, une rapide synthèse bibliographique permet de présenter les deux protagonistes du pathosystème modèle (fig.1).

Figure 1. Triangle de la maladie versus pathosystème à Hyphomycètes entomopathogènes 3. Paecilomyces fumosoroseus, un pathogène de Bemisia tabaci

Paecilomyces fumosoroseus (Wize) Brown & Smith (Pfr) est une espèce de champignons

entomopathogènes appartenant à la classe des Deutéromycètes (champignons imparfaits), au groupe des Hyphomycètes caractérisés par des conidiophores érigés isolément ou en groupes et à la famille des Phialosporées se distinguant par leurs cellules conidiogènes en forme de bouteille (phialides) produisant des spores en chaîne à leur extrémité (Tubaki, 1963). Ces spores ont une forme ovoïde, une longueur de 3 à 4 μm, un diamètre de 1 à 2 μm et sont de couleur rose plus ou moins intense (Samson, 1974) (fig.2). Ces champignons ont un développement très dépendant des conditions climatiques (température, hygrométrie, photopériode, rayonnement) et sont caractérisés par un

3C - Pathosystème "Paecilomyces fumosoroseus – B. tabaci"

Zones méditerranéennes & tropicales"

P. fumosoroseus : • Pathotypes inféodés aux Aleurodes •Tolérance thermique 30°C • Dépendant de l’Humidité

Contraintes climatiques : • Températures non limitantes • Hygrométries < 60% HR • Effet couche limite feuilles >95% HR

B. tabaci : •Larves fixées sur la face inférieure des feuilles de la plante hôte

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grand potentiel adaptatif (Ferron et al., 1991). P. fumosoroseus est une espèce largement répandue dans le monde (Europe, Asie, Amérique).

Les conditions thermiques influencent fortement toutes les étapes du développement fongique (persistance, germination, sporulation) (Vidal & Fargues, 2007). Dans plusieurs cas, l’adaptabilité à la température semble liée à l’origine géoclimatique des isolats en question. Par exemple, des isolats d’origines pakistanaise et indienne sont tolérants aux températures élevées (25-28°C, avec des optima jusqu'à 32-35°C), les isolats d'origine subtropicale américaine sont un peu moins tolérants à tels niveaux de température, alors que des isolats issus d'Europe tempérée présentent une meilleure tolérance à 20-25°C (Vidal et al., 1997). P. fumosoroseus est trouvé à l’état naturel sur une large gamme d’hôtes (plus de 40 espèces d’insectes appartenant à 8 ordres) dont les Homoptères et parmi eux les aleurodes (Smith, 1993). Des études épidémiologiques effectuées dans différentes régions du monde sur des populations naturelles de Bemisia spp. ont montré que P. fumosoroseus est l’une des espèces fongiques les plus communes s’attaquant aux larves et aux adultes de ces aleurodes (Lacey et al., 1996). L’avantage majeur de ces organismes consiste en leur capacité à pénétrer la cuticule des insectes piqueurs-suceurs alors que pour les autres microorganismes l’infection implique d’autres mécanismes (ingestion, blessure). Le processus infectieux de ces entomomycoses se déroule en différentes étapes : (i) reconnaissance et adhésion de la propagule fongique au tégument (épicuticule) de l’hôte (hydrophobines sporales vs lipides épicuticulaires), (ii) pénétration à travers la cuticule par des mécanismes enzymatiques dégradants (protéases, chitinases, chitobiases et N-acétylglucosaminidases exocellulaires ) et physiques (pression osmotique des apex des hyphes infectants très élevée) ; (iii) émission de toxines (cyclodepsipeptides type destruxines) et contournement ou débordement des défenses cellulaires (formation de granulomes) et humorales (dépôts de mélanine), (iv) prolifération (septicémie fongique) et mort de l’hôte, (v) développement saprophytique et (vi) sporulation en surface du cadavre (fig.3).

Figure 2 : Conidiospores en microscopie électronique à balayage (2A) & conidiogénèse (2B) de Paecilomyces fumosoroseus (Source : Fargues (INRA))

2B

c. = conidiospore ph. = phialide ch.c. = chaine de conidiospores

2A

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L’analyse phylogénétique des isolats de P. fumosoroseus à partir des ITS rDNA place tous les isolats inféodés à l’aleurode B. tabaci dans un seul groupe, quelle que soit leur origine géoclimatique, Pakistan, Inde, Népal, Californie, Texas, Floride (Fargues et al., 2002). De plus, la reconstruction phylogénétique par les méthodes du maximum de parcimonie et du maximum de vraisemblance des neuf loci microsatellites développés sur Pfr et caractérisés sur des isolats inféodés à Bemisia tabaci par un polymorphisme de taille et de séquences permet de distinguer deux lignées majeures. L’une regroupe les isolats issus du continent américain et l’autre les isolats issus du continent indo-asiatique (Gauthier et al., 2007). Le caractère monophylétique de l’haplotype ITS-rDNA inféodé à l’espèce hôte B. tabaci suggère une co-adaptation à l’hôte et en raison de l’aire mondiale de répartition des populations de B. tabaci, une diffusion du germe par son propre hôte (Fargues et al., 2002). 4. Bemisia tabaci : un bioagresseur à forte expansion géographique

L’aleurode Bemisia tabaci (Gennadius, 1889) est un piqueur-suceur de sève appartenant à la

famille des Aleyrodidae (Sternorrhyncha : Hemiptera/Homoptera) (Brown, 2007). C'est un bioagresseur cosmopolite d’origine asiatique (Gerling, 1996). B. tabaci possède six stades de développement (fig.4). A tous les stades, l’insecte se trouve préférentiellement sur la face inférieure des feuilles. Tous les stades larvaires sont immobiles, fixés au support végétal, sauf la première phase du premier stade larvaire, dite "crawler", qui garde sa mobilité jusqu’à ce qu'il trouve un endroit propice pour se fixer. Le stade adulte est mobile. La femelle pond ses œufs (face inférieure des feuilles) de façon circulaire ou isolée. Ces derniers sont attachés à la feuille par un fin pédicelle permettant les échanges avec le végétal. Les différents stades larvaires (L1 à L4) sont de forme ovale et de couleur blanchâtre à verdâtre. C

Figure 3 : Cycle de la maladie (Vidal, 1997)

1

2

4

1 1

3

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Sol Hôte

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Ils se distinguant par leur taille, la forme de leurs pattes et la longueur de certaines de leurs soies dorsales (Gill, 1990). Les durées de développement sont étroitement liées aux conditions climatiques et à la plante-hôte (tab.1).

Stade de développement Durée en jours (± intervalles de confiance)

Œuf (incubation) 10,4 (± 1,1) L1 4,3 (± 1,6) L2 3,7 (± 1,3) L3 3,7 (± 1,2)

L4- Pupe 3,4 (± 1,0) Œuf à l’adulte 25,6 (± 0,5)

Adulte (1mm)

Œuf (0,2mm)

L1 (0,25mm)

L2 (0,4mm) L3 (0,6mm)

L4 (0,8mm)

Figure 4 : Cycle de développement de Bemisia tabaci (grossissement x 60. Source : INRA-IRD)

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Cette espèce est thermophile avec des limites inférieures et supérieures de développement respectivement situées entre 10-13°C et 33-38°C. La température influence également la fécondité, qui atteint son maximum entre 21 et 25°C, avec une moyenne de l’ordre de 100 œufs/femelle (Bonato et al., 2007).

Ce ravageur est doté d’une grande capacité adaptative à ces hôtes et à son milieu, d’un important pouvoir de vection de phytovirus et d’une grande polyphagie (plus de 900 hôtes différents), autant de raisons qui justifient son classement par l’Union Internationale de la Conservation de la Nature (IUCN) parmi "les pires 100 espèces invasives " au monde. Ce bioagresseur doit son adaptabilité écologique et sa haute pathogénicité à sa variabilité génétique se traduisant par l’existence de nombreux biotypes (Brown, 2007). L’extension de l’aire de répartition de certains de ces biotypes en particulier, le Q (haut potentiel de résistance aux pesticides) et le B (haut potentiel de vection et de transmission de virus) (Brown, 2007) rend le contrôle de cette espèce plus délicat et son impact agro-socio-économique plus important.

Ce bioagresseur a pu en peu de temps élargir sa zone d’introduction en colonisant de

nouvelles régions du globe plus tempérées et plus humides que sa région d’origine. Il a par exemple été introduit à la fin du siècle dernier en région méditerranéenne (Brown, 2007). En France, il n'est apparu il y a seulement quelques années accidentellement dans le Sud-Est de la France (Della Giustina et al., 1989) puis dans le Roussillon. Il est devenu la cause d’une véritable situation de crise phytosanitaire sur une culture d’importance économique majeure : la tomate sous serre. La crise est d’autant plus grave que ce ravageur assure la vection de phytovirus dont le Tomato Yellow Leaf Curl Virus (TYLCV) hautement pathogène de la tomate. Pour lutter contre ce problème phytosanitaire majeur, l’éventuelle utilisation de champignons pathogènes est envisageable. Mais la lutte microbiologique contre un bioagresseur avec une telle capacité de bio-invasion (adaptation à une large gamme de niches écologiques) nécessite l'utilisation d'agents fongiques dotés eux-mêmes d'une forte adaptation aux conditions climatiques des zones ciblées (zones d’introduction du B. tabaci). Or actuellement, les bio-préparations commerciales à base de champignons entomopathogènes dans le cadre de la protection biologique et intégrée sont chacune développées à partir d’un seul isolat fongique, ce qui probablement limite leur champ d’application. Nous pouvons citer le cas du "PreFeral", mycoinsecticide à base d’un seul isolat naturel de P. fumosoroseus, utilisé contre les aleurodes et commercialisé en France par la société Biobest. Matériels et méthodes 1. Matériels biologiques 1.1. Champignon entomopathogène : Paecilomyces fumosoroseu.

Les essais ont été réalisés avec deux isolats de P. fumosoroseus. L’isolat Pfr 35 a été isolé à partir d’un cadavre de Mamestra brassicae (Lepidoptera : Noctuidae) collecté en Ile de France et conservé dans la collection de champignons entomopathogènes du Centre de Biologie et de Gestion des Populations (CBGP). L’isolat Pfr72 provient de la collection américaine de l’EBCL (European Biological Control Laboratory) du Département Américain de l’Agriculture (USDA-ARS), il a été isolé sur un cadavre de B. tabaci au Pakistan (Multan). Par simplification, ces deux isolats sont respectivement dénommés "A" et "B" dans la partie moléculaire du rapport. Compte tenu de leur historique différent (conditions de maintien des cultures, nombre et fréquence des repiquages, etc.) et afin de restaurer certaines de leurs propriétés dont l'activité pathogène, chacun des isolats a subi un passage par l’insecte-hôte B. tabaci avant la mise en place des essais. Par convention, on

Tableau 1 : Durées des stades de développement de B. tabaci, biotype Q sur tomate, cultivar Hilario, à 25°C ± 1°C, à 60 % ± 10 % d’humidité relative et avec une photopériode journalière de 12 heures (Lurette, 2004)

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appellera "inoculum P0", l’inoculum obtenu après une première infection de l’hôte B. tabaci. Les inocula P1 et P2 seront collectés après respectivement un ou deux transferts de P0 sur milieu de culture. 1.2. Insecte-hôte : Bemisia tabaci

Les insectes proviennent de l’élevage de masse de B. tabaci du CBGP, mis en place à partir

d’adultes prélevés en 2003 sur une culture de tomate dans la région d’Alénya (Pyrénées-Orientales, France). Les insectes du biotype Q sont exempts de phytovirus.

Les élevages sont maintenus dans une chambre climatique à 25±1°C, à un taux d’humidité relative (HR) de 60±10% et sous une photopériode journalière de 16 h. Les insectes sont élevés sur des plants de tabac, indemnes de virus, cultivés en serre au CBGP. L’ensemble est mis dans des cages en plexiglass (50 x 50 x 50 cm), recouvertes d’un filet à fines mailles et munies de deux ouvertures latérales permettant la manipulation des plants et des insectes (fig. 5). 1.3. Plante-support : Haricot vert : Phaseolus vulgaris (var. Contender)

La plante-support est le haricot, choisi pour sa culture facile, son développement rapide, sa

résistance aux conditions thermo-hydriques imposées par les essais et ses feuilles larges et maniables facilitant l’infestation par l’insecte. Lorsque les plants atteignent le stade de deux feuilles cotylédonaires, soit 10 à 13 jours après le semis réalisé en serre, ils sont prêts pour une infestation artificielle avec B. tabaci (fig. 5). 2. Dispositif expérimental

Les essais sont réalisés en chambre climatique. Ils sont bifactoriels avec un premier facteur inoculum fongique à trois niveaux : pathotype A, pathotype B et mélange A+B et un second facteur régime climatique comportant une photopériode jour-nuit 12h-12h également à trois niveaux : 20-13° C (θ basses), 25-20° C (θ intermédiaires) et 32-20° C (θ hautes). Pour chaque régime climatique, les essais sont réalisés sur 24 plants-supports, à raison de 8 plants par type de traitement, artificiellement infestés par B. tabaci et sélectionnés le jour du traitement d’après les effectifs de larves L2 qu’ils portent sur la face inférieure de leurs feuilles (minimum 30 larves). Ces plants sont répartis dans 9 enceintes en plastique (27 x 36 x 18 cm), à raison de 3 enceintes pour chaque variante inoculum (A, B ou mélange A+B) et de 3 plants du même traitement par enceinte (afin de limiter les éventuelles contaminations). 3. Manipulations écopathologiques 3.1. Techniques d’infestation : Préparation des insectes au traitement fongique (fig. 5) Afin de disposer au moment du traitement fongique de cohortes homogènes de larves de deuxième stade (L2 : stade de développement très sensible au champignon), une infestation artificielle en "clip-cage" ou "mini-cage" est réalisée de manière standardisée. Pour chaque plant de haricot, un lot de 40 jeunes adultes de B. tabaci non sexés est prélevé dans l'élevage de masse du CBGP et introduit dans un "clip cage" mis sur la face inférieure d’une des deux feuilles. Les adultes y sont laissés pendant 24 heures à 25±1°C pour pondre. Ensuite, ils sont retirés et les plants infestés sont maintenus dans une chambre climatique pendant environ 14 jours dans les mêmes conditions climatiques que celles des élevages.

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Figure 5. Schéma du mode opératoire des essais d’infection de B. tabaci par deux isolats de P. fumosoroseus

Préparation des suspensions fongiques à partir des P2 Sélection de plants de haricot cultivés Prélèvement de B.tabaci adultes à partir des élevages

Infestation des plantes hôtes par les insectes et développement des larves L2

Pulvérisation du feuillage &

Infection des larves par le champignon

Transfert des plantes infestées dans les enceintes

& Incubation 7 à 10 j en chambre climatique

Sporulation visible du champignon

Récupération des cadavres sporulés

Path

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3.2. Techniques d’infection 3.2.1. Préparation des inocula pour le traitement • Obtention de la culture P1. Pour chaque isolat A et B, une suspension de spores est préparée à partir de P0, en conditions stériles, sous hotte à flux laminaire, en grattant la surface de la culture avec une spatule. Les spores récoltées sont placées dans un pilulier et mises en suspension dans 10 ml d’eau. La suspension homogénéisée est ensemencée sur milieu solide semi-synthétique (SS) (en g/l : 0,39 KH2PO4; 1,42 Na2HPO412H2O; 0,60 MgSO47H2O; 1,00 KCl; 0.70 NH4NO3; 10 glucose; 5 extrait de levure; 20 agar, 0,5 chloramphenicol) à l’aide d’un ensemenceur semi-automatique de type spiral permettant l’obtention d’une concentration de spores décroissante du centre vers la périphérie de la boite de Petri, regroupant ainsi plusieurs dilutions (de 10x à 10x-3) (Gilchrist et al., 1973). Cette technique permet de disposer de thalles de monospores suffisamment isolées pour un prélèvement ultérieur. Les boites ensemencées sont incubées pendant 4 jours à 25°C dans l’obscurité. Une fois que les spores germent et forment un thalle, on procède au transfert des explantats (monospores) sur milieu SS en boites de Petri en choisissant des colonies éloignées et bien individualisées. Ces boites sont placées en incubation à 25°C dans l’obscurité pendant 2 à 3 semaines. Lorsque ces cultures monospores donnent des colonies suffisamment sporulées, une seule colonie monospore est choisie pour chacun des isolats, en fonction de la qualité de sa sporulation et de l'absence de contaminant. Les colonies monospores retenues correspondant aux deux isolats et sont conservées à 5°C pour une utilisation ultérieure. • Obtention de la culture P2 et préparation des suspensions fongiques. Afin de disposer de suffisamment d’inoculum de A et de B pour traiter les insectes, un repiquage de la culture P1 est réalisé deux à trois semaines avant chaque série d’essais, sur milieu SS solide. A partir de ces boites, trois lots (A, B et mélange A+B) de suspensions fongiques sont préparés pour le traitement. Le traitement de chaque cohorte de B. tabaci nécessite 10 ml de suspension. La concentration de cette suspension est la même pour tous les régimes climatiques soit de 108 spores par ml de suspension. Pour les mono-infections, ces spores proviennent de P2 de A ou de B et pour les co-infections, du mélange de 5 x 107 de P2 de A et de de 5 x 107 de P2 de B. 3.2.2. Sélection des plants à traiter

Une fois les aleurodes parvenus au stade L2, les plants sont sélectionnés en fonction des résultats des contrôles et des comptages larvaires (30 à 40 larves L2 par feuille). Les stades indésirables (jeunes L1 et L3) sont éliminés. La surface foliaire à traiter, sur laquelle on a fait le comptage est délimitée afin d’être plus facilement repérée à l’œil nu lors du traitement. 3.2.3 Principe et technique de traitement

Le principe général du traitement fongique consiste à pulvériser des lots de larves de B. tabaci fixées à la feuille l’une des trois variantes de traitements (A, B ou mélange "A+B"), à soumettre le pathosystème à des conditions environnementales optimales pour l’infection puis la sporulation sur cadavres et à récupérer ces spores pour analyser leurs phénotypes et génotypes. Les applications du champignon sont effectuées sur la face inférieure des 2 feuilles du plant par un système de pulvérisation (tour de Burgerjon) permettant une pulvérisation quantitativement homogène de très fines gouttelettes de suspension fongique. Une pression de 70 mm de mercure permet de disposer d’un dépôt de l’ordre de 3 x 105 spores/cm² pour un volume de 10 ml de solution (Fargues et al., 1997).

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3.3. Mise en conditions d’incubation et contrôles post-incubation

Après traitement, les plants sont tuteurés, placés dans des enceintes dans une chambre climatique pendant 7 à 10 jours en fonction du régime climatique. L’humidité relative (HR) de l’air régnant dans ces enceintes est contrôlée par l’injection continue d’un flux d’air régulé en humidité. Pour favoriser la pénétration du champignon à travers la cuticule de l’insecte, l’humidité est maintenue à saturation (100 % HR) les trois premiers jours suivant l’application du traitement fongique. Puis, elle est réduite à 86 % HR par passage de l’air injecté sur une solution saline saturée en KCL (Vidal et al., 2003) jusqu’à la fin de l’incubation afin de favoriser le développement et la sporulation du champignon à la surface des cadavres. Compte tenu de la différence de température et d’humidité entre la chambre climatique et les enceintes (effet du feuillage, volume réduit, rejet de CO2), des essais préalables sont réalisés pour chaque régime thermique afin d’ajuster les niveaux thermo-hydriques des enceintes et définir ceux auxquels doit être soumise la chambre climatique. Les données thermiques et hygrométriques au niveau de chacune des 9 enceintes sont relevées, tout le long du séjour en chambre climatique par des sondes placées à quelques centimètres des feuilles. Ces conditions sont enregistrées toutes les 10 secondes grâce à une acquisition de données Campbell 23X (Campbell Scientific, Royaume-Uni), qui donne la moyenne sur 30 minutes des mesures de température et d’hygrométrie. La figure 6 représente à titre d’exemple les conditions de température enregistrées par les 9 sondes pendant 48 h sous le régime 20-32°C. Figure 6 : Conditions thermiques enregistrées sous le régime thermique de 20°C la nuit et 32°C le jour (photopériode de 12 heures). Les 9 courbes correspondent aux températures enregistrées pendant l’essai dans les 9 enceintes abritant les plants préalablement infestés de B. tabaci et traités avec l’isolat A, B ou le mélange A+B du champignon P. fumosoroseus.

Après incubation, des comptages sous loupe binoculaire sont effectués pour relever la mortalité des larves et les différents taux de sporulation. Le nombre de larves mortes sans signature de sporulation (simplement sèches), (données non exploitées dans le cadre du rapport). Le nombre de larves mortes présentant un signe de sporulation est répertorié en fonction du stade de développement (L2, L3 ou L4). Les aleurodes émergés (exuvies vides) sont considérés comme non infectés.

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08/03

00:00

08/03

06:00

08/03

12:00

08/03

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00:00

09/03

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12:00

09/03

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10/03

00:00

Date et heure

Te

mp

éra

ture

C)

A A A B B B A+B A+B A+B

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5. Mesure de la taille des spores

La taille des spores est un critère morphologique microscopique qui permet de différencier les

deux isolats présents sur les cadavres, en fonction des différents traitements fongiques et climatiques réalisés. Les différentes spores sont récupérées en grattant la surface des cadavres avec une oeze stérile. Les spores sont étalées entre lame et lamelle dans une goutte de fixateur coloré. Les mesures sont faites à l’immersion avec l’objectif x 100 et un oculaire micrométrique.

Pour chaque lame, la taille de 30 spores est mesurée grâce aux graduations de l’oculaire. Les mesures effectuées doivent ensuite être converties en μm en les multipliant par un coefficient dépendant de l’objectif (1 graduation = 1,04μm). 5. Analyses statistiques des données de mortalité, de sporulation et de taille des spores

Les données ont été soumises à l’analyse de variance (ANOVA à une ou à deux voies) suivie du test de comparaison multiple des moyennes de Student-Newman et Keuls (SNK) en utilisant le logiciel SIGMASTAT V5 (SPSS, 1997). Les données biométriques de taille des conidiospores ont été analysées sans transformation préalable, en revanche les taux de mortalité et les taux de cas de sporulation ont nécessité une normalisation préalable de la distribution des données par transformation des pourcentages en valeur angulaire (exprimée en degrés). Les moyennes (données brutes ou valeurs angulaires suivant les cas) ont été présentées avec l’erreur-type (Standard Error of the Mean = SEM). 6. Préparation du matériel fongique pour les typages moléculaires (Fig. 7) 6.1. Prélèvement de cadavres d’insectes avec sporulation du champignon

Les cadavres bien sporulés et suffisamment isolés les uns des autres pour éviter les contaminations sont aléatoirement prélevés sous loupe binoculaire sur les 8 plants correspondant à chaque variante expérimentale (A, B ou mélange). Pour chaque essai, on sélectionne 12 cadavres traités par A, 12 cadavres traités par B et 15 cadavres traités par le mélange. La récupération d’un cadavre sporulé est une opération délicate qui doit être faite soigneusement pour éviter d’abîmer le cadavre. Le mycélium recouvrant le cadavre est alors délicatement soulevé à l’aide d’une pointe métallique stérile et le cadavre est décollé du végétal sans abîmer la feuille ni en prélever un fragment. Le cadavre est mis dans un tube de 2 ml contenant une solution diluée à 10 ppm de tween 20, agent tensioactif favorisant la dispersion des spores dans l’eau. Ce tube est soumis à une agitation mécanique (30 secondes de pulses répétitifs au Vortex) afin de décrocher les conidies du cadavre sans l’abîmer. A partir de la suspension obtenue, une dilution au tiers est faite pour obtenir des colonies suffisamment individualisées et distancées suite à l’ensemencement spiral. 6.2. Obtention de colonies monospores

L’obtention de colonies monospores est une étape indispensable qui a pour double but de s’affranchir du problème des contaminations éventuelles liées au fait que le cadavre de B. tabaci n’est pas stérile et de s’assurer que l’on ne travaille qu’avec un seul génotype fongique. 6.2.1 Ensemencement spiral et isolement des thalles

Sous hotte à flux laminaire, on procède à un ensemencement spiral de la solution diluée contenant les spores du champignon. L’ensemencement se fait en milieu SS solide additionné de chloramphénicol, antibiotique à large spectre limitant les contaminations, en boite de Petri.

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Selon le régime climatique et le type de traitement, on part d’un nombre élevé de cadavres et on procède à plusieurs répétitions pour palier aux éventuelles contaminations de boites (boites inexploitables) et pour obtenir au final un nombre de monospores suffisant et statistiquement représentatif (tableaux 2 et 3). Les boites ensemencées sont incubées à 25°C, à l’obscurité pendant trois à quatre jours selon le développement des colonies. Après environ quatre jours (selon la taille et le développement des spores) les spores ayant formé des thalles sont individuellement prélevées par la technique du transfert d’explantats (Vidal et al., 1997a). Les thalles bien individualisés et non contaminés sont aléatoirement choisis parmi l’ensemble des boites ensemencées disponibles, en prenant soin de leur aspect : régulier et non contaminé.

Le mycélium provenant d’une monospore est ainsi prélevé avec une rondelle de milieu

(diamètre de 6 mm) et transféré sur une nouvelle boite de Petri contenant le même milieu nutritif, à raison d’un explantât par boite. Les rondelles sont soigneusement renversées sur la surface, de sorte que le mycélium soit en contact avec le milieu. Par la suite, les boites sont placées en incubation à 25°C et à l’obscurité pendant une dizaine de jours, jusqu’à sporulation des colonies. Après incubation, selon le nombre final de clones désirés (voir tableaux 2 et 3), les colonies non contaminées sont choisies en fonction de leur aspect pour le typage moléculaire.

Figure 7 : Préparation du matériel génétique pour le typage moléculaire

EXTRACTION de l'ADN

génomique PCR-ITS RFLP-ITS

M 11 X1 X2 Y1 Y2 46 M 11 X1 X2 Y1 Y2 46

Ensemencement de la solution contenant le cadavre sporulé

Boite ensemencée à partir d’un cadavre et présentant plusieurs

colonies

Monospore obtenue après transfert à partir d’une boite ensemencée

B

A

Monospore à un stade plus développé ou on distingue par la

couleur entre A et B

Tapis mycélien obtenu après culture des spores sur milieu

liquide

Cfo I

Sma I CfoI

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Tableau 2 : Nombre de cadavres prélevés sur feuille, de boites ensemencées, de monospores transférées et de colonies typées au niveau moléculaire pour les régimes basses et hautes températures.

Traitement fongique A Mélange A+B B Nb de cadavres prélevés sur la feuille

12 12 + 3

12

Nb de boites ensemencées 3 boites X 12 cadavres = 36 boites

3 boites X 12 cadavres = 36 boites

+

5 boites X 3 cadavres = 15 boites

3 boites X 12 cadavres = 36 boites

Nb de boites pour le transfert d’un explantat

5 boites X 12 cadavres = 60 boites

5 boites X 12 cadavres = 60 boites

+

25 boites X 3 cadavres = 75 boites

5 boites X 20 cadavres = 60 boites

Nb de colonies monospores conservées pour le typage moléculaire

10 colonies 10 colonies + 30 colonies 10 colonies

Tableau 3 : Nombre de cadavres prélevés sur feuille, de boites ensemencées, de monospores transférées et de colonies typées au niveau moléculaire pour le régime de températures intermédiaires.

Traitement fongique A Mélange A+B B Nb de cadavres prélevés sur la feuille

12 12 12

Nb de boites ensemencées 3 boites X 12 cadavres

= 36 boites

5 boites X 12 cadavres

= 60 boites

3 boites X 12 cadavres

= 36 boites Nb de boites pour le transfert d’un explantat

5 boites X 12 cadavres

= 60 boites

25 boites X 12 cadavres

= 300 boites

5 boites X 12 cadavres

= 60 boites Nb de colonies monospores conservées pour le typage moléculaire

10 colonies 100 colonies 10 colonies

666.2.2. Préparation du mycélium en vue de l’extraction de l’ADN (fig. 7)

Dix à onze jours après le transfert des explantats, les colonies monospores ont sporulé. A

partir de chacune de ces monospores, des spores sont récupérées stérilement à l’aide d’une anse et ensemencées dans un tube de 2 ml contenant du SS liquide (sans chloramphénicol). Les tubes ensemencés sont placés en incubation pendant 72 h dans une étuve à 25°C et sous agitation. Après 72 heures, la suspension fongique obtenue est transférée sur milieu solide. Pour cette culture, des disques de cellophane à la taille d’une boite de Petri sont découpés et autoclavés deux fois successivement pendant 25 minutes. Ensuite, sous hotte à flux laminaire, chaque disque est soigneusement placé à la surface d’une boite de Petri contenant du SS solide sans chloramphénicol. Chaque boite est par la suite inoculée par 100 µl de la suspension fongique d’un tube donné, étalée en utilisant un râteau d’aluminium. Les boites sont placées en incubation à l’obscurité pendant 60 à 65 heures à 25°C. 7. Typages moléculaires 7.1. Extraction de l’ADN génomique de Pfr (fig. 7)

Après incubation, un tapis mycélien apparaît à la surface du cellophane. Sur chaque boite, 75 mg de mycélium frais sont récoltés à l’aide d’une spatule stérile. Ce mycélium est mélangé au "Lysing Matrix A" du FastDNA ® KIT MP Biomedicals préalablement à sa conservation à -20°C, en attente de l’extraction de l’ADN.

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L’extraction de l’ADN génomique est réalisée selon le protocole du FastDNA ® KIT. La qualité et la quantité de l’ADN extrait sont vérifiées sur gel d’agarose 1.5 % et TAE 0,5X d’un dépôt de 3 µl d’ADN génomique (additionné de 3 µl de tampon de charge). Après migration à 135 volts pendant 15 min, le gel est mis dans un bain de Bromure d’Ethidium (BET) pendant 20 mn. Les dépôts d’extraits sont révélés sous ultra-violet. 7.2. PCR-RFLP des régions ITS (fig. 7)

Les régions ciblées ITS1 et ITS2 correspondent aux régions comprises entre les gènes codant les différentes sous-unités de l’ARN ribosomique, chaque unité de transcription étant répétée en tandem. ITS1 se situe entre les gènes 18S et 5.8S et ITS2 entre les gènes 5.8S et 28S. La région (ITS1-5.8S-ITS2) est amplifiée par PCR en utilisant le couple d’amorces ITS1F et ITS4A (Larena et al., 1999) dans le mélange PCR décrit tableau 4. L’amplification est faite dans un thermocycleur (MJ Research PTC200) en suivant le programme décrit dans le tableau 5. L’amplification est contrôlée sur gel d’agarose de 1,5 % et TAE 0.5X en déposant 3 µl de produit PCR avec 3 µl de tampon de charge et 5 µl de marqueurs de poids moléculaires (Smart ladder, Eurogentec).

Après une migration à 135 volts pendant 25 min, la révélation/visualisation du gel est faite

comme précédemment décrite. Six μl de produits PCR sont digérés par les enzymes de restriction SmaI et CfoI pris séparément, respectivement à 25°C pour Sma1 et 37°C pour CfoI, en plaque de 96 puits dans un thermocycleur Eppendorf pendant 2 heures. La composition du mélange réactionnel est décrite dans le tableau 6 et correspond aux spécifications données par Proméga®. Vingt microlitres du produit de digestion mélangés à 3µl de tampon de charge sont déposés sur gel d'agarose à 3 % de TAE 0.5X. Après migration à 100 volts pendant 2 heures, le gel est visualisé comme précédemment décrit. Tableau 4 : Composition du mélange PCR

Solution Quantités en µl Tampon Appligène 10x (+15 mM MgCl2) 2.5

Eau (stérile pour BM Sigma) 13,4 Mix dNTPs (25 mM) {D 1/20 = 1.25 mM} 3

Amorce ITS1-F (3 µM) Amorce ITS4-A (3 µM)

2 2

Taq polymérase (Appligène 5u/µl) 0.1 ADN (D 1/100) 2 Volume Total 25

Tableau 5 : Etapes d’amplification de l’ADN par le thermocycleur

Etapes Température Durée Opération 1 94° C 5 mn Dénaturation 2 94° C 30 sec Dénaturation 3 58. 0 °C 1 mn Hybridation 4 72.0 °C 30 sec Elongation

Ajout 1 sec./cycle 5 Retour étape 2 34 fois Hybridation 6 72.0 °C 5 mn Elongation 7 10.0 °C infini Elongation finale 8 Fin

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Tableau 6 : Composition du mélange RFLP

Solution Quantités en µl Eau (stérile) 10,8

Tampon (spécifique de l'enzyme) x10 2 BSA 0,2

Enzyme 1 (soit 10 Unités) Produit PCR 6

Volume Total 20

L’analyse des profils de digestion obtenus (bandes) se fait en référence au marqueur de taille 20bp (Marker Set, Sigma) et au profil de digestions connu des souches Pfr 35 et Pfr 72 (Fargues et al, 2002). 7.3. Séquençage des régions ITS

Afin de contrôler les résultats obtenus par RFLP, des produits PCR correspondant aux ITS sont séquencés dans les sens 5’� 3’ et 3’� 5’ par la Société Cogenics (Grenoble) sur séquenceur automatique 96 capillaires (ABI3730XL). Les chromatogrammes sont analysés au moyen de l’Editeur de séquences Bioedit.

Une séquence consensus est obtenue pour chaque produit PCR séquencé. Les différentes

séquences consensus sont ensuite alignées les unes par rapport aux autres à l’aide du logiciel ClustalW et comparées aux 2 séquences des isolats références Pfr72 (groupe B) et 35 (groupe A). L’assignation de ces séquences à l’un des 2 groupes références est estimée par similarité nucléotidique au moyen du logiciel BioEdit. Les sites de digestion des 2 enzymes de restriction (Fig.7) ont également été positionnés sur les séquences obtenues pour tester la concordance ou non des résultats en RFLP et en séquençage.

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Résultats 1. Influence de la température sur la mortalité larvaire et sur la sporulation des cadavres

Les taux de mortalité provoquée par chacun des isolats inoculé isolément ou en mélange ont été très élevées (90 à 99%) sauf dans le cas de l’isolat francilien Pfr 35 dans les conditions d’incubation 32-20°C (22%) (tabl. 7). Il s’en suit que dans les conditions étudiées la mortalité est significativement dépendante de la température (F = 15.559 ; df = 2, 57 ; P < 0.001) et de l’isolat entomopathogène (F = 11.106 ; df = 2, 57 ; P < 0.001) (interaction : F = 7.546 ; df = 4, 57 ; P < 0.001). Tableau 7 : Mortalité des larves de B. tabaci inoculées avec deux isolats de P. fumosoroseus, isolément ou en co-infection, sous trois régimes thermiques (alternance jour-nuit) (1):

(1) Analyse de variance des taux de mortalité exprimés en arc sin √% (moyenne en degrés ± SEM). Les données suivies des mêmes lettres ne diffèrent pas significativement (test de Student-Newman-Keuls, α = 0.05). (2) Les taux de mortalité en % correspondent aux moyennes calculées.

Les taux de sporulation en surface des cadavres présentent une plus grande variabilité due surtout à l’isolat fongique (F = 9.711 ; df = 2, 51 ; P < 0.001) et dans une moindre mesure à la température (F = 4.725; df = 2, 51 ; P = 0.013), l’interaction entre ces deux facteurs restant forte (F = 6.204 ; df = 2, 51 ; P < 0.001). Chez les cadavres issus des larves incubées à 25-20°C, les taux de sporulation restent très élevés (63 à 98%), en revanche, on constate que, dans le cas de l’isolat francilien, ils sont plus faibles à 20-13°C (51%) et très bas à 32-20°C (10%) (tabl. 8).

Tableau 8 : Sporulation sur les cadavres issus des larves de B. tabaci inoculées avec deux isolats de P. fumosoroseus, isolément ou en co-infection, sous trois régimes thermiques (1):

(1) Analyse de variance des taux de sporulation exprimés en arc sin √% (moyenne en degrés ± SEM). Les données suivies des mêmes lettres ne diffèrent pas significativement (test de Student-Newman-Keuls, α = 0.05). (2) Les taux de sporulation en % correspondent aux moyennes calculées.

13-20°C 20-25°C 20-32°C Isolat Pfr 35 (A) 75.5 ± 4.8 a (1)

94% (2) 77.2 ± 4.8 a

95% 27.7 ± 6.0 b

22% Isolat Pfr 72 (B) 71.4 ± 4.8 a

90% 85.8 ± 5.1 a

99% 72.4 ± 4.8 a

91% Co-infection 81.8 ± 4.8 a

98% 78.7 ± 4.8 a

96% 73.6 ± 5.5 a

92%

20-13°C 25-20°C 32-20°C Isolat Pfr 35 45.6 ± 7.8 c (1)

51% (2) 66.4 ± 6.1 a,b

84% 18.0 ± 8.7 d

10% Isolat Pfr 72 59.4 ± 7.1 a,b,c

74% 82.5 ± 6.6 a

98% 63.4 ± 6.1 a,b

80% Co-infection 62.9 ± 6.1 a,b,c

79% 52.2 ± 6.1 b,c

63% 70.1 ± 7.1 a,b

88%

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2. Analyse de la taille des spores

La longueur moyenne des conidiospores de P. fumosoroseus recueillies sur les cadavres larvaires de B. tabaci incubés à 25-20°C est de 3.7 ± 0.2 µm pour l’isolat francilien et de 4.6 ± 0.4 µm pour l’isolat pakistanais (tabl. 9). La durée du stage n’a pas permis d’effectuer l’ensemble des mesures à partir des échantillons provenant des séries conduites à 20-13°C et à 32-20°C avec les larves contaminées par l’un ou l’autre des deux isolats, néanmoins des mesures partielles ont montré que les données de taille des spores de recueillies à 20-13°C peuvent être légèrement plus faible, avec un seuil de 3.41 µm pour Pfr 35 et 4.45 µm pour Pfr 72 alors que les données partielles issues des individus incubés à 32-20°C sont du même ordre que les données de référence (série 25-20°C). Les données moyennes concernant l’analyse globale des tailles des conidiospores récoltées sur les cadavres indique un effet marqué de la température (F = 46.207 ; df = 2, 813 ; P < 0.001) et de l’isolat (F = 87.337 ; df = 2, 813 ; P < 0.001). La comparaison des moyennes de taille des sporées issue de larves mono-infectées et co-infectées (tabl. 9) montre : l’absence de différence significative entre la moyenne des données issues des larves co-infectées incubées à 32-20°C (4.63 µm) et la moyenne de référence de l’isolat pakistanais (4.65 µm), alors dans les autres conditions thermiques les différences sont significatives. La moyenne des données issue des larves co-infectées incubées à 25-20°C (4.50 µm) est légèrement plus faible et la moyenne des données issue des larves co-infectées incubées à 20-13°C (4.14 µm) se situe entre les tailles de référence des deux isolats (3.73 et 4.63 mµ, respectivement). Tableau 9 : Taille moyenne (µm) des conidiospores récoltées sur cadavres de B. tabaci issus d’essais écopathologiques réalisés avec deux isolats de P. fumosoroseus, inoculés isolément ou en co-infection, sous trois régimes thermiques (alternance jour-nuit)

(1) Analyse de variance des longueurs des conidiospores issues des sporées sur les cadavres (moyenne en µm ± SEM). Les données suivies des mêmes lettres ne diffèrent pas significativement (test de Student-Newman-Keuls, α = 0.05). (*) Moyennes calculées à partir mesures de conidiospores collectées sur des cadavres sporulés. L’analyse de la distribution des tailles des conidiospores collectées sur les cadavres issues des larves co-infectées montre nettement un déplacement des histogrammes vers le phénotype pakistanais, plus thermophile, avec l’augmentation de la température (fig. 8). A 13-20°C, 25% des conidiospores mesurent 3.84 µm de long, tandis qu’à 20-25°C on trouve entre 17% et 20% des spores dans chacune des classes 3.84 ; 4.32 et 4.8 µm. Enfin à 20-32°C, 40% des conidiospores font 4.8 µm de longueur et la distribution des tailles est identique à celle de la distribution de l’inoculum pakistanais de référence. Les tailles moyennes des sporées de 9 cadavres, issus de larves co-infectées, pour chacune des condition de température éprouvée, souligne la variabilité des tailles des conidiospores dans les cas d’incubation à 13-20°C (Fig. 9A) et dans une moindre mesure à 20-25°C (Fig. 9B), alors qu’à 20-32°C les tailles moyennes sont similaires au phénotype de l’isolat pakistanais (Pfr 72) (Fig. 9C). En fait aux températures moyennes et basses, les deux phénotypes peuvent co-exister comme le montrent les mesures faites sur 30 spores collectées sur un des cadavres issus d’une larve co-infectée, incubée à 13-20°C (Fig. 10).

20-13°C 25-20°C 32-20°C

Référence Pfr 35 - 3.73 ± 0.21 d * -

Référence Pfr 72 - 4.63 ± 0.42 a * -

Co-infection 4.14 ± 0.48 c * 4.50 ± 0.54 b * 4.65 ± 0.58 a *

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distribution de tailles des conidies de Pfr 35 et Pfr 72 à 20-25°C

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

1,92 2,4 2,88 3,36 3,84 4,32 4,8 5,28 5,76 6,24 6,72 7,2

longueurs de conidies en !m

fréquence m

oyenne d

es c

onid

ies

Pfr 35

Pfr 72

Figure 8 : Histogrammes de distribution des tailles des conidiospores de P. fumosoroseus récoltées sur des cadavres de B. tabaci. Fig. 8A Histogrammes de référence des isolats Pfr 35 et Pfr 72 à 25-20°C; Fig.8B-D Histogrammes des sporées issues de co-infections à 20-13°C (B), à 25-20°C (C) et à 32-20°C (D).

distribution de tailles des conidies : coinfection à 13-20°C

0

0,05

0,1

0,15

0,2

0,25

0,3

0,35

0,4

0,45

1,92 2,4 2,88 3,36 3,84 4,32 4,8 5,28 5,76 6,24 6,72 7,2

longueurs de conidies en !m

fréquence m

oyenne d

es c

onid

ies

distribution de tailles des conidies : coinfection à 20-25°C

0

0,05

0,1

0,15

0,2

0,25

0,3

0,35

0,4

1,92 2,4 2,88 3,36 3,84 4,32 4,8 5,28 5,76 6,24 6,72 7,2

longueurs de conidies en !m

fréquence m

oyenne d

es c

onid

ies

distribution de tailles des conidies : coinfection à 20-32°C

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

1,92 2,4 2,88 3,36 3,84 4,32 4,8 5,28 5,76 6,24 6,72 7,2

longueurs de conidies en !m

fréquence m

oyenne d

es c

onid

ies

8A. Distribution des tailles des conidies de Pfr 35 et Pfr 72 à 25-20°C

8B. Distribution des tailles des conidies en co-infection à 20-13°C

8C. Distribution des tailles des conidies en co-infection à 25-20°C

8D. Distribution des tailles des conidies en co-infection à 32-20°C

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A- Taille : sporées de cadavres

co-infectés à 13-20°C

0

1

2

3

4

5

6

C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19

Cadavres

Lo

ng

ue

ur

de

s c

on

idio

sp

ore

s

(!m

)

C- Taille : sporées de cadavres

co-infectés à 20-32°C

0

1

2

3

4

5

C30 C31 C32 C33 C34 C35 C36 C37 C38 C39 C30

Cadavres

Lo

ng

ueu

r d

es c

on

idio

sp

ore

s (!

m)

Distribution des tailles des spores issues d'un

cadavre co-infecté et incubé à 13-20°C

0

1

2

3

4

5

6

1 3 5 7 9 11 13 15 17 19 21 23 25 27 29

Conidiospores mesurées

Lo

ng

ue

ur

(!m

)

B- Taille : sporées de cadavres

co-infectés à 20-25°C

0

1

2

3

4

5

6

C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 C29

Cadavres

Lo

ng

ueu

rs d

es c

on

idio

sp

ore

s (!

m)

Figure 9 : Histogrammes de distribution des tailles des conidiospores de P. fumosoroseus récoltées sur des cadavres co-infectés de B. tabaci. Fig. 9A 20-13°C ; Fig. 9B-C 25-20°C et Fig. 9C à 32-20°C. Figure 10 : Histogrammes de distribution des tailles des conidiospores de P. fumosoroseus récoltées sur un cadavre co-infecté de B. tabaci incubé à 20-13°C.

9A. Taille des sporées de cadavres co-infectées à 20-13°C

9B. Taille des sporées de cadavres co-infectées à 25-20°C

9C. Taille des sporées de cadavres co-infectées à 32-20°C

Distribution des tailles des spores issues d’un cadavre

co-infecté et incubé à 20-13°C

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3. Typage moléculaire et séquençage Au cours de ce stage, le nombre total de monospores typées par une approche de PCR-

RFLP-ITS après mono et co-infections d’insectes de B. tabaci a été de 60 pour les deux régimes de températures extrêmes (20-13°C et 32-20°C) et de 120 pour le régime de températures intermédiaires (25-20°C). Quel que soit le régime de température auquel a été soumis le pathosystème et ce, pour chaque enzyme de restriction considérée, seuls deux profils PCR-RFLP-ITS ont pu être observés, un profil A correspondant au profil type de l’isolat francilien Pfr35, un profil B correspondant à celui de l’isolat pakistanais Pfr 72 (Fig. 11). L’analyse des séquences des types A et B obtenus après mono et/ou co-infection a révélé une complète identité avec les séquences des isolats référents telles que déposées dans Genbank. La stabilité des profils PCR-RFLP-ITS des monospores se traduit par la conservation des sites de restriction des enzymes CfoI et SmaI telle qu’observée sur les séquences (Fig. 12). 11A 11B Figure 11 : Profils de digestion des régions ITS des isolats de Pfr par l’enzyme SmaI (Fig. 11A) et CfoI (Fig. 11B). M1 et M2 : marqueurs de taille de 1kb ; 1 et 2 : Profils des isolats de référence Pfr 35 et Pfr 72 respectivement ; 3 et 5 : Profils des isolats de type A (Pfr 35) obtenus après co-infection de B. tabaci ; 4 et 6 : Profils des isolats de type B (Pfr 72) obtenus après co-infection de B. tabaci

Dans le cas des mono-infections de l’hôte par A ou B, aux trois régimes de températures, une spore par cadavre, sur 12 cadavres a été systématiquement typée. Les résultats montrent que les types moléculaires des 12 spores analysées par régime de température et par isolat sont conformes à 100% à l’isolat inoculé. Comme l’ont montré les résultats sur la mortalité et la sporulation et l’analyse de la taille des spores, les 2 isolats mono-inoculés se sont développés dans l’hôte, que le régime de température soit favorable ou non à leur développement et leur typage post infection a confirmé leur identité conforme.

M1 M2 1 2 3 4 5 6 M2 M1 M1 M2 1 2 3 4 5 6 M2 M1

Enzyme SmaI Enzyme CfoI

300pb

200pb

800pb

600pb

400pb

200pb

100pb

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21

Pfr72=type B AAGTAAAAGTCGTAACAAGGTCTCCGTTGGTGAACCAGCGGAGGGATCATTAACGAGTTTTTTCAACTCCCTAACCCTTT Pfr35=type A AAGTAAAAGTCGTAACAAGGTCTCCGTTGGTGAACCAGCGGAGGGATCATTACCAGAGTTTTCACAACTCCCAACCCTCC 13-20 type B AAGTAAAAGTCGTAACAAGGTCTCCGTTGGTGAACCAGCGGAGGGATCATTAACGAGTTTTTTCAACTCCCTAACCCTTT 13-20 type A AAGTAAAAGTCGTAACAAGGTCTCCGTTGGTGAACCAGCGGAGGGATCATTACCAGAGTTTTCACAACTCCCAACCCTCC

Pfr72=type B -GTGAACATACCTATCGTTGCTTCGGCGGACTCGCCCCGGCGTCCGGACGGCCCTG� CGCCGCCC-GCGACCCGGACCCA Pfr35=type A TGTGAACCTACCCATCGTTGCTTCGGCGGACTCGCCCCAGCGTCCGGACGGCCTCG� CGCCGGCCCGCGACCTGGACCCA 13-20 type B -GTGAACATACCTATCGTTGCTTCGGCGGACTCGCCCCGGCGTCCGGACGGCCCTG� CGCCGCCC-GCGACCCGGACCCA 13-20 type A TGTGAACCTACCCATCGTTGCTTCGGCGGACTCGCCCCAGCGTCCGGACGGCCTCG� CGCCGGCCCGCGACCTGGACCCA

Pfr72=type B GGCGGCCGCCGGAGACCCACAAATTCTGTTTCTATCAGTCTTTCTGAATCCGCCGCAAGGCAAAACAAATGAATCAAAAC Pfr35=type A GGCGGCCGCCGGAGACCACGCAACCCTGCATCCATCAGTCTCTCTGAATCCGCCGCAAGGCAACACAAACGAATCAAAAC 13-20 type B GGCGGCCGCCGGAGACCCACAAATTCTGTTTCTATCAGTCTTTCTGAATCCGCCGCAAGGCAAAACAAATGAATCAAAAC 13-20 type A GGCGGCCGCCGGAGACCACGCAACCCTGCATCCATCAGTCTCTCTGAATCCGCCGCAAGGCAACACAAACGAATCAAAAC

Pfr72=type B TTTCAACAACGGATCTCTTGGTTCTGGCATCGATGAAGAACGCAGCGAAATGCGATAAGTAATGTGAATTGCAGAATTCA Pfr35=type A TTTCAACAACGGATCTCTTGGTTCTGGCATCGATGAAGAACGCAGCGAAATGCGATACGTAATGTGAATTGCAGAATTCC 13-20 type B TTTCAACAACGGATCTCTTGGTTCTGGCATCGATGAAGAACGCAGCGAAATGCGATAAGTAATGTGAATTGCAGAATTCA 13-20 type A TTTCAACAACGGATCTCTTGGTTCTGGCATCGATGAAGAACGCAGCGAAATGCGATACGTAATGTGAATTGCAGAATTCC

Pfr72=type B GTGAATCATCGAATCTTTGAACGCACATTG� CGCCCGCCAGCATTCTGGCGGGCATGCCTGTTCGAGCGTCATTTCAACC Pfr35=type A GTGAATCATCGAATCTTTGAACGCACATTG� CGCCCGCCAGCATTCTGGCGGGCATGCCTGTTCGAGCGTCATTTCAACC 13-20 type B GTGAATCATCGAATCTTTGAACGCACATTG� CGCCCGCCAGCATTCTGGCGGGCATGCCTGTTCGAGCGTCATTTCAACC 13-20 type A GTGAATCATCGAATCTTTGAACGCACATTG� CGCCCGCCAGCATTCTGGCGGGCATGCCTGTTCGAGCGTCATTTCAACC

Pfr72=type B CTCGACACCCCTTCGGGGGAGTCGGCGTTGGGGACCGGCAGCATACCGCCGGCCCCGAAATACAGTGGCGGCCCGTCCGC Pfr35=type A CTCGACGTCCCCC� -GGGACGTCGGCCTTGGGGACCGGCAGCACCCCGCCGGCCCTGAAATGGAGTGGCGGCCCGTCCGC 13-20 type B CTCGACACCCCTTCGGGGGAGTCGGCGTTGGGGACCGGCAGCATACCGCCGGCCCCGAAATACAGTGGCGGCCCGTCCGC 13-20 type A CTCGACGTCCCCC� -GGGACGTCGGCCTTGGGGACCGGCAGCACCCCGCCGGCCCTGAAATGGAGTGGCGGCCCGTCCGC

Pfr72=type B GGCGACCTCTGCGTAGTACTCCAACG� CGCACCGGGAACCCGACGCGGCCACGCCGTAAAACACCCAACTTCTGAACGTT Pfr35=type A GGCGACCTCTGCGAAGTACTACAGCT CGCACCGGAAACCCGACGCGGCCCCGCCGTGAAACCCCCAACT-CTGAACGTT 13-20 type B GGCGACCTCTGCGTAGTACTCCAACG� CGCACCGGGAACCCGACGCGGCCACGCCGTAAAACACCCAACTTCTGAACGTT 13-20 type A GGCGACCTCTGCGAAGTACTACAGCT CGCACCGGAAACCCGACGCGGCCCCGCCGTGAAACCCCCAACT-CTGAACGTT

Pfr72=type B GACCTCGGATCAG Pfr35=type A GACCTCGGATCAG 13-20 type B GACCTCGGATCAG

13-20 type A GACCTCGGATCAG 3’

Figure 12 : Comparaison des séquences obtenues pour les types moléculaires A et B des isolats co-inoculés sous le régime de température de 20-13°C en référence aux séquences de Genbank des isolats Pfr72 et Pfr 35. Les sites de restriction des enzymes CfoI et SmaI sont respectivement surlignés en rouge et vert dans les séquences. La flèche dans le site de restriction indique le site de coupure. Les nucléotides des régions correspondant à l’extrémité 3’ du 16S, au 5.8S et à l’extrémité 5’ du 28S sont en caractère gras dans les séquences de références.

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Dans le cas des co-infections sous les trois régimes de température considérés, nous avons tenté d’appréhender la variabilité génotypique de la sporée intra-cadavre en typant 10 spores par cadavre et ce, sur un nombre de 3 cadavres, à l’exception du régime 25-20°C où 12 cadavres ont été analysés. Aux conditions de régime de température extrêmes (20-13°C et 32-20°C), seules des spores de type B ont pu être typées (Fig. 13A-13B). Aucune variabilité génotypique des sporées intra-cadavre n’a été observée. Au régime de température favorable aux deux isolats, la moitié des cadavres ont une sporée homogène, harborant le type B, l’autre moitié des cadavres a une sporée hétérogène avec une fréquence d’apparition du type A variant de 0.15 à 0.6 (Fig.13C).

Dans le cas des co-infections sous les trois régimes de température considérés, une

variabilité génotypique inter-cadavres a été recherchée en typant une à deux spores par cadavre sur 12 cadavres, à l’exception du régime 25-25°C où 10 spores par cadavre ont été considérées. Au régime de température extrême 32-20°C, aucune variabilité génotypique inter-cadavre n’a été observée (Fig. 13E), toutes les spores étant du type B, et ce en accord avec les résultats des analyses morphométriques des sporées sur cadavres où les tailles moyennes sont similaires à celle de l’isolat pakistanais.

Au régime de température extrême 20-13°C (Fig. 13D), 9 cadavres sur 12 ont une sporée

homogène de type B. Pour les cadavres (7, 8 et 11), une première observation du phénotype des spores (premières boites ensemencées à partir des solutions contenant les cadavres) avait révélé la présence de spores attribuable au type A dans un cas sur 5, ce qui avait motivé le typage de deux spores par cadavre. Les sporées de ces trois cadavres sont hétérogènes, arborant les types A et B (Fig. 13D). Ce résultat vient en appui de celui des analyses morphométriques où la taille moyenne des conidiospores récoltées est intermédiaire à la taille des conidiospores des isolats inoculés séparément. Au régime de température 25-20°C, les sporées inter-cadavres sont hétérogènes avec une prédominance de cadavres à sporée de type B (Fig. 13C).

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Figures 13A à 13E : Fréquence de distribution des deux types moléculaires - type A (en rouge) - type B (en gris) de monospores de Pfr prélevées sur cadavres de B. tabaci soumis à co-inoculation et à trois régimes différents de température 20-13°C (A et D), 32-20°C (B et E), 25-20°C (C). Le typage par RFLP-ITS est réalisé soit sur une spore par cadavre (D et E) sauf pour les cadavres 7, 8 et 11 de (D) pour lesquels deux spores ont été typées, soit sur 10 spores par cadavre (A, B, C).

20-13°C : 12 cadavres : 1 à 2 sp/cadavre

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,9

1

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12

Numéro identifiant du cadavre hôte

Fré

qu

en

ce

de

dis

trib

uti

on

du

ty

pe

mo

léc

ula

ire

25-20°C : 12 cadavres : 10 sp/cadavre

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,9

1

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12

Numéro identifiant du cadavre hôte

Fré

qu

en

ce

de

dis

trib

uti

on

du

ty

pe

mo

léc

ula

ire

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,9

1

1' 2' 3'

Numéro identifiant du cadavre hôte

Fré

qu

en

ce d

e d

istr

ibu

tio

n d

u t

yp

e m

olé

cu

lair

e

Fréq

uenc

e de d

istri

butio

n du

type

mol

écul

aire

Numéro identifiant du cadavre hôte

13A (20-13°C); 10 spores/cadavre 13B (32-20°C); 10 spores/cadavre

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,9

1

1' 2' 3'

Numéro identifiant du cadavre hôte

Fré

qu

en

ce d

e d

istr

ibu

tio

n d

u t

yp

e m

olé

cu

lair

e

Fréq

uenc

e de d

istri

butio

n du

type

mol

écul

aire

Numéro identifiant du cadavre hôte

13C. (25-20°C) ; 10 spores/cadavre 13D. (20-13°C) ; 1-2 spores/cadavre

32-20°C : 12 cadavres : 1 sp/cadavre

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,9

1

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12

Numéro identifiant du cadavre hôte

Fré

qu

en

ce

de

dis

trib

uti

on

du

ty

pe

mo

léc

ula

ire

13E. (32-20°C) ; 1 spore/cadavre

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Discussion

Les Hyphomycètes entomopathogènes sont dans leur quasi totalité des champignons

mésophiles, avec une activité physiologique significative dans une gamme de températures de 8-32°C, avec des optima situés entre 20 et 28°C et des seuils à 5°C et 35°C (Ferron et al., 1991). C’est dans ce cadre que se situe cette étude, sachant que chez P. fumosoroseus, Vidal et al. (1997) ont montré, avec des isolats collectés dans des zones tropicales et des isolats originaires de zones tempérées, une corrélation entre les affinités thermiques et le climat régnant dans les régions prospectées. L’activité pathogène des deux isolats de P. fumosoroseus à l’égard des larves de B. tabaci et leur aptitude à sporuler sur les cadavres n’ont pas été altérées par les conditions thermiques éprouvées, sauf à 32-20°C dans le cas de l’isolat francilien Pfr 35, choisi pour son adaptation aux températures des zones tempérées (Vidal et al., 1997). Il convient de noter que l’activité de l’isolat pakistanais Pfr 72, sélectionné pour sa tolérance aux températures plus élevées en raison de ses origines géoclimatiques tropicales (Vidal et al., 1997) n’a pas été affectée à 20-13°C.

Les distributions des tailles des spores des deux isolats fongiques récoltées sur les cadavres de B. tabaci à 25-20°C ont présenté 30% de recouvrement alors que Fargues & Bon (2004) rapportent, que sur cadavres de Galleria mellonella (Lepidoptera : Pyralidae) il est inférieur à 10%. Bien que moins discriminants sur B. tabaci, le critère de taille des conidiospore a permis de confirmer que l’isolat pakistanais est bien adapté aux températures les plus élevées (régime 32-20°C) et qu’inversement l’activité de l’isolat francilien est très réduite. En revanche, aux températures moyennes (25-20°C) et surtout aux températures plus fiables (20-13°C), le pathotype pakistanais, le plus thermophile, s’est avéré très compétitif, coexistant avec le pathotype francilien et même le dominant dans les cadavres de B. tabaci co-infectés. Par contre, aux températures basses (13-13°C et 20-13°C) les essais éco-pathologiques sur larves de G. mellonella montrent que Pfr 35 inhibe totalement Pfr 72 des cadavres issus de larves co-infectées (Fargues & Bon, 2004). Dans les deux études, les données biométriques ont été étayées par les analyses moléculaires (ITS rDNA). Ces résultats apparemment contradictoires soulèvent plusieurs questions relatives aux rôles respectifs des différentes pressions adaptatives et de leurs interactions au sein des pathosystèmes. On retiendra les points suivants :

(i) dans le cas de l’hôte G. mellonella, hétérologue vis-à-vis de chacun des pathotypes étudiés,

les analyses biométriques (phénotypiques) et moléculaires sont cohérentes avec les attendus, à savoir l’hypothèse suivant laquelle le génotype le mieux adapté aux conditions de température données est en mesure d’inhiber le génotype le moins bien adapté;

(ii) les résultats observés chez G. mellonella, coexistence des deux génotypes aux températures

moyennes et inhibition du génotype le moins bien adapté à ces conditions s’appuyaient sur un prérequis, l’absence de sélectivité préférentielle de l’insecte hôte qui a été obtenu en infectant les larves par injection des inocula de manière à s’affranchir de la barrière cuticulaire de l’hôte, dont la sélectivité à l’égard des infections fongiques est bien connue;

(iii) les essais éco-pathologiques sur le modèle G. mellonella – Pfr 35 / Pfr 72 de Fargues & Bon

(2004) ont donc été réalisés, comme le soulignent les auteurs, dans des conditions expérimentales minimisant le rôle sélectif de l’hôte (seules subsistent les défenses cellulaires et humorales et le rôle du tégument du cadavre susceptible de limiter la sortie du champignon à l’extérieur du cadavre mommifié) (Ferron et al., 1991) ;

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(iv) dans le cas de l’hôte B. tabaci, les infections ont été réalisées par contact avec le tégument, donc par la voie "naturelle" d’infection des Hyphomycètes entomopathogènes, donc sans modifier la sélectivité des barrières de défense des larves contaminées ;

(v) la discordance observé à 13-20°C entre les résultats et les attendus, ne peut s’expliquer que

par une meilleure adaptation du pathotype Pfr 72 sur son hôte homologue (d’origine) suivant le concept d’équivalence des effets de changement au sein du pathosystème "Pfr-B. tabaci-Environnement (température)". Concrètement, l’"handicap" lié aux températures relativement basses pour l’isolat pakistanais a été compensé, voire dépassé par une meilleure adaptation (agressivité) à l’égard de son hôte d’origine.

Fargues et al. (2002) dans leur analyse phylogénétique (ITS rDNA) des isolats de P.

fumosoroseus avaient bien montré que les isolats Pfr 35 et Pfr 72 correspondent à deux haplotypes ITS rDNA, dont l’éloignement génétique a été confirmé ensuite par l’analyse des séquences microsatellites effectuée par Gauthier et al. (2007). Par ailleurs les essais éco-pathologiques sur G. mellonella ont étayé l’hypothèse de l’incompatibilité végétative entre ces deux haplotypes (Fargues & Bon, 2004). Le caractère monophylétique de l’haplotype ITS-rDNA inféodé à l’espèce hôte B. tabaci suggère une co-adaptation et en raison de l’aire mondiale de répartition des populations de B. tabaci une diffusion du germe par son propre hôte (Fargues et al., 2002). Tous les isolats inféodés à l’aleurode Bemisia tabaci quelle que soit leur origine géographique (Pakistan, Inde, Népal, Californie, Texas, Floride) ont présenté des affinités pour des conditions thermiques relativement plus élevées que les isolats d’origine européenne tempérée inféodés à divers autres espèces d’insectes (Vidal et al., 1997). (Fargues et al., 2002). Les essais éco-pathologiques sur B. tabaci et les analyses phénotypiques et moléculaires des inocula collectés sur les cadavres issus de larves co-infectées confirme clairement le rôle majeur des pressions adaptatives exercées par l’insecte hôte sur les populations de P. fumosoroseus qui lui sont inféodées, relativisant ainsi l’impact des contraintes climatiques (températures plus basses).

Bidochka & Small (2005) considèrent que les associations entre génotypes fongiques

entomopathogènes et espèces d’insectes hôtes sont particulièrement étroites dans les régions tropicales et subtropicales. Dans les environnements tropicaux (sans grandes variations saisonnières des températures), la spécialisation serait optimisée en favorisant la coévolution, alors qu’en conditions tempérées ces champignons devraient s’adapter à des habitats spécifiques et/ou évoluer comme pathogènes facultatifs avec des spectres d’hôtes très larges.

L’étude bibliographique réalisée au cours du stage m’a permis de constater qu’à ce jour, il y a très peu d’enquêtes épidémiologiques (avec suivis moléculaires) et d’essais expérimentaux dédiés à l’analyse de la structure des populations fongiques entomopathogènes. Les conséquences de l’introduction (volontaire ou accidentelle) d’isolats fongiques dans des écosystèmes où sont déjà présentes des populations fongiques conspécifiques et l’impact des changements climatiques locaux sont donc encore peu connus. In situ, Castrillo et al. (2004) notent que l’introduction répétée de la souche CHA de B. bassiana pour lutter contre le doryphore dans les Etats du Maine et de New York diminue la diversité génétique (RFLP-RAPD) des populations fongiques locales avec augmentation de la fréquence des haplotypes GHA et GHA apparentés, sans pour autant que des hypothèses causales soient étayées dans l’article. Le retour vers l’équilibre initial des populations natives se produit après arrêt des introductions de l’haplotype GHA exogène. Il est intéressant par rapport aux résultats obtenus sur B. tabaci de considérer le travail de Wang et al. (2002).

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En effet, ces auteurs montrent par co-infection des larves de G. mellonella avec deux isolats de B. bassiana qu’il peut y avoir exclusion d’un génotype (28S rDNA) par l’autre en fonction des doses d’inoculum relatives. Ces résultats permettent d’envisager un complément du travail effectué au cours du stage fondé sur un rapport entre les doses d’inoculum de chacun des deux isolats de façon à "rééquilibrer" la relation hôte pathogène en minimisant la sélectivité de l’hôte. Toujours dans le cadre du concept d’équivalence des effets de changement, il s’agirait d’augmenter la dose relative d’inoculum appliquée sur les larves lors de la contamination d’un facteur 3 ou 10 en faveur du pathotype Pfr 35, moins bien adapté à son hôte hétérologue, par rapport à la dose d’inoculum du pathotype Pfr 72 inféodé à B. tabaci.

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Conclusion & perspectives de recherches

Le passage du modèle Galleria mellonella-P. fumosoroseus-Environnement (température) au modèle Bemisia tabaci-P. fumosoroseus-Environnement (température) a été réalisé au cours de ce stage. La biologie de l’insecte hôte, sa taille, etc. ont nécessité un recadrage méthodologique non négligeable. Les investigations sur la problématique de l’impact des contraintes climatiques sur la structuration des populations entomopathogènes seront donc poursuivies sur ce pathosystème modèle. Les analyses sur les co-infections avec les deux haplotypes végétativement incompatibles vont être finalisées et étendues ensuite à des populations de Pfr inféodées à B. tabaci relativement proches (microsatellites) (Gauthier et al., 2007). Dans ce dernier cas, on pourra aborder l’impact des recombinaisons mitotiques dans l’adaptation des populations clonales de P. fumosoroseus dans la tolérance aux contraintes climatiques, sachant que celles-ci pourraient être considérées comme un atout dans les processus adaptatifs des espèces anamorphes (asexuées) chez les Hyphomycètes (Schoustra, et al., 2007).

Les questionnements relatifs à l’adaptation des Hyphomycètes entomopathogènes se révèlent particulièrement pertinents dans le contexte du développement durable où la lutte microbiologique est devenue une des méthodes phytosanitaires alternatives aux insecticides de synthèse, et plus encore dans le contexte du réchauffement climatique. Les environnements ciblés par les introductions d’agents fongiques de lutte microbiologique sont généralement différents de leur environnement d’origine. Suite à cette introduction, le pathogène va interagir avec les diverses composantes biocoenotiques de son nouvel environnement et en particulier avec les populations fongiques entomopathogènes locales. Cela pourra se traduire par des compétitions intra et/ou interspécifiques, de nouvelles recombinaisons, des déplacements des populations fongiques locales. Le succès "invasif" de l’isolat introduit dépendra directement de ses capacités adaptatives. C’est pourquoi, il est devenu primordial d’analyser les facteurs responsables de l’acclimatation de l’agent exogène, mais aussi d’étudier les éventuelles conséquences de son introduction. C’est dans cette perspective que s’était inscrit le thème de mon stage de Master 2.

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