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AmberJames

BADDESIRES

Volume3

ZOOT_003

1.Contremauvaisefortuneboncœur

Portablevisséàl’oreille,jem’efforcedemaîtrisermonrythmecardiaque.Lesmotsd’Alexandersiempreintsdegravitérésonnentencoredansmatête:«JesaisquiestUndercover!»

–Parle!m’impatienté-je,unpeuinquiètedelesentirhésitantettendu.–Cen’estpasunehistoiredesorcellerie,répond-ildansunsouffle.–C’estdéjàça,lâché-jedupourdétendrel’atmosphère.Maisviens-enauxfaits!–C’est à caused’une simple cartemémoire,Aileen.Surun appareil photo, elle peut également

faireofficedetransmetteurWiFi/Eye-Fialimentéparlabatterie.–Là,c’estduchinoispourmoi,tusais?

Même si je crois comprendre à peu près, je suis un peu dépassée par cet aspect technique del’affaire. Je me concentre néanmoins sur chaque mot prononcé par Alexander qui poursuit sonexplication:

–Jevaistenterd’êtreplusclair!D’ordinaire,pourmontravailpersonnel,j’utiliseunLeicaassezancienquin’estpaséquipédecesystème,maisilsetrouvequ’ilestenrévision.

–Ettuenasdoncprisunautre?deviné-je.–Oui,monboîtierproréservéauxshootingsenstudio.–Ainsimondestinestliéauchoixd’unappareil!soupiré-je.Commequoil’équilibredanslavie

netientpasàgrand-chose.–Etj’ensuisvraimentdésolé,Aileen,dit-il.Toujoursest-ilqu’aprèsavoirpriscesclichés,jesuis

passéaustudio.J’avaisdeuxheuresdebattementavantunvolprévuenjetpourmasessiond’escaladeauMexique.Lalumièreétaitsuperbe,alorsj’aifaitquelquesphotosdelavilleparlabaievitrée.Orlacartemémoiredel’appareildevaitêtrepleineetlesimagesqu’ellecontenait,dontlestiennes,ontététransmisesautomatiquementparconnexionWiFiàl’ordinateurdustudio,surunfichierdédiéaustockageetautraitementultérieurdesdonnées.Ceprincipeestdevenuunetellehabitudequejen’aipaspercuté.

–Tuveuxdoncdirequec’estàcausedecesystèmeWiFiquetoutestarrivé?–Oui, c’est seulement en démarrant l’ordi tout à l’heure que j’ai découvert tes photos classées

dans un dossier. Et elles n’étaient plus dans mon boîtier, puisque la carte se débarrasseautomatiquementdesvuesquiontététransféréesentoutesécurité.Jenesaispassijesuisclair?

– C’est un peu compliqué, avoué-je, mais je crois saisir l’essentiel. Les images seraient doncpasséesdetonappareilàl’ordinateur,cequiexpliquequequelqu’unapulesutiliser,c’estça?

–C’estexactementça.–Cequivoudraitdireque…–…c’estforcémentquelqu’undel’équipe,coupe-t-il.Noussommesquatreàoccuperleslieuxet

àconnaîtrelemotdepasse.Commecen’estpasmoi,ilresteparconséquenttrois…suspects.

LafaçondontAlexandervientdeprononcerleterme«suspect»montreàquelpointilsembleàla

fois révolté et consterné. Je frémis à la pensée qu’une personne de son entourage pourrait nousvouloirdumal.Jemedemandebienpourquoietjemedismêmequec’estcarrémentinsensé,maislefaitestquelesphotossontsurTwitter.

–Commenttucomptest’yprendre?lâché-je.Qu’est-cequejepeuxfairepourt’aider?–Toi,turestesauchalet,d’accord?–Maisje…–C’estplussûr,Aileen!mecoupe-t-il.Jenesaispasquiafaitça,maisj’aicommeunmauvais

pressentiment.–Commentça?Alexander,explique-moi!Est-cequetume…cachesquelquechose?–Non, c’est plus compliqué, élude-t-il, je dois vérifier certains détails avant deme prononcer,

maisjetetiensaucourantleplusvitepossible.Turestesauchalet,c’estcequ’ilyademieux.Fais-moiconfiance,tuveuxbien?

Toujoursfaireconfiance,sansjamaisriensavoir,j’enaiunpeumarre!

Jenesuispasraviequ’ildécidepourmoi,jeletrouvetropdirectif.Etcarrémentmystérieux.Cettehistoiremeconcernetoutdemêmeaupremierchefetondiraitqu’ils’évertueàmeteniràl’écart.Commes’il neme racontait pas tout…oucommes’il jugeait que jene suispas enmesuredemedéfendre.Ilvavoircequ’ilvavoir!Auboutdufil,Alexanderdoitsentirlacontrariétéetlemalaisequis’insinuentenmoi,carilajouted’unevoixtrèsdouce:

–C’estparcequejetiensàtoietquejeveuxteprotéger.J’aibienconsciencedetedemanderdem’accordertaconfianceaveuglement,maisjevaisréglerleproblème,crois-moi.

Redisquetutiensàmoi!

Cesmotsm’apaisentmêmesi jesuistoujoursunpeuagacéequeMonsieurAlexanders’imagineseulhabilitéàréglerleproblème.Siçacontinuecommeça,jevaisfinirparavoirl’impressiond’êtreune potiche. Je n’ai pas l’habitude d’attendre sagement les bras croisés que les problèmes soientrégléspourmoi.Jesuisplutôtdansl’action,etlàjemesensquasimentinutile.

–Onseretrouvevite,jetepromets,assure-t-ild’unevoixdouce.Etpardonne-moiencore,Aileen,je…

–Tepardonnerpourquoi?coupé-je,agacée.– D’avoir fait preuve de négligence en oubliant cette putain de carte mémoire dans l’appareil,

lâche-t-ilavecdépit.

Alexandervientdedire«putain»,çaneluiarrivepassouvent,saufquandilestcontrarié.Etlà,jesaisqu’ilprendcettehistoire trèsàcœur,qu’il sesent responsableetqu’ilestdisposéà remuer laterreentièresinécessairepourquejusticesoitfaite.

–Tusaisquoi,Alexander?Jem’enfichedeTwitteretde tout le reste,pourvuque tusoisavecmoi.

Unbrefsilencesuccèdeàcesmotsquisontsortisnaturellement.Puis lavoixémued’Alexandermecolledespapillonsdansleventre:

–Cequejeressenspourtoiestunique…etc’esttellementnouveaupourmoi.Jesuisprêtàtoutpournous.

Jesuisbouleverséeparcettedéclaration.

–Personnenem’ajamaisditça,tusais?–J’espèrebien,Aileen,murmure-t-il.Etj’aimeraisquepersonned’autrenelefasse.

Je souris, secrètement flattée à l’idée qu’il soit un peu possessif. Je m’éclaircis la voix pourinsisterunedernièrefoistoutdemême:

–Tutiensvraimentàcequejepoireauteauchaletàmetournerlespouces?–Oui,c’estlameilleuresolution.–Maistunemecachesriendegrave,c’estpromis?–Toutvabiensepasser.ÉcouteAileen,désolé,maisjedoisyaller.

Jeresteunlongmomentassisesurle largecanapécirculaire,àfixermonportablecommesi jem’attendais à ce qu’il sematérialise en génie etme fasse des révélations fracassantes. Jeme posetoutessortesdequestionsetnesuispasrassurée.

Rivéeàl’écrandemontéléphone,j’ouvremachinalementTwitteretjeconstatequelasituationaempiré.Lescommentairessurmesphotosnecessentd’affluer;siçacontinuecommeça,jevaisfinirpar devenir plus connue que la reine d’Angleterre ! Je quitte l’application pour éviter de sombrerdansladépressionetj’écoutemesderniersmessages.Ilyadesmauvaisesetdesbonnesnouvelles.Sicertainsgroscontratsmelâchentpurementetsimplement,d’autresclientsm’assurentquecelanelesdérangepas,qu’ilstrouventlesclichésbeauxetpasdutoutchoquantsetqu’ilsmaintiennentdoncleurengagement. Certains ne me cachent pas que cela pourrait même avoir un impact positif sur lesventes. Patricia Huxley de chez Casual&Co, une marque de maillots de bain, m’a laissé un petitmessageoùellemerappellequ’iln’ya riendepireque lesilenceet l’indifférence.«Nousallonsdonc surfer sur la vague », déclare-t-elle avec humour.Bref, je ne suis pas encore tout à fait unepestiférée.Ellemaintientnotreséancedumoisprochain.Etjesuisprêteàjouerlejeu,tantquec’estfait avec humour et élégance. Je passe quelques coups de fil pour remercier ceux qui nem’abandonnentpasetpourleurassurerquej’honoreraiavecplaisirmescontrats.Jeraccrocheenmedisantquej’aiquandmêmeencoreunpeudechance.

C’estdéjàça,jenerisquepasdefinirmaviesouslesponts…

Ilvamalgrétoutfalloirquejefasseattention.Sijen’aipasdeproblèmed’argentpourl’instant,jesaisàquellevitesselesréservespeuvents’amenuiser.Maispourl’heure,jen’aipasenviedepenseràça. J’ai surtout besoin de parler à quelqu’un qui compte pour moi. Je lance l’appel et attendsd’entendresavoix.Troissonneriesplustard,jemesensdéjàmieux.

–Enfintumetéléphones!s’exclameSarah.–Désolée,j’étaisunpeuoccupéecesdernièresheures.–Qu’est-cequisepasseavectonAlexander?demande-t-elle,trèsprotectrice.–Toutvabien.Iln’arienfait,commejeteledisaisdansmonSMS!

–Alorsonannuleleprocès?

Jeris,j’aimececôtédirectchezSarah.

–Oui,cen’estplusd’actualité.Tusais,jecroisque…,commencé-jeavechésitation.–Quequoi?s’impatiente-t-elle.–Jesuisentraindetomberamoureuse,avoué-jetrèsvite,moi-mêmesurprisedecetteconfession.–Jem’endoutaisunpeu,rienqu’àtafaçond’enparler!s’amusemonamie.–Jesuissitransparente?– Non, juste différente. Alors, vous vous mariez quand ? ajoute-t-elle sur un ton gentiment

moqueur.

Jerisànouveau,puisredevienssérieuse.

–Nousn’ensommespaslà,etpuisilyadestrucsàrégler,beaucoupplusurgents.–Oui,j’aivuqueleschosess’emballentsurTwitter,çatourneaun’importequoi!répondSarah,

soudaincalmée.–Alexanderestentraindes’occuperduproblème.–Alorstoutvapourlemieuxdanslemeilleurdesmondes,lâche-t-elle,unbrinsarcastique.–Àvraidire,jenesaispas.Jesuisunpeuinquiète,jemedemandes’ilnemecachepasquelque

chosedegrave.–Soisplusprécise,s’ilteplaît.

JenarreàSarahdanslesdétailslesdifférentesétapesdel’affaire,m’efforçantd’êtreaussiclairequepossible.

–Mince,c’estunvraithriller,tonhistoire!–Oui,jemedemandebiencommentçavaseterminer!Enplus,jenesupportepasd’attendresans

rienfaire!–Jepensequ’ilaeuraisond’insisterpourqueturestesauchalet.

Pff,ilssontliguéscontremoiouquoi?

– Je sais, concédé-jemalgrémon léger agacement de voir Sarah prendre le parti d’Alexander.Maisj’aiquandmêmeuneidéeàproposdecebuzzsurTwitter.

–Raconte-moitout!– Avant qu’Alexander ne fasse ces photos de moi endormie, il en a fait d’autres qui sont très

réussiesetjemedisaisqueceseraitintéressantd’organiseruneventeauxenchèresdecesimages.Çame permettrait de reprendre l’ascendant et les bénéfices éventuels pourraient être reversés à unefondationpourlarecherchemédicale.Qu’enpenses-tu?

–Quec’estunebonnemanièrederéagir!répondSarahavecenthousiasme.Commetoutlemondeparledetoiencemoment,çarisqued’attirerdupublicpourl’événement.

–Oui, il fautquej’entoucheunmotàAlexander,poursavoirs’ilseraitpartant.Maisc’estsansdoute la meilleure façon de me montrer sous un autre jour, sans avoir besoin de répondrefrontalement aux ineptiesquipullulent surTwitter.Bref, faire contremauvaise fortuneboncœur !conclus-je,assezraviequ’elleadhèreàcetteidée.

–Çamefaitplaisirque tu reprennesdupoilde labête.Je retrouveenfinmonAileen,mapetitebattantequinecraintriennipersonne!

Je ris, c’estvraimentdouxde l’entendre.Nousnousquittonsenpromettantdenousvoir leplusvitepossible.Aprèslamusiquedesavoixchaleureuse,lesilencequirègnedanslechaletmeficheuncoupdeblues.Mavieestenpassed’êtretotalementbouleversée,beaucoupdechosesm’arriventetilfautquejelesintègre,lesdigère,sanspourautantperdrelefragileéquilibrequej’étaisparvenueàcréer jusqu’ici.Àbienyréfléchir, jen’aipasgrandmondeautourdemoi,mais jenepeuxpasmeplaindre,c’estmoi,seulementmoiquiaifaitlechoixdem’isoler.Àforce,j’aifiniparunpeutropmerefermer.EtcettehistoiresurTwitter,c’estpeut-êtreunefaçondemeréveiller.Lesignalqu’ilesttemps d’embrasser le monde. Et puis je ne suis pas si seule. Il y a Sarah, depuis longtemps. EtAlexandersi fraîchementdébarquédansmavie.L’imagedesparentsque jen’ai jamaisconnusmeserresoudainleventreetjemesureceprofondmanqued’amourenmoi.

Jemeblottisd’abordsurlescoussinsmoelleuxducanapé,puisjedécidedemesecouerunpeu.

Unbonbainchaud,voilàcequipourraitmefairedubien!

Une petite heure plus tard, enveloppée dans un peignoir, je rejoins la chambre, fatiguée maisapaisée. Jeme glisse nue sous la couette et retrouve aussitôt l’odeur d’Alexander.Des frissons debien-êtremeparcourent.Surl’écrandemespaupièrescloses,unbeauvisagedeguerriersedévoilepeuàpeu.Ilmesourit,seslèvresfrémissent,savoixmeberce,ilprononcemonnometmeditqu’ils’appelleAlexanderetqu’iltientàmoicommeiln’ajamaistenuàpersonne.

–Jetienstellementàtoi,murmureAlexanderdansmondostoutenenrelevantmajupe.–Àquelpoint?susurré-jeenmecambrantpourmieuxressentirsonérectioncontremesreins.–Commeça,souffle-t-ildansmoncouenglissantseslongsdoigtssouslasoiedemonstring.–Je…jenevoistoujourspascequetuveuxdire,gémis-jetandisqu’ilfrôlelerenflementdemon

sexebombé.

Noussommessoudésl’unàl’autredansuncoinisolédeladiscothèque.«Juicy»,unextraitdelaBOde8Milenousparvientfaiblement.Commesinousétionsdansunesorted’aquarium,protégésdesbruitsdumonde.Jenesuispasfanderap,maislerythmeainsiétouffédelamusiquem’excitedeplus en plus. Enfin, ce qui me rend vraiment folle depuis quelques secondes, ce sont les doigtsd’Alexanderquipénètrentmonintimité.Noussommesreliésparunfilinvisible,c’est…au-delàdel’osmose.

J’aienviequ’ilmeprennesur-le-champ,commeça,qu’il restedansmondos,déchiremapetiteculotte,mecolle à cette surfacevitréeetmepossèdeavecvigueur.Fort et longtemps. JeVEUX lesentir aller et venir enmoi.Lesnight-clubbers ne sont pas loin, juste derrière le Securit teinté, jepourraispresquelestoucherentendantlesbras,maispersonnenepeutnousvoir.Etcetteproximitén’estpasfaitepourmedéplaire.Jecroisqu’enfindecomptej’aimeledangersoustoutessesformes.Sijenesuispasspécialementexhibitionniste,lapossibilitéd’êtresurprisemegalvanisesecrètement,attisemondésird’unemanièreinconcevable.

–Tuasenviedemoi?susurré-jeenluijetantuneœilladepar-dessusmonépaule.

–Àtonavis?fait-ilenmedécochantunsourireravageur.–Moiaussij’aitrèsenvie,ajouté-jesuruntonquiressembleaufeulementd’unepanthère.–Ici?s’étonne-t-il,sonpoucedécrivantdesmouvementsconcentriquesautourdemonclitoris.

Unevaguedeplaisirm’embrase.J’aichaud, lespointesdemesseins libressousmonchemisiersontdouloureuses,ilesttroptardpourreculer!Oui,j’aienvie,ici,toutdesuite.

–Oh,fais-le,gémis-je.

Jen’aipas l’occasionde terminer.D’ungestevif,Alexanderdéchiremaculotteet jepousseunpetit cri de surprise.Aucunhommen’a jamais fait ça avecmoi et çamemetdansun état terrible.C’estcequej’aimepar-dessustoutaveclui,cettefacultéqu’iladeressentirmesenviescachées,lemoindredemesfantasmes.Etsonnatureldanssamanièredelesréaliser.

–J’espèrequetun’ytenaispastrop,plaisante-t-il.–Non,jeladétestais.

Je le saisispar lanuque, l’obligeà secourberplusversmoiet luimords lecou. Je sourisà lapenséequejesuispeut-êtreentraindemetransformerenvampire.LamorsurefaitgémirAlexanderdontlespaumessesontmisesàpétrirmesfessesavecvigueur.

–Tul’aurasvoulu,chuchote-t-ilàmonoreilledansunsouffleemballé.

Oui,jel’auraisvoulu…

Sansque j’aie le tempsdeme rendrecomptedecequi sepasse, le sexed’Alexander, recouvertd’unpréservatif,frôledéjàmeslèvreshumidesetj’ail’impressionqu’unincendies’estdéclaréentremescuisses.Jemedressesurlapointedespiedsetmecambrepourfaciliterlepassagedesaverge.Ilestàlafoisdouxetdirectif,tendreetautoritaire.Ilesttoutaufonddemoi,m’investittotalement,moncorpstrembledéjàdel’effetqu’ilmefait.Jeplaquemespaumessurlavitreteintéequinousséparedelapiste.Jesuisdeboutcontreunmurdeverre,juperelevée,entraindemefaireprendre.

Cette situation est terriblement érotique. Nos souffles se mêlent aux bourdonnements du rapd’Eminemquienflammeledancefloor.Jepeuxvoirlesdanseursquiignorentcequenoussommesen train de faire. Alexander libère mes cheveux pour glisser sa main dans l’échancrure de monchemisier dont il fait sauter les trois premiers boutons. Je pousse un nouveau petit cri excité. Sapaumeemprisonneundemesseins;del’autre,sesdoigtstitillentmestétonsterriblementsensibles.Sesmouvementsdereinssefontdeplusenplusinsistants.Etàchaquefoisqu’Alexanders’enfonceenmoi,j’ail’impressionquelespointesdemespiedsdécollentdusol.Ilesttellementpuissantquej’éprouvelasensationd’êtrepluslégèrequ’uneplume.

Sonsouffledansmoncous’emballe.Sescoupsdeboutoirsontdeplusenplushallucinants.Moiquivoulaisêtrepossédée,jesuisservieparunamanthorsducommun.Mesmusclessonttétanisés.Demain j’aurai des courbatures, c’est sûr,mais jem’en fiche complètement. Je désire simplementqu’Alexandermefassel’amourjusqu’auboutdelanuit.Jusqu’àcequejen’enpuisseplus…

–Baise-moiencore,s’ilteplaît…

Jenereconnaispasmavoix.Songrognementdansmoncoumepermetdemesureràquelpointmesmotscruslemettenthorsdelui.

Etc’esttantmieux!

Auxplatines,leDJlance«InsaneInTheBrain»parCypressHilletcemorceausemblemettreenjoielafoulequisedéhanchedeplusbelle.Maispasautantquemoi.Jefrémisdebonheuràlapenséequecetitrearriveàpointnommé.Ilaccompagneraàlaperfectionnotrejouissance.Leplaisirmonte.

Comme si c’était encore possible, les battements de mon cœur s’accélèrent, j’ai la sensationenivranteden’être plusqu’un éternel gémissement.Et je frémisde sentir sesmainspuissantesmetenirparleshanches,avecunefermetéquimedonnel’impressiondeluiappartenir.

–Jesuisàtoi,Alexander…

J’aiprononcéçadansunsouffle,commeuncri,commeuneprière,commeunaveu.

–Aileen,Aileen,necesse-t-ilderépéterenrythmeavecsesaffolantscoupsdeboutoir.

Nous sommes à l’orée d’un paradis de sensations démentielles. Une décharge d’électricité metraverse à la vitesse de la lumière tandis qu’Alexander grossit encore en moi. Nous allons jouirensemble et je savoure autant que je peux ces secondes d’intense accord.Et puis c’est commeunecouléede lavequim’encercle, le plaisir quime touche enplein cœur, enplein corps, commeunevague qui se forme peu à peu. Mon sexe se contracte plus fort encore autour de l’érectiond’Alexander.Desconvulsionsdésordonnéesmefontfrissonnerdepartenpartetjecroiseleregardd’un homme juste avant de commencer à jouir comme je n’ai jamais joui. Il m’observe avecinsistance, il estmagnifique, je ne peux pasme détacher de lui, je le dévore des yeux comme s’ils’agissaitd’uninconnu,puisjereconnaissonairdeconquérant,l’expressiondesonplaisirquiprendvie dans lemoindre de ses traits. Jememords la lèvre inférieure et je souris au reflet du visaged’Alexanderdans l’épaissevitredunight-club. Je savoure l’éclatde ses iris aumomentoù il jouitenfinparsaccades, lesmainsplaquéessurmesseins. Jemecambrepour lesentirencoremieuxetcriemonbonheurtandisqu’ilgrognedélicieusementcontremanuque.

Alorsquenotreorgasmeestenpassed’atteindresonclimax,unairdeVivaldimefaitvacilleretc’estcommesijem’évanouissais…

2.Lafacecachéed'Undercover

Jemeréveilleensursaut,lecorpsàfleurdepeau,meredressesurlescoudes.Leréveildemonportable diffuse unmouvement deL’Hiver. Par une fenêtre du chalet, j’aperçois le ciel bleu et lespremiersrayonsdusoleil.Vivaldis’esttrompédesaison!Jemefrottelesyeux,j’aidumalàsortirdemonrêve.Oh,c’était tellement réel. Jepouvais ressentir lesmoindrescaressesd’Alexander, lesvariationsduplaisirqu’ilsaitsibienmedonner,mais…cen’étaitqu’unrêve.

Unrêvesiexcitant…

Seuledanslepetitmatin,jemesureàquelpointcethommeaprisuneplaceimportantedansmavie.Mêmedanslesommeil,ilmerejoint.

Jemeredresse,m’étire,mesaisismachinalementdemonportableetmedirigepiedsnusverslaterrasse.Lesolestchaud,c’estdoux.Unécureuil s’enfuitàmavenue ; jem’adosseà la rambardepour inspirer à fond l’air pur quimemanque tant quand je suis àLosAngeles.Cet endroit est leparadissurterre.

Le soleilme réchauffe et un sourire éclairemonvisage lorsque je découvre qu’Alexanderm’aécritunSMS.

[Bonjour ma Reine des neiges. Des baisers rien que pour toi, plus grands que les plus hautesmontagnesquit’entourent.Alexander]

Jefaisdéfileruneàunelesmagnifiquesphotosenpiècesjointes.Cesontprécisémentdesimagesdesmontagnesquim’entourent.Ellesontétéprisesenétéetc’estmagiquedepouvoircomparercesclichésaudécorimmaculéquimefaitfaceàcetinstant.C’estvraiment…splendide.

Merciinfiniment,monsieurlephotographe…

Jevaismeprépareruncaféetdestartinesgrillées,puisjeretournesurlaterrassepourprofiterdecette matinée qui commence en beauté. Profondément émue, je relis plusieurs fois le messaged’Alexander.C’estunravissementderecevoirdesmotssidouxdèsleréveil.Jeregardeànouveaules imageset jemedisqu’il estvraiment talentueux.C’est tellement éloignédecescartespostalessans âme qu’on trouve un peu partout dans les magasins de souvenirs. Chacune des photosd’Alexanderpossèdeunesignature.Etl’étenduedesapaletteestincroyable.Jesavaisdéjàqu’ilétaitdouépourimmortaliserlesêtresvivants,maisjen’avaisencorejamaisvusontravaildansunautredomaine.Sespaysagesontunetexturequilesrendréels,aupointqu’onpourraitpresqueenrespirerlesodeurs,enécouterlessons.

Tuparviensmiraculeusementàdévoilercequel’œilnuneperçoitpas…

Je souris de parler en pensées à cet hommequi grandit infiniment dansmon cœur. Je bois unegorgéedecaféetcomposeuntexto.

[Bellesphotos,maispasaussijoliesqueleCirconflexequim’attend!]

Ilmerépondquejelefaisrire,quejeluimanqueetmedemanded’êtreprudente.Jeluirenvoieune série de smileys parmi lesquels un skieur, une montagne et quelques dizaines de cœursmulticolores.J’ajouteenPSquej’aieuuneidéepourcontrebalancerl’effetdesphotossurTwitteretquejeluienparleraiquandonseretrouvera.

Jefilemepréparer,j’aitrèsenviedeprofiterdecettemétéoidéalepourdévalerquelquespentes.

Etj’aibesoindemeviderlatête,d’évacuercommeuntrop-pleind’émotions.

***

Enfindematinée,deretourauchalet,ivredevent,desoleiletdesensationsfortes,jedéchausseavecunsentimentdeplénitude.Jecomprendsquec’estvraimentlaviedontjerêve.Danslanature,enphaseavecleséléments.Jemesenstellementbienici!

Je vaisme préparer un thé bien chaud et attends qu’il infuse en vérifiantmesmessages. J’éviteTwitteroù jesaisbienque jene trouverai riende réconfortant.Enrevanche, j’aipleind’appelsenabsence,pratiquementtousd’Alexander.EtilyaussidesSMS.Jelisledernier:

[Rappelle-moivite,j’aibesoindeteparler!]

Lesautressontdumêmeacabit.J’aid’abordl’impressiondelire lesmotsd’unamoureuxtransiqui serait incapable de passer plus de cinq minutes sans moi. Cette insistance et cette fouguem’amusent et me touchent, et puis mon cœur s’affole quand j’écoute enfin son dernier messagevocal:

«Appelle-moivite,s’ilteplaît,c’estsérieux!C’estKatequiabalancélesphotos,j’airetrouvédescarnetschezelleavecdesphotosdetoipunaiséespartout,eteuh,commentdire…défigurées…Enfin,jepensequ’elleestobsédéepartoi.Ellefaitunefixationsurmoidepuisquejel’aisauvéedelarueetsareconnaissances’esttransforméeenuneformed’obsession.J’auraisputeprévenir,maisjusqu’àmaintenantlasituationnesemblaitpasalarmante.Maisnet’inquiètepas,onlacherchepartout.Jetetiensaucourantdèsquej’aidunouveau.Rappelle-moiquandtuascemessageetsurtoutfaisattentionàtoi…»

Leportableme tombepresquedesmains.Toutmon corps est parcourude frissons,mes lèvrestremblent.

C’étaitdoncçaletrucgravequetumecachais?

Sij’enveuxunpeuàAlexander,jesaisnéanmoinsqu’ilvoulaitmeprotégerennemerévélantpastotalementlefonddesespensées.Jemedoutequ’iltenaitàêtresûrdeluiavantd’affirmerquoiquece soit, mais je suis maintenant persuadée qu’il a tout de suite porté ses soupçons sur Kate en

découvrantquequelqu’undesonéquipeavaitutilisélesphotos.Jesupputequel’identitédufameuxUndercoverluiestapparuecommeuneévidence.Maiscommeiln’estpasdugenreàagiràlalégère,ilsouhaitaitd’abordréunirdespreuves.C’estchosefaite.J’entendsencorelavoixdeSarahmeparlerd’un vrai thriller. C’est exactement ça. Je suis même devenue l’obsession d’une folle furieuse enliberté. Jen’aurais jamais imaginéquecette femmesoitcapabledeça.Elleétaitgentilleavecmoi,si…chaleureuse.Jen’arrivepasàcroirequecesoit…réel.EtpourtantcemystérieuxUndercoveradésormaisun(ravissant)visage.

Jem’apprêteàrappelerAlexanderpourqu’ilmedonnedesprécisionsetmerassureunpeu,quanddescoupsfrappésàlaportemefontsursauter.

3.Angoisseenaltitude

J’aiuntrèsmauvaispressentiment,j’hésiteuninstantavantdemedirigerversl’entréeduchalet.Jesuisseuledansunendroit isoléetAlexandervientdem’annoncerdeschosesinquiétantes.Ilyadequoi êtreméfiante. Jeme reprends, je ne veuxpas céder à la paranoïa. Je tente deme rassurer enimaginantquec’estAlexander,là,derrièrecetteporte.Maisjememens.C’estsonchalet,ilentreraitdirectement. Et de toute façon, il m’aurait certainement prévenue de son arrivée imminente. Quoiqu’il en soit, je pourrais bienm’interroger jusqu’à la fin des temps,mon choix est limité : restercloîtréeouallerdécouvrirl’identitédemonvisiteur.

Pasquestiondecéderàlapanique!

Jeprendsunelongueinspiration,actionnelapoignéeetmoncœurloupeunbattementquandjeladécouvre.SipersonnenelatrouveàLosAngeles,c’esttoutsimplementparcequ’ellesetientfaceàmoi.Jereculed’unpas,c’estinstinctif,etjem’enveuxaussitôt.Jecomprendsdansl’instantquemaseuleforceseradeneriendévoileretdefairecommesitoutallaitbien.

–Bonjour,Aileen,jenevousdérangepas,j’espère?– Absolument pas, dis-je d’une voix aussi calme que possible tout en proposant à Kate Blaine

d’entrerdanslechalet.

J’observesestraitstirés,sonteintpâle.Uneétrangeexpressionsemblefigéesurseslèvres.Jemerépètequemonseulavantageestdepouvoirluifairecroirequejenesuisaucourantderien,deluimontrer que sa visite estmême une bonne surprise.Malgré lemalaise, je conservemon calme etm’efforcedeluisourire.

–Vousêtessûrequejenem’imposepas?demande-t-elleunenouvellefois.C’estjustequej’aieubesoindedéconnecteretAlexanderm’agentimentproposédepasserquelquesjoursici.

–C’estunesuperidée,répliqué-je.Àvraidire,jemesentaisunpeuseuledanscechalet.

LesderniersmotsdeKatem’indiquentqu’ellenesedoutepasencorequ’Alexanderàdécouvertque son assistante est à l’origine de la publication des photos. Je dois faire semblant de la croire,jouer la comédie dumieux que je peux.Ce qui n’est pas facile car je garde en tête ces photos demoi…défigurées.Desfrissonsmeparcourent,puisjemereprendsaussitôt.

–Jepeuxm’asseoir?demande-t-elleendésignantlecanapé.J’aifaillim’endormirplusieursfoissurlaroute,j’aivraimentbesoindemeposer.

–Bien sûr, installez-vous.Ça vous dit un café…ou un thé ? proposé-je,m’efforçant d’adopterl’airsurprismaisheureux.

–Jeneseraipascontreunboncafé,merci.–Jem’occupedeça,fais-jeenm’éloignantverslecoincuisine.

Moncerveaufonctionneàmilleàl’heure.J’aimeraisadresserunmessageàAlexander,maismonportableestsurlatablebasse,justesoussesyeux!Jefaislepointsurlameilleurestratégieàadopter.Jedoisvraimentjoueràfondlacartedel’innocence.EtsurtoutneriendireconcernantlanaturedemarelationavecAlexander.Jesongeàcequ’ilm’aracontéàproposdusuivipsychiatriquedeKate.Celasignifiequejevaismarchersurdesœufs.Jesuisàlafoistrèsnerveuseetdéterminéeàgérerlasituation.Tremblerdepeurnem’avanceraàrien.Jemerappellecettepériodedemonadolescence,du temps où j’étais dans un foyer pour orphelins et que le directeurme convoquait régulièrementpourmonsalecaractère.C’étaitmafaçond’oublierquemesparentsnemeprendraientjamaisdansleursbrasetqu’ilmefaudraitapprendreàvivresanseux,àaffronterseulelesaléasdelavie.Jemebattaistoujourscontredesfillesplusfortesquemoiquivoulaientmeracketter,refusantdecéderàlapressionetauchantage.Etmêmequandjemouraisdetrouille,jenelemontraisjamais.

Àpartirdemaintenant,unechoseestsûre :si jenecrainsrientantqueKatedemeurepersuadéed’êtreàl’abridetoutsoupçon,ellerisquefortderéagirdemanièreimprévueendécouvrantqu’elleestdémasquéeetenpassedeseretrouverbientôtentre lesquatremursd’unasile…Etd’unefaçontrèsviolentesielleapprenaitqu’Alexanderetmoivivonsunerelationfusionnelle.

–Voilàvotrecafé,annoncé-jeenledéposantsurlatablebasse.

Ellem’adresseunpetitsourirequiressembleplusàunegrimaceetçamefaitfroiddansledos.Sonregardunpeutroubleconfirmequequelquechosenetournepasrondchezelle.J’ail’impressiondésagréabled’êtreenprésenced’unebombeàretardement.

–Alexanderm’aunpeuracontécequivousarrive,dit-elle.C’estbon,voustenezlecoup?–Oh,ilyadeschosesplusgravessurterre,déclaré-je,secrètementfascinéeparlafaçondétachée

qu’ellead’aborderleproblème,commesiderienn’était.–Oui,c’estvrai,maissijepeuxfairequelquechosepourvousaider,n’hésitezpas,d’accord?

Situpouvaisfoncerdanslesbrasdetonpsychiatre!

J’acquiesce en esquissant un sourire. Je suis en train de jouer un rôle ardu.Après ça, si je suistoujoursdecemonde,jepourraifairecarrièredanslecinéma.

–Jesuissérieuse,insiste-t-elle.J’imaginecequevouspouvezressentir,iln’yariendepirequed’êtreexposéeàlaméchancetédesautres.

–C’estgentil,Kate,maisçavabienfinirparsetasser.–Jevouslesouhaitesincèrement,Aileen.

Redoutable,cettefilleestredoutable…

–Etsionsetutoyait?proposé-je?

Katem’offreunregardoùjelisdelasurprise.Jesensqu’elleestlégèrementdéstabiliséeparmatentativedecomplicité.

–Euh,oui,biensûr,sivous…situveux.–Super!Ona toutes lesdeuxbesoindesedétendre.Alexanderm’aprêté teschaussuresdeski,

mais on pourrait en louer une autre paire et aller profiter des pistes. Il y a un endroit que j’aidécouverthier,j’aimeraislevoirdeprès.

J’aientêteleCirconflexe,bienentendu,etjemedisqu’unerandonnéeaugrandairseraitunbonmoyend’occuperKate tout endétournant son attention. Je pense sincèrement qu’il ne faut pas quenouspassions tropde temps faceà face. J’ai troppeurqu’àunmomentouunautreellenedevinemon petit jeu. En plus, sur la neige, si les choses devaient mal tourner, je pourrais la distancerfacilement.

–Ildoityavoirmonanciennepairedechaussuresdans le local technique,répond-elledefaçonpresquemécanique.Elles ne sont pas top, c’est pour ça qu’Alexanderm’avait offert les nouvelles,maisçairatrèsbien.

–Alorsjeprendslesvieillessitupréfères.– Jem’en fiche, lâche-t-elle sur un ton légèrement agressif, ce sont des grolles de ski pas des

Louboutin.

Jemeforceàrire,maissafaçonderéagirestassezalarmante.J’éprouvelasensationqu’ellepeutperdrel’équilibred’uninstantàl’autre.

Jeprofited’uninstantoùKateestdanslelocaltechniquejouxtantlecoincuisinepourrécupérermonportableetadresseràtoutevitesseunbrefmessageàAlexander:

[Elleestici.Elleignorequenoussavons.NouspartonsskÎer…]

Jecroiselesdoigtsenespérantqu’ilcomprendralesensdemonmessage,avecl’accent…

Jen’aipasleloisird’attendresaréponse,carKatesortdéjàdulocal,déposesesaffairesprèsdubarets’approchedemoi.J’aijusteletempsdefermerl’application,avantqu’ellenemeprennesansprévenirletéléphonedesmains.

Netegênesurtoutpas!

–Jeregardejustelamétéo,lâche-t-elled’emblée,jetelerendstoutdesuite.

Oui,dépêche-toidemeleredonner!

Jene suispas rassuréedu tout.Les secondesqui s’écoulent sont interminables. J’ai enviede luidirequ’ilfaitbeau,queçanesertàrienderegarderlamétéo,maisjeneveuxpaslacontrarier.

–Super,lâche-t-elleenmerendantmonportable.Tudevraislerecharger,tun’aspresqueplusdebatterie.

J’éprouve la sensation désagréable qu’elle affiche un drôle de sourire, comme si elle avaitdécouvert lemessageque j’ai adressé àAlexander, puis jeme rassure en constatant qu’elle abienouvert l’applicationmétéo.Quant à la batterie, ce n’est pas une bonne nouvelle ! Je n’aurai aucunmoyendecommuniquerdanslesheuresàvenir.

Siçacontinuecommeça,jevaisfinirparavoirunproblèmecardiaque!

–Bon,jefilemepréparer,annoncé-je.

Unefoishabillée,jerécupèredelacrèmesolairedanslasalledebainsetjerejoinsKatequiécartelesbrasensouriantdanssacombinaisonjaunefluo:

–J’aitoujourstrouvéqu’onneressembleàriendanscestenues.–Çanetevapassimal,objecté-je.Mêmesijepréféraislarobequetuportaisauvernissage.–Tutesouviensdematenue?–Oui,Kate,tuétaistrèsbelle.–C’est…c’estgentildemedireça.

Là,elleestréellementtouchée,jelelisdanssonregardbrillant.Jesuisdeplusenpluspersuadéeque le seul moyen d’éviter le pire sera d’établir une complicité entre nous. Kate a besoin d’êtreconfortée, félicitée, aimée… Je ne suis pas psy,mais je le ressens au plus profond demoi. Pourl’instant, je ne gère pas tropmal. Et puis je suis un peu rassurée d’avoir eu le temps de prévenirAlexander.L’amourgrandissantquej’éprouveàsonendroitmeprocurelaforcedenepasflancher.Jemesensprêteàaffronterlesheuresàvenirenconservantmonself-control.Siparfoisdesimagesterrifiantesdéfilentdansmatête,jefaisensortedenepastroppenserauxconséquencessid’aventureKateétaitsubmergéeparunecrisededémence.

Siellesavaitl’idyllequenousvivons,Alexanderetmoi…

J’effacecetteéventualitédemonesprit.Katenesupporteraitpasdeconnaîtrelemillièmedecequejepartageaveclui,j’ensuiscertaine.Ilfautvraimentquejemeconcentreuniquementsurcettefausserelationamicalequejem’efforced’instaurer.Quejeluifassedesconfidences.

Defaussesconfidences…

***

Assisescôteàcôtesurletélésiège,nousdemeuronsunlongmomentsilencieuses.Jemecreuselatêtepourtrouverunsujetdeconversation.Katesembleabsenteetçamedérange.Jeneveuxpastroplalaissers’évaderenpensées.Cetteidéedefaussesconfidencesmerevientàl’esprit,c’estsansdoutelemeilleurmoyendeserapprocher.

Maisquoi?Surquelthème?

–CommentçasepasseavecAlexander?medemandeKateàbrûle-pourpoint.

C’estalorsquel’idéejaillitdansmoncerveau.

–Jesuismalheureuse,Kate,lâché-jesanshésiter,demavoixlaplusdésespérée.Jen’enaiparléàpersonne,maislàjecraque,je…oh,laissetomber,jeneveuxpast’ennuyeravecça.

Jeperdsmonregarddanslepaysage.Là-haut,toutlà-haut,leCirconflexeestcommeunpointde

repère.J’attendslaréponsedeKate.Elles’estdéjàtournéeversmoi,jel’imiteetconstatequ’elleal’airtrèsintéresséeparmaconfession.

–Jet’écoute,Aileen.Dis-moicequinevapas.–C’estàproposd’Alexander.–Etalors?

Savoixs’estdurcie,jedoisfairetrèsattention.Jemelanceencroisantlesdoigts:

–Çasepassetrèsmal.J’aicruànotrehistoire,j’yaitellementcru,vraiment…maisluinetientplusàcontinuer.Ilm’aexpliquéqu’ilnesesentpaslibre.

–Tuveuxdirequ’ilaquelqu’undanssavie?–Ilnem’arienprécisé.Ilm’ajusteparlédequelqu’unqu’ilconnaîtdepuislongtemps,jen’ensais

pasplus,maisçaal’airtrèssérieuxpuisque…

Je m’interromps quelques secondes pour ménager mon effet. Le regard que m’offre Kate estbrillantd’impatience,jecroismêmeydécelerunelueurdesatisfaction.Elleestcommesuspendueàmeslèvres.C’estlemomentoujamais…

–…puisqu’ilnem’aimepas.–Ilneveutplusdetoi?

Jesecouelatête,enfeignantunprofonddésespoir.Jepriepourquemaruseaitfonctionné.Lebutétantquenoussoyonsalliéesdanslasouffrance,toutenlaissantcroireàKatequec’estpeut-êtreellelapersonnequ’il connaîtdepuis longtemps.Elledoit à toutprix imaginerque je suismalheureusepourneplusmeconsidérercommeunerivalepotentielle.

–Jemedemandemêmes’iln’apaspubliécesimagesdemoisurTwitterjustepourmenuireetm’humilier.

–Maisiln’apaspufaireunechosepareille!s’exclameKate.Çaneluiressembletellementpas.

Jeressenstoutelapassionquiladévorequandelleparledelui.

–Lesphotosétaientdanssonappareil, rétorqué-je.Ellesnesesontpasretrouvéessurceréseausocialparl’opérationduSaint-Esprit.

–C’est…c’estassez juste,ceque tudis, soupire-t-elle,mais j’avoueque jen’en revienspas. Jesuistellementdésoléepourtoi,ajoute-t-elle,soudaingentilleetcompréhensive.

Plusletélésiègeapprochedusommet,plusjemetienssurmesgardes.Jen’arrivepasàdémêlerlevraidufauxdanslesréactionsdecettefemme.Sonattitudeest…déstabilisante.

QuandnousempruntonsenfinlapistequimèneaubasduCirconflexe,jesuistoujourshabitéeparundésagréablepressentiment.Mesjambessontunpeuflageolantes,maisjedécidedemereprendre.Jem’éclaircislavoixpourlancer:

–C’estgénialdeskiertouteslesdeux,non?

Enguisederéponse,Katemejetteunedrôled’œilladepar-dessussonépaule.

Jen’aimepasdutoutça…

Je m’applique à ne pas la dépasser et à ne pas skier trop bien. Je dois à tout prix lui laissersupposerqu’elleestmeilleurequemoidanstouslesdomaines.Jeneveuxpasl’agaceroulavexerd’unequelconquefaçon.J’inspiredel’airpuretçamerégénère.

Devantmoi,àquelquesmètres,Kateévoluedansunstyleapproximatif.C’estvraimentcompliquéde faire semblantdeskiermoinsbienqu’elle.NousempruntonsdespistesbaliséesendirectionduCirconflexe.

Quandelles’arrêtebrusquementaubordd’unà-pic,jelarejoinsprudemmentetm’immobiliseàsahauteur.

– Tu assures sur des planches, lâché-je sur un ton à décrocher unOscar. Tu pourrais vraimentm’apprendredestasdetrucs.

Ellemefixed’unregardvide,unemoueindéchiffrabledéformelescommissuresdeseslèvres.Etjemefaislaréflexionquelleestvraiment…terrifiante.

–T’asfini,là?crache-t-elle,levisagedéforméparlacolèreetlemépris.–Queveux-tudire?–Tutefousdemoiouquoi?

Sa voix n’est plus qu’un grognement. Je serre et desserre les poings pour me détendre, maisl’appréhensionme gagne irrémédiablement.Kate déchausse et s’approche demoi, plusmenaçantequejamais…

4.À-picdeladémence

LesyeuxdeKatelancentdeséclairs.

–J’aieuleplaisirdeliretonderniermessageàAlexander,lâche-t-elled’untonsec.–Maistu…–Tais-toi!hurle-t-elle.Alors,espècedesalementeuse,commeça, ilnesepasseplusrienentre

vous?–Écoute,jevaist’expliquer,je…–Pourladernièrefois,fermetajoliebouchedeputain,tum’entends?– Je te jure…Alexanderparle sansarrêtde toi. J’aimenti tout à l’heure…C’est toi la fameuse

personnequ’ilconnaîtdepuislongtemps…

Je m’oblige à parler à Kate sur un ton doux. Je ne sais pas où je puise mes ressources pourafficher un tel self-control dans une situation aussi critique,mais le fait est que pour l’instant j’yparviens.C’estsansdoutecequel’onappellel’énergiedudésespoir.Etàvraidire,jen’aipasd’autrechoix.

– Il te parle demoi ? souffle Kate en détachant chaque syllabe et enme dominant de toute sahauteur.

–Oui,trèssouvent…çamerendaitjalouse…–Etilt’aracontéquec’estmoiqu’ilaime,termine-t-elle,dédaigneuse.– Il n’arrive pas à se l’avouer… mais j’en suis certaine…, insisté-je de ma voix la plus

convaincante.Je…–Çayest?m’interrompt-elle,commeongronderaitunenfant.Tuasfinidem’embobiner,espèce

desalementeuse?

Je sais queKate n’est pas dupe, que tous les efforts que je pourrais biendéployer seront vains.DécouvrirmonSMSl’a renduedingue.Sonétatpsychologiquesedégradedesecondeenseconde,toutelacolèreetlafoliedumondesontentraindebouillirenelle.

–Situn’avaispasessayédemevolerAlexander,crache-t-elle,nousn’enserionspaslà!Personned’autrequemoinepeuts’approcherdelui!IlestàMOI!!!Jeneveuxplusparleravectoi.Tueslapiredessorcières.JesuisOBLIGÉEdet’écarterdéfinitivement.

Dansunsursautdedésespoir,jepivotesursadroite,maisperdsl’équilibreetbasculesurlecôté.Jeglisseauborddel’à-picjusqu’àmeretrouverprojetéedanslevide.Jepousseuncrietm’accrocheinextremisàunsurplomb.JelèvelesyeuxversKatepourlasupplierdem’aideràmerétablir.

–S’ilteplaît,je…

Jem’interromps,comprenantavechorreurqu’ellenecompteabsolumentpasmeportersecours.

Sonairàlafoistriomphantetmenaçantsepassedecommentaires.Mesdoigtssecrispentsurl’arêtedelapierre.Jemedébarrassedemesskisàcoupsdetalonshasardeuxsurlesfixationsetlesonqu’ilsproduisentenpercutantunrocherunequinzainedemètresplusbasmecollelachairdepoule.

Jesuismalbarrée…

J’ai faitde l’escaladeavecSarah, jepeuxteniruncertain temps,mais jesuisà lamercidecettefollefurieuse.Elleest…enpleinecrisededémence.Ilsuffiraitqu’elledécidedem’écraserlesdoigtsavecseschaussurespourmecontraindreàlâcherprise.Cetteidéem’obscurcitl’esprit!Mapeurnecessed’enfleraufildessecondes.Jememaudisintérieurementetpousseuncriderage.

–Aide-moi!

Kateéclated’unriremauvaisetmoncœurs’affole.Jen’aijamaiseuaussipeurdemavie.

Pitié,jen’aipasenviedemourir!

Non, jedoisgagnerdu temps,çanepeutpas finircommeça !Dansma tête, ça tourneàcentàl’heure. Jem’y prendsmal avecKate. Elle est dérangée psychologiquement, je dois essayer de ladéstabiliser.Àtoutprix!Jeprendsunelongueinspiration:

–D’accord ! dis-je sur un ton aussi ferme quemon soufflem’y autorise. Alexander ne t’aimepas…maisilt’aaidée,non?Etc’estcommeçaquetu…leremercies?Àtaplacej’auraishonte!

Katedemeuresansvoix,commeinterloquéeetdécontenancée.

Jenemefaispasbeaucoupd’illusionsquantà lasuitedesévénements, jeneveuxd’ailleurspaspenseràl’issuequimeterrifielittéralement,maisjen’aiplusqueçaentête:gagnerdutemps.

Mesdoigtsglissentdequelquesmillimètressurlarocheetjepousseuncriderageenreprenanttantbienquemalmesappuis.

–C’étaitbiententé,grondeKate,toutenposantlasemelled’unedeseschaussuressurunedemesmains.

Jesens lapressionaugmentersurmesphalanges, ladouleurenfle.Jesaisque jene tiendraipasbeaucouppluslongtemps.Parlafolied’unefemmedérangée,jevaism’écraserdanslamontagne.Lasemelle appuie encore un peu plus fort surmes doigts désormais ankylosés et la douleur devientinsoutenable.Jepousseunlongcridesuppliceetlâcheprise.LeriredeKatemetranspercedepartenpart. Je ne tiens plus qu’à une seule main, mon corps se balance dans le vide, tirant à chaqueoscillationunpeuplussurmonbrasparcourudeterriblesélancements.

Jen’yarriveraijamais…jevaisvraimentmourir…

JenePEUXpasacceptercetteidée.JeneVEUXpas.JelèvelesyeuxversKate,ladéfieduregard.Jehurleetlâche:

–Espècedemonstre!

Jesaisquejeviensdesignermonarrêtdemortenprononçantcesmots,maisj’aitropderageenmoi.Tropdecolèrepoursupplierenvain.

–Adieu,grogneKateenappuyantlasemelledesachaussuresurmonautremain.

Àquoibonsupplierpuisquec’estunequestiondesecondes…?

5.Entrelavieetlamort

Jefermelesyeux,résolueaupire.C’estinéluctable.Lapressiondelachaussuresurmesdoigtssefaitplusinsistante.Jegrognededouleur.

Jen’enpeuxplus,jevaislâcher,je…

J’ai d’abord l’impression de rêver quand je ne sens plus le poids de la chaussure sur mesphalanges.Jesoulèvelespaupièresparréflexe,lèvelesyeuxpourapercevoirlatêtedeKate,laquelledisparaît alors de mon champ de vision, comme happée par un aimant. Mes doigts glissentdangereusementsurlaroche,jesuisfichue,jevaism’écraser…Uninstinctdesurviemecommandenéanmoinsunderniersursautd’énergie.Mobilisantlepeudeforcesqu’ilmereste,jeremontemonautre bras vers le bord du surplomb pour tenter de m’y agripper, mais il me manque quelquescentimètres!Jetouchepourtantmonsalutduboutdesdoigts,maisçanesuffitpas.

Quelquescentimètresàpeine!

Dans un gémissement rageur, je prends à nouveau de l’élan, balançantmon corps au risque dedévisser définitivement, lancemon bras et tends les doigts vers le surplomb, quand desmains sesaisissentbrusquementdemespoignets.Etlà,lesyeuxdirigésversleciel,jel’aperçoisàtraversmeslarmes.

Alexander,c’estAlexander…

Ilmeretientparlespoignetsavecuneforcepeucommune,àtelpointqueçamefaitsouffrir.Maisjem’enfiche,jesuisprêteàtoutendurer,pourvuqu’ilnemelâchepas.Jesuisàprésentsuspenduedanslevide,leregardrivéàceluid’Alexander.Jevoiscetéclatdanssespupilles,lesveinesdesoncou gonflées par l’effort, et puis je sens que je remonte, comme en lévitation. Je sais déjà que jen’oublieraijamaiscessecondes,entrelavieetlamort,simplementretenueparcethommeenquij’aidésormaistouteconfiance.Ilmehisseversleborddel’à-pic.Toutsepassetrèsvite,jemeretrouvedans sesbras tandisqu’il reculepournouséloignerduvide. Jemeblottis contre lui, commesi jevoulaistraversersoncorps.Jesenssachaleur,sapuissance,sarespirationdansmescheveux.Jesuisvivanteetjemelaissealleràsangloter.C’estlecontrecoup,jemerendscomptequejeviensdefrôlerlamort.Jen’enrevienspasd’êtreencorelà.Pleurermepermetdem’enassurer.C’estleseldemeslarmesquejesensauborddemeslèvres.Leparfumd’Alexanderquejerespire.

Jesuisvivante…vivante…

–Aileen,Aileen,jesuislà,c’estfini.

Jesuisincapabledeparler,maisjesavourelebonheurd’entendresavoix.

Quandjesuisenfincalmée,jelèvelesyeuxverslui,ilprendmonvisageentresesmains.

–Lecauchemarestterminé,toutvabien,jesuislà.

J’aperçoisKateàquelquesmètresdenous,levisagedéforméparlahaine,ravagéparleslarmes.Unhommes’occupedelamaîtriserenluiliantlespoignetsdansledos.J’interrogesilencieusementAlexander.

– C’est mon ami Tom, dit-il en passant ses doigts dans mes cheveux. Il est guide de hautemontagne.

Le fameux Tomm’adresse un clin d’œil tout en s’attachant à contrôler lesmoindres gestes deKate.Jeluidécocheunsourirereconnaissant.

– Je lui avaisdemandéd’agir aucasoù jen’arriveraispasà temps,m’explique-t-il en levant lepouceàsonintention.

Puisilsepencheversmoietmeconfieàvoixbasse:

–Bravopourl’accentcirconflexedanstonSMS!C’estgrâceàçaquej’aicomprisquevousvousrendiezdanslazonedesà-pics.

– J’espérais de tout cœur que tu saisirais l’allusion, je n’avais pas le temps d’écrire un longmessage.

–Tuasétégénialeettrèscourageuse,fait-ilendéposantunesériedebaiserssurmonvisage.

***

L’inspecteurducommissariatdeMammothLakesexpliqueàAlexanderqueKateBlaineaappelélastationlaveillepoursavoirsiquelqu’unétaitvenurécupérerlescléschezcecommerçantoùilapourhabitudedeleslaisserchaquefoisqu’ilquittelechalet.

–C’est commeçaqu’elle a compris que j’avais fort probablement emmenéAileen àMammothpourlamettreàl’abridelavagueTwitter,endéduitAlexander.Etc’estpourçaqu’elles’yestrenduedirectement.

L’inspecteuracquiesce.Ilm’adresseunsourire:

–Vousavezfaitpreuvedebeaucoupdesang-froid,mademoiselle.–Jen’avaispasvraimentlechoix.Etpuis…

Jeposeunemainsurlebrasd’Alexander,avantd’ajouter:

–SanscethommeetsanssonamiTom,jeneseraissansdoutepluslàpourvousparler.–Parbonheur,cettehistoireseterminebien,répond-il.

Alexandersesaisitdemamainetdéclarequ’ilestdésolé,qu’ilauraitdûm’endireplussurKateavantquecelanedégénère.

–Àcepropos,enprofitel’inspecteur,pouvez-vousm’éclairerunpeuàproposdeMlleBlaine?–Oui,bien sûr,d’autantplusqu’AileenSummer iciprésentea ledroitde savoir. J’ai rencontré

Kateilyaquatreans,àunvernissageauquelelles’étaitfaufiléepouressayerdemangerdeuxtroispetits-fours au buffet. Elle était réellement en situation de détresse, avait contracté tant de créditsqu’ellecroulaitsouslesdettes.Sanstravailetsansdomicilefixe,elledormaitdanslarue,vivaitd’unlieuàl’autreenfonctiondesopportunités.Nousensommesvenusàparlerdephotographie,elleavaitl’airdes’yconnaître.Etc’estalorsquej’aidécidédelaprendresousmonaile,commeassistante.

–Yavait-ilautrechoseentrevous?demandel’inspecteur.–J’allaisyvenir. Il se trouvequeKatea trèsvitecontracté,disons…unesortedepassionpour

moi,mais il ne s’est strictement rien passé entre nous. Je n’étais pas attiré par elle, sans compterqu’elle travaillaitpourmoietque jen’ai jamaismélangé leboulot et lavieprivée.Ellea finiparcomprendrequejenepartageaispassessentiments.Maisunsoir,alorsquetoutsemblaitallerpourlemieux,elleafaitunetentativedesuicide.Làencore,jel’aisoutenue,j’aitenubonpourqu’elles’ensorte. Elle a passé plusieurs semaines dans un centre de repos, suivie quotidiennement par unpsychiatre qui a diagnostiqué diverses névroses et évoqué la possibilité d’un comportementoccasionnellementdangereux.Jesaisquelameilleuresolutionauraitétédecouperlesponts,maisjecraignaissaréaction,etje…

Alexanders’interrompt,m’adresseunregarddoux,avantdepoursuivre:

– Je ne pouvais pas la laisser tomber, je n’aimepas l’idée d’abandonner les gens quand ils ontbesoind’aide.Àforcedepatience,jesuisparvenuàluifaireremonterlapente.C’étaitilyadeuxansdeça.Depuis, tout semblait revenuà lanormale,maisaveccette rechute, aprèscequ’ellevientdefaire, je m’aperçois que je me suis lourdement trompé. D’une certaine manière, j’ai mis la vied’Aileenenpériletjem’enveuxterriblement.

–Tunepouvaispassavoir,lerassuré-jeenétreignantsamain.–Oui,mais j’auraisdûme rendreà l’évidence.Lesmédecinsm’avaientprévenu,Kateétait très

atteinte. Ilsuffisaitd’ungraindesablepourque lemécanismes’enraie.Maiselleallaitpourtantdemieuxenmieux,elleétaittoujourssourianteetmedisaitqu’ilyavaitunhommedanssaviequ’elleme présenterait prochainement. Je pensais donc à bon droit qu’elle était guérie. Elle a dû craquerlorsqu’elleadécouvert lesphotos.Etcethommedanssavie, j’aicomprisalorsqu’il s’agissaitdemoi,qu’elleavaitjouélacomédiepourmefairecroirequ’elleétaitguériedesonobsession.Ellenem’avaitjamaisvuavecunefemmepourlabonneetsimpleraisonquej’aitoujoursétéunsolitaire…

Alexanders’interromptquelquessecondesetjerepenseàmaconversationtéléphoniqueavecKate,àcettepériodeoùjecherchaisdésespérémentàjoindreAlexanderquiavaitdisparudelacirculationenpleincataclysmeTwitter.J’avaisalorséprouvélasensationpalpablequeKatesouffraitbeaucoupdufaitqu’Alexandernelaplaçaitjamaisdanslaconfidence.Quej’essaiedeleretrouveràtoutprixadûsonnercommeunsignald’alarmeenelle,lafaisantsesentirplusquejamaisécartéedecethommequ’ellevénéraitjusqu’àl’obsession.

– En visionnant ces photos, poursuit Alexander, elle a dû comprendre qu’il se passait quelquechosedetrèsimportantdansmavie,quej’étaisentraindetomberam…

Il s’interrompt à nouveau, comme s’il venait de se rendre compte que nous sommes dans uncommissariat,unlieupeupropiceauxdéclarationspersonnelles.Etcommeparsolidaritémasculine,

l’inspecteurletiredel’embarras.

– Oui, je vois très bien, monsieur. Quoi qu’il en soit, on a tout, mais vous serez convoquéultérieurementautribunalpourfaireunedéposition.

Alexanderacquiesceetserrefortmamaindanslasienne.

–Queva-t-ilsepasserpourKate?demande-t-il.–Elle sera vraisemblablement prise en charge par unpsychiatre et probablement internée, dans

l’intérêtdechacun.Àcommencerparlesien.

Alexandersoupire.Ilsouffrecertainementd’avoiréchouédanssesefforts.Jesaisqu’iln’éprouvepas de haine envers Kate. Et moi non plus d’ailleurs. Elle a peut-être failli me tuer, mais j’aiconsciencequec’étaitsousl’emprisedeladémence.Unechoseestsûre,Alexandernerisqueplusdetravailleravecelle.Etlà,j’avouequeçamerassure.

***

Noussommesenfinseulsauchalet.Unpeufatiguéspartoutescesémotionsdignesd’unthriller,maisheureuxqueleschosessefinissentbien.Matêteestposéecontrel’épauled’Alexander.Unfeucrépitedanslacheminée.Savoixchaudeetdoucemeberce.Jesensqu’ils’enveutencorepourmilleetuneraisons.

–Àforced’avoirpeurdeteperdreetennet’impliquantpas,jet’aimiseendanger.–Qu’est-ce que ça aurait changé,Alexander ?Ça ne l’aurait pas empêchée deme rejoindre au

chalet.Ellen’étaitplusàLosAngeles.Tun’asrienàtereprocher.– Oui, mais je n’y arrive pas, murmure-t-il. En fait, j’ai toujours eu peur de perdre ceux que

j’aime.Çavientdeloin,jesuis…

Lavoixd’Alexander s’est légèrementvoilée, ilmeserrecontre lui,neditplus rien.Pourtant jesensqu’ilyaquelquechosed’important,commes’ilavaitunsecretàmeconfier.

Unsecretlourdàporter…

Jemedétacheunpeudeluipourleregarderdanslesyeux:

–IlexistebiendesphotosdemoinuesurTwitter,ouiounon?–Oui,répond-ilsanssaisird’embléelesensdemaquestion.–Ai-jel’airtraumatisée?continué-je.–Non,tuasl’aird’êtrebien.–Exactement!Alorsaprèscequenousavonsenduré,jepeuxtoutentendre,tunecroispas?

Ilm’observesilencieusement,seslèvresfrémissent.

–Dis-moi,s’ilteplaît,insisté-je,parle-moidecettechosequivientdeloin.–J’aiparfoisl’impressionden’êtrequ’unefaçadeenme…réfugiantdanslemondedelabeautéet

du luxe, avoue-t-ild’unevoixgraveethésitante. Jevoyagepartout, j’aibeaucoupd’argent, j’aidu

succès grâce à mes photos et mes films publicitaires, sans compter l’héritage demon père qui avendusonempireinformatiqueàdesfinancierschinois.Vusouscetangle,onpeutdirequelaviemesourit,maisçan’effacerajamaiscertaineschoses.

Il s’interrompt et je l’encourage du regard. Je saisis une de ses mains dans les miennes. Etj’attends.

–C’étaitlorsd’unreportagedeguerre,ilyacinqans,confesse-t-ilsuruntontrèsému.C’étaitunphotographe brillant et c’était…monmeilleur ami. Nous nous sommes retrouvés piégés au beaumilieud’unefusillade.Ilaététouché,ilgisaitàquelquesmètresdemoi,maisilétaitencorevivant.Çatiraitdepartout,c’étaitinfernal.J’aitentédelemettreàl’abridesballes,mais…jen’ysuispasarrivé.Undeuxièmeprojectilel’aatteint,sousmesyeux,c’était…

Alexandersecachelevisageentrelesmains.Soncorpsestparcourudetremblements,commes’ilrevivaitendirectcemomentd’extrêmeviolence.

–Cen’estpastafaute,murmuré-jeenmecollantcontrelui.Vousfaisiezunmétierdangereux,çaauraitaussibienputomber…surtoi.

J’éprouvedesdifficultésà réaliserceque jeviensdedire.Lasimple imaged’Alexander touchépardesballesaucoursd’unefusillademeretournelestripes.Jeposematêtecontresontorsepoursentirsoncœurbattre.

Toutvabien,ilrespire…

–Le seul problème,Aileen, c’est que j’ai insisté pour que nous nous rendions dans cette zone.Karl,ils’appelaitKarl,nelesentaitpasdutout.Maisilm’asuivi,commejel’avaisfaitmoi-mêmedans d’autres situations, nous fonctionnions en duo, mais là c’est comme… comme si je l’avaisconduitàl’échafaud,je…jemedisquesij’avaislaissétomber,Karlseraittoujoursvivant,il…

Incapabledepoursuivre, il semord l’intérieur des joues, ses yeux sont brillants et samâchoiretremble.Jemesureàquelpointc’estcourageuxdesapartdemeconfierunsouvenirsidouloureux.Jene trouvepas lesmotspour luidirequ’ilnepeutpasseconsidérerresponsabled’unévénementindépendantdesavolonté.CeKarlétaitreporterdeguerre,toutcommelui.

–Etdepuis,reprend-ild’untonpeuassuré,j’aitoujourspeurdenepasêtrelàpourmesproches,j’imagine régulièrement qu’une telle situation pourrait se reproduire. C’est pour ça que jen’entraîneraiplus jamaisquiquecesoitdansuneaventurecomportant lemoindrerisque.Aprèssamort,j’aiabandonnélereportagedeguerrepourmecacherderrièreunmurdepaillettes.Aumoins,danslamode,jenemetspersonneendanger,saufquandjefaisdesphotosdetoiquiseretrouventpubliéessurTwitter.

– Oublie Twitter, Alexander, c’est un accident et on s’en fiche ! insisté-je avec force. Et jecomprends que tu souffres de cette expérience douloureuse,mais parfois les choses arrivent sansqu’onnepuisse rieny faire.Karl savait qu’il ne partait pas faire unepromenade etmême si c’esthorriblequ’ilnesoitplusdecemonde,jesuissûrqu’ilteprendraitdanssesbrass’ilpouvaitrevenir.Vousétiezuntandem,vouspartagiezlesrisques.Tunepeuxpaspassertavieàt’envouloir.

Ilsourit tristement,effaceune larmesolitairequi roulesursa joueoùpointeunebarbede troisjours.

–Jesaisbien,lâche-t-il.C’estpouroublierettenterdeguérirquejeparssouventseulàl’aventure,pourm’éprouver,repousserleslimites,sansavoiràm’inquiéterpourautrui.

EnécoutantAlexander,jeressensavecacuitésoncôtésecret,sondésirdevivreàl’écartetdenepastropselivrer.Jesaisàprésentquec’estpourçaqu’ilnem’apasemmenéefaireunevraiechutelibre.Lecentredesimulationétaitlemeilleurmoyendem’offrirdessensationssansrisque.Saufquejesuisexactementcommelui,j’aibesoind’adrénaline.Jeveuxtoutpartageraveclui,quellesqu’ensoient les conséquences. On ne peut pas vivre dans une boîte garnie de coton. Se mesurer auxélémentsestlaplusbellefaçonderespirer.

–Tum’assauvélavie,nel’oubliespas.Dèsquetuassupourmesproblèmes,tut’eslancéàcorpsperdudanslabataille.Etquandjet’aiprévenuqueKateétaitauchalet,tuasréagiauquartdetour,tunem’asjamaisabandonnéeettum’asépargnéunechutemortelle.

– Je neme serais jamais pardonné de ne pas arriver à temps, ditAlexander enme fixant avecintensité.Etcurieusement,c’estvrai,cetincidentmeredonneconfianceenmoi.

–Dèsquetudouterasdetoi,jemependraidanslevidepourquetuviennesmesauver,d’accord?proposé-jeavecunclind’œil.

Ilritetjesavoure.Puisilretrouvesonsérieuxetprendmonvisageentresesmains:

– Je voudrais quemon passage sur terre ressemble enfin à quelque chose. J’ai beau rouler enPorsche,me déplacer en jet et vivre dans l’une des plus luxueuses villas deBeverlyHills, plus letempsavance,plusjemedisquec’estunesortede…comédie.Laviec’estmieuxqueça,c’estplusqueça.Jerêvedetrekenconditionsextrêmes,d’escaladesimpressionnantesetdesautsinterminables.J’aienviedemedépasser,dem’évader,derespirer,j’aspireàplusde…liberté.

Jesuissuspendueàses lèvres.C’estmonsportif,monaventurier, l’hommeavecqui jevoudraisvivremilleetuneexpériences.Aveclui,jemesensenconfiance,prêteàdécouvrirdeschosesaprèsleboutdumonde.

–Undésirdesolitudem’habitaitenpermanence,poursuit-ilsursalancée,etpuisjesuistombésurtoi,jenem’attendaistellementpasàtoi.Tuaschangémoncœur,tum’asrévélé.Jemesuissouventmoquédesprétenduesaventuresquel’onmeprêtaitsurlestabloïds,maislàj’aimeraiscrieràlafacedumonde qu’ils se sont trompés, qu’ils parlaient sans savoir, ajoute-t-il avec passion. J’étais seulparce que je l’avais choisi. J’ai toujours été loyal et à l’écoute, mais j’étais également dur etinaccessible.J’auraispupassermontempsàvivreainsi.C’étaitrodé,jeglissaissurdesrails.Etpuisj’aidécouvertqu’ilmemanquaitquelquechose.C’estgrâceàtoi,Aileen,assure-t-ilenmeregardantdroitdanslesyeux.J’aipeut-êtrefaitdesphotosdetoinue,maisenfindecomptec’esttoiquiasmismessentimentsànu.

Ils’interromptquelquessecondespourreprendresonsouffle.Ilestpassionnéetjesuissuspendueàseslèvres.

Encore,encore…

–Quandjem’ensuisrenducompte,reprend-il,j’aiprispeur.Jetevoulaisplusquetout,maisjen’étaispascertaind’êtrel’hommequ’iltefaut.Etpourtant,jepouvaisliredanstesbeauxyeuxvertston désir de tendresse et d’amour. Plus les jours passaient, plus jemesurais qu’on se ressemblait.J’avais l’impressionquenousavions tous lesdeuxemprisonnénoscœurs, avantde jeter la cléducoffre-fort. Je saisque je t’ai fait souffrir,maisc’était indépendantdemavolonté, tucomprends?J’avais l’impression que tume rendais soudain fragile, alors que c’était… tout le contraire.Tu asmêmeréussiàmeguérirdecetteblessure,enmeredonnantconfianceenmoi.Désolédetediretoutçad’unbloc,c’estsansdouteunpeuconfus,je…

– J’adore quand tu es confus, coupé-je enme serrant fort contre lui, avant deme reculer pourplonger mon regard dans le sien. Aucun homme ne m’a jamais parlé comme ça. Eh oui, on seressembleinfiniment.Mesparentssontmortsdansunaccidentdevoiturealorsquej’étaisenfant.J’aipassémonenfanceetmonadolescenced’unfoyeràl’autre,àdevoirmebattrecontrel’adversité,àm’habitueràcetteidéequejeseraisprivéed’amouretdetendresse.Jemesuisenferméemoiaussi,pourmeprotéger.Pourêtreforte!Maislaforce,c’estquandons’ouvrecommetuviensdelefairesimerveilleusement.Etjenepensaispasêtrecapableunjourdem’enremettreàquelqu’uncommejesuisen trainde le faireavec toi. Jen’ai jamaiseuaussiconfiancedemavie, jenemesuis jamaissentieautantensécuritéqu’avectoi…etheureuse.

Jem’interrompsuninstantetreculed’unpaspourregarderAlexander.Évoquermonpasséremuetantdechosesenmoi.Maisdanslesyeuxdecethommepascommelesautres,jedevinequ’ilresteraàmescôtés.

–Promets-moijusteunechose,d’accord?ajouté-jed’unevoixétranglée.–Toutcequetuvoudras.–Plusjamaisdesecretsentrenous,onpartagetout.Lepirecommelemeilleur.

Lesyeuxbrillants,Alexanderacquiesce.Cebrusquesilenceaprèslestaccatodesmotsestcommeuneoasisquenousfoulonsavecémerveillement.Lecielestdégagé,notrehorizonsembleinfini.

–Aufait,ajouté-jeenluiadressantunsourireinsistant,qu’allais-tudireaucommissariatavantquenotreinspecteurnetetiredel’embarras?

Ilmedécocheàsontourunsourireéclatant:

–C’estunsecret,Aileen!–Alexander!protesté-je.– Je suis amoureux de toi ! déclare-t-il, avec dans les yeux un mélange de vulnérabilité,

d’assuranceetdetendresse.–Tusaisquoi?répliqué-jeaucombledel’émotion.–Jet’écoute.–Jesuisamoureusedetoi,assuré-jeavecunsourireéclatant.–Ettusaisquoi?demande-t-ilsuruntonému.–Jet’écoute,murmuré-je.–J’aienviedetoi!

Matempératureaugmentetandisqu’Alexanderselèvepourallerchoisiruneplaylist.

J’entends bientôt « Need U » un titre d’Oceaán que j’adore. Et je me laisse faire quand monsauveurcommenceàmedéshabiller.Parceque,oui,j’aibesoindelui…

Alexandermetientcontresoncorpspuissant,jesuisnue,ilesthabillé.C’estunesituationtrès…érotique.Jemesensà la fois forteet fragile, livréeetadmirée.Sesmainsparcourentmescourbesavecuneimpatiencequimeravit,s’attardentsurmesfesses.Ilglissesesdoigtsdansmachevelure,joueavecquelquesmèches.Jemedisqu’ilpourraitbienmefairejouirrienqu’enmecaressantdelasorte.

L’effetquetumefais…

Ilsepenche,poseseslèvresfiévreusessurlesmiennes.Audébut,c’estdoux,lent,tendre,sensuel,comme si nous venions de nous rencontrer et que nous nous cherchions, puis l’atmosphère seréchauffe, jusqu’à devenir quasi électrique. Il m’embrasse alors à pleine bouche. Nos languess’enroulent désormais dans un long baiser profond, presque violent, qui étouffe nos soupirs deplaisir.J’adorecettesensationd’êtreensapossessionbienveillante,àlafoissoumiseetvénérée.

–J’aisienviedetoi,gronde-t-il.Jeveuxteprendre,je…–Chuuut…,onatoutnotretemps.J’aiprévuquelquechoseavantça.

Il penche la tête sur le côté,m’interroge du regard. Il est renversant de charme et de beauté. Jedésireplusquetoutsentirsapeaucontrelamienne.J’aibesoindecettechaleur,dececontact.C’esturgent!

–Laisse-toifaire,ajouté-jeencommençantàledéshabiller.

Alexanderacquiesce.Enquelquessecondes,sachemises’envoledanslesairspourplanerversleparquet.Oceaánenchaînesur«ToLose»et,commesic’étaituneévidence, jem’agenouilleàsespieds. Visage relevé vers lui, je déboutonne son jean en le provoquant du regard, avant de faireglisser le pantalon jusqu’à ses chevilles. Je me mords la lèvre inférieure. Son boxer blanc estdéforméparuneérectionimpressionnante.Sansréfléchirpluslongtemps,jedébarrasseAlexanderdecesous-vêtementtotalementinutile.

À quelques millimètres de mon visage, son sexe se dresse fièrement. Je lève les yeux versAlexander.

–Ilestbeau,dis-jeenposantl’indexàl’extrémitédesonsexe.–Ilestàtoi,répond-ilenfrissonnant.

Mmm,bonneréponse…

Ilgémità son touretpasse sesdoigtsdansmescheveux tandisque j’approchemes lèvrespourl’embrasser.

Jesaisislabasedesonérection,prendsunmalinplaisiràm’attardersursongland.Alexanderse

tendaussitôtcommeunarc.Jesaisàquelpointcettepartiedesonanatomieestsensibleetj’aidécidéd’enjouer.Jel’empoigneenfinavecdouceur,maisfermeté,luiimprimantd’embléeunmouvementde va-et-vient, alternant les rythmes lents et les cadences rapides, au gré de mon inspiration.Alexandergémitsansdiscontinuersousl’effetdemontraitement.

Pluslesminutespassentetplusj’aienviedelerendrefou.

Etplusjedeviensfolle!

Savergeestàprésentsidurequejenepeuxplusrésisteràlatentationdelaprendreenbouche.J’entrouvre mes lèvres et la fais glisser lentement entre ma langue et mon palais. Mes paumesplaquéessurses fesses, jem’appliqueà le recevoir leplus loinpossible. J’aime tellement lesentiremprisonnéenmoi.C’estunplaisirindescriptible.Alexandertrembleàprésentdespiedsàlatête.Jesuisàgenoux,maisc’estmoiquidécide ! J’ai tellementenviequ’il jouissedansmabouche,qu’iltrembleetvacilledansunpuissantorgasmemalgrésescuissessolidesetsoncorpsd’athlète.Jesenssonplaisirquimonte,sonmembrequisegonfle.

–Aileen,je…

QuandAlexanderexplosebrusquement,jecontinueàluiimprimermonrythme.Jelegardedansmaboucheetj’accueillesasemencequijaillitenmoiparsaccades.Ilm’enjointd’arrêter, ilrâleettrembledetoutsoncorps.Jen’obéispassur-le-champ.J’enprofiteetjesavoure.Puisjemeredresselentement,remontelelongdesontorseluisantdesueur.

Ilmeserrecontrelui,lecorpstoujoursagitédeconvulsions.

Jesuisbiencontrecethommequej’aimecommejen’aijamaisaimépersonne.

Au bout d’un longmoment à onduler l’un contre l’autre au rythme de la musique qui envahitl’espaceduchalet,Alexandermesoulèveettraverselapiècepourm’emmenerverslachambre.Ilmedéposeavectendressesurlelit,avantdemerejoindre.

–Jepeuxtefairel’amour,maintenant?murmure-t-il.–Tuesdéjà…prêt?–Avectoi,jesuistoujoursprêt,souffle-t-il.Tuestellementmerveilleuse.–Redis-le,j’aimalentendu.

Ilrittoutendéroulantunpréservatifsursonérectionànouveauterriblement…conséquente.

–Jet’aime,chuchote-t-ilenmepénétrantavecdouceur.

Ilm’investitavecunedélicatesseàcrierdebonheur.Jesuistellementsensiblequejepourraisjouirimmédiatement.Maisnousavonstoutnotretemps.Alors,aprèslafoliedecesdernièresheures,c’estlemomentdel’accalmie.Alexandervaetvienttendrementenmoi,meconduisantpasàpasversuneoasisdefélicité.Ilmefait l’amouravecsonregardautantqu’avecsoncorps.C’estcommesinousétionsdanslascèned’unfilmauralenti.Etc’esttoutsimplementmerveilleux.

Ce rythme paisibleme transporte littéralement. Nous naviguons tous deux sans cesse entre uneincroyable douceur et une délicieuse sauvagerie. Cette façon que nous avons de nous aimer nousressembletellement.Aveclesyeux,nousnousdisonslesmotsquin’existentpas.Noscorpssoudésfrémissentenosmose.Alexanderplacesesmainssousmesgenouxpourrelevermes jambesetmepénétrerencoreplusprofondément.Unechaleurdivineparcourtmesreins,annonçant l’imminenced’unorgasmeincommensurable.Mesdoigtsseperdentdans lescheveuxsoyeuxdemonamantquiaugmente brusquement la cadence. J’en ai le souffle coupé tant c’est intense. Et juste avant que lajouissance ne me chavire, il reprend son rythme lent tout en entourant mon visage de ses largespaumes. Je gémis sous les décharges de plaisir quime traversent de part en part. Jeme contracteautourdesonsexetandisqu’ilembrassemonfront,monnez,mesjoues,meslèvres,chaqueparcelledemoicommesi c’était ladernière fois.Nouscrionsdeconcert,bouchecontrebouche.Le tempss’arrête, l’espace d’un orgasme indescriptible, puis nos cœurs se remettent à battre. Nos doigtss’entrelacent,noscorpssontanimésdesoubresautstotalementindépendantsdenotrevolonté.Jesaisdésormais qu’avec Alexander je veux me noyer jour et nuit dans un océan de douceur et desauvagerie.

Je croise son regard noir et magnifique. Je sais qu’il perçoit le fond de ma pensée plusdistinctementquesij’avaishurlécesmotssurletoitdumonde.

6.Lespetitsaventurierssauvages

Voici une magnifique image du bonheur : deux êtres étendus sur un plaid, nus, devant unecheminéeoùcrépiteunfeudebois.Et leplusbeaudansl’histoire,c’estqu’ils’agitd’Alexanderetmoi.Ilyamêmeunebandeoriginale,commedanslesfilms.Là,c’estAstronomyyavec«ThingsI’dDo For U ». C’est magique comme la musique colle parfois si parfaitement à une ambiance. Lachansonraconteleschosesqu’onpeutfairepourquelqu’un.C’estunpeunotrehistoireàAlexanderetmoi.Noscorpssontencoresensibles,ivresdenoscaressesàlafoisdoucesetpassionnées.

Je passe mon doigt sur le contour de ses belles lèvres. Son sourire me fait fondre. Et j’ai ànouveauenviedefairel’amouraveclui.Jen’aijamaiséprouvéautantdesensationsphysiquesavecunhomme.C’estdouxetc’estsauvage,c’estdélicieuxetc’estprofond.C’estunedroguedontjenepourraisplusmepasser.J’aimêmel’impressionquejen’auraisplusenviequedeça.

Nousnousenlaçonsetroulonssurlesolennousembrassantàpleinebouche.C’estcommesinousétionsaffamés,enmanqueperpétuel.

QuandAlexanderselèvepourallernouschercherquelquechoseàboire,jeleregardesedirigerverslacuisineetmeretienspournepasmejetersurluitantilestsexyetattirant.

En attendant son retour, je repense au nombre affolant de suiveurs sur Twitter. Il ne cesse degrimper,c’estlemomentoujamais,ilfautenprofiter.

Alexander me rejoint avec deux verres et une bouteille de vin blanc frais. Il me sert et jem’éclaircislavoix:

–J’aiimaginéquelquechose,commencé-je.– Je suis tout ouïe, répond-il en me tendant un verre que j’appuie contre mon front pour en

éprouverlafraîcheur,avantdelegoûter.–Délicieux,dis-je.–C’estunpetitvinsecdelarégion,parfaitpouruneconversationaucoindufeu.

Il passe une main sur mon visage et je frissonne à son contact. J’aime tellement ses délicatesattentions.

– Alors voilà, continué-je. Comme par la force des choses tous les regards sont actuellementdirigés surmoi, jemesuisditqu’onpourraitorganiseruneventeauxenchèresdephotosdecettesériequetuasréaliséeavantcellesdumatin.Ils’agiraitdetiragesnumérotés.Lesbénéficesseraientreversésàunefondationderecherchepourlamédecine.Est-cequetuseraisd’accord?

–Tuescertainedevouloirfaireça?demande-t-ilsansmequitterdesyeux.–Pourquoi?Tutrouvesquecen’estpasunebonneidée?dis-je,soudaindéstabilisée.–Aucontraire,c’esttrèscourageuxdetapart,assure-t-il.Onvalefaireparcequec’estunebelle

manièrede répondreauxmauvaises langues.Et à cepropos, j’ai aussiunechoseà tedire.Depuistoujoursjepensecommetoiqu’ilfautréagirauxchosesquiseproduisentdansnotrevie.

Ils’interromptuninstantpourboireunegorgéedevin,avantdem’expliquer:

–Pour répondreàma façonaubuzzdeTwitter,une idée s’est imposéeen tevoyant skier. Il setrouve qu’unemarque de vêtements d’hiverme propose régulièrement des ponts d’or pour que jeréalise un film publicitaire. J’ai toujours refusé parce que je n’avais pas le temps. Et jemanquaisd’allantaussi.J’aichangéd’avis,j’aidécidéd’accepter.Àuneseulecondition!

–Laquelle?dis-jesuruntonintrigué.–Quetusoislepersonnageprincipaldececlip.–Moi!m’exclamé-je.–Oui,rit-il,jenevoispersonned’autredanslapièce.Tuseraisleurégérieetceseraitmafaçonde

terhabillerauxyeuxdumonde.– Jolie formule,monsieur.Etpasserdenueàvêtued’unecombinaisonde ski,onpeutdireque

c’esttoutourienavectoi.

Nousrionsetnousnousenlaçons.

– Qu’en penses-tu ? me demande-t-il au creux de l’oreille. J’ai déjà choisi la musique pourillustrerlefilm:lemorceauquenousécoutionslorsdushootingJust4You.

Jem’ensouviensparfaitement,ils’agissaitde«YuksekRemix»parChassol,untitreàlafoishotet lancinant. J’imagine les images dans la neige et cette bande originale un peu décalée. Je suispersuadéequ’Alexanderferaquelquechosedetrèsbeau.Jemeblottiscontrelui.

–Onvalefaire,jesuisprêteàtoutavectoi.–Jesuisprêtàtoutpourtoi,souffle-t-ilàmonoreille.

***

QuandAlexander crie « coupez », je stoppema course dans une gerbe de poudreuse.C’était ledernier plan du clip. Et c’est la fin d’un tournage d’anthologie durant lequel nous avons vécud’intensesmoments de partage avec l’équipe. Des rires, des fous rires, des sauts incroyables, deschutesmémorables,des frissons inconcevables etungrandbold’adrénaline.Alexanderme rejointpourmeprendredanssesbras,lestechnicienssurplacenousapplaudissent.

–Tuasétégrandiose,medit-il.Tuskiesvraimentcommeunedéesse.Leclipserasublime,grâceàtoi.

–Non,grâceàtoi,répliqué-je.Toiseulsaismemettreenvaleurtellequejesuis.

Alexandersetournealorsversl’équipe,s’éclaircitlavoixetdéclared’uneintensitéàfairefondreleCirconflexeetlesà-picsenvironnants:

–Jevousremercietoutesettousinfinimentpourvotretravailexceptionnel.

Moncœur bat la chamade.Depuis deuxmoismavie estmerveilleuse. J’ai remplimesdernierscontratsetnousnoussommesinstallésauchaletavecAlexander.Laventeauxenchèresaremportéunvif succès et les jolis commentaires surTwitter ont déjà effacé lesmauvais souvenirs du scandaleUndercover.Désormais, toutvapour lemieuxdans lemeilleurdesmondes.Nousavonsdécidédenousposer.

AvecAlexander,jevischaquejourcommesic’étaitunrêve…

Souslesregardsattendrisdel’équipedetournage,ilmeserretendrementcontreluietnousnousembrassonssousunenouvellesalved’applaudissementsdontl’échosembleserépercuteràl’infini.Du coin de l’œil, j’aperçois quelques personnes qui prennent des photos. Je ne serais pas surprisequ’ellesseretrouventbientôtsurTwitter.Ceseraitunebellehistoireetlapreuvequel’amourestplusfortquetout,qu’ilfinittoujourspartriompher.

Jesursauteenentendantlespremièresmesuresde«Neptune»parFakear.J’aieulachancedelevoir en live lors d’un séjour en France et j’en garde un souvenir impérissable. À une dizaine demètres,l’ingénieurdusondresseunpouceenl’airàmonintention.Entrelesprises,nousn’avonspasarrêtédeparlerdemusiqueélectro:c’estunbeaucadeauqu’ilmefaitdelancercemorceaudanscedécoràcouperlesouffle.Unisdanslebonheur,nousnousmettonstousàdanserdanslaneige.

Jen’oublieraijamaiscesmoments…

***

Dansl’espacefeutréduchaletoùjemesenssibien,jemedéhanchesur«LightenUp»,unremixde Tobtok par Citizens.AvecAlexander, je n’arrête pas d’avoir envie de danser. Et je souris à lapenséequejel’aidéfinitivementconvertiàmapassiondelamusiqueélectro.Assissurlecanapé,ilmedévisageavecunairgourmandetj’avouequej’enrajouteunpeupourlerendrefou.J’aienviedel’étonner,deleséduire,defaireensortequ’iln’aitd’yeuxquepourmoi.

Jesuisdevenuelégèrementpossessive,maisjem’enfiche…

Maintenant que j’ai rencontré l’amour, je compte m’y arrimer comme à une bouée, dussé-jetraversertouslesocéansduglobe.

Alexanderselèvepourmerejoindre,m’enlacetendrementetnousdansonsl’uncontrel’autre.Sespaumesquiencerclentmesreinsmecollentdesfrissonsirrésistibles.

–Est-cequetuseraisdisposéeàparcourirlemondeavecmoi?demande-t-il.–Jeseraismêmeprêteàlerefaire.

Ilritetmeserreplusfort.

–Tuesincroyable,murmure-t-ilavantd’ajouter:découvrirdesendroitsfabuleuxpourassouvirnotrepassiondelanatureetdusport,ceseraitvraimenttop.C’estcommeçaquej’aimeraisvivre.

–Unevieavecunsens,tuveuxdire?

– Oui. Être avec toi, toujours, pratiquer l’escalade, faire du ski, du bateau, s’offrir des chuteslibres,respireràpleinspoumonsàl’écartdesbruitsdumonde.Etpuis…

Il s’interrompt, s’éloigne un peu demoi, pose sesmains surmes épaules etm’embrase de sonregardintense:

–…àforcedeparcourirleglobe,nouspourrionsfinalementtrouverlespotidéalpour…notremariage.

C’estcommeunélectrochoc.Jenecalculemêmepasmaréaction,jesuissimplementvictimedemoncorpsquisemetàsauterenl’air.C’est…incontrôlable.Jepousseuncridejoiesousl’œilravid’Alexander.Jem’arrêtesoudain,lespoingssurleshanches:

–Etqueferions-nouslà-bas,toutlà-bas,aprèsnotremariage?–J’aibienunevagueidée,dit-il.–Jet’écoute,monsieurmonfuturmari.–Là-bas,toutlà-bas,onpourraitfabriquerdespetitsaventurierssauvages?

C’estlaréponsequej’attendais,mêmesijen’osaisl’espérer.Aprèsmaviepasséedanslesfoyers,jem’étaistoujourspromisdenejamaisavoird’enfants.Maistantdechosesontchangédepuisnotrerencontre.Àprésent,c’estunrêvequejeveuxréaliser.Jesuisprête,aveclui.

–Çame plairait vraiment, tu sais ? insiste-t-il. En plus, je n’ai encore jamais fait de photos defamille.

–Moinonplus,je…

Lesmotsmemanquent.Jemelaisseenvelopperparlesbrasprotecteursdemonsauveur.Jerespiresonparfumquej’adore,j’écoutesoncœurbattre…Bom-bom…bom-bom…toutvabien!

Onvousattend,lespetitsaventurierssauvages…

FIN

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EntreTomKelley,lequarterbackdesGiants,etMayaLeblanc,lajeunephotographe,rienn’auraitdûarriver!Tomvitdansunmondefaitdevictoiresetdepaillettes,dedollarsetdebimbos.Maya,elle,essaietantbienquemaldebouclersesfinsdemois.AlorsquandTomessaiedelaséduire,l’instinctdeMayaluiditdefuir…Nerisque-t-ellepasdesebrûlerlesailesàcôtoyercemondesidifférentdusien?D’autantquecetuniversauxapparencessuperficiellesdanslequelvitTomestmoinsinnocentqu’iln’yparaît…

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Août2016

ISBN9791025732649