« De passage : le voyage à l’Œuvre » · 2015-11-17 · Ces routes hantent notre imaginaire...

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« De passage : le voyage à l’Œuvre » Victoire Barbot, Romain Cattenoz, Baron von Humboldt, Élodie Lombarde, Betsabeé Romero, César Martinez Silva, Cannelle Tanc, Jean-Frédéric Maximilien de Waldeck. Du 19 novembre au 18 décembre 2015 Vernissage le 18 novembre 2015 à partir de 18h 21 av du maine 75015 Paris du jeudi au samedi de 14h à 18h www.art-immanence.org Immanence reçoit le soutien de la Ville de Paris, du Conseil régional d'Ile-de-France, du Ministère de la Culture et de la Communication - Direction Régionale des Affaires Culturelles d'Ile-de-France et participe au réseau tram.

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« De passage : le voyage à l’Œuvre » Victoire Barbot, Romain Cattenoz, Baron von Humboldt, Élodie Lombarde, Betsabeé Romero, César Martinez Silva, Cannelle Tanc, Jean-Frédéric Maximilien de Waldeck.

Du 19 novembre au 18 décembre 2015 Vernissage le 18 novembre 2015 à partir de 18h

21 av du maine 75015 Paris du jeudi au samedi de 14h à 18h www.art-immanence.org Immanence reçoit le soutien de la Ville de Paris, du Conseil régional d'Ile-de-France, du Ministère de la Culture et de la Communication - Direction Régionale des Affaires Culturelles d'Ile-de-France et participe au réseau tram.

  Le propos de l'exposition est de révéler le pouvoir de catalyseur de la carte sur l'imaginaire en

suivant les lignes des routes et des fleuves, qui forment autant de directions que l'on a envie de prendre,

comme le suggèrent les fils cousus de la carte d’Élodie Lombarde. À l'image du voyageur qui arpente

visuellement les routes des mappemondes avant de parcourir les territoires qui l'ont fait rêver. La carte de

New York découpée par Cannelle Tanc et son œuvre en cire, inspirée des bois fossilisés des canyons hopi,

évoquent ce passage de la carte au territoire, de l'urbanisme des mégalopoles aux espaces naturels, de la

terre à ce qu'elle produit.

Ce déplacement de la carte fantasmée au territoire réel est opéré par le travail de l'artiste au

moyen de son œuvre. L'exposition de celle-ci repose sur sa mobilité comme le suggèrent les automobiles

et barques de Romero, Cattenoz et Martinez Silva. L’œuvre devient l'opératrice du déplacement, elle est

l'oeil du spectateur parcourant l'exposition, elle est le regard du voyageur qui parcourt le monde ; ce

regard activé par la Coccinelle de Betsabeé Romero tournant autour de la place du Zócalo à

Mexico. Emportés par la vitesse, nous regardons une œuvre qui regarde le monde en le sillonnant, qui nous

en donne une image et qui nous reflète, comme le rappellent les ailes polies de Romain Cattenoz.

Il est donc constamment question de regard à travers ce cheminement : un regard scientifique sur

le monde, celui de Humboldt et à sa manière celui de Waldeck, qui ont arpenté le territoire pour le

cartographier au nom d'une visée scientifique : géographique, botanique et géologique pour Humboldt ;

une visée historique pour Waldeck, qui complète les dessins disparus du site archéologique de Palenque à

l'aune des théories de son époque, attribuant à l’Égypte la paternité des glyphes mexicains. C'est alors ce

travail de la matière par la roche que nous invite à scruter la carte en papier émeri d’Élodie Lombarde sur un

mode géologique. Ce sont ces temporalités naturelles que donne à voir l'installation de Cannelle Tanc, par

l'exposition d'images et d'objets qui composent une géologie d'ombres et de silences.

À cette observation scientifique européenne de l'Ancien Monde sur le Nouveau Monde, César

Martinez Silva propose un regard qui en inverse l'exotisme. Il imagine la découverte de l'Ancien Continent

par le Nouveau à l'aide des trajineras - « barques » de Xochimilco à Mexico - voguant sur les fleuves

européens et permettant à ces nouveaux conquérants d'indianniser notre géographie à l'aide de suffixes

aztèques, à l'image de ce que les Européens ont fait dans les territoires indiens du continent américain.

Parce qu'elles semblent incongrues au milieu du patrimoine du Vieux continent, ces barques hautes en

couleur reflètent sur le mode de l'humour le regard étonné du voyageur face à l'altérité.

Ce regard du voyageur s'accompagne aussi d'un geste de collecte d'objets comme autant de

souvenirs des pays traversés, à l'instar du scientifique recueillant les plantes découvertes, à l'instar de

l'artiste ramassant les objets d'une temporalité plurielle. Les œuvres de Victoire Bardot recréent ce cabinet

de curiosité miniature que rapporte chaque voyageur dans ses bagages et qui n'a de sens que pour lui. Ce

reliquat intime devient alors lui aussi un catalyseur d'images suscitant des rêveries et des fantasmes

toujours renouvelés, qui sont autant d'invitations aux départs.

Caroline Pérée, novembre 2015.

Les mappemondes de notre enfance ont bercé notre imaginaire. Accrochées aux parois des salles de

classe, elles sont nos premières fenêtres ouvertes sur le monde. L'enfant studieux se laisse attraper par ces

frontières colorées, par le bleu azur des océans, par ces passages fantasmés qui forment autant de détroits

découverts dans la fièvre d'ouvrir de nouvelles voies maritimes, d'aller percer le mystère derrière les

colonnes d'Hercule et de chercher l'Autre au-delà de soi-même. Ces routes hantent notre imaginaire

d'adultes et celui des urbanistes qui font de nos villes des lieux de passage, des lacis piétonniers, des

circulations alternées et circulaires, des raccourcis occultés, autant de voyages qui nous font franchir des

espaces-temps, au gré d'une flânerie, d'un trajet en train ou en avion. Le passage est aussi un moment de

traversée et de transition, le lieu d'une initiation, d'un changement en germe entre le temps parcouru et

l'espace vécu. Le passage est un voyage géographique qui implique une traversée de soi.

Au XXIe siècle, le monde des découvreurs a laissé place à un espace globalisé, où transitent des

flux de personnes et de marchandises à toute heure et en tous lieux. On voyage vers des pays lointains

comme on prendrait un métro. Au milieu de ces déambulations, l'artiste circule aussi et ses œuvres plus

encore. Exposées à New York, Londres, Paris et Berlin, elles empruntent les chemins tracés par les galeries

et musées internationaux. Mais plus qu'un moyen de circulation, le voyage est un instrument de

transformation, il façonne l’œuvre comme il transforme l'artiste qui suit les méandres du déplacement et de

la traversée, celles d'une ville, d'un pays, d'un continent, celles plus intimes de son intériorité. Car traverser,

c'est se traverser, c'est se dé-placer, c'est aller de l'autre côté de soi-même. Voyager, c'est passer des

lignes, frontières réelles mais aussi lignes de démarcation entre mes référents culturels et ceux du lieu où

j'arrive. C'est franchir des lignes que je ne franchirai pas dans ma culture d'origine – par ignorance, par

témérité et par liberté – c'est donc passer outre et m'expérimenter moi-même comme un nouveau territoire

tout en explorant un nouvel endroit d'autant plus intéressant qu'il est Autre. C'est alors laisser une

empreinte, le passage marque une trace, il participe à la création de l'œuvre.

À partir de cette dynamique créatrice, l'exposition se propose de décliner la notion de voyage à

travers quatre approches thématiques et trois pays unis par des histoires de découvertes et d'artistes

migrants et arpenteurs : l'Allemagne, la France et le Mexique. Si le voyage est d'abord spatial, il se décline

dans la géographie des villes et des frontières, notamment dans les œuvres de Francis Alÿs, qui travaille à

partir de la globalisation et du déplacement géographique. Mais le voyage implique aussi une dimension

temporelle, notamment entre des pays unis par les missions archéologiques au Mexique : le baron

Humboldt en Allemagne et le cartographe Waldecq pour la France. Ce dernier par exemple, dans sa

recomposition fantaisiste des glyphes du site de Palenque, nous rapproche du travail d'artistes piétons

comme Gabriel Orozco, qui lui aussi recompose le réel à partir de ses matériaux, mettant au jour les

mécanismes de la création artistique. D'autre part, l’œuvre se révèle comme la mise en abyme du voyage

qui la sous-tend, à travers la mémoire qu'elle porte comme dans le travail de Tacita Dean ou parce qu'elle

symbolise elle-même le chemin parcouru comme dans l’œuvre de Betsabeé Romero. Enfin, parce que le

voyage transforme l'artiste dans son être, sa démarche questionne la notion d'identité, c'est le cas des

artistes chicanos comme Guillermo Gomez Peña, mais c'est aussi celui de tout artiste qui émigre.

L’exposition s’inscrit dans le colloque international: La Fin des cartes ? Territoires rêvés, territoires normalisés qui se tiendra le 19-20 novembre 2015 de 9h à 18h à l’École nationale supérieure d’architecture Paris-Belleville. Un colloque organisé par Aline Caillet, Sophie Fétro, Anna Guilló, Karen O’Rourke, de l’Université Paris 1, Panthéon Sorbonne, Paris. Rendez vous à 14h00 à Immanence le 18 novembre pour une promenade urbaine des expositions organisés dans le cadre de la manifestation La Fin des cartes ? Territoires rêvés, territoires normalises. Toutes les informations et réservation sur www.lafindescartes.net

Commissaires d’exposition :

Caroline Perrée (Chercheur en Histoire de l 'Art)

[email protected]

Cannelle Tanc (Artiste associée)

[email protected]

Les artistes :

Victoire Barbot Victoire Barbot vit et travaille entre Paris et Mexico. Née en 1988, elle suit des études de design à lʼécole dʼArt Appliqués Olivier de Serre puis développe sa pratique de sculpture aux Beaux Arts de Paris dʼoù elle sort diplômée en 2014. Victoire Barbot collecte, récupère, stocke, assemble, classe, range et dessine. Il sʼagit pour elle de construire des agencements, ce quʼelle appelle “Misensemble” et procède pour cela par assemblages, élaborant des équilibres précaires avec des matériaux collectés quʼelle emboite et déploie dans lʼespace. Puis, elle les archive par le dessin, et finit par les classer à nouveau, pour ce faire elle redessine ses sculptures sous une forme rangée, classée qu'elle nomme "Misenboite".

Sans titre (Misensemble collaborée 1/6), octobre 2014

Coquillage, silex, balle 3,5 x 3,5 x 2,5 cm

Romain Cattenoz Après un double curcus en arts appliqués et en arts plastiques, Romain Cattenoz développe une pratique artistique qui s’articule entre la sculpture et le dessin. La question du regard est au cœur de son travail. Ses sculptures-objets sont des assemblages réalisés à partir de miroirs. Grâce à la fragmentation de la vision qu’ils proposent apparaissent de multiples facettes du réel. Les dessins, eux, documentent le parcours « off » fictif ou réel du jeune artiste. Premiers éléments d’une future reconstruction d’une coccinelle Voklswagen considérée comme un des symbole de la ville de Mexico ou plutôt comme une image d’épinal transmise par les livres d’apprentissage de l’espagnol de niveau 4ème ou 3ème laissant l’étudiant rêveur dans d’impossibles road trip dans les rues la capitale mexicaine. Semble t'il des marques japonaises ont repris le marché des taxis.Romain Cattenoz a entrepris ce projet, collectant des morceaux de coccinelle, reconstituant à la manière d’un restaurateur d’œuvre d’art, pièce par pièce aussi bien une voiture qu’un souvenir fantasmé d’un hypothétique voyage « plus tard » datant de son adolescence. Ces éléments de carrosserie sont polis jusqu’à obtenir une surfasse miroitante. Vanité industrielle, ces ailes deviennent des objets exposés réfléchissant tout ce qui les entoure. Le principe de spécularité perd les éléments de carrosserie dans l’espace et les confond dans le paysage. Le miroir, matériau récurrent dans la pratique de Romain Cattenoz, tente d’ici d’effacer les limites entre objet et sculpture.

"coupé 3 portes" portières de voiture poli-miroir, 150x150x120cm, Paris, 2014

Baron von Humboldt Le Baron Humboldt est né à Berlin en 1769 et mort en 1859. C'est un érudit allemand éduqué avec les idées des Lumières. Naturaliste, géographe et géologue, Humboldt est surtout un infatigable voyageur qui arpente l'Amérique latine traversant tout le continent pour en recenser les plantes, observant la société des hommes et le milieu naturel. Ses écrits témoignent d'une observation minutieuse des hommes et ses dessins botaniques d'une grande dextérité.

Impressions naturelles des plantes du voyage de MM. Humboldt et Bonpland.

Ms 988. Bibliothèque de l'Institut http://agora.qc.ca/dossiers/Alexandre_von_Humboldt

Elodie Lombarde Carte Emeri est une surface cousue au fil blanc de toile émeri. La surface faite de poudre de roche, par sa brillance, fait écho à un imaginaire céleste. Les fils cousus et tendus finissent de dessiner ce rapprochement, Faite pour le ponçage du métal, la toile émeri renvoie à une activité, à une archéologie des techniques et une géologie de l'histoire des matières. Roche utilisée depuis l'Antiquité comme abrasif, elle condense des strates d'usages et réalités géologiques que le fil relie, noue, explore. L'approche anthropologique du matériau disparaît dans les assemblages cousus parce que concentrée sur la matérialité des compositions. En la transformant en surface et espace lisse, la matière se développe progressivement dans l'espace. Le fil construit une mise en abîme entre une activité et une cartographie de l'univers et ouvre un dialogue entre microcosme et macrocosme.

Carte Emeri, toile émeri cousue et fil blanc, 180x200 cm, 2014

Betsabeé Romero

Betsabeé Romero est née à Mexico en 1963. Elle vit et travaille à Mexico. Cette artiste plasticienne associe le présent et le passé à travers une esthétique automotrice. La roue, symbole de la modernité sous la forme du pneu et d'un temps cyclique, invite à une exploration de la mémoire à travers des œuvres qui commémorent l'injustice et la violence sociale sévissant dans le pays. Betsabeé Romero a réalisé plus de 30 expositions individuelles, notamment au Mexique, aux Etats-Unis et en Europe. Elle a participé à de nombreuses résidences et expositions internationales comme la Biennale de la Havane, la Biennale de Porto Alegre, Au bord du Paysage, "Au bord du paysage" à Fargues en France et "Art Grandeur Nature" à la Courneuve en France, "Cinco continentes una ciudad" au Musée de la Ville de Mexico, InSite 97 à San Diego-Tijuana, la Biennale du Caire, Kohj à Bangalore en Inde, et à Philadelphie.

Espiral sin fin, 2008

http://www.betsabeeromero.com/

César Martinez Silva

César Martinez est né à Mexico en 1962. Il vit et travaille à Mexico. Le travail de cet artiste plasticien porte sur les relations de pouvoir à travers le corps par la pratique de performances anthropophages. Il a recours à l'humour pour mieux dénoncer l'hégémonie du centre sur les périphéries. Dans cette série de photos, La vuelta al mundo en trajinera, l'artiste opère une découverte du Vieux continent par le Nouveau en mexicanisant des toponymes européens avec l'idée que le Mexique aurait pu découvrir l'Europe. Il se joue là une sorte de vision des vaincus présentée avec humour et ironie, qui s'interroge également sur la globalisation des déplacements et migrations. Son travail a été exposé aux Etats-Unis, en Colombie, au Brésil, en Espagne, en Angleterre, en Italie, en Allemagne, en Chine. Il a participé à la Biennale de Thessalonique en Grèce. Il a réalisé plus de 250 performances dans le monde. Il a obtenu des bourses et des résidences, dont celle de Banf Centre for the Arts au Canada, puis celle de l'Université Autonome Métropolitaine en Espagne.

http://martinezsilva.com/index.php?/fotografiadas/la-vuelta-al-mundo-en-trajinera/#

Cannelle Tanc Cannelle Tanc est née à Nice en France en 1970. Elle vit et travaille à Paris. Elle travaille le paysage dans la tentative de plier et de déplier. Découper est aussi une manière de dessiner, de retracer des lignes, en les pliant. Une ville n’est pas uniquement une somme d’habitats individuels et d’institutions mais plutôt un dessin, un tissu de réseaux, de plis, toujours en devenir qu’il nous appartient de penser et de faire évoluer avec économie et légèreté. En 2014, elle a exposé à Scotty entreprises, Institut Français, Berlin. En 2013, Des maisons vides ne font pas une ville, exposition collective, Galerie m 1886, Ankara, Turquie, Institut Français Ankara, Tram. En 2012, a exposé au Coin des rêves, le 6B, Saint-Denis ; Parce que la carte est plus importante que le territoir, Pôle d’art contemporain, Atelier Oulan Bator, Orléans ; Atlas at last, Grandes Galeries à l’esadhar, campus de Rouen ; La carte est plus importante que le territoire, Fondation Moret, Martiny, Suisse ; WunderKammer, Die Bäckerei, l'Iglu/Nordketten, Institut Français, Innsbruck, Autriche. En 2011 notamment Die Zeit der leichten Dinge, Architekturforum, Zürich, Suisse ; Utopies incarnées, Le Cabaret Voltaire, Zürich, Suisse. En 2009 Archipel, La Force de l‘art 02, invité par J.L Froment, Grand Palais, Paris ; Le complexe de Rittberger, Glassbox, cité universitaire, Paris.

Bois fossilisé, canyon de Chelly, cire, 2014.

www.cannelletanc.eu

Jean-Frédéric Maximilien de Waldeck

Waldeck est né à Prague en 1766 et mort à Paris en 1875. Le prétendu baron Waldeck est le premier européen à vivre et à travailler à Palenque dans les ruines mayas. Personnage aux mille facettes, il s'emploie à dessiner les glyphes tout en les complétant et recréant alors le réel, avec les préjugés de son temps, à savoir en complétant les parties manquantes par des références égyptiennes, romaines, chinoises, faisant de Palenque un croisement de cultures de l'Orient. A la manière des artistes, il recompose le réel selon sa fantaisie et la forme que lui inspirent les dessins mayas.

Mayan-2, XVIII siècle

http://www.dsloan.com/Auctions/A23/item-waldeck-monuments-1866.html