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1 « MESDAMES ET MESSIEURS, VOICI LA BÊTE DU MANAGEMENT STRATÉGIQUE » « Pour être tout à fait franc, je ne suis pas aussi malin que vous semblez le croire. »

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« MESDAMES ET MESSIEURS,

VOICI LA BÊTE

DU MANAGEMENT STRATÉGIQUE »

« Pour être tout à fait franc,

je ne suis pas aussi malin que vous semblez le croire. »

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Présentation des auteurs :

Henry MINTZBERG est un universitaire canadien en sciences de gestion et possède une

double formation : il est tout d'abord diplômé en génie mécanique (McGill, Montreal, 1961),

et a appliqué ses connaissances d’ingénieur au Canadian National.. Il est professeur de gestion

depuis 30 ans à l’Université Mc Gill, où il est titulaire de la chaire Cleghorn à la Faculté

d’administration. Il est également professeur invité à l’Institut européen d’administration des

affaires (INSEAD) à Fontainebleau. H. Mintzberg a été président de la Strategic Management

Society et a reçu deux fois le McKinsey Award pour le meilleur article de la Harvard

Business Review. Il est l'auteur de nombreux ouvrages et publications, et notamment d’un

ouvrage phare, « Grandeur et décadence de la planification stratégique », publié en 1994.

L'auteur le présente comme "un livre dans un livre dans un livre dans un livre". En effet, il

s'agit d'un sous-ensemble de son oeuvre sur la théorie de la politique générale d'entreprise

commencée en 1968.

Joseph LAMPEL : enseigne le management à l’Université de ST Andrews en Ecosse. Il est

cofondateur de l’Institute for Research on Emergent Policy Processes.

Bruce AHLSTRAND : auteur de « The Quest of Productivity » et coauteur de « Human

Resource Management » in the Multi-Divisional Compagny, est professeur de Management à

l’Université de Trent dans l’Ontario.

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Introduction :

Autorité incontestée en matière de stratégie, Henry Mintzberg est l'auteur de plusieurs best-

sellers sur le sujet. Ce livre, « safari en pays stratégique » est destiné tant aux professionnels

qu'au monde académique, réunit l’histoire, l’analyse et la critique de tout ce qui a été écrit de

valable sur la stratégie.

Henry Mintzberg et ses coauteurs y recensent 10 grandes écoles de pensée, chacune avec ses

maîtres, ses concepts originaux, ses résultats mais aussi ses limites : de l’école du

positionnement avec Michael Porter à l’école entrepreneuriale avec Joseph Schumpeter, en

passant par la célébrissime Harvard Business School ou encore le Boston Consulting Group.

Mise à jour et augmentée, cette deuxième édition porte plus particulièrement sur les capacités

dynamiques, la relation entre connaissance et concurrence, la théorie des options réelles, et

l’impact de l’encadrement supérieur et intermédiaire sur la prise de décisions stratégiques.

Elle met également l’accent sur le courant de la « fabrique de la stratégie ».

L’intérêt de l’ouvrage est donc de présenter un véritable panorama de la pensée stratégique,

afin de permettre à chacun de mieux appréhender l’ « animal stratégique » dans son entier et

de se faire sa propre opinion.

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Les dix écoles de « safari en pays stratégique »

Les écoles La description

L’école de la conception

l’élaboration de la stratégie en tant que processus de

conception

L’école de la planification

l’élaboration de la stratégie en tant que Processus

formel

L’école du positionnement

l’élaboration de la stratégie en tant que processus

d’analyse

L’école entrepreneuriale

l’élaboration de la stratégie en tant que processus

visionnaire

L’école cognitive

l’élaboration de la stratégie en tant que processus

intellectuel

L’école de l’apprentissage

l’élaboration de la stratégie en tant que processus

émergent

L’école du pouvoir

l’élaboration de la stratégie en tant que processus de

négociation

L’école culturelle

l’élaboration de la stratégie en tant que processus

collectif

L’école environnementale l’élaboration de la stratégie en tant que processus de

réaction

L’école de la configuration

l’élaboration de la stratégie en tant que processus de

transformation

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L’école de la

planification :

l’élaboration de la

stratégie comme

processus formel

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Bien que plus ancienne, la planification stratégique n’est apparue dans la littérature de

gestion, que dans les années soixante. Diverses écoles de pensées s’affrontent sur la définition

de la planification stratégique. Les écoles du processus considèrent que la stratégie naît du

processus de planification, alors que les partisans de l’école du contenu considèrent que la

planification ne permet pas de créer la stratégie mais de la mettre en oeuvre. (Mintzberg,

1998).

L'élaboration stratégique pour l’école de la planification est un procédé délibéré de réflexion

consciente sur une situation qu'il faut modifier. Ici c'est le processus formel qui prime.

L'élaboration et la mise en œuvre sont garanties par une personne ou l'équipe dirigeante. Le

plus souvent cette conception est stabilisée dans le fameux tableau de bord. C'est dire

l'importance qui est donnée à la formulation, ce n'est qu'après leur formulation que les

stratégies peuvent s'appliquer. Ces approches reposent sur une distinction nette entre pensée et

action. Ce ne sont pas les mêmes qui produisent la connaissance et qui mettent en œuvre.

Se pose alors la question de l'appropriation de la connaissance produite.

Cette approche suppose que la situation est relativement stable et prévisible, le scénario est un

outil essentiel dans l'arsenal du stratège, il est le moyen par lequel on restitue la décision à la

direction politique. Définition et quantification des objectifs permettent de lui conférer

l'instance de contrôle.

L'action est pensée en termes de contrôle et de réduction des écarts par rapport aux objectifs

formulés.

Cette approche a eu une influence considérable dans la pratique du management stratégique

dans les années 70. Depuis, elle a essuyé des revers importants et a pratiquement disparue.

Elle reprend pour l'essentiel les hypothèses de l'école de conception en décomposant son

élaboration en étapes distinctes et en lui donnant, sous forme de check-lists, une formalisation

plus rigoureuse. Reprenant l’évaluation des possibilités externes et internes de l’entreprise,

elle quantifie les orientations stratégiques de l’entreprise par des plans stratégiques à long

terme, moyen terme et court terme. Parallèlement, les objectifs, budgets et programmes

d’action sont suivis aux niveaux de l’entreprise, par domaine d’activité et fonctions. Le maître

mot qui domine cette école est le souci de la planification dans le détail avec comme

corollaire le contrôle. Cependant, cette école se démarque de l’école de la conception, en

introduisant dans l’élaboration stratégique, des planificateurs. En clair, l'équipe de « planning

stratégique » remplace, de fait, les dirigeants dans la phase de conception.

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La planification stratégique a commencé à chanceler dans les années 80 dans une sorte de

bataille entre les planificateurs « bureaucrates » et la direction qui se trouvait parfois court-

circuitée ainsi que les cadres intermédiaires soumis à des contrôles centralisés. Pour les

auteurs, la critique de cette école ne porte pas sur le processus de planification mais sur

l’illusion que prétendait entretenir cette école en voulant « recréer l’entrepreneur de génie »

dans son élaboration stratégique. Des procédures formelles, si complexes soient-elles, ne

permettront jamais de prédire des discontinuités, d’informer une hiérarchie sur le signe avant

coureur ou de créer des nouvelles stratégies. Il ne faut pas pour autant rejeter l’intérêt que

peuvent présenter les planificateurs dans l’analyse des données en vue de préparer la réflexion

stratégique ou l’examen des stratégies produites en aval. Ils peuvent servir également de

catalyseurs à la promotion de la planification formelle. Il faudrait à la fois des planificateurs

qui encourageraient la réflexion créative, les stratégies émergentes et d’autres qui se

préoccuperaient de la programmation formelle.

I- La planification est une procédure formalisée :

Mintzberg et ses coauteurs précisent ce que c’est la planification : « ce n'est pas ce que font

les planificateurs ».

A la suite de l'étude de plusieurs propositions de définition, Mintzberg retient cette

définition : "la planification est une procédure formalisée qui a pour but de produire un

résultat articulé sous la forme d'un système intégré de décisions".

Les auteurs s'interrogent ensuite sur les objectifs de la planification. Ici, cinq différentes

explications présentées par les planificateurs sont passées en revue.

On planifie pour coordonner les actions et les hommes, mais il s'agit d'une des méthodes pour

obtenir un consensus.

La planification est l'effort de formalisation, c'est à dire la décomposition, l'articulation

et la rationalisation.

On planifie pour s'assurer que le futur est systématiquement pris en compte, mais cela

ne signifie pas qu'il sera bien pris en compte.

On planifie pour se comporter de manière rationnelle, la décision formalisée étant plus

efficace que le non formalisé. Cette affirmation non prouvée est souvent contredite car

le processus de formalisation est trouvé réducteur.

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On planifie pour contrôler, à la fois la Direction Générale et la hiérarchie, mais aussi le

futur et l'environnement en rendant celui-ci moins complexe par décomposition.

Enfin on planifie car les systèmes formels permettent la programmation du processus

de formation de la stratégie, comme ils ont permis celle des processus opérationnels :

la planification est la suite du Taylorisme à un niveau plus élevé.

Mintzberg présente la notion de stratégie : à la fois un plan d'action pour atteindre une

situation future, la stratégie délibérée, et une suite de comportements cohérents dans le temps

qui ont entraîné la situation présente, la stratégie émergente. Les deux formes doivent être

prises en compte, mais dans la pratique, la deuxième est négligée.

La distinction entre stratégie comme position (produits, marchés,…) et comme perspective (la

conception qu'a l'entreprise de son activité) est ensuite rappelée, la première a été privilégiée

par la littérature car elle est plus formalisable, mais que là encore. Les deux formes devraient

être prises en compte.

Le processus de planification stratégique :

Mintzberg définit les relations plans, planification, planificateurs : "la formation de la

stratégie est un processus de planification, que les planificateurs conçoivent où auquel ils

apportent leur soutien, qui a pour objectif de planifier pour produire des plans."

Les auteurs présentent les modèles de processus de planification stratégique.

Le modèle de la planification est une évolution de celui de la conception. Les différences

d'hypothèses viennent du caractère informel, de la place du PDG comme acteur clé, et de

l'originalité des stratégies, qui sont remises en cause par l'école de la planification.

Les postulats concernant ce modèle sont :

la formation de la stratégie doit être un processus contrôlé et conscient aussi bien que

formalisé et détaillé, décomposé en étapes distinctes, chacune d'elles étant délimitée

par des check-lists et soutenue par des techniques.

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la responsabilité pour l'ensemble du processus est, en principe, entre les mains du

PDG ; la responsabilité pour son exécution est, en pratique, entre les mains des

fonctionnels de la planification.

les stratégies sortent de ce processus pleinement développées, typiquement sous la

forme de positions génériques qui doivent être expliquées de façon à pouvoir être

mises en œuvre par une attention vis-à-vis d'objectifs, de programmes, et de plans

opérationnels de diverses sortes.

La planification est décomposée en un ensemble de stades :

définition d'objectifs ; audit externe ; audit interne ; évaluation de la stratégie ;

opérationnalisation de la stratégie ; ordonnancement du processus.

Mintzberg s'intéresse ensuite aux modèles développés dans la littérature, ceux d'Ansoff et de

Steiner, remarque leur caractère très complet, mais s'interroge sur leur réelle application.

A ce stade, Mintzberg soulève déjà le problème de l'inexplication de la formation de la

stratégie par le modèle. De plus il met en lumière la confusion du processus de planification,

où l'articulation entre objectifs, budgets, stratégies et programmes n'est pas claire. Il propose

alors une décomposition en deux groupes de hiérarchies : d'un côté les hiérarchies destinées

au contrôle de la performance, celle des budgets et des objectifs, de l'autre celles destinées à la

planification de l'action.

Selon Mintzberg, la séparation des deux en raison de leurs relations complexes représente la

grande faille de la planification. Le contrôle est routinier, quantitatif, et a posteriori, alors que

la planification de l'action est unique, plus qualitative, et a priori : les plans opérationnels ne

servent qu'une fois.

Le traitement séparé des deux est source d'échec, et l'intégration des deux n'est pas explicitée.

Les auteurs présentent alors les deux formes de planification stratégique. On retrouve tout

d'abord la planification stratégique conventionnelle, où la hiérarchie instaurée tente de

résoudre le problème : les objectifs entraînent les stratégies qui déterminent les programmes

qui déterminent les actions, les trois premiers déterminant les budgets. La planification

comme jeu de nombres est ensuite présentée comme un "processus de génération de nombres,

pas de génération d'idées", d'où l'absence de stratégie.

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II- Le modèle de la planification stratégique de Steiner :

George Steiner a développé le modèle conceptuel de la structure et du processus de la

planification de l'entreprise systématique. Le modèle comprend les éléments suivants :

Définition des objectifs: c’est la quantification des buts de l’entreprise et qui remplace

la réflexion au niveau de l’école de la conception.

L’audit externe: évaluation de la situation externe de l’entreprise.

L’audit interne: évaluation des compétences distinctives.

L’évaluation: cette étape se prête à la modification et au perfectionnement par le biais

de méthodes diverses: calcul du retour sur investissement, analyse du risque, courbe

de valeur,…..

La concrétisation : tout le mécanisme (objectif, budget, stratégie et programmes) est

rassemblé en un système de plans opérationnels. Chacun partie est placé sous la

responsabilité d’une entité bien précise au sein de l’entreprise.

III- Les principes de l’école de la planification :

Les stratégies sont le résultat d’un processus maitrisé et conscient de planification

formelle décomposé en étapes distinctes dont chacune est délimitée par des listes et

étayée par des techniques.

Le PDG a la responsabilité de la totalité de ce processus. Dans la pratique, ce sont les

planificateurs qui prennent en charge son exécution.

Les stratégies découlent de ce processus, elles sont expliquées afin d’être appliquées

aux objectifs, aux budgets, aux programmes et aux divers plans opérationnels.

Le scénario :

Cette méthode repose sur la représentation plausible de différents futurs envisageables,

à partir de l’influence de facteurs clés environnementaux dont l’évolution est très

incertaine.

Le contrôle stratégique :

Maintenir l’entreprise sur les rails des stratégies prévues, conçu comme l’un des trois

modes d’élaboration stratégiques utilisables par le siège d’une entreprise présente dans

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plusieurs secteurs d’activité, il allie autonomie des pôles d’activité et souci des intérêts

de la société mère

IV- Les illusions de la planification stratégique :

Ce sont « les erreurs de raisonnement de la planification stratégique ». Il existe trois

illusions.

Mintzberg et ses coauteurs considèrent que ces trois illusions se fondent en une seule

et unique grande illusion.

Les auteurs critiquent la planification stratégique « sur l’idée que l’on peut développer

une stratégie grâce à un processus structuré (la planification ayant d’autre fonction

dans l’entreprise). »

Les illusions sont :

Illusion de la prédétermination : c’est la prévention de l’évolution de

l’environnement, de le contrôler ou d’en supposer sa stabilité.

Illusion du détachement : la tentative de « dépasser les particularités humaine et

systématiser les comportements »

Illusion de la formalisation : c’est de s’en douter de l’efficacité du système de

planification

La grande illusion serait donc : « la planification plutôt que de fournir de nouvelles

stratégies, ne peut que supposer leur existence préalable » par ce que l’analyse n’est pas une

synthèse : la planification stratégique n’élabore pas des stratégies.

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Conclusion :

La planification stratégique est un processus de la pensée autant qu'un plan d'action.

Concevoir de solides stratégies, c'est apprendre à penser stratégiquement, à se poser les

bonnes questions et à y répondre de façon ouverte et créative.

La question de la planification stratégique est encore totalement d'actualité.

L'accélération de l'économie, comme par exemple le raccourcissement de la durée de vie des

produits et l'innovation permanente, est générale. Elle est due entre autres aux nouvelles

technologies.

La planification en tant que programmation est ainsi confrontée au besoin de flexibilité dans

l'application de la stratégie. Les produits de plus en plus élaborés agrandissent la distance

entre les planificateurs et les managers, ce qui rend l'élaboration de la stratégie plus complexe.