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1 Introduction

La « maison Périer », se situant au numéro 573 de l'avenue Louise, a

accueilli un public hétérogène: des artistes, des amateurs d'art, de riches hommes

d'affaires (les deux dernières catégories allant souvent de pair), etc. Ses habitants,

Gilbert Périer et sa famille mettaient un point d'honneur à l'agencer au mieux. Y

étaient aussi exposées les œuvres d'art que ce patron de la société aérienne

nationale belge prenait plaisir à collectionner et à exhiber. Il a, par l'ouverture de

sa salle de réception à une vie artistique et mondaine, participé au rayonnement

des artistes de l'avant-garde de son temps.

Mais l'hôte de la maison était un artiste lui-même, l'on comprend donc les

sensibilités qu'il pouvait partager avec ses amis tels que Paul Delvaux ou René

Magritte. Au moment de la construction de son hôtel, il a demandé à Paul

Bonduelle de lui prévoir un atelier. Cependant, cette passion restait un loisir et sa

peinture une pratique intime. De ce fait, nous parlerons de cet espace de création

(l'atelier) à chaque fois que cela nous semble pertinent mais nous nous pencherons

plutôt sur les pièces de séjour, le hall de réception et la salle à manger, destinées à

recevoir ces assemblées variées, parce que ce sont elles qui ont été les plus

représentées et qui ont joué le rôle d'épicentre pour l'éclat de la maison, de ses

hôtes et de ses invités.

Pour commencer, nous mettrons en avant certains aspects significatifs de

la biographie de Gilbert Périer et de son père, Gaston Périer, qui a financé la

maison. Puis, nous verrons comment cet homme d'affaires a développé des liens

avec le monde artistique et quelles étaient les personnes conviées dans son hôtel.

Ensuite, nous considèrerons la maison de façon plus systématique: nous en

décrirons l'environnement, nous aborderons les points importants de la vie de son

concepteur, Paul Bonduelle, l'origine de la commande, l'aspect physique de la

bâtisse, du point de vue extérieur et intérieur et, enfin, son destin depuis la mort de

son premier propriétaire. Nous mettrons en lien tous ces points avec la

personnalité de Gilbert Périer et son activité dans l'univers artistique. Par la suite,

nous évoquerons les représentations de la maison en essayant de les comprendre

en regard de l'architecture et de la sociabilité de Périer.

Dans un second temps, nous mettrons en scène ces informations,

trouvées dans diverses archives de Bruxelles. Nous expliquerons d'abord le

principe du scénario avant de le rendre par écrit. Cet exercice servira de base aux

étudiants en architecture de l'Université libre de Bruxelles qui travailleront peut-

être sur la maison.

Enfin, nous conclurons le travail en soulignant les points importants que

celui-ci a soulevés, notamment concernant le mécénat et les rapports qui

pouvaient s'établir entre les grands patrons et les artistes. La bibliographie finale

fera montre des lieux investigués pour la réalisation de cette étude.

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2 Gaston et Gilbert Périer Deux hommes ont été impliqués dans la construction du numéro 573 de

l'avenue Louise à Bruxelles : Gaston Périer et son fils, Gilbert. Nous allons

détailler la biographie de ces deux hommes puis nous essayerons d'établir leurs

liens nombreux avec les arts et, par là, leur sociabilité, en nous concentrant plus

particulièrement sur Gilbert Périer, puisque Gaston n'a finalement jamais habité la

maison en question. 2.1 Biographies

Gaston Périer est né à La Haye le 30 juin 1875. Il est issu d'une famille

bourgeoise : son père, Odilon Périer était un avocat, bâtonnier au barreau de

Termonde et sa mère, Wilhelmine Boots était la fille de Cornelis Boots,

bourgmestre d'Amsterdam et ministre hollandais de la Justice.1 Il suit les traces de

son père puisqu'il fait le droit à l'Université libre de Bruxelles et devient stagiaire

chez deux grands avocats de l'époque : Jules Bara et Auguste Beernaert.2

En 1900, il épouse Jeanne Thys, fille du général Albert Thys, lui-même

une personne importante de la grande bourgeoisie belge.3 Ce dernier était le

fondateur de nombreuses entreprises coloniales et il introduisit son beau-fils dans

ce milieu. Gaston Périer arrêta donc son activité d'avocat pour se consacrer aux

affaires coloniales, plus particulièrement au sein d'entreprises commerciales et

dans le domaine bancaire (surtout la Banque d'Outremer). Petit à petit, il entre

dans le comité d'organisation de plusieurs d'entre elles et en assure même parfois

la présidence.4 Dans le cadre de ces fonctions, il effectue différents voyages vers

le continent africain. Il s'est notamment rendu au Congo en 1909 et en 1925,

comme en atteste la presse de l'époque. On l'y désigne d'ailleurs comme « un des

Belges les plus considérablement intéressés dans les affaires congolaises. »5 En

cette qualité, il a été l'organisateur de la section belge de l'exposition coloniale

internationale à Paris en 1931, où l'art et la littérature « nègres » ont tenu une

place prépondérante.6

Sur le plan personnel, le premier fils du couple, Odilon-Jean Périer est né

1 Comme le montre la généalogie de la famille Périer : Belgique, Bruxelles, Archives générales

du Royaume, Société générale de Belgique. Finoutremer, I384-23, « Généalogie de la famille

Périer ».

2 Serge Jaumain, Ginette Kurgan-Van Hentenrijk et Valérie Montens (éds.), Dictionnaire des

patrons en Belgique. Les hommes, les entreprises, les réseaux, Bruxelles, De Boeck & Larcier,

1996, p.502.

3 Erik Buyst et Ginette Kurgan, Cent grands patrons du XXe siècle en Belgique, Bruxelles, Alain

Renier & Cie, 1999, pp.200-201.

4 Serge Jaumain et alii (éds.), Op. Cit., p.503.

5 « Elisabethville – Kinshasa via Stanley ville », L'Avenir colonial belge, 23 avril 1925, p.1.

6 Ministère des colonies, Catalogue d'exposition de la section belge à l'exposition coloniale

internationale de Paris, Paris, 1931, Bruxelles, La Propagande commerciale, 1931, pp.14-21.

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en 1901, un an avant son frère Gilbert Périer. Les deux jeunes hommes ont reçu

une sensibilisation littéraire de la part de leur mère, si bien que l'aîné devint poète

et critique littéraire reconnu.7 Jeanne Thys meurt en 1921. Son époux se remarie

en 1925 avec Lucie Graux. De leur union naîtront trois filles : Françoise, Anne et

Claire.8 Gaston Périer meurt le 12 mars 1946, après avoir été emprisonné pendant

l'occupation allemande.

Donc, Gilbert Périer est né en 1902, le 10 octobre plus précisément.

Après une enfance bercée par la fibre littéraire de sa mère, il fait ses études à

l'Athénée royal d'Ixelles et poursuit le chemin de ses ancêtres en sortant docteur

en droit de l'Université libre de Bruxelles en 1926. D'abord stagiaire chez Paul-

Émile Janson, il est engagé comme secrétaire personnel de ce ministre de la

justice quelque temps plus tard.9

Pourtant, comme son père, il quitte l'exercice juridique en 1930 pour

connaître une ascension fulgurante au sein de la compagnie aérienne belge, la

Sabena : « c'est le début de sa carrière : le petit-fils du « pionnier du rail » au

Congo, va devenir « pionnier du ciel » ».10

Il faut préciser que Gaston Périer était

un des administrateurs fondateurs de la Sabena.11

Pendant la Seconde Guerre

mondiale, il développa d'ailleurs des liens aériens internes en Afrique et participa

par là au développement de la colonie et à ses bénéfices pour la métropole. Il

accomplit aussi, pendant cette période, des missions en Amérique et en

Angleterre. Après la guerre, en 1947, il est appelé à prendre la présidence du

conseil d'administration de la Sabena.12

En tant que président de la société

aérienne, il reçut de nombreux prix comme le Commandant de l'Ordre de Léopold

et de l'Ordre de Léopold II, il siégea à l'Académie Royale des Sciences, et présida

le Cercle royal africain, notamment.13

Cet homme d'affaires était aussi fort proche de son frère aîné Odilon-Jean

qu'il perdit très jeune, en 1928. « Jean exerce un grand ascendant sur son frère.

Gilbert apprendra de lui l'art d'écrire et de s'exprimer tantôt avec émotion, tantôt

avec une rigueur cartésienne, mais toujours en un langage choisi. »14

Au niveau familial, Gilbert Périer épousa, en 1926, Marie Noblet. Ils

eurent trois enfants : Marie, Jeanne et Étienne. Après son divorce, il épousa en

deuxième noce Simone Nassé, à New York, en 1945.15

C'est avec cette dernière

qu'il terminera sa vie, le 13 mars 1968, non sans laisser derrière lui la maison que

7 Madeleine Defrenne, Odilon-Jean Périer, Bruxelles, Palais des Académies, p.13.

8 Bruxelles, Archives de la Ville de Bruxelles, Registre de la population, folio 158.

9 Serge Jaumain et alii (éds.), Op. Cit., p.504.

10 Edgard Van Der Straeten, « Gilbert Périer (10 octobre 1902-13 mars 1968) », extrait du

Bulletin des Séances, Bruxelles, Académie Royale des Sciences d'Outre-mer, 1969, p.98.

11 Guy Vanthemsche, La Sabena. L'aviation commerciale belge. 1923-2001. Des origines au

crash, Bruxelles, De Boeck & Larcier, 2002, p.85.

12 « Belgique », France-Aviation, octobre 1955, n°11, p.7, version numérisée sur Gallica,

gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6554100c/f1.image.r=, dernière consultation le 18 janvier 2014.

13 Erik Buyst et Ginette Kurgan, Op. Cit., p.171 et p.264.

14 Edgard Van Der Straeten, Loc. Cit., p.97.

15 Belgique, Bruxelles, Archives de la Ville de Bruxelles, Registre de la population, folio 158.

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nous allons étudier dans ce travail sous la garde de sa femme, laissée veuve.16

Force est de constater que cet homme, issu d'un milieu très aisé, avait

acquis toute une reconnaissance dans les milieux coloniaux et aussi mondains, ce

qui peut expliquer le choix de la localisation de son habitation, l'avenue Louise,

avec les discussions politiques et économiques qu'on peut imaginer y avoir été

tenues (dans des dîners ou réunions éventuelles, etc.) Toutefois, tout comme le

reste de sa famille, il développa tout au long de sa vie diverses activités, au point

que Norge écrivit à son sujet : « Homme à facettes, sans aucun doute. (Les

diamants en ont aussi). Et toute la grâce qu'il détenait par essence, il s'ingéniait à

la celer, fût-ce à ses amis. Homme aux dons si divers qu'ils sembleraient se

contredire. On en suit le cheminement parmi tant de méandres mais qui tous

débouchent sur un paysage de tendresse, de subtilité, d'humanité, non sans cette

pointe d'humour blessé qui les attise. »17

Il nous faut, en conséquence, comprendre

maintenant quels étaient les liens qui unissaient le monde artistique, Gilbert Périer

et sa maison de l'avenue Louise.

2.2 Les liens avec le monde artistique et la sociabilité de la maison

Le goût des arts est une affaire de famille chez les Périer. En effet,

Gaston, déjà, faisait partie de nombreuses associations à but non lucratif et qui

touchaient aux questions artistiques : notamment le Dispensaire des Artistes, le

Comité de patronage des Beaux-Arts de Belgique, la société des Amis des Musées

Royaux de l'État à Bruxelles, la Société auxiliaire des Expositions du Palais des

Beaux-Arts à Bruxelles, etc.18

Chacune de ces associations impliquait un lien

étroit avec d'autres amateurs d'art et surtout avec des artistes et contribuait, par

œuvre de mécénat, au développement des arts. Toutefois, c'est surtout en tant que

collectionneur que Gaston Périer a collaboré à la vie du monde artistique. La

« collection Gaston Périer-Thys »19

a compté de nombreuses œuvres.

Effectivement, dans le document concernant les possessions de Gaston Périer et

son héritage, les œuvres d'art occupent une place importante : plusieurs tableaux

(d'Alfred Stevens, de Constant Permeke ou d'Henri de Braekeleer par exemple),

des statues ou masques africains, des objets d'art asiatique, etc. Cette collection

prenait, visiblement, place dans l'ensemble de sa maison, du sous-sol aux

chambres.20

Il a pu transmettre cette habitude à son fils, tout comme il lui a légué

16 Lettre de Simone Périer à Émilie Noulet, Bruxelles, le 27 mars 1968. Bruxelles, Archives et

Musée de la Littérature, ML5035/4432, un feuillet, quatre pages.

17 Dans Gilbert Périer, Études, notes et conférences, poèmes et chansons, peinture, Bruxelles,

André de Rache, 1969, p.147.

18 Serge Jaumain et alii (éds.), Op. Cit., p.504.

19 Piérens-Gevaert, « L'art belge ancien et moderne », Gazette des Beaux-Arts, Paris, 1923,

premier semestre, p.337, version numérisée sur Gallica,

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb343486585/date.r=%22gaston+p%C3%A9rier%22.langFR,

dernière consultation le 18 janvier 2014.

20 Belgique, Bruxelles, Archives générales du Royaume, Société générale de Belgique.

Finoutremer, I384-55, « possessions de Gaston Périer », 41 p.

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plusieurs objets, dont des œuvres d'art (Les Fortifs d'André Lhote ou La danseuse

espagnole de Kees van Dongen par exemple).21

Gilbert Périer a donc hérité d'un goût pour la collection qui se déclinait

tout au long des pièces « ouvertes » de son hôtel du Square du Bois au bout de

l'avenue Louise. En effet, dans Les Beaux-Arts, il est question d'une gravure de

Picasso, de toiles de Max Ernst et de Gust de Smet et d'une sculpture de Zadkine

dans le salon.22

Les œuvres des artistes avaient donc une place dans la demeure du

président de la Sabena et étaient montrées aux différents visiteurs. Ses préférences

allaient surtout aux expressionnistes flamands et aux surréalistes23

, ce dont

témoignent les indications des tableaux achetés par Gilbert Périer dans le

catalogue de vente du Centaure, des toiles de Gustave de Smet et Fritz Van den

Berghe, notamment.24

Il défendait l'art moderne. Parmi tous ces artistes, deux ont

plus particulièrement été aidés, dans leur carrière, par les gestes de mécénat de

Gilbert Périer : René Magritte et Paul Delvaux.

René Magritte a trouvé, dans la famille Périer, une source de financement

considérable. Gilbert Périer, sa femme Simone, mais aussi son fils Étienne et son

frère Odilon-Jean Périer ont compté dans leurs possessions des planches du

peintre surréaliste.25

C'est aussi par l'intermédiaire de son patron amateur d'art que

la Sabena a demandé à Magritte, déjà très reconnu en 1965, de réaliser leur

symbole, L'oiseau du ciel, un vrai tableau et non pas une simple image

publicitaire.26

Il semblerait que les deux hommes aient construit toute une

relation27

. Ce qui est certain, c'est qu'un grand respect habitait Gilbert Périer pour

René Magritte, il écrit d'ailleurs à son propos : « Des neuf millions de Belges

d'aujourd'hui, René Magritte est l'un des seuls dont on parlera encore dans deux

cents ans. »28

Paul Delvaux, pour sa part, a également vu compter certaines de ses

œuvres dans la collection de Gilbert Périer. L'histoire du mécénat qu'il a apporté à

cet artiste est intéressante. En effet, à la base, Gilbert Périer voulait offrir, au nom

de la Sabena, un prix de sculpture pour décorer les bâtiments de la société. Cette

initiative a débouché sur un échec, les finalistes n'ayant pu être départagés. De ce

fait, Gilbert Périer a décidé qu'à défaut de pouvoir organiser un mécénat pour sa

21 Belgique, Bruxelles, Archives générales du Royaume, Société générale de Belgique.

Finoutremer, I384-55, « Héritage de Gaston Périer », n.p.

22 J.B.R., « L'hôtel de Madame Gilbert Périer », Les Beaux-Arts, 5ème année, n°133, 5 octobre

1935, p.25.

23 Émile Langui dans Gilbert Périer, Op. Cit., p.173.

24 Jean Milo, Vie et survie du « Centaure », s.l., Éditions nationales d'art, s.d., pp.93-172.

25 David Sylvester (éd.), René Magritte : catalogue raisonné, Paris, Flammarion, 1992, quatre

premiers volumes.

26 Georges Roque, Ceci n'est pas un Magritte, Paris, Flammarion, 1983, p.113.

27 En témoigne l'existence d'une correspondance qui n'a malheureusement pas pu être retrouvée

mais évoquée dans David Sylvester (éd.), Op. Cit., quatre premiers volumes.

28 Rétrospective Magritte (1898-1967) dans les collections privées. 20 janvier-27 mars,

Bruxelles, Galerie Isy Brachot, 1988, p.44.

7

société, il mettrait sur pied une démarche semblable pour lui.29

Il a fait appel à

Delvaux en 1954 pour réaliser des fresques monumentales dans le hall de

réception de son hôtel. Le projet qui était destiné à se réaliser en six mois dura

finalement deux ans, jusqu'en 1956.30

Cette entreprise exceptionnelle, que nous

détaillerons plus loin, démontre une ouverture de la maison à une activité

artistique et aux amis artistes du propriétaire. C'est d'abord à Émile Salkin que

Gilbert Périer a parlé du projet, qui le proposa à Delvaux non sans l'aider dans sa

tâche.31

Les deux collaborateurs étaient en fait des amis de l'hôte, que Delvaux

qualifia d' « aimable, patient, accueillant autant qu'il se peut ».32

Dans cette

entreprise, l'on comprend que l'intérêt était partagé : d'une part, Paul Delvaux

montrait sa production à un nombre considérable de personnes venues visiter

l'homme d'affaires, potentiellement des mécènes, et d'autre part, Périer

transformait la pièce centrale de sa maison en une gigantesque œuvre d'art, et

exhibait par là son statut d'amateur d'art et de collectionneur. La maison Périer

était donc un vecteur d'images pour les deux hommes.

Tout ceci insiste sur l'accueil particulier réservé aux artistes. Selon

Philippe Farcy, se tenait au 573 de l'avenue Louise une « sorte de salon littéraire et

artistique »33

À la fois en exposant les œuvres au regard de ses visiteurs et en

accueillant les artistes chez lui, Gilbert Périer témoigne d'un goût artistique

particulier et moderne qui est également à mettre en lien avec sa propre activité

d'artiste. C'est en effet sous le pseudonyme de Clément Clou, non sans une pointe

d'humour, que l'homme d'affaires signe ses toiles. Il est surtout un peintre amateur,

qui s'est fait construire un atelier dans son hôtel pour exercer sa passion. Nous

verrons d'ailleurs que l'atelier est plutôt de l'ordre de l'intime. D'un point de vue

stylistique, ses peintures étaient définies par « un désir d'ordre, de clarté et

d'équilibre qui s'apparente au cubisme à la manière de Jacques Villon. »34

et se

situaient entre le post-expressionnisme et le surréalisme, sans pour autant être des

copies des maîtres qu'il collectionnait.35

Lorsque Gilbert Périer fait son

autoportrait, il se peint en tant que collectionneur, et non pas en tant que peintre,

faisant ressortir ses goûts pour l'art africain, se plaçant devant un masque et une

statuette, au sujet desquels il écrivit à Gaston-Denys Périer, ancien ministre des

colonies (fig. 1).36

L'Afrique coloniale est aussi le sujet de la toile Le grand

29 Gilbert Périer, « Pourquoi une compagnie aérienne offre un prix de sculpture ? », Revue

Sabena, Automne 1955, n.p.

30 Jérôme Peignot, « Delvaux illusionniste », Connaissance des Arts, 222, 1970, p.34.

31 Laurent-Louis Sosset, « Chez Gilbert Périer, les fresques de Delvaux traduisent sa nostalgie de

la Rome antique », Les Beaux-Arts, 8 juin 1956, n°736, p.1.

32 Ibid., p.5.

33 Philippe Farcy, « D'admirables fresques sans protection », La Libre Belgique, 13 juillet 1995,

p.7.

34 Émile Langui dans Gilbert Périer, Op. Cit., p.147.

35 Émile Langui, « Les peintures murales de Paul Delvaux chez Gilbert Périer à Bruxelles »,

Quadrum, 1, mai 1956, p.134.

36 Lettre de Gilbert Périer à Gaston-Denys Périer, Bruxelles, 8 mars 1951, un folio, quatre pages.

Bruxelles, Archives et Musée de la Littérature, ML709.

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général Itumba. Pour autant, il n'exerce pas son art de façon « confidentielle »37

uniquement, puisqu'il expose ses peintures du trois au quinze mars 1951 lors d'une

exposition intitulée, sans doute avec le sens figuré que ce nom laisse supposer,

« La palette du dimanche ».38

Cet événement semble pourtant ne s'être déroulé

qu'une fois. Émile Langui met en avant la particularité de ce peintre amateur,

grand connaisseur et amateur d'art, à l'encontre de ce que Gilbert Périer, modeste,

pensait de lui-même : « Et pourtant, il était bien autre chose qu'un peintre du

dimanche, qu'un naïf ou qu'un maître de la réalité populaire. Ou, si vous voulez, il

était tout cela, dans la meilleure acception du mot, un authentique peintre, avec un

sens profond de l'histoire de l'art en général et de l'aventure contemporaine en

particulier. »39

Le petit chien qu'il peint dans son salon, en l'introduisant dans la

fresque de Delvaux, témoigne enfin de cette connivence entre les peintres et cet

homme d'affaires.

De plus, Gilbert Périer était en contact étroit avec le monde artistique

grâce à son appartenance à plusieurs cercles, ce qui entraîne une sociabilité

importante. Tout d'abord, il y a la galerie Le Centaure, au centre du marché de

l'avant-garde de l'époque et dont le siège se situait au numéro 62 de l'avenue

Louise, dans un immeuble loué.40

Ce groupe, dans lequel étaient impliquées de

grandes figures de l'époque (fin des années 1920) comme Paul-Gustave Van

Hecke, collectionneur et proche des artistes, André de Ridder ou encore Luc et

Paul Haesaerts, était lié par contrat avec de nombreux artistes, parmi lesquels l'on

retrouve ceux admirés par Gilbert Périer (Magritte, Constant Permeke ou Frits

Van Den Berghe, par exemple).41

C'est d'ailleurs pour cela qu'il figure parmi les

acheteurs de la vente des collections du Centaure en 1932.42

Plus qu'une galerie

ou une revue, Le Centaure constituait un bastion de défense pour l'art moderne, à

l'encontre d'un conservatisme ambiant. Aux origines de cette assemblée, l'on

retrouve les deux revues d'avant-garde Sélection et Variétés, soutenues également

par Gilbert Périer.43

Il paraît donc évident que ces lieux rassemblaient non

seulement des artistes mais aussi des amateurs d'art et qu'ils ont permis de

nombreuses rencontres vraisemblablement à la source d'invitations dans la maison

du patron de la Sabena.

Gilbert Périer a également fait partie du conseil d'administration de L'Art

vivant, en compagnie de Paul-Gustave Van Hecke, d'André de Ridder, d'Edmond

Odry et d'Alex Salkin-Massé notamment.44

Ce groupement d'artistes et d'amateurs

s'est créé le 31 juillet 1930 dans le but de défendre l'art contemporain. Les artistes

sont exposés et leurs droits défendus dans une volonté politique. Le grand nombre

37 Ibid.

38 Ibid.

39 Émile Langui, dans Gilbert Périer, Op. Cit., p.173.

40 Jean Milo, Op. Cit., p.39.

41 Ibid., p.63.

42 Ibid., p.92.

43 Émile Langui, dans Gilbert Périer, Op. Cit., p.173.

44 L'Art Vivant (A.S.B.L.), Première exposition l'Art Vivant en Belgique 1910-1930, Bruxelles,

Galerie Georges Giroux, du 17 janvier au 28 janvier 1931, p.1.

9

d'amateurs fortunés (dont Périer) participant à cette initiative a permis de financer

les peintres et sculpteurs en ces temps de crise du début des années 1930.45

Mais L'Art Vivant n'a pu exister que grâce à ses liens étroits avec la

Société des Expositions du Palais des Beaux-Arts, petit groupe de défense de l'art

moderne auquel Gilbert Périer prit part.46

Il fut d'ailleurs appelé plus tard, en

1956, à devenir administrateur du Palais des Beaux-Arts. Là encore, il se trouve

au côté d'Émile Langui, déjà présent dans d'autres cercles. Il restera dans le comité

jusqu'à sa mort, en 1968.47

Luc et Paul Haesaerts, Paul-Gustave Van Hecke, Émile Langui, André de

Ridder, Édouard Léon Théodore Mesens et d'autres sont autant de noms qui

reviennent comme étant des amateurs d'art moderne, aux côtés de Gilbert Périer et

que l'on peut aisément imaginer tenir réunion chez lui. Certaines de ces personnes

sont d'ailleurs reprises par Philippe Farcy comme ayant participé au salon

littéraire et artistique de la maison du Square du Bois.48

En fait, Périer était un

hôte très accueillant. Ses collaborateurs de la Sabena étaient des amis et devaient

très certainement venir régulièrement chez lui49

mais le monde artistique était

aussi présent : « Tous les amis, artistes, littérateurs, esthètes, hommes de sport ou

d'affaires aiment l'esprit de cette accueillante et spirituelle demeure où la bonne

grâce de leurs hôtes et le charme des conversations entretiennent de longs

moments d'amitié. »50

Le hall de réception de la maison a donc sans doute

participé à la défense de l'art moderne qui tenait tant à ce collectionneur-artiste,

par la constitution en son sein d'une sociabilité tant artistique que mondaine et

financière.

La situation de l'Avenue Louise, permise par la fortune de l'habitant (et

surtout de son père, comme nous l'aborderons plus loin), participe à un

rayonnement plus large et plus intéressant pour les artistes, parce que touchant des

personnes susceptibles d'acheter des œuvres. Dans les domiciles connus de la

famille Périer, le double intérêt pour les affaires financières et pour l'art est aussi

visible. En effet, avant d'habiter le 573 de l'avenue Louise, Gilbert habitait avec

son père au 50 de la rue Defacqz, maison qu'a fait construire et où a habité le

peintre René Janssens et qui contenait également un atelier.51

L'on comprend donc

que ce n'est pas la première fois que le patron de la Sabena possède un atelier

dans sa maison. Après cela, Gilbert a habité à La Hulpe, sur la chaussée de

45 Virginie Devillez, Le Retour à l'ordre. Art et politique en Belgique 1918-1945, Bruxelles,

Éditions Labor, 2002, p.45 et p.49.

46 Émile Langui, « Max Janlet, un mécène authentique », dans Hommage à Max Janlet

(exposition tenue à Bruxelles, Musée d'Ixelles, du 14 avril au 25 juin 1978), Bruxelles, 1978,

p.214.

47 Procès-verbaux des assemblées générales et des conseils d'administration des années

1956-1960, 104 p. et Palais des Beaux-Arts. Conseil d'administration, du 3 décembre 1968, n.p.

48 Philippe Farcy, Loc. Cit., p.7

49 Willem Deswarte, « Le président », Revue Sabena, Automne 1955, n.p.

50 J.B.R, Loc. Cit., p.25.

51 Belgique, Bruxelles, Archives de la commune d'Ixelles, urbanisme, dossier "50 rue Defacqz".

10

Bruxelles52

, avant de déménager, vers 1930, jusqu'à la fin de sa vie au 573 de

l'avenue Louise. La famille, par la personne de Gaston Périer, possédait de

nombreuses maisons (dont trois sur l'avenue Louise).53

Ils avaient, en outre, une

résidence secondaire dans un quartier mondain, à Knokke-le-Zoute, où ils

accueillaient aussi les artistes, leur offrant par là une visibilité au sein de cette

sociabilité de villégiature. Ce fut le cas pour Delvaux notamment.54

3 Le 573 de l'Avenue Louise à Bruxelles

3.1 L'environnement de la maison : l'avenue Louise et le square du Bois

L'hôtel se situe dans la prolongation de l'avenue Louise, route

monumentale construite dans le milieu du XIXe

siècle pour relier la ville au Bois

de la Cambre.55

À l'époque dont nous traitons, l'avenue était avant tout un lieu

prestigieux de promenades mondaines, occupé par des arbres, des jardins, des

sculptures, des bancs, etc.56

Dans cette logique, la construction du square du Bois

(ou square Tasson au départ) permettait à ses habitants de profiter d'une intrusion

dans la nature de la forêt tout en bénéficiant d'un accès rapide à la ville. Cette

partie de l'avenue réservée à quelques privilégiés, puisque privative dès sa

construction, vers 191057

, est postérieure à la construction de l'avenue, comme en

témoignent les cartes postales de la fin du XIXe siècle.

58 À la base, l'avenue

Louise a été conçue pour fournir à la bourgeoisie bruxelloise un lieu où habiter et

où développer des modes de vie nouveaux. De grandes maisons luxueuses y ont

alors été érigées, surtout jusqu'en 1940, comme l'hôtel Solvay par exemple.59

À

l'époque où Gilbert Périer y résidait, l'avenue comptait parmi ses habitants

nombreuses grandes fortunes de la capitale : Louis Camu ou Arthur Bemelmans

notamment.60

Un changement s'opéra toutefois à partir de 1935, laissant la place à

52 Belgique, Bruxelles, Archives de la Ville de Bruxelles, Registre de la population, folio 158.

53 Belgique, Bruxelles, Archives générales du Royaume, Société générale de Belgique.

Finoutremer, I384-55, « héritage de Gaston Périer ».

54 Serge Jaumain et alii, Op. Cit., p. 505.

55 Antoine Chabert, « Aux origines de l'avenue Louise qui doit son nom à une Reine et une

Princesse », dans Léon Geerts (dir.), L'histoire illustrée du Haut de la Ville, Bruxelles, Les

Publications de Bruxelles, 1972, p.49.

56 Caroline Mierop, L'avenue Louise, Bruxelles, Ministère de la Région de Bruxelles-Capitale,

Service des Monuments et sites, s.d., pp.8-9.

57 Inventaire du patrimoine architectural, Bruxelles, extensions Sud, L'avenue Louise et les rues

adjacentes. Considérations historiques, urbanistiques et architecturales, p.9, version pdf

http://www.irismonument.be/pdf/fr/1001-louise_bruxelles-extensions_sud.pdf, consulté le 23

novembre 2013.

58 Belgique, Bruxelles, Bibliothèque du Palais des Académies, fonds Belfius, « Cartes postales de

l'avenue Louise. Vue du bois ».

59 Paul Aron, Notes prises à la conférence donnée à la journée « Textyles », Bruxelles, Univesité

libre de Bruxelles, le 25 octobre 2013.

60 Xavier Duquenne, L'Avenue Louise à Bruxelles, Bruxelles, Xavier Duquenne, 2007, p.216.

11

des bureaux d'entreprises et à de grands immeubles modernes.61

Les artistes, n'ayant pas les moyens d'occuper une maison dans l'avenue,

s'installent dans les rues alentour. Effectivement, l'avenue leur offrait un

rayonnement important, tant par les galeries d'art que par les esthètes fortunés qui

réservaient aux œuvres une place en vue.62

En s'installant avenue Louise, les

Périer63

se rapprochent donc de ces activités de soutien. Le siège de la galerie du

Centaure, à laquelle a participé Gilbert Périer, se trouvait dans cette partie du haut

de la ville. L'habitant du 573 a également fait partie du conseil d'administration du

Cercle de l'Avenue, dont le siège se situait au 185 de l'avenue Louise et qui se

doublait de la « Maison d'Art », où étaient accueillis de nombreux artistes pour

des expositions ou des concerts, comme en attestent les cartons d'invitation.64

C'est lui qui a contacté Georges Marlow, son ami par ailleurs, pour lui demander

d'en assurer la présidence.65

La maison du 573 se trouve dans la partie prolongée du square du Bois

(ou square au Bois) dans lequel la famille Périer possédait, en tout, trois hôtels,

fait exceptionnel puisque les autres propriétaires ne possédaient qu'une parcelle

chacun.66

Les habitants de toutes ces maisons mitoyennes jouissaient d'un statut

qui leur assurait une situation financière aisée : il s'agissait d'avocats, de rentiers

et d'industriels.67

Certains, comme Pierre Bautier, directeur du musée des beaux-

arts étaient également des amateurs d'art.68

Ce sont deux architectes qui firent la

majorité des maisons de l'enclos69

: tout d'abord, Léon Govaerts exécuta la grille

protégeant cet espace privé, l'entrée et les premières maisons. Ensuite, ce dernier

« se désintéressant de l'affaire »70

, Paul Bonduelle prit le relais en construisant

61 Ibid., p.195.

62 Notes prises au cours d' « histoire comparée des arts en Belgique », Université libre de

Bruxelles, année académique 2013-2014.

63 L'avenue était centrale dans la vie de la famille. Odilon-Jean Périer en a d'ailleurs fait le sujet

de plusieurs poèmes.

64 Notamme Lilli Krauss. Belgique, Bruxelles, Archives de la ville de Bruxelles, Fonds

Fauconnier, Carton 71, « Cercle de l'Avenue A.S.B.L. ».

65 Lettre de Gilbert Périer à Georges Marlow, Bruxelles, le 15 décembre 1932, une page.

Bruxelles, Archives et Musée de la Littérature, ML5816/90.

66 Belgique, Bruxelles, Archives générales du royaume, Société générale de Belgique.

Finoutremer, « Plan du square du Bois », I384-36.

67 Par exemple, dans l'almanach de 1935 : Almanach du commerce et de l'industrie : Bruxelles et

sa banlieue, Bruxelles, 1935, volume « rues », p.453 et celui de 1968 : Almanach du commerce

et de l'industrie : Bruxellles et sa banlieue, Bruxelles, 1968, volume « rues », p.496, versions

numérisées consultées sur

http://www.bruxelles.be/artdet.cfm?id=6332&PAGEID=5070&startrow=81&foldername=AC_

1935#, dernière consultation le 20 janvier 2014.

68 Annette Neve, Paul Bonduelle 1877-1955, mémoire présenté sous la direction de Pierre Le

Nain, Bruxelles, Institut supérieur d'Architecture de l'état - La Cambre, Année académique

1983-1984, p.124.

69 Inventaire du patrimoine architectural, Bruxelles, extensions Sud, Op. Cit., p.23.

70 Lettre de Bautier à Périer, Bruxelles, le 9 avril 1926. Bruxelles, Archives générales du

royaume, Société générale de Belgique. Finoutremer, I384-36.

12

quelques hôtels dans la prolongation de l'enclave, dont celui de Gilbert Périer. Ces

deux hommes ont fait du clos du bois une démonstration du style architectural

« Beaux-Arts » inspiré des grands styles français du XVIIIe siècle. Les hôtels

construits là se caractérisent par un grand luxe et une architecture intérieure

centrée autour d'un escalier monumental et dirigeant les « belles » pièces vers la

façade arrière.71 Même si la résidence de Gilbert Périer correspond à certaines de

ces caractéristiques, nous verrons qu'elle fait tout de même figure d'exception dans

l'esthétique de son architecte.

3.2 L'architecte

Alphonse-Léopold-Jules Bonduelle est né à Tournai le 15 juin 1877. Sa

mère, Juliette-Louise Debock est française et c'est sans doute pour cela qu'il se

tourne vers l'Académie des beaux-arts de Lille pour commencer ses études

artistiques.72

Il termine sa formation à Paris, à l'école Grasset puis à l'École

nationale des Beaux-Arts et, dans le même temps, effectue des études

d'architecture à l'Académie des Beaux-Arts de Bruxelles qu'il termine en 1899.73

Il a également effectué des études en arts décoratifs.74

Il parachève sa formation

grâce aux stages qu'il exécute chez Albert Dumont et Ernest Acker.75

Il est lauréat du prix Godecharle en 1900 et part, dans ce contexte, en

voyage d'études en France et en Italie. Il en retirera une grande admiration pour

les modèles français. Il réalise ses premières commandes en collaboration avec

Charles Gilson, qui restera son associé jusqu'en 1914 et ensemble, ils exécutent,

en 1907, la brasserie Whitbread à Molenbeek.76

Cette même année, il remporte le

concours ouvert pour la construction d'un hôtel communal à Laeken.77

Cette

récompense lui permettra d'accéder à la Société Centrale d'Architecture de

Bruxelles. Il en assurera d'ailleurs la présidence par deux fois : en 1919 et en 1930

et en restera un membre important. Entretemps, de 1925 à 1928, il prend en

charge la direction de L'Émulation, revue dans laquelle il écrit de nombreux

articles et expose ses convictions architecturales. Auparavant, pendant la Grande

Guerre, il avait organisé les Ateliers libres d'architecture où il forma nombreux

jeunes architectes.78

Dans les années 1930, il réalisa plusieurs projets : il fonda un

71 Inventaire du patrimoine architectural, Bruxelles, extensions Sud, Op. Cit., p.23.

72 Annette Neve, Op. Cit., p.14.

73 V.-G. Martiny, Notice sur Paul Bonduelle, extrait de l'Annuaire 1974, Bruxelles, Palais des

Académies, 1974, pp.1-2.

74 Lettre de Paul Bonduelle à l'Académie royale de Belgique, Bruxelles, 7 juin 1949. Bruxelles,

Archives du Palais des Académies, 14535, une page.

75 V.-G. Martiny, Op. Cit., p.2.

76 Guide de l'architecture 1920-1930 à Bruxelles, Bruxelles, Archives d'Architecture moderne,

2001, p.74.

77 Georges De Hens et V.-G. Martiny (dir.), Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles. Une

écore d'architecture, des tendances 1766-1991, Bruxelles, G. De Hens, 1992, p.86.

78 Benoît Mihail, « Paul Bonduelle », dans Anne Van Loo (dir.), Dictionnaire de l'architecture en

13

centre d'information générale en matière d'architecture, fut vice-président du

bureau Sécuritas mais surtout, en 1935, il fut chargé de concevoir le pavillon

belge à l'exposition universelle de Bruxelles.79

Dans l'immédiate après-guerre, il exécuta la reconstruction de la ville de

Tournai dont il est originaire. Il fut aussi chargé d'une chaire d'architecture à

l'Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles mais n'y restera que pour quelques

leçons et ne reprendra cette activité d'enseignant qu'en 1949.80

C'est à cette

période qu'il est devenu correspondant pour l'Académie royale de Belgique,

institution pour laquelle il écrivit plusieurs conférences.81

Comme dernier

honneur, on lui offrit la fonction d'architecte en chef pour la future exposition

universelle de Bruxelles de 1958 mais il mourut avant de pouvoir concevoir ses

plans, le 24 décembre 1954, dans sa maison de la rue des Minimes.82

Il fit don

d'une somme d'argent à l'Académie royale pour qu'elle crée un prix d'architecture,

projet qui lui tenait déjà à cœur de son vivant.83

Paul Bonduelle a réalisé plusieurs grands projets. Il fit tant des édifices

publics, comme le cinéma des Galeries ou l'école Sainte-Anne que des bâtiments

industriels, le siège du Soir ou l'extension des bureaux Solvay notamment.84

Une

de ses productions les plus étonnantes fut la réalisation, en 1909, alors qu'il était

encore jeune architecte, de la loge maçonnique de la rue de Laeken à Bruxelles,

dont la décoration égyptisante se démarque quelque peu des ses autres

productions.85

Grâce à ce projet, devenu franc-maçon, il rencontre la haute

bourgeoisie bruxelloise et se met à réaliser, dans les années 1910-1920, divers

hôtels pour ces clients prestigieux qui prennent la forme de villas, de châteaux ou

de grandes maisons.86

Il paraît naturel qu'il ait été sollicité pour édifier plusieurs

maisons dans le square Tasson vers les années 1910-1915. C'est d'ailleurs Pierre

Bautier, premier à avoir fait appel à Bonduelle dans l'enclave, qui a recommandé

son architecte aux Périer dans un souci de cohérence.87

Le choix de l'architecte

est, en conséquence, motivé par le goût de la haute société pour son esthétique.

Effectivement, Bonduelle étant conservateur, il a trouvé par là les faveurs de ce

public qui « un peu anachronique, est autant une intelligentsia progressiste,

intéressée aux avant-gardes modernes, collectionneuse... que solidement ancrée

Belgique de 1830 à nos jours, Anvers, Fonds Mercator, 2003, p.163.

79 Georges De Hens et V.-G. Martiny, Op. Cit, p.86.

80 V.-G. Martiny, Op. Cit., pp.7-8.

81 Belgique, Bruxelles, Archives du Palais des Académies, « Paul Bonduelle », « Bibliographie

académique », 14535.

82 V.-G. Martiny, Op. Cit., p.10.

83 Belgique, Bruxelles, Archives du Palais des Académies, « succession Bonduelle », 13568.

84 Guide de l'architecture 1920-1930 à Bruxelles, Bruxelles, Archives d'Architecture moderne,

2001, p.74.

85 Benoît Mihail, Loc. Cit., p.163.

86 Annette Neve, Op. Cit., p.22.

87 Lettre de Pierre Bautier à Gaston Périer, Bruxelles, 9 avril 1926. Bruxelles, Archives

générales du Royaume, Société générale de Belgique. Finoutremer, I384-36, une page.

14

dans les conventions de vie. »88

Cependant, la réalisation d'un atelier dans l'une de

ces grandes constructions semble aussi exceptionnelle que la duplicité de Gilbert

Périer, à la fois artiste et homme d'affaires.

Paul Bonduelle base son travail sur une esthétique classique, sur un

respect des traditions, comme le veut le style « Beaux-Arts » déjà évoqué, et sur le

modèle de François Blondel, architecte du XVIIIe

siècle.89 Il prend une position

très tranchée contre l'Architecture moderne en Belgique, en particulier contre l'Art

nouveau. Pour lui, c'est en se basant sur la tradition qu'il est possible d'innover,

« la force de ses théories réside dans sa certitude que le classicisme est la culture

de l'avenir »90. Il se montre très critique par rapport à l'art moderne : « le résultat

de cet engouement fut une production hâtive et d'une désolante fécondité. »91

Néanmoins, la façade de la maison Périer est caractérisée par un style qualifié de

« moderniste »92, contradiction que nous tenterons d'expliquer dans la suite de ce

travail.

Enfin, Paul Bonduelle mettait un point d'honneur à employer des ouvriers

qualifiés, d'élite, quitte à les payer plus cher, puisque ses commanditaires le lui

permettaient.93 C'est pour cela qu'il emploie la société François et fils pour toutes

les maisons du square, dont celle de Gilbert Périer et s'assure, de façon très

régulière, de l'avancée des travaux.94 Par ailleurs, il travaille avec sa sœur et son

beau-frère, deux peintres-sculpteurs, qui s'occupent des décorations des grands

hôtels et qui réactualisent le lien de l'architecte avec les activités artistiques, qui

l'avait occupé au début de sa vie et qui peut avoir trouvé en Gilbert Périer un écho.

En conclusion, « le souci de Bonduelle, c'est aussi de prétendre au travail bien

fait, au matériau rigoureusement choisi et mis en œuvre selon une sévère volonté.

Ne laissant aucun détail au hasard, il se montre autoritaire sur les chantiers,

dialoguant, certes, mais en maître. »95

3.3 Le bâtiment : son origine, ses spécificités de construction

Depuis quelques années déjà, Gaston Périer était occupé aux travaux de

sa propre maison, celle du 579 de l'avenue, puisqu'il en a acheté la parcelle en

1925 et qu'il a fait ériger sa maison immédiatement après.96

88 Annette Neve, Op. Cit., p.7.

89 Guide de l'architecture 1920-1930 à Bruxelles, Bruxelles, Archives d'Architecture moderne,

2001, p.74.

90 Benoît Mihail, Loc. Cit., p.163.

91 Paul Bonduelle, « La situation de l'architecte en Belgique », L'Émulation, 1908, n°1, p.14.

92 « Maison Périer » sur Irisnet,

http://www.irismonument.be/fr.Bruxelles_Extension_Sud.Avenue_Louise.573.html, dernière

consulation le 20 janvier 2014.

93 Paul Bonduelle, Loc. Cit., p.20.

94 Comme en témoigne la correspondance entre les Périer et Bonduelle, Belgique, Bruxelles,

Archives générales du Royaume, Société générale de Belgique. Finoutremer, I384-36.

95 Annette Neve, Op. Cit., p.54.

96 Belgique, Bruxelles, Archives générales du Royaume, Société générale de Belgique.

15

C'est lui qui entreprit, pour son fils, la construction de l'hôtel du numéro

573. Il s'est donc chargé de payer tous les frais, de gérer les contacts avec les

ouvriers, avec l'architecte, etc. Pour autant, il était clair que la maison était

dessinée pour son fils, ce qui met aussi Gilbert Périer, encore jeune à l'époque,

dans une situation de commanditaire. L'acte de vente de la parcelle et le payement

des plans et du mesurage furent signés par Gaston Périer chez son notaire

Scheyven le trois novembre 1928, ce qui marque aussi le début des travaux.97

Dès

le départ, c'est Bonduelle qui est contacté pour ce chantier.98

C'est de cette époque

que datent les plans de la maison qui, même s'ils ne sont pas signés, sont sans

doute dessinés par Bonduelle, au vu de la correspondance qui suit et qui le place

clairement comme l'architecte principal en charge de la conception.99

Les travaux

dureront presque trois ans. En effet, en septembre 1931, Paul Bonduelle envoie

une lettre qui témoigne de la fin des travaux : « je garde de votre collaboration le

meilleur souvenir et vous remercie de vos bons soins. »100

En tout, les travaux

auront coûté un million six cent nonante-six mille trois cent dix francs, ce qui

élève le prix total de la maison à deux millions deux cent nonante-trois mille deux

cent nonante-deux francs, les terrains entrant en grande partie dans cette somme

élevée.101

Gaston Périer était donc l'acheteur de cette maison, qu'il gardera dans ses

biens jusqu'à sa mort102

et qui reviendra en héritage à son fils. Cependant, il est

certain que, dès le départ, cette maison est conçue pour que Gilbert s'y installe

avec sa famille, la maison étant construite pour y vivre et pas seulement pour

recevoir. Les deux hommes sont d'ailleurs intéressés par l'avancée des travaux,

même si Gaston s'occupe toujours des comptes. Gilbert Périer écrit par exemple à

son père : « Mon cher papa, je t'envoie sous ce pli, une facture Monnaie pour

toutes les cheminées sauf celle du salon, […] le tout accompagné d'une lettre de

Bonduelle. »103

Gilbert est donc aussi en contact avec les hommes chargés du

projet. C'est d'ailleurs lui qui s'installe dans l'hôtel à la fin des travaux.104

Dans la

Finoutremer, « Acte de vente de la parcelle du 579 », I384-36.

97 Lettre de Scheyven à Gaston Périer, Bruxelles, le 31 octobre 1928, une page. Bruxelles,

Archives générales du Royaume, Société générale de Belgique. Finoutremer, I384-36.

98 Lettre de François à Gaston Périer, Bruxelles, 12 novembre 1928, une page. Bruxelles,

Archives générales du Royaume, Société générale de Belgique. Finoutremer, I384-36.

99 Belgique, Bruxelles, Archives de la Ville de Bruxelles, urbanisme, « Plans du 573 de l'Avenue

Louise ».

100 Lettre de Paul Bonduelle à Gaston Périer, Bruxelles, le 14 septembre 1931, une page.

Bruxelles, Archives générales du Royaume, Société générale de Belgique. Finoutremer, I384-

36.

101 Belgique, Bruxelles, Archives générales du Royaume, Société générale de Belgique.

Finoutremer, « document de comptes », I384-36.

102 Belgique, Bruxelles, Archives générales du Royaume, Société générale de Belgique.

Finoutremer, « Possessions de Gaston Périer », I384-55, p.8.

103 Lettre de Gilbert Périer à Gaston Périer, Bruxelles, le 29 décembre 1930, une page.

Bruxelles, Archives générales du Royaume, Société générale de Belgique. Finoutremer, I384-

36.

104 Almanach du commerce et de l'industrie : Bruxelles et sa banlieue, Bruxelles, 1932,

16

suite, c'est Gilbert Périer qui prit en charge les modifications de la maison. En

1953, il fit mettre des barrières aux fenêtres en façade, changement dessiné par

Paul Bonduelle qui, cette fois, signe ses plans.105

À la base, la maison a posé un problème de mitoyenneté avec son voisin

Dooms qui ne semblait pas apprécier que son immeuble soit « encaissé »106

par

cette nouvelle construction. Effectivement, « la maison de Monsieur Gilbert Périer

avance de 17 centimètres sur l'alignement de la façade de Monsier Dooms »107

.

Du fait du mécontentement de ce voisin, Bonduelle propose de reculer l'entièreté

de la construction vers le bois, ce que Gaston Périer veut éviter108

mais le projet se

réalisera finalement puisqu'aujourd'hui, la façade arrière est plus reculée que celle

des autres maisons, plongeant les belles pièces dans la nature de la forêt.

3.4 Description physique du bâtiment

L'habitation de Gilbert Périer et sa famille s'élève sur cinq étages et

s'enfonce profondément par rapport à sa petite façade.109

Comme dans beaucoup

de maisons de l'époque, la cuisine se trouvait dans le sous-sol, avec la cave à vin

et le garage. Au rez-de-chaussée se trouvent les deux salles de réception : le hall et

la salle à manger, ainsi qu'un vestiaire (preuve de luxe et de réceptions) et la salle

du portier. À l'entresol se trouvent le bureau du maître de maison et un énorme

espace consacré aux archives. Ces deux étages sont reliés par un grand escalier.

Un plus petit escalier jouxte l'autre et monte plus haut dans les étages. Au premier

étage se trouvent les chambres des enfants et, vers la façade avant, une grande

chambre qui est sans doute celle des propriétaires. Enfin, au deuxième étage, sont

situés l'atelier et les chambres pour les domestiques.

3.4.1 L'aspect extérieur : une façade différente

La maison Périer ne ressemble pas aux différentes habitations du square

Tasson. En effet, les autres élévations de l'enclave font montre d'un style « Beaux-

Arts », directement inspiré de l'esthétique historiciste et du XVIIIe siècle. Cette

constatation vaut aussi pour les trois hôtels qu'a dessinés Bonduelle avant celui de

Gilbert Périer.110 L'hôtel de Bautier, le premier à avoir été conçu par l'architecte

volume « rues », p.400.

105 Belgique, Bruxelles, Archives de la Ville de Bruxelles, urbanisme, « Modifications du

573 de l'Avenue Louise ».

106 Lettre de Dooms à Gaston Périer, Bruxelles, le 22 octobre 1929, une page. Bruxelles,

Archives générales du Royaume, Société générale de Belgique. Finoutremer, I384-36.

107 Lettre de Paul Bonduelle à Gaston Périer, Bruxelles, 16 mars 1929, une page. Bruxelles,

Archives générales du Royaume, Société générale de Belgique. Finoutremer, I384-36.

108 Lettre de Gaston Périer à Dooms, Bruxelles, le 18 mars 1929, une page, Bruxelles,

Archives générales du Royaume, Société générale de Belgique. Finoutremer, I384-36.

109 Les descriptions reprises ici se font selon les plans de la maison. Belgique, Bruxelles,

Archives de la ville de Bruxelles, urbanisme, « plans de la maison de Gaston Périer ».

110 Inventaire du patrimoine architectural, Bruxelles, extension Sud, L'avenue Louise et les

17

dans l'impasse, est d'une esthétique très classique, avec une tourelle et des

ornements.111 Ceux d'Hostetter et de Gaston Périer présentent des façades très

ordonnancées, avec un mélange de maçonnerie, d'un classique plus « épuré » que

la façade de Bautier : elles sont plus austères et quelque peu moins ornées.112

La résidence de Gilbert Périer prend une allure toute différente.

Effectivement, l'on pourrait la rapprocher d'une esthétique moderniste, avec une

utilisation de formes géométriques simples (le cercle pour le porche, notamment,

qui la caractérise), un étage en attique et une toiture plate.113 On ne retrouve plus

aucun ornement ni aucune ferraillerie caractéristiques du style « Beaux-Arts », qui

étaient encore bien présents sur la façade de l'hôtel de Gaston.114 La simplicité du

résultat pourrait témoigner du caractère modeste dont son propriétaire faisait

montre.115

Cette constatation pousse Annette Neve à qualifier la réalisation de « très

mauvaise » et à remettre en doute la paternité de Bonduelle.116 Pourtant, nous

avons la certitude qu'il est le concepteur du projet : c'est à lui que Gaston se réfère

lorsqu'il y a des mésententes avec Dooms, c'est lui qui tient la correspondance

pour l'avancée du projet117 et, enfin, on le nomme comme étant l'architecte de la

maison Périer dans L'Émulation118 et dans un article sur l'hôtel de 1935119.

Cependant, le doute d'Annette Neve se justifie lorsque sont considérées

les idées qu'avait Paul Bonduelle sur le modernisme, genre contre lequel il

s'élevait fermement. Pourtant, il faut aussi considérer que Bonduelle, au-delà de

ses conceptions esthétiques personnelles, travaillait pour des patrons, fortunés de

surcroît, qui pouvaient se montrer exigeants. Pour l'hôtel de Bautier, par exemple,

Bonduelle a dû faire de nombreuses concessions pour satisfaire les désirs de son

client.120 L'architecte se plaint d'ailleurs du manque de goût dont les bourgeois

faisaient parfois preuve : « les hommes d'affaires sont trop absorbés pour trouver

le temps de se former le goût ; les nouveaux riches ne savent pas la manière dont

on fait de l'art avec de l'argent [...] »121

Gilbert Périer ayant des goûts très modernes en art, sa propre peinture se

rapprochant du cubisme, il est possible qu'il soit intervenu pour donner son avis

rues adjacentes. Considérations historiques, urbanistiques et architecturales, p.9, disponible

sur www.irismonument.be.

111 Annette Neve, Op. Cit., p.124.

112 Ibid., pp.182-187.

113 « Maison Périer » sur Irisnet, http://www.irismonument.be.

114 Comme en témoignent les plans. Belgique, Bruxelles, Archives de la Ville de Bruxelles,

urbanisme, « plans de la maison de Gaston Périer ».

115 Émile Langui, Loc. Cit., p.134.

116 Annette Neve, Op. Cit., p.208.

117 Ces documents se trouvent à Belgique, Bruxelles, Archives générales du Royaume,

Société générale de Belgique. Finoutremer, I384-36.

118 « Propriété, avenue Louise, 573 à Bruxelles. Paul Bonduelle architecte, SCAB. »,

L'Émulation, 9, 1932, pp. 276-277.

119 J.B.R., Loc. Cit., p.25.

120 Annette Neve, Op. Cit., p.124.

121 Paul Bonduelle, dans l'Émulation, 1931, n°1, p.23.

18

quant à l'allure de la façade dans le but de la rapprocher de ses visions

personnelles de l'art. Bonduelle, payé pour ce travail, se serait alors contraint à

abandonner son classicisme habituel. Toutefois, en n'utilisant pas des matériaux

industriels, pourtant typiques du modernisme, mais plutôt de la pierre blanche

pour les escaliers et les contours des fenêtres122, caractéristique du style « Beaux-

Arts »123, l'architecte a peut-être voulu adapter cette esthétique à ses propres

principes (fig. 2 et fig. 2bis

). Paul Bonduelle écrit à Gaston Périer : « je suis

heureux d'avoir réussi à vous satisfaire, ainsi que votre fils, pour ce travail qui

était un peu une gageure. »124 Cette confidence témoigne du caractère inhabituel

que ce projet suppose : une adaptation aux goûts artistiques de son commanditaire

en ne se trahissant pas totalement.

3.4.2 L'aspect intérieur

Paul Bonduelle avait pris l'habitude, depuis la construction de l'hôtel

Bautier, de mettre les pièces de séjour vers l'arrière de la construction et un grand

escalier monumental en son cœur, ce dernier faisant montre d'un certain

prestige.125 La maison Périer ne fait pas exception à ces principes. Par contre,

nous n'avons trouvé aucune source qui décrive un projet décoratif, même si nous

savons qu'il s'agissait d'une pratique courante dans les conceptions de

Bonduelle.126

L'atelier, conçu pour que Gilbert Périer puisse exercer sa passion, donne

une dimension artistique à cette maison bourgeoise. Il est intéressant d'observer la

place de l'atelier dans la maison, à l'étage le plus haut.127 Or, l'escalier

monumental, visible depuis le hall, ne dépasse pas l'entresol, ce qui signifie un

caractère plus privé pour les deux derniers étages. Ceux-ci ne sont accessibles que

par le plus petit escalier, « de service », qui jouxte l'autre. Le haut de la maison

n'était donc pas destiné à accueillir des visiteurs. Cette hypothèse se voit être

renforcée par le fait que ce sont les chambres qui occupent le plus grand de cet

espace. L'atelier de Gilbert Périer n'était donc sûrement pas destiné à être visité, il

s'agissait là d'une activité pratiquée en amateur, peu de sources témoignent de

cette facette de l'homme d'affaires qui était, par ailleurs, très modeste par rapport à

sa passion : « Ce compliment eût sans aucun doute gêné Gilbert Périer, mais il

convient parfaitement au véritable peintre que fut Clément Clou. »128

122 Belgique, Bruxelles, Archives de la Ville de Bruxelles, urbanisme, « plans de la maison

de Gaston Périer ».

123 « Beaux-Arts » dans le glossaire d'irisnet, sur www.irisnet.be.

124 Lettre de Paul Bonduelle à Gaston Périer, Bruxelles, le 16 septembre 1931, une page.

Bruxelles, Archives générales du Royaume, Société générale de Belgique. Finoutremer, I384-

36.

125 Annette Neve, Op. Cit., p.124.

126 Ibid.

127 Belgique, Bruxelles, Archives de la ville de Bruxelles, urbanisme, « plans de la maison

de Gaston Périer ».

128 Gilbert Périer, Op. Cit., p.174.

19

L'architecture de l'atelier (fig. 3) a toutefois été pensée pour créer un

environnement agréable et inspirant.129 Tout d'abord, l'atelier, réparti sur deux

pièces, est situé à l'arrière de la maison, prenant l'espace des belles pièces de

séjour du bas de la maison (le hall de réception notamment). Cette place lui

confère une certaine importance.130 De plus, comme déjà mentionné, la maison a

subi un recul vers le bois, ce qui a pour conséquence d'offrir à celui qui se place

dans l'atelier, qui se trouve dans la partie la plus avancée vers le jardin, de ne voir

que les arbres du bois, sans que sa perspective ne soit entravée par les façades des

maisons mitoyennes. Cela est renforcé par le fait que le mur gauche ne soit

occupé que par des fenêtres, accentuant la luminosité de la pièce (fig. 4). Enfin, il

existe un petit escalier qui donne un accès direct à la terrasse du premier étage. Sa

fonction semble être de permettre au peintre amateur de sortir pour réaliser ses

œuvres et se placer au plus près de la nature. Dans les planches que nous avons

retrouvées, pourtant, il n'y a pas de représentation du bois de la Cambre.

Cependant, la planche « le bois tordu » montre qu'il aimait représenter la nature

qui entoure sa propriété de Knokke, il est donc possible qu'il existe pareille

entreprise dans sa maison de Bruxelles.131

L'accueil des invités ne se centrait donc pas sur l'atelier du dernier étage,

mais plutôt sur le hall et sur la salle à manger qui se situaient au rez-de-chaussée.

À nouveau, ces pièces sont orientées vers le jardin et offrent une vue plongeante

dans la forêt. L'architecture du hall (fig. 5), qui prend la hauteur de l'entresol et

muni d'un chemin en mezzanine, comme une galerie ouverte pour accéder au

bureau du maître de maison et aux archives, renforce sa fonction d'épicentre de

rencontre, étant visible depuis chacune des pièces alentour. La configuration

permettait aussi de mettre en vue, et donc en valeur, les œuvres d'art exposées.

Dans les années 1950, le hall s'est transformé, en deux ans, en une œuvre

monumentale de Paul Delvaux (fig. 6). Pendant sa réalisation, un deuxième

atelier, beaucoup plus grand et professionnel a donc pris place dans la maison.

L'ouvrage achevé a donc renforcé l'attrait du regard vers la pièce de vie centrale

de la maison.

Après un voyage en Italie, fasciné par les peintures murales de la

Renaissance, Périer demande à Paul Delvaux, par l'intermédiaire d'Émile Salkin

de faire un projet similaire, adapté à son pinceau, dans son salon de réception.132

Il offre la pièce la plus visible à l'univers fantasque du peintre, ce qui apparaît

comme un geste de mécénat exceptionnel pour l'époque.133 Il lui propose cent

dix mille francs pour cette réalisation et ne le restreint qu'à peu d'impératifs.134

129 Certaines de ces observations sont issues des plans de la maison, les autres de la visite de

la maison, le 10 décembre 2013.

130 Inventaire du patrimoine architectural, Bruxelles, extensions Sud, L'avenue Louise et les

rues adjacentes. Considérations historiques, urbanistiques et architecturales, p.9, disponible

sur www.irismonument.be.

131 Gilbert Périer, « Le bois tordu », dans Gilbert Périer, Op. Cit., p.177.

132 Émile Langui, Loc. Cit., p.135.

133 Ibid., p.134.

134 Philippe Farcy, « La chapelle Sixtine de Delvaux menacée ? », La Libre Belgique, 13

20

Delvaux a voulu défier les lois architecturales spécifiques de cette pièce, pour

créer un monde « hors du temps et de la raison ».135 L'artiste explique

l'organisation de la pièce au départ : « Il faut savoir que je me suis trouvé d'abord

devant un mur jaune absolument nu. Seul, un haut plafond bleu avec de petits

nuages blancs existait et je dus m'en accommoder. Quant au local, on ne pouvait, à

proprement parler, y découvrir une architecture véritable. »136 Delvaux s'est en

fait approprié l'agencement de la pièce pour le faire oublier : « Il est vrai que déjà,

sur le sol, un damier contribue à défoncer l'horizon. Incorporées aux murs, ces

scènes finissent par les abolir. »137 Avec l'aide de Salkin, il a utilisé toutes les

ressources de la pièce : la cheminée est devenue une table pour un dîner de

philosophes, des portes apparaissent un cheval et des jeunes filles, il peint un

escalier en face de celui existant, etc.,138 et ce, sur tout l'espace de la pièce, la

galerie et l'escalier également. En définitive, l'artiste qui, grâce à ce geste de

mécénat, pouvait être vu par la fréquentation éclectique de ce grand hôtel

bruxellois, parvint à transformer cet « espace à la fois ingrat et compliqué, mais

qui, à la longue, s'est prêté admirablement à l'esprit surréaliste de l'art de Paul

Delvaux. »139

3.5 Le devenir de l'hôtel

Nous ne savons que très peu de choses sur le devenir de la maison Périer.

Il apparaît qu'elle a été vendue après la mort de son propriétaire (non sans que sa

femme Simone en ait été la « gardienne »140) à Margareth Krebs, épouse d'un

médecin suisse collectionneur de tableaux plus anciens et très vite devenue veuve.

Elle était aussi, comme Gilbert Périer, une amatrice de Max Ernst, de Magritte et

de Delvaux, ce qui fit qu'elle conserva la fresque du peintre de Saint-Idesbald.141

Toutefois, nous ne connaissons pas la portée de sa sociabilité et nous ne pouvons

affirmer qu'elle ait entretenu l'hôtel comme un lieu de rayonnement artistique et

social. Ce qui est certain, c'est qu'elle a connu Paul Delvaux, nous pouvons

d'ailleurs voir la fresque et le salon qui la contenait dans un film réalisé du vivant

de l'artiste. Nous y voyons que Krebs plaçait aussi, à l'image de l'habitant

précédent, des œuvres de sa collection, comme des sculptures, dans ce grand hall

peint.142 Cette propriétaire a malheureusement vendu au Japon trois parties de la

juillet 1995, p.1.

135 Ibid., p.136.

136 Laurent-Louis Sosset, « Paul Delvaux vient de signer son chef-d'oeuvre à Bruxelles sur

les murs d'un hôtel de maître », Les Beaux-Arts, n°734, 25 mai 1956, p.5.

137 Jérôme Peignot, Op. Cit., p.34.

138 Émile Langui, Loc. Cit., p.134.

139 Ibid., p.137.

140 Lettre de Simone Périer à Emilie Noulet, Bruxelles, lettre du 27 mars 1968, une page.

Bruxelles, Archives et Musée de la Littérature, ML5035/4432.

141 Philippe Farcy, « D'admirables fresques sans protection », La Libre Belgique, 13 juillet

1995, p.7.

142 Adrian Maben, Delvaux Paul, le somnambule de saint-Idesbald, France, Gunther

21

pièce, dont deux portes, cassant par là l'unité de la fresque.143

À la mort de Margareth Krebs, à la fin du mois de mai 1995, une vague

de panique a remué la presse puisque les fresques n'étaient pas classées et n'étaient

donc pas protégées juridiquement.144 À la suite de ces événements, un dossier a

été constitué pour mettre la bâtisse et les fresques sur la liste de sauvegarde,

deuxième niveau de protection des bâtiments en Belgique.145 Actuellement, la

maison conçue par Bonduelle n'est pas classée mais les fresques de Delvaux ont

bénéficié de ce niveau de protection supplémentaire.146 Ce sont donc les fresques

qui donnent à la bâtisse son caractère inestimable et non pas l'architecture

générale147.

Après Krebs, d'autres particuliers ont acheté la maison, « dans un geste

de mécénat ».148 La famille semble également impliquée dans le monde

artistique, comme les propriétaires précédents. Enfin, ces nouveaux habitants ont

restauré le haut de la maison pour en faire des appartements. La fille du

propriétaire n'était pas informée de l'existence d'un atelier dans ces étages. En

effet, si Gilbert Périer avait dans l'idée de faire du hall de sa maison un endroit

précieux et à sauvegarder, il n'eut pas le même soin pour son atelier, qui tomba

dans l'oubli.

4 Projection de l'imaginaire : la maison représentée

Gilbert Périer n'était pas un artiste professionnel mais un grand amateur

d'art dont la collection et les gestes de mécénat ont été reconnus et médiatisés de

son temps. En revanche, aucune représentation de l'atelier n'a été retrouvée, ce qui

confirme son caractère privé. Les invités de la maison n'y étaient sûrement pas

conviés et n'en ont donc pas rendu compte dans les représentations, plastiques ou

écrites, qu'ils ont faites de la maison. L'hôte ne s'exhibait pas en tant qu'artiste : il

s'était choisi le pseudonyme de « Clou », preuve du peu de considération qu'il

avait pour son œuvre, « il ne savait que trop bien que la peinture – sa petite folie

et sa vraie passion – constituait le côté vulnérable de sa personnalité multiple,

complexe et très « en vue ». »149 Il ne met jamais son activité artistique en avant

et lui préfère une image de riche protecteur des arts. Quand il peint son

Halkenhauser et RM Associates, couleur, 1986, 60''

143 Michel Butor, Jean Clair et Suzanne Houbart-Wilkin, Delvaux, Bruxelles, Cosmos, 1975,

p.280.

144 En témoignent les articles de Philippe Farcy dans la Libre Belgique au mois de juillet

1995.

145 Philippe Farcy, « Sauvegarde en marche », La Libre Belgique, août 1995, p.5

146 Yves Jacqmin et Manoëlle Wasseige (coord.), Monuments et sites protégés : région de

Bruxelles capitale, Sprimont, Pierre Mardaga, 1999, pp.186-187.

147 Voir à ce sujet l'arrêté du ministère de la région de Bruxelles-Capitale, disponible sur

internet, http://www.monument.irisnet.be/images/REGISTRE/AG/021_027.pdf, dernière

consultation le 22 janvier 2014.

148 Entretien avec la fille du propriétaire, le 10 décembre 2013.

149 Émile Langui dans Gilbert Périer, Op. Cit., p.173.

22

autoportrait150, d'ailleurs, il ne se présente pas en peintre mais bien en

collectionneur, dans un habit mondain (fig. 1).

Depuis sa construction, la maison témoigne d'une large sociabilité. Par

conséquent, ce sont les pièces de séjour que l'on voit être représentées : le salon et

la salle à manger en particulier, en confirmant l'intention de cette architecture

ouverte aux regards.

Avant que la fresque ne recouvre ses murs, le salon a été pris en

photographie plusieurs fois, dans le cadre d'articles essentiellement. Un premier

article, dans la revue d'architecture L'Émulation, ne met en scène le bâtiment que

de façon informative. Ce sont le hall de réception et le hall d'entrée qui sont

représentés, dans une vue du bas pour le salon de réception qui met déjà en avant

la collection du maître de maison. En effet, sont visibles des masques africains, art

apprécié par cet homme investi dans les colonies, des statuettes et des

tableaux.151 Dans un article des Beaux-Arts152, deux photographies sont

intégrées : l'une qui prend le salon vu de la galerie, qui démontre donc l'ampleur

de la pièce, un point de vue différent sur celle-ci et, à nouveau, une mise en avant

de la collection d'art (fig. 5). La deuxième photographie est intéressante parce

qu'elle met en scène madame Gilbert Périer, sa première épouse en 1935153, dans

le salon de réception (fig. 7). Elle est montrée en habits mondains, également

devant les œuvres d'art de la collection, masques africains et statuettes. Il est

intéressant de remarquer que cet article présente non pas Gilbert Périer mais la

maîtresse de maison, comme une hôtesse brillante. L'article suppose qu'elle

participait aussi à l'activité artistique de la maison.

Du point de vue du contenu, cet article montre la maison comme étant

l'image architecturale de la personnalité de ses habitants, ce qui confirme peut-être

l'hypothèse d'une réalisation dirigée par Gilbert Périer : « Entre l'hôte et l'hôtel

existe une complicité faite, semble-t-il, d'un même charme opérant sur tous ceux

qui pénètrent dans le bel immeuble construit par l'architecte Bonduelle. »154 Puis,

la description met en avant les collections des résidents et l'architecture spécifique

de la salle de réception, la galerie ouverte. L'on remarque encore ici qu'on ne parle

d'aucune autre pièce si ce n'est du lieu de réception. Enfin, cet article insiste sur la

sociabilité des hôtes, en la mettant en parallèle avec leur goût artistique, par

ailleurs très exposé, et qui confère un rôle de rayonnement à la maison, que nous

avons déjà évoqué à plusieurs reprises.

Avec la fresque de Paul Delvaux, la maison connaîtra une nouvelle

médiatisation, dans laquelle est sans cesse mise en exergue l'image de mécène du

patron de la Sabena. Les différents articles évoquent l'œuvre monumentale mais

150 « le collectionneur », Gilbert Périer, Op. Cit., n.p.

151 « Propriété, avenue Louise, 573 à Bruxelles. Paul Bonduelle architecte, SCAB. »,

L'Émulation, 9, 1932, pp. 276-277.

152 J.B.R., Loc. Cit., p.25.

153 Bruxelles, Archives de la Ville de Bruxelles, Registre de la population, folio 158.

154 J.B.R., Loc. Cit., p.25.

23

ne font pas part du reste de la maison. L'article d'Émile Langui155, par ailleurs

président de l'administration des Beaux-Arts156 et ami de l'hôte, décrit cette

fresque en détail et souligne, comme dans les articles précédents, l'activité à la

fois mondaine et de mécène qu'exercent la maison et ses habitants.157 Y figurent

différentes photographies, de la fresque mais aussi de Delvaux, de Salkin et de

Périer pendant sa réalisation (fig. 8). Ces captures montrent l'espace comme un

atelier immense, avec des échafaudages, etc. (fig. 9) Gilbert Périer, lui, porte

toujours un costume et n'est pas représenté en train de peindre. Par contre, les

discussions des trois hommes sont mises en scène, dans un esprit de mécénat et

d'échanges artistiques.

Dans ces images, l'on constate que jamais une scène de dîner mondain

n'est reprise. Dans les textes des articles, par contre, ils sont évoqués, surtout dans

l'immédiate actualité de la réalisation de la fresque Delvaux : « le tout-Bruxelles

était présent le 17 mai pour saluer l'événement. Ce fut une brillante fête d'art et

d'amitié, une inauguration à la fois mondaine et familiale. »158

Un article de Laurent-Louis Sosset159 fait part d'un autre témoignage :

celui de Paul Delvaux sur sa fresque et, par la même occasion, sur la maison

Périer et son hôte. Il explique qu'il fut absorbé par ce travail qui dura deux ans et

qu'il ne peignit que quelques tableaux dans cet intervalle. Il décrit la salle comme

« morose »160 et qualifie son hôte d'« accueillant »161. Dans ce témoignage,

Delvaux ne parle presque pas de la vie dans la maison, il n'évoque ni les dîners

mondains, ni l'atelier ou l'activité artistique de Gilbert Périer, il se concentre sur la

description de sa fresque et sur l'architecture de la pièce.

La médiatisation dont la maison a bénéficié lors de cet événement, même

si elle reste à petite échelle, montre que cette entreprise de mécénat a

véritablement placé le lieu comme un vecteur d'images : celle de Delvaux,

travaillant dans son atelier, celle de ses œuvres et enfin celle du maître de maison,

en un riche amateur d'art brillant et plein de conseils (comme le montrent les

discussions prises en photographie).

Enfin, dans la fresque de Delvaux elle-même, l'on peut déceler une

représentation des activités de la maison. Selon Delvaux, la seule contrainte que

Périer lui avait imposée était de le représenter en compagnie de sa femme et de sa

belle-fille dans l'ensemble, « pour le reste, carte blanche ».162 Le maître de

maison intervient donc dans la conception artistique pour demander son portrait,

155 Émile Langui, Loc. Cit., pp.132-142.

156 Procès-verbaux des assemblées générales et des conseils d'administration des années

1956-1960, 104 p.

157 Émile Langui, Loc. Cit., p.134.

158 Laurent-Louis Sosset, Loc. Cit., p.5.

159 Laurent-Louis Sosset, « Chez Gilbert Périer, les fresques de Paul Delvaux traduisent sa

nostalgie de la Rome antique », Les Beaux-Arts, n°736, 8 juin 1956, p.1 et p.5.

160 Ibid., p.5.

161 Ibid.

162 Ibid.

24

comme pour donner une preuve de son mécénat. Delvaux a décidé de faire figurer

son commanditaire sur le dessus de la pièce, au début de la galerie ouverte, près

de l'entrée du bureau du maître (fig. 10). Il peint cette famille en haut d'un escalier

qu'elle s'apprête à descendre pour rejoindre la communauté de personnages au bas

de la fresque.163 De plus, ils sont les seuls personnages de l'ensemble à être

habillés non pas à l'antique, mais avec des habits contemporains et mondains. Cela

pourrait être une mise en abîme : une représentation de la vie de la maison sur les

murs de la maison. Il s'agit clairement du maître qui s'exhibe, comme à un dîner

mondain, dans un riche apparat et qui descend vers ses convives, non sans les

observer tous et être vu de tous. Par cette représentation (dans laquelle nous ne

connaissons pas, finalement, la véritable part prise par le commanditaire du point

de vue de sa conception), Delvaux place son mécène dans une posture d'hôte

brillant et profite de l'architecture pour le mettre en valeur. Malgré cette

démonstration, rappelons que l'hôte était réputé pour être modeste et simple,

comme l'était la façade de sa maison.

À ces trois personnages fait écho un petit chien, celui de la maison, peint

cette fois par Gilbert Périer, seule partie de la fresque qu'il ait réalisée (fig. 11).164

Il témoigne d'une connivence qui devait exister entre l'artiste et le commanditaire,

de l'ambiguïté de statut qu'endossait Gilbert Périer, son action de mécène et son

activité de peintre se mêlant, mais aussi d'une action d'intervention dans l'ouvrage

qu'il a demandé. La place du chien est intéressante : il se situe juste en dessous de

la fenêtre qui donne sur le bois165, comme intégré dans cette nature mais aussi

absorbé par elle, il reste très discret par rapport à l'ensemble. À travers lui, Gilbert

Périer s'affirme artiste sans s'exhiber comme tel, en représentant un sujet de l'ordre

du familier de surcroît (le chien de la maison). À travers cette fresque, comme à

travers l'architecture de son hôtel, Gilbert Périer semble placer sa peinture dans

l'intimité, alors qu'est affichée son identité « en vue »166 de riche mécène

mondain.

5 Scénario

(Supprimé pour mise en ligne)

163 Émile Langui, Loc. Cit., p.142.

164 Ibid.

165 Constatation faite lors de la visite de la maison, le 10 décembre 2013.

166 Émile Langui dans Gilbert Périer, Op. Cit., p.173.

25

6 Conclusion

À travers ce travail, nous avons montré quels étaient les liens qui

s'établissaient entre les artistes et les grands collectionneurs en mettant en avant

les possibilités qu'offraient les maisons de ces esthètes dans ces relations.

Dans le cas de Gilbert Périer, la situation de son hôtel lui a permis de se

trouver au centre d'un quartier de promotion artistique, à laquelle il a

abondamment participé. Grâce à une fortune acquise tant par l'héritage de sa

famille que par son propre poste au sein de multiples entreprises et de la Sabena

particulièrement, il a offert, dès la construction de sa bâtisse, une possibilité de

rayonnement à un art moderne, d'avant-garde. Son goût pour la collection que son

père lui a léguée a été renforcé par une volonté de faire se rencontrer tous les

milieux auxquels il participait. Par de grandes assemblées organisées dans son

habitation, il a aidé les artistes et leurs acheteurs à faire connaissance.

Il n'a pas laissé au hasard la conception de son lieu de résidence. L'on

ressent, dans sa construction, la duplicité de ses intérêts: à la fois artistiques (sa

façade rend l'esthétique de l'univers qu'il admire, malgré les goûts classiques de

son architecte) et mondains (le salon de réception est dessiné pour voir et être vu).

Même s'il reste un homme de son milieu et fait appel à Paul Bonduelle,

l'architecte de la haute bourgeoisie, pour réaliser son hôtel, il manifeste également

une diversification de ses activités. Il est aussi Clément Clou, un artiste familier,

« du dimanche », qui n'expose pas cette facette sensible de sa personnalité à tout-

va. C'est pourquoi Bonduelle avait prévu un atelier dans les pièces intimes de sa

demeure.

Par la fresque Delvaux, il transforma son salon de réception en un

immense atelier d'artiste, puis en une œuvre d'art admirable et conservée jusqu'à

aujourd'hui. Dans ce geste, la salle de réception apparaît comme un moyen de

transmettre des images : non seulement l'art de Delvaux est exposé, comme

l'étaient les peintures et sculptures qui, auparavant, ornaient le salon, mais aussi

l'image du maître de maison est mise en avant, il est présenté comme un hôte

brillant.

Finalement, cette personnalité complexe de l'hôte a défini, dans ce cas,

toutes les particularités de l'hôtel: son architecture, la sociabilité dont il témoigne

et les représentations qui en ont été faites. Comme l'écrit Émile Langui: « vous

me direz que cela se tient plus ou moins, que le mécène ne s'imagine pas sans les

revenus de l'homme d'affaires, que le peintre est naturellement collectionneur et

vice-versa. N'empêche que l'on peut considérer un personnage qui unit toutes ces

qualités – et, n'en déplaise à sa modestie, c'est le cas de Gilbert Périer –, comme

un être rare et précieux. »167

Les sources n'ont pourtant pas toujours permis de bien établir la place

que ce mécène prenait dans la réalisation des œuvres qu'il commandait. Cette

donnée pourrait être intéressante pour jauger de la place de la maison en tant que

167 Émile Langui, Loc. Cit., p.134.

26

lieu de création artistique et en tant qu'éventuel centre de discussions sur la

conceptualisation des œuvres commanditées.

27

7 Bibliographie 7.1 Bibliographie primaire

Nous trions les sources primaires selon les lieux de conservation. Nous

indiquerons aussi les lieux sondés qui n'ont pas abouti à un résultat, de sorte que

les démarches poursuivies soient exposées.

Archives générales du Royaume168

Belgique, Bruxelles, Archives générales du royaume, Société générale de

Belgique. Finoutremer, « Copie de lettres concernant la succession Périer-Thys,

1921-1929 », I384-22.

Belgique, Bruxelles, Archives générales du royaume, Société générale de

Belgique. Finoutremer, « Notes biographiques sur Périer Gaston et notes

généalogiques sur les famille Périer et de Pauw, 1939-1946 », I384-23.

Belgique, Bruxelles, Archives générales du royaume, Société générale de

Belgique. Finoutremer, « Voyage au Congo belge en février-mai 1925:

programme, plans, correspondance, notes manuscrites, 1925 », I384-26.

Belgique, Bruxelles, Archives générales du royaume, Société générale de

Belgique. Finoutremer, « Relevé des objets d'art chinois mis en consignation par

Gaston Périer chez P. Friché, décorateur. Vente des mêmes 1936-1941 », I384-30.

Belgique, Bruxelles, Archives générales du royaume, Société générale de

Belgique. Finoutremer, « Correspondance relative à la construction d'une fontaine

à la mémoire du fils de Périer Gaston, le poète Périer Odilon, 1941-1945 », I384-

31.

Belgique, Bruxelles, Archives générales du royaume, Société générale de

Belgique. Finoutremer, « Villa du Bois Tordu à Knokke-le-Zoute: correspondance

avec la Compagnie Immobilière Le Zoute, plans, devis et factures de travaux

divers d'aménagement, dommages de guerre, réquisition de la maison, 1921-

1946 », I384-35.

Belgique, Bruxelles, Archives générales du royaume, Société générale de

Belgique. Finoutremer, « Immeuble situé Avenue Louise, n° 573: plans; examen

des fondations, correspondance avec le propriétaire de la maison voisine, V.

Dooms, concernant des problèmes de mitoyenneté; comptes d'entretien; travaux

168 Les références reprises ci-dessous sont des dossiers comportant différents documents.

Voir le travail et le dossier numérique pour plus de détails.

28

d'aménagements par la société François et Fils. Terrain à bâtir au n° 553 de

l'Avenue Louise: plan, 1926-1931, 1942-1943 », I384-36.

Belgique, Bruxelles, Archives générales du royaume, Société générale de

Belgique. Finoutremer, « Maison située Square du Bois ou Square Tasson: travaux

d'aménagement, 1929-1931 », I384-37.

Belgique, Bruxelles, Archives générales du royaume, Société générale de

Belgique. Finoutremer, « Biens mobiliers de Périer Gaston: relevés des titres mis

en dépôt par Périer Gaston à la Banque d'Outremer s.a. (puis à la S.G.B. s.a.),

relevés des biens situés à l'étranger et notamment en Angleterre, relevé du

portefeuille en 1940, participation dans le Royal Golf Club de Belgique et dans la

Chasse de Vossem s.a., opérations sur des titres de la société Les Mines Réunies

s.a. et mandat dans cette société, achats en bourse avec l'agent de change Théo

Duwez et Cie, correspondance avec H. Le Boeuf et concernant la succession de ce

dernier, prêt d'argent à J. Bastin, achat de titres de la Sogechim s.c.a.r.l., pouvoirs

accordés par Périer Gaston à A. Bemelmans, L. Beckers, et A. Marchal pour la

gestion des fonds déposés à la S.G.B. s.a., correspondance relative à la gestion de

son compte titres à l'Union des Banques de Province s.a., 1906-1946 », I384-39.

Belgique, Bruxelles, Archives générales du royaume, Société générale de

Belgique. Finoutremer, « Déclaration fiscale de Périer Gaston pour 1929, 1930 »,

I384-41.

Belgique, Bruxelles, Archives générales du royaume, Société générale de

Belgique. Finoutremer, « Avances d'hoirie de Périer Gaston à son fils Périer

Gilbert, 1945 », I384-42.

Belgique, Bruxelles, Archives générales du royaume, Société générale de

Belgique. Finoutremer, « Discours, notes, correspondance, articles de presse,

catalogues relatifs au rôle de Périer Gaston comme commissaire général du

Gouvernement égyptien à l'Exposition Internationale et Universelle de Bruxelles

en 1935 », I384-52.

Belgique, Bruxelles, Archives générales du royaume, Société générale de

Belgique. Finoutremer, « Documentation sur l'Exposition Internationale Coloniale

Maritime et d'Art Flamand à Anvers en 1930. Documentation sur la participation

de Périer Gaston comme commissaire général adjoint du Gouvernement belge à

l'Exposition Coloniale et Internationale de Paris en 1931 (avec notamment le

rapport général présenté par le gouverneur NN. Olivier), 1930-1931 », I384-53.

Belgique, Bruxelles, Archives générales du royaume, Société générale de

Belgique. Finoutremer, « Condoléances. Correspondance concernant la

constitution du conseil de famille. Correspondance avec le notaire H. Scheyven et

29

avec l'avocat NN. Nice relative aux dommages de guerre à la villa de Knokke-le-

Zoute, 1946-1951 », I384-54.

Belgique, Bruxelles, Archives générales du royaume, Société générale de

Belgique. Finoutremer, « Inventaire des biens immobiliers et mobiliers,

correspondance avec l'Administration des Contributions concernant notamment

l'impôt sur le capital, 1946-1949 », I384-55.

« Elisabethville – Kinshasa via Stanley ville », L'Avenir colonial belge, 23 avril

1925, p.1

Ministère des colonies, Catalogue d'exposition de la section belge à l'exposition

coloniale internationale de Paris, Paris, 1931, Bruxelles, La Propagande

commerciale, 1931, pp.14-21.

« In memoriam. Gaston Périer », Association des intérêts coloniaux belges, 23

mars 1946, n°1085, pp.1-2

Archives et Musée de la Littérature

Lettres d'Auguste Gérard à Odilon-Jean Périer; à Aude Périer; à Gilbert Périer,

1926-1927, Bruxelles, Archives et Musée de la Littérature, ML09420/0003/001-

047

Lettre de Simone Périer à Emilie Noulet, Bruxelles, lettre du 27 mars 1968, une

page. Bruxelles, Archives et Musée de la Littérature, ML5035/4432.

Lettre de Gilbert Périer à Georges Marlow, Bruxelles, s. d., un folio, quatre

pages. Bruxelles, Archives et Musée de la Littérature, ML5816/139.

Lettre de Gilbert Périer à Georges Marlow, Bruxelles, le 15 décembre 1932, une

page. Bruxelles, Archives et Musée de la Littérature, ML5816/90.

Lettres de Gilbert Périer à Gaston-Denys Périer, Bruxelles, 1951. Bruxelles,

Archives et Musée de la Littérature, ML709.

Lettres de Gilbert Périer à Odilon-Jean Périer, s.d. Bruxelles, Archives et Musée

de la Littérature, ML09424/0003/001-081.

PÉRIER Gilbert, "Deux lettres", dans Congo-Meuse, Aspects de la culture à

l'époque coloniale en Afrique centrale, Bruxelles, Archives et Musée de la

Littérature, 2007, pp.39-47

30

Archives de la Ville de Bruxelles

Belgique, Bruxelles, Archives de la Ville de Bruxelles, Registre de la population,

folio 158.

Belgique, Bruxelles, Archives de la Ville de Bruxelles, Fonds Fauconnier, Carton

71, « Cercle de l'Avenue A.S.B.L. ».

Belgique, Bruxelles, Archives de la Ville de Bruxelles, urbanisme, « Plans du 573

de l'avenue Louise ».

Belgique, Bruxelles, Archives de la ville de Bruxelles, urbanisme, « Plans du 579

de l'avenue Louise ».

Belgique, Bruxelles, Archives de la Ville de Bruxelles, urbanisme,

« Modifications du 573 de l'avenue Louise ».

Almanach du commerce et de l'industrie : Bruxelles et sa banlieue, Bruxelles,

1932, volume « rues », 347 p., disponible sur

http://www.bruxelles.be/Almanach/show.cfm?dir=AC_1932&file=AC_1932_RU

ES%20STRATEN&count=347, dernière consultation le 22 janvier 2014.

Almanach du commerce et de l'industrie : Bruxelles et sa banlieue, Bruxelles,

1935, volume « rues », 391 p., disponible sur

http://www.bruxelles.be/Almanach/show.cfm?dir=AC_1935&file=AC_1935_RU

ES%20STRATEN&count=391, dernière consultation le 22 janvier 2014.

Almanach du commerce et de l'industrie : Bruxellles et sa banlieue, Bruxelles,

1968, volume « rues », 423 p., disponible sur

http://www.bruxelles.be/Almanach/show.cfm?dir=AC_1968&file=AC_1968_RU

ES%20STRATEN&count=423, dernière consultation le 22 janvier 2014.

Archives de la Commune d'Ixelles

Belgique, Bruxelles, Archives de la commune d'Ixelles, urbanisme, dossier "50

rue Defacqz".

Musées Royaux des Beaux-Arts de Bruxelles169

L'Art Vivant (association sans but lucratif), Première exposition l'Art Vivant en

Belgique 1910-1930, Bruxelles, Galerie Georges Giroux, du 17 janvier au 28

169 Nous nous attendions à retrouver des catalogues de vente reprenant le nom de Gilbert

Périer mais ce ne fut pas le cas.

31

janvier 1931, 78 p.

Archives du Palais des Académies

Belgique, Bruxelles, Bibliothèque du Palais des Académies, fonds Belfius,

« Cartes postales de l'avenue Louise. Vue du bois ».

Lettre de Paul Bonduelle à l'Académie royale de Belgique, Bruxelles, 7 juin 1949.

Bruxelles, Archives du Palais des Académies, 14535, une page.

Belgique, Bruxelles, Archives du Palais des Académies, « Paul Bonduelle »,

« Bibliographie académique », 14535.

Belgique, Bruxelles, Archives du Palais des Académies, « succession Bonduelle »,

13568.

BONDUELLE Paul, "La théorie dans les Arts plastiques", dans Bulletin de la

classe des Beaux-Arts, Bruxelles, Palais des Académies, 1946, tome XXVIII,

pp.177-190.

BONDUELLE Paul, "L'architecte hier et aujourd'hui", dans Bulletin de la classe

des Beaux-Arts, Bruxelles, Palais des Académies, 1949, tome XXXI, pp.80-96.

Archives du Palais des Beaux-Arts de Bruxelles

Procès-verbaux des assemblées générales et des conseils d'administration des

années 1956-1960, 104 p.

Palais des Beaux-Arts. Conseil d'administration, du 3 décembre 1968, n.p.

Bibliothèque Royale de Belgique – Section périodiques

BONDUELLE Paul, "La situation de l'architecte en Belgique", L'Émulation, n°1,

1908, pp.13-14 et et 20-21

BONDUELLE Paul, dans L'Émulation, 1931, n°1, p.23

J.B.R., « L'hôtel de Madame Gilbert Périer », Les Beaux-Arts, 5ème année, n°133,

5/10/1935, p.25.

« Propriété, avenue Louise, 573 à Bruxelles. Paul Bonduelle architecte, SCAB. »,

L'Émulation, 9, 1932, pp. 276-277

SOSSET L.-L., « Paul Delvaux vient de signer son chef-d’œuvre à Bruxelles sur

32

les murs d'un hôtel de maître », Les Beaux-Arts, n°734, 25 mai 1956, p.5.

SOSSET L.-L., « Chez Gilbert Périer, les fresques de Paul Delvaux traduisent sa

nostalgie de la Rome antique », Les Beaux-Arts, n°736, 8 juin 1956, Bruxelles, p.1

et 5.

Bibliothèque Royale de Belgique

DESWARTE Willem, « Le président », Revue Sabena, Automne 1955, n.p.

LANGUI, Émile, « Les peintures murales de Paul Delvaux chez Gilbert Périer à

Bruxelles », Quadrum, 1, mai 1956, pp. 133-142.

PÉRIER Gilbert, « Pourquoi une compagnie aérienne offre un prix de

sculpture ? », Revue Sabena, Automne 1955, n.p.

PÉRIER Gilbert, dans L'Art belge, revue du mouvement artistique franco-belge,

janvier 1968, numéro René Magrite, p.50.

PÉRIER Gilbert, Études, notes et conférences, poèmes et chansons, peinture,

Bruxelles, André de Rache, 1969, 189 p.

Gallica (http://gallica.bnf.fr/?lang=FR)

« Belgique », France-Aviation, octobre 1955, n°11, p.7, version numérisée sur

Gallica, gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6554100c/f1.image.r=, dernière

consultation le 18 janvier 2014.

PIERENS-GEVAERT, « L'art belge ancien et moderne », Gazette des Beaux-Arts,

Paris, 1923, premier semestre, p.337, version numérisée sur Gallica,

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb343486585/date.r=%22gaston+p%C3%A9rier%

22.langFR, dernière consultation le 18 janvier 2014.

Irisnet (www.irisnet.be)

Photographie de la maison Périer, © Monuments & Sites – Bruxelles.

Archives d'Architecture Moderne

Nous avions fait des recherches aux Archives d'Architecture Moderne pour

trouver de nouvelles informations sur la maison mais seuls les plans déjà

répertoriés aux Archives de la Ville de Bruxelles étaient archivés à cet endroit.

33

Archives de l'Art Contemporain en Belgique

Nous espérions trouver des correspondances entre des artistes et Gilbert Périer

pour préciser ses liens avec cet univers, mais notre recherche n'a pas été

fructueuse.

Bibliothèque Royale de Belgique – Section estampes

Nous cherchions aux estampes des cartes postales de l'avenue Louise et du square

du Bois mais nous n'en avons pas trouvé d'originales par rapport au fonds Belfius.

7.2 Bibliographie secondaire AUBRY Françoise, VANDENBREEDEN Jos, VANLAETHEM France,

L'architecture en Belgique: art nouveau, art déco & modernisme, Bruxelles,

éditions Racine, 408 p.

BENEVOLO Leonardo, Histoire de l'architecture moderne, Paris, collection

Espace et Architecture, 1979, volume 2: "avant-garde et mouvement moderne

(1890-1930), 300 p.

Bruxelles art déco 1920-1930, Paris, Editions Norma, 1996, 239 p.

BUTOR Michel, CLAIR Jean, HOUBART-WILKIN Suzanne, Delvaux,

Bruxelles, Cosmos, 1975, 352 p.

BUYST Erik et KURGAN Ginette, 100 grands patrons du Xxème

siècle en

Belgique, Bruxelles, Alain Renier & Cie, 1999, 287 p.

CHABERT Antoine, « Aux origines de l'avenue Louise qui doit son nom à une

Reine et une Princesse », pp.45-54 dans GEERTS Léon (dir.), L'histoire illustrée

du Haut de la Ville, Bruxelles, Les Publications de Bruxelles, 1972, 328 p.

COWLING Elizabeth (dir.), Surrealism and after. The Gabrielle Keiller

collection, Edinburgh, Scottish national gallery of modern art, 1997, 208 p.

DEFRENNE Madeleine, Odilon-Jean Périer, Bruxelles, Palais des Académies,

1957, 467 p.

DE HENS Georges et MARTINY V.-G. (dir.), Académie royale des Beaux-Arts de

Bruxelles. Une école d'architecture, des tendances 1766-1991, Bruxelles, G. De

Hens, 1992, pp.86-88.

DEVILLEZ Virginie, Le Retour à l'ordre. Art et politique en Belgique 1918-1945,

34

Bruxelles, éditions Labor, 2002, 431 p.

DUQUENNE Xavier, L'avenue Louise à Bruxelles, Bruxelles, Xavier Duquenne,

2007, 262 p.

FARCY Philippe, « La chapelle Sixtine de Delvaux menacée ? », in La Libre

Belgique, 13 juillet 1995, p.1.

FARCY, P., « D'admirables fresques sans protection », in La Libre Belgique, 13

juillet 1995, p.7.

FARCY, P., « Maison Périer : des précisions s'imposent », in La Libre Belgique,

20 juillet 1995, p.24.

FARCY, P., « Sauvegarde en marche », in La Libre Belgique, août 1995, p.5.

Guide de l'architecture 1920-1930 à Bruxelles, Bruxelles, Archives d'Architecture

moderne, 2001, 94 p.

Guide de l'architecture moderne à Bruxelles, Bruxelles, éditions de l'Octogone,

1993, 167 p.

GUYAUX André (éd.), « Odilon-Jean Périer », Textyles, n°25, 2004, 134 p.

Hommage à Max Janlet (exposition tenue à Bruxelles, Musée d'Ixelles, du 14

avril au 25 juin 1978), Bruxelles, 1978, 50 p.

JACQMIN Yves et WASSEIGE Manoëlle (coord.), Monuments et sites protégés :

Région de Bruxelles-Capitale, Sprimont, Pierre Mardaga, 1999, pp.186-187.

JAUMAIN Serge, KURGAN-VAN HENTENRIJK Ginette, MONTENS Valérie

(éds.), Dictionnaire des patrons en Belgique. Les hommes, les entreprises, les

réseaux, Bruxelles, De Boeck & Larcier, 1996, 729 p.

MABEN Adrian, Delvaux Paul, le somnambule de saint-Idesbald, France,

Gunther Halkenhauser et RM Associates, couleur, 1986, 60''

MARTINY V. G., Notice sur Paul Bonduelle, extrait de l'Annuaire 1974,

Bruxelles, Palais des Académies, 1974, 21 p.

MIHAIL Benoît, "Paul Bonduelle", VAN LOO Anne (dir.), Dictionnaire de

l'architecture en Belgique de 1830 à nos jours, Anvers, Fonds Mercator, 2003,

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35

MIEROP Caroline, L'avenue Louise, Bruxelles, Ministère de la Région de

Bruxelles-Capitale, Service des Monuments et Sites, s.d., 36 p.

MILO Jean, Vie et Survie du "Centaure", s.l., Éditions nationales d'art, s.d., 279 p.

MONTENS Valérie, Le Palais des Beaux-Arts. La création d'un haut lieu de

culture à Bruxelles (1928-1945), Bruxelles, Editions de l'Université de Bruxelles,

2000, 376 p.

NEVE Annette, Paul Bonduelle 1877-1955, mémoire présenté sous la direction de

Pierre Le Nain, Bruxelles, Institut supérieur d'Architecture de l'état - La Cambre,

Année académique 1983-1984, 326 p.

PEIGNOT, J., « Delvaux illusionniste », Connaissance des Arts, 222, 1970, pp.

34-39.

PÉRIER Odilon-Jean, Poèmes, préface de Norge, Bruxelles, Jacques Antoine,

1979, 231 p.

PUTTEMANS Pierre, Architecture moderne en Belgique, Bruxelles, Marc Vokaer

éditeur, 1974, 262 p.

Rétrospective Magritte (1898-1967) dans les collections privées. 20 janvier-27

mars, Bruxelles, Galerie Isy Brachot, 1988, 238 p.

ROBERTS-JONES, Magritte poète visible, Bruxelles, Laconti, 1972, 115 p.

ROQUE Georges, Ceci n'est pas un Magritte, Paris, Flammarion, 1983, 206 p.

SCHMITZ Marcel, L'architecture moderne en Belgique, Bruxelles, Éditions de la

Connaissance, s.d., 39 p.

VAN DER STRAETEN Edgard, “Gilbert Périer (10 octobre 1902-13 mars

1968)”, extrait de Bulletin des Séances, Bruxelles, Académie Royale des Sciences

d'Outre-Mer, 1969, pp.97-100.

VANTHEMSCHE Guy, La Sabena. L'aviation commerciale belge. 1923-2001.

Des origines au crash, Bruxelles, De Boeck & Larcier, 2002, 341 p.

6.3 Sitographie

Arrêté du ministère de la région de Bruxelles-Capitale, disponible sur internet,

http://www.monument.irisnet.be/images/REGISTRE/AG/021_027.pdf, dernière

consultation le 22 janvier 2014.

36

« Beaux-Arts » dans le glossaire d'irisnet, sur www.irisnet.be, dernière

consultation le 22 janvier 2014.

Inventaire du patrimoine architectural, Bruxelles, extension Sud, L'avenue Louise

et les rues adjacentes. Considérations historiques, urbanistiques et

architecturales, p.9, disponible sur www.irismonument.be

« Maison Périer » sur Irisnet, www.irismonument.be, dernière consultation le 22

janvier 2014.

37

ANNEXES

Figure 1 – PÉRIER Gilbert, le Collectionneur, dans PÉRIER Gilbert, Études,

notes et conférences, poèmes et chansons, peinture, Bruxelles, André de Rache,

1969, n.p.

Gilbert Périer ne se représente pas en tant qu'artiste mais bien en collectionneur.

38

Figure 2 – Plans de la façade de Gilbert Périer, Belgique, Bruxelles, Archives de

la Ville de Bruxelles, urbanisme, « Plans du 573 de l'avenue Louise ».

La façade est de style moderniste (forme géométrique du porche) mais Bonduelle

a utilisé la pierre blanche pour les contours de fenêtre et les marches du porche.

39

Figure 2bis

– Façade de la maison actuellement, disponible sur

http://www.irismonument.be/fr.Bruxelles_Extension_Sud.Avenue_Louise.573.ht

ml, © Monuments & Sites – Bruxelles.

La façade montre une esthétique moderniste (les contours des fenêtres ont été

refaits).

40

Figure 3 – L'architecture de l'atelier, Belgique, Bruxelles, Archives de la Ville de

Bruxelles, urbanisme, « Plans du 573 de l'avenue Louise ».

L'atelier, réparti sur deux pièces, prend la place des belles pièces de la maison, à

l'arrière. Un escalier donne accès directement à la terrasse de l'étage du dessous.

41

Figure 4 – L'atelier de l'intérieur actuellement, visite de la maison, le 10 décembre

2014.

Les fenêtres sont en enfilade, donnant une grande luminosité et l'impression de se

trouver dans la nature du bois.

42

Figure 5 – L'architecture du hall, J.B.R., « L'hôtel de Madame Gilbert Périer »,

Les Beaux-Arts, 5ème année, n°133, 5 octobre 1935, p.25.

L'architecture du hall de réception permet de voir et d'être vu, avec la galerie

ouverte et l'accès à toutes les pièces autour.

43

Figure 6 – LANGUI, Émile, « Les peintures murales de Paul Delvaux chez

Gilbert Périer à Bruxelles », Quadrum, 1, mai 1956, pp. 133-142.

Les fresques de Delvaux ont recouvert la salle de réception chez Gilbert Périer.

44

Figure 7 – J.B.R., « L'hôtel de Madame Gilbert Périer », Les Beaux-Arts, 5ème

année, n°133, 5 octobre 1935, p.25.

La maîtresse de maison est représentée en habits mondains. Elle aussi recevait ses

invités.

45

Figure 8 – LANGUI, Émile, « Les peintures murales de Paul Delvaux chez

Gilbert Périer à Bruxelles », Quadrum, 1, mai 1956, pp. 133-142.

Périer, Delvaux et Salkin discutent de la réalisation de la fresque. Cela peut être

une preuve de l'intervention du mécène.

46

Figure 9 – LANGUI, Émile, « Les peintures murales de Paul Delvaux chez

Gilbert Périer à Bruxelles », Quadrum, 1, mai 1956, pp. 133-142.

Le salon de réception s'est transformé en l'atelier de Delvaux pendant la

réalisation de la fresque.

47

Figure 10 – LANGUI, Émile, « Les peintures murales de Paul Delvaux chez

Gilbert Périer à Bruxelles », Quadrum, 1, mai 1956, pp. 133-142.

Le maître de maison est représenté dans la fresque, avec sa femme et sa belle-fille,

en haut d'un escalier peint et sur la galerie ouverte du dessus de la pièce, sorte de

mise en abîme des réceptions de la maison.

48

Figure 11 – LANGUI, Émile, « Les peintures murales de Paul Delvaux chez

Gilbert Périer à Bruxelles », Quadrum, 1, mai 1956, pp. 133-142.

En dessous de la fenêtre, Gilbert Périer, alias Clément Clou a peint son chien.

Cette intrusion discrète représente un sujet intime.