Post on 03-Jul-2020
BA NDEYE FATOUMATA
Analyse multicritère pour la priorisation des
interventions en matière d’approvisionnement en eau en
milieu rural au Sénégal : cas de la région de Diourbel.
Mémoire présenté
à la Faculté des études supérieures de l’Université Laval
dans le cadre du programme de maîtrise en génie civil
pour l’obtention du grade de maîtrise ès science (M. Sc.)
SCIENCE ET GÉNIE
GÉNIE CIVIL
UNIVERSITÉ LAVAL
QUÉBEC
2009
© Ba N. Fatoumata, 2009
i
Remerciements
Au moment où je rédige les dernières lignes de mon mémoire de maîtrise, je tiens à faire
part de ma profonde gratitude à M. Christian Bouchard pour avoir accepté de m’encadrer
dans ce projet, pour ses précieux conseils, sa compréhension et sa disponibilité. Le chemin
a été long et souvent difficile. Vous m’y avez accompagnée sans relâche et avec beaucoup
de rigueur dès les premiers moments. Merci M. Bouchard pour la générosité d’esprit dont
vous avez fait preuve en mon égard.
J’exprime également toute ma gratitude à Mme Irène Abi-Zeid, co-directrice de ce
mémoire, pour son appui ses conseils avisés et ses encouragements. C’est elle qui m’a
transmise mes connaissances de base en aide à la décision. Son sens de la précision a été
d’un apport appréciable dans les travaux de recherche. Mille mercis Irène.
Mes remerciements vont aussi à l’endroit de M. Bruno Urli, professeur à l’Université du
Québec à Rimouski pour avoir accepté avec diligence et beaucoup d’intérêt, non seulement
de réviser ce mémoire mais aussi, de participer au jury du séminaire de présentation des
travaux de recherche.
À toute ma famille, pour son soutien inconditionnel, je tiens à réaffirmer toute ma
reconnaissance et mon affection. Parce que le caractère académique de ce document
demande une certaine réserve, je me contenterai de paraphraser Jean Gabin qui disait : ‘‘le
jour où quelqu’un vous aime, il fait très beau. Je ne peux pas mieux dire, il fait très beau’’!
Merci à tous ceux qui, de près ou de loin, ont contribué au bon déroulement de ce mémoire,
par un conseil, par un document, par une information ou par un sourire. Ils sont nombreux.
Merci à chacun d’entre vous.
Alkhamdoulila.
ii
Résumé
De nombreux programmes et projets visant l’accès aux ressources en eau sont initiés au
Sénégal pour satisfaire une demande en eau qui se fait de plus en plus pressante en milieu
rural notamment. L’insuffisance des moyens financiers pour mettre à la disposition des
populations une eau de bonne qualité en quantité suffisante impose qu’un échelonnement
dans le temps soit opéré pour la réalisation de ces projets. En amont des études de
faisabilité technique et économique, il est nécessaire d’identifier les diverses dimensions
que revêt l’allocation des ressources en eau afin d’établir des priorités d’investissement.
Cette étude présente une analyse multicritère d’aide à la décision pour définir les priorités
d’interventions relatives à l’approvisionnement en eau. Après avoir identifié les objectifs
relatifs à l’approvisionnement en eau en milieu rural en général, sept critères (quantitatifs et
qualitatifs) de priorité permettant d’atteindre ces objectifs sont définis. Ils portent sur la
qualité des eaux disponibles, la quantité d’eau disponible pour les besoins domestiques, la
distance d’accès aux points d’eau, l’acceptabilité des coûts de l’eau, le potentiel de
développement et enfin la disponibilité de l’eau pour l’agriculture. Des indicateurs de
mesure sont proposés en fonction des données disponibles pour chacun des critères
pondérés par des acteurs de la gestion des ressources en eau au Sénégal. La région de
Diourbel au Sénégal est étudiée en particulier. Il s’agit d’une région essentiellement
alimentée par des eaux souterraines de qualité médiocre et où le manque d’eau est
récurrent. Elle sert à la fois de cadre d’élaboration et d’analyse de la démarche. L’analyse
multicritère d’aide à la décision pour prioriser les besoins d’intervention en matière
d’approvisionnement en eau de Diourbel aboutit au rangement par ordre de priorité des huit
arrondissements de la région par la méthode MACBETH (Measuring of Attractiveness by
Categorical Based Evaluation Technique). L’atteinte de l’objectif consistant à favoriser
l’élevage n’est cependant pas mesuré faute de données. Ainsi, le critère portant sur la
disponibilité de l’eau pour le cheptel n’a pas été retenu dans l’évaluation des
arrondissements de Diourbel. Une analyse de sensibilité permet de juger de l’effet des
variations des pondérations sur le classement ainsi obtenu. L’analyse du processus dans son
ensemble permet de mettre en exergue les difficultés potentielles liées à l’utilisation d’une
telle démarche dans le contexte sénégalais tout en laissant entrevoir des perspectives plutôt
prometteuses quant aux possibilités de mise en application.
iii
Abstract
Many programs and projects for water resources management are initiated in Senegal to
satisfy an increasing demand for water, especially in rural areas. The lack of sufficient
funding requires that these projects be spread over time. Therefore, prior to any technical or
economic feasibility study, it is necessary to identify the higher priority areas. This study
presents a multicriteria analysis for ranking rural subareas in Senegal, in particular in the
region of Diourbel, in terms of prioroities of water supply needs. After having identified the
objectives related to water supply on the regional scale, six quantitative and qualitative
priority criteria were defined. These criteria pertain to the available water quality, the
available quantity of water for domestic needs, the distance to water distribution points, the
availability of water for agriculture, the acceptability of water costs and the development
potential of a rural subarea. The achievement of the objective which consists in supporting
the cattle farming is however not measured due to lack of data. Indicators are proposed for
each criterion based on the data available at the time of the study. Criteria weights were
obtained from various water resource management stakeholders in Senegal. It’s a region
essentially feed by mediocre quality groundwater and where the lack of good water quality
is recurrent. Our multicriteria analysis leads to the ranking of eight districts of the Diourbel
region in terms of intervention priority. A sensitivity analysis enabled us to evaluate the
effect of the criteria weights on the districts ranking. Our experience with this project has
brought forward the difficulties associated with conducting a multicriteria analysis in the
Senegalese context, while emphasizing promising application possibilities.
iv
Avant-Propos
Ce mémoire intègre un article soumis pour publication à la Revue des Sciences de l’Eau.
L’auteure principale de l’article est l’étudiante Ba Ndeye Fatoumata, également auteur de
ce mémoire. Le premier co-auteur est M. Christian Bouchard, professeur au département de
Génie Civil de l’Université Laval. La seconde co-auteure est Mme Irène Abi-Zeid,
professeure au département d’Opération et Systèmes de Décision de l’Université Laval.
v
L’eau est un vecteur d’inégalités profondes
car sa répartition place États et population
dans une situation de disparités dont on a du
mal à imaginer l’importance1.
1 Fauchon Loïc (1998). Gestion future des ressources en eau dans l'espace méditerranéen, Congrès de Kaslik,
Liban 1998.
vi
Acronymes et abréviation
AFD : Agence Française de Développement
AHP : Analytic Hierarchy Process
APRHN : L’Agence de Promotion du Réseau Hydrographique National
ARD : Agence Régionale de Développement
ASUFOR : Association des Usagers de Forage
BAD : Banque Africaine de Développement
DEM : Direction de l’Exploitation et de la Maintenance
CR : Communauté Rurale
CSE : Conseil Supérieur de l’Eau
DGPRE: Direction de la Gestion et de la Planification des Ressources en Eau
DH : Déficit Hydrique
DHR ou DHY : Direction de l’Hydraulique Rurale
DRDR : Direction régionale de Développement Rural
DSPR : Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté
ELECTRE : Elimination et Choix Traduisant la Réalité
FAO: Organisation des Nations unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (Food and
Agriculture Organization)
F CFA : Franc de la Communauté Française d’Afrique
GIRE : Gestion Intégrée des Ressources en Eau
ISDEI : Indicateur Simplifié de Satisfaction de la Demande en eau d’Irrigation
MACBETH: Measuring Attractiveness by Categorical Based Evaluation Technique
MAHS : Ministère de l’Agriculture et de l’Hydraulique du Sénégal
MEFS : Ministère de l’Économie et des Finances du Sénégal
PAPIL : Projet d’Appui à la Petite Irrigation Locale
PCR : Président de communauté Rurale
PEPAM : Projet eau Potable et Assainissement du Millénaire
PELT : Projet Eau à Long terme
PNDA : Plan Naional de Développement Rural
PNIR : Programme National d’Infrastructures Rurales
vii
PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement
PRDI : Plan Régional de Développement Intégré
PROMETHEE : Preference Ranking Organization METHod for Enrichment Evaluations
OMD : Objectifs du Millénaire pour le Développement
OMS : Organisation Mondiale de la Santé
REVA : Retour Vers l’Agriculture
SAUR : Société d’Aménagent Urbain et Rural
SDE : Sénégalaise Des Eaux
SONES : Société Nationale des Eaux du Sénégal
SONEES : Société d’Exploitation des Eaux du Sénégal
TTC : Toutes Taxes Comprises
UNICEF: United Nations International Children's Emergency Fund
viii
Table des matières
Remerciements .................................................................................................. i
Résumé .............................................................................................................. ii
Abstract ............................................................................................................iii
Avant-Propos ................................................................................................... iv
Table des matières ........................................................................................ viii
Liste des tableaux ............................................................................................. x
Liste des figures ................................................................................................ x
Introduction ...................................................................................................... 1
Revue de Littérature ........................................................................................ 5
1. La gestion de l’eau au Sénégal ........................................................................................... 6
1.1 La problématique de l’approvisionnement en eau ........................................................ 6
1.1.1 L’eau : une prise de conscience collective ............................................................ 6
1.1.2 L’état de la ressource en eau au Sénégal ............................................................... 7
1.1.3 L’approvisionnement en eau .................................................................................. 8
1.2 L’organisation de la gestion de l’eau au Sénégal ........................................................ 10
1. 2.1 Cadre institutionnel, réglementaire et législatif .................................................. 10
1.2.2 Une gestion complexe ......................................................................................... 16
1.2.3 Revue stratégique du secteur ............................................................................... 17
2. Les méthodes d’aide multicritères à la décision .......................................................... 21
2.1 Généralités ................................................................................................................... 21
2.1.1 L’aide à la décision .............................................................................................. 21
2.1.2 L’aide multicritère à la décision ......................................................................... 22
2.2 L’application des méthodes multicritères à la gestion des ressources en eau ............. 26
2.3 La méthode MACBETH ............................................................................................. 27
Article .............................................................................................................. 33
Résumé .................................................................................................................................. 35
ix
Abstract ................................................................................................................................. 36
1. Introduction ...................................................................................................................... 37
2. Contexte de recherche ...................................................................................................... 38
2.1 Présentation de la région de Diourbel ......................................................................... 38
2. 2 L’approche méthodologique ...................................................................................... 40
3. Structuration du processus ................................................................................................ 42
3.1 Identification des acteurs et des décideurs .................................................................. 42
3. 2 Choix des unités territoriales ..................................................................................... 43
3.3 Identification des objectifs et formulation des critères ............................................... 43
3.4 Évaluations des arrondissements ................................................................................ 45
4. Rangement des arrondissements ....................................................................................... 52
4.1 Le logiciel M-MACBETH .......................................................................................... 52
4.2 Pondération des critères .............................................................................................. 53
4.3 Fonctions de valeur ..................................................................................................... 54
5. Analyse des résultats et de la démarche ............................................................................ 58
6. Conclusion ........................................................................................................................ 60
Remerciements ...................................................................................................................... 61
Complément sur la méthodologie : détermination des unités territoriales
et orientation adoptée pour l’évaluation des unités territoriales .............. 65
Définition des critères .................................................................................... 68
Conclusion générale ....................................................................................... 78
Bibliographie................................................................................................... 79
Annexes ........................................................................................................... 87
Annexe A : Présentation de la région de Diourbel ............................................................... 88
Annexe B : Description des ouvrages d’adduction d’eau en milieu rural ............................ 93
Annexe C : Questionnaire transmis aux présidents de communauté rurale (PCR) pour
estimer l’acceptabilité des populations à payer l’eau ........................................................... 95
Annexe D : Critère accessibilité au point d’eau - Script ArcView ..................................... 100
x
Liste des tableaux
Tableau 1- Tranche tarifaire de la SDE
Tableau 2- Matrice des jugements inconsistants
Tableau 3- Intervalles de qualité d’eau souterraine
Tableau 4- Détermination de la qualité globale de l’eau.
Tableau 5- Pondération, évaluation et priorités.
Liste des figures
Figure 1- Schéma organisationnel des services de l’eau potable en milieu rural.
Figure 2- Les étapes d’un processus de prise de décision
Figure 3- Classification des techniques d’analyse multicritère.
Figure 4-Exemple de matrice des jugements d’attractivité du logiciel M-MACBETH.
Figure 5- Schéma d’une situation d’inconsistance sémantique
Figure 6- Carte de la région de Diourbel
Figure 7 - Schéma du processus d’élaboration de la démarche
Figure 8 - Arbre des objectifs, critères et indicateurs de mesure
Figure 9- Fonctions de valeurs
Figure 10- Effet de la pondération sur le rangement des arrondissements
Figure 11- Borne fontaine
Figure 12 - Borme avec pompe à motricité humaine
Figure 13- Puits moderne
1
Introduction
Mise en contexte et motivation
L’exploitation rationnelle et équitable des ressources en eau est l’un des enjeux majeurs de
notre époque. Dans les pays de l’Afrique subsaharienne où se conjuguent accroissement
démographique rapide, sécheresse et manque de moyens financiers pour l’exploitation des
ressources, plus qu’une priorité, le problème de l’accès à l’eau est une question de survie
pour ces pays en voie de développement. En effet, l’eau est un vecteur de développement
incontestable mais c’est avant tout une ressource vitale. L’enjeu stratégique que représente
l’accès à l’eau est reconnu par la communauté internationale de sorte qu’il est maintenant
considéré comme un droit humain de base [ONU, 2002]. Aujourd’hui, c’est donc une
obligation pour les gouvernements de mettre en place des politiques garantissant ce droit.
Le Sénégal, à l’image d’autres pays sahéliens, développe des programmes et projets
favorisant l’accès des populations à l’eau pour ses divers usages. Malgré un souci de plus
en plus affirmé des autorités de garantir cet accès à tous, les populations rurales demeurent
les moins bien servies. Au Sénégal, seuls 67% de la population en milieu rural disposent
d’un accès raisonnable à l’eau contre 87% en milieu urbain [MAHS, 2004].
Problématique
Les causes majeures d’une telle disparité résident dans l’inégale répartition des ressources
hydriques sur le territoire, dans la multiplicité des facteurs à intégrer mais surtout dans le
manque de moyens financiers pour mettre à la disposition des populations une eau de
qualité et en quantité suffisante. L’ampleur du problème n’étant pas la même partout et les
moyens étant limités, il est dès lors pertinent de chercher à élaborer des stratégies
d’allocation et de gestion intégrée des ressources en eau permettant de satisfaire de manière
prioritaire les besoins en infrastructures d’adduction ou de traitement de l’eau. Pour les
mener convenablement, il est nécessaire d’y intégrer la multiplicité des dimensions des
projets et programmes d’allocation des ressources hydriques. Les traditions
socioculturelles, l’interaction entre les institutions, la motivation des intervenants, la
préservation de l’environnement et le souci de répondre aux attentes des populations sont
autant de facteurs d’importance.
2
Dans cette perspective, l’État met en place des outils pour favoriser un cadre de gestion
efficace intégrant ces diverses dimensions. Et à cet effet, une approche de gestion intégrée
des ressources en eau (GIRE) a été initiée en 2004 par le Ministère de l'Agriculture et de
l'Hydraulique et est pilotée par la Direction de la Gestion et de la Planification des
Ressources en Eau (DGPRE) [BAD, 2005]. Néanmoins, des disparités marquantes
demeurent [PNUD, 2001] tant au niveau de l’espace qu’au niveau des usages.
Contribution
L’objectif du travail de recherche présenté est de contribuer, dans une certaine mesure, à
surmonter ces difficultés. Le projet s’inscrit dans une démarche d’aide à la décision de la
gestion des ressources et des infrastructures en eau en milieu rural au Sénégal. Pour ce
faire, nous proposons une procédure pour ranger en termes de priorité d’interventions en
matière d’approvisionnement en eau, des unités territoriales sur la base de plusieurs
critères. L’analyse du cas de la région rurale de Diourbel illustre la démarche. L’étape
d’analyse des priorités d’interventions ici étudiée ne prend pas en compte l’identification
ou le choix de projets ni leur financement. Elle est située en amont. La démarche est
élaborée dans une approche systématique, permettant d’expliciter clairement la
problématique et facilitant l’analyse des nombreuses variables (qualitatives et quantitatives)
que nécessitent les décisions concernant la priorisation des interventions en matière
d’approvisionnement en eau afin d’aboutir à un choix rigoureux et transparent.
Aperçu de la méthodologie
La région de Diourbel sert de cadre d’illustration de la démarche. Il s’agit d’une région
majoritairement rurale, essentiellement alimentée par des eaux souterraines de qualité
médiocre et où le manque d’eau est récurrent. Ses huit arrondissements sont évalués selon
un ensemble de critères pondérés par des acteurs de la gestion des ressources en eau au
Sénégal. Ces critères sont établis en prenant en compte les principes du développement
durable et les exigences légales en matière d’allocation des ressources en eau au Sénégal.
L’approche proposée intègre l’utilisation de données bibliographiques sur le cadre
institutionnel et réglementaire de la gestion des ressources en eau au Sénégal. Elle
comprend aussi la collecte de variables d’évaluations sur la région d’étude. Des entrevues
3
auprès des intervenants dans le domaine et des enquêtes sur le terrain pour l’évaluation des
arrondissements sur certains critères ont également été effectuées dans l’élaboration de la
démarche d’aide multicritère proposée. Les évaluations ont nécessité le développement de
programmes de calculs pour pouvoir agréger, à l’échelle de l’arrondissement, les
informations disponibles au niveau des villages ou des communautés rurales. Un système
d’information géographique (SIG) a permis l’analyse spatiale, l’agrégation et la
représentation des données. Il s’agit du logiciel ArcView 3.2. Le logiciel d’aide multicritère
à la décision MACBETH (« Measuring Attractiveness by Categorical Based Evaluation
Technique ») [Bane e Costa et Vansnick, 1999] a servi à établir le rangement final des
arrondissements.
Objectifs et résultats attendus
Au terme de cette étude, le classement des arrondissements de la région de Diourbel en
termes de priorité d’adduction et de traitement d’eau est obtenu. L’analyse de sensibilité
des résultats permet de juger de la variation des poids accordés aux critères et de leur effet
sur le classement obtenu. Le travail inclut aussi une analyse succincte du cadre décisionnel
en matière d’allocation des ressources en eau au Sénégal.
Les différentes étapes qui ont permis d’atteindre ces résultats constituent la démarche
multicritère pour la priorisation des interventions pour l’approvisionnement en eau. Les
résultats obtenus concernent spécifiquement la région de Diourbel. Néanmoins,
globalement, la démarche pourrait être adaptée à d’autres régions rurales du Sénégal, voire
servir de cadre à l’élaboration d’un outil d’aide à la décision utile aux professionnels
œuvrant dans le domaine de la gestion des ressources en eau (administrateurs publics,
responsables de la santé publique, investisseurs, ingénieurs etc.) dans des contextes
géographiques et sociologiques similaires.
Organisation du document
Suite à ce chapitre d’introduction, le document s’organise autour de 6 grands chapitres. Le
premier chapitre correspond à la revue de littérature. La gestion de l’eau au Sénégal et les
méthodes multicritère d’aide à la décision y sont abordées.
4
Le second chapitre est constitué de l’article présentant l’analyse multicritère pour la
priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau dans le cas de la
région de Diourbel. Il peut être lu indépendamment des autres chapitres. L’article comprend
une introduction suivie par la présentation du contexte de recherche qui débute par la
présentation de la région de Diourbel ; l’exposition de l’approche achève cette seconde
section de l’article. La structuration du processus constitue la troisième section. Elle inclut
l’identification des acteurs et des décideurs de la gestion de l’eau au Sénégal, le choix des
unités territoriales à prioriser, la définition des critères ainsi que les procédures
d’opérationnalisation de ces critères. La section quatre de l’article permet d’exposer l’étape
de rangement des unités territoriales. Le logiciel M-Macbeth y est brièvement décrit, la
procédure de pondération et les fonctions de valeurs également. Elle se termine par le
rangement des arrondissements. S’en suit une analyse des résultats obtenus. L’article
s’achève par une discussion des résultats et de la démarche dans son ensemble et une
conclusion ouvrant sur les perspectives futures de l’application d’une telle démarche.
Les chapitres suivants du mémoire sont des compléments au contenu de l’article. Le
troisième chapitre explique le choix de l’orientation adoptée pour l’évaluation des unités
territoriales. Le chapitre suivant présente plus en détail les indicateurs de mesure de chacun
des critères. Une discussion sur l’élaboration de la démarche et une conclusion plus large
termine le document.
5
Revue de Littérature
6
1. La gestion de l’eau au Sénégal
1.1 La problématique de l’approvisionnement en eau
1.1.1 L’eau : une prise de conscience collective
Si ouvrir un robinet est un geste simple, anodin pour certains, l’accès à l’eau, est un
problème quotidien dans les pays en voie de développement. En Afrique sub-saharienne en
particulier, près de 42% de la population n’ont pas accès à de l’eau en quantité et en qualité
suffisante [OMS et UNICEF, 2004]. Ceci est la cause, entre autres, des nombreuses
maladies d’origine hydrique responsables de millions de décès sur le continent chaque
année [OMS et UNICEF, 2004, 2005]. À cela s’ajoute un manque de superficies agricoles
irriguées pour atténuer un déficit, alimentaire annuel de plusieurs millions de tonnes de
produits agricoles [Seck, 2005]. En effet, en Afrique de l’Ouest, seuls 4% des terres arables
sont irriguées comparé à 38% en Asie [Diouf, 2006]. Compte tenu de l’accroissement
démographique rapide, il devient impératif d’améliorer l’accès à une eau salubre en
quantité et de développer une agriculture nourricière efficace. Ceci ne pourra se réaliser
sans une bonne maîtrise de l’eau.
Dans la volonté d’atteindre ses propres objectifs de développement dans le secteur de l’eau
et ceux pour lesquels il s’est engagé auprès de la communauté internationale (les Objectifs
du Millénaire pour le Développement, OMD), le Sénégal développe des programmes
favorisant l’accès à l’eau pour la consommation humaine, l’assainissement et l’agriculture.
Outre l’aspect financier qui constitue un obstacle de taille, les difficultés rencontrées pour
la réalisation adéquate de ces objectifs sont souvent l’insuffisance de concertations des
acteurs civils et des institutions [Hane, 2006]. On observe aussi, un manque d’intégration
des diverses dimensions des projets en hydraulique, notamment les considérations
socioculturelles. Par ailleurs, comme le souligne le rapport provisoire de l’état des lieux de
l’hydraulique de 2004 [MAHS, 2004] la stratégie, la planification et la programmation
constituent des points faibles du secteur de l’hydraulique au Sénégal. Cependant, bien qu’il
reste des efforts à faire dans ce sens, le gouvernement met en place des outils de
7
planification stratégique, de concertation et d’intégration pour favoriser un cadre de gestion
efficace. A cet effet, une approche de gestion intégrée des ressources en eau (GIRE) a été
initiée en 2004 par le Ministère de l'Agriculture et de l'Hydraulique et est pilotée par la
Direction de la gestion et de la planification des ressources en eau (DGPRE) [BAD, 2005].
1.1.2 L’état de la ressource en eau au Sénégal
À l’image d’autres pays sahéliens, le Sénégal est aux prises avec des difficultés
d’approvisionnement en eau. Pourtant, le pays est traversé par d'importants cours d'eau et
recèle des nappes souterraines appréciables [Ambassade France, 2003].
Parmi les ressources en eau de surface, on compte [FAO, 2005] le bassin versant du fleuve
Sénégal, qui occupe par ailleurs 37% du territoire et constitue avec des apports annuels de
20 milliards de m³ par an, la source en eau de surface la plus importance. Il alimente en
grande partie le Lac de Guiers, importante réserve d’eau douce avec un potentiel de 0,6 à
1,2 millions de m³/j [Badiane et al. 2000]. Le fleuve Gambie occupe 30% de la superficie
totale du pays. Le fleuve Casamance couvre quant à lui 11% du territoire national. La
rivière Kayanga qui prend sa source dans le massif du Fouta Djallon en Guinée, a un
écoulement annuel estimé à 60 millions de m³ par an. Les cours d’eau du Sine et du
Saloum, autrefois avec une activité hydrologique relativement importante, connaissent
aujourd’hui une intrusion permanente d’eau saline en aval.
Les petits bassins versants sont le siège d’écoulements épisodiques, qui alimentent les
grands cours d’eau ou se déversent dans la mer. Dans les grandes dépressions, il se forme
également des mares et des marigots pouvant durer de 2 à 3 mois après l’hivernage [FAO,
2005]. Ces cours d’eau non pérennes sont nombreux dans le Ferlo nord et au sud du pays
ainsi que dans la zone humide des Niayes qui est ambivalente dans la mesure où elle
appartient à la fois au domaine côtier et continental. Ils sont caractérisés par une forte
variabilité des apports au cours de l’année et une irrégularité des apports d’une année à
l’autre [MAHS, 2004].
Le pays bénéficie de ressources en eau souterraines importantes sur la majeure partie du
territoire [Badiane et al. 2000]. Quatre types de nappes sont identifiés : les nappes
8
superficielles (50 à 75 milliards m³ avec renouvellement de 5 milliards m3/an), les nappes
semi-profondes (10 milliards m³), la nappe profonde du Maestrichtien (300 à 500 milliards
m³ [FAO, 2005] avec des potentialités de renouvellement de 200 millions m3/an) et la
nappe de la zone du socle, dans la partie Est du pays (50.000 m3/an mobilisables) [BAD,
2005].
Le pays est donc doté de ressources en eau considérables. La disponibilité des ressources en
eau renouvelable est estimée à environ 4750 m3 par habitant et par an [MAHS, 2004 ; CSE,
2005]. La valeur de référence de pénurie d’eau est de 1000 m³/habitant/an. Le Sénégal est
bien au dessus. Cependant, en ce qui concerne les eaux de pluie, qui se concentrent sur une
courte période de 3 à 4 mois [Badiane et al., 2000], on note un abaissement généralisé de la
pluviométrie, avec une translation des isohyètes du nord vers le sud.
1.1.3 L’approvisionnement en eau
Il est admis que le problème de l’eau au Sénégal se pose non pas en termes de quantité mais
en termes de disponibilité, d’accès et de qualité de la ressource. En effet, alors que les
régions de Ziguinchor et de Kolda bénéficient de la présence du fleuve Gambie (avec un
débit de 10 milliards de m³/an en moyenne) [Badiane et al. 2000], de celle de Saint-Louis,
de la présence du fleuve Sénégal (20milliards de m³/an au total) [Ba, 2003], la zone Centre-
Ouest est l’une des plus pauvres en ce qui concerne les eaux de surface. Mais elle est,
paradoxalement, la plus peuplée [APRHN, 2006]. De plus, les eaux souterraines existantes
demandent des investissements importants pour leur exploitation. Dans la zone centre, les
nappes semi-profondes sont difficilement exploitables, du fait que leur eau est saumâtre,
avec de fortes teneurs en chlorures et en sels minéraux [MAHS, 2004]. Malgré cet état de
fait, au milieu des années quatre-vingt dix déjà, les eaux souterraines fournissaient 84% des
débits pour l’alimentation en eau potable des centres urbains et en milieu rural. La majorité
des unités industrielles, minières et touristiques est aussi alimentée par des eaux
souterraines. [Ministère de l’Hydraulique, 1994].
Leur utilisation pour l’irrigation est cependant relativement faible. En effet, les eaux
souterraines ne contribuent que pour 10% [site internet CSE, 2007] à l’irrigation des
9
superficies irriguées qui eux ne représentent que 1,6% du potentiel irrigable, estimé à
500 000 hectares, sur l’étendue du territoire. [Banque Mondiale et Coopération Française,
2007].
L’accès à l’eau potable et à l’eau d’irrigation implique des coûts de distribution (coût de
transport) et de traitement (exigences de qualité). De ce fait, l’allocation doit être
financièrement rentable. Il s’agit d’une exigence pour la SONES et la SDE. L’État, qui
jusqu’à maintenant a subventionné les communautés rurales et les maraîchers de la zone
des Niayes, (à Dakar qui utilisent l’eau traitée distribuée par la SDE) veut se départir de
cette responsabilité insoutenable à long terme. Pour disposer d’eau, il faudra donc en avoir
les moyens. Dès lors, l’aspect financier constitue un critère incontournable pour l’allocation
des ressources hydriques. Au-delà du déséquilibre naturel de la répartition des ressources
hydrauliques, se pose le problème de l’inégale répartition des infrastructures de production
et de distribution. La priorité a longtemps été donnée à la capitale et aux grandes villes au
détriment des collectivités rurales. Ces dernières, pour la plupart, ont un accès limité à l’eau
salubre pour leurs activités domestiques et agricoles ainsi que pour l’assainissement. [Site
Banque Mondiale].
Au Sénégal, le PEPAM estime à 64% le taux d’accès raisonnable à l’eau potable en milieu
rural et à 17% le taux d’accès à l’assainissement approprié [MAHS, 2004]. Pour la région
de Diourbel, ces pourcentages sont respectivement 77% et 17% [Portail internet du
PEPAM, 2006].Ce taux d’accès à l’eau comprend l’apport des potences à charrettes.
Pourtant, près de 70% de la population sénégalaise vit en milieu rural [Thiam, 2005] avec
comme principales sources de revenu l’agriculture et l’élevage [Gouvernement du Sénégal,
2007]. C’est aussi là que l’on compte le plus de pauvres.
Pour suivre le rythme de la croissance démographique, les producteurs devront accroître la
production vivrière. Ceci nécessite des apports suffisants en eau pour l’élevage et
l’agriculture. Cependant, comme le soulignent de nombreuses études [Badiane et al., 2000,
Faye et al., 2000, Thiam, 2005, site du CSE], les apports en eaux pluviales sont de plus en
plus faibles et insuffisants pour satisfaire les besoins des producteurs.
10
1.2 L’organisation de la gestion de l’eau au Sénégal
1. 2.1 Cadre institutionnel, réglementaire et législatif
Le recensement des organismes, autorités et personnes impliqués dans les projets
d’hydraulique ainsi que l’organigramme hiérarchique des intervenants dans le domaine de
la gestion de l’eau au Sénégal, ont permis de répertorier les décideurs et autres acteurs à
consulter. Les textes de lois (code de l’eau, code de l’environnement) ont permis de mieux
comprendre la législation régissant l’exploitation des ressources naturelles.
a. Réforme du secteur de l’eau
La réforme du cadre institutionnel et réglementaire du secteur de l’eau au Sénégal a été
entreprise au milieu des années 90 suite aux difficultés financières de la Société Nationale
d’Exploitation des Eaux du Sénégal (SONEES). Dans le cadre de cette réforme, la
SONEES a été remplacée par la SONES (Société Nationale des Eaux du Sénégal) et la SDE
(Sénégalaise Des Eaux) (loi n° 95-10 du 7 avril 1995).
Selon l’Agence Française de Développement, AFD (2006), ce choix a été dicté, d’une part,
par la volonté de distinguer la société de gestion et l’Etat sénégalais dans l’optique d’en
préciser les objectifs et de faciliter les aides internationales directement affectées au
domaine de l’eau. D’autre part, il a été dicté par le souci de limiter le risque trop important
de faire une concession avec une entreprise privée du fait de la connaissance relativement
mauvaise de l’état du patrimoine et des investissements à réaliser.
La seconde réforme entamée vers 2005 avec le lancement du PELT est plus une réforme
sectorielle que structurelle. Les volets assainissement, alimentation en eau potable,
environnement et gestion des ressources en eau [Coly, 2006] sont globalement pris en
compte en vue de renforcer et de développer le secteur de l’hydraulique.
11
b. Cadre institutionnel
La gestion des ressources hydriques au Sénégal est organisée principalement autour :
- du Ministère de l’Agriculture, de l’Élevage et de l’Hydraulique (décret n°2003-358
de mai 2003) responsable de la mise en œuvre de la politique, des projets et des
programmes dans le secteur de l’assainissement et de l’hydraulique ;
- du Ministère de l’économie et des finances, MEFS, chargé de la maîtrise d’ouvrage
des projets d’hydraulique et d’assainissement financés par l'État; il recherche les
financements et gère le service de la dette;
- du Conseil Supérieur de l’Eau (CSE), (juin 1998) qui, sous l’autorité du Premier
Ministre, statue sur les orientations générales du secteur et les grandes options
d’aménagement, veille au respect de la réglementation relative à la gestion des eaux
internationales, et décide de la gestion des ressources en eau;
- le Comité Technique de l’Eau, (juin 1998) chargé d’étudier toutes les questions
relatives à la gestion de l’eau pour le compte et à la demande du CSE.
D’autres ministères sont impliqués de manière directe ou indirecte dans le secteur. Il s’agit
du Ministère de l’Environnement et de la Protection de la Nature, du Ministère de
l’Hygiène Publique et de l’Assainissement, du Ministère du Plan et du Développement
Durable, du Ministère de l’Intérieur ainsi que du Ministère des Collectivités Locales et de
la Décentralisation.
– la Direction de la gestion et de la planification des ressources en eau (DGPRE); la
DGPRE est chargée de la planification de l'utilisation des ressources en eau et du
développement de la connaissance des ressources; elle délivre des autorisations de création
d’ouvrages, suit et contrôle les mesures de la qualité de l'eau;
– la Direction de l'hydraulique (DHY) dont le rôle principal est la programmation et la
maîtrise d'ouvrages des travaux neufs en milieu rural; elle veille à l'application des normes
et standards nationaux;
– la Direction de l'exploitation et de la maintenance (DEM) a pour mission d’assurer
la bonne exploitation et la maintenance des forages ruraux motorisés; la DEM intervient
12
aussi dans la maîtrise de travaux de réhabilitation; elle veille ainsi à la qualité des
opérations et à la continuité du service de l'eau potable.
Les Sociétés d’exploitation et de patrimoine qui sont sous l’autorité du ministère chargé de
l’hydraulique comprennent :
– La SONES est la société de patrimoine et de contrôle d’exploitation de l’eau au
Sénégal (l’État en est le principal actionnaire); elle a en charge la gestion du patrimoine,
l’élaboration du plan directeur de l’hydraulique urbaine ; la SONES intervient au niveau de
la programmation des investissements et de la recherche des financements; elle a aussi
pour rôle de sensibiliser le public et de contrôler la qualité de l’exploitation; en outre elle
assure la maîtrise d’ouvrage des travaux de renouvellement des infrastructures;
– La Sénégalaise Des Eaux (SDE) est une société privée (à 98,5% possédée par la
SAUR) chargée de l’exploitation technique et commerciale du réseau urbain
d’approvisionnement selon un contrat d’affermage d'une durée de 10 ans.
Les autres administrations autonomes sont :
- L’Agence de promotion du réseau hydrographique national (APRHN) créée depuis
octobre 2000 a comme mission ‘‘d’œuvrer à l’aménagement et à la réhabilitation du réseau
hydrographique national et de constituer un maillage complet du territoire national de façon
à apporter l’eau à toutes les populations tant pour les besoins domestiques que pour ceux de
l’agriculture et de l’élevage; à cet effet, l’APRHN pourra:
procéder à toutes les opérations d’extraction, de transfert et de stockage d’eau
ou d’excédents d’eau de surface et d’eau de ruissellement ;
concevoir et planifier tous programmes d’exécution physique et financière;
réaliser ou faire réaliser tous travaux et études d’exécution en matière de
transfert d’excédents d’eau de surface et d’infrastructures hydrauliques, tels
que :endiguements, barrages, canalisations ou ouvrages de retenues et de prise ;
ceci bien sûr en rapport avec les besoins en eau potable et en eau à usage
agricole et pastoral, des populations et des autres acteurs économiques.’’ (Décret
2000-804 article 2);
13
- La société d’aménagement et d’exploitation des terres du delta du fleuve Sénégal
(SAED) qui intègre dans son champ d’action les vallées du fleuve Sénégal et de la Falémé
depuis 1974 [Ngaidé, 2006] a un mandat orienté vers l’agriculture et l’élevage; elle accorde
une grande importance à la gestion et à la préservation du patrimoine hydraulique;
- La société de développement agricole et industriel du Sénégal (SODAGRI) est
chargée de piloter des projets de développement industriel rural du Bassin de l’Anambé
telles que la réalisation d’infrastructures et la formation des producteurs.
Les Services déconcentrés du Ministère de l'hydraulique (rattachés à la DEM depuis le
début de l'année 2004) comprennent :
- 10 Divisions Régionales de l'Hydraulique (DRH);
- 15 Brigades des Puits et Forages (BPF), responsables du suivi de l'exploitation et de
la maintenance des forages;
- Des Subdivisions Régionales de Maintenance (SRM), structures de maintenance
lourde et de formation de conducteurs de forage;
- Des Brigades Hydrologiques (BHY), en charge du suivi des eaux de surface et des
eaux souterraines pour le compte de la DGPRE qui en assure la tutelle;
- Des Associations d’Usagers de Forages (ASUFOR) responsables de l’exploitation
des forages en milieu rural.
La figureFigure 1 présente un schéma de l’organisation de la gestion de l’eau en milieu
rural.
14
ASUFOR DEM
Communauté
rurale
Gouverneur de
région
Opérateur de
maintenance
Gérant Opérateur
financier
Protocole Reconnaissance
juridique
Licence
d’exploitation
Contrat de
maintenance
hydraulique
Contrat de
gérance
Contrat de prêt plan
épargne projet
Figure 1- Schéma organisationnel des services de l’eau potable en milieu rural.
Adapté de MAHS, 2004
c. Cadre réglementaire et législatif
Plusieurs textes de lois, de décrets et d’arrêtés régissent la gestion, la planification et
l’utilisation des ressources en eau.
Il s’agit essentiellement de :
- la loi n° 76-66 du 2 juillet 1976 portant code du domaine de l’État réglant le statut
juridique des ressources en eau ;
- la loi n°81-13 du 4 mars 1981 portant code de l’eau, mise en application depuis juin
1998. Ce code organise la préservation et la protection de la qualité des ressources
hydriques et détermine les régimes d’utilisation des eaux suivant un ordre de
priorité bien défini : l’alimentation humaine, l’élevage, l’agriculture, la sylviculture
et en dernier lieu l’agro-industrie ;
- la loi n°2001-01 du 15 janvier 2001 portant code de l’environnement fixant les
règles en matière de protection de l’environnement.
15
La formulation des objectifs
Selon le recensement effectué dans le cadre du PEPAM [MAHS, 2004], les objectifs
d’accès utilisés au Sénégal sont formulés de manière globale:
- dans le Document de Stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP) [Ministère de
l’Économie et des Finances, 2003];
- dans la lettre de politique sectorielle de l’environnement en ce qui concerne
l’assainissement;
- dans le cahier des charges du contrat d’affermage pour l’hydraulique urbaine;
- et dans le cahier des charges du Ministère de l’hydraulique.
La délimitation de l’hydraulique rurale et urbaine
Concernant la délimitation entre la gestion de l’eau en milieu urbain et celle en milieu rural,
elle est faite suivant un critère unique de statut administratif. Les populations des localités
ayant le statut de commune sont classées comme population urbaine. Un seuil de 5000
habitants est souvent mentionné pour la classification mais il n’est pas toujours respecté
(exemple: la communauté rurale de Touba Mosquée).
La tarification
En ce qui concerne la tarification, en milieu rural, les charges d’exploitation du service de
l'eau potable se répartissent entre l'État et les usagers. La DEM s’occupe du renouvellement
du forage, des réservoirs ou châteaux d'eau ainsi que des canalisations principales pour le
compte de l’État. Les dépenses liées à la maintenance des infrastructures sont à la charge
des usagers. Ces derniers s’en acquittent suivant deux systèmes tarifaires : les cotisations
forfaitaires (surtout là où les compteurs d’eau sont défectueux ou inexistants) et la vente de
l’eau au volume. La vente de l'eau au volume se pratique essentiellement par bassine de 25
litres (entre 5 et 15 francs de la communauté financière africaine, FCFA2 ou par m³ au
branchement particulier. Ce mode de tarification est systématiquement appliqué sur les
nouveaux projets, et progressivement instauré sur les sites existants dans le cadre de
REGEFOR selon un rapport d’évaluation de la BAD [BAD, 2005].
2 1 FCFA équivaut à 0,245 $ Canadien en date du 21 avril 2009.
16
En milieu urbain, la grille tarifaire est appliquée aux usagers domestiques à trois niveaux
(Tableau 1). Le premier est la tranche sociale réservée aux consommateurs domestiques et
subventionnée à hauteur de 60% pour une consommation inférieure à 10m³/mois (191,32
FCFA pour les villes avec des réseaux d’assainissement, 181 FCFA pour les villes non
assainies en date de janvier 2003) [AFD, 2006]. Le second niveau est celui de la tranche
pleine payée par les usagers domestiques ayant une consommation mensuelle comprise
entre 10 et 20m³. Le dernier niveau constitue la tranche dissuasive pour une consommation
supérieure à 20m³ par mois. Les tarifs au mètre cube de ces deux derniers niveaux étaient
respectivement de 629,88 et 788,67 FCFA en date de janvier 2003 [AFD, 2006].
Les fontainiers, revendeurs d’eau, en périmètre affermi, bénéficient d’un tarif unique de
264 ou 322 le m³ selon que la ville est assainie ou pas. Les usagers achètent l’eau entre 600
et 1000 FCFA le m³.
Tableau 1- Tranche tarifaire de la SDE
Catégorie Total TTC en FCFA/m³
Abonnés domestiques
Tranche sociale (< 10m³/mois)
Tranche pleine (10 à 20m³/mois)
Tranche dissuasive (>20m³/mois)
191,32
629,88
788,67
Abonnées non domestiques 788,67
Bornes fontaines 322,31
Maraîchers
< Quota Q
Comprise entre Q et 2xQ
>2xQ
131,37
507,84
788,67
Adapté de [AFD, 2006] ; TTC : toute taxe comprise.
Le prix moyen de l’eau, estimé à 456 FCFA/m³ en 2002, comprend ‘‘le prix patrimoine’’
versé à la SONES, le ‘‘prix exploitant’’ versé à la SDE, le tarif assainissement (pour les
villes assainies), la TVA de 18%, la surtaxe hydraulique (sauf exonération) de 1,95
FCFA/m³ et la surtaxe (sauf exonération) municipale de 3,25 FCFA [BAD, 2005].
1.2.2 Une gestion complexe Dans le cadre de son analyse sur le cadre institutionnel et juridique de la gestion des
ressources en eau et de l’environnement, Ngaidé (2006), met en exergue les difficultés
17
d’ordre institutionnel, juridique et financier auxquelles se heurte la gestion des ressources
en eau au Sénégal. Ainsi, les remaniements ministériels fréquents contribuent à l’instabilité
institutionnelle rendant difficile la mise en place de projet ou programme à long terme dans
le secteur de l’hydraulique. Ngaidé (2006) fait remarquer cependant que les changements
des organes de gestion de l’eau sont parfois liés à des adaptations exigées par la multiplicité
des problèmes que pose cette ressource. De plus, la législation relative à l’eau n’est pas
assez harmonisée. Toute la réglementation relative à cette dernière n’est pas regroupée dans
le Code de l’eau. Elle est complétée par d’autres textes tel que le code de l’hygiène, le Code
de l’environnement, le code du domaine de l’État etc. [Hane, 2006; MAHS, 2005]. Une
question aussi importante que le droit à l’eau, par exemple, n’est pas prise en compte dans
le Code de l’eau [Ngaidé, 2006]. Ces difficultés sont renforcées par la multiplicité des
acteurs qui complique la coordination des actions des différentes structures et la dichotomie
entre l’hydraulique rurale et urbaine entraîne une gestion déséquilibrée au détriment de
l’hydraulique rurale tel que l’illustre la section 1.2.1. La plupart des programmes
d’hydraulique développés concernent le milieu urbain. À cet effet, il est nécessaire de
renforcer les programmes d’hydraulique rurale [Ngaidé, 2006]. En outre, actuellement,
comme nombre de pays africains, le Sénégal dépend fortement de financements extérieurs
dans sa gestion des ressources naturelles [CSE, 2005]. Les infrastructures qui ne répondent
pas suffisamment à la demande actuelle deviennent plus dispendieuses à réaliser. Des
moyens de financement plus souples (construction progressive) et l’utilisation de matériaux
locaux pourraient apporter des solutions, pas toujours faciles à appliquer cependant.
1.2.3 Revue stratégique du secteur
Les perspectives de l’État dans le secteur de l’hydraulique visent la réorganisation du cadre
institutionnel en cours, entre autres, par le renforcement des moyens de mise en application
des textes en vigueur, une meilleure clarification de la mission et de la responsabilité des
acteurs, l’implication des usagers et des collectivités locales aux programmes à caractère
social. L’état s’investit également dans la consolidation et le renforcement des
infrastructures et la préservation des ressources notamment en améliorant notamment les
18
capacités de traitement des eaux, en limitant l’exploitation de la nappe maestrichtienne
menacée d’intrusion saline, en garantissant la satisfaction des divers usages de l’eau et en
assurant une gestion durable des eaux du lac de Guiers. Parallèlement, l’État et ses
partenaires font de l’atteinte de l’équilibre financier du secteur de l’hydraulique par la
maîtrise du prix de l’eau un objectif essentiel. L’atteinte des OMD, notamment en ce qui a
trait à la satisfaction des besoins en eau pour le milieu rural (84%) et le milieu urbain
(100%) d’ici 2015, est aussi un des objectifs majeurs dans le domaine de la gestion des
ressources en eau au Sénégal. À cet effet, les pouvoirs publics ont mis en place divers
projets et programmes de développement dans le secteur de l’hydraulique et les domaines
connexes (PNIR, plan REVA, PNDA, PAPIL, PEPAM etc.).
Les projets et actions engagées trouvent leur origine dans les années 80 où il était
nécessaire de faire face au développement de plus en plus important des villes alors que les
investissements dans le secteur de l’eau stagnaient [Ngaidé, 2006]. C’est ainsi qu’ont été
mis en place le Projet Sectoriel Eau (PSE, 1996-2004), le projet d’alimentation en eau de la
Petite Côte (1998-2000), le projet d’alimentation en eau des onze villes régionales (2001-
2003), le Projet Eau à Long Terme (PELT, 2002-2005) [Coly, 2006]. Le PELT visait à
accroître la production et la distribution d’eau pour desservir 800 000 habitants en zones
périurbaines à Dakar et 200 000 dans les villes secondaires ainsi qu’à permettre l’accès à
l’assainissement collectif de 90 000 personnes supplémentaires à Dakar et 50 000 autres en
centres secondaires. Depuis 2005, le Programme Eau Potable et Assainissement du
Millénaire (PEPAM) a été initié et comprend un sous-programme rural et urbain. Aussi,
dans l’ensemble des régions, des plans de développement ont été initiés ou actualisés.
Depuis 1996, date de l’entrée en vigueur des nouveaux textes de loi sur la décentralisation,
la région sert de cadre de programmation du développement économique, social et culturel.
Le plan régional de développement intégré (PRDI) est un important outil de planification
en vue d’améliorer les conditions de vie des populations (ARD, 2000). Les objectifs
fondamentaux du PRDI [PRDI, 2000] concernent la promotion de l’équité à travers les
différentes couches de la population et la lutte contre le déséquilibre interrégional en
utilisant de manière efficace les potentialités de l’espace régional. Dans la région de
Diourbel, l’élaboration de la seconde version de ce plan est le résultat d’une démarche de
19
concertation entre divers acteurs (agriculteurs, éleveurs, collectivités locales, ONG,
organisations de populations etc.). Le premier tome du PRDI présente un bilan
diagnostique succinct de la région à partir duquel quatre enjeux majeurs sont dégagés. Les
objectifs stratégiques tirés de ces enjeux servent d’appui aux perspectives de
développement économique et social proposées dans la seconde section du document. Les
perspectives ainsi énumérées sont certes pertinentes, mais les moyens de mise en œuvre
demeurent abstraits.
Parmi les grands projets hydrauliques de l’État, on compte la construction du Canal du Baol
(rebaptisé canal Cheikh Amidou Bamba) [APRHN, 2006] destiné à l’alimentation de la
zone Centre-Ouest, la remise en eau des vallées fossiles en vue d’améliorer la disponibilité
en eau de surface pérenne et le programme de développement de la rive gauche du fleuve
Sénégal (PDRG) pour l’irrigation de 240 00 hectares de terres [Badiane et al., 2000]. Un
projet relativement similaire avait été entrepris dans les années 80-90. Il s’agissait du projet
du Canal du Cayor. Il visait à la fois la satisfaction de la demande en eau de la capitale et
des villes traversées ainsi que le développement hydro-agricole des régions de Louga,
Thiès, Diourbel et Dakar. Dans le cadre de ce projet qui a fait l’objet d’une étude technique
et financière complète, l’eau devait être transférée dans une conduite à ciel ouvert. Mais
n’ayant pas obtenu l’aval des bailleurs de fonds (notamment la Banque Mondiale), il fut
abandonné [Adams, 2000].
Dans les actions de développement menées par l’État ou certains organismes non
gouvernementaux, l’approche projet est souvent privilégiée. Cependant, elle n’a pas permis
d’articuler avec efficacité les objectifs des projets avec la politique macroéconomique. Elle
se fait souvent de façon mécanique et peu intégrée tel que le souligne le rapport sur l’état de
l’environnement au Sénégal du Ministère de l’environnement et de la protection de la
nature [CSE, 2005]. Ce même rapport informe aussi sur la faiblesse des mécanismes de
suivi et d’évaluation des programmes et celle du niveau de développement de l’approche
programme dont souffrent les exercices de mise en œuvre d’un cadre stratégique de
planification environnementale.
20
Les organismes internationaux participent par leurs financements mais aussi par des études
et des rapports, directement ou indirectement, à la gestion du secteur de l’hydraulique au
Sénégal. Ainsi, pour pallier le déficit d’approvisionnement en eau et les nombreux
problèmes qu’il engendre, la Banque Mondiale préconise aux pays africains comme le
Sénégal, de moderniser les infrastructures, d’améliorer les méthodes de gestion, de réduire
les coûts et d’accroître l'efficacité des systèmes d'approvisionnement en eau. C’est dans
cette optique que des programmes comme le PEPAM sont appuyés par la Banque mondiale
mais aussi par la Banque Africaine de développement et d’autres organismes.
La mise en place de programmes appropriés de gestion des ressources en eau devrait
contribuer de manière décisive à la réduction de la pauvreté, à la croissance économique, à
la sécurité alimentaire et à la préservation des écosystèmes naturels de la région [ARD,
2000, Banque Mondiale, 2007]. Un programme comme le PEPAM, initié par le
gouvernement sénégalais dans le cadre des OMD, devrait permettre d’atteindre ces
objectifs. Avec ce programme, le Sénégal est devenu le premier pays Africain à disposer
d'une véritable stratégie sectorielle pour l'atteinte des OMD pour l'eau potable et
l'assainissement. Ce programme porte cependant que sur l’eau potable et l’assainissement.
21
2. Les méthodes d’aide multicritères à la décision
2.1 Généralités
2.1.1 L’aide à la décision Le concept de processus de prise de décision qui provient, selon [Tsoukias, 2008], de
Simons relève principalement de l’activité cognitive d’un individu (décideur) confronté à
une problématique pour laquelle il n’existe pas de solution sur mesure. Quant à l’aide à la
décision, elle implique au moins 2 acteurs : le client et l’analyste.
Le processus d’aide à la décision se définit selon [Roy et Bouyssou, 1993] comme étant
‘‘l’activité de celui qui, prenant appui sur des modèles clairement explicités mais non
nécessairement complètement formalisés, aide à obtenir des éléments de réponse aux
questions que se pose un intervenant dans un processus de décision, éléments concourant à
éclairer la décision et normalement à recommander, ou simplement à favoriser, un
comportement de nature à accroître la cohérence entre l’évolution du processus d’une
part, les objectifs et le système de valeurs au service desquels cet intervenant se trouve
placé d’autre part’’. En effet, partant des connaissances du client relatives à la situation et
aux connaissances méthodologiques de l’analyste, le but est d’arriver à un consensus
cohérent.
Le modèle de préférence utilisé pour l’élaboration d’une recommandation intègre un
modèle de réflexion. Les approches d’aide à la décision diffèrent notamment par la place et
le rôle accordés au modèle de rationalité traduisant l’information de manière formelle.
[Tsoukias, 2008] dresse une liste des différentes approches. La première approche énoncée
est l’approche normative. Le modèle de rationalité est défini d’avance. Il se veut universel.
Le décideur doit s’y conformer.
La deuxième approche, dite descriptive permet de surmonter les difficultés que peuvent
rencontrer les décideurs à suivre le postulat dans l’approche précédente. Les modèles de
l’approche descriptive sont fondés sur l’observation des décideurs (ou plutôt de leurs
préférences). Ils sont indépendants de la situation du problème.
Dans l’approche prescriptive, le modèle rationnel s’élabore à l’intérieur du processus
décisionnel. Sa validité est donc limitée aux conditions locales.
22
L’approche constructive permet de construire le modèle de rationalité du décideur à partir
des réponses apportées aux questions relatives à ses préférences. Cette interaction conduit à
la formulation du problème en même temps que l’élaboration de sa solution.
C’est dans cette dernière approche que se situe la finalité de l’aide multicritère à la décision
selon Planeix (1999). On ne cherche plus à réfléchir sur la façon dont le décideur prend sa
décision mais on cherche au contraire à modéliser à la fois le problème à traiter et les
préférences du décideur [Le Bars M., 2003]
2.1.2 L’aide multicritère à la décision L’aide multicritère à la décision dont il s’agit ici, est une branche des modèles de recherche
opérationnelle qui s’occupe des problèmes de décision lorsqu’il y a un nombre important de
critères [Zeleny, 1982]. La pertinence de l’utilisation des méthodes multicritères d’aide à la
décision vient du fait que, dans la plupart des situations, lorsque les gens prennent des
décisions, ils n’ont pas un seul objectif. Au contraire, ils ont besoin de prendre en
considération un certain nombre de points de vue [Morais et Almeida, 2006] . C’est le cas,
la plupart du temps, des problèmes liés à la gestion des ressources naturelles [Takch et
Simonovic, 2002].
L’analyse multicritère constitue un cadre d’analyse du contexte décisionnel, de
structuration du processus de décision. Elle facilite l’intervention des acteurs participant à
la légitimation de la décision finale [Roy, 2005]). Ces modèles multicritères se fondent sur
plusieurs hypothèses dont les suivantes [Roy, 1992] :
- L’ensemble des possibles n’est pas défini de façon stable dès le départ; il peut varier
au cours du processus; les préférences ne sont pas définitives mais construites au cours de
la phase de conception;
- La multiplicité des critères implique la recherche de compromis, par opposition à
une solution optimale définie de façon rigide;
- Le fait que les algorithmes retenus soient suffisamment souples pour autoriser des
itérations nombreuses et peu coûteuses permet également de traiter des cas où les
informations ne sont pas toutes disponibles en même temps.
23
L’application d’une procédure d’aide multicritère à la décision suit un certain nombre
d’étapes clés. Celles-ci ont été identifiées dans plusieurs études [Joubert et al., 2003 ;
Morais et Almeida, 2006]. Il s’agit d’une procédure itérative [Lahdelma et al., 2000]
comprenant les étapes suivantes [CSIRO, 2000] :
- l’identification des acteurs ou des décideurs;
- la définition des objectifs et des critères;
- l’identification des alternatives;
- la pondération des critères;
- l’établissement d’une unité de mesure pour chaque critère;
- le choix d’une méthode d’évaluation et l’évaluation des options ou des alternatives;
- l’analyse de sensibilité
La Figure 2 présente les étapes d’un processus de prise de décision proposée par Morais et
Almeida (2006).
Évaluation des
résultats
Recommandations
Paramètres de
décision
Évaluation des
performances
Sélection de la méthode
d’aide multicritère à la
décision
Formulation des
actions potentielles Sélection des critères
Définition du
problème
Identification des
acteurs
Figure 2- Les étapes d’un processus de prise de décision (Morais et Almeida, 2006)
24
Dans le champ de l’analyse multicritère, de nombreuses méthodes d’analyse ont été
développées. À ce titre, on peut citer Analytic Hierarchy Process (Saaty, 1980), Théorie de
Multi-Attribute Utility Theory (MAUT) (Keeney and Raiffa, 1976), le Simple Multi-
Attribute Rating Technique (SMART), Preference Ranking Organization Method for
Enrichment Evaluations (PROMETHEE), Elimination et Choix Traduisant la Réalité
(ELECTRE), etc.
La figureFigure 3 adaptée de [CSIRO, 2000], présente une classification des techniques
d’analyse multicritère.
25
Les éléments en italique sont des éléments qui font appel au jugement plutôt qu’à l’analyse.
Support multi-
objectif d’aide
à la décision
Méthode de standardisation des données en des
unités communes
Méthode de la valeur espérée
Méthode naïve de conversion passant d’ordinal à
cardinal
Point fixe
Méthodes graphiques
AHP
Analyse des jugements
Méthode du compromis
Macbeth
Rangement
Évaluation
Analyse de concordance
Rangement
lexicographique
Classement linéaire
Méthode de la fréquence
Théorie Multi-Attribut
Analyse de discordance
Somme pondérée
Point Idéal
Compromise programming
Méthode de permutation
ELECTRE
Evamix
Cardinalisation de la
matrice d’évaluation
AHP
MACBETH
Méthode pour
ranger les
actions
Méthode
pour
transformer
les données
Méthode pour
pondérer les
critères
Continue
Discrète
Qualitative
Qualitative
Quantitative
Quantitative Mixte
Figure 3- Classification des techniques d’analyse multicritère.
26
2.2 L’application des méthodes multicritères à la gestion
des ressources en eau
Concernant les problèmes d’ingénieries ou de gestion liés aux ressources en eau,
l’application des méthodes d’aide multicritère à la décision remonte au début des années
soixante-dix déjà [Roy et al. 1992 ]. Connel et al. (2000) suggèrent leur utilisation pour le
développement d’une gestion convenable des ressources en eau [Rajui et al. 2000]. Bien
que, beaucoup reste encore à faire pour l’application des approches multicritères à de réels
problèmes de design et d’aménagement en ingénierie impliquant des objectifs conflictuels
comme le soulignent [Rajui et al. 2000 ; Bhattarai et Starkl, 2005]. D’autres auteurs tels
que ( Royet et al.., 1992 ; Duckstein et al., 1994 ; Abu-Taleb M. F et Mareschal B, 1995
Bender et Simonovic, 2000 [cités par Rajui et al. 2000]; Hämäläinen R. P., et al., 2001 ;
Hedia T., 2004) ont aussi cherché à promouvoir leur utilisation dans ce domaine.
Parmi les différentes méthodes employées, on trouve les méthodes de surclassement de
synthèse qui constituent une des approches les plus prolifiques en aide multicritère à la
décision [Martel et Matarazzo, 2005]. L’idée est de construire des relations binaires en
comparant par pair toutes les actions potentielles pour ensuite les exploiter de sorte à
obtenir une recommandation finale. Dans cette catégorie, les méthodes de la famille
ELECTRE et PROMETHEE sont bien connues et ont été appliquées dans divers problèmes
concrets [Martel et Matarazzo, 2005] notamment en gestion des ressources en eau [Raju et
al. 2000]. Ainsi, (Roy et al. 1992 ) proposent une méthodologie pour la ‘‘priorisation’’ de
l’allocation des ressources en eau dans une région de Pologne en utilisant la méthode de
surclassement. ELECTRE III.
D’autres méthodes de la famille ELECTRE ont été utilisées (ELECTRE 1, Tri, 3 et 4) dans
la gestion des ressources en eau pour l’allocation de ressource ou de projet. (Morais et
Almeida, 2006, Raju et al. 2000) [Raju et al. 2000] ont aussi utilisé la méthode
PROMETHEE dans une étude de cas sur la gestion des ressources en eau en Espagne. Elle
a longtemps été une alternative à ELECTRE III. Certains considèrent d’ailleurs qu’elle en
27
est une simplification. Elle poursuit en effet le même but (le rangement), avec des moyens
analogues (le surclassement), tout en étant beaucoup moins complexe [Shärlig A., 1996].
D’autres familles de méthodes ont aussi été employées dans le domaine de la gestion des
ressources en eau. Il s’agit notamment des méthodes de critère unique de synthèse. C’est
une classe de méthodes fondées sur l’agrégation complète des critères en un critère unique.
C’est le cas de AHP [Bhattarai et Starkl, 2005], et de MACBETH [Bana e Costa et al.,
2004]. Cette dernière méthode, utilisée dans le cadre du présent mémoire est présentée dans
la section suivante.
2.3 La méthode MACBETH
MACBETH (Measuring Attractiveness by Categorical Based Evaluation Technique),
comme son nom l’indique, est une approche pour mesurer l’attractivité par une technique
d’évaluation basée sur des catégories [Bana e Costa et Vansnik, 1999]. Il s’agit d’un
processus interactif qui permet, à partir d’un ensemble fini d’éléments, de construire une
échelle intervalle permettant de quantifier l’attractivité de ces éléments selon l’opinion d’un
évaluateur. Cette méthode s’inscrit dans la famille des systèmes d’aide à la décision du type
critère unique de synthèse.
Dans la procédure MACBETH, afin d’établir une échelle cardinale de valeur pour
l’évaluation d’actions ou la pondération de critères, on fait appel au jugement qualitatif de
l’évaluateur. Comme le souligne Bana e Costa et al. (2004), ceci a pour avantage d’éviter
les difficultés potentielles qui peuvent subvenir lorsque l’on force l’évaluateur à produire
une estimation numérique directe des poids ou de la valeur des actions.
L’approche et son logiciel d’application ont été utilisés dans des problèmes décisionnels
divers allant de la sélection d’un portfolio d’actions [Bana e Costa et Soares, 2004] au
choix d’une future carrière pour un individu [Bana e Costa et Chagas, 2004]. Dans le
domaine de la gestion de l’eau, pour l’évaluation multicritère des mesures de contrôle
28
d’inondation dans le cas de la rivière de Livramento au Portugal, l’approche a été appliquée
pour construire un modèle d’évaluation quantitative basé sur les jugements de valeur
qualitatifs formulés par un groupe d’experts. [Bana e Costa et al. 2004].
L’objectif de la méthode MACBETH est de faciliter la construction d’une échelle cardinale
pour représenter les jugements de valeur d’un évaluateur E sur les éléments ai d’un
ensemble fini A d’actions potentielles sur lesquelles il doit se prononcer. Selon un
processus similaire, une échelle des poids des critères peut être générée. MACBETH offre
aussi des outils d’analyse de sensibilité et de robustesse. Les sections suivantes décrivent
les étapes de ce processus.
Mode de questionnement
La procédure de questionnement dans la méthode MACBETH consiste à demander à E
d’exprimer son jugement absolu [Bana e Costa et Vansnick, 1995] de différence
d’attractivité entre les éléments de A en les comparant deux à deux. Cette notion de
jugement absolu a été utilisée par Saaty (1977, 1980) dans sa méthode AHP (Analytical
Hierarchy Processus). Pour exprimer son jugement de valeur, E choisit parmi les six
catégories sémantiques suivantes proposées par MACBETH : C1 : très faible, C2 : faible,
C3 : modérée, C4 : forte, C5 : très forte, C6 : extrême. D’un point de vue mathématique, ces
catégories sont des relations binaires asymétriques. La catégorie C0 ( « no difference ») sert
à exprimer l’indifférence entre deux éléments.
En répondant aux questions, E complète au fur et à mesure la matrice d’évaluation ; la
dernière colonne étant celle de l’élément le moins attractif de A. L’élément le plus attractif
est sur la première ligne de la matrice [Bana e Costa et Chagas, 2004]. Ainsi, il est
nécessaire de remplir seulement la partie supérieure de la matrice. Bana e Costa et Chagas,
2004 font remarquer qu’il n’est pas indispensable de comparer l’ensemble des paires
d’éléments pour obtenir une échelle numérique à l’aide du logiciel. Cependant, plus il y a
d’informations disponibles, plus l’échelle sera précise. Dans l’exemple de la Figure 4
(accompagnant le logiciel, M-MACBETH) qui illustre l’utilisation de la méthode pour le
choix d’une imprimante, selon un critère de qualité d’impression, l’attractivité du niveau de
29
qualité ‘‘Très bonne’’ par rapport au niveau ‘‘Bonne’’ est faible. Elle est modérée par
rapport au niveau ‘‘Acceptable’’, très forte, par rapport au niveau ‘‘Neutre’’ et extrême par
rapport au niveau ‘‘Faible’’. Ainsi, le niveau ‘‘Très bonne’’ est préféré au niveau ‘‘Bonne’’
qui est préféré au niveau ‘‘Acceptable’’ qui est préféré au niveau ‘‘Neutre’’ ; le niveau
‘‘Faible’’ étant le moins attractif.
Figure 4-Exemple de matrice des jugements d’attractivité du logiciel M-MACBETH.
Dérivation d’une échelle numérique
Une fois la matrice des jugements générée, le logiciel teste automatiquement la consistance
des jugements émis par E. Si elle est vérifiée, le système propose une échelle de valeurs
numériques traduisant ces jugements. Un nombre réel v(ai) est associé à chaque élément ai
de A en respectant les deux règles de mesure suivantes [Bana e Costa et Vansnick. 1999] :
(1) , : ( ) ( ) est plus attractif que x y A v x v y x y (Condition ordinale)
(2)
'
, ' 1,2,3,4,5,6 , , , ,
avec , et , :
' 1 ( ) ( ) ( ) ( )
k k
k k x y w z A
x y C w z C
k k v x v y v w v z
(Condition sémantique)
Obtention d’une échelle intervalle
L’échelle numérique proposée par MACBETH est révisée et validée par E afin qu’elle
corresponde le plus exactement possible à ses jugements de valeurs. Pour chaque valeur
proposée, il est possible de visualiser l’intervalle à l’intérieur de laquelle, il est permis de la
30
faire varier sans violer les contraintes imposées par les règles de mesures [Bana e Costa et
al. 1999] précédemment citées. En validant les valeurs, E valide la cardinalité de l’échelle
Bana e Costa et al, 2004].
Gestion de l’inconsistance
Lorsque qu’aucune fonction de valeur ne peut être associée à la matrice de jugement de E,
on parle d’incompatibilité. Bana e Costa et Vansnick [Bana e Costa et Vansnick. 1999]
listent les quatre cas d’incohérences généralement rencontrés entraînant l’incompatibilité.
Ils concernent l’incohérence entre le jugement comparatif et le jugement sémantique :
1) Pour trois éléments x, y, z tel que x et y sont tous deux plus attractifs que z, x
est plus attractif que y et la différence d’attractivité entre y et z est plus
importante que celle entre x et z ;
2) Pour trois éléments x, y, z tel que x est plus attractif que y et z, y est plus
attractif que z et la différence d’attractivité entre x et y est plus grande que
celle entre x et z
3) Pour trois éléments x, y, z tel que x et y sont tous deux plus attractifs que z, il
n’y a pas de différence d’attractivité entre x et y et la différence d’attractivité
entre x et z est différente de celle entre y et z ;
4) Pour trois éléments x, y, z tel que z est plus attractif que x et y, il n’y a pas de
différence d’attractivité entre x et y, et la différence d’attractivité entre z et x
est différente de celle entre z et y.
L’incompatibilité peut aussi être causée par une inconsistance entre les jugements
sémantiques. L’exemple de Bana e Costa et Vansnick (1999) qui est présenté au
tableauTableau 1 et à la figureFigure 5 illustre cela.
31
Tableau 2- Exemple de matrice de jugements inconsistants
A B C D E F
A No very weak weak Strong very strong Extreme
B No very strong Strong very strong Extreme
C No Weak Moderate very strong
D No Weak Strong
E No Moderate
F no
weak
moderate very weak
strong
B
C
D
E
Figure 5- Schéma d’une situation d’inconsistance sémantique
Ainsi, on a v(B)-v(D) > v(C)-v(E) et v(D)-v(E) > v(B)-v(E) ce qui même par sommation à
v(B)-v(E) > v(B)-v(E). La règle 2 (condition sémantique) n’est pas respectée.
Dans ces cas, le logiciel MACBETH offre une alternative. Il met en exergue les évaluations
posant problème et suggère de changer certains jugements [Bana e Costa et al. 1999]. Il
peut y arriver que les 2 règles de mesure ne puissent pas être respectées simultanément.
Dans ce cas, la première condition (condition ordinale) est toujours respectée et
MACBETH essaye de minimiser l’erreur sur la seconde condition (par programmation
linéaire).
Obtention des constantes d’échelle
Lorsque l’on cherche à comparer des éléments ai de A selon différentes dimensions, pour
chacune de ces dimensions, E évalue la différence d’attractivité entre les éléments de A. Il
32
complète ainsi une matrice des jugements par dimensions. La procédure est similaire pour
la pondération des sous-critères (ou sous-dimensions) d’un critère global.
La valeur finale est obtenue par une simple addition qui procède du bas vers le sommet de
l’arbre représentant les liens entre les dimensions globales et leurs sous-dimensions. Les
dimensions globales sont au sommet de l’arbre. On admet que la valeur de chaque
dimension contribue indépendamment à l’agrégation [Bana e costa et al, 2004 et Bana e
Costa et al. 1999].
Ainsi :
1
1
( ) . ( )
1 0 ( 1,..., )
et
(le plus attractif) 100, (le moins attractif) 0
dC
dC
n
C i j j i
j
n
j j dC
j
j j
V a w v a
avec
w w j n
v v
Où :
VC est la valeur de l’élément ai sur la dimension globale C ;
ai est un élément de l’ensemble A sur lequel E doit se prononcer ;
ndC est le nombre de sous-dimensions composant C;
wj est le poids attribué à la sous-dimension j ;
vj(ai) est la valeur de ai sur la sous dimension j.
33
Article
34
Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière
d’approvisionnement en eau en milieu rural au Sénégal : cas de la région
de Diourbel.
Multi-criteria analysis for the prioritization of water supply intevention
projects in a rural area in Senegal: the case of Diourbel region.
Fatoumata Ba, Christian Bouchard, Irène Abi-Zeid
35
Résumé
De nombreux programmes et projets visant l’accès aux ressources en eau sont initiés au
Sénégal pour satisfaire une demande en eau qui se fait de plus en plus pressante,
notamment en milieu rural. L’insuffisance des moyens financiers impose que ces projets
soient échelonnés dans le temps. En amont des études de faisabilité technique et
économique, il est nécessaire d’établir des priorités d’intervention. Cette étude présente une
analyse multicritère d’aide à la décision pour prioriser les besoins d’intervention en matière
d’approvisionnement en eau en milieu rural au Sénégal. Le cas de la région de Diourbel est
étudié. Après avoir identifié les objectifs relatifs à l’approvisionnement en eau au niveau de
la région, six critères quantitatifs et qualitatifs permettant de mesurer les degrés d’atteinte
de ces objectifs sont définis. Ces critères permettent d’évaluer la priorité en termes de
projets de développement éventuels. Il s’agit de critères portant sur la qualité des eaux
disponible, la quantité d’eau disponible pour les besoins domestiques, la distance d’accès
aux points d’eau, la disponibilité de l’eau pour l’agriculture et enfin, l’acceptabilité des
coûts de l’eau ainsi que le potentiel de développement. La démarche a abouti au rangement
des huit arrondissements de la région de Diourbel par ordre de priorité d’intervention. Les
critères ont été pondérés par des acteurs de la gestion des ressources en eau au Sénégal.
Une analyse de sensibilité permet de juger de l’effet des différentes pondérations sur le
classement des priorités obtenu. L’analyse du processus dans son ensemble permet de
mettre en exergue les difficultés liées à l’utilisation d’une telle démarche dans le contexte
sénégalais tout en montrant les avantages que l’on peut en tirer.
Mots clés : approvisionnement en eau, gestion, priorité, approche multicritère, milieu rural,
Sénégal.
36
Abstract
Many programs and projects for water resources management are initiated in Senegal to
satisfy an increasing demand for water, especially in rural areas. The lack of sufficient
funding requires that these projects be spread over time. Therefore, prior to any technical or
economic feasibility study, it is necessary to identify the higher priority areas. This study
presents a multicriteria analysis for ranking rural subareas in Senegal, in particular in the
region of Diourbel, in terms of priorities of water supply needs. After having identified the
objectives related to water supply on the regional scale, six quantitative and qualitative
priority criteria were defined. These criteria pertain to the available water quality, the
available quantity of water for domestic needs, the distance to water distribution points, the
availability of water for agriculture, the acceptability of water costs and the development
potential of a rural subarea. Indicators are proposed for each criterion based on the data
available at the time of the study. Criteria weights were obtained from various water
resource management stakeholders in Senegal. Our multicriteria analysis process lead to the
ranking of eight districts of the Diourbel region in terms of intervention priority. A
sensitivity analysis enabled us to evaluate the effect of the criteria weights on the districts
ranking. Our experience with this project has brought forward the difficulties associated
with conducting a multicriteria analysis in the Senegalese context, while emphasizing
promising application possibilities.
Keywords: water supply, priority, multicriteria analysis, rural area, Senegal.
37
1. Introduction
Dans les pays d’Afrique subsaharienne où se conjuguent croissance démographique rapide,
sécheresse et manque de moyens financiers pour l’exploitation des ressources hydriques,
l’accès à l’eau est un enjeu majeur et un défi considérable. Dans le cadre des Objectifs du
Millénaire pour le Développement de l’Organisation des Nations Unies [PNUD, 2001] et
de ses propres objectifs de développement dans le secteur de l’eau, le Sénégal développe
des programmes favorisant l’assainissement des eaux usées et l’accès à l’eau pour la
population. Cependant, seuls 67% de la population en milieu rural au Sénégal disposent
d’un accès raisonnable à l’eau contre 87% en milieu urbain [MAHS, 2004]. Les causes
majeures d’une telle disparité résident dans l’inégale répartition des ressources hydriques et
surtout dans le manque de moyens financiers. Ces limitations physiques et économiques
obligent à échelonner les projets d’adduction et de traitement de l’eau.
Il est dès lors pertinent de développer des stratégies de gestion des ressources en eau, pour
répondre aux besoins les plus prioritaires et les plus pressants en termes
d’approvisionnement en eau. Les instruments de calculs économiques classiques
(rentabilité, coûts-bénéfices etc.) s’avèrent limités pour une telle gestion. En effet, toutes les
variables du problème ne peuvent être ramenées à une échelle purement monétaire
[Hajkowics et al., 2000]. Les traditions socioculturelles, la motivation des intervenants, la
préservation de l’environnement et le souci de répondre aux attentes des populations sont
autant de facteurs d’importance qui sont difficiles voire impossibles à quantifier
financièrement.
Nonobstant ces difficultés, le Sénégal met en place des outils pour favoriser un cadre de
gestion efficace. À cet effet, une approche de gestion intégrée des ressources en eau a été
initiée en 2004 par le Ministère de l'Agriculture et de l'Hydraulique du Sénégal (MAHS) et
est pilotée par la Direction de la Gestion et de la Planification des Ressources en Eau
(DGPRE) [BAD, 2005]. Néanmoins, des disparités marquantes demeurent tant au niveau
local que régional [PNUD, 2001].
L’objectif du travail de recherche présenté ici est de contribuer à surmonter ces difficultés.
Il s’agit de proposer une démarche structurée d’aide à la décision pour prioriser les
38
interventions en matière d’approvisionnement en eau en milieu rural au Sénégal. Pour ce
faire, nous proposons une analyse multicritère pour ranger des unités territoriales par ordre
de priorité d’intervention. Le présent projet ne porte pas sur l’identification ou le choix de
projets précis d’adduction ou de traitement d’eau ni sur leur financement. L’étude se situe
en amont de ces derniers. Cet article présente les résultats et les différentes étapes de
l’analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement
en eau dans la région de Diourbel.
2. Contexte de recherche
2.1 Présentation de la région de Diourbel
La région de Diourbel est principalement rurale et s’étend sur une superficie de 4769 km²
subdivisée en trois départements, huit arrondissements (Baba-Garage, Lambaye, Ngoye,
Ndoulo, Ndindy, Ndame, Kael et Taïf) et 33 communautés rurales (Figure 6). Elle abrite
une population de 929 414 habitants [MAHS, 2005]. Cette région qui a un climat soudano-
sahélien chaud et sec ne reçoit, en moyenne, que 400 à 600 mm pour 30 à 40 jours de pluie
avec une irrégularité spatio-temporelle très marquée [ARD-Diourbel, 2000]. Les
températures oscillent entre 27 et 30°C avec un maximum entre avril et juin. La sécheresse
dans les réseaux hydrographiques de surface du Car-Car (au nord) et du Sine (au sud-est)
illustre la dégradation des conditions climatiques au cours des dernières décennies [Badiane
et al. 2000].
39
Dakar
Océan Atlantique Sénégal
Région de Diourbel
Baba-Garage Lambaye
Ngoye
Ndindy
Ndoulo
Ndame
Kael
Taif
Océan Atlantique
20km
Dakar
Océan Atlantique Sénégal
Région de Diourbel
Baba-Garage Lambaye
Ngoye
Ndindy
Ndoulo
Ndame
Kael
Taif
Océan Atlantique
20km
Figure 6- Carte de la région de Diourbel
L’approvisionnement en eau dans la région se fait essentiellement à partir de nappes d’eau
souterraine avec une forte exploitation de la nappe du Maestrichtien. Bien que le potentiel
hydrique de la région soit considéré comme important, la quantité disponible pour les
populations de même que la qualité de ces eaux sont insatisfaisantes actuellement [MEFS,
2007]. En effet, les points d’approvisionnement sont disparates. Les équipements sont à
certains endroits insuffisants ou vétustes. Par ailleurs, les teneurs en fluorures sont au
dessus des normes sanitaires dans plusieurs communautés rurales de la région. Les
problèmes d’assainissement tel que la proximité des fosses septiques avec le réseau d’eau
potable, l’absence de système d’évacuation adéquat des ordures et des eaux usées, la
pollution de la nappe superficielle, etc. se répercutent sur la qualité des eaux de
consommation.
40
Située dans le bassin arachidier, la région de Diourbel a pour principales activités
l’agriculture et l’élevage. Les difficultés d’ordre climatique, l’appauvrissement des terres et
le manque d’infrastructures d’adduction d’eau constituent des obstacles majeurs au
développement de ces activités. Diourbel, jadis zone maraîchère, souffre aujourd’hui de la
sécheresse. Les agriculteurs ne peuvent compter que sur les eaux de pluies qui ne tombent
que durant les trois mois d’hivernage et de manière irrégulière. Pour le reste, l’eau, souvent
trop salée, est impropre à l’agriculture. À cause du manque de pâturages (les terres
agricoles sont rares et très convoitées) et du manque d’eau, le bétail transhume tout au long
de l’année entre le Sud et le Sud-est, séjournant même pendant une certaine période hors de
la région. Une urbanisation croissante et une évolution démographique rapide [PNUD,
2001] accroissent ces difficultés et augmentent la pression sur les ressources hydriques
(voir Annexe A pour une présentation plus détaillée de la région).
2. 2 L’approche méthodologique
Les décisions en matière de planification de projets d’infrastructures de production et de
distribution d’eau relèvent souvent d’une analyse complexe ayant des objectifs conflictuels
à intégrer (objectifs sociopolitiques, environnementaux et économiques). Elles ont un
caractère multidimensionnel et intègrent un nombre d’intervenants important avec des
systèmes de valeurs variés. Les approches purement objectives à la recherche d’une
solution unique et optimale s’avèrent dès lors irréalistes [Bana e Costa et al., 2004a]. Dans
cette perspective, les approches multicritères constituent un support d’analyse adapté à la
complexité d’une telle décision. Elles permettent de faciliter le processus de décision en le
rendant plus explicite, rationnel et efficient. D’ailleurs, plusieurs études dont, (Abu-Taleb et
Mareschal, 1995 ; Raju et al. 2000 ; Hämäläinen et al., 2001 ; Tkach et Somonovic 2002 ;
Hedia, 2004) suggèrent l’utilisation de telles approches pour le développement d’une
gestion efficace des ressources hydriques.
Dans ce projet, l’analyse multicritère s’est effectuée en trois phases principales (voir Figure
7): la structuration du processus, l’évaluation des unités territoriales puis l’analyse des
41
résultats ayant mené à un rangement de ces unités. La structuration du processus a débuté
par la définition du contexte décisionnel avec l’identification des acteurs du processus. Les
objectifs ont été définis ainsi que les critères permettant de mesurer le degré d’atteinte de
ces objectifs par chacune des unités territoriales. Durant la seconde phase, les méthodes et
les paramètres permettant de rendre opérationnels les critères ont été élaborés. Les unités
territoriales ont été évaluées sur chaque critère et l’agrégation a été réalisée à l’aide du
logiciel M-MACBETH (Measuring of Attractiveness by Categorical Based Evaluation
Technique ; [Bana e Costa et Vansnick, 1999]. Enfin, les résultats et la démarche ont été
analysés.
• Définition du contexte décisionnel
• Identification des objectifs
• Définitions des critèresStructuration du processus
• Indicateurs de mesure
• Évaluations
• Agrégations des évaluationsÉvaluation des unités
territoriales
• Analyse des résultats
• Analyse de la démarche
Analyse
• Définition du contexte décisionnel
• Identification des objectifs
• Définitions des critèresStructuration du processus
• Indicateurs de mesure
• Évaluations
• Agrégations des évaluationsÉvaluation des unités
territoriales
• Analyse des résultats
• Analyse de la démarche
Analyse
Figure 7 - Schéma du processus d’élaboration de la démarche
42
3. Structuration du processus
3.1 Identification des acteurs et des décideurs
Le secteur de l’eau au Sénégal se distingue par un très grand nombre et une forte diversité
d’acteurs, par des réformes organisationnelles fréquentes et par la séparation qui est faite
entre les zones rurales et urbaines. Cinq grands groupes d’intervenants ayant des influences
plus ou moins grandes dans la gestion de l’eau peuvent être identifiés. Les collectivités
locales assument une responsabilité grandissante dans la maîtrise d’ouvrage local et la
planification de projets de petite et moyenne envergure (réhabilitation de puits modernes, la
promotion des systèmes autonomes individuels, etc.). Au niveau rural, les populations sont
des acteurs significatifs au sein des projets d’adduction d’eau. Elles ont un droit de regard
sur les choix et priorités d'investissements à travers le processus participatif d'élaboration
des plans locaux. Mais dans les faits, leur participation est pour l’instant limitée. Le secteur
privé et la société civile (bureaux d’étude, bailleurs de fond et banques) sont aussi
fortement impliqués dans la gestion et la distribution des ressources en eau. En fait, les
bailleurs de fonds internationaux sont des intervenants majeurs. Les organismes non
gouvernementaux constituent des promoteurs importants de projets en hydraulique rurale
mais c’est au niveau des services techniques de l’État que les projets sont validés [Hane,
2006]. L'État est le responsable de l’atteinte des objectifs de desserte en eau au niveau
national. Il veille à la préservation, à la protection des ressources en eau et de
l'environnement ainsi qu’à la pérennité de l'approvisionnement en eau. Il assume aussi la
maîtrise d'ouvrage de grands projets hydrauliques. L’État, par l’entremise de ses organes
(ministères, directions et agences), est donc le décideur ultime en matière d’allocation des
ressources en eau.
L’importance du nombre de parties prenantes rendant presque impossible la participation
de tous, même à différents niveaux d’implication, nous avons dû choisir des représentants
de ces parties prenantes. Les organismes qui ont été sollicités à divers stades de l’étude sont
mentionnés dans les sections 3.3, 3.4 et 4.
43
3. 2 Choix des unités territoriales
Dans la terminologie de l’aide à la décision, les éléments sur lesquels les décideurs doivent
se prononcer sont nommés options. Dans le cas présent il s’agit d’arrondissements qui sont
des unités territoriales administratives (voir les 8 arrondissements à la figureFigure 6). Ce
choix, plutôt que celui d’unités physiques hydrographiques, s’explique par le fait que l’eau
vient essentiellement de grandes nappes souterraines qui couvrent une bonne partie de la
région à l’étude. L’échelle de l’arrondissement a été choisie de sorte à correspondre à la
plus petite échelle à laquelle pour les informations sont significatives et exploitables, et à
concorder le plus possible à une représentation mentale que se font les intervenants de leur
territoire. L’arrondissement, lequel est la plus petite unité territoriale pour laquelle les
informations sont les plus complètes, correspond également à un découpage administratif
déjà établi. Les décisions en matière de développement (en dehors des projets individuels)
se prennent d’ailleurs, souvent, en suivant le découpage administratif du territoire. Parmi
les huit arrondissements que compte Diourbel, celui de Ndame abrite une communauté
rurale aux caractéristiques particulières. Il s’agit de la communauté rurale de Touba
Mosquée considérée comme une communauté rurale mais qui est en fait une ville de plus
de 400 000 habitants. Cette ville a donc été exclue de l’analyse.
3.3 Identification des objectifs et formulation des critères
Au niveau national, le Document de stratégie de réduction de la pauvreté sert de référence
à l’élaboration des plans sectoriels de développement (dont celui des ressources en eau) et
de programme d’investissement [MEFS, 2003]. Le Code de l’eau et le Code de
l’Environnement [République du Sénégal, 1981 et 1983] sont également deux documents
de réglementation concernant les ressources hydriques. Les priorités d’allocation des
ressources en eau selon l’usage y sont précisées. À partir des entrevues avec des
intervenants du secteur de l’hydraulique au Sénégal et de l’ensemble des documents cités
ci-dessus, nous avons identifié les objectifs d’un approvisionnement en eau qui visent à
améliorer les conditions de vie des populations rurales. Ces objectifs sont présentés à la
figureFigure 8. Nous avons ensuite élaboré des critères pour mesure les degrés d’atteintes
44
de ces objectifs par les différents arrondissements. Les évaluations des arrondissements sur
ces critères nous permettent d’arriver à un rangement de ces arrondissements en ordre de
priorité pour d’éventuels projets de développement de ressources hydriques :
Critère 1 : Qualité des eaux souterraines ;
Critère 2 : Acceptabilité des coûts de l’allocation ;
Critère 3 : Satisfaction des besoins domestiques en eau ;
Critère 4 : Accessibilité au point d’eau ;
Critère 5 : Satisfaction des besoins en eau pour la production agricole ;
Critère 6 : Potentiel de développement.
Améliorer l’approvisionne-ment en eau des
populations rurales
Préserver l’environnement
Réduire la pauvreté
Préserver la santé et le bien être des populations rurales
Développer les activités génératrices de revenu
Exploiter le potentiel économique
Tendre vers l’autosuffisance alimentaire
Réduire les maladies d’origine hydrique
Augmenter l’accessibilité à l’eau
Favoriser le potentiel de développement
Potentiel de développement
Favoriser l’élevage
Favoriser l’agriculture
Satisfaction du besoin en eau
Assurer une bonne qualité d’eau
Qualité des eaux souterraines
Garantir un accès à une distance ‘‘raisonnable’’
Distance parcourue pour s’approvisionner en eau
Assurer la pérennité de l’approvisionnement par une gestion durable des infrastructures et limiter le gaspillage
Acceptabilité des coûts de l’allocation
Assurer une quantitésuffisante d’eau pour l’hygiène et les autres usages domestiques
Satisfaction des besoins domestiques en eau
Objectifs CritèresIndicateurs de mesure
Évaluation subjective par un responsable régional
Indicateur simplifiéde satisfaction de la demande en eau d’irrigation pour une plante de référence
Indicateur qualitatif global basé sur les teneurs en fluorures, nitrates et résidus secs
Proportion de la population pour laquelle la distance est > 1km
Résultats d’un sondage auprès de présidents de communautés rurales
Pourcentage de satisfaction par rapport à l’objectif moyen terme du PEPAM
Améliorer l’approvisionne-ment en eau des
populations rurales
Préserver l’environnement
Réduire la pauvreté
Préserver la santé et le bien être des populations rurales
Développer les activités génératrices de revenu
Exploiter le potentiel économique
Tendre vers l’autosuffisance alimentaire
Réduire les maladies d’origine hydrique
Augmenter l’accessibilité à l’eau
Favoriser le potentiel de développement
Potentiel de développement
Favoriser l’élevage
Favoriser l’agriculture
Satisfaction du besoin en eau
Assurer une bonne qualité d’eau
Qualité des eaux souterraines
Garantir un accès à une distance ‘‘raisonnable’’
Distance parcourue pour s’approvisionner en eau
Assurer la pérennité de l’approvisionnement par une gestion durable des infrastructures et limiter le gaspillage
Acceptabilité des coûts de l’allocation
Assurer une quantitésuffisante d’eau pour l’hygiène et les autres usages domestiques
Satisfaction des besoins domestiques en eau
Objectifs CritèresIndicateurs de mesure
Évaluation subjective par un responsable régional
Indicateur simplifiéde satisfaction de la demande en eau d’irrigation pour une plante de référence
Indicateur qualitatif global basé sur les teneurs en fluorures, nitrates et résidus secs
Proportion de la population pour laquelle la distance est > 1km
Résultats d’un sondage auprès de présidents de communautés rurales
Pourcentage de satisfaction par rapport à l’objectif moyen terme du PEPAM
Figure 8 - Arbre des objectifs, critères et indicateurs de mesure
Les critères 2 et 6 semblent moins directement liés à la problématique de besoins
d’approvisionnement en eau. Le critère 2 est relatif à l’acceptabilité et subséquemment à la
45
faisabilité économique des projets éventuels d’adduction d’eau. La tarification est
également un moyen de gestion de la demande. Par la tarification, on limite le gaspillage
des ressources. En outre, au-delà des préoccupations sanitaires, l’eau, dans ses diverses
utilisations, est un facteur de réduction de la pauvreté et un vecteur de développement
considérable. La prise en compte du critère potentiel de développement (critère 6) est liée à
cet objectif. Le choix de ce critère vient aussi pallier la faiblesse d’une démarche
essentiellement basée sur l’état actuel des choses. En matière de planification, l’aspect
projection est important et c’est ce qu’apporte ce critère.
Tous les critères ont été validés par 7 représentants de différents ministères (Agriculture et
hydraulique; Environnement et protection de la nature; Prévention, hygiène publique et
assainissement; Réseau hydrographique national), par 1 représentant de l’Agence Régionale
du Développement rural de Diourbel (ADR-Diourbel), par 1 représentant de l’Agence
Régionale de Développement de Diourbel (DRDR-Diourbel) et par 2 représentants de la
Société de Distribution d’Eau (SDE) et de la Société Nationale des Eaux du Sénégal
(SONES). À noter que, dans un premier temps, un critère sur la satisfaction des besoins en
eau du cheptel avait été retenu. Cependant, ce critère n’a pu être gardé faute de données
suffisantes pour faire les évaluations des arrondissements.
3.4 Évaluations des arrondissements
Afin d’évaluer les arrondissements sur les différents critères, il a fallu élaborer des
indicateurs de mesure. Deux orientations s’offraient à nous dans l’élaboration des
indicateurs de mesure : la première étant de prioriser les populations les plus nécessiteuses
c’est-à-dire celles pour lesquelles les lacunes sont les plus grandes par rapport à leurs
besoins; la seconde étant de réduire globalement le plus possible les lacunes quitte à
favoriser des arrondissements plus populeux où les lacunes sont relativement plus faibles
mais qui peuvent représenter en absolu des déficits importants. En se basant sur les
documents d’élaboration des plans sectoriels de développement et des programmes
d’investissement pour le Sénégal [MEFS, 2003 ; République du Sénégal, 2005], la première
orientation a été choisie en visant une réduction des inégalités entre arrondissements, c’est-
à-dire en utilisant des indicateurs relatifs plutôt que des indicateurs absolus. À noter que les
indicateurs développés pour l’évaluation des arrondissements sur la base des critères ont été
46
validés par des représentants des organismes suivants : SDE, PEPAM3, DGPRE, ARD-
Diourbel, DRDR-Diourbel, Collectivité de Diourbel.
Critère 1 - Qualité des eaux souterraines.
Les populations de la région de Diourbel s’approvisionnent à partir de trois types de nappe
d’eau souterraine, et ce, en proportion variable (les gammes de profondeur de pompage
sont indiquées entre parenthèses): Éocène (40 à 95m), Paléocène (105 à 280m) et
Maestrichtien (215 à 365m). La qualité de ces nappes varie dans la région. Il a donc fallu
évaluer la qualité globale des eaux souterraines captées dans un arrondissement donné.
Globalement, la qualité d’une eau dépend de paramètres physico-chimiques et de
paramètres microbiologiques. Dans la présente étude, cette évaluation se limite aux
paramètres physico-chimiques car il n’a pas été possible d’obtenir de donnée permettant de
distinguer les eaux pompées du point de vue de leur qualité microbiologique (voir la
description des infrastructures de captage dans la section portant sur le critère 3). Les trois
paramètres physico-chimiques considérés sont ceux qui posent le plus de problème au
niveau de Diourbel et pour lesquels l’information était disponible, à savoir les résidus secs
(cela est très proche des solides totaux dissous et de la teneur en sels totale), les nitrates et
les fluorures.
La qualité physico-chimique globale de l’eau captée dans un arrondissement a été évaluée
en plusieurs étapes. Dans un premier temps, les informations présentes dans les rapports de
(Badiane et al.2000) et de (l’ARD-Diourbel 2000), les données du PEPAM (2006) et celles
de la base CHRONO de la DGPRE (2008) ont été compilées. Cela a permis d’estimer les
teneurs en résidus secs de chaque nappe dans chaque arrondissement. Pour les nitrates, les
nappes plus profondes (Paléocène et Maestrichtien) ont été considérées comme non
contaminées puisque la contamination de surface, essentiellement d’origine agricole,
n’atteint pas a priori ces nappes. Cela a été confirmé par la compilation des données
disponibles qui montre que la concentration en nitrates chute brutalement quand l’eau
souterraine est captée à plus de 70m. Dans le cas des fluorures, la contamination est, a
3 PEPAM : Programme Eau Potable et Assainissement du Millénaire : programme de mise en œuvre des
Objectifs du Millénaire pour le développement pour l’eau potable et l’assainissement en milieu rural et
urbain.
47
priori, naturelle et donc cela dépend de la nature des minéraux avec lesquels l’eau
souterraine est en contact. Ne disposant pas de données locales, la teneur en fluorures a été
appréciée de manière globale pour un arrondissement donné. Trois niveaux d’appréciation
ont été définis pour chaque paramètre: bonne, médiocre et mauvaise (voir
Tableau 3). Ces niveaux ont été établis sur la base des normes de l’OMS, en vigueur au
Sénégal [OMS, 2004]. Le premier niveau de qualité correspond à des concentrations
relevées respectant majoritairement la norme de l’OMS; le troisième niveau correspond à
des concentrations dépassant en majorité la norme de l’OMS ; et le second niveau est un
niveau intermédiaire compris entre les deux précédents.
Tableau 3- Intervalles de qualité d’eau souterraine
Paramètre de qualité Valeurs seuils Intervalles de qualité retenus
Fluorures 0,5mg/L : concentration minimale
souhaitable du point de vue de la
prévention des caries ;
1,5mg/L: norme de l’OMS (2004) au-
delà duquel il y a un risque de fluorose
dentaire et de fluorose osseuse
5mg/L: concentration au-delà de
laquelle il y a un risque important de
fluorose dentaire et un risque de fluorose
osseuse paralysante.
Bonne : une majorité de relevés
dans l’intervalle [0 – 1,5mg/l]
Médiocre : des relevés
également au dessus et dans la
norme
Mauvaise : une majorité de
relevés >1,5mg/l
Nitrates 50mg/L : norme de l’OMS (2004)
Bonne : une majorité de relevés
dans [0 – 50mg/l]
Médiocre : des relevés
également au dessus et dans la
norme
Mauvaise : une majorité de
relevés >50mg/l
Résidus-secs 1200mg/L : valeur indicative de l’OMS
(2004)
2000mg/L : limite supportable pour les
humains en zone aride ou semi-aride.
Les animaux sont encore plus résistants
mais les plantes le sont moins [Badiane
et al., 2000].
Bonne : une majorité de relevés
dans [0 – 1200mg/l]
Médiocre : des relevés
également au dessus et dans la
norme
Mauvaise : une majorité de
relevés >1200mg/l
Nous avons ensuite défini une règle d’agrégation qui mène à 8 classes de qualité globale
d’eau souterraine (Très mauvaise, Mauvaise, Très médiocre, Médiocre, Passable à
médiocre, Passable Passable à bonne et Bonne). Il s’agit d’une échelle de dangerosité
48
globale où les fluorures sont les éléments les plus déterminants suivis des nitrates puis des
résidus secs (voir Tableau 4). Finalement, le niveau de qualité retenu pour l’arrondissement
est celui de la nappe d’eau souterraine la plus captée. L’échelle du critère qualité d’eau
correspond donc à l’évaluation globale définie au tableau
Tableau 4. L’arrondissement est d’autant plus prioritaire que son niveau de qualité d’eau
est mauvais.
Tableau 4- Détermination de la qualité globale de l’eau. Fluorures Nitrates Résidus-secs Qualité Globale
Mauvaise Mauvaise Mauvaise
Très mauvaise
Mauvaise Médiocre
Mauvaise Bonne
Médiocre Mauvaise
Médiocre Médiocre
Médiocre Bonne
Bonne Mauvaise
Mauvaise Bonne Médiocre
Bonne Bonne
Médiocre Mauvaise Mauvaise
Très médiocre Mauvaise Médiocre
Mauvaise Bonne
Médiocre Mauvaise
Médiocre
Médiocre Médiocre
Médiocre Bonne
Bonne Mauvaise
Bonne Médiocre
Bonne Bonne
Bonne Mauvaise Mauvaise
Médiocre à Bonne Mauvaise Médiocre
Mauvaise Bonne
Médiocre Mauvaise
Bonne Médiocre Médiocre
Médiocre Bonne
Bonne Mauvaise
Très Bonne Bonne Médiocre
Bonne Bonne
Critère 2 - Acceptabilité des coûts de l’allocation
Pour chacun des arrondissements de la région, l’acceptabilité des coûts de l’allocation a été
mesurée à travers un questionnaire transmis à 18 présidents de communauté rurale (PCR)
49
sur les 33 que compte la région(le questionnaire est consigné à l’annexe C). Les PCR sont
des représentants et des résidants de la communauté rurale. La population administrée par
les PCR interrogés représente au moins 50% de la population de chacun des
arrondissements. L’approche choisie consiste à poser directement la question sur la volonté
de payer pour l’installation de nouveaux branchements privés ou l’amélioration des
infrastructures publiques d’eau potable et d’eau d’irrigation. Trois niveaux de réponses sont
possibles: oui, non, peut- être. En accordant une valeur de 0 à une réponse négative (non),
de 0,5 à une réponse incertaine (peut-être), et de 1 à une réponse positive (oui), les
arrondissements ont été évalués en calculant le pourcentage de la somme de oui et de peut-
être dans l’ensemble des réponses. Plus le pourcentage obtenu est élevé, et plus la volonté
de payer des populations de l’arrondissement pour une amélioration du service est jugée
grande. Les arrondissements où le pourcentage de réponse positive est la plus grande sont
jugés prioritaires.
Critère 3 – Satisfaction des besoins domestiques en eau
L’évaluation sur ce critère a été effectuée à l’aide d’un des indicateurs proposés par le
PEPAM pour l’accès à l’eau: ‘‘l’équivalent point d’eau’’ (EPE). Un EPE correspond en fait
à une borne fontaine qui est supposée alimenter 300 habitants à raison de
25L/personne/jour (MAHS, 2004). Les autres ouvrages d’alimentation en eau peuvent être
ramenés à l’EPE selon une table de conversion (MAHS, 2004). Les directives de l’OMS
sur la quantité d’eau destinée aux usages domestiques précise l’importance de satisfaire les
besoins en eau des populations à la fois en termes de quantité et de qualité (OMS et
UNICEF, 2004). Ainsi, seules les infrastructures, qui garantissent une eau de qualité
suffisante du point de vue microbiologique et qui sont retenues dans l’inventaire sénégalais
des points d’eau disponibles pour les populations (la borne fontaine, le puits moderne, le
branchement privé et le forage avec pompe à motricité humaine), ont été considérées dans
la présente étude (l’annexe B fournie une description des ouvrages hydrauliques).
L’indicateur de mesure retenu pour l’évaluation des arrondissements est le taux de
satisfaction en termes d’approvisionnement en eau:
(%) 100P N
N
A ATaux de satisfaction
A
(1)
50
Où A (m3/jour) est l’approvisionnement en eau et où les indices « P » et « N »
correspondent respectivement aux approvisionnements présent et nécessaire. AP est calculé
à partir du recensement des ouvrages provenant à la fois de la base de données PROGRES
(Programme de gestion des ressources en eaux souterraines ; référence pour les ouvrages
d’adduction d’eau souterraine) de la DGPRE et des plus récentes enquêtes effectués dans le
cadre du PEPAM. Il est à noter cependant que ces données renseignent sur l’existence
physique des ouvrages mais pas sur leur état de fonctionnalité. La valeur de AN est
déterminée à partir du nombre d’habitants de l’arrondissement (données provenant du
recensement de la population de 2002 ; [MAHS, 2005]) et de l’objectif à moyen terme du
PEPAM d’approvisionnement en eau en zone rurale c’est-à-dire 25L/pers/jour [MAHS,
2004]. Plus le taux de satisfaction est faible, plus l’arrondissement est jugé prioritaire.
Critère 4 - Accessibilité au point d‘eau
Quatre types d’information ont été utilisés pour l’évaluation sur ce critère. Il s’agit du
nombre d’habitants, du type et du nombre d’infrastructures d’adduction d’eau, ainsi que de
la position géographique des villages. Ces informations proviennent des résultats de
l’enquête sur les infrastructures des villages de Diourbel [PEPAM, 2006] pour la base de
données PROGRES. L’accessibilité au point d’eau est évaluée en mesurant, dans un
premier temps, la distance parcourue par les populations pour s’approvisionner en eau. Le
logiciel de système d’information géographique ArcView GIS 3.2 a servi à effectuer les
calculs de distance parcourue par les habitants de chaque arrondissement pour combler
leurs besoins en eau en termes de quantité (le script ArcView est présenté à l’annexe D).
Le déficit ou l’excédent d’eau de chaque village a été évalué sur la base de 25L/pers/jour.
L’hypothèse de base est la suivante : les habitants des villages déficitaire en eau vont
combler leur déficit avec l’excédant du village (ou des villages) excédentaire(s) le(s) plus
proche(s). La position géographique des habitants se confond à celle du centre du village
auquel ils sont rattachés. Cette démarche de calcul permet de déterminer la distribution des
distances de marche pour chaque arrondissement. L’indicateur de mesure retenu pour
l’évaluation des arrondissements est la proportion d’habitants parcourant plus d’un
kilomètre. Un arrondissement est d’autant plus prioritaire que son pourcentage d’habitants
51
ne bénéficiant pas d’un accès raisonnable, et parcourant donc une distance supérieure à 1
km pour s’approvisionner en eau, est important.
Critère 5 – Satisfaction du besoin en eau pour l’agriculture
Les difficultés rencontrées dans la collecte des données nécessaires au calcul précis du
déficit hydrique (DH), une méthode très utilisée dans l’évaluation des besoins en eau pour
l’agriculture, ont conduit à l’élaboration d’un indicateur simplifié de satisfaction de la
demande en eau d’irrigation (ISDEI). Cet indicateur, qui est inspiré du DH, se calcule
comme suit :
90
90
(%) 100mil
mil
P DISDEI
D
(2)
où Dmil90 est la demande en eau d’irrigation (mm/an) et P sont les précipitations (mm/an).
La demande en eau pour l’agriculture est évaluée en utilisant une culture de référence pour
la région qui a été choisie avec l’aide du Centre National de Recherche Agronomique de
Bambey, à savoir le mil variété 90 jours. La valeur retenue pour Dmil90 est de 457mm/an.
Cette valeur correspond à l’évapotranspiration maximale pour le mil (variété 90 jours) tel
que déterminé par l’Institut Sénégalais de Recherche Agronomique. La quantité d’eau de
pluies par arrondissement représente la quantité d’eau disponible (en mm/an), les
précipitations constituant à plus de 90% la source d’eau pour l’agriculture dans la région
(les précipitions ont été supposées homogènes dans un arrondissement donné). Les valeurs
du ISDEI, qui ont servi à l’évaluation des arrondissements sur le critère satisfaction du
besoin en eau pour l’agriculture, ont été calculées avec les données pluviométriques datant
de 1997, 1998 et 2004. Ces dernières sont les seules années pour lesquelles les données
étaient complètes. À noter que les données pour l’année 2005 étaient également disponibles
mais ces données n’ont pas été retenues car il s’agit d’une année exceptionnelle du point de
vue pluviométrique. Plus le ISDEI est bas, plus l’arrondissement est jugé prioritaire.
Critère 6 - Potentiel de développement
Ce critère a été évalué de manière qualitative par un responsable de la DRDR-Diourbel et
ancien responsable de l’ARD-Diourbel. Le DRDR œuvre au nom du ministère de
52
l’agriculture à la mise en place d’une politique de développement agricole cohérente et à
contribuer à renforcer la promotion des initiatives régionales et locales. L’ARD a quant à
elle pour mission de permettre la coordination et l'harmonisation des interventions et
initiatives des collectivités locales en matière de développement local en général. Le
responsable interviewé s’est basé sur un certain nombre de vecteurs de développement tels
que la qualité des sols pour l’agriculture, l’organisation sociale et l’esprit d’entreprenariat et
a effectué son évaluation du potentiel de développement des arrondissements sur une
échelle composée de sept niveaux : Très grand, Grand++, Grand+, Grand, Moyen+, Moyen,
Faible. Plus son potentiel de développement est jugé élevé, plus l’arrondissement est jugé
prioritaire pour l’allocation des ressources en eau.
4. Rangement des arrondissements
4.1 Le logiciel M-MACBETH
Le logiciel M-MACBETH qui a servi à ranger les arrondissements en termes de priorité
pour des projets éventuels de développement de ressources hydrique est un outil d’aide
multicritère à la décision appliquant la méthode MACBETH. Cette méthode a été déjà
appliquée à divers cas réels d’aide multicritère à la décision [Bana e Costa et al. 2004a,
Bana e Costa et al. 2004b].
MACBETH permet à un décideur (ou à un analyste) de construire une fonction de valeur
pour chaque critère. Une telle fonction de valeur établit une relation entre l’évaluation
d’une option (un arrondissement dans notre cas) et sa performance (un degré de priorité
d’intervention dans notre cas). L’élaboration d’une fonction de valeur inclut le choix des
évaluations qui correspondent au niveau de performance inférieure (0) et au niveau de
performance supérieure (100). Pour établir une fonction de valeur, le décideur (ou
l’analyste) compare deux à deux les niveaux d’évaluation suivant ce critère en utilisant
l’échelle d’attractivité suivante : nulle (les deux niveaux sont jugées égales), très faible,
faible, modérée, forte, très forte, extrême (un niveau est jugé extrêmement fort par rapport à
l’autre). Ce faisant, Il construit sa fonction de valeur pour le critère considéré. Le système
53
vérifie simultanément la consistance des réponses et fournie des propositions en cas
d’inconsistance. Au terme de cette étape, le logiciel propose une échelle numérique
soumise à l’appréciation du décideur. Celui-ci a la possibilité de revenir sur son jugement,
d’y apporter des changements. L’échelle ainsi obtenue est une échelle cardinale
représentative des jugements de valeur du décideur.
4.2 Pondération des critères
La pondération des critères a été faite par 13 personnes lors d’entrevues privées pour statuer
sur l’importance relative des critères : Direction de l’environnement (2 personnes), SDE, (2
personnes), SONES (1 personne), MAH (1 personne), APRHN (Agence de Promotion du
Réseau Hydrographique National) (1 personne), DGPRE (3 personnes), DRDR-Diourbel (1
personne), Ministère du plan (1 personne), Direction de l’hydraulique (1 personne). La
technique d’évaluation utilisée est celle du point fixe [Hajkowicz et al., 2000]. Le décideur
est appelé à distribuer, sur l’ensemble des critères, un nombre de points fixé d’avance, 100
en l’occurrence. Pour faciliter la distribution des points, il a été proposé aux intervenants de
classer les critères, représentés par des fiches, par ordre d’importance et de les éloigner
selon leur importance relative en y intercalant des cartes blanches avant de leur assigner un
poids. À noter que les pondérations ont été choisies alors qu’il y avait encore un 7e critère
sur les besoins en eau du cheptel. Suite au retrait de ce critère, le poids de ce critère a été
redistribué sur les autres poids au prorata de leur valeur initiale. Les poids moyen, minimal
et maximal pour chaque critère sont présentés au tableauTableau 5.
54
Tableau 5- Pondération, évaluation et priorités.
Pondérations
Critère 1 Critère 2 Critère 3 Critère 4 Critère 5 Critère 6
Moyenne 24% 12% 26% 12% 13% 12%
Minimale 16% 4% 13% 8% 6% 6%
Maximale 35% 27% 43% 20% 25% 18%
Arrond. Critère 1 Critère 2 Critère 3 Critère 4 Critère 5 Critère 6 Global
Évaluations
A Très médiocre 0% 16% 26% -35% Grand
B Médiocre 0% 9% 27% -13% Grand
C Médiocre 0% -8% 36% -34% Grand
D Médiocre 33% 27% 20% -3% Moyen
E Médiocre 72% 12% 35% -29% Moyen+
F Mauvaise 0% -14% 36% -16% Très grand
G Mauvaise 22% -32% 53% -7% Grand+
Bonne 50% -32% 63% -21% Grand++
Priorités (pondérations moyennes)
A 53 0 6 26 47 60 31
B 32 0 10 27 21 60 24
C 32 0 21 36 46 60 31
D 32 33 3 20 20 27 21
E 32 72 8 35 40 40 33
F 74 0 25 36 22 100 44
G 74 22 41 53 20 73 49
H 0 50 41 63 28 87 39
4.3 Fonctions de valeur
Pour la présente étude, et à une exception près, nous avons élaboré nous-mêmes les
fonctions de valeur en fonction des informations dont nous disposions (voir ci-dessous).
Dans le logiciel M-MACBETH, nous avons défini les fonctions de valeur. Pour les critères
Acceptabilité des coûts de l’allocation et Accessibilité au point d’eau, les fonctions de
valeurs sont considérées linéaires c’est-à-dire que la différence d’attractivité entre deux
niveaux d’évaluation consécutifs est constante. Pour ces deux critères, les bornes sont les
mêmes à savoir :
- L’évaluation de 0% correspond à une performance de 0 sur l’échelle MACBETH ;
55
- L’évaluation de 100% correspond à une performance de 100 sur l’échelle
MACBETH ;
Les quatre autres fonctions de valeurs sont présentées graphiquement à la figureFigure 9.
La fonction de valeur du critère Qualité des eaux souterraines (Figure 9a) a une allure
décroissante. La différence d’attractivité entre les niveaux de qualité diminue en tendant
vers le niveau ‘‘Bonne’’. Les jugements sur les différences d’attractivité des niveaux
qualitatifs de performance du critère Potentiel de développement ont été bâtis à partir des
indications fournies par un représentant de l’ARD-Diourbel. Il a précisé lors de
l’évaluation, la relation qu’il y avait entre les niveaux consécutifs. Ainsi, par exemple, le
niveau ‘‘Grand++’’ se situe entre le niveau ‘‘Très grand’’ et le niveau ‘‘Grand+’’ (voir la
fonction de valeur à la figure Figure 9b). Pour le critère de Satisfaction des besoins
domestiques en eau, la priorité maximale correspond à une quantité de 5l/pers./j (80% de
déficit par rapport à 25l/pers./j). Il s’agit du minimum recommandé en zone tropicale
[Gleick, 1996]. La priorité minimale correspond à une quantité de 35l/pers./j (surplus de
40% par rapport à 25l/pers./j). Il s’agit de la quantité recommandé par l’OMS. Cette valeur
est considérée comme l’objectif à long terme pour l’approvisionnement en eau en milieu
rural au Sénégal. C’est également l’extrémité supérieure de la fourchette de quantité d’eau
consommée par jour par les personnes disposant d’un branchement privé (30-35l/pers./j),
estimée d’après une enquête effectuée en 1996 (sur la faisabilité de la réforme du secteur)
et une autre effectuée en 2004 pour le projet REGEFOR [MAHS, 2004]. Une fonction
décroissante non-linéaire est définie entre ces deux bornes (voir Figure 9c). Cela reconnaît
le fait qu’un déficit est d’autant plus important que la quantité disponible est faible. La
fonction de valeur du critère Satisfaction des besoins en eau pour la production agricole a
été établie en considérant deux niveaux de référence intermédiaires entre les niveaux
supérieur et inférieur qui correspondent à des ISDEI de respectivement -100% et +100%.
Les niveaux intermédiaires correspondant à des pluviométries de 200mm et de 378mm
d’eau. D’après la FAO (1992), l'agriculture pluviale n'est pas praticable quand les
précipitations varient entre 100 et 300mm. En prenant la moyenne de ces valeurs, à savoir
200mm (ISDEI = -56%), nous avons estimé que la différence entre celle-ci et un manque
absolu d’eau de pluie (ISDEI = -100%) pour satisfaire les besoins de la plante de référence
56
peut être considérée comme faible (selon les jugements sémantiques proposés par le
logiciel M-MACBETH). Le second point intermédiaire correspond à une pluviométrie de
378mm (ISDEI = -17%) qui est la valeur d’évapotranspiration minimale de la plante de
référence. Entre cette valeur et la valeur maximale (ISDEI = +100%), la différence
d’attractivité est jugée faible. La fonction de valeur a été construite à partir de ces deux
différences d’attractivité et est présentée à la figureFigure 9d.
0
20
40
60
80
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Figure 9- Fonctions de valeurs a) Critère qualité eau, b) Critère potentiel de
développement, c) Critère satisfaction des besoins domestiques, d) Critère satisfaction des
besoins en eau pour la production agricole.
4.4 Rangement des arrondissements
À partir des évaluations (voir Tableau 5), des fonctions de valeur et des pondérations des
critères, une performance globale est calculée sur une échelle de 0 à 100 pour chaque
arrondissement. Le calcul est une moyenne pondérée. Les performances globales des
arrondissements, qui correspondent à leur priorité d’intervention en matière
57
d’approvisionnement en eau, sont présentées au tableau Tableau 5. De manière De manière
générale, les performances globales varient de 21/100 à 49/100 sur l’échelle MACBETH, et
ce pour les pondérations moyennes. Les trois arrondissements les plus prioritaires sont G
(49/100), F (44/100) et H (39/100). Les deux arrondissements les moins prioritaires sont D
(21/100) et B (24/100). Les trois autres arrondissements (A, C et E) se situent entre ces
deux groupes. Il est intéressant de constater à la figureFigure 10, où sont montrées les
performances minimales et maximales, que les pondérations ne modifient pas cette
tendance. Bien que les pondérations varient significativement (voir les pondérations
minimales et maximales au tableauTableau 5) et qu’elles aient un impact sur les valeurs des
performances, cela ne remet pas significativement en cause le classement basé sur la
pondération moyenne. En effet, pour 100% des pondérations, l’arrondissement G demeure
le plus prioritaire tandis que pour plus de 70% des pondérations, les arrondissements F et H
gardent, respectivement, leurs seconde et troisième places par ordre de priorité
décroissante. Par ailleurs, pour près de 80% des pondérations, les arrondissements B et D
maintiennent, respectivement, leur avant-dernière et dernière places dans ce rangement.
Dans l’ensemble, le rangement des arrondissements du tableauTableau 5 établi pour les
pondérations moyennes semble donc valide vis-à-vis des préférences des décideurs
consultés au cours de l’étude.
0
10
20
30
40
50
60
A B C D E F G H
Pe
rfo
rma
nc
e g
lob
ale
min
max
Figure 10- Effet de la pondération sur le rangement des arrondissements
58
5. Analyse des résultats et de la démarche
Dans l’ensemble, les intervenants consultés se sont montrés intéressés et favorables à la
démarche proposée d’aide à la décision multicritère proposée. La participation importante
des intervenants a enrichi son élaboration et lui apporte beaucoup de légitimité. Cependant,
il a été impossible de réunir l’ensemble des représentants pour une concertation directe vu
leur grand nombre. La gestion des ressources en eau au Sénégal se caractérise par la
séparation qui est faite entre le rural et l’urbain, par le très grand nombre d’intervenants
avec des prérogatives quelques fois similaires et par les restructurations fréquentes des
organes d’État concernés. Ceci complique la coordination des efforts et la mise en place
d’une approche participative dont la nécessité dans la gestion des ressources en eau est
pourtant reconnue [ARD-Diourbel, 2000 ; BAD, 2005 ; République du Sénégal, 2005]. Des
organes officiels de coordination et de concertation comme le Conseil Supérieur de l’Eau
et le Comité Technique de l’Eau ont été mis en place mais nous n’avons pas trouvé de trace
d’activité de ces organismes. On peut supposer ainsi qu’il existe des obstacles d’ordre
structurel (dynamique hiérarchique complexe) à la concertation directe entre les groupes
d’intervenants notamment en ce qui concerne les entités étatiques. L’étude n’a pas permis
d’identifier ces obstacles de manière précise. Il serait intéressant de les analyser dans une
étude ultérieure afin d’essayer de les surmonter.
La principale difficulté rencontrée lors de l’élaboration de la démarche s’est située au
niveau de la qualité et de la disponibilité des données. Il s’agit d’un handicap majeur pour
l’opérationnalisation des critères. Par exemple, l’évaluation du critère Qualité des eaux
souterraines, ne prend pas en compte l’ensemble des paramètres physico-chimiques
d’importance ni les paramètres microbiologiques car ces informations ne sont pas
complètes dans les bases de données de la DGPRE chargée de leur traitement et de leur
stockage. Un critère initialement retenu sur la satisfaction des besoins en eau pour le
cheptel a dû être abandonné faute de données sur les quantités d’eau actuellement
disponibles pour l’abreuvage du cheptel. Le problème se pose également concernant le
recensement des infrastructures (leur nombre et leur fonctionnalité). En outre, la
59
connaissance du nombre d’habitants par localité est essentielle à la démarche. Pourtant
l’information disponible sur la population par localité n’est qu’une estimation effectuée
dans le cadre du PEPAM à partir des données du recensement de 2002 et des taux de
croissance par localité datant de 1988. Les consultants du PEPAM n’ont pu avoir accès à
des données plus récentes auprès de la Direction de la Prévision et de la Statistique. Une
tentative a aussi été entreprise dans le cadre de cette étude mais sans succès.
Concernant, le critère Acceptabilité des coûts de l’allocation, les évaluations par les
décideurs n’ont été faites que sur la base de l’acceptabilité financière des populations sans
tenir compte de leur capacité de payer. La prise en compte de ce second aspect pourrait se
faire dans le futur au moyen d’enquêtes. En outre, l’analyse aurait pu s’opérer à plus petite
échelle : celle de la communauté rurale (reconnue comme l’unité territoriale administrative
de base pour l’allocation lorsque l’analyse est menée à l’échelle d’une région). Toutefois,
toutes les informations nécessaires à l’évaluation des critères ne sont pas disponibles
actuellement à cette échelle. Ainsi, dans la perspective de mettre en place des outils de
planification mais aussi de suivi et d’évaluation, des efforts devraient être faits dans la
collecte de données actualisées et précises et dans l’échange d’informations entre les divers
intervenants. Étant donné le développement rapide des technologies de l’information et de
la communication, ces problèmes pourraient être surmontés du point de vue technique.
L’approche présentée pourrait aussi être améliorée en utilisant le logiciel M-MACBETH
pour les pondérations des critères. En effet, les poids devraient être sur une échelle ratio et
refléter l’importance relative d’un changement d’unité sur la fonction de valeur [Hajkowicz
et al., 2000] ce qui n’est pas garanti avec la méthode du point fixe utilisée. Cependant, le
poids des critères exprimé par les décideurs reste valable pour traduire l’importance relative
accordée à chaque critère.
60
6. Conclusion
A l’instar d’un certain nombre de pays en voie de développement, le Sénégal initie des
projets de petite et moyenne envergure pour répondre à l’urgence de l’approvisionnement
en eau dans le monde rural. En amont de ces projets, l’insuffisance des moyens impose
qu’un choix soit fait quant aux priorités d’intervention en matière d’approvisionnement en
eau. En tant que ressource naturelle vitale intégrant bien d’autres dimensions (sociale,
environnementale, humaine, culturelle), l’eau ne peut être traitée comme un simple bien
économique dont l’allocation dépendrait de l’équilibre entre l’offre et la demande. La
multiplicité de ses dimensions impose une gestion intégrée et concertée qui s’avère
complexe. Dans le cadre de la présente étude, le contexte décisionnel a été analysé selon un
point de vue multicritère. Des critères ont été proposés dans le but de faciliter, à l’échelle
régionale, la priorisation des besoins en eau en milieu rural au Sénégal. Ces critères sont en
rapport avec le système de valeurs de différents intervenants identifiés dans la gestion des
ressources en eau et les objectifs fixés par l’État. Des indicateurs de mesure pour ces
critères ont été proposés dans le contexte du Sénégal. Ces indicateurs, des pondérations
définis par des intervenants sénégalais, et des fonctions de valeur définies à l’aide du
logiciel M-MACBETH, ont permis de ranger les arrondissements de la région rurale de
Diourbel par ordre de priorité. D’après les résultats obtenus, trois de ces arrondissements
ressortent comme plus prioritaires du point de vue de l’approvisionnement en eau.
Globalement, l’application d’une telle démarche d’aide à la décision s’avère donc tout à fait
faisable. Néanmoins, une amélioration de la collecte et de la compilation de données sur
l’utilisation de l’eau au Sénégal faciliterait l’expansion et le raffinement ce type de
démarche.
61
Remerciements
Tous les organismes, et leurs représentants, du secteur de l’eau au Sénégal qui ont participé
à cette étude sont remerciés pour leur précieuse collaboration. L’étude présentée dans cet
article a bénéficié en particulier de l’appui de la Direction de Gestion et de Planification des
Ressources en Eau et de celui de l’organe de coordination du PEPAM. Enfin, Oscar Nilo,
professionnel de recherche à l’Université Laval, est remercié pour son aide dans la partie
informatique de l’étude.
62
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65
Complément sur la méthodologie : détermination des
unités territoriales et orientation adoptée pour
l’évaluation des unités territoriales
Détermination des unités territoriales Dans la terminologie de l’aide à la décision, les éléments sur lesquels les décideurs doivent
se prononcer selon leur système de valeur sont généralement nommés options, ou actions.
Dans le cas présent les unités territoriales de la région d’étude représentent les options.
L’ensemble des options constituant la région, l’exigence d’exhaustivité est donc facilement
rencontrée. Cependant, cet ensemble peut varier en nombre selon l’échelle d’allocation
choisie. Le découpage du territoire sur lequel les décideurs doivent se prononcer quant à la
priorité d’allocation des ressources en eau doit répondre à deux contraintes principales : à
savoir la pertinence (pour que les informations soient significatives) et la faisabilité (en ce
qui a trait au travail de recherche). L’unité de surface sur laquelle porte la décision
d’allocation a donc été choisie de sorte à correspondre à la plus petite échelle pertinente de
décision, à concorder le plus possible à une représentation mentale que se font les
intervenants de leur territoire et à être la plus homogène possible en terme de
caractéristiques. Le choix s’est porté sur l’arrondissement car il s’agit de la plus petite unité
territoriale pour laquelle les informations sont les plus complètes mais aussi parce que cela
correspond à un découpage administratif déjà établi. Les décisions en matière de
développement se prennent d’ailleurs, souvent, en suivant le découpage administratif du
territoire (village, CR, arrondissement, département ou région). Les plans locaux de
développement (PLD) par exemple se définissent au niveau de la CR.
Parmi les 8 arrondissements que compte Diourbel, celui de Ndame abrite une communauté
rurale aux caractéristiques particulières de sorte qu’elle a été exclue de l’analyse. Il s’agit
de la communauté rurale de Touba Mosquée. Capitale du mouridisme, Touba Mosquée,
dans le département de Mbaké, a les caractéristiques d’une ville d’après le critère de
délimitation entre l’hydraulique rurale et urbaine (5000 habitants). Elle est pourtant
66
considérée comme une communauté rurale. Cette ville abrite plus de 90% de la population
de l’arrondissement et près de 47% de celle de l’ensemble de la région soit 421 495
personnes (d’après les estimations faites à partir du recensement de 2002; d’autres sources
mentionnent plus de 462 000). Cette population fluctue de manière importante lors des
grands évènements religieux qui ont lieu plusieurs fois au cours de l’année. C’est une zone
de forte attraction. Cette affluence s’explique par sa fonction religieuse et le caractère
commercial de la cité. De même, le fait que les terres et l’eau y sont gratuites contribue à
cette affluence. Dans ce contexte démographique et socio-religieux, le traitement de la
question de l'eau relève d'une approche spécifique [MAHS, 2005].
Orientation adoptée pour l’évaluation des unités territoriales Pour l’ensemble des arrondissements, la priorité d’intervention pour l’approvisionnement
en eau est déterminée en fonction du niveau de satisfaction des besoins sur l’ensemble des
critères. Deux orientations s’offraient à nous dans l’élaboration des indicateurs d’évaluation
par critère: la première étant de prioriser les populations les plus nécessiteuses c’est-à-dire
celles pour lesquelles les lacunes sont les plus grandes ; la seconde étant de réduire
globalement le plus possible les lacunes quitte à favoriser des arrondissements plus
populeux où les lacunes sont relativement plus faibles. Le choix dépend des orientations
données à la gestion des ressources en eaux, définies par les décideurs (politiques et
bailleurs de fonds).
Le document de stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP) sert de référence à
l’élaboration des plans sectoriels de développement (dont celui des ressources en eau) et de
programme d’investissement [MEFS4, 2003]. Le gouvernement y affirme sa volonté de
réduire les inégalités en répartissant de façon équilibrée les richesses, en généralisant
l’accès aux services sociaux et en éradiquant toutes formes d’exclusion. L’équité est un des
principes directeurs de mise en œuvre énoncé dans le DSPR [République du Sénégal,
2005]. L’objectif socio-politique en matière d’allocation des ressources en eau, s’il
4 Ministère de l’Économie et des Finances
67
s’inspire du DSRP tel que voulu par l’État, semble donc être de réduire les écarts à la
norme (à la cible). En se basant sur les documents d’élaboration des plans sectoriels de
développement et des programmes d’investissement pour le Sénégal, la première
orientation a été choisie en visant une réduction des inégalités entre arrondissements, c’est-
à-dire, évaluer les arrondissement sur les critères en utilisant des valeurs relatives plutôt que
des valeurs absolues.
Cependant, en ce qui concerne l’adduction en eau potable en milieu rural de manière
spécifique, le PEPAM5 qui sert d’outil de mise en œuvre des projets pour l’atteinte des
OMD dans ce domaine, vise la satisfaction des besoins minimum des communautés rurales
en fonction de leur population. Un objectif global d’accès à l’eau potable en milieu rural de
82% est également fixé dans le cadre de ce programme. Ainsi, cet objectif devrait être
mieux explicité afin d’éviter que les stratégies de réduction de la pauvreté dans quelque
secteur que ce soit, soient basées sur un objectif qui ne corresponde pas à la réalité du
processus décisionnel.
Le critère Qualité des eaux souterraines évalué de manière qualitative ne répond qu’à
l’objectif de réduction des inégalités entre arrondissements. Du fait des informations
disponibles, l’échelle n’a pas pu être définie de sorte à prendre en compte l’importance
relative de la population concernée. L’évaluation du critère Potentiel de développement a
également été faite de manière qualitative. Elle intègre de façon assez complexe
l’importance de la population tout en établissement une échelle relative entre les
arrondissements.
5 PEPAM : Programme Eau Potable et Assainissement du Millénaire : programme de mise en œuvre des
Objectifs du Millénaire pour le développement pour l’eau potable et l’assainissement en milieu rural et
urbain.
68
Définition des critères
À partir des entrevues avec des intervenants du secteur de l’hydraulique au Sénégal et d’un
ensemble de documents de référence sur la gestion des ressources en eau au Sénégal, nous
avons identifié les objectifs en matière d’approvisionnement en eau qui visent à améliorer
les conditions de vie des populations rurales. Ces objectifs sont présentés à la figure Figure
8 - Arbre des objectifs, critères et indicateurs de mesure. Nous avons ensuite élaboré des
critères pour répondre aux objectifs de dernier niveau. La liste des critères a été validée par
7 représentants de différents ministères (Agriculture et hydraulique; Environnement et
protection de la nature; Prévention, hygiène publique et assainissement; Réseau
hydrographique national), par 1 représentant de l’Agence Régionale du Développement
rural de Diourbel (ADR-Diourbel), par 1 représentant de l’Agence Régionale de
Développement de Diourbel (DRDR-Diourbel) et par 2 représentants de la Société de
Distribution d’Eau (SDE) et de la Société Nationale des Eaux du Sénégal (SONES). Ces
critères, au nombre de sept, permettent ainsi, de déterminer les priorités d’interventions en
matière d’approvisionnement en eau en milieu rural. Cependant, le critère de satisfaction
des besoins en eau du cheptel n’a pas été retenu dans l’évaluation finale des
arrondissements de la région de Diourbel (dont les résultats sont présentés dans l’article)
faute de données suffisantes pour procéder à l’évaluation.
Cr1 : Qualité des eaux souterraines.
Cr2 : Acceptabilité des coûts de l’allocation
Cr3 : Satisfaction des besoins domestiques en eau.
Cr4 : Accessibilité au point d’eau.
Cr5 : Satisfaction des besoins en eau pour la production agricole.
Cr6 : Potentiel de développement.
Cr7 : Satisfaction des besoins en eau du cheptel.
69
Qualité des eaux souterraines Assurer la qualité de l’eau est un objectif sanitaire incontournable dans les projets
d’allocation des ressources en eau mais ceci constitue aussi, de façon plus globale, un
objectif de développement majeur. Il s’agit d’une condition de succès pour la lutte contre la
pauvreté, la faim, la mortalité infantile, l’égalité entre les genres etc. [OMS et UNICEF,
2004]. Cette qualité dont il est question comprend un aspect physico-chimique et un aspect
microbiologique qui font l’objet d’une réglementation au niveau national suivant les
recommandations de l’OMS. Cependant, pour des raisons économiques, l’eau disponible,
surtout en milieu rural, ne rencontre pas toujours les normes en vigueur. Il s’agit avec ce
critère, d’évaluer la qualité globale des eaux souterraines captées des arrondissements de la
région en utilisant les normes de l’OMS comme références. Cette évaluation se limite
néanmoins aux paramètres physico-chimiques car l’information nécessaire pour
l’évaluation sur les paramètres microbiologiques n’est pas disponible. Ainsi, les
arrondissements ayant des eaux de moins bonne qualité au regard des paramètres physico-
chimiques sont prioritaires pour l’allocation des ressources en eau.
Acceptabilité des coûts de l’allocation La quantité et la qualité de l’eau ne sont pas les seuls éléments à considérer pour garantir
les besoins de base en matière d’approvisionnement en eau. La satisfaction de ces besoins
dépend également de l’accessibilité définie en termes de distance et de temps
d’approvisionnement mais aussi d’accessibilité financière [Guy Howard et Jamie Bartram,
2003] et de pérennité des infrastructures d’approvisionnement. C’est sur ces deux derniers
aspects que porte le critère volonté de payer des populations. En effet, l’accès à l’eau
potable et à l’eau d’irrigation implique des coûts (de distribution et de traitement). De ce
fait, l’allocation doit être financièrement rentable de manière durable. Simultanément,
l’accessibilité économique de l’eau aux populations a une influence significative sur le
choix de la source d’eau. Un coût trop élevé de l’eau peut conduire les populations à utiliser
des sources alternatives de moindre qualité [OMS et UNICEF, 2005]. Or, le financement
des infrastructures par la vente de l’eau aux populations conditionne leur implantation et
70
assure leur pérennité. Ainsi, les arrondissements où la volonté de payer est la plus forte sont
jugés prioritaires.
Satisfaction des besoins domestiques en eau L’eau est essentielle aux activités domestiques. Le caractère vital de la ressource et les
multiples usages qui en sont faites rendent nécessaire la garantie d’un accès adéquat à l’eau
pour les populations. Satisfaire l’alimentation en eau des populations est par ailleurs
l’objectif premier de l’allocation des ressources en eau selon le code de l’eau au Sénégal
(article 75 du code de l’eau). Sur le plan international, l’importance de disposer d’une eau
potable en quantité adéquate est reconnu comme un droit humain de base [Vaillancourt,
2003]. Ce critère référant à la quantité d’eau disponible pour la population humaine est
donc incontournable dans la démarche d’élaboration de l’outil d’aide pour l’allocation des
ressources en eau en milieu rural. Il se justifie d’un point de vue sanitaire et légal.
Les directives de l’OMS en la matière précise l’importance de satisfaire les besoins en eau
des populations à la fois en termes de quantité et de qualité [OMS et UNICEF, 2004]. À ce
titre, seules les infrastructures garantissant une eau de qualité microbienne en quantité
suffisante sont retenues dans l’inventaire des points d’eau disponibles pour les populations.
C’est pourquoi, dans l’évaluation de ce critère, les points de distribution ne garantissant pas
un tel niveau d’accès n’ont pas été comptabilisés.
Accessibilité au point d’eau Le critère d’accès à l’eau potable adopté pour l’atteinte des OMD au Sénégal est celui
défini par l’OMS et l’UNICEF dans le cadre du Joint Monitoring Program for Water
Supply and Sanitation. L’accès raisonnable est le niveau retenu. Il définit l’accès en termes
de quantité mais aussi de distance. Il s’agit d’un niveau de desserte garantissant une
disponibilité de 20 litres par personne au minimum, à un point d’accès situé à une distance
d’un kilomètre ou moins du point de résidence des consommateurs [OMS et UNICEF,
2000]. Ces deux aspects relatifs à la quantité et la distance sont pris en compte dans
l’élaboration de la démarche d’aide multicritère proposée. Ainsi, le critère accessibilité au
point d’eau dont il s’agit dans ce chapitre, mesure la satisfaction du niveau d’accès
71
raisonnable en termes de proportion de personne ne bénéficiant pas de ce niveau d’accès
par arrondissement. Il est admis que la distance à parcourir pour s’approvisionner en eau a
des conséquences non négligeables sur la quantité et la qualité de l’eau. La distance limite
la quantité d’eau transportable et la manutention et la nécessité d’entreposage peut accroître
les risques de contamination. La distance à parcourir a également un impact considérable
sur l’éducation des jeunes -surtout des filles- obligés d’effectuer les corvées de collecte au
détriment de leurs études, sur le développement économique et l’équité entre les genres
[OMS et UNICEF, 2004]. La prise en compte de ce critère dans la démarche d’élaboration
de l’outil d’aide à la décision permet donc, au-delà de l’impact sanitaire, d’intégrer
indirectement d’autres aspects socio-économiques d’importance reliés à l’adduction en eau.
Satisfaction des besoins en eau pour la production agricole Il existe des objectifs sociaux et économiques évidents d’intégration de la satisfaction des
besoins en eau pour l’agriculture dans les critères d’allocation des ressources en eau. Parmi
ceux-ci : la nécessité d’améliorer le cadre de vie des populations en favorisant
l’autosuffisance alimentaire et le besoin de développer l’économie locale en permettant la
pratique des activités agricoles pour assurer un minimum de revenu aux populations
rurales. La considération de ce critère se justifie aussi de manière légale par l’obligation de
prendre en compte, dans le cadre de l’allocation des ressources en eau, les besoins sociaux
et économiques des populations (section 5, article 75 du Code de L’Eau). Or en milieu
rural, l’agriculture et l’élevage constituent les premières sources de revenus. La satisfaction
des besoins en eau pour l’agriculture s’inscrit d’ailleurs en troisième position dans l’ordre
de priorité défini dans le Code de l’Eau du Sénégal (section 5, article 76). De plus, le droit à
une alimentation suffisante, droit reconnu par la communauté internationale, exige qu’un
accès aux ressources en eau soit garanti à l’agriculture [FAO, 2004].
Potentiel de développement Ce critère mesure le potentiel de développement des arrondissements si plus d’eau de
meilleure qualité était disponible pour l’irrigation et la consommation. Comme son intitulé
le précise, il introduit la notion de potentiel et permet ainsi de prendre en compte des
éléments quantitatifs mais aussi qualitatifs, tel que le dynamisme ou le potentiel de terre
72
cultivable, facteurs d’importance dans la contribution des projets d’adduction en eau au
développement des arrondissements. Il à été introduit dans la démarche pour compléter
l’évaluation des autres critères. En effet, l’ensemble des autres critères, sauf celui portant
sur la volonté de payer des usagers, sont évalués en fonction de la demande ou des besoins
actuelles sans tenir compte des perspectives futures difficilement évaluables dans le cadre
de cet étude. La prise en compte de ces facteurs permet aussi, de mesurer a priori
l’efficacité de la mise en valeur des arrondissements par l’allocation des ressources en eau.
Satisfaction des besoins en eau pour le cheptel L'élevage joue un rôle primordial pour la sécurité alimentaire par sa contribution à la
satisfaction des besoins alimentaires des populations. Sur le plan économique, il est à noter
qu’il occupe une place importante dans l’économie de la région et participe pour 7,5% au
PIB national [Gouvernement du Sénégal, 2007]. Les mesures engagées par le
gouvernement pour renforcer les atouts du secteur de l’élevage et réduire les contraintes,
prennent en compte l’amélioration des infrastructures hydrauliques. La satisfaction des
besoins en eau de l’élevage s’inscrit, par ailleurs, en seconde position (après celle des
besoins pour l’alimentation humaine) dans l’ordre des priorités défini dans le Code de l’Eau
de l’État du Sénégal.
Pour ce critère, l’indicateur de mesure initialement proposé consistait en l’évaluation de
l’effectif du cheptel par unité territoriale converti en Unité Bétail Tropical6, la
détermination de la quantité d’eau nécessaire pour son alimentation ainsi que la quantité
d’eau effectivement disponible. Un arrondissement serait d’autant plus prioritaire que la
satisfaction des besoins en eau de son cheptel est faible.
Ce critère n’a cependant pas été retenu dans l’évaluation des arrondissements de Diourbel.
Les données nécessaires à la détermination de la quantité d’eau nécessaire pour
l’alimentation du cheptel ainsi que la quantité d’eau effectivement disponible n’ont pu être
collectées auprès du ministère chargé de l’élevage et d’autres structures impliquées dans
l’alimentation en eau du cheptel.
6 1UBT correspond à un à un animal de 250kg consommant 40L/J (environ, dépendamment des conditions)
73
Discussion générale
L’identification des nombreux objectifs qui sous-tendent la gestion des ressources en eau
démontre que l’élaboration d’une stratégie d’allocation des ressources ne peut être menée
selon une seule dimension. Elle nécessite l’intégration des aspects sociaux, économiques et
environnementaux et la prise en compte des systèmes de valeurs des intervenants, ce qui
représente un nombre considérable de données. L’approche multicritère d’aide à la décision
utilisée permet non seulement d’identifier ces éléments, de les analyser chacune dans une
unité de mesure appropriée (pas nécessairement monétaire) mais aussi de les synthétiser.
Elle offre un cadre d’élaboration constructif et le formalisme qu’impose une telle approche
pousse les décideurs à prononcer clairement leurs jugements de valeurs. Ceci apporte
beaucoup de transparence et d’intelligibilité au processus décisionnel.
L’application de la démarche demande le support d’un outil efficace pour l’agrégation des
évaluations sur l’ensemble des critères. La méthode MACBETH [Bana e Costa et
Vansnick, 1999] utilisée dans le cadre de cette étude s’avère simple d’utilisation et son
logiciel d’application convivial. En effet, il s’agit d’une technique d’agrégation additive
bien connue et simple d’utilisation. Elle ne requiert que des jugements qualitatifs de la part
des évaluateurs pour juger de l’attractivité des options. Sur le plan théorique, la procédure
permettant le passage d’une échelle ordinale à une échelle cardinale est cohérente avec les
principes de la théorie du mesurage [Falmagne, 1988].
Un point important est à souligner quant à l’utilisation du logiciel M-MACBETH comme
outil d’agrégation dans la démarche. Pour plus de cohérence, le poids des critères devrait
également être obtenu avec la même méthode ou une méthode similaire. En effet, les poids
devraient être sur une échelle ratio et refléter l’importance relative d’un changement d’unité
sur la fonction de valeur [CSIRO, 2000] ce qui n’est pas garanti avec la méthode du point
fixe utilisée. Cependant, le poids des critères exprimé par les décideurs reste valable pour
traduire l’importance relative accordée à chaque critère.Par ailleurs, la méthode M-
MACBETH et son logiciel d’application présentent bien des avantages qui devraient
74
faciliter l’application d’une telle démarche. Cependant, le principale critique qu’on puisse
formuler quand à la méthode et qu’elle n’admet pas l’incomparabilité entre les options et
qu’elle induit une certaine compensation entre les critères [Maystre et al. (1994)] en ayant
recourt à la somme pondérée. L’incomparabilité autorise une plus grande richesse dans la
relation entre les options. En effet, les informations sur lesquelles se fonde le classement ne
sont pas toujours assez précises pour qu’une distinction tranchée puisse être faite dans
l’évaluation des options ou, dans le cas de ce mémoire, des unités territoriales.
En ce qui concerne la compensation entre les critères, une alternative consisterait en
l’utilisation de M-MACBETH dans un premier temps, pour établir les pondérations ; dans
un second temps une méthode de surclassement admettant l’incomparabilité servirait à
établir le rangement. Dès lors, la question du choix même de M-MACBETH pourrait être
posée par le lecteur. Mais il n’est pas de méthode d’agrégation multicritère parfaite et le
choix pourrait lui-même nécessité une analyse multicritère. L’option de M-MACBETH a
été motivée notamment par la simplicité d’utilisation du logiciel. Le recours à ce logiciel a
évité, entre autres, d’avoir à définir de nombreux seuils comme cela doit être fait dans les
méthodes de surclassement.La méthode et son logiciel d’application facilitent en fait
l’application d’une démarche d’aide à la décision dans des contextes comme celui de la
présente étude.
L’analyse de la région de Diourbel a servi de cadre d’élaboration de la démarche. Elle a
également permis d’évaluer son applicabilité et mesurer les difficultés inhérentes à un tel
projet.La principale difficulté rencontrée lors de l’élaboration de la démarche s’est située au
niveau de la qualité et de la disponibilité des données. Il s’agit d’un handicap majeur pour
l’opérationnalisation des critères. Ainsi, alors que 7 critères sont définis pour la démarche
proposée, seuls 6 sont retenus dans l’analyse des priorités d’interventions pour la région de
Diourbel. Le critère satisfaction des besoins en eau pour le cheptel n’a pu être considéré.
Les informations sur les infrastructures d’alimentation en eau destinées au cheptel ne sont
pas disponibles. Ce critère demeure pourtant d’une grande importance dans l’analyse des
priorités d’interventions d’approvisionnement en eau en milieu rural au Sénégal.
75
De plus, l’évaluation du critère Qualité des eaux souterraines, ne prend pas en compte
l’ensemble des paramètres physico-chimiques d’importance ni les paramètres
microbiologiques car ces informations ne sont pas complètes dans les bases de données de
la DGPRE chargée de leur traitement et de leur stockage. Une démarche de prise en compte
des paramètres microbiologiques a cependant été tentée. Elle consistait à mesurer la
vulnérabilité à la contamination microbiologique des différents systèmes d’adduction d’eau
en fonction de leurs caractéristiques et de leur environnement immédiat. Elle n’a pas abouti
par manque de données (notamment en ce qui concerne l’environnement immédiat :
distance aux champs, distance par rapport au point d’abreuvage etc.). Le problème se pose
également concernant le recensement des infrastructures (leur nombre et leur
fonctionnalité). En outre, la connaissance du nombre d’habitants par localité est essentielle
à la démarche. Pourtant l’information disponible sur la population par localité n’est qu’une
estimation effectuée dans le cadre du PEPAM à partir des données du recensement de 2002
et des taux de croissance par localité datant de 1988. Les consultants du PEPAM n’ont pu
avoir accès à des données plus récentes auprès de la Direction de la Prévision et de la
Statistique. Une tentative a aussi été entreprise dans le cadre de cette étude mais sans
succès.
Pour les même raisons, un élément d’importance n’a pas été pris en compte : la capacité
financière des ménages. En effet, dans la démarche proposée, le critère acceptabilité des
coûts de l’allocation n’a été évalué que sur la base de la volonté de payer des populations
sans prendre en compte leur capacité, l’information sur les revenus par ménage n’étant pas
accessible. Or l’acceptabilité des coûts de l’allocation est fortement liée à ces deux
paramètres. Reste à savoir comment les évaluer simultanément pour juger de l’acceptabilité
des coûts par les populations.
Enfin, l’analyse aurait pu s’opérer à plus petite échelle : celle de la communauté rurale
(reconnue comme l’unité territoriale administrative de base pour l’allocation lorsque
l’analyse est menée à l’échelle d’une région). Toutefois, toutes les informations nécessaires
à l’évaluation des critères ne sont pas disponibles actuellement à cette échelle.
76
Dans l’ensemble, les intervenants consultés se sont montrés intéressés et favorables à la
démarche proposée. La participation importante des intervenants a enrichi son élaboration
et lui apporte beaucoup de légitimité. Les motivations académiques de l’étude n’ont pas
constitué un frein majeur à leur implication. Ils ont au contraire reconnu la nécessité d’une
telle démarche.
Néanmoins, il a été impossible de réunir l’ensemble des représentants pour une
concertation directe vu leur grand nombre. La gestion des ressources en eau au Sénégal se
caractérise par la séparation qui est faite entre le rural et l’urbain, par le grand nombre
d’intervenants avec des prérogatives quelques fois similaires et par les restructurations
fréquentes des organes d’État concernés. Ceci complique la coordination des efforts et la
mise en place d’une approche participative dont la nécessité dans la gestion des ressources
en eau est pourtant reconnue [ARD, 2000 ; BAD, 2005]. En fait, des organes officiels de
coordination et de concertation comme le Conseil Supérieur de l’Eau et le Comité
Technique de l’Eau ont été mis en place. Cependant nous n’avons pas trouvé de trace
d’activité de ces organismes. On peut supposer qu’il existe des obstacles d’ordre structurel
(dynamique hiérarchique complexe) à la concertation directe entre les groupes
d’intervenants notamment en ce qui concerne les entités étatiques. L’étude n’a pas permis
d’identifier ces obstacles de manière précise. Il serait intéressant de les analyser dans une
étude ultérieure afin d’essayer de les surmonter. Si cette concertation entre décideurs est
rendue plus facile, il serait possible d’aboutir à un ensemble de poids qui soit le résultat
d’un consensus plutôt que d’une moyenne arithmétique. Cela est d’autant plus vrai qu’on
note des différences significatives entre les poids minimaux et maximaux accordés aux
critères (voir section 4.2). La piste de la moyenne géométrique plutôt qu’une moyenne
pondérée arithmétique, qui a été envisagée tardivement dans le cadre de ce mémoire,
pourrait être explorée étant donnée la variabilité des poids.
Dans la perspective de mettre en place des outils de planification mais aussi de suivi et
d’évaluation, des efforts doivent être faits dans la collecte de données actualisées et précises
et dans l’échange d’informations entre les divers intervenants. Il en existe d’ores et déjà
mais leur accès n’est pas facile et les données ne sont pas mises à jour fréquemment. Les
coûts inhérents à ces efforts peuvent constituer un frein à leurs applications. Pourtant, d’un
77
point de vue technique, étant donné le développement rapide des technologies de
l’information et de la communication, ces problèmes pourraient être facilement surmontés.
L’opérationnalisation des critères a souffert de ce manque de données. Les méthodes
d’évaluations proposées dans ce travail pourraient alors être redéfinies en fonction des
données et des moyens disponibles dans le cadre d’un projet similaire. C’est le cas
notamment du critère Qualité des eaux souterraines qui demanderait probablement la
décomposition de l’indicateur de mesure en deux sous-indicateurs (physico-chimique et
microbiologique).
Conclusion générale
A l’instar d’un certain nombre de pays en voie de développement, le Sénégal initie des
projets de petite et moyenne envergure pour répondre à l’urgence de l’approvisionnement
en eau dans le monde rural. En amont de ces projets, l’insuffisance des moyens impose
qu’un choix soit fait quant aux priorités d’intervention en matière d’approvisionnement en
eau. En tant que ressource naturelle vitale intégrant bien d’autre dimensions (sociale,
environnementale, humaine, culturelle), l’eau ne peut être traitée comme un simple bien
économique dont l’allocation dépendrait de l’équilibre entre l’offre et la demande. La
multiplicité de ses dimensions impose une gestion intégrée et concertée qui s’avère
complexe. Dans le cadre de la présente étude, le contexte décisionnel a été analysé. Des
critères ont été proposés dans le but de faciliter, à l’échelle régionale, la priorisation des
interventions concernant l’approvisionnement en eau en milieu rural au Sénégal. Ces
critères sont en rapport avec le système de valeurs de différents intervenants identifiés dans
la gestion des ressources en eau et les objectifs fixés par l’État. Des indicateurs de mesure
pour ces critères sont proposés dans le contexte du Sénégal. Ces indicateurs, des
pondérations définis par des intervenants sénégalais, et des fonctions de valeur définies à
l’aide du logiciel M-MACBETH, ont permis de ranger les arrondissements de la région
rurale de Diourbel par ordre de priorité. D’après les résultats obtenus, trois de ces
arrondissements ressortent comme plus prioritaires du point de vue de l’approvisionnement
en eau. Globalement, l’application d’une telle démarche d’aide à la décision s’avère donc
tout à fait faisable. Néanmoins, une amélioration de la collecte et de la compilation de
données sur l’utilisation de l’eau au Sénégal faciliterait l’expansion et le raffinement ce
type de démarche. Par ailleurs le raffinement de ce type de démarche pourrait être entrepris
notamment en développant des méthodes d’agrégation pour comparer des sources d’eau sur
plusieurs paramètres en même temps ou encore en analysant de manière spécifique le lien
entre la capacité et la volonté de payer. En fait, l’étude de chacun de ces critères pris
individuellement pourrait constituer un sujet d’étude intéressant.
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Annexes
88
Annexe A : Présentation de la région de Diourbel
La région de Diourbel s’étend sur de 4769 km² subdivisés en trois départements (Diourbel,
Bambay et Mbaké), huit arrondissements (Baba-Garage, Lambaye, Ngoye, Ndoulo,
Ndindy, Ndame, Kael et Taïf) et 33 communautés rurales. Elle abrite une population de 929
414 habitants [MAHS, 2005]. Située dans le bassin arachidier, elle a pour principales
activités l’agriculture et l’élevage. Les difficultés d’ordre climatique, l’appauvrissement des
terres et le manque d’infrastructures d’adduction d’eau auxquelles fait face la région
constituent des obstacles majeurs au développement de ces activités génératrices de revenus
pour une population essentiellement rurale mais plus largement pour le bien-être de cette
population. En effet, la région de Diourbel dispose d’un climat soudano-sahélien chaud et
sec. Sur le plan pluviométrique, elle ne reçoit en moyenne que 400 à 600 mm pour 30 à 40
jours de pluie avec une irrégularité spatio-temporelle très marquée. Une urbanisation
croissante et une évolution démographique rapide accroissent ces difficulté, et augmentent
la pression sur les ressources hydriques [Agence régionale de la prévision et de la
statistique 2005 ; PNUD, 2001].
L’approvisionnement en eau se fait essentiellement à partir des ressources en eaux
souterraines (avec une forte exploitation de la nappe du maestrichtien). Le taux d’accès à
l’eau potable est estimé à 77% [MASH, 2005] avec néanmoins des disparités. En outre,
bien que le potentiel hydraulique de la région soit considéré comme important, la quantité
disponible pour les populations de même que la qualité de ces eaux sont insatisfaisants. En
effet, les points d’approvisionnement sont disparates. Les équipements sont insuffisants et,
par endroit, vétustes. Par ailleurs, les teneurs en fluorures et en sel sont au dessus des
normes sanitaires dans toute la région. Bambey et Mbaké connaissent en plus des
concentrations en fer importantes. Les problèmes d’assainissement tel que la proximité des
fosses septiques avec le réseau d’eau potable, l’absence de système d’évacuation adéquat
des ordures et des eaux usées, la pollution de la nappe superficielle etc., se répercutent sur
la qualité des eaux de consommation. Diourbel autrefois zone maraîchère,
souffreaujourd’hui de la sécheresse. Les agriculteurs ne peuvent compter que sur les eaux
89
de pluies qui ne tombent que durant les trois mois d’hivernage et de manière irrégulière.
Pour le reste, l’eau, souvent trop salée est impropre à l’agriculture.
A.1 Situation géographique et contexte physique
La région de Diourbel se situe entre 14°30’ et 15° de latitude nord et entre 15°40’ et
16’40 de longitude ouest (ARD, 2000). Au centre ouest du pays, elle est limitée au
Nord par la région de Thiès et de Louga, au Sud par les régions de Thiès et de Fatick,
à l’Est par les régions de Fatick et Louga et à l’Ouest par la région de Thiès.
Avec ses 4769 km² de superficie, elle est la région la moins étendue du pays après
Dakar. Le relief y est plat, avec quelques cuvettes et de rares formations dunaires. Les
sols y sont essentiellement de type Dior et Deck-Dior ferrugineux.
A.2 Population
En termes de densité de population, la région de Diourbel se place en deuxième
position après Dakar. Elle abrite 929 414 habitants [MAHS, 2005] dont près de 78%
en milieu rural. La population est essentiellement jeune et féminine : 59 % ont moins
de 20 ans, et 53% sont des femmes. [Senagrosol, 2006]. Touba, capitale du
mouridisme, dans le département de Mbaké -par ailleurs le plus peuplé de la région-
est une zone de forte attraction. Elle abrite 96% de la population de l’arrondissement
et 47% de l’ensemble de la région [Agence régionale de la prévision et de la
statistique, 2005]; cela s’explique par sa fonction religieuse et le caractère commercial
de la cité. Cette affluence s’explique aussi par le fait que les terres et l’eau y sont
gratuites.
La population diourbelloise est caractérisée par une urbanisation croissante, et une
évolution démographique rapide. En effet, le taux de croissance démographique de la
région de 3,8% est l’une des plus forte du pays (2,4% pour le plus récent recensement
en 2002) [Agence régionale de la prévision et de la statistique 2005 ; PNUD, 2001].
On note toutefois une forte dépression démographique dans la population active due à
des difficultés d’ordre économiques et sociales (activités agricoles et industrielles peu
prospères, exode rural…).
90
A.3 Climat
La région de Diourbel dispose d’un climat soudano-sahélien chaud et sec. Sur le plan
pluviométrique, elle ne reçoit en moyenne que 400 à 600 mm pour 30 à 40 jours de pluie
avec une irrégularité spatio-temporelle très marquée. Les températures moyennes oscillent
entre 27 à 30°C avec un maximum entre avril et juin. La non fonctionnalité des réseaux
hydrographique du Car-Car (au nord) et du Sine (au sud-est) illustre la dégradation des
conditions climatiques au cours des dernières décennies [Badiane et al. 2000].
A.4 Activités économiques dominantes
Diourbel n’est pas nantie sur le plan industriel. En effet, elle ne renferme que deux
unités industrielles : la SONACOS et la SETUNA, des usines alimentaires. Malgré
des difficultés d’ordre climatique et l’appauvrissement des terres, l’agriculture est une
activité dominante avec une prépondérance de l’arachide, du mil, de la souna, du
sorgho et du niébé [ARD-Diourbel, 2000]. L’élevage y est aussi pratiqué. Il est
cependant, de plus en plus extensif et transhument à cause de la rareté des pâturages
au profit de l’agriculture. Le cheptel de la région est important avec une
prédominance au Nord, à Mbaké.
A.5 Condition d’approvisionnement en eau potable et eau
d’irrigation
L’approvisionnement en eau se fait essentiellement à partir des ressources en eaux
souterraines (avec une forte exploitation de la nappe du maestrichtien), les cours d’eau
douce étant quasi inexistants. Avec plus de 190 ouvrages hydrauliques [MAHS, 2005], le
taux d’accès à l’eau potable est estimé à 77% avec néanmoins des disparités. En outre, bien
que le potentiel hydraulique de la région soit considéré comme important, la quantité
disponible pour les populations de même que la qualité de ces eaux sont insatisfaisants. En
effet, les points d’approvisionnement sont disparates : le principal cours d’eau (le Sine)
subit des infiltrations saline. Lors de fortes pluies, il se forme des marres dans les zones
dépressionnaires. Les équipements sont insuffisants et, par endroit, vétustes. Par ailleurs,
91
les teneurs en fluorures et en sel sont au dessus des normes sanitaires dans toute la région.
Bambey et Mbaké connaissent en plus des concentrations en fer importantes. Les
problèmes d’assainissement tel que la proximité des fosses septiques avec le réseau d’eau
potable, l’absence de système d’évacuation adéquat des ordures et des eaux usées, la
pollution de la nappe superficielle etc. se répercutent sur la qualité des eaux de
consommation.
A.6 Sols de la région
Trois types de sols sont présents dans la région de Diourbel [ARD-Diourbel, 2000] :
- Les sols ferrugineux tropicaux peu ou pas lessivés (‘‘Diors’’) ils couvrent 80% des
terres. Ils sont composés à 95% de sable, 3% d’argile et 1,5% de limon. Perméables,
leur capacité de rétention en eau est généralement faible ainsi que leur capacité
d’échange. Ce type de sol est pauvre en phosphore (moins de 150 mg/kg de terre), en
azote (0,3 à 1,5%) et en est de même pour la concentration en matière organique
(0,2%). Le pH est souvent acide. Lorsqu’ils sont bien amendés, ses sols sont propices à
la culture de l’arachide, du mil, du niébé, de l’oseille, du manioc et de la pastèque.
- Les sols brun hydromorphes (‘‘Deck’’) d’une apparence argileuse qui représente 15%
des sols de la région. Ils sont favorables aux cultures céréalières et maraîchères.
- Les sols ferrugineux tropicaux rouge (‘‘Deck-diors’’). Ils ne couvrent que 5% des
terres. Ils sont propices à la culture du Sorgho, du maïs, des agrumes et de la tomate.
A.7 Cheptel
Le cheptel est estimé à 134 718 bovins, 294 750 bovins et caprins, 475 800 volailles et à 82
125 têtes d’équins et d’asins selon les recensements 2005 de l’inspection régional des
services vétérinaires. À cause du manque de pâturages -les terres agricoles étant rares et
très convoitées- le bétail transhume tout au long de l’année entre le Sud et le Sud-est. De
plus la majeure partie des troupeaux séjourne pendant une certaine période hors de la
région.
A.8 La communauté rurale de Touba Mosquée : un cas particulier
92
Parmi les 8 arrondissements que compte Diourbel, celui de Ndame abrite une communauté
rurale aux caractéristiques particulières de sorte qu’elle a été exclue de l’analyse. Il s’agit
de la communauté rurale de Touba Mosquée. Capitale du mouridisme, Touba Mosquée,
dans le département de Mbaké, a les caractéristiques d’une ville d’après le critère de
délimitation entre l’hydraulique rurale et urbaine (5000 habitants); elle est pourtant
considérée comme une communauté rurale. De même, le fait que les terres et l’eau y sont
gratuites contribue à cette attractivité. Dans ce contexte démographique et socio-religieux,
le traitement de la question de l'eau relève d'une approche spécifique [MAHS, 2005].
93
Annexe B : Description des ouvrages d’adduction d’eau
en milieu rural
B.1Le branchement domiciliaire
Les usagers bénéficiant de ce type de branchement sont raccordés à un réseau de conduites
de distribution alimenté par un château d’eau. Ils possèdent un (ou plusieurs) robinet(s) à
l’intérieur de leur concession. En milieu rural, ceci n’implique pas nécessairement un
traitement de l’eau distribuée.
B.2 La borne fontaine La borne fontaine est une infrastructure de
distribution d’eau publique. Elle est raccordée à un
réseau alimenté par un château d’eau ou directement
au forage muni d’une pompe électrique. La borne
fontaine est préférentiellement située au centre du
village. Les habitants viennent s’y fournir en eau dans
des bidons ou des bassines le plus souvent sans
couvercle. Le fontainier est chargé de gérer la vente.
En son absence le robinet est mis sous scellé.
B.3 Le forage avec pompe à motricité humaine
Au niveau du forage à motricité humaine, le sol est foré jusqu'à
la nappe et les parois sont protégées par un enduit de bentonite
comme pour le reste des forages. L’eau est acheminée à la
surface via une pompe manuelle, elle sort d’un tuyau en métal
et est recueillie comme dans le cas des bornes fontaines dans
des récipients.
Figure 11- Borne fontaine
Figure 12 - Borme avec
pompe à motricité humaine
94
B.4 Le puits moderne
Le puits moderne est un ouvrage hydraulique dont le diamètre conventionnel est compris
entre 1,80m et 2m. Il est souvent en béton armé. Sa différence par rapport au puits
traditionnel est sa grande pénétration sous le niveau statique de la nappe. Cette descente
sous le niveau statique nécessite le recours à des techniques perfectionnées7. La limite de
creusement des puits modernes à grand diamètre varie selon la profondeur du niveau des
eaux souterraines, mais est environ de 40 à 50 m au maximum, alors que pour les forages,
une profondeur plus grande est possible8. L’eau est acheminée à la surface par un sceau de
puits. Comme dans le cas des autres infrastructures publiques d’adduction d’eau, l’eau est
recueillie dans des récipients.
Ce seau est plongé dans le puits et ramené
à la surface par une corde. Le sol autour du
puits est protégé par une dalle de ciment
pour limiter une éventuelle pollution par
infiltration. L’accès aux animaux est aussi
évité en surélevant les abords immédiats
du puits moderne.
B.5 Le puits traditionnel Aussi appelé puits artésien, le puits traditionnel est un puits à trou creusé manuellement
protégé par des pierres ou du bois mais on en trouve aussi protégé par une structure en
ciment ou en argile.
7 DGPRE : Base de données hydrogéologie (consulté en juin 2007). 8 JGRC (Société Japonaise des Ressources Vertes - département outre-mer) (2001) : Guide technique du développement des ressources
en eau. Construction d'infrastructures hydrauliques adaptées aux conditions locales : puits, mares et mini-barrages, mars 2001.
Figure 13- Puits moderne
95
Annexe C : Questionnaire transmis aux présidents de
communauté rurale (PCR) pour estimer l’acceptabilité
des populations à payer l’eau
Les hypothèses émises pour l’évaluation du critère volonté de payer
- L’opinion des PCR ou des sous-préfets représente celle de la population qu’ils
administrent
- Les personnes interrogées ont une bonne connaissance des avantages liés à une
amélioration de la desserte, de l’intérêt que cela représente pour la population et de
la valeur qu’elle lui accorde
Note pour l’enquête
- Informer le PCR que l’enquête n’a été commandée par aucun organisme (ni SDE ni
SONES etc.) et qu’il est réalisé dans un cadre académique (maîtrise en génie civil)
pour recueillir des données sur la gestion des ressources en eau dans la communauté
rurale (CR).
- Exposer clairement le but de l’enquête : recueillir l’opinion de la population de la
CR en question. Le PCR représente ici cette population. Ses réponses doivent donc
refléter l’opinion de la majeure partie de la population de toute la communauté
rurale.
- Informer le PCR que d’autres CR de la région seront visitées pour l’enquête (2 à 3
par arrondissement) selon l’importance de la population. L’enquête couvre toute la
population de la CR qu’il administre et non pas seulement celle du village où est
basé le chef le de CR.
- S’assurer que le PCR comprend bien les questions et si nécessaire les traduire en
wolof et ne pas hésiter à revenir sur certaines questions.
- Insister sur l’importance de leur contribution à la présente enquête.
- Le scénario d’adduction d’eau améliorée (‘‘à la question si une eau de meilleure
qualité…’’) implique des infrastructures d’eau répondant mieux aux besoins des
96
habitants et à une distance raisonnable ainsi que de l’eau de meilleure qualité; ceci
aussi bien pour l’eau de consommation que pour l’eau d’irrigation.
- Point d’eau de distribution : borne fontaine (BF), branchement privé (BP), puits
protégé ou puits moderne (PM) et forage villageois avec pompe à motricité humaine
(FVPMH).
- Le tarif est un tarif moyen même s’il peut varier d’un village à un autre à l’intérieur
de la communauté rurale.
- Il est très important de préciser la quantité en litre ou en m³ pour le prix aux
questions 10 et 11 de même qu’aux questions 13, 15 et 17
- Demander à la fin de l’interview, en tant que question hors enquête, comment
s’explique la différence de tarif entre la borne fontaine et le BP afin de mieux
comprendre les préférences et l’attitude de la population.
- Aux questions 13, 15 et 17, si le répondant répond OUI, pour obtenir le prix
maximal, démarrer avec le prix payé actuellement à la borne fontaine et rajouter
10F CFAjusqu’à ce que le répondant juge que c’est le maximum qu’il est près à
payer.
97
Questionnaire
Identification
Département : _____________________
Arrondissement : _____________________
Communauté rurale (CR) : _____________________
Contacts du PCR (tel etc.) __________________
Rapport de visite
Date de la visite : _____________________
Nom du répondant : _____________________
Nombre d’année en poste : _____________________
Commentaires
_________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________
98
1 Voir importance
agriculture
irriguée dans
CR
Y-a-t-il des superficies
irriguées dans la CR ?
Non Un peu Beaucoup
2 Vérifier
l’uniformité des
cultures
Quelles sont les cultures
dominantes dans la CR ?
- les fruits (pastèque, mangue etc)
- les légumes (arachide, niébé etc.)
- les céréales (mil, sorgho etc.)
3 Vérifier Q14,
16 et 18
Quelles sont les limites au
développement de
l’agriculture ?
- les surfaces cultivables
- le prix de l’eau
- la qualité de l’eau
- la disponibilité de l’eau
- autres
4 Évaluer
cohérence Q13,
15 et 17
Le revenu mensuel des
habitants est en moyenne
compris entre
- 15 000 et 35 000 FCFA
- 35 000 et 50 000 FCFA
- Plus de 50 000 FCFA
5 Attitude face à
au fait de devoir
payer
Complète Q9
Quelle est l’origine de l’eau
utilisée pour l’irrigation ?
- Puits
- BF
- Céanes
- Autre :
6 Liée à Q11 Quelle est l’infrastructure
d’adduction d’eau pour usage
domestique (animaux et être
humain) la plus utilisée dans
toute la CR ? (plusieurs
réponses possibles)
- Puits moderne
- BP
- BF
- ForagePMH
99
7 Renseignement sur
pannes et si prix déjà problématique
Vérifie Q14
Quels sont les difficultés
rencontrées pour
l’approvisionnement en eau de
consommation?
- aucune difficulté
- les quantités insuffisantes
- la qualité insuffisante
- les pannes trop fréquentes (détails si possible)
- la distance trop grande
- le prix est trop élevé
- autres :
8 Hypothèse critère
distance moyenne Quelle est la distance moyenne au
lieu d’approvisionnement pour
l’eau de consommation?
- moins de 1 km
- entre 1 et 2 km
- plus d e 2 km
9 L’eau d’irrigation est-elle
payante ? (précisez le nombre de
litres ou m³ pour le prix payé) ?
Non OUI
-Puits :___________F/________(L ou m³)
-BF: ______________F/_________
-Céanes:___________F/_________
-Autre : ___________F/_________
10 Comparer au
maximum de Q13,
15 et 17
L’eau de consommation est-elle
payante (précisez nombre de litres
ou m³ pour le prix payé) ?
Non Oui
- à la BF __________F/_______(L ou m³)
- au BP ____________F/_________
- au FVPMH ________F/_________
- au puits ___________F/_________
- vendeurs ambulants _______F/________
11 Combien paye t- on en moyenne
pour un raccordement
domiciliaire?
_________________FCFA
12 Les habitants préfèrent-ils payer
une facture (du compteur) ou au
jour le jour ?
Recevoir une facture
(tous les 1,2 ou 3 mois)
Payer à chaque prélèvement
Supposons que l’approvisionnement collectif en eau soit amélioré (meilleure qualité, plus grande proximité, plus grande
quantité) ; est-ce que les habitants de votre arrondissement seraient prêts à payer davantage pour l’eau ? Quel serait le
prix maximal acceptable (précisez pour quelle quantité)?
13 Oui
Prix maximal:_______FCFA
Pour________(litre ou m³)
Peut être maximal:_______FCFA
Pour________(litre ou m³)
Non
14 Si non, pour quelle raison ? - la situation actuelle leur convient
- la situation ne leur convient pas mais la majorité de la population
qui paie déjà l’eau n’a pas les moyens de payer plus cher
- autre (à préciser)
Supposons que l’approvisionnement privé en eau soit amélioré (meilleure qualité, plus grande quantité, moins de
panne) ; est-ce que les habitants de votre arrondissement seraient prêts à payer davantage pour l’eau ? Quel serait le prix
maximal acceptable (précisez pour quelle quantité)?
15 Oui
Prix maximal: _______FCFA
Pour________(litre ou m³)
Peut être
Prix maximal:______FCFA
Pour________(litre ou m³)
Non
16 Si non, pour quelle raison ? - la situation actuelle leur convient
- la situation ne leur convient pas mais la majorité de la population
qui paie déjà l’eau n’a pas les moyens de payer plus cher
- autre (à préciser)
Supposons que l’approvisionnement en eau pour l’irrigation soit amélioré (meilleure qualité, plus grande quantité) ;
est-ce que les habitants de votre arrondissement seraient prêts à payer davantage pour l’eau ? Quel serait le prix maximal
acceptable (précisez pour quelle quantité)?
17 Oui
Prix maximal:______FCFA
Pour________(litre ou m³)
Peut être
Prix maximal:______FCFA
Pour________(litre ou m³)
Non
18 Si non, pour quelle raison ? - la situation actuelle leur convient
- la situation ne leur convient pas mais la majorité de la population
qui paie déjà l’eau n’a pas les moyens de payer plus cher
- autre (à préciser)
100
Annexe D : Critère accessibilité au point d’eau - Script
ArcView
Le script Arcview illustré ci-après a servi à estimer des distances à parcourir pour la
satisfaction des besoins en eau des populations des arrondissements de Diourbel (critère
d’Accessibilité au point d’eau).
Dans un premier temps, pour chaque village identifié (par son nom, sa communauté rurale,
son arrondissement et ses coordonnées géographiques), la différence entre le EPE
nécessaire et le EPE présent est calculée.
- Si la valeur est égale à 0, le village est consigné dans la liste des villages comblés en
EPE (Village_EPE_Comblé)
- Si la valeur est supérieure à 0, le village est consigné dans la liste des villages en
surplus d’EPE (Village_EPE_Surplus)
- Si la valeur est inférieure à 0, le village est consigné dans la liste des villages en
déficit d’EPE (Village_EPE_Déficit)
Ensuite, pour chaque village dans la liste des villages en déficit, la distance avec l’ensemble
des villages de la liste des villages en surplus d’EPE est calculée. En débutant par la
distance la plus petite, le surplus du village le plus proche est alloué au village déficitaire
préalablement choisi jusqu’à épuisement du surplus ou satisfaction du déficit. Si le surplus
est épuisé, le second village en surplus le plus proche du village déficitaire sert à combler
une partie ou tout le reste du déficit du village en question. Le premier village ayant servi à
réduire le déficit est transféré dans la liste des villages comblés (Village_EPE_Comblé). Si
le déficit est comblé sans épuisant du surplus, le village en surplus reste dans la liste pour
réduire éventuellement d’autres déficits.
La somme des distances nécessaires à combler le déficit du village déficitaire constitue
l’indicateur pour le critère d’accessibilité. Le script offre la possibilité de limiter
l’allocation à la communauté rurale, à l’arrondissement ou à l’ensemble de la région.
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