Post on 22-Jan-2018
The Shift Project
Sandrine Maljean-DuboisDirectrice de recherche au CNRS, Directrice du Centre d’Etudes et de Recherches Internationales et Communautaires
Qu’attendre du Pacte mondial pour l’environnement et du droit international ?
Sandrine Maljean-DuboisDirectrice de recherche au CNRS
Directrice de DICE (Droits international, comparé et européen)
CNRS et Aix-Marseille Université
Qu’attendre du Pacte mondial pour
l’environnement et du droit international ?
Ateliers du Shift, 3 octobre 2017
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Le dépassement des frontières planétaires9 seuils biogéophysiques à ne pas dépasser pour maintenir la biosphère dans un
« espace de fonctionnement sécurisé »
Point de basculement franchi pour au moins 4 d'entre eux
(biodiversité, cycles biogéochimiques de l’azote et du phosphore, déforestation,
changements climatiques)
La grande accélération de l’anthropocèneEpoque qui débute avec la Révolution industrielle (1784: brevet de la machine à
vapeur) et qui est marquée par l’impact significatif de l’homme sur l’écosystème
terrestre (force géologique)
Epoque qui connaît une « grande accélération » à compter de 1945
Pas une crise : un point de non retour
Un bilan négatif des politiques environnementalesSur 90 objectifs de politiques environnementales listés par GEO5 (PNUE), seuls
quatre ont enregistré « des progrès significatifs » : la disparition des molécules portant
atteinte à la couche d'ozone, l'élimination du plomb dans les carburants, l'amélioration
de l'accès des populations à une eau potable et la promotion de la recherche en matière
de lutte contre la pollution marine.
Un constat, celui de la détérioration constante de notre environnement
malgré les développements du droit de l’environnement.
Un projet de Pacte dans la filiation de plusieurs projets antérieurs
[Summary of Proposed Legal Principles for Environmental Protection and Sustainable
Development (WCED Experts Group on Environmental Law, 1986)] => Déclaration de Rio
(1992)
Projet de déclaration de principes sur les droits de l’homme et l’environnement (Rapport
Ksentini, Com. DH, ONU, 1994)
Draft International Covenant on Environment and Development (UICN, 1995, 4e éd. 2010)
= projet de traité « prêt à adopter » mais très long [79 articles]
Projet « Prieur » de Pacte international relatif au droit des êtres humains à l’environnement
(CIDCE, 2012, 2017) = plus court et centré sur les droits de l’homme
Projet « Lepage » de Déclaration des droits de l’humanité (CIDCE, équipe française,
2015)
Principes d’Oslo sur les obligations concernant le changement climatique (groupe
d’experts, 2015)
World Declaration on the Environmental Rule of Law (UICN, WCEL, 2016)
Projet de Déclaration de principes éthiques en rapport avec le changement climatique
(UNESCO, en cours de négociation)
Un pari, celui de l’utilité d’un traité mondial sur l’environnement.
Une proposition du Club des juristes en 2015
Rapport 2015 Renforcer l’efficacité du droit de l’environnement.
Devoirs des États, droits des individus
Plutôt comme un troisième Pacte sur les droits de l’homme
« Grâce au droit, grâce à ce Pacte mondial pour
l’environnement, il s’agit d’aller plus loin dans la
transformation de nos sociétés et d’agir résolument »
(E. Macron, New York, 19 septembre 2017)
1. Pourquoi un Pacte mondial sur l’environnement?
2. Comment ?
3. Quoi ?
4. Pour quelle effectivité?
Plan de l’intervention
Pourquoi le Pacte mondial ?1. Porter une nouvelle utopie (re)mobilisatrice
Pourquoi le Pacte y
parviendrait là où les autres
initiatives ont échoué ?
A-t-on besoin d’un traité à
cette fin ?
• Momentum : après l’adoption
des ODD et de l’Accord de Paris
• Un texte court et lisible
• Faisant fond sur des principes
pour la plupart consensuels
Traité comme acte fort
Pourquoi le Pacte mondial ?2. Activer/réactiver une éthique environnementale
N’est-ce pas le rôle de l’UNESCO ?
Ce n’est pas le seul objectif C’est le rôle de l’ONU car
s’inscrit dans la filiation de
grands textes (Déclaration 1948,
Pactes, Charte de la Nature,
Déclaration de Rio…).
Pourquoi le Pacte mondial ?3. Conventionnaliser les principes de Rio
• inutile car ils ont déjà essaimé dans
les constitutions et lois nationales
• « treaty fatigue » / minilatéralisme
• risque crispation des Etats sur forme
traité
cout financier de la
négociation et de
l’administration d’un
nouveau traité dans un
contexte très tendu
• Essaimage pas universel
• Pas un énième traité sectoriel mais une
convention qui formerait l’ossature du DIE
• Permettra de renforcer le contrôle
international et national
• Privilégiera les formules à texture
ouverte
question de volonté/priorité
Pourquoi le Pacte mondial ?4. Renforcer et approfondir les principes de Rio
(contenu, portée)
Choix difficile
Risque d’affaiblir les principes
non retenus
Risque de figer des principes
qui ont évolué (même en deça
du chemin parcouru)
On gardera l’essentiel de Rio
(tout en priorisant)
On privilégiera des formules à
texture ouverte
Pourquoi le Pacte mondial ?5. Promouvoir de nouveaux principes
Risque d’affaiblir l’ensemble
(oppositions, non ratification, non entrée en vigueur)
Équilibre entre nécessaire prudence et promotion de la valeur
ajoutée du Pacte
Pourquoi le Pacte mondial ?6. Améliorer la cohérence du droit international de
l’environnement et de la gouvernance internationale de
l’environnement
Avec un nouveau traité qui
participe à la prolifération
normative?
Avec de nouvelles institutions
qui participent à la prolifération
institutionnelle?
Défragmentation possible par
•production de méta-normes
• promotion du soutien mutuel
(OMC?)
• promotion du transfert de techno
• mise en cohérence des
financements
Pas OME ni cour de
l’environnement mais
défragmentation possible en
promouvant les liens
• Entre COP
• Entre secrétariats
• Entre mécanismes financiers
• Entre mécanismes de contrôle
etc.
Comment ?
Travail au sein de la Commission environnement du Club
des juristes présidée par Yann Aguila
Consultation écrite de 150 experts internationaux à cinq
reprises1. présentation générale et questions ouvertes
2. architecture et rédaction
3. mécanismes de suivi
4. formulation et contenu des principes
5. livre blanc
Finalisation d’un pré projet mi juin
Réunion d’une trentaine d’experts à Paris le 23 juin au
Conseil constitutionnel pour « négocier » le pré projet
Présentation du projet le 24 juin à La Sorbonne
Comment ?
Promotion durant l’été (Chine, Inde…)
Présentation à l’ONU 19 septembre lors d’un « sommet » -
soutien de nombreux pays
Soutien des ONGs (WWF, UICN…) et de beaucoup de pays
Conférences à Columbia Univ. le 20 – à venir à Rio,
Santiago…
Objectif de convaincre de l’opportunité et lancer
concrètement un processus officiel de négociation
internationale sous l’égide de l’ONU en vue de l’adoption
d’un Pacte qui ne sera pas ce Pacte
Quoi ?Un texte court, préambule et 26 articles
Dont 20 substantiels
Codification de principes anciensEx. En cas de risque de dommages graves ou irréversibles, l'absence de
certitude scientifique ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard
l'adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir la
dégradation de l'environnement. (art. 6)
Développement progressif
Formulation plus claire et précise de certains principesEx. Toute personne a le droit de vivre dans un environnement écologiquement
sain et propice à sa santé, à son bien-être, à sa dignité, à sa culture et à son
épanouissement. (art. 1)
Principes neufsEx. Les Parties et les entités infranationales des Etats Parties s’abstiennent
d’autoriser des activités ou d’adopter des normes ayant pour effet de diminuer le
niveau global de protection de l’environnement garanti par le droit en vigueur.
(art. 17)
Elargissement aux acteurs non étatiques
Pour quelle effectivité?Son impact potentiel à l’échelle internationale
Potentiellement
Une restructuration du droit international de
l’environnement dont ces principes deviendraient
l’ossature
Une fonction d’orientation
Une fonction juridictionnelle
Des incertitudes/ Qui va le faire « vivre » et évoluer à
l’échelle internationale?
Coopération n’est pas institutionnalisée (pas de COP)
Pas une convention-cadre
Prévoit simplement un comité de suivi fonctionnant sur
la base de rapports nationaux
Pour quelle effectivité?Son impact potentiel à l’échelle nationale
Potentiellement
Une restructuration des droits nationaux de
l’environnement dont ces principes deviendraient
l’ossature (reprise législations, constitutions…)
Une fonction d’orientation
Une fonction juridictionnelle (« arme » du droit, procès
climatiques…)
Des incertitudes
Dépend de la ratification par l’État concerné
Force normative comme « force de la norme perçue,
ressentie, vécue et conférée par ses destinataires » (C.
Thibierge) comme une inconnue, dépendant de
nombreux facteurs.
Conclusion
Un pari audacieux
Pour qu’il soit réussi et utile (et non contre-productif), le
processus et le projet doivent être aussi subtilement pensés
que la COP 21 et l’Accord de Paris !
Merci pour votre attention
maljean.dubois@gmail.com