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Nom : KOUA OBA jovial
Démographe /Géographe
INS /Congo /Membre de l’UEPA /Membre de l’UERPOD
Thème : Santé sexuelle et reproductive
Résumé
La présente communication se propose d’examiner la question de l’avortement qui est une pratique
non marginale, dans deux pays d’Afrique. Sa mesure est cependant rendue difficile par un
certain nombre de considérations qui entourent cet acte. Condamné par la quasi-totalité des
religions, objet d’une législation particulièrement restrictive, l’avortement se pratique
généralement de façon clandestine et ne saurait, de ce fait, se prêter à un enregistrement
exhaustif. L’objectif de cette étude est de contribuer à une meilleure connaissance de cette pratique au
Congo l’EDSC-2005 et au Gabon l’EDSG-2000 où des questions sur l’avortement ont été intégrées
dans les questionnaires, précisément dans la section relative à la reproduction. Ces données collectées
nous ont permis d’apportées un éclairage sur la fréquence de l’avortement, le stade de la grossesse au
moment de l’avortement, la personne qui a pris la décision d’avorter, les raisons qui ont motivé cette
décision, la procédure, le lieu, le type d’assistance ainsi que les complications dues à l’avortement.
Les différents résultats d’analyse, montrent qu’au Gabon, 40% et 39% au Congo des femmes qui
avortent utilise la méthode de dilatation et du curetage, 2% contre 4% l’aspiration ; 6% et 3% une
sonde ; 12% et 9% une injection et on estiment à 32% contre 25% celles ayant utilisé des méthodes
dites « Artisanales » et dangereuses. Le risque pour une femme de recourir à un type de méthode
d’avortement varie selon les facteurs socio-économiques et démographiques de la femme.
Au niveau des facteurs socio-économiques et démographiques, l’occupation principale, la
parité atteinte, sont les facteurs les plus déterminants en matière de recours aux méthodes
d’avortement moderne au Gabon et au Congo.
Sous thème : Tendances, déterminants, conséquences de l’avortement au Congo et au Gabon
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Ces résultats témoignent donc l’importance de la sensibilisation des femmes en fin de vie féconde
sur les risques et les dangers liés à l’utilisation des méthodes d’avortement dites « artisanales et
dangereuses ». Les causes sont multiples : Le manque des moyens, l’âge de la fille …Les
conséquences sont très fâcheuses d’où dans le pire des cas on assiste à des avortements clandestins
aux dangers incalculables (infection, stérilité, mort….).l'interruption volontaire de grossesse
(I.V.G.) apparaît comme un des principaux facteurs de la stérilité secondaire au Gabon et
Congo. Plus que les MST, les avortements clandestins contribuent au maintien voire à
l'accroissement des taux de stérilité .Il est donc souhaitable que les gouvernements des deux pays
s’engager à traiter les conséquences des avortements pratiqués dans de mauvaises conditions de
sécurité et faciliter l’accès aux services de planification familiale afin de réduire le recours aux
interruptions volontaires de grossesse (IVG). Vu les causes et les conséquences cette étude s’inscrire
dans une logique de la légalisation de l’avortement dans les deux pays. Cette position présente les
limites sur la question: est ce que l'avortement autorisé peut sauver des
vies? C'est aux femmes africaines de se battre pour obtenir ce droit à
avorter, à suivre l'exemple des femmes européennes, est ce que ça ne
sera pas des grands risques, voir le libertinage et la décadence sexuelle ?
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1-INTRODUCTION GENERALE
La pratique de l’avortement est assez rependue ; quarante à soixante millions d’interruptions
volontaires de grossesse sont pratiquées à travers le monde chaque année (ADRIENNE
Germaine. 1999). De ce nombre, environ 20 million sont à risques, soit un avortement pour
sept naissances ; 95% de ces interruptions volontaires de grossesses sont pratiquées dans les
pays en voie de développement (OMS, 1995). Au Gabon, 20 % et Congo 11% des femmes
recourent à l’avortement pour réguler leur fécondité (EDSG 2000, EDSC ,2005). Cette
pratique est réalisée par une variété des méthodes. De tout temps, et à travers le monde, les
femmes ont toujours eu recours à l’avortement provoqué pour mettre un terme aux grossesses non
désirées ; ou encore comme mode de régulation des naissances. Malgré son caractère illégal et
stigmatisant, certaines d’entre elles n’hésitent pas à recourir à des procédés clandestins et cela dans
des conditions dangereuses et non autorisées. Les méthodes connues et utilisées varient selon les
pays tout comme l’offre de produits contraceptifs ou abortifs, que ce soit sur le marché formel ou sur
le marché informel. Les manœuvres abortives se soldent parfois par un échec ; certaines femmes
peuvent alors accepter de poursuivre leur grossesse tandis que d’autres recherchent une technique
plus efficace. Il arrive aussi que des complications surviennent (hémorragie, infection, perforation de
l’utérus, etc.) et provoquent des problèmes de santé, de stérilité ou, dans des cas extrêmes, la mort
de la femme (Strickler et al. 2001). Les femmes font appel à une gamme diversifiée de méthodes
pour réguler leur fécondité. En Turquie, c’est « la grande nervure des feuilles de tabac, au Japon, les
fines branches de bambou, en Inde la racine d’une plante appelée plumbage zeilamia, en Chine, une
sorte d’instrument irritant le hérisson » (Henri NOMIGNI, 1999).
Les types de procédés auxquels les femmes recourent pour avorter sont un sérieux problème
de santé publique. Les organisations internationales comme l’Assemblée Mondiale de la Santé
(WHA) et l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) à travers des conférences, Fora et colloques
sensibilisent les Etats sur la prise de conscience d’un tel fléau.
Ainsi dès 1967, dans sa résolution 20.41, l’Assemblée Mondiale de la Santé (WHA) a déclaré
que l’avortement posait dans de nombreux pays, un grave problème de santé publique. Elle a donc
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encouragé l’OMS d’aider les Etats membres, sur leur demande, à créer des services de planification
familiale au sein de leur service de santé de base.
La conférence sur la Maternité sans risque organisée à Nairobi en 1987 devait accélérer la
prise de conscience du problème de l’avortement à l’échelon international en attirant l’attention sur
la nécessité de réduire la mortalité et la morbidité maternelles. Du coup, divers chercheurs
entreprirent de recueillir et de diffuser des données sur l’avortement. Ces données sur le problème
de l’avortement à risque ont été publiées et estiment que quarante à soixante millions
d’interruptions volontaires de grossesse sont pratiquées à travers le monde chaque année. De ce
nombre, environ 20 millions sont à risques, soit un avortement pour sept naissances ; 95% de ces
interruptions volontaires de grossesses sont pratiquées dans les pays en voie de développement
(OMS, 1995) et, sur un total de 13% des décès en rapport avec la grossesse, environ un sur huit (13%)
seraient dus à des avortements à risque (OMS, 1994). Cette dernière estime par ailleurs qu’au moins
80000 femmes meurent chaque année à cause d’un avortement dangereux, et que beaucoup plus
encore souffrent des séquelles qui affectent leur santé physique ou mentale pour le reste de leur vie.
A la conférence du Caire en 1994, il a été reconnu que l’avortement ne devait en aucun cas
être considéré comme méthode de planification familiale, les gouvernements devaient également
s’engager à traiter les conséquences des avortements pratiqués dans de mauvaises conditions de
sécurité et faciliter l’accès aux services de planification familiale afin de réduire le recours aux
interruptions volontaires de grossesse (IVG).
La pratique de l’avortement touche tous les pays, mais les avortements à risque (abortion),
c’est-à-dire faits dans des conditions d’hygiène et de sécurité insuffisantes, surviennent
essentiellement dans les pays en développement où se produisent 97% des 19 millions
d’avortements à risque pratiqué dans le monde (WHO 2004). La majorité des études et enquêtes sur
l’avortement provoqué en Afrique se réalisent en milieu hospitalier auprès des femmes qui ont eu
des complications consécutives aux types de méthodes abortives utilisés.
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Les complications d’avortement et leur gravité sont étroitement liées aux types de méthodes
abortives utilisées. Les méthodes « à risque » sont surtout celles qui sont basées sur la pharmacopée
traditionnelle, l’insertion d’objet dans l’utérus, l’utilisation de médicaments en surdosage, les
produits chimiques. Mais les méthodes chirurgicales ne sont pas non plus dénuées de risques surtout
lorsqu’elles sont pratiquées par des prestataires de santé non qualifiés ou dans un environnement
sanitaire inadéquat. L’utilisation de certaines méthodes ne produit pas toujours l’effet escompté.
Elle se solde parfois par un échec ; les conséquences de cet échec vont des séquelles pour les
enfants à naître (malformation, mortalité) aux problèmes de santé pour les femmes. Les
complications les plus fréquentes sont des lésions des organes génitaux, des douleurs pelviennes
chroniques, des infections, des hémorragies, des hystérectomies, des problèmes de stérilité et
d’incontinence et même de décès de la femme (Anderson B.A. et al, 1994). A ces problèmes de santé
s’ajoutent toutes les conséquences psychologiques et sociales pour les femmes.
A Bamako, dans l’enquête menée auprès des femmes en consultation dans les centres de
santé, 59% déclarent des complications après leur avortement, surtout des hémorragies (Konaté
M.K. et al. 1996). Dans une enquête à l’hôpital de cette ville (Diallo Diabaté et al. 2000) ont été
identifiées comme principales complications post-abortum les hémorragies (47%), les complications
infectieuses (33%) et les intoxications médicamenteuses (4%).
Le Gabon et le Congo deux pays ayant des frontières communes à l’instar des autres pays en
développement sont touchés par l’incidence des types de méthodes abortives utilisées par des
femmes. Selon les Enquêtes Démographique et de Santé des deux pays, 20 % pour le Gabon et 11%
au Congo des femmes ont reconnu avoir avorté en recourant à un éventail de méthodes.
Les quelques rares études sur l’avortement qui nous permettent de saisir les recours
montrent une pluralité de méthodes abortives. Les différents résultats d’analyse, montrent qu’au
Gabon, 40% et 39% au Congo des femmes qui avortent utilise la méthode de dilatation et du
curetage, 2% contre 4% l’aspiration ; 6% et 3% une sonde ; 12% et 9% une injection et on
estiment à 32% contre 25% celles ayant utilisé des méthodes dites « Artisanales » et dangereuses.
Interdit par la religion et mal considéré du point de vue social ; ces statistiques sont sous-estimées.
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Ces statistiques sont assez inquiétantes pour des pays qui veulent assurer une protection
sanitaire à leur population, réduire la mortalité maternelle et qui plus ont a opté pour une politique
nataliste. Aussi, malgré le caractère illégal de cette pratique dans ces deux pays, ces femmes qui ont
recouru à ces méthodes abortives, l’ont fait dans des centres de santé, soit privé (22%et 19%), soit
parapublic (2% et 1%) ou public (20% et 14%) respectivement au Gabon et au Congo. Pourtant,
l’avortement reste interdit dans les deux pays. En effet, le codes pénaux de ces pays stipule
que : « Quiconque, par aliments, breuvages, médicaments, manœuvres, violences ou par tout autre
moyen, aura procuré ou tenté de procurer l’avortement d’une femme enceinte ou supposée enceinte,
qu’elle y ait consenti ou non, sera puni d’un emprisonnement de un à cinq ans et d’une amende » seul
les montants différent d’un pays à l’autre.
Ces résultats qui nous semblent troublants, nous conduisent à rechercher les facteurs
susceptibles d’expliquer le recours à ces types de méthodes abortives. Cette étude se propose de
répondre à la question centrale qui est de savoir : quels sont les facteurs qui déterminent le choix
des méthodes d’avortement provoqué au Gabon et au Congo ? Il sera question de voir les causes et
les conséquences de l’avortement dans ces pays ?
Les études menées sur l’avortement depuis quelques décennies sont productives. Il existe
une abondante littérature sur ce thème : (KONATE M.K. et al, 1999), (Henri NOMIBNI 2000), (A.
GUILLAUME 2004, 2007) etc. Toutefois, peu de ces études se sont intéressées particulièrement aux
facteurs des méthodes d’avortement utilisées.
Une étude du ministère de la Santé du Gabon annonce que les avortements illégaux ont
causé, en 2001, un quart des morts liées à la grossesse, annonce L’Agence de presse des Nations
Unies. Ces décès représentaient cette année-là 110 des 407 complications fatales qui sont survenues
chez les femmes enceintes, faisant des avortements clandestins la source principale de mortalité. La
plupart des cas relevés concernent des adolescentes.
La pertinence de cette étude réside dans le fait que peu d’études ont essayé d’identifier et
d’expliquer les facteurs qui déterminent cause et les conséquences d’avortement. Notre étude a
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donc pour particularité de faire une étude comparative, bien que les deux pays n’ont pas la même
structure, et les sources des données n’ont pas été collectées la même année. Elle cadre bien avec le
cinquième objectif du millénaire sur le développement qui stipule en son dernier point qu’ : « En
réduisant le nombre de grossesses non désirées, des avortements pratiqués dans des conditions
dangereuses et, donc, les décès maternels, la planification familiale sauve la vie des femmes. De plus,
en affranchissant ainsi les femmes, on leur donne la possibilité de s’attaquer à tout ce qui met en
danger leur santé et leur vie ».
L’objectif général de cette étude est de faire la lumière sur les causes et les conséquences de
l’avortement afin de fournir aux décideurs de ces pays des informations, pour la mise en place des
programmes et politiques de population sur la santé de la reproduction et à la communauté
scientifique.
2.1. Revue de la littérature
2.1.1. Les Approches explicatives du recours à l’avortement
La question de l’avortement est largement reconnue comme étant une problème
complexe, difficile à aborder, et en particulier à mesurer, puisque sa pratique est niée et
occultée, surtout lorsqu’il est effectué de façon illégale. La négation et/ou la déclaration
erronée de l’avortement obéissent à des raisons multiples et variées. « C’est un sujet intime et
sensible pour les femmes, qui peut s’avérer douloureux lorsqu’il est interdit par la religion,
proscrit par différents professionnels de la santé, sanctionné par la loi et récriminé sur le
plan éthique et moral, et qu’il est finalement stigmatisé et peu accepté par la société »
(Guillaume A. 2005). Là où les lois sont restrictives en la matière, l’avortement se réalise en
général de façon clandestine, dans des conditions à haut risque pour la vie et la santé des
femmes. La femme et ceux qui le pratiquent peuvent en plus être poursuivis pénalement.
La recherche sur la pratique de l’avortement en Afrique a été pendant longtemps axée
sur l’exploitation des données issues des milieux hospitaliers auprès des femmes ayant eu des
complications après une tentative d’avortement ou un avortement réussit. Bien que non
représentatives, ces données ont permis de mettre en évidence la prévalence de cette pratique
dans bon nombre de pays. D’après certaines enquêtes et études, le recours à l’avortement par
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certaines méthodes abortives en Afrique s’expliquerait par des caractéristiques d’ordre
démographique, socioculturel, socio-économique et institutionnel.
2.1.1.1. Approche démographique
Le retard constaté dans l’entrée en vie sexuelle et maritale des femmes en Afrique est la
plupart du temps du à un recul de l’âge au mariage ; pour les hommes la situation est inverse
puisque les rapports sexuels sont de plus en plus précoces. Ces conditions d’entrée dans la sexualité
contribuent à l’allongement de la période d’activité sexuelle avant le mariage avec pour conséquence
une exposition de plus en plus marquée aux risques de grossesses non désirées et un recours de plus
en plus diversifié et préféré de certaines méthodes abortives (Delaunay, Guillaume, 2004). La
pratique de l’avortement touche toutes les femmes quel que soit leur âge, leur parité, leur situation
matrimoniale, elle intervient à différents moments du cycle de vie familiale (Mundigo et Shah, 1999).
Au Gabon, Barrière (2000) montre que la prévalence de l’avortement varie entre 15 et 23%
chez les femmes de plus de 20ans, et 4% chez les plus jeunes. Lorsqu’on analyse l’âge des femmes à
leur premier avortement, 44% d’entre eux se sont produits avant 20 ans.
Une enquête sur les adolescents non mariés âgés de 14-25 ans à Abadan, au Nigeria, a montré que
9 femmes sur 10 ont avorté lors de leur première grossesse (Lapido et al.1983)
En Tunisie, l’âge moyen à l’avortement est d’environ 30 ans, mais il semble que cette pratique soit
fréquente chez les jeunes femmes célibataires, les relations sexuelles étant socialement prohibées et
condamnées (Gastineau B., 2002).
A Bamako et à Abidjan, des enquêtes auprès des femmes en consultation dans les centres de
santé montrent que l’avortement concerne surtout les femmes de moins de 25 ans et célibataires.
(Konaté M.K et 1993 ; Guillaume A. et Degrés du Lou A., 2002).
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L’avortement est fréquemment pratiqué par des jeunes femmes en début de vie féconde
qui, par cette pratique, interrompent leur(s) première(s) grossesses par un avortement ( Okpani,
2000 ; Guillaume 2003).
Deux enquêtes menées au Cameroun soulignent la forte prévalence de l’avortement chez les
jeunes adolescents sans enfants et instruites ou en cours de scolarisation (Leke ; 1998).
Les études auprès des femmes qui ont eu des complications d’avortement aboutissent à des
conclusions quelque peu différentes. Au Mozambique et en Zambie, les femmes hospitalisées pour
des avortements clandestins sont des femmes jeunes, célibataires, peu instruites ou encore
scolarisées, sans enfants et de milieux sociaux défavorisées (Hardy et al; 1997 ; Guillaume 2004). A
Accra au Ghana, selon une étude réalisée en milieu hospitalier, un quart des femmes de moins de 20
ans venus accoucher pour la deuxième grossesse avait interrompu clandestinement leur première
grossesse.
Par ailleurs, une catégorie de femmes avortement pour espacer les naissances lorsque
l’intervalle inter génésique est court ou quand la parité a été atteinte (Renne, 1997).
Au Gabon, une femme sur huit a décidé d’avorter parce que ses naissances étaient très
rapprochées. En outre 19% de l’ensemble des femmes ont des besoins non satisfaits en matière de
contraception, dont la plupart (14%) pour espacer les naissances. (Barrère, 2000).
L’importance du recours à l’avortement dans de nombreux pays africains et la nature des
motivations amènent à s’interroger sur son rôle dans le contrôle des naissances.
Selon des enquêtes démographiques de Cote d’Ivoire en 1994 et 1999, l’indice synthétique de
fécondité est passé de 5,7 enfants par femmes lors de la première enquête(1994) à 5,2 enfants par
femme lors de la seconde (1999). Au cours de cette même période, la pratique contraceptive a
légèrement augmentée mais reste faible : seulement 6% de femmes en 1999 utilisaient une méthode
moderne de contraception (Guillaume, 2000).
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D’après une enquête faite à d’Abidjan auprès des consultants, la diminution de la
descendance des femmes imputable à l’avortement est estimée à 10% et cette proportion atteint
15% chez les jeunes femmes. Les femmes. Les femmes qui ont utilisé la contraception par le passé
ont une probabilité trois fois plus élevée d’avoir déjà avorté que celles qui n’ont jamais eu recours à
la contraception. Elles utilisent donc conjointement les deux pour réguler leur fécondité (Guillaume,
2000).
L’avortement comme méthode de contraception
L’avortement provoqué a toujours été utilisé comme méthode de régulation de naissance
bien avant l’apparition et l’utilisation des méthodes de contraception voire le développement des
programmes de planification familiale. Le recours à l’avortement n’apparaît pas comme un
événement exceptionnel au cours des trajectoires féminines. Une femme sur cinq a avorté une fois
au cours de sa vie féconde. Une femme interrogée a interrompu volontairement 9 de ses 12
grossesses. Si l’on considère les femmes ayant été au moins deux fois enceintes, 4 % ont interrompu
toutes leurs grossesses par un avortement (Guillaume A 1999). Le développement des programmes
de planification familiale a contribué à une plus grande utilisation de la contraception, même s’il n’a
pas toujours eu l’effet escompté d’une réduction, voire d’une disparition du recours à l’avortement.
Dans les pays ou l’usage des méthodes contraceptives est élevé, les échecs de la
contraception restent très fréquents comme l’atteste la persistance des grossesses non désirées qui
se concluent par une interruption de grossesse. A Abidjan, certaines femmes ont expliqué leur
avortement par un besoin de limiter (3 %) ou d’espacer (9 %) les naissances, exprimé par le jugement
que « le dernier enfant était trop petit ». Les grossesses non désirées résultent soit d’une absence de
contraception, soit de l’échec d’une méthode (Guillaume A. Op, cit,). Cette situation est
caractéristique de la période du post-partum pendant laquelle les femmes pensent ne pas être
exposées au risque d’une nouvelle grossesse car elles se sentent protégées par l’allaitement.
Dans les pays en voie de développement et particulièrement en Afrique, les individus
utilisent très peu les méthodes contraceptives modernes, l’intensité et la fréquence de l’activité
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sexuelle fait croitre le risque de grossesses non désirées. Cette non utilisation massive de ces
méthodes contraceptives modernes ne semble pourtant pas être liée à la connaissance de leur
existence mais plutôt à une appréciation correcte du mode d’action des différentes méthodes et de
leurs éventuels effets secondaires, des représentations que les femmes se font de leur usage. Le
recours à l’avortement après l’échec de contraception montre un réel désir de maîtrise de leur
fécondité chez certaines femmes. Elles utilisent d’abord la contraception pour éviter une grossesse
non désirée et, logiquement, si elle survient, décident alors d’avorter avant de revenir à leurs
pratiques contraceptives. Pour elles, avortement et contraception sont deux outils de régulation de
la fécondité utilisés de façon complémentaire (Guillaume A, 2003). L’avortement intervient comme
mode de régulation de la fécondité dans un contexte de recours limité à la contraception.
A l’Ile Maurice, pays réputé pour l’efficacité de son programme de planification familiale,
avec une prévalence de 75%, le recours aux avortements clandestins persiste pour différentes
raisons dont la plus fréquente est l’entrée précoce en vie sexuelle sans usage contraception (N’yong’
o D. et Oodit G., 1996; Djoke 2004).
En Ethiopie, Madebo T. et Tadié GT (1993) ont constaté que 83% des femmes n’utilisaient pas
de contraception avant la grossesse qu’elles ont interrompue, seulement 11% en utilisaient une,
mais sans respecter les normes d’usage et 6% ne s’expliquent pas les raisons de cet échec. Les
contraceptions post-abortum peuvent contribuer à la réduction du recours à l’avortement, mais dans
bon nombre de pays africains la qualité et l’existence du counselling post-abortum constitue un
problème (Wilfried MENDAME. 2005).
Au Cameroun, le recours à l’avortement se conçoit également comme une volonté
réfléchie de planifier les naissances surtout chez les femmes ayant déjà une descendance
raisonnable, nombreuse ou souhaitée. L’acte abortif survient parfois dans le cas de grossesses
trop rapprochées. Ces femmes qui connaissent des grossesses trop rapprochées et qui décident
de se faire avorter ont parfois eu peur leur entourage social. Elles ont peur de se faire
stéréotyper et d’être qualifiées de ‘‘pondeuses’’ (Ngwé et al. 2005).
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2. 1.1.2. Approche socioculturelle
Les rapports sexuels sont partout un des aspects du comportement social le plus entouré
d’interdits culturels, du moins en Afrique. Du point de vue de la moralité religieuse, les rapports
sexuels ne devraient avoir lieu que dans le cadre d’une union socialement reconnue et devraient
exclusivement être réservés pour la procréation.
Dans les faits, la morale est de plus en plus remise en question, comme l’atteste le
pourcentage non négligeable de naissances hors mariage dans certains pays, notamment chez les
adolescentes (Renne, 1997).
La grossesse de la jeune fille reste cependant perche, à tord ou à raison comme une fatalité
dans les sociétés africaines parce que non désirée. Elle conduit le plus souvent à des avortements
pratiqués dans la clandestinité. La crainte de la réaction des parents ou de la famille face à une
grossesse considérée comme inacceptable et les problèmes de couples (mésententes, grossesses pré
maritales, refus de paternité, partenaires occasionnelles,) expliquent certaines interruptions de
grossesses (Kasolo, 2000; Guillaume 2004). Ces motifs sont d’une importance variable selon l’âge des
femmes et leur situation matrimoniale.
La décision d’avorter est pour les jeunes femmes largement dépendantes de la réaction du
partenaire et de sa capacité à accepter la paternité. (Barrère, 2001).
Les études menées en Cote d’Ivoire, mettent l’accent sur le poids des raisons familiales dans
les décisions de pratiquer l’avortement : unions instables, refus de reconnaître l’enfant par le père,
demande du partenaire, problèmes de couples, crainte d’un scandale ou de réaction des parents
(Guillaume 1999).
A Bamako au Mali, dans trois centres de santé, les raisons principales du recours à
l’avortement mentionnées par les femmes sont : le célibat (38 à 64% des réponses), la pression
familiale (31 à 45%) et la rupture avec leur partenaire (1,7 à 14,6%) (Konaté et al.1999).
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La crainte des parents a aussi été mentionnée comme motif d’avortement, particulièrement
par les jeunes femmes : 16,4% des femmes de moins de 20ans ont avorté pour cette raison au Gabon
(Barrère, 2001), 22% au Bénin 7,1% au Togo 17% en 1996 au Nigeria et 26% en Ouganda (ALIHOU, et
al, 1996 ; Renne, 1997 ; Bazira, 1992). Au Sénégal ,21% des femmes ont mentionné la crainte des
parents et 20% la peur des critiques de l’entourage (Diadhiou et al, 1995).
La pratique de l’avortement est aussi fréquente chez les jeunes femmes scolarisées, et même en
progression chez celles qui sont scolarisées au secondaire et qui veulent terminer leur scolarité
(Renne, 1997). Ainsi, en Afrique subsaharienne, (Zabin et Kirogu (1998), déclarent que, dans
beaucoup de pays, la majorité des femmes qui avortent sont des adolescents. Car, celles-ci veulent
continuer leurs études ou leur travail et attendre pour avoir un enfant, de pouvoir l’assumer
économiquement.
La poursuite des études est l’un des principaux motifs d’avortement cité par les femmes ; en Cote
d’Ivoire, cette raison est mentionnée par près de 55% des femmes de différentes régions du pays
dont 19% d’entre elles vivent à Abidjan. La majorité est scolarisée dans le deuxième cycle (Barrère,
2004).
Approche économique
La pauvreté ou l’état de pauvreté témoigne d’un dénuement profond de l’individu de biens matériels
ou immatériels s’opposant à son développement normal et compromettant en lui l’intégrité de la
personne humaine. Des difficultés liées à la pauvreté peuvent conduire certaines femmes à
pratiquer l’avortement en recourant à certains types de méthodes. En ce qui concerne le Gabon,
malgré un PIB/habitant des plus élevé d’Afrique subsaharienne de 5439 US$ en 2004 (PNUD-GABON,
2004 p. 3), la pauvreté devient le fardeau, le lot quotidien d’une proportion importante de la
population. Car, « sur la base d'un seuil de pauvreté absolue (c'est-à-dire basé sur le coût des
consommations alimentaires et non alimentaires essentielles) de 30 174 FCFA par tête et par mois, 27
% de la population est pauvre alors que 11 % des individus sont extrêmement pauvres » (République
gabonaise : Service de la statistique 2008). Au Gabon, un tiers des femmes dit être confrontée à des
difficultés économiques ou vouloir poursuivre une activité professionnelle (Barrère, 2001). A Douala
et Yaoundé, le deuxième motif cité par les femmes pour justifier l’avortement est le manque de
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moyens financiers (39,6%) (Ngwé et al, 2005). Sur le plan économique, les enquêtés affirment que la
tendance est de recourir aux méthodes les moins onéreuses, bien qu’elles présentent de nombreux
risques. Ainsi les méthodes abortives sont fonction du niveau de vie de la personne qui se fait avorter
ou de celle qui décide de prendre en charge les frais associés à la décision d’interrompre la grossesse
Le cadre juridique du recours à l’avortement
De nos jours, l’avortement n’est totalement interdit que dans 15 pays (sur 190). Dans les
autres pays, la situation varie d’une limitation très stricte à une politique très libérale : dans 55 pays,
l’avortement est possible sur demande ou pour des raisons économiques et sociales (United Nations,
1994). Certains Etats ou institutions (le Vatican, quelques pays d'Amérique Latine ou des pays
islamistes) ont émis des réserves sur cette question de l'avortement. Ces réserves renvoient d'une
part à des considérations éthiques ou religieuses autour de la notion de vie du fœtus mais aussi pour
confirmer que l'avortement ne doit pas être utilisé comme «méthode de planification familiale ».
Cependant, l’infraction d’avortement est tombée en désuétude, ce qui crée un
déphasage entre la loi (article 337 du code Pénal) et la réalité (pratique judiciaire et
réprobation sociale de la condamnation pour avortement (Venant TCHOKOMAKOUA
2000).
Il faut noter que dans son article 339, le code pénal prévoit deux cas dans lesquels les
pénalités prévues par l’article 337 réprimant l’avortement ne peuvent pas être prononcées :
Ø lorsque l’avortement est justifié par la nécessité de sauver la mère d’un péril grave
pour sa santé ;
Ø lorsque la grossesse résulte du viol.
Toutefois, certaines modalités doivent être observées à savoir : l’avortement doit être
réalisé dans les premiers mois de la grossesse, notamment en cas de viol ; l’avortement doit
être pratiqué par un praticien dans un centre hospitalier public ou dans une formation sanitaire
privée autorisée ; l’avortement doit être effectué après une autorisation du Ministère public
qui délivre une attestation sur la matérialité des faits.
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Les variables socioculturelles
Le type de méthodes moderne d’avortement est déterminé par des normes et valeurs
propres à chaque société ; ces valeurs et normes influencent l’individu dans ses décisions et choix.
Ces variables sont principalement :
Ø La religion.
Ø L’ethnie.
Ø Le milieu de résidence.
La région de résidence
Méthodes modernes
Les méthodes de type moderne renvoient à l’ensemble des méthodes utilisées dans les centres de
santé. Il s’agit principalement : du curetage, les comprimés oraux ou l’aspiration, les injections, la
sonde, ovules et la dilatation du col (NGWE al, 2005). Dans notre travail, nous entendons par type de
méthodes modernes l’ensemble des méthodes qui font intervenir la technologie médicale à moindre
risque et qui se pratiquent dans les centres de santé. Elles comprennent : le curetage, l’aspiration, la
sonde, les ovules et la dilatation
Méthodes traditionnelles
Les méthodes d’avortement traditionnelles se définissent comme un ensemble de méthodes
utilisées hors des formations sanitaires. Elles se résument essentiellement à la prise orale de
breuvages ou de potions à base de plantes vendues sur les marchés ou à une visite chez le guérisseur
ou chez une femme qui pratique les avortements. Ces produits peuvent être : soit une infusion de
feuilles, de tabac, de racine d’arbre, soit des purges ou lavements, soit des bains de vapeur ou
l’absorption de boissons chaudes. (Guillaume. A, 2002). Pour (NGWE al, 2005), Les méthodes
clandestines et traditionnelles regroupent un ensemble de méthodes informelles qui sont utilisées
dans des conditions présentant de graves risques de complication sanitaires. Elles sont assez
nombreuses : « le miel, le sel, les drogues reconnues abortives (whisky, tabac), l’utilisation de
15
produits pharmaceutiques obtenus de façon illicite ou auprès des pharmacies du trottoir (nivaquine,
quinine, comprimé de permanganate intra-vaginaux, aspirine, injections diverses pouvant provoquer
l’avortement), utilisation de sondes intra-utérines, le citron+ eau chaude+ le piment, le bicarbonate,
le bleu à linge +l’escargot, l’application des coups de poing sur le bas ventre par un tiers (copine,
copain, camarade), l’utilisation des tessons de bouteilles broyées et mélangés avec des écorces
écrasées, l’utilisation des raticides ou de purgatifs ( sulfate de soude), eau savonneuse + bleu à linge,
l’utilisation de la souris pourrie ». Pour le Ministère de la Santé de la République gabonaise, les
méthodes traditionnelles comprennent diverses thérapies, les unes aussi complexes et dangereuses
que les autres. Il s’agit des thérapies suivantes : « purge à base de tabac, d’eau salée, de feuilles de
marguerite, de sel gemme ; absorption de potions à base d’écorces diverses, absorption de mélange
de jaune d’œuf et d’eau de haricot, de mélange de miel et de jus de citron, etc. ». (Situation Sanitaire
au Gabon : à Libreville et à Owendo, Ministère de la Santé Publique, 2004).
Population cible
L’ensemble des femmes âgées de 15 à 49 ans enquêtées lors des EDSC ET EDSG qui ont reconnu
avoir été enceinte durant la période déterminée et avoir avorté soit 420 femmes au Gabon et 646 au
Congo constituent notre échantillon. C'est-à-dire que toutes les femmes de l’échantillon de départ
qui n’ont pas reconnu avoir avorté ne sont pas prises en compte, soit 623 femmes et 910
respectivement pour le Gabon et le Congo. Toutefois, il convient de signaler que l’exclusion des
femmes n’ayant pas reconnu avoir avorté pour une raison ou pour une autre pourrait conduire à une
sous-estimation du phénomène étudié.
Au Gabon
Graphique 1.1 : Répartition des femmes ayant eu un avortement provoqué par milieu de résidence selon l’utilisation des méthodes d’avortement .
16
Exploitation des données de l’EDSG 2000 par l’auteur
Exploitation des données de l’Eds 2000 par l’auteur
Graphique .3 : Répartition des femmes ayant eu un avortement provoqué par ethnie selon l’utilisation des méthodes d’avortement.
17
Source : exploitation des données de l’EDS 2000
Tableau .1 : Effectif des femmes qui utilisent les types de méthodes d’avortement selon les Variables socioculturelles.
Types de méthodes d’avortement
Modalités traditionnelles Modernes
effectif pourcentage effectif pourcentage
Urbain 146 44,5% 182 55,5%
Rural 60 65,2% 32 34,8%
Khi-deux 0,000***
V de cramer 0,171***
Source : Exploitation des données de l’EDSG 2000
18
Graphique 4 : Répartition des types de recours par niveau de vie des ménages selon l’utilisation des méthodes d’avortement.
Graphique .5: Répartition en pourcentage des méthodes d’avortement par niveau d’instruction selon l’utilisation des méthodes d’avortement.
Source :Exploitation des données de l’EDS 2000
19
Graphique 6 : Répartition en pourcentage des méthodes d’avortement par occupation des femmes selon l’utilisation des méthodes d’avortement
.source : Exploitations des données de l’Eds 2000 Graphique 7 : Répartition en pourcentage des femmes par méthodes de contraception selon l’utilisation des méthodes d’avortement.
20
Source :Exploitation de l’Eds 2000 Graphique 8: Répartition en pourcentage des femmes par nombre d’enfants nés vivants selon l’utilisation des méthodes d’avortement.
21
Source :Exploitation des données del’EDS 2000 Figure .1: Catégorisation des femmes selon le type de recours
22
Source :Exploitation des données de l’eds 2000 Au Congo 3. NOMBRE D’AVORTEMENTS SUR LA DURÉE DE VIE
Ce paragraphe présente la répartition de l’ensemble des femmes par nombre d’avortements
qu’elles ont eus au cours de leur vie, selon certaines caractéristiques sociodémographiques.
Près de neuf femmes sur dix (89 %) ont déclaré n’avoir jamais eu recours à l’avortement au
cours de leur vie. Cette proportion est néanmoins sujette à caution du fait du caractère illégal
de l’avortement et de la réprobation sociale qui entoure cet acte, certaines femmes n’ayant
probablement pas osé déclarer avoir eu recours à cette pratique. Le pourcentage des femmes
ayant déclaré avoir eu recours à l’avortement, au moins une fois dans leur vie (11 %), est
donc à considérer avec une certaine réserve car il est probablement sous-estimé. Parmi les 11
% de femmes ayant déclaré avoir avorté, un peu plus de la moitié (6 %) ont déclaré ne l’avoir
pratiqué qu’une seule fois. Par contre, 1 % des femmes ont déclaré avoir eu recours à
l’avortement 4 fois ou plus au cours de leur vie. Comme on pouvait s’y attendre, la proportion
de femmes ayant eu recours à l’avortement au cours de leur vie croît régulièrement avec l’âge
23
: si à 15-19 ans, seulement une femme sur cent (1 %) a déjà pratiqué l’avortement, cette
proportion atteint 22 % dans la tranche d’âges 45-49 ans. De même, la proportion de femmes
ayant eu recours à l’avortement augmente avec le nombre d’enfants vivants ; en effet, le
nombre d’enfants vivants augmente avec l’âge de la femme qui est donc exposé plus
longtemps au risque d’avorter, et plus une femme a d’enfants vivants, plus elle est susceptible
de pratiquer l’avortement. La pratique de l’avortement varie de manière sensible selon le
milieu de résidence. Les résultats indiquent que la fréquence de l’avortement est plus élevée
en milieu urbain (13 %) qu’en milieu rural (8 %), cependant on constate également de fortes
variations entre régions. Les femmes de Pointe-Noire pratiquent beaucoup plus l’avortement
que celles de Brazzaville (18 % contre 12 %) et celles du Sud beaucoup plus que celles du
Nord (10 % contre 5 %).Enfin, on constate que le niveau d’instruction et le niveau de bien-
être économique du ménage influent sur la pratique l’avortement. Les femmes les plus
instruites et celles des ménages les plus riches ont plus fréquemment déclaré avoir avorté. En
effet, 7 % des femmes sans instruction ont déclaré avoir avorté, contre 19 % de celles ayant
un niveau secondaire 2nd cycle ou plus. De même, 6 % des femmes appartenant aux ménages
les plus pauvres contre 15 % de celles vivant dans les ménages les plus riches ont eu recours à
l’avortement. Ces différences doivent néanmoins être interprétées avec prudence car elles
pourraient représenter beaucoup plus des différences d’attitudes face à l’avortement que des
différences réelles de pratique, certaines femmes déclarant plus facilement que d’autres avoir
avorté.
4. STADE DE LA GROSSESSE AU MOMENT DE L’AVORTEMENT
Des questions plus détaillées sur l’avortement ont été posées sur le dernier avortement ayant
eu lieu depuis l’année 2000. Cette démarche répond au double souci de disposer
d’informations sur l’ Avortement .Près d’une femme sur dix (9 %) a déclaré avoir avorté, au
moins, une fois au cours des cinq dernières années (tableau 6.2) Cette fréquence de
l’avortement au cours de la période récente est particulièrement élevée chez les femmes de
20-29 ans (14 %) et chez celles de 30-34 ans (11 %). En examinant le pourcentage de femmes
ayant avorté depuis 2000 selon les autres caractéristiques sociodémographiques, on retrouve
les tendances observées précédemment et l’influence des mêmes variables telles que le milieu
de résidence, le niveau d’instruction et le niveau de bien-être économique du ménage. En
effet, on constate que la proportion de femmes ayant avorté est plus élevée en milieu urbain
qu’en milieu rural (11 % contre 7 %), à Pointe-Noire qu’à Brazzaville (17 % contre 9 %), au
24
Sud du pays qu’au Nord (8 % contre 5 %) et qu’elle a tendance à augmenter au fur et à
mesure que s’élève le niveau d’instruction ou le niveau de bien-être économique du ménage.
5. DÉCISION DE L’AVORTEMENT
Aux femmes qui ont déclaré avoir eu recours, au moins une fois, à un avortement au cours des
Cinq dernières années, on a demandé de préciser qui avait pris la décision d’avorter. Dans
Plus des trois quarts des cas (77 %) la décision d’avorter a été prise par l’enquêtée elle-même.
Cependant dans 12 % des cas, c’est le mari/partenaire qui a décidé de l’avortement et, dans 7
% des cas, c’est un parent ou ami. C’est seulement dans 4 % des cas qu’un professionnel de la
santé a recommandé l’interruption de la grossesse. Le type de personne ayant pris la décision
de l’avortement varie avec l’âge de la femme. En effet, on constate que chez les femmes les
plus jeunes, dans 16 % des cas, la décision d’avorter a été prise par quelqu’un autre que
l’enquêtée, que le mari ou qu’un professionnel de la santé. En outre, c’est dans ce groupe
d’âges que la proportion de femmes ayant décidé elles-mêmes est la plus faible (64 %). Entre
15 et 34 ans, plus l’âge des enquêtées augmente, plus ces dernières ont tendance à prendre
elles-mêmes la décision d’avorter. Chez les femmes plus âgées (35-39 ans), on constate que le
mari/partenaire et le professionnel de la santé ont décidé de l’avortement dans des proportions
relativement importantes (respectivement 18 % et 10 %), cela peut-être pour des raisons de
santé. Parmi les femmes de niveau primaire, tout comme parmi celles des ménages les plus
pauvres, dans un cas sur cinq la décision d’avorter a été prise par le mari. Mis à part ce
constat, les résultats ne permettent pas de conclure à une influence du niveau d’instruction ou
du bien-être économique sur la décision d’avorter. Par contre, il ressort que les femmes du
milieu urbain sont proportionnellement plus nombreuses à avoir pris elles-mêmes la décision
d’avorter (80 %) que celles du milieu rural (71 %). De même, on note que c’est à Pointe-
Noire que la proportion de femmes ayant pris elles-mêmes la décision d’avorter est la plus
élevée (86 %) et, à l’opposé, c’est dans le Nord qu’elle est la plus faible (64 %).
6. CAUSES DE L’AVORTEMENT Les femmes ont été aussi interrogées sur la raison principale pour laquelle elles ont avorté la dernière
fois : On note que le « nombre trop élevé d’enfants ou les naissances trop rapprochées » explique la
décision d’avorter dans 23 % des cas ; en outre, 13 % des femmes ont déclaré avoir avorté parce que le
25
mari ne voulait plus d’enfants. Par ailleurs, 17 % des femmes ont avorté à cause de « difficultés
économiques ou de manque d’argent » et 10 % pour pouvoir continuer de travailler ou pour poursuivre
la scolarité. Enfin, il faut noter la proportion relativement élevée de femmes ayant cité d’autres raisons
(19 %). L’examen de la raison principale d’avorter selon les caractéristiques sociodémographiques des
femmes dégage des tendances qui ne surprennent pas. C’est ainsi que près d’un quart des jeunes
femmes de 15-19 ans ont plus fréquemment interrompu leur grossesse parce qu’elles estimaient
qu’elles étaient trop jeunes pour avoir un enfant (23 %) ou parce que, dans 17 % des cas, elles
souhaitaient poursuivre leur scolarité, ou encore par peur des parents (17 %). La raison concernant le
nombre élevé d’enfants et les problèmes de santé ont été particulièrement évoqués par les
femmes de 35-39 ans (12 %) et celles ayant cinq enfants ou plus (11 %). Enfin, la poursuite
de la scolarité ou de l’activité professionnelle a été évoquée plus fréquemment par les femmes
du milieu urbain (12 %), celles de niveau secondaire 2nd cycle ou plus (23 %) et celles des
quintiles de bien-être les plus riches (13 % et plus) que par les autres catégories de femmes.
Les femmes ayant décidé elles-mêmes d’avorter ont, généralement, justifié leur acte par le «
nombre trop élevé d’enfants ou les naissances trop rapprochées. En milieu rural, les raisons
justifiant l’avortement les plus fréquemment citées sont le « nombre trop élevé d’enfants » (28
%), et les « difficultés économiques ou le manque d’argent » (15 %). En milieu urbain, où ces
trois dernières raisons ont été citées moins fréquemment (respectivement 21 %, 10 % et 17
%), « le désir de poursuivre la scolarité ou de continuer à travailler » a été avancé par 12 %
des femmes.
7. CONSEQUENCE DE L’AVORTEMENT Moins d’une femme sur cinq (18 %) a déclaré avoir eu des complications après l’avortement.
Ces complications semblent plus fréquentes parmi les femmes ayant pratiqué l’avortement par
Injections (28 %) ou au moyen de comprimés (21 %) que parmi celles ayant utilisé
l’aspiration (16 %) ou la dilatation et curetage (14 %). En d’autres termes, en se référant aux
relations établies plus haut entre le lieu de l’avortement, la procédure de l’avortement et
l’assistance à l’avortement, on peut dire que ce sont les femmes ayant avorté à domicile et
celles ayant avorté sans assistance d’un professionnel de la santé (médecin ou autre personnel
de santé) qui semblent plus exposées aux complications après l’avortement. L’infécondité et
la stérilité secondaire n’appariaient qu’après une naissance vivante ou lorsque les grossesses
n’arrivent pas à terme, soit à cause des avortements, soit à cause des méthodes contraceptives
traditionnelles souvent utilisée, dont les effets stérilisants et abortifs sont à l’ origine de
l'infécondité. La recrudescence de ces pratiques néfastes, justifie l’urgence de cette étude dans
26
ces pays pro-nataliste où les femmes qui restent volontairement sans enfant sont relativement
rares. conséquences sont très fâcheuses d’où dans le pire des cas on assiste à des avortements
clandestins aux dangers incalculables (infection, stérilité, mort….).l'interruption volontaire de
grossesse (I.V.G.) apparaît comme un des principaux facteurs de la stérilité secondaire au
Gabon et Congo.
Conclusion Générale
Cette étude avait pour objet d’identifier les causes et les conséquences d’avortement
provoqué au Gabon et au Congo. Partant d’un contexte peu favorable au changement
démographique accompagné d’une logique de faible fécondité, qui justifie d’ailleurs la pertinence de
cette étude, un accent particulier a été mis sur les études antérieures portant sur les facteurs
explicatifs de l’avortement.
Les leçons tirées de la revue de la littérature sur l’avortement pratiqué dans le contexte de
l’Afrique Subsaharienne en général et au Congo et au Gabon en particulier, nous ont permis de
formuler l’hypothèse générale selon laquelle le recours aux d’avortement dans ces pays est fonction
des facteurs socio-économiques et socioculturels d’une part, et des facteurs sociodémographiques
d’autre part. L’influence de ces divers facteurs sur l’avortement passe directement ou indirectement
par d’autres facteurs appelés facteurs intermédiaires qui sont étroitement liés avec le recours aux
méthodes d’avortement .Au niveau de l’approche méthodologique, nous avons eu recours, dans un
premier temps, à l’analyse descriptive à travers l’analyse bi variée et l’analyse factorielle des
correspondances multiples AFCM). Cette méthode d’analyse nous a permis de catégoriser les
femmes utilisatrices des méthodes d’avortement.
Les causes identifiées figurent en bonne place, le manque de moyen, l’âge de la fille .Tout
ceci amène à des conséquences néfastes sur la vie féconde future voir à la mort.
27
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