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ÉCONOMIE Outre son parcours honorable lors de la Coupe du monde, l’équipe de France de football a non seulement réussi à redevenir populaire avec une nouvelle forme d’attachement auprès de ses fans, mais aussi à être à nouveau respectée par les autres nations. Si, sur le plan sportif, la France n’a pas encore à son actif une victoire significative face à une très grande nation du football en compétition officielle, le match nul en Espagne et surtout l’exploit réalisé face à l’Ukraine au Stade de France pour se qualifier lors des barrages marquent le début d’une nouvelle ère marketing pour les Bleus. Pour bien comprendre comment l’équipe de France et son encadrement ont pu créer une nouvelle dynamique pour redevenir une marque sportive respectée et attractive, l’analyse comparée du management de son image entre 2010 et 2014 fait état d’un changement radical de stratégie de communication de la part de la Fédération française de football. La réputation de l’équipe de France représente la réaction nette affective ou émotionnelle, bonne ou mauvaise, faible ou forte, des fans, des clients, des joueurs, des médias et du grand public vis-à-vis des Bleus. Afin de construire une bonne réputation pour une équipe ou un club, cinq principes fondamentaux sont à intégrer dans leur stratégie de communication : – Être visible. Naturellement, l’équipe de France l’est extrêmement dans les médias avec la diffusion des matches officiels, mais aussi en termes de suivi journalistique lors des conférences de presse pour les annonces du sélectionneur. D’ailleurs, le match France-Allemagne a réalisé un pic d’audience à 21 millions de téléspectateurs en fin de rencontre. – Être authentique. Si, en 2010, le lien avec l’histoire des Bleus avait été mis de côté, ce fut très différent sous l’ère Blanc, puis celle de Deschamps. La symbolique même du sélectionneur Didier Deschamps, capitaine historique de l’équipe de France, ainsi que les différents sujets traités dans les médias, comme le numéro spécial de L’Équipe Magazine sur la victoire lors de l’Euro 1984 ou encore la rediffusion télé de la demi-finale France- Allemagne du Mundial 1982, ont permis de promouvoir les différentes épopées des Bleus sous un angle positif et intergénérationnel. – Être transparent. À la différence de 2010, les choix du sélectionneur concernant les joueurs et leur positionnement tactique ou encore les lieux de vie ou de préparation de l’équipe ont toujours été explicités. Deschamps et son staff ont défendu leur projet humain et sportif avec le soutien continu du président de la FFF, dans les bons et mauvais moments. – Être cohérent. Si, en 2010, peu de journalistes, de consultants et d’anciens joueurs arrivaient à comprendre la logique de Raymond Domenech, en 2014, la volonté de préparer l’Euro 2016 avec une équipe jeune en construction autour de jeunes talents prometteurs rappelle les choix d’Aimé Jacquet lors de l’Euro 1996 pour préparer 1998. – Être distinctif. Si le bus de Knysna ou encore la demande en mariage de Raymond Domenech en 2008 ont marqué négativement l’histoire des Bleus, peu d’éléments distinctifs à part l’exploit face à l’Ukraine n’ont encore pu singulariser l’équipe 2014. Une forte régularité, un style de jeu marquant, à l’image de l’Espagne et maintenant de l’Allemagne, ou encore la présence d’un « clutch player » (joueur décisif), comme ont pu l’être Platini et Zidane, font partie des défis pour 2016. n LIONEL MALTESE PROFESSEUR ASSOCIÉ KEDGE BUSINESS SCHOOL BLEUS : UNE RÉPUTATION EN RECONSTRUCTION «B on les gars, bravo ! Vous avez tous porté très haut les couleurs du club pendant ce Mondial. (Pleurs.) Mais, maintenant, on revient aux choses sérieuses. Fini les scores fleuves, en face c’est du costaud. Reims, Bastia, Évian-TG, ce sera serré, ne vous attendez pas à gagner 7-1. (Pleurs.) Fini les hymnes en mondovision, le pays qui pousse, les top-modèles dans les tribunes... C’est retour à l’ordinaire, c’est Chantal au Roudourou, c’est “Paga” sur le bord du terrain, faudra être forts. (Sanglots.) Blaise, tu peux arrêter de courir quand je parle, s’il te plaît ? Merci. Les gars, on va être attendus sur tous les terrains... (Quinte de toux.) Qui tousse ? Ibra, ça va ? Pourquoi tu tousses ? Tu as pris froid ? Va voir le docteur, il va te faire un mot. Tu veux rentrer te soigner une semaine au pays ? Qu’est-ce qu’il y a mon “Zlatanou” ? C’est Tahiti Bob qui t’embête ? Comment ça il te prend tous les ballons ? Et c’est qui Tahiti Bob ? C’est pas bien, David. Tu restes dans ta surface parce qu’il y a du boulot. (Larmes.). Tu laisses la balle à Zlatan, sinon on t’enlève les piles, on débranche la PlayStation... Blaise ! Qu’est-ce que je t’ai dit ? Assieds-toi ! Jean-Louis, j’en étais où ? Bon, l’objectif cette saison... “Pocho” ! On n’embête pas son capitaine, on arrête de rigoler maintenant, la colo c’est fini ! Jean- Louis ? Ah oui... donc objectif titre et Ligue des champions. Vous avez la chance d’être dans un club où tout le monde rêve d’évoluer, où les places sont chères. On vient encore de refuser deux joueurs. Thiago, comment s’appellent déjà les copains que tu voulais qu’on prenne ? Jô et Fred, oui. Mais je crois qu’on a ce qu’il faut en Brésiliens. Non, Thiago, c’est très chrétien CHRONIQUE Ici c’est... «Fini les scores fleuves, en face c’est du costaud. Reims, Bastia, Évian-TG, ce sera serré, ne vous attendez pas à gagner 7-1.» PAR PATRICK SOWDEN d’aider son prochain dans le besoin, c’est tout à ton honneur, mais on n’est pas non plus l’armée du Salut, pas la peine d’insister. Faut déjà qu’on trouve une place sur le terrain à David. Non, ne pleure pas, ça ne changera rien. Pocho, donne un mouchoir à ton capitaine. Un mouchoir, Pocho, pas ton slip ! Excuse-le Thiago, tu sais comment il est. Allez les gars, on est forts ! Ici, c’est... Blaise ! Assis ! (Pleurs, toux, rires emplissent le vestiaire.) Jean- Louis, vas-y parce que moi j’peux plus, j’peux plus... » n FF _ MARDI 15 JUILLET 2014 _ 21 FRANCK SÉGUIN LE VESTIAIRE DU PARIS-SG, LES COULISSES DE L’EXPLOIT.

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ÉCONOMIE

Outre son parcours honorable lors de la Coupe dumonde,l’équipe de France de football a non seulement réussi àredevenir populaire avec une nouvelle forme d’attachementauprès de ses fans, mais aussi à être à nouveau respectée parles autres nations. Si, sur le plan sportif, la France n’a pas encoreà son actif une victoire significative face à une très grandenation du football en compétition officielle, le match nul enEspagne et surtout l’exploit réalisé face à l’Ukraine au Stade deFrance pour se qualifier lors des barrages marquent le débutd’une nouvelle ère marketing pour les Bleus. Pour biencomprendre comment l’équipe de France et son encadrementont pu créer une nouvelle dynamique pour redevenir unemarque sportive respectée et attractive, l’analyse comparée dumanagement de son image entre 2010 et 2014 fait état d’unchangement radical de stratégie de communication de la partde la Fédération française de football.La réputation de l’équipe de France représente la réaction netteaffective ou émotionnelle, bonne oumauvaise, faible ou forte,des fans, des clients, des joueurs, des médias et du grand publicvis-à-vis des Bleus. Afin de construire une bonne réputation pourune équipe ou un club, cinq principes fondamentaux sont àintégrer dans leur stratégie de communication :– Être visible. Naturellement, l’équipe de France l’estextrêmement dans les médias avec la diffusion des matchesofficiels, mais aussi en termes de suivi journalistique lors desconférences de presse pour les annonces du sélectionneur.D’ailleurs, le match France-Allemagne a réalisé un picd’audience à 21 millions de téléspectateurs en fin de rencontre.– Être authentique. Si, en 2010, le lien avec l’histoire des Bleusavait été mis de côté, ce fut très différent sous l’ère Blanc, puiscelle de Deschamps. La symbolique même du sélectionneurDidier Deschamps, capitaine historique de l’équipe de France,ainsi que les différents sujets traités dans les médias, comme lenuméro spécial de L’Équipe Magazine sur la victoire lors del’Euro 1984 ou encore la rediffusion télé de la demi-finale France-Allemagne duMundial 1982, ont permis de promouvoir lesdifférentes épopées des Bleus sous un angle positif etintergénérationnel.– Être transparent. À la différence de 2010, les choix dusélectionneur concernant les joueurs et leur positionnementtactique ou encore les lieux de vie ou de préparation de l’équipeont toujours été explicités. Deschamps et son staff ont défenduleur projet humain et sportif avec le soutien continu du présidentde la FFF, dans les bons et mauvais moments.– Être cohérent. Si, en 2010, peu de journalistes, de consultants etd’anciens joueurs arrivaient à comprendre la logique deRaymond Domenech, en 2014, la volonté de préparer l’Euro 2016avec une équipe jeune en construction autour de jeunes talentsprometteurs rappelle les choix d’Aimé Jacquet lors de l’Euro 1996pour préparer 1998.– Être distinctif. Si le bus de Knysna ou encore la demande enmariage de Raymond Domenech en 2008 ont marquénégativement l’histoire des Bleus, peu d’éléments distinctifs àpart l’exploit face à l’Ukraine n’ont encore pu singulariserl’équipe 2014. Une forte régularité, un style de jeu marquant, àl’image de l’Espagne et maintenant de l’Allemagne, ou encore laprésence d’un « clutch player » (joueur décisif), comme ont pul’être Platini et Zidane, font partie des défis pour 2016. n

LIONELMALTESEPROFESSEUR ASSOCIÉ KEDGE BUSINESS SCHOOL

BLEUS: UNERÉPUTATION ENRECONSTRUCTION

«B on les gars, bravo ! Vous aveztous porté très haut les couleursdu club pendant ce Mondial.

(Pleurs.)Mais, maintenant, on revient auxchoses sérieuses. Fini les scores fleuves, enface c’est du costaud. Reims, Bastia, Évian-TG,ce sera serré, ne vous attendez pas à gagner7-1. (Pleurs.) Fini les hymnes en mondovision,le pays qui pousse, les top-modèles dans lestribunes... C’est retour à l’ordinaire, c’estChantal au Roudourou, c’est “Paga” sur lebord du terrain, faudra être forts. (Sanglots.)Blaise, tu peux arrêter de courir quand jeparle, s’il te plaît ? Merci. Les gars, on va êtreattendus sur tous les terrains... (Quinte de toux.)Qui tousse ? Ibra, ça va ? Pourquoi tu tousses ?Tu as pris froid ? Va voir le docteur, il va te faireun mot. Tu veux rentrer te soigner une semaineau pays ? Qu’est-ce qu’il y a mon “Zlatanou” ?C’est Tahiti Bob qui t’embête ? Comment ça il teprend tous les ballons ? Et c’est qui Tahiti Bob ?C’est pas bien, David. Tu restes dans ta surfaceparce qu’il y a du boulot. (Larmes.). Tu laissesla balle à Zlatan, sinon on t’enlève les piles, ondébranche la PlayStation... Blaise ! Qu’est-ceque je t’ai dit ? Assieds-toi ! Jean-Louis, j’enétais où ? Bon, l’objectif cette saison... “Pocho”!On n’embête pas son capitaine, on arrête derigoler maintenant, la colo c’est fini ! Jean-Louis ? Ah oui... donc objectif titre et Ligue deschampions. Vous avez la chance d’être dansun club où tout le monde rêve d’évoluer, où lesplaces sont chères. On vient encore de refuserdeux joueurs. Thiago, comment s’appellentdéjà les copains que tu voulais qu’on prenne ?Jô et Fred, oui. Mais je crois qu’on a ce qu’il fauten Brésiliens. Non, Thiago, c’est très chrétien

CHRONIQUE

Ici c’est...

«Fini les scoresfleuves, en facec’est du costaud.Reims, Bastia,Évian-TG, ce seraserré, ne vousattendez pas àgagner 7-1.»

PAR PATRICK SOWDEN

d’aider son prochain dans le besoin, c’est tout àton honneur, mais on n’est pas non plusl’armée du Salut, pas la peine d’insister. Fautdéjà qu’on trouve une place sur le terrain àDavid. Non, ne pleure pas, ça ne changerarien. Pocho, donne unmouchoir à toncapitaine. Unmouchoir, Pocho, pas ton slip !Excuse-le Thiago, tu sais comment il est. Allezles gars, on est forts ! Ici, c’est... Blaise ! Assis !(Pleurs, toux, rires emplissent le vestiaire.) Jean-Louis, vas-y parce que moi j’peux plus, j’peuxplus...» n

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LE VESTIAIRE DU PARIS-SG, LES COULISSES DE L’EXPLOIT.

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