· Je dédie ce livre à ma famille, à mes parents disparus, à mes enfants, Mal-laury, Ambre et...

34
Préface de Didier Chos

Transcript of  · Je dédie ce livre à ma famille, à mes parents disparus, à mes enfants, Mal-laury, Ambre et...

Comment notre alimentation peut-elle occasionnerdes douleurs ? En quoi consiste ce lien étonnant ?

Quel est le rôle de l’intestin, et celui de notre systèmeimmunitaire ? Comment notre alimentation et certains

nutriments peuvent-ils influer sur ces phénomènes ?Pour quels résultats ? Sont-ils durables ?

Cet ouvrage, qui allie connaissances fondamentales récentes et expérience

de terrain, acquises notamment ces dix dernières années auprès de patients

fibromyalgiques, propose une synthèse cohérente et une prise en charge très

détaillée. Étayé d’une bibliographie fournie, illustré de figures pédagogiques

et d’encadrés documentés, il s’adresse à toutes celles et ceux qui, dans leur

quotidien, dans leur travail ou par curiosité, sont confrontés à la douleur chronique.

Denis Riché est titulaire d’un doctorat de nutrition humaine. Fondateur de la micro-

nutrition et auteur d’une quinzaine d’ouvrages, il est notamment enseignant à la

faculté de Poitiers (responsable d’un DU consacré à la micronutrition), ainsi qu’à

la faculté de Pharmacie de Dijon (DU « Alimentation, santé et micronutrition »).

Il travaille encore beaucoup dans le domaine du sport, ce qui l’a amené à s’intéresser

plus particulièrement à la douleur, à la sphère digestive et à l’immunité.

Conc

eptio

n gr

aphi

que

: Prim

o&Pr

imo

9 782804 175702

ISBN : 978-2-8041-7570-2

NOUDOU

www.deboeck.com

Ne

nour

riss

ez p

lus

votr

e d

oul

eur

Mic

ronu

trit

ion

et fi

brom

yalg

ieD

enis

Ric

Préface de Didier Chos

NOUDOU_Mise en page 1 25/02/13 16:53 Page1

« NE NOURRISSEZ PLUS VOTRE DOULEUR ! »

« NE NOURRISSEZ PLUS VOTRE DOULEUR ! »

Denis Riché

Pour toute information sur notre fonds et les nouveautésdans votre domaine de spécialisation, consultez notre site web :

www.deboeck.com

© De Boeck supérieur s.a., 2013, 2e tirage 2014Fond Jean Pâques 41348 Louvain-la-Neuve

Maquett e intérieure : PAO Patrick Leleux

Tous droits réservés pour tout pays.Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notam-ment par photocopie) partiellement ou totalement le présent ouvrage, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.

Imprimé en BelgiqueDépôt légal :Bibliothèque nationale, Paris : avril 2013Bibliothèque royale de Belgique : 2013/0074/121ISBN : 978-2-8041-7570-2

Je dédie ce livre à ma famille, à mes parents disparus, à mes enfants, Mal-laury, Ambre et Jules-Adrien, à Delphine, à mes amis proches, dont Bernard et Karine chez lesquels j’ai trouvé l’énergie de reprendre le cours de mon projet et enfi n à tous mes patients, que je salue ici.

Je remercie Franck qui a passé de longues heures à retranscrire le contenu d’une de mes conférences sur ce thème, et le docteur Raffi n qui a consacré son précieux temps à relire avec att ention mon manuscrit.

VII

PRÉFACE

Denis Riché est à juste titre considéré comme un nutritionniste iconoclaste.Son parcours dans le domaine de la nutrition du sport depuis plus de

20 ans, dans le domaine particulier de la micronutrition depuis plus de 12 ans, att este de cet état d’esprit dans les diff érents domaines de sa recherche personnelle.

Son ouvrage Micronutrition, santé et performance, publié en 2008, faisant suite à de nombreuses publications concernant la nutrition des sportifs, est devenu un livre de référence pour tous ceux qui s’intéressent à la nutrition du sport, à la micronutrition dans le domaine de la performance, mais aussi dans toutes ses indications.

Tous les professionnels de santé peuvent à présent mieux comprendre les diff érents impacts de l’alimentation sur les états de santé, et notamment les liens entre nutriments, micronutriments et perturbations fonctionnelles de santé.

Ainsi le regard sur le microbiote nous invite à aborder les troubles fonc-tionnels digestifs, les maladies infl ammatoires de l’intestin, les infections récur-rentes, les hypersensibilités de toute origine avec de nouveaux outils, de nou-velles approches conceptuelles et thérapeutiques.

Dans le cadre des déséquilibres de l’écosystème intestinal, l’augmentation de la perméabilité intestinale est devenue depuis 20 ans un phénomène mieux connu, mieux compris, et de nombreuses pathologies sont revisitées à la lumière de ce mécanisme perturbant majeur.

Les observations des micronutritionnistes ont rapidement permis de conclure qu’un syndrome de l’intestin irritable pouvait évoluer isolément, parfois s’accompagner de troubles à distance faisant suggérer la présence

« Ne nourrissez plus votre douleur »

VIII

d’une hyperperméabilité intestinale, et enfi n être noyé dans un syndrome poly-algique chez certains patients, asthénique chez d’autres patients. La dif-fi culté du traitement s’en trouve amplifi ée, parallèlement à la complexité du tableau.

L’idée que certains perturbateurs pouvaient être la source de la chronicité et de l’ampleur des symptômes a été évoquée très précocement. L’aliment fut le premier à être désigné ; certaines protéines du lait, le gluten, vont être stig-matisés, entraînant des exclusions défi nitives souvent excessives.

Une meilleure connaissance de la population microbienne du microbiote oriente aujourd’hui les pistes de recherche vers certains de ses composants comme nouveaux perturbateurs. Le Candida albicans est le principal à fi gurer sur la liste, et joue probablement un rôle extrêmement complexe dans l’éclo-sion et l’entretien de nombreuses pathologies.

Sa responsabilité est évoquée dans l’entretien d’une pathologie doulou-reuse mystérieuse et passionnante, la fi bromyalgie.

Denis Riché s’est appuyé sur cett e hypothèse, sur les liens entre la perméa-bilité intestinale, la dysbiose, les réponses inadaptées du système immunitaire intestinal, pour modéliser les liens entre le contenu de l’assiett e, l’écosystème intestinal, les perturbateurs microbiens, les diff érents systèmes de régulation, et le contrôle de la douleur.

Cet exercice est particulièrement original, et bien sûr enrichit et justifi e le grand soin apporté aujourd’hui à notre microbiote.

Le modèle proposé n’a qu’intérêt théorique, il nous aide à mieux com-prendre et ainsi mieux traiter avec les thérapeutiques désormais usuelles du micronutritionniste.

Denis Riché dans ce livre nous propose les protocoles qui ont démontré leur effi cacité sur les patientes et patients att eints de fi bromyalgie.

Articulée autour d’un modèle d’épargne digestive, la restauration des pro-priétés du microbiote sera la première cible initiale ; le choix des souches pro-biotiques sera fait sur des critères individuels  ; celles qui bénéfi cient d’eff ets prouvés sur le candida seront largement utilisées lorsque le terrain sera évoqué.

La « cicatrisation » de l’intestin passe par l’ensemble des ingrédients limi-tant l’infl ammation de la muqueuse, et ceux qui exercent un eff et trophique.

Préface

IX

Enfi n, la déstabilisation de tous les systèmes de régulation sera corrigée au cas par cas avec des stratégies micronutritionnelles et à l’aide d’extraits de plantes standardisés.

Le grand intérêt de cett e approche est d’ouvrir de nouvelles perspectives de traitement anti-douleur pour les syndromes complexes, mais aussi d’off rir un modèle de réfl exion pour la prise en charge à venir de nombreuses patho-logies.

Didier Chos

XI

AVANT-PROPOS

Quelle drôle d’idée que celle de lier entre elles deux notions apparemment aussi étrangères que l’alimentation et la douleur ?

Ces dernières années, un certain nombre d’écrits ont fait évoluer la façon dont est perçue la relation entre le contenu de notre assiett e et notre santé. Avec des ouvrages tels que L’alimentation ou la 3e médecine de Jean Seigna-let (129), Le régime santé de Serge Renaud (116) ou Guérir de David Servan Schreiber (131), la « diététique » est enfi n sortie de la prison du dogme de la calorie pour aborder un nouveau continent, celui de l’alimentation - santé. L’idée qui domine, dans toutes ces publications issues d’années de réfl exion, d’expériences de terrain, d’échecs, d’investissements, est que, fi nalement, toutes les cellules de notre organisme fonctionnent avec des molécules, et que ces dernières ne nous tombent pas du ciel. Au contraire, chacun de nos choix alimentaires va infl uer sur le déroulement de fonctions essentielles, telles que l’immunité, la digestion, la mémoire, mais aussi sur tous les processus sensoriels qui nous permett ent, en permanence, de nous adapter à notre environnement et aux agressions qu’il recèle. Cela étant, penser que nos choix alimentaires puissent déclencher, amplifi er, att énuer ou au contraire éteindre des per-ceptions douloureuses relève encore d’une conception avant-gardiste de la physio logie. Ainsi, dans le dernier ouvrage de synthèse des pratiques nutri-tionnelles hospitalières, aucune ligne n’est consacrée à cett e idée (128). Nous verrons en quoi cett e idée n’a rien de saugrenu, si on considère que le support de toute information hormonale, nerveuse (donc sensorielle), ou immunitaire, repose sur la libération de molécules que certains de nos tissus élaborent à partir des constituants de notre ration.

Imaginer pouvoir constituer un modèle de l’alimentation « anti-douleur » a pris du temps. Il a fallu, en particulier, comprendre quels messagers portaient l’information de la douleur, d’où ils venaient, comment on les fabriquait, pour-quoi leur libération pouvait devenir chronique, pour ensuite élaborer peu à peu, pas à pas, une stratégie permett ant de contrer les états où elle s’était installé durablement. Ce n’est pas une approche facile à faire passer  ; dans

« Ne nourrissez plus votre douleur »

XII

l’esprit de l’homme de la rue, la douleur n’existe en eff et que si une agres-sion provoque une lésion. Alors, cett e dernière donne naissance à un message qui informe le cerveau de cett e situation. Autrement dit, dans cett e vision clas-sique, la douleur perçue est relativement proportionnelle au niveau d’att einte occasionné. Certes, régulièrement, des exceptions mal aidées par la Nature, expriment des plaintes exacerbées, évoquent des souff rances chroniques alors que, d’un strict point de vue anatomique, rien ne justifi e une telle particularité. On admet alors, sans doute un peu vite, qu’elles sont douillett es, n’ont pas de courage, voire « qu’elles en rajoutent » quand ce n’est pas qu’elles «  le font exprès  ». Mais en aucun cas leur existence ne remett rait en cause cett e vision orthodoxe de la nociception. Or, depuis une quinzaine d’années, une pathologie gagne du terrain dans toutes les classes de la population. Encore mal connue du grand public il y a seulement trente ans, elle appartient désor-mais de plus en plus au langage courant. Il s’agit de la fi bromyalgie, pathologie dont nous verrons plus loin la nature et le sens étymologique. Cett e épidémie soudaine a tout changé. En eff et, la fi bromyalgie constitue un véritable défi , tout en nous faisant prendre conscience des limites de notre connaissance de la douleur. Devant l’explosion fulgurante de la maladie, plus de deux millions de cas recensés rien qu’en France (la prévalence att eignant 3,9 % selon le Sénat), dont 10 % en invalidité totale, le corps médical commence à s’interroger. Chez ces patients, majoritairement patientes d’ailleurs, la douleur existe sans sup-port lésionnel. Elle pourrait donc paraître « virtuelle », voire être considérée comme une variante de l’hystérie, d’autant que la souff rance n’est jamais loin de la douleur et que le rhumatologue aura tôt fait d’adresser, en toute bonne foi, ces patients réfractaires aux approches classiques à des psychiatres de leurs connaissances.

Mais « psychiatriser » la fi bromyalgie conduirait à négliger un point essen-tiel  : la douleur qui la caractérise frappe de manière troublante toujours aux mêmes sites anatomiques, sur les mêmes zones musculaires, quelles que fussent les histoires et les origines de ces sujets. De surcroît, ces derniers se confron-taient très régulièrement à l’échec thérapeutique, au grand désarroi des spé-cialistes, habitués à traiter les lésions, mais pas la « virtualité ». Il s’agissait donc d’un véritable défi que de comprendre le sens de cett e maladie, les facteurs en jeu, et de remett re à plat la compréhension des mécanismes participant à la douleur. Ce faisant, l’identifi cation des phénomènes et des acteurs impliqués allait peut-être permett re d’imaginer des antidotes tirés de notre assiett e, qui soulageraient non seulement ces patients en proie à des souff rances trop vite qualifi ées d’imaginaires, mais aussi potentiellement tous ceux qui présentent des douleurs chroniques ou anormalement fortes associées à des lésions. Car

Avant-propos

XIII

certains d’entre nous se posent une question toute bête  : pourquoi, avec le même diagnostic, avec la même imagerie médicale, souff ré-je beaucoup plus que d’autres ? D’où vient cet écart ?

Ceux possédant une bonne expérience de la médecine du sport savent que, sur un diagnostic équivalent, certains patients vont exprimer une plainte douloureuse très importante alors que d’autres s’en accommoderont très bien. De la même manière, à titre d’exemple, dans le cas de l’arthrose, l’impor-tance de la douleur perçue est directement proportionnelle - et uniquement proportionnelle - à l’infl ammation, et pas du tout aux lésions. L’idée qui se dégage aujourd’hui, après plus de dix ans d’expérience au quotidien sur le terrain, c’est que derrière la lésion se cachent toujours de potentiels agents d’amplifi cation, d’origine biologique et, comme je vous invite à le découvrir dans cet ouvrage, majoritairement en relation avec nos choix alimentaires. Cela nous amène à penser que derrière le modèle de la fi bromyalgie, à chaque fois que l’on est confronté à une douleur chronique associée à des tableaux de perturbations très complexes, il est possible d’intervenir pour att énuer cett e douleur, indépendamment des aspects lésionnels. Cet ouvrage n’a pas pour vocation de constituer un traité fondamental ni un ouvrage de référence dans le domaine scientifi que ; il s’adresse plutôt à toutes les victimes de la douleur chronique auxquelles la médecine n’a pas su apporter de réponse satisfaisante. Il s’adresse aussi aux praticiens curieux et aux professionnels de la santé, qui trouveront dans ce livre, en dépit de son caractère résolument vulgarisateur, toutes les références aux articles ou aux publications ayant servi de support à ma réfl exion et à ce modèle. Je les invite à les parcourir et à poursuivre le che-minement qui les conduira sans doute au même constat que moi.

XV

SOMMAIRE

Préface ............................................................................................ VIIAvant-propos ...................................................................................XI

Chapitre 1. Un nouveau regard sur la douleur ................................. 11. Pour une approche systémique ....................................................................................12. Précisions sur la douleur ..................................................................................................32.1 De la douleur à la thérapie génique ...............................................................................32.2 Le paradoxe de la fi bromyalgie .......................................................................................42.3 Au cœur de la douleur .......................................................................................................62.4 L’amplifi cation mystérieuse de la sensation douloureuse .......................................92.5 Les messages de la douleur ............................................................................................ 132.6 Les messagers extérieurs : drôles d’invités surprise ! ............................................ 162.7 L’intestin perméable : le point de départ de la chronicité .................................. 173. L’écosysteme intestinal.................................................................................................. 183.1 Présentation  ........................................................................................................................ 183.2 L’écosystème : le pilier de la santé intestinale .......................................................... 193.3 La santé dans l’équilibre  ................................................................................................ 213.4 La réponse immunitaire s’exporte  .............................................................................. 223.5 De l’équilibre au déséquilibre ..................................................................................... 263.6 L’apparition de l’hyperperméabilité .......................................................................... 293.7 Synthèse sur intestin et douleur  .................................................................................. 34

Chapitre 2. Introduction à la micronutrition .................................. 371. Les outils de la consultation de micronutrition ................................................ 371.1 L’insuffi sance de l’approche orthodoxe .................................................................... 371.2 Partir des troubles fonctionnels .................................................................................... 392. La présentation des questionnaires ........................................................................ 402.1 Le « DDM »  ........................................................................................................................ 402.2 La « DNS »  .......................................................................................................................... 432.3 Le questionnaire alimentaire (QA) .............................................................................. 512.4 Le questionnaire de vulnérabilité digestive (QVD) ............................................... 542.5 Conclusion sur les outils de la consultation ............................................................... 57

« Ne nourrissez plus votre douleur »

XVI

Chapitre 3. Douleur et hyper perméabilité intestinale ................... 591. Introduction ........................................................................................................................ 591.1 La nécessité d’un modèle ............................................................................................... 591.2 L’hyperperméabilité et la douleur : des arguments

de plus en plus troublants  ............................................................................................. 621.3 La biologie fondamentale apporte

le maillon manquant ......................................................................................................... 641.4 Conclusion  .......................................................................................................................... 652. Le Candida albicans : au cœur de la tourmente ................................................. 662.1 Pourquoi tant d’intérêt pour lui ? ................................................................................ 662.2 Faire connaissance avec cet ennemi intime ............................................................... 662.3 Candida et hyperperméabilité intestinale ................................................................ 682.4 Candidose et fi bromyalgie ............................................................................................. 732.5 Un perturbateur immunitaire aux multiples impacts  ............................................ 732.6 Le responsable de symptômes polymorphes .......................................................... 792.7 Métaux lourds et fi bromyalgie  ..................................................................................... 81

Chapitre 4. La prise en charge des patients .................................... 831. Le recueil des données ................................................................................................... 831.1 Méthodologie ..................................................................................................................... 831.2 Les résultats  ........................................................................................................................ 852. Commentaires .................................................................................................................... 852.1 Commentaires sur le DDM ............................................................................................ 852.2 Résultats et commentaires de la « DNS »  ................................................................. 892.3 Le « QVD » ......................................................................................................................... 902.4 Le score de douleur .......................................................................................................... 912.5 La présence de « super antigènes »  .......................................................................... 913. Introduction d’un nouveau questionnaire : « le score de Francis » ......... 923.1 L’évaluation de la plainte digestive en gastro-entérologie .................................. 923.2 Le score de Francis conforte la relation intestin-douleur musculaire ............... 944. Conclusion sur les résultats initiaux ........................................................................ 95

Chapitre 5. Le protocole diététique et micronutritionnel anti-douleur .................................................................................... 971. La place essentielle des probiotiques .................................................................... 972. Prébiotiques et nutriments de la cicatrisation intestinale  ........................1012.1 Les prébiotiques, alliés de notre microfl ore ...........................................................1012.2 Les nutriments de la cicatrisation intestinale ...........................................................102

Sommaire

XVII

3. Quel régime alimentaire proposer ? .....................................................................1033.1 Les objectifs de ce régime anti-douleur ...................................................................1033.2 Les intolérances alimentaires – une aff aire de terminologie  .............................1043.3 Les récentes avancées de la biologie. Confi rmation de l’intérêt

potentiel d’un régime d’éviction ...............................................................................1073.4 L’éviction du gluten, mythe ou réalité ? ...................................................................1083.5 Les laitages, un cas d’école ...........................................................................................1103.6 Le régime anti-mycose  ..................................................................................................1123.7 Les aliments qui cicatrisent  ..........................................................................................1133.8 Les molécules alimentaires qui réduisent la douleur, magnésium

et taurine  ...........................................................................................................................1144. Conclusion : des résultats promett eurs  ..............................................................1154.1 L’évolution des scores du DDM  .................................................................................1154.2 L’évolution du score de douleur  ...............................................................................1174.3 Les perdus de vue  ..........................................................................................................1184.4 Conclusions et perspectives .......................................................................................119

Renvois bibliographiques  ............................................................. 123

1

1UN NOUVEAU REGARD

SUR LA DOULEUR

1 Pour une approche systémiqueLa médecine, aujourd’hui, scinde systématiquement le corps en organes et

fonctions, comme si les parties de ce tout étaient indépendantes les unes des autres. Cett e vision du corps conduit à une architecture de la médecine en spé-cialités dédiées à des organes ou à des systèmes isolés (endocrinologie, allergo-logie), mais ce découpage organisé montre ses limites quand une perturbation met simultanément en jeu plusieurs tissus. Pensons à ces enfants souff rant d’al-lergies, d’eczémas et de problèmes digestifs qui, en plus du pédiatre, voient déjà trois spécialistes diff érents, leur proposant sans doute tous un protocole spécifi que. Or, comme on le découvrira dans cet ouvrage, on peut aussi voir ces trois symptômes comme les conséquences d’un seul et unique problème : une perturbation de l’écosystème intestinal, état que certains spécialistes qualifi ent aujourd’hui de dysbiose. L’idée ici développée est de montrer qu’il y a sou-vent des perturbations qui démarrent dans un système particulier, par exemple la sphère digestive, et qui ont des répercutions à distance, dans bien des sites anatomiques, infl uant alors sur de nombreuses fonctions. Globalement, la fi bro-myalgie illustre de manière très nett e les limites de cett e vision de la santé. Il apparaît ainsi, avec le recul acquis sur plusieurs années, qu’en dépit d’une éty-mologie et une plainte plaçant le muscle au cœur du problème, nous sommes en fait en prise directe avec des problématiques digestives et immunitaires. Ce point de vue peut surprendre. Mais il est solidement argumenté comme nous le développons ici au fi l des pages.

Le morcellement du corps en parties et celui de la médecine en spécialités a conduit, en ce qui concerne la fi bromyalgie, à ce que chacun, selon son orien-

« Ne nourrissez plus votre douleur »

2

tation et son domaine de compétence, voie midi à sa porte. Pour l’un c’était «  psy  », pour tel autre il s’agissait d’un problème de magnésium, pour un troisième l’origine était génétique, quand un quatrième relevait la fréquence survenue d’épisodes de maltraitance dans l’enfance de ces sujets, et qu’un

Occipital : à l’insertion des musclessous-occipitaux (D et G)

Trapèzien : à la partiemoyenne du bord supérieur

du muscle (D et G)

À l’insertion au-dessusde l’épine de l’omoplate,

près du bord interne(D et G)

Épicondylien :2 cm au-dessous

des condyles (D et G)

Fessier : au quadrantsupéro-externe dela fosse (D et G)

Tronchantérien : enarrière de la saillie

du grand trochanter(D et G)

Genou : en regard ducoussinet graisseux

interne, près del’interligne (D et G)

Trapèzien : à la partiemoyenne du bord

supérieur dumuscle (D et G)

2e côte : justeà côté de la jonctionchondrocostale, à lasurface supérieure

(D et G)

Cervical bas : à la partieantérieure des espaces

intertransversaires(D et G)

DépressionArthralgies

RaideurAnxiété

Acrosyndrome

Dyspnée

Paresthésies

Syndrome secTroubles digestifs

Lysurie

Douleurspelviennes

Douleursthoraciques

Céphalées detension

Troubles de laconcentration et

mémorisation

Asthénie

Myalgiesà l’effort

Cellulalgies

Syndromedouloureux

Figure 1. Les deux tableaux paradoxaux de la fi bromyalgie.

Chapitre 1 • Un nouveau regard sur la douleur

3

dernier faisait référence aux défi cits en « oméga 3 » ou au stress chronique. Aucune de ces observations n’est fausse. Mais elles sont fragmentaires. La dif-fi culté consiste à considérer que ces facteurs puissent tous, peu ou prou, être présents, et surtout qu’il puisse en exister d’autres, encore plus déterminants et beaucoup moins sérieusement envisagés jusqu’alors… S’impose alors la néces-sité de hiérarchiser les informations pour construire un arbre décisionnel qui soit cohérent.

Dans cett e logique, nous allons développer un certain nombre de points essentiels pour la compréhension de ce modèle, sur lequel repose la prise en charge des patients se plaignant de douleurs chroniques. Ainsi, l’écosystème intestinal va jouer un rôle crucial dans notre réfl exion. Dans une autre partie, j’exposerai, la stratégie qui m’a amené à travailler sur plus de 220 dossiers de patients fi bromyalgiques, en développant une réfl exion de micro-nutrition-niste, faisant appel à ses outils habituels, c’est-à-dire ceux servant au recueil des informations. L’hypothèse de perméabilité intestinale va occuper une large place dans cett e réfl exion, avec notamment un élément qui pèse parti-culièrement lourd sur le plan épidémiologique : la candidose. Une anecdote assez cocasse, datant de plus de 5 ans, situe bien son importance. Dans le cadre des investigations relatives à ce travail de recherche, mon ami le docteur Didier Chos et moi-même avons rencontré à l’Hôpital de Lyon Sud le Profes-seur Grégoire Cozon, épidémiologiste travaillant sur la fi bromyalgie. Nous avons échangé sur nos statistiques, lui dans le Rhône et moi dans les Pyrénées Orientales. Dans ses résultats, 69 % de patients fi bromyalgiques présentaient une mycose, de mon côté j’en comptais 66 %. Hasard des chiff res ! En tout cas, cett e coïncidence épidémiologique très forte nous a poussés à poursuivre nos travaux.

2 Précisions sur la douleur

2.1 De la douleur à la thérapie géniquePour commencer la partie introductive, reprenons la notion de douleur

communément admise et utilisée : « la douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable liée à une lésion tissulaire existante ou poten-tielle ou décrite en termes d’une telle lésion » (International Association for the study of Pain- Merskey, 1979). Elle distingue les notions de «  douleur aiguë  » et celle de «  douleur chronique liée à une lésion  ». L’idée que la douleur puisse exister sans lésion n’est pas envisagée dans cett e défi nition. Et c’est toute la problématique de la fi bromyalgie. Les rhumatologues et les

« Ne nourrissez plus votre douleur »

4

spécialistes de la médecine interne sont très à l’aise quand il existe une lésion ou une att einte. Pour eux, il s’agit d’une situation sur laquelle ils disposent de protocoles qui donnent des résultats dans un certain nombre de cas. Or, le fi bromyalgique exprime une plainte douloureuse particulièrement forte mais sans support lésionnel. L’une des pistes de réfl exion, pour comprendre ce paradoxe, serait la suivante ; puisque ces patients expriment une douleur et qu’il n’y a pas de lésion, c’est que dans l’expression de la douleur surviennent des anomalies. Vers où aller ? Sans surprise, c’est sur la piste génétique que les chercheurs se sont d’abord lancés. Ainsi, certains auteurs se sont demandé si, chez ces patients atypiques, il n’existait pas une surexpression de certains gènes codant pour des neurotransmett eurs ou des neurorécepteurs en jeu dans la transmission de la douleur. Autrement dit, ce sont des patients pour qui la production de glutamate ou la fabrication de substance P, médiateur de la douleur, dysfonctionne. À cause d’une production excessive, généti-quement programmée, de ces messagers de la douleur, ces patients sont-ils condamnés de manière innée à avoir mal ? Forts de cett e conviction, certains n’ont pas hésité, pendant un certain nombre d’années, à classer la fi bromyal-gie parmi les maladies orphelines ; sans résultat. Trente ans après les premiers écrits sur cett e hypothèse, malgré les investissements consacrés à l’étude de nos chromosomes, rien n’est ressorti. Pourtant, suite au dernier congrès de septembre 2011, le compte rendu d’un rhumatologue de Perpignan, le doc-teur Matzloff suggère que  : «  la piste génétique semble enfi n solide  ». À terme, des thérapies géniques vont donc être imaginées. Sur quelles parties de notre ADN ? Mystère.

2.2 Le paradoxe de la fi bromyalgieLa fi gure 1 permet de mett re en lumière l’aspect paradoxal de la maladie.

D’un côté, on l’identifi e sur la base de points musculaires douloureux très précis, de l’autre, on lui reconnaît de fréquentes autres plaintes d’une grande diversité.

Aujourd’hui encore, on lit dans les ouvrages médicaux récents que  : «  la fi bromyalgie se caractérise par un état neuropathique douloureux chronique de jour comme de nuit accompagné de multiples symptômes associés  ». En dépit de cett e défi nition qui englobe de nombreux points d’appel, le para-digme de la fi bromyalgie pour la médecine, encore aujourd’hui, est le dysfonc-tionnement du système nerveux autonome et du contrôle des douleurs. C’est-à-dire que, de ce point de vue, quelque chose dans le cerveau fonctionnerait de manière anormale, au point de se trouver à l’origine de cett e douleur. Sous cet angle, la fi bromyalgie serait donc purement cérébrale. C’est donc bien pour

Chapitre 1 • Un nouveau regard sur la douleur

5

cela que, lorsque le diagnostic écarte la polyarthrite, (la diffi culté à établir le diagnostic diff érentiel montre bien la réalité de la douleur perçue), le rhumato-logue ne trouvant pas de lésion considère que «  c’est dans la tête ! » et passe la main au psychiatre qui va travailler en pharmacologie, sur les molécules qui sont supposées jouer sur l’att énuation ou l’accentuation de la douleur. Nous ver-rons plus loin que certaines molécules comme la sérotonine, dans le contexte de ces tableaux chroniques relevés, peuvent être très peu disponibles pour des raisons purement physiologiques. Sans trop anticiper, évoquons que tout ce qui touche la fonction intestinale, l’activité hépatique ou un état infl ammatoire peuvent interférer avec sa synthèse. Autrement dit, des raisons physiologiques peuvent provoquer des manifestations psychologiques. Mais, dans cett e aff aire, est-ce la poule ou l’œuf ; est-ce la conséquence, est-ce la cause ou bien les deux observations sont-elles liées à autre chose ? Nous verrons plus loin ce qu’il faut en penser.

Cette définition ne fait aucune référence officielle aux symptômes diges-tifs ou à l’immunité alors même que, des gens comme Grégoire Cozon (34) ont largement publié dans des congrès d’immunologie aux États-Unis sur les liens établis entre la candidose, le staphylocoque doré, le syndrome de fatigue chronique et la fibromyalgie. Restant confinée principalement à l’approche psychiatrique, la prise en charge officielle offre la perspective d’un marché juteux et inespéré à une industrie pharmaceutique en perte de vitesse. Avec 2 millions de fibromyalgiques en France, nul doute que les laboratoires vont tenter de mettre au point des molécules « spécifiques », à action cérébrale.

La défi nition de la fi bromyalgie, quand on la synthétise, est extrêmement troublante1. Il existe une espèce de schizophrénie sémantique ; on déclare un certain nombre de points douloureux qui ont été répertoriés (voir fi gure 1 page 2)  ; cela veut dire que la patiente – puisque 75 % environ des fi bro-myalgiques sont des femmes – qui n’a que neuf points douloureux sur les onze requis, ne vas pas être qualifi ée de « fi bromyalgique ». À la place, on évoquera un syndrome de « polyalgie chronique idiopathique ». Ce qui va la rassurer énormément, car dans le premier cas on ne sait pas quoi faire alors que dans le second cas, on ne sait pas quoi proposer. Ce qui change tout …

1. Ce n’est qu’en 1992 que l’Organisation mondiale de la santé a reconnu cett e maladie comme rhumatismale, alors qu’elle était auparavant considérée comme une maladie psychiatrique par les médecins. Le mot fi bromyalgie vient du latin fi bro (fi bre) et myo (muscle), et du grec algie (douleur). Il s’agit donc de douleurs chroniques des muscles du squelett e qui touchent le corps tout entier, augmentant tout au long de la journée pour att eindre leur maximum durant la nuit. C’est pourquoi, elles entravent profondément la vie quotidienne.

« Ne nourrissez plus votre douleur »

6

Le paradoxe est qu’autour de ce syndrome douloureux, il existe une kyrielle de symptômes associés qui ont été clairement répertoriés. Cett e situation est à l’image du syndrome de surentraînement décrit chez le sportif (119). Ainsi, la Société Française de Médecine du Sport avait-elle lors du Congrès de 1999 (consacré à ce thème), identifi é plus de 50 critères qui s’y ratt achent. Une telle pléthore, mett ant sur le même plan des troubles d’ampleur et d’expres-sion variables, montre à quel point, dans ces deux situations, on patauge allè-grement.

Autrement dit, le diagnostic repose sur le dénombrement des points douloureux, et dans le même temps, on admet que le sujet fibromyalgique peut être considéré comme tel en raison de la présence d’une grande diversité de symptômes, en dehors des douleurs musculaires, communes à tous. Le problème est qu’une médecine qui décrit des symptômes n’en donne pas forcément les causes et, une fois encore, les spécialistes ne disent pas par où aborder la question. Cette situation peut expliquer qu’un grand nombre de patients se tourne vers des approches alternatives, car bien évi-demment la réponse qui consiste à leur affirmer «  vous n’avez rien  », et qui sous-entend en fait « vous n’avez rien de lésionnel », laisse toujours la fin de la phrase en suspens. Si ces spécialistes allaient au bout de leur idée, ils concluraient par un brutal  : « c’est dans la tête », ce qui n’est pas faux puisque, par nature, les douleurs sont intégrées au niveau cortical  ; mais évidemment, cela ne répond ni à leur plainte ni à leur demande de consi-dération.

2.3 Au cœur de la douleurComment fonctionne la douleur  ? La physiologie nous l’explique bien. Il

intervient d’abord un facteur qui agit sur un capteur sensoriel. Il peut s’agir d’une pression importante, ce peut-être une chaleur excessive, ce peut être la présence d’un corps étranger dans un tissu. Les thermorécepteurs et les méca-norécepteurs qui conduisent l’information douloureuse, ont un niveau de sol-licitation beaucoup plus important que s’il s’agit de lire du braille ou de regar-der si le radiateur fonctionne. Ainsi, le seuil de détection des thermorécepteurs ou des mécanorécepteurs se situe à un niveau cent fois plus élevé. Cela signifi e qu’il existe des conductions nerveuses de la douleur très particulières, dont les voies sont détaillées sur la fi gure 2.

Une fois l’information réceptionnée, un messager est libéré. Ce messager de la douleur, qui appartient à la grande famille des neurotransmett eurs, va faire remonter l’information le long du neurone (voir fi gure 3 et encadré 1), avec éventuellement un relais au niveau médullaire (précision dont l’apport

Chapitre 1 • Un nouveau regard sur la douleur

7

ne change rien au raisonnement). L’information arrive au niveau du cortex. Pre-nons un exemple pour bien comprendre. Imaginons que je tape sur le doigt avec un marteau. Il s’ensuit une stimulation des mécanorécepteurs, la molécule est libérée le long des voies nerveuses et arrive très rapidement au niveau du cerveau et là, je crie « aïe » ! Donc forcément, quand il n’y a pas de lésions et que la personne hurle malgré tout, les physiologistes sont un peu démunis.

D’où vient ce paradoxe ? Au niveau de la physiologie, l’information est relayée par plusieurs voies distinctes. Cela répond à un objectif : en fonc-tion de la nature de la stimulation, des relais utilisés, il va y avoir tour à tour une douleur diffuse, puis une autre plus profonde qui tend à deve-nir durable. Quand il existe des stimulations chroniques de certaines aires corporelles, avec une douleur quelque peu récurrente, ces douleurs chro-niques se manifestent de manière moins précise que si on se coupe ou qu’on se casse le doigt. Ainsi, les personnes qui en sont victimes ont du mal à les localiser : « j’ai mal dans le ventre, j’ai mal dans le dos … ». De fait, on rencontre avec la fibromyalgie ce paradoxe d’une situation où cohabitent des points douloureux musculaires très précis et des douleurs diffuses que les patients ne sont pas capables de caractériser. En fait, l’information va faire appel à des relais, à d’autres molécules dès lors que l’information la

Figure 2. Les voies de la douleur.

« Ne nourrissez plus votre douleur »

8

douleur persiste. Pour illustrer simplement cette transmission d’informa-tion, retenons l’image de la clef (le messager) qui va dans la serrure (le récepteur). On verra comment cette image pédagogique évolue dans le cas de la douleur chronique.

On observe la même chose au niveau viscéral. En eff et, il ne faut pas perdre de vue que l’on dispose de plus de neurones dans l‘intestin que dans la moelle épinière. De ce fait, les nocicepteurs intestinaux qui sont également sensibles aux molécules du système immunitaire, les cytokines, vont transmett re des informations douloureuses diff uses qui vont pouvoir participer au syndrome de douleur.

Pour résumer, l’approche proposée jusque là a consisté à travailler sur les molécules susceptibles de jouer un rôle antagoniste des messages de la douleur, dans le but d’arrêter la transmission de l’information douloureuse. Divers messagers participent au codage et à l’ajustement de l’information. Interviennent ainsi des molécules telles que les endorphines, le gaba, le glu-tamate, la substance P, la sérotonine, que nos cellules fabriquent à partir des nutriments de notre ration, en fonction de notre aptitude à les digérer et à les assimiler.

Figure 3. Le neurone (d’après un document pédagogique de l’IEDM).

Chapitre 1 • Un nouveau regard sur la douleur

9

Encadré 1

Le neurone est constitué de trois parties fonctionnelles spécialisées ; d’une part le corps cellulaire (1), d’autre part des voies afférentes (les dendrites), enfi n une voie efférente l’axone, qui se termine par le bouton synaptique. Le corps cellulaire est le lieu privilégié des étapes de la biosynthèse des neuromédia-teurs. Nous retrouvons au sein même de ce corps cellulaire toutes les activités non spécifiques observées au sein des autres cellules. Après la synthèse des molécules fonctionnelles, les neurotransmetteurs, ceux-ci sont stockés dans le bouton synaptique de la zone terminale de l’axone sous forme de petites vésicules (2). Leur libération donnera lieu à l’activité dans la fente synaptique (3), où le messager se lie au récepteur (4). Au sein de cette synapse, existe un matériel enzymatique important permettant la dégradation du neurotrans-metteur après son action sur les récepteurs (7). Le neurotransmetteur ainsi libéré peut donc agir directement sur les récepteurs post synaptiques au seindes corps cellulaires ou des dendrites du second neurone, être dégradé par les enzymes de la synapse, ou être enfi n l’objet d’une recapture, afi n d’être recyclé par le premier neurone (5, 6).

Sur le plan clinique, notons que si des récepteurs sont occupés par des « agonistes » ou des « antagonistes », le neurone présynaptique essaiera d’ajuster son taux de libération des messagers de façon à maintenir un fl ux d’information constant. C’est un point important, car on pourra, de ce fait, ren-contrer des situations évocatrices d’états d’hypo activité de certaines voies neuronales associées à des taux circulants supérieurs à la norme…Com-prendre ce paradoxe ne sera possible qu’en considérant la problématique délicate de l’activité des récepteurs.

2.4 L’amplifi cation mystérieuse de la sensation douloureuseQuand on regarde ce système dans les détails, on peut apporter des

nuances qui ont leur importance. Ainsi, on sait que des messagers principaux interviennent au niveau des relais médullaires et au niveau cérébral, et qu’il existe aussi des acteurs « annexes », qui vont att énuer ou amplifi er le message. Concernant la douleur, pour une même lésion, le message perçu sera donc d’un niveau variable selon l’intervention plus ou moins importante de ces messagers « annexes ». Pour prendre une image, c’est comme si vous passiez (d’une dou-leur « normale ») d’une situation où vous joueriez de la guitare sèche, à une autre où (douleur accrue ou réduite), vous allumiez ou non l’ampli. Nous ver-rons que dans les mécanismes qui peuvent expliquer ce syndrome de douleurs chroniques, certaines molécules, dont nous évoquerons l’origine, sont capables de participer à une amplifi cation très importante de la sensation douloureuse.

« Ne nourrissez plus votre douleur »

10

Cela nous amène à reparler brièvement du neurone, car, évidemment, la modulation de l’expression de la douleur est en lien avec son fonctionnement. Il faut évoquer ici l’objectif de la transmission neuronale, telle qu’elle est décrite sur la fi gure 3 et dans l’encadré 1. Il s’agit de maintenir constante la « densité » d’informations transmises. C’est-à-dire que tout est mis en œuvre, dans ce tissu, pour que la liaison entre le messager et le récepteur ait la même probabilité de survenue dans n’importe quelle circonstance. Autrement dit, tout ce qui se passe au niveau physiologique, dès qu’il y a un défi cit, vise à prévenir le risque que l’information soit diluée. C’est pour cela qu’à un moment donné, quand la synthèse d’un neurotransmett eur baisse, il n’y a pas d’impact immédiat sur les mécanismes de transmission. La répercussion se fera au terme d’un assez long délai. Entre temps, des mécanismes adaptatifs se mett ent en place, notam-ment au niveau des récepteurs post-synaptiques (voir la fi gure 4 et l’encadré 2 page 12). On observe ainsi la survenue d’un processus que l’on nomme, en physiologie, «  l’up-regulation  » («  régulation à la hausse  »), qui consiste en une augmentation du nombre de récepteurs post-synaptiques. Grâce à cela, on voit s’accroître la probabilité que les molécules messagères, alors moins nom-breuses, rencontrent quand même un récepteur et que l’information passe au niveau optimal. Pour parler plus clairement en langage de nutritionniste, un défi cit de la synthèse de la sérotonine ou de la dopamine (molécules fabri-quées à partir de constituants de notre assiett e, comme nous le verrons), ne va pas tout de suite donner lieu à une symptomatologie caractéristique d’un défi cit. L’organisme, dans un premier temps, s’adapte, compense ; ce qui veut dire que lorsque les symptômes cliniques s’expriment, ces mécanismes de com-pensation ne suffi sent plus. On est déjà profondément défi citaire.

On doit aussi considérer l’existence des interventions pharmacologiques qui vont interférer sur la durée de vie sur la molécule au niveau de la synapse. En eff et, certains médicaments, de la classe des « inhibiteurs de la recapture de la sérotonine » (IRS) ou encore les » inhibiteurs des enzymes de dégradation » (les enzymes en question se nomment les « monoamine oxydases » et les molécules pièges sont abrégées les « IMAO ») modifi ent la nature et la durée de la liaison du messager à son récepteur, et visent à restaurer une densité d’information « nor-male ». Toutes ces stratégies pharmacologiques ont en fait pour but de maintenir de manière artifi cielle une probabilité de rencontre à peu près correcte2.

2. C’est pour cela que si vous arrêtez un peu vite une complémentation visant à restaurer la séroto-nine par exemple, vous pouvez vous trouver confronté à un retour de signes évocateurs de défi cits, alors qu’au bout d’un mois ils semblaient avoir disparu. Considérons par exemple qu’au moment de la première consultation, la synthèse de la sérotonine correspondait à 50 % de l’optimal, avec une densité de récepteurs de 120 %. Cet ajustement n’empêche pas l’émergence de signes fonctionnels.

Chapitre 1 • Un nouveau regard sur la douleur

11

Certaines théories relatives à la fi bromyalgie reposent sur l’hypothèse d’une perturbation profonde de l’expression des messages douloureux. Les auteurs de certains modèles se sont ainsi demandés si, dans le cadre de la biosynthèse de nos neuromédiateurs, certaines voies défaillantes pouvaient favoriser des défi cits en plusieurs molécules, en jeu dans la douleur, au point de favoriser cett e maladie. Ainsi, certains scientifi ques écrivent que beaucoup de patients fi bromyalgiques seraient défi citaires en magnésium. Ce n’est pas faux, mais chez beaucoup de sujets qui ne sont pas fi bromyalgiquse on rencontre égale-ment de fréquents défi cits en cet élément. Cela signifi e simplement que dans le cadre de la fi bromyalgie ce n’est pas le défi cit en magnésium qui est isolément et exclusivement responsable. Ce n’est qu’une pièce du puzzle parmi d’autres.

On comprend aussi les liens qui ont pu être faits à un moment donné, par certains biologistes, entre les défi cits en acides gras « oméga 3 », constituants importants des membranes où se nichent les récepteurs (voir l’encadré  1 page 9), et la fi bromyalgie. Mais là encore il existe un biais de raisonnement. En eff et, si beaucoup de sujets fi bromyalgiques sont défi citaires en « oméga 3 », beaucoup de sujets, au sein de la population générale et non souff rants, en sont également défi citaires (27). Cela ne veut pas dire là non plus que cett e parti-cularité ne joue pas un rôle. Mais si la question posée en micronutrition est de savoir comment corriger le trouble fonctionnel, c’est-à-dire la douleur, la prio-rité n’est peut être pas de corriger en première intention cett e anomalie, ce qui reviendrait, fi nalement, à procéder à une complémentation « statistique » étrangère à la question de la douleur, qui est pourtant celle qui a amené le patient chez nous. De la même manière, nous voyons des patients qui souff rent de fi bromyalgie chez qui l’on a dosé l’iode, la vitamine D, et établi l’existence de défi ciences. La correction, de ces anomalies biologiques est certes louable. Mais répond-on vraiment, ce faisant, au problème de douleur amenant le patient en consultation  ? Ou bien s’agit-il d’une composante annexe, indé-pendante, qu’il faut considérer avec le même sérieux que chez n’importe quel autre patient, mais sans plus ?

Donc, pour résumer, dans la logique d’une prise en charge micronutrition-nelle de la fi bromyalgie, la question à se poser serait de savoir quelles sont les molécules qui interviennent et de comprendre ce qui se passe au niveau de ces récepteurs.

Sous l’eff et d’un mois de correction, on peut voir la synthèse passer à 70 % de l’optimal, avec des récepteurs encore surnuméraires. La situation rencontrée permet alors une densité à peu près cor-recte de l’information. La situation semble s’être normalisée et on arrête la complémentation…juste au moment où le processus d’up regulation cesse. Elle correspond alors à une synthèse insuffi sante avec une densité normale de récepteurs : les signes fonctionnels reviennent de fait en force.

« Ne nourrissez plus votre douleur »

12

Figure 4. Hypersensibilité et désensibilisation.

Encadré 2 : Comment les récepteurs modulent l’information

Lorsqu’un neurotransmetteur (représenté en violet) est normalement syn-thétisé, normalement stocké puis normalement libéré, le fl ux d’information transmis au niveau du récepteur (en jaune) est optimal (partie haute de la fi gure). Dans ce cas, les récepteurs synaptiques sont sensibles à ce message chimique. S’ensuit alors la cascade physiologique normale et la transmission du signal aboutissant à l’effi cacité physiologique.

En cas d’augmentation anormale du fl ux de neurotransmetteurs libérés (partie gauche du schéma), un mécanisme normal et physiologique de régu-lation se met en place : c’est la down regulation ou désensibilisation post-synaptique. Les quantités de récepteurs s’exprimant diminuent, la stimulationdu deuxième neurone s’en trouve diminuée, la régulation est faite.

Inversement, comme cela arrive en cas de défi cit de synthèse, il peut sur-venir une diminution du fl ux des neuromédiateurs (partie droite de la fi gure). Cela aboutit normalement à un phénomène d’up regulation, encore nommé « hypersensibilité » : de très nombreux récepteurs apparaissent sur la sur-face des membranes post-synaptiques afi n d’augmenter la probabilité de ren-contre avec le messager, de façon à transmettre un signal approprié malgré ladiminution du taux des médiateurs synaptiques.

Chapitre 1 • Un nouveau regard sur la douleur

13

2.5 Les messages de la douleurVoyons maintenant quels messagers jouent un rôle infl uent dans la perception

de la douleur. Evoquons d’abord le glutamate. Il s’agit d’un acide aminé (voir l’en-cadré 3 page 16) tiré de notre alimentation et doté d’un eff et excitateur. De ce fait, sa présence à un taux élevé va amplifi er la nociception, en particulier au niveau du relais médullaire. Retenons donc que le glutamate est un neurotransmett eur qui contribue à majorer la douleur. Il s’agit d’un acide aminé non essentiel, ce qui signifi e que ses taux ne dépendant pas seulement des apports, et que toute ten-tative de modifi cation de son statut peut se voir compensée. De plus, sa diff usion et son transport au sein de notre organisme sont à la fois extrêmement faciles, et complexes à étudier ou à moduler. Ce n’est donc pas sur lui que l’on va pouvoir intervenir de façon majeure pour moduler l’intensité douloureuse. Par ailleurs certains de ses récepteurs, sans trop entrer dans les détails, notamment ceux qui sont désignés en abrégé par « NMDA »3, voient leur action favorisée dans un tel contexte. Des dérivés oxydés du tryptophane, viennent s’y lier, alors que la syn-thèse de sérotonine - faute de précurseur - chute. En eff et, c’est un point impor-tant, cet acide aminés essentiel constitue le précurseur de la sérotonine, mais il se trouve détourné de sa fonction première dans un tel contexte (136). Cela peut conduire, à terme, à l’instauration de douleurs chroniques diff uses. À ce jour, il existe d’ailleurs peu d’études ayant porté sur ce neurotransmett eur, alors même qu’il participe de manière indéniable aux mécanismes de la douleur.

On s’est beaucoup plus intéressé à un peptide appelé substance P, véritable porte parole des voies douloureuses. Les peptides font partie de la grande famille des protides (voir l’encadré 3 page 16). L’une des hypothèses émises pour tenter d’expliquer l’origine de la fi bromyalgie repose sur l’idée selon laquelle les sujets qui en sont att eints disposeraient d’un phénotype (c’est-à-dire d’un profi l géné-tique particulier) qui les prédisposerait à fabriquer beaucoup plus de substance P que la normale. Autrement dit, quand ils se tapent sur le doigt avec un marteau leur ressenti équivaudrait à celui qui résulterait de l’écrasement des phalanges par un camion. Le seul argument pour soutenir cett e idée repose sur l’observa-tion de Russell et coll (125), ayant mesuré des valeurs plus élevées de cett e molé-cule dans le liquide céphalo-rachidien de sujets fi bromyalgiques, comparative-ment à des sujets sains. Mais en situation de douleur chronique, est-ce si étonnant qu’on libère en plus grande quantité une molécule qui y prenne part ? Cause ou conséquence ? C’est comme si l’on disait :  « Les sujets stressé ont un taux de

3. NMDA : c’est le nom abrégé de « N-méthyl D aspartate (NMDA). Le sous-type NMDA a un rôle essentiel dans les douleurs chroniques par amplifi cation du stimulus au niveau médullaire et thalamique lors d’une stimulation prolongée douloureuse.

Comment notre alimentation peut-elle occasionnerdes douleurs ? En quoi consiste ce lien étonnant ?

Quel est le rôle de l’intestin, et celui de notre systèmeimmunitaire ? Comment notre alimentation et certains

nutriments peuvent-ils influer sur ces phénomènes ?Pour quels résultats ? Sont-ils durables ?

Cet ouvrage, qui allie connaissances fondamentales récentes et expérience

de terrain, acquises notamment ces dix dernières années auprès de patients

fibromyalgiques, propose une synthèse cohérente et une prise en charge très

détaillée. Étayé d’une bibliographie fournie, illustré de figures pédagogiques

et d’encadrés documentés, il s’adresse à toutes celles et ceux qui, dans leur

quotidien, dans leur travail ou par curiosité, sont confrontés à la douleur chronique.

Denis Riché est titulaire d’un doctorat de nutrition humaine. Fondateur de la micro-

nutrition et auteur d’une quinzaine d’ouvrages, il est notamment enseignant à la

faculté de Poitiers (responsable d’un DU consacré à la micronutrition), ainsi qu’à

la faculté de Pharmacie de Dijon (DU « Alimentation, santé et micronutrition »).

Il travaille encore beaucoup dans le domaine du sport, ce qui l’a amené à s’intéresser

plus particulièrement à la douleur, à la sphère digestive et à l’immunité.

Conc

eptio

n gr

aphi

que

: Prim

o&Pr

imo

9 782804 175702

ISBN : 978-2-8041-7570-2

NOUDOU

www.deboeck.com

Ne

nour

riss

ez p

lus

votr

e d

oul

eur

Mic

ronu

trit

ion

et fi

brom

yalg

ieD

enis

Ric

Préface de Didier Chos

NOUDOU_Mise en page 1 25/02/13 16:53 Page1