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Cours DES gynécologie-obstétrique5è semestre- 17/12/2012
Chloé Maignien
Madame M, née en 1970, G0P0, célibataire est porteuse depuis 12 mois d’un SIU aulevonorgestrel. Après une phase de 3 mois où elle a présenté de l’acné et des saignements, les problèmes cutanés se sont amendés, mais les saignements persistent. Ils sont isolés.Le SIU a été mis en place en raison de règles devenues plus abondantes, l’échographie n’ayant pas décelé d’anomalie. Mme M na pas d’antécédents personnels en dehors d’un surpoids (IMC 30 kg/m2). Elle n’a pas d’antécédents familiaux notamment carcinologiques.
Quelles indications donnez-vous à Mme M sur ces saignements?
◦ Persistance de métrorragies > 3-6 mois, sous SIU au levonorgestrel nécessite des explorations complémentaires
◦ But : éliminer une pathologie organique sous-jacente
◦ Les métrorragies fonctionnelles doivent rester un diagnostic d’élimination
◦ Pathologies organiques bénignes : Fibromes Polype Adénomyose Hyperplasie de l’endomètre
◦ Pathologies organiques malignes : Cancer du col ou de l’endomètre (facteurs de risque :
nulliparité, surpoids)◦ Grossesse
◦ Moins probables : Troubles de l’hémostase (thrombopénies,
thrombopathies, maladie de Willebrand…)
◦ Métrorragies fonctionnelles = diagnostic d’élimination : Echec du traitement médical par SIU au
lévonorgestrel (hyperplasie de l’endomètre liée à une hyperoestrogénie relative, favorisée par l’obésité)
Iatrogénie du SIU (atrophie endométriale) : habituellement, les effets indésirables du SIU sont fréquents les 1ers mois, puis diminuent avec le temps
→ acné les 3 premiers mois
Quel bilan clinique et/ou paraclinique réalisez-vous dans un premier temps (justifier)? ◦ Interrogatoire
Histoire menstruelle, pour identifier facteurs de risque de cancer de l’endomètre ou arguments en faveur d’une pathologie organique préexistante : Date de la ménarche Durée des cycles Durée et abondance des règles Signes fonctionnels associés (dysménorrhée, douleurs
pelviennes chroniques, dyspareunie…) Vie sexuelle (facteurs de risque de cancer du col,
grossesse) Tabagisme (risque de cancer du col)
Caractéristiques des saignements : Périodicité Durée Facteurs déclenchants (rapports sexuels→ cancer du col) Abondance : nombre de protections, score P BAC,
retentissement sur la qualité de vie, signes d’anémie Signes associés : altération de l’état général, douleurs
pelviennes, signes fonctionnels urinaires/digestifs… Recherche d’étiologies spécifiques :
Prise médicamenteuse (aspirine, AINS) Histoire personnelle/familiale évocatrice de troubles de
l’hémostase (hématomes spontanés/post-opératoires, hémorragies muqueuses, ATCD de maladie de Willebrand)
Signes sympathiques de grossesse
◦ Examen clinique Inspection cutanéo-muqueuse, pouls : recherche de
signes d’anémie (pâleur, tachycardie, dyspnée d’effort)
PA, poids, taille, BMI : recherche de facteurs de risque de cancer de l’endomètre (HTA, obésité)
Palpation abdominale Hépato/splénomégalie, ascite; en faveur d’une
pathologie maligne Taille de l’utérus (fibromes)
Aires ganglionnaires (adénopathies suspectes de malignité)
Examen au spéculum : Inspection vaginale et cervicale à la recherche d’un
diagnostic différentiel (ectropion, cervicite, lésion suspecte…), d’un polype accouché par le col
Ablation du SIU et envoi en bactériologie Frottis cervico-utérin Biopsie de l’endomètre avec une pipelle de Cormier
(hyperplasie, cancer)
Touchers pelviens : Volume utérin Douleur à la mobilisation utérine Masse latéro-utérine Col/vagin/paramètres Carcinose
◦ Examens complémentaires : hCG NFS-plaquettes (retentissement des saignements =
anémie; thrombopénie) Ferritine si anémie TP-TCA, facteur Willebrand si histoire de évocatrice de
coagulopathie Echographie pelvienne par voie abdominale et
endovaginale + étude doppler: Fibromes Polypes Aspect évocateur d’adénomyose (volumineux utérus,
asymétrie des parois myométriales, aspect hétérogène du myomètre avec images kystiques…)
Epaisseur, régularité, vascularisation de l’endomètre
L’échographie montre un endomètre de 12 mm; quel complément de bilan réalisez-vous?◦ Hystéroscopie diagnostique :
En consultation; après avoir éliminé une grossesse Sérum physiologique pour la distension utérine Aspect de la cavité, de l’endomètre :
Fibrome, polype ? Lésion endométriale suspecte Biopsies de l’endomètre dirigées, pour examen
anatomopathologique
Votre bilan met en évidence trois foyers microinvasifs d’adénocarcinome endométrioide de l’endomètre classé stade 1A grade 1 au sein d’un endomètre en hyperplasie atypique.
Mme M souhaite ne pas être opérée car elle est nullipare. CAT?
Classification FIGO anatomochirurgicale (2009)
Stades I : Tumeur limitée au corps utérin o IA : Tumeur limitée à l’endomètre ou ne dépassant pas la moitiédu myomètreo IB : Tumeur envahissant la moitié du myomètre ou plus de lamoitié du myomètre
Stades II : Tumeur envahissant le stroma cervical mais ne s’étendant pas au delà de l’utérus
Stades III : Extensions locales et/ou régionales comme suit o IIIA : Séreuse et/ou annexeso IIIB : Envahissement vaginal et/ou paramétrialo IIIC : Atteinte des ganglions lymphatiques régionaux
o IIIC1 o Ganglions pelvienso IIIC2 o Ganglions lomboaortiques +/- ganglions pelviens
Stades IV : Extension à la muqueuse vésicale et/ou intestinale et/ou métastases à distance
o IVA : Extension à la muqueuse vésicale et/ou intestinale o IVB : Métastases à distance incluant les métastases intraabdominaleset/ou ganglions inguinaux
Grade histologique
La prise en charge thérapeutique est déterminée en fonction du risque de récidive, défini en fonction du stade, du type histologique et du grade selon la classification de l’European Society for Medical Oncology (ESMO) puliée en 2009 :
→ Stade IA grade 1, type 1 histologique = Risque bas → Traitement chirurgical : hystérectomie totale avec salpingo-ovariectomie bilatérale →Le traitement conservateur de l’utérus n’est pas recommandé mais peut être discutépour des patientes désirant une grossesse, présentant des tumeurs supposées destade I, grade 1 sans envahissement myométrial, au mieux après explorationcoelioscopique des ovaires pour éliminer une extension extra-utérine ou de la séreuse
- grade 1 : ≤ 5 % de contingent indifférencié,- grade 2 : 6-50 % de contingent indifférencié,- grade 3 : > 50 % de contingent indifférencié
◦ Faire un bilan d’extension locorégionale, pour rechercher une contre-indication au traitement conservateur : Clinique (SF évocateurs d’un envahissement digestif ou
urinaire, aires ganglionnaires, ascite, envahissement col/vagin/paramètres au spéculum/TV/TR)
IRM pelvienne avec exploration des aires ganglionnaires lomboaortiques (infiltration myométriale, envahissement cervical/vaginal/ paramétrial, atteinte rectale/vésicale, extension ganglionnaire)
Exploration coelioscopique : atteinte ovarienne ou de la séreuse
CA 125 recommandé si suspicion d’extension régionale, atteinte ovarienne (stade III), ou type 2 histologique
◦ Information de la patiente sur le traitement de référence : Hystérectomie totale avec annexectomie bilatérale
par voie coeliovaginale
Intérêt double : Staging Thérapeutique
Pronostic : 95% de survie à 5 ans
◦ Information concernant le traitement conservateur :
Hormonothérapie par progestatifs (acétate de médroxyprogestérone, acétate de mégestrol, SIU au levonorgestrel)
Risques : Sous-estimer le stade tumoral, et la présence de tumeurs
synchrones (11-29%) → exploration coelioscopique des ovaires Progression sous traitement/récidive après traitement Peu de données de la littérature concernant l’efficacité, les
rechutes, le taux de grossesse, les modalités du traitement et du suivi
Résultats : Etudes descriptives, petits effectifs, différences dans les thérapeutiques
et modalités de suivi, durée de suivi Taux de réponse complète : 75 % Taux de rechute : 30 % (médiane variable) Taux de grossesse : 30 %
Nécessité d’un suivi rapproché (échographies, biopsies endomètre répétées), recours fréquent à la PMA, lutte contre le surpoids
Traitement chirurgical dès projet parental accompli Ushijima et al. J Clin Oncol 2007
Park et al. Eur J Cancer 2012Koskas et al. Anticancer Res 2012
Bovicelli et al. J Cell Phys 2012Kesterson et al. J Clin Oncol 2012
Gallo et al. Am J Obstet Gynecol 2012
Mme M a finalement bénéficié d’une HTNC + curages pelviens. Elle revient vous voir en raison de bouffées de chaleur importantes.Que peut on lui proposer?
◦ Troubles du climatère liés à une ménopause secondaire à l’ovariectomie bilatérale
◦ Problème : THS classiquement contre-indiqué chez les patientes aux antécédents de cancer de l’endomètre
◦ Mais …
Recommandations de l’INCa (2010) :
« Il n’y a pas de contre-indication à un traitement hormonal substitutif uniquement oestrogénique chez les femmes de moins de 50 ans qui peut être proposé au titre du traitement de la ménopause secondaire à l’ovariectomie bilatérale. »
◦ Données de la littérature :
Quelques études non randomisées, rétrospectives Patientes traitées par THS (ATCD de cancer de
l’endomètre stade I) vs patientes contrôles Pas d’augmentation du risque de récidive Biais : petits effectifs, groupes non comparables,
pronostic plus favorable des patientes traitées par THS
Creasman et al. Obstet Gynecol. 1986Lee et al. Gynecol Oncol. 1990
Chapman et al. Am J Obstet Gynecol. 1996Suriano et al. Obstet Gynecol. 2001
Ayhan et al. Int J Gynecol Cancer. 2006
1 essai contrôlé randomisé, THS contre placebo, en double-aveugle THS après cancer stades I ou II 618 patientes dans chaque bras Suivi moyen de 35,7 mois Récidives : 2,3% dans le bras THS/ 1,9% dans le bras
placebo Mortalité : 0,8% vs 0,6% Biais : arrêt prématuré de l’essai car diminution des
inclusions; mauvaise observance des patientes dans le bras THS (41%); inclusions de formes à faible risque de récidive → nombre de récurrences insuffisant → puissance statistique insuffisante)
Barakat et al. J Clin Oncol. 2006
◦ Conclusion : Discussion en RCP Information éclairée de la patiente (THS le plus
efficace sur les symptômes, mais données parcellaires sur le risque de récidive)
Privilégier les alternatives Règles hygiéno-diététiques (éviter caféine, tabac;
ambiance tempérée; vêtements confortables + activité physique régulière, lutte contre le surpoids, 1,2-1,5g de calcium/jour)
Phytoestrogènes (isoflavone…) IRS, gabapentine
Si THS : Estradiol par voie orale (1mg/j), transcutanée (timbre de
25 ou 37,5µg) ou percutanée (gel 1mesure) Posologie minimale efficace Durée la plus courte possible (réévaluation annuelle) Efficace également dans la prévention de l’ostéoporose
post-ménopausique
Tibolone : non, car a des propriétés estrogéniques, et pas de données dans la littérature
Tableau comparatif des différents traitements disponibles
Stearns et al. Lancet. 2007
Agent Number of studiesin meta-analysis
Duration oftreatment
Mean diff erence in number
of hot fl ushes per day*
Oral 17-β-oestradiol and progestagen
5 12 to 24 weeks –16 ・ 8 (–23 ・ 4 to –10 ・ 2)†
Transdermal 17-β-oestradiol
6 11 to 12 weeks –22 ・ 4 (–35 ・ 9 to –10 ・ 4)†
Gabapentin 2 8 to 12 weeks –2 ・ 05 (–2 ・ 80 to –1 ・ 30)
SSRI or SNRI (paroxetine, venalfaxine,citalopram)
6 4 weeks to12 months
–1 ・ 13 (–1 ・ 70 to –0 ・ 57)
Red-clover isoflavones
6 12 weeks to12 months
–0 ・ 44 (–1 ・ 47 to 0 ・ 58)
Soy isoflavones 11 4 to 6 weeks
6 months
12 months
–1 ・ 15 (–2 ・ 33 to 0 ・ 03)
–0 ・ 97 (–1 ・ 82 to –0 ・ 12)
–1 ・ 22 (–2 ・ 02 to –0 ・ 42)
Clonidine 10 4 weeks
8 weeks
–0 ・ 95 (–1 ・ 44 to –0 ・ 47)
–1 ・ 63 (–2 ・ 76 to –0 ・ 05)
Demandez vous un complément d’examens chez cette patiente? (justifier)
◦ Oui ◦ Evaluer les conséquences de la ménopause précoce
Risque cardio-vasculaire : glycémie à jeun, cholestérol total, triglycérides
Risque osseux : ostéodensitométrie ◦ Dépistage du cancer du sein (terrain
d’hyperestrogénie ) : mammographie bilatérale de dépistage
◦ Recherche d’un syndrome de Lynch Cancer de l’endomètre < 50 ans Consultation d’oncogénétique Recherche de l’instabilité des microsatellites sur la pièce
opératoire
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