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histoires de savants

La neige sexangulaireun tout petit rien

hist-math.fr Bernard Ycart

Johannes Kepler (1571–1630)

Étrennes, ou de la neige sexangulaire (1611)Johannes Kepler (1571–1630)

Johannes Matthaeus Wacker von Wackenfels (1550–1619)

à quel point tu aimes le RienKepler, Étrennes ou de la neige sexangulaire (1611)

Je sais à quel point tu aimes le Rien, pas tant pour son faibleprix, que pour la plaisanterie ou le jeu, aussi délicieux qu’il estspirituel : de sorte qu’il est facile pour moi de me rendre compteque plus un cadeau s’approche de Rien, mieux tu l’apprécieras etplus facilement tu l’accepteras.

Quoi que ce soit qui évoquera pour toi la pensée du Rien, il faudraque ce soit réduit, bon marché et éphémère, c’est-à-dire presquerien.

trouver ce qui est le plus proche de RienKepler, Étrennes ou de la neige sexangulaire (1611)

Dans ces réflexions anxieuses, je traversai le pont, confus de magrossière impolitesse à me présenter à toi sans étrenne, d’autantque jusque là je fais toujours résonner la même corde, et metstoujours en avant le même Rien ; j’étais aussi vexé de ne pastrouver ce qui est le plus proche de Rien, et qui cependant seprête au jeu de l’esprit ; quand il arriva que de la vapeur d’eaufut condensée par le froid en neige, et des flocons tombèrent ici etlà sur mon manteau, tous avec six angles et des rayons duveteux.

retiens ton souffle de peur de ne rien recevoirKepler, Étrennes ou de la neige sexangulaire (1611)

Par Hercule, voici quelque chose plus petit que n’importe quellegoutte, avec pourtant une structure ; voici l’étrenne tant désiréepour l’adepte du Rien, et digne d’un mathématicien, qui n’a Rien,qui ne reçoit Rien, car cela tombe du ciel et ressemble à une étoile.

[. . . ]

Et quel augure dans le nom, quel bonheur pour Wacker l’adeptedu Rien ! Car si tu demandes à un Allemand que veut dire nix, ilrépondra Rien s’il connait le Latin.

[. . . ]

Accepte donc sereinement ce Rien et si tu peux retiens ton souffle,de peur de ne rien recevoir.

pourquoi pas cinq branches ou bien sept ?Kepler, Étrennes ou de la neige sexangulaire (1611)

Plaisanterie mise à part, venons-en au fait. Il doit y avoir uneraison pour laquelle quand la neige commence à tomber, ses fi-gures élémentaires montrent invariablement la forme d’une petiteétoile à six branches. Car si cela se produit par hasard, pourquoine tombent-elles pas avec cinq branches ou bien sept ?

Micrographia (1665)Robert Hooke (1635–1703)

Micrographia (1665)Hooke, Micrographia (1665)

le nombre d’orKepler, Étrennes ou de la neige sexangulaire (1611)

le nombre d’orKepler, Étrennes ou de la neige sexangulaire (1611)

Il est impossible de réaliser une structure à cinq angles sans cetteproportion que les Géomètres modernes nomment Divine.

x+ xφ = xφ2

φ =1 +

√5

2= 1.618

1, 1, 2, 3, 5, 8, 13, 21, . . .

la conjecture de KeplerKepler, Étrennes ou de la neige sexangulaire (1611)

Marcus Tullius Cicero (106–43 av. JC)

découverte du tombeau d’ArchimèdeCicéron, Tusculanes, v, xxiii, 64

Quand j’étais questeur, j’ai découvert son tombeau ignoré desSyracusains qui niaient son existence. C’était une enceinte entiè-rement couverte d’épines et de ronces. J’ai cherché le tombeau.Je connaissais en effet quelques fragments de vers dont j’avais ap-pris qu’en haut du monument figurait une sphère associée à uncylindre.

Cicéron découvrant le tombeau d’ArchimèdePierre-Henri de Valenciennes (1750–1819)

De la sphère et du cylindreArchimède (287–212 av. JC)

De la sphère et du cylindreArchimède (287–212 av. JC)

La surface de la sphère est quadruple d’un de ses grandscercles.Un cylindre qui a une base égale à un grand cercle de lasphère, et une hauteur égale au diamètre de cette mêmesphère, est égal à trois fois la moitié de la sphère.La surface du cylindre est aussi égale à trois fois la moitié dela surface de la sphère.

Sphère et cylindreArchimède (287–212 av. JC)

volumes de la sphère et du cube

sphère :4π

3r3

cube :8r3

rapport :π

6= 0.5236

empilement cubique

densité : π6 = 0.5236

empilement cubique

empilement optimal

empilement optimal

densités d’empilement

empilement cubique :

π

6= 0.5236

empilement optimal :

π

3√2= 0.7405

David Hilbert (1842–1943)

Sur les problèmes futurs des mathématiques (1900)David Hilbert (1842–1943)

Le premier individu rencontré dans la rueHilbert, Sur les problèmes futurs des mathématiques (1900)

Un mathématicien français des temps passés a dit : « Une théoriemathématique ne doit être regardée comme parfaite que si elle aété rendue tellement claire qu’on puisse la faire comprendre aupremier individu rencontré dans la rue. » Cette clarté, cette lim-pidité si énergiquement exigée ici d’une théorie mathématique, jel’exigerais encore davantage d’un problème mathématique parfait.

le rapport de l’espace rempli à l’espace videHilbert, Sur les problèmes futurs des mathématiques (1900)

Problème xviii

Je citerai aussi une question [. . . ] importante pour la Théorie desnombres et peut-être utile aussi en Physique et en Chimie : c’estla question de savoir comment on pourrait, avec la plus grandedensité possible, remplir l’espace au moyen d’un nombre infini decorps de même forme assignée d’avance, par exemple au moyen desphères d’un rayon donné ou de tétraèdres d’arêtes données [. . . ]autrement dit, on demande de répartir ces corps dans l’epace defaçon que le rapport de l’espace rempli à l’espace vide soit le plusgrand possible.

pour l’humiliation de la PhilosophieVoltaire, Elémens de la Philosophie de Neuton (1738)

Moins bon Philosophe qu’Astronome admirable, il dit que le Soleila une ame, non pas une ame intelligente, mais une ame végétante,agissante : qu’en tournant sur lui-même il attire à soi les Planètes ;mais que les Planètes ne tombent pas dans le Soleil, parce qu’ellesfont aussi une révolution sur leur axe.

[. . . ]

Il faut avouer pour l’humiliation de la Philosophie, que c’est dece raisonnement si peu Philosophique, qu’il avoit conclu que leSoleil devoit tourner sur son axe : l’erreur le conduisit par hazardà la vérité.

Somnium (1634)Johannes Kepler (1571–1630)

The man in the Moone (1638)Francis Godwin (1552–1633)

L’homme dans la lune (1648)Francis Godwin (1552–1633)

Histoire comique contenant. . . (1657)Savinien Cyrano de Bergerac (1619–1655)

Savinien Cyrano de Bergerac (1619–1655)

Nihil Sequitur !Kepler, Étrennes ou de la neige sexangulaire (1611)

références

P. Ball (2011) In retrospect : On the six-cornered snowflake,Nature, 480, 455T. C. Hales (2011) Cannonballs and honeycombs, Notices ofthe AMS, 47(4), 440–449J. Kepler (1966) The six-cornered snowflake, Oxford Univer-sity PressC. Corrales Rodrigáñez (2010) The use of mathematics toread the book of nature. About Kepler and snowflakes, Contri-butions to Science, 6(1), 27–34G. G. Szpiro (2003) Kepler’s conjecture, New York : Wiley