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    Charles Darwin

    OBSERVATIONSGOLOGIQUES SUR LES

    LES VOLCANIQUES

    (1844)

    dition

    du

    groupe

    Ebookslibre

    setgratuits

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    OBSERVATIONS GOLOGIQUES SUR LES LESVOLCANIQUES EXPLORES PAR LEXPDITIONDU BEAGLE ET NOTES SUR LA GOLOGIE DELAUSTRALIE ET DU CAP DE BONNE-ESPRANCE

    TRADUIT DE LANGLAIS SUR LA TROISIME DITIONPAR

    A.-F. RENARD

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    Table des matires

    AVANT-PROPOS DU TRADUCTEUR ..................................... 5

    INTRODUCTION .................................................................... 12

    CHAPITRE IIFERNANDO NORONHA, TERCEIRA, TAHITI, MAURICEROCHERS DE SAINT-PAUL ................................................. 46

    CHAPITRE IIIASCENSION ........................................................................... 58

    CHAPITRE IVSAINTE-HLNE .................................................................. 99

    CHAPITRE VARCHIPEL DES GALAPAGOS ............................................. 125

    CHAPITRE VITRACHYTE ET BASALTE. DISTRIBUTION DES LES

    VOLCANIQUES ..................................................................... 145CHAPITRE VIINOUVELLE-GALLES DU SUD, TERRE VAN DIEMEN,KING GEORGES SOUND, CAP DE BONNE-ESPRANCE............................................................................................... 159

    TERRE VAN DIEMEN .............................................................. 167

    KING GEORGES SOUND ........................................................ 173

    CAP DE BONNE-ESPRANCE ................................................ 179

    APPENDICE .......................................................................... 184

    DESCRIPTION DE COQUILLES FOSSILES ........................... 184

    COQUILLES TERRESTRES FOSSILES DE SAINTE-HLNE................................................................................................... 186

    COQUILLES PALOZOIQUES DE LA TERRE VAN DIEMEN

    ................................................................................................... 190

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    DESCRIPTION DE SIX ESPCES DE CORAUX PROVENANTDUN DPT PALOZOIQUE DE LA TERRE VAN DIEMEN................................................................................................... 194

    TABLE ................................................................................... 206 propos de cette dition lectronique ................................. 213

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    AVANT-PROPOS DU TRADUCTEUR

    Luvre de Darwin comprend, outre ses travaux biologiques,trois ouvrages consacrs spcialement la gologie. Ils ont parusous le titre gnral de Gologie du Voyage du Beagle1 et formentcomme une trilogie embrassant ltude des constructionscoralliennes, des les volcaniques et de la gologie de lAmriquemridionale. De ces publications, la seule qui ait t traduite enfranais est celle sur les les coralliennes, tude magistrale o sesont rvles pour la premire fois la grandeur de conception, lapuissance et la pntration de cet incomparable observateur2.

    Je me suis propos de complter la traduction des uvresgologiques de Darwin et je publie aujourdhui ses Observationssur les les volcaniques, qui seront suivies par ses tudes sur lagologie de lAmrique du Sud. Ces ouvrages, qui ont paru en1844 et 1846, constituent un ensemble avec le Journal dunNaturaliste, dont ils dveloppent les passages essentiels sous une

    1 La mise en oeuvre des observations et des matriauxgologiques amasss par Darwin pendant lExpdition du Beagle(dcembre 1831 octobre 1836) stend sur une priode de quatreans, de 1842 1846. Son livre sur les les volcaniques, commenc ent 1842, fut termin en janvier 1844 ; six mois aprs, il mettait sur lemtier ses observations sur la gologie de lAmrique du Sud, quilachevait dcrire en avril 1845. Durant la priode qui stend de 1846 1854, il fit paratre une srie de travaux secondaires se rattachant la

    gologie et qui portent sur les poussires tombes sur les naviresdans lOcan Atlantique (Geol. Soc. Journ. II, 1846, pp. 26-30), sur lagologie des les Falkland (Geol. Soc. Journ. II, 1846, pp. 267-274),sur le transport des blocs erratiques, etc. (Geol. Soc. Journ. IV, 1848,pp. 315-323), sur lanalogie de structure de certaines rochesvolcaniques avec celles des glaciers (Edinb. Roy. Soc. Proc. II, 1851,pp. 17-18). Les deux volumes de son mmoire sur les Cirripdesparurent en 1851 et 1854 ainsi que ses monographies des Balanids etdes Vrrucids fossiles de la Grande-Bretagne.

    2 Darwin, les Rcifs de corail, leur structure et leur distribution.Trad. de langlais daprs la 2e dition, par L. Cosserat, Paris, 1878.

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    forme plus technique. Ces pages, moins descriptives etpittoresques de facture, rclames telles en quelque sorte par lessujets plus spciaux dont elles traitent, nont pas, quoique duneporte assez haute cependant pour consacrer, elles seules, la

    rputation de lAuteur, attir lattention gnrale comme lont faitson attachant Journal dun Naturaliste et son livre sur laStructure et la Distribution des les coralliennes. Dautre part, cesrecherches gologiques sont de Darwin avant le Darwinisme :elles ont prcd de prs de quinze ans lOrigine des espces etses travaux biologiques qui marquent une date dans lhistoire dessciences.

    Ces uvres rvlatrices dvoilaient la nature organique sousun jour o elle avait t peine entrevue ; il en dcoulait desconclusions dune si considrable porte dans tous les ordresdides, elles branlaient si profondment les prjugs et lerreur,elles projetaient de si vives clarts sur tant de problmes restsinsolubles, que durant la dernire moiti du XIXe sicle aucuneconception ne simposa davantage la pense, ny laissa uneimpression plus profonde et ne suscita des controverses plus

    passionnes. On comprend quau milieu du dchanementdinjures et de sarcasmes qui accueillirent lide de lvolutiontelle que la formulait le Matre, dans lardeur de la courageusedfense dont elle fut lobjet et dans le triomphe final de la thorievolutionniste, on perdit peut-tre trop de vue le rleprpondrant que Darwin a jou comme lun des fondateurs dessciences gologiques. Les recherches du dbut de sa carrirefurent comme noyes dans la gloire de ses plus rcentes

    dcouvertes.

    Cependant ces tudes et ces travaux gologiques ont eu uneinfluence directrice sur la pense du naturaliste anglais, et peut-tre nest-il pas hors de propos, en prsentant cette traduction,dinsister sur ce fait. On peut dire, en effet, que les recherchesgologiques auxquelles ce savant sest livr avant daborder lapublication de lOrigine des espces lavaient admirablement

    prpar la conception de luvre capitale quil devait difier. Ilest incontestable que cest dans la connaissance du monde

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    inorganique et de son dveloppement, dans lobservationimmdiate des phnomnes gologiques, dans lapplicationconstante des principes de lcole de Hutton et de Lyell dont il futun des premiers adeptes, quon peut voir, sinon le point de dpart

    et lorientation de ses thories biologiques, du moins une desbases sur lesquelles il les tablit.

    Cest du reste ce quil dclare lui-mme, avec cette noblemodestie qui a caractris toute son existence, quand il crit entte de son Journal, dans sa ddicace Lyell, que le mriteprincipal de ses uvres a sa source dans ltude quil a faite desPrincipes de Gologie. Cest l quil a pu puiser, en effet, cette

    notion des causes actuelles, fondamentale pour sa doctrine,suivre leur action dans les priodes anciennes et rattacher lun lautre les phnomnes dont la terre fut le thtre. Cest lalumire nouvelle que ce livre avait faite dans son esprit quil a puembrasser, comme nul autre avant lui, limmense dure destemps gologiques et de la succession des faunes et des flores. Or,ces considrations constituent quelques-unes des pierresangulaires du grandiose difice quest le Darwinisme.

    Tous les naturalistes connaissent les deux chapitres X et XIde lOrigine des Espces, sur linsuffisance des donnespalontologiques et sur la succession gologique des tresorganiss, o Darwin traite des questions qui mettent en relationses doctrines avec les donnes gologiques. Lune des plus hautesautorits contemporaines, Sir Archibald Geikie, les apprcie ences termes : Ces chapitres ont provoqu, dans les thories

    gologiques admises, la rvolution la plus profonde qui se soitproduite notre poque 3. Peu dhommes de science, toutefois,savent quelles tudes avaient prpar lAuteur ces conceptionsgniales sur lhistoire de la terre. Pour retrouver la marche de cestudes, de cette longue et difficile prparation, il faut remonteraux travaux de Darwin sur la Gologie du Beagle. Cest l quonpeut apprcier, dans leur expression technique, ces connaissancesspciales sur la nature des roches et sur la structure du globe qui

    3 Sir Archibald Geikie, The Founders of Geology, p. 282. 1897.

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    servirent de base ces gnralisations. Quand on a lu et mditces mmoires, fruit de tant de recherches faites dans un contactdirect avec la nature, on comprend comment lAuteur a pursoudre ces problmes fondamentaux avec le savoir et lautorit

    inconteste qui le placent au premier rang parmi les initiateurs dela gologie.

    Et ce qui tmoigne hautement de la valeur de ces travaux degologie pure, cest qu ct de tant duvres de cette poquetombes dans loubli ils ont rsist aux attaques du temps. Certesil y a mis son invitable patine ; mais ils demeurent des modlesdont la matire dun pur mtal et la ligne harmonieuse et svre

    commandent ladmiration. Ces mmoires tmoignent touscomment une intelligence matresse delle- mme, en possessiondes connaissances spciales rclames par les sujets quelleaborde, doue dune incomparable pntration, sentend scruterla nature, difier la synthse des faits et la traduire dunemanire claire, concise qui frappe par sa simplicit mme. Etpour ceux que leurs tudes ont prpars pntrer le dtail de cesuvres, qui peuvent se rendre compte des efforts qui

    accompagnent lexploration de rgions encore vierges, juger desprocds et des mthodes suivis pour atteindre les rsultats, sereplacer par la pense au point o en tait la science lorsque cesrecherches furent faites, saisir le caractre original et neuf desconsidrations qui devancrent leur temps et ont servi de pointde dpart aux gnralisations futures, pour ceux-l luvregologique de Darwin sera place parmi celles qui appartiennent lhistoire de la gologie ; ils reliront ces pages avec admiration et

    fruit.

    Charg de dcrire les matriaux recueillis par lexpdition duChallenger, jai t amen me livrer une tude attentive deluvre gologique du naturaliste anglais : ce fut le cas, enparticulier, pour ses Observations sur les les volcaniques. Lessavants qui avaient organis cette clbre croisire staientassign la mission daller explorer, un demi-sicle dintervalle,

    les les de lAtlantique tudies lors du voyage du Beagle. LeChallenger aborda donc aux principaux points illustrs par les

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    premires recherches de Darwin : les naturalistes de lexpdition,MM. Murray, Moseley, Buchanan et le Dr Maclean, purent selivrer ainsi sur le terrain la constatation des faits signals parDarwin et, se guidant par ses mmoires, recueillir aux gisements

    quil avait explors des sries de roches analogues celles surlesquelles avaient port ses investigations. On me fit lhonneur deme confier ces matriaux, et je les tudiai avec les ressourcesquoffraient, au moment o jabordai ce travail, les procdsmodernes de la lithologie4. Je dus, en me livrant ces recherches,suivre ligne par ligne les divers chapitres des Observationsgologiques consacres aux les de lAtlantique, oblig que jtaisde comparer dune manire suivie les rsultats auxquels jtais

    conduit avec ceux de Darwin, qui servaient de contrle mesconstatations. Je ne tardai pas prouver une vive admirationpour ce chercheur qui, sans autre appareil que la loupe, sansautre raction que quelques essais pyrognostiques, plus rarementquelques mesures au goniomtre, parvenait discerner la naturedes agrgats minralogiques les plus complexes et les plus varis.Ce coup dil qui savait embrasser de si vastes horizons, pntreici profondment tous les dtails lithologiques. Avec quelle sret

    et quelle exactitude la structure et la composition des roches nesont-elles pas dtermines, lorigine de ces masses minralesdduite et confirme par ltude compare des manifestationsvolcaniques dautres rgions ; avec quelle science les relationsentre les faits quil dcouvre et ceux signals ailleurs par sesdevanciers ne sont-elles pas tablies, et comme voici branles leshypothses rgnantes, admises sans preuves, celles, par exemple,

    4 Les mmoires que jai publis sur la lithologie des les explorespar Darwin lors du voyage du Beagle et par les naturalistes duChallenger, ont paru dans la collection des Reports of the scientificResults of the voyage of H.M.S. Challenger sous les titres Petrologyof Saint-Pauls Rocks (Narr. vol. II, appendice B), 1882,Petrology ofvolcanic Islands (Phys. Chem. Part. VII) (vol. II, 1889). Les chapitressuivants de ce dernier mmoire portent spcialement sur les rochesdcrites dans Geological Observations on volcanic Islands de Darwin: II,Rocks of the Cape de Verde Islands, p. 13. IV,Rocks of FernandoNoronha, p. 29. V, Rocks of Ascension, p. 39. VII, Rocks of theFalkland Islands, p. 97.

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    des cratres de soulvement et de la diffrenciation radicale desphnomnes plutoniques et volcaniques ! Ce qui achve dedonner ce livre un incomparable mrite, ce sont les idesnouvelles qui sy trouvent en germe et jetes l comme au hasard

    ainsi quun superflu dabondance intellectuelle inpuisable.

    Et limpression que jexprime ici est celle quprouvent tousceux qui se sont familiariss avec les tudes de Darwin sur lesphnomnes volcaniques. On sen convaincra dans les pages quisuivent et par lesquelles M. J. W. Judd a fait prcder luvregologique du grand naturaliste dite dans The MinervaLibrary of famous Books5. Parmi les gologues actuels, personne

    peut-tre na mieux connu Darwin et nest plus mme de seprononcer sur ses travaux que M. Judd : ses recherches sur levolcanisme dans ses manifestations lpoque prsente et auxpriodes anciennes de lhistoire du globe sont si hautementapprcies quelles le dsignaient pour la mission que lui ontconfie les diteurs de cette publication. Je tiens les remercierici, ainsi que mon savant ami M. Judd de lautorisation quilsmont si obligeamment accorde de placer cette Introduction en

    tte du volume que je publie aujourdhui. Elle ma paru prsenterun intrt trs vif en rappelant, comme elle le fait, lescirconstances dans lesquelles fut crit ce livre.

    Je me suis efforc de conserver religieusement cettetraduction la simplicit de loriginal et jai mis tous mes soins rendre la pense de lAuteur avec une scrupuleuse exactitude. Jaimaintenu les dnominations lithologiques quil avait adoptes,

    considrant quil sagissait en cela dun aspect historique conserver.

    En publiant cette traduction, mon but na pas t seulementde rappeler la haute valeur et la porte de luvre gologique de

    5 Distribution and Structure of coral rocks, GeologicalObservations on volcanic Island and parts of South America, by Ch.Darwin, with Introduction by J.W. Judd, Professor of Geology in theNormal School of Science, South Kensington.

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    Darwin, de complter ainsi pour les lecteurs franais la collectiondes uvres de limmortel naturaliste : jai voulu aussi, par monmodeste travail, rendre hommage ce librateur de la pensequest Darwin, ce paisible chercheur qui marcha simplement

    vers la vrit malgr les cris et les clameurs dont on essayadtouffer sa voix, ce caractre vraiment lev qui neut jamaisen rponse aux insultes ineptes et haineuses que des parolessereines. Mais la vrit marcha cette fois dun pas rapide, et,durant les dernires annes de sa noble et laborieuse existence, ilput voir le triomphe de lvolution, et assister ce mouvementmancipateur des sciences naturelles quavaient provoqu sesdoctrines.

    Darwin a trac la route qui menait vers des horizonsnouveaux : le monde intellectuel tout entier sy est engag etceux-l mme qui le dclaraient jadis un esprit faux et superficiel,qui criaient bien haut que ses thories taient radicalementinconciliables avec les dogmes et la morale, se sentant vaincuspar luniversalit de la pousse volutionniste, en sont rduits une honteuse capitulation. Pour ceux-l, la marche triomphale du

    Darwinisme est une nouvelle et terrible dfaite.

    Jestime quil est bon de rappeler aux consciences ces hrosde la vrit qui neurent dautres armes que leur intelligencelibre des prjugs, leur raison claire, leur travail opinitre etcalme et qui surent remplir au prix damertumes sans nombre lasi difficile tche davoir fait accomplir la pense humaine un pasen avant. Entre eux, Darwin est des premiers.

    A.-F. RENARD.

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    INTRODUCTION

    Pendant les dix annes qui suivirent son retour en Angleterre,aprs son voyage autour du Monde, Darwin se consacra surtout la prparation de la srie douvrages qui furent publis sous letitre gnral de Gologie du Voyage du Beagle. Le second volumede la srie comprend les Observations gologiques sur les lesvolcaniques, et les notes sur la gologie de lAustralie et du Capde Bonne-Esprance, il parut en 1844. Les matriaux de cevolume ont t runis en partie au commencement du voyage,lorsque le Beagle fit escale San Thiago dans larchipel du Cap-

    Vert, aux Rochers de Saint-Paul et Fernando Noronha ; maissurtout durant la croisire de retour ; cest alors que Darwintudia les les Galapagos, quil traversa larchipel des lesPomotou et visita Tahiti. Aprs avoir touch la Baie des lesdans la Nouvelle-Zlande, ainsi qu Sydney, Hobart-Town et King Georges Sound en Australie, le Beagle, traversant lOcanIndien, fit voile vers le petit groupe des les Keeling ou Cocos,clbre par les observations quy a faites Darwin, et se dirigea

    ensuite vers lle Maurice. Aprs une escale au Cap de Bonne-Esprance, le navire arriva successivement Sainte-Hlne et lAscension, et visita une seconde fois les les du Cap-Vert avantde rentrer en Angleterre.

    Le voyage pendant lequel Darwin eut loccasion dtudier tantde centres volcaniques intressants, lui rservait au dbut uneamre dception. Durant la dernire anne de son sjour

    Cambridge il avait lu le Personal Narrative de Humboldt et enavait extrait de longs passages relatifs Tnriffe. Il avait recueilliun ensemble de renseignements en vue dune exploration de cettele, lorsquon lui proposa daccompagner le capitaine Fitzroy bord du Beagle. Son ami Henslow lui avait conseill, en lequittant, de se procurer le premier volume des Principes deGologie qui venait de paratre, tout en le prmunissant contreles ides de lauteur de cet ouvrage. Au commencement du

    voyage, Darwin, accabl par un violent mal de mer qui leconfinait dans sa cabine, consacrait tous les instants de rpit que

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    lui laissait la maladie tudier Humboldt et Lyell. On se figure sadception, quand, au moment o le navire atteignait Santa-Cruzet o le Pic de Tnriffe apparaissait au milieu des nuages, onreut la nouvelle que le cholra rgnait dans lle et empchait

    tout dbarquement.

    Une ample compensation lui tait rserve, cependant, quandle Beagle arriva Porto-Praya dans lle de San Thiago, la plusgrande de larchipel du Cap-Vert. Darwin y passa trois semainesdans des conditions favorables et cest l quil commena, proprement parler, son uvre de gologue et de naturaliste. Faire de la gologie dans une contre volcanique, crit-il son

    pre, est chose charmante ; outre lintrt qui sattache cettetude en elle-mme, elle vous conduit dans les sites les plus beauxet les plus solitaires. Un amateur passionn dhistoire naturellepeut seul se reprsenter le plaisir quon prouve errer parmi lescocotiers, les bananiers, les cafiers et dinnombrables fleurssauvages. Et cette le, qui a t pour moi si instructive et maprodigu tant de jouissances, est cependant lendroit le moinsintressant, peut-tre, de tous ceux que nous explorerons

    pendant notre voyage. Certes, elle est, en gnral, assez strile,mais le contraste mme fait apparatre les valles admirablementbelles. Il serait inutile de tenter la description de ce tableau ; aussifacile serait-il dexpliquer un aveugle ce que sont les couleurs,que de faire comprendre quiconque na jamais quitt lEurope ladiffrence frappante qui existe entre les paysages tropicaux etceux de nos contres. Chaque fois quune chose attire monattention admirative, je la note soit dans mon journal (dont le

    volume augmente), soit dans mes lettres ; excusez monenthousiasme mal traduit par des mots. Je constate que meschantillons saccroissent en nombre dune manire tonnante, etje crois que je serai oblig den expdier, de Rio, une collection enAngleterre.

    Un passage remarquable de lAutobiographie, crite parDarwin en 1876, tmoigne de limpression ineffaable que lui

    laissa cette premire visite une le volcanique. La structuregologique de San Thiago est trs frappante, quoique dune

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    grande simplicit. Une coule de lave sest tale autrefois sur lefond de la mer, constitu par des dbris de coraux et de coquillesrcentes ; ces couches calcaires ont t soumises comme unecuisson et transformes en une roche blanche et dure. Lle

    entire a t souleve depuis cette poque, mais lallure de la zonede roche blanche ma rvl un fait nouveau et important : cestquil sest produit, plus tard, un affaissement autour des cratresqui avaient t en activit depuis le soulvement. Lide me vintalors, pour la premire fois, que je pourrais peut-tre crire unlivre sur la gologie des contres que nous allions explorer, etcette pense me fit tressaillir de joie. Ce fut pour moi une heuremmorable ; avec quelle nettet je me rappelle la petite falaise de

    lave sous laquelle je me tenais, le soleil blouissant et torride,quelques plantes tranges du dsert croissant aux alentours, et mes pieds des coraux vivants, dans les lagunes inondes par lamare.

    Au moment de cette exploration, cinq annes seulementstaient coules depuis lpoque o il suivait dimbourg lesleons du professeur Jameson, qui enseignait encore la doctrine

    Wernerienne. Darwin avait trouv ces leons incroyablementennuyeuses . Le seul effet quelles produisent sur moi,dclarait-il, cest de me faire prendre la rsolution de ne lire dema vie un livre de gologie, ni dtudier cette science de quelquemanire que ce soit.

    Quel contraste avec les expressions dont il se sert en parlantde ses recherches gologiques, dans les lettres crites ses

    parents bord duBeagle ! Aprs avoir fait allusion au plaisir quilprouve rassembler et tudier les animaux marins, il scrie : Mais la gologie lemporte sur le reste ! Dans une lettre Henslow, il dit : La gologie mentrane ; mais, commelintelligent animal plac entre deux bottes de foin, je ne sais laquelle donner la prfrence : tudierai-je les roches cristallinesanciennes ou les couches moins cohrentes et plus fossilifres ? Et, lorsque son long voyage va se terminer, il crit encore : Je

    trouve la gologie un intrt qui ne faiblit jamais ; et, comme onla dit dj, elle nous inspire des ides aussi vastes sur notre

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    monde que celles que lastronomie nous suggre sur lensembledes mondes. Darwin fait videmment allusion ici un passagede Sir John Herschel dans son admirable Introduction ltudede la philosophie naturelle, uvre qui exera une influence trs

    profonde et trs heureuse sur lesprit du jeune naturaliste.

    La prdilection marque que professait Darwin, durant etaprs le clbre voyage duBeagle, pour les tudes gologiques, nepeut laisser aucun doute ; comme il est facile aussi de reconnatrequelle est lcole gologique dont il suivait les doctrines et dontlenseignement, malgr les avertissements de Sedgwick et deHenslow, le dominait tout entier. Il crivit en 1876 : La

    premire contre que jai tudie, lle de San Thiago danslarchipel du Cap Vert, ma dmontr clairement la remarquablesupriorit de Lyell, au point de vue gologique, sur tous lesauteurs dont javais emport les uvres ou que jai tudisdepuis. Et il ajoute : La science gologique a contract unegrande dette envers Lyell, elle lui doit plus, je crois, qu personneau monde Je suis fier de me rappeler que la premire contredont jtudiai la constitution gologique, San Thiago dans

    larchipel du Cap Vert, ma convaincu de la supriorit infinie desides de Lyell sur celles que javais pu puiser dans tout autre livreque les siens.

    Les passages que jai cits montrent dans quel esprit Darwincommena ses tudes gologiques, et les pages qui suiventfourniront des preuves nombreuses de lenthousiasme, de lapntration et du soin avec lesquels ses recherches furent

    poursuivies.

    Les collections de roches et de minraux recueillies parDarwin furent, au cours mme de son voyage, envoyes Cambridge et confies son fidle ami Henslow. son retour enAngleterre, aprs avoir revu sa famille et ses amis, le premier soinde Darwin fut de commencer ltude de ces matriaux. Vers la finde 1836, il alla se fixer, pendant trois mois, dans un appartement

    de Fitzwilliam street Cambridge : il se rapprochait ainsidHenslow et pouvait se livrer lexamen des roches et des

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    minraux quil avait runis. Il fut puissamment second danscette tude par le professeur William Hallows Miller, lminentcristallographe et minralogiste.

    Darwin ne commena rellement crire son livre sur les lesvolcaniques quen 1843, aprs stre tabli dans la maison quilhabita le reste de sa vie, sa clbre rsidence de Down dans leKent. Dans une lettre du 28 mars 1843 son ami M. Fox, il dit : Javance trs lentement dans la rdaction dun livre, ou pluttdune brochure sur les les volcaniques que nous avons explores ; je ny consacre quune couple dheures chaque jour, et encoredune manire assez peu rgulire. Cest une besogne ingrate que

    dcrire des livres dont la publication cote de largent et quepersonne ne lit, pas mme les gologues.

    Cette tude occupa Darwin pendant toute lanne 1843, et lelivre fut publi au printemps de lanne suivante. Daprs unenote de son journal, le temps rellement consacr laprparation de cet ouvrage stendit de lt de 1842 jusquen janvier 1844. Lorsquil fut achev, Darwin ne parut nullement

    satisfait du rsultat obtenu. Il crivait Lyell : Vous mavez faitun grand plaisir en disant que vous aviez lintention de parcourirmesles volcaniques ; ce livre ma cot dix-huit mois de travail !Et ma connaissance, rares sont les gens qui lont lu. Je senscependant que le peu que renferme cet ouvrage, et cest peu dechose en effet, aura son utilit en confirmant des hypothsesanciennes ou nouvelles, et que mon travail ne sera pas perdu. Ilcrivait Sir Joseph Hooker : Je viens de terminer un petit

    volume sur les les volcaniques que nous avons explores.Jignore jusqu quel point la gologie pure et simple vousintresse, mais jespre que vous mautoriserez vous envoyer unexemplaire de mon ouvrage.

    Tout gologue sait combien ce livre de Darwin sur les lesvolcaniques est intressant et suggestif. La satisfaction mdiocrequil semble inspirer son auteur doit tre probablement

    attribue au contraste que Darwin sentait exister entre lesouvenir des vives jouissances quil prouvait lorsque, le marteau

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    la main, il errait dans des contres nouvelles et intressantes, etla tche lente, laborieuse et moins conforme ses gots que luiimposaient la transcription et larrangement de ses notes sousforme de livre.

    Lorsquen 1874 je dcrivais les anciens volcans des lesHbrides, jeus frquemment loccasion de rappeler lesobservations de M. Darwin sur les volcans de lAtlantique, pourexpliquer les faits que nous montrent, dans nos propres les, lesrestes de volcans anciens. Darwin, crivant son fidle ami SirCharles Lyell au sujet de mon travail, lui dit : Jai prouv unesatisfaction bien vive en voyant citer mon livre sur les volcans, je

    le croyais mort et oubli.

    Deux ans plus tard, en 1876, on proposa Darwin de publierune nouvelle dition des Observations sur les les volcaniques etsur lAmrique du Sud. Il hsita dabord, car il lui semblait queces ouvrages noffraient plus actuellement quun intrtmdiocre ; il me consulta sur ce point au cours dune desconversations que nous avions souvent ensemble cette poque,

    et jinsistai fortement auprs de lui pour la rdition de ces livres.Jprouvai une vive satisfaction lorsque, se rendant mesinstances, il consentit ce quils fussent publis sans aucunemodification du texte. Il crit dans la prface de cette nouvelledition : Par suite des progrs rcents de la gologie, mes idessur quelques points pourront paratre un peu vieillies, mais jaicru prfrable de les laisser telles quelles ont t publiesoriginairement.

    Peut-tre ne sera-t-il pas sans intrt dindiquer brivementles principaux problmes gologiques sur lesquels le livre deDarwin les les volcaniques a jet une nouvelle et vive lumire. Leprincipal mrite de ces recherches est davoir fourni desobservations qui, non seulement, prsentent un haut intrtscientifique, mais dont quelques-unes ont permis de faire rejeterdes erreurs couramment admises ; dappeler lattention sur des

    phnomnes et des considrations qui avaient t compltementngligs par les gologues, mais qui ont exerc depuis lors une

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    grande influence sur la gense des thories gologiques ; et, enfin,de faire ressortir limportance qui sattache des causes faibles etinsignifiantes en apparence, mais dont quelques-unes donnent laclef de problmes gologiques du plus haut intrt.

    En visitant des contres o von Buch et dautres gologuesavaient cru trouver la preuve de la thorie des cratres desoulvement , Darwin fut amen dmontrer que les faitspouvaient recevoir une interprtation tout fait diffrente. Lesides mises dabord par le clbre gologue et explorateurallemand, et presque universellement admises par sescompatriotes, avaient t soutenues par lie de Beaumont et par

    Dufrnoy, les chefs du mouvement gologique en France. Ellestaient pourtant vigoureusement combattues par Scrope et parLyell en Angleterre, et par Constant Prvost et Virlet de lautrect de la Manche. Dans cet ouvrage, Darwin nous montre surquelles faibles bases repose cette thorie daprs laquelle lesgrands cratres circulaires des les de lAtlantique devraient leurorigine des ampoules gigantesques de la crote terrestre, qui, encrevant leur sommet, auraient donn naissance aux cratres.

    Reconnaissant linfluence que linjection de la lave exerce sur lastructure des cnes volcaniques, en accroissant leur masse et leurhauteur, il montre quen gnral les volcans sont difis par desjaculations rptes qui amnent une accumulation de matiresruptives autour de lorifice.

    Cependant, quoiquil arrivt aux mmes vues gnrales queScrope et que Lyell sur lorigine des cratres volcaniques

    ordinaires, Darwin vit clairement que, dans certains cas, degrands cratres peuvent stre forms ou stre agrandis parlaffaissement du plancher, la suite druptions. Limportance dece facteur auquel les gologues avaient accord trop peudattention, a t montre rcemment par le professeur Danadans son admirable ouvrage sur le Kilauea et dautres grandsvolcans de larchipel hawaen.

    Laffaissement qui se produit autour dun centre volcanique,et qui dtermine le plongement des couches environnantes, a t

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    mis en lumire pour la premire fois par Darwin, comme rsultatde son premier travail sur les les du Cap-Vert. Des exemplesfrappants du mme fait ont t signals depuis en Islande parM. Robert et par dautres, dans la Nouvelle-Zlande par

    M. Heaphy, et dans les les occidentales de lEcosse par moi-mme.

    diverses reprises, Darwin appela lattention des gologuessur le fait que les orifices volcaniques prsentent entre eux desrelations quon ne saurait expliquer sans admettre lexistence,dans la crote terrestre, de lignes de fracture le long desquellesles laves se sont fray un chemin vers la surface. Mais en mme

    temps il vit clairement quil nexistait pas de preuves du passagede grands torrents de laves le long de ces fractures ; il montracomment les plateaux les plus remarquables, forms de nappesde laves successives, peuvent avoir t construits par desmissions rptes et modres, manant dorifices volcaniquesnombreux, distincts les uns des autres. Il insiste expressmentsur la rapidit avec laquelle la dnudation peut faire disparatreles cnes de cendres forms autour des orifices djaculation, et

    les traces dmissions successives de laves.

    Lun des chapitres les plus remarquables du livre est celui olauteur traite des effets de la dnudation dterminant lrosionde lappareil volcanique, au point de ne plus laisser subsister quedes paves ou tronons ruins de volcans. Il a eu loccasiondtudier une srie de cas permettant de suivre toutes lesgradations des formes volcaniques, depuis les cnes complets

    jusquaux masses bouchant les cratres, o elles staientsolidifies. Les observations de Darwin sur ce sujet ont t de laplus haute valeur et du plus grand secours pour tous ceux qui sesont efforcs dtudier les effets de laction volcanique pendant lespriodes anciennes de lhistoire de la terre.

    Comme Lyell, Darwin tait fermement convaincu de lacontinuit des actions gologiques, et ctait toujours avec une

    vive satisfaction quil constatait que les phnomnes du passpouvaient sinterprter par des causes actuelles. Au moment o

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    Lyell se livrait, quelques mois avant sa mort, ses dernierstravaux gologiques sur les environs de sa rsidence dans leForfarshire, il crivit Darwin : Toutes mes recherches ontconfirm ma conviction que la seule diffrence entre les roches

    volcaniques palozoques et rcentes se rduit aux modificationsqui ont d se produire en raison de limmense priode de tempspendant laquelle les produits des volcans les plus anciens ont tsoumis des transformations chimiques.

    Lorsquaprs avoir achev ses tudes sur les phnomnes volcaniques, Darwin entreprit lexamen des grandes massesgranitiques des Andes, il fut vivement frapp des relations qui

    unissent les roches dites plutoniques et les roches dorigineincontestablement volcanique. On doit dire ce sujet que lescirconstances mmes dans lesquelles se fit la croisire du Beaglefurent trs favorables Darwin dans ses tudes sur les rochesruptives. Aprs avoir observ des types nettement caractrissde la srie rcente, il alla tudier dans lAmrique du Sud deremarquables gisements de masses ignes anciennes trscristallines et, dans le voyage de retour, il put revoir les roches

    volcaniques rcentes, raviver ainsi ses premires impressions ettablir des relations entre ces deux types lithologiques.

    Il exposa quelques-unes des considrations gnrales que cesobservations lui avaient suggres, dans un travail quil lut laSocit Gologique le 17 mars 1838, et qui portait comme titre : Du rapport de certains phnomnes volcaniques, de la formation des chanes de montagnes, et des effets des

    soulvements continentaux. La relation entre ces deux ordres defaits est discute dune manire plus approfondie dans son livresur la gologie de lAmrique du Sud.

    Les preuves dun soulvement rcent constates sur les ctesdun grand nombre dles volcaniques amenrent Darwin conclure quen gnral les aires volcaniques sont des rgions desoulvement ; et il fut conduit, naturellement, les opposer aux

    aires dans lesquelles, comme il le montra, la prsence datolls, dercifs frangeants et de rcifs-barrires, offre les preuves dun

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    affaissement. Il parvint de cette manire dresser une carte desaires ocaniques, les rpartissant en zones soumises desmouvements de soulvement ou daffaissement. Ses conclusions cet gard taient aussi neuves que suggestives.

    Darwin reconnut trs clairement le fait que la plupart des lesocaniques semblent tre dorigine volcanique, quoiquil prt soinde signaler les exceptions importantes qui infirment, dans unecertaine mesure, la gnralisation de cette rgle. Dans sonOrigine des espces il a dvelopp lide et mis la thorie de lapermanence des bassins ocaniques, que dautres auteurs ontadopte aprs lui et ont tendue plus loin, pensons-nous, que

    Darwin navait cru devoir le faire. Sa prudence sur ce point et surles questions spculatives du mme genre tait bien connue detous ceux qui avaient lhabitude de les discuter avec lui.

    Quelques annes avant le voyage du Beagle, M. PoulettScrope avait signal les analogies remarquables qui existent entrecertaines roches ignes structure rubane, telles quon enrencontre aux les Ponces, et les schistes cristallins feuillets. Il ne

    semble pas que Darwin ait eu connaissance du remarquablemmoire de Scrope, mais il appela lattention, dune maniretoute spontane, sur les mmes phnomnes lorsquil entrepritltude de roches fort analogues quon observe lle delAscension. Comme il venait dtudier les grandes masses deschistes cristallins du continent Sud-Amricain, il fut frapp dufait que les roches incontestablement ignes de lAscensionoffrent une rpartition identique des minraux constitutifs, le

    long de feuillets parallles. Ces observations conduisirentDarwin la mme conclusion que celle laquelle Scrope taitarriv quelque temps auparavant, cest--dire que, lorsque lacristallisation sopre dans des masses rocheuses soumises desforces dformatrices trs puissantes, il se produit une sparationet une distribution des minraux constitutifs, suivant des plansparallles. On a reconnu pleinement aujourdhui que ce processusdoit avoir t un facteur important dans la formation des roches

    mtamorphiques, que les auteurs rcents dsignent sous le nomde dynamo-mtamorphisme.

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    Dans ltude de ce problme et dun grand nombre dautresanalogues, exigeant des connaissances minralogiques trsexactes, il est remarquable de voir quel point Darwin russissait

    dcouvrir la vrit au sujet des roches quil tudiait, laideseulement dun canif, dune simple loupe, de quelques essaischimiques et du chalumeau. Depuis Darwin ltude des roches ensections minces sous le microscope a t invente, et estaujourdhui du plus grand secours dans toutes les recherchesptrographiques. Plusieurs des les tudies par Darwin ont texplores nouveau, et des chantillons de leurs roches ont trecueillis pendant le voyage du navire de la Marine Royale le

    Challenger. Les rsultats de ltude quen a faite un des matresde la microscopie des roches, le Professeur Renard, de Bruxelles,ont t publis rcemment dans un des volumes des Rapportssur lExpdition du Challenger. Il est intressant de constaterque, tandis que ces recherches rcentes ont enrichi la sciencegologique dun grand nombre de faits nouveaux et prcieux, etque des changements nombreux ont t apports lanomenclature et dautres points de dtail, tous les faits

    principaux dcrits par Darwin et par son ami le professeur Milleront rsist lpreuve du temps et dune tude plus approfondie,et demeurent comme un monument de la sagacit et de la justesse dobservation de ces pionniers des recherchesgologiques.

    JOHN W. JUDD.

    OBSERVATIONS GOLOGIQUES SUR LES LESVOLCANIQUES

    CHAPITRE PREMIER

    SAN THIAGO, ARCHIPEL DU CAP VERT

    Roches des assises infrieures. Dpt sdimentairecalcareux avec coquilles rcentes mtamorphis au contact de

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    laves surincombantes ; allure horizontale et tendue en surface deces couches. Roches volcaniques postrieures associes unematire calcaire terreuse et fibreuse, et frquemment renfermedans les vacuoles des scories. Anciens orifices druption

    oblitrs, de petite dimension. Difficult que prsente ladtermination de coules de laves rcentes sur une plaine unie. Collines de lintrieur de lle, constitues par des roches volcaniques plus anciennes. Grandes masses dolivinedcompose. Roches feldspathiques situes sous les couches de basalte cristallin. Uniformit de structure et daspect descollines volcaniques les plus anciennes. Forme des vallesvoisines de la cte. Conglomrat en voie de formation sur la

    plage.

    Lle de San Thiago stend du N.-N.-W. au S.-S.-E. sur unelongueur de trente milles et une largeur de douze milles environ.Les observations auxquelles je me suis livr pendant mes deuxvisites cette le ont toutes t faites dans sa partie mridionale etdans un rayon de quelques lieues seulement autour de Porto-Praya. Vue de la mer, la contre offre une configuration varie :

    des collines coniques pentes douces, de couleur rougetre (telleque la colline dsigne sous le nom de Red Hill et reprsentedans la figure intercale dans le texte)6 et dautres collines moinsrgulires, dune couleur noirtre et sommet plat (marques A,B, C, dans la mme figure), slvent au-dessus de plaines de lavequi stagent en gradins successifs. On aperoit dans le lointainune chane de montagnes, hautes de plusieurs milliers de pieds,qui traverse lintrieur de lle. Il ny a pas de volcan actif San

    Thiago, et il nen existe quun seul dans tout larchipel, celui deFogo. Lle na t prouve par aucun tremblement de terreviolent depuis quelle est habite.

    6 La configuration de la cte, la position des villages, desruisseaux et de la plupart des collines reprsents dans cette figure,ont t copies de la carte dresse bord du H.M.S. Leven. Lescollines sommet plat (A B C, etc.) y ont t reportes dune manirepurement approximative, pour rendre ma description plus claire.

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    [Illustration : FIG. I. Vue dune partie de San Thiago, lunedes les du Cap Vert.]

    Les roches infrieures que lon voit sur la cte prs de Porto-Praya sont trs cristallines et fort compactes ; elles semblentappartenir des masses volcaniques anciennes et dorigine sous-marine. Frquemment elles sont recouvertes, en stratificationdiscordante, par un dpt calcaire irrgulier, dune faiblepaisseur, o abondent des coquilles appartenant une desdernires priodes de lre tertiaire ; ce dpt est recouvert, sontour, par une grande nappe de lave basaltique, qui, partie ducentre de lle, sest rpandue en coules successives entre les

    collines sommet plat marques A, B, C, etc. Des coules plusrcentes ont t jacules par les cnes dissmins dans lle, telsque Red Hill et Signal-Post Hill. Les couches suprieures descollines sommet plat prsentent, au point de vue de laconstitution minralogique et dautres gards encore, unrapport intime avec les assises infrieures des couches de la cte,qui semblent former avec elles une masse continue.

    Description minralogique des roches formant les assisesinfrieures. Le caractre de ces roches est extrmementvariable. Elles sont formes dune masse fondamentale basaltiquecompacte, noire, brune ou grise, renfermant de nombreuxcristaux daugite, de hornblende, dolivine, de mica, et parfois dufeldspath vitreux. On rencontre frquemment une varit presqueentirement compose de cristaux daugite et dolivine. On saitque le mica se prsente rarement l o laugite abonde, et

    vraisemblablement la roche qui nous occupe noffre pas uneexception manifeste cette rgle, car le mica y est arrondi aussiparfaitement quun caillou dans un conglomrat (tout au moinsdans le plus caractristique de mes spcimens, o lon voit unnodule de mica long dun demi-pouce) ; il na videmment pascristallis dans la pte qui le renferme aujourdhui, mais il doitavoir t form par la fusion dune roche plus ancienne. Ces lavescompactes alternent avec des tufs, des roches amygdalodes et des

    wackes, et, certains endroits, avec des conglomrats grossiers.Parmi les wackes argileuses, les unes sont vert fonc, dautre vert

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    jauntre ple, d autres enfin presque blanches. Je constatai avectonnement quun certain nombre de ces dernires roches, mmeles plus blanches, fondaient en un mail noir de jais, tandis queplusieurs chantillons des varits vertes ne donnaient quun

    globule gris ple. De nombreux dikes forms essentiellement deroches augitiques trs compactes et de varits amygdalodesgrises coupent les couches ; en divers endroits celles-ci ont t violemment disloques et fortement redresses. Une ligne dedislocation coupe lextrmit septentrionale de Quailland, lot dela baie de Porto-Praya, et on peut le suivre jusqu lle principale.Ces dislocations se sont produites avant le dpt de la couchesdimentaire rcente, et la surface de lle a subi, antrieurement

    ce dpt, une dnudation importante, comme lattestent denombreux dikes tronqus.

    Description du dpt calcaire qui recouvre les rochesvolcaniques dont il vient dtre question. Cette couche peut trefacilement reconnue cause de sa couleur blanche et de lextrmergularit avec laquelle elle stend le long de la cte, sur uneligne horizontale pendant plusieurs milles. Sa hauteur moyenne

    au-dessus de la mer, mesure depuis sa ligne de contact avec leslaves basaltiques qui la recouvrent, est de 60 pieds environ ; etson paisseur, fort variable cause des ingalits de la formationsur laquelle elle repose, peut tre value environ 20 pieds.Cette couche est forme dune substance calcaire parfaitement blanche, constitue en partie par des dbris organiques et enpartie par une substance que lon pourrait comparer, pourlaspect, du mortier. Des fragments de roches et des cailloux

    sont dissmins dans toute cette couche, et se runissent souventen conglomrat, surtout vers la base. Un grand nombre de cesfragments sont comme badigeonns dune couche peu paisse dematire calcareuse blanchtre. Quail-island, la partie infrieuredu dpt calcaire est remplace par un tuf terreux tendre, decouleur brune, plein de turritelles, et qui est surmont dun lit decailloux passant au grs et contenant des fragments dchinides,des pinces de crabes et des coquilles ; les coquilles dhutres

    adhrent encore aux roches sur lesquelles elles vivaient. Le dptrenferme un grand nombre de sphrules blanches ressemblant

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    des concrtions pisolitiques, et dont la grosseur varie de celledune noix celle dune pomme ; elles renferment ordinairementun petit caillou en leur centre. Je me suis assur par un examenminutieux que ces soi-disant concrtions taient des nullipores

    conservant leur forme propre, mais dont la surface taitlgrement use par le frottement ; ces corps (considrsgnralement aujourdhui comme des vgtaux) noffrent aucunetrace dorganisation intrieure, quand on les tudie sous unmicroscope de puissance moyenne. M. Georges R. Sowerby a bien voulu examiner les coquilles que jai rassembles ; ellesappartiennent quatorze espces, dont les caractres sont assezbien conservs pour quil soit possible de les dterminer avec un

    degr de certitude suffisant, et quatre espces dont on ne peuttablir que le genre. Parmi les quatorze mollusques dont la listese trouve lappendice, onze appartiennent des espcesrcentes ; un, non encore dcrit, pourrait tre identique uneespce vivante que jai trouve dans le port de Porto-Praya ; lesdeux autres espces sont nouvelles et ont t dcrites parM. Sowerby. Les connaissances que nous possdons sur lesmollusques de cet archipel et des ctes voisines ne sont pas

    encore assez compltes pour nous permettre daffirmer que cescoquilles, mme les deux dernires, appartiennent des espcesteintes. Parmi ces coquilles, celles qui se rapportentincontestablement des espces vivantes ne sont pasnombreuses, mais elles suffisent cependant pour dmontrer quele dpt appartient une priode tertiaire rcente. Les caractresminralogiques de la formation, le nombre et les dimensions desfragments quelle renferme, et labondance des patelles et des

    autres coquilles littorales, dmontrent que tout lensemble sestaccumul dans une mer peu profonde, prs dun ancien rivage.

    Effets produits par la coule de lave basaltique qui sestrpandue sur le dpt calcaire. Ces effets sont trsremarquables. Cette matire calcareuse est modifie jusqu uneprofondeur denviron un pied sous la ligne de contact, et on peutsuivre le passage, tout fait insensible, de petits fragments de

    coquilles, de corallines et de nullipores peine agrgs, jusquune roche, o lon ne peut trouver aucune trace dune origine

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    mcanique, mme au microscope. Aux points o lesmodifications mtamorphiques ont t les plus intenses, onobserve deux varits de roches. La premire varit est dure etcompacte, finement grenue et blanche, sillonne par quelques

    lignes parallles formes de particules volcaniques noirtres ;cette roche ressemble un grs, mais un examen plus minutieuxmontre quelle est compltement cristalline, avec des faces declivage si parfaites quon peut les mesurer facilement augoniomtre rflexion. Si, aprs les avoir mouills, on examine, laide dune forte loupe, les chantillons qui ont subi unmtamorphisme moins complet, on peut constater unetransformation graduelle trs intressante ; quelques-unes des

    particules arrondies qui les constituent conservent leur formepropre, tandis que dautres se fusionnent insensiblement dans lamasse granulo-cristalline. Les surfaces dcomposes de cetteroche revtent une couleur rouge-brique, comme cest souvent lecas pour les calcaires ordinaires.

    La seconde varit mtamorphique est, de mme, une rochedure mais sans trace de structure cristalline. Cest une pierre

    calcaire blanche, opaque et compacte, fortement mouchete detaches, irrgulirement arrondies, dune matire terreuse,ocreuse et tendre. Cette matire terreuse prsente une couleur brun-jauntre ple, et parat tre un mlange de fer et decarbonate de chaux ; elle fait effervescence avec les acides, elle estinfusible mais noircit au chalumeau et devient magntique. Laforme arrondie des petites taches de substance terreuse, ainsi queles diverses tapes quon peut constater jusqu leur isolement

    parfait, et quon peut suivre en examinant une sriedchantillons, montrent clairement quelles ont t formes, soitpar lattraction des particules terreuses entre elles, soit plusvraisemblablement par une attraction rciproque des atomes decarbonate de chaux amenant alors la sgrgation de cesimpurets terreuses trangres. Ce fait ma vivement intress,car javais observ souvent des roches quartzeuses (par exempleaux les Falkland, et dans les couches siluriennes infrieures des

    Stiper-Stones dans le Shropshire) mouchetes, dune manireprcisment analogue, par de petites taches dune substance

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    terreuse blanchtre (feldspath terreux ?) ; on avait dj toutesraisons de croire alors que ces roches avaient t modifies ainsisous laction de la chaleur, et cette hypothse reoit maintenantsa confirmation. Cette texture tachete pourrait fournir peut-tre

    quelques indications pour distinguer les roches quartzeuses, quidoivent leur structure actuelle une action igne, de cellesformes par voie purement aqueuse ; distinction qui doit avoirfait hsiter bien des gologues dans ltude des rgions arnaco-quartzeuses, si jen juge par ma propre exprience.

    En spanchant sur les sdiments tals au fond de la mer, lesparties infrieures et les plus scoriaces de la lave ont empt une

    grande quantit de matire calcaire, qui forme maintenant la ptetrs cristalline et blanche comme neige, dune brche renfermantde petits fragments de scories noires et brillantes. Un peu au-dessus de cette couche, l o le calcaire est moins abondant et lalave plus compacte, les interstices de la masse de lave sontremplis dun grand nombre de petites sphres, formes despicules de calcaire spathique, qui rayonnent autour dun centrecommun. Dans une certaine partie de Quail-island, o les laves

    surincombantes nont pas plus de 14 pieds dpaisseur, le calcairea pu cristalliser sous linfluence de la chaleur dgage par cesmatires ruptives ; on ne peut pas admettre que cette faiblecouche de lave ait t plus paisse lorigine, et que son paisseurait t rduite par une rosion postrieure, ltat celluleux de sasurface nous le montre. Jai dj fait observer que la mer o ledpt calcaire sest opr devait tre peu profonde ; ledgagement de lanhydride carbonique a donc t entrav par une

    pression de loin infrieure celle, quivalant une colonne deauhaute de 1.708 pieds, que Sir James Hall considrait commencessaire pour empcher ce dgagement. Depuis lpoque de sesexpriences on a dcouvert que cest moins la pression que lanature de latmosphre ambiante qui intervient pour retenirlacide carbonique gazeux. Ainsi, il rsulte dexpriences de

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    M. Faraday7 que des masses importantes de calcaire se fondentquelquefois et cristallisent, mme dans des fours chauxordinaires. Suivant M. Faraday, le carbonate de chaux peut trechauff, pour ainsi dire, toute temprature dans une

    atmosphre dacide carbonique, sans se dcomposer ; et Gay-Lussac a montr que des fragments de calcaire, chauffs dans untube une temprature insuffisante par elle-mme pourprovoquer leur dcomposition, dgageaient cependant lacidecarbonique ds quon faisait passer au travers du tube un courantdair ou de vapeur deau : Gay-Lussac attribue ce phnomne audplacement de lacide carbonique naissant. La matire calcaire,qui se trouve sous la lave, surtout celle qui forme les aiguilles

    cristallines renfermes dans les vacuoles des scories, ne peut pasavoir subi laction du passage dun courant gazeux, quoiquelle aitt chauffe dans une atmosphre contenant vraisemblablementune trs forte proportion de vapeur deau. Peut-tre est-ce pourcette raison quelle a conserv son acide carbonique sous cettepression relativement faible.

    Les fragments de scories renferms dans la pte calcaire

    cristalline sont dun noir de jais, cassure brillante comme cellede la rtinite. Cependant leur surface est recouverte dune couchedune substance translucide orange-rougetre, que lon peutgratter facilement au canif ; ces fragments apparaissent alorscomme sils taient recouverts dune couche mince de matirersineuse. Les plus petits dentre eux prsentent des partiescompltement transformes en cette substance ; transformationqui semble tout fait diffrente dune dcomposition ordinaire.

    Nous verrons dans un autre chapitre qu larchipel desGalapagos de grandes couches de cendres volcaniques, avecparticules scoriaces, ont subi une transformation peu prsidentique.

    7 Je suis fort reconnaissant M. E.-W. Brayley de mavoir indiqu ce sujet les travaux suivants : Faraday : Edinburgh, Newphilosophical Journal, vol. XV, p. 398 ; Gay-Lussac : Annales dechimie et de physique, tome I, chap. XIII, p. 210, dont la traduction aparu dans le London and Edinburgh philosophical Magazine, vol. X,p. 496.

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    Extension et horizontalit du dpt calcaire. La limitesuprieure du dpt calcaire, si nettement marque cause de lacouleur blanche de cette roche, et si voisine de lhorizontale, court

    le long de la cte sur une distance de plusieurs milles, laltitudede 60 pieds environ au-dessus du niveau de la mer. La nappe debasalte qui la recouvre prsente une paisseur moyenne de 80pieds. louest de Porto-Praya, au-del de Red Hill, la coucheblanche avec le basalte qui la surmonte, sont recouverts par descoules plus rcentes. Jai pu la suivre de lil, au nord de Signal-Post Hill, stendant au loin sur une distance de plusieurs milles,le long des falaises de la cte. Mes observations ont port sur une

    tendue denviron 7 milles le long de la cte, mais la rgularit decette couche me porterait croire quelle stend beaucoup plusloin. Dans des ravins perpendiculaires la cte, on la voit plongerdoucement vers la mer, probablement suivant linclinaison quelleprsentait lors de son dpt sur les anciens rivages de lle. Je naitrouv dans lintrieur de lle quune seule coupe o cette coucheft visible, la hauteur de quelques centaines de pieds, cest labase de la colline marque A ; elle y repose, comme dhabitude,

    sur la roche augitique compacte associe avec de la wacke, et elley est recouverte par la grande nappe de lave basaltique rcente.En certains points cependant cette couche blanche ne conservepas son horizontalit ; Quail-island sa surface suprieure neslve qu 40 pieds au-dessus du niveau de la mer ; icigalement la nappe de lave qui la recouvre na que 12 15 piedsdpaisseur ; dautre part, au nord-est du port de Porto-Praya, lacouche calcaire ainsi que la roche sur laquelle elle repose

    atteignent une hauteur suprieure au niveau moyen. Je crois quedans ces deux cas la diffrence de niveau ne provient pas dunexhaussement ingal, mais de lirrgularit primitive du fond dela mer. Ce fait peut tre dmontr Quail-island, car le dptcalcaire y offre en un certain point une paisseur de beaucoupsuprieure la moyenne, alors quen dautres points cette rochene se montre pas ; dans ce dernier cas les laves basaltiquesrcentes reposent directement sur les laves plus anciennes.

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    [Illustration : FIG. 2. Signal-Post Hill ; A. Roches volcaniques anciennes ; B. Dpt calcareux ; C. Lavebasaltique suprieure.]

    Sous Signal-Post Hill la couche blanche plonge dans la merdune manire bien intressante. Cette colline est conique, hautede 450 pieds, et offre encore quelques traces de structurecratriforme ; elle est constitue en majeure partie de matiresruptives mises postrieurement au soulvement de la grandeplaine basaltique, mais en partie aussi de laves trs anciennes,probablement de formation sous-marine. La plaine environnanteet le flanc oriental de la colline ont t dcoups par lrosion en

    falaises escarpes surplombant la mer. La couche calcaire blancheest visible dans ces ravinements la hauteur de 70 pieds environau-dessus du rivage, et stend au nord et au sud de la colline, surune longueur de plusieurs milles, en dessinant une ligne quiparat parfaitement horizontale ; mais, au-dessous de la colline,elle plonge dans la mer et disparat sur une longueur denviron unquart de mille. Le plongement est graduel du ct du sud, et plusbrusque du ct du nord, comme le montre la figure. Ni la couche

    calcaire ni la lave basaltique surincombante (pour autant quonpuisse distinguer cette dernire des coules plus rcentes)naugmentent dpaisseur mesure quelles plongent ; jenconclus que ces couches nont pas t originairement accumulesdans une dpression dont le centre serait devenu plus tard unpoint druption, mais quelles ont t dranges et ployespostrieurement leur dpt. Nous pouvons supposer, ou bienque Signal-Post Hill, aprs son soulvement, sest abaiss avec la

    rgion environnante, ou bien quil na jamais t soulev lamme hauteur quelle. Cette dernire hypothse me parat la plusvraisemblable, car, durant le soulvement lent et uniforme decette partie de lle, lnergie souterraine, affaiblie par desruptions rptes de matires volcaniques mises au-dessous dece point, devait ncessairement conserver moins de puissancepour le soulever. Un fait analogue semble stre produit prs deRed Hill, car, en remontant les coules de lave qui affleurent, des

    environs de Porto-Praya vers lintrieur de lle, jai t amen supposer que la pente de la rgion a t lgrement modifie

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    depuis que la lave y a coul, soit quil y ait eu un lgeraffaissement prs de Red Hill, soit que cette partie de la plaine aitt porte une hauteur moins considrable que le reste de lacontre, lors du soulvement gnral.

    Lave basaltique qui surmonte le dpt calcaire. Cette lave,dun gris ple, est fusible en un mail noir ; sa cassure est terreuseet concrtionne, elle contient de petits grains dolivine. Lesparties centrales de la masse sont compactes, ou parsemes toutau plus de quelques petites cavits, et elles sont souventcolonnaires. Cette structure se prsente dune manire saillante Quail-island o la lave a t divise, dune part, en lamelles

    horizontales et, dautre part, dcoupe par des fissures verticalesen plaques pentagonales ; celles-ci tant leur tour empiles lesunes sur les autres, se sont insensiblement soudes, de manire former de belles colonnes symtriques. La surface infrieure de lalave est vsiculaire, mais parfois sur une paisseur de quelquespouces seulement ; la surface suprieure, qui est galement vsiculaire, est divise en sphres formes de couchesconcentriques, et dont le diamtre atteint souvent 3 pieds. La

    masse est forme de plus dune coule ; son paisseur totaletant, en moyenne, de 80 pieds. La partie infrieure sestcertainement tale en coules sous-marines, et il en estprobablement de mme pour la partie suprieure. Cette laveprovient en majeure partie des rgions centrales de lle,comprises entre les collines marques A, B, C, etc., dans la figure.La surface de la contre est unie et strile prs de la cte ; le paysslve vers lintrieur par des terrasses successives ; lorsquon les

    observe de loin, on en distingue nettement quatre superposes.

    ruptions volcaniques postrieures au soulvement de lacte ; matires ruptives associes avec du calcaire terreux. Ces laves rcentes proviennent des collines coniques teintebrun-rouge, dissmines dans lle et qui slvent brusquementdans la plaine prs de la cte. Jen ai gravi plusieurs, mais je nendcrirai quune seule, Red Hill, qui peut servir de type pour ce

    groupe et dont certaines particularits sont remarquables. Sahauteur est de 600 pieds environ ; elle est constitue par des

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    roches de nature basaltique, trs scoriaces et dun rouge vif ; elleprsente sur lun des cts de son sommet une cavit qui estprobablement le dernier vestige dun cratre. Plusieurs autrescollines de la mme catgorie sont, en juger par leur forme

    extrieure, surmontes de cratres beaucoup mieux conservs.Lorsquon longe la cte par mer, on voit clairement quune masseconsidrable de lave, partie de Red Hill, sest coule dans la meren passant au-dessus dune ligne de rochers haute denviron 120pieds. Cette ligne de rochers constitue le prolongement de cellequi forme la cte et qui borne la plaine de deux cts de lacolline ; ces coules ont donc t mises par Red Hillpostrieurement la formation des rochers de la cte, et une

    poque o la colline se trouvait, comme aujourdhui, au-dessusdu niveau de la mer. Cette conclusion concorde avec la nature trsscoriace de toutes les roches de Red Hill, qui semblent tre deformation subarienne ; et ce fait est important, car il existe prsdu sommet quelques bancs dune matire calcaire, qu premirevue on pourrait prendre tort pour un dpt sous-marin. Ces bancs sont forms de carbonate de chaux, blanc, terreux, ettellement friable quil scrase sous le moindre effort, les

    spcimens les plus compacts mme ne rsistant pas la pressiondes doigts. Quelques-unes de ces masses sont blanches comme lachaux vive, et paraissent absolument pures, mais on peuttoujours y dcouvrir la loupe de petites particules de scories, etje nai pu en trouver une seule qui ne laisst pas de rsidu de cettenature quand on la dissolvait dans les acides. Il est difficile, pourcette raison, de dcouvrir une particule de calcaire qui ne changepas de couleur au chalumeau ; la plupart dentre elles sy vitrifient

    mme. Les fragments scoriacs et la matire calcaire sontassocis de la manire la plus irrgulire, parfois en lits peudistincts, mais plus frquemment en une brche confuse, o lecalcaire prdomine dun ct et les scories de lautre. Sir H. De LaBeche a bien voulu faire analyser quelques-uns des spcimens lesplus purs, dans le but de dcouvrir si, en raison de leur originevolcanique, ils contenaient beaucoup de magnsie ; mais on nena dcel quune faible quantit, analogue celle qui existe dans laplupart des calcaires.

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    Quand on brise les fragments de scories engags dans lamasse calcaire, on voit quun grand nombre de leurs vacuolessont tapisses et mme partiellement remplies dun rseau decarbonate de chaux, blanc, dlicat, excessivement fragile et

    semblable de la mousse, ou plutt des conferves. Ces fibres,observes laide dune loupe dont la distance focale est dundixime de pouce, se montrent cylindriques ; leur diamtre estlgrement suprieur un millime de pouce ; elles sont ousimplement ramifies, ou plus communment unies en un rseauformant une masse irrgulire, mailles de dimension et deforme trs variables. Quelques fibres sont recouvertes dunecouche paisse de spicules extrmement fins, parfois agrgs en

    houppes minuscules, ce qui leur donne un aspect velu. Cesspicules ont un diamtre uniforme sur toute leur longueur ; ils sedtachent facilement, de sorte que le porte-objet du microscopeen est bientt recouvert. Le calcaire offre cette structure fibreusedans les vacuoles dun grand nombre de fragments des scories,mais gnralement un degr moins parfait. Ces vacuoles nesemblent pas tre relies lune lautre. Il nest pas douteux,comme nous allons le montrer, que le calcaire ait t jacul

    ltat fluide, intimement mlang la lave, et cest pour cetteraison que jai cru devoir marrter dcrire cette curieusestructure fibreuse, dont je ne connais aucun analogue. cause dela nature terreuse des fibres, cette structure ne semble paspouvoir tre attribue la cristallisation.

    Dautres fragments de la roche scoriace de cette colline,quand on les brise, se montrent rays de traits blancs, courts et

    irrguliers, qui proviennent dune range de vacuoles spares,entirement ou partiellement remplies dune poudre calcareuseblanche. Cette structure ma rappel immdiatement les petitesboules et les filaments tirs de farine, dans une pte mal ptrie,avec laquelle ils ne se sont pas mlangs, et je suis port penserque, de la mme manire, de petites masses de calcaire nayantpas t incorpores dans la lave liquide, ont t tires, lorsquetoute la masse tait en mouvement. Jai examin soigneusement,

    en les broyant et en les dissolvant dans les acides, des fragmentsde scories prises moins dun demi-pouce de cellules qui taient

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    pleines de la poussire en question, et je ny ai pas trouv detraces de calcaire. Il est clair que la lave et le calcaire nont t quetrs imparfaitement mlangs. Lorsque de petites masses decalcaire ont t emptes dans la lave encore visqueuse, o on les

    observe comme une matire pulvrulente, ou en fibres rticulestapissant les vacuoles, je suis port penser que les gaz absorbsont pu se dilater plus facilement aux points o ce calcairepulvrulent rendait la lave moins rsistante.

    un mille lest de la ville de Praya on observe une gorge auxparois escarpes, large de 150 yards environ, coupant la plainebasaltique et les bancs sous-jacents, mais qui a t comble par

    une coule de lave plus moderne. Cette lave est dun gris sombre,et prsente presque partout une structure compacte et unedisposition imparfaitement colonnaire ; mais, une petitedistance de la cte, elle renferme, irrgulirement dispose, unemasse brchiforme de scories rouges, mlanges dune quantitconsidrable de calcaire blanc, terreux, friable, et en certainspoints, presque pur, comme celui du sommet de Red Hill. Cettelave avec le calcaire quelle empte doit certainement avoir coul

    comme une nappe rgulire ; en juger par la forme de la gorge,vers laquelle convergent encore les prcipitations atmosphriquesactuellement peu abondantes dans cette rgion, et par laspect dela couche de blocs incohrents ressemblant aux quartiers derochers du lit dun torrent, et sur laquelle repose la lave, nouspouvons conclure que la coule tait dorigine subarienne. Jenai pu suivre cette coule jusqu son origine, mais, daprs sadirection, elle parat tre descendue de Signal-Post Hill, loign

    dun mille un quart, et qui, comme Red Hill, a t un centredruption postrieure au soulvement de la grande plainebasaltique. Un fait qui concorde avec cette manire de voir, cestque jai trouv sur Signal-Post Hill une masse de matire calcaireterreuse, de la mme nature, mlange avec des scories. Ilimporte de faire observer ici quune partie de la matire calcairequi constitue le banc sdimentaire horizontal, et spcialement lamatire fine recouvrant dune couche blanche les fragments de

    roches engags dans le banc, doit son origine, suivant touteprobabilit, la fois des ruptions volcaniques et la trituration

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    de restes dorganismes. Les roches cristallines anciennes sous-jacentes sont associes avec beaucoup de carbonate de chaux sousla forme damygdalodes et de masses irrgulires, dont je nai pucomprendre la nature.

    En tenant compte de labondance du calcaire terreux prs dusommet de Red Hill, cne volcanique haut de 600 pieds et deformation subarienne, du mlange intime de petits fragments etde volumineux amas de scories empts dans des masses duncalcaire presque pur, et de la manire dont de petits noyaux et destranes de poussire calcaire sont renferms dans des fragmentsmassifs de scories, en tenant compte enfin dune association

    identique de calcaire et de scories, constate dans une coule delave quon a toutes raisons de croire moderne et subarienne, etqui est descendue dune colline o lon rencontre galement ducalcaire terreux, je pense que, sans aucun doute, le calcaire a tjacul ltat de mlange avec la lave fondue. Je ne sache pasquaucun fait semblable ait t dcrit, et il me parat intressantde le signaler, dautant plus quun grand nombre de gologues ontcertainement cherch dterminer les actions qui doivent se

    produire dans un foyer volcanique prenant naissance dans descouches profondes, de composition minralogique varie. Lagrande abondance de silice libre dans les trachytes de certainesrgions (tels que ceux de Hongrie dcrits par Beudant, et des lesPonza par P. Scrope) rsout peut-tre la question pour le cas oles roches sous-jacentes seraient quartzeuses, et nous trouvonsprobablement ici la solution du problme dans le cas o lesproduits volcaniques ont travers des masses sous-jacentes de

    calcaire. On est port, naturellement, se demander quel tat setrouvait le carbonate de chaux, actuellement terreux, au momento il a t jacul avec la lave dont la temprature tait trsleve ; ltat extrmement celluleux des scories de Red Hillprouve que la pression ne peut avoir t bien considrable, etcomme la plupart des ruptions volcaniques sont accompagnesdu dgagement de grandes quantits de vapeur deau et dautresgaz, nous trouvons ici runies les conditions qui, suivant les ides

    actuelles des chimistes, sont les plus favorables pour llimination

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    de lacide carbonique8. On peut se demander si la lenterabsorption de ce gaz na pas donn au calcaire renferm dansles vacuoles de la lave cette structure fibreuse si particulire,semblable celle dun sel efflorescent. Enfin je ferai remarquer la

    grande diffrence daspect constate entre ce calcaire terreux, quidoit avoir t port une haute temprature dans uneatmosphre de vapeur deau et de gaz divers, et le calcairespathique, blanc, cristallin, qui a t form sous une nappe delave peu paisse (comme Quail-island) stalant sur un calcaireterreux et sur les dbris dorganismes tapissant le fond dune merpeu profonde.

    Signal-Post Hill. Nous avons dj parl de cette colline diverses reprises, notamment lorsque nous avons signal lamanire remarquable dont la couche calcaire blanche, en dautrespoints parfaitement horizontale, plonge dans la mer sous lacolline (figure 2). Son sommet est large et offre des traces peunettes de structure cratriforme ; il est form de rochesbasaltiques9, compactes ou celluleuses, avec des bancs inclins de

    8 Je pense qu une grande profondeur au-dessous de la surfacedu sol, le carbonate de chaux tait ltat liquide. On sait que Huttonattribuait la formation de toutes les roches amygdalodes des gouttesde calcaire fondu flottant dans le trapp comme de lhuile dans leau ;cette thorie est certainement fausse, mais si les roches quiconstituent le sommet de Red Hill staient refroidies sous la pressiondes eaux dune mer peu profonde, ou entre les parois dun dike, nousaurions, selon toute probabilit, une roche trappenne associe avec

    de grandes masses de calcaire spathique compacte et cristallin. Or,daprs la manire de voir de beaucoup de gologues aujourdhui, laprsence de ce calcaire aurait t attribue, tort, des infiltrationspostrieures.

    9 Ces roches offrent frquemment une varit remarquable,remplie de petits fragments dun minral terreux, rouge jaspe fonc,qui montre, quand on lexamine attentivement, un clivage peu net ;les petits fragments sont allongs, tendres, magntiques avant commeaprs calfaction, et difficilement fusibles en un mail terne. Ceminral est videmment trs voisin des oxydes de fer, mais je nesaurais le dterminer avec certitude. La roche qui renferme ce minral

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    scories incohrentes dont quelques-uns sont associs ducalcaire terreux. Comme Red Hill, cette colline a t le foyerdruptions postrieures au soulvement de la plaine basaltiqueenvironnante ; mais, contrairement la premire colline, elle a

    subi des dnudations importantes et a t le sige dactionsvolcaniques une priode trs recule, quand elle tait encoresous-marine. Pour tablir ce point, je me base sur lexistence desderniers vestiges de trois petits centres druption que jaidcouverts sur le flanc qui regarde lintrieur des terres. Ils sontforms de scories luisantes cimentes par du spath calcairecristallin, exactement comme le grand dpt calcaire sous-marin,aux endroits o la lave, encore haute temprature, sest tale ;

    leur aspect ruiniforme ne peut tre expliqu, je pense, que parlaction dnudatrice des vagues de la mer. Ce qui ma men aupremier orifice, cest que jai observ une couche de lave de 200 yards carrs environ, bords abrupts, tale sur la plainebasaltique sans quil y et proximit quelque monticule do elleaurait pu tre jacule ; et le seul vestige dun cratre que je soisparvenu dcouvrir consistait en quelques bancs obliques descories, lune de ses extrmits. 50 yards dun second amas de

    lave sommet plat comme le premier, mais beaucoup plus petit,je dcouvris un groupe circulaire irrgulier de plusieurs massesdune brche forme de scories cimentes, hautes denviron 6pieds, et qui sans doute ont constitu autrefois le centredruption. Le troisime orifice nest plus indiqu aujourdhui quepar un cercle irrgulier de scories cimentes, de 4 yards dediamtre environ, et ne slevant, en son point culminant, qu 3pieds peine au-dessus du niveau de la plaine, dont la surface

    prsente son aspect habituel et noffre aucune solution decontinuit aux environs ; nous avons ici une section horizontalede la base dun orifice volcanique qui a t presque entirementras avec toutes les matires jacules.

    en juger par sa direction, la coule de lave qui comble lagorge troite10 situe lest de la ville de Praya, parat tredescendue de Signal-Post Hill, comme nous lavons fait

    est crible de petites cavits anguleuses tapisses et remplies decristaux jauntres de carbonate de chaux.

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    remarquer plus haut, et stre rpandue sur la plaine aprs quecelle-ci eut t souleve ; la mme observation sapplique unecoule (qui nest peut-tre quune portion de la premire)recouvrant les rochers du rivage, peu de distance lest de la

    gorge. Lorsque je mefforai de suivre ces coules sur la surfacerocheuse de la plaine presque entirement prive de terre arableet de vgtation, je fus fort surpris de constater que toute tracedistincte de ces coules disparaissait bientt compltement,quoiquelles soient constitues par une matire basaltique dure etquelles naient pas t exposes laction dnudatrice de la mer.Mais jai observ depuis, larchipel des Galapagos, quil estsouvent impossible de suivre des coules de laves mme trs

    rcentes et de trs grande dimension, au travers de coules plusanciennes, si ce nest en se guidant sur la dimension des buissonsqui les recouvrent, ou en comparant ltat plus ou moins luisantde leur surface, caractres quun laps de temps fort court suffit effacer entirement. Je dois faire remarquer que dans unergion surface unie, climat sec, et o le vent souffle toujoursdans la mme direction (comme larchipel du Cap Vert), leseffets de dgradation dus laction atmosphrique sont

    probablement beaucoup plus considrables quon ne lesupposerait, car dans ce cas le sol meuble saccumule uniquementdans quelques dpressions protges contre le vent, et tanttoujours pouss dans une mme direction, il chemineconstamment vers la mer sous forme dune poussire fine,laissant la surface des rochers dcouverte et expose sans dfense laction continue des agents atmosphriques.

    Collines de lintrieur de lle constitues par des rochesvolcaniques plus anciennes. Ces collines sont reportesapproximativement sur la carte et marques des lettres A, B, C,etc. Leur constitution minralogique les rapproche des roches

    10 Aux endroits o la nappe basaltique suprieure estinterrompue, les parois de cette gorge sont presque verticales. La lavequi la remplie ultrieurement adhre ces parois presque aussifortement quun dike ses murs. Lorsquune nappe de lave sestcoule le long dune valle, elle est souvent borde, de chaque ct,par des masses de scories incohrentes.

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    infrieures visibles sur la cte, et elles sont probablement encontinuit directe avec ces dernires. Vues de loin, ces collinessemblent avoir fait partie autrefois dun plateau irrgulier, ce quiparat probable en raison de luniformit de leur structure et de

    leur composition. Leur sommet est plat, lgrement inclin etelles ont, en moyenne, environ 600 pieds de hauteur. Leurversant le plus abrupt est dirig vers lintrieur de lle, point doelles rayonnent vers lextrieur, et elles sont spares lune delautre par des valles larges et profondes, au travers desquellessont descendues de grandes coules de lave qui ont form lesplaines du rivage. Leurs flancs tourns vers lintrieur de lle etqui sont les plus abrupts, comme nous venons de le dire,

    dessinent une courbe irrgulire peu prs parallle la ligne durivage, dont elle est loigne de 2 ou 3 milles vers lintrieur. Jaigravi quelques-unes de ces collines et, grce lamabilit deM. Kent, chirurgien-adjoint du Beagle, jai obtenu des spcimensprovenant de celles des autres collines que jai pu apercevoir laide dune longue-vue. Quoiquil ne mait t possible dtudier, laide de ces divers lments, quune partie de la chane, 5 6milles seulement, je nhsite pas affirmer, daprs luniformit

    de structure de ces collines, quelles appartiennent une grandeformation stendant sur la majeure partie de la circonfrence delle.

    Les couches suprieures de ces collines diffrentconsidrablement des couches infrieures par leur composition.Les couches suprieures sont basaltiques, gnralementcompactes, mais parfois scoriaces et amygdalodes, et sont

    associes des masses de wacke. L o le basalte est compact, ilest tantt finement grenu et tantt trs grossirement cristallin ;dans ce dernier cas il passe une roche augitique renfermantbeaucoup dolivine ; celle-ci est incolore ou prsente les teintesordinaires : jaune et rougetre terne. Sur certaines collines, lescouches basaltiques sont associes des bancs dune matirecalcaire, terreuse ou cristalline, englobant des fragments descories vitreuses. Les couches dont nous parlons en ce moment ne

    diffrent des coules de lave basaltique qui constituent la plainectire que par une plus grande compacit, par la prsence de

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    cristaux daugite et par les dimensions plus fortes des grainsdolivine ; caractres qui, joints laspect des bancs calcairesassocis avec ces couches, me portent croire quelles sont deformation sous-marine.

    Quelques masses importantes de wacke sont fort curieuses.Les unes sont associes ces couches basaltiques, les autres semontrent sur la cte, et spcialement Quail-island o ellesconstituent les assises infrieures. Ces roches consistent en unesubstance argileuse dun vert-jauntre ple, structure arnacelorsquelle est sche, mais onctueuse quand elle est humide ; dansson tat de plus grande puret, elle est dune belle teinte verte,

    translucide sur les bords, et prsente accidentellement des traces vagues dun clivage originel. Elle se fond trs facilement auchalumeau en un globule gris-sombre, parfois mme noir,lgrement magntique. Ces caractres mont conduitnaturellement croire que cette matire tait un produit dedcomposition dun pyroxne faiblement color ; cette manirede voir est appuye par le fait que la roche non altre se montrepleine de grands cristaux isols daugite noire, ainsi que de

    sphres et de tranes dune roche augitique gris fonc. Le basaltetant ordinairement form daugite et dolivine souvent altre etde couleur rouge sombre, je fus amen examiner les phases dedcomposition de ce dernier minral, et je maperus avectonnement que je pouvais suivre une gradation presque parfaiteentre lolivine inaltre et la wacke verte. Dans certains cas, desfragments provenant dun mme grain se comportaient auchalumeau comme de lolivine, part un lger changement de

    couleur, ou donnaient un globule magntique noir. Je ne puisdonc douter que la wacke verdtre ntait lorigine autre choseque de lolivine, et que des modifications chimiques trsprofondes aient d se produire au cours de la dcomposition pouravoir pu transformer un minral trs dur, transparent, infusible,

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    en une substance argileuse, tendre, onctueuse et facilementfusible11.

    Les couches de la base de ces collines, ainsi que quelquesmonticules isols, dnuds et de forme arrondie, sont constituspar des roches feldspathiques ferrugineuses compactes, finementgrenues, non cristallines (ou dont la nature cristalline est peineperceptible) ; ces roches sont gnralement demi dcomposes.Leur cassure est extrmement irrgulire et esquilleuse, et mmeles petits fragments sont souvent trs rsistants. Elles renfermentune forte proportion de matire ferrugineuse, soit en petits grains clat mtallique, soit en fibres capillaires brunes ; en ce derniercas, la roche prend une structure pseudo-brchiforme. Ces rochesrenferment parfois du mica et des veines dagate. Leur couleurbrun de rouille ou jauntre est due partiellement aux oxydes defer, mais surtout dinnombrables taches microscopiques noires,qui fondent facilement lorsquon chauffe un fragment de roche, etsont videmment formes de hornblende ou daugite. Ces rochescontiennent donc tous les lments essentiels du trachyte,quoiquelles offrent, premire vue, laspect dargile cuite ou de

    quelque dpt sdimentaire modifi. Elles ne diffrent dutrachyte que parce quelles ne sont pas rudes au toucher etquelles ne renferment pas de cristaux de feldspath vitreux. Ainsi

    11 DAubuisson, dans son Trait de Gognosie (tome II, p. 569),indique, daprs M. Marcel de Serres, que des masses de terre verteexistent prs de Montpellier, et sont considres comme dues ladcomposition de lolivine. Je ne sache pas cependant que laction du

    chalumeau sur ce minral se trouve modifie lorsquil prsente uncommencement de dcomposition. Ce fait est important, car, premire vue, il semble invraisemblable quun minral dur,transparent, rfractaire, se soit transform en une argile tendre etfacilement fusible comme celle de San Thiago. Je dcrirai plus loinune substance verte formant des filaments dans lintrieur desvacuoles de certaines roches basaltiques vsiculaires au Van DiemensLand, qui se comporte au chalumeau comme la wacke verte de SanThiago, mais cette forme cylindrique des filaments prouve quelle nepeut pas avoir t forme par la dcomposition de lolivine, minral seprsentant toujours en grains ou en cristaux.

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    que le cas sen prsente si souvent pour les formationstrachytiques, on ne voit ici aucune trace de stratification. Oncroirait difficilement que ces roches ont pu couler ltat delaves ; il existe pourtant Sainte-Hlne des coules bien

    caractrises, dont la composition est presque identique celle deces roches, ainsi que je le montrerai dans un autre chapitre. Jairencontr en trois endroits, parmi les monticules constitus parces roches, des collines coniques, pentes douces, formes dephonolite contenant de nombreux cristaux de feldspath vitreuxbien forms, et des aiguilles de hornblende. Je crois que ces cnesde phonolite ont le mme rapport avec les couches feldspathiquesenvironnantes, que certaines masses dune roche augitique

    grossirement cristallise ont avec le basalte qui les entoure, dansune autre partie de lle, cest--dire que dans les deux cas cesroches ont t injectes. Les roches de nature feldspathique tantplus anciennes que les nappes basaltiques qui les recouvrent etque les coules basaltiques de la plaine ctire, obissent lordrede succession habituel de ces deux grandes divisions de la srievolcanique.

    Ce nest qu la partie suprieure des couches de la plupart deces collines quon peut distinguer les plans de sparation ; lescouches sinclinent faiblement du centre de lle vers la cte.Linclinaison nest pas identique dans toutes les collines ; elle estplus faible dans la colline marque A que dans les collines B, D ouE ; les couches de la colline C scartent peine dun planhorizontal ; et celles de la colline F (pour autant que jai pu enjuger sans la gravir) sont faiblement inclines en sens inverse,

    cest--dire vers lintrieur et vers le centre de lle. Malgr cesdiffrences dinclinaison, leur similitude de forme extrieure et deconstitution tant au sommet qu la base, leur disposition en uneligne courbe en prsentant le flanc le plus escarp vers lintrieurde lle, tout semble prouver quelles faisaient originairementpartie dun plateau qui stendait probablement autour dunegrande partie de la circonfrence de lle, comme je lai faitremarquer plus haut. Les couches suprieures ont coul bien

    certainement ltat de lave, et se sont probablement tales sousla mer, comme cest aussi le cas pour les masses feldspathiques

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    infrieures. Comment donc ces couches ont-elles t amenes prendre leur position actuelle, et do ont-elles fait ruption ?

    Au centre de lle il existe des montagnes leves12, mais ellessont spares du flanc escarp intrieur de ces collines par unelarge tendue de pays de moindre altitude ; dailleurs lesmontagnes de lintrieur paraissent avoir t le centredjaculation de grandes coules de lave basaltiqu