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IFPEK
INSTITUT DE FORMATION EN ERGOTHERAPIE DE RENNES
UE 6.5 S6 :
Evaluation de la pratique professionnelle et de recherche
GARNIER Marion
Mai 2014
Sensibilisation aux risques de la première chute chez
les personnes âgées auprès des professionnels
intervenant quotidiennement à leur domicile
IFPEK
INSTITUT DE FORMATION EN ERGOTHERAPIE DE RENNES
Sous la direction de Bénédicte Dubois, directrice de mémoire
UE 6.5 S6 :
Evaluation de la pratique professionnelle et de recherche
GARNIER Marion
Mai 2014
Sensibilisation aux risques de la première chute chez
les personnes âgées auprès des professionnels
intervenant quotidiennement à leur domicile
Résumé
Les chutes sont la première cause de mortalité accidentelle des personnes de plus de 65 ans
et représentent 12% des admissions dans les services gériatriques.
L’un des rôles de l’ergothérapeute est d’intervenir auprès de personnes âgées hospitalisées à la suite
d’une chute à domicile afin d’assurer leur rééducation et leur réadaptation. Cependant, face à cette
problématique de santé publique, l’interrogation se pose du rôle de l’ergothérapeute dans la
prévention de ces chutes.
Ce mémoire s’intéresse à la sensibilisation que peut mener un ergothérapeute auprès des
professionnels intervenant régulièrement voire quotidiennement au domicile de la personne, dans le
but de participer à la prévention des chutes. Pour cela, un recueil de données par un questionnaire et
des entretiens permettra l’analyse des interventions conduites par les aidants professionnels
concernant la problématique des chutes chez les personnes âgées et le ressenti des ergothérapeutes
face à la sensibilisation qu’ils peuvent réaliser au sein d’un service à domicile. Des propositions
d’interventions seront ensuite discutées.
Mots clés : sensibilisation, ergothérapie, aidants professionnels, domicile, prévention des chutes.
Abstract
Falls are the first cause of accidental death among people aged 65 years old and over and
represent 12% of the entries in geriatric services.
One of the roles of occupational therapists is to work with elderly people that have been
hospitalised after falling in their home, to insure rehabilitation and readaptation. However, in regards
to this problem within the public health system, the question arises as to the role of the occupational
therapist in preventing these falls.
This thesis focuses on the awareness that can bring an occupational therapist among
professionals working regularly and daily in the person's home, in order to help prevent falls. For this,
data will be collected through a questionnaire and interviews and will enable the analyses of the
interventions conducted by professional caregivers regarding the problem of falls among the elderly
as well as the feelings of occupational therapists regarding the awareness that they may practice or
apply within a home service. Proposals regarding interventions will then be discussed.
Key words : awareness, occupational therapy, professional caregivers, home, fall prevention
Je tiens à remercier, ma directrice de mémoire,
Bénédicte Dubois pour ses précieux conseils,
son soutien et son accompagnement
tout au long de l’élaboration de mon mémoire.
Un grand merci aux ergothérapeutes
et à tous les professionnels des services à domicile
qui m’ont accordé du temps pour répondre à mon enquête.
Je remercie les ergothérapeutes de mon dernier lieu de stage
pour leur aide et leurs encouragements.
Enfin, j’adresse mes remerciements à mes proches,
amis et famille, qui m’ont aidée et soutenue
dans la réalisation de ce mémoire.
Sommaire
Introduction………………………………………………………………………………………………………………………….1
1. Problématique………………………………………………………………………………………………..…..2 2. Apports théoriques………………………………………………………………………………………………9
2.1 Les chutes……………………………………………………………………………………..9
2.2 La prévention des chutes…………………………………………………………….17
2.3 Les acteurs de prévention des chutes au domicile de la personne
âgée………………………………………………………………………………………...…21
3. Méthodologie de recherche………………………………………………………………………………26 3.1 Le questionnaire…………………………………………………………………….…..26
3.2 L’entretien………………………………………………………………………………....27 4. Analyse des données recueillies ……………………………….…………...............................29
4.1 Analyse du questionnaire…………………………………………………..……...29
4.2 Analyse des entretiens……………………………………………………..….….…35
5. Analyse croisée des données et discussion……………………………………………….…….…40
5.1 Analyse croisée des données…..……………………………………………......40
5.2 Vérification de l’hypothèse………………………………………………….…..…42
5.3 Propositions d’interventions..………………………………………………..…..43
5.4 Critiques et limites de la méthode……………….…………………………..…44
5.5 Apports personnels…………………………………………………………………....46
Conclusion………………………………………………………………………………………………………………………….47
Bibliographie………………………………………………………………………………………………………………………49
Annexes
1
Introduction
« En 2060, une personne sur trois aura ainsi plus de 60 ans » (INSEE1, 2010). A la vue du
vieillissement croissant de la population, les personnes âgées sont au cœur des
préoccupations. En ce sens, une problématique de santé publique est relevée : la chute chez
la personne âgée.
D’après la Société Française de Gériatrie et de Gérontologie (2009), un tiers des plus de
65 ans et 50% des plus de 80 ans vivant à domicile, tombent au moins une fois dans l’année,
sachant que le risque de rechuter est multiplié par vingt après une première chute et la
mortalité multipliée par quatre. Ce phénomène chez la personne âgée entraîne de multiples
conséquences qui touchent le sujet lui-même et le système de santé.
Au sein d’un service de soins de suite et de réadaptation, l’ergothérapeute est amené à
rencontrer des personnes âgées hospitalisées suite à une première chute dans leur domicile.
Il prend en charge ces personnes le temps de leur hospitalisation afin de maintenir et
d’améliorer leur indépendance et leur autonomie. Il va alors utiliser plusieurs moyens allant
du travail analytique à des mises en situation et jusqu’à la visite à domicile ou
l’accompagnement vers une structure.
Cependant, ne vaut-il pas mieux prévenir que guérir ? La prévention des chutes est une
notion souvent soulignée dans le milieu gériatrique, mais quel peut être le rôle de
l’ergothérapeute pour éviter la première chute ?
Ce mémoire interroge les moyens de prévention qu’il est possible de mettre en place
pour les personnes âgées à risque de chute vivant à leur domicile. Pour cela, nous allons
dans un premier temps présenter le cheminement de notre réflexion qui nous a amené à
formuler une question de recherche ainsi que deux hypothèses. Ensuite, nous
développerons les concepts théoriques de notre sujet. Nous exposerons la méthodologie de
recherche des données complémentaires, pour les analyser ultérieurement. Enfin, cet écrit
s’achèvera par une discussion autour des données recueillies ainsi que des propositions
d’intervention en ergothérapie.
1 Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques
2
1. Problématique
Lors du stage de deuxième année, en Soins de Suite et de Réadaptation (SSR)
gériatrique, nous avons constaté que beaucoup de personnes âgées étaient hospitalisées
suite à une chute à domicile. Nous nous sommes alors demandé comment l’ergothérapeute
pouvait intervenir avant l'hospitalisation et pas uniquement à sa suite. Dans notre projet
d’étude, portant sur la sensibilisation aux aides techniques et à la manutention auprès des
aides à domicile, nous avons tenté de répondre à cette question. Lors d’un temps
d’observation auprès des aides à domicile chez les bénéficiaires, nous avons remarqué que
certains logements n’étaient pas sécurisés face aux risques de chute alors que plusieurs
usagers avaient été hospitalisés à la suite d’une chute dans leur domicile.
Après quelques recherches documentaires, les chutes chez les personnes âgées
peuvent être citées comme une problématique de santé publique. En effet, un tiers des
personnes âgées de plus de 65 ans et 50% des plus de 80 ans vivant à domicile, tombent au
moins une fois dans l’année (Société Française de Gériatrie et de Gérontologie, 2009). Les
chutes ont des conséquences multiples touchant à la fois directement l'individu et le
système de santé. La conséquence, en ce qui concerne l'individu, est : un excès de morbi-
mortalité lié aux conséquences traumatiques (alitement prolongé, perte d’indépendance, …)
et psychologiques (anxiété, peur de chuter de nouveau). Les conséquences au niveau du
système de santé sont associées aux coûts des hospitalisations. En ce sens, d’après le
rapport de l’Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé (INPES), les
personnes de plus de 65 ans représentent 54% des hospitalisés pour des accidents de vie
quotidienne dans les séjours de plus de quinze jours. De plus, la chute est le principal
mécanisme accidentel des personnes de plus de 65 ans, c’est-à-dire 4 accidents sur 5 (Duval,
et al., 2000).
Cependant, connaître les conséquences des chutes ne suffit pas, il faut également en
comprendre les causes. Celles-ci peuvent être multifactorielles, directement liées à l’individu
(la médication, la vue, les chaussures, l’alimentation, …) mais également à son
environnement propice aux chutes (sol glissant, luminosité réduite, encombrement d’une
pièce …).
3
Nous nous sommes interrogés sur le rôle que peut jouer l’ergothérapeute dans cette
problématique de santé. Le médecin intervient pour la médication, le kinésithérapeute pour
la rééducation de l’équilibre, le diététicien pour l’équilibre alimentaire. L'action jouée par
l'ergothérapeute intervenant dans une structure (hôpital, centre de rééducation et de
réadaptation,…) prend place après que la personne ait chuté afin d’assurer la rééducation
(analytique, réengagement dans les activités, mises en situation écologiques) et la
réadaptation (aménagement du domicile, préconisation d’aides techniques). Néanmoins, les
compétences de l’ergothérapeute peuvent permettre l’éducation thérapeutique du patient,
la prévention face à ces risques ou la préconisation préventive de matériels.
Quelle place occupe l'ergothérapeute dans l’équipe pluridisciplinaire face à la
prévention des chutes ? A quel niveau et comment peut-il jouer un rôle préventif?
Quel rôle joue l’ergothérapeute dans la prévention primaire des chutes chez les personnes
âgées?
Afin de mieux cerner notre sujet et d’avancer dans notre réflexion, nous avons
effectué des recherches documentaires, participé à un temps informatif sur la prévention
des chutes des personnes âgées et rencontré une ergothérapeute travaillant dans un service
de soins infirmiers à domicile.
Le rapport retenu (Pinville, 2013) révèle une augmentation du taux de vieillissement
de la population pour les années à venir et dégage les enjeux internationaux en lien avec le
vieillissement. Il est noté qu' « entre 2006 et 2050, la proportion de personnes âgées de plus
de 60 ans devrait doubler pour atteindre 22% ». Ce chiffre élevé conforte l'idée d’adapter la
société aux besoins de la population vieillissante pour maintenir l’autonomie et
l’indépendance des plus âgées. Ce rapport souligne également l'importance de la
prévention, comme solution au vieillissement : « Alors que les systèmes de santé ont
longtemps reposé sur la seule logique curative, la prévention apparaît aujourd’hui dans
l’ensemble des pays de l’OCDE2 comme l’autre pilier de l’action publique en matière de
vieillissement ». Il est ainsi valorisé que « l’adoption de comportements de santé positifs par
l’ensemble de la population » répond à un « vieillissement actif et en bonne santé ».
2 Organisation de Coopération et de Développement Économiques
4
C’est dans ce même but que nous souhaitons orienter notre réflexion vers la
prévention primaire. Elle réunit « l’ensemble des actes visant […] à réduire […] les risques
d’apparition de nouveaux cas ». En revanche, la prévention « secondaire » prend place afin
de détecter la maladie ou les lésions à un stade où une intervention s’est avérée utile. La
prévention tertiaire permet de limiter les complications et les séquelles de la maladie ou de
son traitement (Flajolet, 2008).
Dans un deuxième temps, il nous parait important de décrire successivement le
débat théâtral de prévention des chutes des personnes âgées auquel nous avons participé,
et de l’analyser, car c’est une manifestation qui affecte directement notre sujet de mémoire.
Le débat théâtral « Juliette aux pays des embûches » est organisé par la Mutualité Française,
c’est une mutuelle qui possède notamment un service de prévention et santé.
L’après-midi fut divisé en trois parties : une pièce de théâtre, un temps d’intervention
de professionnels et un temps de débat avec le public.
La pièce de théâtre circule depuis 2001. Elle aborde la problématique des chutes chez
les personnes âgées et est jouée par des acteurs amateurs et bénévoles. Plusieurs thèmes
sont mis en avant dans la pièce de théâtre comme les facteurs favorisant les chutes, les
solutions simples à mettre en place, les chiffres relatifs aux chutes, la discussion autour du
placement en institution, etc. Cette pièce de théâtre met en avant le fait que la chute est un
accident de la vie quotidienne à ne pas négliger, dont les causes peuvent être
multifactorielles. En outre, elle soulève l'idée que des solutions peuvent être apportées
avant l’institutionnalisation. Cette pièce de théâtre nous reflète la situation d'une personne
hospitalisée suite à une chute. Le spectateur peut s’identifier aux personnages de la pièce,
car la plupart des proches de la personne hospitalisée sont représentés. Le réalisme de la
pièce encourage une sensibilisation à la problématique des chutes.
Par la suite, nous avons assisté aux interventions de différents professionnels. La
première était animée par des étudiantes en ergothérapie. Elles ont présenté le métier
d’ergothérapeute, exposé les causes des chutes liées à l’individu (vision, audition,
médication, …) et liées à l’environnement (luminosité, agencement d’une pièce, sol
glissant…). Des conseils et astuces ont été donnés pour faciliter le quotidien (penser à
s’asseoir, éviter les déplacements dans le domicile, …). Enfin, les étudiantes ont présenté sur
5
leur diaporama une gamme de matériel facilitant le quotidien et assurant la sécurité, comme
des aides techniques ou la téléassistance. Cette intervention a permis de faire connaitre
l’ergothérapie, en donnant des conseils simples afin d’éviter les situations à risques, en dépit
du fait que les intervenantes auraient pu exposer davantage le rôle de l’ergothérapeute en
gériatrie. La présentation d’aides techniques a permis d’informer les familles et les
personnes âgées sur le matériel existant sur le marché.
La deuxième intervention concernait le PACT HD3. C’est une association, à but non
lucratif, d’accompagnement des ménages modestes dans la réalisation de leur projet
d’habitat. Les missions sont : d’aider à la décision (visite à domicile, diagnostic autonomie,
évaluation thermique), d’aider à l’élaboration du projet et au montage des dossiers de
subventions (constitution dossier ANAH4, caisse retraite). Le PACT HD exerce des actions de
prévention, car il agit chez des personnes valides. Cette intervention a permis d’informer les
participants sur les aides en matière de financement pour l’aménagement du domicile et de
faire connaitre le PACT HD. Toutefois, nous avons regretté que l’intervenant agisse plus dans
un but « commercial » que « préventif », en insistant à plusieurs reprises sur l’importance de
commencer les travaux le plus rapidement possible, car les réductions de coût n'étaient plus
valables après 2015.
La dernière intervention était celle d’un CLIC5, dont les missions concernent : l’aide
aux démarches administratives, l’aide dans la vie quotidienne (mise en place de matériels,
aide à domicile, subventions), l’information, la prévention et les actions collectives. Les
travailleurs sociaux du CLIC offrent leurs services aux personnes de plus de 60 ans. Cette
intervention a permis d’informer les personnes sur les CLIC et sur les ateliers équilibre mis en
place en partenariat avec un kinésithérapeute. Les participants avaient la possibilité de
s’inscrire aux ateliers en fin de journée. Une vingtaine de personnes s’est inscrites, ce qui
nous permet de conclure que l'information a été reçue positivement par le public.
Cependant, nous avons trouvé que l’intervention du CLIC était brève. Il est un organisme
ressource pour les personnes âgées et leurs familles, il est donc important d’insister sur la
proximité de ces services et l’importance de son rôle d’aide et d’accompagnement.
3 Propagande et Action Contre les Taudis Habitat Développement
4 Agence NAtional de l’Habitat
5 Centre Locale d’Information et de Coordination
6
Après ces temps d’informations, un débat a été animé par les intervenants. Le public
a posé des questions sur le financement des prestations en ergothérapie, le rôle de
l’ergothérapeute au domicile ou encore les études de cette profession. Bien qu'il soit
important que les participants aient un temps de parole, le contexte n’était pas propice à
l’échange : les intervenants sont restés sur scène et les participants placés en tant que
spectateurs. Il aurait été plus avisé de diviser les participants en plusieurs groupes restreints
sur des thèmes proposés, cela aurait permis plus d’interactions.
Par ailleurs, des stands ont été mis à disposition des participants, lesquels exposaient
des aides techniques, de la documentation relative à la prévention des chutes, etc. Nous
avons trouvé ce temps pertinent, les personnes pouvaient manipuler et avoir une
représentation concrète des aides techniques. L'outil documentaire disponible est
également une excellente ressource. Cela permet aux participants de garder une trace de
cette journée sur la prévention des chutes, d’avoir des informations utiles à domicile et des
contacts pertinents en cas de besoin.
Cette journée de prévention des chutes chez les personnes âgées visait à sensibiliser
les personnes âgées elles-mêmes, leur famille mais également les professionnels. Des
étudiants en formation de « service à la personne » et des professionnels intervenant à
domicile étaient présents. Ce sont eux qui agissent au plus près de la personne, et en ce sens
qui apparaissent comme les médiateurs privilégiés pour mettre en œuvre des moyens
permettant de réduire les risques de chutes au domicile.
Pour poursuivre dans ce sens, nous avons rencontré Madame D., ergothérapeute, qui
travaille dans un service de soins infirmiers à domicile. Nous avons choisi d’effectuer
l’entretien exploratoire avec cette professionnelle afin qu'elle nous renseigne sur les actions
que peut mener un ergothérapeute dans l’environnement le plus proche de la personne,
c’est-à-dire son domicile. Nous l’avons interrogée sur son rôle au sein du service à domicile,
sur la population qu’elle rencontrait et sur ces interventions concernant la prévention des
chutes. Cet entretien nous a permis de savoir qu’au sein de ce service, l’ergothérapeute
effectue principalement de la réadaptation auprès des bénéficiaires (aménagement de
domicile, conseils, préconisations de matériel, argumentaire, orientation vers des
organismes spécialisés) et conseille les professionnels intervenant à domicile (infirmiers et
7
aides soignants), principalement en matière de manutention. L’ergothérapeute nous semble
mettre à profit ses compétences dans le maintien à domicile des personnes et de leur
qualité de vie. Elle joue également un rôle d’aide envers les professionnels.
Au cours de l'entretien, l’ergothérapeute nous rapporte qu’elle rencontre
principalement des personnes âgées (de 60 à 100 ans) avec des pathologies diverses. La
demande d’intervention du service de soins à domicile est faite, en majeure partie, lorsque
les personnes vivent seules, n’ont pas de proches à proximité ou lorsque les aidants
familiaux sont épuisés. L’ergothérapeute nous apparaît comme un acteur important dans la
réduction des chutes à domicile, car elle a une proximité avec les personnes à risque de
chutes. En ce sens, lorsqu'une demande d’intervention des services à domicile est sollicitée,
cela nous fait penser qu’il y a un début de perte d’indépendance et représente donc un
facteur de risque de chute plus élevé.
En ce qui concerne la prévention des chutes, l’ergothérapeute nous informe qu’elle
n’est pas directement sollicitée pour effectuer ce type de prévention, mais qu’elle préconise
souvent du matériel pour éviter les chutes et donne des conseils aux personnes comme
l’éclairage, l’agencement d’une pièce, etc. Cela s’explique par un manque de temps, mais
également par une méconnaissance des compétences de l’ergothérapeute de la part de ses
collègues.
L’ergothérapeute n’est donc pas spécifiquement sollicité pour prévenir les chutes, il y
contribue par ses conseils et ses préconisations de matériels lors de ses interventions
ponctuelles. L’ergothérapeute, dans un service de soin à domicile, peut sensibiliser les
personnes âgées, mais n'intervenant que ponctuellement au domicile, il ne représente pas
pour les usagers un professionnel de proximité. En ce sens, il devient important que
l’ergothérapeute effectue également une sensibilisation aux risques de chutes auprès des
professionnels comme les aides à domicile, aides soignants ou infirmiers. Ce sont ces
professionnels qui, en intervenant quotidiennement, instaurent une relation de confiance
privilégiée avec les personnes âgées. Ainsi, ils sont mieux à même de faire changer
l’environnement et les habitudes de vie des personnes prédisposées aux chutes comme en
ajoutant de l’éclairage, enlevant un tapis ou déplaçant un meuble. Il nous semble important
8
de sensibiliser les personnes âgées, mais également les professionnels intervenant
quotidiennement à leur domicile. L’entretien est retranscrit en annexe.
Nous avons donc choisi d’orienter notre mémoire vers la prévention primaire chez les
personnes de plus de 80 ans, car ce sont les personnes les plus touchées par le phénomène
de chute.
En outre, nous souhaitons travailler sur les moyens que peut mettre en place un
ergothérapeute afin que les professionnels intervenant quotidiennement à domicile ainsi
que les personnes âgées elles-mêmes prennent conscience des risques de chute et puissent
modifier leur comportement au quotidien.
Ce qui nous amène à formuler la question de recherche de la façon suivante :
En quoi l’intervention de l’ergothérapeute participerait-elle à prévenir la première chute
chez les personnes de plus de 80 ans vivant à domicile ?
Afin d’apporter des éléments de réponse à cette question, nous poserons les hypothèses
suivantes :
Hypothèse 1 : En sensibilisant les professionnels intervenant régulièrement au domicile des
personnes de plus de 80 ans, aux causes et conséquences de la première chute,
l’ergothérapeute participerait à prévenir cette chute chez ces personnes âgées.
Hypothèse 2 : En menant des actions de prévention primaire touchant les personnes de plus
de 80 ans et leur entourage, l’ergothérapeute participerait à prévenir la première chute.
L’hypothèse 1 sera retenue et traitée dans ce mémoire.
Afin de poursuivre notre réflexion, nous allons apporter dans la prochaine partie des
connaissances théoriques pour comprendre et cerner la problématique des chutes chez les
personnes âgées.
9
2. Apports théoriques
2.1 Les chutes
2.1.1 Généralités
Selon le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales (CNRTL), la chute se
définit comme le « mouvement de quelqu'un ou de quelque chose qui choit, qui tombe ». En
physique, Galilée a mis en évidence que la chute est un « mouvement vertical d'un corps se
rapprochant du centre de la terre sous l'effet de la loi de la pesanteur » (CNRTL, 2012). Par
ailleurs, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) définit la chute comme « un événement à
l’issue duquel une personne se retrouve, par inadvertance, sur le sol ou toute autre surface
située à un niveau inférieur à celui où elle se trouvait précédemment ». Cette organisation
met en évidence les chutes comme « la deuxième cause de décès accidentels ou de décès par
traumatisme involontaire dans le monde ». Il est expliqué que les personnes les plus
touchées par la problématique des chutes sont les personnes âgées et les enfants. La
différence que nous pouvons relever entre ces deux populations est que l’enfant explore son
environnement et les chutes interviennent au cours des différents stades de son
développement. Elles font alors parties du processus d’apprentissage de nouvelles postures.
Tandis que chez la personne âgée, les chutes annoncent une diminution des capacités et
surviennent lors d’activités de la vie quotidienne ritualisées.
Rappelons, qu’un tiers des personnes âgées de plus de 65 ans et 50% des plus de 80
ans vivant à domicile tombent au moins une fois dans l’année, d’après la Société Française
de Gériatrie et de Gérontologie (2009). Si nous regardons de plus près ce phénomène, la
chute constitue un facteur important d’entrée dans la dépendance, environ 30% des
personnes qui s’effondrent seraient concernées. En effet, la chute est l’une des premières
causes d’hospitalisation dans les services de gériatrie : 12% des admissions ont pour motif
une chute.
Outre ces chiffres, les chutes seraient responsables d’environ 12 000 décès par an en
France et seraient la première cause de mortalité accidentelle des plus de 65 ans. De plus, le
10
risque de rechuter est multiplié par vingt après une première chute et la mortalité multipliée
par quatre (Agirc-Arcco, 2010).
La première chute peut être vécue comme un évènement bénin, cependant celle-ci
ne serait pas à négliger. Nous pouvons nous interroger dès à présent sur les facteurs
favorisant la chute chez les personnes âgées.
2.1.2 Les facteurs de risque
Plusieurs facteurs peuvent favoriser une chute chez une personne âgée. On distingue
les facteurs individuels, propres à la personne, des facteurs extrinsèques liés à
l’environnement.
2.1.2.1 Les facteurs individuels
Les troubles de l’équilibre, de la marche et les performances physiques
Les troubles de l’équilibre sont cités en premier lieu, car ils sont fréquemment
rencontrés chez la personne âgée.
Pour mieux comprendre les troubles, faisons un rappel sur les 3 niveaux intervenant
dans le système qui gère l’équilibre. Tout d’abord, il y a les afférences utilisant la sensibilité
proprioceptive et extéroceptive, le système vestibulaire et la vue, qui correspondent à
l’étude de la personne dans son environnement. Ensuite, il y a une interprétation des
informations périphériques par les processus centraux : le cerveau et le cervelet. Enfin, les
organes effecteurs exécutent les mouvements par les articulations et les muscles.
Cependant, en vieillissant ces systèmes se modifient.
Au niveau des afférences, la proprioception devient moins performante et aurait
besoin d’informations supplémentaires notamment apportées par la vue. Or, la vue présente
également quelques altérations avec l’avancée en âge comme le rétrécissement du champ
visuel, une baisse de l’acuité visuelle, la sensibilité au contraste qui diminue, le temps de
récupération après éblouissement qui se prolonge et la réduction de la capacité de la
poursuite oculaire ainsi que l’altération de la précision des mouvements saccadiques. De
11
plus, lors de mouvements rapides et complexes, la sensibilité du vestibule est diminuée. Le
sujet peut alors percevoir une sensation de déséquilibre due à une hyporéflexie vestibulaire.
Au niveau des processus centraux, il est observé une augmentation du temps de
réaction, une désynchronisation des séquences d’activation des muscles, agonistes et
antagonistes, et une baisse des neurotransmetteurs, cependant cette dernière est très
variable selon les individus. La réponse est donc plus lente et moins adaptée.
Enfin, les organes effecteurs vieillissent, ce qui induit une réduction de l’amplitude
articulaire, c’est-à-dire une perte de souplesse, et une diminution de la force musculaire
d’environ 0,5 à 1% par an, à partir de l’âge de 30 ans pour les sujets sédentaires (Agirc-Arcco,
2010).
Les facteurs médicaux
De nombreuses pathologies peuvent être un facteur de risque de chute, c’est
pourquoi nous allons énumérer les principales pathologies dont l’impact a été reconnu.
Tout d’abord, nous pouvons citer les maladies neurologiques centrales et
périphériques qui peuvent être des facteurs de risque de chute tels que les séquelles
d’atteintes vasculaires comme l’hémiplégie, les pathologies neurodégénératives comme la
maladie d’Alzheimer et les syndromes apparentés ou la maladie de Parkinson, puis les
vertiges centraux et périphériques comme la maladie de Ménière6.
Nous pouvons aussi mentionner les problèmes locomoteurs. Les conséquences de
l’ostéoporose avec des déformations rachidiennes de type cyphose dorsale, hyperlordose
cervicale et/ou lombaire peuvent aggraver le risque de chute. L’arthrose en fait également
partie et plus précisément la gonarthrose et la coxarthrose. Les limitations d’amplitudes
articulaires représentent également un facteur de risque de chute et notamment la
réduction de la dorsiflexion de la cheville. La sarcopénie, soit la faiblesse musculaire au
niveau des quadriceps et des grands fessiers notamment, augmente progressivement avec
l’avancée en âge. Enfin, les troubles podologiques comme l’hallux valgus ou les cors sont
souvent négligés, mais sont pourtant fondamentaux pour l’équilibre.
6 « La maladie de Ménière est une atteinte de l'oreille interne se caractérisant par la triade de Ménière : accès
de vertiges de nature rotatoire survenant brutalement, bourdonnements d'oreille et surdité (allant de quelques secondes à quelques jours). » (Agirc-Arrco, 2010)
12
Les atteintes sensorielles sont également un facteur propice aux chutes. Nous
retrouvons dans cette catégorie les pathologies visuelles comme la cataracte, le glaucome
ou la Dégénérescence Maculaire Liée à l’Age (DMLA). La presbyacousie serait également un
facteur de déséquilibre. Cependant, l’appareillage reste mal accepté par la personne, le
diagnostic est pour cette raison posé tardivement.
Certains troubles cardio-vasculaires sont responsables de chutes et plus précisément
l’hypotension orthostatique7 qui est un facteur fréquent de déséquilibre.
Prêtons attention à un phénomène particulier qui est celui de l’association entre la
miction et la survenue d’une chute. Selon l’étude « Lower urinary tract symptoms increase
the risk of falls in older men » menée en 2009, un sujet qui se réveille deux à trois fois par
nuit par des envies d’uriner, aurait un risque de 21% plus élevé de chuter. Pour ceux qui se
réveillent quatre à cinq fois par nuit, le risque passe à 63% (Agirc-Arcco, 2010).
Les facteurs iatrogènes
Rappelons qu’en France, d’après une enquête de l’hôpital Pompidou datant de 2011,
une personne de plus de 80 ans prend en moyenne plus de 10 médicaments par jour. Le
risque de chute augmente avec le nombre de médicaments pris, leur dosage et leur
association. Les effets indésirables de certains médicaments sont également à prendre en
compte dans le risque de chute. Les médicaments qui représentent un facteur favorisant les
chutes sont principalement les neuroleptiques, les antihypertenseurs, les antidépresseurs et
les benzodiazépines (Tigoulet, 2005).
Les facteurs comportementaux
Ils concernent les habitudes de vie et les situations à risque prises au quotidien par
une personne.
Tout d’abord, nous pouvons citer la consommation d’alcool, qui sans être prise de
façon excessive favorise le déséquilibre et affecte les capacités sensitivomotrices.
7 L’hypotension orthostatique correspond à une chute de tension lors du passage de la position couchée à la
position debout (Agirc-Arcco, 2010).
13
La sédentarité affaiblit les capacités physiques et fonctionnelles de la personne âgée
et provoque progressivement une diminution de son indépendance. En effet, l’inactivité
physique conduit alors à une sarcopénie puis une dégradation de l’équilibre et enfin de la
marche (Agirc-Arcco, 2010).
La malnutrition et notamment la dénutrition protéino-énergétique conduisent
également vers la sarcopénie. Le risque de fracture lors de la chute augmente pour les
personnes ayant un indice de masse corporelle (IMC) bas, inférieur à 21 (HAS, 2007).
Certaines habitudes de vie et prises de risque dans le quotidien peuvent augmenter
la probabilité de chuter. Voici quelques exemples fréquemment rencontrés : escalader une
échelle ou une chaise, se hâter, déambuler sans lunettes, marcher les mains dans les
poches, faire un mauvais usage de son aide à la marche (déambulateur, canne), utiliser de
mauvais appuis lors des transferts dans ou hors la baignoire (INPES, 2005).
Les vêtements ou les chaussures non adaptés à la morphologie de la personne
représentent une source de chute. En effet, le port de vêtement trop long, trop ample ou
encore le port de pantoufle altèrent les capacités d’équilibre (Agirc-Arcco, 2010).
2.1.2.2 Les facteurs environnementaux
L’environnement personnel
78% des chutes se déroulent au domicile de la personne (InVS, 2006). L’habitat est en
effet le premier lieu de déséquilibre et de chute. Nous pouvons citer des exemples de risque
de chute au niveau du mobilier comme un fauteuil ou un lit trop bas, une chaise bancale,
l’encombrement de meubles ou d’objets dans une pièce bloquant le passage, des meubles
ou objets roulants, etc. Au niveau du sol, nous pouvons mentionner un tapis ou des fils
électriques mal fixés au sol, un revêtement de sol, un sol glissant, une différence de niveau
d’une pièce à l’autre, etc. Nous repérons également des conditions inadaptées au sein d’un
logement favorisant le risque de chute, telles qu’un mauvais éclairage notamment dans les
couloirs ou escaliers, la pente raide d’un escalier ou de hautes marches ou encore un escalier
sans rampe, une baignoire glissante, des toilettes basses, etc.
Nous pouvons ajouter à ces facteurs environnementaux la présence d’animaux
domestiques. Ces animaux sont souvent des chats ou des chiens. Ils représentent une source
14
de chute notamment avec leur laisse qui peut s’enrouler autour des jambes de la personne
(Agirc-Arcco, 2010).
L’environnement urbain
16% des chutes se déroulent au sein de la voie publique ou dans les zones de
transport. Les conséquences des conditions atmosphériques comme la neige, le verglas ou le
sol rendu glissant par la pluie, sont des facteurs de risque de chute (InVS, 2006). Nous
pouvons citer des exemples de situations rencontrées sur la voie publique pouvant être à
l’origine d’une chute: une dénivellation du sol, le mauvais état d’un trottoir, un lieu mal
éclairé, le rétrécissement d’un passage, un sol glissant, un obstacle imprévu, etc. (Agirc-
Arcco, 2010).
2.1.2.3 En conclusion
D’après de nombreuses études8 citées dans l’étude nationale d’Agirc-Arcco, un
tableau peut être dressé reprenant les facteurs de risques de chute les plus fréquemment
retrouvés chez une personne :
« Un âge supérieur à 80 ans ;
Etre une femme ;
La peur de chuter ;
Des antécédents de chute ;
Des pathologies atteignant la marche ou l'équilibre ;
L’utilisation inappropriée d’une aide technique ;
Une diminution de la force musculaire ;
Une déficience sensorielle mal corrigée ou non modifiable (vue, audition) ;
Une réduction et/ou une dépendance dans les actes de la vie quotidienne ;
Des troubles cognitifs ou psychologiques ;
La prise de plus de quatre médicaments ».
Les facteurs de risque de chute sont par conséquent multifactoriels. Leur association
provoque, chez la personne âgée, une multiplication des risques de chute.
8 Etudes menées par l’American Geriatrics Society, British Geriatrics Society, and American Academy of
Orthopaedic Surgeons Panel on Falls Prevention en 2001
15
La connaissance de ces facteurs serait importante afin que la personne concernée par
ces risques ainsi que son entourage, comme la famille ou les professionnels intervenant
quotidiennement à son domicile, sachent dépister précocement un risque de chute. La prise
de conscience des facteurs de risque participerait à prévenir la chute.
La première chute est importante à éviter, car elle peut entraîner de multiples
conséquences avec un degré de sévérité plus ou moins important.
2.1.3 Les conséquences
La chute peut avoir des conséquences physiques, mais peut également toucher la
sphère psychologique et sociale de la personne.
2.1.3.1 Les conséquences physiques
Les conséquences traumatiques
Elles sont représentées par des hématomes, des plaies cutanées, mais également par
des traumatismes plus sévères comme des fractures. En effet, 2% des chutes se compliquent
par une fracture, dont une fois sur trois à l’extrémité supérieure du fémur (Trombetti et al.,
2009).
Les conséquences secondaires
Elles sont dues aux complications liées à l’immobilisation au sol après la chute. Nous
distinguons deux types de complication :
Primaires : qui sont l’hypothermie, la déshydratation et la rupture thérapeutique, en
effet la personne ne peut pas prendre ses médicaments le temps de l’immobilisation
au sol.
Différées : qui sont les escarres, les accidents thromboemboliques, les infections, les
rhabdomyolyses9 et la dénutrition (Agirc-Arcco, 2010).
9 La rhabdomyolyse est la « destruction du tissu des muscles striés, entraînant la libération dans le sang d'un
pigment musculaire toxique, la myoglobine. » (Agirc-Arrco, 2010)
16
2.1.3.2 Les conséquences psychologiques
Après une chute, une perte de confiance en soi peut apparaître. La crainte de chuter
conduit des personnes à restreindre leur activité de la vie quotidienne par peur de chuter à
nouveau. Cette crainte pouvant devenir excessive, compromet alors la qualité de vie de la
personne et engendre une diminution de ses capacités physiques, qui à leur tour vont
augmenter le risque de chute et l’appréhension de rechuter.
Dans la littérature, la peur de tomber est nommée le « syndrome post-chute » ou
encore la « désadaptation psychomotrice ». Le syndrome post-chute est défini comme
l’« apparition dans les jours suivants une
chute chez une personne âgée, d’une
diminution des activités et de
l’autonomie physique, alors que
l’examen clinique et si besoin le bilan
radiologique, ne décèlent pas de cause
neurologique, mécanique ou de
complication traumatique. » (Nkodo
Mekongo, et al., 2007, pp. 28). Il est
précisé qu’il se produit comme une
sidération des automatismes de
l’équilibre et de la marche. Le
mécanisme du syndrome post-chute est
illustré par la figure 1.
2.1.3.3 Les conséquences sociales
Les personnes restreignent leur activité par peur de rechuter. Il y a alors une baisse
de la participation dans les activités de vie quotidienne. Cette restriction de participation
peut conduire à un isolement social ou à une entrée dans la dépendance (Agirc-Arcco, 2010).
Figure 1 :
Source : DGSP de Québec, (2004), Prévention des chutes dans
un continuum de services pour les aînés vivant à domicile.
17
2.1.3.4 En conclusion
Que les conséquences soient traumatiques, psychologiques ou sociales, la chute peut
entrainer une hospitalisation dans un premier temps, des soins à long terme voir
l’institutionnalisation de la personne (OMS, 2012).
Nous pensons également que les chutes touchent l’entourage de la personne.
L’entrée dans la dépendance demande un investissement plus important pour l’aidant
familial et/ou les professionnels intervenant à domicile pour accomplir les actes de la vie
quotidienne. D’où l’importance de la prévention dans la problématique des chutes chez les
personnes âgées.
2.2 La prévention des chutes
2.2.1 Définition de la prévention
2.2.1.1 Définition générale
D’après le Petit Larousse 2014, la prévention prend sa racine du latin praeventio-onis qui
signifie action de devancer. Sa définition est : l’« ensemble de moyens médicaux et médico-
sociaux mis en œuvre pour empêcher l’apparition, l’aggravation ou l’extension des maladies,
ou leurs conséquences à long terme ».
2.2.1.2 Les différentes classifications de la prévention
Il existe plusieurs classifications des types de prévention qu’il est important de définir.
La classification de l’OMS
L’OMS identifie selon le stade de la maladie, trois types de prévention. Il y a la
prévention dite « primaire » qui s’effectue afin d’éviter l’apparition de la maladie. Ce terme
réunit « l’ensemble des actes visant à diminuer l’incidence10 d’une maladie dans une
population et donc à réduire, autant que faire se peut, les risques d'apparition de nouveaux
cas. Sont par conséquent prises en compte à ce stade de la prévention les conduites
10
« L’incidence correspond au nombre de nouveaux cas d’une pathologie observés pendant une période et pour une population déterminée. Aussi, l’incidence est un critère majeur à prendre en considération pour évaluer la fréquence et la vitesse d’apparition d’une pathologie. » (Flajolet, 2008)
18
individuelles à risque, comme les risques en terme environnementaux ou sociétaux. »
(Flajolet, 2008). Ensuite, la prévention « secondaire » prend place afin de détecter la maladie
ou les lésions à un stade où une intervention s’est avérée utile. « Le but de la prévention
secondaire est de diminuer la prévalence11 d’une maladie dans une population. Ainsi, ce
stade de la prévention recouvre les actes destinés à agir au tout début de l’apparition du
trouble ou de la pathologie afin de s’opposer à son évolution, ou encore pour faire disparaître
les facteurs de risque.» (Flajolet, 2008). Enfin, la prévention tertiaire permet de limiter les
complications et les séquelles de la maladie ou de son traitement. La prévention tertiaire
vise alors « la réadaptation du malade, sous la triple dimension du médical, du social et du
psychologique. » (Flajolet, 2008).
La classification du Professeur San Marco
La classification de RS. Gordon établit en 1982, définit les types de prévention selon la
nature de la population cible. Cependant, le Professeur San Marco donne à cette
classification une vision plus globale de la prévention, en 2003, et intègre la participation du
sujet dans la gestion de sa santé. Le Professeur nomme alors la prévention universelle, la
prévention orientée et la prévention ciblée. La prévention universelle est destinée à
l’ensemble de la population, alors que la prévention orientée s’exerce sur les sujets à risque.
Enfin, « la prévention ciblée est plus largement une prévention destinée aux malades. Elle
correspond alors à l’éducation thérapeutique. » (Flajolet, 2008).
2.2.1.3 En conclusion
Sera considérée dans cet écrit la classification de l’OMS car elle est mondialement
répandue et utilisée dans la littérature. Les types de prévention qui vont nous intéresser
sont la prévention primaire et la secondaire. D’une part, la prévention primaire sera prise en
compte comme référence dans la problématique des chutes, aux comportements individuels
modifiables. D’autre part, la prévention secondaire agit sur les facteurs de risques des
chutes. Comme nous souhaitons intervenir avant l’apparition de la première chute, la
11
« La prévalence est une mesure de l'état de santé d'une population à un instant donné. Pour une affection donnée, elle est calculée en rapportant à la population totale, le nombre de cas de maladies présents à un moment donné dans une population (que le diagnostic ait été porté anciennement ou récemment). La prévalence est une proportion qui s'exprime généralement en pourcentage. » (Flagolet, 2008)
19
prévention tertiaire ne sera pas prise en compte. En outre, la prévention primaire et
secondaire présentent un enjeu majeur actuellement en France.
2.2.2 Les enjeux de la prévention des chutes chez les personnes
âgées
« Le nombre de personnes de plus de 60 ans augmentera, à lui seul, de plus de
10 millions. En 2060, une personne sur trois aura ainsi plus de 60 ans. » (INSEE, 2010). Le
vieillissement de la population est de ce fait au cœur des préoccupations.
D’après une étude du Centre d’Observation de la Société, l’espérance de vie en France,
est de 78,7 ans pour les hommes et 85 ans pour les femmes en 2013. Cependant, le nombre
moyen d’années qu’une personne de 65 ans peut espérer vivre sans incapacité est estimé à
9,7 pour les femmes et 8,5 pour les hommes en 2005, évoluant en 2010 vers 9,8 pour les
femmes et 9 pour les hommes (INSEE, 2012). C’est l’Espérance de Vie Sans Incapacités
(EVSI). Elle est importante à prendre en compte, car elle entraine des conséquences sur les
plans économique, social et sanitaire.
Les trois catégories de personnes âgées distinguées sont :
En bonne santé
En état de fragilité
Dépendantes
L’état de fragilité représente la diminution des capacités physiologiques et serait un
facteur de risque d’entrée dans la dépendance, favorisant les risques de chute,
l’hospitalisation ou l’institutionnalisation. Sa prise en soin par des actions adaptées
permettrait de réduire ou retarder ses conséquences. L’identification de cet état est donc
importante à prendre en compte notamment dans le domaine de la prévention.
Les critères de fragilité sont décrient ci-dessous (Fried, 2001):
La diminution de la force musculaire ;
Les activités physiques réduites ;
La vitesse de marche ralentie ;
La perte de poids inexpliquée ;
La fatigabilité physique et psychique.
20
Lorsqu’une personne présente au moins deux de ces critères, elle est dite « pré-
fragile ». Ce stade touche 10 à 20% des personnes âgées de 65 ans et plus, ainsi que plus de
40% des 85 ans et plus. Il est donc important de repérer cet état afin de limiter la perte
d’indépendance et d’autonomie.
Pour la première fois dans le droit français, une définition de la politique de
prévention est établie : « La politique de prévention a pour but d’améliorer l’état de santé de
la population en évitant l’apparition, le développement ou l’aggravation des maladies ou
accidents et en favorisant les comportements individuels ou collectifs pouvant contribuer à
réduire le risque de maladie et d’accident. » (Code de la santé publique, 2002). Cet article de
droit met en avant les missions d’une politique de prévention qui s’appliquent à la
problématique des chutes.
Les types de prévention, primaire, secondaire et tertiaire sont pris en compte selon l’âge
et les besoins de la personne. Il existe plusieurs domaines de prévention dont le premier
cité : « La prévention des chutes – c’est la thématique dans laquelle on retrouve le plus
d’interventions efficaces » (INPES, 2013).
L’enjeu du vieillissement de la population est de taille, c’est pourquoi des outils de
prévention sont mis en place comme l’éducation pour la santé.
2.2.3 L’éducation pour la santé : un outil de prévention
Dans un premier temps, définissons l’éducation pour la santé qui « est un processus au
travers duquel les personnes peuvent acquérir des compétences et les moyens de les exercer
en faisant des choix favorables pour leur santé. En elle-même, l’éducation pour la santé, par
son processus, contribue à l’amélioration de la santé. […] Tous les secteurs des préventions
primaire et secondaire, tous les publics peuvent être concernés par les actions éducatives
pour la santé qui se déroulent tout au long de la vie. » (Tessier, 2012)
Les méthodes de l’éducation pour la santé sont « la motivation, le centrage sur les
intérêts de la personne ou du groupe, la relation éducative facilitant le changement, la
transmission de connaissances dans le cadre d’un échange de savoirs, la prise en compte des
21
représentations, du sens et de l’apport des comportements préexistants, […] la
complémentarité des intervenants, l’aide au changement, la médiation. » (Bouchet, 2000).
« Eduquer est un processus d’accompagnement des changements de comportements. »
(Tessier, 2012). C’est en effet le but de la prévention des chutes, d’amener les personnes
vers une prise de conscience et un changement de comportement. Cependant, notons que
l’éducation s’accompagne d’une réflexion éthique et méthodologique et qu’il est un
composant majeur des actions de promotion de la santé. Le but de l’éducation est de
changer les comportements au bénéfice de la santé des personnes ou qu’elles conservent
leurs comportements, mais en disposant de l’information nécessaire, c’est-à-dire en toute
connaissance de cause.
« Les professionnels de santé, quelle que soit leur discipline, peuvent être mobilisés dans
la démarche éducative.» (Tessier, 2012). De plus, des personnes dites relais peuvent
intervenir pour faire circuler un certain nombre d’informations, ce sont des
accompagnateurs à l’action éducative. Pour la thématique de la prévention des chutes chez
les personnes âgées, cet accompagnement à l’action éducatrice peut être pratiqué par les
professionnels intervenant directement auprès de la personne.
Beaucoup de professionnels peuvent intervenir au domicile de la personne âgée,
cependant nous avons choisi de vous présenter ceux qui interviennent régulièrement voir
quotidiennement pour réaliser des tâches de la vie quotidienne ou des soins.
2.3 Les acteurs de la prévention des chutes au domicile de la
personne âgée
Nous pouvons retrouver ces professionnels au sein d’un Service d’Aide à Domicile
(SAD) ou un Service de Soins Infirmiers à Domicile (SSIAD). Il s’agit de l’aide à domicile,
l’auxiliaire de vie sociale, l’aide soignant, l’infirmier et l’ergothérapeute.
2.3.1 L’aide à domicile
L’aide à domicile est un professionnel qui peut intervenir régulièrement au domicile de la
personne âgée. Il est appelé lorsque la personne âgée ne peut réaliser seule ou a besoin
d’aide pour réaliser des tâches de la vie quotidienne.
22
D’après le référentiel de compétences «le titulaire de la mention complémentaire Aide à
domicile exerce ses fonctions auprès de familles, de personnes âgées ou de personnes
handicapées vivant en logement privé, individuel ou collectif. Il travaille en étroite
collaboration avec les différents partenaires sanitaires et sociaux intervenant auprès de ces
catégories d’usagers. Sa formation technique et humaine lui permet une approche globale de
la personne et de répondre, dans la limite de ses compétences et des contraintes imposées,
aux besoins de vie quotidienne de ces personnes. Il contribue au maintien de leur vie
sociale. » (IRSAP12, 2013)
Il est décrit dans le rapport du comité Avancée en Age « Prévention et qualité de vie »
que « Les aides à domicile, par leur présence régulière à domicile, ont un rôle d’alerte et de
veille sociale qui doit être mieux reconnu et, éventuellement, complété par des formations
adaptées au pré-dépistage et à la sollicitation des acteurs médicaux concernés. ».
C’est pourquoi l’aide à domicile peut être un acteur de prévention privilégié.
2.3.2 L’auxiliaire de vie sociale
L’auxiliaire de vie sociale accompagne la personne dans les activités de la vie
quotidienne.
« Les auxiliaires de vie sociale (AVS) bénéficient d'un diplôme d'état de niveau V, qui a été
construit pour encadrer l'exercice de l'intervenant au domicile, lequel accompagne une
personne dans les actes de sa vie quotidienne, participe à l'entretien de son environnement, à
son hygiène, mais aussi dans l'effectuation d'un certain nombre de démarches
administratives ou autres interventions à l’extérieur du domicile comme «faire des courses »
ou « aller chercher des résultats d’examens de laboratoire » » (ARS13 Rhône Alpes, 2013).
L’étude de Geneviève Imbert publiée en 2012 dans Gérontologie et Société met en avant
« le positionnement privilégié des auxiliaires de vie auprès des personnes chez lesquelles elles
interviennent et leur potentiel à être acteurs d’actions de prévention, sous certaines
conditions. ». En effet, il est cité que les auxiliaires ont un « accès privilégié au repérage de
12
Institut Régional des Services à la Personne 13
Agence Régionale de Santé
23
certains problèmes de santé des personnes âgées et peuvent ainsi contribuer à des actions de
prévention. »
Toutefois, les auxiliaires de vie seront des acteurs de prévention de première ligne au
domicile des personnes âgées lorsque leur statut sera clarifié. Il est en effet revendiqué une
formation adaptée pour qu’ils puissent répondre au mieux aux besoins de la personne
notamment au niveau des actions de prévention (Avancée en âge, 2013).
2.3.3 L’aide soignant
L’aide soignant est un professionnel appelé à intervenir régulièrement au domicile des
personnes âgées. Il réalise le plus souvent des soins d’hygiène.
D’après le référentiel de formation du diplôme professionnel d’aide soignant, il « exerce
son activité sous la responsabilité de l’infirmier […] l’aide-soignant réalise des soins liés aux
fonctions d’entretien et de continuité de la vie visant à compenser partiellement ou
totalement un manque ou une diminution de l’autonomie de la personne ou d’un groupe de
personnes. Son rôle s’inscrit dans une approche globale de la personne soignée et prend en
compte la dimension relationnelle des soins. L’aide-soignant accompagne cette personne
dans les activités de sa vie quotidienne, il contribue à son bien-être et à lui faire recouvrer,
dans la mesure du possible, son autonomie. Travaillant le plus souvent dans une équipe
pluriprofessionnelle, en milieu hospitalier ou extrahospitalier, l’aide-soignant participe, dans
la mesure de ses compétences et dans le cadre de sa formation aux soins infirmiers
préventifs, curatifs ou palliatifs. Ces soins ont pour objet de promouvoir, protéger, maintenir
et restaurer la santé de la personne, dans le respect de ses droits et de sa dignité. »
L’aide soignant peut également effectuer des tâches pour la personne qui ne sont pas de
sa fonction première comme rendre des services, « tels qu’ouvrir la porte au
kinésithérapeute ou au médecin […] aller chercher un traitement manquant à la pharmacie,
apporter le repas... » (ARS Rhône-Alpes, 2013)
De plus, l’aide soignant est placé dans « un rôle d'interlocuteur privilégié, qui assure la
coordination opérationnelle des interventions auprès de la personne âgée. Il est en relation
étroite avec les autres personnes intervenant au domicile » (ARS Rhône-Alpes, 2013).
24
2.3.4 L’infirmier
L’Infirmier Diplômé d’Etat (IDE) est un professionnel appelé à intervenir régulièrement
au domicile des personnes âgées.
Selon le Ministère des affaires sociales et de la santé, « l’infirmier réalise des soins
destinés à maintenir ou restaurer la santé de la personne malade. Il surveille l’état de santé
des patients et coordonne les soins […] Il travaille en étroite relation avec le corps médical et
encadre parfois une équipe d’aides-soignants. »
Pour effectuer des soins à domicile, l’infirmier peut exercer en libéral ou au sein d’un
SSIAD. Les soins à domicile sont cependant assurés par 93% d’infirmiers libéraux. Ce sont des
infirmiers dits de proximité qui assurent la totalité des soins des personnes vivant à leur
domicile (Macrez, 2010).
Notons que l’infirmier libéral a une place importante auprès de la personne soignée à
domicile. En effet, il joue souvent le « rôle de coordinateur, du fait de sa position privilégiée
auprès des patients et des familles » (IRDES14, 2002).
Par ailleurs, au sein des SSIAD, ce rôle de coordinateur est plus formel, car l’équipe est
constituée « d’au moins un infirmier coordinateur pour assurer l’organisation des soins, des
aides soignants qui assurent sous la responsabilité des infirmiers les soins de base et
relationnels». De plus, « Les services de soins infirmiers à domicile ont pour mission de
contribuer au soutien à domicile des personnes, notamment en prévenant, ou différant,
l’entrée à l’hôpital ou dans un établissement d’hébergement. » (Macrez, 2010). Dans ce cas,
la prévention de l’entrée à l’hôpital ou en institut pour les personnes âgées peut être menée
par celle des chutes au domicile.
Les infirmiers sont donc des acteurs de prévention potentiels, car ils possèdent ce statut
privilégié auprès de la personne.
2.3.5 L’ergothérapeute
L’ergothérapeute est un professionnel qui intéresse notre mémoire et dont nous allons
développer la fonction en relation avec la prévention des chutes et la sensibilisation qu’il 14
Institut de Recherche et de Documentation en Economie de la Santé
25
peut mener auprès de professionnels intervenant à domicile tels que l’aide à domicile,
l’auxiliaire de vie sociale, l’aide soignant ou encore l’infirmier.
Tout d’abord, d’après l’Association Nationale Française des Ergothérapeutes (ANFE),
l’ergothérapeute « est un professionnel de santé qui fonde sa pratique sur le lien entre
l'activité humaine et la santé. L'objectif de l'ergothérapie est de maintenir, de restaurer et de
permettre les activités humaines de manière sécurisée, autonome et efficace. Elle prévient,
réduit ou supprime les situations de handicap en tenant compte des habitudes de vie des
personnes et de leur environnement […] L'ergothérapie peut aussi permettre de prévenir un
problème ou d'en réduire les effets. Il participe aussi aux actions de promotion de la santé, de
prévention ou d'enseignement concernant les populations à risque de perte d'autonomie. »
Nous pouvons retrouver dans le référentiel des compétences de l’ergothérapeute, la
compétence 5 : élaborer et conduire une démarche d’éducation
et de conseil en ergothérapie et en santé publique, la compétence 9 : organiser les activités
et coopérer avec les différents acteurs, et la compétence 10 : former et informer. Ces trois
compétences vont intéresser directement notre sujet et sont le reflet qu’un ergothérapeute
a un rôle à jouer dans la prévention des chutes. Il a notamment les compétences pour
sensibiliser les professionnels aux risques de chute dans le cadre d’actions de sensibilisation
qui peuvent se présenter sous différentes formes : une conférence tout public ou une
formation collective destinée à des professionnels par exemple.
L’ergothérapeute est le professionnel qui peut notamment remédier aux risques de
chute extrinsèques et notamment les risques liés à l’environnement. Il est à même de faire
une étude dans le logement de la personne pour déterminer les risques potentiels de chute.
L’ergothérapeute propose alors des solutions adaptées pour diminuer les risques de chutes
au domicile de la personne, telles que des aménagements de logement ou des
préconisations d’aides techniques (Agirc-Arcco, 2010).
Nous avons pris en compte dans cette partie les aspects théoriques de la problématique
des chutes chez les personnes âgées vivant à domicile. Nous allons maintenant aborder la
méthodologie de recherche employée pour recueillir des données complémentaires auprès
de personnes ressources.
26
3. Méthodologie de recherche
Afin de répondre à la question de recherche, nous avons choisi d’élaborer deux types
de recueils de données, un questionnaire et un entretien. Ainsi pour débuter, rappelons la
question de recherche :
En quoi l’intervention de l’ergothérapeute participerait-elle à prévenir la première
chute chez les personnes de plus de 80 ans vivant à leur domicile ?
Citons également l’hypothèse retenue :
En sensibilisant les professionnels intervenant régulièrement au domicile des
personnes de plus de 80 ans, aux causes et conséquences de la première chute,
l’ergothérapeute participerait à prévenir cette chute chez ces personnes âgées.
3.1 Le questionnaire
3.1.1 Choix de l’outil et des destinataires
Le questionnaire a été choisi pour établir un état des lieux de l’intervention des
professionnels concernant la problématique des chutes chez les personnes âgées. Le but
étant de recueillir des données quantitatives pour dresser un tableau de la situation. Le
questionnaire va mettre en avant les connaissances des professionnels sur le sujet et les
solutions mises en place, puis sera identifié l’outil de sensibilisation qui leur semble le plus
adapté. Nous observerons alors ultérieurement la pertinence de l’intervention de
l’ergothérapeute auprès de ces professionnels concernant les chutes. Les atouts de ce type
de recueil de données pour les destinataires sont la rapidité et la facilité d’usage.
Ce questionnaire est destiné aux professionnels intervenant régulièrement au
domicile des personnes de plus de 80 ans soit les infirmiers, les aides soignants, les
auxiliaires de vie sociale et les aides à domicile. Pour cela, un service d’aide à domicile et
plusieurs services de soins infirmiers à domicile ont été contactés. Dans un premier temps,
nous avons envoyé des mails aux responsables de services pour avoir leur accord quant à la
diffusion du questionnaire. D’une part, la distribution du questionnaire s’est effectuée en
version papier au service d’aide à domicile et d’autre part, par mail aux services de soins
27
infirmiers à domicile. Par ailleurs, nous avons rencontré des difficultés à contacter les
services de soins infirmiers à domicile et à obtenir leur accord pour distribuer le
questionnaire à l’équipe. Sur sept services de soins infirmiers contactés, seulement deux ont
répondu positivement.
3.1.2 Réalisation du questionnaire
Il se compose de huit questions dont des questions fermées, semi-ouvertes et
ouvertes. Le questionnaire débute avec des questions dites « générales » pour avoir des
éléments sur la personne interrogée et introduire le sujet. Les réponses aux questions
suivantes ont permis d’apporter des données sur la nécessité et la pertinence de
l’intervention d’un ergothérapeute auprès de ces professionnels sur la problématique des
chutes. Enfin, un dernier item a permis aux interrogés d’ajouter librement des informations
supplémentaires ou des commentaires sur le questionnaire. Ce dernier est disponible en
annexe.
3.2 Les entretiens
3.2.1 Choix de l’outil et des destinataires
Le recueil d’informations a été complété par des entretiens afin de recueillir des
données de la part des ergothérapeutes, professionnels concernés par ce mémoire. Pour
cela, des recherches sur Internet ont été effectuées ainsi que dans la revue Ergothérapie afin
d’obtenir des contacts d’ergothérapeutes travaillant à domicile auprès de professionnels
intervenant régulièrement au domicile des personnes. Notre choix s’est orienté vers trois
ergothérapeutes, car toutes travaillent dans des structures différentes, mais sont en relation
avec des professionnels intervenant à domicile. Nous avons constaté la difficulté de trouver
des ergothérapeutes exerçant au domicile des personnes. Les entretiens ont été réalisés par
échange téléphonique, car l’éloignement géographique ne permettait pas une rencontre
directe. Par ailleurs, ce type de recueil de données a permis d’obtenir des données
qualitatives. En effet, les informations transmises sont riches, abondantes, précises et ne
peuvent être transcrites dans un questionnaire.
28
3.2.2 Réalisation de la grille d’entretien
L’entretien est semi-directif pour laisser la liberté au professionnel de s’exprimer tout
en l’orientant vers les thèmes qui nous intéressent. Pour cela, les questions sont toutes
ouvertes. Pour chacune, nous avons élaboré des sous-questions pour relancer le sujet ou
préciser l’interrogation initialement posée. Cet entretien a eu pour but de comprendre le
ressenti des ergothérapeutes au sujet de la sensibilisation qu’ils peuvent exercer sur les
professionnels. La grille d’entretien est disponible en annexe.
Nous allons, dans la prochaine partie, analyser les réponses des aidants professionnels
recueillies par le questionnaire et les réponses aux entretiens des trois ergothérapeutes
travaillant au domicile des personnes.
29
4. Analyse des données recueillies
4.1 Analyse du questionnaire
Ont été recueilli 36 réponses au questionnaire dont 21 provenant d’un Service d’Aide
à Domicile (SAD) et 15 de deux Services de Soins Infirmiers à Domicile (SSIAD). Un des deux
SSIAD comptait un ergothérapeute dans son service.
4.1.1 Répartition des professionnels
Les aides à domicile représentent une partie importante des professionnels ayant
répondu au questionnaire. Les infirmiers ne seront pas représentés dans l’analyse car
aucune réponse de leur part n’a été recueillie malgré leur présence dans les services. Cet
échantillon ne peut être représentatif de la répartition des professionnels dans les services à
domicile, cependant il caractérise notre population d’étude. Deux autres professionnels ont
souhaité répondre au questionnaire, la directrice d’un SSIAD et un ergothérapeute.
4.1.2 Le nombre de personnes de plus de 80 ans pris en charge
Les chiffres donnés par les aides soignants et ceux des aides à domicile, auxiliaires de
vie sociale ont été séparés car un écart important est observé. Le nombre moyen de
personnes de plus de 80 ans chez qui l’aide à domicile ou l’auxiliaire de vie sociale intervient
est de 8. Tandis qu’un aide soignant s’occuperait d’environ 35 personnes âgées à domicile.
Cet écart signifie que les aides soignants rencontrent plus de personnes âgées à domicile que
44%
36%
14%
6% 0%
Professionnels
Aides à domicile
Aides soignants
Auxilaire de vie sociale
Autres
Infirmiers
30
les aides à domicile. Cela pourrait s’expliquer par le fait que l’aide soignant assiste les
personnes en perte d’indépendance à réaliser les actes de la vie quotidienne, comme la
toilette, pour maintenir leur état de santé et leur hygiène. De l’autre côté, l’aide à domicile
ou l’auxiliaire de vie sociale accompagne les personnes dans leurs activités domestiques ou
sociales comme les courses, les sorties extérieures. Ils n’interviennent donc pas
spécifiquement chez des personnes âgées. Nous pouvons ajouter à cela la différence de
temps d’intervention. En effet, pendant que l’auxiliaire restera une demi-journée chez une
personne, l’aide soignant pourra intervenir chez plusieurs.
4.1.3 Les situations de risque de chute déjà rencontrées par les
professionnels
Les réponses ont été catégorisées afin de faire ressortir les risques de chute ciblés par
les professionnels.
Les facteurs environnementaux :
Le tapis : est un facteur de risque retrouvé dans la plupart des réponses. Il est donc
bien identifié par les professionnels.
Les sols glissants : sont exprimés dans la majorité des réponses.
Les obstacles au sol : sont cités à plusieurs reprises comme « magazines à même le
sol », « fils électriques ou autres objets au sol ».
Les chaussures ou chaussons non adaptés à la personne : sont mentionnés à de
multiples reprises.
L’agencement du logement : est évoqué par « des meubles mal disposés ».
La salle de bain : a été ciblée comme une pièce avec des dangers, surtout lors de
l’entrée ou la sortie de la baignoire ou de la douche.
Le matériel non adapté à la personne : est exprimé par « la hauteur des fauteuils, lit
ou chaise ».
Les facteurs individuels :
La perte d’équilibre : est ciblée dans de nombreuses réponses.
Les troubles de la vue : sont nommés plusieurs fois telle que « la vue qui baisse ».
La désorientation de la personne : est citée à plusieurs reprises.
31
Le lever nocturne : est désigné par « le manque de lumière la nuit ».
La prise non adaptée de médicaments : par un oubli ou la prise de médicament non
appropriée pour la personne.
Le déni des incapacités : est nommé comme tel : « personne qui croit pouvoir faire
des gestes quotidiens, mais qui ne sont plus adaptés (faire la cuisine, ménage,
jardinage, …) ».
Les transferts : sont cités cinq fois comme une manipulation à risque de chute ainsi
que l’utilisation du matériel spécifique aux transferts.
Les facteurs environnementaux sont largement cités par les aides à domicile et les
auxiliaires de vie sociale. Ces professionnels relèveraient ce qu’ils observent au quotidien, en
lien avec leur activité professionnelle comme l’entretien du logement notamment. Les
facteurs individuels sont nommés majoritairement par les aides soignants. Ce sont des
professionnels qui aborderaient les risques de chute avec un regard plus médical que les
aides à domicile. Les différences de formation initiale de ces professions pourraient en être
l’origine.
4.1.4 L’avis des professionnels sur leur rapport privilégié avec les
personnes
Les professionnels interrogés pensent que leur place est appropriée pour exercer de
la prévention auprès de la personne qu’ils suivent au quotidien.
36%
64%
0% 0%
Le rapport privilégié
Tout à fait d'accord
Plutôt d'accord
Plutôt pas d'accord
Pas d'accord
32
4.1.5 Les propositions des professionnels après le repérage de
facteurs de risque de chute
D’après la majorité des réponses, les professionnels conseillent les usagers et leur
famille. Les conseils nommés sont en lien direct avec les risques de chute cités au préalable
comme « enlever les tapis », « ne pas cirer le parquet », « chaussures qui tiennent au pied »
etc. Le professionnel peut donner des conseils oralement à la personne ou peut l’aider à les
réaliser lors de son intervention. Lorsqu’un risque de chute est repéré, certains
professionnels avertissent leur responsable de service, le médecin traitant ou le
kinésithérapeute de la personne pour qu’ils soient orientés vers des solutions.
Quelques réponses attirent notre attention. L’une d’entre elles est « la mise en place
de la téléalarme » et laisser « une clé chez le voisin ». Ce sont des conseils préventifs donnés
à la personne en cas de chute. Deux réponses précisent que l’intervention de
l’ergothérapeute peut être une solution mise en place après le repérage d’un facteur de
risque de chute. La visite à domicile par l’ergothérapeute serait un moyen de pallier les
risques de chute. Enfin, la question a du être comprise par les personnes interviewées
comme « qu’avez-vous mis en place après le repérage d’une chute » au lieu de « qu’avez-
vous mis en place après le repérage d’un facteur de risque de chute » car deux personnes
ont répondu qu’elles appelaient les pompiers.
4.1.6 Le besoin d’accompagnement ou d’information sur la
problématique des chutes chez les personnes âgées
Les avis sont partagés même si la majorité estime nécessaire un complément
d’information. Parmi les 8 réponses « plutôt pas d’accord », 4 ont spécifié qu’un
ergothérapeute était présent dans leur service, que la formation lui avait déjà été donnée ou
qu’ils en discutaient en équipe. Ces réponses proviennent toutes du SSIAD qui compte dans
son équipe un ergothérapeute. Son intervention serait alors pertinente afin d’apporter des
connaissances aux professionnels intervenant régulièrement au domicile des personnes
âgées.
33
4.1.7 L’aide la plus adaptée pour compléter leurs connaissances
sur la problématique des chutes
Les résultats nous montrent que la formation collective est une aide qui satisfait les
professionnels concernés.
Prenons en compte que huit personnes ont répondu qu’ils souhaitaient une
formation complétée d’un document explicatif. Deux personnes ont répondu qu’elles
désiraient une formation et un soutien par un professionnel. Une réponse précise que le
document explicatif est adapté pour informer la famille.
14%
63%
23%
0%
Le besoin d'accompagnement ou d'informations complémentaires
Tout à fait d'accord
Plutôt d'accord
Plutôt pas d'accord
Pas du tout d'accord
60% 19%
19%
2%
L'aide la plus adaptée
Une formation collective
Un document explicatif
Un soutien par un professionnel
Un entretien indivuduel
34
4.1.8 La transposition des savoirs acquis dans la pratique
professionnelle
Les professionnels ont répondu librement à cette question. Plusieurs thèmes
ressortent malgré la diversité des réponses.
Informer, conseiller, prévenir, éduquer : la majorité des réponses ont été axées sur
ces idées. Les professionnels disent qu’ils pourront expliquer « les potentiels risques
de chute », « informer les personnes grâce à la formation », donner « des conseils à
mes bénéficiaires ou à leurs familles », « prévenir les usagers des risques de chute en
fonction de leur logement » ou enfin « éduquer l’entourage du patient ».
Apporter des solutions à la personne : des professionnels citent des solutions
concrètes qu’ils apporteraient comme « aménagement du logement (enlever tapis,
meuble), adaptation (au domicile, de la marche, canne, déambulateur) etc. ».
Rassurer la personne et se rassurer : le complément d’information permettrait
d’aider et de rassurer la personne. D’autre part, quelques professionnels soulèvent le
fait qu’eux-mêmes se sentiraient rassurer : « je serais plus à l’aise face à la situation
quand j’aurais acquis des informations supplémentaires ».
Transmettre et échanger les informations : certaines personnes interrogées disent
que les informations pourront être partagées avec les stagiaires, remplaçantes,
collègues ou lors de réunions d’équipe.
4.1.9 Les commentaires ou informations supplémentaires
Quatre personnes ont souhaité s’exprimer librement. Une réponse a notifié que le
questionnaire était intéressant. Une autre précise qu’un rapide état des lieux est fait à la
première intervention et que les risques potentiels sont à discuter avec l’usager si possible
ou avec le service d’aide à domicile, la famille ou les amis proches. Une réponse souligne que
« Chaque difficulté ou handicap de la personne âgée est différent. Le conseil n’est pas
toujours facile malgré la confiance qu’elle nous donne. L’acceptation de la perte d’autonomie
[…] la peur de la chute ou de la rechute complique parfois la volonté de continuer ».
L’intervention d’un professionnel extérieur à la situation serait donc parfois nécessaire afin
d’assurer un relais auprès de l’aidant professionnel. Enfin, une information complète mon
35
questionnaire en expliquant que des réunions d’information destinées aux familles existent
au sein des CLIC.
4.2 Analyse des entretiens
Nous nommerons la première ergothérapeute interrogée ‘Ergo 1’, la deuxième ‘Ergo 2’
et la dernière ‘Ergo 3’.
4.2.1 Présentation des ergothérapeutes
‘Ergo 1’ travaille au sein d’un Service d’Accompagnement Médico-Social pour Adultes
Handicapés (SAMSAH) et d’un PACT15. Son rôle au sein du SAMSAH est d’accompagner des
personnes en situation de handicap moteur dans leur projet de vie, tant au niveau du
matériel, des sorties extérieures que dans l’aménagement de leur logement. Elle indique
qu’elle travaille beaucoup en collaboration avec les services à domicile prestataires. Au sein
du PACT, elle réalise des évaluations à domicile et donne des conseils pour l’aménagement
du logement. Son public est principalement âgé.
‘Ergo 2‘ travaille à temps partiel au sein d’un CLIC. Elle accueille et conseille les
personnes âgées ou les personnes en situation de handicap ne relevant plus d’une
orientation MDPH16. Elle les oriente vers des structures qui pourront répondre à leur besoin.
‘Ergo 2’ travaille également auprès de la CARSAT17 où son rôle est d’évaluer globalement les
besoins des personnes âgées ayant été cotées GIR 5 ou 618 pour ensuite proposer un plan
d’aide humaine, préconiser des aides techniques ou l’aménagement du logement. Des
ateliers mémoire ou d’équilibre leur sont aussi proposés. Enfin, ‘Ergo 2’ anime
ponctuellement des réunions d’information sur l’habitat, les gestes et postures, les aides
techniques.
‘Ergo 3’ travaille au sein d’un SAMSAH-SAVS19 auprès de personnes en situation de
handicap moteur. Son but est d’amener les personnes vers l’autonomie et l’indépendance
15
Protection Amélioration Conservation Transformation 16
Maison Départementale des Personnes Handicapées 17
Caisse d’Assurance Retraite et de la Santé au Travail 18
Le Groupe Iso-Ressource (GIR) 5 signifie que la personne est autonome mais a besoin d’une aide ponctuelle, le GIR 6 signifie que la personne est autonome dans tous les actes de la vie quotidienne 19
Service d’Accompagnement à la Vie Sociale
36
en leur proposant des moyens de compensation et en facilitant l’intervention des aidants à
domicile.
4.2.2 Le contexte de mise en place d’actions de sensibilisation
‘Ergo 1’ fait de la sensibilisation auprès des aidants professionnels et familiaux,
principalement au niveau de l’utilisation de matériel au domicile. « La demande de ces
interventions vient de la part de la responsable du service d’auxiliaire de vie ». Les
professionnels ont souvent besoin d’explications pour utiliser dans des conditions optimales
du matériel dit spécifique tel que le lève personne.
‘Ergo 2’ a mené des actions de sensibilisation sur les aides techniques et gestes et
postures lors d’ateliers d’aide aux aidants familiaux et avait pour projet de participer à une
conférence sur la prévention des chutes. « Les actions sont menées suite aux demandes des
aidants directement ». Les demandes d’actions de sensibilisation peuvent également venir
des conseillers en gérontologie : ils repèrent en effet les besoins de la personne.
‘Ergo 3’ rapporte que les actions de sensibilisation se déroulent « d’une manière pas très
formalisée, qui ne suit pas un protocole particulier ». Elles se mettent en place en fonction
d’une situation qui pose problème. Elle cite un exemple de sensibilisation auprès d’un
service d’auxiliaire de vie concernant les troubles cognitifs et l’utilisation de matériel. Elle
soulève aussi la difficulté de faire circuler les informations qu’elle donne, car dans certains
cas beaucoup de professionnels peuvent intervenir au domicile de la personne et il est
difficile pour l’ergothérapeute d’expliquer à chaque intervenant l’utilisation d’un matériel ou
autre. De plus, elle rapporte que faire passer les informations par le responsable de service
n‘est pas toujours une bonne solution, cela ajoute un intermédiaire, qui n’est pas forcément
au plus proche de la situation.
Les actions de sensibilisation peuvent donc être menées de manière différente. D’une
part, il y a des actions réalisées auprès d’un groupe de personne comme les ateliers ou les
conférences. Ces actions seraient formelles car elles suivent un cadre et une organisation
définis. D’autre part, une demande est faite de la part des proches de la personne (aidants
familiaux ou professionnels principalement) pour que l’ergothérapeute intervienne au
domicile sur une situation précise posant problème au quotidien. L’action est dans ce cas
37
personnalisée. Il est relevé que ces actions personnalisées ne suivent pas « un protocole
particulier », elles dépendent des situations. L’ergothérapeute à domicile mène des actions
de sensibilisation en fonction de la demande, celles-ci concernent essentiellement
l’utilisation de matériel.
4.2.3 La réceptivité des personnes face aux actions menées
‘Ergo 1’ rapporte que la réceptivité des aidants professionnels est « fluctuant ».
L’ergothérapeute se doit d’être dans ce cas « diplomate » et avoir « un discours adapté ».
Pour elle, lors d’interventions à domicile, la sensibilisation passe par un travail d’équipe avec
l’aidant professionnel.
‘Ergo 2’ nomme « variable » la réceptivité des participants aux actions de
sensibilisation. Cela dépend en effet de l’intérêt qu’ils portent. Elle exprime que la
communication est difficile pour faire venir les personnes aux actions. Avec son expérience,
elle indique que l’information passant « du bouche à oreille » se révèle plus efficace et que
cela se produit surtout en milieu rural. Les retours des participants sur les actions sont
ensuite très positifs.
Pour ‘Ergo 3’ la réceptivité dépendrait de l’intérêt que porte le professionnel à la
situation, mais également de la manière dont est géré le service d’auxiliaire de vie.
L’identification du rôle de l’ergothérapeute est importante pour assurer l’efficacité de son
intervention. Les informations peuvent passer lors de synthèses regroupant tous les
intervenants, lors de visites à domicile, sur les cahiers de transmissions ou sous la forme de
« tutoriels comme des modes d’emploi ». Ce dernier est efficace selon ‘Ergo 3’ car il permet
d’être vu par tous les intervenants au domicile de la personne et d’être utilisé sur le long
terme.
La réceptivité des personnes dépend donc de l’intérêt qu’elles portent à
l’intervention de l’ergothérapeute. L’identification du rôle de l’ergothérapeute dans la
situation est importante pour assurer un travail d’équipe avec l’aidant professionnel. Des
moyens de communication sont soulignés pour assurer la transmission et l’utilisation des
informations délivrées par l’ergothérapeute telles que l’exploitation de fiches explicatives
mises à disposition des professionnels au domicile de la personne, les inscriptions dans le
38
cahier de transmission, l’organisation de rencontres entre tous les intervenants, une visite à
domicile pour effectuer des mises en situation écologiques.
4.2.4 Les actions de sensibilisation concernant les chutes chez les
personnes âgées
Au sein du PACT, ‘Ergo 1’ effectue des visites à domicile. Elle rencontre
régulièrement des personnes âgées concernées par les risques de chute. Elle leur donne
alors des conseils et des solutions lors de ces interventions. De la documentation peut
également leur être envoyée ultérieurement car l’ergothérapeute intervient une seule fois
au domicile.
’Ergo 2’ a « piloté des actions sans vraiment y intervenir ». Elle avait un rôle de
coordinatrice de projet. Des interventions sont organisées en partenariat avec des
associations. Ces ateliers de sensibilisation concernant les chutes sont proposés uniquement
aux personnes âgées et pas aux professionnels les accompagnant au quotidien. Ces derniers
ont un rôle de transmetteur d’information des actions mises en place.
‘Ergo 3’ a effectué des interventions à domicile pour des personnes qui avaient déjà
chuté. Elle était alors présente pour trouver des solutions avec l’auxiliaire de vie. Pour une
personne, l’ergothérapeute a mis en place un document de démarche à suivre pour les
intervenants à domicile afin de réagir en cas de chute. Cette fiche avait notamment pour but
de rassurer les professionnels intervenant à domicile.
La sensibilisation concernant les chutes s’effectue par le conseil. Lorsque
l’ergothérapeute repère un risque de chute, il propose des solutions à la personne
concernée telles que participer à un atelier, préconiser et mettre en place des aides
techniques, guider pour l’aménagement de son logement. La sensibilisation permet
également de rassurer l’aidant professionnel lors d’une situation problématique par la mise
en place d’outils.
39
4.2.5 L’apport de la sensibilisation auprès des professionnels
intervenant régulièrement au domicile des personnes
‘Ergo 1’ pense que la sensibilisation est « bénéfique dans l’accompagnement de la
personne ». Cela apporte également un nouveau regard à la pratique professionnelle des
aidants : « Le fait de sensibiliser c’est aussi leur montrer qu’on peut faire différemment et
qu’ils puissent améliorer eux-mêmes leur pratique. »
‘Ergo 2’ estime « très importante » la sensibilisation des aidants professionnels. Pour
certains, le manque de formation ne leur permettrait pas de gérer les situations dites
complexes. L’ergothérapeute a, dans ce cas, un rôle de soutien. La sensibilisation des
professionnels permettrait « d’apporter un meilleur confort, de garder un meilleur maintien
de l’autonomie » de la personne à domicile. Selon elle, l’ergothérapie tend à se développer
dans les services de soins à domicile et « mériterait d’être largement diffusée ».
D’après ‘Ergo 3’, la sensibilisation est « pour beaucoup de situation […] nécessaire ».
Elle permettrait « d’éviter des situations de conflit ou d’épuisement de l’aidant
professionnel », mais également « d’éviter les mises en danger, apporter de la sécurité et du
confort » autant pour la personne que le professionnel.
La sensibilisation est importante pour le maintien à domicile de la personne. Elle
contribue à la qualité des interventions des professionnels et au maintien de l’indépendance
et de l’autonomie de la personne dans son lieu de vie. Cela permet de rassurer l’aidant sur sa
pratique ainsi que la personne sur les difficultés auxquelles elle doit faire face au quotidien.
Nous allons proposer dans une prochaine partie, la synthèse de toutes ces données
recueillies, croisant l’analyse du questionnaire, des entretiens et des apports théoriques.
Pour enfin, conclure sur notre enquête et répondre à l’interrogation initiale qui questionne
la participation de l’ergothérapeute dans la prévention des chutes par la sensibilisation des
aidants professionnels.
40
5. Analyse croisée des données et discussion
5. 1 Analyse croisée des données
Afin de guider l’ensemble de notre recueil de données et notre réflexion, nous avons
utilisé le modèle conceptuel bio-psycho-social : le Processus de Production du Handicap
(PPH). En effet, c’est « un modèle interactif non linéaire mettant en évidence les facteurs
personnels et les facteurs environnementaux, humains et matériels, qui peuvent influer sur
l’apparition des situations de handicap. Il met en évidence également l’interaction avec les
habitudes de vie de la personne qui sont liées aux facteurs personnels et aux facteurs
environnementaux. » (Morel-Bracq, 2009). Dans cet écrit, ce sont les facteurs individuels et
environnementaux qui influencent le risque de chuter chez la personne âgée, pouvant
entrainer de multiples conséquences et donc des situations de handicap.
D’après l’ensemble des données recueillies, l’intervention de l’ergothérapeute auprès
des aidants professionnels est pertinente. Il est soulevé que les aidants professionnels sont
peu formés et ils sont pourtant amenés à rencontrer des situations complexes qui
nécessiteraient les connaissances spécifiques. L’ergothérapeute est un professionnel qui
peut leur apporter des savoirs et les soutenir dans leur pratique professionnelle. Il possède
en effet des compétences pour mener une démarche d’éducation et de conseil et les
connaissances spécifiques concernant la problématique des chutes.
D’après les entretiens, l’ergothérapeute intervenant à domicile est souvent appelé
pour répondre à des besoins de matériel que ce soit de la préconisation ou l’explication de
son utilisation. Lors de ces visites à domicile, l’ergothérapeute peut faire une rapide
évaluation de la situation globale. Il conseille alors la personne concernant l’aménagement
de son logement ou la préconisation de matériel pour prévenir certains risques.
L’ergothérapeute est dans ce cas sollicité pour effectuer de la prévention secondaire et
tertiaire, peu pour de la prévention primaire.
D’après les aidants professionnels interrogés, la formation collective est l’aide la plus
adaptée pour répondre à leur besoin d’accompagnement sur la problématique des chutes
41
chez les personnes âgées. Cependant, lors des entretiens, la formation n’est pas un moyen
utilisé par les ergothérapeutes. Actuellement, l’ergothérapeute rencontre le professionnel
au domicile de la personne lorsqu’il y a une situation problématique relevée. Il sensibilise
l’aidant professionnel en l’impliquant dans une démarche de travail d’équipe.
Les transferts ont été cités à plusieurs reprises comme un risque de chute par les
professionnels questionnés. Dans la partie théorique, nous avons soulevé que les mauvais
appuis lors du transfert pouvaient être un risque de chute. Cependant, les données
pratiques relèvent que la mauvaise utilisation du matériel par les aidants professionnels est
un risque de chute pour la personne, mais également pour le professionnel. L’objectif de
l’ergothérapeute est dans ce cas d’apporter une démarche afin que le transfert soit
rassurant et sécurisant autant pour la personne que pour le professionnel.
Lors de l’entretien, ‘Ergo 2’ a mentionné que des conseillers en gérontologie
pouvaient repérer les besoins de la personne à son domicile. Cette profession a fait l’objet
d’une recherche car elle n’est pas précisée dans la partie « Apports théoriques ». Le
conseiller en gérontologie est « un intervenant à domicile chez les personnes âgées. Il
contribue au diagnostic de la situation du sujet et participe à l’élaboration d’un projet de vie
personnalisé. » (DGCIS20, 2013). Il intervient dans le secteur médico-social et notamment
dans les CLIC. Il peut faire appel à l’ergothérapeute pour mettre en place des actions de
sensibilisation après avoir évalué les besoins des personnes et repéré des risques.
D’après les réponses du questionnaire, l’apport d’informations supplémentaires
concernant les chutes permettraient aux professionnels d’éduquer la personne âgée et son
entourage face à certains risques. Cet accompagnement est de l’éducation pour la santé. Il
répond aux enjeux économiques et politiques du vieillissement de la population par le
repérage des facteurs de risques et la mise en place de mesures adaptées. La sensibilisation
rassure également le professionnel dans sa pratique. Cette assurance est alors bénéfique
dans la prise en soin au quotidien de la personne qui se sentirait elle-même rassurée.
Selon les commentaires du questionnaire, l’aide humaine à domicile est parfois
difficile à accepter pour la personne âgée car elle souligne sa perte d’indépendance et
d’autonomie. Il est alors délicat de sensibiliser dans certains cas pour les aidants
20
Direction Générale de la Compétitivité de l’lndustrie et des Services
42
professionnels. La prévention est un moyen d’informer, de conseiller et non des consignes à
suivre. C’est la limite de la prévention et de ce que peuvent apporter les professionnels. La
personne est la seule à décider si elle suivra les conseils. Cependant, la sensibilisation auprès
des aidants professionnels, selon les ergothérapeutes interrogées, permet de maintenir
l’autonomie et l’indépendance des personnes et aide l’accompagnement quotidien.
La difficulté à trouver des ergothérapeutes exerçant dans des SSIAD proches de notre
lieu d’étude révèlerait que la profession n’est actuellement que peu représentée.
L’ergothérapeute a pourtant les compétences pour occuper une place entière dans un
service à domicile. Il contribue au maintien de l’indépendance et l’autonomie de la personne
à domicile, mais répond également à l’enjeu politique et économique actuel du maintien à
domicile du nombre croissant de personnes âgées. D’après les interrogées, l’ergothérapie
auprès des personnes âgées vivant à leur domicile tend à se développer, mais est encore
insuffisant face à la demande et aux besoins.
Cette analyse croisée des données théoriques et pratiques va nous permettre de
confirmer ou non notre hypothèse de départ.
5.2 Vérification de l’hypothèse
L’hypothèse à laquelle nous avons essayé de répondre est la suivante :
En sensibilisant les professionnels intervenant régulièrement au domicile des
personnes de plus de 80 ans, aux causes et conséquences de la première chute,
l’ergothérapeute participerait à prévenir cette chute chez ces personnes âgées.
Le recueil de données par le questionnaire et les entretiens ne nous permet pas de
valider cette hypothèse. Les données pratiques sont quelque peu en contradiction avec
celles recueillies dans les apports théoriques. Malgré la demande des professionnels
interrogés de formation collective pour leur apporter des informations supplémentaires sur
la problématique des chutes, les ergothérapeutes interrogées n’en réalisent pas au sein d’un
service à domicile. L’ergothérapeute rencontre les aidants professionnels au domicile de la
personne lors d’une situation problématique qui concerne majoritairement l’utilisation de
matériel. Par ailleurs, les aidants professionnels, considérés comme des acteurs de
prévention privilégiés de la personne, ne bénéficient pas de connaissances assez spécifiques
43
pour repérer les facteurs favorisant la première chute. L’ergothérapeute possède les
compétences pour mener une démarche d’éducation et de conseil auprès de professionnels
mais n’en effectue pas pour répondre à la problématique des chutes chez les personnes
âgées. La sensibilisation des aidants professionnels n’est donc pas un moyen pour répondre
à la problématique des chutes au domicile des personnes âgées, pourtant relevée comme un
problème de santé publique en France.
Des suggestions d’actions menées par l’ergothérapeute peuvent cependant être
émises.
5.3 Propositions d’interventions
D’après ‘Ergo 2’, la mise en place de tutoriel ou mode d’emploi laissé au domicile est
un bon outil de communication d’informations afin de faciliter les interventions
quotidiennes autant pour la personne que pour le professionnel. Ces outils personnalisés
peuvent être vus par l’ensemble des intervenants au domicile de la personne.
L’ergothérapeute peut dans ce cas mettre en place un document à diffuser à l’équipe
reprenant l’utilisation de matériel souvent rencontrée comme problématique. Dans cette
même dynamique, une formation peut être organisée par l’ergothérapeute en proposant la
manipulation de matériel spécifique (lève personne, guidon de transfert, disque de transfert)
ainsi cela permettrait un temps d’échange et de formation continue pour les aidants
professionnels. Afin de compléter ces outils, le support vidéo, avec description pour guider
l’observation et alerter sur des points de vigilance, parait intéressant à proposer. En effet,
lorsqu’une difficulté est rencontrée, le professionnel pourrait dans un premier temps
visionner la vidéo pour reproduire la manipulation du matériel.
Concernant la problématique des chutes, l’ergothérapeute peut proposer un temps
collectif de réflexion avec les aidants professionnels au cours duquel les risques et les
conséquences des chutes seront repris et approfondis. Un document pourra être à la suite
construit par les professionnels pour adapter les connaissances apportées par
l’ergothérapeute à leur pratique professionnelle. Cet écrit pourra rappeler les risques et les
conséquences des chutes chez une personne âgée et apporter des solutions en cas de
repérage d’un facteur de risque. De plus, de la documentation relative à la prévention des
44
chutes pourra être remise directement à la personne. Les aidants professionnels, considérés
comme des acteurs de prévention privilégiés, pourront être les transmetteurs appropriés.
Les proches de la personne, la famille ou les amis, sont également des acteurs
importants dans le maintien à domicile de la personne en perte d’autonomie ou
d’indépendance. Ils sont à inclure dans le projet individuel de la personne ainsi que dans ses
prises en soin quotidiennes. La sensibilisation peut dans ce cas aussi leur être adressée.
L’ergothérapeute a la possibilité de proposer un temps de rencontre avec plusieurs aidants
familiaux accompagnant au quotidien une personne à risque de chute afin d’exposer et
d’expliquer les conséquences possibles des chutes et d’apporter des solutions à mettre en
place au quotidien.
5.4 Critiques et limites de la méthode
Les enquêtes menées sont insuffisantes pour que les chiffres statistiques soient utilisés
comme une généralité. Les échantillons du questionnaire et des entretiens sont en effet trop
petits pour obtenir un intervalle de confiance raisonnable sur les chiffres obtenus.
Le recueil de données complémentaires aurait pu être soutenu par des entretiens
supplémentaires avec un délai de travail de recherche plus étendu. Il aurait été intéressant
de recueillir l’avis d’autres ergothérapeutes car le ressenti est en partie différent selon le
fonctionnement du service. Des questions plus ciblées sur la problématique des chutes pour
les entretiens auraient pu être posées et pour le questionnaire, sur les conséquences des
chutes. La prise en soin devenant plus conséquente pour les aidants suite à une chute, la
prise de conscience de cette notion aurait été intéressante à analyser. La formulation des
questions présente également des limites. En effet, dans le questionnaire, des données n’ont
pu être exploitées car les réponses ne répondaient pas à la question, notamment pour celle
demandant le nombre d’usagers pris en charge actuellement, une réponse à notifié 80%
alors que la réponse attendue aurait du se présenter sous la forme d’un chiffre. Le
questionnaire ne permet pas de reformuler la question comme il peut être fait lors d’un
entretien.
Par ailleurs, aucun infirmier n’a répondu au questionnaire. Ce professionnel n’a donc pas
pu être représenté au cours de l’analyse des données. Plusieurs explications peuvent être
45
données. L’infirmier peut avoir un rôle de coordination des soins au sein d’un SSIAD et
n’intervient donc pas directement auprès de la personne. Certains SSIAD composent
essentiellement leur équipe d’aides soignants et travaillent en collaboration avec des
infirmiers libéraux. Cependant, lors de la prise de contact avec les SSIAD, nous avions été
vigilants au fait que des infirmiers soient présents au sein des services.
Le questionnaire a été diffusé à un seul service d’aide à domicile. Il aurait été pertinent
qu’il circule vers d’autres services car chacun a un fonctionnement différent.
Dans le cadre d’un travail plus conséquent, il serait intéressant d’effectuer une
expérimentation. Sur un service à domicile donné, recueillir le nombre de chutes des
personnes de plus de 80 ans pendant un temps donné. Puis, informer les aidants
professionnels des risques et conséquences des chutes pour mieux les dépister et conseiller
la personne en conséquence. Enfin, sur la même durée, répertorier le nombre de chutes puis
analyser les différences ou non par rapport au premier recueil. L’efficacité et la pertinence
de la sensibilisation seraient alors peut-être mises en avant. Cependant, cette idée
d’expérimentation est à réfléchir car de multiples paramètres seraient à prendre en compte
comme le vieillissement de la personne entre les deux recueils, de multiples critères
d’inclusion et d’exclusion de la population d’étude, etc.
Il nous a semblé délicat de recueillir le ressenti des personnes âgées recevant de l’aide au
quotidien et à leur domicile. Un professionnel a en effet souligné que la perte progressive
des capacités est parfois difficile à accepter. De plus, lors de notre participation à la
conférence sur les chutes au mois d’octobre, une personne âgée nous a confié qu’elle en
avait assez d’entendre à répétition qu’il fallait être vigilant au quotidien. Cette réaction
interpelle et nous rappelle qu’il ne suffit pas de faire de la sensibilisation pour sensibiliser. En
effet, la prévention entre en jeu lorsque l’individu se sent concerné et a une volonté de
changer ses habitudes.
46
5.5 Apports personnels
Ce mémoire a permis de comprendre sur le terrain la question de recherche. Les
connaissances sur le rôle de l’ergothérapeute dans un service à domicile ont pu être
approfondies et la vision de la profession élargie. Les entretiens téléphoniques ont été
enrichissants et motivants afin de pouvoir répondre à nos interrogations.
La formation de trois ans au sein de l’école d’ergothérapie nous permet d’avoir des
connaissances sur la problématique des chutes chez les personnes âgées. Toutefois grâce à
l’élaboration de ce mémoire, ces connaissances se complètent.
Ce sujet ressort comme un problème de santé publique dans la littérature et c’est un
thème que les futurs ergothérapeutes peuvent largement rencontrer au cours de leur
exercice. Il a donc été important de s’y intéresser.
47
Conclusion
La problématique des chutes chez la personne âgée est un problème de santé
publique auquel de nombreuses actions déjà mises en place tentent de répondre.
Cependant, en prenant en compte que les personnes âgées accompagnées par des services à
domicile sont des sujets dans une phase dite « pré-fragile » voir « fragile », ils deviennent
alors les cibles de la prévention primaire et secondaire.
Les facteurs de risque des chutes peuvent être multifactoriels. Les facteurs
environnementaux sont bien identifiés par les professionnels intervenant régulièrement au
domicile de la personne. Les facteurs individuels, nécessitant plus d’analyse, ne sont pas
toujours mis en avant. Pour cela, une information est importante à donner car ce sont les
aidants professionnels, en rencontrant la personne quotidiennement, qui peuvent repérer
au plus vite un facteur médical, iatrogène ou comportemental à risque de chute. Ce
dépistage aura pour but d’informer, conseiller de manière adaptée la personne. Par
exemple, de la documentation pourra lui être remise par l’aidant professionnel, des conseils
pourront lui être donnés concernant l’agencement du logement ou la prise de contact avec
un spécialiste comme le kinésithérapeute ou le médecin généraliste, l’ophtalmologiste etc.
Au sein d’un service à domicile, l’importance du travail en équipe est soulignée, par
les réponses du questionnaire, afin d’assurer une prise en soin cohérente et harmonieuse.
Les temps de synthèse, où tous les professionnels sont réunis, sont alors fondamentaux. Cela
permet d’échanger et de se transmettre des informations. L’équipe a un rôle important de
soutien, rassurant pour les professionnels.
Les réponses du questionnaire mettent en avant une réelle demande de formation
autour de la problématique des chutes de la part des aidants professionnels.
L’ergothérapeute peut jouer un rôle dans leur formation continue pour répondre à cette
demande. Par ses compétences, ce dernier peut mettre en place des outils permettant aux
aidants professionnels d’éviter des mises en danger ou de faciliter des gestes quotidiens de
leur pratique. Cependant, à la vue du recueil de données par les entretiens, l’ergothérapeute
ne participe pas à la prévention des chutes spécifiquement en sensibilisant les
48
professionnels. Son rôle est pour le moment concentré sur de la sensibilisation liée à
l’utilisation de matériel dit spécifique.
Toutefois, son rôle pourrait s’élargir en proposant des actions plus variées.
L’ergothérapeute peut mettre en place un temps collectif de réflexion autour duquel les
aidants professionnels pourront discuter des risques et des conséquences des chutes. Un
document réalisé par leurs soins pourra reprendre les éléments relevés et les adapter à leur
pratique professionnelle. Ce document pourrait servir de support aux aidants professionnels
lorsqu’ils rencontreront la situation d’une personne à risque de chute.
Dans cette même dynamique, l’ergothérapeute peut proposer un temps informatif et
d’échange destiné aux aidants familiaux. En effet, l’aidant professionnel a fait l’objet de cet
écrit, cependant l’aidant familial est également un acteur clé dans la prise en soin
quotidienne de la personne. L’ergothérapeute peut également sensibiliser cette personne
qui est au plus proche de la situation.
Ainsi, ce mémoire a pour but d’ouvrir une réflexion autour de la participation de
l’ergothérapeute dans la formation continue des professionnels intervenant régulièrement
au domicile de la personne âgée.
49
Bibliographie
Actes de congrès, colloque
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Articles de périodiques
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Annexes
Annexe 1 : Entretien exploratoire
Annexe 2 : Questionnaire
Annexe 3 : Résultats du questionnaire
Annexe 4 : Grille d’entretien avec l’explication des questions posées
Annexe 5 : Entretien avec ‘Ergo 1’
Annexe 6 : Entretien avec ‘Ergo 2’
Annexe 7 : Entretien avec ‘Ergo 3’
Annexe 1 : Entretien exploratoire
Marion (M): Bonjour, je fais un entretien exploratoire pour mon mémoire et je m’intéresse
au rôle de l’ergothérapeute à domicile. J’ai eu votre contact suite à mon projet avec le CCAS
de la ville de R. qui m’a indiqué qu’une ergothérapeute travaillait au Service de Soins
Infirmiers à Domicile (SSIAD). Tout d’abord, ce que j’aimerais savoir c’est votre parcours
professionnel, vos expériences, lieu d’exercices, etc.
L’ergothérapeute (E) : J’ai eu mon diplôme en 2009, j’ai commencé par des remplacements
à la ville de R. dans les EHPAD, puis dans d’autres villes de la B. Je recherchais encore en B. et
la responsable du secteur ouest m’a contacté parce que le SSIAD recherchait une
ergothérapeute. Mon poste est un 40%, je travaille le lundi et le vendredi, ça fait un jour par
secteur. Le SSIAD gère 2 secteurs : l’ouest, le centre-est alors que le service à domicile gère
tous les secteurs de R. Après ce sont des associations qui s’occupent des autres secteurs
pour ce qui concerne le SSIAD et il n’y a pas d’ergothérapeute pour le moment.
M : Quel est le rôle de l’ergothérapeute au sein du SSIAD ?
E : Je me base sur la réadaptation, je ne fais pas de rééducation car une journée pour
minimum 60 personnes à voir au domicile. Il y a des besoins, on voit des désadaptations
psychomotrices qui apparaissent, mais il faudrait une présence tous les jours, je préfère ne
pas le faire et envoyer les personnes vers des kinés, certains acceptent de collaborer et
d’autres non comme pour les transferts.
M : Concrètement que faites-vous en réadaptation ?
E : Je fais beaucoup d’aménagements du domicile, ça part du conseil, de mettre en place des
aides techniques, à refaire une pièce avec les personnes et faire appel à des artisans. Les
bénéficiaires me demandent souvent d’être maitre de chantier mais je refuse car je ne me
sens pas d’avoir les connaissances en architecture pour diriger un chantier, j’oriente alors les
personnes vers le PACT-ARIM ou l’ANAH, qui ont vraiment le rôle de tout coordonner. Je suis
plus dans le rôle de faire un argumentaire, où c’est possible d’avoir des subventions et de
justifier les besoins.
M : Lorsque vous allez chez les bénéficiaires, qui a fait appel à l’ergothérapeute ? Est-ce qu’il
y a une prescription ?
E : J’ai rarement de prescriptions, ou alors c’est pour du matériel, lève-personne ou autres.
Dans la plaquette, c’est noté que les personnes peuvent avoir à faire à une ergothérapeute
ou une psychologue, soit les bénéficiaires demandent, les aides soignantes, les infirmières,
ou l’infirmière coordonnatrice qui me demandent les services. Pour les nouvelles prises en
charge où l’infirmière coordonnatrice me demande d’agir, généralement j’attends une
semaine avant de me présenter aux bénéficiaires et avec les aides soignantes, nous évaluons
les difficultés. Les aides à domicile ne me sollicitent pas car je dépends du SSIAD
uniquement. J’interviens au service à domicile lorsque ma responsable est appelée par ce
service et qu’il y a une demande particulière. Il n’y a pas assez de temps ergo pour traiter
tous les problèmes, pourtant cela permettrait un meilleur suivi.
M : Quelle est la population que vous rencontrez au cours de vos interventions ?
E : La moyenne d’âge est de 80 ans environ, les personnes ont entre 60 ans et 100 ans. Je
rencontre pour la plupart des personnes souffrant de polypathologies ou de maladies
particulières comme la maladie de Parkinson, maladie d’Alzheimer, polyarthrite rhumatoïde,
troubles psychiques ou des personnes avec des troubles moteurs ou cognitifs, démence. Les
personnes habitent seules ou avec leurs proches, enfant, conjoint, voisin mais le service
intervient souvent chez des personnes seules ou lorsque ce sont les aidants familiaux qui
n’en peuvent plus.
M : Y a-t-il des bénéficiaires qui reviennent d’hospitalisation ?
E : Oui, cela arrive souvent. Il y a une prise en charge initiale avec un quota par semaine. Si
l’hospitalisation dure plus de 2 mois, les personnes sont retirées de la liste du service et ils
doivent refaire une demande. Les personnes peuvent attendre avant que le service ré-
intervienne car il faut gérer le planning, les délais peuvent être des mois. Je vois cette
organisation d’un peu plus loin car ce n’est pas l’ergo qui gère ce problème, mais on peut
intervenir pour des demandes dites urgentes comme la manutention auprès des
professionnels, il y a beaucoup d’arrêts de travail. Les urgences en ergo sont plutôt celle-ci,
après ce n’est pas encore dans les mœurs que l’ergo puisse faire de la prévention pour les
professionnels ou bénéficiaires. Je suis souvent sollicitée pour du matériel en ce qui
concerne les chutes, mais peu pour de la rééducation, réadaptation. Actuellement, je ne
peux pas faire de la prévention par manque de temps, mais également parce que les autres
professionnels qui me sollicitent ne savaient pas que l’ergo pouvait faire de la rééducation
ou autre.
M : Que mettez-vous en place pour les personnes qui sont susceptibles de chuter ?
E : Pour les personnes ayant été hospitalisées suite à une chute, souvent, je reçois les
comptes-rendus des visites à domicile des ergothérapeutes et je prends la suite de ce
qu’elles ont fait. Je reprends avec la personne les conseils donnés par l’ergo et je demande à
la personne ce qu’elle en pense, je refais des essais si nécessaire. Avec l’aide soignant, on
réévalue les difficultés, ça permet de faire un suivi. Après les retours d’hospitalisation, je
demande l’avis de mes collègues pour qu’elle me dise s’il y a un besoin.
M : Et au niveau de la prévention des chutes ?
E : Je n’en fais pas réellement. Je conseille au niveau du matériel, la lumière, aménagement
des pièces pour pouvoir bien se déplacer. Déjà quand on arrive à faire ça c’est bien ! On me
sollicite lorsqu’il y a un risque de chute et que les gens ont emmagasiné un nombre de
choses chez eux. Je peux intervenir chez des personnes qui ont déjà chuté comme ceux qui
sont susceptibles de chuter comme quand on voit des personnes qui ont une marche à
risque de chute avec leur déambulateur. Généralement, on m’envoie pour faire le
négociateur pour essayer de persuader les personnes de changer leurs habitudes. On peut
aussi faire appel à la responsable pour ce qui est du changement de matériel quand ça
devient dangereux aussi pour les collègues. La majorité des personnes acceptent, mais nous
avons eu un cas où les personnes ont refusé et on a mis fin aux services et c’est une
infirmière libérale qui a pris le relais. C’est une décision qui se discute en équipe, ici il y a une
réunion infirmières, aides soignantes et si la psy ou moi sommes présente nous y allons. J’y
vais le vendredi, mais parfois j’ai des visites toute la journée et je ne peux pas y aller.
M : Merci beaucoup pour vos réponses.
Annexe 2 : Questionnaire
Bonjour,
Je suis actuellement étudiante en troisième année d’ergothérapie à l’institut de
formation en ergothérapie de Rennes. Dans le cadre de mon mémoire de fin d’étude, je
réalise une enquête auprès des professionnels intervenant à domicile, à l’aide d’un
questionnaire.
Mon mémoire concerne les chutes chez les personnes âgées vivant à domicile.
Ce questionnaire est anonyme et sera utilisé uniquement dans le cadre de mon
étude.
Vos réponses sont précieuses pour l’avancée de mon mémoire et je vous remercie
d'avance de tout l'intérêt que vous allez y porter et du temps que vous allez y passer.
Je suis à votre disposition pour toutes questions ou informations complémentaires
par mail : mgarnier@ifpek.org
Marion Garnier
Questions :
1. Quelle est votre profession ?
Aide soignant
Infirmier
Aide à domicile
Autre (précisez) :
________________________________________________________________
2. Combien d’usagers de plus de 80 ans prenez-vous en charge actuellement ?
_____________________________________________________________________
3. Pouvez-vous citer des situations de risque de chute que vous avez déjà
rencontrées chez vos bénéficiaires de plus de 80 ans ?
_____________________________________________________________________
_____________________________________________________________________
_____________________________________________________________________
_____________________________________________________________________
_____________________________________________________________________
4. Pensez-vous que votre rapport privilégié avec les bénéficiaires (en intervenant
régulièrement et au domicile de la personne) peut permettre une meilleure
acceptation des changements des habitudes de vie de la personne par rapport à
l’intervention d’un professionnel intervenant ponctuellement auprès de la
personne ? (Entourez la réponse)
Tout à fait d’accord plutôt d’accord plutôt pas d’accord pas du tout d’accord
5. Qu’avez-vous proposé après le repérage d’un facteur de risque de chute chez une
personne âgée ? (conseil, appel d’un proche du bénéficiaire, appel d’un
professionnel,…)
_____________________________________________________________________
_____________________________________________________________________
_____________________________________________________________________
_____________________________________________________________________
_____________________________________________________________________
6. Ressentez-vous le besoin d’avoir un accompagnement ou des informations
supplémentaires sur la problématique des chutes chez les personnes âgées ?
Tout à fait d’accord plutôt d’accord plutôt pas d’accord pas du tout d’accord
7. Quelle aide vous semblerait la plus adaptée pour compléter vos connaissances
sur la problématique des chutes ?
Une formation collective
Un entretien individuel
Un soutien par un professionnel lors d’une intervention chez un bénéficiaire
Un document explicatif
Autres :________________________________________________________
8. Comment pensez-vous transposer ces savoirs acquis dans votre pratique
professionnelle?
________________________________________________________________________
________________________________________________________________________
________________________________________________________________________
________________________________________________________________________
________________________________________________________________________
Commentaires sur le questionnaire ou informations supplémentaires :
___________________________________________________________________________
___________________________________________________________________________
___________________________________________________________________________
___________________________________________________________________________
___________________________________________________________________________
Annexe 3 : Résultats du questionnaire
Au total, nous avons recueilli 36 réponses dont 21 provenant d’un service à domicile et 15
d’un service de soins infirmiers à domicile.
Question 1 : La répartition
des professionnels
[Cette question a été posée
pour observer les divergences
de réponses aux questions
suivantes par profession]
13 Aides soignants
0 Infirmier
16 Aides à domicile
5 Auxiliaires de vie sociale
2 Autres : 1 ergothérapeute et 1 directrice du SSIAD
Question 2 : Le nombre
d’usagers de plus de 80
ans actuellement pris en
charge
[Ces réponses ont permis
d’introduire le sujet et
d’observer des différences
entre les professions]
Pour les aides à domicile : 6, 5, 5, 7, 8, 4, 25, 16, 9, 10, 6, 9, 10, 9,
N.A21, 4 ;
Pour les auxiliaires de vie sociale : 7, 10, 4, 5, 7 ;
Pour les aides soignants : 37, 37, 40, 25, 40, 30, 39, 10, 40, 40, 40, 40,
40 ;
Pour les autres : 12 (ergothérapeute) et 39 (directrice du SSIAD).
Question 3 : Les situations
de risque de chute déjà
rencontrées
[Cette question a permis
d’observer les facteurs de
risque de chute repérés par
les professionnels]
Facteurs environnementaux représentés dans ses réponses :
« Tapis, pas assez dégagé, pas de barres fixées pour les
déplacements. » ;
« Tapis (entre Montauban et lit), glisser de la baignoire, chute avec
déambulateur. » ;
« Tapis, meubles mal disposés, journaux, magasines à même le sol. » ;
« Parquet trop ciré (glissant), chaussons qui ne tiennent pas aux pieds,
descentes de lit qui glissent sur le sol, risques quand présence
d’escaliers dans le logement, se prennent les pieds dans les bords des
tapis ou fils électriques ou autres objets au sol, perte d’équilibre, ne
lèvent pas assez les pieds quand ils marchent, vue qui baisse, ils voient
moins les obstacles sur le sol. » ;
« Les sorties de douche ou de baignoire, les tapis, se lever du lit
« Souvent à cause des tapis qui glissent. » ;
« Risque avec tapis, perte d’équilibre en marchant, montée ou
21
N.A signifie données manquantes
descente de la baignoire, chute dans la douche. » ;
« Les tapis, perte d’équilibre (problème de santé). » ;
« Le col du fémur, chute due à des malaises, clavicule. » ;
« Heurter le pied dans un tapis. » ;
« Déjà trouvé une personne tombée de son canapé. » ;
« Pris les pieds dans le tapis, trous moquette, obstacles sur trottoir,
éviter de mettre des affaires personnelles dans le passage, mais plutôt
sur une chaise pour une personne mal voyante. » ;
« Perte d’équilibre, présence de tapis. » ;
« Tapis, chaussures, chaussons pas mis correctement aux pieds » ;
« Logement non adapté (tapis au sol glissant, hauteur des fauteuils, lit,
chaise plus adaptée, chaussons (mules). » ;
« Chute due à des tapis. » ;
« Escaliers, tapis, sols glissants. » ;
« Tapis salle de bain, précipitation pour répondre au téléphone.
Douche ou baignoire non adaptées. » ;
« Niveau de la salle de bain (douche, baignoire). » ;
« Toilettes trop hautes, se pencher pour ramasser un objet. » ;
N.A ;
« Tapis au sol en mauvais état ou sol abimé (carrelage, moquette),
encombrement des pièces (chambre, salle à manger, salle de bain), fils
électriques au sol, escaliers non éclairés, canne abimée, patient non
conscient du danger. » ;
« Petites marches, tapis. » ;
« Tapis au sol, encombrement de la pièce, manque de lumière,
déplacements et transferts à risque. » ;
« Risques de chute avec les marches, tapis, baignoire, douche. Matériel
non adapté pour l’aide à la marche. Chute à la marche, essaye de sortir
seul sans aide d’une tierce personne. » ;
« Tapis glissants, parquets, chaussons qui ne tiennent pas au pied,
animaux. » ;
« Animaux domestiques, descente de lit, douche glissante et pas
adaptée, médicaments. » ;
« Tapis, fils électriques. » ;
« Fils électriques, sol mouillé, tapis. »
Facteurs individuels représentés dans ses réponses :
« Chute due à une désorientation (passe par-dessus les barrières),
risque de chute lors des transferts » ;
« Risques importants chez les personnes désorientées, personne AVC
sans avoir récupérée, transferts » ;
« Tapis, chaussons pas bien mis, glissant, sol » ;
« Chaussures mal adaptées, tapis, sol mouillé, perte d’équilibre,
manque de lumière la nuit, médicaments mal pris (somnifères),
logement pas adapté, FR22 (freins pas mis), douleurs, activités et gestes
plus adaptés à l’âge » ;
« Logement non aménagé, coussin non adapté sur le fauteuil
(glissant), chaussons mal adaptés, refus déambulateur, surestimation
des capacités (déni) » ;
« Lever la nuit pour aller aux WC, transfert baignoire, transfert lit
(passage coucher-debout) » ;
« Conduites à risque, mauvaises chaussures, mauvaise utilisation du
matériel d’aide à la mobilité, intérieur mal organisé, encombrement,
tapis glissants, animaux domestiques »
Question 4 : Avis sur le
rapport privilégié
[Cette question a permis de
savoir s’ils pensent que leur
place est appropriée pour
effectuer de la
sensibilisation]
Tout à fait d’accord : 13
Plutôt d’accord : 23
Plutôt pas d’accord : 0
Pas du tout d’accord : 0
Question 5 : Proposition
après le repérage d’un
facteur de risque de chute
[Cette question a permis de
connaitre les solutions
trouvées par les
professionnels]
Conseils mis en place :
« Conseil. » ;
« Donner des conseils auprès de la personne à domicile, par nous, par
un professionnel ou par la famille. » ;
« Conseils et exécution. » ;
« Conseils : mettre de l’adhésif double face sous le tapis et les
descentes de lit, investir dans des chaussures fermées, ne pas cirer les
22
Fauteuil Roulant
parquets, installer des barres le long des murs et dans les escaliers. » ;
« Enlever toutes les choses sur le sol qui pourraient être un obstacle. » ;
« Enlever tapis, mettre des barres de soutien dans la salle de bain, WC,
lit médicalisé. » ;
« Enlever tapis. » ;
« Conseil : enlever ou scotcher des tapis, utilisation d’une canne
(simple ou trépied), demande à la famille l’achat de siège de bain ou
de barres pour la douche. » ;
« Conseils, mis en pratique (enlever les tapis). » ;
« Conseils : enlever tapis, choses qui encombrent les pièces, chaussures
qui tiennent au pied. » ;
« Enlever les tapis, coller les trous des moquettes, je conseille, puis
agit, décision de la famille ou responsable. » ;
« Utiliser déambulateur, installation main courante et barre d’appui,
retirer les tapis. » ;
« Conseil avec la personne, les proches. » ;
« Conseiller la famille, documentation, matériel médical adapté au
logement ou à la personne. » ;
« Conseil auprès de la personne et aider au changement. » ;
« Enlever le tapis. » ;
« Retirer tapis ou les fixer, téléphone sans fil, brochure sur adaptations
possible » ;
« Je lui donne quelques conseils pour éviter le risque de chute, j’avertis
le bureau de cette situation pour m’orienter vers une solution adaptée
à ce risque. » ;
« Conseils (préconisation), appel par IDE23, du médecin traitant. » ;
« Mettre chaussures plus adaptées, retirer tapis, Montauban près du
lit, mise en place d’une téléalarme, ôter tout ce qui peut gêner à la
déambulation, matériel de transferts. » ;
« Concertation entre équipe et auprès de la famille. » ;
« Conseils avec le patient et la famille : ôter tapis, aménagement de la
chambre au rez-de-chaussée plutôt qu’à l’étage. Faire intervenir un
conseiller en matériel adapté. » ;
23
Infirmier Diplômé d’Etat
« Mise en place d’aides techniques, formation des intervenants (aides
soignants, aide à domicile), conseil manutention aux aidants. » ;
« Conseils pour expliquer afin de réaménager les endroits à risques. » ;
« Conseils en ôtant tapis ou objet qui gênent les transferts. Appel des
aidants pour mettre en place plus de lumière ou barre d’appui. » ;
« Proposer intervention d’un kinésithérapeute. Proposer et mettre en
place du matériel adapté. » ;
« Supprimer les tapis, enfermer les animaux, acheter des chaussons
adaptés. » ;
« Conseils pour modifier, supprimer, organiser, équiper, à l’usager et à
ses proches référents » ;
« Oter les tapis, aménager l’environnement pour éviter les dangers. » ;
« Discussion en équipe pour améliorer la situation, prendre contact
avec les aidants. » ;
« Réaménagement de l’espace. »
Moyens préventifs en cas de chute :
« Mise en place de la téléalarme, système ouverture de porte, clé chez
les voisins. »
Intervention de l’ergothérapeute :
« Enlever les tapis. Réaménager l’habitat (visite ergothérapeute). » ;
« Intervention de l’ergothérapeute pour évaluer les besoins. »
Question mal interprétée :
« Contacter le bureau, famille et pompier. » ;
« Appel médecin, IDE, pompiers, kiné, informer le chef de service,
famille. »
Question 6 : Ressenti sur le
besoin d’accompagnement
ou d’informations
supplémentaires sur la
problématique des chutes
[Cette question met en avant
Tout à fait d’accord : 5
Plutôt d’accord : 22
Plutôt pas d’accord : 8 → Précision de 4 réponses : « car
ergothérapeute dans le service » ; « on en discute en équipe » ;
« ergothérapeute dans le service » ; « déjà eu une formation ».
la pertinence de l’intervention
de l’ergothérapeute]
Pas du tout d’accord : 0
Question 7 : Aide la plus
adaptée pour compléter
les connaissances (choix
multiples)
[Cette question a permis de
connaitre la forme d’aide
préférentielle des
professionnels]
Une formation collective : 25
Un entretien individuel : 1
Un soutien : 8
Un document explicatif : 8 → Précision d’une réponse : « pratique à
laisser à la famille ».
-dont 8 ont répondu formation collective et document explicatif
-et 2 ont répondu formation collective et soutien par un professionnel
-4 personnes n’ont pas répondu
Question 8 : Transposition
des acquis dans la pratique
professionnelle
[Cette question a mis en
avant la manière dont les
professionnels transposent
leur acquis]
Informer, conseiller, prévenir, éduquer :
« Pouvoir informer les personnes grâce à la formation. » ;
« Mettre en application en expliquant les risques encourus si l’on ne
modifie pas l’espace de vie. » ;
« En donnant des conseils à mes bénéficiaires ou à leur famille, en
faisant de la prévention. » ;
« En conseillant les personnes au quotidien, en signalant les potentiels
risques de chute avant. J’essaie de supprimer les risques par moi-même
lorsque cela est possible sinon je remonte l’info à la famille ou au
service pour qu’ils fassent le nécessaire. » ;
« Prévention, conseiller (canne, déambulateur, barre, alarme). » ;
« Utilise mes connaissances acquises en formation. » ;
NA ;
« Prévenir les usagers des risques de chute en fonction de leur
logement. » ;
« Mieux conseiller la personne âgée, lui montrer les bons gestes pour
se déplacer. » ;
« Bon sens, dialogue, écoute. » ;
NA ;
NA ;
« Education patient. » ;
« Par des conseils. » ;
« En mettant en pratique ce qui a été appris en formation. « Éduquer »
l’entourage du patient. » ;
NA
« Prévenir et anticiper les risques de chute en référer à l’entourage au
plus vite (plus équipe). » ;
« Toujours resté dans le conseil pour que la démarche soit la plus
constructive possible. Les connaissances enrichissent le dialogue. » ;
« En dialoguant avec les personnes âgées, en expliquant, en parlant
avec leur entourage et en réunion d’équipe. » ;
« En expliquant au patient les risques. »
Apporter des solutions à la personne :
« Aménagement de l’espace (enlever tapis, meuble), adaptation (au
domicile, de la marche, canne, déambulateur) etc. » ;
« Je mets en place j’agis et précise sur le cahier de liaison ce que
j’estime faire pour éviter les risques de chute. » ;
« Réussir à aider une personne si elle chute. » ;
« En prodiguant des conseils avec personnes prises en charge, en
proposant des brochures adaptées. » ;
« Transposition des infos connues aux familles par le biais de conseil
d’aménagement, d’utilisation et d’apprentissage des aides techniques,
mise en place de relais vers des ateliers équilibres.»
Rassurer la personne et se rassurer :
« En parlant, petit à petit à la personne âgée. » ;
« Faire le nécessaire auprès de la personne aidée, la conseiller, de la
rassurer pour qu’elle soit au mieux chez elle. » ;
« Je serais plus à l’aise face à la situation quand j’aurais acquis des
informations supplémentaires. »
Transmettre et échanger les informations :
« Avec les stagiaires, remplaçante, info entre collègues. » ;
« Avec les stagiaires, remplaçantes, info entre collègues.»24 ;
« En parler lors des réunions d’équipe. » ;
« En observant et transmettant aux responsables. » ;
« Au cours des réunions hebdomadaires : recherche de solutions
24
Cette réponse est cité deux fois à l’identique sur deux questionnaires différents
adaptées à chaque cas et chaque domicile, avec les soignants eux-
mêmes avant de les proposer à la famille et au patient. » ;
« Transmission, parlez avec les personnes concernées et mettre en
place « si possible » les aménagements et équipements. »
Données non exploitables :
« On l’effectue régulièrement dans notre profession. » ;
« En étant plus professionnelle pour éviter les chutes. »
Commentaires ou
informations
supplémentaires
[Cette dernière question est
facultative et permet à
l’interrogé de s’exprimer
librement]
4 réponses :
« Faire un rapide état des lieux à la première intervention, en discuter
avec l’usager si possible ou bien remonter l’information au service, à la
famille, amis les plus proches. » ;
« Intéressant. » ;
« Chaque difficulté ou handicap de la personne âgée est différent. Le
conseil n’est pas toujours facile malgré la confiance qu’elle nous
donne. L’acceptation de la perte d’autonomie par le déplacement, la
peur de la chute ou de la rechute complique parfois la volonté de
continuer. » ;
« Proposition de réunions collectives adressées aux familles : ceci peut
se faire (et cela a déjà été fait) par le CLIC, film. »
Annexe 4 : Grille d’entretien avec l’explication des questions posées
Présentation : Tout d’abord, une brève introduction est donnée afin de se présenter
ainsi que le sujet qui nous intéresse.
Je suis Marion Garnier, actuellement étudiante en troisième année d’ergothérapie à
l’institut de formation en ergothérapie de Rennes. Dans le cadre de mon mémoire de fin
d’étude, je réalise un recueil de données, à l’aide d’un entretien, auprès des
ergothérapeutes intervenant au domicile et pouvant être en relation avec les professionnels
intervenant régulièrement au domicile des personnes.
Mon mémoire concerne la sensibilisation auprès des professionnels intervenant à
domicile.
Cet entretien est anonyme et sera utilisé uniquement dans le cadre de mon étude.
Vos réponses sont précieuses pour l’avancée de mon mémoire et je vous remercie
d'avance de tout l'intérêt que vous allez y porter et du temps que vous allez y consacrer.
1. Pouvez-vous décrire le fonctionnement de votre service ?
Quel est votre rôle dans ce service ?
Cette question introduit le sujet et permet de présenter les interrogés.
2. Dans quel contexte mettez-vous en place des actions de sensibilisation ?
Est-ce une demande des professionnels ? d’une association ? d’un
organisme ?
Est-ce lors d’un cas particulier rencontré ?
Cette question s’intéresse à la raison pour laquelle de la sensibilisation peut être menée.
3. Comment percevez-vous la réceptivité des professionnels ?
Est-ce que l’information parait être transmise ?
Quels outils avez-vous mis en place pour mesurer cela ?
Comment vos informations sont-elles perçues et reçues ?
Le ressenti des ergothérapeutes est demandé pour observer la réception de leurs
informations.
4. Avez-vous eu l’occasion de mener une action de sensibilisation concernant les
chutes chez les personnes âgées?
Dans quel contexte?
Comment cela s’est déroulé ? Quel en était le contenu?
Y avait-il des professionnels de présents? Lesquels?
Cette question permet de savoir si l’ergothérapeute a une expérience en lien avec le sujet,
savoir également le déroulement de cette action.
5. Que pensez-vous de la sensibilisation que peut mener un ergothérapeute auprès
des professionnels intervenant à domicile?
Pour vous, qu’est-ce que peut apporter la sensibilisation?
Cette question permet de mettre en avant l’avis du professionnel sur la sensibilisation qu’il
peut mener.
Annexe 5 : Entretien avec ‘Ergo 1’
Marion (M) : Bonjour, je suis Marion Garnier, étudiante en troisième année à l’école de
Rennes. Dans le cadre de mon mémoire de fin d’étude, je réalise un recueil de données, à
l’aide d’un entretien, auprès des ergothérapeutes intervenant au domicile et pouvant être
en relation avec les professionnels intervenant régulièrement au domicile des personnes.
Mon mémoire concerne la sensibilisation auprès des professionnels intervenant à domicile.
Je vous remercie d'avance de tout l'intérêt que vous allez y porter et du temps que vous allez
y consacrer. Tout d’abord, pouvez-vous décrire le fonctionnement de votre service ? Quel
est votre rôle dans ce service ?
Ergothérapeute 1 (E1) : J’interviens dans un SAMSAH25. J’accompagne des personnes avec
un handicap moteur, cela concerne surtout des pathologies chroniques invalidantes. Il y a un
tiers des personnes suivies par le SAMSAH qui ont des pathologies comme la SEP26, SLA27 et
deux tiers des personnes qui sont porteuses du VIH28 avec des troubles associés comme des
troubles addictifs ou psychiques. Actuellement les personnes que j’accompagne ont surtout
des SEP, des pathologies myopathiques. Je fais une évaluation globale, je la fais au début
pour voir les besoins de la personne aussi bien dans sa vie quotidienne, dans son domicile,
dans ses activités à l’extérieur. Je les accompagne dans leur projet de vie comme
l’aménagement du lieu de vie, le renouvellement de matériel. Je peux voir précisément
comment ça se passe pour la toilette, l’habillage, il y a des mises en situation. Je travaille
donc là beaucoup avec les aidants aussi bien familiaux que les services prestataires qui
interviennent au domicile. On travaille toujours énormément en équipe que ce soit avec la
psychologue, les travailleurs sociaux, le corps médical avec médecins, infirmières. Dans mon
ancien travail, le fonctionnement était globalement le même. Je travaillais au sein d’un
SAMSAH-SAVS29 qui était accolé à un service d’auxiliaire de vie. Souvent les personnes
25
Service d’Accompagnement Médico-social d’Adultes Handicapés 26
Sclérose En Plaque 27
Sclérose Latérale Amyotrophique 28
Virus d’Immunodéficience Humaine 29
Service d’Accompagnement à la Vie Sociale
suivies en SAMSAH étaient aussi suivies par le SAV30. Je dirais que c’était plus facile parce
qu’on travaillait beaucoup avec les auxiliaires de vie.
M : Dans quel contexte mettez-vous en place des actions de sensibilisation ? Est-ce une
demande des professionnels ? Est-ce lors d’un cas particulier rencontré?
E1 : Pour la vie quotidienne, nous pouvons faire de la sensibilisation sur l’utilisation du
matériel qui est au domicile. Par exemple, je me souviens qu’avec une personne nous avions
travaillé sur l’utilisation de la planche de transfert. Souvent l’aidant familial ou professionnel
était dans quelque chose où il fallait aller au plus vite et donc aidait beaucoup la personne
dans ses transferts alors qu’avec la planche elle y arrivait seule. C’est ce genre de
sensibilisation que je peux faire, utiliser le matériel à domicile, que ce soit le lève-personne
ou le fauteuil roulant, comment charger un fauteuil roulant électrique, entretenir un fauteuil
roulant, comment positionner le coussin d’assise, car souvent on le retrouve pas mis de la
bonne façon. Parfois les matelas anti-escarre peuvent être mis à l’envers. Souvent la
demande de ces interventions vient de la part de la responsable du service d’auxiliaire de vie
qui peut dire que dans telle situation ça ne fonctionne pas. Par exemple, un monsieur qui
avait un lève-personne verticalisateur, nous avons du travailler plein de fois. Il fallait
éduquer les auxiliaires de vie pour utiliser le matériel qui était spécifique. C’était là une
demande du service d’auxiliaire de vie. Parfois je me rendais moi-même compte que le
matériel était parfois sous-utilisé alors que pour la personne cela pouvait être bénéfique
pour elle. L’obstacle est souvent qu’ils ne savent pas comment l’utiliser. Les demandes
émanant de la personne sont plus rares.
M : Comment percevez-vous la réceptivité des professionnels ?
E1 : Je dirais que c’est fluctuant, cela dépend des personnes. Il y a des personnes qui sont
plutôt à l’écoute. Il faut aussi, je trouve avoir un discours adapté parce que ce sont des
personnes qui connaissent très bien le patient et qui sont au quotidien avec eux donc il ne
faut pas arriver en leur disant qu’ils font n’importe quoi. Sinon cela peut être mal vécu par
l’aidant qui peut se dire je sais comment ça se passe au quotidien, je fais mon travail. Il faut
être diplomate car il faut dire les choses en mettant une certaine forme. J’ai beaucoup appris
30
Service d’Auxiliaire de Vie
de ces personnes là. Je ne prétends pas détenir tout et j’essaye vraiment de le mettre en
forme comme un travail d’équipe.
M : Avez-vous eu l’occasion de mener une action de sensibilisation concernant les chutes
chez les personnes âgées ? Dans quel contexte ?
E1 : Dans mon activité professionnelle, j’ai un temps dans un PACT31. Je fais des évaluations
à domicile pour déterminer les aménagements possibles dans le logement. La mission à la
base c’est ça, mais je fais une évaluation globale et aussi du conseil. Cela arrive très
régulièrement que ce soit des personnes vieillissantes, qui commencent à avoir des
problèmes d’équilibre, une perte progressive de motricité. C’est très fréquent que je me
rende compte dans le logement par exemple que les espaces ne sont pas forcément bien
dégagés au sol, la personne est mal chaussée, ce genre de chose. Je suis donc dans une
démarche d’ergothérapeute et je les sensibilise par rapport aux potentiels risques de chute
en proposant des solutions. Les actions menées sont donc faites lors des visites et je fais le
conseil tout de suite. Ce ne sont pas des ateliers. Je peux envoyer de la documentation à la
personne par la suite pour qu’ils s’adressent à des endroits quand ils veulent acquérir du
matériel ou autre.
M : Que pensez-vous de la sensibilisation que peut mener un ergothérapeute auprès des
professionnels intervenant à domicile ?
E1 : C’est très intéressant. Je le conçois comme un travail d’équipe et il faut plutôt faire
attention à la manière d’amener la sensibilisation pour pas que les professionnels se sentent
offusqués. J’ai eu de très bonnes expériences et cela était bénéfique dans
l’accompagnement de la personne. On travaille tous ensemble autour du patient pour que
ça se passe au mieux au domicile. Les professionnels peuvent prendre des habitudes avec le
patient au quotidien, c’est parfois ritualisé, mais ce n’est pas toujours optimum dans la vie
quotidienne. Le fait de sensibiliser c’est aussi leur montrer qu’on peut faire différemment et
qu’ils puissent améliorer eux-mêmes leur pratique.
M : Merci beaucoup pour toutes vos réponses.
31
Protection -Amélioration - Conservation - Transformation de l’habitat
Annexe 6 : Entretien avec ‘Ergo 2’
Marion (M) : Bonjour, je suis Marion Garnier, étudiante en troisième année à l’école de
Rennes. Dans le cadre de mon mémoire de fin d’étude, je réalise un recueil de données, à
l’aide d’un entretien, auprès des ergothérapeutes intervenant au domicile et pouvant être
en relation avec les professionnels intervenant régulièrement au domicile des personnes.
Mon mémoire concerne la sensibilisation auprès des professionnels intervenant à domicile.
Je vous remercie d'avance de tout l'intérêt que vous allez y porter et du temps que vous allez
y consacrer. Tout d’abord, pouvez-vous décrire le fonctionnement de votre service? Quel est
votre rôle dans ce service?
Ergothérapeute 2 (E2) : Je travaille au CLIC32 de la ville de F., je suis là-bas 2 jours par
semaine. Je suis aussi en conventionnement avec la CARSAT33, c’est une caisse de retraite où
je vais au domicile des personnes âgées qui ont un GIR34 5, 6 et je fais l’évaluation globale de
leur besoin. En fonction de ça, je leur propose de mettre en place un plan d’aide d’humaine.
Ça me permet de repérer aussi tous les autres besoins comme des besoins en aide
technique, d’aménagement de logement. En fonction également de leur situation, je peux
leur proposer des ateliers mémoire, équilibre. C’est à peu près 75% de mon activité. Sur le
25% qui reste, je fais de l’accueil au CLIC. Les personnes qui viennent au CLIC sont des
personnes âgées, personnes en situation de handicap qui ne relèvent plus d’une orientation
MDPH35. J’épaule les collègues dans le secteur social par rapport aux connaissances
médicales, capacités, incapacités des personnes. Je vais faire une évaluation un peu plus fine
qui permet après de les réorienter directement vers les bonnes structures. Sur une petite
partie de mon temps, j’anime des réunions d’information sur l’adaptation de l’habitat, les
gestes et postures et des conseils en aide technique. Ce sont des interventions ponctuelles
où je peux intervenir plusieurs fois dans l’année.
M : Dans quel contexte mettez-vous en place des actions de sensibilisation?
32
Centre Local d’Information et de Coordination 33
Caisse d’Assurance Retraite et de la Santé au Travail 34
Groupe Iso-Ressource 35
Maison Départementale des Personnes Handicapées
E2 : J’ai mené des actions de sensibilisation sur les aides techniques ou gestes et postures,
c’était des ateliers d’aide aux aidants. Je n’étais pas avec les personnes en perte
d’indépendance, mais avec les aidants familiaux, je leur amenais des conseils pour le
quotidien. L’année dernière je devais participer à une conférence sur la prévention des
chutes que je n’ai pas pu faire à cause de la neige. Les actions sont menées suite aux
demandes des aidants directement pour cet exemple. Avec les échanges qu’on peut avoir,
on s’aperçoit qu’ils aimeraient bien avoir des informations sur ce sujet là. Les autres
demandes sont plus celles des conseillères en gérontologie et qui repèrent des besoins.
M : Comment percevez-vous la réceptivité des personnes participant à la sensibilisation ?
E1 : C’est très variable. Les personnes qui participent ont en soi un intérêt. Ce qui est très
difficile c’est la communication, faire venir les personnes. Il faut une accroche pour les
personnes, une fois qu’elles participent elles sont très satisfaites. Par exemple sur la ville de
F., on a du mal à avoir des personnes présentes sur les ateliers prévention des chutes par
exemple alors que sur les petites villes alentours proportionnellement on a plus de monde.
Je pense que c’est plus facile dans les petites communes car il y a beaucoup de bouche à
oreille. L’information passe plus facilement et du coup les professionnels sont aussi un peu
plus proches des personnes que les grandes villes. Cependant, une fois que les personnes se
déplacent, les retours sont très positifs, mais le plus dur c’est de les faire venir.
M : Avez-vous eu l’occasion de mener une action de sensibilisation concernant les chutes
chez les personnes âgées? Si oui, dans quel contexte? Y a-t-il des professionnels qui y
participent ?
E2 : Oui, j’ai piloté des actions sans vraiment y intervenir. Pour cette action là, j’avais un rôle
de coordination. Il y a eu un appel à projet qui a été fait par une caisse de retraite pour aider
au financement. Sur un secteur on propose aux communes qui pourraient être intéressées.
Ensuite il y a un partenariat qui peut être fait avec d’autres associations comme K. ou S. Ce
sont ces associations qui peuvent nous contacter directement pour savoir sur quel secteur ils
peuvent intervenir et on organise ensuite une intervention. Pour les professionnels qui
peuvent y participer, il y a un kinésithérapeute qui fait les ateliers, moi j’y participe quand je
peux aussi. Sur les réunions de préparation, il peut y avoir une conseillère en gérontologie de
présente. Elle ne participe pas aux conférences, aux ateliers, mais nous aide pour la
communication. Il n’y a pas forcément d’autres professionnels.
M : Y a-t-il d’autres personnes que les personnes âgées qui assistent à la sensibilisation ?
Comme des professionnels ?
E2 : Non, mais il y a déjà eu une kinésithérapeute et une ergothérapeute qui sont venues
assister à un atelier pour leur donner des idées. Les professionnels sont plus là pour diffuser
la communication car ce sont eux qui rencontrent des personnes. Mais réellement aux
réunions, ateliers, conférences, il n’y a pas de professionnels.
M : Que pensez-vous de la sensibilisation que peut mener un ergothérapeute auprès des
professionnels intervenant à domicile ? Qu’est-ce que peut apporter la sensibilisation ?
E2 : Je trouve ça très important surtout auprès des aides à domicile pour être notamment
conseiller sur les aides techniques, la prévention des escarres, etc. Je pense qu’il y a un gros
travail à faire encore. Ça s’est déjà développé car il y a quelques ergothérapeutes qui
interviennent dans des services de soins à domicile. Il y a beaucoup de professionnels qui ne
sont pas forcément formés sur les pathologies évolutives, l’accompagnement de la personne
âgée. Il y a des interventions de l’ergothérapeute sur des situations complexes et c’est très
bien. Seulement ça mériterait d’être largement diffusé. La sensibilisation pour le maintien à
domicile de la personne permet d’apporter un meilleur confort, de garder un meilleur
maintien de l’autonomie. Ça permettrait aussi que les professionnels fassent attention à
certaines choses pour garder l’autonomie de la personne.
M : Merci beaucoup pour toutes vos réponses.
Annexe 7 : Entretien avec ‘Ergo 3’
Marion (M) : Bonjour, je suis Marion Garnier, étudiante en troisième année à l’école de
Rennes. Dans le cadre de mon mémoire de fin d’étude, je réalise un recueil de données, à
l’aide d’un entretien, auprès des ergothérapeutes intervenant au domicile et pouvant être
en relation avec les professionnels intervenant régulièrement au domicile des personnes.
Mon mémoire concerne la sensibilisation auprès des professionnels intervenant à domicile.
Je vous remercie d'avance de tout l'intérêt que vous allez y porter et du temps que vous allez
y consacrer. Tout d’abord, pouvez-vous décrire le fonctionnement de votre service ? Quel
est votre rôle dans ce service ?
Ergothérapeute 3 (E3) : Je travaille à temps plein dans un SAVS-SAMSAH. L’équipe
accompagne des personnes qui vivent à domicile et qui présentent un handicap moteur avec
éventuellement des troubles associés. Je fais partie d’une équipe pluridisciplinaire composée
de deux ergothérapeutes, une psychologue spécialisée en neuropsychologie, une
orthophoniste, trois assistantes sociales, une conseillère en économie sociale et familiale, un
animateur socio-éducatif, un éducateur spécialisé, deux psychologues, deux infirmiers
coordinateurs, deux aides médico-psychologiques et un médecin de médecine physique et
réadaptative. Le rôle de l’équipe est d’amener les personnes vers l’autonomie, de ne pas
s’inscrire dans la durée. Normalement, on a un accompagnement où va intervenir sur une
période de la vie pour aider la personne à mettre en place des moyens de compensation,
pour l’aider à acheminer son projet de vie. Le but est ensuite de mettre en place des relais, il
y a donc une importance dans les transmissions qu’on va faire pour les équipes qui prennent
le relais. Nous sommes là aussi pour faciliter l’intervention des aidants d’accompagner les
personnes dans leur projet de vie à domicile. Le rôle de l’ergothérapeute est de manière
globale de compenser le handicap par du matériel, des aides techniques, l’apprentissage de
nouvelles techniques, de gestes facilitateurs, l’aménagement du logement, l’évaluation de
mise en place d’aide humaine. On évalue alors les capacités, les difficultés, on cherche des
solutions et on accompagne le projet comme la recherche de financement, le lien avec les
fournisseurs, etc. jusqu’à ce que les travaux se réalisent, l’aide technique soit livrée, la
personne comprenne le fonctionnement de l’aide technique, l’entourage également. Le
projet est vraiment individualisé.
M : Dans quel contexte mettez-vous en place des actions de sensibilisation ? Est-ce une
demande des professionnels ? Est-ce lors d’un cas particulier rencontré ?
E3 : Ça se déroule d’une manière pas très formalisée, qui ne suit pas un protocole particulier.
C’est en fonction des situations. Par exemple, il y a eu de la sensibilisation par rapport à des
difficultés cognitives de la personne. Ça été pour un service d’auxiliaire de vie qui intervenait
pour sensibiliser sur les troubles cognitifs de l’usager, leur expliquer les difficultés de la
personne et comment faire au quotidien avec ces difficultés. Cette sensibilisation avait pour
but de faire comprendre qu’il y avait des comportements qui n’étaient pas volontaires et
qu’il fallait prendre de la distance par rapport à des paroles de la personne. Il y a eu
également de la sensibilisation pour l’utilisation de matériel, souvent par rapport aux
options des fauteuils roulants : la roulette anti-bascule, pour les positionnements
particuliers, puis comment on utilise un lève-personne, comment on met une sangle. La
difficulté avec les professionnels qui interviennent c’est qu’ils sont des prestataires et qu’ils
tournent beaucoup. La difficulté est lorsqu’on montre à une auxiliaire de vie, elle ne va pas
montrer à ces collègues. On ne peut pas multiplier les visites pour montrer à toutes les
auxiliaires qui interviennent chez la personne. Il nous arrive de passer par la responsable du
service d’auxiliaire de vie, mais ce qui est un peu compliqué c’est que les responsables ne
sont pas au plus proche de la situation. Cela fait un transmetteur en plus et le message n’est
pas forcément clair quand il arrive à la personne concernée.
M : Comment percevez-vous la réceptivité des professionnels ?
E3 : Ça dépend des personnes, si elles s’intéressent à ce qu’on leur dit et si elles voient un
intérêt sur elle. Par exemple, des conseils sur l’utilisation d’un matériel pour faciliter des
transferts ou des conseils sur la manutention. Si elles voient un intérêt, préserver leur dos ou
leurs articulations, elles vont être plus réceptives. Ça dépend pas mal de la personne, mais
aussi de comment est géré le service d’auxiliaire de vie, comment se positionne le
responsable du service, comment il va transmettre les informations, comment il est impliqué
dans la situation. On essaye que les services nous identifient bien. Dans les moyens pour
transmettre les informations, soit ça se fait de manière informelle en visite à domicile soit un
rendez-vous est fixé. On peut aussi transmettre des informations lors des synthèses comme
pour la sensibilisation faite pour les troubles cognitifs. Sinon nous pouvons organiser une
rencontre au service avec la personne concernée, la responsable du service, une auxiliaire de
vie, c’est quelque chose de plus formel. Selon la situation, la sensibilisation prend des formes
différentes. Globalement, la sensibilisation est prise en compte, entendue. Après est-ce que
c’est mis en application sur le long terme, je ne sais pas. Quand on voit par exemple à
domicile que le matériel n’est pas utilisé ou autre, on en déduit qu’il y a eu un souci à un
niveau. Quand il y a des plaintes de l’entourage de l’usager, on conseille mais on voit il y a
des informations qui ne sont pas passées. Pour moi, il n’y a pas de moyens pour voir si
l’information est passée. Pour que l’information passe directement aux auxiliaires de vie et
pour qu’elle soit disponible au domicile, on passe par les classeurs de transmission. Il arrive
donc qu’on mette des messages dans ces cahiers là en indiquant des informations. On peut
aussi passer par des tutoriels comme des modes d’emploi. On peut prendre des photos de
l’installation pour le positionnement, on peut indiquer comment gonfler un coussin à air. Ce
support permet de l’avoir toujours au domicile et affiché. Cela permet que les informations
soient les mêmes pour toutes les auxiliaires de vie et restent dans le temps.
M : Avez-vous eu l’occasion de mener une action de sensibilisation concernant les chutes
chez les personnes âgées ? Dans quel contexte ?
E3 : Oui, pour une personne qui avait tendance à chuter et qui était très désordonnée. On lui
a donné des conseils pour organiser son logement autrement, mais aussi à l’auxiliaire de vie
qui intervenait. Lors d’une visite à domicile on avait rappelé d’essayer de limiter les
obstacles, de ranger et donc limiter le risque de chute. Ce n’était pas très formel, c’est un
élément qui déclenche nos interventions. Il y avait aussi un usager qui était dispersé et qui
conservait beaucoup de documents. Chez lui c’était alors très encombré. Je lui ai donné des
conseils pour ranger les choses, pas forcément en hauteur pour qu’il ne prenne pas
d’escabeau. Le but était de limiter les obstacles et de chuter. Pour une autre personne, pour
limiter les chutes nous avons fait des aménagements de logement, mais nous n’avons pas
trouvé de moyens de limiter les risques aux chutes. Pour que les aides à domicile soient
rassurées, nous avons donc mis en place une démarche à suivre en cas de chute. Cela avait
été travaillé avec la psychologue, le médecin traitant car les chutes étaient liées à la
pathologie du monsieur. C’était donc une fiche qui avait été mise au domicile en cas de
chute comme la conduite à tenir. Le document a été transmis à la responsable du service et
laissé au domicile de l’usager.
M : Que pensez-vous de la sensibilisation que peut mener un ergothérapeute auprès des
professionnels intervenant à domicile ?
E3 : Pour beaucoup de situations, elle est nécessaire parce que si on met en place quelque
chose, mais que les conseils ne sont pas respectés, si la manière la plus adaptée n’est pas
mise en place, ça n’a aucun intérêt. C’est donc vraiment important. Ce n’est pourtant pas
évident à mettre en place. Ça se fait souvent de manière informelle. On essaye de mettre en
place des supports pour faciliter ça et de faire le lien avec les responsables de service qui
sont en contact avec toutes les auxiliaires de vie. De manière plus globale, nous intervenons
souvent avec des SSIAD et lorsqu’il y a des ergothérapeutes, cela permet qu’il y ait les
bonnes informations qui passent auprès des professionnels. L’équipe fait aussi remonter
plus facilement leurs difficultés au lieu de nous contacter. La sensibilisation peut apporter
une meilleure connaissance des troubles de la personne, cognitifs ou psychiques. Cela peut
éviter des situations de conflit ou d’épuisement de l’aidant professionnel. Pour un usager qui
a des troubles de communication, on peut expliquer à l’aidant qu’il faut lui laisser finir sa
phrase ou autres. Tous les conseils qu’on peut donner permettent à la personne d’être plus
comprise. Pour l’aspect plus moteur, la sensibilisation permet à l’usager d’être rassuré ainsi
que le professionnel. Le fait d’être formé rassure en effet, l’usager et le professionnel. La
sensibilisation permet d’éviter les mises en danger, apporter de la sécurité et du confort tant
sur le plan des transferts, moteurs que sur la situation en générale. L’aide au domicile n’est
pas facile pour la personne, pour l’auxiliaire donc si on peut apporter un peu de confort.
Mais il est vrai qu’il y a un peu un trou dans le secteur médico-social même si ça tend à se
développer. Les ergothérapeutes dans les services à domicile suivent beaucoup de
personnes, moi j’en suis 90 avec ma collègue.
M : Merci beaucoup pour toutes vos réponses.