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Mécanismes de la cancérogenèse

Dr. Jocelyn CERALINE

UdS/Faculté de Médecine/EA4438 Laboratoire Signalisation et Cancer de la prostate

Service d’Hématologie et d’Oncologie – HUS ceraline@unistra.fr

La genèse d’une cellule cancéreuse

Question récurrente

Quels sont les évènements qui au niveau moléculaire,

cellulaire et tissulaire conduisent à la cancérogenèse ???

La genèse d’une cellule cancéreuse

 Le dogme de la mutation somatique

 Le rôle du stroma

 Liens avec l’embryogenèse et la différenciation cellulaire

 Les cellules souches tumorales

Le dogme de la mutation somatique

  Hugo de Vries (1901) : Concept de mutation pour expliquer la sélection naturelle.

  Theodore Boveri/David Hansemann (1914) : Origine génétique des cancers

  Notions d’agents mutagènes ou carcinogènes (1914-1940s): Démonstrations que des agents extérieurs (chimiques ou physiques) pouvaient conduire au cancer.

Agents génotoxiques => lésions de l’ADN => Mutations => Cancer

  Le cancer serait donc une maladie de l’ADN.

  En touchant des gènes clés, les mutations affectent des voies de signalisation impliquées dans les mécanismes homéostatiques qui gouvernent normalement la prolifération cellulaire.

  La notion de « mutation » englobe différentes altérations génétiques :

- les mutations ponctuelles - les courtes délétions ou insertions - les pertes ou gains chromosomiques - les translocations - les insertion de séquences nucléotidiques virales.

  Ces altérations génétiques peuvent être spontanées ou héréditaires.

  Elles sont causées par un agent viral, ou résultent d’agressions génotoxiques

physiques ou chimiques.

Le dogme de la mutation somatique

Exemples d’agressions génotoxiques

  exogènes

- radiations ionisantes

•  cassures doubles brins => Délétions ou translocations •  Radicaux libres => cassures simples brins, bases endommagées

- rayonnement UV

- carcinogènes chimiques environnementaux (http://monographs.iarc.fr)

•  Amines hétérocycliques, hydrocarbures aromatiques polycycliques, amiante,

arsenic, cadmium.

•  formation de dimères de pyrimidine => double transitions CC → TT → ex : gène p53 dans les cancers cutanés.

-  Radicaux oxygénés réactifs (•OH, . •O2, …)

  endogènes

- Erreurs spontanées et non réparées au niveau de l’ADN

5-méthylCytosine

1 2

3 4

5

6

- infidélité de l’ADN polymérase au cours de la réplication de l’ADN

- dépurination

- déamination de la 5-méthylcytosine au niveau des îlots CpG

NH2

Thymine

-  stress oxydatif

-  catabolisme de composés toxiques

Aberrations chromosomiques

Gain ou perte de un ou de plusieurs chromosomes => Aneuploïdie

Réarrangements chromosomiques résultant de cassures de l’ADN ⇒  Translocations, insertions ⇒  Gènes de fusion ou forte expression d’un gène

Gain ou perte d’une portion de chromosome => amplification, larges délétions

Les mutations somatiques acquises confèrent à la cellule cancéreuse ses principales caractéristiques.

Le dogme de la mutation somatique

Les gènes cibles des mutations sont impliqués dans :

  le contrôle de la prolifération cellulaire

- Activation des médiateurs positifs

- Inactivation des médiateurs négatifs (freins)

  le contrôle de l’apoptose

  la différenciation cellulaire

  la réparation de l’ADN

  l’adhésion cellulaire

  l’angiogenèse

  l’élimination de catabolites toxiques.

Douglas Hanahan and Robert A.Weinberg. (2000). The Hallmarks of Cancer (Review). Cell, Vol. 100 : 57–70.

Cellule transformée

Modifications morphologiques,

biochimiques et biologiques

Transformation

Cellule normale

Altérations génétiques

La transformation cellulaire maligne

mutations ponctuelles, perte ou

gain chromosomique, amplification

génique, translocations, délétions

alléliques, insertions virales…

Epigénétique

  L’épigénétique (préfixe «  épi  », du grec signifiant «  au dessus  »)

conduit à un changement du phénotype sans pour autant modifier le

génotype de la cellule.

  Les modifications épigénétiques et le phénotype associé persistent

pendant les mitoses et voire même après la méiose.

  Rôle physiologique fondamental :

- contrôle de l’expression de gènes, de microRNA

- inhibition d’éléments transposables

- embryogenèse

- inactivation du chromosome X

- empreinte génétique.

L’épigénétique se traduit par des modifications de la chromatine

1.  La méthylation des cytosines au niveau d’ilots CpG.

•  Ce sont de courtes répétitions du dinucléotide Cytosine-Guanine

•  Les ilots CpG sont répartis dans tout le génome

•  Leur méthylation conduit à l’absence d’expression de tous les gènes dans la

région

•  Ils sont retrouvés au niveau de la région promotrice de certains gènes.

Contrôle de l’expression génique

La méthylation de l’ADN

  Il y a transfert d’un groupement méthyle d’un donneur, la S –adénosylméthionine, au carbone 5 de la cytosine.

  La réaction est catalysée par une famille d’enzymes appelées ADN méthyltransférases (DNMT1, DNMT3A, DNMT3B).

Cytosine

1 2

3 4

5

6

5-méthyle Cytosine (5mC)

1 2

3

4 5

6

ADN Méthyltransférase

  Toutes les cytosines ne sont pas méthylées. La séquence cible des DNMTs est 5’-CpGOH-3’ (CpG).

Conséquences de la méthylation de l’ADN

La méthylation des régions promotrices => absence de transcription des gènes dans la région.

Complexe d’activation de la transcription

FT PolII HAT

Transcription

TF : Facteurs de transcription HAT : Histone acétylase HDAC : Histone déacétylase Pol II : ARN polymérase II

: CpG non méthylé

: CpG méthylé : Histone non acétylée : Histone acétylée

DNMTs

HDAC HDAC HDAC

Transcription

TF PolII HAT

Etude de l’état de méthylation d’une région promotrice

Action du bisulfite de sodium

Bisulfite de sodium

En milieu alcalin, le bisulfite de sodium convertit les cytosines en uraciles.

Les cytosines méthylées ne sont pas affectées.

Les uraciles sont considérées comme des thymines.

The Biology of Cancer (© Garland Science 2007)

Etude de l’état de méthylation d’une région promotrice

Principe de la MS-PCR (PCR spécifique de la méthylation)

The Biology of Cancer (© Garland Science 2007)

Etat de méthylation de la région promotrice du gène suppresseur de tumeur RASSF1A

Ilot CpG méthylé Ilot CpG non méthylé

The Biology of Cancer (© Garland Science 2007)

Absence de transcription de gènes de réparation de l’ADN

Méthylation de promoteurs

Instabilité génétique Mutagenèse augmentée

Conséquences de l’hyperméthylation de promoteurs de gènes impliqués dans la cancérogenèse

Conséquences de l’hyperméthylation de promoteurs de gènes impliqués dans la cancérogenèse

Absence de transcription de gènes suppresseurs de tumeur

Méthylation de promoteurs

Prolifération des cellules cancéreuses

Hyperméthylation et cancers

En résumé

Hyperméthylation de l’ADN ≠ Altération génétique Il s’agit d’un événement épigénétique pouvant affecter le niveau

d’expression d’un gène donné.

La cancérogenèse = accumulation de modifications génétiques et épigénétiques

Exemple de la carcinogenèse prostatique

Conclusion

Modifications génétiques et épigénétiques

Cellule saine

Tumeur

International Cancer Genome Consortium

Cancer Une maladie du Génome

Challenge

  Chaque tumeur est différente   Chaque personne atteinte d’un cancer est différente

Les objectifs de la recherche sur le génome des cellules cancéreuses

 Identifier les changements au niveau génomique associés à la progression tumorale

 Identifier de nouvelles cibles thérapeutiques

 Adapter les thérapies anti-cancéreuses en fonction du génotype tumoral

Etudes systématiques du génome dans différentes localisations cancéreuses

  Forte incidence d’anomalies génétiques > souvent 10,000 mutations par cancer

- minorité sont des mutations “driver” - grande majorité sont “passagères”

  Hétérogénéité au sein et entre les types de tumeurs

‘Nouvelles Generations de séquenceurs’

Nouvelles opportunités pour des analyses plus profondes des génomes des tumeurs

 Capacité des nouveaux instruments 100,000 à 1,000,000 fois > à celle des instruments utilisés pour le projet du séquençage du génome humain

 Drastique diminution des coûts

 Applications: ADN, ARN, chromatine (i.e. épigénome)

Evolution du séquençage/Révolution

1990: milliers de bases/jour

2000: million de bases/jour

2010: milliard de bases/jour

  Les clones de cellules cancéreuses n’évolueraient pas indépendamment les uns des autres.

  Il est admis que les tumeurs sont hétérogènes, constituées de plusieurs clones cellulaires qui diffèrent les uns des autres.

  Il existerait une coopération entre les différents clones cellulaires au sein d’une tumeur.

Coopération entre cellules tumorales Un concept nouveau

La genèse d’une cellule cancéreuse

 Le dogme de la mutation somatique

 Le rôle du stroma

 Liens avec l’embryogenèse et la différenciation cellulaire

 Les cellules souches tumorales

Communications stroma – épithélium Exemple de la prostate

Rôle du stroma dans la genèse d’une cellule cancéreuse

  A l’âge adulte, les interactions entre le stroma et l’épithélium continuent de réguler la maintenance et la réparation tissulaires.

  Cette théorie propose que le stroma soit aussi la cible des changements induits par les carcinogènes.

Expériences de combinaisons stroma sain ou stroma exposé à un carcinogène/épithélium sain ou épithélium exposé au même carcinogène

Maffini et al., 2004, J. Cell Sci. 117, 1495-1502

Conclusions

  L’action du carcinogène au niveau des cellules épithéliales n’est pas suffisante pour induire la cancérogenèse dans ce modèle.

  Des altérations au niveau du stroma (mutations ???) peuvent initier la cancérogenèse au niveau de l’épithélium sans que ce dernier soit exposé au carcinogène.

Rôle du stroma dans la genèse d’une cellule cancéreuse

Rôle du stroma dans la genèse d’une cellule cancéreuse

Les actions paracrines du facteur de croissance fibroblastique (FGF10), d’origine stromale, sont suffisantes pour la transformation histologique de l’épithélium prostatique adjacent.

La genèse d’une cellule cancéreuse

 Le dogme de la mutation somatique

 Le rôle du stroma

 Liens avec l’embryogenèse et la différenciation cellulaire

 Les cellules souches tumorales

  Développement tumoral similaire à l’organogenèse au cours du développement

embryonnaire

- Rythme soutenu des divisions cellulaires

- Invasion des trophoblastes dans la matrice utérine

- Expression de gènes architectes

- Implication des mêmes voies de signalisation

- Transition épithéliale-mésenchymateuse

- Migration des cellules de l’œuf lors de l’organogenèse/cellules métastatiques

Embryogenèse, différenciation, et cancérogenèse

Propriétés invasives comme les cellules tumorales

-  Prolifération soutenue

-  Expression ou répression de molécules d’adhésion cellulaire

-  Sécrétion d’enzymes de digestion de la matrice extracellulaire

-  Activation de la télomérase

-  Néo-angiogenèse

-  Echappement au système immunitaire.

Similitudes entre développement du placenta et cancérogenèse

Trophoblastes : Mise en place des surfaces d’échanges nutritionnels et gazeux.

Embryogenèse, différenciation, et cancérogenèse

  le contrôle de la prolifération cellulaire

  le contrôle de l’apoptose

  la différenciation cellulaire

  la réparation de l’ADN

  l’adhésion cellulaire

  l’angiogenèse

  l’élimination de catabolites toxiques.

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2000

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Vol

. 10

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Les gènes cibles des mutations sont impliqués dans :

De nombreux gènes architectes impliqués dans la différenciation au cours de l’embryogenèse sont cibles d’altérations génétiques lors de la genèse d’une cellule cancéreuse.

Exemples de gènes contrôlant la différenciation cellulaire lors de l’embryogenèse et impliqués dans la cancérogenèse

=> Gènes à homeobox (HOX) codant pour des protéines (facteurs de transcription) à homéodomaine.

⇒ Translocations chromosomiques retrouvées dans les leucémies myéloïdes aiguës. ⇒  Expression altérée dans les cancers colorectaux, pancréas, estomac. ⇒  Morphogène et Gène suppresseur de tumeur dans le côlon adulte ???

  Cdx2 (Caudal type homeobox transcription factor 2) jouant un rôle dans la différenciation hématopoïétique

  NKX3.1 code pour une protéine impliquée dans le développement du tractus urogénital au cours de l’embryogenèse.

→ perte d’expression entraîne un délai de la différenciation cellulaire

=> lésions précancéreuses prostatiques.

  Exemple du Sarcome d’Ewing

  Tumeur à « petites cellules rondes » se développant aux dépens des tissus mous et osseux.

  100 cas/an en France, enfants et adultes confondus

  Cellules primitives neuro-ectodermiques présentant des degrés variables de différenciation.

  Origine cellulaire inconnue.

Exemples de gènes contrôlant la différenciation cellulaire lors de l’embryogenèse et impliqués dans la cancérogenèse

Sarcomes d’Ewing Un événement génétique unique est suffisant pour induire la

cancérogenèse

Dans les deux cas, la protéine anormale entraîne une activation continue du récepteur membranaire de l’Insulin-like Growth factor (IGF-1) ⇒ Prolifération cellulaire.

  Translocation t(21;22)(q22;q12) : EWS-ERG => 15 % des tumeurs d'Ewing

  Translocation t(11;22)(q24;q12) : EWS-FLI1 => 85 % des tumeurs d'Ewing

Sarcomes d’Ewing

Origine mésenchymateuse des tumeurs d’Ewing

Tirode et al., 2008; M/S n°3.

Différenciation cellulaire et cancérogenèse

  La cellule cancéreuse est peu différenciée et proliférative

Cellule cancéreuse

Etat prolifératif

Cellule souche indifférenciée Cellule différenciée

fonctionnelle

+ +++ 0

X Cellule peu différenciée

+++

Aut

o-re

nouv

elle

men

t

p53

La genèse d’une cellule cancéreuse

 Le dogme de la mutation somatique

 Le rôle du stroma

 Liens avec l’embryogenèse et la différenciation cellulaire

 Les cellules souches tumorales

Cellules souches et cancérogenèse

  Seule une petite fraction de cellules au sein d’une tumeur ont la capacité de propager la tumeur dans un modèle de souris immunodéprimées.

  Ces cellules sont dénommées «  cellules souches cancéreuses » ou « cancer stem cells » (CSC)

  Elles se distinguent des autres cellules au sein de la tumeur par l’expression de marqueurs de surface spécifiques de cellules immatures.

Hamburger AW, Salmon SE. Primary bioassay of human tumor stem cells. Science 1977; 197: 461–463.

Isolement de cellules souches cancéreuses

D’après Vermeulen et al., Cell death and differentiation, 2008

Cellules souches et cancérogenèse

Vermeulen et al., Cell death and differentiation, 2008

Cellule souche cancéreuse Capacité d’auto-renouvellement

Cellules cancéreuses différenciées Non tumorigènes Capacité d’auto-renouvellement nulle

  La tumeur serait vue comme un organe anormal avec son compartiment de cellules souches qui contrôle la prolifération cellulaire.

  Les CSC ont la capacité d’auto-renouvellement et seraient à l’origine de la grande variété de cellules différenciées présentes au sein de la tumeur.

Cellules souches et cancérogenèse

  Gold standard :

1) Des cellules sont définies comme CSC si elles ont la capacité de donner une phénocopie de la tumeur initiale dans un modèle de souris immunodéprimée.

2) La tumeur résultante peut être xénotransplantée en série.

Cellules souches et cancérogenèse

D’après Vermeulen et al., Cell death and differentiation, 2008

  La pression de sélection se fait au niveau des CSC.

  Acquisition d’altérations génétiques???

Sélection clonale de clones hiérarchisés

Cellules souches cancéreuses et résistance aux traitements anti-cancéreux

Vermeulen et al., Cell death and differentiation, 2008

Les cellules résiduelles après traitement anti-cancéreux :

A. = Uniquement les cellules souches cancéreuses

B. = Un clone CSC pré-existant et résistant suite à une accumulation d’altérations génétiques

A.

B.

CSC Cellules cancéreuses différenciées

Cancérogenèse et cellules souches pluripotentes

Rôles de p53 dans la réponse thérapeutique

Implication de p53 dans l’auto-renouvellement des cellules souches embryonnaires et dans leur réponse à

des agressions génotoxiques

Conséquences de l’inactivation de p53

Lecture

•  Tannock IF, Hill RP. - The basic science of Oncology, MC Graw-Hill Editions Nouvelle édition.

•  Lacave R, Larsen CJ, Robert J. Cancérologie fondamentale, Coll. Société Française du Cancer, John Libbey Eurotext, 2005.

•  Robert A. Weinberg. The Biology of Cancer, Garland Science, 2007.

•  Tirode F, Laud-Duval K, Prieur A, Delorme B, Charbord P, Delattre O. Mesenchymal stem cell features of Ewing tumors. Cancer Cell. 2007 May;11(5):421-9.

•  Vermeulen L, Sprick MR, Kemper K, Stassi G, Medema JP. Cancer stem cells - old concepts, new insights. Cell Death Differ. 2008 Feb 15; [Epub ahead of print].