Post on 12-Sep-2018
UNIVERSITE DE PARIS 1 – PANTHEON SORBONNE
INSTITUT DE RECHERCHE ET D’ETUDES SUPERIEURES DU TOURISME
Mémoire professionnel présenté pour l’obtention du
Diplôme de Paris 1 – Panthéon Sorbonne
MASTER PROFESSIONNEL « TOURISME » (2ème année)
Spécialité Développement et Aménagement Touristique des
Territoires
Par M. Fabien HENNION
Sous la direction de M. Noël Le Scouarnec
Année universitaire 2008-2009
Prise en compte du changement climatique
par le système touristique québécois.
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Remerciements
Ce travail n’aurait pas pu être réalisé sans la participation de plusieurs personnes qui ont
contribué, de près ou de loin, à l’élaboration de ce mémoire. Il me paraît indispensable
de remercier toutes ces personnes.
Tout d’abord M. Noël Le Scouarnec, Maître de Conférence associé à l’IREST - Chef du
bureau de la Prospective et de l’Evaluation Economique, Direction Générale de la
Compétitivité, de l’Industrie et des Services, pour son encadrement universitaire et
professionnel et ses apports nombreux sur les thématiques relatives à ce travail.
Ensuite,
- Mme Paule Buissière, Coordinatrice à la gestion et exploitation des Parcs au
sein de la SEPAQ ;
- Mme Marie-José Guérin, Directrice de la Maison du tourisme de Tadoussac ;
- M. Alexis Boyer-Lafontaine, Directeur des affaires publiques de l’ASSQ ;
- M. Thomas Antil, à la Direction de la recherche et de la prospective du
Ministère du Tourisme Québécois ;
- M. Dany Gareau, Gestionnaire à la communication et la mise en valeur du parc
marin du Saguenay-Saint Laurent ;
- M. Guy Bélanger, responsable de l’enneigement de la station du Mont Sainte
Anne
Toutes ces personnes qui ont accepté de me rencontrer au Québec ont permit de faire
avancer la réflexion autour de ce -système touristique québécois-.
M. Ludovic Martin, ex-stagiaire à la direction de la prospective et de la recherche de la
Direction du Tourisme, pour m’avoir apporté beaucoup sur le sujet du changement
climatique et la complexité de sa prise en compte.
Enfin, Mme Gravari-Barbas, professeur de géographie et directrice de l’IREST, et Melle
Amandine Chapuis, monitrice en géographie à l’IREST, pour le suivi méthodologique et
les conseils apportés tout au long de ces deux années.
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Sommaire
Remerciements Sommaire 1. Introduction
2. Problématique
3. Méthodologie globale de l’étude Partie 1 : Changement climatique et tourisme, état des connaissances et regards croisés 1. Le phénomène climatique : entre phénomène scientifique avéré et perception de la société
1.1 Entre –réchauffement- et -changement- climatique : illustration de l’incertitude entourant le thème 1.2 Perception du changement climatique : aléa, enjeu, risque ?
2. Changement climatique et tourisme : des liens étroits 2.1 Le tourisme, vecteur du changement climatique 2.2 Le tourisme, victime du changement climatique 2.3 Une prise de conscience du monde du tourisme
3. L’approche de la question au Québec : l’image d’une province verte ? 3.1 Introduction méthodologique : l’analyse documentaire 3.2 Eléments de synthèse 3.3 Conclusion : un imaginaire français fortement ancré
p2
p3
p5
p8
p11
p12
p14
p14 p15
p17 p17 p20 p23
p26 p26 p27 p30
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Partie 2 : Prise en compte du changement climatique : Monographie du système touristique québécois
1. Cadre méthodologique de la monographie 1.1 Le système touristique québécois 1.2 L’analyse de discours : une méthodologie pour la production d’une information nouvelle
2. Résultats et discussions
2.1 Le système touristique : approches et réalités diversifiées 2.2 Des réponses apportées à un contexte plus large 2.3 Le développement durable : cadre d’actions et volonté affichée
Partie 3 : Vers des pistes de réflexion pour le territoire français
1. Un contexte particulier 1.1 La situation géographique du Québec rend le contexte climatique différent 1.2 Le système des parcs diffère de nos espaces naturels 1.3 Le développement durable inscrit dans les textes
2. Mais des similitudes qui permettent la mise en perspective
2.1 Le cas des stations de ski, une problématique comparable 2.2 L’érosion côtière et autres phénomènes naturels, des enjeux identiques 2.4 Le Ministère du Tourisme québécois et son homologue français, des points communs
3. Facteurs clés de prise en compte
3.1 L’approche de la question, plurithématique et sectorielle 3.2 Le développement durable appliqué concrètement
Conclusions de l’étude Références bibliographiques Liste des figures Glossaire Annexes
p47
p41
p31
p33 p33 p37
p41
p52
p55
p57 p57 p60
p68
p64
p61
p64 p66
p70
p70 p71
p73
p76
p79
p80
p81
« L’Université n’entend donner aucune approbation ou improbation aux opinions émises dans les mémoires et thèses. Ces opinions doivent être considérées comme propres à leurs auteurs »
5
1. Introduction
Un sujet d’actualité, complexe et transversal
Le changement climatique est actuellement au cœur de nombreuses réflexions dans le
domaine du tourisme. L’approche du phénomène apparaît comme complexe et liée à
beaucoup d’incertitude. En sortant du simple champ touristique le changement climatique
est un réel sujet de société, largement diffusé par les médias, et dont le monde
scientifique s’est emparé depuis déjà quelques années. Les travaux sur le sujet sont
nombreux et amènent à un fait établi, pour lequel tout le monde est d’accord : le
réchauffement climatique existe. Mais là s’arrête le consensus, le reste est synonyme
d’hypothèses, de scénarios, d’expérimentations… Et ceci tant pour les tenants que les
aboutissants du phénomène.
Directement liée au tourisme, la question est là encore sujette à controverse et en cours
d’étude. Les doutes et remises en question scientifiques se retrouvent dans l’approche
touristique du changement climatique. La récente conférence de Davos1 a traité,
notamment, de scénarios possibles, de conséquences supposées, toujours en restant
dans une approche très globale et en montrant bien les limites des études au niveau des
territoires, à plus grande échelle.
Un enjeu pour le développement touristique français
Dans ce contexte d’extrême complexité, le sujet apparaît comme un enjeu majeur dans
les politiques actuelles de développement touristique en France. En 2006 la Direction du
Tourisme publie un rapport sur le sujet2, ce travail reprenant le GIEC (Groupe d'Experts
Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat) en référence s’intéresse au cas français
en particulier. Ce rapport est pour l’instant le seul existant sur ce thème, et est la base
de plusieurs travaux actuels, notamment par la DIACT, le MEEDDAT et l’ancienne
Direction du Tourisme. Tous ces travaux prennent le parti d’une nécessaire adaptation du
tourisme face aux risques du changement climatique.
Le contexte international est lui aussi porteur sur ce sujet. L’allocution de M. Francesco
Frangialli du 18 novembre 2008, dans le cadre du cycle des conférences de l’IREST,
l’illustre bien. La question est globale, au cœur des travaux et discussions, et porteuse de
nombreuses interrogations pour l’avenir. Dans cette vision prospective les échanges
1 Climate change and tourism : Responding to global challenges, octobre 2007 2 CERON, J-P. ; DUBOIS, G. Adaptation au changement climatique et développement durable du tourisme. Mai 2006
6
internationaux sont nombreux, fréquents, et tendent vers une connaissance toujours plus
poussée du sujet. Néanmoins ici encore on se trouve dans le champ des hypothèses et
des partis pris, à une échelle globale et pluri-thématique.
L’intérêt de l’étude d’un exemple, par une approche ciblée
Ce travail s’inscrit ici dans l’étude d’un exemple : le territoire du Québec, afin d’en tirer
une analyse amenant à des pistes de réflexions pour la question française. L’étude de cet
exemple apparaît positive car permettant un « pont » entre le monde nord-américain, et
son approche de ces questions, et la France. Les modèles sociaux-économiques
européens et nord-américains divergent sur de nombreux points. Il ne s’agit pas ici du
cœur de l’étude mais cela explique certaines choses qui nous intéressent. Nous
retrouvons ces différences dans les approches en termes d’ingénierie territoriale. Le
monde nord-américain semble laisser une plus grande place à l’initiative privé, là où
l’Europe se base sur un modèle plus institutionnel. Cette impression apparaît dans les
secteurs du tourisme et de l’environnement qui encadrent ce travail, les approches
divergent et s’inscrivent différemment sur les territoires. L’approche nord-américaine,
même s’il est important de relativiser des approches différentes entre le Canada, les
USA, ou le Québec, semble montrer une certaine avance dans la prise de position face au
changement climatique, et dans les notions environnementales en général. L’histoire de
ce continent, et l’environnement particulier de celui-ci, laisse une grande part encore à la
« nature sauvage » qui fait tant rêver en Europe. Paradoxalement le rôle des politiques
et décideurs peut parfois paraître moins marqué dans ces pays quant aux questions
environnementales, la sphère privée y jouant un rôle prépondérant. Ces modèles
proposent donc une vision différente du traitement de ces questions et posent le Québec
comme à mi-chemin entre ce continent et la Vieille Europe à laquelle il reste attaché,
parfois à l’encontre de sa propre appartenance au Canada. Il nous semble que le Québec
puisse agir comme un pont entre ces modèles. Le choix de ce terrain permettra de
confronter la vision nord-américaine de la question tout en laissant une certaine facilité
de contact et d’étude dans cette province francophone, et aux liens forts avec la France.
L’objectif de ce travail est d’étudier, dans le contexte de complexité et d’incertitude
présenté plus haut, la perception et la prise en compte de l’enjeu par les acteurs du
tourisme. D’une part en comparant les approches entre l’échelon global et l’échelon local,
d’autre part en effectuant aussi cette comparaison entre les différents professionnels, les
élus, les organismes privés… Ceci afin d’observer des comportements et prises en compte
divers, pour enfin étudier la réponse à tout cela de la politique touristique québécoise.
7
Cette approche s’avère riche en enseignement, en effet l’étude de cet exemple précis
qu’est le Québec rend possible l’obtention de résultats. Dans ce contexte d’enjeu
international, de questions mondiales, s’intéresser à un cas particulier en passant d’un
cadre général, et flou, à un enseignement local et précis apporte à la réflexion. De plus,
l’approche envisagée prend comme objet d’étude les questions de perceptions,
d’approches particulières du phénomène. En ce sens il s’agit d’apporter un regard
nouveau sur ce thème déjà largement abordé.
8
2. Problématique
Un décalage constaté entre connaissances globales et réalités locales
Comme présenté précédemment, le changement climatique et le tourisme sont deux
thèmes liés, de plus en plus au cœur des réflexions actuelles. Pourtant on constate un
réel décalage en France entre les différents échelons du tourisme sur la question. La
prise en compte est inégale et complexe au niveau local, de plus la connaissance du
problème est globale et les instances nationales ont un regard limité sur l’implication
locale et concrète du changement3. Il existe donc un besoin de mieux cerner les choses,
de mettre en place des méthodes permettant de lier les différents échelons, et d’apporter
des réponses locales dans un contexte global. Ceci se retrouve dans les préoccupations
actuelles de la Direction du Tourisme, notamment du bureau de la recherche et de la
prospective qui a lancé une réflexion dans ce sens.
Le Québec : l’image d’une province « verte »
Le Canada, est plus particulièrement la province du Québec, apparaît dans l’imaginaire
français comme un pays novateur et en avance sur les questions environnementales. Il
s’agit ici d’un sentiment, souvent partagé et constaté, qu’il conviendra de préciser et de
clarifier lors d’une étude sur l’imaginaire relayé par le Québec auprès des français. Le
choix précis du Québec s’explique par, d’abord le lien fort qu’il existe entre la France et
celui-ci, ensuite par le fait que le Québec est, au sein de la fédération canadienne, garant
de sa politique touristique. Il apparaît donc comme une entité pertinente à étudier.
Ainsi, dans ce contexte actuel de réflexion, lancée par les instances touristiques
françaises, l’étude du cas du tourisme québécois, et plus particulièrement de la prise en
compte de l’enjeu du changement climatique aux différents échelons touristiques du
territoire, s’avère intéressante. Il s’agira ici d’observer cette prise en compte, et les liens
et méthodes qui unissent l’échelon provincial et les territoires à un niveau local, quant à
la perception et les réponses apportées au changement climatique.
3 Entretien avec M. Ludovic MARTIN, chargé de mission « changement climatique » à la Direction du Tourisme. Avril 2008.
9
Ce travail essaiera de répondre à cette problématique :
Chronologiquement il s’agira de se demander :
- Comment les acteurs du tourisme québécois perçoivent le changement climatique et
répondent au défi ? Il s’agira d’analyser les discours et d’observer les méthodes et
stratégies proposées.
- Pourquoi pensent-ils cela et agissent-ils de cette façon ? Ici le contexte québécois sera
mis en avant pour en relever les particularités et les spécificités limitant l’application à
d’autres cadres.
Des hypothèses structurant la réflexion
Hyp. 1 : Le système touristique québécois, plus impliqué sur les questions
environnementales, intègre le changement climatique et apporte des réponses
pertinentes et adaptées.
Cette hypothèse met en avant le fait que l’imaginaire géographique du Québec n’est pas
qu’un imaginaire, qu’il se base sur des faits et des réalités. Partant de ce postulat
l’approche québécoise doit apporter à la réflexion, par l’étude de sa prise en compte du
phénomène : perceptions et réponses apportées. Cette hypothèse devra être démontrée
en mettant en parallèle un travail sur l’imaginaire et des constatations faites par
observation ou discussion avec les principaux intéressés.
Hyp. 2 : Le contexte québécois, bien que particulier, permet de tirer de ces
réponses et méthodes une réflexion pour le cas français sur la question du tourisme
face au changement climatique.
Ici c’est l’analyse du contexte québécois qui permettra de valider, ou non, cette
hypothèse. Il s’agira d’une réflexion sur le pourquoi de la prise en compte de la question.
Les particularités du contexte seront mises en avant, qu’elles soient géographiques,
Est-il possible et pertinent, pour la France, de s’inspirer de l’exemple de prise en compte du changement climatique par le tourisme québécois ?
10
sociétales, structurelles… , afin de permettre la comparaison avec notre cas français.
Nous partons de l’idée que malgré ces particularités il est possible de tirer des
enseignements de cette étude et des applications possibles dans d’autres cadres.
11
3. Méthodologie globale de l’étude
Différentes questions et hypothèses ont guidé le travail, la méthodologie mise en place
aura pour but d’y répondre, et d’élargir la réflexion.
D’abord il a été nécessaire de cerner le sujet « changement climatique » et plus
particulièrement dans l’exemple du territoire étudié. Même si ces questions ne sont pas
l’objet principal du travail elles sont nécessaires pour comprendre et situer réellement
l’avancée des études, des recherches, les faits avérés, les pistes, les débats… A ce titre
une étude des différentes études et recherches a été nécessaire, ajoutée à la rencontre
de spécialistes de la question, dans l’approche touristique ou non, en France comme au
Québec. Cette réflexion était nécessaire pour pouvoir aborder les questions principales du
travail, de manière optimale.
Ensuite, la question de la prise en compte passe par l’analyse de discours des acteurs de
ce « système » touristique québécois. Cette méthodologie étant le cœur de l’étude, une
partie explicative lui est consacrée dans la suite de ce document. Le système d’acteurs
étudié y est présenté ainsi que l’approche par entretiens semi-dirigés qui a été adoptée.
Enfin, résulte de ce travail une analyse de l’exemple québécois afin d’en tirer
d’éventuelles pistes d’application pour le territoire français. La monographie de l’exemple
québécois devrait permettre de faire émerger des méthodes, des outils, des
formalisations dans la politique touristique, tout en présentant le contexte dans lequel
ces pistes s’inscrivent, ceci afin d’en tirer les meilleurs axes de réflexions dans un
contexte différent.
12
Partie 1 Changement climatique et tourisme, état des
connaissances et regards croisés
13
Introduction
Dans un premier temps il est nécessaire de cerner les sujets qui nous animent et d’établir
une présentation du contexte de nos hypothèses. Il s’agit en quelque sorte du cadre de la
réflexion, qui légitime l’étude et entraîne le choix de la méthodologie et du terrain.
D’abord nous tenterons de cerner la problématique du changement climatique, et les
questions qui se posent actuellement. Nous mettrons en avant la grande complexité du
sujet, et plus encore, la difficulté qui entoure sa caractérisation et sa prise en compte.
Ensuite, nous présenterons les liens étroits qui existent entre ce phénomène climatique
et le monde du tourisme. Par une approche synthétique nous mettrons en avant les liens
de causes à effets entre les deux thématiques, nous essayerons aussi de montrer
comment le monde institutionnel du tourisme s’est emparé de la question et a évolué
dans ses réflexions.
Enfin, nous essayerons de montrer en quoi la province du Québec apparaît aux yeux des
français comme « en avance » sur les questions environnementales. Un travail d’analyse
documentaire permettra de présenter cet imaginaire français, et ce que cela semble
impliquer pour le territoire québécois.
14
1. Le phénomène climatique : entre phénomène
scientifique avéré et perception de la société
D’abord il a été nécessaire de cerner le sujet « changement climatique » et plus
particulièrement dans l’exemple du territoire étudié. Pour le cas du Québec, c’est
principalement la lecture des comptes-rendus du groupe Ouranos qui a alimenté la
recherche. Ce consortium de chercheurs, d’industriels, d’institutions publiques, mène des
études sur le cas spécifique du territoire québécois. Enfin le contexte international a
aussi été pris en compte, avec ici une vision plus large du phénomène, notamment par le
biais de rapports de conférences et sommets internationaux. Cette réflexion était
nécessaire pour pouvoir aborder les questions principales du travail, de manière
optimale.
Plusieurs concepts et définitions animent la recherche liée au sujet de ce travail. Il sera
nécessaire d’en expliquer ici les fondements, les différentes visions éventuelles, voir
même les contradictions, afin de finalement prendre position au sujet des notions
énoncées et étudiées dans cette étude.
1.1 Entre –réchauffement- et -changement- climatique :
illustration de l’incertitude entourant le thème
Le concept au cœur de l’étude apporte déjà son lot de complexités et de contradictions.
Les recherches actuelles dans le domaine des sciences dites « dures » mettent en avant
ce concept de réchauffement climatique avéré (global warming). Nous prendrons ici en
référence le GIEC (Groupe d'Experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat) en
tant qu’organisme international, reconnu et approuvé. Son objectif est de faire émerger
un consensus mondial sur la question, et en ce sens répondre aux problèmes posés par
cette complexité dans l’approche. Ainsi le GIEC estime à l’horizon 2100 un réchauffement
global de la planète compris entre 1,1 et 6,3 °C, fourchette pouvant être affinée avec
une incertitude relativement faible entre 1,8 et 4,0 °C4. Au sein même du monde
scientifique ces estimations font débat, les chiffres, les méthodes, les prévisions… sont
contestés. Néanmoins c’est majoritairement un crédit important qui est accordé à ces
études. Loin d’entrer dans des polémiques qui sortent du cadre de notre travail, et du
4 GIEC, 4ème rapport d’évaluation : Climate change 2007. Novembre 2007
15
contexte des sciences sociales et humaines, on s’accordera à parler d’un réchauffement
climatique global, sans plus de détails et de précisions.
Néanmoins, même si dans un contexte global on s’accorde à parler de réchauffement, la
question à un niveau local nécessite une réflexion plus poussée. Les situations
géographiques et les contextes climatiques locaux sont autant de facteurs qu’il faut
prendre en compte. En certains cas on parlera plus facilement de –changement-
climatique que de réchauffement. L’exemple québécois est particulièrement marquant sur
ce fait, des épisodes hivernaux très froids ces dernières années sont venus apporter un
peu plus de complexité dans le ressenti de la population quant au –réchauffement-
climatique5.
Ainsi, il sera choisi de parler dans ce travail de –changement climatique-, ceci ne
remettant pas en cause l’acceptation d’un réchauffement global, mais révélant plus
justement le ressenti du territoire étudié. Ce terme, à l’acceptation plus large, permettra
un échange plus important avec les acteurs du tourisme concernés par l’étude.
1.2 Perception du changement climatique : aléa, enjeu,
risque ?
La question de la perception du changement climatique met en avant le poids que l’on
donne à celui-ci. La thématique des risques et depuis longtemps étudiée par les sciences
humaines et sociales, partant de la formule qui relie aléas et enjeux pour aboutir au
risque6, le champ de connaissance sur la question est vaste.
Plusieurs choses sont intéressantes à intégrer à la réflexion ici. Les liens entre les risques
et la société sont de plus en plus forts, car responsables en certains cas d’une
augmentation des aléas, car multiplicateurs d’enjeux par son développement7. La société
vulnérable est au cœur des questions liées au phénomène climatique actuel. Ensuite ce
changement climatique apparaît comme un risque collectif et global8, en cela son aspect
complexe est mis en évidence. A la fois risque naturel et anthropique, car relevant de
phénomènes naturels et de leur accentuation par l’Homme, il couvre de nombreux
champs de la société en ayant des conséquences environnementales, sociales,
5 HENNION, F. Entretien avec M. Thomas Antil, Ministère du tourisme québécois. Septembre 2008 6 BAUD, P. ; BOURGEAT, S. ; BRAS, C. Dictionnaire de géographie. Ed, Hatier. 3ème édition 2005. 7 FABIANI, J-L. ; THEYS, J. La société vulnérable, évaluer et maîtriser les risques. Presse de l’ENS. 1987 8 GILBERT, C. Risques collectifs et situations de crise. L’Harmattan. 2003
16
économiques… Enfin apparaît une nécessaire adaptation et des réponses à trouver. Cela
et unanimement souhaité, quelques soit les positions et les idées9.
Il apparaît donc que le changement climatique peut être caractérisé en tant que risque
global, néanmoins les questions qui animent notre étude, et surtout celles relatives à la
perception, poussent à ne pas aller aussi loin dans la caractérisation. En effet l’un des
objectifs est de constater le poids et l’ampleur que donnent les professionnels du
tourisme québécois à ce changement. Ainsi il sera plus intéressant d’observer comment
eux le caractérisent, et ensuite comment l’échelon provincial répond globalement à ces
questions.
Enfin, la perception en tant que sujet d’étude, amène à réfléchir à la complexité, ici
encore, de la notion. Il faudra prendre en compte le « vécu » et les influences externes
(médias, société…) qui fondent la perception. Cette nécessité donnera lieu à une
méthodologie précise, allant en ce sens.
9 BESSAT, F. Risques, environnement et société : le cas du réchauffement climatique. Question de géographie, les risques. Ed, du Temps. 2003.
17
2. Changement climatique et tourisme : des liens étroits
Ces deux thèmes qui animent la présente étude ont fait l’objet de nombreux travaux et
recherches. Ils ont été approchés séparément d’abord, puis conjointement plus
récemment. Le tourisme n’a pas été tout de suite relié au phénomène du changement
climatique, une fois encore la transversalité qui le caractérise ayant joué un rôle. Parce
qu’il renvoie à d’autres secteurs économiques, le tourisme en tant que tel fait l’objet
d’une mise en perspective avec la question climatique depuis relativement récemment.10
Néanmoins il existe maintenant une documentation importante sur ces deux sujets. Il
s’agit ici de faire une synthèse de cette recherche, afin de poser les bases de la
thématique de ce travail. Pour cela nous nous baserons assez largement sur, d’une part
l’étude de la Direction du Tourisme sur l’impact du changement climatique sur le
tourisme (CERON et DUBOIS, mai 2006), d’autre part, sur l’allocution de M. Francesco
FRANGIALLI du 18 novembre 2008. Dans le cadre des conférences de l’IREST, le
secrétaire général de l’OMT nous a présenté les liens étroits qui font l’objet de cette
partie, son allocution ayant pour but de synthétiser la question, il nous apparaît
judicieux d’en faire la porte d’entrée de cette partie.
2.1 Le tourisme, vecteur du changement climatique
Par définition le tourisme apparaît comme vecteur du phénomène. Les études montrent
que l’activité humaine a un effet non-négligeable sur l’accroissement du phénomène,
notamment du à la production de gaz à effet de serre11. Sans rentrer dans plus de détails
scientifiques il est généralement admis que ces gaz à effet de serre (GES) sont
majoritairement responsables du changement climatique (même si la couverture
nuageuse et notamment les micro-particules issues des aérosols ont aussi un impact sur
l’effet de serre).
Reprenons la définition du terme –tourisme- proposée par le laboratoire MIT en 2003 :
« Système d’acteurs, de pratiques et d’espaces qui participent de la recréation des
individus par le déplacement et l’habiter temporaire hors des lieux du quotidien. ». Cette
définition traduit la complexité de l’activité touristique, il est possible de faire émerger
10 CERON, J-P. ; DUBOIS, G. Adaptation au changement climatique et développement durable du tourisme. Mai 2006 11 JACQUES, G ; LE TREUT, H. ; Le changement climatique, éditions UNESCO, 2004.
18
certains thèmes : activités humaine, hébergement, et en point d’orgue, le transport, qui
donne son sens au tourisme en incluant un nécessaire déplacement. Ces activités sont
toutes génératrices de GES, car très énergivores. A cela il faut ajouter que le tourisme
favorise la multiplication des « lieux de vie », selon la thèse de l’habiter poly-topique
défendue par Mathis Stock. En cela s’ajoutent encore des activités humaines générées
par le tourisme.
Toutes les activités précédemment évoquées ne contribuent pas de la même façon à
cette production de GES, et donc au phénomène climatique. Pour rendre possible la
comparaison les recherches prennent souvent en référence la production d’un GES : le
CO2 , ce gaz le plus souvent obtenu par combustion de matières fossiles (charbons,
pétroles…) est le gaz majoritairement responsable de l’effet de serre. En s’intéressant
particulièrement au CO2 il est donc possible de comparer les différentes activités
humaines. Les études menées dans le cadre de la conférence de Davos en 2007 mettent
en avant la répartition suivante :
Figure 1 : Emission globale de CO2 par sous-secteurs touristiques
Sources : OMT / PNUE / OMM
Les chiffres de l’étude estiment donc à près de 5% les émissions de CO2 directement
dues à l’activité touristique. Ces chiffres bruts permettent d’établir les proportions
présentées dans le tableau suivant :
19
Figure 2 : Part des sous-secteurs touristiques dans l’émission globale
Sources : OMT / PNUE / OMM
Il est facilement constatable que le transport joue un rôle prépondérant en termes
d’émission de GES, le secteur du transport touristique représente près de 75% du total.
Le tourisme étant défini, comme présenté précédemment, par des déplacements, la
question du transport est une problématique majeure. De plus, pour affiner encore les
résultats, notons que dans ce secteur c’est le transport aérien qui est lui même le plus
pourvoyeur de GES. De plus, ce mode de transport représente approximativement 17%
des déplacements touristiques aujourd’hui.12
Ce sont donc une minorité des déplacements qui engendrent une majorité des émissions.
Cela semble mettre en avant la question souvent conflictuelle du -tourisme domestique-
contre le -tourisme international-, au nom de questions environnementales et sociales
ces idées sont de plus en plus mises en opposition, vers un tourisme à deux vitesses qui
correspondrait lui-même à des publics et des motivations opposés. Néanmoins il nous
apparaît aujourd’hui illogique de réfléchir ainsi. M. Frangialli faisait remarquer dans son
allocution que de nombreux pays en voie de développement ont une grande partie de
leur économie basée sur le tourisme, réduire la mobilité ne serait-il pas les condamner à
un non-développement ? Certes il existe des exemples qui montrent que ce
développement n’est pas toujours raisonné, et ne profite souvent pas au territoire lui-
même, outre ces questions qui sortent du champ d’étude et doivent être posées par
12 Climate change and tourism : Responding to global challenges, Advanced summary of Davos conference, octobre 2007.
20
ailleurs, réduire les déplacements et rendre le tourisme toujours plus local ne semble pas
être la solution à l’heure actuelle.
2.2 Le tourisme, victime du changement climatique
Le changement climatique redessine la carte du tourisme mondial à des échéances plus
ou moins importantes. Il impacte directement l’activité touristique, et remet en cause
l’avenir de nombreux territoires. Les travaux amenant à la conférence de Davos ont
permis de dresser une cartographie des effets du changement climatique à moyen et
long-terme. Cette carte, présentée ci-dessous, met en avant notre exemple québécois,
comme un territoire impacté de différentes manières.
Figure 3 : Distribution géographique des impacts du changement climatique sur
les destinations touristiques
Sources : OMT / PNUE / OMM
21
Cette synthèse met en avant différents facteurs qu’il convient de préciser. D’abord les
impacts sur les territoires ont des échéances et des périodicités diverses, il faut séparer :
- Les impacts immédiats, souvent catastrophiques (inondations destructrices,
tempêtes, avalanches, incendies…). Ces événements, favorisés par le changement
climatique, peuvent impacter directement une destination, par une altération
physique de l’environnement, par une destruction du patrimoine qui faisait
l’attractivité, ou plus induitement par un effet très néfaste sur l’image même du
territoire.
- Les impacts à plus long terme, qui auront au final les mêmes effets, mais des
temps d’application plus long. Ces impacts, majoritaires, peuvent être directement
liés au changement climatique, ou peuvent être favorisé par ce dernier. Combinés
avec d’autres facteurs ils contribuent alors à l’accélération d’autres changements.
De la même façon il est possible de dresser une typologie des territoires menacés.13
Deux type de territoires émergent quand on réfléchit aux impacts du phénomène
climatique, avec à chaque fois un rôle fort joué par ce dérèglement :
Les îles et espaces littoraux
L’importance de leur évolution est particulièrement grande quand on connaît le poids
qu’a le tourisme littoral au niveau mondial aujourd’hui. Pour ces territoires les risques
sont nombreux et de différentes sortes :
- D’abord, c’est la hausse du niveau des mers et océans qui fait encourir un risque
à certains rivages. La fonte des glaciers de l’arctique est le principale phénomène
responsable de cette élévation. La submersion des littoraux peut remettre
intégralement en cause certaines destinations, on pense notamment aux îles de
l’océan indien, aux très faibles altitudes.
- Ensuite, c’est l’érosion côtière, phénomène déjà bien connu, qui peut être
accentuée par le changement climatique. La hausse des températures de l’eau
sur certaines côtes entraîne des dérèglements des courants côtiers et donc des
atteintes plus fortes en certains points du littoral. De même, des côtes prises par
la glace certaines parties de l’année se retrouvent continuellement travaillées par
les courants à cause de la diminution des périodes gelées. L’érosion est donc
13 Réchauffement climatique et tourisme. Compte-rendu de conférence par M. Francesco Frangialli. Novembre 2008.
22
largement favorisée. C’est notamment le cas des côtes du Saint Laurent14, cas
intéressant particulièrement notre étude.
- L’atteinte à la biodiversité marine est enfin un dernier risque pour ces territoires
littoraux. La hausse des températures des mers et océans a une incidence directe
sur le déclin de la faune et de la flore marine. L’exemple des barrières de corail
est emblématique, la disparition de celles-ci ayant en plus un effet direct sur les
écosystèmes dont elles font parties. Dans notre exemple du Saint Laurent
québécois ce sont les grands mammifères marins qui sont touchés, la hausse des
températures déréglant notamment les cycles saisonniers de déplacement des
cétacés.
Les territoires liés à la neige et aux glaciers
Ici encore la hausse des températures a des effets non-négligeables, à la fois sur la
structure physique des territoires et sur les activités touristiques liées. Différentes
thématiques peuvent être approchées :
- Les activités sportives et de loisirs liées à la présence de neige sont d’abord
concernées. En premier lieu c’est évidemment la diminution des manteaux
neigeux qui s’observe. Paradoxalement le changement climatique a tendance à
augmenter les précipitations, mais les températures étant dans un même temps
plus chaudes, ces précipitations donnent moins souvent de la neige. Le gradient
mêlant la température et l’altitude doit être pris en compte, il en résulte un
phénomène plus important à des faibles altitudes. Attention cette donnée
physique est aussi vraie pour les massifs européens (Alpes, Pyrénées…), mais les
choses sont un peu différentes dans d’autres endroits du monde, où la latitude
joue un rôle plus important que l’altitude. Nous le verrons par la suite.
- Les zones polaires, et le tourisme qui s’y déroule, sont aussi touchées. Même si le
poids des activités touristiques est relativement faible aujourd’hui dans ces zones,
l’impact du changement climatique n’en est pas moins visible. En termes d’image
d’abord la fonte des glaciers polaires est emblématique, l’image des ours blancs
perdus au milieu de grandes étendues d’eau est forte. En dépassant un peu ces
clichés d’autres risques apparaissent, dans le nord du Québec c’est notamment le
cas de nombreuses tribus amérindiennes autochtones qui voient leurs terrains de
14 HENNION, F. Entretien avec Mme Marie-José GUERIN, Directrice de la Maison du Tourisme de Tadoussac. Septembre 2008
23
chasse et de vie s’amoindrir, avec une remise en cause totale de leur existence.
On sort ici du champ touristique, mais cela est bien révélateur de la globalité du
phénomène étudié.
D’autres territoires et zones touristiques sont impactés par le changement climatique, les
zones qui se désertifient, les zones où le tourisme est lié à une biodiversité qui
s’amenuise. Le rôle du phénomène est peut-être un peu plus indirect en ces cas là, mais
contribue tout de même à rendre plus étroits encore les liens entre le tourisme et le
changement climatique.
2.3 Une prise de conscience du monde du tourisme
Cette réflexion s’accompagne d’une prise de conscience des institutions internationales
sur les liens étroits présentés précédemment. Il est intéressant ici de revenir sur
quelques grandes dates qui présentent chronologiquement cette prise en compte. Depuis
les années 60, et la première prise de conscience d’un changement climatique accéléré,
les sommets et conférences sur la question s’enchaînent, sous l’égide des Nations Unies
les conférences mondiales sur le climat se multiplient. Ici seront mises en avant
uniquement les dates emblématiques qui relient le phénomène à un contexte global, qui
marquent des tournants dans la prise de conscience et le souhait de prendre des
mesures fortes. L’intégration du tourisme dans la réflexion globale sera aussi mise en
avant.
Le sommet de la Terre de Rio, 1992
Cette date représente la première prise de conscience officielle du phénomène du
changement climatique. Certes on parle alors de changement climatique depuis
longtemps, des études existent, le GIEC a déjà été créé (en 1988), mais d’une manière
globale la communauté internationale certifie le risque et l’incidence de l’Homme sur la
planète en signant la convention cadre sur le changement climatique.
Ce grand rassemblement qui pose les jalons d’une prise de conscience environnementale,
après la conférence de Stockholm de 1972 et surtout le rapport Brundtland de 1987, est
la première prise de position officielle sur le changement climatique. C’est dans ce
contexte que sont évoqués des accords majeurs pour la lutte contre le changement
climatique : le protocole de Montréal, pour la diminution des chloro-fluoro-carbones
24
(CFC), et surtout, le protocole de Kyoto, pour une diminution des émissions de GES à
l’échelle mondiale.
A cette date le tourisme n’est pas intégré à la réflexion, le sommet de la Terre recouvre
le monde économique sans faire apparaître le tourisme comme particulièrement
concerné.
Sommet de Johannesburg, 2002
Le tourisme intègre la réflexion en tant que secteur d’activité à part entière à cette date.
Le monde touristique participe donc à ce sommet du développement durable après avoir
lancé sa propre réflexion interne dès 1995 durant la conférence de Lanzarote, aux Iles
Canaries. L’OMT devient alors un acteur de ce sommet, et l’idée d’un tourisme durable
est dès lors défendue. C’est aussi au cours de ce sommet que deux pays majeurs, le
Canada et la Russie, déclarent leur intention de ratifier le protocole de Kyoto.
Conférence de Djerba, 2003
Il s’agit de la première conférence internationale sur le thème du tourisme face au
changement climatique. Après avoir intégré la réflexion globale sur le développement
durable à Johannesburg, le monde du tourisme lance sa propre action autour du
phénomène climatique. Sous l’organisation de l’OMT, 13 institutions internationales et 42
pays sont représentés. Une déclaration y est adoptée, on authentifie alors que le
tourisme est directement lié au changement climatique, avec toute la complexité
présentée précédemment. Il s’agit aussi de la période où la société elle-même prend
conscience de manière accrue du phénomène, avec notamment le relais des médias, le
succès du film an inconvenient truth (documentaire d’Al Gore) étant particulièrement
marquant.
Conférence de Davos, 2007
A Valence, la même année, le GIEC présente son 4ème rapport, celui-ci décrit avec de plus
en plus de certitudes l’évolution du climat mondial. Dans ce contexte Davos est la
deuxième conférence de l’OMT sur le sujet. Le sujet du tourisme vecteur et victime du
changement climatique est au cœur des discussions. Le climat apparaît comme une
ressource majeure pour le tourisme, et le rôle de ce dernier dans l’émission de GES est
mis en avant dans un même temps. La conférence statut sur un engagement nécessaire
25
du monde du tourisme sur les 4 points spécifiques du Programme des Nations Unies sur
l’Environnement :
- atténuation des émissions de GES
- adaptation des entreprises et des destinations au changement en cours des
conditions climatiques,
- introduction des technologies nouvelles dans le secteur pour à la fois s’adapter et
limiter les émissions,
- mobilisation des ressources financières pour pouvoir conduire ces changements.
Cet engagement s’est traduit par l’adoption d’une résolution sur ces thèmes, un an plus
tard, lors de l’assemblée générale de l’OMT de Chacarera de Indias (Colombie) en 2008.
L’après Kyoto, 2009-2020
Toujours en 2007, à Bali, le sommet des Nations Unies sur le changement climatique
aboutit à une feuille de route pour préparer l’après Kyoto. Le protocole s’avérant limité et
plus en phase avec un nouveau contexte mondial (essor de pays nouvellement
industrialisés notamment). Cette feuille de route mène la réflexion à Copenhague, en
décembre 2009, où doit être signé le nouveau protocole de réduction des émissions de
GES à l’horizon 2020. Les premiers débats et discussions pour préparer ce protocole ont
eu lieu à Bangkok en avril 2008 et à Poznam en décembre de la même année.
La crise économique et financière mondiale s’étant depuis superposée à la crise
environnementale, on peut se demander si les échéances seront respectées, si le
processus en marche depuis plus de 15 ans ne va pas connaître un ralentissement sévère
qui pourrait remettre en cause toute la logique d’action envisagée.
26
3. L’approche de la question au Québec : l’image d’une
province « verte »
3.1 L’analyse documentaire, présentation et méthode
L’hypothèse d’une province « verte » qui guide notre étude doit être approfondie. La
méthodologie envisagée est celle de l’analyse documentaire, celle-ci doit permettre
d’observer l’image du cas analysé, véhiculée dans la société. Cette technique permet
d’observer comment est perçu le Québec dans la conscience collective. Cette méthode, si
elle est bien construite, permet de mettre en avant des éléments, des grandes lignes, qui
caractérisent l’imaginaire relayé par la destination. L’imaginaire est une notion complexe,
mêlant à la fois perception d’une image et construction de cette même image par des
mécanismes intellectuels faisant appel à d’autres référentiels, inconscient ou non.
L’objectif principal de ce travail est la caractérisation de l’imaginaire français pour le
Québec. Cette caractérisation passera par l’analyse de divers documents, de types et de
sources différentes. Deux approches seront proposées, d’abord une série de 5 documents
émanant d’acteurs français pour illustrer ou parler du Québec, ensuite 3 autres
documents émanant, eux, d’acteurs québécois. Cette double approche aura pour but de
comparer l’imaginaire perçu par les français à l’image véhiculée par le Québec lui-même.
Ceci afin d’étudier les liens qui existent entre imaginaire, fabrication de celui-ci et
réciprocité des attentes et des réponses.
Une séance de discussions avec quelques étudiants français a permis d’observer des
grandes lignes et grandes tendances portées par l’imaginaire. Cette discussion n’a pas
été faite avec assez de rigueur scientifique pour la faire figurer dans la liste des
documents analysés, mais vise à servir de fil rouge à la réflexion. Ceci tout en gardant le
regard le plus détaché possible sur les documents, en essayant de ne pas avoir soi-même
déjà trop construit son imaginaire sur la question. C’est tout l’enjeu de ce travail et de la
méthodologie adoptée.
27
Ce dossier documentaire se compose donc de 8 documents :
- 3 couvertures de guides ou brochures touristiques
- 1 diaporama promotionnel
- 1 couverture de bande-dessinée
- 1 publicité
- 1 texte de présentation d’un carnet de voyages en ligne
- 1 chanson
Chacun de ces documents a fait l’objet d’une analyse contextuelle et graphique, cette
analyse est présentée en annexe A. Nous reprenons ici les éléments de synthèse qui
ressortent de l’étude.
3.2 Eléments de synthèse
Imaginaire perçu par les français et image relayée par les québécois : points
communs et différences.
La première chose à constater est que l’imaginaire perçu par les français concernant le
Québec est souvent proche de l’image qu’en relaient les québécois eux-même. Ces
nombreux points communs seront repris en détails par la suite, expliqués et mis en
contexte.
Il peut-être intéressant de ce poser une question à ce sujet : l’imaginaire est-il un reflet
de l’image envoyée par les québécois, ou est-ce plutôt ces même québécois qui se
conforment à l’imaginaire attendu pour satisfaire une certaine demande ? En effet deux
des trois documents émanant d’acteurs québécois sont des publicités, ou documents
promotionnels, la question posée prend donc ici un sens commercial, marketing, qu’il
faut intégrer à la réflexion. Néanmoins l’exemple de la chanson de Charlebois tend à
prouver qu’en dépassant ce sens commercial les images et l’imaginaire sont assez
proches.
Un aspect cependant semble limiter la comparaison : là ou Charlebois parle de l’hiver
comme élément marquant son expérience, nul trace n’en est fait dans les autres
documents, ou alors d’une manière très discrète. Plusieurs explications peuvent justifier
cela. D’abord il s’agit, pour beaucoup de documents, d’éléments publicitaires, relatifs au
tourisme, or le tourisme international au Québec est beaucoup plus présent dans la
28
période estivale que durant l’hiver. Les statistiques 2007 du ministère du tourisme
québécois donnent plus de 50% des arrivées internationales pendant l’été contre moins
de 25% pour l’hiver. Si on s’intéresse uniquement au cas français l’écart se creuse
encore plus. Il s’agit peut être d’une explication à cette présence limitée de l’hiver dans
les publicités.
De plus il a été constaté pendant les recherches que les séjours au Québec en période
hivernale étaient souvent intitulés « Canada » plutôt que « Québec », alors qu’il
s’agissait de séjours uniquement localisés dans la province québécoise. Comme si l’hiver
était plus rattaché au Canada, et à sa dimension Grand Nord, qu’au Québec.
Détaillons maintenant les éléments phares découlant de l’analyse.
L’eau et la couleur bleu, caractéristiques de la province
Comme une trame de fond que l’on retrouve dans tous les documents, l’eau et la couleur
bleu semblent emblématiques de cet imaginaire.
L’eau d’abord se retrouve principalement sous des formes naturelles (lacs, rivières,
mer…) et sert de décor à de nombreuses représentations. Cette eau rappelle évidemment
les nombreux lacs présents au Québec mais aussi le Saint Laurent, véritable mer-fleuve
qui traverse le pays. Dans l’imaginaire français le Québec ne semble pas pouvoir être
dissocié du Saint Laurent, certainement parce que son gigantisme impressionne dans
notre contexte, mais aussi peut être car notre histoire commune, tant recherchée par les
français, a le fleuve comme cadre, comme scène.
De la même façon la couleur bleu est reliée au Québec, et en premier lieu parce que c’est
la couleur que l’on donne au fleuve et à l’eau précédemment évoqués. Cette couleur fait
en même temps partie de l’identité québécoise et donc de l’image relayée. C’est ici le
drapeau « fleurdelisé » qui nous vient à l’esprit, drapeau que le français connaît aussi
bien, voir mieux, que celui du Canada fédéral. Ce bleu c’est donc le fleuve, mais c’est
aussi le ciel qui rempli souvent l’espace des photos et illustrations, et donne une
dimension ouverte et illimitée à notre imaginaire, nous y reviendrons dans la prochaine
partie.
29
L’impression de grands espaces, d’une nature non contrôlée
L’impression générale que l’on retrouve dans les documents est celle d’espaces illimités,
ouverts et naturels. Ces grands espaces sont mis en avant par les compostions
horizontales que l’on retrouve dans les documents, rien ne semble pouvoir barrer
l’espace ou le réduire. L’horizon est lointain et semble inaccessible, cela étant relevé par
la présence de grandes étendues d’eau ou de ciel dont nous avons parlé juste au-dessus.
L’imaginaire d’un français comporte une dimension presque mythique envers ces grands
espaces, où les proportions semblent tellement différentes des nôtres.
Ces espaces sont, de plus, occupés par une nature non dominée par l’homme. Cette
impression est très forte dans l’imaginaire du Québec, c’est pour nous français le « pays
nature » par excellence. Et par là on retrouve les évocations de l’eau, du ciel, mais aussi
d’une végétation et d’une faune bien particulière. L’homme est très peu présent dans
cette nature, et quand il y est il la respecte par des activités calmes, non polluantes
(canoë, randonnée…). C’est cette image de la nature qui est relayée dans l’imaginaire du
Québec.
Il faut ajouter à cela que cet imaginaire s’inscrit dans un cadre bien particulier, entouré
d’une dimension « mystérieuse ». Cela se traduit par les nombreux champs lexicaux
utilisés pour évoquer le Québec, mais aussi par la présence de brumes, d’animaux
spectaculaires, dans les images. Le Québec apparaît comme encore « sauvage » et
propice à une aventure recherchée par nous, français. En liant encore cela avec ce
contexte d’histoire commune, le Québec nous apparaît un peu comme notre Far-West,
encore à l’époque actuelle.
Une population accueillante et tellement proche de nous…
La population québécoise est évoquée en des termes très particuliers, il s’agit d’une
population proche de nous, accueillante, particulière mais tellement sympathique dans
notre imaginaire. Combien de fois entendons-nous l’expression « nos cousins
d’Amérique ».
Cette population passe pour très intégrée à cet environnement dont nous avons parlé,
respectueuse et particulièrement concernée par ses problèmes. C’est là l’image de ce
trappeur proposant des pancakes dans sa cabane en bois qui ressort. Il n’est en effet que
très peu fait mention dans les documents de l’hypermodernité d’une ville comme
Montréal, de la capitale politique qu’est Québec… Et ceci ne se retrouve pas vraiment non
plus dans l’imaginaire français pour la province.
30
Les québécois apparaissent comme vraiment proche de nous dans cet imaginaire, notre
histoire commune, leur langue, leurs coutumes… Tout semble rappeler la France en
Amérique du Nord. Bien sur ils ont leurs expressions, leurs particularités, preuve s’il en
est qu’ils ont gardé ce côté traditionnel qu’avait nos ancêtres communs. Tout cela est
bien sur, ici, à prendre au second degré, quand on connaît un peu le contexte québécois
et sa population on s’aperçoit que les choses sont bien différentes. Néanmoins c’est ce
qui semble véhiculé dans l’imaginaire français.
3.3 Conclusion : Un imaginaire français fortement ancré
Pour les français le Québec c’est un mythe, une aventure, qui mêle à la fois présent et
passé. C’est l’image d’un pays immense, naturel, ou l’homme et son environnement se
sont toujours associés. C’est l’image d’une Histoire partagée, d’une population
chaleureuse et accueillante. C’est l’image d’un pays où le français peut connaître le
frisson de la découverte, de l’aventure, tout en ayant de solides attaches et un
environnement rassurant.
Cet imaginaire est fort, ancré dans nos esprits, et souvent relayé par les québécois eux-
mêmes quand il s’agit d’objectifs promotionnels, touristiques… Finalement on peut se
demander si cet imaginaire n’exerce pas, lui même, en retour, une action sur les
québécois et leur façon de percevoir leur province. Oui il existe des liens forts entre nos
deux « pays » mais ces liens sont bien plus complexes qu’ils ne peuvent paraître de
premier abord et relève d’une Histoire elle même complexe et toujours en marche.
31
Partie 2 Prise en compte du changement climatique : Monographie du système touristique québécois
32
Introduction
Cette deuxième partie présente le cœur de la réflexion, à savoir la prise en compte du
changement climatique par le système touristique québécois. Après avoir cerner les
sujets qui animent l’étude et poser les postulats de base, nous allons maintenant étudier
spécifiquement le cas du Québec.
D’abord nous présenterons la méthodologie employée pour répondre aux questions. Le
système touristique étudié sera présenté et justifié, puis la méthode de l’analyse de
discours, via notamment des entretiens semi-dirigés, sera elle aussi présentée. Cette
partie méthodologique doit permettre de comprendre comment nous avons été cherchés
l’information, et pourquoi nous avons ciblé cette information.
Ensuite, les résultats de cette monographie seront mis en avant et discutés. Nous
verrons ainsi la diversité des prises en compte du changement climatique, et la diversité
des réponses apportées. De même, le développement durable, qui apparaît comme un
cadre aux stratégies du système touristique sera présenté dans le cas québécois.
33
1. Cadre méthodologique de la monographie
1.1 Le système touristique québécois
Les acteurs du tourisme québécois : le choix d’une représentation des liens
entre « global et local »
Ce concept, à l’acceptation très large, a besoin d’être défini et présenté selon le sens qui
lui sera donné dans cette étude. Les acteurs du tourisme d’un territoire sont nombreux et
divers, ce terme peu précis englobe tout un système de personnes, d’entités, de
structures, qui font le territoire touristique15. Ce système peut être découpé en plusieurs
types d’acteurs, selon une typologie proposée par Lozato-Giotard on retrouvera ainsi les
prestataires de services touristiques (hébergement, restauration, activités de loisirs…),
les acteurs institutionnels (de l’international à l’échelon le plus local), les acteurs indirects
(producteurs d’équipements, financeurs… Ici encore le champ est très large), et enfin les
touristes eux même, consommateurs et acteurs de l’offre touristique. Cette typologie,
parmi les nombreuses existantes, met en avant la complexité du domaine touristique et
les nombreux liens transversaux qu’il comporte.
Notre cas d’étude nous pousse à opter pour une définition précise et exhaustive de ce
que l’on appellera « acteurs du tourisme québécois ». La demande de la Direction du
Tourisme, quant à des méthodes et façons de faire entre les différents échelons
fonctionnels, associée aux réalités matérielles d’un travail de recherche, amène à
plusieurs remarques. D’abord il s’agira d’étudier la question des acteurs institutionnels du
tourisme québécois, de l’échelon provincial aux institutions locales, car il s’agit ici de ce
qui intéresse particulièrement la demande. Ensuite, le changement climatique touchant
différemment les territoires et les filières touristiques il s’agira de cibler sur des filières et
territoires pertinents, le choix est fait d’étudier deux exemples : le tourisme de sport
d’hiver et le tourisme littoral, principalement basé sur le Saint-Laurent, avec prise en
compte des paysages et de la biodiversité. Ces territoires sont représentés par des
institutions, dont on a parlé précédemment, mais aussi par des acteurs privés participant
des décisions et stratégies, il sera donc intéressant de les intégrer au champ d’étude.
Le premier exemple est choisit car emblématique du risque « changement climatique ».
En France ou ailleurs, ce qui motive principalement les recherches et actions est la
question de l’enneigement conséquent à un réchauffement global. En ce sens le Québec
s’est lui aussi emparé de la question et l’étude de cet exemple apparaît intéressante.
15 LOZATO-GIOTARD, J-P. Les acteurs de la filière tourisme. Management du tourisme, Territoires, systèmes de production et stratégies. Pearson Education. 2007
34
Pour le deuxième exemple, le choix s’impose car il s’avère que l’atteinte aux paysages et
à la biodiversité, autre grande question liée au changement climatique, touche
particulièrement ce tourisme littoral au Québec. Point fort du tourisme québécois, cette
filière semble particulièrement vulnérable face au changement climatique.
Cadre de l’étude et terrains étudiés
Le travail combine deux approches pour un même objectif qu’est l’étude de la prise en
compte du changement climatique dans notre exemple. D’abord, une première approche
en terme de lien entre les échelons fonctionnels du système touristique québécois, avec
ici la question de différences dans les prises en compte, et d’une réponse globale à des
questionnements locaux. Ensuite, une deuxième approche qui amène à s’intéresser à
deux thèmes précédemment évoqués : le tourisme de sport d’hiver et le tourisme littoral.
Ces deux approches doivent être liées et donner lieu à l’étude de cas rapprochant les
différentes données.
En cumulant ces deux approches apparaît donc un système d’acteurs intéressant l’étude.
Des terrains spécifiques ont été choisis afin de dresser une représentation de ce système,
leur choix c’est fait de manière pertinente et pragmatique. Voici un schéma présentant le
système étudié, il sera ensuite détaillé et les choix en termes de terrain seront justifiés.
Figure 4 : Le système touristique québécois dans notre étude
Source : F. Hennion. 2009 (logiciel Illustrator)
35
D’abord la question de l’échelon global, et de la perception de l’enjeu changement
climatique, de sa prise en compte à ce niveau amènent à s’intéresser au ministère du
tourisme, organe le plus proche de notre Direction du Tourisme. Ceci amènera la
réflexion sur un cadre global de prise en compte pour le tourisme québécois. Ce
ministère, en relation avec tous les acteurs, plus ou moins directement, apparaît comme
particulièrement intéressant pour l’étude.
En terme de filière, et d’abord celle du tourisme littoral, le cas choisit est celui de la
région de Tadoussac, ville touristique de la côte Nord, le long de la baie du Saint Laurent.
Le choix a été fait car il s’agit de la « capitale » de ce tourisme littoral dans la région du
Manicouagan. De plus le tourisme sur place se base essentiellement sur la présence des
baleines, tout au long de la période estivale, dans la baie, et sur la présence à l’année
d’une faune marine importante. L’enjeu est donc ici encore de taille, tant pour les
conséquences sur cette biodiversité que pour les conséquences liées aux changements
des paysages côtiers. Enfin, ce territoire rejoint celui du parc marin du Saguenay – Saint
Laurent, acteur supplémentaire dans ce système, directement impliqué dans la réflexion
et ajoutant donc de l’intérêt au travail.
La filière « sport d’hiver » sera, elle, étudiée par le biais de l’exemple de la station du
Mont Sainte Anne. Celle-ci, parmi les plus importantes dans la province se situe à
proximité immédiate de la ville de Québec. Sa taille en fait un exemple intéressant car
suffisamment important pour avoir une vraie réflexion sur les sujets qui nous
préoccupent, et une capacité à y répondre. Ici c’est, entre autres, la question essentielle
des conditions d’enneigement qui fera l’objet de l’étude.
Dans les deux cas précédents, les liens avec le niveau provincial seront eux aussi
étudiés, et viendront compléter ce système d’acteurs. Dans le cas de la région de
Tadoussac, c’est la SEPAQ (Société des Etablissements de Plein Air du Québec) qui sera
observées. Il s’agit d’une société d’Etat responsable des Parcs Naturels et autres espaces
protégés de la province. Son étude apparaît comme pertinente, d’abord, par l’existence
du parc marin, dont elle est gestionnaire et exploitante, mais aussi par sa grande
implication sur les territoires dépassent bien souvent la simple délimitation des Parcs
Naturels. Elle est l’organe le plus a même de répondre en terme de biodiversité et
d’atteinte à l’environnement, au niveau du Québec. Pour la filière « sport d’hiver » c’est
l’ASSQ (Association des Stations de Ski du Québec) qui sera l’interlocuteur de ce travail.
Ici encore elle fait le lien entre les stations québécoises et le contexte provincial, par un
système de réseau de station et de coopération. Par-là elle a une bonne connaissance
36
des questions locales et un regard sur le contexte global, ceci s’avérant particulièrement
pertinent pour notre étude.
Les six acteurs étudiés dans ce système donneront lieu à autant d’entretiens et
d’observations, ceux-ci sont présentés dans la partie méthodologique suivante.
Figure 5 : Représentation cartographique du terrain étudié
Sources : F. Hennion. 2009 (logiciel Illustrator)
37
1.2 L’analyse de discours : une méthodologie pour la
production d’une information nouvelle
Le cœur de la réflexion se base sur l’observation des perceptions de l’enjeu à différentes
échelles et pour différents acteurs. Dans ce but la méthodologie choisie a été celle
d’entretiens semi-dirigés, ceci afin d’avoir de réels éléments de comparaison entre ces
entretiens, tout en laissant une place à tout discours plus large16. Nous avons présenté
dans une précédente partie le système d’acteurs étudié, chacun d’eux a fait l’objet d’un
entretien durant le mois de septembre 2008. Ce voyage d’étude a permis, en plus de
réaliser ces entretiens, un travail d’observation des terrains et de documentation
iconographique. La liste de ces entretiens ainsi que l’organisation du travail de terrain
sont proposés en annexe.
L’entretien semi-dirigé
La méthode des entretiens semi-dirigés est une méthode qualitative de recherche
sociale, qui tend à faire ressortir toutes les opinions sur un thème spécifique, afin de
mieux comprendre certains comportements sociaux. Dans notre cas d’étude les
entretiens ont été mis en place en suivant un guide, préalablement établi, celui-ci
comportant 6 sections (le guide d’entretien est présenté en annexe C). Dans ce cadre
général il a été nécessaire d’adapter chaque entretien à l’interlocuteur, en fonction de
son attitude, sa disposition à parler, ses connaissances sur les sujets abordés. Par
exemple l’entretien s’est avéré fort différent avec le responsable de la communication de
l’ASSQ qu’avec le responsable de l’enneigement de la station du Mont Sainte Anne. Dans
le premier cas l’entretien a été plus long, et la part de l’enquêteur à la discussion assez
limité, l’objectif a été ici de bien circonscrire l’information et de la ventiler en fonction de
la section abordé. Dans le deuxième cas, l’entretien s’est avéré beaucoup plus technique,
l’interlocuteur se contentant souvent de répondre simplement aux questions. Le rôle de
l’enquêteur a donc été plutôt d’animer la conversation, et de poser les questions les plus
pertinentes pour arriver aux thèmes abordés. Cet exemple montre la complexité de la
méthodologie mais met en avant, dans un même temps, tout l’intérêt de la méthode :
pouvoir proposer un cadre global, permettant la mise en perspective, à des acteurs
différents et pluriels.
Chaque entretien a été enregistré, sauf sur demande contraire de la part de
l’interlocuteur. Dans tous les cas les comptes-rendus de ces entretiens sont proposés en
annexe D.
16 FENNETEAU, H. Enquête : entretien et questionnaire. Dunod. 2007
38
Synthèse et analyse
A la suite des ces entretiens il a été question d’analyser les discours, les volontés, les
approches, dans la perception du phénomène dans le but finalement d’observer les
réponses apportées et les différentes manières de se saisir du problème. Une grille
d’analyse est proposée et doit permettre une étude rigoureuse et scientifique17. En effet
cette grille a pour but de synthétiser l’information et dans un même temps de rendre
comparable les discours. Les thèmes abordés sont déclinés en sous-partie, renseignées à
chaque fois de manière concise. Cette méthodologie permet de tirer des grandes
tendances des discours observés, des grandes lignes qui caractérisent la façon
d’appréhender le sujet, ensuite ces tendances peuvent être illustrées et approfondies en
s’intéressant plus précisément à chaque entretien.
Il s’agit ici d’une analyse de discours reposant, d’une part, sur les entretiens
précédemment évoqués, et d’autre part sur une étude des discours publics des acteurs
concernés, via les publications et autres diffusions médiatiques émanant d’eux. Ainsi
l’analyse de discours s’est complétée par l’étude des documents suivants :
- Plan de gestion environnementale de la SEPAQ
- Compte-rendu des Assises du Tourisme 2007 du Ministère du Tourisme
québécois : Défis de demain, stratégies d’aujourd’hui
- Plan directeur 2007-2009 du Parc Marin Saguenay-Saint Laurent
- Plan stratégique 2005-2007 du Ministère du Tourisme québécois.
Ces documents étant des documents publiques il a été important d’avoir un regard
objectif à leurs lectures, c’est là où la confrontation avec les entretiens est
particulièrement intéressante, elle permet d’observer les contradictions éventuelles
d’avoir un regard croisé sur le sujet.
17 BLANCHET, A. ; GOTMAN, A. L’enquête est ses méthodes : l’entretien. Nathan Université.1992.
Figure 6 : Grille d’analyse des discours
41
2. Résultats et discussions
2.1 Le système touristique : approches et réalités diversifiées
De « l’enjeu » des stations de ski aux problèmes d’enneigement
Pour la station de ski du Mont Sainte Anne, et pour d’autres selon l’ASSQ, le changement
climatique apparaît presque comme un « enjeu marketing et commercial ». Le paradoxe
est important entre les discours généraux, alarmistes quant à la question de
l’enneigement, et les discours de ces acteurs du tourisme de sports d’hiver. Ce qui
apparaît ici c’est qu’à moyen terme, la station étudiée voit le changement climatique
comme une réelle aubaine pour gagner des parts de marché18. Explication : le
phénomène climatique diminuant l’enneigement hivernal semble toucher les stations de
sports d’hiver nord-américaines selon un gradient sud-nord très marqué, les territoires
les plus au sud étant plus touchés (nous expliquerons dans la suite de ce travail ce
phénomène). Ainsi notre cas d’étude voit là une opportunité de développement,
l’enneigement étant bien moins problématique, pour l’instant, c’est un facteur de
différenciation à mettre en avant, la finalité espérée est la récupération des clientèles de
l’Est des Etats-Unis qui ne trouvent plus dans les destinations de sports d’hiver classiques
(surtout au Vermont et au New Hampshire) les conditions optimales pour pratiquer le ski.
Cette vision des choses posent de nombreuses autres questions, et notamment à
l’échelle de la province du Québec.
Néanmoins, malgré cet « avantage » perçu, les conditions climatiques évoluent bel et
bien dans la station. Même si cela se ressent pour l’instant moins que chez les stations
plus au sud, il a été constaté des grandes fluctuations dans les saisons. Entre un hiver
2007 aux conditions de neige très mauvaises et l’épisode 2008, exceptionnel en termes
d’enneigement, les choses ne sont pas aussi simples qu’elles n’y paraissent. Certes la
station semble mieux lotie, mais c’est au prix d’une nécessaire adaptation, coûteuse, à la
fois financièrement et environnementalement. L’incertitude croissante sur les conditions
climatiques, d’une saison à l’autre mais aussi au cœur d’une même saison, compliquent
la donne et implique un effort technologique important. De plus, on peut légitimement se
poser la question du long terme, le gradient évoqué précédemment évolue
inexorablement vers le nord, mais cela ne semble pas encore à l’ordre du jour des
réflexions de la station du Mont Sainte Anne.
18 HENNION, F. Entretien avec M. Guy Trembley, Responsable enneigement de la station du Mont Sainte Anne Septembre 2008
42
A un niveau provincial, pour l’ASSQ, le discours est plus ambigu. La constatation faite par
la station étudiée, et par d’autres située dans un contexte semblable, est aussi
appréhendée par l’association. L’ASSQ y voit également un enjeu de différenciation non-
négligeable, notamment vis à vis du marché du nord des Etats-Unis. En revanche, ses
missions doivent aller vers l’intérêt de l’ensemble des stations du Québec, et au sein de
cet ensemble, les données sont très diverses. Les stations du sud québécois, notamment
du sud-est, connaissent les mêmes bouleversements que les stations nord-américaines,
avec des conditions d’enneigement déjà aujourd’hui défavorables. Là où la station du
Mont Sainte Anne peut percevoir favorablement une baisse de la concurrence de ces
stations québécoises, l’ASSQ n’a pas la même position19. C’est là toute l’ambiguïté de la
situation, comment réagir d’une manière globale ? Favoriser le développement des
stations du nord et ainsi sacrifier les autres ? Tout miser sur l’adaptation des stations du
sud pour les sauver ? L’idéal apparaît comme la recherche d’un consensus : assister les
stations plus touchées sans empêcher le développement de celles du nord, mais il s’agit
là d’un consensus relativement utopique tant les objectifs de chaque station sont
opposés. De plus, l’ASSQ reste une association de gestionnaires et de propriétaires, où le
poids du plus fort économiquement à son importance dans les décisions, il est facile de
penser que les stations du nord, aux potentiels de développement plus fort, vont avoir un
poids toujours plus important dans ce système, et favoriser de la même leur
développement. Cette relation cyclique creusant un peu plus les écarts dans ce système
à deux vitesses, mais encore une fois, pour combien de temps ?
19 HENNION, F. Entretien avec M. Boyer-Lafontaine, Directeur des affaires publiques de l’ASSQ. Septembre 2008
43
Le tourisme du Saint Laurent : la remise en cause d’un patrimoine naturel
important
Même si le terrain étudié n’est pas tout le Saint-Laurent, la commune de Tadoussac
apparaît bien comme la « capitale » du tourisme sur le fleuve. De plus les discours de la
SEPAQ et du Parc Marin, ajoute à la réflexion sur l’ensemble de cette filière du tourisme
autour du Saint-Laurent. Le changement climatique apparaît comme un facteur
remettant en cause en profondeur le modèle touristique actuelle, en effet celui-ci est
basé sur la présence d’une faune particulière, justifiant en grande partie le tourisme.
Depuis le milieu des années 80, et l’idée d’un pécheur de Tadoussac d’emmener des
touristes sur son bateau pour s’approcher des baleines, ce tourisme n’a cessé de se
développer dans et autour de la commune, d’une rive à l’autre du Saint Laurent, pour
devenir aujourd’hui emblématique de la région20.
Figure 7 : Les mammifères marins au cœur du tourisme sur le Saint Laurent
Crédits photographiques : F.HENNION, 2008
Le tourisme à Tadoussac, et sur l’ensemble de la côte Nord, est tourné autour de l’observation des baleines et autres mammifères marins. L’observation se fait sur divers bateaux, du plus imposant au plus petit, que l’on retrouve en nombre sur le fleuve.
20 Le guide du Routard, Québec et Provinces Maritimes, édition 2008-2009. Hachette édition
44
Le changement climatique influe sur la présence de cette faune : les animaux sédentaires
(phoques et bélougas) voient leur taux de mortalité considérablement augmenter,
probablement à cause d’une algue toxique dont le développement est favorisé par un
réchauffement de l’eau et par la hausse des précipitations ; les mammifères marins non
sédentaires (baleines, rorquals, cachalot, orques…) qui passent normalement la période
estivale dans le Saint Laurent où les eaux sont plus froides et riches en nourriture, ont
des cycles de migration bouleversé, ils restent plus longtemps dans le Saint Laurent, car
celui-ci est pris pas les glaces plus tard dans l’année, mais en même temps séjourne de
plus en plus au nord de l’estuaire, loin des infrastructures de tourisme et des sites
traditionnels21. Ces bouleversements amènent une nécessaire remise en cause du
système par les professionnels, nous verrons par la suite que ces évolutions ne sont pas
du seul fait du changement climatique et donc comment les acteurs tentent d’y
répondre d’une manière globale.
En plus de cette atteinte à l’essence même du tourisme dans l’estuaire, le phénomène
climatique impact aussi les paysages et l’environnement physique des lieux. Ici c’est
d’abord l’érosion côtière qui est au cœur de la question, en effet, bien que naturel, ce
phénomène s’accentue considérablement ces dernières années, et le changement
climatique semble en être un facteur aggravant. Plusieurs facteurs expliquent cette
accélération du processus : d’abord les précipitations de plus en plus fréquentes en été,
qui s’infiltrent dans le sol et sous-sol et fragilisent l’ensemble ; Ensuite, une légère
montée des eaux, qui influe aussi sur l’ensemble ; Enfin, peut être le facteur le plus
important, les eaux du Saint Laurent sont prises par la glace sur une période de plus en
plus courte dans l’année, et ainsi les côtes se trouvent plus impactées par l’action des
vagues et des marées, ce qui contribue encore à accentuer l’érosion. La durée de cette
saison des glaces pourrait diminuer de 6 semaines d’ici 2050, de plus, à l’intérieur même
de cette « saison » des épisodes de redoux viennent déjà libérer ponctuellement et
partiellement certaines parties de l’estuaire de la glace22. Cette érosion met à mal
certaines infrastructures touristiques, les falaises dunaires de Tadoussac sont notamment
concernées, le processus menaçant déjà aujourd’hui des installations d’hébergements
touristiques de la commune.
21 HENNION, F. Entretien avec Mme Guérin, Directrice de la Maison du Tourisme de Tadoussac. Septembre 2008 22 Etude de la sensibilité des côtes du Saint Laurent aux impacts des changements climatiques, Communiqué de Presse du consortium Ouranos. Juillet 2008.
45
Figure 8 : Phénomène d’érosion à Tadoussac
Crédits photographiques : F.HENNION, 2008
Des conditions climatiques qui pénalisent globalement le tourisme
D’une manière globale à l’échelle de la Province, et ce la se ressent dans tous les
discours des acteurs, les conditions climatiques changeantes pénalisent le tourisme. Les
hivers fluctuants, d’une année à l’autre et au sein d’une même saison, sont défavorables
pour plusieurs raisons : D’abord c’est évidemment l’enneigement qui pose problème,
nous avons vu précédemment que cette question est complexe et que l’échelon local est
différemment concerné ; En revanche, c’est en terme d’image que tous se retrouvent,
l’image des stations et de leur enneigement est globalement mauvaise. Les touristes du
nord des Etats-Unis par exemple voient comme une évidence qu’il se passe la même
chose ailleurs que dans leur contexte local, ainsi les stations du nord du Québec doivent
elles-mêmes avoir des sérieux problèmes d’enneigement, ce qui, nous l’avons vu, n’est
pas vraiment le cas. De même, ce déficit d’image est véhiculé par les médias, qui
montrent souvent les rues de Montréal et Québec, sans neige, même en plein hiver, ceci
contribue à donner l’impression d’un manque de neige partout dans la Province, alors
que de nombreux facteurs expliquent cette absence de poudreuse dans les grandes villes
L’érosion est très marquée sur les falaises sableuses au nord de la baie de Tadoussac. Des niches d’arrachements illustrent le phénomène. Des zones d’habitations touristiques risquent d’être emportées dans de prochains glissements de terrains.
46
(pollution, piétinement humain…). Ce concept des « trottoirs mouillés » pénalise
fortement l’image des stations et est au cœur des campagnes marketing de l’ASSQ23.
La période estivale est elle aussi touchée par ces fluctuations dans le climat. Les
précipitations sont en augmentation, accompagnées par des épisodes de canicules plus
présents. L’été 2008 est aux yeux de tous un exemple évident de ce dérèglement. Bien
que cet épisode soit trop proche de nous pour tirer de réelles conclusions, nous
retrouvons son évocation dans l’ensemble des discours étudiés. Les acteurs mettent alors
en avant la pluie qui a gâché la saison. Ces événements se traduisent de diverses
manières sur le territoire, si pour les stations de ski cela réduit simplement le nombre de
touristes en période estivale, pour d’autres les conséquences sont plus importante : Dans
la région du Manicouagan, dont Tadoussac est le centre touristique, les effondrements de
routes s’accroissent depuis quelques années, dus à l’infiltration d’eau sous les
infrastructures de transport ; Dans cette même région certains étés ont été synonymes
de feux de forêt dévastateurs (en 2005 notamment) ; A la SEPAQ on évoque l’été 2008
comme l’été des cyanobactéries, micro-organismes toxiques qui se sont multipliés dans
les lacs des parcs naturels de la Province et ont entraîné la prise de mesures de
fermeture drastiques24 (il a été scientifiquement reconnu que le développement de ces
organismes est favorisé par les fortes précipitations) ; Enfin, au Ministère du Tourisme on
parle, entre autre, du tourisme golfique qui voit son activité diminuée avec des saisons
estivales pluvieuses, les conditions de jeu et la recrudescence de champignons dans les
greens, favorisée par les précipitations, semblant expliquer cela.
Des phénomènes climatiques encore plus exceptionnels peuvent s’ajouter à cette liste,
encore une fois le changement climatique n’est pas le seul responsable, il serait trop ardu
d’expliquer le jeu de facteurs qui conditionnent ces événements, néanmoins le
changement climatique apparaît toujours comme un catalyseur, qui favorise les
phénomènes et augmente leur périodicité. Ces phénomènes évoqués sont ceux relatifs
aux grands épisodes de cyclone et tempête tropicale qui touchent chaque année les côtes
du sud-est des USA. Ces épisodes météorologiques, dont la recrudescence en constante
évolution n’est plus à démontrer, impactent le Québec d’une certaine façon : La Province
est touchée quasiment à chaque fois parce que l’on appelle la « queue du cyclone »,
quelques jours après les événements catastrophiques plus au sud, de très fortes
précipitations arrivent au Québec, les vents ne sont plus aussi violents mais la pluie
redouble d’intensité. Ces événements récurrents s’ajoutent au reste quand on évoque le
23 HENNION, F. Entretien avec M. Boyer-Lafontaine, Directeur des affaires publiques de l’ASSQ. Septembre 2008 24 HENNION, F. Entretien avec Mme Buissière, Responsable gestion et exploitation à la SEPAQ. Septembre 2008
47
changement climatique. Pour beaucoup d’experts « les conditions météorologiques sont,
avec le taux de change et les catastrophes naturelles ou technologiques, l’un des trois
facteurs qui conditionnent fortement l’activité touristique »25. Dans ce contexte on
comprend bien que la combinaison de plusieurs de ces facteurs, comme évoqué ici, joue
un rôle prépondérant sur le tourisme.
2.2 Des réponses apportées à un contexte plus large que le
changement climatique
Nous l’avons évoqué, le changement climatique est rarement (voire jamais) pris en
compte individuellement. Sa perception et ses impacts sont toujours couplés avec
d’autres facteurs, d’autres phénomènes. En étudiant les discours nous n’avons jamais
entendu « le changement climatique est responsable de… » mais plutôt « le changement
climatique contribue à… », « le changement climatique favorise… ». Il en va de même
pour les réponses apportées, elles sont toujours en opposition à divers facteurs, à
diverses évolutions auxquelles il faut s’adapter.
Diversification des stations de ski, une réponse à des changements pluriels
Outre l’adaptation technologique, nécessaire pour produire de la neige artificielle, dont
nous avons déjà parlé, les stations de ski, quelles qu’elles soient et où qu’elles se
trouvent, cherchent à se diversifier. Elles se diversifient au sein même de la saison
hivernale d’abord, avec l’émergence d’activités « nouvelles », à l’emprise
environnementale peut être moins forte (randonnée en raquettes, balade en traîneau à
chiens, plongée sous-marine en lac gelé…). Ensuite, elles essayent de se diversifier en
proposant une offre qui dépasse la saison hivernale, sur les marges de cette saison
(printemps et automne) mais aussi de plus en plus en été. Cette diversification se traduit
là encore par l’émergence d’une offre plurielle, des activités nombreuses, des manières
de communiquer différentes aussi. L’exemple de la station du Mont Sainte Anne est
intéressant à observer. Ici c’est une offre toute l’année qui est proposée, en été la
pratique du VTT est mise en avant, profitant des installations de remontées mécaniques
la station s’est positionnée assez tôt comme un « spot » privilégié pour cette pratique. La
randonnée et la simple observation du sommet de la station ne sont pas oubliées. En
plus, les périodes « entre saison » sont aussi prises en compte, l’automne
25 MONFERRAND, A. La météo un aléa majeur de la fréquentation touristique. Revue Espaces n°190 : Météo et Tourisme, Février 2002
48
particulièrement avec le thème central des couleurs de l’été indien autour duquel
s’organise la station.
Figure 9 : Diversification de l’offre touristique à la station du Mont Sainte Anne
Crédits photographiques : F.HENNION, 2008
Pourquoi cette diversification ? Au regard des discours le changement climatique n’est
pas le cœur du problème, bien sur il s’intègre dans la réflexion, mais nous pouvons alors
plutôt penser qu’il ajoute une justification à une diversification enclenchée avant que l’on
parle et que l’on perçoive autant le phénomène. Le changement climatique n’explique pas
la diversification mais s’ajoute aux facteurs la rendant nécessaire. Ces facteurs semblent
plus démographiques et sociétales, le vieillissement de la population, les seniors de plus
en plus actifs, sont parmi les raisons expliquant cela. L’évolution de la prise de
conscience écologique dans la société actuelle va aussi vers la recherche d’alternatives
aux activités touristiques traditionnelles, telles que le ski. Nous pourrions dire ici que
cette diversification des stations de ski au Québec cherche à répondre -aux crises-, de
manière globale, crise environnementale, crise climatique, crise démographique… en
proposant des « stratégies d’aujourd’hui pour relever les défis de demain »26. Il faut y
ajouter évidemment la crise économique et financière actuelle, dont les effets à long
terme sont encore bien peu visibles mais qui vont dans le sens de ces adaptations
26 Assises du tourisme 2007, compte-rendu des conférences. Ministère du Tourisme Québécois. Mai 2007
La station diversifie son offre en proposant des activités toute l’année. L’automne est mis en avant avec la « grande virée des couleurs » qui concerne les mois de septembre et d’octobre. Les activités sont adaptées à toutes tranches d’ages : VTT sportif, randonnée, tour d’observation accessible en télécabine…
49
complexes à une société en changement. (Nb : la période d’entretiens correspond à la
semaine où l’on apprend la faillite de Lehman Brothers, et donc du début de la crise sur
le plan médiatique, on ne retrouve donc pas ou peu d’évocation de celle-ci dans les
entretiens avec les différents acteurs).
Sur le Saint-Laurent, une tentative de réponse globale aux atteintes à la
ressource touristique
De la même façon, les réponses apportées par les acteurs de la filière –tourisme littoral-
sont des réponses globales, dans lesquelles le changement climatique est un des
paramètres. Ici il est intéressant d’observer deux choses : D’une part les réponses
apportées par les institutions de la région du Manicouagan, symbole du tourisme sur le
Saint Laurent (ATR Manicouagan, municipalité de Tadoussac, Parc Marin du Saguenay
Saint Laurent) ; D’autre part les réponses apportées par la SEPAQ, société d’Etat
gestionnaires des parcs naturels, et donc notamment du Parc Marin du Saguenay Saint
Laurent, autour de Tadoussac. Ces réponses de la SEPAQ, mise en place dans un
contexte global, seront présentées par la suite car dépassant le simple cadre de notre
terrain. Ce sont différents acteurs, qui sont étudiés, mais qui répondent d’un même
objectif : le respect environnemental et par là, la préservation de la ressource
touristique.
Face aux problèmes évoqués précédemment quant à la faune marine de l’estuaire du
Saint Laurent, les institutions de la région du Manicouagan ont décidé de mettre en place
un plan de développement stratégique du tourisme. Il faut noter d’abord que ce plan
émane de la concertation de divers acteurs, aux profils et motivations premières très
différentes. Ce plan a pour objectif de limiter l’activité humaine sur le Saint Laurent, et
par là, d’essayer de limiter les impacts de celle-ci sur la faune. En effet, les constatations
faites de surmortalité sur les espèces sédentaires et de bouleversement des cycles
migratoires des espèces non-sédentaires, bien que favorisé par le changement climatique
(cf : 3.1) n’en sont pas moins que des résultantes de la trop forte activité touristique sur
le fleuve. Les « croisières aux baleines » se sont développées dans un premier temps de
manière anarchique, sans véritable cadre, entraînant toujours plus de bateaux auprès
des animaux. La pollution sous toutes ses formes a alors joué un rôle non-négligeable sur
le bouleversement de cet écosystème (pollution aux hydrocarbures, pollution sonore…).
Le plan met en avant plusieurs mesures réglementaires : nombre maximal de bateau sur
le fleuve, distance minimale pour approcher les animaux, normes techniques quant aux
motorisations…). Cette réglementation s’accompagne d’une stratégie visant à mettre en
avant d’autres types d’activités : activités d’observation des animaux d’abord, mais à
partir d’observatoire situés sur la terre ; Activités d’autres natures, tournées vers
50
l’intérieur des terres (randonnée, canoë, ski sur sable…). C’est donc une recherche de
l’équilibre optimal, entre une activité touristique et un respect de l’intégrité
environnementale, qui est l’objectif numéro 1 du plan. Le tourisme apparaît alors, non
pas comme une activité pourvoyeuse d’atteintes environnementales, mais au contraire
comme un moyen de préservation par la valorisation de l’espace naturel. Le Centre
d’Interprétation des Mammifères Marins de Tadoussac en est une bonne illustration : ce
« musée » géré par un groupement scientifique, le GREMM27, est un outil d’explication du
territoire et du plan stratégique, auprès des touristes. On y découvre le rôle des
scientifiques et la fragilité du milieu, on peut aussi contribuer de manière financière au
travail des chercheurs, en payant son billet d’entrée d’abord, mais aussi, de manière plus
improbable, en « adoptant » un bélouga…
L’échelon global : entre communication, études scientifiques et capacité
d’actions parfois limitée
Il faut d’abord remarquer que pour l’ensemble des acteurs de l’échelon provincial
(Ministère, SEPAQ, ASSQ), le rôle de mise en réseau est primordial. Leurs positions
stratégiques en font les interlocuteurs privilégiés de l’échelon local, en termes
d’information et de mutualisation des moyens. Les exemples de chacun illustrent cela. A
la SEPAQ cela se traduit par la publication annuelle d’un « guide conseil », reprenant les
études effectuées, les axes stratégiques et les actions préconisées par l’association. De
même, tous les ans, un congrès permet de réunir les stations membres du réseau et de
favoriser les discussions et débats. La SEPAQ, quant à elle, et plus particulièrement le
réseau Parcs Québec, met en place la concertation en organisant avec chaque parc deux
à quatre « tables d’harmonisation » par an. Ces rencontres, réunissant les représentants
de la société d’Etat et les directeurs de parcs permettent d’avoir une vision de l’état des
choses sur les territoires locaux et de mettre en avant le cadre global. Enfin, le Ministère
du Tourisme, apparaît en fil rouge dans la concertation, des partenariats existent entre
lui et les associations sectorielles (notamment la SEPAQ), ensuite il est lié aux territoires
locaux via les ATR (Association Touristique Régionale), avec lesquelles des « contrats de
développement » sont passés. Le partage de l’information et la communication sont
assurés de manière particulièrement efficace via le réseau de veille en tourisme. Ce
réseau, créé par la Chaire de tourisme de l’université du Québec à Montréal (UQAM) et
financé par le Ministère, fait de la veille stratégique et prospective sur le thème du
tourisme dans sa grande transversalité. Le partage de l’information est rapide,
notamment via l’envoi mensuel d’un bulletin, le « Globe Veilleur » sous le format d’une
newsletter informatique.
27 Groupement de Recherche et d’Etude des Mammifères Marins
51
Il est donc évident que ces organismes globaux sont des acteurs primordiaux de la
concertation entre les territoires et la Province, néanmoins nous pouvons affirmer que
leurs moyens d’actions sont passablement limités. La mise en place et la réalisation
d’études est la principale action de l’échelon global : études sectorielles, études de
marchés, études scientifiques… Les exemples sont nombreux et commencent à émerger
sur le thème du changement climatique et du tourisme. Le Ministère du Tourisme est par
exemple intégré aux travaux du consortium Ouranos, ce rassemblement de quelques 250
scientifiques québécois et, plus largement, canadiens, a été créé en 2001 par le
gouvernement du Québec. Ses missions sont d’acquérir et de développer les
connaissances sur le changement climatique, et d’étudier la question de la vulnérabilité
sociale, économique et environnementale, du phénomène au Québec, en Amérique du
Nord, et dans un contexte mondial28. Il s’agit en quelque sorte d’une « émanation
locale » du GIEC, sur le territoire québécois, même si aucuns liens institutionnels
n’existent entre les deux organismes. Mais en sortant du champ de ces études et
recherches, les possibilités d’action des acteurs étudiés sont limitées. Le Ministère n’a
quasiment aucun levier d’actions sur la question du changement climatique29, tant la
problématique est large et le secteur touristique est lui aussi transversal à d’autres
ministères, plus influents. Nous reviendrons sur ce point par la suite.
Dans le précédent paragraphe nous n’avons pas abordé le cas de la SEPAQ, la raison en
est que le constat d’une certaine impuissance dans les actions n’est pas vrai dans le cas
de la société d’Etat. Sa capacité d’action est bien réelle, et sur la question du
changement climatique elle apparaît effectivement dans l’exemple du plan de gestion
environnementale, évoqué en terme de réponses et présenté dés le paragraphe suivant.
La mise en place de ces actions et leur application réglementaire sont favorisées par le
statut même de la SEPAQ. L’institution est en effet une société d’Etat émanant de
plusieurs ministères : le Ministère de l’Environnement et le Ministère des Ressources
Naturelles. Ces deux ministères, relativement influents par ailleurs, ont créé la SEPAQ
comme un « outil concret » pour la gestion des parcs et réserves naturelles. Avec comme
objectif affiché la gestion raisonnée des espaces et, en corollaire, des moyens et un
pouvoir réglementaire pour y arriver. Dans ce contexte la SEPAQ apparaît comme
garante des espaces naturels et a tout pouvoir pour mener à bien sa mission. Sa capacité
d’action est donc forte, et l’exemple du plan de gestion environnementale, tourné vers un
développement durable des espaces, et intégrant la problématique « changement
climatique » est un exemple de cette capacité.
28 Le plan stratégique du consortium Ouranos, Horizons 2004-2009. Mai 2006 29 HENNION, F. Entretien avec M. Antil, Direction de la recherche et de la prospective, Ministère du Tourisme. Septembre 2008
52
2.3 Le développement durable : cadre d’actions et volonté
affichée
Des exemples concrets d’applications
Des exemples illustrent bien la prise en compte du développement durable au Québec, et
la volonté de dépasser les simples mots pour aller vers des actions concrètes, le plan de
gestion environnementale de la SEPAQ est un de ces exemples, nous l’avons abordé
précédemment concernant les réponses apportés pour le tourisme sur le Saint Laurent et
allons maintenant le détailler et l’expliciter.
Le plan de gestion environnemental de la SEPAQ, bientôt appliqué à l’ensemble des 23
parcs du réseau, se veut une application concrète et en adéquation avec les territoires,
du développement durable. Mis en place dans tous les parcs naturels du Québec ce plan
vise à limiter l’impact sur l’environnement des activités humaines et à proposer un
développement raisonné des parcs30. Cette stratégie, élaborée courant 2008, décrit de
façon concrète les moyens de parvenir à l’objectif, en déclinant le plan par secteur
d’intervention (gestion énergétique, gestion de l’eau, gestion des aménagements…), en
subdivisant ces secteurs en thématiques (pour l’exemple de la gestion énergétique ce
seront : les transports, les hébergements, les équipements structurants…), et enfin en
créant pour chaque thèmes des objectifs et des indicateurs d’évaluation précis (toujours
dans l’exemple de la gestion environnementale : diminuer de 20% la quantité de
carburant utilisée par les véhicules des parcs d’ici 2010, diminuer l’émission de GES de
9% d’ici 2010…). L’accompagnement de ce plan devra se faire par les moyens de
concertation déjà évoqués, les « tables d’harmonisation ». Il convient d’ajouter que
l’élaboration de ce plan s’est faite, elle aussi, après un concertation complète des
territoires. Chacun des parcs a été visités par les responsables de la SEPAQ et les
directeurs écoutés, afin de mettre en place un outil efficace et en adéquation avec les
réalités locales. Là encore, le développement durable, dans son volet sociétal, apparaît.
Un cadre de réflexion bien intégré
Même s’il n’existe pas de façon automatique des plans environnementaux tels que celui
de la SEPAQ chez l’ensemble des acteurs, le développement durable apparaît comme un
fil rouge dans toutes les réflexions. Avec pour tous, le sentiment partagé que la
ressource environnementale et territoriale est au cœur de l’activité touristique. Nous
30 HENNION, F. Entretien avec Mme Buissière, Responsable gestion et exploitation à la SEPAQ. Septembre 2008
53
l’avons vu, le cas des stations de ski de la province est particulier, mais là aussi la
ressource naturelle est considéré avec attention, notamment dans la stratégie de l’ASSQ
qui met en avant la recherche de technologies plus « propres » et moins
« consommatrices » en eau et en énergie pour la production de neige artificielle. Cette
conscience de la –nature ressource- pour le tourisme prend tout son sens avec l’exemple
du tourisme sur le Saint Laurent, le plan de développement ayant en objectif numéro 1
une préservation de cette ressource, symbolisée par la faune des cétacés et autres
mammifères marins. Dans ce cas d’étude, la protection, la conservation, sont au cœur
des réflexions et des politiques, la notion de capacité de charge, incontournable dans ce
thème, est mise en avant avec la recherche d’une redistribution de l’espace touristique :
moins d’activité humaine sur le fleuve, redistribution de cette activité dans les espaces
terrestres alentours. De même, la SEPAQ a une vision à long terme de cette protection
de la ressource, l’activité des parcs naturels étant totalement dépendante d’elle. Un
exemple de cette prise en compte concerne l’hébergement dans les parcs naturels, les
constructions « en dur », consommatrices d’espaces et d’énergies (construction,
chauffage, alimentation électrique…) sont remplacées petit à petit par des solutions plus
« douces », notamment des systèmes de tentes équipées, permettant à la fois d’avoir
une empreinte écologique faible et de proposer le confort nécessaire au développement
touristique pour tous. Ces systèmes se développement actuellement, un partenariat a
par exemple été passé avec la société française Huttopia, qui conçoit et vend ce genre de
produit.
Dans tous les exemples cités, et dans l’ensemble des discours étudiés, ce qui apparaît
c’est que cet objectif de développement durable n’est jamais uniquement
environnemental. Parler de la recherche d’un équilibre de développement serait plus
approprié. Les acteurs ne nient pas le développement économique, évidemment
nécessaire et au cœur des stratégies, mais ils l’ajoutent à des concepts sociétaux et
environnementaux qui se doivent d’accompagner le développement, plutôt que de le
contraindre. La SEPAQ, peut être l’exemple le « plus environnemental » étudié, a pour
mission de valoriser les espaces naturels, au delà de la simple conservation. Cela se
traduit par le fait que la commercialisation de l’offre, la promotion, l’aménagement
touristique, soient autant de missions confiées à la société d’Etat. Un même acteur à des
objectifs fort divers, et il nous semble donc que la recherche de l’équilibre de
développement soit favorisé dans ce système. L’exemple du GREMM à Tadoussac ajoute
à cette réflexion, ici ce sont les revenus de l’activité touristique qui permettent, entre
autre, le travail de protection et de sensibilisation des scientifiques. Le tourisme apparaît
comme un outil de protection par la valorisation et l’apprentissage.
54
C’est peut être ça « l’image réelle » du Québec : La recherche d’un équilibre
Bien sur le discours tenu ici peut paraître très utopique, et très formaté, mais il relève
d’un travail de fond, de confrontation des discours oraux issus des entretiens à des
recherches plus approfondis d’exemples et de situations concrètes. Ce discours se fonde
donc sur plus qu’une simple impression.
Au regard de ce travail la province du Québec n’apparaît pas comme particulièrement
« verte », dans le sens développé par l’imaginaire français. Il nous paraît évident ici de
devoir relativiser cette hypothèse qui entourait l’étude. Non, les québécois ne sont pas
plus « écolos » qu’ailleurs. Cela relève de l’implication individuelle de chacun, du rôle
d’association impliquée, de l’effet des médias… La société québécoise n’a pas plus de
grands principes que la société française ou européennes, l’écologie ne rythme pas plus
la vie politique que dans nos institutions, et le secteur touristique entre dans ce cadre. Il
est donc question ici de remettre en cause certain clichés que l’on peut percevoir dans
notre « vieux continent ».
Néanmoins, nous affirmons ici que le Québec est « en avance » sur la question du
développement raisonné et équilibré de l’activité humaine. Par ce terme « en avance »
nous entendons « plus conscient », « plus impliqué », « plus avancé dans la recherche
de réponses aux enjeux ». En effet, même si ce n’est pas l’écologie pure et dure qui
symbolise la société québécoise, son environnement, son histoire, ont joué un rôle sur
les évolutions actuelles. Il semble que là-bas on accepte beaucoup mieux le principe d’un
développement économique nécessaire, mais qui doit être en phase avec la société et
son environnement. Il n’est pas étonnant alors de constater que les principes du
développement durable en soit déjà à la concrétisation dans certains cas, et que le
tourisme apparaît souvent comme un enjeu de protection autant que de valorisation.
Pour expliquer cela il conviendrait d’avoir une réflexion sociologique très poussée et
complexe, à l’image du contexte québécois. Il ne s’agit pas ici de notre propos, certains
facteurs peuvent être mis en avant. La position géographique d’abord, où l’influence
nord-américaine est évidente et définit en partie la société. L’Histoire ensuite, dans
laquelle le Québec a toujours entretenu des lien fort avec son environnement, il a
toujours été la ressource essentielle de son développement, des premières traites de
fourrures à l’exploitation forestière actuelle31. Enfin, les grands espaces ne sont pas qu’un
cliché, et contribuent à la mentalité québécoise que nous ne faisons qu’effleurer
« naïvement » ici.
31 LACOURSIERE, J. ; Une Histoire du Québec. Ed Septentrion. 2002
55
Partie 3 Vers des pistes de réflexion pour le territoire
français
56
Introduction
Dans cette troisième partie il est maintenant question d’interpréter et de mettre en
perspective l’étude du cas québécois. La question centrale de cette partie est de chercher
à constater ou non des possibilités de comparaison avec le cas français.
D’abord nous verrons que l’exemple du Québec est bien particulier, en termes de
contexte géographique, sociétale, politique. Nous verrons donc que la systématisation
comporte des limites.
Mais ensuite, nous mettrons en avant le fait que ces apparentes différences se réduisent
avec des angles d’approches particuliers. Il est possible de sortir de l’exemple québécois
des modèles analytiques comparables à la France. Nous verrons que c’est notamment le
cas pour les stations de ski et leur problème d’enneigement.
Enfin, une fois cette démonstration faite, nous nous attacherons à tirer des
enseignements de l’étude québécoise, afin de mettre en place des pistes de réflexion
pour la France.
57
1. Un contexte particulier
1.1 La situation géographique du Québec rend le contexte
climatique très différent
Des températures beaucoup plus basses au Québec qu’en France, pour des
latitudes identiques
Il résulte du contexte géographique et climatique québécois de grandes différences avec
la France. Nous pouvons résumer la chose en deux points : des saisons beaucoup plus
marquées outre-Atlantique, et des écarts de températures beaucoup plus importants.
Ces différences prennent place alors que la France et le Québec se situent globalement
sous les mêmes latitudes. L’explication de ces différences est à chercher du côté des
courants marins, et de leur rôle de régulateur thermique de la planète. Sans entrer dans
de trop complexes détails le phénomène peut être résumé ainsi : le Gulf Stream, ce
courant chaud localisé dans l’Atlantique Nord, réchauffe les côtes des USA et de l’Europe
de l’Ouest durant son parcours ; En revanche, il est limité dans sa progression vers le
nord du continent Américain par un courant froid descendant, le courant du Labrador. Le
Québec n’est donc pas réchauffé par le Gulf Stream, et au contraire, il se trouve sous
l’influence constante de ce courant froid provenant du Groenland. Il résulte de l’effet de
ces courants des grandes différences de températures entre, d’une part, les parties nord
et sud du continent Nord-Américain, d’autre part, entre la France et le Québec. Les
températures hivernales sont beaucoup plus basses au Québec, les températures
estivales sont relativement semblables, d’où des différentiels annuels de température
plus marqués.
Le graphique suivant illustre ce différentiel, il a été choisi de comparer les températures
mensuelles moyennes des villes de Québec et de La Rochelle. Ces villes ont été choisies
car situées à la même latitude. La situation spécifique de La Rochelle, en bordure de
l’océan, doit influencer quelque peu son climat, néanmoins il s’agit plus ici d’illustrer
globalement l’idée. De plus, le même travail de comparaison a été réalisé entre la ville de
Québec et Paris, les résultats sont très proches de ceux proposés ici.
58
Figure 10 : Comparatif des températures mensuelles moyennes entre la France et le Québec
Températures moyennes - Année 2008
-15
-10
-5
0
5
10
15
20
25
Jan Fév Mars Avril Mai Juin Juil Août Sept Oct Nov Déc
T (°C)
Québec
La Rochelle
Réalisation : F.HENNION, 2009 Source : Environnement Canada / Météo France
L’enneigement n’est pas question d’altitude mais de latitude
La question de l’enneigement diffère donc elle aussi au Québec, car directement liée aux
températures. La neige étant le résultat d’une « solidification » des précipitations, elle ne
se produit qu’à des températures suffisamment bases pour passer de l’état liquide à l’état
solide, soit des températures inférieures à 0°C au sol. Au Québec l’enneigement est donc
question de latitude, en effet au plus on descend vers le sud de la province, au plus
l’effet du courant du Labrador perd de l’intensité au profit de celui du Gulf Stream, ainsi
apparaît un gradient Nord-Sud de températures, des températures moyennes qui
augmentent globalement en descendant vers le sud de la province.
Là où en France les stations les plus hautes en altitudes sont celles qui connaissent les
plus basses températures hivernales, au Québec les choses sont différentes, les stations
les plus septentrionales connaissent les taux d’enneigement les plus importants.
L’altitude des stations québécoises joue un rôle quasi-nul sur les conditions
d’enneigement32. L’ensemble des stations québécoises se situent sur deux massifs très
anciens, les Appalaches et le massif des Laurentides, ces massifs ont des altitudes
relativement faibles dans leur partie canadienne. Ainsi, les plus « hautes » stations
québécoises, le Mont Oford à 853 mètres, et le Mont Sutton à 968 mètres, connaissent
32 HENNION, F. Entretien avec M. Boyer-Lafontaine, Directeur des affaires publiques de l’ASSQ. Septembre 2008
59
des problèmes sérieux d’enneigement ces dernières années car elles se situent au sud-
est de la province, là où l’effet du courant du Labrador est le plus faible ; En revanche, la
station du Mont Sainte Anne, légèrement moins haute (800 mètres) n’a pas encore ces
problèmes, elle se situe plus au nord. Des stations très basses ont même des conditions
de neige plus favorables que les deux premières citées, le Mont Bromont, qui « culmine »
à 172 mètres, à une période d’ouverture hivernale plus longue que les stations du sud-
est.
Le contexte des stations de ski apparaît donc différent, il est intéressant de noter que la
communication de ces stations est elle même différente. Là où les stations françaises
parlent d’abord d’altitude (« plus haute station d’Europe », « au sommet du massif »…),
au Québec les stations mettent d’abord en avant le dénivelé de leurs pistes, ainsi la
station du Mont Sainte Anne apparaît comme la première au regard de ce facteur, avec
625 mètres de dénivelé, alors que son altitude n’est pas la plus importante.
Il semble difficile de parler de « réchauffement » climatique et pourtant…
Dans l’ensemble des discours étudiés nous relevons un certain scepticisme à l’évocation
du terme « réchauffement climatique ». Il est difficile de parler du constat d’un
réchauffement chez les acteurs du tourisme québécois, tant les températures restent
bases au Québec ces derniers hivers. Il est avéré que les périodes d’enneigement sont
légèrement raccourcies, que le Saint Laurent est pris par les glaces un peu plus tard dans
l’année, mais néanmoins l’hiver continu d’être extrême sur une période importante et la
perception qu’a la société québécoise du l’augmentation des températures en est moins
marquée.
Les mots qui reviennent les plus souvent sont « bouleversement », « fluctuations »,
« dérèglement ». Tous s’accordent à dire que le climat évolue, que les événements
extrêmes sont plus fréquents, que les précipitations s’accentuent. Les deux dernières
années sont particulièrement caractéristiques de cette perception : un hiver 2007 doux,
où la neige n’a fait son apparition qu’en janvier ; un hiver 2008 au contraire très froid et
où les tempêtes de neige se sont succédées sans discontinuer ; un été 2008 très pluvieux
(on se souvient des images des hommes politiques français, présents dans la province en
juillet pour célébrer le médiatique 400ème anniversaire de la fondation de la ville de
Québec, protégés par des rangées de parapluie…).
60
1.2 Le système des parcs diffère de nos espaces naturels
Des espaces naturels hors des territoires des collectivités
Dans leur forme, leur organisation, leur structuration, les parcs naturels québécois sont
très différents des parcs naturels français, nationaux ou régionaux. Les espaces naturels
québécois sont de deux sortes : les parcs naturels et les réserves fauniques. Les réserves
sont des espaces régis par le Ministère des Ressources Naturelles, et ont vocations à être
des espaces de chasses et de pêches. Les parcs naturels sont eux régis par le Ministère
de l’Environnement, il s’agit de territoire à triple vocation : « protéger, conserver,
découvrir ». La SEPAQ est la société d’Etat qui gère les deux types d’espaces.
A la différence de la France ces territoires ne sont pas superposés à des territoires
communaux, il s’agit d’enclaves territoriales, dont le gouvernement est propriétaire. Les
échelons « régionaux » et « cantonaux » n’ont pas plus de directive sur ces territoires.
Cette spécificité peut s’expliquer par le contexte nord-américain du Québec, en effet nous
retrouvons ce modèle dans les grands parcs nationaux des Etats-Unis, avec un contexte
de « grands espaces » qui légitime et permet ce modèle. Il est plus facile de libérer de
telles enclaves dans des territoires à très faible densité de population, comme c’est le cas
au Québec. Ce contexte, qui influence aussi la mentalité nord-américaine, notamment
dans la relation de l’Homme avec son environnement, diverge de la France et rend
l’exemple assez spécifique. Les parcs sont donc des espaces fermés, dont il faut
s’acquitter d’un droit d’entrée, et où les horaires d’ouverture sont, là encore,
réglementés. Nous percevons bien là les différences majeures qui existent avec ce que
nous appelons en France un parc naturel.
Avant 1998, au Québec, la gestion et l’exploitation de ces parcs naturels étaient
concédées par le gouvernement à des acteurs privés, qui étaient garant de l’espace, dans
le cadre imposé par la réglementation provinciale. Il résultait de cet état de fait des
différences structurelles et de développement entre les différents parcs, l’objectif
d’équilibre entre protection et valorisation ne semblait pas atteint33. Pour répondre à cela
le gouvernement a décidé, en 1998, de « racheter » chaque concession établie avec les
gestionnaires privés et de créer dans un même temps la SEPAQ, qui a donc remplacé ces
acteurs privés dans la gestion et l’exploitation des parcs. La chose s’est déroulée
relativement bien, l’opinion publique y étant très favorable.
33 HENNION, F. Entretien avec Mme Buissière, Responsable gestion et exploitation à la SEPAQ. Septembre 2008
61
Une gestion structurée et adaptée
Ainsi, aujourd’hui, un seul acteur, directement lié au gouvernement, est responsable du
développement de ces espaces. Nous sommes donc en présence de territoires en dehors
des superpositions administratives et sous l’égide d’un acteur dédié. L’organisation du
réseau apparaît donc « simple » dans sa structuration et son fonctionnement.
Chaque parc et réserve faunique est sous la responsabilité d’un directeur local, qui doit
rendre des comptes à l’organisme central, la SEPAQ, elle-même sous l’égide des deux
ministères évoqués, Environnement et Ressources Naturelles. Cette organisation
pyramidale favorise la concertation et l’opérationnalité du réseau des espaces naturels. Il
faut tout de même ajouter que la concertation, notamment pour la mise en place de
politiques de développement, intègre d’autres acteurs, sortant de la structure
pyramidale : les acteurs territoriaux (ATR, communes avoisinantes), les scientifiques et
associations de protection de l’environnement, les communautés autochtones
éventuelles…
Ce système peut apparaître comme très directif et peu « démocratique » par certains
aspects, mais il nous semble qu’il convient parfaitement au contexte des parcs
québécois, sans comparaison possible avec nos exemples français et européens. Les
conflits d’intérêts sont limités par la non-présence de zones d’habitations permanentes
dans les parcs. Néanmoins, des conflits d’intérêts apparaissent parfois quant aux
ressources naturelles des parcs, l’eau et le bois, qui attirent le secteur industriel. La
gestion de ces espaces peut en être déstabilisée, quand l’intérêt d’autres ministères
apparaît et s’ajoute au contexte. Des exemples, notamment d’installations
hydroélectriques au cœur même des parcs, gâchent un peu ce cadre apparemment
positif.
1.3 Le développement durable inscrit dans les textes
le plan stratégique 2005-2007 du Ministère du Tourisme
Il est intéressant de regarder comment le concept apparaît dans la politique touristique
québécoise, ceci sera fait en étudiant le plan stratégique du Ministère. Le document
étudié ici est donc proposé par le Ministère du Tourisme et adressé au Parlement
québécois. D'une manière plus large sa diffusion publique en fait un document de
communication envers la population, les acteurs intéressés. Ce plan est, à l'heure
actuelle, le seul disponible, une réflexion est en cours sur un nouveau plan actualisé. Des
62
plans sectoriels sont déjà proposés mais le document synthétique est en cours
d'élaboration. Le plan fait apparaître des objectifs classiques de développement :
promotion vers les marchés cibles, réponses à la concurrence, essor économique des
territoires… Mais qu’en est-il du développement durable ?
La première chose intéressante à relever dans ce document c’est la présence du concept
« développement durable du tourisme » en fil rouge dans la réflexion34. En effet, même
s’il n’est pas nommé de façon claire dans tous les paragraphes et autres sections
énoncés, il agit comme un cadre pour l’ensemble du document. Que ce soit dans le volet
marketing, dans les volontés de développement, dans les stratégies commerciales, les
principes d’équités, de durabilité, d’équilibre, sont mis en avant.
En étudiant la sémantique utilisée les choses sont marquantes ; Ainsi, le plan stratégique
se donne pour mission de : « Favoriser, en concertation et en partenariat avec les
intervenant concernés, l’essor de l’industrie touristique dans une perspective de
prospérité économique et de développement durable ». De même, la vision que propose
le plan : « Que le tourisme devienne, pendant toute l’année, une source de richesses
économiques, sociales, et culturelles, pour toutes les régions du Québec, et ce, dans le
respect des principes du développement durable. »
Nous voyons bien ici que le cadre est posé, que l’ensemble du document, et donc de la
stratégie, intègre ces réflexions. Ceci se traduit concrètement dans certaines sections,
notamment dans l’objectif « croissance et pérennité de l’industrie, des ressources et des
communautés impliquées ». Les trois piliers fondateurs du développement durable
apparaissent ici, et montre l’attachement du plan à cette démarche.
La révision de 2007 et la loi de 2009 : Le développement durable devient
réglementaire pour tous les ministères et organismes d’Etat
En dépassant le domaine du tourisme, l’étude du contexte québécois apporte un peu plus
quant aux questions qui nous animent. Le plan stratégique présenté dans la précédente
section s’inscrit en effet dans une démarche plus vaste, de la part du gouvernement
québécois, d’intégrer le développement durable comme cadre à toutes les stratégies,
dans tous les domaines et secteurs. En 2005 a été proposé le Plan de développement
durable du Québec. Celui-ci a fait l’objet d’une loi, et d’un travail de concertation
publique effectué par une commission parlementaire. Cette loi inscrit le développement
34 Plan stratégique 2005-2007 du Ministère du Tourisme
63
durable au cœur de la démarche gouvernementale, en indiquant des règles et indications
claires. Ainsi cette loi :
- établit une définition du développement durable pour le Québec;
- engage le gouvernement à adopter une stratégie de développement durable, une
seule applicable à tous les ministères et à un nombre important d’organismes;
- attribue au Premier ministre la responsabilité de déposer la Stratégie
gouvernementale de développement durable à l’assemblée nationale et d’en
défendre le bilan aux 5 ans;
- engage les ministères et les organismes visés à identifier les actions qu’ils
mèneront pour contribuer à l’atteinte des objectifs gouvernementaux de la
stratégie et à rendre compte annuellement des résultats de leurs démarches;
- instaure des mécanismes d’évaluation et de reddition de comptes en matière de
développement durable afin de mesurer les progrès accomplis. Entre autres, la loi
engage le gouvernement :
En 2007 cette loi a été révisée, un amendement s’est greffé, celui-ci stipule que pour fin
2009 chaque ministère devra proposer un plan stratégique dans le cadre de cette action
gouvernementale. Ce n’est plus une proposition mais une véritable loi qui s’applique.
Dans ce contexte le Ministère du Tourisme révise en ce moment son plan stratégique35.
La SEPAQ, en tant que société d’Etat, doit aussi se conformer à la réglementation, son
Plan de gestion environnementale, déjà largement présenté, est la réponse à ce nouveau
contexte légal.
35 HENNION, F. Entretien avec M. Antil, Direction de la recherche et de la prospective, Ministère du Tourisme. Septembre 2008
64
2. Mais des similitudes qui permettent la mise en
perspective pour le cas français
2.1 Le cas des stations de ski, une problématique comparable
Un modèle identique au Québec comme en France
Nous l’avons démontré, le contexte géographique et climatique du Québec rend
l’exemple bien particulier, et en cela fort différent de notre cas français. Néanmoins
n’est-il pas pour autant possible de se saisir de la question d’un modèle commun ? En
effet, là où il est question de latitude au Québec il est question d’altitude en France,
outre les terminologies et leurs définitions la problématique est commune. Il existe dans
les deux cas un différentiel entre stations, un différentiel opposant d’un côté, des stations
plus au sud, à fort problèmes d’enneigement à des stations plus au nord, sans problème
majeur ; De l’autre, des stations de basses et moyennes altitude, à des stations de haute
et très haute altitude. Dans les deux cas les stations peuvent être placées sur un
gradient, avec en abscisse la « situation » géographique (nord/ sud , basse/haute) et en
ordonnée les conditions d’enneigement. Mis sur une même représentation graphique ces
deux gradients seraient fort proches.
Ce différentiel entre station se retrouve aussi dans les réponses apportées
Nous retrouvons ces points communs dans les réponses apportées de chaque côté de
l’Atlantique. Les stations les plus « favorisées » en termes de neige mise une part
importante de leur développement sur la recherche de technologie d’enneigement
toujours plus efficace, en conservant le ski et les sports de neige au centre de la
stratégie. Les autres stations, plus « pénalisées » adoptent plutôt des stratégies de
diversification de leur offre, tournées vers la mise en avant de nouvelles activités, de
nouvelles pratiques. Attention, il n’est pas dit ici que ces modèles de réponses sont aussi
tranchées, bien sur toutes les stations cherchent à se diversifier, et toutes continuent à
croire en l’industrie du ski, mais à des degrés de prise en compte fort divers en fonction
des situations différentes expliquées plus haut. Il faut ajouter que la fluctuation des
conditions climatiques d’une saison à l’autre rend un peu plus complexe encore la vision
prospective des stations et cela se ressent dans les stratégies.
65
Une évolution « parallèle » entre le Québec et la France
Enfin, dernier point commun aux modèles, les évolutions sont parallèles entre les deux
territoires. Si nous reprenons le gradient proposé, celui-ci évolue dans les deux cas, d’un
côté les « latitudes critiques » remontent, de l’autre ce sont les « altitudes critiques » qui
évoluent dans le même sens. Et dans les deux cas, une question fondamentale peut être
posée et doit être posée : Combien de temps tiendra ce modèle ? Ne va-t-on pas
inexorablement vers une situation où toutes les stations seraient sous le « seuil
critique » ?
Figure 11 : L’évolution parallèle des stations de ski au Québec et en France, tentative de modélisation
Réalisation : F.HENNION, 2009. (Logiciel Illustrator)
66
2.2 L’érosion côtière et autres phénomènes naturels : des
enjeux identiques
L’érosion côtière, une problématique globale
Ce phénomène naturel qui s’accélère avec le changement climatique, touche l’ensemble
du globe terrestre. Ici et là les facteurs aggravant son différents, la gravité des impacts
diverge aussi, mais nous retrouvons le problème en France comme au Québec. Dans
notre cas français, l’érosion se traduit de multiple façon, déperdition de sable sur certains
littoraux ; Au contraire ensablement de baie ou d’estuaire sur d’autres façades littorales ;
Fragilisation de falaises et de côtes rocheuses. L’érosion qui redessine les contours du
littoral français touche le tourisme par un impact sur les paysages et les infrastructures,
comme au Québec. Ici ce sont des exemples forts qui illustrent le phénomène. C’est
d’abord le littoral languedocien qui perd du sable en quantité importante les plages se
réduisent et des apports de sable par engins de chantier est nécessaire chaque année.
Ensuite ce sont les falaises de la côte normande et de la côte d’Opale qui se fragilisent
considérablement, avec des épisodes de fort éboulement fréquent. Dans cet exemple
l’impact sur les infrastructures est direct, avec notamment des zones d’habitation ou des
sites touristiques qui se retrouvent aujourd’hui en bord de falaise, suite à l’effondrement
de celles-ci. Enfin, dans cette liste non exhaustive, comment ne pas parler du cas de la
baie du Mont Saint Michel, où le paysage est bouleversé par un ensablement de la baie,
cela mettant en péril l’écosystème du site mais aussi son identité, si importante dans le
contexte touristique.
Ces exemples nombreux, de part et d’autre de l’Atlantique, ne s’expliquent pas par les
mêmes facteurs. Au Québec nous parlerons des eaux moins souvent prises par la glace ;
En France nous expliquerons le phénomène par le rôle des courants littoraux, de plus en
plus important, et accentué par la hausse du niveau des mers et océans, et par les
épisodes de forte précipitation. Néanmoins, outre le changement climatique qui joue un
rôle dans les deux cas, un autre facteur se retrouve de manière commune : l’activité
humaine, et notamment touristique. Dans les deux cas cette activité favorise l’érosion,
de manière directe (piétinement des espaces, dépassement de la capacité de charge sur
les sites naturels…) ou indirecte (imperméabilisation des sols, aménagements et
constructions qui font évoluer les courants marins, les courants fluviaux…). Ce rôle de
l’Homme dans le processus légitime la prise en compte de l’exemple québécois pour la
France. Il s’agit alors d’observer plutôt les réponses apportées que les causes et
incidences.
67
L’instabilité du climat, un problème commun pour l’activité touristique
Dans la même idée, les fluctuations du climat et l’augmentation des événements
climatiques exceptionnels se retrouvent dans nos deux cas. Encore une fois pour des
raisons propres à chaque territoire. Les études scientifiques actuelles ne permettent pas
encore de tirer des statistiques précises de cette instabilité, mais il est possible de lister
certaines observations, relevant plus d’un constat partagé que d’une réalité
scientifiquement prouvée : des été moins ensoleillés, des précipitations plus fréquentes
en été et en hiver, des épisodes caniculaires plus nombreux, des événements d’orage et
de tempête plus forts et plus fréquents… Ces observations, faites au Québec comme en
France, même si elles ne sont pas établies scientifiquement, sont ressenties par les
sociétés, les médias jouant encore ici un rôle non-négligeable.
C’est ce ressenti qui a une incidence directe sur l’activité touristique. L’évolution actuelle
du tourisme est liée à ces évolutions de perception du climat. Il s’agit bien sur d’un
facteur parmi d’autres (évolution démographique, évolution de l’organisation du travail,
évolutions technologiques, évolution des mentalités…). Le climat agit donc en
transformant les habitudes touristiques et en obligeant les professionnels du secteur à
s’adapter36. Le tourisme s’oriente vers de plus en plus de courts séjours, le touriste limite
ainsi le risque de « gâcher » ses vacances en les répartissant sur l’année et en
minimisant le risque de mauvais temps. De même, le tourisme est de plus en plus régit
par l’idée de « dernière minute », le touriste attend d’être sur des conditions climatiques
avant de projeter son séjour. Il peut décider au dernier moment d’un départ comme de
l’annulation d’un séjour. Nous constatons donc de nouveaux modes de consommation, de
nouvelles répartitions des temps de vacances. Les touristes ne sont pas forcément
pénalisés par le climat, ils trouvent des échappatoires, mais le système touristique, lui,
est bouleversé.
Nous ne pouvons pas vraiment parler ici d’un « problème », l’incidence de ces évolutions
n’est pas que négative, des territoires traditionnellement peu touristiques tirent leur
épingle du jeu, de même le patrimoine historique et culturel tend à profiter de cette
nouvelle donne. Il s’agirait donc de parler « d’enjeux », que l’on retrouve partout dans le
monde, et qui légitime donc de s’intéresser encore une fois à l’exemple québécois.
36 MONFERRAND, A. La météo un aléa majeur de la fréquentation touristique. Revue Espaces n°190 : Météo et Tourisme, Février 2002
68
2.3 Le Ministère du Tourisme québécois et son homologue
français, des points communs.
Comme en France, le Ministère du Tourisme québécois à un rôle complexe
Nous ne reviendrons pas sur la définition du tourisme qui illustre bien la transversalité de
ce dernier et donc la complexité de son approche par les institutions. Ce qu’il faut
remarquer ici c’est les caractéristiques communes entre le Ministère du Tourisme
québécois et son homologue français. Par l’étude du cas québécois il nous a semblé
relever des modèles proches pour les deux ministères, dans les rôles, les modes
d’organisations, les travaux et liens avec les autres acteurs gouvernementaux. Même si
au Québec le tourisme dispose d’un ministère, les réalités nous ont parus semblables à
celles du Secrétariat d’Etat français, à savoir un relatif manque de lisibilité et des limites
dans la capacité d’actions. Les divers changements d’affectation qui jalonnent l’histoire
du Secrétariat d’Etat, jusqu’aux changements récents, illustrant bien ce point de vue.
Changement climatique et tourisme : illustration de l’extrême transversalité du
ministère
La question du changement climatique illustre parfaitement les constatations énoncées
dans le précédent paragraphe. Au Québec ce qui est apparu c’est l’aveu d’impuissance du
ministère quant au changement climatique. La démonstration ayant été faite des liens
particuliers qui unissent les deux thèmes nous pouvons nous demander ce qui explique
cette impuissance.
C’est le rôle et le poids d’autres ministères qui compliquent la chose. En effet, nous
l’avons vu, le tourisme intègre des secteurs tels que le transport, l’environnement,
l’aménagement, l’industrie, …. Au Québec il faut également y ajouter les ressources
naturelles. Ces ministères ont historiquement un poids plus important sur l’échiquier
gouvernemental québécois. Le Ministère de l’Environnement par l’histoire des espaces
naturels au Québec ; le Ministère des Ressources Naturelles par l’histoire de l’industrie du
bois et de l’énergie hydraulique ; le Ministère des Transports par son rôle prépondérant
dans le développement de la province depuis toujours. Ainsi, le Ministère du Tourisme,
bien que reliant ces acteurs, n’en a pas moins une faible influence sur les décisions de
chacun. De plus on connaît le rôle de ces secteurs sur le changement climatique,
notamment les émissions de GES par les transports. Au milieu de ce système complexe,
69
d’acteurs aux visions et objectifs parfois fort opposés, le Ministère du Tourisme québécois
a du mal à émerger en tant que preneur de décision et acteur d’influence.
70
3. Facteurs clés de prise en compte
Nous nous proposons ici de synthétiser les idées-clés qui émergent de la monographie de
l’exemple québécois, et qui ont été légitimées par l’analyse précédente, sur les
différences et points communs entre les deux cas étudiés. Il ne s’agit pas d’un plan
d’actions mettant en avant une « recette miracle » trouvée en étudiant le cas du système
touristique québécois. En effet, l’étude ne nous a pas apporté de méthodes précises qui
apporteraient une réponse directe à la prise en compte du changement climatique. Faut-
il en conclure que le Québec en est au même point que la France sur le sujet ? Difficile à
dire tant la complexité est grande. Néanmoins, même si cette « recette miracle » n’existe
pas plus au Québec qu’en France, des constatations ont été faites. Il s’agit d’axes de
réflexion, reprenant des thèmes déjà présents en France, mais sur lesquelles il nous
semble important d’appuyer en s’inspirant de l’exemple québécois.
3.1 L’approche de la question plurithématique et sectorielle
Intégrer le changement climatique à un contexte environnemental plus large
Il convient de ne pas isoler la problématique mais bien de l’intégrer à une réflexion
environnementale globale. Le changement climatique apparaît comme un des facteurs
agissant sur l’environnement, parmi d’autres qu’il faut appréhender en même temps. Les
causes du changement climatique se partagent avec d’autres phénomènes naturels ; De
même ses incidences sont aussi « partagées ». Pour illustrer cela, reprenons l’exemple
du tourisme sur le Saint-Laurent : les bouleversements de l’écosystème du fleuve sont
dus à des facteurs complexes (trop grand nombre de bateaux, développement d’algues
toxiques, réchauffement de l’eau…). Le changement climatique s’insère dans ce système
en étant favorisé par certains facteurs (émission de GES des bateaux) et en favorisant
certains autres facteurs (température de l’eau, développement des algues dû notamment
aux précipitations). Il n’est pas possible de dire « le changement climatique est
responsable de l’évolution de l’écosystème du Saint Laurent », en revanche il y participe,
dans les causes comme dans les conséquences. Ainsi il convient d’approcher la question
environnementale globalement et en prenant le changement climatique comme un
intrant du modèle.
Nous pouvons aller encore plus loin en ouvrant la question à d’autre problématique que
l’environnement, le changement climatique apparaît alors intégré à un système où se
71
mêlent les crises, démographiques, économiques, sociétales, environnementales… Autant
de thèmes qu’il convient d’aborder conjointement.
Adopter une approche sectorielle
Dans cette complexité, afin d’adopter une prise en compte efficace, l’approche sectorielle
apparaît pertinente. Comme il n’apparaît pas possible d’étudier la question de manière
large il faut donc découper le système en sous-système permettant l’étude. Pour nos cas
de l’activité touristique cela peut se traduite concrètement de différentes façons : un
découpage territorial, où le sous-système serait un territoire à grande échelle, limitant
ainsi les données à prendre en compte ; un découpage sectorielle par activité, ici on
centre la réflexion sur une activité précise, de manière là encore à limiter les données.
Il est possible d’illustrer cette réflexion avec l’exemple québécois. Le découpage
territorial est choisi par la SEPAQ, qui prend chacun des parcs du réseau comme un
ensemble cohérent. Il est ainsi plus facile d’évaluer l’intégrité environnementale du
territoire et les effets des phénomènes comme le changement climatique sur celui-ci. Le
découpage par activités est adopté par le Ministère du Tourisme dans ces études. Des
recherches sur l’impact du changement climatique sur le golf, sur la pratique de la moto-
neige, sur le développement des croisières, sont autant d’exemples qui vont dans ce
sens.
3.2 Le développement durable appliqué concrètement
Le passage de simples « mots » à des formes d’action concrètes
Suite à cette prise en compte la question des réponses apportées est à considérer. Ce qui
apparaît d’abord au regard du cas québécois ce sont des exemples pertinents dans
l’approche de la question. Le sujet inquiète, on en parle, on en débat, on évalue les
risques et on estime les évolutions, mais peu d’acteurs vont plus loin. Certes, le sujet est
encore aujourd’hui source de questionnement, notamment sur ses incidences réelles
actuelles et à l’avenir. Néanmoins il nous apparaît pertinent de répondre dès aujourd’hui
à l’enjeu. Ne serais-ce qu’en agissant là où il existe des certitudes, ou sur des secteurs
où l’atteinte environnementale est prouvée, avec le changement climatique comme
facteur favorisant (cf : le tourisme sur le Saint Laurent).
Le plan de gestion environnementale nous semble un exemple particulièrement
pertinent. Il s’agit d’une illustration des principes du développement durable adaptés à
un cadre concret et répondant à des objectifs clairs. L’activité humaine impacte
72
l’environnement, et favorise le changement climatique, le plan va donc vers une
diminution de ces impacts. Le développement économique et sociétale ne sont pas mis
de côté, et accompagnent la stratégie. A ceux qui n’y verraient que des actions
médiatiques, et des effets d’image, nous pouvons répondre que ces questions participent
évidemment à l’ensemble. Dans une vision plus large le développement durable agit sur
l’image d’un territoire, d’une activité, sans que cela soit néfaste, au contraire. La volonté
d’un développement « gagnant-gagnant » doit, à notre sens, être intégré à la définition.
La concertation comme outil majeur
Pour porter la réflexion et la prise en compte sur le sujet, et sur les évolutions plurielles
évoquées plus haut, la concertation apparaît évidemment comme indispensable. Dans le
cadre de prise en compte sectorielle proposé cette concertation doit se faire avec les
territoires, et avec les secteurs d’activité. De « bas en haut » d’abord, afin de
comprendre les réalités locales et particulières ; De « Haut en bas » ensuite, pour faire
comprendre et accepter les cadres réglementaires, les décisions, les propositions. Cette
idée de concertation n’est pas nouvelle, mais est essentielle et doit être, non pas en
périphérie des actions, comme pour se donner bonne conscience, mais bien au cœur de
toutes stratégies. De même, elle doit être mise en place de manière relativement simple
pour plus d’efficacité, et ici apparaît la problématique du mille-feuilles institutionnel
français quant à l’activité touristique.
Le système touristique québécois semble favoriser la concertation, par sa relative
simplicité et son mode d’organisation. Les secteurs d’activités, via leurs « fédérations »
provinciale le montrent (l’ASSQ, la SEPAQ, des modèles simples, pyramidaux). Les
territoires appliquent eux aussi ce modèle (les communes, les ATR, le Ministère, des
acteurs relativement peu nombreux). Cela se traduit par des exemples techniques de
concertation qui ont été présentés tout au long de ce document. Attention il faut
relativiser ici ce côté apparemment très efficace. Premièrement certains de ces systèmes
ne sont pas applicables en France, l’organisation du réseau des parcs naturels en étant la
parfaite illustration. Ensuite, les échanges entre ces différents systèmes ne sont eux pas
très développés, ainsi le Ministère n’a que peu de contact avec les associations telles que
l’ASSQ. Enfin, nous n’allons pas ici vers le parti pris d’une nécessaire « réduction » des
échelons territoriaux en France, encore une fois sur ce point l’exemple du Québec est
différent et ne relève pas des mêmes questions qu’en France, nous sommes plus d’avis à
une « optimisation » du système des échelons territoriaux (dans les compétences, les
organisations, les attributions…), pour plus de lisibilité et d’efficacité, tout en conservant
le cadre particulier du découpage institutionnel français.
73
Conclusions de l’étude
Retour sur l’étude et ses limites
Cette étude tente donc d’apporter un regard local et précis sur un sujet global et
complexe. Par l’observation de l’exemple du Québec, dans la prise en compte du
changement climatique par le système touristique, ce travail cherche à apporter un
regard pragmatique sur le problème.
Le sujet du tourisme face au changement climatique est au cœur des réflexions actuelles,
et apportent son lot de questions et de débats. Le mémoire prend ici le parti d’étudier les
réalités locales de la perception du phénomène, et de les mettre en liaison avec une prise
en compte globale et large. Ceci afin d’aller vers l’acquisition, et la mise en place, de
méthodes pertinentes pour le territoire français, afin de répondre au décalage constaté à
l’heure actuelle.
Il faut bien sur ici prendre en compte les limites de ce travail. Le système étudié n’est
qu’une partie de la grande complexité qui définit le domaine touristique, même s’il a été
mis en place de la manière la plus pertinente possible, il n’étudie qu’une partie de la
question et apporte donc des réponses sur des secteurs bien précis. La généralisation est
donc limitée et l’application possible sur des points particuliers. Notons par exemple
qu’un acteur phare du système touristique, le touriste lui même, n’est que peu étudié ici.
Il s’agit là d’une sérieuse limite au travail, mais l’approfondissement de cette question
pourrait être l’objet d’une étude à part entière.
Le cas du Québec apporte un éclairage nouveau
Notons d’abord que le Québec n’apparaît pas plus « vert » que la France dans les faits. Il
existe un imaginaire fort de la province en France, synonyme de nature sauvage et
d’environnement protégé, néanmoins nous avons pu constater que ces impressions ne se
traduisent pas vraiment sur place, ou alors qu’elles s’expliquent par des facteurs
externes qui font du territoire québécois un cas particulier.
Malgré cette contradiction avec une de nos hypothèses le Québec apparaît sur certains
points « en avance » dans la prise en compte du changement climatique. Notamment par
une application concrète des principes du développement durable dans des activités ou
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sur des territoires locaux. En cela l’étude apporte un éclairage intéressant sur la
problématique.
L’analyse de discours et la phase de terrain ont permis de constater de grandes
disparités sectorielles et territoriales dans la prise en compte du phénomène climatique
au Québec. En outre, la méthodologie a permis de faire émerger le développement
durable comme le cadre de toutes les stratégies actuelles de ce système touristique
québécois, notamment via l’inscription du principe de durabilité dans les textes et les
réglementations.
Une mise en perspective possible pour la France
La monographie du cas québécois nous donne des pistes stratégiques pour la France. Le
territoire de la province offre un contexte très particulier et différent du contexte
français. Cela est vrai notamment sur les questions géoclimatiques, mais aussi sociétales
et politiques. Malgré ces différences un modèle commun apparaît avec la France, sur
certains thèmes et enjeux qui peuvent être comparés. Les jeux d’acteurs ont certaines
similitudes de part et d’autre de l’Atlantique, de même les problématique de
l’enneigement, de l’érosion des côtes, des épisodes climatiques, se retrouvent en de
nombreuses similarités. Ainsi il apparaît pertinent d’observer l’exemple et d’y réfléchir en
termes d’adaptation au territoire français.
L’étude du Québec n’a pas mis en avant de « recettes miracles » dans la prise en compte
du changement climatique par le système touristique, mais des pistes de réflexion
émergent. Ces axes stratégiques ressortent de la monographie et sont illustrés
d’exemples pertinents. Ces axes peuvent être résumés ainsi : Une approche sectorielle
d’un phénomène plurithématique, qu’il convient d’appréhender dans sa complexité ; Le
développement durable appliqué concrètement, en dépassant les mots pour des actes
concrets et en mettant la concertation au cœur de la stratégie.
Dépasser les cadres établis
Nous l’avons souvent vu, le changement climatique est lié étroitement au tourisme. Ce
secteur touristique est synonyme de transversalité, et cela se ressent dans le rôle et les
actions des institutions touristiques, souvent limitées par le poids d’autres acteurs et le
manque de lisibilité du tourisme. La question du changement climatique ne devrait-elle
pas dépasser ce contexte ? L’enjeu n’apparaît-il pas encore assez important pour penser
différemment ? L’idée d’un « Ministère de la question climatique » ne devrait-elle pas se
75
traduite aujourd’hui, par l’émergence d’un outil de prise en compte qui dépasserait ce jeu
d’acteurs institutionnels complexe. Il nous semble que la question mérite d’être posée.
76
Références bibliographiques
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- Programme de gestion environnementale des Parcs 2008-2010. Réseau SEPAQ, (septembre 2008).
- Plan directeur 2007-2009 du Parc Marin Saguenay-Saint Laurent
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79
Liste des figures
Figure 1 : Emission globale de CO2 par sous-secteurs touristiques Figure 2 : Part des sous-secteurs touristiques dans l’émission globale Figure 3 : Distribution géographique des impacts du changement climatique sur les destinations touristiques Figure 4 : Le système touristique québécois dans notre étude Figure 5 : Représentation cartographique du terrain étudié Figure 6 : Grille d’analyse des discours Figure 7 : Les mammifères marins au cœur du tourisme sur le Saint Laurent Figure 8 : Phénomène d’érosion à Tadoussac Figure 9 : Diversification de l’offre touristique à la station du Mont Sainte Anne Figure 10 : Comparatif des températures mensuelles moyennes entre la France et le Québec Figure 11 : L’évolution parallèle des stations de ski au Québec et en France, tentative de modélisation
p18
p19
p20
p34
p36
p39
p44
p46
p49
p59
p66
80
Glossaire
� GIEC : Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du
Climat
� DIACT : Délégation Interministérielle à l’Aménagement et à la
Compétitivité des Territoires
� MEEDDAT : Ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement
Durable et de l’Aménagement du Territoire
� OMT : Organisation Mondiale du Tourisme
� GES : Gaz à Effet de Serre
� MIT : Mobilités, Itinéraires, Territoires
� CFC : Chloro-Fluoro-Carbonates
� SEPAQ : Société des Etablissements de Plein Air du Québec
� ASSQ : Association des Stations de Ski du Québec
� ATR : Association Touristique Régionale
� GREMM : Groupe de Recherche et d’Etudes sur les Mammifères
Marins
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ANNEXES
Annexe A : L’imaginaire du Québec, analyse documentaire Annexe B : Organisation de la phase de terrain Annexe C : Guide d’entretien Annexe D : Compte-rendu des entretiens
p82
p100
p99
p98
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Annexe A : L’imaginaire du Québec, analyse documentaire
Document 1
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Contexte du document Il s’agit ici de la couverture du célèbre guide du Routard concernant le Québec. C’est l’édition 2007-2008 qui traite également des provinces maritimes canadiennes (New-Scotland et New-Brunswick). Cette édition s’adresse aux touristes francophones et est publié par Hachette Tourisme. Analyse graphique Le document semble partagé en deux grands ensembles, symétriques. Le premier reprend une photo et le titre « Québec et provinces maritimes », le deuxième est plus classique et est composé du nom « Guide du routard », de l’année d’édition et du logo de la société. La composition générale donne une impression d’horizontalité, avec une succession de couches assez rectilignes. Les couleurs dominantes sont le bleu et le marron. Le bleu, d’abord, se retrouve partout, dans les textes, la photo, le logo. C’est celle qui apparaît dés le premier coup d’œil. Le marron vient compléter le tableau, lui aussi se retrouve dans la photo, dans quelques textes et le logo. Dans le titre le « Québec » est mis en avant, avec un caractère plus important que les « provinces maritimes ». Il faut noter toutefois que ce qui apparaît comme plus grand au niveau des textes est le mot « Routard ». On peut supposer là une volonté marketing forte de faire apparaître en premier lieu la célèbre appellation. En observant la photo qui représente directement la destination étudiée plusieurs éléments apparaissent. La présence de l’eau est forte, elle compose quasiment l’intégralité de cette photo, mis à part un léger bandeau supérieur où l’on retrouve de la végétation. Cette eau ajoute à l’aspect horizontal des choses et à la présence dominante de la couleur bleue. Ensuite, deux personnages se distinguent, il s’agit de deux caribous traversant cette eau et dont on ne distingue que la tête est les ramures. Leur présence vient casser un peu l’aspect plat de la photo et leur couleur marron reprend celle de certains textes et bandeaux. L’ensemble donne une impression de « nature sauvage », caractérisé par une faune particulière et la présence de l’eau. Le marron rappelle un peu l’élément « bois » qui s’ajoute à la composition, et que l’on retrouve dans le bandeau supérieur. A part le logo du Routard on ne distingue aucune présence humaine, que ce soit par des personnages où des constructions, la nature semble vierge et déshumanisée.
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Document 2
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Contexte du document Ici encore il s’agit de la couverture du guide du Routard. C’est l’édition 2006-2007, donc précédant le document présenté plus haut. De la même façon ce guide correspond à la destination Québec mais aussi aux provinces maritimes qui lui sont géographiquement attachées. Analyse graphique Comme pour l’édition 2007-2008 le découpage du document est assez simple, deux grands ensembles de part et d’autre d’une ligne horizontale centrale. Ici encore l’élément supérieur est composé d’une photo et d’un texte, l’élément inférieur comporte, lui, le logo, le nom et les renseignements d’éditions du Routard. Trois couches horizontales successives se distinguent, de la plus large en haut à la plus fine en bas. Dans ce cas on constate une absence de la couleur bleue qui était un point central du précédent document. Ici c’est la couleur marron qui domine, et qui apparaît dans toutes les parties de l’image. Il s’agit de plusieurs teintes de marron, du marron clair au marron foncé, presque noir. Il est à noter que la bande inférieur est très similaire à celle de l’édition 2007-2008, tant dans la forme que dans la couleur, néanmoins c’es une caractéristique que l’on ne retrouve pas dans d’autre guide du Routard, concernant d’autres lieux, c’est donc un élément particulier de cette destination. La typographie est elle aussi semblable d’une édition à l’autre, les éléments constatés plus haut restent valables. Au niveau des éléments qui composent la photo les choses sont en revanche différentes. Ici ce qui prédomine c’est l’homme au centre la photo, sa position et son attitude en font l’élément central, qui attire l’œil. Il est très souriant, la barbe impressionnante, et la chemise à carreaux rouges et noirs attendues. Il tient dans ses mains ce qui ressemble fort à des pancackes et est prêt à y verser le contenu d’une tasse, du sirop d’érable à coup sur ! Il se tient dans l’encadrement d’une fenêtre, non pas d’une maison traditionnelle en pierre, mais bel et bien d’une cabane en bois, dont la couleur marron se rapproche de l’ensemble déjà évoqué. C’est une atmosphère chaleureuse qui se dégage du tableau, non pas par le côté extérieur de la photo, mais bien parce qu’on se projette facilement au coté de ce québécois, lui-même très chaleureux. L’homme est bien présent dans ce document néanmoins il ne donne pas l’impression d’une humanité prépondérante et dominatrice, mais plutôt d’une humanité intégré à son environnement et respectueux de celui-ci.
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1
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Document 3
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Contexte du document Les 5 images proposées ici sont à étudier ensemble, il s’agit en effet d’un diaporama illustrant un voyage organisé au Québec, proposé par l’agence de voyage Aventuria. Ce produit est vendu en ligne, via leur site web www.Aventuria.com et s’intitule « le Québec au naturel ». Ce diaporama est donc présent sur le site pour illustrer le voyage, et se compose de 5 images qui défilent tour à tour. Malgré le nom et la vocation de cette agence de voyage, le produit proposé et assez classique, avec location de voiture et hébergement en gîtes pendant une dizaine de jours. Analyse graphique On fera ici une analyse des documents pris ensemble, sans les décrire un à un. Ceci afin de mettre en avant l’unité qu’il existe dans ces représentations et tirer les grandes tendances que l’on retrouve dans chaque. Les couleurs sont ici encore importantes. D’abord on retrouve ce bleu déjà plusieurs fois présenté, sur 4 des 5 images il apparaît nettement, et est même prédominant sur 2 d’entre elles. De nouvelles couleurs apparaissent sur ces images, il s’agit des tons jaunes, orangés et rouges, que l’on retrouve dans la végétation. Ces couleurs sont mises en avant par des plans larges qui forment des patchworks de végétation. Le vert apparaît lui aussi, toujours dans cette végétation, mais moins prononcé, et surtout sur les pelouses de la photo numéro 2. Les éléments qui se retrouvent sur ces images sont eux aussi intéressant à prendre en compte. Encore une fois l’eau est particulièrement présente, sur 4 des 5 photos il s’agit d’un élément central, sur la dernière, la photo numéro 2, on la devine en arrière-plan. Cette eau est toujours dans un contexte « sauvage », il s’agit d’une eau élément de la nature. La forêt domine elle aussi, avec des représentations d’espaces forestiers immenses, sans limites apparentes. A l’instar des caribous que l’on observait tout à l’heure, c’est maintenant une baleine à bosse qui occupe le centre d’une des images, la faune mise en avant, une faune bien particulière et caractéristique ici encore. Associé à l’élément aquatique on retrouve sur deux photos un canoë, moyen de transport paisible et intégré à son environnement. L’homme n’est présent que sur deux des images, d’abord par des personnages, de taille minime, à bord d’un des canoës, ensuite et surtout, dans l’architecture et la représentation de la ville de Québec sur la photo 2. C’est ici un élément nouveau qui apparaît, la trace de l’homme civilisé, installé et développé. Malgré cela ce n’est pas l’image d’une ville moderne et traditionnelle qui est présentée, mais bien celle d’une ville historique, où les canons et le château Frontenac en arrière-plan rappellent une époque passée. Il s’agit alors plus d’une mise en avant d’un patrimoine que de la réelle place de l’homme. Et même ici, la couleur verte dominante semble rappeler l’importance de l’environnement de la ville et son intégration dans celui-ci.
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Document 4
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Contexte du document La couverture de la bande-dessinée « La belle province », relatant les aventures de Lucky Luke, fait ici l’objet de l’analyse. Il s’agit du 71ème album des aventures du célèbre cow-boy, premier non dessiné et scénarisé par Morris décédé peu avant sa parution. On doit les dessins à Achdé et le scénario à l’humoriste Laurent Gerra. L’histoire de cet épisode de déroule principalement au Québec, où se rend Lucky Luke afin de permettre à son cheval, Jolly Jumper, de retrouver une jument dont il s’est épris et qui se nomme d’ailleurs « Province »… Analyse graphique Deux choses peuvent être mises en évidence quant à la composition du tableau : D’abord une composition horizontale en fond d’illustration. Il est composé de différentes couches qui se superposent et qui font le décor de l’action. Ensuite, une composition verticale en premier plan, où se retrouvent les personnages de l’action. Cette composition verticale est centrale, et est disposée quasiment sur toute la hauteur de la couverture. Le fond se caractérise par trois couleurs dominantes, du bleu prédominant, pour les ¾ de l’image, du vert, et du marron clair pour compléter le tableau. Le premier plan reprend lui des couleurs plus traditionnels dans l’univers de Lucky Luke, et pas forcément caractéristique à cette représentation. En revanche le marron du personnage situé en bas de l’image s’ajoute à la composition et occupe un large espace. Sans revenir sur les personnages de Lucky Luke, Jolly Jumper et Rantanplan, généraux à tous les albums de Morris, plusieurs éléments apparaissent. On retrouve l’eau sous la forme d’une petite rivière, qui traverse l’image. Les alentours de cette eau sont composés de terre et d’herbe. On peut distinguer, en haut à droite de l’image, la présence de végétation sous forme de feuille d’arbre, à la teinte rouge très prononcée. Le personnage situé en bas de l’image est un orignal (ou élan), encore un représentant de cette faune caractéristique. Ses traits sont humanisés et son expression pas franchement dynamique, cela rejoint ici les nombreuses représentations de cette animal, aux allures « grossières » mais impressionnant. Enfin, un dernier élément apparaît, un panneau vertical où s’inscrit le mot « Québec » et où l’on peut voir la représentation d’une fleur de lys, emblème de la province. Il est intéressant de noter que ce panneau reprend vaguement la forme des panneaux de signalisation de l’on peut retrouver au bord des routes qui traversent le Québec.
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Document 5
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Contexte du document Dans cet exemple, plus d’image ou d’illustration, mais un texte, qu’il est intéressant d’analyser. Ce texte sert d’introduction au site Internet d’un « amoureux du Québec » comme il se caractérise lui-même. Sur ce site personnel cet internaute nous propose des récits illustrés par des photos de ces différents séjours dans la province. Ce voyageur est français et a effectué trois voyages au Québec, entre 1998 et 2000. Analyse de texte Ce site http://membres.lycos.fr/lucet/quebec/, est d’apparence assez sobre et ne semble pas relever de grandes capacités en matière de réalisation de sites web. Il s’agit plus d’un espace où entreposer ces photos et ces textes, simplement. C’est sur le texte d’introduction du site que nous allons revenir. Ce texte est donc relativement court, composé de six phrases, mais intéressant car on perçoit que dans ce court espace l’auteur essaye de mettre un maximum de chose sur ces ressentis et ces sentiments quant à la destination. Il est articulé en deux temps, d’abord un texte vraiment introductif, où l’on retrouve l’essentiel des choses à prendre en compte, ensuite, une deuxième partie, où sont proposés des liens hypertextes pour aller jusqu’au albums photo de chacun des voyages. Si l’on s’intéresse maintenant aux champs lexicaux présents dans ce texte, plusieurs choses apparaissent. D’abord le thème de la nature, de l’environnement, est fortement présent, on retrouve les mots :
- nature / air / lac /paysage
A noter que ce qui compose ici la nature c’est donc l’élément « eau » et l’air qui servent de cadre aux paysages. Ensuite, un autre champ lexical apparaît, relatif cette fois au rêve, à l’émerveillement, on retrouve les mots suivants :
- rêves / émerveille / rêve si fort / chance / merveilleux
On peut ajouter à ce champ le terme « contrées lointaines » qui revient deux fois et qui ajoute à ce côté féerique, irréel, du voyage au Québec. On remarque qu’il n’est quasiment pas fait mention d’éléments tangibles et matériels que l’auteur a pu découvrir pendant ces voyages, à peine est évoqué une « maison en rondins de bois », qui semble plus s’ajouter au premier champ étudié. L’impression générale est celle d’un « pays » merveilleux, où toute la place est laissée aux rêves et à l’enchantement, plutôt qu’au tangible, au concret… Et cela malgré déjà trois voyages sur place de la part de l’auteur.
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Document 6
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Contexte du document Ce document est la couverture d’une brochure publicitaire éditée par Tourisme Québec, l’ancien organe de promotion touristique du ministère québécois (devenu aujourd’hui Bonjour Québec). Editée en 1996 cette brochure était destinée au public français via les représentations québécoises en France. Il s’agit d’une brochure composée de 3 recto-verso agencé en volet. Dans sa version originale la brochure est sous le format 24*32. Les photos composant la couverture qui est ici étudiée, sont de Sylvain Majeau et Robin Edgar, pour le compte de Tourisme Québec. Analyse graphique D’abord la composition d’ensemble : le plan général est horizontal avec de nombreuses lignes droites qui traversent le document de part en part. Plusieurs strates horizontales se distinguent donc de bas en haut, d’abord le texte « Québec – Canada », puis une photographie reprenant ces lignes horizontales, et enfin une dernière bande sur laquelle vient s’ajouter une photo qui romps légèrement cet alignement horizontal. La couleur bleu domine nettement sur le document, à la fois dans les bandes aux deux extrémités et dans les deux photos centrales. Cette couleur se retrouve vraiment partout, avec quelques nuances de bleus, jusque sur les toits de la photo du bas. Le texte, même s’il est limité, est intéressant à étudier. On constate que le titre « Québec » et écrit bien plus grand que le sous-titre « Canada », et au dessus de ce dernier. Ce titre attire l’attention et est visible dés le premier coup d’œil alors que le sous-titre n’est visible qu’après coup, en portant son attention expressément sur la bande bleu qui l’entoure. Plusieurs éléments apparaissent sur le document. D’abord l’eau, élément central, au même titre que la couleur bleue précédemment présentée. L’eau apparaît dans la photo principale, mais c’est aussi la trame de fond des deux bandeaux extrêmes. Ensuite la photo centrale propose plusieurs éléments à prendre en compte, deux personnages, on suppose un couple, à bord d’un canoë, et devant un petit hydravion. On ne distingue que la silhouette de ces deux personnages qui se découpe face au soleil rasant de l’arrière-plan. Les derniers éléments se retrouvent, d’une manière plus réduite, dans la photo située en bas. Ce sont des maisons anciennes, de style assez classique, devant lesquelles passe une calèche. De la végétation vient compléter le tableau de cette photo. L’impression d’ensemble dégagé par le document est celle d’un espace vaste et calme. On imagine qu’aucun bruit ne vient troubler les tableaux des deux photos.
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Document 7
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Contexte du document Ici encore il s’agit d’un document émanent d’un organisme québécois, et adressé à un public français. Cette publicité est proposée par Air Canada, compagnie nationale canadienne, desservant le Québec. Cette publicité a été diffusée à l’occasion du 400 ème anniversaire de la fondation de la ville de Québec, et se trouve alors dans une brochure distribué par la ville. Elle vise à promouvoir les vols reliant Paris à Québec, via Montréal ou Toronto. C’est donc bien la destination « Québec-ville » qui est mise en avant, néanmoins il est possible de l’analyser dans notre but. Analyse graphique Le document comporte ici un montage photo sur le quasi totalité de la page, un bandeau de texte dans la partie inférieure, et une zone de texte intégré au haut de l’image. Cette zone de texte met en avant la destination et la facilité de communication entre celle-ci et Paris. Le bandeau inférieur concerne la compagnie et les modalités de réservation. Le montage infographique est composé d’une photo servant de décor et d’un personnage plus ou moins dessiné qui se trouve dans ce décor. La photo en elle-même à un arrière-plan horizontal, où des strates se superposent, et un premier plan situé sur la droite de l’image, et à la dimension plus verticale. La couleur bleu prédomine encore, sur tout le fond de l’image, avec même une coloration bleuté pour la végétation qu’on y découvre. Du bleu foncé au bleu très pale des nuages, on retrouve plusieurs nuances de ce bleu sur toute la hauteur du document. La composition verticale de droite prend, elle, des teintes grisâtres, il s’agit d’une mise en noir et blanc de l’objet. Les éléments que l’on trouve dans le décor sont d’abord, l’eau sous la forme d’un lac, la végétation avec une colline boisée, le ciel bleu et clair, ainsi qu’un nuage qui vient faire le lien entre le lac et le ciel, et donne un côté un peu fantasmagorique à l’ensemble. Les autres éléments que l’on peut trouver se situent dans la composition verticale. D’abord une cabane en bois, situé directement sur le lac, et où est assis un homme relativement jeune, dans une attitude contemplative. Ce personnage est habillé de manière assez sophistiqué, pantalon de costume et chemise blanche, et semble plus rattaché à un environnement de bureau plutôt qu’à cette cabane. On a ici une proposition de mélange entre une certaine modernité et un cadre plus typique et nature. Les derniers éléments que l’on peut remarquer sont une succession de feuilles d’érables représentées entre la photo et le bandeau inférieur, elles viennent ici à la fois s’intégrer au décor du lac, et se rapprocher du logo de la compagnie canadienne.
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Je reviendrai à Montréal, Robert Charlebois
Je reviendrai à Montréal
Dans un grand Bœing bleu de mer J'ai besoin de revoir l'hiver Et ses aurores boréales
J'ai besoin de cette lumière Descendue droit du Labrador Et qui fait neiger sur l'hiver
Des roses bleues, des roses d'or
Dans le silence de l'hiver Je veux revoir ce lac étrange Entre le cristal et le verre
Où viennent se poser des anges
Je reviendrai à Montréal Ecouter le vent de la mer
Se briser comme un grand cheval Sur les remparts blancs de l'hiver
Je veux revoir le long désert Des rues qui n'en finissent pas Qui vont jusqu'au bout de l'hiver Sans qu'il y ait trace de pas
J'ai besoin de sentir le froid
Mourir au fond de chaque pierre Et rejaillir au bord des toits
Comme des glaçons de bonbons clairs
Je reviendrai à Montréal Dans un grand Bœing bleu de mer
Je reviendrai à Montréal Me marier avec l'hiver Me marier avec l'hiver
Document 8
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Contexte du document Ici est proposé un nouveau type de document, une chanson, il s’agit de « Je reviendrais à Montréal » par Robert Charlebois. Cette chanson apparaît pour la première fois, en 1976, sur l’album Longues distances du chanteur québécois. Elle devient vite un tube et est aujourd’hui fortement rattaché au chanteur. Il faut ajouter que seule la musique est ici de Charlebois, les paroles sont de Daniel Thibon, compositeur québécois lui aussi. Comme son nom l’indique cette chanson a pour thème principal Montréal, capitale économique du Québec, mais ici encore le cadre de la chanson dépasse celui de la ville et propose une réflexion sur la province. Analyse de texte La chanson est composée de 7 paragraphes agencés en 2 couplets et un refrain qui revient 3 fois. Le rythme des phrases est inchangé tout au long de la chanson, des vers de 8 pieds sur un tempo relativement lent. Ce rythme colle bien avec l’idée de nostalgie que véhicule la chanson.
L’analyse lexicale apporte beaucoup quant à notre étude. Le premier de ces champs est celui de l’hiver et du froid, qui transite de bout en bout de la chanson. On retrouve les termes :
- hiver / neige / blanc / froid / glaçons / blanc / aurores boréales
Le thème de la nature et des grands espaces s’ajoute aussi, reprenant même certains termes évoqués précédemment, on retrouve :
- aurores boréales / lumière / roses / lac / vent / mer / désert / n’en finissent
pas Ensuite, le champ lexical de la ville, de la construction est aussi évoqué, il faut noter qu’il s’agit alors d’une évocation de la ville ancienne, plus que de la modernité ou du XX ème siècle. :
- remparts / rues / pierres / toits
Enfin, un dernier champ lexical vient donner un cadre presque irréel à l’ensemble :
- étrange / ange / cristal / cheval blanc
Des éléments spécifiques se retrouvent. L’eau est encore évoquée, par le biais de la mer, l’auteur soulignant le bleu de celle ci. S’il fallait donner une couleur à cette chanson ça semblerait être un mélange entre le blanc de l’hiver et le bleu de la mer.
Annexe B : Organisation de la phase de terrain
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Annexe C : Guide d’entretien
Section 1. Présentation du travail
- Le sujet - Mon travail et son contexte - Le pourquoi d’un entretien avec l’interlocuteur
Section 2. Présentation de l’acteur
- Présentation de la structure - Présentation du rôle de l’interlocuteur
Section 3. Perception du changement climatique
- Perception spécifique du changement climatique dans l’activité ? - Degré de perception - Caractérisation du changement climatique (enjeu, aléa, risque, catastrophe…) - Perception des échéances
Section 4. Réponses apportées
- Réponses spécifiques ? - Degré des réponses : Adaptation ? Simple prise en compte ? Action sur les effets
du changement climatique ? - Cadre des réponses : Incitation ? Stratégie ? Politique forte ? - Echéance, programme, des réponses
Section 5. Liens « global/local » (le sens des questions dépend de l’interlocuteur)
- Homogénéité dans la prise en compte ? - Coopération effective entre les échelons ? - Méthodes de coopération, de mise en réseau…
Section 6. Le développement durable comme cadre des stratégies ?
- S’inscrit-il dans la réflexion ? - Le changement climatique et sa prise en compte sont-ils reliés à ce cadre ? - Cadre de toutes les réponses ou simple élément intégré à la réflexion ?
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Annexe D : Compte-rendu des entretiens ENTRETIEN n°1 Acteur : ASSOCIATION DES STATIONS DE SKI DU QUEBEC Interlocuteur : Alexis BOYER-LAFONTAINE Date : 09/09/08 Lieu : Montréal Durée de l’entretien : 50 min Section 1. Présentation du travail
Section 2. Présentation de l’acteur
Association non-gouvernementale, l’ASSQ est un regroupement des propriétaires et gestionnaires des stations de ski québécoise. Il s’agit en quelque sorte du « MEDEF québécois des stations de ski » (dixit Alexis Boyer-Lafontaine). Les fonctions de l’association sont d’aider le développement des stations, faire la promotion des sports d’hiver au Québec, et d’assurer la pérennité de l’activité en finançant ou en effectuant des études sur les thèmes et questions inhérents au secteur. M. Boyer-Lafontaine est directeur des affaires publiques au sein de l’ASSQ, en ceci il est responsable de la communication de l’association avec l’extérieur. Section 3. Perception du changement climatique L’activité des sports d’hiver est marquée par une augmentation importance des amplitudes climatiques d’une saison à l’autre. Certains hivers ont été relativement doux (2006 et 2007 par exemple), alors que l’hiver 2008 a été particulièrement froid et enneigé. C’est ce dérèglement qui est perçu, plus qu’un réchauffement climatique. La perception est très différente dans les différents secteurs géographiques du Québec. Les cantons les plus au sud perçoivent déjà des difficultés d’enneigement et le raccourcissement des saisons hivernales. Plus au nord par contre, ce changement climatique ne semble pas affecter les conditions d’enneigement, certains parlent même d’enjeu quant au report des marchés des stations du sud et des USA vers leurs propres destinations ! Le changement climatique se perçoit localement pour les stations québécoises. Les différences locales se retrouvent dans la caractérisation du phénomène. Pour les stations des Cantons de l’Est, au Sud-Est du Québec, on parle d’un véritable risque : d’abord l’aléa est observé, avec des températures de plus en plus douce en hiver et un enneigement particulièrement faible, ensuite l’enjeu est important car ces stations correspondent traditionnellement aux destinations du marché montréalais, tout proche. Comme expliqué précédemment, les stations plus au nord, moins touchés par le phénomène climatique, parle plutôt d’opportunités, et perçoivent donc le changement climatique plus comme une « chance » à titre individuel. Ici encore les perceptions sont différentes selon la localisation des stations. D’une manière globale l’ASSQ a une double approche : vision sur le long terme par le
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financement d’études et la participation aux groupements de réflexion, mais aussi vision à court terme d’une réelle opportunité pour le développement des sports d’hivers au Québec. Section 4. Réponses apportées D’une manière globale un défi d’adaptation se pose. A l’heure actuelle l’ASSQ cherchent à identifier :
- Les enjeux - Les conséquences - Les moyens à mettre en œuvre pour cette adaptation -
Il s’agit avant tout d’une question d’argent pour les adhérents de l’association. En effet les recherches ont pour objectifs d’anticiper les demandes de prêt à faire auprès des financeurs. Un virage est en train d’être amorcé quant aux techniques de fabrication de neige, une course à la technologie est en route chez les grandes stations de la province pour produire plus à des dépenses énergétiques faibles. La réflexion sur le développement d’activités « hors-neige » est aussi à l’ordre du jour. Pour l’instant, seules les très grandes stations du territoire ont une réelle offre estivale, qui n’a néanmoins pas le même poids économique que l’offre hivernale. Les petites stations, plus nombreuses, n’ont pas de vocation estivale et mise tout sur la saison d’hiver, même dans le contexte actuel. Les réalités sont là encore très différentes selon les échelles. L’adaptation passe aussi par l’essor d’activités hivernales autres que le ski (moins consommatrice d’espace, d’énergie, avec un effet plus limité sur le climat). Néanmoins, bien que conscient de cela, les efforts d’adaptation sont principalement tournés vers la technologie autour de la filière « ski ». Enfin, une adaptation dans la communication est aussi envisagée. L’idée est de montrer aux gens que malgré des conditions d’enneigement faibles dans les vallées, les domaines skiables sont eux praticables. Les chutes de neige moins importante dans les villes, les épisodes de pluies hivernales plus présentes, créent chez les population des a priori sur l’enneigement des stations. Il y a donc toute une réflexion à avoir en ce sens pour l’ASSQ. Section 5. Liens « global/local Les 80 stations du Québec, réunies au sein de l’ASSQ, sont régies par des systèmes et des contextes très différents. Entre les très grandes stations (Mont Sainte Anne, Mont Tremblant) véritables « entreprises », et les stations plus petites, parfois publiques, avec une vocation plus locale, les enjeux sont divers. A ce titre l’ASSQ se définit plus comme un organe de communication global que comme un réel réseau de stations. La publication d’études, le partage d’informations, sont effectifs mais il n’en résulte pas d’incitation à une stratégie globale. L’association met à disposition des outils, un cadre de réflexion, ensuite libre à chacun de se sentir concerné et d’agir en ce sens. Par exemple, l’ASSQ a publié en 2008 un guide de gestion environnementale pour les stations de ski, inspiré de l’association équivalente au Etats-Unis, la NSSA. Ce guide met en avant des facteurs clés de « réussite environnementale » mais reste au stade du conseil plutôt que de l’incitation.
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Section 6. Le développement durable comme cadre des stratégies ? Le développement durable est ici un fil rouge qui dépasse la simple action de l’ASSQ. En effet la politique touristique de la province du Québec est très poussée en ce sens, les stations de ski doivent respecter un cadre définit par le Ministère du tourisme. Le développement durable n’apparaît pas comme un cadre stratégique mais plus comme une obligation. Néanmoins, l’ASSQ relève une certaine unanimité des acteurs des stations quant au bien fondé de cette démarche, l’opportunité de développement ne pouvant être assurée que si le patrimoine naturel est préservé.
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ENTRETIEN n°2 Acteur : MINISTERE DU TOURISME Interlocuteur : Thomas ANTIL Date : 11/09/08 Lieu : Québec Durée de l’entretien : 45 min Section 1. Présentation du travail
Section 2. Présentation de l’acteur
Le Ministère du Tourisme québécois n’existe en tant que tel que depuis 2005, avant il s’agissait d’un secrétariat d’Etat. Concernant ses missions, les textes indiquent que : « le ministère du Tourisme favorise, en concertation et en partenariat avec les intervenants public et privé, l’essor de l’industrie touristique dans une perspective de prospérité économique et de développement durable. ». En outre ses missions relèvent des orientations suivantes :
• Orienter et concerter l’action gouvernementale et privée en matière de tourisme. • Assurer la mise en marché du Québec et de ses expériences touristiques. • Amorcer l’implantation du tourisme durable. • Susciter et soutenir le développement de produits touristiques. • Offrir et encadrer des services à la clientèle touristique en matière d’accueil, de
renseignements et de réservations touristiques. • Assurer l’implantation du Plan de gestion des ressources humaines.
M. ANTIL est responsable du transfert des connaissances à la Direction de la Recherche et de la Prospective au sein du Ministère. Il est l’interlocuteur privilégié sur ces questions car, comme on le verra par la suite, il s’agit d’un sujet qui en est au stade des recherches et des études. Section 3. Perception du changement climatique Au niveau global du Ministère la question du changement climatique se pose essentiellement pour la filière «ski». Il s’agit pour lui d’anticiper les effets et de répondre aux besoins de renouvellement d’infrastructures vieillissantes. En ce sens un programme d’aides est actuellement en cours à destination des territoires, la question centrale est l’adaptation de la filière aux évolutions en cours, le changement climatique s’inscrit en filigrane dans la réflexion. D’autres secteurs touristiques sont touchés par le phénomène, et donc observés par le Ministère :
- la filière « golf : depuis quelques années on constate l’apparition de champignons de plus en plus présent sur les parcours, ces micro-organismes profitent de températures plus élevées et de conditions d’humidité plus importantes. De même, on constate plus de périodes de fortes chaleurs, ou à l’inverse de fortes pluies. En conclusion les saisons golfiques sont plus longues mais dans des conditions plus mauvaises, ce qui pose nécessairement un besoin d’évolution.
- Le tourisme polaire fait lui aussi l’objet de nombreuses attention. Dans ce cas l’impact du changement climatique se fait très fortement ressentir, avec la fonte des glaces et le dégel du permafrost, de nombreuses infrastructures sont en péril. On pourrait penser que cette forme de tourisme reste marginale au Québec mais
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il existe néanmoins une forte demande quant au tourisme de chasse et de pèche qui prend place sur les territoires polaires. De même 2 parcs naturels québécois se localisent dans le « Grand Nord ». Ces territoires n’ont certes pas un intérêt économique primordial mais en revanche ont une vraie action structurante au niveau local, notamment pour les populations autochtones vivant sur les territoires concernés, ceci justifiant entre autre l’intérêt de la réflexion du Ministère.
Section 4. Réponses apportées Le stade actuel de la prise en compte se traduit par de nombreuses études et recherches sur le sujet. En premier lieu des études reliant directement le changement climatique et ses effets au tourisme : études sur le ski, le golf, la motoneige. Ces thèmes ont été les premiers étudiés car ils répondent d’infrastructures physiques, relativement simples à appréhender. Une étude sur le tourisme de croisières, dans le contexte des évolutions apportées par le changement climatique doit être prochainement lancée. Ensuite, d’autres thèmes ont été observés ou en cours d’observation, moins directement liés au tourisme et plus difficile à appréhender : les écosystèmes et la biodiversité, avec notamment une étude sur la migration des troupeaux dans le Grand Nord, une étude est également en cours sur l’érosion côtière. M. Antil fait remarquer que le problème des températures et de l’enneigement ne se pose pas de manière simple au Québec : la nordicité amène des températures toujours froides sur le territoire, et donc l’augmentation des épisodes pluvieux se traduit paradoxalement par plus de neige, la question réelle est celle des fluctuations de plus en plus importantes d’une saison à l’autre et donc une augmentation des incertitudes. Section 5. Liens « global/local En ce qui concerne directement le changement climatique il n’existe pour l’instant pas de ligne de conduite insufflée par le gouvernement en direction des territoires locaux. Le gouvernement mène une action globale partage sa connaissance avec les territoires. Le Ministère se trouve, en outre, très peu « armé » pour diriger la prise en compte. Le tourisme relève de nombreux domaines, rattachés à autant de Ministères influents (transport, environnement, industrie…) et en cela le Ministère du tourisme en tant que tel a plus un rôle de liaison, de communication, qu’un réel pouvoir d’actions. Ce rôle de liaison se traduit de diverses manières : des contrats de développement lient le Ministère aux ATR (Associations Touristiques Régionales, l’équivalent de nos CRT). De plus, des partenariats existent entre le Ministère et les organisations sectorielles (l’ASSQ par exemple). Ces contrats et partenariat impliquent chacun dans l’organisation et la mise en place des études, et entraînent un partage des connaissances et des échanges d’expériences constants. Section 6. Le développement durable comme cadre des stratégies ? A l’échelle du gouvernement québécois le DD s’inscrit comme « LE » cadre de toutes les politiques actuelles, et donc légitimement pour celle du Ministère du Tourisme. Le développement durable est inscrit dans les textes du gouvernement :
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- 2005 : proposition du Plan de développement durable du Québec - 1er Janvier 2008 : Loi sur développement durable au Québec : d’ici le 1er janvier
2009, tous les Ministères et Sociétés d’Etat québécoises devront intégrer le DD dans leur politique et proposer un plan de développement durable spécifique à leur institution.
De plus, pour le Ministère du Tourisme, le DD a fait l’objet de plusieurs manifestations et rassemblements :
- Assise du tourisme, mai 2007 : « Défis de demain, stratégies d’aujourd’hui » - Symposium International, mars 2009 : « Le développement durable du tourisme »
Pour M. Antil, le DD agit plus comme une philosophie à intégrer dans toutes actions plutôt que comme des méthodes précises, le manque de financement sur la question est pour lui une illustration concrète de la chose. Dans ce cadre stratégique global le changement climatique apparaît en fil rouge, comme un des défis de demain auquel le cadre du DD peut répondre.
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ENTRETIEN n°3 Acteur : Société des Etablissements de Plein Air du Québec (SEPAQ) Interlocuteur : Paule BUISSIERE Date : 12/09/08 Lieu : Québec Durée de l’entretien : 1 h 15 min Section 1. Présentation du travail Section 2. Présentation de l’acteur
Créé en 1998 la SEPAQ est une société d’Etat ayant comme rôle la gestion du réseau « Parc Québec » regroupant les 23 parcs naturel de la province, ainsi que la gestion des 15 réserves fauniques du Québec. Ces deux réseaux sont bien distincts, e son gérés par deux services au sein de la SEPAQ. Il s’agit dans tous les cas de territoire sous la propriété du gouvernement québécois. Le tourisme a un poids non-négligeable dans l’organisation de la SEPAQ, la question est au cœur de la gestion des Parcs (randonnée, activité de loisirs diverses) mais aussi au cœur de la gestion des réserves fauniques (chasse et pêche). Mme Paule Buissière est coordinatrice à la gestion et l’exploitation des Parcs Naturels, en cela elle est le lien entre la direction de chacun des 23 parcs et le siége de la société basé à Québec. Elle a un regard sur l’activité de l’ensemble des parcs tout en étant garante de l’application des directives provinciale. Section 3. Perception du changement climatique Constat d’abord de fluctuations de plus en plus importantes sur les saisons, elles sont de plus en plus inégales, avec d’une année sur l’autre des hiver très froid à des hivers doux, avec très peu de neige. Les activités de ski de randonnée et de raquettes sont particulièrement concernées par ces fluctuations. De plus, la question de l’été 2008 est évoquée, celui-ci a été particulièrement pluvieux, avec un ensoleillement très faible, Mme Buissière se pose la question du rôle du changement climatique sur cette météo. Enfin, l’été 2008 a aussi été le théâtre d’une recrudescence des cyanobactéries dans certains lacs des parcs, ces organismes toxiques ayant proliféré des plages ont du être fermées et des lacs ont été déclarés impraticables pour toutes activités. La hausse des températures globales semble être en partie à l’origine de cela, des études sont actuellement en cours pour approfondir les recherches. Le changement climatique apparaît comme une grosse question pour la SEPAQ mais avec une prise en compte relativement récente : En 2004 lancement du programme pour la mesure de l’intégrité écologique dans les parcs du réseau. Le programme vise à mesurer un ensemble de 30 facteurs écologiques, et observer leur évolution. Un bilan est fait tous les 5 ans, le premier doit donc arriver fin 2009. Le but de ce programme est d’observer l’évolution « géographique » de la faune,
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de la flore, et des écosystèmes des parcs, afin de voir comment le climat impacte ceux-ci. Section 4. Réponses apportées D’abord il y a le programme de mesure présenté précédemment, il ne s’agit pas directement d’une réponse apportée, mais plutôt d’un moyen d’évaluer l’incidence réelle du changement climatique, afin de prendre les bonnes décisions. La SEPAQ a mis en place en parallèle un programme de gestion environnementale, le but de celui-ci est de réduire l’empreinte écologique sur les territoires des parcs naturels. Ce programme compile une série d’action, et d’objectifs propre à chaque secteur d’activité présent sur les parcs. Le programme est détaillé en secteurs d’actions, eux-même détaillés en thèmes, avec à chaque fois des indicateurs à respecter, pour aller jusqu’au niveau opérationnel. Les secteurs d’actions sont :
- Gestion énergétique - Gestion de l’eau - Gestion des matières résiduelles - Gestions des matières toxiques - Gestion des aménagements - Achats éco-responsables - Gestion hôtelière - Bureaux verts - Evénements éco-responsables
Dans la section « gestion énergétique » les indicateurs sont par exemple les consommations d’essence, la part de véhicules électriques à détenir dans les parcs… L’idée de ce programme est d’abord de lancer des actions concrètes et réalistes visant à diminuer l’impact de l’homme sur l’environnement, et en cela participer à la lutte contre le changement climatique, et dans un même temps de faire des parcs du réseau des exemples en matière environnementale, afin de lancer la réflexion et les actions à une échelle plus globale. Il se traduit déjà par des actions concrètes : en matière d’hébergement on installe de plus en plus un concept de « tente en dur », permettant de minimiser les consommations d’espaces et d’énergie tout en assurant un confort nécessaire aux clients. Un contrat a été passé en ce sens avec la société française Utopia qui développe cette offre. Ce programme s’inscrit dans la loi du 1er janvier 2008 qui impose à tous les ministères et sociétés d’Etat de mettre en place un plan de développement durable. Section 5. Liens « global/local En tant que réseau la SEPAQ a un rôle essentiel de communication et d’information entre les parcs et le gouvernement. Attention toutefois les choses sont assez complexes : la société dépend de plusieurs ministères, le ministère de l’environnement pour les parcs naturels et le ministère des ressources naturelles pour les réserves fauniques. Il n’est donc pas toujours facile d’avoir plusieurs réglementations qui définissent l’action d’une entité. Le réseau « Parcs Québec » est quant à lui hiérarchisé de la manière suivante : les 23 parcs sont sous la direction d’une personne, ces 23 directeurs étant eux-mêmes sous la
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direction du directeur général de la SEPAQ et d’un comité de gestion. Le rôle de la société d’état est de favoriser l’initiative locale, les actions de chaque parcs, tout en assurant un cadre commun, réglementaire. De même la SEPAQ finance à 46% le fonctionnement des parcs, les 54% restant étant de l’autofinancement. La concertation et la cohérence sont assurée par des « tables d’harmonisation » qui se réunissent de 2 à 4 fois par an, et qui rassemble les acteurs des parcs (scientifiques, directeurs, prestataires) et la direction de la SEPAQ. Il faut ajouter que ces rencontres ne concernent pas d’éventuels habitants des lieux, en effet les parcs naturels sont des territoires sans zones d’habitation par définition. Il ne s’agit pas de superposition de communes mais d’espaces sous la propriété du gouvernement. Cette méthode dans les liens entre le global et le local n’est possible que depuis la création de la SEPAQ, en effet en créant le réseau le gouvernement québécois à racheté chaque parc, qui était alors gérés par des concessionnaires privés ayant passé des contrats avec le gouvernement (à l’image des stations de ski actuelles). Section 6. Le développement durable comme cadre des stratégies ?
Le développement durable est présent dans les actions de la SEPAQ en tant que véritable base des actions (cf : le programme de gestion environnementale). Même si elle ne le nommait pas encore comme ça la société d’Etat a toujours fait du développement durable concernant la gestion de ses parc, tout simplement parce qu’il s’agit de l’objectif qui lui a été assigné lors de la création en 1998 : le réseau Parcs Québec à pour vocation de « conserver, protéger et faire découvrir ». Pour les réserves fauniques cela meut paraît moins évident mais ici encore, même si l’objectif est d’assurer des conditions optimales de chasse et de pêche, ce qui peut paraître peut écologique, tout est mis en place pour assurer une pérennité des espèces, une gestion intégré des paysages et un avenir pour les populations locales autochtones, qui dépendent de cette faune pour leur survie. Actuellement c’est une réflexion sur la protection des paysages qui est en cours, un sujet complexe à définir mais qui fait partie des objectifs actuels de protection de la société d’Etat.
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ENTRETIEN n°4 Acteur : Station de ski du Mont Sainte Anne Interlocuteur : Guy BELANGER Date : 15/09/08 Lieu : Beaupré Durée de l’entretien : 40 min Section 1. Présentation du travail Section 2. Présentation de l’acteur
La station du Mont Sainte Anne est une des plus importantes stations du Québec, en termes de superficie et d’offre de pistes de ski ainsi qu’en termes de fréquentation. Elle se situe à proximité de la ville de Québec (40 minutes), dans le massif des Laurentides, sur la côte ouest du Saint Laurent. La station se trouve à 175 m d’altitude, avec un sommet à 800 m. On y trouve 66 pistes de ski alpin et 27 pistes de ski de fond. 12 remontées mécaniques permettent d’y accéder. M. Bélanger est le responsable de l’enneigement et des conditions météo de la station, il est donc l’interlocuteur privilégié pour les questions de changement climatique et d’incidence sur la station. Section 3. Perception du changement climatique Le changement climatique semble être caractérisé ici par de très grandes fluctuations dans l’enneigement, en 2007 les conditions de ski ont été catastrophique, avec notamment une fermeture partielle de la station à noël, l’hiver 2008 a au contraire été particulièrement enneigé, il s’agit de la meilleur année en terme d’enneigement depuis 20 ans. L’incidence du changement climatique est donc assez complexe à percevoir. Toujours est-il que depuis 7 à 8 ans les fluctuations de températures à l’intérieure d’une même saison se font de plus en plus sentir, cela oblige de produire de la neige artificielle plusieurs fois dans l’année, alors qu’auparavant la production de début de saison suffisait. De même il faut produire cette neige dés le début de la saison (aux alentours du 15 novembre) alors qu’auparavant cette période correspondait à des fortes chutes de neige naturelle, la neige artificielle ne servait alors qu’a compléter les manques observés vers la fin de la saison d’hiver. Pour l’été, en 2008 beaucoup moins de touristes sont venus sur la station, qui propose pourtant une offre importante en toute saison, les conditions climatiques très mauvaises semblent en être la raison. Mais M. Bélanger fait remarquer que la station vit économiquement de l’hiver, la prise de conscience de la saison estivale est donc bien moindre. Section 4. Réponses apportées Les réponses apportées sont essentiellement technologiques, avec notamment le changement de tout le parc des canons à neige en 2005. On recherchait alors un matériel plus productif, plus efficace avec moins de besoins d’énergie. La raison initiale de ce changement était la baisse des coûts de production de neige.
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Au Mont Sainte Anne 80% de la station est couverte par les canons à neige, il s’agit d’un fort argument commercial et marketing. Ce chiffre figure dans les publicités pour la station. Il y a 15 ans la station a commencé à proposer une offre estivale, surtout basée autour du VTT, il s’agissait alors d’une mode, la station a conservé un très bon positionnement pour cette pratique, mais on ne parle pas vraiment d’adaptation de l’offre face au changement climatique, même si la pratique du VTT compense les pertes de fréquentation des skieurs dans les mauvaises saisons (cf 2007). La station adapte tout de même son offre en marge de la saison d’hiver, les saisons étant légèrement raccourci depuis quelques années une offre complémentaire a fait son apparition : observation panoramique du sommet de la station, thématique des couleurs de l’automne… Cette diversification de l’offre vise surtout à proposer une alternative au ski à la population locale, historiquement la première à vouloir pratiquer la station dans la saison. Le reste de la clientèle n’arrive qu’un peu après, une fois que les conditions de neige sont dans tous les cas favorables au ski. Section 5. Liens « global/local Les liens avec l’ASSQ sont importants, ils supplantent les liens entretenus avec les institutions telles que le ministère du tourisme par exemple. L’ASSQ apparaît pour la station comme l’interlocuteur privilégié concernant les questions de tendances globales : études de marché, études scientifiques… Les « Rendez-vous de l’ASSQ » sont un bon moyen d’entretenir la communication et l’information. La station fait également appel à l’association ponctuellement pour des besoins de conseil et d’assistance sur des projets importants. Ils sont aussi contactés en cas de nouvelles réglementations gouvernementales, pour plus d’explications et de précisions, que la station a du mal à trouver directement auprès des institutions. Les liens de la station avec la municipalité de Beaupré sont relativement faible car la municipalité ne possède plus les terrains de la station, ils ont été rachetés intégralement par le propriétaire/gestionnaire de la station, un homme d’affaires basé à Calgary (Alberta) qui possède en outre 2 autres stations dans les Rocheuses. La municipalité est néanmoins convié aux tables rondes et concertations, mais sans poids décisionnel véritable. Section 6. Le développement durable comme cadre des stratégies ? Il n’existe pas de programme spécifique tourné vers le développement durable dans la station. Les questions environnementales sont rarement posées, c’est l’aspect économique qui prédomine encore. Même s’il n’existe pas de plan spécifique, l’environnement de la station est protégé car il s’agit de la ressource numéro 1 de la station. De même la recherche de solutions moins énergivores, notamment pour les canons à neige, a aussi un but écologique (dixit M. Bélanger). La station se conforme par ailleurs à toutes les préconisations de l’ASSQ en la matière, encore une fois le rôle de l’Association est mis en avant.
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ENTRETIEN n°5 Acteur : Maison du Tourisme de Tadoussac – Manicouagan Interlocuteur : Marie-José GUERIN Date : 17/09/08 Lieu : Tadoussac Durée de l’entretien : 45 minutes Section 1. Présentation du travail Section 2. Présentation de l’acteur
La Maison du Tourisme a plusieurs rôles propres : l’accueil de la clientèle, l’information, la promotion, le développement de l’événementiel. En outre elle participe à l’élaboration de la politique et la stratégie touristique en lien avec l’Association Touristique Régionale (ATR) et le Parc Naturel Marin du Saguenay Saint Laurent. Le territoire concerné par la Maison du Tourisme de Tadoussac dépasse les limites de la commune, il recouvre l’ensemble de l’ATR Manicouagan, plus ou moins le territoire du tourisme autour de « la route des baleines ». Même si la capitale administrative de la région est Baie-Comeau, c’est bien Tadoussac qui s’inscrit comme capitale touristique, historiquement l’observation des baleines dans le Saint Laurent a commencé ici. La Maison du Tourisme est une émanation de la municipalité. Tadoussac qui recense 850 habitants permanents ne vit que du tourisme ! Mme Guérin est directrice de la Maison du Tourisme et coordinatrice du réseau de l’ATR. Section 3. Perception du changement climatique Mme Guérin souligne la divergence des discours sur la question au Québec, néanmoins elle relève plusieurs phénomènes pouvant être reliés au changement climatique.
- Les hivers sont de plus en plus fluctuants, à l’intérieur d’une même saison avec des épisodes de radoucissement ponctuels, mais aussi d’une saison à l’autre, avec des très gros écarts (cf 2007 et 2008).
- Les pluies sont de plus en plus fréquente au printemps depuis quelques années,
avec parfois des problèmes d’effondrements de routes dans la région, dus à des très fortes précipitations. En 1996 notamment, ce qu’on a appelé le « déluge du Saguenay » à causé l’effondrement de pans entiers de route, sur des terrains argileux.
- A l’inverse certaines années sont remarquablement sèches, en 1990 et 2005
notamment. En contre-partie des épisodes de feux de forêts importants ont eu lieu. Ils ont entraîné la fermeture de routes et de lieux de villégiatures.
- En 2008, un gros problème c’est posé avec la recrudescence d’algues rouges,
favorisés par les précipitations et la température de l’eau. Ces algues toxiques ont causé la mort de centaines de phoques et de bélougas. Ces animaux, résidents à l’année dans le Saint Laurent, connaissent une mortalité très importante depuis quelques années. L’activité de l’homme et la recrudescence des croisières d’observation étant aussi responsable. Ce phénomène des algues rouges ne semble toutefois pas avoir atteint les cétacés géants (baleines et cachalots) qui eux ne résident qu’une partie de l’année dans le Saint Laurent.
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Tous ces événements, que l’on peut relier à un changement du climat, en plus de faire parfois des victimes donnent une très mauvaise image du tourisme dans la région. Un autre soucis majeur à l’heure actuelle c’est l’érosion des côtes du Saint-Laurent. Ce phénomène est très marqué dans la baie de Tadoussac et s’empire en remontant vers le nord. Cela est dû à plusieurs facteurs : la hausse des précipitations, les marées plus importantes qu’avant, mais surtout au fait que le fleuve est gelé moins longtemps dans l’année, les côtes subissent donc plus les mouvements du fleuve, et sont plus rapidement fragilisées. Section 4. Réponses apportées Il apparaît difficile d’apporter des réponses à des événements climatiques exceptionnels, néanmoins le problème de l’activité humaine est abordé de manière globale quant au tourisme sur le fleuve. Une réglementation stricte a été mise en place pour l’observation des baleines et mammifères marins, la réglementation vise à limiter le nombre de bateaux présents autour des animaux, en limitant la durée d’observation, la distance aux animaux, la matériel trop bruyant… De même un rééquilibrage de l’offre est au cœur des politiques, afin de montrer que les croisières d’observation ne sont pas la seule solution, et ainsi les limiter. On met en avant les sites d’observation terrestres, les activités de randonnées, ou de moyens de transport plus respectueux comme les kayaks par exemple. Ce rééquilibrage est au cœur de plan de développement touristique de la région, dossier conjointement mis en place par l’ATR, la Maison du tourisme et le Parc Marin. Les actions ne sont pas directement en réponse au changement climatique mais doivent participer à une réflexion globale sur un nouveau tourisme dans la région, moins émetteur de GES notamment. Section 5. Liens « global/local Tadoussac, par la présence du Parc Marin du Saguenay Saint Laurent, s’inscrit à la fois dans le réseau « Parcs Québec » de la SEPAQ et dans le réseau « Parc Canada » du gouvernement canadien. En effet ce parc est le seul géré conjointement par l’échelon provincial et par l’échelon national. La municipalité est donc intégré à la concertation de ces deux acteurs majeurs, qui travaillent le plus souvent ensemble. De même, les liens avec le ministère du tourisme se font via l’ATR Manicouagan. Mme Guérin évoque alors des problèmes de moyens financiers à l’échelle des communes, dus à une multiplication des échelons qui a son sens empêche une politique locale efficace. Section 6. Le développement durable comme cadre des stratégies ? Le développement durable s’inscrit en fil rouge dans la stratégie local, avec notamment toute l’idée de rééquilibrage du tourisme. Il s’agit pour Mme Guérin, d’une philosophie générale que l’on retrouve à toute échelle de la stratégie : lutte contre l’érosion côtière, protection et valorisation du patrimoine, minimisation de l’empreinte écologique, équité du tourisme…
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Tous les projets qui s’inscrivent dans le plan de développement touristique précédemment évoqué doivent incorporer le développement durable comme cadre des stratégies. Mais encore une fois, un problème de moyens est évoqué.
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ENTRETIEN n°6 Acteur : Parc Marin Saguenay – Saint Laurent Interlocuteur : Dany GAREAU Date : 18/09/08 Lieu : Tadoussac Durée de l’entretien : 40 minutes Section 1. Présentation du travail Section 2. Présentation de l’acteur
Le Parc Marin Saguenay –Saint Laurent est un cas assez unique : il s’agit du seul parc marin au Québec. Il se situe au croisement du fjord Saguenay et de l’estuaire du Saint Laurent. Cette situation privilégiée, avec un brassage des eaux froides, en fait le vivier d’une faune marine importante. Il faut noter aussi que ce parc est le seul sur tout le territoire canadien à être géré conjointement par l’échelon provincial (Parcs Québec) et par l’échelon national (Parc Canada). Dany Gareau est responsable de la communication du parc pour le réseau Parc Canada, il s’agit d’un interlocuteur travaillant pour l’échelon national, mais le système est tel que le gouvernement du Québec est aussi un des interlocuteurs du parc marin, via Parc Canada. Section 3. Perception du changement climatique Les remarques sont relativement similaires à celles faites par Mme Guérin, de la maison du tourisme de Tadoussac. Les saisons étant de plus en plus fluctuantes les écosystèmes du parc sont bouleversés. La surmortalité des phoques et bélougas est un sujet en cours d’études par les scientifique du parc. Il est souvent retrouvé des traces de toxines chez les animaux morts, les algues rouges de l’été 2008 étant particulièrement toxiques, les scientifiques s’interrogent sur leur rôle. Il est répété que ces algues prolifèrent avec des conditions de fortes précipitations. Le cycle de vie des grands mammifères marins semble lui aussi évoluer. L’augmentation de la température de l’eau appauvrie la zone en nourriture, les mammifères marins passent l’été dans des zones de plus en plus au nord de l’estuaire, et dénigre donc petit à petit le parc marin. Mais dans un même temps, les eaux du Saint Laurent étant gelées plus tard dans l’année ces mammifères restent plus longtemps sur place, avant de regagner les zones plus chaudes de l’hémisphère sud en hiver. Ce qui est paradoxale c’est donc que le changement climatique semble allonger la saison des baleines dans le Saint Laurent, mais dans des zones plus éloignées qu’avant. M. Gareau fait remarquer aussi que l’activité humaine de croisières sur le Saint Laurent est aussi un facteur expliquant de cette migration vers le nord. Pour lui tout est lié dans un phénomène global et complexe.
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Section 4. Réponses apportées Les réponses apportées par le Parc Marin visent principalement à limiter l’activité humaine sur le fleuve et le fjord Saguenay. M. Gareau évoque alors le plan de développement touristique du territoire, mis en place conjointement par le parc, la Maison du Tourisme de Tadoussac et l’ATR Manicouagan. La stratégie ayant été évoqué par Mme Guérin (limitation du nombre de bateaux, distances à respecter pour observer les animaux, mise en avant d’activités annexes et complémentaires…) De plus, le parc marin, de par sa double gestion, doit intégrer d’ici peu (entretien réalisé en septembre 2008) le plan de gestion environnementale de la SEPAQ. Pour M. Gareau il s’agit d’un bon moyen de limiter les émissions de GES et de motiver l’adaptation de formes de tourisme moins impactantes écologiquement. Section 5. Liens « global/local La double gestion du parc l’intègre dans les réseau de la SEPAQ et de Parc Canada, l’expérience montre que c’est la SEPAQ qui est majoritairement garante de la gestion et de l’exploitation du parc. Le réseau Parc Canada a un rôle moindre pour ce cas. Les liens avec la SEPAQ sont animés par les tables d’harmonisation évoquées par Mme Buissière. De plus, une fois par an, des coordinateurs de la SEPAQ se rendent sur le parc pour « observer » la situation. En lien avec le territoire local, le parc fait partie du comité de coordination déjà évoqué (maison du tourisme, ATR, Parc Québec, Parc Canada) il faut ajouter que ce comité intègre aussi des représentants du Ministère de l’Environnement québécois et des représentants des tribus autochtones dont le territoire est dans la limite du parc. Section 6. Le développement durable comme cadre des stratégies ? Encore une fois, étant intégré à la SEPAQ le parc s’inscrit dans sa politique globale, et donc prend le développement durable comme un cadre à toutes actions et réflexions. Il faut ajouter que la stratégie interne du parc, le Plan Directeur, est un outil participatif, le fait d’intégrer les représentants précédemment cités en fait un bon exemple de développement durable pour M. Gareau.
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Fabien HENNION Année universitaire 2008-2009
Master 2 DATT - IREST
1. De l’intérêt de la question Un sujet d’actualité, complexe et transversal Le changement climatique est actuellement au cœur de nombreuses réflexions dans le domaine du tourisme. L’approche du phénomène apparaît comme complexe et liée à beaucoup d’incertitude. En sortant du simple champ touristique le changement climatique est un réel sujet de société, largement diffusé par les médias, et dont le monde scientifique s’est emparé depuis déjà quelques années. Les travaux sur le sujet sont nombreux et amènent à un fait établi, pour lequel tout le monde est d’accord : le réchauffement climatique existe. Mais là s’arrête le consensus, le reste est synonyme d’hypothèses, de scénarios, d’expérimentations… Et ceci tant pour les tenants que les aboutissants du phénomène. Directement liée au tourisme, la question est là encore sujette à controverse et en cours d’étude. Les doutes et remises en question scientifiques se retrouvent dans l’approche touristique du changement climatique. La récente conférence de Davos1 a traité, notamment, de scénarios possibles, de conséquences supposées, toujours en restant dans une approche très globale et en montrant bien les limites des études au niveau des territoires, à plus grande échelle. Changement climatique et tourisme : des liens étroits Ces deux thèmes qui animent la présente étude ont fait l’objet de nombreux travaux et recherches. Ils ont été approchés séparément d’abord, puis conjointement plus récemment. Le tourisme n’a pas été tout de suite relié au phénomène du changement climatique, une fois encore la transversalité qui le caractérise ayant joué un rôle. Parce qu’il renvoie à d’autres secteurs économiques, le tourisme en tant que tel fait l’objet d’une mise en perspective avec la question climatique depuis relativement récemment.2 Par définition le tourisme apparaît comme vecteur du phénomène. Les études montrent que l’activité humaine a un effet non-négligeable sur l’accroissement du phénomène, notamment du à la production de gaz à effet de serre3. Sans rentrer dans plus de détails
1 Climate change and tourism : Responding to global challenges, octobre 2007 2 CERON, J-P. ; DUBOIS, G. Adaptation au changement climatique et développement durable du tourisme. Mai 2006 3 JACQUES, G ; LE TREUT, H. ; Le changement climatique, éditions UNESCO, 2004.
Tourisme et changement climatique au
Québec : Etat des lieux et pistes d’actions
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scientifiques il est généralement admis que ces gaz à effet de serre (GES) sont majoritairement responsables du changement climatique (même si la couverture nuageuse et notamment les micro-particules issues des aérosols ont aussi un impact sur l’effet de serre). Reprenons la définition du terme –tourisme- proposée par le laboratoire MIT en 2003 : « Système d’acteurs, de pratiques et d’espaces qui participent de la recréation des individus par le déplacement et l’habiter temporaire hors des lieux du quotidien. ». Cette définition traduit la complexité de l’activité touristique, il est possible de faire émerger certains thèmes : activités humaine, hébergement, et en point d’orgue, le transport, qui donne son sens au tourisme en incluant un nécessaire déplacement. Ces activités sont toutes génératrices de GES, car très énergivores. A cela il faut ajouter que le tourisme favorise la multiplication des « lieux de vie », selon la thèse de l’habiter poly-topique défendue par Mathis Stock. En cela s’ajoutent encore des activités humaines générées par le tourisme. Le tourisme apparaît dans un même temps victime du phénomène, le changement climatique redessine la carte du tourisme mondial à des échéances plus ou moins importantes. Il impacte directement l’activité touristique, et remet en cause l’avenir de nombreux territoires. Les exemples les plus marquants qui viennent illustrer ce propos sont évidemment les îles et archipels menacés de submersion, mais aussi les destinations liées à la neige (stations de sports d’hiver, destinations polaires) où le changement climatique a un effet déjà aujourd’hui. Un enjeu pour le développement touristique français Dans ce contexte d’extrême complexité, le sujet apparaît comme un enjeu majeur dans les politiques actuelles de développement touristique en France. En 2006 la Direction du Tourisme publie un rapport sur le sujet4, ce travail reprenant le GIEC (Groupe d'Experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat) en référence s’intéresse au cas français en particulier. Ce rapport est pour l’instant le seul existant sur ce thème, et est la base de plusieurs travaux actuels, notamment par la DIACT, le MEEDDAT et l’ancienne Direction du Tourisme. Tous ces travaux prennent le parti d’une nécessaire adaptation du tourisme face aux risques du changement climatique.
Le contexte international est lui aussi porteur sur ce sujet. L’allocution de M. Francesco Frangialli du 18 novembre 2008, dans le cadre du cycle des conférences de l’IREST, l’illustre bien. La question est globale, au cœur des travaux et discussions, et porteuse de nombreuses interrogations pour l’avenir. Dans cette vision prospective les échanges internationaux sont nombreux, fréquents, et tendent vers une connaissance toujours plus poussée du sujet. Néanmoins ici encore on se trouve dans le champ des hypothèses et des partis pris, à une échelle globale et pluri-thématique.
Le Québec : l’image d’une province « verte » Le Canada, est plus particulièrement la province du Québec, apparaît dans l’imaginaire français comme un pays novateur et en avance sur les questions environnementales. Il s’agit ici d’un sentiment, souvent partagé et constaté. Ceci explique le choix du Québec. D’autres facteurs justifient le cas, d’abord le lien fort qui existe entre la France et celui-ci, ensuite par le fait que le Québec est, au sein de la fédération canadienne, garant de sa politique touristique. Il apparaît donc comme une entité pertinente à étudier.
4 CERON, J-P. ; DUBOIS, G. Adaptation au changement climatique et développement durable du tourisme. Mai 2006
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Exemples d’illustrations montrant l’image du Québec relayée par les médias
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2. Changement climatique et tourisme : la situation au Québec
Tout au long de ce document des acteurs du système touristique québécois seront présentés et pris en exemple. Cet état des lieux provient d’entretiens réalisés par l’auteur avec ces acteurs du tourisme au Québec. Ce système est synthétisé dans le schéma proposé ici. De « l’enjeu » des stations de ski aux problèmes d’enneigement Pour la station de ski du Mont Sainte Anne, et pour d’autres selon l’ASSQ5, le changement climatique apparaît presque comme un « enjeu marketing et commercial ». Le paradoxe est important entre les discours généraux, alarmistes quant à la question de l’enneigement, et les discours de ces acteurs du tourisme de sports d’hiver. Ce qui apparaît ici c’est qu’à moyen terme, la station étudiée voit le changement climatique comme une réelle aubaine pour gagner des parts de marché6. Explication : le phénomène climatique diminuant l’enneigement hivernal semble toucher les stations de sports d’hiver nord-américaines selon un gradient Sud-Nord très marqué, les territoires les plus au sud étant plus touchés (nous expliquerons dans la suite de ce travail ce phénomène). Ainsi notre cas d’étude voit là une opportunité de développement, l’enneigement étant bien moins problématique, pour l’instant, c’est un facteur de différenciation à mettre en avant, la finalité espérée est la récupération des clientèles de l’Est des Etats-Unis qui ne
5 Association des Stations de Ski du Québec 6 HENNION, F. Entretien avec M. Guy Trembley, Responsable enneigement de la station du Mont Sainte Anne Septembre 2008
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trouvent plus dans les destinations de sports d’hiver classiques (surtout au Vermont et au New Hampshire) les conditions optimales pour pratiquer le ski. Cette vision des choses posent de nombreuses autres questions, et notamment à l’échelle de la province du Québec. Néanmoins, malgré cet « avantage » perçu, les conditions climatiques évoluent bel et bien dans la station. Même si cela se ressent pour l’instant moins que chez les stations plus au sud, il a été constaté des grandes fluctuations dans les saisons. Entre un hiver 2007 aux conditions de neige très mauvaises et l’épisode 2008, exceptionnel en termes d’enneigement, les choses ne sont pas aussi simples qu’elles n’y paraissent. Certes la station semble mieux lotie, mais c’est au prix d’une nécessaire adaptation, coûteuse, à la fois financièrement et environnementalement. L’incertitude croissante sur les conditions climatiques, d’une saison à l’autre mais aussi au cœur d’une même saison, compliquent la donne et implique un effort technologique important. De plus, on peut légitimement se poser la question du long terme, le gradient évoqué précédemment évolue inexorablement vers le nord, mais cela ne semble pas encore à l’ordre du jour des réflexions de la station du Mont Sainte Anne. A un niveau provincial, pour l’ASSQ, le discours est plus ambigu. La constatation faite par la station étudiée, et par d’autres située dans un contexte semblable, est aussi appréhendée par l’association. L’ASSQ y voit également un enjeu de différenciation non-négligeable, notamment vis à vis du marché du nord des Etats-Unis. En revanche, ses missions doivent aller vers l’intérêt de l’ensemble des stations du Québec, et au sein de cet ensemble, les données sont très diverses. Les stations du sud québécois, notamment du sud-est, connaissent les mêmes bouleversements que les stations nord-américaines, avec des conditions d’enneigement déjà aujourd’hui défavorables. Là où la station du Mont Sainte Anne peut percevoir favorablement une baisse de la concurrence de ces stations québécoises, l’ASSQ n’a pas la même position7. C’est là toute l’ambiguïté de la situation, comment réagir d’une manière globale ? Favoriser le développement des stations du nord et ainsi sacrifier les autres ? Tout miser sur l’adaptation des stations du sud pour les sauver ? L’idéal apparaît comme la recherche d’un consensus : assister les stations plus touchées sans empêcher le développement de celles du nord, mais il s’agit là d’un consensus relativement utopique tant les objectifs de chaque station sont opposés. De plus, l’ASSQ reste une association de gestionnaires et de propriétaires, où le poids du plus fort économiquement à son importance dans les décisions, il est facile de penser que les stations du nord, aux potentiels de développement plus fort, vont avoir un poids toujours plus important dans ce système, et favoriser de la même leur développement. Cette relation cyclique creusant un peu plus les écarts dans ce système à deux vitesses, mais encore une fois, pour combien de temps ?
Le tourisme du Saint Laurent : la remise en cause d’un patrimoine naturel important Même si le terrain étudié n’est pas tout le Saint-Laurent, la commune de Tadoussac apparaît bien comme la « capitale » du tourisme sur le fleuve. De plus les discours de la SEPAQ et du Parc Marin, ajoute à la réflexion sur l’ensemble de cette filière du tourisme autour du Saint-Laurent. Le changement climatique apparaît comme un facteur remettant en cause en profondeur le modèle touristique actuelle, en effet celui-ci est basé sur la présence d’une faune particulière, justifiant en grande partie le tourisme. Depuis le milieu des années 80, et l’idée d’un pécheur de Tadoussac d’emmener des touristes sur son bateau pour s’approcher des baleines, ce tourisme n’a cessé de se développer dans et autour de la commune, d’une rive à l’autre du Saint Laurent, pour devenir aujourd’hui emblématique de la région8.
7 HENNION, F. Entretien avec M. Boyer-Lafontaine, Directeur des affaires publiques de l’ASSQ. Septembre 2008 8 Le guide du Routard, Québec et Provinces Maritimes, édition 2008-2009. Hachette édition
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Les mammifères marins au cœur du tourisme sur le Saint Laurent Crédits photographiques : F.HENNION, 2008 Le tourisme à Tadoussac, et sur l’ensemble de la côte Nord, est tourné autour de l’observation des baleines et autres mammifères marins. L’observation se fait sur divers bateaux, du plus imposant au plus petit, que l’on retrouve en nombre sur le fleuve.
Le changement climatique influe sur la présence de cette faune : les animaux sédentaires (phoques et bélougas) voient leur taux de mortalité considérablement augmenter, probablement à cause d’une algue toxique dont le développement est favorisé par un réchauffement de l’eau et par la hausse des précipitations ; les mammifères marins non sédentaires (baleines, rorquals, cachalot, orques…) qui passent normalement la période estivale dans le Saint Laurent où les eaux sont plus froides et riches en nourriture, ont des cycles de migration bouleversé, ils restent plus longtemps dans le Saint Laurent, car celui-ci est pris pas les glaces plus tard dans l’année, mais en même temps séjourne de plus en plus au nord de l’estuaire, loin des infrastructures de tourisme et des sites traditionnels9. Ces bouleversements amènent une nécessaire remise en cause du système par les professionnels, nous verrons par la suite que ces évolutions ne sont pas du seul fait du changement climatique et donc comment les acteurs tentent d’y répondre d’une manière globale. En plus de cette atteinte à l’essence même du tourisme dans l’estuaire, le phénomène climatique impact aussi les paysages et l’environnement physique des lieux. Ici c’est d’abord l’érosion côtière qui est au cœur de la question, en effet, bien que naturel, ce phénomène s’accentue considérablement ces dernières années, et le changement climatique semble en être un facteur aggravant. Plusieurs facteurs expliquent cette accélération du processus : d’abord les précipitations de plus en plus fréquentes en été, qui s’infiltrent dans le sol et sous-sol et fragilise l’ensemble ; Ensuite, une légère montée des eaux, qui influe aussi sur l’ensemble ; Enfin, peut être le facteur le plus important, les eaux du Saint Laurent sont prises par la glace sur une période de plus en plus courte
9 HENNION, F. Entretien avec Mme Guérin, Directrice de la Maison du Tourisme de Tadoussac. Septembre 2008
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dans l’année, et ainsi les côtes se trouvent plus impactées par l’action des vagues et des marées, ce qui contribue encore à accentuer l’érosion. La durée de cette saison des glaces pourrait diminuer de 6 semaines d’ici 2050, de plus, à l’intérieur même de cette « saison » des épisodes de redoux viennent déjà libérer ponctuellement et partiellement certaines parties de l’estuaire de la glace10. Cette érosion met à mal certaines infrastructures touristiques, les falaises de Tadoussac sont notamment concernées, le processus menaçant déjà aujourd’hui des installations d’hébergements touristiques de la commune. Phénomène d’érosion à Tadoussac Crédits photographiques : F.HENNION, 2008 Des conditions climatiques qui pénalisent globalement le tourisme D’une manière globale à l’échelle de la Province, et ce la se ressent dans tous les discours des acteurs, les conditions climatiques changeantes pénalisent le tourisme. Les hivers fluctuants, d’une année à l’autre et au sein d’une même saison, sont défavorables pour plusieurs raisons : D’abord c’est évidemment l’enneigement qui pose problème, nous avons vu précédemment que cette question est complexe et que l’échelon local est différemment concerné ; En revanche, c’est en terme d’image que tous se retrouvent, l’image des stations et de leur enneigement est globalement mauvaise. Les touristes du nord des Etats-Unis par exemple voient comme une évidence qu’il se passe la même chose ailleurs que dans leur contexte local, ainsi les stations du nord du Québec doivent elles-mêmes avoir des sérieux problèmes d’enneigement, ce qui, nous l’avons vu, n’est pas vraiment le cas. De même, ce déficit d’image est véhiculé par les médias, qui montrent souvent les rues de Montréal et Québec, sans neige, même en plein hiver, ceci contribue à donner l’impression d’un manque de neige partout dans la Province, alors que de nombreux facteurs expliquent cette absence de poudreuse dans les grandes villes
10 Etude de la sensibilité des côtes du Saint Laurent aux impacts des changements climatiques, Communiqué de Presse du consortium Ouranos. Juillet 2008.
L’érosion est très marqué sur les falaises sableuses au nord de la baie de Tadoussac. Des niches d’arrachements illustrent le phénomène. Des zones d’habitations touristiques risquent d’être emportés dans de prochains glissements de terrains.
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(pollution, piétinement humain…). Ce concept des « trottoirs mouillés » pénalise fortement l’image des stations et est au cœur des campagnes marketing de l’ASSQ11.
La période estivale est elle aussi touchée par ces fluctuations dans le climat. Les précipitations sont en augmentation, accompagnées par des épisodes de canicules plus présents. L’été 2008 est au yeux de tous un exemple évident de ce dérèglement. Bien que cet épisode soit trop proche de nous pour tirer de réelle conclusion, nous retrouvons son évocation dans l’ensemble des discours étudiés. Les acteurs mettent alors en avant la pluie qui a gâché la saison. Ces événements se traduisent de diverses manières sur le territoire, si pour les stations de ski cela réduit simplement le nombre de touristes en période estivale, pour d’autres les conséquences sont plus importante : Dans la région du Manicouagan, dont Tadoussac est le centre touristique, les effondrements de route s’accroissent depuis quelques années, dus à l’infiltration d’eau sous les infrastructures de transport ; Dans cette même région certains étés ont été synonymes de feux de forêt dévastateurs (en 2005 notamment) ; A la SEPAQ12 on évoque l’été 2008 comme l’été des cyanobactéries, micro-organismes toxiques qui se sont multipliés dans les lacs des parcs naturels de la Province et ont entraîné la prise de mesures de fermeture drastiques13 (il a été scientifiquement reconnu que le développement de ces organismes est favorisé par les fortes précipitations) ; Enfin, au Ministère du Tourisme on parle, entre autre, du tourisme golfique qui voit son activité diminuée avec des saisons estivales pluvieuses, les conditions de jeu et la recrudescence de champignons dans les greens, eux aussi favorisés par les précipitations, semblant expliquer cela. Des phénomènes climatiques encore plus exceptionnels peuvent s’ajouter à cette liste, encore une fois le changement climatique n’est pas le seul responsable, il serait trop ardu d’expliquer le jeu de facteurs qui conditionnent ces événements, néanmoins le changement climatique apparaît toujours comme un catalyseur, qui favorise les phénomènes et augmente leur périodicité. Ces phénomènes évoqués sont ceux relatifs aux grands épisodes de cyclones et tempêtes tropicales qui touchent chaque année les cotes du sud-est des USA. Ces épisodes météorologique, dont la recrudescence en constante évolution n’est plus à démontrer, impactent le Québec d’une certaine façon : La Province est touchée quasiment à chaque fois parce que l’on appelle la « queue du cyclone », quelques jours après les événements catastrophiques plus au sud de très fortes précipitations arrivent au Québec, les vents ne sont plus aussi violents mais la pluie elle redouble d’intensité. Ces événements récurrents s’ajoutent au reste quant on évoque le changement climatique. Pour beaucoup d’experts « les conditions météorologiques sont, avec le taux de change et les catastrophes naturelles ou technologiques, l’un des trois facteurs qui conditionnent fortement l’activité touristique »14. Dans ce contexte on comprend bien que la combinaison de plusieurs de ces facteurs, comme évoqué ici, joue un rôle prépondérant sur le tourisme.
11 HENNION, F. Entretien avec M. Boyer-Lafontaine, Directeur des affaires publiques de l’ASSQ. Septembre 2008 12 Société des Etablissements de Plein Air du Québec 13 HENNION, F. Entretien avec Mme Buissière, Responsable gestion et exploitation à la SEPAQ. Septembre 2008 14 MONFERRAND, A. La météo un aléa majeur de la fréquentation touristique. Revue Espaces n°190 : Météo et Tourisme, Février 2002
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3. Et en termes de réponses ? Diversification des stations de ski, une réponse à des changements pluriels Outre l’adaptation technologique, nécessaire pour produire de la neige artificielle, dont nous avons déjà parlé, les stations de ski, quelles qu’elles soient et où qu’elles se trouvent, cherchent à se diversifier. Elles se diversifient au sein même de la saison hivernale d’abord, avec l’émergence d’activités « nouvelles », à l’emprise environnementale peut être moins forte (randonnée en raquettes, balade en traîneau à chiens, plongée sous-marine en lac gelé…). Ensuite, elles essayent de se diversifier en proposant une offre qui dépasse la saison hivernale, sur les marges de cette saison (printemps et automne) mais aussi de plus en plus en été. Cette diversification se traduit là encore par l’émergence d’une offre plurielle, des activités nombreuses, des manières de communiquer différentes aussi. L’exemple de la station du Mont Sainte Anne est intéressant à observer. Ici c’est une offre toute l’année qui est proposée, en été la pratique du VTT est mise en avant, profitant des installations de remontées mécaniques la station s’est positionnée assez tôt comme un « spot » privilégié pour cette pratique. La randonnée et la simple observation du sommet de la station ne sont pas oubliées. En plus, les périodes « entre saison » sont aussi prises en compte, l’automne particulièrement avec le thème central des couleurs de l’été indien autour duquel s’organise la station. Diversification de l’offre touristique à la station du Mont Sainte Anne
Pourquoi cette diversification ? Au regard des discours le changement climatique n’est pas le cœur du problème, bien sur il s’intègre dans la réflexion, mais nous pouvons alors plutôt penser qu’il ajoute une justification à une diversification enclenchée avant que l’on parle et que l’on perçoive autant le phénomène. Le changement climatique n’explique pas la diversification mais s’ajoute aux facteurs la rendant nécessaire. Ces facteurs semblent plus démographiques et sociétales, le vieillissement de la population, les seniors de plus en plus actifs, sont parmi les raisons expliquant cela. L’évolution de la prise de conscience écologique dans la société actuelle va aussi vers la recherche d’alternatives aux activités touristiques traditionnelles, telles que le ski. Nous pourrions dire ici que
La station diversifie son offre en proposant des activités toute l’année. L’automne est mis en avant avec la « grznde virée des couleurs » qui concerne les mois de septembre et d’octobre. Les activités sont adaptés à toute tranches d’ages : VTT sportif, randonnée, tour d’observation accessible en télécabine…
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cette diversification des stations de ski au Québec cherche à répondre -aux crises-, de manière globale, crise environnementale, crise climatique, crise démographique… en proposant des « stratégies d’aujourd’hui pour relever les défis de demain »15. Il faut y ajouter évidemment la crise économique et financière actuelle, dont les effets à long terme sont encore bien peu visibles mais qui vont dans le sens de ces adaptations complexes à une société en changement. Sur le Saint-Laurent, une tentative de réponse globale aux atteintes à la ressource touristique De la même façon, les réponses apportées par les acteurs de la filière –tourisme littoral- sont des réponses globales, dans lesquelles le changement climatique est un des paramètres. Ici il est intéressant d’observer deux choses : D’une part les réponses apportées par les institutions de la région du Manicouagan, symbole du tourisme sur le Saint Laurent (ATR16 Manicouagan, municipalité de Tadoussac, Parc Marin du Saguenay Saint Laurent) ; D’autre part les réponses apportées par la SEPAQ, société d’Etat gestionnaires des parcs naturels, et donc notamment du Parc Marin du Saguenay Saint Laurent, autour de Tadoussac. Ces réponses de la SEPAQ, mise en place dans un contexte global, seront présentées par la suite car dépassant le simple cadre de notre terrain. Ce sont différents acteurs, qui sont étudiés, mais qui répondent d’un même objectif : le respect environnemental et par là la préservation de la ressource touristique. Fac e aux problèmes évoqués précédemment quant à la faune marine de l’estuaire du Saint Laurent, les institutions de la région du Manicouagan ont décidé de mettre en place un plan de développement stratégique du tourisme. Il faut noter d’abord que ce plan émane de la concertation de divers acteurs, aux profils et motivations premières très divers. Ce plan a pour objectif de limiter l’activité humaine sur le Saint Laurent, et par là essayer de limiter les impacts de celle-ci sur la faune. En effet, les constatations faites de surmortalité sur les espèces sédentaires et de bouleversement des cycles migratoires des espèces non-sédentaires, bien que favorisé par le changement climatique (cf : 3.1) n’en sont pas moins que des résultantes de la trop forte activité touristique sur le fleuve. Les « croisières aux baleines » se sont développées dans un premier temps de manière anarchique, sans véritable cadre, entraînant toujours plus de bateaux auprès des animaux. La pollution sous toutes ses formes a alors joué un rôle non-négligeable sur le bouleversement de cet écosystème (pollution aux hydrocarbures, pollution sonore…). Le plan met en avant plusieurs mesures réglementaires : nombre maximal de bateau sur le fleuve, distance minimale pour approcher les animaux, normes techniques quant aux moteurs des bateaux…). Cette réglementation s’accompagne d’une stratégie visant à mettre en avant d’autres types d’activités : Activités d’observation des animaux d’abord, mais à partir d’observatoire situés sur la terre ; Activités d’autres natures, tournées vers l’intérieur des terres (randonnée, canoë, ski sur sable…). C’est donc une recherche de l’équilibre optimal, entre une activité touristique et un respect de l’intégrité environnementale, qui est l’objectif numéro 1 du plan. Le tourisme apparaît alors, non pas comme une activité pourvoyeuse d’atteintes environnementales, mais au contraire comme un moyen de préservation par la valorisation de l’espace naturel. Le Centre d’Interprétation des Mammifères Marins de Tadoussac en est une bonne illustration : ce « musée » géré par un groupement scientifique, le GREMM17, est un outil d’explication, auprès des touristes, du territoire et du plan stratégique. On y découvre le rôle des scientifiques et la fragilité du milieu, on peut aussi contribuer de manière financière au travail des chercheurs, en payant son billet d’entrée d’abord, mais aussi, de manière plus improbable, en « adoptant » un bélouga… L’échelon global : entre communication, études scientifiques et capacité d’actions parfois limitée
15 Assises du tourisme 2007, compte-rendu des conférences. Ministère du Tourisme Québécois. Mai 2007 16 Association Touristique Régionale 17 Groupement de Recherche et d’Etude des Mammifères Marins
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Il faut d’abord remarquer que pour l’ensemble des acteurs de l’échelon provincial (Ministère, SEPAQ, ASSQ), le rôle de mise en réseau est primordial. Leurs positions stratégiques en font les interlocuteurs privilégiés de l’échelon local, en termes d’information et de mutualisation des moyens. Les exemples de chacun illustrent cela. A la SEPAQ cela se traduit par la publication annuelle d’un « guide conseil », reprenant les études effectuées, les axes stratégiques et les actions préconisées par l’association, de même, tous les ans, un congrès permet de réunir les stations membres du réseau et de favoriser les discussions et débats. La SEPAQ, quant à elle, et plus particulièrement le réseau Parcs Québec, met en place la concertation en organisant avec chaque parc deux à quatre « table d’harmonisation » par an. Ces rencontres, réunissant les représentants de la société d’Etat et les directeurs de parcs permettent d’avoir une vision de l’état des choses sur les territoires locaux et de mettre en avant le cadre global. Enfin, le Ministère du Tourisme, apparaît en fil rouge dans la concertation, des partenariats existent entre lui et les associations sectorielles (notamment la SEPAQ), ensuite il est lié aux territoires locaux via les ATR (Association Touristique Régionale), avec lesquelles des « contrats de développement » sont passés. Le partage de l’information et la communication sont assurés de manière particulièrement efficace via le réseau de veille en tourisme. Ce réseau, créé par la Chaire de tourisme de l’université du Québec à Montréal (UQAM) et financé par le Ministère, fait de la veille stratégique et prospective sur le thème du tourisme dans sa grande transversalité. Le partage de l’information est rapide, notamment via l’envoi mensuel d’un bulletin, le « Globe Veilleur » sous le format d’une newsletter informatique.
Il est donc évident que ces organismes globaux sont des acteurs primordiaux de la concertation entre les territoires et la Province, néanmoins nous pouvons affirmer que leurs moyens d’actions sont passablement limités. La mise en place et la réalisation d’études est la principale action de l’échelon global : études sectorielles, études de marchés, études scientifiques… Les exemples sont nombreux, et sur le thème du changement climatique et du tourisme commence à émerger. Le Ministère du Tourisme est par exemple intégré aux travaux du consortium Ouranos, ce rassemblement de quelques 250 scientifiques québécois et, plus largement, canadiens, a été créé en 2001 par le gouvernement du Québec. Ses missions sont d’acquérir et de développer les connaissances sur le changement climatique, et d’étudier la question de la vulnérabilité sociale, économique et environnementale, du phénomène au Québec, en Amérique du Nord, et plus largement dans un contexte mondial18. Il s’agit en quelque sorte d’une « émanation locale » du GIEC, sur le territoire québécois, même si aucuns liens institutionnels n’existent entre les deux organismes. En sortant du champ de ces études et recherches, les possibilités d’action des acteurs étudiés sont limitées. Le Ministère n’a quasiment aucun levier d’actions sur la question du changement climatique19, tant la problématique est large et le secteur touristique est lui aussi transversal à d’autres ministères, plus influents. Nous reviendrons sur ce point par la suite.
Dans le précédent paragraphe nous n’avons pas abordé le cas de la SEPAQ, la raison en est que le constat d’une certaine impuissance dans les actions n’est pas vrai dans le cas de la société d’Etat. Sa capacité d’action est bien réelle, et sur la question du changement climatique elle apparaît effectivement dans l’exemple du plan de gestion environnementale, évoqué en terme de réponses et présenté dés le paragraphe suivant. La mise en place de ces actions, et leur application réglementaire sont favorisées par le statut même de la SEPAQ. L’institution est en effet une société d’Etat émanant de plusieurs ministères : le Ministère de l’Environnement et le Ministère des Ressources Naturelles. Ces deux ministères, relativement influents par ailleurs, ont créé la SEPAQ comme un « outil concret » pour la gestion des parcs et réserves naturelles. Avec comme objectif affiché la gestion raisonnée des espaces et, en corollaire, des moyens et un
18 Le plan stratégique du consortium Ouranos, Horizons 2004-2009. Mai 2006 19 HENNION, F. Entretien avec M. Antil, Direction de la recherche et de la prospective, Ministère du Tourisme. Septembre 2008
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pouvoir réglementaire pour y arriver. Dans ce contexte la SEPAQ apparaît comme garante des espaces naturels et a tout pouvoir pour mener à bien sa mission. Sa capacité d’action est donc forte, et l’exemple du plan de gestion environnementale, tourné vers un développement durable des espaces, et intégrant la problématique « changement climatique » est un exemple de cette capacité.
4. Le développement durable : cadre d’actions et volonté affichée
Des exemples concrets d’applications Des exemples illustrent bien la prise en compte du développement durable au Québec, et la volonté de dépasser les simples mots pour aller vers des actions concrètes, le plan de gestion environnementale de la SEPAQ est un de ces exemples, nous l’avons abordé précédemment concernant les réponses apportés pour le tourisme sur le Saint Laurent et allons maintenant le détailler et l’expliciter.
Le plan de gestion environnemental de la SEPAQ, bientôt appliqué à l’ensemble des 23 parcs du réseau, se veut une application concrète et en adéquation avec les territoires , du développement durable. Mis en place dans tous les parcs naturels du Québec ce plan vise à limiter l’impact sur l’environnement des activités humaines et à proposer un développement raisonné des parcs20. Cette stratégie, élaborée courant 2008, décrit de façon concrète les moyens de parvenir à l’objectif, en déclinant le plan par secteur d’intervention (gestion énergétique, gestion de l’eau, gestion des aménagements…), en subdivisant ces secteurs en thématiques (pour l’exemple de la gestion énergétique ce seront : les transports, les hébergements, les équipements structurants…), et enfin en créant pour chaque thèmes des objectifs et des indicateurs d’évaluation précis (toujours dans l’exemple de la gestion environnementale : diminuer de 20% la quantité de carburant utilisée par les véhicules des parcs d’ici 2010, diminuer l’émission de GES de 9% d’ici 2010…). L’accompagnement de ce plan devra se faire par les moyens de concertation déjà évoqués, les « tables d’harmonisation ». Il convient d’ajouter que l’élaboration de ce plan s’est faite, elle aussi, après un concertation complète des territoires. Chacun des parcs a été visités par les responsables de la SEPAQ et les directeurs écoutés, afin de mettre en place un outil efficace et en adéquation avec les réalités locales. Là encore, le développement durable, dans son volet sociétal, apparaît.
Un cadre de réflexion bien intégré Même s’il n’existe pas de façon automatique des plans environnementaux tels que celui de la SEPAQ chez l’ensemble des acteurs, le développement durable apparaît comme un fil rouge dans toutes les réflexions. Avec pour tous, le sentiment partagé que la ressource environnementale et territoriale est au cœur de l’activité touristique. Nous l’avons vu, le cas des stations de ski de la province est particulier, mais là aussi la ressource naturelle est considéré avec attention, notamment dans la stratégie de l’ASSQ qui met en avant la recherche de technologies plus « propres » et moins « consommatrice » en eau et en énergie pour la production de neige artificielle. Cette conscience de la –nature ressource- pour le tourisme prend tout son sens avec l’exemple du tourisme sur le Saint Laurent, le plan de développement ayant en objectif numéro 1 une préservation de cette ressource, symbolisée par la faune des cétacés et autres mammifères marins. Dans ce cas d’étude la protection, la conservation, sont au cœur des réflexions et politiques, la notion de capacité de charge, incontournable dans ce thème,
20 HENNION, F. Entretien avec Mme Buissière, Responsable gestion et exploitation à la SEPAQ. Septembre 2008
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est mise en avant avec la recherche d’une redistribution de l’espace touristique : moins d’activité humaine sur le fleuve, redistribution de cette activité dans les espaces terrestres alentours. De même, la SEPAQ a une vision à long terme de cette protection de la ressource, l’activité des parcs naturels étant totalement dépendante d’elle. Un exemple de cette prise en compte concerne l’hébergement dans les parcs naturels, les constructions « en dur », consommatrices d’espaces et d’énergies (construction, chauffage, alimentation électrique…) sont remplacées petit à petit par des solutions plus « douces », notamment des systèmes de tentes équipées, permettant à la fois d’avoir une empreinte écologique faible et de proposer le confort nécessaire au développement touristique pour tous. Ces systèmes se développement actuellement, un partenariat a par exemple été passé avec la société française Huttopia, qui conçoit et vend ce genre de produit.
Dans tous les exemples cités, et dans l’ensemble des discours étudiés, ce qui apparaît c’est que cet objectif de développement durable n’est jamais uniquement environnemental. Parler de la recherche d’un équilibre de développement serait plus approprié. Les acteurs ne nient pas le développement économique, évidemment nécessaire et au cœur des stratégies, mais ils l’ajoutent à des concepts sociétaux et environnementaux qui se doivent d’accompagner le développement, plutôt que de le contraindre. La SEPAQ, peut être l’exemple le « plus environnemental » étudié, a pour mission de valoriser les espaces naturels, au delà de la simple conservation. Cela se traduit par le fait que la commercialisation de l’offre, la promotion, l’aménagement touristique, soient autant de missions confiées à la société d’Etat. Un même acteur à des objectifs fort divers, et il nous semble donc que la recherche de l’équilibre de développement soit favorisé dans ce système. L’exemple du GREMM à Tadoussac ajoute à cette réflexion, ici ce sont les revenus de l’activité touristique qui permettent, entre autre, le travail de protection et de sensibilisation des scientifiques. Le tourisme apparaît comme un outils de protection par la valorisation et l’apprentissage.
C’est peut être ça « l’image réelle » du Québec : La recherche d’un équilibre Bien sur le discours tenu ici peut paraître très utopique, et très formaté, mais il relève d’un travail de fond, de confrontation des discours oraux issus des entretiens à des recherches plus approfondis d’exemples et de situations concrètes. Ce discours se fondent donc sur plus qu’une simple impression. Au regard de ce travail la province du Québec n’apparaît pas comme particulièrement « verte », dans le sens développé par l’imaginaire français. Il nous paraît évident ici de devoir relativiser cette hypothèse qui entourait l’étude. Non, les québécois ne sont pas plus « écolos » qu’ailleurs. Cela relève de l’implication individuelle de chacun, du rôle d’association impliquée, de l’effet des médias… La société québécoise n’a pas plus de grands principes que la société française ou européennes, l’écologie ne rythme pas plus la vie politique que dans nos institutions, et le secteur touristique entre dans ce cadre. Il est donc question ici de remettre en cause certain clichés que l’on peut percevoir dans notre « vieux continent ». Néanmoins, nous affirmons ici que le Québec est « en avance » sur la question du développement raisonné et équilibré de l’activité humaine. Par ce terme « en avance » nous entendons « plus conscient », « plus impliqué », « plus avancé dans la recherche de réponses aux enjeux ». En effet, même si ce n’est pas l’écologie pure et dure qui symbolise la société québécoise, son environnement, son histoire, ont joué un rôle sur les évolutions actuelles. Il semble que là-bas on accepte beaucoup mieux le principe d’un développement économique nécessaire, mais qui doit être en phase avec la société et son environnement. Il n’est pas étonnant alors de constater que les principes du développement durable en soit déjà à la concrétisation dans certains cas, et que le tourisme apparaît souvent comme un enjeu de protection autant que de valorisation. Pour expliquer cela il conviendrait d’avoir une réflexion sociologique très poussée et
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complexe, à l’image du contexte québécois. Il ne s’agit pas ici de notre propos, certains facteurs peuvent être mis en avant. La position géographique d’abord, où l’influence nord-américaine est évidente et définit en partie la société. L’Histoire ensuite, dans laquelle le Québec a toujours entretenu des lien fort avec son environnement, il a toujours été la ressource essentielle de son développement, des premières traites de fourrures à l’exploitation forestière actuelle21. Enfin, les grands espaces ne sont pas qu’un cliché, et contribuent à la mentalité québécoise que nous ne faisons qu’effleurer « naïvement » ici.
5. Facteurs clés de prise en compte
Nous nous proposons ici de synthétiser les idées-clés qui émergent de la monographie de l’exemple québécois. Il ne s’agit pas d’un plan d’actions mettant en avant une « recette miracle » trouvée en étudiant le cas du système touristique québécois. En effet, l’étude ne nous a pas apporté de méthodes précises qui apporteraient une réponse directe à la prise en compte du changement climatique. Faut-il en conclure que le Québec en est au même point que la France sur le sujet ? Difficile à dire tant la complexité est grande. Néanmoins, même si cette « recette miracle » n’existe pas plus au Québec qu’en France, des constatations ont été faites. Il s’agit d’axes de réflexion, reprenant des thèmes déjà présents en France, mais sur lesquelles il nous semble important d’appuyer en s’inspirant de l’exemple québécois. Intégrer le changement climatique à un contexte environnemental plus large Il convient de ne pas isoler la problématique mais bien de l’intégrer à une réflexion environnementale globale. Le changement climatique apparaît comme un des facteurs agissant sur l’environnement, parmi d’autres qu’il faut appréhender en même temps. Les causes du changement climatique se partagent avec d’autres phénomènes naturels ; De même ses incidences sont aussi « partagées ». Pour illustrer cela, reprenons l’exemple du tourisme sur le Saint-Laurent : les bouleversements de l’écosystème du fleuve sont dus à des facteurs complexes (trop grand nombre de bateaux, développement d’algues toxiques, réchauffement de l’eau…). Le changement climatique s’insère dans ce système en étant favorisé par certains facteurs (émission de GES des bateaux) et en favorisant certains autres facteurs (température de l’eau, développement des algues dû notamment aux précipitations). Il n’est pas possible de dire « le changement climatique est responsable de l’évolution de l’écosystème du Saint Laurent », en revanche il y participe, dans les causes comme dans les conséquences. Ainsi il convient d’approcher la question environnementale globalement et en prenant le changement climatique comme un intrant du modèle. Nous pouvons aller encore plus loin en ouvrant la question à d’autre problématique que l’environnement, le changement climatique apparaît alors intégré à un système où se mêlent les crises, démographiques, économiques, sociétales, environnementales… Autant de thèmes qu’il convient d’aborder conjointement.
Adopter une approche sectorielle Dans cette complexité, afin d’adopter une prise en compte efficace, l’approche sectorielle apparaît pertinente. Comme il n’apparaît pas possible d’étudier la question de manière large il faut donc découper le système en sous-système permettant l’étude. Pour nos cas de l’activité touristique cela peut se traduite concrètement de différentes façons : un découpage territorial, où le sous-système serait un territoire à grande échelle, limitant
21 LACOURSIERE, J. ; Une Histoire du Québec. Ed Septentrion. 2002
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ainsi les données à prendre en compte ; un découpage sectorielle par activité, ici on centre la réflexion sur une activité précise, de manière là encore à limiter les données. Il est possible d’illustrer cette réflexion avec l’exemple québécois. Le découpage territorial est choisi par la SEPAQ, qui prend chacun des parcs du réseau comme un ensemble cohérent. Il est ainsi plus facile d’évaluer l’intégrité environnementale du territoire et les effets des phénomènes comme le changement climatique sur celui-ci. Le découpage par activités est adopté par le Ministère du Tourisme dans ces études. Des recherches sur l’impact du changement climatique sur le golf, sur la pratique de la moto-neige, sur le développement des croisières, sont autant d’exemples qui vont dans ce sens. Le passage de simples « mots » à des formes d’action concrètes Suite à cette prise en compte la question des réponses apportées est à considérer. Ce qui apparaît d’abord au regard du cas québécois ce sont des exemples pertinents dans l’approche de la question. Le sujet inquiète, on en parle, on en débat, on évalue les risques et on estime les évolutions, mais peu d’acteurs vont plus loin. Certes, le sujet est encore aujourd’hui source de questionnement, notamment sur ses incidences réelles actuelles et à l’avenir. Néanmoins il nous apparaît pertinent de répondre dès aujourd’hui à l’enjeu. Ne serais-ce qu’en agissant là où il existe des certitudes, ou sur des secteurs où l’atteinte environnementale est prouvée, avec le changement climatique comme facteur favorisant (cf : le tourisme sur le Saint Laurent). Le plan de gestion environnementale nous semble un exemple particulièrement pertinent. Il s’agit d’une illustration des principes du développement durable adaptés à un cadre concret et répondant à des objectifs clairs. L’activité humaine impacte l’environnement, et favorise le changement climatique, le plan va donc vers une diminution de ces impacts. Le développement économique et sociétale ne sont pas mis de côté, et accompagnent la stratégie. A ceux qui n’y verrait que des actions médiatiques, et des effets d’image, nous pouvons répondre que ces questions participent évidemment à l’ensemble. Dans une vision plus large le développement durable agit sur l’image d’un territoire, d’une activité, sans que cela soit néfaste, au contraire. La volonté d’un développement « gagnant-gagnant » doit, à notre sens, être intégré à la définition. La concertation comme outil majeur Pour porter la réflexion et la prise en compte sur le sujet, et sur les évolutions plurielles évoquées plus haut, la concertation apparaît évidemment comme indispensable. Dans le cadre de prise en compte sectorielle proposé cette concertation doit se faire avec les territoires, et avec les secteurs d’activité. De « bas en haut » d’abord, afin de comprendre les réalités locales et particulières ; De « Haut en bas » ensuite, pour faire comprendre et accepter les cadres réglementaires, les décisions, les propositions. Cette idée de concertation n’est pas nouvelle, mais est essentielle et doit être, non pas en périphérie des actions, comme pour se donner bonne conscience, mais bien au cœur de toutes stratégies. De même, elle doit être mise en place de manière relativement simple pour plus d’efficacité, et ici apparaît la problématique du mille-feuilles institutionnel français quant à l’activité touristique. Le système touristique québécois semble favoriser la concertation, par sa relative simplicité et son mode d’organisation. Les secteurs d’activités, via leurs « fédérations » provinciale le montrent (l’ASSQ, la SEPAQ, des modèles simples, pyramidaux). Les territoires appliquent eux aussi ce modèle (les communes, les ATR, le Ministère, des acteurs relativement peu nombreux). Cela se traduit par des exemples techniques de concertation qui ont été présentés tout au long de ce document. Attention il faut relativiser ici ce côté apparemment très efficace. Premièrement certains de ces systèmes ne sont pas applicables en France, l’organisation du réseau des parcs naturels en étant la parfaite illustration. Ensuite, les échanges entre ces différents systèmes ne sont eux pas
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très développés, ainsi le Ministère n’a que peu de contact avec les associations telles que l’ASSQ. Enfin, nous n’allons pas ici vers le parti pris d’une nécessaire « réduction » des échelons territoriaux en France, encore une fois sur ce point l’exemple du Québec est différent et ne relève pas des mêmes questions qu’en France, nous sommes plus d’avis à une « optimisation » du système des échelons territoriaux (dans les compétences, les organisations, les attributions…), pour plus de lisibilité et d’efficacité, tout en conservant le cadre particulier du découpage institutionnel français. Dépasser les cadres établis Nous l’avons souvent vu, le changement climatique est lié étroitement au tourisme. Ce secteur touristique est synonyme de transversalité, et cela se ressent dans le rôle et les actions des institutions touristiques, souvent limitées par le poids d’autres acteurs et le manque de lisibilité du tourisme. La question du changement climatique ne devrait-elle pas dépasser ce contexte ? L’enjeu n’apparaît-il pas encore assez important pour penser différemment ? L’idée d’un « Ministère de la question climatique » ne devrait-elle pas se traduite aujourd’hui, par l’émergence d’un outil de prise en compte qui dépasserait ce jeu d’acteurs institutionnels complexe. Il nous semble que la question mérite d’être posée.
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