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Revue annuelle composée pour le Noël des Anciens de Coublanc Année 2014 Prix minimum : 4,00 Numéro 19 Samedi 14 décembre 2013 ISSN 1964 - 812 X

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Revue annuelle composée pour le Noël des Anciens de

Coublanc Année 2014

Prix minimum : 4,00 € Nu

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Sommaire

Le latin de notre enfance, « O crux ave, spec

unica » et autres « ave ! »

par Bernard Berthier, page 3.

Noli me tangere ou le vitrail de Marie-

Madeleine par Régis Déal, page 4.

Des vacances à Coublanc entre 1946 et 1949

(première partie)

par Claude Latta, page 7.

Souvenirs d’enfance et de service militaire au

Maroc,

par Maurice Bertillot, page 12.

Mon père, Joseph Chassignolle. Souvenirs

d’enfance par Juliette Buchet, page 17.

Cahier Jules Dubuy. Voyages en mer vers la

Papouasie par Bernard Berthier, page 25.

Rémy Berthier et Maria Joly son épouse, mes

parents

par Pierre Berthier, page 30.

Un siècle après. Les poilus de Coublanc morts

d’août à décembre 1914

par la rédaction, page 35.

Les autres rubriques, liste des Anciens, des décès, nais-

sances, mariages, contributions des élèves des écoles, mots croi-

sés, « On s’en souviendra » sont à peu près à leur place habi-tuelle...

Éditorial de Bernard Berthier

président de l’association

du Noël des Anciens de Coublanc

et rédacteur en chef d’En ce Temps-là

Chers lecteurs,

Baudelaire a écrit, entre tant d’autres beaux vers, ce-

lui-ci :

« Du passé lumineux recueille tout vestige. »

C’est un peu ce que nous faisons dans cette revue.

Mais le passé est-il toujours lumineux ? Que d’hor-

reurs dans l’histoire du XXe siècle ! Que de souf-

frances avez-vous connues !… Sans parler de la vie

quotidienne, souvent plus difficile que celle d’aujour-

d’hui, quoi qu’on dise de la crise actuelle.

Or je remarque que, sans ignorer les épreuves person-

nelles et collectives passées, vous ne ressentez pas de

déplaisir à l’évocation de cette époque. Est-ce par

simple nostalgie de la jeunesse ? Non. Il semblerait, à

entendre la plupart d’entre vous, et c’est ce que vous

avez à nous enseigner, qu’il y ait eu dans notre vil-

lage comme dans toutes les campagnes alentour un

rythme de vie et une solidarité qui rendaient la dure

existence supportable et même agréable.

Pour notre part, nous essayons d'être, comme disait

Michelet, « le lien des temps », et d'assurer « cette

chaîne vitale qui du passé mort en apparence fait cir-

culer la sève vers l'avenir. »

L’encadré ci-contre montre que nous aurions pu faire

un numéro double ! Mais il aurait fallu aussi doubler

le prix de vente...

Deux fils directeurs principaux distinguent et guident

ce numéro : l’évocation, un siècle après, des poilus

morts pour la France, et les voyages que des Cou-

blandis ont faits sur la mer.

Bonne lecture !

Joyeux Noël 2013 et

Heureuse Année 2014

Dessin de la couverture

Nadège Demont réinterprète une carte postale

représentant le navire-hôpital l’Asie, qui, durant

la guerre de 1914-1918, a rapatrié les blessés de

l’armée française d’Orient, dont Rémy Berthier.

Voir la carte postale page 30.

Projets coublandis - Le projet de diaporama sur l’histoire de la Grotte de

Lourdes de Coublanc a connu, grâce à Georges Piquand,

une ébauche de réalisation. La première mouture a été pro-

jetée le vendredi 17 mai 2013 à la fin de l’Assemblée géné-

rale des Amis de la Grotte de Lourdes de Coublanc. Reste à

peaufiner le montage.

- Le projet de publication d’un livret de tous les textes de

Claude Chevreton parus dans les numéros d’En ce Temps-

là. Est toujours en panne. Si vous connaissez d’autres textes

de notre talentueux concitoyen, prévenez Bernard Berthier.

Dans les prochains numéros

- Une personnalité à Écoche au XXe siècle : Madeleine

Prajoux.

- Souvenirs d’enfance brionnaise de Marie-Laure Chassi-

gnolle.

- Un curé originaire de Coublanc : l’abbé Barriquand.

- Maurice Crozet, maréchal-ferrant à Cadollon.

- Souvenirs divers de Maurice Accary.

- Grandeur et décadence de la famille Auvolat.

- Henry Bénas dans la Marine de guerre française.

- Marcelle Perrin et l’école primaire à Écoche.

- La Raterie au temps de la jeunesse de Jeanne Berthier.

- Souvenirs d’enfance à la Place de Célestine Barriquand.

En ce Temps-là 2013 Page 3

Le latin de notre enfance O crux ave et autres ave

par Bernard Berthier

L'an dernier, nous avons évoqué l'appel « Venite adore-mus » inscrit sur le fronton de l'église de Chauffailles.

Continuons à lire la façade de ce bâtiment.

Sous le fronton, il y a un arc de pierre qui ouvre et pro-tège à la fois l'exonarthex. Au sortir de la messe, les fi-dèles y discutent à l'abri de la pluie. En levant les yeux

vers le mur où s'ouvrent les grandes portes en bois de la nef, on remarque (mais y songe-t-on ?) une espèce d’œil

-de-bœuf divisé en quatre quarts par une croix de pierre. Sur cette croix

sont inscrits les mots latins « O CRUX AVE » sur la ligne verticale et « SPES UNICA » sur l'horizontale, avec le X de

CRUX à l’intersection, comme un pe-tite croix à l’intérieur de la grande. L’ensemble se prononce : « O crouks,

awé, spess ounika ». Ces mots appartiennent à l'hymne « Vexilla regis » écrit par Venance

Fortunat (530-609), un poète d’Italie du nord devenu évêque de Poitiers à la fin du VIe siècle.

Fortunat écrivit cet hymne en l’honneur de l'arrivée d'un fragment de la Vraie Croix que l'empereur byzantin Jus-tin II et l’impératrice Sophie avaient envoyé à la reine

Radegonde. Cette reine franque s'était retirée dans un couvent qu'elle avait fait bâtir près de Poitiers et elle avait cherché des reliques pour sa chapelle. L'hymne ac-

compagna la procession des reliques le 19 novembre 569.

Depuis, l'Église de langue latine − encore dans notre jeunesse − chantait sept strophes choisies dans cet

hymne, aux Vêpres, depuis le dimanche des Rameaux

jusqu'au Jeudi Saint, à la fête du triomphe de la Croix, ainsi que le Vendredi Saint, quand on apporte les hosties du tabernacle à l'autel durant la messe des présanctifiés.

Je propose le texte et la traduction de la première strophe, et de celle où figurent les mots

qui nous intéressent. La croix n'a pas toujours été l'unique symbole chrétien en art. Tant que le

supplice de la crucifixion était pratiqué par les Romains, jusqu'au IVe siècle, les chrétiens ont préféré l'agneau, ou le

poisson (ICHTUS)... Venance Fortunat est au tournant de la

tradition : la croix va s'imposer dans l'art religieux, jusqu'à faire oublier les autres symboles christiques.

Cela accompagne une évolution théolo-gique où la faute humaine est suréva-

luée, entraînant le culte du sacrifice sanglant de plus en

plus inadmissible et admirable du Fils de Dieu. Cela peut aller jusqu'au culcul-la-praline des vitraux re-présentant l'enfant Jésus, dans l'atelier paternel, portant

une petite croix (Coublanc) ou même aidant à en fabri-quer une, de forme potencée, à Coutouvre.

L'hymne de Venance Fortunat oublie d'évoquer la résur-rection, mais la circonstance de la procession des re-liques imposait cet oubli. Plus tard, on peut se demander

si la mort sur la croix n'a pas été considérée comme plus importante que la sortie du tombeau. Pour les chrétiens véritablement croyants, le spes unica (l'espoir unique),

c'est la vie du ressuscité, et non sa souffrance et sa mort, même s'il n'y a pas de résurrection sans mort préalable.

La joie vient du dimanche de la vie, et non de l'enfer de la passion de la semaine...

Chez les Romains, Ave était une formule militaire par laquelle le soldat saluait son chef. La formule fameuse, sans cesse reprise dans le péplums de notre enfance, et

par Astérix gladiateur (1964), Ave, Caesar, morituri te salutant, (« Salut, César ! Ceux qui vont mourir te sa-luent ») rapportée une seule fois par un historien latin à

propos de gladiateurs qui étaient en fait des soldats con-damnés à mort, a eu un succès postérieur au culte dolo-

riste de la Croix. L’origine militaire du mot a été oubliée, et l’on honore la Vierge Marie : « Ave Maria, gratia plena » dans chaque

« Je vous salue Marie ». Que d’ « ave » donc dans nos vies jadis, sans parler de la chanson peu recommandable, mais dont nous nous sou-

venons bien aussi : « Ave, ave, ave le petit doigt ! ». Mais chut !

Crédits iconographiques

Fonds Maria Auclair (p.20)

Bernard Berthier (pp. 3, 17, 18, 30 à 34)

Collection Mélanie Berthier (pp. 4 et 6)

Fonds Maurice Bertillot (pp. 12 à 16)

Fonds Juliette Buchet (pp. 17 à 19)

Fonds Mado Clarin (pp 18 et 32)

Nadège et Patricia Demont (p. 1 et 44)

Fonds Célestine-Dinet-Barriquand (p. 20)

Fonds Jules Dubuy MSC et/ou musée d’Is-

soudun et/ou alii (pp. 25-29)

Fonds Claude Latta (p. 7 à 11)

Fonds Maurice Poyet (p. 13)

Internet sans indication de droits d’auteur

(pp. 13, 14, 25, 26, 29)

Vexílla Regis pródeunt, Fulget Crucis mystérium : Quo carne carnis cónditor Suspénsus est patíbulo. […] O Crux ave, spes unica, Hoc Passiónis témpore, Auge piis justítiam, Reísque dona véniam.

Voici les étendards du roi, Brille le mystère de la Croix : La chair du créateur de la chair Est pendue à ce gibet. [...] Ô Croix, salut, unique espoir En ce temps de la Passion ; Rends justice aux gens pieux Et pardonne aux coupables

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Vitrail du Noli me tangere

Église de Coublanc, bas-côté nord,

huitième vitrail à gauche en entrant.

Photographie de Mélanie Berthier.

Noli me tangere

Marie-Madeleine et le Ressuscité

par Régis Déal

Non, vous ne vous trompez pas de chronique, vous n'êtes pas dans « Le latin de notre enfance » mais bien dans la

présentation d'un vitrail de notre église coublandie.

La scène représentée ici correspond à l’épisode de l’évan-

gile selon saint Jean, chapitre 20, versets 11 à 18, épisode connu sous le nom de Noli me tangere, au cours duquel le

Christ ressuscité apparaît à Marie-Madeleine qui le prend

pour un jardinier.

Cependant Marie se tenait dehors près du sépulcre, et pleu-rait […] : « Ils ont enlevé mon Seigneur, et je ne sais où ils l'ont mis. » En disant cela, elle se retourna, et elle vit Jésus

debout ; mais elle ne savait pas que c'était Jésus. Jésus lui dit : « Femme, pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu? » Elle, pensant que c'était le jardinier, lui dit: « Seigneur, si

c'est toi qui l'as emporté, dis-moi où tu l'as mis, et je le

prendrai. »

Jésus lui dit: « Marie ! »

Elle se retourna, et lui dit en hébreu : « Rabbouni! » c'est-à

-dire, Maître !

« Noli me tangere » : ce sont les mots que Jésus lui adresse alors quand, parce qu'elle n’en croit pas ses yeux, elle veut aussitôt le toucher pour s’assurer qu’il est bien en vie. Jésus

le lui interdit fermement par cette parole qui donne mainte-

nant son nom à l'épisode lui-même.

Jésus lui dit: « Ne me touche pas ; car je ne suis pas encore monté vers mon Père. Mais va trouver mes frères, et dis-leur que je monte vers mon Père et votre Père, vers mon

Dieu et votre Dieu. »

Marie de Magdala alla annoncer aux disciples qu'elle avait

vu le Seigneur, et qu'il lui avait dit ces choses.

Le sens de l'épisode

Nous comprenons ainsi qu'il s'agit par là, à travers cette scène du Noli me tangere, d'évoquer la résurrection du

Christ.

Certes, sans doute moins souvent traitée en peinture que l’Annonciation ou la Crucifixion elle-même, la Résurrec-

tion trouve une grande place dans l’histoire de l’art. La scène entre Jésus et Marie-Madeleine fait partie des motifs

de la résurrection et possède le statut de « grand épisode canonique » en correspondant à un dogme de la religion ca-

tholique.

C'est d'ailleurs par l'Église Romaine que l'étiquette de trois mots latins, Noli me tangere, a été donnée à cette scène. Jé-

sus parlait araméen, son évangile a ensuite été écrit en grec avant que saint Jérôme ne le mette en latin. Nous connais-sons le dicton « traduction : trahison ». Pour la formule la-

tine « Noli me tangere », il existe ainsi différentes interpré-tations nuancées ; la plus courante, « Ne me touche pas », a longtemps été interprétée comme un refus du Christ d'être

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touché par une femme afin de rester pur. Il exprimerait

ainsi un tabou que l'on peut retrouver dans la religion ca-tholique, lié à la sexualité. Mais, nous le verrons, cela peut aussi se traduire comme « Ne me retiens pas », « Tu

dois accepter la séparation » ou encore « Ne me touche

pas comme ça »...

Qui était Marie Madeleine ?

L'identité de sainte Marie-Madeleine, représentée sur ce vitrail, est assez difficile à établir, en raison de diverses

homonymies et légendes successives : les traditions su-perposent souvent les attributs de la sœur de Marthe et de

Lazare, elle aussi nommée Marie, ceux de la pécheresse anonyme pardonnée par Jésus chez le pharisien Simon et ceux de Marie de Magdala (= Madeleine) « dont étaient

sortis sept démons » (Luc, 8, 2)... Ces associations ont contribué à accentuer l'idée de l'interdit du toucher. Il fal-lait montrer que Marie-Madeleine était une femme

« impure ». Cela s'est surtout transmis dans le dogme ca-tholique. Rappelons que chez les chrétiens orthodoxes,

sainte Marie-Madeleine est demeurée l'apôtre des apôtres, soit celle qui est le premier témoin de la résur-

rection du Christ.

Revenons maintenant à l'illustration qu'en donne notre

vitrail.

Paysage et personnages

Le lieu, le Golgotha de saint Jean, n'est pas si aisé à re-connaître. Certes nous pouvons bien voir qu'il s'agit

d'une colline, des arbres, sans doute des oliviers, s'y élè-vent et le sol est assez rocheux. Pour nous aider égale-

ment à nous situer, nous avons une croix discrète sur la

gauche, surmontant un caveau ouvert.

Pour ce qui est des personnages maintenant, nous voyons Marie-Madeleine, implorante, à genoux, les deux mains et le regard tendus vers le Christ. Ce dernier garde son

corps comme à distance, tirant même un pan de sa tu-nique comme en signe de protection. Les habits du Christ restent assez fidèles à la tradition : il a d'abord un chiton

(= une tunique) blanc, symbole de pureté, évocation du linceul. Il porte par-dessus un drapé rouge qui lui donne

une dimension seigneuriale. De sa main droite, il indique la direction du ciel, rappelant par là sa dimension divine. Placé un peu en arrière, il donne l'impression d'être plus

haut que Marie, comme si l'ascension avait déjà com-mencé. En revanche, son visage penché, ses yeux mi-clos expriment sa compassion pour cette femme et plus large-

ment pour la condition humaine.

Ce qui se joue dans cette scène, c'est bien le rapport entre

terre et ciel, humanité et divinité.

En observant de près le vitrail, nous distinguons les stig-

mates sur les mains et les pieds du Christ rappelant évi-demment sa mort, de la passion à la crucifixion. Mais son calme, sa sérénité, sa douceur montrent bien comme

il est au-delà de ça : il a vaincu la mort.

Si le Christ n'est plus un homme, il n'est pas encore un

Dieu. Mais le Christ est également en train d'entamer sa « tournée d'adieux » avant sa montée définitive au ciel

(l'ascension) ; d'où le choix souvent retenu, parmi les

nuances de traduction de la formule « Noli me tangere »,

de « Ne me retiens pas » comme si le Christ signifiait à Marie-Madeleine : Tu dois accepter la séparation. Il jus-tifierait ainsi la situation dans laquelle il se trouve, et qui

est un des sens de la fête de Pâques : le passage.

Ainsi, toucher le Christ en tant que tel ne serait pas un

tabou. Le refus serait simplement adressé à Marie-Madeleine pour rappeler la nouvelle nature de Jésus : un

gisant, revenu parmi les vivants, en train de « passer ».

Cette théorie fonctionne si l'on observe d'autres épisodes

de la vie de Jésus où il accepte d'être touché par des

femmes..

La première, atteinte d'une maladie qui lui fait perdre du sang, vient toucher ses vêtements au milieu de la foule ; elle guérit aussitôt. « Qui m’a touché ? » demande alors

Jésus avant de rendre hommage à la foi de cette femme

(Marc 5, 25 à 34).

La deuxième, sœur de Lazare (lui-même ressuscité par Jésus et sorti du tombeau), répand un parfum coûteux sur les cheveux et les pieds de Jésus. Judas déplorant le gas-

pillage, Jésus lui répondit: « Laisse-la garder ce parfum pour le jour de ma sépulture. » (Jean 12, 7). Le toucher

rappelle ici la dimension tangible du Christ.

Toucher au mystère...

Si nous reprenons la démonstration pour ce qui se joue

dans la scène du vitrail, le refus d'être touché pourrait porter sur une quasi impossibilité physique ou matérielle puisqu'il est mort. Pourtant, cela ne tient plus lorsque

quelques jours plus tard, il dira à Thomas Didyme incré-dule : « Avance ici ton doigt, et regarde mes mains ;

avance aussi ta main, et mets-la dans mon côté. » (Jean

20, 27).

Ces deux épisodes, de l'interdiction du toucher à Marie-Madeleine à l'ordre de toucher à Thomas, reposent sur la question du témoignage à venir. Certes l'évangile ne dit

pas si Thomas a effectivement touché le Christ ou non, mais les représentations iconographiques de la scène le montrent très souvent le doigt touchant la plaie de Jésus.

Dans l'imaginaire populaire, il peut ainsi fréquemment passer pour le dernier à pouvoir témoigner de la réalité

tangible du Christ. Marie-Madeleine est quant à elle la première à pouvoir témoigner que le Christ est vivant par

-delà la mort, ce que les Chrétiens célèbrent à Pâques.

D'autre part, il a suffi à Marie-Madeleine d'entendre la voix de Jésus lui disant « Marie » pour le reconnaître.

Nous pouvons proposer alors comme traduction : « Tu n'as pas besoin de me toucher », contrairement à saint Thomas, la foi de Marie-Madeleine étant assez forte pour

croire en la résurrection du Christ sans y mettre les

mains.

Nous l'avons dit, la scène a été représentée par de nom-breux peintres. Citons parmi eux les plus célèbres : Rem-

brandt, Dürer, Titien.

Certains ont choisi d'attribuer une pelle au Christ pour illustrer la méprise de Marie-Madeleine qui prend

d'abord Jésus pour un jardinier. Nous pouvons dire que le

vitrail coublandi est resté sobre en la matière.

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Là où notre vi-

trail diffère beaucoup des tableaux, c'est

dans la proximi-té physique de

Marie-Madeleine avec le Christ : c'est

sans doute une contrainte liée à la faible largeur

caractéristique du vitrail. Cela

permet en tout cas aux mains, même si la perspective nous dit qu'il n'y a pas contact, d'être représentées sur le corps du Christ. Or

ceci n'arrive jamais dans les peintures, où les corps res-tent à distance, le Christ effectuant même parfois un mouvement de recul. Ici nous pouvons noter que Jésus

demeure assez stoïque, comme s'il était sûr que Marie-

Madeleine ne pourrait l'atteindre.

Par ailleurs, il est difficile de savoir si l'artiste qui a réali-sé ce vitrail n'a pas voulu transgresser en quelque sorte l'idée première du tabou du toucher. Ce serait sans doute

pousser trop loin l'interprétation que d'y voir là un privi-lège accordé à la sainte Patronne de notre village, fêtée,

rappelons-le, le 22 juillet...

D'autres « Noli me tangere »

Et puis comme pour montrer la célébrité de cette for-mule, l'expression « Noli me tangere » se retrouve dans

plusieurs domaines :

Tout d'abord chez les compagnons des temps anciens qui

pouvaient voyager de chantier en chantier en toute liber-

té. Si l'on cherchait à les arrêter, ils opposaient la formule

« Noli me tangere », rappelant par là qu'en qualité de bâ-tisseurs de châteaux ou de cathédrales, ils étaient intou-chables. Cela leur était garanti par des protections ecclé-

siastiques ou seigneuriales.

Dans le Code Civil, la formule est l'affirmation du carac-

tère sacré et de l'inviolabilité du corps humain.

Les sciences naturelles se sont également inspirées de la

formule :

Impatiens noli-tangere (la balsamine des bois) désigne

une fleur qui, lorsqu'on touche sa tige à l'époque de la

maturité, réagit en projetant des graines autour d'elles.

Epidares nolimetangere est un phasme (insecte ressem-blant à une brindille) qui porte ce nom car il entre en ca-

talepsie à la moindre menace d'un prédateur.

En médecine, la formule désigne un ulcère qui ne cica-

trise pas et qu'il ne faut donc pas toucher si l'on veut es-

pérer une amélioration.

Mais terminons en revenant à l'église de Coublanc ; nous

avons déjà répété que Marie-Madeleine en était la sainte Patronne. Nous trouvons alors une autre représentation de cette femme, sous forme de statue. Debout, elle y em-

brasse la croix, ses longs cheveux ondulés étant détachés (contrairement au vitrail où ils sont attachés). Ce jeu sur les cheveux n'est pas anodin : attachés, donc apprêtés

pour séduire, ils évoquent la pécheresse, voire la prosti-tuée ; dénoués, ils évoquent la pénitence de celle qui s'est

convertie, en restant fidèle au Christ.

Ainsi Marie-Madeleine est toutes les femmes en une : de

la fautive Ève à Marie l'immaculée.

Régis Déal (Vitry-sur-Seine)

Corrigenda Malgré nos relectures, nous avons laissé quelques fautes dans la première édition de la revue de 2013.

Page 8. Félix Martin est né à Saint-Igny-de-Roche et non à Coublanc.

Page 12. Erreur dans la légende de la photo d’en bas à droite : il faut lire « Martin », et non « Perrin » !

Page 21. Dans l’encadré, le nom de l’auteur du texte a sau-té : il s’agissait de l’abbé Pierre.

L’erreur la plus grave : la grille des mots croisés n’avait pas les bonnes définitions ; celles de 2012 étaient restées en place. Pour les lecteurs qui n’auraient pas reçu le rectificatif, les voici ci-dessous.

Nous prions les lecteurs de nous pardonner ces négli-gences.

Horizontalement : A. Revue passionnante, écrite par des passionnés (en 4 mots). B. Grands hommes. Réunion an-nuelle obligatoire des associations. C. Acronyme exprimant l’amusement, très employé sur Internet. Entoura. D. Désigne un film projeté dans sa langue d’origine. Gouver-nai. E. Variété de langoustines frites. Cran en vrac. F. Fruit des céréales. La 2013e après Jésus-Christ commence bien-

tôt. G. Diminutif du duplicateur à alcool. Pas bien. H. L’automne est sa saison de prédilection dans les sous-bois. Distance. I. Appuya. Nom d’un célèbre club de basket. J. Le nouveau donne lieu à des festivités. Article. Demi-dieu. K. Qu’elles soient patronales, des classes ou de l’Assomption, elles sont nombreuses à Coublanc. Fabriquer à partir de rien.

Verticalement : 1. Elles sont nombreuses et chargées d’his-toire dans le Brionnais, celle de Coublanc date de 1852. Bruit de chute, ou nom d’un chien dans une célèbre blague. 2. Préfixe pouvant précéder -logisme, -phyte, -lithique, ou même -nazi. Classe de l’école primaire. Dernier repas de Jésus. 3. On en trouve 26 à Coublanc, de tous styles et de toutes époques. 4. Dedans. Club de football encouragé par Jacques Villeret dans « le dîner de cons ». Côte française bordant la mer du Nord et la Manche. 5. Avec les taxes. Enrobé de chapelure. En matière de. 6. Molécule extraite de la fève de Calabar, appelée aussi physostigmine, utilisée comme antidote de la belladone et du datura. Champion. 7. Île du littoral atlantique. Fête de fin d’année. 8. Radin. Arbre libanais déraciné. 9. Prénom d’une fameuse institu-trice de Coublanc, qui y a enseigné pendant des années et même des décennies, jusqu’en 2011. 10. Note. Petit fleuve côtier du Nord de la France. Il peut être contemporain, abs-trait ou plastique. 11. Quinze Coublandis exercent ce beau métier, sur une surface moyenne de 33 hectares.

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Des vacances

à Coublanc

entre 1946 et 1949

par Claude Latta

Le « bon air » de Coublanc

Je suis venu en vacances à Coublanc pendant les trois

mois d'été, juillet-août-septembre, en 1946, 1947,

1948 et 1949. Nous habitions alors à Roanne. Nous

arrivions à Coublanc début juillet et nous repartions

fin septembre : l’année scolaire se terminait le 14 juil-

let mais nous l’anticipions et la rentrée des classes

était le 1er octobre. Nous avions, mon frère jumeau

Julien et moi, entre huit et onze ans (nous sommes

nés en 1938). Nous venions avec mes tantes – les

sœurs de mon père – qui s'oc-

cupaient de nous car notre ma-

man était malade. C’est tante

Jeanne qui restait avec nous. Le

reste de la famille devait venir

tous les 8 ou 15 jours. Nous

venions dans la grande maison

qui est en face de l'église et qui

nous était louée par M. et

Mme Montchanin, de la Place.

C’était assez rustique mais cela

avait le charme de la campagne

et de la nouveauté. Nous ve-

nions « prendre le bon air » –

comme on disait à l'époque – à

Coublanc, à la suite d’une

« primo-infection » ; nous

avions, comme on disait, « viré

notre cuti ». Il avait été ques-

tion de nous envoyer en maison

de repos mais nous avions pro-

testé de toute la force de nos

huit ans et une autre solution

avait été trouvée : nous irions à

Coublanc le pays d’origine de

notre grand-mère paternelle,

Françoise Denis (à Coublanc, on l’appelait plutôt

« Francine ») dont le père, Firmin Denis, avait été

boulanger et aubergiste à Coublanc. Cela nous a

d’ailleurs bien réussi et notre santé s’est rétablie.

Retour sur l’an 1940

Les contacts avec Coublanc n’avaient d’ailleurs ja-

mais été rompus. En 1940, au moment de la Débâcle,

ma grand-mère avait eu l’idée de se réfugier à Cou-

blanc (à 30 km de Roanne !) et avait loué, vite fait,

une maison – je ne sais pas laquelle – à la Place. Voi-

là toute la famille partie avec deux voitures vers Cou-

blanc. Dans la première voiture, Grand-mère, tante

Jeanne et moi (2 ans). Tante Hélène conduisait la

deuxième voiture, chargée de valises et paquets de

toutes sortes : la deuxième voiture avait quitté la

route et avait « débaroulé » dans un « ravin », en tout

cas dans un fossé, et il fallut faire demi-tour pour ré-

cupérer la conductrice qui n’avait pas de mal. Une

fois arrivés à Coublanc, les Allemands étaient déjà

là ! Tante Jeanne se souvenait qu’ils passaient à toute

vitesse en faisant déraper leurs side-cars. On s’installa

cependant quelque temps à Coublanc : je pleurais

toutes les nuits, on me faisait prendre des bains de

tilleul pour me calmer. Pendant ce temps, mes grands

-parents maternels couraient en direction de la Cor-

rèze (où ils avaient une maison) avec ma mère et mon

frère.

Pendant ce temps de la Débâcle, mon père, André

Latta, et mon oncle Gaston Fournier – son beau-frère

– étaient des soldats dans la dé-

route. Le premier, âgé en 1940

de 42 ans, avait, à 19 ans, com-

battu à Verdun en 1917. Il se

retrouva en juin 1940 en Haute-

Loire, vers Langogne, où son

régiment avait reflué, quitta son

uniforme pour éviter d’être fait

prisonnier et rentra à Roanne.

Le second, fait prisonnier en

Champagne, vers Châlons-sur-

Marne, s’évada facilement alors

qu’il était encore en France,

passa par Paris où il fut hébergé

par quelqu’un qu’il avait ren-

contré dans le métro et qui, con-

sidérant sa mine, lui avait dit :

« prisonnier évadé ? ». Il le lo-

gea une nuit et lui donna de

l’argent pour prendre le train. Il

rentra chez lui à Roanne. Plus

tard, les gendarmes vinrent les

interroger – ils étaient menacés

d’être considérés comme

« déserteurs ». Il aurait mieux

valu qu’ils se fassent prendre ou

ne s’évadent pas ! Cependant les gendarmes n’insistè-

rent pas, ne firent pas de zèle.

Quelque temps plus tard, après toutes ces péripéties,

tout le monde se retrouva à Roanne…

La maison du bourg

À Coublanc, nous sommes donc venus en vacances

en 1946-1949 : la maison était grande et nous dispo-

Julien et Claude Latta devant la tonnelle

dont on voit l’armature de fer

En ce Temps-là 2013 Page 8

sions de tout le premier étage. On montait par un es-

calier de pierre qui tournait et avait des marches de

calcaire jaune usées. À gauche en arrivant sur le pa-

lier, il y avait une immense salle dallée de briques

rouges, des tomettes non vernissées qui

« marquaient » les chaussures. Elle servait à la fois de

cuisine, de salle de séjour et de chambre. La partie

cuisine était rudimentaire, un lavabo en zinc avec un

réservoir au-dessus, un évier, un réchaud à butane et,

sans doute, une « cuisinière ». Il fallait tout apporter

de Roanne ; quand nous arrivions, la remorque était

pleine. Il y avait un lit à rouleaux au fond, dans lequel

couchait ma grand-mère quand elle venait. De l’autre

côté du palier, à gauche en regardant la maison, une

chambre à deux lits, puis une petite chambre dont la

vue donnait sur la cour de la ferme Druère. Dans la

grande chambre, il y avait deux « chromos » qui me

fascinaient et dont je revois chaque détail : L’Angélus

et

les Glaneuses, d’après Millet. De mon lit, je voyais

l’église : quand j’ai revisité la maison, en 2009 – 60

ans après ! – j’ai revu l’église dans le « cadrage » de

la fenêtre qui était resté dans ma mémoire !

Il y avait aussi un grenier : le soir, nous y mettions la

chatte, Chouquette, qui venait avec nous et qui, d’une

année à l’autre se reconnaissait dans la maison de

Coublanc. Quand l’une des fenêtres du grenier était

ouverte, elle se mettait sur le rebord et observait. Une

fois, en venant à Coublanc, on s’était arrêté à Char-

lieu. Voilà que la chatte s’était évadée de la voiture et

il avait fallu lui courir après dans Charlieu… pour

heureusement la rattraper. Nous avions eu bien peur

de perdre notre minette. Quand nous allions repartir à

Roanne, nous la faisions prisonnière pour être sûrs de

ne pas la laisser et nous enfermions cette pauvre bête

dans un filet à provisions.

Au rez-de-chaussée, il y avait, d’un côté, à droite en

regardant la maison, une grande pièce où

M. Monchanin entreposait ses caisses de limonade et

de sodas (« à la saccharine », nous étions peu de

temps après la guerre). Merveilleuse boisson quand il

nous en donnait une bouteille !

L’épicerie d’Anna Dejoux

Toujours au rez-de-chaussée, de l’autre côté, l’épice-

rie était tenue par Anna Dejoux. C’était un peu un

capharnaüm où, dans un petit espace s’entassaient les

produits d’épicerie et de bazar les plus divers. Mon

frère m’a rappelé qu’on y vendait aussi des pierres à

sel que l’on plaçait dans les champs et que venaient

lécher les vaches, cela leur donnait, disait-on, des

« vitamines ». Comme nous embêtions sans cesse

Anna Dejoux en évoluant de façon désordonnée dans

sa boutique, elle canalisait nos énergies en nous con-

fiant le soin de coller les tickets d’alimentation sur de

grandes feuilles quadrillées imprimées à cet effet et

qu’elle devait retourner comme justificatif. Les

« restrictions » et les tickets d’alimentation ont conti-

nué après la fin de la guerre. Le magasin n’était pas

tout le temps ouvert ; aussi les clients allaient-ils la

chercher chez elle, un peu plus bas dans le chemin

qui rejoint la route. Elle faisait souvent ce va-et-vient.

La pompe ; le bacha et le tonnerre

Devant la maison, il y avait une pompe à main et un

bacha : on y prenait l’eau et les voisins aussi. On nous

avait fait des petits seaux avec des grandes boites de

lait en poudre de cinq litres pour que nous aidions à

monter l’eau. Le soir, toujours exactement à la même

heure, 9 h ou 10 h, M. Comte, un voisin, venait cher-

cher de l’eau et on écoutait le bruit de la pompe ;

nous étions déjà couchés. Il y avait aussi une tonnelle

devant la maison avec un asparagus, dont le nom

m’enchantait, et un sorbier qui donnait des boules

rouges qu’il ne fallait pas manger. L’asparagus existe

toujours : la dernière fois que je suis allé à Coublanc,

j’en ai cueilli un brin ; mais la tonnelle a disparu. Je

me souviens aussi d’orages très forts. Grand-mère

nous avait appris à compter la distance entre l’éclair

et le coup de tonnerre : tant de secondes, c’est à tant

de kilomètres que la foudre est tombée. D’ailleurs, un

jour que nous revenions de la Place vers le bourg par

le chemin de la Ramborgne et que l’orage avait écla-

té, la foudre est tombée juste devant nous sur un arbre

qui a pris feu. Nous n’en menions pas large.

Parfois nous étions malades – sans doute un gros

rhume ou la grippe – ce qui suscitait une inquiétude

excessive parce nous avions eu cette « primo-

L’église vue en 2009 depuis la fenêtre de la chambre

où je couchais.. Soixante ans avant !

En ce Temps-là 2013 Page 9

infection » dont j’ai parlé. Les remèdes étaient clas-

siques : lit, cataplasmes de farine de lin, diète et

bouillon de poireaux ! Je me souviens d’avoir eu une

forte fièvre, j’avais des hallucinations, je voyais des

monstres sur le mur de la chambre. Mon souvenir en

reste très vif. La pièce me semblait tanguer. Le soir,

avant de se coucher, on nous faisait avaler une gousse

d’ail, remède bon, paraît-il, pour tuer les vers. Mais,

le lendemain matin, l’haleine devait être forte ! Les

remèdes traditionnels étaient parfois inattendus : ma

grand-mère racontait que, jeune, vers l’âge de quinze

ans – en 1885 – « elle avait manqué de fer » (un peu

d’anémie sans doute) : tous les dimanches matin, elle

avalait un verre d’eau dans lequel avaient trempé des

vieux clous rouillés !

L’église

L’église était en face de chez nous : une immense

église construite au XIXe siècle (1851-1852), en style

néogothique. Les vitraux me semblaient très beaux :

je me souvenais du vitrail de saint Hubert, avec le

cerf qui a une croix au-dessus de la tête : j’ai vérifié,

il est toujours là et mon souvenir était bon ; le curé

était un vieux prêtre qui avait l’air fatigué et était peu

causant. J’ai appris depuis qu’il s’appelait Joseph

Gras (il est mort en 1963). En fin d’après-midi, il sor-

tait du presbytère – situé près de l’emplacement ac-

tuel du monument aux morts – traversait la place et

allait prier dans l’église. Nous allions à la messe. Au

moment où on dit les intentions de prières, le curé

lisait un interminable nécrologe et, à la demande de

ma grand-mère, nous faisions attention à ce qu’il dise

bien « famille Denis » (mes ancêtres coublandis) dans

la liste des familles inscrites pour les intentions de

prières (« prions pour… »). Il y avait aussi les vêpres

mais je ne pense pas que nous y allions toutes les fois.

Lorsqu’il y avait un mariage ou un baptême, on lan-

çait aux gamins du village des dragées et des sous

(des pièces percées d’un trou, pièces de 5 c, 10 c et

20 c et des pièces blanches de 1 F qui avaient encore

le portait du maréchal Pétain et la francisque de l'État

français. Mais les garçons du village avaient plus

d’entraînement que nous et on ne ramassait pas grand

chose. À la messe, Anna Dejoux tenait l’harmonium

et elle et sa sœur Clotilde chantaient avec foi et en-

train.

Nous avions des amis. Mes tantes s’étaient liées avec

les demoiselles Dejoux, M. et Mme Monchanin, M. et

Mme Francisque Buchet et Joannès Demont.

Nous jouions avec Alice Monchanin, notre amie

d’enfance, que j’ai revue à plusieurs reprises : en

1996, Danièle, mon épouse, et moi nous avions mené

Tante Hélène (elle avait alors 91 ans, et qui est morte

en 2004 à 99 ans) pour lui faire revoir Coublanc. Je

me suis arrêté chez Alice en disant « Qui suis-je ? »

et, bien que nous ne nous soyons pas vus depuis

25 ans, elle m’a dit : « Dody » (mon surnom d’en-

fant). Nous étions tous – Danièle, Tante Hélène et

moi – rentrés chez elle qui nous a reçus dans la vieille

maison (elle traversait la route plusieurs fois par jour

entre sa maison neuve et la vieille maison où avait

habité sa mère et où se trouvait la fabrique de limo-

nade. Nous avons parlé de nos enfants. J’ai, depuis,

appris avec tristesse la mort d’Alice en 2006. Sur une

photo, prise dans la cour des demoiselles Dejoux,

nous sommes déguisés, elle, mon frère et moi.

Les demoiselles Dejoux

Les demoiselles Dejoux

étaient nos voisines et amies,

très pieuses et très enjouées –

« marrantes », disait-on. Anna

tenait l’épicerie et Clotilde

faisait les piqûres, courait la

campagne en vélo pour aller

les faire – bénévolement – et

en avait même fait au « père

curé » qui, elle en faisait un

récit inimitable, ne voulait pas

lui faire voir ses fesses ! Elles

avaient deux métiers à tisser

qui occupaient une partie du

Devant l’église, le monument aux morts,

qui était alors au milieu de la place

Alice Monchanin

En 1947 ou 1948

En ce Temps-là 2013 Page 10

rez-de-chaussée de leur maison et qui leur permet-

taient de compléter les revenus de l’épicerie. Anna

tenait l’harmonium pendant les offices religieux et en

avait aussi un chez elle, pour « s’entraîner ».

Les métiers à tisser battaient un peu partout. Nous

adorions voir taper la navette. Le « soyeux » de Char-

lieu passait de temps en temps chercher les rouleaux

de rayonne et de fibranne. Il y avait des usines, sur-

tout celle de Cadolon mais c’était loin du bourg et

nous n’y allions pas souvent. Il y avait plus d’habi-

tants à Cadolon

que dans le bourg.

Dans le bourg, il

y avait l’usine

Perrin ; on disait

qu’elle fabriquait

de la toile pour les

parachutes (c’était

l’époque de la

guerre d’Indo-

chine).

Anna et Clotilde

étaient très

pieuses, mais ma-

licieuses et mo-

queuses. Elles

habitaient dans

une petite maison

à la façade étroite,

maison bien co-

quette et bien te-

nue qui donnait

de deux côtés :

sur la route et sur

le chemin en

terre, à l'époque,

qui va de l’église

à la poste aujourd'hui devenue maison particulière

(celle de Jeannine Lacôte). Du côté de la route, il y

avait une toute petite cour allongée, close par une

haie de troènes taillée au cordeau. Près de la route, il

y avait aussi des cabanes à lapins et une cabane pour

les poules qui allaient en liberté dans le bourg. Clo-

tilde allait le long de la route pour ramasser de l’herbe

pour ses lapins et des orties – qu’elle prenait à pleines

mains – pour la bouillie donnée aux poules. Quand

Clotilde (sa sœur l’appelait Néné) avait bu un petit

coup, elle chantait volontiers et trinquait en disant :

« À la prospérité de votre commerce ! » Le matin,

elle faisait un petit casse-croûte avec des gratons et a

vécu jusqu’à plus de cent ans. À la fin de sa vie, elle

perdait un peu la tête et, une fois que nous étions allés

la voir, elle m’avait appelé Antonin, du nom de l’un

des mes oncles qu’elle avait connu enfant et qui est

mort à 28 ans en 1924. Elle s’était trompée de généra-

tion mais pas de famille ! C’est la première fois que

je me suis vraiment rendu compte que l’on pouvait

perdre la mémoire.

Les « demoiselles » avaient un frère curé qui venait

en voiture les voir de temps en temps. Elles étaient

pour lui aux petits soins et l’entouraient avec respect.

Lui arrivait en voiture depuis sa paroisse du Charo-

lais, était assez discret et se laissait servir comme un

pacha. Il avait sa chambre réservée dans leur petite

maison. Elles avaient eu aussi une sœur morte de la

grippe espagnole. Celle-ci avait fait beaucoup de

morts à Coublanc.

Les soirs d’été tante Jeanne et les « demoiselles » se

réunissaient. On chantait : « Kénavo »,

« Ramuntcho » et d’autres chansons. Anna accompa-

gnait ces chansons profanes à l’harmonium… Quand,

il faisait mauvais, on jouait aux petits chevaux ou aux

dames. On regardait des photos anciennes. Tante

Jeanne faisait voir les photos de l’époque où, à

18 ans, elle était infirmière auxiliaire avec de jeunes

Américaines venues à Roanne soigner les blessés et

avec lesquelles elle était restée en relation. Clotilde

disait : « Ah, on va regarder les Américaines ! »

M. et Mme Buchet

M. et Mme Buchet habitaient dans l’école publique

qui était à côté de la cure. M. Francisque Buchet

avait, en montant vers la mairie à droite, un atelier où

il avait au moins six métiers qui faisaient un bruit

d’enfer. Sa femme, Germaine, née Boutculet, était

institutrice publique et nous jouions aussi avec leur

fils, Michel Buchet qui était un peu plus âgé que

nous. Fils unique, il était content de trouver des co-

pains et nous aussi. Il venait chez nous quand il était

interne au lycée de Roanne (nous étions ses corres-

pondants, nécessaires pour que les internes puissent

sortir). Nous l’avons malheureusement perdu de vue

depuis longtemps. Les Buchet avaient une maison à

l’Orme, dans l’angle aigu entre les deux routes venant

du Bourg et du Pont des Rigolles, où ils se sont en-

suite retirés.

Hélène, Claude et Alice en 1996

Devant la fabrique de limonade

Dans la cour de la maison Dejoux,

Alice déguisée avec les vêtements

de Julien,

Claude avec ceux de sa grand-

mère, Julien avec ceux d’Alice...

En ce Temps-là 2013 Page 11

Nous avions fait mieux se comprendre les Buchet

(Mme Buchet, institutrice laïque) et les demoiselles

Dejoux (qui n’en avaient que pour l’école libre). Les

demoiselles avaient été impressionnées parce que,

mon frère et moi, nous avions fait notre première

communion, à laquelle elles étaient invitées, dans la

chapelle du lycée (public) de Roanne : il avait une

chapelle parce qu’il avait été un collège de Jésuites.

Ce signe de tolérance et d’ouverture du lycée – qui

avait un aumônier – fit merveille.

Comme voisins, nous avions aussi, de l’autre côté de

la ruelle, les Berthillot, qui exploitaient une ferme –

la « ferme André » - qui appartenait à la commune –

et qui est aujourd’hui démolie et transformée en par-

king. Il y avait une fille de notre âge – je ne me sou-

viens pas de son prénom – mais nous n’osions pas

bien lui parler. Le « père Berthillot » prêtait son che-

val pour tirer le corbillard.

Les Monchanin

Nous allions souvent à la Place, où habitaient les

Monchanin. Chez Monchanin, la vieille maison un

peu sombre sentait l’encaustique. Chose extraordi-

naire, il y avait le téléphone, un téléphone ancien à

manivelle : on appelait d’abord la poste et on deman-

dait un numéro. La fabrique de limonade (« La Ré-

gionale ») a fonctionné jusqu’en 2006 ! Elle était de

l’autre côté de la cour. Il y avait la grand-mère La-

croix, sa fille Léa et le mari de celle-ci, Antonin Mon-

chanin. Il avait été très marqué par la mort de son fils

aîné qui s’était noyé accidentellement en se baignant

dans la Loire le jour même où, le matin, il avait passé

le brevet.

Àsuivre

Claude Latta (Montbrison)

On s’en souviendra

Un hiver 2012/2013 qui n’en finit pas Sans qu’il ait fait bien froid, la France entière a eu l’impression de n’en jamais finir avec un hiver qui a grignoté le printemps… La végétation a eu presque un mois de retard, mois qui s’est répercuté jusqu’à

l’automne.

La Grotte de Lourdes rajeunie Depuis quelques années, l’AAGLC s’inquiétait des risques de chute d’arbres en cas de tornade : cela aurait pu causer des dégâts à la maçonnerie de la Grotte, mais, bien pire, à des visiteurs ou des pèle-

rins.

Le lundi 21 octobre, la mairie a fait procéder à l’abat-tage de deux feuillus dans le parc de la grotte, et des six conifères au-dessus de la grotte elle-même. Le travail a été exécuté par l’entreprise de Dominique Lamure aidé des bénévoles de l’AAGLC. L’associa-tion a ensuite débarrassé le bois tombé, les grands troncs ayant été débités par la scierie de Cadollon, au profit final du CCAS de Coublanc. Le résultat est bien sûr un changement de physiono-mie des lieux, qui ressemblent plus désormais à ce qu’ils étaient en 1936. La seule crainte des béné-voles : un soleil trop vif le 15 août prochain...

L’association compte replanter au début de 2014.

Travaux communaux L’enfouissement des réseaux électriques et télépho-niques a été terminé à la Croix-du-Lièvre. La façade nord de la mairie a été recrépie. Le parking de l’école privée a été goudronné à neuf. L’entrée de la Salle pour Tous a été joliment redessi-

née pour les personnes à mobilité réduite.

Novembre blanc

Le 19, une neige lourde comme celle de novembre 1982 s’est appesantie sur la Loire et une partie du Rhône et de la Saône-&-Loire. À Coublanc, il en est tombé près de 35 cm. Beaucoup d’arbres ont été ébranchés, et certains renversés ; beaucoup de

lignes de téléphone ou d’électricité ont été arrachées.

Plus jamais « Chez Mimi » ! Le 6 décembre, après 18 ans de bons et loyaux ser-vices au dépôt de pain, à l’épicerie et au café du Bourg, Michèle Bernillon a fêté sa retraite, avec nombre d’amis, dans le Hall des loisirs, Elle avait su mettre de la gaîté dans Coublanc, et comme l’a fait remarquer M. le Maire, elle jouait un peu le rôle d’un

psychologue, par son écoute attentive des clients.

Le Bulletin de Coublanc 2014 Le Bulletin de Coublanc, sous la direction de David Buzet-Bague, présente notre revue : rendons-lui la pareille, pour continuer à vivre en bonne entente. Cette année, en particulier, deux pages préparées par Pierre Degut présentent des actes de la mairie en 1914. On peut voir les soucis que la mobilisation et les premiers mois de guerre causaient au Conseil munici-pal.

En ce Temps-là 2013 Page 12

Souvenirs d'enfance et

de service militaire au

Maroc

de Maurice Bertillot

Je suis né le 30 janvier 1936 à Charlieu.

Mon père, Marcel, et son épouse, Alice Gelin, habi-

taient le hameau appelé soit La Forest, soit Fillon, à

Écoche. Cela a dépendu de l'existence puis de la dis-

parition d'un chemin entre ces deux hameaux.

Des parents tisseurs à bras

Mon père était tisseur à bras à domicile : il a fait

fonctionner son unique métier jusqu'en 1966, sans

jamais recourir à l’électricité. Ma mère, après nous

avoir éduqués, a eu elle aussi un métier à bras. Tous

deux produisaient de la soie naturelle de qualité, ce

qui demandait un grand savoir-faire.

De plus, nous avions un potager et une vache.

Nous étions trois enfants, Clémence (née en 1930),

moi (1936) et Denise (1940).

Je suis allé à l'école à Écoche. Il y avait une école

tenue par des religieuses, réservée aux filles, dans le

quartier du Couvent ; mais j'ai été élève successive-

ment dans les deux écoles publiques. Les petits al-

laient à celle d'en haut, sur le chemin qui monte en

face de l'église, à gauche. À mon époque, c'était ma

tante Céline Bertillot, belle-sœur de mon père, qui

était institutrice. Puis je suis allé à la grande école,

tenue par un maître, qui occupait la maison de l'ac-

tuelle mairie. J'ai passé à 14 ans mon certificat

d'études, à Belmont.

Les étés de mes 13 et de mes 14 ans, j'ai été embau-

ché comme aide par un voisin cultivateur, Léon Ver-

chère.

À la fin de ces deuxièmes « vacances », et de cet été

qui a suivi ma réussite au certificat, mon père voulait

que je me mette au tissage avec lui : il aurait équipé

une cabine avec des métiers électriques. Mais je lui ai

dit que je voulais apprendre un autre métier. J'ai d'abord songé à me faire apprenti-boucher. Un

jour de la fin d'août 1950, je prends le vélo familial,

un vélo de femme, et je descends au Bourg pour en

La plus perfectionnée des machines ne fera pas oublier le tissage à bras

... et cependant cette noble profession tend à disparaître

Marcel Bertillot est un ancien de la Belle Époque : il est né à Écoche en 1900 […] À 14 ans, au domicile paternel, le petit Marcel faisait déjà fonctionner son premier métier […] Depuis, du même geste à la fois souple et rythmé, M. Bertillot n'a jamais cessé de tisser. Au ha-meau Fillon, où il habite maintenant, M. Bertillot se considère comme le premier « moteur » de son usine ; son épouse le second. Ces moteurs ont travaillé pour le bien des industries charlien-dines. À la maison Maillet, par exemple, qui grou-pa jusqu'à 400 tisseurs à bras ! M. Guilhaud, industriel charliendin, nous précisa à ce sujet qu'il devait bien y avoir vers 1920 près de 1 500 de ces artisans dans la seule localité de Coublanc. Maintenant, pour toute la région, il n'en reste plus qu'un à Écoche et deux à Villers.

Des travaux incomparables

Les travaux de ces ouvriers de la soierie et du textile sont cependant incomparables. M. Bertillot a travaillé longtemps pour les établis-sements Tassinari, de Lyon. Il aurait la possibilité de faire figurer quelques autres références sur sa carte de visite, et pas des moindres. Fournisseur du roi Carol de Roumanie, en 1937 ; plus près, en 1959, il a tissé des étoffes com-mandées pour la restauration du château de Ver-sailles. […]

Le moteur s’arrête sur commande...

« C'est très simple, continue M. Bertillot, s'il n'y a pas de défaut, c'est que, au moindre ennui, le « moteur » s'arrête tout seul. » Le réflexe de l'homme est encore le plus rapide et le plus infail-lible des rhéostats ! » Nous faisant alors une brève démonstration du mouvement dit de « taffetas », notre tisseur s'ins-talle aux commandes de son métier. Et... en avant ! Par une sèche pression du pied sur une sorte de pédale, la navette « claque ». D'un mouvement précis, le bras du tisseur ra-mène le « battant » qui arrive avec précision le fil sur la trame. Tout ceci a l'air très simple. Ces gestes sont d'un perpétuel recommencement, une fois à droite, une fois à gauche, la navette voyage. [...]

Claude Guilbert, dans un journal local de 1960

En ce Temps-là 2013 Page 13

parler avec le boucher d'Écoche, qui occupait la partie

droite de la maison du café Chassignol, au coin de la

place de l'église et de la route de Belmont. Je lui de-

mande s'il cherchait un apprenti. « Non, me dit-il. Il

vaudrait mieux que tu trouves une plus grande bou-

cherie... »

Je sors, je reprends mon vélo, et je continue jusqu'au

pont des Rigolles, au garage Barriquand.

Mécanicien chez Ferdinand Barriquand

Je demande à Ferdinand s'il veut bien me prendre

comme apprenti. À ce moment-là, il n'avait pas d'ou-

vrier. Il venait d'accepter un autre apprenti, trois mois

plus tôt, c'était Maurice Verchère, de Saint-Igny-de-

Roche. Ferdinand me répond oui, mais dit qu'il faut en

parler avec mon père.

Le lendemain ou tout comme, mon père et moi des-

cendons à pied au Pont des Rigolles : nous n'avions

qu'un seul vélo ! L'accord se fait, Ferdinand me pré-

pare un contrat.

J'ai donc commencé à travailler en septembre. Ferdi-

nand a déniché dans son grenier un vieux vélo pour

me permettre de venir d'Écoche. Il avait appartenu à

Jean Plassard d'Écoche : sa plaque l'indiquait. Pour les

repas de midi, mon père a pris contact avec des con-

naissance du voisinage, M. et Mme Damas, qui

n'avaient pas d’enfants. Ils étaient tisseurs sur métiers

mécaniques. Ils habitaient, au Foron, à gauche en al-

lant vers le Pont des Rigolles, la maison qui est avant

celle des Déchavanne aujourd'hui. Ils m'ont reçu à leur

table à midi, mais j'apportais mon repas.

J'ai fait ainsi trois ans d'apprentissage, jusqu'à l'âge de

17 ans, puis Ferdinand m'a gardé comme ouvrier jus-

qu'à mon service militaire.

Une anecdote : il y avait quand j'étais ouvrier un ap-

prenti de Chenay-le-Châtel, près de Marcigny. Il

n'était ni doué ni attentif. Il faisait des conneries, et un

jour Ferdinand voulut lui donner une bonne correc-

tion. Il lui courut après, mais c'est lui qui se fit mal au

pied !... On passait le conseil de révision quelque temps avant

ses vingt ans. J'ai été jugé apte pour le service. Mon

ami d'Écoche René Monnet, qui avait trois ans de plus

que moi, avait dû passer trois fois le conseil de révi-

sion, et ce n'est qu'au troisième qu'il avait été jugé

apte. Il était mince et menu, et avait eu peu auparavant

un accident de moto... Il ne réussit donc pas à marcher

sur les traces de son frère Maurice, qui avait réussi à

échapper au service en se privant de nourriture un bon

bout de temps, pour paraître trop fragile pour le régi-

ment et ne pas faire le poids. Il faut dire que Maurice

était soutien de famille, puisque son père était mort

quand il avait douze ans.

René et moi avons reçu ensemble notre convocation,

et nous avons passé

ensemble les huit

jours qui nous sé-

paraient de notre

départ pour l'ar-

mée.

En route pour le

Maroc

Le mardi 3 juillet

1956, René et moi

avons été conduits à la gare de Chauffailles par Mau-

rice Monnet, en voiture. Nous avons pris le train de

Lyon. C'était, à vingt ans, mon premier vrai voyage.

J'étais parfois allé à Pont-Trambouze en car pour

rendre visite à ma marraine. L'armée payait le trajet en

train. Nous nous sommes rendus à la caserne de la

Doua, où nous avons passé trois jours occupés par des

piqûres et des visites médicales. Là, je quittais René :

il était affecté à Montélimar pour ses classes, et parti-

rait ensuite en Algérie, où la situation commençait à

devenir tendue. Quant à moi, tout à fait par hasard,

j'étais affecté au Maroc.

J'ai pris le train de Marseille, puis, nous avons été em-

barqués sur le Koutoubia, un bateau régulier sur cette

ligne de la Compagnie de Navigation Paquet. Il mesu-

rait cent trente mètres de long. J'étais étonné par le

nombre de ca-

mions et de voi-

tures qui pou-

vaient trouver

place sur le pont.

Je n'ai pas telle-

ment profité des

charmes éven-

tuels de mon

premier voyage.

Il y avait en moi

de l'appréhen-

sion : la première fois que l'on monte en bateau, on ne

se sent pas bien sûr. Nous avons fait l'essentiel du

voyage dans les cales, sauf deux heures de sortie sur le

pont chaque jour. J'ai vu des poissons volants et un

requin. Le trajet jusqu'à Casablanca dura trois jours et

deux nuits, avec une escale de deux heures à Tanger.

Je n'ai pas trop eu le mal de mer. Mais ce n'était pas le

Carte postale d’époque, avec l’école à gauche,

et la maison Chassignol au fond

La caserne de la Doua

en carte postale

En ce Temps-là 2013 Page 14

cas de tous. Beaucoup vomissaient. Cela ne sentait pas

bon dans les cales ! Et comme nous étions sur des lits

superposés, il fallait parfois se garer de ce qui était

propulsé d'en haut ; y avait intérêt à se sauver à

temps ! Assis sur mon lit, appuyé sur une caisse, j'ai

écrit un mot à ma famille au dos d'une carte postale

représentant le Koutoubia. La voici.

Nous sommes arrivés le soir à Casablanca. Nous

avons pris un train de nuit pour Fez.

Le lendemain, c'était un samedi, la fête du 14 juillet.

Nous n'avons pas défilé : nous ne savions pas faire,

mais nous avons regardé les autres défiler, et nous

avons déjeuné avec eux au réfectoire : c'était un bon

repas de fête, et on s'est dit que l'armée aurait du bon,

si on mangeait tous les jours aussi bien...

Après le repas, il a fallu aller s'installer dans nos

chambres. Le bâtiment était à huit cent mètres du ré-

fectoire. Nous avons parcouru cette distance à pied,

mais sous un soleil terrible et par une température de

50°, plusieurs ont fait des malaises et ont dû être se-

courus. Pour ma part, j'ai tenu bon, mais le lendemain

j'avais les oreilles et le nez rougis : ça a tout pelé !

Une des choses qui nous a surpris le plus, c'était de

voir la campagne complètement brûlée par le soleil,

sans plus de verdure du tout. Nous avons occupé des dortoirs provisoires, avant

d'être installés dans nos chambrées de vingt-cinq à

trente places.

Nous avons fait à Fez nos quatre mois de classes. L'es-

sentiel se passait à la caserne, dont nous ne sortions

jamais, sauf pour aller à quelque distance au stand de

tir, ou faire quelques patrouilles dans la ville maro-

caine.

Il y avait avec

nous des rappe-

lés : la guerre

d'Algérie en était

la cause. Je ne

connaissais au-

cun de mes ca-

marades. Il y avait eu deux mois avant moi un autre

Écochois, Jeannot Sarnin, le fils du boulanger.

L'hiver était venu. Je n'ai pas souvenir qu'il fît froid,

mais il pleuvait beaucoup.

Nous n'avons pas eu de permission avant Noël. En

fait, à Fez, j'ai passé deux mois de classes en plus, le

« peloton », parce qu'on pensait que je pourrais avoir

un petit grade. Mais cela ne m'intéressait pas.

Au début de l'année 1957, j'ai été muté à Rabat, pour

une quinzaine de jours, en caserne.

Tout par un coup, le soldat Bertillot que je suis est

affecté à Casablanca, au 41e régiment de transmission.

Dix-huit mois à Casablanca

J'y passe d'abord quelques jours d'adaptation. Puis le

capitaine me convoque : Quelle est votre profession ?

– Mécanicien. – Voulez-vous continuer à être mécani-

cien ? – Oui, que je réponds. On m'affecte donc au

service du garage, à l'intérieur de la caserne.

J'étais d'abord au premier échelon des mécaniciens ;

j'étais cantonné aux tâches les plus sommaires : la-

vage, nettoyage, vidange des véhicules. Ces véhicules

étaient des jeeps, soit des Willys américaines, soit des

Delahaye françaises, ainsi que des GMC à six roues

produits par une branche de General Motors, et des

Dodge.

Un jour, mon sergent-chef me demande de changer un

Notice sur le Koutoubia

Le Koutoubia a été construit aux chantiers de La Seyne en 1930. Son mobilier en inox a été réalisé par Jean Prou-vé. Son escalier Art nouveau a été monté à Tou-lon par Pierre Missey, premier compagnon de Jean Prouvé. On y voit l’utilisation unique de l’acier inoxydable poli. Le Koutoubia assura la ligne Casablanca-Marseille de 1933 à 1961 pour la compagnie Pa-quet. Ce paquebot eut une vie mouvementée, entre autres : Lors d'un combat le 29 septembre 1936, au sud de Malaga (Espagne), une unité de la marine nationaliste, le croiseur Canarias, a coulé le des-troyer Almirante Ferrándiz du gouvernement de la République espagnole. Le paquebot Koutoubia (capitaine Lelond), parvenu sur zone, a sauvé une quarantaine de naufragés. Alors réquisitionné comme croiseur auxiliaire, il est prévu pour l'expédition de Norvège en mai 1940. Il transporte, au sein du convoi FP5 […]. Mais c'est finalement pour la France que le con-voi appareille de Greenock. Lors des bombardements allemands du port de Bougie en novembre 1942, le Koutoubia a dû être sabordé pour maîtriser l'incendie dont il était vic-time. Il sera renfloué et perdra une cheminée. Il sera renommé Phocée en 1961, pour servir au sein de la Compagnie française de navigation créée par Paquet pour sa ligne Marseille-Israël afin de contourner le boycott de la ligne arabe contre les compagnies commerçant avec ce pays. Mais deux ans plus tard, il sera désarmé...

En ce Temps-là 2013 Page 15

pneu. « Je n'ai pas le droit de le faire ! – J'ai le droit de

te le faire faire ! » réplique le chef.

La hiérarchie était ainsi faite : deuxième classe ; pre-

mière classe ; maître-ouvrier (c'est ce que j'étais en

arrivant à Casablanca ; caporal ; caporal-chef, grade

que l'on obtenait toujours au bout de vingt-quatre

mois. Un caporal ou un caporal-chef avait une solde

non négligeable : elle a été supprimée au moment où

j'arrivais à ces grades ! C'est le même genre de mal-

chance qui m'a fait faire quelques mois de plus que ce

qui était prévu...

Il y avait un grand

nombre de camions en

stock, qui ne servaient

pas tous ou pas souvent,

mais il fallait que je les

passe en revue et qu'ils

soient tous nickel.

J'ai participé à quelques

manœuvres. On faisait

quelques patrouilles en

ville, mais vu mes occupations de mécanicien, j'y par-

ticipais peu.

C'est dans cette caserne de Casablanca que j'ai passé

l'essentiel de mon service, tandis que bon nombre de

camarades de mon contingent ont été redirigés en Al-

gérie. Ceux qui restaient à Casablanca et qui n'avaient

pas la chance de faire une activité intéressante, comme

moi, passaient leur temps à être chauffeurs, à faire

quelques marches et à balayer la cour de la caserne...

La caserne était sur la frange de la ville.

En fait, il y avait dans le coin tout un ensemble de bâ-

timents militaires, avec divers corps, des Spahis, des

Tirailleurs sénégalais, qui étaient les vrais rois et qui

avaient droit à un bordel militaire.

Mon 41e régiment des Transmissions avait la charge

de postes de radio HF qui faisaient une chaîne, répar-

tis régulièrement sur une ligne qui allait de Casablan-

ca à Fez en passant par Rabat, El Kansera et Meknès

et qui étaient installés sur les sommets à une cinquan-

taine ou une centaine de kilomètres de ces villes. Ces

sommets du Moyen-Atlas peuvent atteindre deux

mille mètres. Deux ou trois fois par an, nous partions

à trois dans une jeep Willys, le chauffeur Besnard

(mon ami), le sergent-chef Belnet et moi derrière, avec

la caisse à outils qui sautait à chaque irrégularité de la

piste. Un jour, nous avions pris un peu de retard. Le

chef dit au chauffeur d’accélérer, ce qui fait qu'il est

sorti de la piste, que son casque lui est tombé sur les

yeux, et que le sergent a dû le remettre en place. Le

but de ces tournées était d'aller vérifier le groupe élec-

trogène de chaque station, et de réviser et vidanger les

camions affectés à ces stations : c'était ma tâche. À la caserne, tous les jours, à midi, il y avait le

« rapport », au cours duquel le courrier était distribué

et les directives étaient données. Souvent, mon chef

m'exemptait d'y aller : « Si tu as quelque chose à faire,

tu ne vas pas au rapport. »

La discipline fait la force principale des armées

Mais d'autres soldats s’exemptaient d'eux-mêmes, si

bien qu'un jour, pendant que je travaillais, un cama-

rade vient me prévenir : « Le chef Lespart te de-

mande ! » Ce sergent était une « tête de con ».

Quelques jours auparavant, pour lui faire plaisir,

j'avais réparé non sans difficultés la voiture de sa pe-

tite amie, une Fiat. Je pensais qu'il allait me laisser

tranquille. Au rapport, il nous punit d'une demi-heure

de marche autour de la cour, en plein soleil (50°!). Je

renâcle, mais mes camarades me disent de rester dans

le rang. Au bout d'un moment, je finis par quitter les

rangs avec mon fusil, et d'aller demander au chef

quand il arrêtera cette idiotie. Il m’emmène devant son

supérieur, le capitaine Raguenet, sec, mais pas si bête

que lui ; il avait une

traction. Il s'adresse

d’abord au sergent :

« Vous pouvez dispo-

ser ! ». Puis il me ré-

primande un peu,

mais pas plus que ça :

« Ne recommencez

pas ! ».

Il faut dire que j'entretenais pas mal de véhicules pri-

vés des petits gradés... J'avais une position un peu pri-

vilégiée.

Ainsi, une autre fois, je devais changer la coque sur

une traction accidentée, celle de l’adjudant-chef Na-

varre. Ce gradé ne voulait pas que sa femme le sache

trop... « Bertillot, me dit-il, tu ne vas pas au rapport,

mais tu travailles sur ma traction. » Je démonte sa voi-

ture, mais voici que c'est samedi après-midi. On a une

perm, et je sors de la caserne avec trois ou quatre ca-

marades. On est rentrés un peu en retard, vers

11 heures, et au retour on est accueilli au poste de po-

lice de la caserne. L'un d’entre nous dit au gardien :

« Tu ne vas pas nous emmerder!... ». Le chef dedans

entend cela et réplique : « Qu’est-ce que vous dites ?

Entrez ». Le camarade dit : « On n'a pas fait bien de

mal ». – « Ça vous apprendra ! Au poste ! » Or, ce

soir-là, c'était justement l'adjudant-chef Navarre qui

était de permanence. Il venait contrôler le poste de

police de temps en temps. Il vient. Il voit Bertillot et

ses copains : « Qu'est-ce que vous faites là ? » – « On

En ce Temps-là 2013 Page 16

n'a rien fait de bien spécial... » – « On n'arrête pas ce

qui n'ont pas fait grand' chose ! Les autres, 48h de trou

ou de corvée. Bertillot, toi, demain matin – c'était di-

manche – tu retournes sur ma voiture. » – « Je ne peux

pas faire

le travail

tout

seul. » –

Je vais te

trouver

deux

gars. »

Mais il

n'a pas

choisi

mes co-

pains...

Comme les camarades de mon contingent d'appelés,

j'ai eu droit à une longue permission en juillet 1957 :

trois semaines, avec le transport payé vers la France.

À l'aller, j'ai pris le même Koutoubia qu'en juillet

1956. Il était simplement un peu moins chargé en ca-

mions. J'ai fait en sens inverse le parcours Marseille –

Lyon – Chauffailles – Écoche. Je suis reparti par Ma-

rignane, en avion. C'était un Bréguet deux ponts.

Nous avions de temps en temps une permission pour

sortir en ville l'après-midi. Quand il faisait trop chaud,

on ne sortait pas tout de suite. Si on se mettait en civil,

il fallait être prudent, et ne pas se faire prendre. On

allait un peu dans les souks, ou au marché, où il y

avait quantité de bourricots qui tiraient des charrettes

chargées de légumes. Une fois, un camarade pied-noir,

qui avait des permissions du samedi midi au dimanche

soir, parce qu'il avait sa famille à proximité, nous a

emmenés à la pêche à la grenouille dans un oued.

« C'est dangereux ? » – « Pas plus qu'ailleurs ! » Je

n'ai pas souvenir d'autres activités intéressantes, ni de

diffusion de films, ni de lectures, ni d'aumônerie mili-

taire.

La quille

Mon service dura jusqu'en octobre 1958. Je devais être

libéré en juillet, au bout de 24 mois. Mais il y a eu des

prolongations, à cause de la guerre d'Algérie, et j'ai

fait 27 mois. J'ai revu Jean Sarnin dans ma caserne : il

avait la quille, lui, et pouvait rentrer à Écoche ! Deux

mois plus tard, c'était à nous de rendre notre paque-

tage, mais il a fallu attendre encore quinze jours à ne

rien faire : il n'y avait pas de bateau pour nous rapa-

trier !

C'est encore une fois (la troisième) le Koutoubia qui

nous transporta jusqu'à Marseille. Nous pouvions

monter à tour de rôle sur le pont, ce qui était plus inté-

ressant que de rester dans les cales, où cependant des

gradés nous tenaient au courant des côtes que nous

longions, et notamment du passage du détroit de Gi-

braltar. Nous avons fait escale à Tanger.

Arrivé à Marseille, j'ai pis le premier train possible

pour Lyon, et ensuite j'ai pris une correspondance

pour Roanne : je m'en souviens, parce que j'y ai ren-

contré, tout par un coup « On se connaît, il me

semble ? »), un camarade de la région qui avait été lui

aussi au 41e RI et dans la même caserne de Casablan-

ca que moi, mais dans une chambrée voisine et sans

que je le connaisse : nous avons parlé ensemble.

Je me suis fait quelques camarades au régiment. Le

meilleur de mes amis René Besnard, que je n'ai jamais

perdu de vue, avait suivi le même parcours que moi,

Fez et Casablanca, où il était chauffeur. Après notre

retour, il habitait Iffendic en Ille-et-Vilaine, et nous

sommes allés le voir. J'ai peu à peu perdu le contact

avec les autres camarades.

Bien sûr, le fait d'avoir fait mon service militaire au

Maroc m'a permis de découvrir un pays étranger, mais

surtout le paysage et la chaleur. Quant aux habitants,

on était sur nos gardes, et eux se méfiaient aussi des

soldats français. Et puis, je n'y suis pas retourné plus

tard, et d'ailleurs ma femme et moi n'avons guère

voyagé.

Si je fais le bilan de ces longs mois, je pourrais dire

que l'armée, c'était du temps perdu. Mais pas tout à

fait pour moi, qui ai eu la chance de pouvoir continuer

à faire de la mécanique, même si mon rang ne m'auto-

risait à faire que des tâches trop simples – sauf quand

c'était directement pour réparer les voitures des gra-

dés. Je n'ai donc pas perdu la main, et cette position

privilégiée m'a permis d'éviter bon nombre de corvées

sans intérêt. Mais quand, à la fin, l'adjudant-chef Na-

varre m'a proposé : « Je te fais rentrer dans l'armée »,

je lui ai répondu sans hésiter : « Non, cela ne m'inté-

resse pas. »

Propos recueillis à Cadollon par BB les mardi 5 mars

et jeudi 14 novembre 2013.

Avec un soldat indigène

En ce Temps-là 2013 Page 17

Souvenirs d’enfance de Juliette Buchet

Mon grand-père Chassignolle était sans doute de

Vertpré, et c’est là qu'est né mon père Joseph. Mon

grand-père est devenu locataire au Pont des Rigolles,

dans une maison voisine de celle aujourd’hui des Du-

maitre, celle où Mme Canet a eu ensuite son café.

Puis il a profité d'une mise en vente pour acheter une

maison plus tranquille, sur la route du Pont des Ri-

golles à L'Orme, à droite, entre les deux calvaires :

celle habitée aujourd'hui par mon gendre (Paul

Druère). Son métier était de réparer les moulins. Il

avait épousé Jeanne Buchet. Je n'ai pas connu ces

grands-parents.

Mon père a épousé à je ne sais quelle date [en fait, le

16 septembre 1919] Antoinette Accary, de Maizilly,

qui avait un frère appelé Édouard. La famille d’An-

toinette et d’Edouard habitait sur la nouvelle route qui

montait au bourg de Maizilly, dans une ferme.

Édouard Accary a repris la ferme après ses parents,

tandis que son autre sœur s'est mariée à un Chevalier,

habitant de Saint-Denis et a habité une maison don-

nant dans la cour de la pharmacie de Saint-Denis. Je

n'ai pas beaucoup connu mon grand-père Accary,

mais beaucoup plus ma grand-mère, qui était très

gaie, qui aimait chanter. Elle est venue à ma première

communion, à l’occasion de laquelle elle avait acheté

deux chapeaux à Charlieu. Deux, parce que le pre-

mier ne lui plaisait pas. Ils avaient des bêtes et des

vignes. Pas de ces vignes nombreuses à Maizilly qui

donnaient du mauvais « vin de noa ». J'ai participé

aux vendanges. C'était une réjouissance et cela se ter-

minait par un grand banquet. Chaque semaine, le jeu-

di quand j’allais à l’école, ma mère et moi allions les

voir en vélo. Quand j’étais petite, elle me mettait sur

son porte bagages. Nous passions par les Duperron et

le garage Chenaux, où nous prenions le café, puis

nous montions à gauche dans un petit chemin, et nous

prenions un autre café dans une maison au dessus,

chez les Clémencin, avant d’arriver, pas très tôt, chez

les Accary. Chaque année, ma grand-mère allait faire

« une saison » à Vichy. Cette saison, c’était une se-

maine de cure. Ce n'est pas qu'elle était malade, mais

c'était comme des vacances, une occasion de liberté...

Ma mère l’accompagnait à la gare de Saint-Denis, et

peut-être prenait-elle le train avec elle pour Vichy,

puis rentrait. Pour les retours, je ne sais plus comment

ils se passaient.

Mon père, Joseph, a été à l'école, à Coublanc, sûre-

ment, puis à l'école professionnelle à Charlieu, sur la

route de Saint-Bonnet-de-Cray. Sa mère est morte

jeune, en 1902. Il n’avait que 11 ans. C'est pourquoi il

était souvent chez les Chevreton (les Mâconnais),

comme en pension chez eux. De leur maison, il pou-

vait voir la maison Chassignolle de l’Orme. Quand il

voyait les volets ouverts, c’est que son père était ren-

tré de ses tournées de mécanicien en moulins. Il allait

alors le retrouver. Il a appris le métier avec son père :

l'école professionnelle lui a permis de se perfection-

ner.

Ensuite, il est parti travailler en stage dans la maison

de Dôle qui leur fournissait le matériel d'entretien des

moulins, la maison Lacroix. Cette entreprise a voulu

plus tard l'envoyer travailler à l'étranger ou dans la

région de Dole : il n'a pas voulu, non plus qu'il n'a

suivi le conseil de son père d'aller en apprendre plus

en Algérie : il a refusé, parce qu'il était déjà marié. Il

s'est contenté de travailler, en liaison avec ce fournis-

seur de Dôle, dans notre région.

Il y a eu aussi la guerre, qui a été déclarée quand il

avait 23 ans. Il l’a faite, mais ne m’en a que très peu

parlé.

Mes parents se sont mariés le 16 septembre 1919, et

je suis née, leur fille unique, le 3 juin 1921, à la mai-

son de la route de l'Orme. C'est dans la même maison

que naîtra bien plus tard, le 17 juin 1947, ma fille

unique Josette, avec l'aide de la sage-femme de

Chauffailles, madame Charbonnier.

Mon père avait des cousins germains qui habitaient

La maison Chassignolle à l’Orme

En ce Temps-là 2013 Page 18

au Moulin de

l'Orme (la mai-

son Bellon

d'aujourd'hui).

C'étaient deux

frères vieux

garçons, Joanny

et Barthélemy

Chassignolle.

Ils venaient souvent manger chez mes parents, dont la

maison était toute proche. Ils avaient des vignes à

Montbernier, au-dessus de la maison de Claude La-

côte, et les jours de vendanges, comme ceux de battai-

sons, c'est ma mère, avec moi qui la suivais toujours et

partout, qui préparions le repas dans leur maison. Le

reste du temps, ils se débrouillaient, pour se nourrir,

comme pour se blanchir : le Pontbrennon passe au

bout de leur jardin. Il y avait là un lavoir à deux

places, où nous-mêmes allions rincer notre linge blan-

chi en le transportant dans un tombereau : c'était un

rude travail. Je me souviens de madame Denimot, une

voisine dont le métier était lessiveuse. Elle habitait

peut-être la maison aujourd’hui Chervier-Vouillon.

Ma mère l’engageait

parfois, pour laver

les grands draps. Je

descendais avec elle,

et elle me chargeait

de battre et rincer les

mouchoirs.

Il y avait eu un mou-

lin, qui a donné son

nom au lieu, mais je

ne l'ai jamais vu

fonctionner. Je me

souviens cependant

de la disposition des

lieux, du couloir et

de la grande pièce du

moulin. Les deux

frères n'avaient pas

le même caractère :

Joanny, l'aîné, était « bonnet de nuit » ; il était tou-

jours triste ou du moins sérieux. Son cadet aimait plai-

santer et aurait eu envie de se marier. Il savait même

avec qui : la Rosalie Joly. Mais son frère, qui avait sur

lui trop d'autorité, l'en a empêché. Il n'a pas eu le cou-

rage de prendre son indépendance et de quitter son

frère. Ils vivaient d’une ferme dont ils avaient hérité,

par leur mère, à Chauffailles, et surtout de leur propre

ferme du Moulin de l’Orme, entourée de terrains qui

leur appartenaient. Deux vieux garçons n’avaient pas

besoin de gros revenus ! Je pense qu’ils avaient fait la

guerre tous les deux. Leur tombe est au cimetière de

Coublanc.

Mon grand-père et mon père avaient dans leur maison

de l'Orme un atelier avec des outils pour travailler le

bois, et de quoi faire de la mécanique. Il y avait une

raboteuse, une scie à ruban. Ils avaient du bois en

stock. Je me souviens qu’ils fabriquaient des éléva-

teurs, tout en bois. Mon père est mort à l’époque où on

allait les fabriquer dans des matériaux plus modernes.

Cela lui aurait enlevé du travail.

Il travaillait pour les meuniers de la région : Buchet à

Cadollon, le « zouave » à Chandon, Fourcault à Tan-

con, Pont à Maizilly, Jacquis, qui travaillait au moulin

de Gâtelier à Saint-Denis-de-Cabane, Pegon à Saint-

Bonnet-de-Cray, Duperret à Pouilly, Brivot à Saint-

Yan, un certain Der à Neuvy-Grandchamp (entre

Gueugnon et Bourbon-Lancy), Girard à Paray-le-

Monial, à côté du pont, et enfin Chollet, au moulin de

Cornillon à Mably : c'était le plus gros de ses clients..

Mon père nous emmenait souvent, ma mère et moi, en

voiture, une petite peugeot, les dimanches, voir ses

clients et déjeuner chez eux : ses clients étaient la plu-

part du temps de bons amis. C'est ainsi que je suis al-

lée plusieurs fois chez les Girard à Paray : c’était son

client préféré. Il en profitait pour voir le travail à faire.

Ensuite, il pouvait passer les commandes à l'entreprise

de Dôle, par courrier. On le livrait chez ses clients, et

si on le livrait à l'atelier, ou pour les grosses pièces

qu'ils travaillait à l'atelier, les meuniers, qui étaient

équipés de camions, venaient chercher chez nous le

matériel ou les pièces usinées par mon père. Alors, on

leur rendait leur repas du dimanche en les invitant à

notre table.

Mon père s'occupait beaucoup de nous le dimanche,

parce qu'il était très pris en semaine. Quand il allait

travailler à Paray ou à Saint-Yan, il partait pour la se-

maine entière, avec sa caisse à outils dans sa voiture.

Avant, il avait eu une moto : je ne sais pas bien com-

ment il faisait pour aller travailler avec. Il logeait chez

les meuniers ses clients. Il était apprécié de tous, parce

qu'il était très gentil.

Il n'a jamais manqué de clientèle ni de travail, parce

qu'il a fait sa carrière à l'époque des grandes transfor-

mations, où les minoteries sont passées de la force de

l'eau des rivières à celle des moteurs électriques : il a

fallu faire toutes sortes de modernisations.

Il recevait de temps en temps la visite d'ingénieurs

Joseph Chassignolle

En ce Temps-là 2013 Page 19

venus de Paris pour lui présenter de nouveaux maté-

riels. Après le déjeuner, ils restaient à table, et discu-

taient ensemble des après-midi entières. Ils initiaient

mon père à des techniques nouvelles, et cela convenait

à mon père, qui aimait progresser. Pour ma part, j'étais

pot de colle : il fallait, toujours, autant que je le pou-

vais, que j'écoute ses conversations. Je le suivais par-

tout, comme un petit chien, et il me laissait le suivre.

Mais il lui a manqué un fils, pour prendre la succes-

sion. Je me souvent que je l’ai suivi une fois à Mussy,

où il y avait une meunière. J’ai été frappé de voir les

poules entrer dans la cuisine. Mon père était avec un

ingénieur, pour faire un devis précis, ou voir si la

cliente l’acceptait. C’était pendant la guerre de qua-

rante. La meunière a offert un saucisson à l’ingénieur,

qui ne s’est pas fait prier pour l’accepter.

Certes, je n'étais pas toujours avec mon père : il y

avait l'école, à Coublanc, où j'ai eu comme institutrice

Melle Boutculet, originaire de La Chapelle-sous-Dun,

qui a épousé plus tard mon futur beau-frère Fran-

cisque Buchet. Francisque avait sa cabine juste après

le café Buchet, Germaine Boutculet travaillait à l'école

d'à côté du presbytère : ils pouvaient se voir facile-

ment ! Ils se sont mariés et ont eu un fils unique, Mi-

chel.

Puis, de 10 ans à 15 ans, j'ai été pensionnaire chez les

sœurs de Belmont, des sœurs de la congrégation de

Claveisolles, comme beaucoup d'autres jeunes filles

de Coublanc ou des environs. Mes parents m'y emme-

naient en voiture et m'en ramenaient en fin de se-

maine : chaque fois qu'ils me laissaient à Belmont, je

pleurais. La bonne sœur cuisinière, qui s'appelait Léo-

cadie, disait : « Tu ne vas pas pleure ». En vain, ça ne

manquait pas, c’était plus fort que moi. Pourtant, je

n’y étais pas malheureuse, chez les sœurs, même si la

discipline était sévère. Je ne sais plus s'il y avait de

l'éducation ménagère, mais je me souviens qu'on fai-

sait de la gymnastique sous le grand préau, sans plaisir

pour moi, qui n'aimais guère le sport. On se levait à

7 h du matin, celles qui le voulaient pouvaient des-

cendre prendre une tasse de chocolat, mais moi je n’en

prenais pas. Il y avait une étude d’une heure, avant le

petit déjeuner, où l’on avait de la soupe et du saucis-

son, donné par les parents paysans. Puis c’était

l’école.

Mon père était un homme agréable, gentil et moderne.

Il avait voulu que ma mère apprenne à conduire, mais

elle n’y était pas arrivé. Il m’a fait passer mon permis

de conduire, à une époque où c’était rare chez les

filles. Ma cousine de Saint-Denis a perdu sa mère

jeune, et elle en était triste. Je me souviens que quand

elle venait chez nous, nous chantions tous ensemble.

Joseph, mon père, est mort d'un cancer avant l’âge de

la retraite, en 1948. Je m’en souviens : ma fille Josette

avait neuf mois. L'entreprise a fermé. Je ne passe pas à

Lozanne, devant le grand moulin qui est au bord de la

route, sans penser à mon père, aux appareils à cy-

lindres... Quand je veux penser à tous ceux de ma fa-

mille qui sont morts d'un cancer, je ne me les rappelle

plus : mon cerveau s'y oppose. Ma mère est restée

veuve longtemps. J’étais mariée, vivais au bourg avec

Albert, qui travaillait dans la cabine familiale, mais

j’allais souvent la voir à l’Orme.

Quand je repense à ma jeunesse, je trouve que j’ai eu

de la chance : mes parents voyaient beaucoup de

monde, et mon père nous emmenait souvent en

voyage. Je ne m’ennuyais pas.

Quand on est jeune, on est tout feu tout flammes ; on

oublie les dates, on ne s’intéresse guère au passé. Pour

moi, j’ai plaisir à y songer, à m’y replonger, même si

je n’ai pas une très bonne mémoire.

Propos recueillis au Bourg par B.B.

les 15 mai et 29 novembre 2013

Solution de la grille 20 de la page 43

Albert Buchet, Juliette Chassignolle, Joseph Chassignolle

et son épouse Antoinette Accary

En ce Temps-là 2013 Page 20

Les grandes joies de la vie

Cinq naissances d’enfants habitants Coublanc (à savoir 1 garçon et 4 filles) ont été

enregistrées à la Mairie en 2013 : Katell LAMY BRISON 21 mars de Stéphanie BRISON et Julien LAMY Cadolon

Sacha DHAIBY 6 juillet de Nidale EL CHAAR et Bassam DHAIBI Bonnefond Alyzée LEBRETON DUDU 18 juillet de Jennifer DUDU et Jean-Sébastien LEBRETON Cadolon

Loue LABROSSE 5 septembre de Émilie DEVEAUX et Anthony LABROSSE Les Remparts Éline BOTTACCI 25 septembre de Aurélie ANTOINE et Marc BOTTACCI Montbernier

Tous ces nouveaux-nés ont vu le jour à Roanne.

Un mariage a été enregistré à la mairie de Coublanc :

Sophie Carole CHRISTOPHE et Fabrice GRISARD La Place 25 mai 2013

Un mariage a été célébré en l’église de Coublanc :

Edwige ROUCHON et de Pierre-Yves LARUE (de Mars) 18 mai 2013

Tous nos vœux d’heureuse vie aux uns et aux autres !

En ce Temps-là dit adieu à des amis

Toutes les personnes âgées sont chères à l’Association du Noël des Anciens, mais nous sommes particulièrement touchés parle décès de ceux qui ont collaboré à la revue dans les années passées. Cette année, nous voulons évoquer :

−Victoire Buchet, née Chevre-ton, que nous allions souvent consulter aux Bruyères pour qu’elle nous commente des photos et nous renseigne sur tant d’événements passés. Elle nous recevait toujours avec beaucoup de bienveillance et racontait ses souvenirs avec un humour qui traduisait bien sa personnali-té à la fois ferme et généreuse. Parmi les articles ré-cents dont elle a été l’auteure, on peut lire ses souve-

nirs de jeunesse dans la revue 2011, page 30 et découvrir le voisinage de la Place dans la revue 2013, page 17. La photo la représente à son mariage, à 26 ans, en 1946. − Joanny Berthier, consulté à

La Roche, qui avait évoqué pour nous son père Pétrus, marguillier, dans la revue 2009, page 36. Avec son épouse Jeanne, il nous ren-seignait aussi, avec beau-coup de patience et

de compétence, sur des photos anciennes et sur des faits pas-sés. La photo le représente à 20 ans, en 1946. Ces deux collaborateurs de notre revue ont disparu, mais il continueront de nous rendre service : nous avons pris en notes des propos qui seront uti-lisés dans les années à venir. − Il en va un peu de même pour Didier Auvolat, mort bien trop tôt pour passer pour un Ancien de Coublanc, mais, qui nous a communiqué, ces dernières an-nées, des photos du fonds fami-lial qui ont servi (en 2011) et serviront encore à illustrer notre revue.

En ce Temps-là 2013 Page 21

Nos deuils en 2013

Parmi les Anciens de Coublanc (7 = 1+6)

Victoire BUCHET, née CHEVRETON Les Bruyères 13/06/1920 - 17/05/2013 à 92 ans

Jeanne SAMBARDIER, née CHANRION Montbernier 15/05/1922 - 09/03/2013 à 90 ans

Julienne DESMURS, née FONTENILLE Le Perret et MA 22/06/1924 - 21/02/2013 à 88 ans

Joanny BERTHIER La Roche 16/01/1926 - 20/08/2013 à 87 ans

À la Maison des Anciens, venant d’autres communes (1)

Yvonne LASSAGNE, née CANET Chauffailles 28/11/1908 - 31/03/2013 à 104 ans

Marie-Louise LAMURE, née GARDES Chauffailles 07/09/1914 - 25/04/2013 à 98 ans

Marie FARIZY, née LAMURE Chauffailles 14/07/1918 - 09/03/2013 à 94 ans

Mathilde JONDET, née LAPALLUS Ligny-en-Br. 23/02/1919 - 23/09/2013 à 94 ans

Lucienne BUISSON, née GABELLE Dijon 12/11/1920 - 17/03/2013 à 92 ans

Louise BELIJAR, née CAUDERLIER Roanne 03/06/1923 - 23/02/2013 à 89 ans

Henri Louis PERRIN Chauffailles 11/04/1924 - 11/11/2013 à 89 ans

Suzanne CHASSARD, née COLIN Lyon 13/12/1924 - 29/05/2013 à 88 ans

Maurice CHABUET, ép. RAMBERTON Maizilly 07/10/1926 - 18/05/2013 à 86 ans

Henri CORNELOUP Chassigny 01/10/1930 - 02/09/2013 à 82 ans

Parmi les Coublandis de moins de soixante-quinze ans (4)

Jean-Marc CHASSIGNOL Cadolon 10/03/1957 - 01/05/2013 à 56 ans

Hubert DÉCHAVANNE La Place 09/07/1959 - 29/04/2013 à 53 ans

Maria Josèphe LO PRESTI Génillons 14/09/1962 - 31/01/2013 à 50 ans

Parmi les apparentés coublandis résidant hors de Coublanc (?)

Andrée CHAVANON, née BUISSON Belmont 03/10/1921 - 03/11/2013 à 92 ans

Marie FAUCHERY, née BÉNAS La Serve et Chauffailles 12/12/1921 - 08/08/2013 à 91 ans

Josette PERRIN, née FONTENILLE Chauffailles et MA 16/11/1925 - 24/06/2013 à 87 ans

Simone COQUET, née GRAPELOUP Le Bourg et Charlieu 29/12/1925 - 15/01/2013 à 87 ans

France GAILLARD Cadollon 19/02/1934 - 14/11/2013 à 79 ans

Irène DUCLAY, née AZNAR L’Orme et ? 09/08/1936 - 12/03/2013 à 76 ans

Didier AUVOLAT Crosse 18/09/1963 - 03/08/2013 à 49 ans

Nos condoléances aux familles dans la tristesse

La Sagesse de Salomon

Mais la vie des justes est dans la main de

Dieu, aucun tourment n'a de prise sur eux. Celui qui ne réfléchit pas s'est imaginé

qu'ils étaient morts ; leur départ de ce

monde a passé pour un malheur ; quand

ils nous ont quittés, on les croyait anéan-tis, alors qu'ils sont dans la paix. Aux yeux

des hommes, ils subissaient un châtiment,

mais par leur espérance ils avaient déjà

l'immortalité. Ce qu'ils ont eu à souffrir était peu de chose auprès du bonheur dont

ils seront comblés, car Dieu les a mis à

l'épreuve et les a reconnus dignes de lui.

Comme on passe l'or au feu du creuset, il a éprouvé leur valeur ; comme un sacrifice

offert sans réserve, il les a accueillis. Au

jour de sa visite, ils resplendiront, ils étin-

celleront comme un feu qui court à travers la paille. Ils seront les juges des nations et

les maîtres des peuples, et le Seigneur ré-

gnera sur eux pour toujours. Ceux qui

mettent leur confiance dans le Seigneur comprendront la vérité ; ceux qui sont fi-

dèles resteront avec lui dans son amour,

car il accorde à ses élus grâce et miséri-

corde. (Ier siècle avant J.-C.)

En ce Temps-là 2013 Page 22

Liste des Anciens

Née en 1909 Marie-J. BRISSAUD Cadolon

Née en 1917 Marie-Rose DÉAL L’Orme Belmont

Nées en 1919 Marguerite AUCLAIR Cadolon MA

Germaine LAMURE L’Orme Saint-Igny-de-Roche

Nés en 1921 Maria AUCLAIR La Place

Juliette BUCHET Le Bourg

Clotilde FOREST La Place

Renée RONDEL Le Bourg Chauffailles

Yvonne VILLARD La Place

Nés en 1922 Maurice BARRIQUAND Montbernier

Jacques RONDEL Le Bourg Chauffailles

Née en 1923 Andrée CHERVIER Les Génillons

Nés en 1924 Germaine BERTHIER L’Orme

Marie-Rose CHEVRETON La Place

Germaine COLLONGE Cadolon

Nés en 1925 Simone BOUCHERY Le Bourg

Marie LACÔTE Montbernier

Henri SAMBARDIER La Croix du Lièvre

Nés en 1926 Marie-Laure CHASSIGNOLLE Cadolon

Marie-Louise CHAVANON Charmaillerie MA

Nés en 1927 Jeanne BERTHIER La Roche

Gisèle MATHERON Les Genillons

Maurice VOUILLON L’Orme

Nées en 1928 Jeannine LARUELLE Montbernier MA

Juliette VOUILLON L’Orme

Nés en 1929 Jeannine DEQUATRE La Charmaillerie

Augustin GRAPELOUP Bonnefond

Marguerite GRAPELOUP Bonnefond

Louis LAURENT La Charmaillerie

Nés en 1930 Claudien ACCARY L’Orme

Simone ALLOIN La Bourgogne Charlieu

Madeleine BARRIQUAND Montbernier

Germaine DÉCHAVANNE La Place Chauffailles

Jean LARUELLE Montbernier

Marie-Louise LAURENT Charmaillerie

Hélène NEVERS Cadolon Briennon

Marcelle PERRIN Cadolon

Germaine SAMBARDIER La Croix du Lièvre

Les listes qui suivent ne correspondent pas exactement aux données de l’état-civil. Quand un Coublandi est obligé de quitter la commune, il n’est pas rayé automatiquement de nos listes. Mais, bénéficiant en général d’un cadeau dans la commune où il s’est installé, il ne recevra plus le cadeau des Coublandis, mis à part la revue.

Quatre d’entre vous, dont les noms sont écrits en italique, vivent à la Maison des Anciens de

Coublanc (MA). En italique aussi, le nom du ha-meau d’origine de ceux qui ne résident plus à Coublanc. Nous indiquons la ville ou le village où ils se trouvent à notre connaissance.

Par ailleurs, une personne de 1938 n’a pas voulu figurer dans notre liste.

Si nous avons commis des erreurs, nous vous prions de nous les signaler, pour que nous les cor-rigions l’an prochain. Merci.

En ce Temps-là 2013 Page 23

Nés en 1931 Maurice ACCARY Le Foron

René DANTON Cadolon

Zahara ASKI Le Perret

Nés en 1932 Josette-Simone BRISE Carthelier Charlieu

Geneviève CROZET Cadolon

Marie-Antoinette DEMONT Les Génillons

Odette GRAPELOUP La Place

Jean MERCIER La Serve

Urbain PANAFIEU Les Remparts

Nés en 1933 André BUCHET La Place

Bernard BUCHET Croix du Lièvre

Claude CHAMBONNIER Cadolon

Jeanne CHAMBONNIER Cadolon

Suzanne DANTON Cadolon

Raymonde DÉCHAVANNE Montbernier

Henri VAGINAY Bois Gauthay

Nés en 1934 Monique MATHERON Les Génillons

Josette PANAFIEU Les Remparts

Georges PIQUAND Montbernier

Albert PROVILLARD Carthelier

René VERMOREL Cadolon

Simone VERMOREL Cadolon

Nés en 1935 Marie AUBONNET Cadolon

Jean VERNAY Cadolon

Simone RODRIGUES Cadolon

Nés en 1936 Marie BERTILLOT Cadolon

Maurice BERTILLOT Cadolon

André BOURDON Le Perret

Joseph GAILLARD Les Espaliers MA

Josette GAY Cadolon

Josiane GONDARD La Grande Terre

Joseph LACÔTE Le Bourg

Colette PIQUAND Montbernier

Jean POYET Montbernier

Nés en 1937 Josette CHAVANON L’Orme

Gabrielle PREHER Terre des Chambres

Marie-France VERNAY Cadolon

Nés en 1938 Jean BERTHILLOT Le Perret

Anne-Marie BUCHET Croix du Lièvre

Yvonne MERCIER La Serve

Hubert SAUVAGE Les Pins

On peut ajouter à cette liste des personnes depuis longtemps en résidence secondaire à Coublanc, parfois inscrites sur les listes électorales, ou répertoriées par nos listes précédentes, ou même qui écrivent dans notre revue. Si vous connaissez d’autres personnes dans leur cas, ayez la gentillesse de nous le faire savoir...

Né en 1925 Pierre BERTHIER Lyon et La Place

Célestine BARRIQUAND-DINET La Place et Charlieu

Nées en 1928 Renée BERTHIER-LAPLANCHE La Faverie et Fontenay-sous-Bois

Claude BELLON Le Moulin de l’Orme et Lyon

Née en 1929 Antoinette BERTHIER-GUILLAUME La Faverie et Fontenay-aux-Roses

Né en 1929 Roger FOUILLANT Le Foron et Roanne [TSVP]

En ce Temps-là 2013 Page 24

Né en 1932 Jean GAVET Le Bois Gauthay et Roanne

Nés en 1933 Gaston BENHAMOU Les Épalis et Aubervilliers

Jean-Claude DUCLAY L’Orme et ?

Geneviève LACÔTE Cadolon et Mably

Le Comité du Noël des Anciens, qui a préparé le cadeau 2013 ainsi que cette revue 2014, est composé

de Bernard Berthier (président et rédacteur de la revue En ce Temps-là), Marie-Thérèse Jarroux-

Chavanon (trésorière), Cécile Bailly, Danielle Berthier-Duperron, Anne-Marie Déal, Renée Druère et De-

nise Déal.

Nos subsides proviennent pour une part des anciens eux-mêmes lors de la distribution du colis, et de

particuliers à l’occasion d’événements familiaux (qu’ils en soient chaleureusement remerciés) ; mais pour

l’essentiel du CCAS de Coublanc, donc de la commune. Nous avons aussi reçu des contributions volon-

taires pour encourager le colis et la revue En ce Temps-là.

Ce numéro 19 a été conçu et composé par Bernard Berthier et le Conseil d’administration de l’asso-

ciation du Noël des Anciens de Coublanc, avec l’aide, pour la relecture, la recherche et la fourniture de

documents, de photos anciennes et de souvenirs, de Marie-France Jacotey, secrétaire de la mairie de

Coublanc, Danielle Berthier-Duperron, Marie-Thérèse Jarroux-Chavanon, Renée Druère, Anne-Marie

Déal, Geneviève Le Hir, Marie-Jo Dufour, François Millord, Martine Berthier, Simone Bouchery, Régis

Déal, Claude Lattat, Marie et Maurice Bertillot, Claude Guilbert, Renée Monnet, Jean-Paul Monnet,

Maurice Poyet, Juliette Buchet, Paul Druère, Philippe Séveau (msc), Georges Delbos (msc), Pierre Ber-

thier, Jeannette Roy, Mado Clarin, Claude Franckart et Coublanc-71, Madeleine et Maurice Barriquand,

Marie-Laure Chassignolle, Raymonde Lacôte, Bernard et Chantal Dumaitre, Maria Auclair, Célestine

Dinet-Barriquand, Joëlle Courot et Lionel Simond avec les enfants des écoles. Photo du vitrail par Mé-

lanie Berthier. Dessin de couverture de Nadège Demont. Page finale par Patricia Demont. Aux uns et

aux autres nos remerciements.

Voir l’ensemble des « Crédits iconographiques » à la page 3.

- Michèle Bernillon (café-épicerie de Coublanc) - Brigitte et Bruno Chevreton (boucherie à Chauf-failles) - Maison de la Presse (Chauffailles) - Chantal et Georges Galvez (Librairie Gribouille à Chauffailles) - Aurélie et Jérôme Besançon (boulangerie de Saint-Maurice) - Ginette et Philippe Desmurs (garage de Maizilly)

- Pierre Zeimetz (épicerie de Saint-Igny) - Louis-Frédéric Blanchardon (épicerie de Mars) - L’épicerie d’Écoche - Le café - restaurant de Cadollon (L’Escale 71) - Le bar - restaurant de Tancon

Un grand merci à ces diffuseurs bénévoles ! Nous comptons sur eux et éventuellement

sur d’autres nouveaux pour ce numéro 2014 !

Points de vente du numéro 2013

Mimi prend sa retraite

Michèle Bernillon a tenu (pour M. Chandioux de

Chauffailles, puis à son compte) le commerce pluriel

de l’ancienne poste du 1er octobre 1995 au

7 décembre 2013 : c’est exactement la durée de vie de

notre revue En ce Temps-là, née en 1995.

En lui souhaitant une excellente retraite, nous la re-

mercions avec beaucoup de gratitude à la fois pour

son dévouement pour composer au mieux le colis des

Anciens en tout ou en partie selon les années, ainsi

que pour la distribution, gratuite jusqu’en 2006, et

pour la vente ensuite de notre revue.

Entre les points de diffusion du canton, c’est elle qui

avait le record des ventes !

Nous espérons que ses successeurs accepteront de

diffuser En ce Temps-là à partir de janvier 2014.

En ce Temps-là 2013 Page 25

Cahiers Jules Dubuy

Les Coublandis

vont en bateau

Le père Dubuy en mer

Jules Dubuy a fait deux fois le voyage aller de Mar-

seille à Port Moresby en Papouasie Nouvelle Guinée,

et une fois le voyage retour. En effet, il n'est pas reve-

nu de son second voyage : son corps repose dans une

tombe toute simple, sur le bord du terre-plein central

de sa station d'Ononghé.

Sur le paquebot Van Waerwych

Le premier trajet aller du jeune prêtre-missionnaire a

eu lieu à la fin de décembre 1912. À l'époque, il n'y

avait pas d'autre moyen que le steamer. Nous ne sa-

vons pas sur quel navire il est allé de Marseille à Syd-

ney, ou à Batavia, l'actuelle Jakarta. Mais de Sydney

ou de Jakarta à Port Moresby, nous savons qu'il a em-

barqué sur le Van Waerwych de la compagnie hollan-

daise Koninklyke Paketvaart Maatschappy, plus con-

nue sous l'appellation anglaise de Royal Packet S

(team) N(avigation) Company.

Comme nous en informe un encadré publicitaire ci-

joint dans le quotidien néo-zélandais The Evening

Post du 18 décembre 1912, annonçant la traversée

immédiatement postérieure au passage de Jules Du-

buy, cette compagnie assurait les liaisons Sydney-Port

Moresby-Batavia-Singapour et retour. Notre conci-

toyen a dû débourser 12 livres s'il venait de Sydney,

ou bien une vingtaine de livres s'il a fait le parcours

Jakarta-Port Moresby, où il a débarqué, attendant que

le frère Alexis le prenne en charge dans l'embarcation

de la mission.

Avant de s’ensevelir dans la forêt sauvage de Papoua-

sie, et de rencontrer des populations au mode de vie

quasi-préhistorique, notre Coublandi a pu découvrir

l'extrême modernité technique et financière du capita-

lisme hollandais. La compagnie Packet était floris-

sante. Le rapport annuel pour 1910, tel qu'il est pré-

senté dans le Sydney Morning Herald du 19 juillet

1911, indique qu'elle possède soixante-douze navires,

dont six ont été

mis en service

en 1910. Six

autres sont at-

tendus pour l'an-

née suivante.

Cette croissance

accompagne le

développement

économique

voulu par le

gouvernement

hollandais dans

l'archipel indo-

nésien et au-

delà. Les navires de la compagnie ont parcouru

2 044 630 miles en 1910 au lieu de 1 730 808 deux

ans plus tôt. Les profits sont allés de pair, et les ac-

tionnaires ont touché un dividende de 10 % au lieu de

6 % l'année précédente. La compagnie a passé un ac-

cord avec le gouvernement hollandais, pour que celui-

ci éponge d'éventuelles pertes sur la desserte de l'Aus-

tralie, mais récupère sa mise sur d'éventuels gains une

autre année. La Royal Packet croit tellement en l'ave-

nir de la ligne Sydney-Java qu'elle a commandé deux

paquebots plus grands et plus rapides pour cette liai-

son commerciale. Comme la plupart des bateaux de la

compagnie, les machines fonctionneront au « fioul

liquide » au lieu du charbon, ce qui était un progrès de

l'époque. Et l'article de conclure que les deux vais-

seaux, qui remplaceront à terme le Van Waerwych et

le Van Linchoten, sont attendus en Australie à la fin

de l'année suivante (1912). Mais Jules Dubuy a pris le Van Waerwych, comme il

en informe lui-même son confrère le père Chabot (msc

= missionnaire du Sacré-Coeur d'Issoudun) dans une

lettre datée du 15 mars et écrite à Ononghé, où notre

Coublandi vient de s'installer... pour presque quarante

ans. La lettre a été publiée par les Annales d'Issoudun Le Van Linchoten, alter ego du Van Waerwyvh

En ce Temps-là 2013 Page 26

d'août 1913. Voir ci-dessous un extrait.

Comment ce voyage sur le Van Waerwych s'est-il pas-

sé ? Comment le savoir, alors que Jules Dubuy n'en dit

rien ?

Il y avait d'autres missionnaires chrétiens qui se ren-

daient en Papouasie à l'époque de Jules Dubuy, et

même bien avant.

La revue (anglophone) des Adventistes du Septième

Jour, publiée à Sydney, rend compte dans son numéro

du lundi 8 août 1910

d'un voyage Sydney-

Port-Moresby. L’auteur

de l'article « En route to

the East Indies » (= « En

route pour les îles entre

l'Inde et l'Australie »)

donne une idée intéres-

sante de la vie sur ce

bateau durant le trajet

vers la Nouvelle-

Guinée, moins de deux

ans et demi avant que

Jules Dubuy n'y soit à

son tour passager. Je

traduis son récit. « Le Steamer Van Waer-

wych s'est révélé être un

navire excellent. Son

commandant, le capi-

taine Arnold, est un

homme des plus

agréables. Sur ce bateau, on veille avec beaucoup d'at-

tention à la sécurité et au confort des passagers. Les

cabines sont bien aérées et bien disposées, et la nourri-

ture aussi bonne que sur les meilleures compagnies.

Notre première escale fut Brisbane, où l'auteur de ces

lignes fut rejoint sur le steamer par le pasteur Crad-

dock. Nous avons eu le temps de rester ensemble la

nuit durant et une assemblée de prière eut lieu en

l'église de Brisbane sud. On y présenta aux fidèles le

sujet de la fin prochaine du monde, du point de vue du

prophète Daniel (chapitre 12).

Notre escale suivante fut Cairns, dans le nord du

Queensland. Les passagers eurent l’opportunité de

visiter les fameuses cataractes de Barron Falls, qui

sont à dix-neuf miles de Cairns en chemin de fer. Le

paysage est superbe tout le long du trajet. À Cairns, on

embarqua quatre mules pour notre mission en Papoua-

sie, et j'ai eu le privilège de voir qu'elles avaient un

certificat de santé en bonne et due forme, et que leur

noms étaient bien remplis, afin de tenir compte des

règlements de douane en Nouvelle-Guinée.

Ces mules prirent leurs quartiers sur le pont au-

dessous du nôtre, tout près de la seconde-classe. Dans

cet endroit, on pouvait aussi trouver des vaches et des

veaux, des chevaux et des chiens, des chats et des pin-

tades, des canaris, et je ne dois pas omettre un perro-

quet très bruyant.

Les mules supportèrent bien leur passage sur le stea-

mer, et se nourrirent sans renâcler de fourrage vert et

de foin. Elles semblaient être de bonne disposition et

bien dressées. Leur achat nous a réjouis, car nous sa-

vons combien elles sont utiles à nos fidèles travail-

leurs en Nouvelle-Guinée.

Un triste incident, en rapport avec notre voyage, se

produisit à Cairns. Nous devions partir à neuf heures,

la nuit de vendredi, et le capitaine donna son coup de

sifflet une demi-heure auparavant, pour avertir les vi-

siteurs et les passagers, ainsi que pour signaler au pi-

lote qui nous avait conduits sur le quai de retourner

nous chercher pour nous ramener en mer. Quelques

minutes plus tard, nous apprîmes qu'au moment précis

où le sifflet avait retenti, le pilote s'était brûlé la cer-

velle avec un pistolet. Nous ne partîmes pas avant le

lendemain matin.

Le jour qui suivit notre départ de Cairns, le capitaine

vient me voir pour me demander de diriger un service

religieux pour les passagers. Ce fut fait. Nous avons

bonne confiance que cela impressionna favorable-

ment, en vue du bien moral, l’esprit de l'auditoire. La

plupart de gens qui sont en bateau sont des touristes

portés sur le plaisir, et en règle générale peu se sou-

cient de la religion.

Notre bateau mit environ quarante-huit heures pour

parcourir la distance qui sépare Cairns de Port Mores-

by, en Papouasie. Le voyage entier ne nous avait pas

pris plus de douze jours. Durant tout le trajet, nous

avons eu beau temps. Un agréable voile de nuages

légers, qui nous protégeait du soleil tropical, avait ren-

du le voyage beaucoup plus agréable qu'il n'aurait été

autrement. »

Ce récit de l'adventiste J. E. Fulton n'aurait-il pas pu

être fait par Jules Dubuy ? Notre concitoyen, cepen-

dant, a fait le voyage en décembre, durant l'été austral,

En ce Temps-là 2013 Page 27

période des cyclones. Peut-être le bateau a-t-il été plus

secoué. On peut se demander aussi si notre mission-

naire du Sacré-Cœur a pris le temps ou eu l'argent né-

cessaire pour aller voir les chutes de Barron Falls – s'il

venait de Sydney –, et s'il a entretenu de bonnes rela-

tions avec le capitaine, probablement protestant. En

tous cas, l'atmosphère de ferme qui régnait entre deux

ponts n'a pas dû gêner le fils de paysan qu'il était...

De Port Moresby à Yule Island

La lettre évoquée ci-dessus, envoyée au père Chabot,

mais destinée au grand public des lecteurs des Annales

d'Issoudun, qui comptaient de nombreux abonnés dans

les campagnes françaises, raconte le parcours de liai-

son entre la capitale politique du pays et la capitale de

la mission des MSC. Laissons la parole à Jules Dubuy.

« C'est pour répondre à une promesse faite sur le Van

Waerwych, le 27 décembre dernier, que je quitte notre

chantier de scieurs de long et que je veux vous dire en

deux mots l’histoire de la fondation d’Ononghé. Nous

voilà donc installés à Jelel ul’ enda depuis le 9 février

et non sans les péripéties et les agréments habituels

dans ces pays encore vierges. Comme vous me l’aviez

fait prévoir, F. Alexis vint nous chercher à Port-

Moresby avec le steam-launels [sic. En fait l'impri-

meur n'a pas su déchiffrer le juste mot de Jules Dubuy,

« steam lauch », qui désigne une embarcation à va-

peur] de Yule. Le 31 décembre à trois heures du ma-

tin, nous levions l’ancre et l’hélice nous poussait rapi-

dement hors de la baie. Les côtes déchiquetées de

Nouvelle-Guinée commencèrent à défiler devant nous.

Nous allions à belle allure et il semblait que nous se-

rions à Yule dans l’après-midi, lorsque vers onze

heure et demie quelques ratés se produisirent suivis

d’un brusque arrêt du moteur. Cette fois nous y étions.

C’était une panne et une superbe panne. Au bout de

six heures de travail, le moteur se décidait à reprendre

sa course, mais à cinq heures et demie du soir, c’est la

marée basse, la nuit arrivait, impossible d’avancer

sans se briser sur les récifs à fleur d’eau. On se décida

à passer la nuit à la belle étoile et c’est ainsi que se fit

pour nous le passage du 31 décembre 1912 au

1er janvier 1913. Dirai-je que je le regrettai ? Certes

non, car j’eus le spectacle toujours si grandiose d’une

belle nuit d’équateur et d’une mer phosphorescente

comme on n’en trouve que sous les tropiques. Cela

valait bien une panne. » 1

Depuis l'origine de la mission catholique, les pères

avaient compris la nécessité d'avoir leur propre embar-

cation pour traverser le golfe de Torrès qui sépare la

Nouvelle-Guinée de l'Australie, et en particulier de la

petite île de Thursday, au large du cap le plus septen-

trional de l'Australie, où les Français venus d'Issoudun

s'étaient installés comme sur une tête de pont pour

conquérir la Papouasie. Toute une histoire pourrait

être racontée de leurs petits bateaux successifs et des

aléas que les missionnaires avaient subis durant des

traversées souvent dangereuses. Tel ou tel frère était

chargé de l'entretien et du service de l'embarcation

salutaire, malgré tempêtes et pannes...

Jules Dubuy, vers le printemps 1929, regagna la

France pour y prendre les quelques mois de vacances

auxquels il avait droit. On le vit bien sûr à Coublanc,

mais il sut transformer ces mois d'oisiveté possible en

tournées de propagande pour sa mission et en voyages

d'affaires pour se procurer des outils et des matériaux

nécessaires − par exemple à la Foire de Lyon. Sur le

trajet aller (Papouasie-France), nous n'avons aucun

renseignement.

Le voyage de 1930

Sur le retour, nous en savons ou pouvons en deviner

un peu plus.

Le père Hervouet, son confrère, témoigne de ses der-

niers jours en France : « Le procureur (= le père char-

gé des affaires matérielles dans le couvent) de Mar-

seille me disait qu’à ce départ, il avait préparé plus de

100 caisses. Toute une usine (scierie) en caisses. Les 3

dernières nuits, avant son départ, y passèrent alors que

pendant la journée, il faisait des conférences. Et il ne

paraissait pas fatigué. Il avait une résistance étonnante

à la fatigue. »

Cinq ans plus tard, dans la lettre du 20 avril 1935

adressée à Victor Thévenet, son maître ès menuiserie

de la Croix-du-Lièvre à Coublanc, Jules Dubuy écrit :

« On est en train de construire [à Marseille] une vaste

maison spécialement aménagée pour l'arrivée, le sé-

jour et le départ des missionnaires de la dizaine de

Missions ou Vicariats apostoliques dont notre société

a la charge dans l'Océanie et les Indes Hollandaises et

qui passent tous par le canal de Suez. »

Même si la maison de la rue Dorian n'était peut-être

pas encore utilisable en 1930, Dubuy partit de Mar-

seille ; le départ eu lieu le 10 avril. Il est quasi certain

que le paquebot de Jules Dubuy passa par le canal de

Suez, pour gagner l'Indonésie (les Indes hollandaises).

Le père Verjus avait déjà suivi cette route à la fin du

XIXe siècle.

Le 15 mai 1930, Dubuy quitte Surabaya (grand port

d'Indonésie, utilisé notamment par le Royal Packet

Company. Le poète Rimbaud, soixante ans aupara-

vant, y avait fait lui aussi escale, tenté un moment de

s’engager dans les troupes coloniales hollandaises ! À

Soerabaia (selon l'orthographe de l’époque), Jules Du-

buy admire sans doute le SS Melchior Treub de la

compagnie hollandaise, qui assure des liaisons entre

l'Indonésie et la Chine et le Japon. Il achète une carte

postale représentant ce bateau, et deux jours plus tard,

1. Les missionnaires d'Issoudun se répétaient-ils les vers fameux

(et récents à l'époque) du poète Heredia, dans son sonnet « Les

Conquérants » ? : L'azur phosphorescent de la mer des Tropiques

Enchantait leur sommeil d'un mirage doré...

En ce Temps-là 2013 Page 28

dans la mer de Java, il rédige un mot à l'intention de

Victor Thévenet (en fait de son épouse aussi, et de

tous les Coublandis qui seront par eux au courant).

Cette carte ne pourra être postée qu'à l'escale de Ra-

baul, au nord de la Nouvelle-Guinée, dans l'île de la

Nouvelle-Bretagne, où, vers 1880, les missionnaires

catholiques avaient réussi à s'implanter avant d'abor-

der la grande île. Le timbre a été décollé, emportant la

plus grande partie du cachet : il reste visible le 9, et il

est probable que ce soit le 9 juin. Le tampon de la

poste de Coublanc est du 27 juillet. Si nos supposi-

tions sont bonnes, la carte aura mis quarante-huit jours

pour venir de Rabaul à Coublanc...

Le verso manuscrit nous renseigne utilement : Jules

Dubuy est sur un bateau appelé le Saint-Roch. Je n'ai

pas réussi à trou-

ver de renseigne-

ments sur ce ba-

teau. Notre mis-

sionnaire parle

d'escale à Soera-

baia : peut-être

était-il sur ce

bateau avant.

Mais depuis

quand ? Pour-

quoi pas depuis

Marseille ?

Il écrit le 15 mai,

et prévoit l'arri-

vée à Rabaul

après l'Ascen-

sion, qui tombait

cette année-là le

29 mai. La carte

est postée probablement le 9 juin. Il faut donc entre 14

jours au mieux et 25 jours au plus pour accomplir le

trajet Soerabaia-Rabaul !

Le 25 juillet, de Yule Island, Jules Dubuy écrit à Vic-

tor Thévenet : « Mon Cher Victor, me voici depuis

une dizaine de jours à Yule au centre de la Mission et

il faut que je vous donne signe de vie. J'ai donc passé

5 semaines en Nouvelle-Bretagne et je suis arrivé en

Nouvelle-Guinée à Yule par 2 étapes ou plutôt 3 : Ra-

baul - Samarai, Samarai à Port Moresby, Port Mores-

by à Yule. »

Du 10 avril au 15 juillet, le voyage a donc duré trois

mois, mais il faut en soustraire cinq semaines d'arrêt

volontaire. C'est beaucoup plus rapide que cinquante

ans plus tôt, grâce au développement des transports.

Une traversée de luxe

« Cette dernière étape s'est faite dans des conditions

idéales ; impossible d'espérer mieux. À Port-Moresby,

j'ai fait une visite au Gouverneur qui m'a accueilli de

la façon la plus amiable, m'a offert le passage à bord

du bateau du Gouvernement, a téléphoné à son capi-

taine qu'il embarque dès le lendemain mes 12 mètres

cubes de bagages sans que j'aie à me déranger et gra-

tis pro Deo.

Le surlendemain nous sommes partis pour Yule. Il n'y

avait à bord en dehors de l'équipage que le Gouver-

neur, son gendre, leurs femmes et moi.

La réception par le Régulus

À Yule il y avait à notre arrivée dans le port un navire

de guerre français, le Régulus. Nous commençâmes

par aller le passer en revue : tout l'équipage, officiers

et matelots, était sur le pont en grande tenue et au

garde à vous. Vous voyez que j'ai été bien reçu à mon

arrivée dans la Mission : les honneurs de guerre ren-

dus par un bateau de guerre français. Mes bagages

furent débarqués dans la nuit suivante de 9 à 10h1/2.

Si cette heure tardive vous intrigue, je dirai(s) qu'on

l'avait choisie parce que c'était le moment de la marée

haute et la marée ici varie de plus de trois mètres.

Mais ce qu'il faut aussi que vous sachiez, c'est que le

commandant du Régulus avait mis les projecteurs de

son bateau à notre disposition ; et pendant que les Ca-

naques enlevaient les caisses et les emmagasinaient

dans les docks, ils furent puissamment éclairés par les

fanaux du bord. Vous pensez s'ils étaient heureux. Ils

n'avaient jamais rien vu de si lumineux et ils hurlaient

d'enthousiasme.

Voilà comment s'est terminé ce long voyage sur mer.

Je n'ai assurément pas lieu d'être mécontent, tant s'en

faut. Reste le plus dur : passer de la côte à Ononghé

mes 16 mètres cubes de bagages, car j'ai trouvé ici 4

mètres cubes arrivés par d'autres lignes, entre autres la

raboteuse.

Dans tout le voyage, en fait d'accident je n'ai eu

qu'une caisse de brisée et un tonneau de peinture dé-

foncé. La caisse brisée est celle de Roanne. Elle pesait

1090 kilogm. À Rabaul, il fallut la mettre sur un ca-

mion pour la transporter à un autre quai pour l'embar-

quement ; quand il s'agit de la descendre du camion,

les Canaques voulurent la recevoir, seulement comme

ce n'était pas de la plume, elle leur échappa et tomba

sur le sol complètement brisée ; heureusement qu'ils

avaient pris la précaution d'enlever leurs doigts de

pied, surtout qu'ils n'avaient pas de souliers.

La Cie Burn et Phelp. [Burns Philp] se débrouilla pour

En ce Temps-là 2013 Page 29

la remballer en 4 caisses. Le voyage me revient à en-

viron 30 000 F, dont les 2/3 pour les frais de transport.

J'ai eu beaucoup de chance pour la douane, les doua-

niers se sont contentés du tiers de mes factures qu'ils

ont examinées pendant 2 jours et taxées 3 000 F. Au-

cune caisse n'a été ouverte. J'ai été très satisfait, car

j'aurais pu avoir quelque 50 000 F à payer sans comp-

ter les caisses dézinguées et 2 ou 3 mois d'attente.

De Paris, Joubert-Tiersot m'avait envoyé une petite

machine dont 1 pièce a été brisée. Je lui ai écrit de me

la renvoyer et en même temps j'ai commandé une

avoyeuse pour les scies à ruban. Je lui ai dit qu'il

s'adresse à vous pour le paiement. Mais si sur les

900 F il ne restait rien, je vous serai reconnaissant de

voir M. le Curé de Chauffailles.

Donnez bien le bonjour à tous ceux qui se souviennent

de moi, à l'occasion donnez de mes nouvelles à ma

maman.

Je présente mes meilleures salutations et vous prie de

croire à ma vive et profonde amitié. »

Comment mieux terminer le récit des aventures mari-

times de Jules Dubuy que par cette lettre remar-

quable ?

Mais en a-t-il fini avec les bateaux et la mer ?

Pas tout à fait.

Notre Coublandi ne dit rien de possibles remontées de

fleuves en canot. Il est vrai que la rivière d'Ononghé,

la Vanapa, est plutôt un torrent, très peu propice à la

navigation. Mais il va encore être question de bateaux,

en 1937. D'abord parce que la Croix prévue pour le

mont Albert-Edward est arrivée cette année-là, par

mer évidemment, mais est restée trois mois, indûment,

dans les entrepôts de la douane de Port Moresby.

Et en juin de cette même année, comme le raconte

Jules Dubuy dans une nouvelle lettre à Victor Théve-

net (3 août) : « La Nlle Guinée a été dernièrement sé-

rieusement éprouvée : il y a quelque 2 mois, une érup-

tion volcanique a détruit la capitale de la Nlle Bre-

tagne, Rabaul, où je m’étais rendu directement de

Marseille en 1930.

Le port qui avait quelques 3 kilomètres de fond à son

entrée a été comblé et des bateaux se sont trouvés su-

bitement dans les jardins. »

Décidément, le surréalisme ne triomphait pas qu'en

Europe. La nature tropicale s'y mettait...

Bernard Berthier

Le Régulus

Le Régulus est un aviso-sloop de type anglais « Flower ». Il a été construit à Glasgow. Commencé en sep-tembre 1916, il est mis à flot en mars 1917, et mis en service le 2 mai 1917. Son équipage est de 6 officiers, et 97 hommes. En mai 1917, il patrouille dans l'Atlantique. En novembre, il évite deux torpilles tirées par un sous-marin allemand. En 1919, il est affecté comme bâtiment hydro-graphe à Terre-Neuve. De septembre 1919 à janvier 1920, le Régulus est au Cameroun et au Sénégal. En décembre 1921, il s’échoue trois fois sur le redoutable banc d’Ar-guin au large d'Arcachon. En 1922-1924, il croise dans l'Atlantique, en Amé-rique Centrale et du Sud. Le 28 avril 1923, il est pris dans les glaces à Terre-Neuve. En avril 1927, le Régulus part pour l’Indochine, le Japon et la Chine. Le premier mai 1929, il est accidentellement abor-dé devant Tsin-Tao (port entre Pékin et Shanghai) par un bâtiment japonais. En juillet 1930, il parade devant Yule Island. En 1932, il est déclaré aviso colonial. En mai 1935, il est rayé des listes et en juillet il est vendu... Triste fin d'une courte carrière de 18 ans, pour un bon bateau.

Humeur humour par Bibi De mes deux filles, l'une entrera chez les car-mélites, l'autre chez les cars Michel. Dieu sera généreux pour nous accueillir au Pa-radis. Pourquoi ? Parce qu'il n'est pas radin... À un repas entier je préfère une midinette… Dans un couple, l'âge de la retraite amène une redistribution des tâches, et des moustaches. Il y a un temps pour tout : le temps de l'i-pad, et le temps de l'EHPAD. Le couple, ce miroir aux alouettes : la ménagère scotchée devant le poste et le bonhomme posté devant le scotch...

En ce Temps-là 2013 Page 30

Rémy Berthier

et Maria Joly son épouse

par Pierre Berthier

Mon père, Rémy Berthier (Jean-Rémy pour l'état ci-

vil), est né à Coublanc, dans la maison familiale de La

Roche, le 17 novembre 1896. Il était le fils de Joanny

Berthier et de Clotilde Guillermet, de la famille des

Guillermet de Mardore. Il était aussi le petit frère de

Pétrus (1892) et d'Élise (1893). Sa jeunesse se déroula

à Coublanc, sans rien de remarquable. La famille con-

serve quelques uns de ses

cahiers d'école, où on le voit

appliqué à bien écrire. Les

leçons d'instruction civique

qu'il recopie patiemment

sont assez étonnantes par

rapport à l'enseignement

actuel... Son frère Pétrus

reprenant la ferme, il lui

fallu trouver un autre mé-

tier : il devint apprenti tail-

leur chez Rémy Joly, à La

Place.

Mon père avait presque

18 ans lors de la déclaration

de guerre, en août 1914. Il a

été beaucoup marqué par

ses 3 ou 4 ans de service

militaire et de guerre. Je

n'en garde que quelques

souvenirs, qu'il nous a ra-

contés parfois plus tard. Il

en parlait peu, certainement

par dégoût de la chose militaire (il disait qu'il voulait

absolument rester soldat de deuxième classe, « et en-

core par protection » !) et à cause des horreurs qu'il

avait connues, comme la mort d'un copain, un soldat

italien de vingt ans. En effet, vers Koritza, il avait vu

ce jeune homme mourant, les entrailles ouvertes, et

qui gémissait en disant : « Mama ! »

C'est un peu par hasard, ou par désir de voyager et

esprit d'aventure, qu'il avait choisi de partir en Orient,

plutôt que sur le front du nord de la France, quand on

demanda des volontaires pour les Dardanelles. Il pa-

raît que dans un groupe de dix-neuf jeunes Coublandis

de sa classe, ils ne sont que deux à avoir choisi

l'Orient, mais ils sont rentrés tous deux vivants.

À l'aller, il a eu le mal de mer dans le bateau de Mar-

seille jusqu'à Salonique, dans le nord de la Grèce.

L'étage supérieur était réservé aux officiers et sous-

off. En dessous, bien bas dans les soutes, les simples

soldats, mal nourris, en piètre état. « Ne bougez pas

d'ici », disait l'officier. Et parfois, et cela faisait peur :

« Il y a de la lumière. ! » ou « Bateau à l'horizon !

Priez le bon Dieu ! » Un ou deux bateaux de transport

de troupes ont été torpillés devant eux..

Il a fait la difficile campagne de Grèce, de Macédoine

et de Serbie, avec la fameuse bataille de Koritza. Il

racontait que le roi de Serbie lui avait serré la main

après la victoire et lui avait dit avec un accent balka-

nique : « Vous êtes un brave ! »

Il a été décoré, mais après la guerre, il n'a pas voulu

porter ses décorations. Il en avait assez. « Les tueries

m'emmerdent ! » C'est pourquoi il ne la racontait pas

beaucoup, sa guerre.

Il avait contracté le paludisme là-bas. Avait-il aussi

respiré des produits toxiques ? A-t-il été gazé ? Il a été

rapatrié dans un bateau-hôpital nommé « L'Asie »,

avant la fin de la guerre, puisqu'il écrit de Cannes le

23 juillet 1918. Il a été cantonné dans cette petite ville,

L'Asie

L’Asie est un paquebot de 139 mètres de long, qui a été mis en service par la Compagnie des Chargeurs Réunis en 1914. Il est réquisitionné par la Marine Na-tionale en 1916 et transformé en navire hôpital de 770 lits. Opérationnel à partir de février 1917, il effectue durant deux ans en moyenne, au service de l'Armée d'Orient, deux rotations mensuelles entre Toulon et Salonique avec parfois des escales à Bizerte, Milo, Bône et Al-ger. Il connaît divers aléas, dont un le 10 mai 1917 : en convoi en Méditerranée, il aborde et endommage le torpilleur d’escadre Mortier. Le 4 avril 1918, en route pour Salonique, il est contrô-lé par un sous-marin allemand par 35°25N et 015°13E, au sud de Malte. Lors du contrôle, un marin alle-mand tombe à l’eau et est soigné par le docteur Ma-rin, médecin major de l’Asie. La correction de l’équi-page allemand est notée dans le compte rendu du voyage. Le 20 juillet 1918, Rémy Berthier en descend et remet le pied en France. Après l’Armistice, l'Asie continue à naviguer en Médi-terranée Orientale, transporte des personnels civils et militaires, des réfugiés, de matériel, y compris pour le compte de la Croix Rouge américaine. Rendu à la marine marchande en 1919, il connaîtra des incendies et des échouages divers, puis sera pris par les Allemands à Marseille en mai 1943, remis aux Italiens, rebaptisé Rossano, bombardé par les Alliés dans le port de Gênes. Trente ans d’existence. Finie la comédie !...

En ce Temps-là 2013 Page 31

pour soigner son paludisme ; il y a passé un an envi-

ron, dans un hôpital improvisé dans un grand hôtel

réquisitionné : une année de vacances à Cannes, aux

frais de l'armée ! Mais cela a-t-il compensé les crises

de paludisme qui l'ont pris le reste de sa vie, de temps

en temps, et qui lui donnaient une forte fièvre durant

trois ou quatre jours ?

Il est donc enfin rentré mais, de la même manière que

son patron avait fait dans sa jeunesse des voyages

d'apprentissage à Metz, Reims ou Bordeaux, Rémy

avait fait durant presque un an un bout de tour de

France passant par Strasbourg et Paris : en fait, pour

se perfectionner dans le métier, on se mettait au ser-

vice de patrons qui avaient momentanément trop de

travail, à l'approche des grandes fêtes où les gens se

faisaient faire un costume. Il a aussi pu apprendre la

coupe.

Après la guerre, il s'est un peu intéressé à la politique.

Il est entré dans un parti politique, le PDP (Parti dé-

mocrate populaire, espèce de parti démocrate-

chrétien) dirigé par un Raymond Barre de l'époque. Il

était allé deux ou trois fois à ses conférences. La sec-

tion de Coublanc comportait une dizaine de membres.

On était venu le chercher. Ce parti

n'était pas très venimeux. Mon père a

dû assister à quelques réunions le

dimanche, à Chauffailles ou Saint-

Igny.

Rémy Berthier était un bon garçon,

et plutôt beau. Il a plu à Maria Joly,

et a été agréé par les parents de Ma-

ria Joly. Le mariage a eu lieu le

17 octobre 1922. C'est à cette noce

que son frère Pétrus, célibataire

quoique plus âgé que lui, a fait la

connaissance de Clotilde Joly, qu'il

allait épouser bientôt.

Maria, officiellement Maria Claudia,

était la fille du futur maire et d'Émi-

lie Leaumorte. Elle était née le 29

avril 1901, à Coublanc. Elle avait eu une petite sœur,

Lucie Augustine, qui était née le 13 décembre 1903, et

morte quelques mois plus tard, le 27 avril 1904. Ma-

ria, qui n'était pas une travailleuse acharnée à l'école

de Coublanc, avait été mise par ses parents en pension

chez les sœurs de Belmont, jusqu'au brevet. Ensuite,

elle avait aidé sa mère dans le magasin, mais songeait

surtout à se marier...

Quand il avait dit à mon grand-père : « Je désire épou-

ser votre fille », Rémy Joly lui avait répondu : « Oui,

mais ne vous installez pas à moins de trente kilo-

mètres de Coublanc ! » Il y avait déjà plusieurs tail-

leurs à Coublanc ! Un copain l'a poussé vers Charlieu.

« Il y a tout plein de bourgeois ! » Mais la condition

exigée par Rémy Joly lui interdisait Charlieu, trop

proche. Il s'est exilé à Paray-le-Monial. Le magasin

familial, avec deux petites pièces d'habitation à l'étage,

était situé en plein cœur, place Guignault.

Il travaillait avec ma mère, qui vendait du tissu ou de

la mercerie, mais aussi avec deux employés, un

homme et une femme. Ma mère était maligne ; je l'ai

entendue souvent qui vantait sa marchandise, en di-

sant : « Prenez ce tissu, il est excellent ! » ou bien :

« Il vous va très bien ! », alors que c'était un produit

ordinaire faisant un effet banal. Mon père, plus hon-

nête ou moins commercial, aurait voulu qu'elle dise la

vérité ; il lui reprochait après ses enthousiasmes

feints : « Tu n'as pas honte ! »

Il était tailleur, et il était coupeur : cela faisait en fait

deux métiers. Comme il ne connaissait pas l'algèbre, il

faisait ses modèles sur le papier. Moi, qui étais bon en

maths très jeune, je lui ai donné des moyens arithmé-

tiques. « Qu'est-ce que t'es savant ! » La règle de trois

pouvait être utile !...

Il avait un ami, connu à la guerre ou au PDP, un cer-

tain Brivet, je crois, qui devait avoir une petite usine

de tissage, et qui fut ou à peu près son premier client.

Ce Brivet lui proposa de lui faire de la pub, en disant :

« Je me fais faire un costume chez Berthier ! »

C'est à Paray que le couple a eu deux enfants : Pierre

(moi) né le 17 octobre 1925, et mon frère René, né le

28 mai 1927. Nos parents nous

envoyaient souvent en vacances à

Coublanc. C'est là, chez ma grand-

mère, que j'ai attrapé la polio, en

1928. Mes parents et le docteur

m'ont envoyé à l'hôpital De-

brousse, à Lyon, où, faute de

place, on m’avait mis dans un ser-

vice de méningite et on ne savait

pas si j'allais mourir de l’une ou de

l’autre maladie. Revenu vivant à

Paray, c'est ma mère qui m’a fait

marcher en alternant taloches pour

me forcer et chocolat pour me ré-

compenser ou m'inciter. Ma mère

et ma grand-mère Émilie Joly

étaient très fâchées d'avoir un en-

fant que tous ses camarades traitaient de « patte

folle ».

La maison que nous habitions était en mauvais état : il

pleuvait place Guignault, il pleuvait sur le lit où je

dormais avec mon frère, et nous y mettions parfois

une bassine. On entendait la voisine, qu'on appelait la

mère Pisse-trois-gouttes (« et la quatrième est en

route »), parce que durant les nuits (ou bien l'imaginait

-on) elle allait souvent à son pot de chambre ; c'était

une vieille dame qui donnait des coups de mains à

l'école.

Une fois, durant un séjour de vacances à Coublanc,

mes parents ont invité leur nièce et filleule Madeleine

Berthier à passer chez eux quelques jours de vacances,

quelque temps après la mort en 1940 de sa sœur Cé-

lestine, fillette de dix ans, durant la semaine de la dé-

bâcle. C'est René qui avait accompagné de Coublanc

sa jeune cousine, sans doute en train. Moi, j'étais resté

En ce Temps-là 2013 Page 32

à Coublanc : à Paray, il n'y

aurait pas eu de place pour

trois enfants !

Rémy aimait la pêche à la

ligne : il emmenait ses deux

fils pêcher dans le canal ou la

Bourbince. D'où le souvenir

que j'ai d'un proverbe orgueil-

leux que l'on devait répéter

souvent : « Si la Bourbince

portait bateaux, Paris serait

dans le siau ! »

En je ne sais quelle année,

mais les photos prouvent que nous avons environ dix

ou douze ans, et ce doit donc être peu avant la guerre,

nous sommes allés à Lourdes, avons visité le sanc-

tuaire et même marché en montagne. On m'avait fait

miroiter que l'eau de Lourdes guérirait ma jambe atro-

phiée. On ne devrait pas dire cela à un jeune boiteux :

la déception du bain inefficace dans la piscine de

Lourdes a beaucoup diminué ma foi. Anatole France

disait, et cela m'a marqué, qu'à Lourdes il y a plus d'ex

-voto que de jambes de bois...

À Paray-le-Monial, il y avait beaucoup d'ecclésias-

tiques, et l'on était souvent fourré dans la basilique. La

basilique était l'église de notre paroisse. Mon père fai-

sait partie du chœur de chant. Moi aussi. Un peu plus

malin que les autres, j'avais été choisi pour être l'en-

fant qui tourne les pages pour l'organiste qui jouait de

l'harmonium, un certain M. Racine. Durant certains

offices, avec mes deux copains Fusch et Jacob, nous

ouvrions nos missels avec un sérieux formidable, mais

on avait mis dedans des poèmes de Baudelaire – poète

interdit ! – qu'on lisait ainsi durant la messe.

En ce temps-là, qu'ils le veuillent ou non, les jeunes

échappaient difficilement à une solide éducation reli-

gieuse. Heureusement, le curé Dargaud était un pince-

sans-rire, qui faisait parfois de faciles plaisanteries, et

on racontait qu'une fois ou l'autre, à la fin de la messe,

faisant les annonces en lisant la feuille ad hoc, il avait

dit : « Il y a promesse de mariage entre... » et il avait

laissé tomber la feuille comme par maladresse et con-

tinué en disant : « entre la chaise et le banc ! »

Nous recevions aussi la visite du Père de Bréchard,

qui était bien avec toutes les femmes, et qui venait

rendre visite à ma mère depuis qu'il avait eu vent de la

possible vocation religieuse de

mon frère. D'après Clotilde

Forest, c'est ma mère qui avait

voué mon frère à la prêtrise,

s'il guérissait du tétanos ! Mon

frère avait donc été mis au petit

séminaire Saint-Hugues, tandis

que moi, je commençais à

m'installer sur l'établi de tail-

leur et à apprendre le métier.

Une fois, le Père de Bréchard

était entré dans l'atelier, m'y

avait vu, et avait deman-

dé si j'étais intelligent,

et si je ne pouvais pas

faire mieux que le mé-

tier de tailleur d'habits.

« Réfléchissez-y ! » Et il

avait laissé un livre, une

grammaire latine, je

crois, en me disant de

l'apprendre. J'avais ap-

pris, et quand il était

revenu nous voir, il

avait décidé que je pou-

vais entrer en sixième, fin septembre, tandis que mon

frère, de deux ans moins âgé que moi, était déjà en

quatrième ou en troisième. En un an ou deux de travail

acharné (je faisais systématiquement tous les exercices

de tous les livres, et le programme de plusieurs années

en une seule), j'avais rattrapé mon frère en seconde, et

en fin de seconde, j'avais une meilleure moyenne que

lui, grâce aux maths. Mais ma mère, me semblait-t-il,

gardait une préférence pour son René, qui voulait de-

venir prêtre ! D'ailleurs, à Saint-Hugues, mon frère

déjeunait au grand restaurant pour 4 francs, tandis que

je mangeais au petit restaurant, pour 1 franc. Je n'en

étais pas mécontent, il y avait des fayots, et au dessert,

de la confiture de tomates. C'est donc au père de Bré-

chard que je dois d'être devenu un travailleur intellec-

tuel, alors que mes parents hésitaient à faire des dé-

penses pour prolonger l'instruction de deux enfants et

n'envisageaient pas pour un enfant de métier intellec-

tuel autre que la prêtrise.

C'était pendant la Deuxième Guerre mondiale. Au dé-

but de la guerre, en 1939, Rémy a été mobilisé en tant

que « vieille classe » à Troyes où, vu son métier, il

repassait les pantalons des officiers. Au moment de la

défaite, il réussit à échapper à pied ou en vélo aux

mailles du filet de l'armée allemande et à éviter d'être

fait prisonnier, en rentrant comme il put à Paray, où il

eut un jour la maladresse de se montrer en habit mili-

taire à la fenêtre de la maison ; il comprit vite le

risque, et se changea... Durant les dernières années de

l'Occupation, il fut réquisitionné les nuits pour surveil-

ler les lignes de chemin de fer, avec le risque d'être

fusillé si les résistants en faisaient sauter. La vie maté-

rielle était dure. Nous nous nourrissions des produits

de deux petits jardins que

mon père avait loués non

loin de chez lui. D'après

Jeannette Roy, dont le père

avait un jardin voisin, il se

faisait un point d'honneur à

avoir les premières fraises,

qu'il offrait à la petite fille.

J'y travaillais avec lui, mal-

gré le handicap de ma jambe

atrophiée. Coublanc et ses

ressources étaient à une cin-

En ce Temps-là 2013 Page 33

quantaine de kilomètres, mais surtout de l'autre côté

de la ligne de démarcation qui, à Paray, suivait le ca-

nal.

Pendant l'occupation, Rémy eut la faiblesse de sympa-

thiser avec un officier allemand, un des responsables

de la troupe d'occupation, mais peu fanatique. Cet of-

ficier avait besoin des services d'un tailleur, notam-

ment pour repasser ses pantalons : les deux anciens

combattants causaient en évoquant les idioties meur-

trières de la première guerre. Ma mère, qui était ba-

varde, ne gardait pas le mutisme de l'héroïne du Si-

lence de la mer envers cet officier, dont je me sou-

viens qu'il s'appelait Siegfried Witke, et qu'il faisait

son possible pour limiter, en faveur des Parodiens, les

ennuis de l'occupation. À la Libération, on a reproché

à mon père cette fréquentation, et il a été victime de

l'épuration, notamment par suite des menées de

« résistants » souvent de la dernière heure : il a été

emprisonné deux ou trois mois à Dijon. Pendant ce

temps, les voisins qui tenaient le magasin Casino, dont

la sympathie allait aux éléments communistes des ar-

mées et des maquis qui remontaient du sud de la

France, voulaient faire subir un mauvais sort à ma

mère : je me souviens d'être intervenu dans la rue, de-

vant le magasin, pour la défendre. Par manque de

chance, le maire de Paray, M. Desrichard, qui avait de

l'amitié pour mon père, avait été tué par un obus juste

avant la Libération [en fait, il était mort en déporta-

tion. Ndlr]. Les mois d'absence de mon père furent

durs. Ma mère servait d'infirmière à l'hôpital, en plus

de la tenue du magasin.

Mon père reçut, quand il fut élargi, l'interdiction

d'exercer à Paray-le-Monial et dans le département de

Saône-&-Loire. Son beau-père Rémy Joly était mort

en 1943, et il aurait pu s'installer tailleur à la Place,

sans l'interdiction. Il vint aussi près que possible : c'est

à Charlieu qu'il rouvrit un magasin, pour quelque

temps ; il s'y sentait bien. Mais Maria, sa femme, l'a

poussé à revenir à Coublanc, dès que ce fut possible,

pour venir habiter à côté de sa mère devenue veuve.

Vers 1937, Rémy avait acheté au maréchal-ferrant

Fouillet une maison à la Place, au-dessus de la maison

de son beau-père. Le couple, désormais sans enfants

(nous avions pris notre envol, moi vers Lyon, René

vers Autun ou Rome), s'y installa, jusqu'en 1957, date

de la mort d'Émilie Joly.

Les premiers temps à Coublanc ne furent pas faciles.

Même là, Rémy a été mal accueilli par quelques per-

sonnes – des voisins de la Raterie – faisant du zèle de

pureté contre l'espèce de collaborateur, pensaient-ils,

qu'avait été mon père. Mais bientôt les tracasseries,

comme des ordures déposées dans la cour de la mai-

son, ont cessé et les choses se sont régularisées, si bien

que sa gentillesse et son talent de couturier lui valu-

rent à nouveau l'estime générale. Aujourd'hui encore,

les Coublandis les plus vieux se souviennent d'avoir

acheté du tissu chez la Maria, ou fait faire un costume

chez Rémy, et peut-être portent-ils encore ce costume

dans les grandes occasions, car le tissu était aussi bon

que la coupe. À cette époque encore, il avait des aides

ou des apprentis. Par sympathie avec moi, il avait en-

gagé un apprenti qui boitait, Paul Imbert, originaire de

Montchanin ou de Montceau.

En 1947, mes parents ont eu un troisième fils, mort-né

le 2 février. Ma mère était déjà âgée de 45 ans ! Ce fils

s'appelle Bernard et est enterré au cimetière de Cou-

blanc. On voit encore son nom sur la tombe où il fi-

gure, accompagné d'une seule date, au-dessous de ce-

lui de l'aïeul Philibert Leaumorte. C'est là que sont

enterrés mes parents, qui les ont rejoints, mon père en

décembre 1965, et ma mère en 1967.

Rémy n'était pas aussi pieux ni aussi dévoué à l'Église

que son frère Pétrus, mais avec Maria, ils avaient plu-

sieurs filleuls : Pierre Desnoyer, fils de sa sœur Élise,

mariée à un Desnoyer de Ligny, puis Madeleine Ber-

thier, fille du Pétrus, future épouse de Maurice Barri-

quand, enfin, leur petit-fils Bernard Berthier. Mais ce

qu'ils avaient principalement fait pour l'Église, c'est de

lui avoir donné leur second fils, mon frère René, or-

donné fin juin 1951 à Saint-Igny-de-Roche !

À la mort d'Émilie, mes parents se sont installés dans

la belle maison de pierres jaunes de Rémy Joly, et ont

loué leur maison à des vacanciers lyonnais ou greno-

blois. Par suite de mon mariage et de la naissance de

Bernard (1951) et Jean (1952), mes parents sont deve-

nus grands-parents, et de bons grands-parents, malgré

la distance. Ils sont venus nous voir à Saint-Michel, à

l'époque où je travaillais à l'Observatoire de Haute-

Provence, et à Grenoble, pour des communions solen-

nelles. Nous allions régulièrement les voir en voiture à

Coublanc, durant les vacances d'été ou de Noël. Mon

père pêchait dans le crau avec ses petits-enfants, ou les

emmenait faire un tour en bicyclette. Il leur montrait

ses poules, et surtout ses lapins, qu'ils allaient nourrir

dans l'écurie de l'autre maison. Comme j'avais fait

avec mes grands-parents Joly, nous jouions avec les

enfants à la manille ou au tarot. C'est là, dans les an-

nées 60, que j'ai découvert la télévision, à l'écran fré-

quemment orné de neige, que mon frère René avait

voulu leur offrir. À soixante ans passés, mes parents

diminuaient progressivement leur activité profession-

nelle, mais jusqu'au bout mon père a travaillé pour la

famille. L'établi, les craies, la collection de gros ci-

seaux, la psyché étaient encore en place, tandis que le

magasin avait fermé, et que la banque servait de table

de ping-pong aux enfants.

Rémy était un homme naturellement de bonne humeur

et gentil, beaucoup plus drôle que son frère Pétrus.

Pétrus chantait à l'église et s'entraînait chez lui, à La

Roche, à chanter des cantiques religieux ou bibliques,

comme « Les Mines du Cédron ». Rémy, accompa-

gnée de sa couturière (une certaine Marmore à une

époque), chantait des chansons d'amour sur son établi.

Il aimait bien rigoler, s'amuser. Il avait ses proverbes,

venus de je ne sais où : « Chez moi, je suis chez ma

femme. Dans la rue, je suis chez moi », ou bien : « La

En ce Temps-là 2013 Page 34

vie est dure, les femmes sont chères, et les enfants si

faciles à faire » ou encore : « Là où la chèvre est atta-

chée, elle broute. » Nous faisions des marches vers

Serpulin, jusqu'à une vigne qui lui venait des Joly, et

qui faisait un méchant vin blanc, dit « vin de noix »,

où vers le « Verger du roi Louis », au-delà de la ferme

où se succédèrent ses fermiers Lauriot puis Auclerc,

chez qui il allait chercher le lait le soir, dans la nuit,

avec ses petits-enfants. Ou encore, le dimanche, nous

allions voir à pied la Madeleine d'Écoche

(Melle Prajoux), une cousine par les Leaumorte, qui

tenait l'épicerie-café du Bourg d'Écoche avec la Mélo

Duffy, et qui était aussi modiste.

Rémy avait une bonne santé, apparemment, mais de-

puis longtemps, depuis la guerre peut-être, son cœur

battait de manière irrégulière. Un jour, le 7 décembre

1965, il était allé chercher en mobylette, à Chauf-

failles, des médicaments pour sa femme, qui souffrait

du diabète et devait souvent se faire des piqûres. Au

retour, il avait dû s'arrêter au Bourg de Coublanc, pour

une affaire à traiter à la mairie. Sa mobylette n'avait

plus voulu redémarrer spontanément, il avait peiné à

la relancer, et en remontant par le chemin de terre qui

part du bas des Génillons, qui longe la maison Desser-

tine avant de rejoindre la route vers les Druère, à la

Gâterie, il s'était effondré, le cœur épuisé. Il avait

69 ans seulement. Son visage était méconnaissable,

avait dit son frère Pétrus venu le reconnaître ; mais sur

son lit de mort, dans la maison Joly, il avait retrouvé

sa fraîcheur et même un certaine jeunesse, quand nous

étions arrivés de Grenoble, de nuit, en passant par le

Lyon illuminé du 8 décembre. Nous suivîmes à pied

son corbillard tiré par un cheval.

Sa veuve Maria, ma mère, minée par le deuil et le dia-

bète, a passé, sans lui, deux très mauvaises années,

d'abord chez elle, et enfin dans une maison de retraite

tenue par des Carmélites à Sainte-Foy-lès-Lyon, où

elle est morte le 21 novembre 1967.

Propos recueillis auprès de Pierre Berthier

par Bernard Berthier, à Lyon, en 2011-2012.

L’histoire des poilus

Notre revue, de concert avec le site Internet Cou-blanc-71, ambitionne d’écrire l’histoire des poilus de notre village. La tâche est ample. Le monument aux morts du Bourg de Coublanc re-cense 66 noms. La plaque de la mairie en compte autant. Les poilus dont le nom figure sur ces deux documents − le Bulletin de Coublanc 2014 reproduit une photo du second − ne sont pas tous nés à Cou-blanc. Certains y ont peu vécu. Le nom de certains figure aussi sur des monuments aux morts d’autres communes. Nous avons, de plus, repéré des Coublandis morts à la Grande Guerre, dont le nom ne figure pas sur notre monument, et figure, ou non, sur des monu-ments d’autres communes, où ils avaient été s’instal-ler avant guerre. Le canton de Charlieu a publié vers 1920 un livre d’or des combattants morts pour la France : cela nous a aidés dans notre recherche. Certains fiches sont accompagnées de photos : en voici deux des frères Jean et Louis-Jean Boyer de l’Orme, inscrits sur le monument de Saint-Denis-de-Cabanne. L’article qui suit prend en compte ces poi-lus, à le différences des listes que nous avons pu-bliées dans les revues de 2005 à 2007. Cependant, nous ne sommes pas sûrs de les avoir tous retrou-vés ! Mais ne parler que des « morts pour la France » se-rait très réducteur. Il y a aussi tous ces jeunes hommes partis de Coublanc, qui y sont revenus, blessés physiquement ou moralement, dont une trentaine de pensionnés et quelques « gueules cas-sées ». Il faudra aussi que nous fassions l’histoire de ces poilus, d’ailleurs commencée dans notre numéro de 1998, pages 12 à 14. Ceux-là, à la différence de la majorité de ceux qui sont morts, ont eu une des-cendance, dont nous sommes le produit ! Le site Internet Coublanc-71 a entrepris de lister et de ficher tous les noms retrouvables. La revue tâche de parler des personnes de manière plus large, avant et après la guerre. Par exemple, dans ce nu-méro, il est question de deux poilus survivants, au moins, Joseph Chassignolle et Rémy Berthier. Il ne tient qu’à vous, lecteurs, de collaborer à cette tâche en nous faisant connaître les photos, souvenirs ma-tériels et récits familiaux de vos ancêtres qui ont « fait » 14-18…

La rédaction

Rémy et Maria avec leurs deux petits-fils

En ce Temps-là 2013 Page 35

Tous nos poilus

morts en 1914

La mobilisation du 2 août et l'entrée en guerre du 4 août vont vider Coublanc d'un grand nombre de jeunes gens, de 20 à 45 ans, sans doute plusieurs centaines ! La mor-

talité des premiers jours de guerre en particulier, et des cinq premiers mois plus généralement, est effroyable :

non pas 15, comme l'indique le Monument aux morts de Coublanc (MC), mais, avec 9 autres retrouvés par Claude Franckart et moi, 24 jeunes hommes nés à Cou-

blanc ou venus y habiter vont périr en cinq mois et se-ront reconnus « Morts pour la France » (MPLF). Pour mieux comprendre leurs notices biographiques,

résumons les opérations : - L'armée française tente de percer en Alsace-Lorraine,

mais est rejetée vers la Meuse (août et début de sep-tembre). Beaucoup de Coublandis meurent dans ces opé-rations.

- Les Allemands percent au centre, prennent Reims, ap-prochent de Paris, mais sont repoussés à la première ba-taille de la Marne (début septembre) et reculent large-

ment. - En octobre, les Alliés (Français, Anglais et Belges) empêchent les Allemands de couper la liaison avec la

Manche et la Mer du Nord. C'est la « course à la mer », qui entraîne la bataille des Flandres, très meurtrière, no-

tamment en Coublandis. - La guerre de mouvement cesse fin novembre et en dé-cembre, pour faire place à la longue guerre de tranchées :

deux lignes continues qui vont de la mer du Nord à la frontière suisse.

Le 134e RI, caserné à Mâcon, enrégimente

beaucoup de Coublandis. Six d'entre eux vont

y mourir.

1. Joannès Gonin est le quatrième enfant d'Antoine, cultivateur à Saint-Igny, et de Claudine Trouillet. Avant

lui, une petite Augustine-Marie, née en 1872, n'a vécu que quelques mois. Sa cadette, née en 1874 a repris son nom et épousera Marie-Joseph Grizard en 1901. En 1879

naît Jean-Marie, puis, après notre Joannès, Benoît, né en 1889, qui meurt lui aussi à la guerre en 1916, laissant Antoinette Tacher veuve à Saint-Igny. Joannès Gonin

est né le 30 juillet 1881, à Saint-Igny. En 1907, il épouse, à Coublanc, Maria Holveck. Il est de trois mois le cadet de son concitoyen Joseph Badolle, avec qui il

part à Mâcon pour être recruté au 134e RI (matricule 547). Il monte en train vers la Moselle avec ses 3400

compagnons, hommes et officiers recrutés à Mâcon. Il meurt, « tué à l'ennemi », le 31 août, à Magnières, dans la Meurthe-&-Moselle, tout près de Rozelieures où se

sont déroulés de violents combats, au cours d'une attaque qui échoue. Sa guerre n'aura pas duré un mois. La trans-cription à Coublanc tardera jusqu'en 1920. MPLF. MC.

2. André-Joseph Lacôte, né le 21 novembre 1884 à

Foron, est le fils d'un propriétaire cultivateur, Jean-

Benoît, et de son épouse Marie Philomène Accary. Ceux-là n'ont su faire que des garçons : quatre avant André, un après. De trois d'entre eux, on sait qu'ils se marièrent,

Jean-Joseph avec Marie-Antoinette Berthier, Antoine avec Marie Crost, et le petit Joseph avec Pierrette Chas-

signolle. André, devenu tisseur, se maria aussi, en 1908, à Coublanc, avec Marie-Julie Auvolat. Six ans de « bonheur conjugal », qui sait ? Une fille, Marie-

Philomène-Alice, née en 1911. Et des cousins germains Lacôte à pleines panerées, dont la guerre va prendre la fleur.

Il est recruté à Mâcon (matricule 173, mais 75 selon un autre acte) et incorporé au 134e RI. Après les massacres

subis fin août (1/3 de l'effectif !), le régiment a été trans-féré du côté de Saint-Mihiel. André Lacôte meurt « tué à l'ennemi » à Bois-Brûlé, commune d'Apremont, le

1er octobre. Une attaque vigoureuse déclenchée à 9 heures du matin au son de trois coups de canon a échouée devant la résistance des Allemands. Notre Cou-

blandi est resté sur le terrain... La transcription de son acte de décès à Coublanc aura

lieu rapidement : le 18 avril 1915. Qu'est devenue la pe-tite orpheline de 3 ans ? MPLF. MC.

3. Claude-Auguste Dubois, tisseur, cultivateur, ouvrier en soie, et son épouse Mariette Vermorel, tisseuse, ont eu beaucoup d'enfants. Il y en a eu six, dont quatre sont

morts entre 0 et 18 ans. Deux seuls, un garçon et une fille, arriveront à l'âge du mariage. Puis naît Lazare, à Génillon, le 15 novembre 1882. Sa mère mourra quand il

aura 11 ans, et son père se remariera en 1898 avec Clau-dine Adèle Chambrade, dont il aura un fils. La jeunesse

de Lazare Dubois a donc été marquée par la mort. En 1914, il résidait au Bois d'Oingt, mais comme les autres Coublandis, il est recruté à Mâcon (matricule 524) pour

le 134e RI. Moins de quarante jours plus tard, il meurt des suites de ses blessures mais est considéré comme « tué à l'ennemi », le 8 octobre, lui aussi dans la forêt

d'Apremont. La transcription sera faite à Coublanc en août 1915. MPLF. MC.

4. Joseph Badolle est le fils de Claude-Marie, déclaré « employé » à Cadolon, et de Marie-Thérèse Lacôte. En

76 et en 78, les deux premiers enfants du couple n'ont pas vécu. Adèle-Alvina, née en 1979, épousera Jean Bu-chet en 1904. Benoît-Joseph naît à Saint-Igny le 20 avril

1881. Louise et Marie-Philomène lui succèdent en 84 et 87. Le père meurt en 1890, la mère en 1898. Geneviève Lacôte, descendante de Louise, parle de cette fratrie dans

le numéro de 2011 de notre revue, page 25. Joseph est donc orphelin depuis 16 ans quand il part au

recrutement à Mâcon à l'âge de 33 ans. Il est tisseur, et célibataire. Il est soldat au 134e RI de Mâcon (matricule 563), qui est

transféré dans la Meuse en septembre. La guerre se stabi-lise. La routine des premières tranchées commence. Le 14 octobre, les positions de 1e ligne sont renforcées avec

du fil de fer. Des couvertures sont distribuées aux hommes. Le 15 octobre, les tranchées ne peuvent plus

En ce Temps-là 2013 Page 36

être protégées. Le déboisement continue à être produit

par les projectiles explosifs allemands. Pertes sensibles. Réception de carton bitumé et de toile de tente pour per-fectionner les abris. Des gabions ont été transportés sur

le front. Le 16, toujours des canonnades, sans mouve-ment de part et d'autre. Joseph Badolle a dû recevoir un

éclat d'obus. Il en meurt, « tué à l'ennemi à la Forêt d'Apremont, dans la Meuse, le 16 octobre 1914 ». La transcription du décès n'aura lieu que l'été 1920. MPLF.

MC. 5. Julien-Benoît Thomachot, propriétaire, né en 1849, et

son épouse Thérèse Buchet, née en 1858, ont eu dix en-fants entre 1878 et 1895 ! Sur ces dix enfants, quatre ou

cinq sont morts en bas âge. Les autres ont eu une longue vie, entre 75 et 91 ans. Seul Auguste Thomachot a été fauché en plein âge mûr. Né au moment des épis dorés, à

l'Orme, le 17 juillet 1881, il est parti avec ses conscrits pour le recrutement de Mâcon (matricule 622). Il est in-tégré au 134e RI, comme les précédents. Il leur survivra

de quelques semaines, tué à l'ennemi le 15 novembre. Au Bois Brûlé, commune d'Apremont dans la Meuse, la

nuit de 13 au 14 novembre a été rude. Les Allemands ont pris « un élément de tranchée » à la 1e compagnie, mais la 4e contre-attaque et repousse l'ennemi, en tue beau-

coup et fait 21 prisonniers. C'est un jour et demi plus tard, le 15, durant la routine des bombardements alle-mands au canon de 105, ou dans les fusillades qui s'en-

suivent, qu'Auguste est mortellement touché, à 33 ans. Le jugement sera transcrit à Dijon en 1915. MPLF. MC.

6. Marius Lavenir est le premier enfant de Claudius, tisseur, et de Mariette-Philiberte Devillaine, tisseuse, de

douze ans sa cadette. Il est né le 24 mars 1892 dans la maison familiale du Bois Gauthay. Entre 1894 et 1905, le couple aura sept enfants, le premier et le quatrième

mort-nés, semble-t-il, tous des garçons, dont l'un, Fran-cisque, épousera en 1930 une dame, Clotilde, née en 1902, qui est morte centenaire à Coublanc (cf. revue de

2002, page 2). Marius s'est éloigné de Coublanc : avant son service, il est jardinier à Ambérieux.

Marius a été incorporé le 10 octobre 1913, à l'âge normal de 21 ans, et son service militaire s'est transformé en conscription guerrière. Comme beaucoup d'autres Cou-

blandis, il est recruté à Mâcon (matricule 316) et intégré au 134e RI. Son parcours est donc identique à celui de ses camarades, et il meurt, dans une fusillade ou un bom-

bardement, le 18 novembre dans un endroit où cinq autres Coublandis sont morts depuis un mois et demi, dont Auguste Thomachot trois jours avant lui ; il est

« tué à l'ennemi » au Bois Brûlé, à Apremont. Le journal de marche note seulement, ce jour-là : « Beaucoup

d'hommes ont les pieds gelés ». Le jugement de décès sera transmis à Coublanc le 28 septembre 1915. MPLF. MC.

Autres régiments impliqués dans les mêmes

actions

7. Notre revue 2013, page 8, sous la plume de sa petite-nièce Germaine, a parlé de Félix Martin, propriétaire,

cultivateur, et de son épouse Benoîte-Marie Lachassagne

et évoqué leurs cinq enfants. C'est l'aîné que nous allons suivre ici. Auguste-Claudius Martin est né à La Croix le 10 avril 1893.

Augustin, comme on l'appelait, était donc encore bien jeune en août 1914 : 21 ans ! Il a pourtant été recruté

après sans doute un petit temps de service militaire, à Mâcon (matricule 590). Il a été incorporé au 21e Bataillon de Chasseurs à pied. Le 14 août, le batail-

lon, perçant en Alsace, prend le Donon. Le 18, il protège le passage du 21e Corps d'armée qui marche en direction de Sarrebourg. Les Allemands contre-attaquent, et le col

du Donon et le petit Donon sont le lieu de combats fé-roces, avec bombardements et fusillades, dans les jour-

nées du 20 et 21 août. Augustin est tombé au Donon « tué à l'ennemi » le 20 août, comme deux autres Coublandis dans d'autres com-

bats. Sa guerre aura été fort courte. Le journal de marche de son bataillon note son matricule au corps (3636) et son nom parmi les 13 chasseurs tués. C'est au Donon,

commune de Grandfontaine (Bas-Rhin), que repose son corps, dans l'ossuaire 1 de la nécropole.

Son acte a été transcrit le 12 février 1915, à Saint-Igny-de-Roche, où ses parents s'étaient depuis longtemps ins-tallés et où son père lui survivra 34 ans ! Son nom figure

au monument aux morts du village. MPLF. 8. La famille Lacôte était nombreuse : c'est une tautolo-

gie. Mais laquelle ? Il y en avait au moins deux à Foron, et toutes les deux prolifiques. Celle dont les parents étaient Claude-Constant, cultivateur, et Françoise Acca-

ry, son épouse, a eu dix enfants, tandis que l'oncle Jean-Benoît, père du cousin poilu décédé Joseph, n'a eu que

six garçons. Est née d'abord une fille, puis six garçons, puis deux filles et un garçon, de 1882 à 1898. Plusieurs étaient mariés avant guerre, mais pas Antoine Lucien

Lacôte, le cinquième de la famille, né à Foron le 11 décembre 1888, cultivateur comme ses parents et en-core célibataire à 25 ans, quand la guerre a été déclarée.

Recruté à Mâcon (matricule 1059), il est incorporé au 56e RI, comme Cyrille Auclair, qu'il va précéder de cinq

jours dans la mort. En effet, il meurt, dans la terrible journée du 20 août, tué à l'ennemi, à Saint-Jean de Bas-set, village voisin de Gosselming, dans la Moselle.

Le jugement et la transcription à Coublanc se feront au printemps 1921. Les restes d'Antoine reposent dans la nécropole nationale de Gosselming, ossuaire 1. MPLF.

MC. 9. Marius Grapeloup est né le 24 mai 1893 à Coublanc.

Il est le troisième enfant de Jean-Napoléon, tisseur, et de son épouse Françoise Lathuillière, tisseuse. Dix ans plus

tôt sont nés les jumeaux Claude et Benoîte-Marie, qui épouse en 1906 Joseph-Benoît-Marie Devillaine. Marius est allé travailler la terre à Saint-Laurent-en-Brionnais, et

est célibataire au moment de son service militaire fait dans le 6e Régiment d'Infanterie Coloniale depuis le 24 décembre 1913. Il passe du service à la guerre, recruté à

Mâcon (matricule 521). Avec les deux précédents, il est l'un des trois Coublandis morts dès le 20 août ! Il est

En ce Temps-là 2013 Page 37

« tué à l'ennemi » mais son corps a disparu. Retrouvé, il

est inhumé dans la nécropole nationale de Walscheid, tombe 29. Le village de Walscheid fut l'ultime avancée de l'armée française qui avait envahi la province alle-

mande de la Lorraine en descendant le Donon et prenant position sur la butte du Saint-Léon et à l'ouest du village,

le 18 août 1914. L'armée allemande venant de Saverne par la vallée de la Zorn prit position à l'est. Le 19 août 1914 à 5 h du matin la bataille de Walscheid s'engage

par un duel d'artillerie par-dessus le village, puis par des corps à corps à la baïonnette quand des chasseurs bava-rois prennent à revers le régiment colonial au Saint-Léon

en passant par les sentiers de montagne. Les avions jet-tent des shrapnels. 800 morts (environ 400 de part et

d'autre) et 1 200 blessés militaires furent recensés en deux jours. MPLF. MC. Décès fixé par jugement du tribunal de Charolles du

23 juillet 1920, transcrit en août à Coublanc. 10. Benoît Auclair, tisseur, et son épouse Antoinette La-

combe, de six ans son aînée, ont engendré six enfants. Les trois garçons vont faire la guerre de 14.

L’aîné, Claudius, né en 1886, épouse Marie-Joséphine Bidaud en 1910. Il survivra à la guerre, et sera le père d’Antonin Auclair. Notre revue en a déjà parlé en 2010

(page 36). Le cadet, Antonin, né en 1889, est tué en 1915. Nous en parlerons l’an prochain. Cyrille naît le 3 février 1892, à la Raterie. Viennent ensuite Marie-

Thérèse, Victor, qui n'a pas vécu, et Victorine… La photo qu’on a de Cyrille Auclair (cf. revue de 2007, page 9) montre un beau et grand jeune homme. C’est un

paysan encore célibataire, qui passe directement du ser-vice militaire à la guerre. Il est incorporé à Mâcon

(matricule 250) lors de la mobilisation, au 56e RI, qui part le 4 août, franchit la frontière (celle de 1870) le 20 août 1914, attaque Gosselming. Le village est pris et

abandonné, 1/3 du régiment est hors de combat ; plus de 600 soldats sont tués. C'est dans ce combat que meurt son camarade Antoine Lacôte. Les Français reculent

jusque vers Nancy. Les 24 et 25 août, les Allemands at-taquent cette position de repli et Cyrille disparaît le 25 au

cours du combat d'Essey-la-Côte. Une ambulance re-trouve son corps (identifié grâce à sa plaque « et aux autres effets dont il était le détenteur ») le 29 sur le

champ de bataille de Vennezey (Meurthe-&-Moselle). Décès fixé par jugement du tribunal de Charolles du 25 août 1917 et transcrit le 7 octobre suivant à Coublanc.

MPLF. MC. 11. Claude Grapeloup, tisseur et propriétaire, et son

épouse Marie-Joséphine Monchanin, tisseuse, ouvrière en soie, ont eu beaucoup d'enfants. Le futur poilu

Claude Marie Joseph Grapeloup est le dernier, né le 23 septembre 1883 en Bourguignon. Ses quatre premiers frères et sœurs, nés entre 70 et 77, n'ont pas vécu plus de

14 ans, semble-t-il. Les deux sœurs qui l'ont précédé, Marie-Louise et Clotilde ont eu une plus longue part de vie.

Joseph avait fait son service militaire au 134e RI à Mâ-con, et avait épousé Augustine Holveck en avril 1909 : il

était devenu par là le beau-frère de Joannès Gonin. De

cette union, Marguerite venait de naître le 24 mai 1914. Mais il a été rappelé à l'activité par la mobilisation géné-rale le 12 août et affecté en renfort au 334e RI. Matricule

378 au recrutement à Mâcon. Le régiment est dirigé vers l'Alsace, pour contenir la

poussée allemande, et se bat ensuite autour de Saint-Dié. Le 28 août, à 3heures, le régiment quitte son bivouac et se dirige sur le rentrant de bois situé à l'est du point 526

où il stationne pendant une demi-heure. Ensuite il se di-rige en colonne double sur les hauteurs au sud d'Anozel à travers bois. [...]. Il surprend les Allemands qui éva-

cuent le village. Le reste du régiment s'établit sur les hauteurs face à Saulcy. Une charge à la baïonnette est

exécutée vers 11h et des groupes ennemis se replient sur la lisière est de Saulcy. À douze heures, le 334e fouille le village d'Anozel, re-

joint par un bataillon du 229e. Après quoi le régiment prend une formation de rassemblement dans les bois au S.O. d'Anozel. À 13h30, deux obus de 105 allemands

explosent dans ses rangs, en tuant quatre hommes et en en blessant dix autres dont un sous-lieutenant et un adju-

dant. Le régiment quitte cet emplacement pour rejoindre la lisière du bois vers le point 526. Là, l'ordre est donné de se porter à nouveau vers Azorel en se tenant à droite

en échelon et en arrière du 229e. Parmi les morts du jour, le corps de Claude Grapeloup n'a pas été reconnu, ou du moins il a fallu un jugement

du 13 avril 1920 pour le déclarer MPLF, « tué à l'enne-mi » à Mandray (Vosges), juste à côté d'Anozel, et re-connaître qu'il est enseveli dans la nécropole nationale

de Saulcy-sur-Meurthe (tombe 633). Sa guerre aura duré 16 jours... MC.

Sa fille, la petite Marguerite, a été déclarée pupille de la nation le 30 janvier 1920.

12. Claude Boyer, tisseur, et son épouse Claudine-Marie Sirot, tisseuse, ont eu cinq enfants, trois filles d'abord, dont la vie fut plutôt longue, sauf pour la seconde, puis

deux garçons, qui tous deux moururent à la guerre, tous deux dans les premiers mois. Terrible tribut payé à la

patrie. Jean Boyer est né le 14 avril 1891 à l'Orme. Il est lui-même devenu tisseur, mais sans doute à Saint-Denis-de-

Cabane, bien qu'il soit resté célibataire. Il accomplissait son service actif au 159e Régiment d'Infanterie à Brian-çon au moment de la mobilisation. Au recrutement, à

Roanne, il reçoit le matricule 637. Il part avec son régi-ment, de Briançon. Un des trains a un accident à Sa-vines. Quatre morts. On laisse des blessés à l'hôpital de

Gap. On débarque près de Belfort. On passe la frontière le 18. Le 19 août, combat à Altkirsch. Le baptême du feu

fait 800 morts ou blessés ! Le 22 août, en arrière, la 11e compagnie est anéantie par une collision ferroviaire avec un train d'artillerie : 85 morts et quasi autant de

blessés. Le régiment se bat un mois durant dans les Vosges, autour du col de la Chipotte, pris et repris plu-sieurs fois par les adversaires. Jean Boyer meurt à

23 ans, « tué à l'ennemi », le 17 septembre, à Saint-Benoît, devenu depuis Saint-Benoît-la-Chipotte, entre

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Baccarat et Saint-Dié. C'est là que ses restes reposent

dans une nécropole nationale, dans la tombe 873. Mé-daille militaire et croix de guerre. Le 8 mars 1915, le jugement est transcrit à Saint-Denis-

de-Cabane, où son nom figure sur le monument. MPLF. Notons que pas moins de 37 poilus portant le nom de

Jean Boyer sont mort à la guerre !

13. Grégoire Déverchère, cultivateur, et son épouse Jeanne-Françoise Dejoux, de huit ans sa cadette, ouvrière

en soie, n'ont eu que deux enfants. Le second est une fille, Claudine-Marie, née en 1885. L'aîné, Joanny Dé-

verchère, est né le 16 novembre 1880 à Carthelier, d'une

mère de 20 ans. Devenu tisseur, il s'est marié à Tancon en avril 1907, avec Antoinette-Marie Nevers. Le couple,

qui n'a pas eu d'enfant, est allé s'installer à Pouilly-sous-Charlieu. C'est là que l'ordre de mobilisation a touché Joanny. Il s'est rendu à Roanne pour le recrutement

(matricule 1596) et a été incorporé au 99e RI. Le régiment, qui part de Lyon le 6 août, débarque à Épi-nal, entend le canon pour la première fois le 12, passe la

frontière de l'Alsace-Lorraine le 15, se bat héroïquement dans les Vosges, mais est contraint au repli vers Saint-

Dié, peut de nouveau progresser après la défaite alle-mande sur la Marne. Le front stabilisé dans les Vosges, le 99e est envoyé dans la Somme le 18 septembre. On

essaie de prendre les Allemands de vitesse, dans leur recul, mais le front s’immobilise et la guerre de tran-chées va commencer. Joanny Déverchère, qui s'est si

bien battu qu'il a reçu la médaille militaire et la croix de guerre avec étoile de bronze, meurt « tué à l'ennemi » dans la bataille d'Herleville, non loin de Péronne, le 25

septembre. Il est inhumé à Vermandovillers (Somme). Le décès est fixé par jugement du Tribunal de Roanne du

06/09/1918, avec transcription quasi immédiate à Pouilly-sous-Charlieu. MPLF. Monument de Pouilly.

14. Claude-Marie-Vital Narboux, cultivateur, et son épouse Claudine Millet, habitant, semble-t-il, Montber-nier, ont eu une demi-douzaine d'enfants : Claude, né en

1876, a épousé Louise Buisson ; Marie-Pélagie n'a pas vécu ; Marie-Léonie, née en 1880, a épousé en 1912

Louis Vallet ; Marius a vécu de 1881 à 1963 et Claudine née en 1883 a épousé Émile-Prosper Villard en 1909. Adolphe-Joseph Narboux, né en dernier le

11 septembre 1887, est allé prendre femme dans la Côte roannaise, à Chérier : en avril 1912, il épouse Antoinette Oblette. Leur vie conjugale ne durera pas longtemps :

Adolphe est recruté avec le matricule 698 à Mâcon ; il est incorporé au 21e Bataillon de Chasseurs à pied, comme Auguste Martin. Il survivra un peu plus d'un

mois à son camarade. Après le Donon mangeur d'hommes, le bataillon participe aux combats du col de la

Chipotte, puis à la bataille de la Marne, avant de remon-ter vers les Vosges. Adolphe tombe le 27 septembre à la scierie de la Turbine, d'un « coup de feu reçu au com-

bat », dans la commune de Celles-sur-Plaine (Vosges). Il est inhumé dans la commune proche de Ban-de-Sapt, à la nécropole nationale La Fontenelle, tombe 20. La trans-

cription a été faite en septembre 1920, à Roanne, où sa veuve devait habiter. MPLF.

15. Il n'y a pas que les Lacôte, les Villard aussi forment

des familles nombreuses. Au Bois Gauthay, Pierre Vil-lard, tisseur, et son épouse Marie-Valentine Chavanon, tisseuse, ont donné le jour à neuf enfants : Marius, Noé-

mie, Émile, qui sera le père des Villard de la Raterie, Marie-Félicie et Marie-Honorine. Tous ceux-là se marie-

ront et vivront assez longtemps. La naissance de Firmin

Villard, notre poilu, est encadrée par celle de Pierre et de Jean, qui ne vivront pas. Puis viendra Marie-

Victorine, née en 1883, année de la mort de son père. Firmin est donc né le 28 mai 1881 (la fiche MPLF dit le 21) et a épousé le 3 février 1910, à Mars, Marie-

Claudine Forest. Il n’aura pas d’enfant. Recruté à 33 ans, à Mâcon (matricule 587), il est incorporé au 5e Régiment

d'Infanterie coloniale. Ce régiment est débarqué le 7 août à Dounoux, près d'Épinal, et commence les vraies hostilités le 19 août en

attaquant vers Walsheid. Il se bat dans les Vosges, vers Baccarat, Raon-l'étape, le col de la Chipotte fin août. En septembre, mêmes champs d'opérations : il s'agit de dé-

fendre la rive gauche de la Meurthe, entre Raon et Thia-ville. Le 25 septembre, le régiment quitte le front de Lor-

raine et part en train pour Toul. Il va cantonner à Giron-ville. Firmin meurt alors, « tué à l'ennemi », le 28 septembre 1914, à Apremont, comme beaucoup

d'autres Coublandis. Médaille et Croix de guerre. Le jugement et sa transcription à Charolles (pourquoi ?) auront lieu en juillet-août 1920, et son nom figure sur le

monument au morts de Mars. MPLF. 16. Claude-Marie-Césaire Berthier est le premier en-

fant de Claude, tisseur, et de Marie-Césarine, tisseuse, son épouse. Viendront après lui Jean-Claude (1887) et

Marie (1891), future épouse, en 1943, de Paul Audin. Lui est né le 28 mai 1884. La famille habite la Raterie – ou la Place... Il a des cousins à la Raterie, dont le futur

abbé Claude Barriquand, né en 1883. Recruté à Mâcon (ou Roanne ?) (matricule 236), il est caporal au 298e R.I, dont le casernement normal est à

Roanne. Le régiment s'y organise du 2 au 11 août. C'est théoriquement un régiment de réserve, mais il va être

vite engagé dans la guerre. Il débarque le à Vesoul le 12, et passe la frontière de l'Alsace-Lorraine le 17, se bat en Alsace, puis, le 28, embarque pour la Somme, débarque

à Gannes près de Mondidier. Début septembre, il accom-pagne la retraite sous un soleil de plomb d'autres troupes, et de civils qui fuient vers le sud-est. Derrière lui, on fait

sauter les ponts. Claude écrit souvent à ses parents, et son père s'inquiète, le 18 octobre, d'être sans nouvelles de lui. On lui répond de Roanne, le 9 novembre, qu'il a

été blessé aux combats de Vingré (Aisne) les 18-20 sep-tembre, mais qu'on en sait pas plus. En fait, si l'on en

croit la fiche MPLF, il est mort, le 6 octobre, « tué à l'en-nemi », à Vingré. J'ai tendance à penser que c'est plutôt de ses blessures des combats précédents.

Jugement rendu le 2 octobre 1917 et transcrit le 16 à Saint-Victor-sur-Rhins, où son nom figure sur le monu-ment aux morts. MPLF.

17. La famille Belot a dû n'être coublandie qu'épisodi-quement. C'était des marchands ambulants, aussi bien le

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père, François, que la mère, Amélie-Augustine De-meure, toute jeune mère de 19 ans, dont il est écrit

qu'elle était « directrice de jeux et amusements publics, marchande foraine ». Et Adolphe Belot lui-même est défini comme marchand forain. Il est né à Perreuil, entre

Le Creusot et Mercurey, le 2 avril 1893. Il n'aura, semble-t-il, qu'une petite sœur, Marie, née en 1909. Adolphe est recruté à Autun, avec le matricule 4, dans le

31e Bataillon de Chasseurs à pied. Ce bataillon se bat d'abord dans les Vosges, en couver-ture du secteur de Coinches, fait retraite fin août par

Baccarat, se bat ensuite dans la trouée de Charmes, par-ticipe à la première bataille de la Marne, passe en Ar-

tois, dans le secteur de Carency (Pas-de-Calais). C'est là que meurt Adolphe Belot, « tué à l'ennemi », le 8 octobre 1914, lors de la « course à la mer » pour em-

pêcher les Allemands de couper la France de l'Angle-terre. Son décès est fixé par jugement du tribunal de Charolles

le 23/07/1920. MPLF. MC. Le nom d'Adolphe Belot est inscrit aussi sur le monument aux morts de Perreuil.

18. Philibert Devillaine s'est marié trois fois. La pre-mière en 1879 avec Reine Vermorel, qui lui donne trois

enfants. La seconde en 1886 avec Marie-Justine Troncy, de qui naît le 25 mai 1887, dans la maison familiale du Bois Gauthay, notre Théophile-Urbain. La troisième en

1888, avec Claudine-Marie Boireaud, et voici que nais-sent neuf enfants de 1889 à 1904 ! Le premier, Antoine-Benoît, demi-frère de Théophile, va lui aussi mourir à la

guerre, en 1916. Théophile se marie en mai 1911 à Mars, avec Catherine-Julie Dury. Mais c'est peut-être à

Chandon que le couple s'établit. Au recrutement à Mâcon, (matricule 657), il est incor-poré au 12e Régiment de Hussards, signe qu'il était ca-

pable de monter à cheval. Mais, soit en Alsace, soit dans la bataille de la Marne, les hussards se battirent à pied puis vécurent dans les tranchées, comme les régiments

d'infanterie. Puis le 12e remonte vers le Pas-de-Calais, dans la « course à la mer ». Le 5 octobre, le premier

demi-régiment occupe Monchy-aux-Bois et le deuxième demi-régiment creuse et occupe des tranchées à Bienvil-lers-aux-Bois. Le lendemain, tout le régiment reçoit à

midi ordre d'aller à Fonquevillers coopérer à une attaque sur la ferme de la Brayelle. L'attaque s'exécute le 7 à 15 heures. Par ses feux, le régiment fixe les défenseurs

de la Brayelle, tandis que l'infanterie attaque Gommié-court. Le 9 octobre à 17 heures, nouveau combat à pied

à Bienvillers et renforcement par le deuxième demi-régiment de la défense d'Hannescamps. La belle con-duite du régiment à cette occasion lui vaut une citation à

l'ordre de la Division. Au cours des quatre journées de combat des 6, 7, 9 et 10 octobre, le régiment compta comme pertes 5 tués (dont,

le 10, Devillaine, « tué à l'ennemi » à Hannescamps), 28 blessés, dont 7 officiers, et deux disparus. Le jugement rendu le 1er décembre 1920 au Tribunal de

Roanne. Acte transcrit le 13 à Chandon (Loire). MPLF. Son nom n’est pas sur le monument de Chandon.

19. Théodore-Marie Dessertine, tisseur, propriétaire et ouvrier en soie, et son épouse Françoise Lusy (ou Luzy),

tisseuse, habitant au hameau du Plat à Coublanc, ont eu neuf enfants, avant le décès de Théodore et le remariage de sa veuve avec Antoine Devilaine. Précédant Henri

Dessertine, notre poilu, né le 13 novembre 1880 à Cou-blanc, il y a eu Benoît, Claudine et Claude, le troisième n'ayant vécu que neuf ans. Ensuite, quatre filles, dont la

dernière n'a guère vécu. Recruté à 33 ans à Mâcon (ou à Roanne) (matricule 571), il est incorporé au 98e RI, dont le casernement

habituel est à Roanne. 7 août, Épinal ; 20 août, Sarrebourg ; après quoi, repli

sur la Mortagne, rivière affuent de la Meurthe ; reprise de l'attaque, puis, à la mi-septembre, transport dans l'Oise, pour contribuer à la victoire de la Marne et préci-

piter le recul des Allemands. Puis le régiment s'installe durablement dans le Bois des Loges, entre Noyon et Montdidier, pour y bloquer l'ennemi. C'est à cette occa-

sion qu'Henri est grièvement blessé, et meurt « des suites de blessures de guerre » dans l'ambulance 15, le

14 octobre 1914, à Montdidier, dans la Somme. Il est inhumé dans ce même village, dans la nécropole natio-nale l'Égalité, tombe 368. Le jugement est transcrit le 17

avril 1915, à Écoche. En effet, en novembre 1908, il avait épousé une fille d'Écoche, Antoinette-Marie Ber-thier. MPLF, son nom figure sur le monument aux morts

d'Écoche. 20. Benoît-Victor Defaye, né le 15 mars 1886, est le

deuxième fils de Jean-Marie, tisseur à la Favrie, et de son épouse Claudine Crozet, tisseuse de huit ans plus

âgée que son mari. Le frère aîné, Benoît-Joseph, est né en l'année précédente. Il se marie en 1911 avec Émi-lienne Reneaud. Sans doute ce frère a-t-il fait la guerre,

mais il en est revenu vivant, et mourra à 78 ans. L'an d'après naît une sœur, Marie, qui épousera, après la guerre, Auguste Mercier.

En août 1914, Benoît-Victor est recruté à Mâcon avec le matricule 544, pour être intégré dans le 256e RI. Son

régiment part le 11 pour les Vosges, où il connaît l’épreuve du feu jusqu’au début de septembre. Le 28, Defaye ne devait pas être loin d’un autre Coublandi,

Joseph Grapeloup, du 334e RI, quand celui-ci trouva la mort vers Anozel. Le régiment participa ensuite à la course à la mer, et fut envoyé en Artois, près de Bé-

thune. Il défendit héroïquement les villages de Bully, Cambrin et Cuinchy, très exposés, tantôt sur la défen-

sive, tantôt passant à l’attaque. Le 17 octobre, le lieute-nant Trolliet, qui partait reconnaître, à la tête de sa sec-tion, les nouvelles positions allemandes, fut pris, à leur

approche, sous un feu violent de mousqueterie et de mitrailleuses ; il déploya alors sa section face à l’ennemi pour lui répondre, et bien que blessé par cinq balles à la

tête, aux deux bras et à la jambe, il continua, assis sur le bord du fossé de la route, à observer et à noter la situa-tion des lignes ennemies, et ne voulut céder son com-

mandement qu’après avoir perdu toutes ses forces. Deux jours plus tard, le 19, à 10 h du matin, Defaye fut « tué à

l'ennemi »

En ce Temps-là 2013 Page 40

La transcription à Coublanc sera rapide, malgré la diffi-culté de l'état-civil à s'assurer du décès. : 17 avril 1915. MPLF. MC.

Morts dans la bataille des Flandres 21. Étienne Accary est né à La Roche le 14 octobre

1877. Il était le quatrième enfant et premier garçon d'An-toine Accary et de son épouse Madeleine-Félicie. Ses

parents, qui ont 28 ans à sa naissance, vont avoir encore quatre filles. Ce sont des paysans. Il grandit et devient paysan à son tour. Quand la guerre éclate, il a déjà

36 ans. Ce n'est plus un jeune homme. Cinq de ses sœurs se sont mariées. L'une d'elle est déjà la maman, depuis 1901, de Marie-Rose Crozet, qui épousera plus tard, en

1934, Adrien Duperron. Pourquoi Étienne ne s'est-il pas marié ? Avait-il eu trop de sœurs auprès de lui dans son

enfance ? Recruté à Mâcon, comme la plupart des poilus de Cou-blanc, il va servir dans le 146e Régiment d'Infanterie

(matricule 1333). Le 146e RI a participé à la première bataille de la Marne (août-septembre), puis il monte vers la Picardie et le nord. Début novembre, il débarque à

Steenwerke et continue jusqu'à Elverdinghe. Combats le 6 et le 7. Nouvelles avancées le 9 et le 10, et c'est le jour où le front se stabilise qu'Étienne meurt, en Belgique,

« tué à l'ennemi » au Mont Kemmel, le mercredi 11 novembre 1914. Le 11 novembre ne signifie encore

rien. Rien que la Saint-Martin, si importante pour les paysans… MPLF. MC.

22. Louis-Jean Boyer est le petit frère de Jean, dont nous avons parlé plus haut. Il est né le 21 juin 1893 à L'Orme. Sans doute s'est-il exilé avec son frère à Saint-

Denis-de-Cabanne. Recruté à Roanne avec le matricule 123, il est incorporé

le 11 septembre dans le 158e RI, déjà cantonné depuis deux ans dans les Vosges. Sa guerre, entamée avec un peu de retard (sans doute le temps d'une formation mili-

taire minimale), va être légèrement plus longue que celle de son frère. Sait-il, au moment où il commence de se battre, que son frère aîné est déjà mort, ou peu s'en faut ?

Le 158e, revenu des Vosges et passé par Paris, participe en Champagne au milieu de septembre à la poursuite des Allemands après la victoire de la Marne. C'est là que

Louis Boyer le rejoint. Puis le régiment monte en Artois, pour « la course à la mer » et joue un rôle important dans

l'affreuse bataille d'Ypres. Les Allemands ne passent pas. C'est alors la guerre des tranchées qui commence, avec le froid qui fait des victimes : les pieds boueux gèlent dans

les tranchées, vers Hooge. C'est dans ces conditions que Louis meurt, le 2 ou 3 décembre, « tué à l'ennemi », à « Westock en Belgique ». Or ce village, ainsi orthogra-

phié par les rapports militaires, n'existe pas ; mais il y a une région qui s'appelle le Westhoek...

L'acte est transcrit le 7 mai 1915 à Saint-Denis-de-Cabanne, où son nom figure au monument avec celui de son frère. Il serait inhumé dans un des cimetières mili-

taires du Westhoek. MPLF.Médaille militaire et Croix de guerre.

23. Joannès Druère est né le 6 novembre 1877 aux Remparts. Après Claudius et Jules, il était le troisième et

dernier enfant de Claude et de Marie-Louise Genty. Sa mère est morte alors qu'il avait 7 ans. Le père était fabri-quant de coton. Il mourut en 1900. Deux ans après, à

24 ans, Joannès, cultivateur, avait épousé Marie-Joséphine Robin, de Chandon. Le couple engendra deux

garçons, Benoît-Joseph en 1904 et Maurice-Jules en 1911. Joannès est recruté à Mâcon à 36 ans. Son régiment sera

réuni au 146e RI, celui d’Étienne Accary, né la même année que lui, mort un mois avant lui. Après la mort d’Étienne au Mont Kemmel, le 146e RI se bat pour Ca-

lais, autour d'Ypres, dans la boue, le froid et la pluie. Joannès meurt de ses blessures à l'hôpital temporaire de

Zuydcoote, le jour même de son admission, à midi, le 12 décembre. Par rapport à son camarade, cela permettra une transmission très rapide de son acte de décès à Cou-

blanc. Il est inhumé dans la cimetière militaire de Zuydcoote, Carré 1, tombe 417. MPLF. MC.

24. Cousin germain de Claude-Marie-Joseph Grapeloup, et plus jeune d'un an, Marie-Joseph Grapeloup est né dans le même hameau d'en Bourguignon, le 21 août

1884, de Jean-Marie, tisseur, et de son épouse Pierrette-Marie-Pélagie Ducruy, tisseuse. En filant l'amour tendre,

ces tisseurs avaient engendré trois enfants avant notre poilu : une fille, Marie-Florine, née en 1872, qui a épou-sé en 1897 Jean-Firmin Boland, puis deux garçons, dont

je ne sais pas grand-chose, ni s'ils ont vécu. Après Marie-Joseph naîtra Louis, qui vient d’épouser, en 1914, José-phine Fénéon. Mais le mariage, ce n'est pas pour notre

poilu, qui va devoir fêter ses trente ans dans les tran-chées.

Matricule 182 au recensement à Mâcon, il est affecté au 4e Régiment de Marche des Zouaves, 19e compagnie. Avec ses camarades, venus pour l'essentiel de Bizerte et

de Tunis, il reçoit le baptême du feu à Charleroi, le 23 août, puis bat en retraite jusqu'au 29 août. Dans le cadre de la bataille de Guise, le régiment combat à Ribe-

mont. Après la bataille de la Marne, les zouaves repren-nent leur marche en avant et livrent de durs combats vers

la ferme d'Hurtebise, vers Craonne, dans l’Aisne. La ma-ladie frappe ces bataillons de coloniaux peu habitués au froid et à la pluie, en octobre, en décembre. Mais à quel

moment Joseph céda-t-il ? C'est la maladie qui va le tuer, juste avant la Saint-Sylvestre, le 30 décembre, à l’hôpital complémentaire 40 de Rennes. La transcription à Cou-

blanc est faite grâce au registre de l'hôpital. Il est inhumé sur place, dans le carré militaire du cimetière de l'est, rang 22, tombe 9. MPLF. MC.

Bernard Berthier, décembre 2013,

avec l'aide du site Coublanc-71 et de son webmestre N.B. Malgré nos efforts, nous ne pouvons pas assurer que tous les renseignements sont absolument exacts. Il y a aussi des généalo-

gies incomplètes...

En ce Temps-là 2013 Page 41

Fantastique robot

7 juillet 2087.

Aujourd'hui, ce sont les grandes vacances !

Victor et Mirabelle partent avec leurs parents… di-

rection l'Australie. Le vaisseau est prêt, dans trois

heures, ils seront arrivés à destination grâce au cou-

loir spatio-rapido. Ils feront le tour du pays et ils es-

saieront de vivre sans leur robot : Bingo surnommé

Bip-Bip par les enfants.

Bingo sait faire beaucoup de choses dans la maison et

en plus, il ne s'épuise jamais. Il fait le ménage, la cui-

sine, il sert le petit-déjeuner au lit, il va chercher les

enfants à l'école. Il sait jouer au basket avec Victor et

Mirabelle, il leur apprend à dessiner. Il fait même des

massages quand on a mal au dos.

− Au revoir Bip-Bip, tu vas nous manquer, mais ne

t’inquiète pas, chez papi, tu vas bien t’amuser !

− En plus, à Coublanc, il y a une brocante ce week-

end ! dit Mirabelle.

− AU-RE-VOIR… ON SE RE-VOIT DANS QUIN-

ZE JOURS, répond le robot.

Bip-Bip file à toute allure chez le grand-père de Mira-

belle et de Victor. Arrivé à la maison, il frappe à la

porte.

Grand-père Théo ouvre en ronchonnant.

− Oh, non ! Pas encore ce fichu robot… Moi, je pré-

fère me débrouiller tout seul ! Je ne sais pas comment

font les autres pour supporter ces gros tas de fer-

raille !

− BON-JOUR-CHER MON-SIEUR, répond le robot.

QUE PUIS-JE FAI-RE POUR VOUS ? VOUS MA-

SSER LES PIEDS ? FAI-RE LA CUI-SI-NE ?

− Du balai ! Va dans le placard avec ton cousin

l’aspirateur !

Mais le robot se met à passer l’aspirateur et grand-

père qui regardait tranquillement un match de foot sur

sa télévision format réalité à commande de pensée, se

met à crier :

− Arrête ça tout de suite !

Mais le robot continue son ménage et grand père

Théo est fou de rage, il a raté son match de foot.

− Tu m’as fait louper la finale !

Toute la nuit grand-père Théo pense à se venger et

c’est décidé…

− … demain j’irai le vendre à la brocante…

Le lendemain matin.

− Viens, Bip- Bip, on va faire un tour ! Et grand père

embarque le robot dans sa vieille voiture. Mais en

chemin, la voiture tombe en panne au milieu des bois.

− Oh ! Il manquait plus que ça ! On est perdu mainte-

nant… je ne sais même plus où nous sommes !... Le

moteur est peut-être grillé à moins que ce ne soit une

panne d’essence !

Grand-père Théo stresse de plus en plus. Bip-Bip ré-

fléchit et met en route son super GPS laser.

− C’EST PAR ICI, PAR ICI PA-PI…PAR LÀ, PAR

LÀ, PAR-LÀA !

Et en quelques minutes, ils arrivent à la brocante.

Mais grand-père n’a plus du tout envie de vendre Bip

-Bip. Ils deviennent inséparables. Ils regardent en-

semble les matchs de foot, font ensemble le ménage

et vont même cueillir des champignons.

Maintenant, ils sont de grands « AMY-

COLOGUES ».

La classe de C.E École Ste Thérèse Coublanc

Élèves de CE 1 : 7 élèves

Dorian BOUCHACOURT Le Pont des Rigolles

Charly DARGAUD Saint-Denis-de-Cabanne

Lilou GUERZEDER Le Foron

Romane LACÔTE Cadollon

Jayson RUDE La Place

Yaël VIDAL Vers Roche (Saint-Igny)

Johann VOGIN La Raterie

Élèves de CE 2 : 10 élèves

Alexis BALTHAZARD La Roche

Pierre BERRY La Croix-du-Lièvre

Shâhin BOUZIR Le Foron

Célian BUZET-BAGUE Bois Gauthay

Lisa CHATTON La Bourgogne

Angèle CHAVANON L’Orme

Alycia DANJOUX Les Varennes (Maizilly)

Enzo DESMURS La Bergerolle (Saint-Igny)

Camille ESBERARD La Favrie

Nolan MONTET Les Bruyères

École privée Sainte-Thérèse Année 2013-2014 Maîtresse : Joëlle Courot (Saint-Julien de Jonzy-71)

En ce Temps-là 2013 Page 42

En mer

Il était une fois un joli petit village, Coublanc, qui

vivait tranquillement. Un jour, la guerre éclata.

Tous les hommes majeurs du village furent appelés

à la bataille. Il ne resta que des enfants, des femmes

et des vieillards. André, bûcheron de métier et âgé

de vingt-sept ans, fut un des appelés au combat. Il

avait deux enfants, un garçon de 5 ans, Henri, et

une fille de 2 ans, Marguerite. Sa femme, Made-

leine, était désespérée à l'idée que son mari parte à

la guerre. Cependant, elle fut rassurée par les bruits

qui couraient dans le village : on pensait que la

guerre ne durerait que quelques semaines.

André était appelé à se rendre au port de Marseille

pour prendre un navire militaire. La veille de son

départ, André prépara ses affaires les plus impor-

tantes, embrassa ses deux enfants et alla se cou-

cher.

Il ferma les yeux et se sentit bercé, comme par des

vagues... Il était sur un bateau de guerre. Il enten-

dait le capitaine hurler ses ordres. Des bateaux en-

nemis leur lançaient des bombes. Sur le pont, l'agi-

tation gagnait les marins. Des avions survolaient

leur navire à basse altitude. Tous ces bruits étaient

effrayants. Le bateau d'André fut touché mais il

réussit à embarquer sur un canot de sauvetage avec

d'autres soldats au moment où le navire commen-

çait à couler. Les vagues, énormes, secouaient la

barque.

Soudain, une bombe explosa juste à côté de l'em-

barcation et la fit chavirer. André fut saisi de peur.

L'eau était froide ; il ne savait pas nager et le poids

de ses bottes et de ses vêtements militaires com-

mençaient à le fatiguer. Plusieurs fois, il but la

tasse. De plus, il craignait les monstres marins qu'il

s'imaginait terrifiants avec de grandes mâchoires

d'où dépassaient de longues dents pointues. Tout à

coup, un navire approcha et le sauva de la noyade.

Malheureusement, il s'agissait d'un bateau ennemi.

On allait le fusiller lorsqu'il hurla :

– Nooon !!!

André, trempé de sueur, se réveilla. Ce n'était rien.

Juste un cauchemar.

Mais, au final, le cauchemar de la guerre allait du-

rer quatre ans.

Classe de CM1-CM2

De l’école publique de Coublanc

Élèves de l’école publique Année 2013-2014

Enseignant : Lionel Simond (Tancon-71)

CM 1 (12 élèves)

Laya AGGOUNE Les Épalis

Noé AUBARD Le Bois Gauthay

Florian AUCLERC Terre des Chambres

Nathan BOUCHACOURT Le Pont des Rigolles

Maxence CHAVANON La Brue

Élise DUPERRON La Roche

Guillaume FRANCKART La Place

Dan GENAUDY La Place

Thaïs GENILLON Le Foron

Axel PARIAT Les Plantes Sud Cadollon

Lola PÉLEGRIN Le Bois Gauthay

NesrineTILOUCH Lallerand (Maizilly)

CM 2 (8 élèves)

Thomas ARNARDI L’Orme

Laurie DUILLON, Cadollon

Melvyn GUERZEDER Le Foron

Louis GUIGUITANT Montbernier

Ludivine PERRAT Le Foron

Alexia RABUTEAU La Place

Nicolas REVILLIER Les Espaliers

Daniel TACITE Le Foron

Claude Franckart (La Place), webmestre du très actif et complet site Internet personnel Coublanc-71, propose aux personnes désireuses de retrouver leurs ancêtres de le contacter. Ses recherches faites dans un esprit de sympathie réciproque sont totalement gratuites. Sa base généalogique sans cesse remise sur le chantier comporte plus de 40 000 fiches de 1680 à 1935, donc forcément des gens de leurs famille.

Contact : [email protected]

En ce Temps-là 2013 Page 43

Mots croisés Grille n°20 par François Millord

Horizontalement : A. Elles furent nombreuses à Coublanc ces derniers temps, avec entre autres la station

filtre plantée de roseau à Cadolon, et le nouveau local technique au Pont des Rigoles. B. Malgré les efforts

engagés par la mairie, Coublanc n’a tou-

jours pas le sien. Pronom. C. Frappée de

malédiction. Conjonction. D. Champion.

Habitants d’une commune du Brionnais

jadis dotée d’un petit séminaire, non loin

de Coublanc. E. Bateaux à fond plat ser-

vant autrefois au transport fluvial, no-

tamment sur la Loire. F. Le relais lecture

de Coublanc l’est désormais, pour mo-

derniser et faciliter l’enregistrement des

livres. G. Elles peuvent être organisées

dans la salle pour tous, en toutes sortes

d’occasions : fête des classes, mariage,

etc. H. Pronom. Centièmes de siècle. En-

fila. I. Posé sur un astre familier. Profes-

sion représentée à Coublanc par l’entre-

prise Duperron. J. Pronom. Grelottaient.

K. Boirions du lait.

Verticalement : 1. Identifiant des sites

Internet italiens. Œuvrait. 2. Certains

sont bien représentés à Coublanc, comme

par exemple Lacôte, Dechavanne ou Ber-

thier. Prénom féminin fêté le 25 dé-

cembre. 3. Nuança. Mouvement qui unifia les forces françaises de résistance le 1er février 1944. 4. Ils

n’épargnèrent pas la Bourgogne lors de sa libération par les alliés, comme par exemple à Nevers le 17 juil-

let 1944. Couleur. 5. Celui de l’association des parents d’élèves a eu lieu le 1er dimanche de décembre (en 2

mots). 6. Endommageâmes. Unité de mesure chinoise, équivalent à 500 mètres. 7. Accessoires de plongée.

Sa longue marche changea l’histoire de la Chine. 8. Répétât. Organe. 9. Conjonction. Trous. 10. Contestes.

Adjectif possessif. 11. Habitants d’un pays voisin de la France. Groupe de rap français des années 1990.

Solution page 19.

Conférence culturelle

Le dimanche 2 février 2013, l’association culturelle Arcanson de Saint-Nizier-sous-Charlieu a proposé une conférence sur le père Jules Dubuy, mission-naire du Sacré-Cœur. Durant près de trois heures, devant un auditoire de cinquante personnes réu-nies dans une salle du château de Carillon, qui voulaient toujours en savoir plus, Bernard Berthier, équipé des photos et diaporama de Gérard Vagi-nay, a exposé la vie et l’œuvre de notre fameux Coublandi, depuis le Bois Gauthay où il est né jus-qu’à la Papouasie où il repose parmi ses convertis.

Deuxième rencontre du Patrimoine

local à Coutouvre

Après le succès de la Première rencontre, à Vil-lers, le 11 novembre 2012, les organisateurs ont choisi Coutouvre pour lieu de la deuxième ren-contre. La revue En ce Temps-là y était présente, le dimanche 24 novembre, pour représenter Cou-blanc, parmi les autres associations des villages voisins – Cours-La Ville, Chandon, Charlieu, Vil-lers, Coutouvre et même Roanne – qui travaillent à la sauvegarde du patrimoine culturel sous toutes ses formes

Sauvegarde du patrimoine culturel

En ce Temps-là 2013 Page 44

Revue imprimée en décembre 2013 par Graphi Center, à Roanne. ISSN 1964 - 812 X

Responsable de la publication : Bernard Berthier, La Place, 71170 COUBLANC [email protected]

Les articles des anciens numéros sont accessibles sur le site http://Coublanc-71.com

Un riche hérite ; il se dit : « Voilà de l'argent de proche ! » (Bibi)