Protéger la terre

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Doctissimo.fr Avril 2012 Page 1 sur 73 Recueil de Maryam RAHOU Protéger la terre

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La terre héberge une grande partie de la vie. Et c’est d’elle que provient la majeure partie de nos aliments. C’est pourquoi il est essentiel de la préserver. Comment limiter les pesticides ? Faut-il manger bio ? Quelles catastrophes écologiques menacent notre planète ? Un bilan sans concession des risques qui pèsent sur la planète.

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Recueil de

Maryam RAHOU

Protéger

la terre

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HOME : Rendez-vous avec la planète

I. Les gestes pour protéger la terre

Les actions pour un sol non pollué

I.1. Lutter contre la pollution des sols

I.2. REACH, pour une réglementation des produits chimiques

I.3. Engrais vert

I.4. Les productions locales

Agir à son niveau pour protéger la terre

I.5. Repenser notre rapport aux autres à la terre : interview de Coline Serreau

I.6. Se débarrasser des nuisibles sans polluer

I.7. Jardinez malin !

I.8. Régions sèches : des jardins adaptés

I.9. Le bois, matériau idéal ?

I.10. La surpêche

II. Les pesticides

L'essentiel sur les pesticides

II.1. Qui sont les pesticides ?

II.2. Où se cachent les pesticides ?

II.3. Plantes OGM : attentes et résultats

II.4. Demain, des pesticides biologiques

Pesticides : des risques pour la santé et l'environnement

II.5. Chlordécone aux Antilles : Bilan d’un scandale sanitaire

II.6. Pesticides : un rapport parlementaire polémique

II.7. Vers une simplification de la réglementation sur les pesticides ?

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II.8. Pesticides et cancers chez les agriculteurs

II.9. Pesticides : quels effets sur la santé ?

II.10. Parkinson : les pesticides doublent le risque

II.11. Pesticides et cancer : il est temps d’agir !

II.12. Agrican : Moins de cancer chez les agriculteurs ?

Pesticides : la situation en France

II.13. Pesticides : l'exception française

II.14. Pesticides : les raisins de la colère

II.15. Pesticides : une harmonisation européenne sous surveillance

II.16. La sécurité sanitaire meilleure que jamais

II.17. La réduction des pesticides n'équivaut pas à une réduction des risques

II.18. Pesticides : le monde agricole vigilant

III. Les catastrophes écologiques

Les principales catastrophes écologiques

III.1. Qu'est-ce qu'une catastrophe écologique ?

III.2. L’huile de palme à l’origine d’un désastre écologique

III.3. Le syndrome du Titanic vu par Pascal Husting, directeur général de Greenpeace France

III.4. Les sites les plus pollués dans le monde et en France

III.5. Désertification : et si ce n'était pas inéluctable ?

III.6. Le contrôle des oléoducs sera renforcé

Les catastrophes écologiques qui menacent les eaux

III.7. Loi sur les gaz de schiste : les écolos dénoncent une reculade

III.8. Les marées noires

III.9. Quels polluants menacent l'eau ?

III.10. La mer d'Aral sauvée de la pollution ?

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La terre héberge une grande partie de la vie. Et c’est d’elle que provient la majeure partie de nos

aliments. C’est pourquoi il est essentiel de la préserver. Comment limiter les pesticides ? Faut-il

manger bio ? Quelles catastrophes écologiques menacent notre planète ? Un bilan sans concession des

risques qui pèsent sur la planète.

HOME : Rendez-vous avec la planète

Le 5 juin 2009, à l'occasion de la Journée Mondiale de l'Environnement, sera diffusé simultanément et

quasi-gratuitement dans une cinquantaine de pays le film HOME de Yann Arthus Bertrand. Son

message est simple : « Regardez comme la Terre est belle, regardez ce que nous somme en train de

détruire. Mais surtout, regardez toutes ces merveilles qui nous restent à préserver ».

L'environnement est devenu en quelques années un des sujets les plus médiatisés, les plus controversés et les

plus influents dans notre quotidien. Mais si tout le monde sait ce dont il s'agit, combien s'engage pour le

préserver ? Parmi les plus célèbres, Yann Arthus Bertrand offre une nouvelle dimension à ce combat avec

un film produit par Luc Besson et simultanément diffusé dans plus de 150 pays.

Home : préserver la maison Terre

A travers ce premier long métrage, Yann Arthus Bertrand apporte un discours optimiste sur la question de

l'environnement. Loin de l'affolement habituel des écologistes, souvent pessimistes sur l'avenir de la planète,

le film témoigne d'innombrables solutions qu'il est possible de mettre en place pour préserver notre "maison

Terre". Quatre milliards d'années, c'est l'âge de la Terre. 200 000 ans, c'est l'arrivée de l'Homme et les

conséquences de l'exploitation démesurée.

Ce film s'inscrit dans la droite lignée d'Al Gore et sa "Vérité qui dérange" sortie en 2006 qui témoignait déjà

de la situation environnementale de la planète. C'est d'ailleurs à la suite de la diffusion de ce documentaire

que Yann Arthus Bertrand s'est rendu compte de l'impact que peuvent avoir ces longs formats sur le public.

« J'ai vu à quel point les spectateurs étaient émus, parfois jusqu'aux larmes » témoigne le réalisateur « et je

me suis dit que le long métrage était un excellent moyen de toucher les gens ».

Pendant 217 jours, il a parcouru le monde en hélicoptère pour tourner l'intégralité du film dans les airs.

« Depuis le ciel, on voit bien les endroits où la Terre est blessée : ‘Home' explique donc simplement les

problèmes actuels, tout en disant qu'il existe une solution ».

Home : une diffusion exceptionnelle

Dès le début du projet, Yann Arthus Bertrand a souligné l'idée d'une multidiffusion simultanée et gratuite

afin de rendre accessible le message au plus grand nombre, et à tous ceux qui consomment (trop). « Et si

nous sommes capables de dire que 100, 200 ou 500 millions de personnes auront vu le film en 24 heures, ce

sera un message extrêmement fort à adresser aux gouvernements » espère Luc Besson producteur du film.

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En France, France 2 diffusera en première partie de soirée (20h35) la version courte (90 min) du

documentaire, suivie d'une programmation spéciale. A Paris, une diffusion en extérieur aura également lieu

le même soir à 22 heures sur le Champs de Mars.

Ecologique jusqu'au bout, le film est compensé Carbone, c'est-à-dire que toutes les émissions de gaz

carbonique engendrées par le film sont calculées et compensées par des sommes d'argent qui servent à

donner de l'énergie propre à ceux qui n'en ont pas. Grâce à ce long métrage, Yann Arthus Bertrand fait

partager son émerveillement, autant que son inquiétude. Un film à ne pas manquer !

Lionel Top, le 25 Mai 2009

I. Les gestes pour protéger la terre

Les menaces qui pèsent sur les sols sont nombreuses. Qu’il s’agisse de l’agriculture, des industries, des

produits chimiques… Les causes de la pollution sont nombreuses, et ses conséquences potentiellement

graves. Comment protéger la terre, au niveau global mais aussi local ? Nos conseils.

Les actions pour un sol non pollué

Limiter la pollution des sols est un enjeu majeur, pour préserver la faune et la flore. C’est aussi indispensable

pour protéger notre santé. Mais comment faire concrètement pour ne pas polluer les sols ? Comment limiter

l’épandage des produits chimiques à risque ? Quelques pistes.

I.1. Lutter contre la pollution des sols

« On boit l'eau, on respire l'air mais on ne mange pas le sol » : le pédologue autrichien Winfried Blum

explique ainsi le désintérêt de l'opinion pour la menace que représente la pollution des sols. Devant

l'accroissement de l'érosion, de la toxicité des sols et des nappes phréatiques, devant la salinisation des

terres agricoles devenues stériles, rien n'est fait. Ou si peu. La communauté internationale devrait très

vite prendre conscience du danger, car l'humanité est en train de détruire la base même de sa survie.

Les médias abreuvent l'opinion d'avertissements face au réchauffement climatique. L'air pollué, les menaces

qui pèsent sur les océans : les journalistes s'emploient à démontrer les dangers sur l'environnement du mode

de vie régnant dans les pays industrialisés. Occultant une donnée majeure pour l'avenir de la planète : la

pollution des sols.

Les dangers qui guettent les sols

La terre produit les aliments présents dans notre assiette. Elle stocke tout ce que nous produisons, le filtre et

le transforme. Elle protège l'eau, les matières premières, les substances vivantes et les gaz qui constituent la

base de l'activité humaine. Une activité menaçante aujourd'hui pour sa préservation. L'érosion augmente avec

la transformation des paysages.

Les sites industriels, anciens ou actuels, polluent la nature et occasionnent des fuites, contrôlées ou non, de

produits toxiques et de métaux dans le sol. L'agriculture intensive rend les sols stériles à long terme et diffuse

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nombre d'insecticides et d'engrais chimiques qui atteignent les nappes phréatiques. Aujourd'hui, ce sont 3,5

millions de sites qui risquent d'être contaminés en Europe.

Une pollution aux conséquences nombreuses. La diminution du nombre des matières organiques en est la

première et elle provoque une perte inégalée de biodiversité. Avec l'urbanisation, les sols deviennent

imperméables et laissent les pluies torrentielles se répandre, provoquant inondations et coulées de boue

partout dans le monde.

Un phénomène accru par l'érosion, entraînant des pertes de terrains de l'ordre de 25 milliards de tonnes

chaque année dans le monde. Une menace tout aussi importante : la salinisation des sols, après la

surexploitation des ressources hydrauliques. La terre est asséchée et devient complètement stérile, voire

déserte, sans que rien ne soit fait pour enrayer le phénomène.

Autre exemple : l'épandage de boues issues des stations d'épuration. Elle permet de recycler les déchets

urbains tout en fertilisant les sols. Sauf que ces boues contiennent nombre de produits toxiques et de métaux,

même si leur nombre est réglementé. Parsemant ainsi dans l'environnement nombre de dangers pour les sols.

Comment nettoyer une terre polluée ?

Face à cela, l'Etat français développe une politique modeste. Et considère uniquement la pollution comme un

danger, et non la contamination. S'attaquant donc en priorité, en 2005, aux plus de 3 000 sites pollués en

France présentant un risque pour la santé humaine. Situés au Nord Pas-de-Calais, en Lorraine et en Alsace,

en Ile de France et dans la vallée du Rhône, il s'agit donc surtout de sites industriels abandonnés ou actifs.

Toute dépollution commence par un diagnostic complet lors duquel le sol est étudié ainsi que les ressources

hydrauliques. On établit un historique des activités industrielles sur le site qui permet ensuite de déterminer

plusieurs objectifs précis.

De nombreuses techniques existent pour traiter le site. Les traitements biologiques utilisent certains micro-

organismes qui se nourrissent des polluants pour les transformer en eau ou en dioxyde de carbone. On y

associe parfois le bio-venting, c'est-à-dire l'aspiration des gaz du sol, qui stimule également les micro-

organismes. Les scientifiques se servent également des plantes connues pour leurs capacités à fixer les

métaux lourds dans leurs racines.

Les traitements chimiques existent. Souvent, des nappes phréatiques entières sont pompées, traitées et

rejetées. Mais cette technique coûte cher et dure beaucoup trop longtemps. On se contentera donc souvent de

nettoyer la surface de l'eau contenue dans les nappes, qui rassemble la majorité des polluants, ou d'y faire

circuler des nettoyants. Seule l'Amérique du Nord a créé une véritable industrie de restauration des sols par

l'utilisation d'autres substances chimiques dangereuses mais très efficaces.

15% de terres dégradées sur la planète

L'Union européenne propose en 2006 une stratégie commune de protection des sols : elle réalise que seuls

neuf Etats membres ont une législation spécifique en matière de lutte contre la pollution des terres.

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La directive a reçu un accueil mitigé, sachant que les Etats veulent garder leur souveraineté sur la question de

l'aménagement du territoire. Mais 15% de la superficie émergée de la Terre, plus que les Etats-Unis et le

Canada réunis, sont déjà dégradés sans que rien n'ait été fait par la communauté internationale. Combien

faudra-t-il donc d'hectares de terres polluées pour qu'elle se rende compte de l'ampleur des dégâts ?

I.2. REACH, pour une réglementation des produits chimiques

La réglementation REACH marque une avancée importante en matière de législation des produits

chimiques au niveau européen : c’est désormais aux industriels de faire la preuve de l’innocuité des

substances qu’ils mettent sur le marché. Le texte comporte pourtant de nombreuses limites… mais

constitue le début d’une véritable prise de conscience.

L'industrie chimique, cela représente plus de cent mille substances disséminées dans la nature et présentes

partout autour de nous, de l'agriculture (pesticides) à la cosmétique ou aux produits de nettoyage par

exemple. Or celles-ci pourraient être impliquées dans l'augmentation récente de pathologies telles que

l'asthme, les allergies, les troubles endocriniens ou encore les cancers (+ 63% en 20 ans). De plus, ces

composés s'accumulent dans l'environnement, si bien que même à des doses infimes, ils pourraient exercer à

long terme des effets néfastes encore inconnus... y compris des dérèglements génétiques !

Pour tenter d'y remédier, l'Union européenne a récemment mis en place une réglementation visant à mieux

contrôler la production et la dissémination de ces substances, tout en étudiant de façon méthodique leurs

propriétés. Celle-ci porte le nom de REACH, un acronyme anglais pour Registration, evaluation and

authorization of Chemicals (enregistrement, évaluation et autorisation des produits chimiques). Celle-ci a

été adoptée par le conseil de l'union le 18 décembre 2006, et est entrée en vigueur depuis le 1er juin 2007.

Une application progressive

Le principe sur lequel repose REACH constitue une véritable petite révolution législative : c'est désormais

aux industriels de faire la preuve de l'innocuité des composés qu'ils lancent sur le marché. En pratique, cela

passe d'abord par leur enregistrement auprès de l'agence mise en place à Helsinki (Finlande) pour l'occasion.

Cette disposition s'appliquera progressivement à près de 30 000 substances produites ou importées en

Europe, dans des délais variables selon les quantités concernées :

D'ici décembre 2010 pour les substances dépassant 1000 tonnes produites par an ;

D'ici juin 2013 pour celles produites entre 100 et 1000 tonnes ;

D'ici juin 2018 pour celles produites entre 1 et 100 tonnes.

En dessous d'une tonne par an, le règlement ne s'applique pas. Les experts de l'UE évalueront ensuite la

validité des informations fournies par les industriels, puis pourront, si nécessaire, restreindre voire interdire

la commercialisation des substances incriminées. Ainsi, pour la première fois au monde, le principe de

précaution au cœur du développement durable trouve une application législative à portée générale.

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Des dispositions incomplètes

REACH comporte toutefois de nombreuses exemptions. Ainsi, certaines substances produites ou importées

dans des quantités inférieures à 10 tonnes par an n'y seront pas soumises. Or cela concerne 60% des produits

chimiques en circulation en Europe. De même, les substances radioactives, ou encore les déchets, n'entre pas

dans le champ d'application du règlement.

Celui-ci est d'ailleurs d'une complexité byzantine, et laisse subsister une large marge d'interprétation. En

effet, il s'étale sur près de 1000 pages, et ses annexes, censées permettre d'en saisir toutes les subtilités,

occupent quant à elles près de... 10 000 pages ! Il en ressort notamment que la substitution des substances les

plus dangereuses ne sera obligatoire que si celle-ci ne menace pas l'activité économique ou que la

dangerosité des produits n'est pas maîtrisée.

C'est que les industries chimiques pèsent lourd en Europe : 613 milliards d'euros de chiffre d'affaires (31%

du marché mondial), pour 1,7 millions de salariés. Tel quel, REACH va déjà demander un effort financier

significatif aux entreprises du secteur : de 40 000 à 70 000 euros pour chaque produit.

Le texte est donc le résultat d'un compromis entre des intérêts contradictoires. Néanmoins, il marque déjà un

progrès, puisque 1500 à 2500 substances pourraient se voir interdire. Surtout, il traduit le passage des grands

principes généreux à leur application concrète. Et montre que la prise en compte du développement durable

ne se réalisera que par petits pas, au fil d'une prise de conscience progressive...

Bernard Rastoin

I.3. Engrais vert

Un engrais vert est une culture temporaire de plantes à croissance rapide qui va ensuite être enfouie

pour améliorer la qualité du sol, principalement en amenant les éléments nutritifs à la culture

suivante. Egalement appelé CIPAN pour "Culture intermédiaire Piège à Nitrates", les engrais verts

permettent d'améliorer les caractéristiques du sol, de limiter l'érosion et le lessivage des nitrates.

Qu'est-ce qu'un engrais vert ?

Les engrais verts sont une technique bien connue des jardiniers et des agriculteurs bio pour améliorer

naturellement les qualités nutritives d'un sol. Entre deux mises en culture, elle consiste à faire pousser des

plantes à croissance rapide puis à les faucher et les enfouir dans le sol. Cette technique permet de limiter

l'érosion, les mauvaises herbes et le lessivage des sols, et fournit un humus riche en nutriments qui revitalise

les sols pour les cultures suivantes. Certains engrais verts permettent aussi de lutter contre des maladies ou

des parasites.

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Tout le monde peut-il faire son engrais vert ?

L'engrais vert s'adapte particulièrement aux potagers ou aux espaces fleuris. A la fin d'une culture, par

exemple au début de l'automne quand on a récolté ses dernières tomates, salades ou radis, il suffit de semer

sont engrais vert et d'attendre une nouvelle mise en culture, par exemple les beaux jours venus, pour faucher

les herbes qui ont poussé et les mélanger à la terre. C'est tout !

Entre deux cultures, en hiver, le sol est ainsi protégé. Au lieu de disparaître, les nutriments présents dans le

sol sont absorbés par l'engrais vert, et lui seront restitués au moment de l'enfouissage. Le réseau racinaire des

plantes évite également que le sol ne se compacte ou soit lessivé, surtout si le terrain est pentu. De plus, un

sol aéré favorise la vie microbienne et facilite la rétention d'eau. Si pendant l'hiver, l'engrais vert gèle, cela

n'a pas d'importance, il suffira une fois les beaux jours revenus, de biner le sol.

Quels types de plantes utilise-t-on ?

Une grande variété de plantes peut être utilisée pour faire des engrais verts. Même si elles présentent toutes

des caractéristiques communes, elles ont chacune des spécificités :

Les légumineuses fournissent au sol un apport particulièrement concentré en azote. En effet, elles présentent

la particularité de capter l'azote de l'air et le fixer dans leurs racines, et fournissent donc au sol un apport

supplémentaire en azote. On pourra utiliser de la luzerne très résistante à la sécheresse mais affectée par

l'humidité excessive ; du trèfle blanc, violet ou incarnat, qui s'adapte à tous types de sols mais peut se faire

envahir par des mauvaises herbes et repousser après enfouissage ; de la féverole, du lupin, du pois fourrager,

ou encore de la vesce ;

Les brassicacés permettent d'enrichir le sol en matières organiques, sans fournir un apport en azote aussi fort

que les légumineuses ; de plus, leurs racines denses et profondes favorisent le maintien de la structure du sol.

On pourra utiliser du colza (mais attention, il est difficile à enfouir car il produit une végétation haute), de la

moutarde (facile à faucher du fait de sa végétation basse et à enfouir mais arrivant très vite à maturité), de la

navette fourragère (facile à faucher mais assez difficile à enfouir du fait de ses racines puissantes), ou de la

phacélie, qui a une action insecticide et étouffe les mauvaise herbes ;

Les graminées et les céréales sont particulièrement utilisées pour favoriser la recomposition des sols. Leurs

racines permettent d'aérer un sol compact et favorisent la rétention d'eau. Ainsi on pourra utiliser de l'avoine,

du blé, du seigle, ou du ray-grass.

Quels sont les avantages des engrais verts ?

En laissant travailler la nature, les sols sont protégés en hiver et revitalisés pour les beaux jours. Les engrais

verts ont un coût très faible, sont faciles à semer et nécessitent un suivi minimal. Pour le jardinage et le

maraîchage c'est une technique bio, qui ne pollue pas mais enrichi les sols en profondeur !

M.M., le 4 mai 2009

I.4. Les productions locales

Issues des terroirs et de savoir-faire locaux, les productions locales favorisent le respect de

l'environnement et le développement économique d'un territoire. Découvrez toutes les raisons de se

laisser séduire.

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Moins de transports, donc moins d'émissions de gaz à effet de serre

Lorsqu'on importe de zones lointaines les produits que l'on consomme quotidiennement, on induit une forte

consommation d'énergie liée au transport. C'est la réalité qu'a pointé du doigt pour la première fois en 1993

une jeune scientifique Allemande, Stefanie Böge. Dans une étude publié par l'Institut pour le climat, l'énergie

et l'environnement de Wuppertal, elle a déterminé la quantité de kilomètres parcourus pas les différents

ingrédients qui composent le yaourt aux fraises qu'elle achète dans le supermarché près de chez elle.

Le résultat : 9 115 km parcourus ! Rapporté à la consommation de pétrole, elle montre que chaque kilo de

yaourt produit "à distance" consomme 6 litres de pétrole… On pourrait bien sûr multiplier les exemples.

Consommer des produits locaux, quand ils existent et sont disponibles, permet donc de réduire son empreinte

écologique !

Les paniers terroirs, un moyen original de consommer local

Que ça soit au travers des associations pour le maintien de l'agriculture paysanne (les AMAP), des jardins de

cocagne, des systèmes de paniers de légumes comme Le campagnier, de cueillette ou de vente directe chez

les producteurs, ou au travers de gammes de produits locaux ou régionaux disponibles dans les grandes et

moyennes surfaces, les possibilités d'accéder à des productions locales se multiplient et sont en plein essor.

Ainsi, le phénomène des AMAP est un cas intéressant. Les AMAP permettent d'acheter, sous forme d'un

abonnement, des paniers de légumes directement auprès de producteurs situés à proximité. Une AMAP est

une association composée par un groupe de consommateurs et un ou plusieurs producteurs.

Moyennant un engagement de la part des consommateurs de s'approvisionner pendant au moins une saison,

le producteur s'engage à livrer chaque semaine une quantité de légumes cultivés avec soin qui couvre les

besoins d'un couple ou d'une famille. Né au Japon dans les années 1960, le système des AMAP s'est

largement répandu en Suisse, en Amérique et en Europe du Nord. En France, le nombre d'AMAP ne cesse de

grossir et on compte aujourd'hui plus de 800 AMAP sur tout le territoire.

De même, des systèmes de distribution de panier comme celui proposé par l'entreprise Le Campagnier, ou le

réseau des jardins de cocagne, qui combinent l'insertion par le travail des "jardiniers" avec la production et la

distribution de fruits et légumes bios, ou les gammes de produits régionaux commercialisées en grandes et

moyennes surfaces, contribuent au rapprochement entre les producteurs et les consommateurs et à la

dynamisation des productions locales, en leur fournissant des débouchés concrets.

Les productions locales, issues des terroirs et des savoirs faire locaux, sont donc accessibles à travers des

circuits de distribution ou des gammes de produits nouveaux. En plus de contribuer à préserver

l'environnement en réduisant les consommations d'énergies générées par le transport sur de longues

distances, elles contribuent à redonner de la vie aux localités en stimulant l'activité économique locale.

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Les productions locales correspondent à des initiatives multiples qui permettent de donner du sens à l'acte de

consommation car derrière des produits, on retrouve des visages et des lieux qui font partie de notre

environnement direct.

M.M., le 5 mai 2009

Agir à son niveau pour protéger la terre

Protéger la terre, cela commence chez soi ! Car il n’y a pas que les grands exploitants agricoles qui menacent

les sols. Les jardiniers amateurs emploient souvent sans discernement pesticides et autres herbicides. Nos

conseils pour respecter l’environnement au quotidien.

I.5. Repenser notre rapport aux autres à la terre : interview de Coline Serreau

Il y a plein de manières d’agir pour la planète. Avec son dernier film, Coline Serreau porte haut les

couleurs d’un nouveau mode de pensée. Au centre du débat, la protection de la terre, un organisme

vivant, la fin d’une forme d’exploitation de type industriel, au profit de solutions locales. La révolution

est en marche !

L'écologie, on ne parle plus que de ça. Et pour cause. Les dangers qui menacent notre planète sont

nombreux. Toutefois, plus qu'un film catastrophe, c'est davantage à une vision où domine l'espoir auquel

nous convie Coline Serreau dans son dernier film : Solutions locales pour un désordre global : « J'ai préféré

montrer qu'il existe des solutions, et donner la parole aux acteurs du changement à travers le monde,

France, Maroc, Inde, Brésil Ukraine »… Autour des réflexions de paysans, de philosophes et d'économistes,

la cinéaste engagée et visionnaire nous propose de repenser notre rapport à l'écologie, à la terre et aux autres.

Doctissimo : Au coeur de l'écologie, la terre. Son plus grand prédateur serait l'homme et l'agro-industrie.

Le film s'ouvre sur les méfaits de la Révolution Verte, et le désordre global qui en découle. Quels sont-ils ?

Coline Serreau : Le constat est là, à la fois fracassant et inexorable. La fameuse Révolution verte désignant

le bond technologique réalisé dans l'agriculture dégrade les sols et tue la biodiversité. Un constat qui a déjà

donné lieu en 1992 à une convention sur la diversité biologique. Repenser l'écologie passe forcément par un

changement de rapport à la terre, un organisme infiniment vivant, un écosystème riche, que nous sommes en

train de détruire.

Plutôt que d'entretenir un rapport uniquement basé sur la productivité et la rentabilité, peut-être pourrions-

nous revenir au vivant et en prendre soin. Un système qui ne vaut pas uniquement pour l'agriculture mais qui

s'applique au travail, également… avec les souffrances que l'on connaît.

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Doctissimo : Pour une meilleure cohérence écologique, il faudrait repenser l'agriculture ?

Coline Serreau : Une vision plus cohérente serait de type agrobiologique, basée sur un retour à la

production locale à taille humaine, une agriculture localisée avec une reprise en main des semences (chasse

gardée aujourd'hui d'une poignée de multinationales), où chaque terroir privilégie des productions en accord

avec son terrain et son climat. Le maître-mot, c'est l'autonomie… Comme le précise l'économiste brésilien

Joao Pedro Stedile, « les fertilisants et les pesticides ne doivent pas être issus de la chimie, mais des

ressources que la nature nous donne ». Il ne s'agit pas tant d'être en lutte contre la technologie et la

modernité, mais bien de réinventer la démocratie, comme l'appelle la physicienne indienne et chef de file des

écologistes de terrain Vandana Shiva : « Celle qui permet de faire le lien entre la terre et l'assiette pour

revendiquer notre droit à nous nourrir par nous-mêmes et à la santé ».

Doctissimo : Concrètement, quelles sont les solutions ? Allons-nous tous redevenir paysans ?

Coline Serreau : Les solutions existent, c'est indéniable. Elles procèdent selon moi "d'un retour en avant".

Plus qu'un retour à la paysannerie pour tous (sans doute utopique), elles consistent essentiellement à renouer

un lien entre la ville et la terre, ceux qui produisent et ceux qui consomment…Il s'agit de retrouver à travers

de petites structures locales une autonomie alimentaire sans produits chimiques. Comme le propose Pierre

Rhabbi, l'un des pionniers de l'agriculture biologique, « ceux qui sont en ville peuvent se solidariser avec

ceux à la campagne et ainsi faire un pont par-dessus la sphère affairiste, pour davantage d'autonomie ».

Doctissimo : Le fameux slogan "Think global, act local" représente-t-il une des solutions ?

Coline Serreau : Plus qu'un vœux pieux, ce slogan donne déjà lieu à des initiatives dans ce sens. Les paniers

en sont une. Ce sont des regroupements de maraîchers biologiques, qui proposent la livraison hebdomadaire

de paniers de fruits et légumes biologiques. A Toulouse, on est en train de mettre en place une ceinture

maraîchère. A Strasbourg, un groupement d'agriculteurs font une réserve de semences locales, anciennes.

Doctissimo : Etes-vous optimiste ?

Coline Serreau : Bien sûr. Au-delà du débat sur l'agriculture, c'est tout un mode de pensée qui change. La

volonté de changement est encourageante. Aussi sûrement qu'une femme prend soin d'un gosse qui est

malade, nous ferons de même pour notre planète bien mal en point. Nous avons suffisamment d'inventivité,

de volonté et d'amour de la vie pour le faire. « La conscience est en train de naître graduellement dans la

société, et c'est là qu'est la réponse », soutient l'analyste indien des politiques alimentaires Devinder Sharma.

Le mythe de l'agriculture industrielle et sa promesse d'accroissement spectaculaire tend à se fissurer.

Catherine Maillard, le 31 mars 2010

Pour aller plus loin

Solutions locales pour un désordre global

Un film de Coline Serreau, sortie le 7 Avril

Site internet : www.solutionslocales-lefilm.com

I.6. Se débarrasser des nuisibles sans polluer

Souris, mouches ou cafards ont lancé un plan d’invasion contre votre habitation ? Des mites prennent

votre penderie d’assaut ? Inutile de céder au tout chimique : il existe des solutions pour vous

débarrasser des nuisibles sans polluer. Soit en vous procurant les nombreux produits qui se

développent dans ce domaine, soit grâce à quelques astuces « maison »…

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Au rayon des locataires indésirables, les cafards occupent sans conteste une place de choix. Déclenchant une

répulsion irrationnelle, ils sont fréquemment associés à la saleté et une fois qu'ils sont installés, prolifèrent à

une vitesse impressionnante. Pour leur défense, précisons qu'ils ne sont pas vecteurs de maladie, et que ce

n'est pas tant la saleté qui les attire, que les aliments faciles d'accès. La première mesure à prendre consiste

donc à leur couper les vivres : emballages hermétiques pour les aliments, balayage régulier... Il ne doit plus

rester une miette !

Autre solution naturelle pour en venir à bout, les pièges à base de glu ou « sticky box » qui les attireront

grâce à un appât alimentaire et ne contiennent aucun produit toxique. A disposer de préférence devant les

points d'accès par lesquels ils pénètrent dans votre logement, et que vous aurez pris soin de repérer au

préalable.

Ces solutions ne fonctionnent pas, et l'insecte continue de se multiplier ? Il est temps d'employer les grands

moyens : la « pâte à ravets », mélange d'acide borique, que l'on peut se procurer en pharmacie, et de lait

concentré sucré. Déposez-en quelques pincées dans des bouchons de bouteille aux points stratégiques

(cuisine, entrée des conduits...). Attention toutefois, ce produit est toxique et ne doit pas être laissé à la portée

des enfants.

Et je remets le son...

Parfois, malheureusement, on a beau faire, les indésirables reviennent inlassablement à la charge. Il existe

pourtant un moyen pour venir à bout (en théorie) d'une bonne part d'entre eux : les appareils à ultrasons, qui

les repoussent mais ne les éliminent pas. Rats, souris, mais aussi cafards, moustiques et mouches sont censés

fuir devant ces émetteurs à haute fréquence (30 à 65 Hz) inaudibles pour les êtres humains et leurs

compagnons domestiques.

Idéal à priori, mais les témoignages d'utilisateurs laissent entrevoir une efficacité variable, quoique avérée

dans certains cas (moustiques notamment). Contre ces derniers, on peut d'ailleurs se procurer des modèles

alimentés à l'énergie solaire, bien adaptés notamment lorsqu'on part en randonnée.

Contre les rongeurs, on peut aussi utiliser les pièges classiques (tapettes ou nasses) dont l'efficacité n'est plus

à démontrer. Ou faire l'acquisition d'un chat, qui les incitera à se tenir prudemment à l'écart... dans la plupart

des cas. Certains propriétaires de matous déplorent malgré tout une inactivité forcenée de leur félin préféré

dans ce domaine.

Choisir le « fait maison » ?

L'écologie ne serait pas ce qu'elle est si ses thuriféraires n'avaient pas tous leurs « solutions maison » à vous

proposer pour chaque aspect de la vie quotidienne. Cela vaut bien sûr aussi pour les nuisibles. En

commençant par un éloge de l'araignée, qui n'a pas son pareil pour vous débarrasser des mouches,

moustiques et autres insectes volants. A méditer la prochaine fois qu'il vous viendra à l'idée d'écraser l'un de

ces arachnides...

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Contre les fourmis, les astuces fusent : infusion de feuilles de noyer ou de laurier, marc de café, vinaigre

blanc à passer sur leur parcours pour effacer les phéromones qui leur servent de repère... Le basilic serait

aussi très efficace, à condition d'en apprécier l'odeur. Quant aux mites, une orange piquée de clous de girofle

devrait éviter qu'elles ne viennent se régaler de vos lainages.

Dernière précision : il n'existe pas de « remède miracle » contre les indésirable, notamment parce que ceux-

ci, selon les espèces, ont pu développer des résistances plus ou moins fortes aux différents antidotes. Dans

certains cas, les solutions proposées fonctionneront, dans d'autres il faudra se replier sur une alternative, ou la

combinaison de plusieurs d'entre elles.

En gardant à l'esprit que tous ces « nuisibles » sont des êtres vivants, et que bien souvent, on peut seulement

les repousser dans les limites du raisonnable... à moins de choisir de s'installer dans un milieu abiotique,

c'est-à-dire interdisant à la vie de prospérer.

Bernard Rastoin

I.7. Jardinez malin !

Cultiver la vie tout en la préservant. Le jardin se doit de rester un lieu où l'écologie a toute sa place.

Où les principes biologiques l'emportent sur les insecticides et pesticides. En respectant ce lieu de vie,

le jardinier écolo allie sauvegarde de l'environnement à l'économie de dépenses inutiles. Par quelques

astuces, il peut créer un petit écosystème chez lui pour son propre avantage, et celui de l'équilibre

naturel.

Créer son propre jardin n'est pas une mince affaire. Il demande du temps, des soins nombreux et une

implication totale. La majorité choisit donc de se fier aux désherbants et aux engrais, et préfèrent les

pesticides plutôt que la prévention. Laissant ainsi un lieu de vie sans vie, un jardin propre mais pollué et

fragile. Choisir la voie de l'écologie n'est que profitable et permet de soulager le porte-monnaie, même s'il

demande en échange quelques efforts supplémentaires.

Nourrir la terre

Les jardiniers le savent : le jardin en bonne santé est celui qui a le moins besoin d'être traité chimiquement.

Pour cela, il faut d'abord bien connaître son sol. Selon une texture argileuse, sableuse ou limoneuse, les

besoins sont différents. Avant toute culture, il faut donc impérativement se renseigner auprès de sa commune

ou tout simplement d'un voisin jardinier.

Les engrais de synthèse sont dangereux pour l'environnement et polluent l'eau. En fabriquant son propre

compost, on permet une fertilisation naturelle et tout aussi efficace de la terre. Les résidus végétaux de la

cuisine et du jardin doivent être hachés et macérer plusieurs mois dans un bac à compost, si possible

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ensoleillé. Autre technique : faire macérer un kilo d'orties hachées dans dix litres d'eau que l'on expose au

soleil et remue régulièrement pendant une semaine. Après avoir dilué le mélange dans dix fois son volume

d'eau, on peut le pulvériser sur la terre, pour accélérer la croissance des plantes et les aider à se défendre.

Protéger la terre

En préparant soigneusement le sol, on le protège contre les mauvaises herbes, on l'ameuble et on le nourrit,

en mélangeant les apports en compost. Il faut sans cesse s'assurer qu'il n'est ni trop sec, ni trop humide. Pour

le bêchage, on préférera une grelinette, plus respectueuse des plantes. Biner régulièrement la terre permet

également de la protéger des mauvaises herbes et lui assure une humidité constante (« un binage vaut deux

arrosages »).

Dans un potager, la rotation des cultures permet d'éviter l'appauvrissement du sol, limite l'apparition de

maladies et améliore les rendements. Il faut donc créer des parcelles dans son jardin pour ainsi ne pas

cultiver une même famille de légumes deux années de suite sur un même sol. Cela permet d'alterner des

cultures exigeantes, comme la tomate ou le chou, avec des cultures moins gourmandes, comme la salade ou

l'aubergine.

Les plantes sont toutes différentes, certaines se défendent mieux que d'autres. Une richesse de biodiversité

que le jardinier peut utiliser, notamment en associant certains végétaux à d'autres. Il est également important

de savoir quelles plantes sont les mieux adaptées à la région, elles seront ainsi plus résistantes et

nécessiteront moins de traitements. Elles attireront plus les animaux.

Créer la biodiversité

Une terre saine et fertile attirera les prédateurs afin de maintenir l'équilibre du jardin. On peut donc créer des

refuges pour oiseaux, laisser venir hérissons, musaraignes et reptiles. Pour les attirer, il suffit de creuser une

mare, installer un nichoir et laisser un tas de branches dans un coin.

Les insectes auxiliaires sont essentiels pour prévenir l'invasion des nuisibles. Planter des fleurs riches en

pollen et en nectar attire les coccinelles, les abeilles et les punaises, qui se régalent des pucerons, chenilles et

acariens. Il est également possible d'acheter des larves de coccinelles que l'on plante dans le jardin.

Laisser pousser l'herbe favorise la biodiversité. Elle peut atteindre les cinq centimètres, ce qui, en même

temps, lui permet de mieux retenir l'eau arrosée. Par ailleurs, il faut accepter que les plantes soient un peu

attaquées pour préserver les insectes auxiliaires et ne jamais utiliser de pesticide ou d'insecticide.

Arroser la terre

L'eau s'évapore très vite. Il est donc inutile d'arroser en pleine journée, surtout en plein soleil. En été, il faut

donc arroser le soir, et le reste de l'année, préférer le matin pour éviter le gel. Il faut également arroser en

fonction des besoins des plantes et selon leur taille, ce qui nécessite une parfaite connaissance des végétaux

que l'on cultive.

Le binage est essentiel : il aère la terre, draine l'eau jusqu'aux racines et agit comme un désherbant naturel.

Après une grosse pluie, biner permet également de laisser la terre respirer tout en évitant une inondation à la

prochaine pluie. Aussi, récupérer l'eau de pluie permet d'économiser l'eau tout en respectant la terre, car l'eau

de pluie n'est pas chlorée. On peut installer une cuve de récupération des eaux de pluie si les besoins sont

importants, pour un grand jardin par exemple. Si le jardin est plus petit, une citerne sous l'arrivée de gouttière

suffit.

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Si l'on a les moyens, le système d'arrosage goutte à goutte est plus économe et plus efficace. Sinon, on peut

toujours remplir une bouteille d'eau que l'on perce avec une aiguille pour la placer près des plantes.

Soigner la terre

Malgré tout ce que l'on peut faire, le jardin est toujours victime des attaques d'insectes ravageurs ou de

maladies végétales. Pour les premiers, comme les pucerons, il existe plusieurs insecticides biodégradables et

non polluants. La roténone et le pyrèthre sont très efficaces. L'huile de paraffine recouvre le corps des

insectes et les empêchent de respirer. Contre les limaces, on peut enterrer plusieurs pots à moitié remplis de

bière brune. Les limaces et les escargots s'y introduisent et s'y noient.

Une rangée de ces pots le long du potager est une protection définitive et efficace. Enfin, il suffit parfois

d'asperger de l'eau sur les plantes pour noyer les pucerons. On peut aussi créer ses propres insecticides.

Mettre du marc de café, de la cendre ou de la sciure près des plantes permet de les protéger des limaces et

des escargots.

La plaie du jardin, ce sont les mauvaises herbes. Malgré la prévention, le compost et le binage, elles peuvent

toujours apparaître. Les arracher dès qu'elles poussent permet d'éviter leur propagation. Si elles sont

nombreuses, de l'eau bouillante directement répandue est une première solution. L'eau de cuisson des

pommes de terre en est une autre. Car en cas d'invasion, il reste plusieurs herbicides « tolérés » car peu

dangereux, comme le chlorate de soude. Le sulfate de fer est utile contre la mousse.

Si les guêpes vous ennuient, il existe un moyen simple d'en réduire le nombre. Couper une bouteille en

plastique près du goulot, poser ce dernier sur la partie restante, remplie d'un liquide sucré. Les guêpes,

attirées par ce breuvage, s'introduiront dans la bouteille et ne pourront plus en sortir.

En suivant ces conseils, les besoins en traitements chimiques devraient se réduire rapidement. En règle

générale, il vaut mieux éviter de les utiliser et se méfier des slogans comme « 100% biodégradable » ou «

respecte l'environnement ». Tous sont chimiques, polluent l'eau et nuisent à la biodiversité. Or, avec un

jardin écologique, il est tout à fait possible de lier rendement agricole à préservation de l'environnement.

I.8. Régions sèches : des jardins adaptés

Un jardin mieux adapté à son environnement, plus économe en eau, c'est l'approche défendue par

Olivier Filippi dans son ouvrage "Pour un jardin sans arrosage". Destiné avant tout aux passionnés

des régions méditerranéennes, celui-ci recèle aussi de nombreux conseils qui peuvent se transposer

dans d'autres milieux et traduisent une approche très écologique de la question...

Après des années de croissance ininterrompue, le secteur de la jardinerie connaît ces derniers temps un début

de fléchissement. L'une des explications résiderait dans l'instabilité climatique qui rebute les jardiniers

amateurs. Or, s'adapter aux sautes d'humeur de la météo risque de devenir une obligation incontournable

dans les années à venir pour tous ceux qui souhaitent continuer de cultiver leur petit coin de verdure.

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S'ajoutant à l'épuisement des nappes phréatiques, le phénomène conduit à se pencher d'un peu plus près sur

l'adaptation des variétés de plantes à leur écosystème. Un impératif d'autant plus contraignant dans les

régions méditerranéennes, où la pénurie d'eau guette chaque été. Mais aussi une façon de faire de l'écologie

pratique, tout en contribuant à vivifier la végétation environnante.

C'est pourquoi quelques pionniers ont lancé depuis quelques années la vogue du jardin sec, également appelé

jardin méditerranéen. Un jardin qui possède toutes les vertus : facile à entretenir, peu coûteux en eau, et qui

s'adapte à merveille aux paysages méridionaux...

Le jardin sec, modèle d'adaptation

L'air de rien, c'est une véritable petite révolution dans l'art de cultiver des jardins. Parmi ses précurseurs, le

pépiniériste Olivier Filippi, installé à Mèze dans l'Hérault. Son ouvrage référence, "Pour un jardin sans

arrosage" (éditions Actes Sud) a déjà connu plusieurs rééditions depuis sa sortie en avril 2007. Il a en outre

été récompensé du prix Pierre-Joseph Redouté, décerné au meilleur ouvrage de jardin et de botanique paru

dans l'année en langue française.

Au fil des pages, le livre d'Olivier Filippi apparaît comme une somme précieuse sur la question. Avec une

philosophie sous-jacente : se lancer dans l'aventurer, tâtonner, expérimenter, c'est aussi préparer le terrain

pour les futurs jardiniers en herbe. L'auteur livre ainsi le fruit de vingt ans d'expérience pour amener chacun

à évoluer dans sa pratique du jardinage.

Le constat de départ se base sur l'extraordinaire diversité de la végétation méditerranéenne, souvent ignorée à

l'exception de quelques spécialistes. Dans ce milieu exigeant, les plantes ont dû développer des capacités

d'adaptation hors du commun. Diversifiées à l'extrême, elles présentent toute une palette de qualités à

sélectionner en fonction de la nature du sol, de l'amplitude thermique, de la pluviométrie...

Avec quelques qualités communes qui en font des plantes écologiques par excellence : peu gourmandes en

eau, elles ne nécessitent pas non plus d'engrais ou de pesticides pour croître et prospérer.

Un patient apprentissage

Cultiver un jardin sec, c'est donc moins s'en occuper en permanence que d'apprendre à en doser les

équilibres, pour qu'il puisse se développer de façon autonome. Un vrai rêve pour les allergiques de la

tondeuse et de l'arrosage quotidien. Mais aussi un patient apprentissage qui demande de sélectionner les

variétés les mieux adaptées, savoir les associer les unes aux autres, préparer le sol, maîtriser les techniques

d'arrosage afin d'employer au mieux le peu d'eau nécessaire...

"Pour un jardin sans arrosage" fournit toutes les règles de base pour y parvenir. Il livre aussi une longue liste

de végétaux adaptés à la sécheresse, qui remplit la majeure partie de l'ouvrage. Mais comme le reconnaît

Olivier Filippi dans sa préface, il reste des centaines, voire des milliers de variétés à décrire.

Filippi précise d'ailleurs que les conseils qu'il distille ne concernent pas uniquement le milieu méditerranéen,

mais peuvent intéresser tous ceux qui souhaitent s'essayer à un jardinage plus respectueux de

l'environnement. A condition de transposer, dans chaque écosystème, les végétaux et les pratiques qui lui

conviennent le mieux. Et d'échanger pour transmettre ces savoir-faire à d'autres passionnés...

Bernard Rastoin

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I.9. Le bois, matériau idéal ?

Construire en bois, ce n’est pas seulement bon pour l’environnement, mais aussi pour votre maison.

Résistant et souple, bénéficiant de qualités d’isolation supérieures, c’est un matériau particulièrement

bien adapté pour construire des habitations saines et durables. Du coup, le voilà qui revient sur le

devant de la scène, séduisant particuliers et constructeurs…

En France, seules 4% des maisons individuelles sont en bois, contre 30 en Allemagne ou 60% dans les pays

scandinaves. Ce décalage s'explique en partie par le succès du béton durant la période de reconstruction qui a

suivi la deuxième guerre mondiale. Mais aussi par une série d'a priori sur les caractéristiques de ce matériau :

le bois aurait du mal à vieillir, il serait coûteux ou encore favoriserait les incendies.

Pourtant, aucune de ces affirmations ne se vérifie vraiment. Le bois est un matériau durable, qui peut être

conservé durant plusieurs dizaines d'années, voire des siècles, s'il est correctement entretenu. De plus, même

s'il représente un certain surcoût par rapport à d'autres techniques de construction, le bois a vu son prix

diminuer significativement depuis que l'usage s'en est démocratisé. Enfin, en matière d'incendie, il respecte

les mêmes réglementations que les autres types de bâtiments, et peut même faire preuve, dans certaines

conditions, d'une plus grande résistance au feu.

Si l'on ajoute à cela ses multiples qualités, on comprend mieux l'essor actuel des maisons en bois : plus 46%

depuis 2001, contre 20% pour l'ensemble des maisons individuelles. De quoi donner envie de se pencher un

peu plus sur la question...

Solide, durable, sain

Le bois possède une bonne résistance à la pression, et sa souplesse lui permet d'amortir les chocs. Ses

capacités mécaniques lui permettent de se plier à de multiples usages, de l'ossature d'un bâtiment aux

parements extérieurs. Pour les mêmes raisons, il résistera mieux que d'autres matériaux à d'éventuels

glissements de terrain.

Le bois constitue également un excellent isolant thermique : une cloison en bois de 15 cm possède les mêmes

qualités d'isolation qu'un mur de brique d'un mètre d'épaisseur. En revanche, il est mieux adapté aux régions

froides ou tempérées que chaudes, car il conserve moins la fraîcheur de la nuit que la pierre. Par ailleurs, ses

propriétés acoustiques varient selon les essences. C'est pourquoi il sera parfois nécessaire de réaliser une

isolation supplémentaire (en liège par exemple) dans les parois.

Les qualités du bois s'apprécient aussi en termes de confort. Pour ses propriétés hygroscopiques, d'abord : il

absorbe l'humidité lorsque celle-ci augmente et la rejette lorsqu'elle diminue, améliorant la qualité de l'air

dans la maison. De plus, il ne contient pas de substances nocives, sans oublier ses avantages sur le plan

esthétique.

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Ultime atout du bois, celui-ci respecte mieux l'environnement. Il s'agit en effet du seul matériau de

construction entièrement renouvelable et biodégradable. Durant sa croissance, il contribue à stocker le CO2

présent dans l'atmosphère et à émettre de l'oxygène. Et même lors de sa production, il consomme moins

d'énergie que n'importe quel autre matériau.

Une grande souplesse d'utilisation

Du fait de ses caractéristiques mécaniques, le bois se prête à tous les usages possibles. En effet, il peut être

employé aussi bien pour la charpente que pour des revêtements intérieurs (lambris) ou des parements

extérieurs. De plus, sa simplicité d'utilisation permet de réaliser des aménagements ou des agrandissements

en un délai record. Cette flexibilité permet aussi de bénéficier d'une grande liberté architecturale, dans le

cadre d'un des trois modes de construction possibles :

1. La maison à ossature de bois, qui est la méthode la moins coûteuse et repose sur l'assemblage de

membrures en bois ;

2. La maison en poteaux poutres, où les poteaux porteurs déterminent la hauteur de l'habitation ;

3. La maison en rondins ou madriers, qui offre une grande solidité mais moins de souplesse en

matière esthétique.

Enfin, concernant le coût de construction, celui-ci est supérieur de 5 à 10% à celui d'une maison classique,

tout compris. Mais c'est sans compter avec les économies d'énergie permises par l'utilisation du bois. A

terme, la dépense s'avèrera donc légèrement inférieure.

Bertrand Mauvy

I.10. La surpêche

La surpêche désigne la surexploitation des ressources halieutiques (aliments d’origine aquatique). Il

apparaît comme évident que les ressources alimentaires fournies par la mer sont renouvelables, mais à

condition qu’on les exploite à un rythme adéquat.

Quand on pêche les poissons plus vite qu’ils ne se reproduisent, les populations de poissons diminuent…

Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), 18% des stocks mondiaux

de poissons sont surexploités, et 47% sont exploités à leur niveau maximum.

Les premiers signes de surpêche apparaissent dès la révolution industrielle du XIXe siècle, avec la forte

réduction des populations de baleines et de saumons en particulier. Depuis les années 1950, la surpêche s’est

généralisée à la plupart des espèces consommées.

La pêche est devenue une activité industrielle

Aujourd’hui, les navires de pêche sont de véritables usines des mers. Ils peuvent repérer les bancs de

poissons par satellite, les pêcher avec des filets dérivants pouvant aller jusqu’à 60 km de long, ou des lignes

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équipées de milliers d’hameçons pouvant atteindre 120 km de long. Ils peuvent traiter les poissons pêchés,

les congeler et les emballer avec des capacités de stockage en mer équivalentes à 12 Boeings 747 pour les

plus gros chalutiers de 170 mètres de long.

L’industrie de la pêche est en situation de surcapacité

La FAO estime que la flotte de pêche mondiale atteint 3,8 millions de navires en 1995. Elle constate un

problème de surcapacité de l'industrie de la pêche, en d'autres termes un trop grand nombre de navires de

pêche. Ceci s’explique par le fait que certains bateaux sont de véritables usines des mers, et qu’en dehors des

premiers 200 milles nautiques qui bordent le littoral d’un pays (la zone d’exclusivité économique d’un pays),

l'accès aux ressources n’est pas réglementé. Ainsi, quiconque dispose d’un bateau peut aller pêcher et

exploiter les ressources marines. Cette absence de réglementation entraîne une surabondance de bateaux dans

certaines zones de pêches.

Surpêche : des conséquences environnementales, économiques et sociales

Au-delà du fait que la surpêche risque de supprimer définitivement certaines populations de poissons, ce

phénomène a des conséquences environnementales, économiques et sociales.

D’un point de vue environnemental, la diminution de certaines populations de poissons accélère l’érosion

des écosystèmes marins. Les principaux poissons qui subissent la surpêche sont le thon, l'espadon, le marlin,

le cabillaud, le flétan, la raie et la limande. Ces grands prédateurs marins pourraient être remplacés par des

poissons plus petits se nourrissant de plancton, ou par des méduses.

D’un point de vue économique, l’exploitation non durable des ressources de la mer fragilise l’industrie de

la pêche et se répercute sur les consommateurs. L’industrie de la pêche fournit de l’emploi aujourd’hui à près

de 200 millions de personnes à travers le monde. La surpêche entraîne dans un premier temps une

surabondance de poissons à la vente, puis une forte baisse des quantités de poissons. Pour les producteurs, la

surabondance de poissons entraîne une baisse des prix qui fragilise leur activité.

Dans un deuxième temps, la baisse de la quantité de poissons disponibles nécessite un ajustement des

capacités ; beaucoup de navires devront rester au port pour que peu soient rentables. Coté consommateurs, la

surpêche devrait entraîner à terme une raréfaction du poisson donc une augmentation des prix.

D’un point de vue social, la surpêche expose les populations les plus dépendantes des produits de la mer à

un risque de pénurie alimentaire. Les produits de la pêche constituent un apport en protéine essentiel pour les

populations côtières en particulier dans les pays en développement. Ainsi la FAO estime qu’en Asie près

d’un milliards de personnes en dépendent comme principale source de protéine animale.

M.M., le 4 mai 2009

II. Les pesticides

La France est l'un des premiers utilisateurs d'insecticides, d'herbicides et autres fongicides... Et les

consommateurs s'en inquiètent. Mais quels sont les aliments susceptibles de contenir des pesticides ?

Quels sont leurs effets sur notre santé ? Comment les éviter ?... Doctissimo vous aide à manger sans

risque.

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L'essentiel sur les pesticides

On parle beaucoup des pesticides mais on ne sait pas vraiment qui ils sont. A quoi servent-ils vraiment ?

Quelles sont les différents types ? Dans quels aliments les retrouve-t-on ?... Autant de questions qui

trouveront des réponses dans nos articles.

II.1. Qui sont les pesticides ?

Les pesticides font souvent la Une des médias. Accusés de nombreux maux, ils ont néanmoins constitué

un progrès pour les exploitants agricoles. Fongicide, insecticide, herbicide... les types de pesticides sont

nombreux. Tour d'horizon...

La France est l’un des pays européens qui consomment le plus de pesticides. Même si elle reste bien loin

derrière l’Amérique du Nord, premier mondial. Sous le terme "pesticides", on trouve en réalité plusieurs

produits : les fongicides, les herbicides, les insecticides…

Utilisation des pesticides en France en 2000

Type de produits Quantité (tonnes)

Fongicides

Insecticides

Herbicides

Divers

52 834

3 103

30 845

7 911

Total 94 692

Source : Union des Industries de la Protection des Plantes

Les différents pesticides

Insecticides : Les plus connus sont les organochlorés, comme par exemple le DDT. Mais la plupart sont très

persistants et donc interdits. Ils sont remplacés par les organophosphorés et les carbamates, plus toxiques

mais qui laissent moins de résidus. Plus récemment, sont apparus les pyrethroïdes, qui ont l’avantage d’être

moins nocifs pour les oiseaux ou les mammifères, mais plus dangereux pour la faune aquatique.

Organophosphorés et carbamates sont inhibiteurs de la cholinestérase. Ils vont bloquer le système nerveux

des insectes, provoquant la mort.

Herbicides : Les herbicides vont permettre de lutter contre les mauvaises herbes ou de "nettoyer" un sol

avant de planter. Les plus utilisés sont appelés les "phenoxy". Mais il existe d’autres produits tels que les

aldéhydes, les amides, les pyridil, les isoxazoles, etc. Ils vont agir par exemple en bloquant la synthèse de

certains lipides, d’acides aminés ou vont empêcher la photosynthèse.

Fongicides : Les fongicides sont des substances qui servent à lutter contre les champignons et les

moisissures. Ceux-ci vont ainsi permettre de lutter contre le mildiou de la pomme de terre par exemple.

Certains organochlorés, et carbamates peuvent être utilisés.

Algicides : Les algicides sont des substances qui vont permettre d’éliminer les algues.

Nématicides : Les nématicides sont des produits qui vont servir à éliminer les vers, notamment ceux qui

s’attaquent aux racines. Certains peuvent être très dangereux pour l’homme.

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Rodonticides : Ce sont de substances qui vont tuer les rongeurs (rats, souris, mulots…) après ingestion. Il

peut s’agir par exemple d’anticoagulants, qui vont provoque des hémorragies internes chez l’animal qui l’a

mangé.

Répulsifs : Les répulsifs sont des produits destinés à éloigner les oiseaux, taupes et autres insectes nuisibles

sans forcément chercher à les tuer.

Des sites pour aller plus loin

Union des Industries de la Protection des Plantes

Sur le site du ministère de l’agriculture, vous pourrez trouver un catalogue des produits phytosanitaires autorisés en

France, avec leurs indications et degrés de nocivité.

II.2. Où se cachent les pesticides ?

Vache folle, listeria, dioxine... Le contenu de son assiette inquiète de plus en plus le consommateur. Et

l'un des sujets qui le préoccupent le plus, c'est la présence éventuelle de pesticides dans

l'alimentation... Tour d'horizon des aliments qui peuvent en contenir et des moyens mis en œuvre pour

éviter les risques.

Les pesticides ont permis d’améliorer la productivité agricole et d’éviter les famines qui ravageaient encore

l’Europe au début du XXe siècle. Ils sont nombreux, environ 8 000 produits différents et n’ont pas tous le

même degré de toxicité. Depuis les années 70 de nombreux pesticides retirés du marché, ont été remplacés

par des produits qui en se dégradant rapidement ne s’accumulent pas dans les sols. Pourtant, ils peuvent

parfois arriver dans votre assiette ou dans votre verre !

Où risque-t-on de trouver des pesticides ?

Les pesticides sont pulvérisés sur les plantes et le sol. Par conséquent on risque d’en retrouver dans les

produits de cultures et les eaux…

Fruits et légumes : En ce qui concerne les fruits et légumes, les producteurs doivent théoriquement respecter

un délai entre le dernier épandage et la récolte. Cela permet de laisser les résidus disparaître. Le temps est

fonction du produit utilisé. Pourtant, selon une étude de la direction de la santé européenne la moitié des

fruits et légumes consommées en France en 1999 contenaient des résidus de pesticides. Mais des contrôles

empêchent théoriquement que les seuils dangereux soient dépassés.

Céréales : Les céréales sont, elles aussi, susceptibles de contenir des pesticides, mais le risque est

théoriquement moindre. En effet, les plantes sont souvent traitées au moment des semis ou de la pousse,

avant le développement du grain et plutôt sur les tiges ou les feuilles. Les céréales sont donc moins

susceptibles de porter des résidus.

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Produits préparés : Les fruits, légumes et céréales contenus dans les produits préparés ne contiennent

théoriquement pas ou peu de résidus d’insecticides. En effet, les étapes de la transformation (lavage,

épluchage, cuisson…) éliminent les éventuelles traces.

Viande, poissons et produits laitiers : Les produits animaux peuvent être contaminés par les pesticides,

s’ils mangent des produits contenant des résidus. Il y a même un effet de concentration : en ingurgitant une

grande quantité de plantes ou de céréales, le bétail, les volailles ou les poissons vont concentrer les résidus,

devenant ainsi plus toxiques que le végétal de départ.

En général, les pesticides vont se retrouver dans les graisses animales. Mais on va les retrouver aussi dans le

foie ou les reins. De plus, ils peuvent s’accumuler dans le lait. Mais bien sûr cela suppose que les produits

dont ils se nourrissent en contiennent.

Eau du robinet : Un des derniers bilans de l'Institut français de l'environnement révélait que 94% des

analyses effectuées dans les rivières et les fleuves montraient des traces de contamination incompatibles avec

une consommation d'eau potable sans traitement des pesticides. L’agriculture intensive - irrigation,

utilisation de pesticides, d’engrais (les fameux nitrates)- contribue à la contamination des eaux.

Et comme nos cours d’eaux sont déjà chargées en pollution industrielle et urbaine, le résultat n’est pas

fameux ! D’autant que les traitements que subit l’eau pour redevenir potable ont un coût et ne sont pas

anodins. Depuis 1998, un décret européen fixe -tout comme il y a une limite maximale à ne pas dépasser

pour les pesticides et les nitrates - un seuil pour les sous-produits de la désinfection. Au-delà de ce seuil l’eau

n’est pas potable !

Aliments sous surveillance

Les pesticides ne sont pas anodins c’est pourquoi leur usage est strictement contrôlé. La commercialisation

d’un pesticide fait l’objet d’une autorisation de mise sur le marché qui évalue l’efficacité du produit et son

innocuité pour l’homme. Pour chaque fruit, légume, céréale, on connaît la dose maximale de résidus de

pesticides potentiellement contenus dans l’aliment. Ces limites maximales de résidus garantissent la sécurité

du consommateur.

Pour les calculer, on considère que chaque fruit, légume et céréale contient le maximum possible de résidus

de pesticides, on les additionne en prenant en compte le régime alimentaire des français, puis on compare ces

données avec la dose journalière de pesticide admissible, c’est-à-dire une dose dont on est sûr qu’elle ne

provoque pas de maladies. Une fois que ce premier seuil est établi, on rajoute une marge de sécurité. La mise

sur le marché de pesticides et leurs modalités d’utilisation sont calculées pour qu’avaler de temps en temps

d’infimes quantités de résidus ne présente pas de risque particulier pour la santé.

Pas que dans l’assiette !

Les pesticides sont des produits dangereux qui si on les avale tels quels provoquent des intoxications

violentes pouvant aller jusqu’à la mort. Or les risques ne sont pas uniquement dans l’assiette : plus on est

exposé directement à ces produits (par leur manipulation, leur pulvérisation), plus leurs effets à long terme

sur la santé risquent d’être importants.

Cela concerne les agriculteurs mais aussi dans une moindre mesure les jardiniers amateurs, ces derniers qui

ne connaissent pas forcément les bonnes pratiques d’utilisation des pesticides doivent s’orienter vers des

produits moins dangereux portant la mention "emploi autorisé dans les jardins".

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Les pesticides n’ont pas tout faux !

Les pesticides ne sont pas forcément synonymes de poison ! Ils nous protègent de certaines bactéries et

notamment des mycotoxines : ces champignons présents à la surface des fruits et des légumes sont - même à

très faibles doses -extrêmement dangereux. Ces mycotoxines sont éliminés par les fongicides, une catégorie

de pesticides interdits en agriculture biologique.

Pour l’instant ne rien ne laisse présager que les mycotoxines proliféreraient davantage dans le bio que dans

l’agriculture traditionnelle car d’autres aspects du bio comme la rotation des cultures permettent d’éliminer

des risques liés à la prolifération de ces champignons dans le sol. Mais la question est ouverte et l’AFSSA

(Agence française de sécurité sanitaire des aliments) vient de lancer pour y répondre une grande étude visant

à évaluer les risques et les bénéfices sanitaires et nutritionnels des aliments issus de l’agriculture biologique.

Cet avis devrait en rendu en mai prochain.

Quelles mesures pour se protéger ?

Au niveau national et européen un système de contrôle est mis en place. En France, le gouvernement

souhaite réduire la quantité de pesticides et vient d’annoncer la création d’un observatoire des résidus, lieu

d’information et de concertation ouvert au public. D’un point de vue individuel, on peut s’orienter vers des

produits bios - sans pesticides chimiques - ou issus de l’agriculture raisonnée. Sans oublier que l’épluchage

et le lavage des légumes et des fruits permettent d’éliminer une petite part des résidus de pesticides.

Hélène Huret

II.3. Plantes OGM : attentes et résultats

La question des plantes OGM (organismes génétiquement modifiés) laisse rarement indifférent. Au-

delà des inquiétudes soulevées par la manipulation du vivant, les vertus que leur prêtent leurs

créateurs sont pourtant impressionnantes. Mais les résultats sont-ils vraiment à la hauteur ?

Quant on parle d'OGM (organismes génétiquement modifiés), cela concerne généralement l'usage agricole

de cette technologie développée à partir de la fin des années 1970. Il faut savoir, pourtant, que les OGM sont

également présents dans de nombreux autres domaines : en recherche fondamentale, dans le domaine

médical, ou encore sur des animaux qui ne font pas pour l'instant l'objet de commercialisation (à l'exception

d'un petit poisson fluorescent, le glofish).

A la base, le principe appliqué est toujours le même : un gène est transféré dans la cellule de l'organisme

qu'on souhaite modifier. Puis cette cellule est mise en culture jusqu'à obtenir une variété mutante de

l'organisme d'accueil. La différence, toutefois, avec les exemples précédents, est que ceux-ci sont utilisés

dans des milieux confinés. A l'inverse, les plantes génétiquement modifiées sont cultivées en plein champ,

avec les risques que cela comporte en termes de dissémination, voire pour la santé des consommateurs.

OGM agricoles : un essor fulgurant

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Les OGM ont connu une croissance impressionnante depuis leur lancement au tournant des années 1990,

mais ce développement se concentre sur un petit nombre de pays (six d'entre eux concentrent 99% des

surfaces cultivées). En 2006, les plantes génétiquement modifiées couvraient un total de 102 millions

d'hectares, soit 7% des terres cultivées dans le monde. Les principaux pays concernés sont les Etats-Unis

(plus de 50% des surfaces concernées), suivis de l'Argentine, du Brésil et du Canada.

Les principaux OGM cultivés dans le monde sont le soja, le maïs et le colza. Le blé, dont le génome est d'une

grande complexité, n'est pas concerné. Mais on trouve de nombreuses autres plantes, comme le tabac, la

betterave, la chicorée ou même les œillets...

Il faut dire que les OGM agricoles ont été présentées par leurs créateurs comme une panacée pour différents

maux affectant la production alimentaire :

Ils permettraient d'obtenir des rendements supérieurs, beaucoup plus rapidement que par les

méthodes classiques qui reposent sur de multiples croisements ;

Grâce à la transgenèse, les plantes peuvent développer une plus grande résistance aux maladies et

aux insectes, diminuant ainsi la consommation de pesticides ;

Des molécules spécifiques peuvent y être insérées à des fins thérapeutiques (par exemple, un riz plus

riche en vitamine A pour lutter contre la cécité dans les pays en voie de développement).

Des doutes de plus en plus sérieux

En Europe, en revanche, ces cultures restent une exception, les autorités ayant préféré se montrer prudentes

sous la pression des associations et des consommateurs. Le pays qui y recourt le plus est l'Espagne, avec 100

000 hectares de surface cultivée (maïs principalement). Néanmoins, les OGM sont déjà bien présents, sous

forme de tourteaux de soja pour le bétail, et au rayon alimentation (maïs modifié, farines et huiles...), avec

obligation de le signaler sur l'étiquette.

Quoi qu'il en soit, sur le terrain, les OGM ne semblent pas à la hauteur des promesses évoquées, et

confirment même certaines des inquiétudes soulevées par les associations qui s'y opposent. Les rendements

sont décevants par rapport aux variétés classiques, et les insectes s'adapteraient rapidement aux plantes

censées leur résister.

De ce fait, la consommation d'insecticides, au lieu de décroître, connaît une augmentation inquiétante. Par

ailleurs, le principal motif d'utilisation des OGM est leur résistance aux herbicides (71% des cas), ce qui n'est

pas non plus une très bonne nouvelle pour l'environnement. Les risques de dissémination (contamination de

cultures non modifiées par les OGM) se confirment également, et ce dans un rayon important.

Le début du reflux ?

C'est pourquoi, aujourd'hui, de plus en plus de pays ont fait marche arrière dans le domaine des OGM : l'Inde

et la Chine ont renoncé à cultiver du riz modifié, la Thaïlande a abandonné une nouvelle variété de papaye, la

Russie, l'Ukraine ou la Pologne ont adopté des législations contre l'importation de soja transgénique.

Plusieurs membres de l'UE, au niveau national ou régional, ont demandé d'activer la clause de sauvegarde,

qui leur permet de refuser d'accueillir des cultures d'OGM du fait de risques sérieux pour l'environnement ou

la santé. Les grandes firmes ne sont pas en reste, dans la distribution (Wal-Mart) ou l'industrie alimentaire.

Kraft Foods, Pepsico, Danone, Nestlé, Unilever par exemple, soit cinq des six plus grandes entreprises du

secteur, ont pris fin 2005 l'engagement de ne pas utiliser de produits génétiquement modifiés.

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Il est encore trop tôt pour dire si ce reflux se confirmera à l'avenir. Mais il montre qu'il en va des OGM

comme de toute nouvelle technologie : on ne peut en mesurer pleinement les effets qu'après un laps de temps

significatif. Et que la prudence est parfois préférable, surtout lorsqu'on touche, comme ici, au cœur du

vivant...

Bernard Rastoin

II.4. Demain, des pesticides biologiques

Aujourd'hui, les pesticides chimiques sont accusés de nombreux maux. Pourtant il existe des

alternatives, déjà utilisées ou encore à l'essai. Le maître mot est la lutte biologique. Petit tour d'horizon

de quelques méthodes 100% naturelles ayant démontré leur efficacité...

Bien avant le succès du bio, la lutte contre les parasites par des méthodes naturelles à fait l’objet de

nombreuses recherches. Voici quelques exemples de techniques déjà employées ou prometteuses…

Un amour de coccinelle…

L’exemple de plus connu de lutte biologique reste bien sûr la coccinelle. Cette bête à bon dieu est aussi

l’ennemi juré des pucerons. Elle peut en manger plus d’une centaine par jour ! L’intérêt pour protéger les

plantes est donc certain ! A l’INRA, on travaille à sélectionner les plus voraces, mais si possible incapables

de voler, pour éviter qu’elles ne se sauvent dans le champ voisin…

Les champignons tueurs !

Pour lutter contre les nématodes, ces petits vers qui vont manger la plante, on utilise généralement des

nématicides chimiques. Mais ceux-ci sont souvent très toxiques, et plusieurs pays les ont déjà mis à l’index.

C’est pourquoi il est important de trouver des solutions moins agressives. Or la solution pourrait être dans les

champignons ! En effet, certains sont capables de prendre au piège les nématodes afin de s’en nourrir.

D’autres peuvent tuer les œufs de ces vers. L’INRA travaille notamment dans cette direction.

Les mangeurs d’œufs

Un autre moyen potentiel de lutte contre les insectes nuisibles est… d’autres insectes : les trichogrammes.

Ceux-ci sont extrêmement petits, mais sont capables de tuer l’ennemi… dans l’œuf. En effet, les femelles

pondent leurs œufs dans ceux d’autres insectes qu’elles trouvent, et les larves se nourrissent du contenu de

ces derniers. L’avantage est certain : les insectes ravageurs sont tués avant de faire le moindre dégât !

L’appel du sexe…

Un outil précieux peut-être les phéromones. Ces signaux chimiques sont émis par l’un des insectes pour

attirer son partenaire en vue de se reproduire. Il est ainsi possible de fabriquer des pièges à phéromones qui

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vont attirer comme un phare les représentants du sexe opposé de l’espèce. On peut aussi répandre la

substance, pour désorienter les mâles (ou les femelles) qui seront incapables de féconder leur partenaire.

Et les OGM ?

Il existe une autre méthode qui permet théoriquement de remplacer les pesticides chimiques : les organismes

génétiquement modifiés ! En effet, il est possible de modifier une plante pour lui faire fabriquer des

substances qui vont la protéger des insectes ou autres maladies. Le cas le plus connu est le maïs

génétiquement modifié pour exprimer la protéine Bt, lui permettant de lutter contre la pyrale, insecte

ravageur.

Contrairement aux apparences, la méthode est proche du naturel : les substances exprimées se font grâce à

des gênes issues d’autres plantes qui ont su développer une résistance. Mais tant que les problèmes de

disséminations et que les questions de risques pour le consommateur ne sont pas résolus, cette alternative aux

pesticides reste virtuelle.

Des solutions pour après-demain…

Sans parler des OGM dont le cas est particulier, la lutte biologique semble être une alternative prometteuse

aux pesticides. Néanmoins, la mise en place est souvent complexe : il faut pouvoir élever les insectes ou les

champignons utiles, produire les phéromones… et ce choix entraîne forcément une hausse des prix. Il suffit

de regarder le coût des produits bio…

Le remplacement total des pesticides n’est pas pour demain et l’avenir "écologiquement correct" passe pour

l’instant par une utilisation raisonnée de ces produits et une amélioration de leur qualité, afin de les rendre

plus efficaces et moins nocifs.

Alain Sousa

Pesticides : des risques pour la santé et l'environnement

Accusés de causer de nombreuses maladies, les pesticides ont rarement pu être incriminés directement. Leur

utilisation massive n'est cependant pas sans conséquence sur l'environnement. Tout ce qu'il faut savoir sur les

risques associés à ces produits phytosanitaires.

II.5. Chlordécone aux Antilles : Bilan d’un scandale sanitaire

Pesticide largement utilisé dans les bananeraies aux Antilles, le chlordécone a été interdit en 1993.

Divers plans d’action gouvernementaux ont tenté d’évaluer l’étendue des dégâts et les dangers associés

afin de les limiter. Face à cette crise, l’Institut de veille sanitaire publie un bilan des risques associés à

la rémanence de ce poison et reconnaît un lien avec la survenue de cancers.

En 2007, c’est le Pr. Belpomme qui lançait l’alerte, parlant de "désastre sanitaire" ! Face à la pollution au

chlordécone, un plan d’action interministériel est mis en œuvre pour la période 2008-2010 et reconduit pour

la période 2011-2013. Ces mesures ont permis de définir divers objectifs : caractériser l’étendue des dégâts,

connaître les dangers, évaluer les risques et maîtriser les impacts… Retour sur les principales conclusions du

bilan réalisé par l’Invs et sur les actions à mener.

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Une pollution au chlordécone durable et étendue

Un pesticide interdit en 1993 continue de faire des ravages dans les Antilles françaises. Le chlordécone ne

bénéficie de mesures sanitaires qu’en 1999, année durant laquelle des analyses révèlent l’ampleur des dégâts.

La contamination de l’eau est rapidement mise à jour, des fermetures des captages les plus pollués et des

limitations de l’usage de l’eau dans les communes les plus polluées sont décidées. « C’est la première fois

que l’impact sur la santé humaine est publiquement évoqué par une autorité française » précise Didier

Torny de l’Institut national de la recherche agronomique à Ivry-sur-Seine.

Mais les contaminations concernent aussi les sols. A partir de 2003, des mesures sont prises pour limiter la

distribution et la vente de certaines denrées alimentaires cultivées sur des sols pollués. Les études RESO2

montrent que la fréquence globale de contamination des aliments est de 11,1% !

Les aliments les plus fréquemment touchés sont les légumes racines (18,4%), les cucurbitacées (11,3%) et

les produits de la mer et d’eau douce (respectivement entre 13,5 et 27,1%). Logiquement, l’impact sur les

populations devient un sujet de préoccupation majeure.

Chlordécone : les populations les plus exposées

La consommation d’eau et d’aliments pollués a logiquement des conséquences sur la santé humaine. Pour

l’évaluer, différentes études ont été menées depuis 1999 pour estimer l’exposition au chlordécone des

populations de Guadeloupe et Martinique. Les résultats témoignent de la présence de chlordécone à des

concentrations de l’ordre du microgramme par litre dans le sang des populations étudiées. Certaines

personnes plus particulièrement exposées sont identifiées.

Il s’agit d’anciens travailleurs agricoles de la banane, de consommateurs de produits de la mer et de

consommateurs de légumes racines en zone contaminée. Selon les chercheurs, la contamination se fait

principalement via l’alimentation. D’où la nécessité de limiter la consommation des aliments les plus

contaminés. Une mesure évidente mais qui se révèle moins simple à mettre en œuvre…

Limiter les sources de contamination

S’il est possible d’effectuer des analyses et de retirer certains lots contaminés dans les circuits "classiques"

(grande et petite distribution notamment), cela devient très complexe pour les aliments achetés en circuits

courts (autoproduction, dons, achats sur le bord des routes ou directement auprès du producteur) chose que

confirment les données disponibles : les personnes qui se fournissent via ces circuits sont le plus susceptible

de montrer des dépassements importants par rapport aux valeurs toxicologiques de référence (VTR).

En outre, les facteurs de risque de contamination sont identifiés. Selon le dernier Bulletin Epidémiologique

hebdomadaire (BEH), les plus fortes contaminations concernent :

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Les personnes résidant toutes dans les zones contaminées ;

Les enfants plus à risque d’exposition élevée que les adultes ;

La consommation de légumes racines (dachine, patate douce) plus de 2 fois par semaine et leur

approvisionnement en circuit court sont des facteurs de risque d’exposition élevée ;

La consommation plus de deux fois par semaine et l’approvisionnement en circuit court pour le

poisson constituent également des facteurs de risque.

Améliorer l’information des populations

Connaissant les facteurs de risque, des programmes de prévention sont initiés. Le programme Jafa (pour

Jardins Familiaux) mis en place à partir de 2008 en Martinique et en Guadeloupe vise à « diminuer les

apports en chlordécone liés à l’alimentation afin de ramener les niveaux d’exposition potentielle en deçà de

la VTR ». (…) peut-on lire dans le BEH.

Communication de proximité, diagnostic de contamination des jardins créoles, programmes d’éducation axés

sur la réduction de l’exposition et la qualité de l’alimentation sont les trois axes prioritaires. Par ailleurs, un

volet recherche a été décliné en Martinique concernant les modes de préparation des légumes.

Au-delà de ce programme spécifique, le vaste plan chlordécone 2008-2010 a été mis en place. Ses objectifs

sont nombreux, tant au niveau environnemental ou scientifique qu’au niveau sanitaire.

Le chlordécone lié au myélome et au cancer de la prostate

Reconnu comme cancérogène probable pour l’homme, le chlordécone est lié à de nombreuses tumeurs chez

l’animal. Ses effets sur l’homme font l’objet de nombreux travaux, en particulier dans les Antilles françaises,

décrites du fait de son exposition importante comme "un laboratoire à petite échelle"… Mais de précédentes

études témoignent de ces effets délétères, notamment celle concernant les employés d’une usine produisant

du chlordécone à Hopewell (Etats-Unis). Chez ces personnes exposées, des troubles cliniques apparaissaient

au-delà d’une concentration sanguine de 1 000 μg par litre de sang.

Les études menées aux Antilles montrent une augmentation significative du nombre de myélomes multiples

selon le lieu de vie des habitants : l’incidence de ce cancer est plus élevée chez les personnes vivant dans les

zones contaminées aux pesticides organochlorés. « Pour toutes les autres localisations cancéreuses étudiées,

aucune distribution spatiale particulière n’a été mise en évidence » notent Alain Blateau et ses collègues,

soulignant néanmoins que cela « ne permet en aucun cas de conclure à l’absence de lien ».

L’étude Karuprostate a permis de mettre en évidence une relation significative entre l’exposition au

chlordécone et le risque de survenue d’un cancer de la prostate. « Un risque significativement augmenté de

survenue de la maladie apparait lorsque les concentrations en chlordécone dépassent 1 μg/L ». Face à

l’accumulation de ces résultats, les auteurs appellent les autorités sanitaires à prendre toutes « les mesures

utiles destinées à protéger les populations, en particulier celle de la réduction des expositions ».

Quid des relations pesticides et cancer ?

Le Bulletin épidémiologique hebdomadaire du 8 février 2011 confirme ainsi les conséquences d'une

exposition au chlordécone évoquées dans le rapport du Pr Dominique Belpomme, pourtant décrié peu de

temps après sa sortie. Aujourd’hui, « On en sait plus sur la toxicité du chlordécone que sur bien d’autres

pesticides ou polluants persistants » avoue William Dab, Président du Conseil scientifique du Plan d’action

chlordécone 2008-2010 en Martinique et en Guadeloupe.

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Un aveu moyennement rassurant quand on sait que les pesticides sont ponctuellement suspectés de favoriser

certaines maladies : leucémie (dont un viticulteur vient de décéder suite à des expositions répétées aux

pesticides), maladie neurologiques, dont la maladie de Parkinson (une étude américaine datant de 2000

estimait que ces maladies sont deux fois plus courantes dans les comtés californiens où des pesticides sont

couramment utilisés)… Pour mieux évaluer les effets de ces composés, la Mutuelle de Santé Agricole a lancé

en 2005 l’étude épidémiologique AGRICAN, qui suit 182 000 agriculteurs.

Par ailleurs, l’objectif initial de réduire de 50% l’usage des pesticides d’ici 2018 (plan Ecophyto) a semblé

effrayer les législateurs lors du Grenelle II. L’article 6 bis A stipule ainsi que le retrait de la vente d’un

pesticide ne pourra plus être décidé uniquement par l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments

(Afssa devenue Anses aujourd’hui) sur des critères sanitaires ou environnementaux.

Une évaluation socio-économique lié au retrait du produit incriminé sera nécessaire. Une nouveauté que les

associations de défense de l’environnement ont largement dénoncée, estimant que le risque pour la santé

et/ou l’environnement devait prévaloir sur toutes considérations économiques, sous peine de voir de

"nouveaux scandales chlordécone" apparaître.

Yamina Saïdj, le 8 février 2011

II.6. Pesticides : un rapport parlementaire polémique

Rendu public le 28 avril, le rapport parlementaire "Pesticides et santé" émet plusieurs

recommandations pour réduire l’impact des pesticides sur la santé et l’environnement. Des

propositions qui ne manqueront pas de susciter la polémique.

Selon les rapporteurs de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, une

simplification de la réglementation s’impose, tout comme une meilleure information des usagers de ces

produits et des consommateurs. Par ailleurs, plusieurs pistes ont été étudiées pour passer à des modes

d’agriculture moins gourmands en pesticides. Une urgence quand on sait que la France est le pays

européen qui utilise le plus de pesticides. Des composés qui sont suspectés d’augmenter le risque de

pathologies graves comme la maladie de Parkinson ou certains cancers…

Une remise en cause du Grenelle ?

Présenté dans le cadre du Grenelle de l’environnement, le plan Ecophyto prévoie de réduire de 50%

l'utilisation des pesticides d'ici 2018. Mais face à cet objectif phare, les rapporteurs restent dubitatifs et

opposent des considérations économiques aux priorités environnementales : « L’engagement du Grenelle de

l’environnement de réduire l’usage des pesticides de 50% dans un délai de 10 ans impliquerait, selon une

simulation, que toute l’agriculture française passe en mode de production intégrée. Ce changement majeur

des systèmes de production entraînerait une baisse des rendements estimée à 12% en grand cultures, 24%

pour la viticulture et 19% pour les fruits et aurait des effets significatifs sur les marges ».

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Plus loin, les experts se font plus sceptiques encore : « Vos rapporteurs (…) invitent les pouvoirs publics à

anticiper les conséquences d’une diminution trop brutale de l’utilisation des pesticides en France ».

C’est trop pour François Veillerette, porte-parole du Mouvement pour le droit et le respect de générations

futures (MDRGF), qui estime que « le rapport remet totalement en cause les objectifs du Grenelle. Or, ces

objectifs constituent une réelle motivation pour les agriculteurs désireux d’aller vers des modes de

productions plus respectueux de la nature et de leur santé. Si les objectifs sont remis en cause, cela ne peut

que freiner les agriculteurs. Si on enlève la carotte, comment espérer que les choses avancent ? Au

contraire, j’ai l’impression que ce rapport est rétrograde, qu’au lieu de faire évoluer favorablement la

situation, il tente de la faire reculer ».

Dangereux le bio ?

Comment réduire l’usage et la dépendance aux pesticides ? Le rapport passe en revue l’agriculture raisonnée,

l’agriculture biologique et la production intégrée. Pour cela, les experts s’appuient sur les conclusions de

l’Institut national de la recherche agronomique (Inra), pour souligner que « l’agriculture raisonnée n’a pas

démontré les preuves de son efficacité ».

Coté agriculture biologique, en mettent en avant les risques qu’elle présente pour le consommateur. « Elle

n’est pas jugée, comme étant à elle seule, susceptible de régler le problème des pesticides », souligne Jean-

Claude Etienne, sénateur et l’un des deux rapporteurs. « D’autant que les études suggèrent que les aliments

issus de l’agriculture biologique seraient porteurs de mycotoxines, qui favoriseraient les cancers ».

Le porte-parole du MDRGF s’insurge : « L’agriculture biologique est carrément massacrée dans ce rapport.

Concernant les mycotoxines, ils oublient de préciser qu’on en retrouve autant, si ce n’est plus, dans les

aliments issus de l’agriculture intensive que dans les aliments bio ».

Autre frein important selon les rapporteurs : le coût des aliments issus de cette filière peut être dissuasif. Pour

éviter ce problème, le Grenelle prévoyait d’augmenter progressivement la part de l’agriculture biologique

pour que les surfaces agricoles biologiques représentent 6% des surfaces agricoles en 2012 et 20% en 2020.

Vers une production intégrée ?

D’après Jean-Claude Etienne, la solution est la production intégrée, qui est à ses yeux comme « l’approche

la plus performante ». Il s’agit d’un mode d’agriculture qui tente de limiter le recours aux pesticides par des

méthodes prophylactiques et alternatives à l’échelle pluriannuelle de la succession des cultures. Plus

simplement, cela consiste à semer moins serré, pour laisser la plante respirer, à semer durant des saisons où

les maladies sont moins fréquentes, à faire des désherbages mécaniques, à avoir recours à plus d’engrais

organiques, etc.

C’est un mode d’agriculture qui "intègre", comme son nom l’indique, toutes les méthodes à disposition. « Le

faire de semer moins serré permet d’utiliser deux fois moins de fongicides par exemple. Pour ce qui est des

céréales, ce mode de production permet de réduire de moitié l’usage des pesticides. Certes, on constate une

baisse du rendement mais la rentabilité, elle au contraire, augmente », note François Veillerette.

En plus de ces modes de production, les rapporteurs ont exploré d’autres pistes pour réduire l’usage de

pesticides. « Même si nous manquons actuellement de données, note le sénateur. Les OGM pourraient

constituer non pas une solution alternative mais complémentaire »…

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Le porte-parole du MDRGF manque alors de s’étouffer : « Bien que ce rapport soit intitulé "pesticides et

santé", on y trouve un long plaidoyer en faveur des OGM. Or, ils n’ont rien à faire ici. Ce qui est intéressant

de noter, ce sont les positions pro-OGM du rapport mais anti-bio ». A défaut de convaincre, on peut

reconnaître que le rapport ne manque pas d’originalité…

Si l’Italie a choisi de développer son agriculture biologique (la surface agricole biologique y représente 7%

de la superficie agricole utilisée, la plaçant ainsi en tête des pays européens), la Suisse a choisi de développer

le modèle de la production intégrée. Vers quelle solution se tournera la France ?

Yamina Saïdj, le 29 avril 2010

Des sites pour aller plus loin

Le site de l'Opecst

Le site du MDRGF

Le site de l'UIPP

Le plan Ecophyto

Le Ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer

II.7. Vers une simplification de la réglementation sur les pesticides ?

Parmi les recommandations issues d’un rapport parlementaire "Pesticides et santé", tout un volet est

consacré à la réglementation régissant les produits phytosanitaires. Réglementation qu’il faudrait

simplifier et clarifier, d’après les rapporteurs.

Après avoir auditionné plus d’une centaine d’intervenants et recensé de multiples études scientifiques,

l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) a rendu son rapport

"Pesticides et santé"… Quatre axes ont été identifiés comme prioritaires pour réduire les risques liés à

l’usage de pesticides : la veille sanitaire, la réglementation, la formation et l’information, et la recherche.

Pour Jean-Claude Etienne, sénateur UMP et rapporteur, il s’agissait de « faire la part entre la rationalité

scientifique et l’émotionnel, qui lui aussi a sa part ici. Nous avons pris la mesure de l’immensité de ce que

nous ne savons pas ». A la lecture du rapport, force est de constater qu’il existe encore de nombreuses

inconnues, notamment pour ce qui est des effets des pesticides sur la santé, celles des agriculteurs en

premier lieu.

Les Français inquiets sur les risques liés aux pesticides

En préambule de la présentation du rapport, le sénateur tient à souligner que les pesticides sont loin d’avoir

bonne presse. Il cite les résultats d’un sondage réalisé par l’Institut de radioprotection et de sûreté

nucléaire en 2008 selon lequel « 64% des Français interrogés considèrent que les risques liés aux pesticides

sont élevés. Mais surtout, seuls 14% d’entre eux jugent les autorités sanitaires capables de les protéger par

rapport aux risques ».

Malgré l’inquiétude de nos compatriotes, notre pays est le premier pays européen consommateur de

pesticides et le 4ème

au niveau mondial, avec un total de 78 600 tonnes de substances actives vendues. Mais le

rapport précise qu’il « convient toutefois de préciser que la France est le premier producteur agricole

européen avec une surface agricole de 29 millions d’hectares en France métropolitaine ».

Pour remédier à ce désamour des Français, le rapport se propose de « se doter des moyens nécessaires pour

mieux comprendre les attentes des citoyens (…) et surtout, apporter les réponses qui s’imposent ».

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Un même produit pour plusieurs cultures ?

Concernant le volet réglementation, le rapport plaide pour une simplification et une clarification de la

réglementation actuelle. Entre la réglementation européenne et la réglementation française, avouons qu’il

n’est pas toujours évident de s’y retrouver. Le rapport recommande « d’autoriser, si possible, pour des

couples formés d’une culture et d’un parasite, l’usage des produits phytopharmaceutiques pour une famille

de plantes et pas uniquement pour une variété précise ».

« Cette proposition est scandaleuse, inadmissible », s’insurge François Veillerette, porte-parole du

Mouvement pour le droit et le respect de générations futures (MDRGF) qui estime qu’ « elle rendra très

difficile l’évaluation de l’exposition des utilisateurs et des consommateurs d’un produit donné pour une

culture donnée. Cela revient à prendre en compte l’efficacité au détriment de l’innocuité ».

Toujours dans le volet réglementation, le rapport préconise de « mettre au point (…) un indicateur de

pression sur l’environnement qui mesure les quantités de matières actives utilisées et non pas seulement un

indicateur d’impact sur l’environnement qui mesure les quantités de pesticides présentes dans

l’environnement et dans les végétaux que nous consommons ».

Claude Gatignol, l’un des rapporteurs, précise que cela devrait permettre de mieux connaitre toutes les

quantités et les variétés utilisées. Cette mesure a été également proposée par Jean-Charles Bocquet, directeur

général de l'Union des industries de la protection de plantes (UIPP) (lire son interview).

Comment satisfaire toutes les parties ?

« L’impression que laisse ce rapport, c’est qu’on ne sait rien et que les incertitudes sont bien trop

nombreuses pour engager une quelconque action. Par ailleurs, les recommandations émises remettent

complètement en cause les objectifs du Grenelle de l’environnement. A quelques jours du vote de la loi du

Grenelle, le message envoyé aux parlementaires est clair : continuons d’utiliser des pesticides et mieux,

facilitons la réglementation de manière à pouvoir en mettre encore plus sur le marché » regrette François

Veillerette.

Alors que la Terre devrait compter 9 milliards de bouches à nourrir en 2050, la question des modes

d’agriculture est cruciale. Il faut pouvoir proposer aux consommateurs des produits agricoles en quantité

suffisante et de bonne qualité. Sans pour autant abîmer l’environnement… Que de défis à relever pour notre

société qui devra trouver des solutions pour une agriculture durable, respectueuse de l’environnement, de la

santé des citoyens et qui permettra aux agriculteurs de vivre convenablement de leur activité…

Yamina Saïdj, le 29 avril 2010

Des sites pour aller plus loin

Le site de l'Opecst

Le site du MDRGF

Page 34: Protéger la terre

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Avril 2012 Page 34 sur 73

Le site de l'UIPP

Le plan Ecophyto

Le Ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer

II.8. Pesticides et cancers chez les agriculteurs

Quotidiennement en contact avec les pesticides, les agriculteurs seraient pourtant moins touchés par

les cancers que la population générale. Mais certaines tumeurs (prostate, lymphomes) seraient plus

fréquentes. Telle est l’une des conclusions d’un rapport parlementaire "Pesticides et santé", rendu

public le 27 avril.

Fruit du regroupement de nombreux témoignages et de l’ensemble des études publiées à ce jour, le rapport

"Pesticides et Santé" fait le point sur les connaissances de l’impact des produits phytopharmaceutiques (ou

pesticides) sur la santé et sur l’environnement. Les rapporteurs ont aussi cherché les pistes pour mieux

protéger consommateurs et agriculteurs. Ces derniers comptent parmi les populations les plus exposés aux

pesticides.

Globalement moins de cancers chez les agriculteurs…

Selon Jean-Claude Etienne, sénateur et rapporteur, « En terme d’intoxications aigues, les faits sont là. Par

contre, en ce qui concerne les intoxications chroniques, il est beaucoup plus difficile de se prononcer ». En

résumé, une exposition ponctuelle et très importante a des conséquences néfastes indéniables mais les effets

d’expositions chroniques en petites quantités restent difficiles à évaluer.

Pour répondre à cette vaste question, « les études épidémiologiques ont une valeur plus importante que les

études toxicologiques », précise-t-il. Jusqu’à présent, le peu d’études épidémiologiques menées auprès des

agriculteurs sur l’influence des pesticides ont montré des résultats assez surprenants. Selon certaines, les

agriculteurs seraient moins sujets aux cancers que la population générale !

D’après le rapport, cela pourrait s’expliquer par leur mode de vie, généralement plus sain : une meilleure

alimentation, un travail en extérieur, un moindre tabagisme…

… mais plus de tumeurs de la prostate !

Mais selon ces mêmes études, le risque de développer certains cancers (notamment de la prostate et les

lymphomes) est considérablement augmenté. Ici, ce sont les pesticides qui seraient en cause et en particulier,

deux types de pesticides, les organophosphorés et les organochlorés. Selon Claude Gatignol, député UMP et

rapporteur, ces deux types de pesticides « influenceraient fortement le risque de cancers de la prostate ».

Mais contrairement à ce que l’on pourrait croire, « il n’y aurait pas d’effet dose-dépendant, pas de relation

entre la surface traitée et la dose reçue par l’applicateur ».

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Pourtant, ces résultats, bien que restant à confirmer, n’incitent pas les rapporteurs à plus de prudence vis-à-

vis des pesticides. Ce qui ne manque pas d’étonner François Veillerette, porte-parole du Mouvement pour le

Droit et le Respect des Générations Futures (MDRGF) : « Aucune action n’est entreprise alors que nous

disposons d’études scientifiques pointant directement du doigt les effets des pesticides sur la santé. Le

rapport ne parle à aucun moment de la nécessité d’appliquer le principe de précaution, mettant en avant les

nombreuses incertitudes qui subsistent. Or, c’est la base même du principe de précaution, entamer une

action sur la base de suspicions, sans nécessairement attendre d’avoir des certitudes ».

L’étude AGRICAN : Une situation éclaircie ?

Pour pouvoir statuer de manière plus certaine sur les relations entre pesticides et cancers, disposer de

données plus importantes et exploitables, la Mutuelle de Santé Agricole a lancé en 2005 l’étude

épidémiologique AGRICAN, « la plus vaste étude épidémiologique menée jusqu’à présent » d’après Claude

Gatignol. Elle devrait porter sur une population de 182 000 agriculteurs, les résultats étant actuellement

rassemblés pour être prochainement publiés.

Par ailleurs, notons également l’éventuelle implication des pesticides dans l’apparition de maladies

neurologiques, dont la maladie de Parkinson. Selon une étude américaine datant de 2000, ces maladies

neurologiques seraient en effet deux fois plus courantes dans les comtés californiens où des pesticides sont

couramment utilisés.

Quotidiennement au contact de phytopharmaceutiques, à des concentrations parfois élevées, les agriculteurs

représentent incontestablement une population à risque, exposée à un danger avéré. Les rapporteurs insistent

sur la nécessité pour eux de porter « des combinaisons de protection. Nous savons qu’elles sont mal

accueillies et peu ou pas acceptées par la population agricole. Ils nous disent ressembler à des cosmonautes.

Pourtant, c’est pour l’instant la meilleure protection dont ils disposent. ».

Par ailleurs, ajoutent-ils, « les règles d’application sont également très importantes. Il faut contrôler les

outils de vaporisation régulièrement ». Dans les recommandations émises dans le rapport, la formation et

l’information des agriculteurs est un des axes prioritaires. L’obtention d’un agrément pour utiliser ce type de

produits est d’ailleurs à l’étude.

Frédéric Tronel, le 29 avril 2010

Des sites pour aller plus loin

Le site de l'Opecst

Le site du MDRGF

Le site de l'UIPP

Le plan Ecophyto

Le Ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer

II.9. Pesticides : quels effets sur la santé ?

Les pesticides sont souvent accusés des pires effets sur la santé. : asthme, fertilité, cancer... Mais ces

accusations sont-elles justifiées ? Quelle est réellement leur nocivité ? Le point sur ces effets supposés.

Les pesticides sont accusés de tous les maux. Si théoriquement toutes les précautions sont prises pour éviter

qu’ils se retrouvent dans notre assiette, on peut néanmoins s’inquiéter de leurs effets. Les études sur

l’homme restent rares, et la plupart ont été effectuées sur les animaux, à de très fortes doses d’exposition.

Mais, plusieurs maladies ont pu être reliées à une éventuelle action des herbicides et autres insecticides.

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Trop proches des hormones ?

L’un des principaux reproches fait aux pesticides, sont les perturbations hormonales qu’ils entraîneraient. En

effet, certains produits employés, les organochlorés par exemple, sont proche des hormones humaines. Ils

seraient ainsi responsables de dérèglements des systèmes immunitaires, nerveux et reproducteurs. Le risque

serait d’autant plus important chez la femme enceinte et l’enfant. Or le problème est qu’en cas d’ingestion de

pesticides par la mère, ceux-ci se retrouvent concentrés dans le lait maternel.

Un rôle dans la maladie Parkinson ?

Les causes de la maladie de Parkinson restent encore mystérieuses. Parmi les pistes évoquées, les

insecticides ont fait l’objet de plusieurs études. Si les soupçons sont nombreux, aucun résultat concluant n’a

encore été obtenu. D’autres produits sont suspectés : métaux, peintures, colles…

Soupçonnés dans l’asthme

Si les facteurs génétiques sont prépondérants dans l’apparition de la maladie, les facteurs environnementaux

sont essentiels dans son déclenchement. Outre les poussières et les aliments potentiellement allergisants, les

pesticides sont soupçonnés de participer au déclenchement des crises.

Une menace pour le système nerveux

Les organochlorés agissent chez les insectes en inhibant une enzyme importante pour le système nerveux. Ils

sont donc soupçonnés d’avoir des effets potentiels également chez l’homme, notamment sur le système

nerveux central. On parle ainsi d’évanouissements et de spasmes… Certains herbicides pourraient agir sur le

système nerveux périphérique.

Plus de pesticides, moins de bébés…

Les carbamates sont soupçonnés de faire baisser la fertilité, notamment en entraînant une diminution du

nombre de spermatozoïdes. Certains herbicides sont quant à eux suspectés d’entraîner des retards de

croissance chez le foetus. Les organochlorés, par leur forme proche de certaines hormones, sont également

accusés d’avoir des effets lors de la grossesse. Sans parler des malformations des organes génitaux, de plus

en plus évoquées (lire notre article Malformations sexuelles : la pollution au banc des accusés).

Accusés de plusieurs cancers

Certains herbicides (de la famille des phénoxy) sont soupçonnés d’être liés à l’apparition de cancers. Les

organochlorés sont également mis en cause. On leur ressemble avec certaines hormones qui pourrait leur

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faire jouer un rôle dans les cancers du sein, de la prostate ou du testicule. Bien sûr, cette liste est loin d’être

exhaustive ; les pesticides sont aussi évoqués dans le syndrome de la guerre du Golfe, dans l’insomnie…

II.10. Parkinson : les pesticides doublent le risque

Les pesticides doublent le risque de maladie de Parkinson chez les agriculteurs. Mais au-delà de ce qui

pourrait constituer une nouvelle "maladie professionnelle", y-a-t-il des dangers pour les

consommateurs de fruits et légumes ?

Bien que la maladie de Parkinson reste en partie mystérieuse, on pense qu’elle est le résultat d’une

susceptibilité génétique associée à des facteurs environnementaux. Parmi ces derniers, les pesticides ont été

rapidement suspectés. Plusieurs études confirment aujourd’hui ce lien.

Parkinson : les pesticides depuis longtemps suspectés

Dès les années 1980, des liens entre pesticides et maladie de Parkinson ont été suspectés, suite aux premières

descriptions de syndrome parkinsonien chez des toxicomanes utilisant du MPTP (un neurotoxique utilisé

comme intermédiaire de synthèse pour certains pesticides). Ces observations ont été suivies d’études

démontrant la destruction de neurones dopaminergiques chez des animaux exposés à cette même substance.

Or cette maladie neurologique est liée à une carence en dopamine.

A la fin des années 90, plusieurs chercheurs ont confirmé ces liens entre l’exposition à des pesticides et la

maladie de Parkinson. Après avoir suivi 143 325 personnes, une équipe de l’école de santé publique de

Harvard estimait ainsi en juin 2006 que l’exposition aux pesticides augmente le risque de Parkinson de 70% !

En mai 2006, pour la première fois, le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Bourges reconnaissait

comme maladie professionnelle la maladie de Parkinson dont souffrait un ancien salarié agricole de 52 ans

exposé à des pesticides.

Néanmoins, ni ces études ni cette décision de justice ne constituaient la preuve d’un lien irréfutable : aucune

famille de pesticides n’a pu être spécifiquement mise en cause et le rôle du niveau d’exposition n’a pas été

étudié - relation dose-effet-. Mais deux études permettent aujourd'hui de confirmer ce lien.

Un risque de Parkinson doublé chez les agriculteurs

Pour en avoir le coeur net, une équipe française de l’Inserm et de l’Université Pierre et Marie Curie s’est

focalisée sur les agriculteurs. Elle a interrogé 224 patients atteints de maladie de Parkinson, qu’elle a

comparé à un groupe de 557 personnes non malades, toutes affiliées à la Mutuelle Sociale Agricole.

Pour chacun d’entre eux, leur exposition aux pesticides durant toute la vie professionnelle a été

minutieusement reconstituée grâce à un grand nombre d’informations (surface des exploitations, type de

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cultures et de pesticides utilisés, nombre d’années et fréquence annuelle d’exposition, méthode

d’épandage…). Les résultats sont sans ambigüité et montrent que les patients atteints de maladie de

Parkinson avaient utilisé plus souvent des pesticides et durant un plus grand nombre d’années que les

témoins.

De plus, les agriculteurs exposés aux pesticides avaient un risque doublé de développer la maladie par

rapport à ceux qui n’en utilisaient pas. Et ce risque est même plus important encore (x 2,4) chez ceux

utilisant des insecticides de type organochloré. Aujourd’hui interdite, cette famille de produits a été

largement utilisée en France entre les années 1950 et 1990.

Regroupant par exemple le lindane et le DDT, elle se caractérise par une persistance dans l’environnement

de nombreuses années après l’utilisation. Les auteurs insistent donc sur la nécessité d’une éducation à un

meilleur usage professionnel et de mesures de protection des travailleurs agricoles exposés aux pesticides.

Mais ces relations dangereuses ne se limitent plus aux seuls agriculteurs. Publiée en avril 2009, une étude

américaine a été conduite auprès de 368 malades ayant résidé à moins de 500 mètres de surfaces agricoles

sur lesquelles des pesticides ont été épandus entre 1974 et 1999. Elle conclue que cette proximité augmente

le risque de Parkinson de 75% ! Et le risque de développer la maladie avant 60 ans (cas plus rares) est

multiplié par 4…

Quel risque pour le consommateur ?

La maladie de Parkinson est la deuxième maladie neuro-dégénérative la plus fréquente, après la maladie

d’Alzheimer. A priori, les chercheurs estiment aujourd’hui qu’elle ne saurait trouver son origine dans la

seule exposition aux pesticides. Néanmoins, certaines personnes ayant une susceptibilité génétique

particulière pourraient développer la maladie après avoir été exposé à des pesticides.

Mais à partir de quelle dose ? Pour quel pesticide ? Des expositions à faible dose sont-elles dangereuses ?

Peut-il y avoir un risque pour le consommateur exposé périodiquement aux pesticides via son

alimentation ?... Des études complémentaires seront nécessaires pour répondre à ces questions…

David Bême, le 18 juin 2009

II.11. Pesticides et cancer : il est temps d’agir !

Depuis très longtemps, les pesticides ont été suspectés d’augmenter le risque de cancers. Les résultats

d’une équipe française permettent de passer de l’hypothèse à la preuve d’un lien de causalité. Suite à

la publication de la nouvelle étude du centre de d’immunologie de Marseille-Luminy, l’Institut de

veille sanitaire (InVS) et la mutualité sociale agricole (MSA) lancent une grande étude de surveillance

de l’état de santé des agriculteurs.

Les intoxications liées aux pesticides, un problème mondial

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En 1990, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) publie une revue sur l’utilisation des pesticides et ses

conséquences sur la santé publique. Passant en revue les études réalisées jusqu’alors et s’appuyant sur les

données recueillies par l’OMS et le Programme des Nations-Unies pour l’environnement, ce rapport avait

recensé plus de 14 000 cas de contaminations avérées.

Selon l’organisme, « l’exposition aiguë aux pesticides peut entraîner la mort et des maladies graves. Une

exposition prolongée peut accroître le risque de troubles du développement, de la reproduction et de la

fonction du système nerveux. Elle peut perturber le système immunitaire et endocrinien et augmenter le

développement de certains cancers. Les enfants courent un risque plus élevé que les adultes ». Ces effets

sont particulièrement délétères lorsque les personnes ne sont pas protégés (combinaison, masques, gants).

En 2004, un rapport commun publié par l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et

l’Agriculture (FAO), le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) et l’OMS estiment que

« les enfants sont exposés à des risques plus élevés d'intoxication par les pesticides que les adultes et ont

besoin d’être mieux protégés contre ces substances chimiques, notamment dans les pays en développement ».

Selon le rapport, le nombre annuel des intoxications par les pesticides se situe entre 1 et 5 millions, dont

plusieurs milliers de cas mortels. La plupart des intoxications touchent les zones rurales des pays en

développement où les mesures de protection sont souvent inadéquates voire absentes. Ces pays qui n'utilisent

que 25% des pesticides produits dans le monde, enregistrent 99% des décès dus à ce type d’intoxication.

Mais les pesticides ne concernent pas uniquement les pays en voie de développement…

La maladie de Parkinson liée aux pesticides

Après plusieurs études suspectant un lien entre pesticides et maladie de Parkinson, une étude française

publiée en juin 2009 montrait que les agriculteurs exposés aux pesticides avaient un risque doublé de

développer cette maladie par rapport à ceux qui n’en utilisaient pas. Ces relations dangereuses ne se limitent

pas aux seuls agriculteurs.

En avril 2009, une étude américaine montrait qu’habiter à moins de 500 mètres de surfaces agricoles sur

lesquelles des pesticides ont été épandus augmente le risque de Parkinson de 75% ! Et le risque de

développer la maladie avant 60 ans (cas plus rares) est même multiplié par 4…

Les pesticides augmentent les risques de lymphomes

Concernant les liens entre cancer et pesticides, le débat est là encore ouvert depuis plusieurs années. Mais les

derniers résultats de l’étude Agrican (agriculture et pesticides) viennent d’établir pour la première fois un

lien de causalité entre l’exposition aux pesticides et la survenue de certains cancers.

Présentée en avant-première le 5 février 2010, à l’occasion du colloque de la recherche de la Ligue à

Marseille, l’étude publiée en juin 2009 dans le Journal of Experimental Medicine a suivi pendant 5 ans

144 agriculteurs exposés aux pesticides. Résultat : les agriculteurs présentent plus souvent une altération

chromosomique connue pour être une première étape vers la cancérisation de cellules lymphocytaires.

Appelées "translocations", ces modifications se caractérisent par un échange de matériel génétique entre les

chromosomes 14 et 18, qui peut inhiber la mort cellulaire et ainsi laisser des cellules se multiplier

indéfiniment, ce qui est caractéristique des cellules cancéreuses. L’équipe de chercheurs va désormais étudier

les agriculteurs atteints de lymphome pour tenter d’identifier des biomarqueurs qui permettrait un dépistage

précoce de ces cancers et donc un meilleur traitement.

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Si dans la population générale, cette anomalie se retrouve sur une cellule sur un million, elle est 100 à

1000 fois plus présente chez les agriculteurs exposés aux pesticides. Ce qui augmente le risque de développer

un lymphome folliculaire. Ce cancer du sang est en progression constante en France. Ce cancer représente la

cinquième cause de mortalité par cancer en France.

Vaste étude lancée par l’InVS dans le monde agricole

L’Institut de veille sanitaire (InVS) lance, en partenariat avec la Mutualité sociale agricole (MSA), une

grande étude permettant de décrire et de surveiller l’état de santé des travailleurs du monde agricole. Suivant

l’état de santé et les conditions de travail d’un groupe de volontaires pendant plusieurs années, elle pourra

identifier les métiers et les conditions de travail à risque et mesurer leur impact sur la santé de la population,

dans le but de proposer des recommandations en matière de prévention.

Lundi 8 février 2010, une phase pilote incluant 10 000 personnes a débuté dans cinq départements : les

Bouches-du-Rhône, le Finistère, le Pas-de-Calais, les Pyrénées-Atlantiques et la Saône-et-Loire. Cette étape

précède un lancement à l’échelle nationale en 2012.

Cette étude complètera le programme Ecophyto 2018, lancé en septembre 2008 par le ministère de

l’agriculture. Etabli à la suite du Grenelle de l’environnement, ce programme prévoit notamment de réduire

de 50% l’utilisation de produits phytosanitaires, si possible dans les 10 ans.

Ecophyto 2018 souhaite également diffuser le plus largement possible auprès des agriculteurs les pratiques

économes en produits phytosanitaires (réseau de 3 000 fermes pilotes). Suite aux récentes études reliant les

pesticides au cancer et à la maladie de Parkinson, ce programme devrait donc se pencher plus spécifiquement

encore sur ces risques avérés.

La France est le premier utilisateur de pesticides au sein de l’Union européenne et le troisième dans le monde

après la Chine et les Etats-Unis. Alors que les études démontrant les liens de certains de ces produits

phytosanitaires avec des risques importants pour la santé se multiplient, il serait souhaitable que des mesures

sanitaires interviennent rapidement pour les travailleurs du monde agricoles, mais aussi pour les riverains de

ces zones ainsi que pour les consommateurs dont l’exposition reste difficile à évalue.

Ioanna Schimizzi et David Bême, le 11 février 2010

II.12. Agrican : Moins de cancer chez les agriculteurs ?

Les agriculteurs seraient en meilleure santé que le reste de la population mais auraient également

moins de risque de mourir d’un cancer. Ce sont les principales conclusions de l’enquête Agrican dont

les premiers résultats ont été rendus publics mi-septembre. Mais les ONG fustigent ces résultats et

dénoncent un manque de transparence.

Omniprésents dans les fruits et légumes, les pesticides sont des molécules chimiques potentiellement

dangereuses, certaines études scientifiques leur attribuant diverses effets délétères (cancers, Parkinson…).

Quotidiennement au contact de phytopharmaceutiques, à des concentrations parfois élevées, les agriculteurs

représentent incontestablement une population à risque, exposée à un danger avéré. D’autant que la France

est l’un des plus grands utilisateurs de pesticides au monde et en Europe.

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Moins de cancers chez les agriculteurs ?

Pour y voir plus clair sur les liens entre cancers et pesticides dans le monde agricole, la Mutuelle Sociale

Agricole (MSA) a lancé en 2005, l’étude Agrican (AGRIculture et CANcer). Actuellement, la cohorte

Agrican comporte 180 000 personnes (affiliées à la MSA) réparties dans 12 départements ''représentatifs des

activités agricoles de la France métropolitaine'' (Calvados, Côte d'or, Doubs, Gironde, Isère, Loire-

Atlantique, Manche, Bas-Rhin, Haut-Rhin, Somme, Tarn et Vendée).

Même si une partie des résultats a été publiée, ça n’est qu’en 2012 que sera publié l’ensemble des données

sur les liens entre incidences de cancers, facteurs professionnels (type de culture, région, etc.) et utilisation

de pesticides.

En attendant, les premiers résultats semblent pour le moins positifs. Entre 2006 et 2009 sont survenus

11 476 décès. Après avoir analysé leurs causes, il apparait que les agriculteurs ont une plus grande espérance

de vie que la population générale. « Quelle que soit la cause du décès (cancers, maladies circulatoires,

maladies respiratoires), nous avons retrouvé une sous-mortalité nette par rapport à la population général ».

Par exemple, les hommes et femmes de la cohorte ont respectivement 27% et 19% moins de risque de

décéder d’un cancer qu’un homme et une femme du même département et du même âge.

Les agriculteurs fumeraient moins

Pour expliquer cette meilleure espérance de vie, les auteurs du rapport évoquent un tabagisme plus faible et

« sans doute (…) un niveau d’activité physique plus important et une alimentation plus variée ». Or, le

tabagisme est bien évidemment un facteur de risque ''très important" des cancers, le plus important selon les

auteurs du rapport. D’après l’enquête Agrican, les non-salariés (qui représentent la majeure partie de la

cohorte) fumeraient moins que dans la population générale.

En effet, 76% de ces femmes et 42% de ces hommes déclarent n’avoir jamais consommé de tabac. Mais les

hommes salariés de moins de 65 ans et les femmes de moins de 45 ans fument autant, voire plus que la

population générale. Logiquement, les agriculteurs seraient moins sujets aux cancers liés au tabagisme

(larynx, trachée, poumons, vessie, etc.) et plus généralement moins touchés par les cancers.

Seules exceptions : les mélanomes malins de la peau (+ 1% chez les hommes et + 6% chez les femmes par

rapport à la population générale). Chez les femmes, « des tendances à des excès sont aussi observées pour

les cancers de l’oesophage (+ 8%), de l’estomac (+ 5%) et du sang (+ 2%) » note le rapport.

Quid des liens entre cancers et pesticides ?

Alors même que l’objectif d’Agrican est d’étudier les liens éventuels entre cancers et pesticides, seule la

moitié (48%) des agriculteurs interrogés ont déclaré avoir été en contact avec des pesticides (9% des

femmes). Une proportion très faible, compte-tenu de la consommation française de pesticides (voir le tableau

ci-dessus)…

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Un point souligné par Générations futures, association écologiste très active sur le dossier des pesticides, qui

fait valoir « que les données sur la mortalité par cancer présentées pourraient être largement sous estimées

puisque moins d'un agriculteur sur deux est concerné par l'exposition aux pesticides, dont on sait par

ailleurs qu'ils sont un facteur de risque possible du cancer ».

Souvent suspecté, jamais prouvé, le lien entre cancer et pesticides est au coeur des débats. En 2010, une

équipe de chercheurs français avaient découvert que les agriculteurs exposés aux pesticides développent des

anomalies de leur génome pouvant être à l’origine du cancer. « En d’autres termes, les agriculteurs exposés

aux pesticides présentent des empreintes moléculaires de précurseurs tumoraux » notaient les chercheurs.

D’ailleurs, même le polémique rapport parlementaire "pesticides et santé" citait des études montrant que

le risque de développer certains cancers (notamment de la prostate et les lymphomes) est considérablement

augmenté chez les agriculteurs à cause des pesticides.

Selon Claude Gatignol, député UMP et rapporteur, les organophosphorés et organochlorés, deux types de

pesticides suspectés « influenceraient fortement le risque de cancers de la prostate ». Mais contrairement à

ce que l’on pourrait croire, « il n’y aurait pas d’effet dose-dépendant, pas de relation entre la surface traitée

et la dose reçue par l’applicateur ».

Comme l’association Générations Futures, l’association Phyto-Victimes (créée par Paul François, agriculteur

victime des pesticides) s’interroge sur la pertinence de cette étude, se demandant si « Agrican est réellement

représentative de la situation globale en France ? En effet, cette étude est basée sur un nombre réduits de

départements et ne concerne pas la totalité des personnes travaillant ou ayant travaillées dans l’agriculture

(certains saisonniers) ».

Une indépendance remise en cause

Autre motif de discorde pour Générations Futures : l’Union des industries de la protection de plantes (UIPP,

syndicat professionnel des industriels des pesticides) a participé, entre autres au financement de cette étude.

Pour François Veillerette, porte-parole de l’association, cette étude « manque visiblement d'indépendance et

cela explique que les chiffres qui pourraient montrer que les agriculteurs sont plus touchés par certains

types de cancer (possiblement liés aux pesticides) que la population générale ne sortent pas ! (…) Nous

trouvons cela indécent ! ».

Rappelons néanmoins que l’ensemble des analyses sur les incidences de cancer, en fonction des facteurs

professionnels et de l'utilisation de pesticides sera publié en 2012. Pour le moment, les professionnels

reconnaissent l’incidence plus élevée de la maladie de Parkinson chez les agriculteurs, les pesticides étant

les premiers suspects.

Si la réduction d’utilisation des pesticides est bien inscrite dans le plan Ecophyto (réduction de 50% en

10 ans), le rapport de l’OPESCT y met un peu un bémol, mettant en avant « les risques d’une diminution

trop brutale de l’utilisation des pesticides en France » avec des « des effets significatifs sur les marges »…

Les raisons économiques semblent primer sur les considérations environnementales et/ou sanitaires…

Yamina Saïdj, le 21 septembre 2011

Des sites pour aller plus loin

Résultats de l'enquête Agrican sur le site MSA

Générations futures

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Pesticides : la situation en France

Que penser de l'utilisation massive des pesticides en France ? L'avis dépend de quel côté on se place : milieu

associatif ou industriel… La variété des avis entretient la richesse du débat et permet de se faire sa propre

opinion.

Une situation alarmante

selon les associations de protection de l'environnement

Une situation maitrisée

selon les industriels et les agriculteurs

Pesticides, l'exception française

Pesticides : les raisins de la colère

Pesticides : une harmonisation européenne sous

surveillance

"La sécurité sanitaire meilleure que jamais" Intw de Jean-Charles Bocquet

"La réduction des pesticides n'équivaut pas à une

réduction des risques" Intw de Jean-Charles Bocquet

Pesticides : le monde agricole vigilant

II.13. Pesticides : l'exception française

Les pesticides sont très largement utilisés dans l'agriculture traditionnelle pour favoriser une

croissance saine des plantes. Problème : leurs répercussions sur l'environnement, que ce soit dans l'air,

dans l'eau ou dans notre assiette. Les conséquences néfastes sont depuis longtemps mises en évidence

par les scientifiques.

Trois principaux pesticides sont utilisés en agriculture : les insecticides pour se débarrasser d'insectes

ravageurs, les fongicides pour éviter les maladies causées par des champignons et les herbicides (ou

désherbants) pour supprimer les "mauvaises" herbes.

La connaissance des méfaits des pesticides sur la santé devrait naturellement imposer leur réduction.

Pourtant, il n'en est rien dans notre pays. L'étude de l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA)

portant sur l'année 2007, désigne la France comme le plus mauvais élève européen. Tandis que certains de

nos voisins réduisent l'utilisation de produits chimiques pour leurs cultures, nous sommes sur la première

marche du podium des pays les plus contaminés en Europe et en quatrième place, sur le plan mondial.

De plus en plus de produits toxiques dans nos assiettes

La France est la plus grande consommatrice de pesticides, après le Brésil, les Etats-Unis et le Japon. Et

comme si ce classement ne suffisait pas, l'étude de l'EFSA constate même une augmentation des résidus de

pesticides dans certains produits alimentaires français. En effet, 7,6% des fruits et légumes analysés en 2007,

dépassaient les limites maximales en résidus (LMR) autorisées.

Une aggravation de la situation puisqu'en 2006, ce chiffre n'atteignait "que" 6%. Autres aliments testés, les

céréales connaissent la même évolution délétère : 8,16% des céréales analysées en France dépassaient les

LMR en 2007, contre seulement 1% en 2006 ! Des chiffres qui ne prêtent guère à l'optimisme…

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De plus, l'EFSA a constaté au sein de l'Union Européenne, une diminution du pourcentage des produits

contenant plusieurs résidus de pesticides différents… sauf en France. Ainsi, le nombre d'échantillons

contenant plusieurs résidus a même fortement augmenté, évoluant de 25,8% en 2006 à 32,75% en 2007.

Pour limiter l'inquiétude face à ces résultats, les scientifiques de l'EFSA précisent que « la présence de

pesticides dans l'alimentation et même le dépassement des LMR, n'entraînent pas nécessairement de

problèmes du point de vue de la sécurité des aliments ». Pourtant, ces résultats peuvent inquiéter quant à la

qualité des produits alimentaires issus de la filière classique.

La pomme reçoit jusqu'à 27 traitements

Le Mouvement pour le droit et le respect des générations futures (MDRGF) informe les consommateurs sur

le contenu chimique de plusieurs aliments. Ils nous révèlent ainsi que les salades font partie des produits les

plus contaminés par les résidus de pesticides. Dans ce seul aliment, on peut trouver les molécules toxiques

suivantes : Chlorothalonil, Iprodione, Procymidone, Vinclozoline, Deltamethrine, Propyzamide.

Parmi ces produits, certains sont des perturbateurs endocriniens (molécules qui agissent sur l'équilibre

hormonal de l'organisme) et d'autres pourraient être cancérigènes. Mais selon la MDRGF, les fruits ne sont

pas non plus épargnés. La fraise par exemple, qui pousse souvent sous serre, est traitée avec de nombreux

fongicides, pour tuer les champignons.

Les pommes sont encore plus exposées, puisque dans certaines régions de France, la moyenne des

traitements est de 27 par an ! De même, le blé utilisé pour fabriquer le pain des boulangers, peut parfois être

traité jusqu'à 9 fois ! Le lait peut aussi subir des contaminations de pesticides chlorés, qui persistent par

ailleurs longtemps dans l'environnement.

Même le vin n'est pas épargné. Il est peu rassurant de savoir que 95% des vins de culture traditionnelle

contiennent des résidus de pesticides. Des analyses réalisées sur des vins d'Europe et du monde entier ont

permis de découvrir que le vin possède parfois des quantités de pesticides considérablement plus importantes

que l'eau.

Certaines bouteilles présenteraient parfois 5 800 fois supérieures aux Concentrations Maximales Admissibles

(CMA) autorisées pour l'eau du robinet. Et là encore, ces résidus neurotoxiques, perturbateurs endocriniens

ou cancérigènes, ont des répercussions directes sur la santé des consommateurs.

Chaque jour, les consommateurs sont ainsi exposés à ces pesticides et ingèrent ces produits toxiques. Et

l'alimentation n'est pas la seule cause de toxicité. Les Français qui habitent dans les régions de cultures, sont

particulièrement touchés, puisqu'ils inhalent au quotidien ces mêmes résidus chimiques.

Pesticides et maladies chroniques

Les pathologies chroniques liées à une exposition aux pesticides sont nombreuses : allergies, troubles

neurologiques (Alzheimer, Parkinson), perturbations hormonales, troubles cardiaques, troubles digestifs

fonctionnels et cancers (hémopathies malignes, cancers du poumon, de la prostate ou encore du sein).

L'Institut national du cancer se réfère à plusieurs études pour émettre l'hypothèse d'un lien entre le rôle des

pesticides et les tumeurs cérébrales des adultes. Même suspicion pour les tumeurs chez les enfants,

notamment lorsque leurs parents utilisent des pesticides dans le cadre de leur profession ou lorsque l'enfant a

été exposé durant la grossesse.

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Mais l'explosion de ces maladies est-elle surprenante, lorsqu'on sait qu'en 2004, sur 76 000 tonnes de

pesticides commercialisés en France, environ 90% étaient destinés à l'agriculture ? Pour cette même année,

5,4 kilos de pesticides étaient utilisés pour un hectare cultivé.

L'être humain fait partie de l'espèce animale et en cela, il est directement concerné par la contamination de

son environnement et de son alimentation. Impossible de vivre dans une bulle pour se prémunir des

nuisances toxiques. Alors pour se protéger, il est urgent de protéger notre environnement.

Véronique Le Saux, 18 septembre 2009

Des sites pour aller plus loin

Le site de l'EFSA

Le site du MDRGF

Le site de l'Inca

II.14. Pesticides : les raisins de la colère

En automne 2008, une association écologiste dénonce la présence de pesticides dans des grappes de

raisins vendues en France. Un raccourci qui jette l'opprobre sur toute une profession selon les

producteurs de raisins, dont la fédération attaque aujourd'hui l'association. Entre enjeux économiques

et liberté d'expression, où se joue la santé des consommateurs ?

La Fédération nationale des producteurs de raisin de table (FNRPT) assigne le Mouvement pour les Droits et

le Respect des Générations Futures (MDRGF) suite à la publication d'une étude sur la présence de pesticides

dans les raisins de table vendus en supermarché… Un procès qui fait débat et qui permet de revenir sur

l'usage des pesticides en France.

Un pépin pour les producteurs de raisins et les associations écolo

A l'automne 2008, 5 ONG de 5 pays européens (dont le MDRGF pour la France) ont fait tester par un

laboratoire allemand indépendant, des raisins de table vendus dans des magasins appartenant à 16 enseignes

différentes. D'après les résultats, 123 des 124 échantillons de raisins testés contenaient des résidus de

pesticides, dont certains interdits dans l'Union Européenne.

Sur les 25 échantillons français, tous contenaient des pesticides (en moyenne 8,5 résidus de pesticides par

échantillon) et 4 échantillons (16%) présentaient des traces supérieures aux niveaux autorisés par l'Union

Européenne. Vendus en France mais cultivés en Italie, deux échantillons contenaient même de l'endosulfan,

un pesticide interdit dans toute l'Union européenne.

Alors que l'ONG écologiste juge inacceptable les taux de pesticides contenus dans le raisin et réclame plus

de contrôles, les producteur s'insurgent contre la "présentation exagérée" de cette étude. « S'il est important

d'informer, il s'agit d'être vigilant sur le fond comme sur la forme. Il faut en finir avec les effets d'annonces,

mettant à mal des pans entiers des filières économiques » estime le Bâtonnier Patrick Gontard, qui défend les

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intérêts de la FNPRT. Pour ce problème de forme, les producteurs réclament à l'association écologiste

500 000 euros pour préjudice moral et financier.

Pour les écologistes, c'est la liberté d'expression qui est en jeu, les associations craignant pour leur droit à

soutenir les causes environnementales. Une pétition en ligne a été lancée par la MDRGF.

Pesticides : le point sur leur utilisation

Cet événement est l'occasion de revenir sur l'utilisation des pesticides. En France, selon un rapport du Sénat,

« l'agriculture est, de loin, le premier utilisateur de pesticides en France, puisqu'elle représente 90% des

utilisations totales ». Cependant, tous les aliments destinés à la consommation humaine ou animale dans

l'UE sont soumis à une limite maximale de résidus de pesticides (LMR) dans leur composition, soit une

limite par défaut de 0,01 mg/kg (limite fixée par Bruxelles au 1er septembre 2008). L'objectif est d'assurer

que les résidus de pesticides présents dans les aliments ne constituent pas un risque inacceptable pour la

santé. Or, ces LMR ne sont parfois pas respectées, comme en témoigne l'étude de la MDRGF.

Attention aux "cocktails" de pesticides

De même, si un aliment contient moins de pesticide que la limite autorisée, il est important de prendre en

compte l'association de plusieurs pesticides entre eux sur la santé : « Les substances actives sont prises en

compte une par une sans mesurer les effets des cocktails ingérés dans chaque aliment ou au cours de chaque

repas. Qui par exemple a évalué les effets des 16 résidus trouvés à des niveaux inférieurs aux LMR dans une

des grappes de raisin analysés dans notre étude ? Réponse : personne ! » déclare Nadine Lauverjat, Chargée

de mission au MDRGF.

Mais la situation devrait changer, grâce en partie à l'action des associations écologistes. « L'Agence française

de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) vient de démarrer une recherche sur les effets de ces cocktails de

pesticides à faible dose... ce qui est bien le signe qu'il y a lieu de s'y intéresser » précise Nadine Lauverjat.

Pesticides : des contrôles insuffisants

D'après Bruxelles, les exploitants, négociants et importateurs sont responsables de la sécurité des aliments et

donc du respect des LMR. Quant aux autorités des Etats membres, elles sont responsables du contrôle et de

l'application de ces valeurs limites.

Mais le budget alloué à ces contrôles est parfois limité : « La Direction générale de la concurrence, de la

consommation et de la répression des fraude (DGCCRF) analyse un certain nombre d'échantillons chaque

année mais ses moyens financiers sont faibles et le nombre d'analyses forcément réduit. Ainsi pour les

raisins en 2007, il y a eu à peine plus de 50 échantillons analysés » regrette Nadine Lauverjat.

Quelques conseils pour éviter les pesticides

En ce qui concerne le consommateur, il lui est impossible de savoir si le produit acheté contient plus de

pesticides que la limite fixée par l'Europe. Pour éviter de consommer des pesticides, préférez les produits

issus de l'agriculture biologique ou du moins, épluchez bien vos fruits et légumes. Quant au raisin et aux

fruits qui ne s'épluchent pas, rincez-toujours vos aliments à l'eau claire avant de les consommer.

Delphine Tordjman - Le 10 juin 2009

Des sites pour aller plus loin

Association Ensemble pour les Générations Futures

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II.15. Pesticides : une harmonisation européenne sous surveillance

L'Europe veut mieux contrôler l'utilisation des pesticides et leurs concentrations dans les produits

alimentaires. Mais comment s'inscrit cette règlementation européenne face aux lois françaises ? Cela

va-t-il renforcer la sécurité alimentaire ou au contraire la réduire ?... Le point avec Doctissimo.

Les limites maximales en résidus (LMR) de pesticides ont été créées pour renforcer la sécurité alimentaire et

protéger les consommateurs de chaque pays. Elles définissent le seuil autorisé de pesticides dans les produits

alimentaires (fruits et légumes, lait, viandes, etc.). Une réglementation européenne a été mise en place en

2005, afin d'harmoniser progressivement les LMR nationales à celles de l'Union européenne.

Mise en vigueur le 1er septembre 2008, cette récente réglementation a-t-elle amélioré la qualité alimentaire ?

L'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) estime que la nouvelle réglementation est

quasiment équivalente à l'ancienne réglementation française. Un avis qui ne fait pas l'unanimité.

Certains pays ne contrôlaient pas les pesticides

Les limites maximales en résidus, harmonisées aux 27 états membres de l'Union européenne, doivent

permettre aux consommateurs de l'Europe entière d'acheter des produits en toute confiance, dont le taux de

pesticides est automatiquement contrôlé. Avant cette harmonisation, chaque pays disposait de règles propres.

Certains Etats ne fixaient aucune limite à la présence de pesticides dans les produits alimentaires.

Mais désormais, les choses s'améliorent, comme en témoigne le rapport comparatif édité par l'Afssa. Il met

en avant l'existence d'un « réel changement concernant 155 substances qui n'avaient jusqu'à présent que des

LMR strictement nationales ». Depuis l'instauration de la réglementation européenne, l'Afssa a constaté une

augmentation du niveau des LMR dans 29,1% des cas et une diminution dans 34,1% des cas.

Ce qui fait dire aux experts que « l'ensemble de ces changements n'a que peu d'influence sur le niveau de

protection global ». Oui mais le hic, c'est que l'agence française a découvert plusieurs substances actives

potentiellement dangereuses présentes dans certains pesticides. Elle propose donc une réévaluation des LMR

pour les substances concernées, afin de mieux protéger les consommateurs et de limiter leur exposition à des

substances dont les effets ne sont pas encore bien connus.

Réévaluation pour les pommes et les courgettes

L'agence distingue trois cas de figure selon les substances :

Les pesticides pour lesquelles des données sont disponibles et en cours de réévaluation : Cette catégorie

regroupe 24 substances actives : l'Afssa dit avoir « pris en charge la synthèse des informations disponibles

au sein des 27 Etats Membres pour 24 substances actives qui vont prochainement être revues. Pour une

grande partie d'entre elles, le processus de réévaluation des LMR est en cours ». D'ailleurs, la

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réglementation en vigueur depuis septembre 2008 intègre un dispositif de réévaluation continue, qui a

vocation à améliorer sans cesse la protection du consommateur. Un avis partagé par Jean-Charles Bocquet,

président de l'UIPP, qui estime que « la nouvelle réglementation va dans le sens d'une sécurité accrue ».

Les pesticides qui ne devraient même pas exister puisque non autorisées en Europe : Mais les experts

ont découvert aussi d'autres substances actives qui ne sont pas autorisées dans l'Union européenne. Leur

présence dans les aliments contrôlés proviendrait d'une part d'une contamination environnementale et d'autre

part, de denrées alimentaires importées de pays qui ne font pas partie de l'Union européenne. Pour y

remédier, l'agence française souhaite proposer de nouveaux seuils réglementaires destinés à limiter la

contamination de l'environnement. L'Afssa travaille sur le sujet en collaboration avec l'Observatoire des

résidus de pesticides.

Les pesticides pour lesquels les risques sont bien connus : Parmi les nombreuses substances actives dont

les LMR devraient être réétudiées selon l'Afssa, deux en particulier sont pointées du doigt : le Pyrimicarbe et

le Formétanate. Le Pyrimicarbe, que l'on retrouve dans les pommes, est destiné à protéger les pommiers des

attaques des pucerons, au niveau des branches et du collet de l'arbre.

Le Formétanate, quant à lui, est un insecticide utilisé pour protéger les courgettes. Suite à des travaux, l'Afssa

estime que leur utilisation engendre un « risque théorique aigu pour la population française ». L'agence

donc a demandé à l'Autorité européenne pour la sécurité des aliments (EFSA) de réévaluer rapidement les

LMR de ces deux produits, compte tenu d'une très grande consommation en France.

Une harmonisation par le bas ?

Inquiètes de l'exposition croissante aux pesticides, les Organisations non gouvernementales "Natuur en

Milieu” et le réseau PAN Europe ont lancé une action en justice juste avant même la mise en place de la

nouvelle législation, en septembre 2008. « La Commission n'a pas rempli son obligation de fixer des limites

légales les plus basses possibles », déclarait à l'époque Elliott Cannell, coordinateur de PAN Europe.

Prenant l'exemple de la pomme, le président du Mouvement pour les droits et le respect des générations

futures (MDRGF), François Veillerette, expliquait à cette même période : « Lorsque la Commission

européenne fixe une LMR à 5 mg/kg pour le pesticide Diflubenzuron, les scientifiques de l'Autorité

européenne de sécurité des aliments (EFSA) fixent cette LMR à 0,35 mg/kg, afin d'exclure tout risque de

toxicité aiguë chez les plus grands consommateurs de pommes que sont les enfants. La Commission

européenne tolère un risque 14 fois supérieur aux seuils de l'EFSA ! ».

Une mise en garde qui fait aujourd'hui écho à l'interrogation de l'Afssa concernant le Pyrimicarbe, un an

après l'harmonisation européenne des limitations de résidus de pesticides.

A l'inverse, le directeur général de l'UIPP note que « de nombreux produits sont amenés à disparaitre du

marché de par cette nouvelle réglementation. Elle prévoit notamment des critères d'exclusion à l'obtention

d'une autorisation de mise sur le marché qui n'existaient pas auparavant. Il y aura donc moins de produits

phytosanitaires disponibles en France ».

Par ailleurs, cette nouvelle réglementation européenne rend nécessaire une réévaluation régulière tous les dix

ans. Une périodicité que certains jugent insuffisante… y compris l'Afssa qui souligne dans son rapport

l'importance d'instaurer un dispositif de réévaluation continue, pour améliorer sans cesse la protection du

consommateur.

Véronique Le Saux, le 5 novembre 2009

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Des sites pour aller plus loin

Le site de l'Afssa

Le site du MDRGF

Le site de l'UIPP

Le plan Ecophyto

Le Ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer

II.16. La sécurité sanitaire meilleure que jamais

Depuis 2008, une nouvelle réglementation européenne relative aux limites maximales de résidus est

entrée en vigueur. Est-elle à l’avantage du consommateur ou doit-il, au contraire, craindre pour sa

sécurité ? Jean-Charles Bocquet, directeur général de l’Union des industries de la protection de

plantes (UIPP) nous donne son avis.

Doctissimo : Quels sont les changements attendus par l'harmonisation européenne en matière de contrôle

des pesticides ?

Jean-Charles Bocquet : L'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) et la Commission

européenne ont d'ores et déjà harmonisé certaines limites maximales de résidus (LMR) pour qu'elles soient

toutes équivalentes dans l'ensemble des Etats membres. Pour l'instant, toutes les LMR nationales ont été

revues d'après les données disponibles sur le panier du consommateur européen, tout en continuant à garantir

sa sécurité bien évidemment.

Aujourd'hui, dans le cadre de la directive 91-414, tous les produits (principe actif et formulation) font l'objet

d'une évaluation nationale. En effet, les pesticides sont des produits particulièrement bien surveillés qui font

l'objet d'une réévaluation basée sur les dernières avancées scientifiques.

Mais la directive européenne 91-414 va se transformer en règlement en 2011 avec un durcissement des

critères d'évaluation. Par ailleurs, des critères d'exclusion vont être introduits, ce qui n'était pas le cas jusqu'à

présent. En pratique, cela signifie que les produits pour lesquels existe un risque maîtrisable ne seront pas

mis sur le marché. En particulier, si un produit présente des propriétés cancérigènes de niveau 2 ou s'il est

persistant dans l'environnement, il n'aura pas l'autorisation de mise sur le marché (AMM), nécessaire pour les

produits phytopharmaceutiques.

Doctissimo : Les limites maximales de résidus (LMR) permettent-elles de certifier que les agriculteurs

utilisent correctement les pesticides ?

Jean-Charles Bocquet : Les LMR sont là pour garantir que les agriculteurs ont bien travaillé, en respectant

le mode d'emploi de manière à rester largement en-dessous des limites autorisées. Or, tous les agriculteurs

sont des professionnels, régulièrement conseillés par les Chambres d'agriculture, des techniciens

indépendants et ceux des industriels. Le meilleur juge pour se rendre compte des bonnes ou mauvaises

pratiques, ce sont les évaluations faites par l'Afssa en complément des contrôles réguliers réalisés par les

autorités compétentes.

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Mais force est de constater qu'il y a encore des problèmes puisqu'on observe que dans près de 5% des cas, les

substances étudiées sont en proportion supérieure aux LMR. Face à ce phénomène, nous avons développé un

programme de sensibilisation et de formation pour rappeler l'importance des bonnes pratiques en insistant

notamment sur :

La date d'utilisation avant la récolte : si le produit est utilisé très peu de temps avant la récolte, il

est logique que sa concentration soit plus élevée ;

Le nombre de traitements qui dépend pour beaucoup du type de culture. En effet, certains fruits ou

légumes nécessitent une culture longue. C'est par exemple le cas de la pomme ou de la poire qui

poussent entre mai et septembre. Plus la culture est longue, plus les risques de maladies ou autres

sont élevés et donc, plus les traitements sont importants. C'est pour cela les pommes sont plus

souvent traitées.

Doctissimo : Est-ce que cette harmonisation européenne est une garantie supplémentaire pour les

consommateurs français ?

Jean-Charles Bocquet : Avec la directive 91/414 et le règlement 396/2005, la sécurité sanitaire est

meilleure que ce qu'elle a jamais été et la nouvelle réglementation va dans le sens d'une sécurité accrue.

D'après une récente réévaluation de l'Afssa, 80% des lots étudiés ont des LMR équivalents aux précédentes

évaluations, 10% ont augmenté et 10% ont baissé. Globalement, on est plutôt à l'équilibre, mais de nombreux

produits sont amenés à disparaitre (NDLR : que ce soit à cause des critères d'exclusion de la réglementation

européenne ou du plan Ecophyto).

Et cela peut avoir des répercussions économiques négatives. Car s'il y a moins de pesticides disponibles, les

agriculteurs auront peut-être plus de difficultés à produire abondamment. Si la production nationale est

réduite, nous serons dans l'obligation d'importer ces denrées, favorisant donc la dépendance par rapport à

d'autre pays producteurs.

Propos recueillis par Yamina Saïdj, le 17 novembre 2009

Des sites pour aller plus loin

Le site de l'Afssa

Le site du MDRGF

Le site de l'UIPP

Le plan Ecophyto

Le Ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer

II.17. La réduction des pesticides n'équivaut pas à une réduction des risques

Les pesticides, largement utilisés dans l'agriculture génèrent bien des inquiétudes de la part du

consommateur. Mise en œuvre du plan Ecophyto, affaire du chlordécone… sont autant de sujets dont

nous avons discuté avec Jean-Charles Bocquet, directeur général de l'Union des industries de la

protection de plantes (UIPP).

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Doctissimo : Etes-vous satisfait des mesures proposées dans le cadre du plan Ecophyto?

Jean-Charles Bocquet, directeur de l'UIPP : L'un des principaux objectifs de ce plan est d'arriver à réduire

de 50% l'utilisation des pesticides d'ici 2018, soit dans 10 ans environ. D'une part, cette réduction est, à notre

sens, un challenge difficile à atteindre. D'autre part, cet objectif ne nous semble pas particulièrement

pertinent. En effet, l'UIPP aurait préféré une réduction de ‘impact des pesticides plutôt qu'une simple

réduction de leur utilisation.

Entre 2000 et 2006, l'utilisation de pesticides a baissé de 30%, passant de 100 000 tonnes de substances

actives mises sur le marché en 2007 à environ 70 000 tonnes en 2006. Cette baisse s'est faite naturellement,

grâce à l'amélioration des produits disponibles et des pratiques des agriculteurs.

Par contre, le tonnage a augmenté en 2007 et en 2008, notamment à cause des mauvaises conditions

climatiques, particulièrement humides (cela favorise l'apparition de maladies sur les vignes et les céréales

notamment).

L'utilisation des pesticides a largement été raisonnée mais elle dépend pour beaucoup des conditions

climatiques et d'autres facteurs (par exemple, les jachères ont été remplacées en 2006 par des plantations de

blés, ce qui augmente de fait les surfaces agricoles cultivables nécessitant l'emploi de pesticides). Pour toutes

ces raisons, fixer un objectif de réduction d'utilisation des pesticides d'ici 10 ans semble très difficile à

atteindre.

Doctissimo : Si une réduction ne vous paraît pas pertinente, quelles mesures préconisez-vous ?

Jean-Charles Bocquet : La réduction de l'utilisation de pesticides n'équivaut pas nécessairement à la

réduction des risques. C'est pour cela qu'il nous paraît beaucoup plus important de jouer sur l'impact des

pesticides, tant au niveau environnemental que sanitaire. Pour évaluer ces impacts, des indicateurs bien

précis doivent être déterminés et mis en place collectivement, notamment pour suivre les pratiques.

Actuellement, il existe des indicateurs de pression (par exemple NODU, qui correspond à la quantité de

produits traités par dose de pesticides et IFT, l'indice de fréquence des traitements), qui doivent être

complétés par des indicateurs d'impact (NDLR : les indicateurs de pression correspondent à des indicateurs

simples, fondés sur les pratiques. L'indicateur d'impact ou de risque pourrait, quant à lui, estimer

quantitativement la réduction de l'impact des pesticides sur le plan environnemental et sanitaire).

Pour l'instant, certaines études indépendantes avancent de possibles indicateurs d'impact, qui ne sont pas

encore validées par les autorités compétentes. Pour arriver à un consensus autour de ces indicateurs, il

faudrait que toutes les parties soient réellement impliquées.

Doctissimo : Le plan Ecophyto encourager également le recours à des méthodes alternatives. Un nouveau

pic contre les pesticides chimiques ?

Jean-Charles Bocquet : Nous parlons plus volontiers de "méthodes complémentaires" dans la mesure où ce

sont des méthodes qui viennent compléter les méthodes dites chimiques. Nous travaillons également

beaucoup sur ce sujet. Par exemple, sur les 19 adhérents de l'union, 16 fabriquent des produits utilisables

pour l'agriculture biologique. Par ailleurs, les industriels ont récemment développé des produits innovants

pour compléter l'offre disponible. La confusion sexuelle en est un bon exemple : le principe est de réduire les

dégâts de chenilles sur les cultures (surtout vignes et pommes) en limitant la reproduction des papillons

concernés.

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Pour ce faire, les phéromones émises par les papillons femelles pour attirer les mâles ont été isolées dans un

premier temps. Puis, ces phéromones sont ensuite reproduites de manière synthétique. Enfin, le produit à

base de phéromones féminines est libéré dans les cultures via un certain nombre de diffuseurs. Désorientés,

les papillons mâles ne peuvent plus trouver leurs femelles et comme ils ne s'accouplent pas, les œufs ne sont

pas fécondés, et n'éclosent pas. Les papillons s'éloignent donc des cultures. Nous avons passé beaucoup de

temps à travailler et à développer ce concept.

Nous restons convaincus de l'utilité de ce genre de produits mais pas de leur exclusivité par rapport aux

produits chimiques classiques. Il est possible d'utiliser les deux types de produits à certains moments pour de

meilleurs résultats. Si on veut s'inscrire dans le progrès, il ne faut pas exclure d'emblée les produits

chimiques.

Doctissimo : En septembre 2007, le chlordécone largement utilisé aux Antilles est accusé d'augmenter les

risques de cancer. Après de tels épisodes, comment rassurer les consommateurs sur les pesticides décriés

par de nombreuses études scientifiques ?

Jean-Charles Bocquet : Le chlordécone est un pesticide organochloré. Il a été interdit dans les années 1990

mais on continue d'en trouver des traces dans le sol. En ce qui concerne le lien entre la consommation

d'aliments contenant du chlordécone et l'apparition de cancer de la prostate, une étude de l'InVS a affirmé

qu'il n'y avait pas de corrélation. C'est le Pr. Belpomme qui avait lancé cette alerte, qui semble donc, pour le

moment injustifiée. Néanmoins, nous nous devons de respecter les lanceurs d'alerte. Il en faut. Nous en

avons besoin.

En dehors du risque sanitaire, l'affaire du chlordécone démontre des conséquences environnementales

puisqu'on a constaté la contamination des sols avec des produits persistants. D'ailleurs, l'Agence française de

sécurité sanitaire des aliments (Afssa) a travaillé localement pour revoir les LMR, revoir les pratiques, etc.

Plus largement, l'UIPP est un acteur volontaire pour participer à des études épidémiologiques afin de

déterminer les effets des pesticides sur la santé. Pour l'instant, on n'a pas pu mettre en évidence une

corrélation entre l'exposition à des pesticides et l'apparition de maladies.

Propos recueillis par Yamina Saïdj, le 9 novembre 2009

Des sites pour aller plus loin

Le site de l'Afssa

Le site du MDRGF

Le site de l'UIPP

Le plan Ecophyto

Le Ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer

II.18. Pesticides : le monde agricole vigilant

Les agriculteurs sont souvent accusés d'utiliser ces pesticides à tort et à travers. Pourtant, les risques

sanitaires liés à l'utilisation de ces substances sont selon Jean-Alain Divanac'h, au coeur de leurs

préoccupations. Vice-président national des Jeunes Agriculteurs (CNJA), et responsable du dossier

environnement, il nous parle de la gestion du problème aujourd'hui.

Doctissimo : Y a-t-il une utilisation abusive des pesticides par les agriculteurs ?

Jean-Alain Divanac’h : Non. Les agriculteurs utilisent des pesticides comme tout le monde utilise un

médicament ou prend une aspirine : c’est un remède qui permet de lutter contre des parasites, des plantes,

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des maladies et autre insecte. C’est un progrès certains en agriculture, qui a permis de faciliter le travail des

agriculteurs. Vous savez, les pesticides sont des produits extrêmement chers, notamment parce qu’il existe

peu de fabricants. Et l’agriculteur doit gérer son entreprise.

Aussi il doit utiliser la bonne dose, au bon moment. Et n’oubliez pas que l’agriculteur est le premier à

manger ce qu’il produit ! Sans compter que lors de l’épandage, il est de fait exposé aux produits et aux

risques éventuels. Il ne peut donc pas se permettre de faire n’importe quoi. Les producteurs de fruits et

légumes sont les plus sensibles à cette problématique et certainement les plus vigilants. Car leur production

arrive directement dans l’assiette du consommateur.

Doctissimo : Si les agriculteurs sont vigilants sur les doses, font-ils attention aux produits utilisés ?

Jean-Alain Divanac’h : Il y a au niveau européen une révision régulière des molécules autorisées. Il y a

d’ailleurs une nouvelle phase d’homologation en cours et je crois que plus de 400 molécules vont être

retirées du marché. D’une part, certaines sont trop anciennes et les fabricants ne souhaitent plus les exploiter,

donc ils ne leur font pas repasser l’homologation, d’autre part, certains produits ne répondent pas aux

nouvelles normes. Les produits commercialisés répondent ainsi à des règles strictes.

Doctissimo : Mais il existe d’autres moyens que les pesticides pour lutter contre les nuisibles.

Jean-Alain Divanac’h : Certes, il existe des moyens mécaniques pour lutter contre certains nuisibles. Ils

sont d’ailleurs utilisés par la filière biologique. Mais les résultats sont plus ou moins bons et la persistance

dans le temps est aléatoire. Mais il ne s’agit pas uniquement d’une question de production, mais aussi de

sécurité pour le consommateur.

Des substances telles que des mycotoxines produites par des champignons microscopiques qui se

développent à la surface des fruits et légumes peuvent être très dangereuses. L’absence de traitement peut

induire un risque supplémentaire, sauf si la consommation se fait rapidement, c'est-à-dire si le circuit est

court et qu’il y a peu de conservation.

De plus, certaines plantes peuvent être nuisibles pour les animaux qui font la pâture et justifient l’utilisation

d’herbicide. Sans parler du fait que personne n’achèterait aujourd’hui des fruits ou des légumes susceptibles

de contenir des vers ! Un autre moyen non chimique est également répandu : les oligo-éléments. Mais ceux-

ci, à l’image du cuivre, utilisés à hautes doses et de manière répétée peuvent entraîner des "blocages" des

sols.

Doctissimo : Vous êtes vice-président de la structure "Jeunes Agriculteurs" en France. Quelle est la

vision des jeunes agriculteurs sur ce problème ?

Jean-Alain Divanac’h : Nous travaillons beaucoup sur l’agriculture raisonnée. C’est-à-dire que l'agriculteur

se pose plus de question sur ses pratiques, les remets en cause. Nous avons d’ailleurs pris conscience du fait

que dire respecter des normes strictes, c’est bien, mais le prouver c’est mieux. C’est pourquoi nous sommes

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engagés dans une démarche de certification et de traçabilité. Il y a ainsi plus de transparence et une

sécurisation accrue. Pour les consommateurs, qui recherchent à la fois un prix abordable et des gages de

qualité, l’agriculture raisonnée répond bien à leurs attentes.

Doctissimo : Peut-on donc dire aujourd’hui que les fruits et légumes sont sûrs ?

Jean-Alain Divanac’h : Une étude de la Direction générale de la consommation, de la concurrence et de la

répression des fraudes (DGCCRF) a été réalisée sur 3000 échantillons de fruits et légumes. Sur la moitié,

aucun résidu chimique n’a été retrouvé. Sur 48%, on a trouvé des taux en dessous des seuils préconisés.

Enfin, les 2% restants flirtaient avec la limite, en restant en dessous. Cela est donc rassurant. Mais il est vrai

que des problèmes subsistent : il y a notamment un manque d’harmonisation sur les seuils et les produits

autorisés. Ainsi, des pesticides interdits en France sont utilisés en Belgique ou en Italie. Sans parler des fruits

et légumes importés d’en dehors des limites de la communauté européenne.

Doctissimo : Les partisans des OGM avancent que ces plantes permettent de diminuer l’utilisation de

pesticides. Etes-vous sensible à cet argument ?

Jean-Alain Divanac’h : Les agriculteurs sont bien sûr intéressé par tout moyen de limiter l’impact sur

l’environnement, d’améliorer les conditions de travail et de réduire les coûts. Mais concernant les OGM, la

question ne se pose pas pour l’instant. Tant que la réaction du consommateur sera défavorable et que les

scientifiques ne pourront nous rassurer sur l’absence de risques, ils ne seront pas d’actualité. Mais la culture

de plantes génétiquement modifiées est une réalité dans de nombreux autres pays, et les OGM sont de toute

façon dans notre assiette.

Propos recueillis par Alain Sousa

III. Les catastrophes écologiques

Si l’homme craint souvent les catastrophes naturelles, il est aussi responsable de désastres pour

l’environnement. L’exemple le plus frappant est celui de la Mer d’Aral, qui a pratiquement disparu.

Quels sont les sites les plus pollués en France et dans le monde ? Quelles sont les menaces qui pèsent

sur la planète ? Tour du monde des points noirs de l’écologie.

Les principales catastrophes écologiques

On ne compte plus malheureusement les catastrophes écologiques, en France et dans le Monde. Quels sont

les principaux désastres pour l’environnement ? Qui sont les responsables ? Comment les éviter pour

préserver la Terre ? Etat des lieux et éléments de réponse.

III.1. Qu'est-ce qu'une catastrophe écologique ?

Nous vivons entourés de catastrophes écologiques... depuis la nuit des temps. L'apparition même de

l'espèce humaine serait due à l'une d'elles ! Mais lorsque celles-ci dépassent un certain seuil et une

certaine fréquence, et surtout sont directement imputables à l'homme, il y a de quoi s'inquiéter...

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Au sens strict, une catastrophe écologique (ou environnementale) est un événement mettant en danger un ou

plusieurs écosystèmes. Son origine n'est pas forcément humaine : en font partie, par exemple, les grandes

vagues d'extinction du vivant sur Terre avant l'apparition de l'homme. Suite à des accidents dont les

scientifiques discutent encore la nature (bombardement de météorites, activité volcanique, autre ?), les

espèces animales et végétales peuplant notre planète ont, à cinq reprises déjà, subi une baisse dramatique de

leurs effectifs (plus de 90% de disparitions dans certains cas).

Depuis l'apparition de l'espèce humaine, celle-ci a également dû composer avec des phénomènes analogues,

d'ordre climatique notamment (périodes glaciaires, désertification...). Selon de nombreux paléontologues,

l'émergence même du groupe de simiens auquel nous appartenons serait en partie due à l'une de ces

catastrophes : l'ouverture d'une faille (rift) dans l'est africain aurait favorisé la savane au détriment de la forêt,

et provoqué l'apparition de la bipédie chez nos lointains ancêtres.

Ce qui est nouveau, cependant, c'est l'implication directe d'une espèce dans la plupart des crises écologiques

que traverse actuellement le monde, et l'ampleur de celles-ci.

Quand le plomb fait chuter l'Empire romain

Lorsqu'on évoque le déclin de la civilisation romaine, il est fréquent d'évoquer divers évènements : la

décadence des institutions, une trop grande extension géographique, les invasions barbares... Mais on pense

plus rarement à incriminer un autre facteur potentiel de cette décadence, à savoir la présence de plomb dans

les canalisations et la vaisselle employée par les romains. En effet, l'ingestion de ce métal peut provoquer une

maladie appelée saturnisme se traduisant par diverses pathologies atteignant le système digestif, le système

nerveux, voire des troubles de la croissance chez les enfants.

Or des prélèvements effectués dans les glaces du pôle Nord ont fait apparaître des teneurs en plomb

anormalement élevées durant cette période. Les élites romaines auraient-elles été atteintes de saturnisme

chronique, entraînant mauvaises décisions et incapacité à gouverner l'Empire ? C'est l'hypothèse avancée par

certains historiens...

Autre exemple fameux de catastrophe environnementale ayant entraîné la disparition d'une civilisation toute

entière, celui de l'Ile de Pâques. Cette fois, c'est la déforestation qui serait en cause. En effet, les tribus

peuplant cette île du Pacifique auraient massivement puisé dans les forêts environnantes pour transporter les

statues monumentales érigées sur ses côtes. Dès lors, le bois n'a plus été disponible pour construire des

pirogues, et les nombreuses espèces d'oiseaux qui peuplaient l'île autrefois se seraient raréfiées...

La thèse est défendue notamment par le biologiste Jared Diamond dans son ouvrage Effondrement, comment

les civilisations décident de leur disparition ou de leur survie. L'auteur y cite d'autres cas de chutes

spectaculaires liées à la déforestation, telles celle des Mayas ou des Vikings. Mais aussi des civilisations qui

ont su tirer le meilleur parti des ressources limitées de leur environnement, comme les Islandais ou les

Japonais.

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Une pression insoutenable sur l'environnement ?

Aujourd'hui, toutefois, la situation est sans précédent dans l'histoire, tant par l'ampleur que par la diversité

des atteintes portées à l'environnement. L'accroissement des gaz à effet de serre fait craindre une crise

systémique globale, entraînant sécheresses dans certaines zones géographiques, inondations dans d'autres,

disparition de nombreuses espèces vivantes, etc.

D'autres atteintes à l'environnement, moins médiatisées mais tout aussi préoccupantes, peuvent être citées

comme la concentration croissante de produits chimiques dans le sol, l'eau, l'air que nous respirons. Celle-ci

n'est sans doute pas étrangère à l'accroissement récent des cancers (+ 63% en 20 ans).

Plus inquiétant encore, à partir d'un certain niveau de gravité, les catastrophes écologiques interagissent entre

elles. L'abandon des CFC (chlorofluorocarbones) présents notamment dans les aérosols semblait ainsi devoir

permettre de résorber le trou apparu dans la couche d'ozone et qui protège notre planète des effets

indésirables du rayonnement solaire. Aujourd'hui, de plus en plus de scientifiques font ressortir un lien entre

l'élargissement de ce trou et le réchauffement climatique.

Les catastrophes écologiques sont ainsi la conséquence inéluctable d'un environnement mouvant, ce qui est

la définition même de la vie. Mais lorsque leur portée et leur fréquence dépasse certains seuils, un

phénomène d'enchaînement risque de se déclencher... avec des conséquences qu'on a encore du mal à

mesurer mais dont chaque information récente confirme la gravité.

Ecoulements de boue toxique : Catastrophe écologique en Hongrie

Suite au déversement de plus d’un million de mètres cubes d’une boue rouge, résidu de la production

d’aluminium, l’état d’urgence a été déclaré dans trois départements du sud-ouest de Budapest. Les raisons

pour lesquelles le réservoir de la société de production d’aluminium (MAL) contenant ces déchets toxiques

s’est fendu, ne sont pas élucidées pour le moment. Face à ce qui pourrait être la pire catastrophe écologique

qu’ait jamais connue la Hongrie, les secours s’activent pour venir en aide aux sinistrés et pour nettoyer les

zones polluées.

Bertrand Mauvy

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III.2. L’huile de palme à l’origine d’un désastre écologique

Très prisée par l’industrie occidentale, la surexploitation de l’huile de palme est à l’origine d’un

véritable désastre écologique : réduction de la biodiversité, pollution des eaux et de l’air, extinction des

orangs-outangs… Le point sur ces palmiers qui font tout sauf rêver.

Utilisée dans l’alimentation, les produits cosmétiques et les agrocarburants, l’huile de palme a du succès

auprès des industriels qui sélectionnent ce produit bon marché au détriment d’autres huiles végétales.

Résultat : on retrouve de l’huile de palme dans un produit de grande consommation sur 10. Or, l’exploitation

massive des palmiers à huile est plus que néfaste pour l’environnement…

Quand la forêt tropicale disparait…

Les plantations industrielles de palmiers à huiles se situent pour la plupart en Asie du Sud-Est (Malaisie et

Indonésie) mais pas seulement : l’Afrique centrale (Cameroun, République du Congo) et l’Amérique du Sud

(Colombie) produisent également de l’huile de palme. Pour répondre à la demande croissante des industriels

en huile de palme, certains exploitants n’hésitent pas à détruire les forêts tropicales.

Déboisement par le feu créant des problèmes respiratoires aux autochtones, exploitation industrielles de

palmiers à huile, construction de routes pour accéder aux exploitations… sont autant d’actions qui

contribuent à la déforestation. Or lorsque l’équilibre de la forêt est menacé, c’est l’ensemble de l’écosystème

qui est danger.

Destruction de la biodiversité

Raser des forêts naturelles pour planter des palmiers à huiles est devenu la priorité des industriels qui cherche

à produire de plus en plus d’huile à des prix de plus en plus bas. Cette aberration écologique va totalement à

l’encontre du développement durable !

La destruction de la biodiversité a un effet boule de neige qui va jusqu’à toucher la santé des populations

locales. « A l’état naturel, la forêt fournit des services essentiels : elle régule l’humidité du climat, offre de la

nourriture mais aussi des soins aux populations locales qui utilisent les plantes comme remède médicinal »,

explique Sylvain Angerand, spécialiste des Forêts à l’association Les Amis de la terre.

Pollution atmosphérique et aquatique

La déforestation est à l’origine d’un cinquième environ des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Plus

d’un million d’hectares de forêt, surtout de forêt tropicale humide, sont détruits chaque mois, soit

l’équivalent de la taille d’un terrain de football toutes les deux secondes. Principalement en raison des feux

de forêt, l'Indonésie est devenu le troisième producteur de CO2 de la planète après les Etats-Unis et la Chine.

Par ailleurs, qui dit culture intensive de palmiers à huile dit souvent engrais chimiques et pesticides.

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Ces composants se retrouvent immanquablement dans les rivières alentours. « La pollution de l’eau a un

impact sur la disparition des poissons et prive alors les populations de nourriture », souligne Sylvain

Angerand.

Extinction des orangs-outans

Vivant dans les forêts de Bornéo (Indonésie) et Sumatra (Malaisie), l’orang-outan est l’un des animaux les

plus "intelligents" de la forêt. Mais en raison de la monoculture de palmier à huile, l’animal voit son espace

de vie naturel décimé, hectare après hectare. D’après l’association les Amis de la Terre, « certains planteurs

qui considèrent l’orang-outan comme un ennemi pour les plantations ne se gênent pas pour les attaquer et

les torturer avant de les tuer ».

Vers une production durable… contestée

Bien sûr, l’alerte a été donnée mais les mesures nécessaires tardent à venir. Ainsi une "Table ronde pour la

production durable d'huile de palme" a été fondée par le Fonds mondial pour la nature (WWF), afin de réunir

les producteurs et acteurs majeurs de l’exploitation d’huile de palme à travers le monde.

Mais des associations contestent certaines actions de la RSPO (Roundtable for Sustainable Palm Oil) : « Sur

le papier, des entreprises soutiennent le développement durable mais à côté, cela ne les empêche pas de

contourner leurs engagements et de poursuivre des coupes d’arbres de manière illégales », poursuit Sylvain

Angerand.

Par ailleurs, les entreprises qui se mobilisent pour acheter une huile de palme "plus respectueuse de

l’environnement" ne respectent pas forcément leurs engagements. D’après un classement initié par WWF,

seulement 10 des 59 entreprises évaluées tiennent leurs engagements à acheter et à utiliser de l'huile de

palme durable (CSPO).

Des progrès restent donc à faire du côté des entreprises mais aussi des consommateurs. Comme l’explique le

Docteur Chevallier, médecin nutritionniste, auteur du livre « Les 100 meilleurs aliments pour votre santé et

la planète », « il est impossible d’être en bonne santé sur une planète malade »…Réduire votre

consommation d’huile de palme est une bonne idée pour votre santé comme pour la planète. Et si vous vous

mettiez à lire les étiquettes ?

Delphine Bourdet, le 20 janvier 2009

III.3. Le syndrome du Titanic vu par Pascal Husting, directeur général de Greenpeace France

Catastrophiste pour les uns, salvateur pour les autres… Le syndrome du Titanic de Nicolas Hulot et

Jean-Albert Lièvre ne laisse pas indifférent. Que pensez du film de l’initiateur du Pacte écologique ?

Directeur général de Greenpeace France, Pascal Husting nous livre ses impressions.

Doctissimo : Quelle est votre impression générale sur le syndrome du Titanic ?

Pascal Husting : Connaissant Nicolas Hulot, je trouve que ce film illustre bien son cheminement personnel.

De l'ode à la beauté de la nature, qu'il célébrait via son émission Ushuaïa, il est passé à un constat beaucoup

plus sombre, voire pessimiste, sur l'état de la planète. C'est pourquoi ça ne m'a pas étonné de voir autant

d'images sur le milieu urbain, ce qui n'était pas vraiment le cas dans ses reportages ou ses films précédents.

Ce film se caractérise également par le sentiment d'une urgence absolue.

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Enfin, le film est très intéressant d'un point de vue artistique. J'ai beaucoup aimé son côté expérimental qui

s'apparente plus volontiers à une œuvre d'art moderne qu'à un film grand public.

Doctissimo : Quels est selon vous le principal message de ce film ?

Pascal Husting : Les commentaires, de et écrits par Nicolas Hulot, sont axés sur la nécessité de prendre en

compte l'urgence de la situation. Comme il parle à la première personne, il parle évidemment beaucoup de

lui-même, de son évolution, de sa vision de notre planète. Il est d'ailleurs bien conscient d'avoir la chance et

le privilège, grâce à son parcours professionnel et personnel, d'avoir pu faire ce cheminement et d'avoir

accéder à cette prise de conscience.

Le syndrome du Titanic souligne que nous sommes dos au mur, à un carrefour des crises écologiques,

sociales, alimentaires, etc. Il nous dit que la situation est grave et que nous devons tous agir à la hauteur des

enjeux. L'heure n'est plus aux retouches cosmétiques de-ci de-là, nous sommes obligés de passer par ce qu'il

appelle lui-même une "révolution culturelle".

Doctissimo : Diamétralement opposé dans le ton à Home, la tonalité sombre de ce film facilite-t-elle selon

vous la prise de conscience ?

Pascal Husting : En fait, ces deux films sont complémentaires dans la mesure où ils ciblent deux publics

bien distincts :

1. Home s'adresse à un plus large public, à ceux qui en sont aux balbutiements d'une réelle prise de

conscience quant au changement climatique. Il parle plus facilement à ceux qui en sont encore à se

demander pourquoi il faut se mobiliser pour changer les choses ;

2. Nicolas Hulot va plus loin que Yann Artus-Bertrand et plus loin que lui-même n'a jamais été. Il met

en jeu sa popularité, et ce, de manière très intelligente, pour faire passer un message volontairement

alarmiste. Il se met en marge de la société justement pour mieux la dénoncer en dressant un constat

sombre sur l'état de notre planète.

Doctissimo : Pensez-vous que ce film place l'écologie dans une vision politique plus que dans une vision

strictement "écolo-écologique" ?

Pascal Husting : Nicolas Hulot change effectivement de position à l'égard de l'écologie. Il a franchi un

palier en termes d'engagement. Maintenant, il ne centre plus son propos sur la Nature mais sur les hommes,

et en particulier sur les hommes dans leur environnement.

Il ne s'agit plus de sauver les baleines ou une espèce rare d'oiseau péruvien. Non, c'est bien de la survie des

hommes dont il s'agit. Il nous montre à quel point nous sommes obnubilés par la richesse matérielle.

L'exemple même des pays du Nord montre que cette richesse-là n'apporte aucune plus-value en termes de

bien-être. D'ailleurs, son "nouveau" positionnement dans les rapports Nord- Sud ressort beaucoup dans le

film. En fait, il a recentré son engagement d'écologiste sur le volet humain.

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Par contre, il ne propose quasiment pas de solutions aux problèmes qu'il met en évidence, ce que l'on attend

généralement d'un écologiste militant. Mais ça n'est peut-être pas à lui de proposer ces solutions. C'est avant

tout aux instances politiques et économiques de prendre leurs responsabilités.

Doctissimo : Pensez-vous qu'il y ait conflit d'intérêt entre le financement du film (notamment par la

SNCF et EDF) et son propos ?

Pascal Husting : C'est un sujet un peu délicat puisque là, nous sommes en opposition avec Nicolas Hulot.

En effet, Greenpeace refuse totalement des subventions des pouvoirs publics ou des entreprises. Mais je n'ai

pas l'impression que Nicolas Hulot ait été censuré ou se soit laissé censurer. C'est du moins mon point de

vue. Certes, la SNCF finance son film mais je ne crois que ça l'ait influencé de quelque manière que ce soit.

Ca n'est pas vraiment étonnant, ni exceptionnel, cela se passe ainsi depuis fort longtemps. Depuis la

renaissance italienne, des mécènes financent des artistes qui vont parfois à l'encontre des intérêts financiers

de leurs généreux donateurs…

Les OGM ou le nucléaire sont d'autres sujets sur lesquels nous avons des points de vue différents. Là encore,

j'ai l'impression que petit à petit, il évolue et réoriente son positionnement. Ca n'est pas tant que nous soyons

opposés au progrès technologique, bien au contraire, mais à notre sens, il doit servir à réhabiliter le social

plutôt que les modèles économiques.

Propos recueillis par Yamina Saïdj, le 7 octobre 2009

Des sites pour aller plus loin

Le site du film le Syndrome du Titanic

Visionner Home sur YouTube

Le site de Greenpeace France

Présent à Copenhague pour l'avenir (site du ministère de l'Ecologie, de l'Energie et du développement durable et de

la Mer)

Pétition des ONG en vue de Copenhague 2009

Protéger la terre • Catastrophes écologiques

III.4. Les sites les plus pollués dans le monde et en France

Dresser la liste des sites les plus pollués dans le monde : c’est la tâche à laquelle s’est attelé le

Blacksmith Institute, une ONG américaine fondée en 1999. Un catalogue qui donne le frisson et

propose un recensement impressionnant de différents types de catastrophes environnementales. Mais

au fait, qu’en est-il en France ?

En 2007, le Blacksmith Institute a publié une version actualisée de son Top 10 des sites les plus pollués au

monde, assorti d'un nouveau classement élargissant à trente sites cette recension. Le classement comptabilise

tous les types de pollution, qu'il s'agisse du sol, de l'air, du nucléaire, etc. Il s'appuie sur le travail d'un groupe

d'experts internationaux (universitaires, représentants d'ONG) et repose sur la prise en compte de deux

critères principaux : le degré de toxicité et le nombre de personnes touchées.

Premier constat : aucun de ces sites ne se situe dans les grands pays développés, mais plutôt, en règle

générale, dans des Etats en phase d'industrialisation accélérée ainsi que dans ceux qui sont apparus à la suite

de l'éclatement de l'URSS. Dans le Top 30, on trouve ainsi six sites en Russie et quatre autres dans ses ex-

satellites (Azerbaïdjan, Kazakhstan Kirghizistan, Ukraine). Le « podium » de ce classement est complété par

la Chine (six sites pollués) et l'Inde (quatre).

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Autre zone géographique particulièrement touchée, l'Amérique latine, avec deux sites au Pérou et un dans

chacun des pays suivants : Argentine, Equateur, Mexique et République Dominicaine. Enfin, l'Afrique

(Zambie, Kenya) et l'Asie (Bengladesh, Philippines) complètent le tableau.

Des endroits où il ne fait pas bon vivre

Quelques exemples pris dans le Top 10 du Blacksmith Institute donneront une meilleure idée de l'ampleur

des dégâts. Tous présentent un point commun : leur état résulte d'un développement non maîtrisé de l'activité

industrielle, avec de lourdes conséquences à long terme pour la santé humaine et l'environnement.

Le site le plus fameux de la liste (et sans doute le seul connu, hormis des spécialistes) est celui de

Tchernobyl, en Ukraine. Plus de vingt après, l'accident nucléaire du 26 avril 1986 continue d'exercer ses

effets négatifs. Une zone de trente kilomètres autour de la centrale désaffectée reste inhabitable. 5,5 millions

de personnes au minimum ont été touchées, et en attendant la pose d'un nouveau sarcophage en 2012, la

menace d'un nouvel accident plane toujours sur la région.

Egalement situé sur les territoires de l'ex-URSS, mais en Russie cette fois, Dzerjinsk est un ancien centre de

production d'armes chimiques. La ville possède des taux de contamination chimique 17 millions de fois

supérieurs aux limites sanitaires. Le taux de mortalité y est plus de deux fois supérieur à la natalité.

A Linfen, en Chine (province du Shanxi), l'industrie charbonnière intensive et sans contrôle a provoqué une

véritable épidémie d'arsenicose, suite à la présence d'arsenic dans l'eau potable. Plus de la moitié de l'eau bue

par les 3 millions d'habitants présenterait d'importants dangers pour la santé.

A Sukinda, en Inde, l'une des plus grandes mines de chrome à ciel ouvert de la planète déverse ses déchets

dans les rivières alentour. Un quart des habitants des villages environnants en subiraient les conséquences

sanitaires directes.

La France pas épargnée ?

En comparaison, un pays comme la France paraît souffrir de maux bien moindres. Mais elle n'est pas

épargnée pour autant. En l'absence de classement scientifique regroupant les différents types de pollution, il

est nécessaire de s'appuyer sur des données parcellaires.

Ainsi, l'Etat aurait recensé plus de 250 000 anciens sites industriels ayant accueilli une activité polluante.

Mais cela ne signifie pas que tous soient atteints, ni au niveau de dangerosité évoqué dans les cas précédents

! Toutefois, près de 4000 sites ont déjà fait l'objet d'une action de dépollution.

Géographiquement, ces sites se concentrent dans d'anciennes régions de forte activité industrielle, comme le

Nord-Pas-de-Calais, le Rhône-Alpes ou l'Ile-de-France. Les prélèvements effectués dans ces sols donnent

des résultats parfois inquiétants : on y trouve des hydrocarbures, des solvants, du plomb, de l'arsenic, du

plomb ou du cadmium à des taux de concentration élevés.

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Certains sites ont d'ailleurs fait récemment la une de l'actualité : l'Institut national de veille sanitaire vient de

publier une étude sur la contamination à l'amiante d'habitants d'Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis)

installés près d'une ancienne usine de broyage.

Autre alerte majeure, depuis août 2007, la consommation de poisson pêchés dans le Rhône est interdite, suite

à une pollution massive aux PCB, des dérivés chimiques cancérigènes. Et l'Ifen (Institut français de

l'environnement) a remis en janvier 2008 un rapport accablant sur l'état du réseau hydrographique hexagonal

: neuf cours d'eau sur dix seraient contaminés par des pesticides… De quoi s'interroger sur l'état véritable de

notre environnement... et renforcer les actions visant à restaurer celui-ci.

Bernard Rastoin

III.5. Désertification : et si ce n'était pas inéluctable ?

Partout dans le monde, le désert avance. Un phénomène qui n'est pas lié qu'aux activités humaines,

mais que celles-ci contribuent à aggraver. Avec des conséquences lourdes tant pour les habitants des

régions concernées que pour leur environnement. Et un constat : pour endiguer sa progression, mieux

vaut effectuer de la prévention que réparer après coup les écosystèmes menacés...

Les déserts arides couvrent 20% de la surface de la planète. En y ajoutant les zones semi-arides, cela

correspond à un tiers des terres émergées. Ces régions sont pour la plupart situées dans une bande étroite

entre les tropiques du Cancer et du Capricorne, du fait notamment des hautes pressions atmosphériques qui y

règnent et contribuent à réduire les précipitations.

Or ces zones ne cessent de s'étendre, et ce quelles que soient les parties du globe concernées. Le cas le plus

connu est celui du Sahel, frappé par une grave sécheresse depuis la fin des années 1960. Mais c'est loin d'être

le seul : au nord de la Chine, le désert s'étend sur un tiers du pays et progresse chaque année de 2 500 km2.

Au cœur de l'Asie centrale, le lac d'Aral, autrefois l'une des plus grandes étendues d'eau intérieures au

monde, est au bord de la disparition. En 2002, une sécheresse persistante a obligé l'Australie à importer du

blé en catastrophe pour la première fois depuis 200 ans. On pourrait multiplier les exemples en Inde, en

Amérique du Nord ou du Sud, et même en Europe (Grèce, Espagne...).

Le problème est jugé si grave qu'il a donné lieu à la signature d'une convention spécifique au Sommet de la

Terre à Rio en 1992. Mais plus de quinze ans après, celle-ci reste en panne, faute de ressources financières et

d'accord sur les moyens de lutte...

Des causes multiples, des conséquences dramatiques

Difficile de démêler, dans ce processus, les causes naturelles de celles qui sont imputables à l'activité

humaine. La sécheresse au Sahel a d'abord eu pour origine une baisse prolongée de la pluviométrie, mais

l'état des sols pourrait avoir accentué celle-ci. La surexploitation des terres et des ressources hydriques, le

déboisement, ont aussi exercé leur influence néfaste.

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L'épuisement des ressources naturelles est encore plus manifeste dans le cas de la mer d'Aral, dont les eaux

ont été détournées pour venir abreuver des champs de coton en plein désert. Mais quelle que soit la région

concernée, l'enchaînement est le même : un accroissement de la pression démographique entraînant celui de

l'activité agricole, le rendement des sols qui décline, les arbres abattus pour pratiquer des cultures de brûlis,

le vent et l'eau qui accentuent l'érosion des terres désormais à nu, le sel qui s'accumule à leur surface jusqu'à

les rendre stériles...

De ce cercle vicieux, l'homme n'est sans doute pas le seul responsable. Mais il contribue à l'aggraver, voire à

l'enclencher, par une gestion inappropriée des ressources. Avec des conséquences dramatiques non

seulement pour les zones touchées, mais aussi pour l'ensemble de la planète. Car si 40% des terres arables

dans le monde pourraient être atteintes par la désertification dans un avenir proche, celle-ci pousse également

à la hausse les marchés alimentaires mondiaux, tout en dispersant des flots de réfugiés à travers le globe...

sans oublier la perte de la biodiversité et l'accentuation du réchauffement climatique.

Prévenir plutôt que guérir

Pour sortir ce cercle vicieux, de multiples approches ont été essayées. Les experts s'accordent désormais sur

un point : il est plus facile et moins coûteux de prévenir le phénomène, plutôt que de tenter de rétablir des

équilibres une fois qu'ils sont rompus.

Cela passe par de multiples actions, à la fois en direction de l'écosystème et des pratiques agricoles. La

plantation de « ceintures vertes » (rangées d'arbres pour empêcher l'avancée des dunes) paraît indispensable.

Ce reboisement contribue aussi à mieux fixer les sols, limitant ainsi le ruissellement. Mais il n'est efficace

que s'il s'accompagne d'une modification profonde des techniques de culture : gestion raisonnée des

ressources en eau, choix de semences adaptées, redécouverte de pratiques ancestrales...

De plus, cela suppose de laisser aux équilibres naturels le temps de se rétablir. Ce que les paysans locaux,

pressés par les contraintes de la subsistance, ne peuvent souvent pas se permettre. La solution passe peut-être

par de micro-investissements décentralisés, visant à financer les actions entreprises tout en leur apportant un

revenu le temps que l'écosystème se restaure.

Néanmoins, l'opinion est malheureusement moins sensible à ce type de démarche qu'à l'aide d'urgence.

Pourtant, de telles actions s'avèrent bien plus efficace pour préserver l'avenir de notre belle planète bleue...

Bertrand Mauvy

III.6. Le contrôle des oléoducs sera renforcé

Après la mini-marée noire provoquée par un oléoduc français dans une réserve naturelle, les

politiques et les associations sont montés aux créneaux. Si les premiers se mobilisent, les autres en

revanche s'insurgent car trop de questions se posent sur cette catastrophe, notamment en matière de

sécurité.

Ce qui semblait inimaginable s'est pourtant produit le 7 août dernier. Un pipeline français qui reliait Fos-sur-

Mer à l'Allemagne s'est soudain mis à fuir. En tout, 4000 m3 de pétrole se sont échappés du tuyau pour se

déverser au grand dam des écologistes en plein milieu de Cossouls de Crau, une réserve naturelle située à

proximité de la Camargue. En tout, 49 400 m2 de terrains ont été souillés d'après des géomètres.

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Des conséquences écologiques dramatiques

Après deux jours de pompage intensif, l'ensemble du pétrole libre qui se trouvait en surface a finalement été

récupéré. Mais la Société du Pipeline Sud-Européen (SPSE) qui exploite l'oléoduc déplore dans un

communiqué que le sol soit encore sali par les traces résiduelles de mazout.

Pour le CEEP, co-gestionnaire de la réserve naturelle avec la Chambre d'agriculture des Bouches-du-Rhône,

« la destruction de cet habitat est irréversible. Il s'est façonné en 10 000 ans : c'est un peu comme si on

badigeonnait de pétrole la grotte de Lascaux ! Par ailleurs, parmi les impacts prévisibles, on s'inquiète des

polluants aériens disséminés sur une surface sûrement supérieure à la zone touchée par le pétrole ».

Les étapes de dépollution vont donc se poursuivre. La technique retenue consiste à ramasser les terres

polluées avant de les traiter dans les filières d'élimination. Cette solution n'est pas idéale pour le biotope mais

c'est celle qui comporte d'après eux le moins de risque. Il conviendra ensuite de réhabiliter la réserve

naturelle. Cette dernière étape sera extrêmement longue.

Seul le temps permettra panser les blessures occasionnées par cette micro marée noire. Par ailleurs, la nappe

phréatique, située entre 6 et 12 m de profondeur, fait l'objet d'analyses spécifiques. Elle alimente les réseaux

des communes voisines. Face à cette catastrophe, la sécurité mais aussi la surveillance des oléoducs sont

directement mise en cause.

Une surveillance insuffisante des oléoducs

La France compte environ 50 000 km de pipelines dont plus de 36 000 qui véhiculent du gaz et des

hydrocarbures. Officiellement, la loi oblige les exploitants d'oléoducs à surveiller visuellement leurs

installations tous les 15 jours. Mais le contrôle technique (épaisseur des parois, état de la corrosion,…) n'a

pour obligation d'être fait que tous les 10 ans ! Dans le cas de la catastrophe du 7 août, l'oléoduc était

parfaitement en règle : son dernier contrôle technique n'avait eu lieu qu'il y a 9 ans !

En visite sur la zone sinistrée, la secrétaire d'Etat à l'Ecologie Chantal Jouanno reconnaît l'urgence du

problème, qualifiant la situation de "déraisonnable". Outre le fait d'une surveillance insuffisante, les

infrastructures sont vieillissantes… En effet, la plupart des installations, comme les grandes raffineries ou les

pipelines, ont été construit dans les années 1960 sous la Présidence de Charles de Gaulle.

Les associations dénoncent une situation scandaleuse

Avec un tel bilan, la catastrophe survenue dans le sud de la France qualifiée de "rarissime" par la Société du

Pipeline Sud-Européen (SPSE) pourrait n'être que le début d'une longue série. Cette situation est vivement

dénoncée par les associations de protection de l'environnement, qui à l'instar de la Ligue Roc estime que

« lorsqu'un pipeline traverse un milieu si rare et précieux, on pourrait s'attendre à ce que des dispositifs

d'alarme fonctionnent pour tout incident ».

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Selon Allain Bougrain-Dubourg, président de la Ligue de Protection des Oiseaux (LPO), « il est urgent que

les pipelines qui passent sur des territoires remarquables et protégés comme les réserves naturelles soient

systématiquement déplacés et empruntent des axes linéaires banalisés pour éviter des pollutions en milieu

naturel ».

Enfin sur Europe, Arnaud Gossement, porte-parole de la fédération France nature environnement, parle d'un

véritable "crime écologique". L'ensemble des associations exige de la part de l'Etat la publication d'un

diagnostic sur les pipelines existants ainsi qu'une réhabilitation exemplaire de la zone touchée aux frais du

pétrolier.

Le contrôle des oléoducs devrait être renforcé

La secrétaire d'Etat à l'Ecologie a annoncé qu'elle allait réunir « avant la fin du mois les principaux

industriels pour leur rappeler qu'en matière de protection de l'environnement, ils se doivent d'être

exemplaires ». Elle a par ailleurs promis « un renforcement des contrôles » sur l'ensemble du réseau de

pipelines en France.

Un plan de modernisation du parc d'oléoducs devrait prochainement être mené par le gouvernement. La

secrétaire d'Etat s'y est engagée en affirmant que ces modification devront être opérationnelles « d'ici à la fin

novembre 2009 ». Ces mesures seront-elles suffisantes pour éviter une nouvelle catastrophe ?

Pierre-Yves Castagnac, le 12 août 2009

Des sites pour aller plus loin

Société du Pipeline Sud-Européen (SPSE)

Fédération France nature environnement

Le Ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer

Les catastrophes écologiques qui menacent les eaux

Les principales menaces écologiques concernent l’eau. Car les rivières et les mers sont les premières

victimes de la pollution de l’Homme. Les catastrophes les plus connues sont bien sûr les marées noires, qui

détruisent les côtes en France et dans le monde. Zoom sur ces désastres qui menacent la planète bleue.

III.7. Loi sur les gaz de schiste : les écolos dénoncent une reculade

Débattue mardi 10 et votée mercredi 11 mai, la loi sur les gaz de schistes a subi plusieurs modifications

qui suscitent la colère des écologistes et de l’opposition, qui dénoncent une reculade. Découvrez les

enjeux du débat ainsi que les risques liés à cette technique particulière de forage. En mars 2010, le

précédent ministre de l’Ecologie, Jean-Louis Borloo accorde trois permis de recherche de cette forme

de gaz naturel dans des sites situés dans le Sud-Est de la France (au total sur 15 000 km²).

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Depuis, la révolte s’organise : débats, manifestations et réunions publiques se multiplient contre les gaz de

schiste ou plutôt contre leur exploitation. Initiée aux Etats-Unis, cette technique a donné lieu à un

documentaire alarmant Gasland, sélectionné aux Oscars.

Face à la contestation, une proposition de loi devait finalement interdire le projet. Mercredi 11 mai, les

députés ont approuvé la proposition de loi interdisant la technique de fracturation hydraulique, mais ce texte

n’abroge pas purement et simplement les permis d’exploration délivrés. Initialement présente dans la

première version, l’abrogation des permis déjà octroyés a été supprimée et remplacée par une autorisation

d’exploration et d’exploitation soumise à condition. Autant de changements que les associations écologistes

dénoncent avec vigueur.

Vers une prolongation des permis accordés ?

Yves Cochet, député vert, qui a porté à bout de bras la première mouture de la proposition de loi évoque une

"reculade". José Bové, lui, qualifie ce texte de "trahison". En effet, bien des choses ont changé entre la

première proposition de loi déposée et celle votée ce mercredi.

A commencer par le titre. Originellement intitulée "abrogation des permis exclusifs de recherches

d'hydrocarbures non conventionnels et interdiction de leur exploration et leur exploitation sur le territoire

national", elle est devenue "proposition de loi visant à interdire l'exploration et l'exploitation des mines

d'hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de

recherches comportant des projets ayant recours à cette technique"... Deux changements de taille illustrent

bien le débat :

D’abord, le terme "abrogation des permis exclusifs" a été supprimé : effectivement, dans la version

adoptée, il n’est pas question d’abrogation des permis accordés, ce pourquoi militent José Bové, Nicolas

Hulot, Eva Joly et de nombreux riverains des plateformes de forage. L’article 2 initial stipulait simplement

« Abrogation des permis exclusifs de recherches de mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux non

conventionnels préalablement délivrés ».

Aujourd’hui, l’article 2 indique que « les titulaires de permis exclusifs de recherches de mines

d'hydrocarbures liquides ou gazeux devront, dans un délai de deux mois à compter de la publication de la

loi, indiquer dans un rapport (…) les techniques employées dans les activités de recherches. Si ce rapport

n'est pas remis ou s'il est indiqué que les titulaires du permis ont recours à la technique dite de fracturation

hydraulique de la roche, les permis exclusifs de recherches concernés sont abrogés ».

En résumé, la porte n’est pas fermée aux exploitants titulaires d’un permis de recherche : s’ils arrivent à

utiliser d’autres techniques (ou à simplement à donner un autre nom à la fracturation hydraulique),

l’exploration et à fortiori l’exploitation pourront être menées.

Ce revirement de situation serait due, selon certains, aux pressions des détenteurs de permis qui menaçaient

de poursuivre en justice le gouvernement et de l’assigner à payer le montant des sommes déboursées suite

aux prospections autorisées (plusieurs millions d’euros).

Ensuite, la suppression du terme "'hydrocarbures non conventionnel" au profit du terme plus

générique "d'hydrocarbures liquides ou gazeux". Cette transformation alerte les écologistes qui estiment

qu’elle constitue une opportunité que sauront saisir les industriels pour exploiter les schistes bitumineux (des

roches à grains fins contenant suffisamment de substances pour fournir du pétrole et du gaz combustible) par

des techniques de forage à ciel ouvert (open sit mining) ou de chauffage du pétrole en profondeur avant

extraction (true in-situ process), toutes deux nocives pour l’environnement.

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Enfin, la disparition du terme "non conventionnels" n’interdirait plus de fait les exploitations off-shore (au

large de la Cote d’Azur et de la Guyane notamment). Le plateau du Larzac va-t-il bientôt ressembler aux

plaines texanes ? Espérons que non.

Les gaz de schiste, c’est quoi ?

Les gaz de schiste, c’est la traduction québécoise de "shale gas" en anglais (schiste argileux), pour désigner

ces milliards de mètres cubes de gaz naturel, formés il y a près de 20 millions d’années et pris dans des

argiles à plusieurs centaines de mètres de profondeur. En effet, le terme schiste est inapproprié, il serait plus

exact de parler de gaz d’argile.

Ce type de gaz est dit non conventionnel car non contenu dans une poche géologique. Résultat : pour

l’extraire, la technique de fracturation hydraulique horizontale qui existe depuis 2007 (cf. explications ci-

dessous) s’avère rentable mais peu respectueuse de l’environnement. Depuis, les choses sont allées très vite :

En 2007 : une compagnie américaine, Devon, arrive à rentabiliser l’extraction du gaz de schiste.

Depuis, les forages se multiplient au pays de l’Oncle Sam ;

1er

mars 2010 : Trois permis d’exploration pour des gaz de schistes sont délivrés par le ministre de

l’Ecologie de l’époque, Jean-Louis Borloo (+ trois permis pour la prospection d’huile (pétrole) de

schiste dans le bassin parisien) ;

Sortie du film Gasland de Josh Fox, présenté au festival du film indépendant de Sundance en

2010. On y voit des habitants de bourgade à proximité des forages ne plus pouvoir consommer l’eau

du robinet, et même y mettre le feu avec un briquet (à cause du gaz infiltré dans les nappes

phréatiques). Choquant ;

Fin décembre 2010 : Première réunion publique sur les gaz de schiste à Saint-Jean-du-Bruel

(Aveyron), réunissant 300 personnes. Cette commune se trouve à proximité des sites de travaux de

prospection de gaz de schiste ;

Début 2011 : Pressions populaires, manifestations avec un réel impact : suite aux différentes

mobilisations citoyennes et débats lancés, la machine se met en marche ;

Février 2011 : Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’Ecologie, décide la suspension durant six

mois des travaux de prospection de gaz de schiste et mandate une mission qui rendra publics les

résultats le 8 juin 2011. Elle qualifie "d’erreurs" les permis octroyés par son prédécesseur ;

Mai 2011 : trois propositions de loi sont déposées à l’Assemblée nationale (une du PS aussitôt

retirée, une de Jean-Louis Borloo et une du groupe UMP portée par Christian Jacob). La commission

du développement durable propose une mouture finale ;

11 mai 2011 : Le texte remanié par la commission est adopté (287 voix pour et 186 contre) ;

1er

juin 2011 : Examen de la loi par le Sénat.

Une solution pour l’indépendance énergétique ?

Aux Etats-Unis, les pro-gaz de schiste justifient leur exploitation au motif de l’indépendance énergétique.

Face aux réserves de gaz naturel qui s’appauvrissent comme peau de chagrin le gaz de schiste est présenté

comme une source inespérée d’énergie. Fin 2010, on dénombrait 35 000 puits produisant du gaz de schiste

aux Etats-Unis (contre une petite cinquantaine au début des années 1990).

En 2007, les gaz de schiste représentaient 42% de la production de gaz américaine et d’après les projections,

ils représenteraient 64% en 2020, ce qui, ajouté au gaz classique, rendrait les Etats-Unis pratiquement auto-

suffisants pour au moins deux siècles ! Certaines projections promettent même l’autosuffisance énergétique

en gaz d’ici quelques années.

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Face à la réduction des ressources en pétrole, l’enjeu est de taille. Et même au pays du tout nucléaire (la

France), cette source d’énergie complémentaire aurait été la bienvenue.

Des dégâts environnementaux colossaux

Mais au-delà des statistiques, l’expérience américaine donne froid dans le dos. En cause : la technique de

fracturation hydraulique horizontale, qui cristallise toutes les critiques. Le gaz se trouve disséminé dans la

roche et non dans une poche bien délimitée.

Le principe d’extraction consiste donc à provoquer des failles dans la roche à l’aide d’un liquide envoyé à

très forte pression pour libérer le gaz emprisonné. Dans le liquide, on trouve de l’eau bien sûr, mais aussi des

microbilles de la taille de grains de sables et des produits chimiques. Une partie de ce liquide est aspirée à la

surface, en même temps que le gaz.

Une pollution chimique : On a recensé pas moins de 500 produits chimiques utilisés pour assurer cette

fracturation. Mais, Halliburton, le géant des gaz des schistes américains, a toujours refusé de révéler la

composition des additifs… On ne sait donc pas ce qu’il y a dedans, ni ce que cela occasionne comme

dommages collatéraux au niveau environnemental ;

Une consommation en eau gigantesque : 15 à 20 millions L d’eau sont nécessaires pour chaque puits. Une

eau qu’il faut prélever et acheminer avec d’énormes camions citernes pour un bilan carbone déplorable ;

Une eau polluée impropre à la consommation : Que faire de cette eau polluée ? Difficilement recyclable à

cause du nombre de produits de différents natures (métaux lourds, gaz, produits chimiques de nature

inconnue), son devenir est incertain. Dans un second temps, ce sont les nappes phréatiques, à partir

desquelles nous puisons l’eau que nous consommons, qui sont menacées ;

Des risques pour les riverains : En cas de fuites dans la roche (et le film Gasland montre que ces cas ne

sont pas exceptionnels), c’est toute la nappe qui est polluée par le gaz… au point de pouvoir mettre le feu à

l’eau du robinet… Pas franchement rassurant.

Alors même si la technique de fracture hydraulique (qui n’est pas définie dans le texte…) est interdite,

beaucoup craignent de voir des plateformes de forage se développer en France. Un peur que Greenpeace

résume en cette formule laconique : Reculer pour mieux forer…

Ainsi, élus de tous bords, écologistes et riverains appellent à rester mobilisés et à continuer de manifester

leur mécontentement. Tous s’étonnent notamment de l’absence de mesures visant à contrôler les

conséquences écologiques de l’exploitation de ces hydrocarbures non conventionnels dans la loi. Prochaine

étape législative : la loi passe devant le Sénat le 1er juin.

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Yamina Saïdj et David Bême, le 12 mai 2011

Des sites pour aller plus loin

Voir le film Gasland en ligne, en Vo sous-titrée

III.8. Les marées noires

Les marées noires ont frappé l'opinion dès l'origine, et furent l'occasion de décisions juridiques qu'il

n'est pas toujours facile d'appliquer. L'une d'elles, toute récente, marque la reconnaissance du

préjudice écologique dans le droit français : c'est le jugement du procès de l'Erika, le 16 janvier

dernier...

18 mars 1967. Le Torrey Canyon, un pétrolier battant pavillon libérien mais appartenant à une compagnie

américaine, s'échoue au large des côtes britanniques. 120 000 tonnes de brut s'échappent de ses soutes pour

venir envahir les rivages de l'Angleterre et de la France. Peu accoutumés à faire face à de telles catastrophes,

les secours peinent à s'organiser, et l'armée doit finalement bombarder l'épave au napalm pour en éliminer

toute trace d'hydrocarbures !

C'est le premier grand accident de ce type dans l'histoire. Il marque l'opinion occidentale, qui prend

conscience de l'existence d'un revers à sa prospérité. Dans ce sens, il s'agit d'une des premières étapes

marquantes de la montée des préoccupations écologiques.

Sur le plan des conséquences, l'accident du Torrey Canyon donne naissance aux premières législations

internationales sur la question. La convention internationale MARPOL, adoptée à Londres le 2 novembre

1973, interdit les déversements volontaires et rend les Etats responsables des bateaux placés sous leur

pavillon. Puis la convention sera renforcée et appliquée à partir de 1978. Le début d'une longue lutte contre

la pollution pétrolière et ses effets sur l'environnement naturel et humain...

Un désastre pour toute une région

Après le Torrey Canyon, les marées noires se sont succédées à une cadence accélérée, reflet de

l'accroissement du trafic :

L'Amoco Cadiz et ses 223 000 tonnes de brut déversées sur les côtes du Finistère en mars 1978 ;

La plate-forme Ixtoc 1 dans le Golfe du Mexique, en juin 1979 (de 450 000 à 1 500 000 t. selon les

estimations) ;

L'Atlantic Empress, en juillet de la même année, au large de Trinité et Tobago (280 000 t.)... ;

Par la suite, néanmoins, tant le nombre d'accident que le tonnage total déversé ont eu tendance à

diminuer : 314 000 t. pour 25 accidents en 1970, 118 000 t. pour 9 en 1980, 29 200 t. pour 4 en 2000,

selon le CEDRE (Centre de Documentation, de Recherche et d'Expérimentation sur les Pollutions

Accidentelles des Eaux), organisme officiel créé après la catastrophe de l'Amoco Cadiz.

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Même l'Erika dont le naufrage, le 12 décembre 1999, qui a fait tant de bruit, n'a laissé s'échapper « que » 20

000 t... Celui-ci n'en a pas moins généré des dégâts considérables : des « galettes » répandues sur 400 km de

côtes, du Finistère à la Charente Maritime, 42 000 oiseaux trouvés morts, peut-être 150 000 en réalité... Des

chiffres encore plus impressionnants que pour l'Amoco Cadiz, du fait notamment d'une tempête qui

contribua à disperser les résidus d'hydrocarbures.

Une lente reconnaissance des dommages

L'affaire de l'Erika est fameuse aussi parce qu'elle marque une inflexion juridique en faveur du droit de

l'environnement, et qu'elle a bénéficié à ce titre d'une couverture médiatique eceptionnelle. Pour la première

fois, en effet, lors du jugement le préjudice écologique a été reconnu dans le droit français.

Les quatre accusés (la société Total, l'armateur Giuseppe Savarese, le gestionnaire Antonio Pollara et la

société de classification Rina) ont été reconnus coupables de « pollution maritime » et de « faute

d'imprudence ». Au terme du procès, le 16 janvier 2008, ils ont été condamnés solidairement à verser 192

millions d'euros. Les plaignants, qui en demandaient 1 milliard, étaient composés notamment :

De l'Etat lui-même ;

Des régions Bretagne, Pays de la Loire, Poitou-Charentes ;

Des départements du Finistère, de la Loire Atlantique et de la Vendée ;

D'associations, la Ligue de Protection des Oiseaux, WWF France, Greenpeace France...

Il aura fallu attendre longtemps, et bien des progrès dans le droit maritime, pour en arriver à cette décision

historique. Celle-ci inquiète certains industriels pollueurs, car elle risque de faire jurisprudence. Néanmoins

cela ne doit pas faire oublier que les dégazages sauvages (rejets volontaires d'hydrocarbures) représentent 1,5

à 2,5 millions de tonnes chaque année selon les estimations les plus basses... Des malversations qu'il est

souvent difficile de surprendre !

Bernard Rastoin

III.9. Quels polluants menacent l'eau ?

Nappes phréatiques, rivières, fleuves et océans : tous sont menacés par la pollution. Déchets, bactéries

et substances toxiques rejetés se retrouvent toujours dans l'eau. Fragilisant la première ressource

naturelle de la planète. Avec la raréfaction, la pollution de l'eau devient la principale source

d'inquiétude des autorités internationales, disposant de peu de moyens pour y répondre efficacement.

Janvier 2006 : une fonderie de la province du Hunan, au sud-est de la Chine, rejette accidentellement du

cadmium dans le fleuve Xiangjiang, qui approvisionne six millions d'habitants de Changsha, la capitale

provinciale. Ce n'est pas la première fois que ce type de pollution touche l'empire du milieu. Explosions

d'usines et fuites accidentelles sont monnaie courante et provoquent une pollution dont les effets sont

largement inconnus.

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De nombreux polluants

En effet, si les polluants aquatiques sont connus et classifiés, leurs effets sont encore sujet à caution, surtout

lorsqu'il s'agit de métaux lourds, de médicaments ou de pesticides. Pire, la majorité des stations d'épuration

ne sont pas équipées pour purifier les eaux polluées par des produits dangereux ou beaucoup trop coûteux à

éliminer. Dans ces polluants, on distingue 4 types, du plus inoffensif à l'extrêmement dangereux :

1. Les pathogènes : les bactéries, virus et protozoaires sont des vecteurs de maladies et se retrouvent

toujours dans les eaux usées provenant des villes et de leurs égouts. Ils sont une menace pour la santé

publique, mais les stations d'épuration débarrassent l'eau de leur présence néfaste. Le chlore est un

anti-pathogène efficace ;

2. La demande biochimique en oxygène (DBO) : certaines usines, notamment les usines de pâte à

papier, déversene plusieurs produits chimiques dans les rivières. Ceux-ci prennent l'oxygène présent

naturellement dans l'eau, provoquant la mort des poissons. Les déchets organiques de ces poissons

émettent des gaz très nocifs, notamment l'hydrogène sulfuré ;

3. Les éléments nutritifs : la présence d'azote et de phosphore dans l'eau n'est normalement pas

dangereuse. Mais leur présence excessive dans l'eau due à l'agriculture et les égouts laisse prospérer

les phytoplanctons qui s'en nourrissent. Ceci provoque la baisse de l'oxygène, la couleur verte de

l'eau et l'émission d'odeurs désagréables. Les plans d'eau sont alors pleins de cyanobactéries, qui

rendent l'eau non potable et interdisent même les activités de loisir ;

4. Les substances toxiques : ce sont celles qui nuisent le plus à la santé des organismes aquatiques et à

ceux qui consomment l'eau. Elles comprennent les métaux lourds (plomb, mercure...), les

hydrocarbures, les phtalates. L'omniprésence de ces produits chimiques dans l'industrie peut, s'ils

sont mélangés, avoir de graves conséquences. Les polluants pétroliers sont les plus toxiques, en cela

qu'ils étouffent les poissons et causent la mort des oiseaux.

L'agriculture mise en cause

D'autres facteurs peuvent également entrer en jeu. L'acidification, par exemple, qui nuit à la santé de l'eau.

Après une pluie acide contenant du soufre et de l'azote, c'est une façon indirecte, pour les voitures et

industries, de polluer l'eau. Les centrales nucléaires, en rejetant des eaux chauffées, provoquent une pollution

thermique qui diminue leur teneur en oxygène et nuit au milieu aquatique.

Mais c'est sans aucun doute l'agriculture intensive qui a causé le plus de dommages. Très exigeante en eaux,

polluante, les autorités ont laissé les agriculteurs déverser des tonnes de produits chimiques dans les fleuves,

rivières et nappes phréatiques. N'ayant des conséquences qu'au terme de plusieurs décennies, les autorités des

puissances occidentales découvrent de plus en plus de taux de nitrates alarmants.

En Amérique du Nord, hormones et antibiotiques destinés aux élevages se retrouvent désormais partout. Et

ce sont 100 000 tonnes de pesticides qui sont déversés annuellement partout en France. Des pesticides qui,

selon l'OMS, tuent 220 000 personnes par an.

Comment contrôler ?

Dans ce grand gâchis planétaire de la seule source de vie, les autorités ont du mal à contrer l'offensive agro-

industrielle. Les contrôles ne prenant pas en compte les produits chimiques, difficile de connaître la toxicité

de l'eau. Et l'épuration n'étant pas rentable lorsqu'il s'agit de matériaux lourds, le traitement des eaux se limite

aux pathogènes et éléments nutritifs pour rendre l'eau potable.

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L'unique solution revient donc à réglementer sévèrement les rejets d'eaux polluées. Certaines initiatives sont

prises en ce qui concerne le phosphore et l'azote, les matériaux lourds sont strictement interdits, mais leur

contrôle reste parcellaire. La seule initiative vient donc des entreprises, qui peuvent remplacer certains

produits toxiques et le simple rejet par des méthodes de nettoyage. Malgré cela, les dernières décennies ont

vu l'intensification de pratiques anti-environnementales qui ont encore des conséquences dans le monde

actuel, et celui de demain.

III.10. La mer d'Aral sauvée de la pollution ?

Au beau milieu de l’Asie centrale, la mer d’Aral était autrefois la quatrième plus grande surface d’eau

intérieure au monde. Mais une utilisation abusive de ses ressources l’a réduite jusqu’à frôler la

disparition… avant d’inverser la tendance grâce à un ensemble de mesures judicieuses. La mer d’Aral

échappera-t-elle au triste sort qui semblait la guetter ?

A la frontière du Kazakhstan et de l'Ouzbékistan, sur un territoire naguère contrôlé par l'URSS, la mer d'Aral

couvrait encore, au début des années 1960, 68 000 km2 : une superficie équivalente à celle du Portugal ! Cela

en faisait la quatrième plus grande étendue d'eau intérieure au monde, derrière la mer Caspienne, le lac

Supérieur aux Etats-Unis et le lac Victoria au Kenya. A la différence de ces deux derniers, toutefois, la mer

d'Aral est remplie d'eau salée.

Seulement voilà... En quarante ans à peine, cette mer intérieure, qui faisait vivre toute une région, s'est

réduite comme peau de chagrin. Au point d'occuper aujourd'hui moins d'un tiers de sa surface initiale (21 000

km2 en 2006). Et de se diviser en deux bassins séparés, désormais appelés « grande mer », au sud, et « petite

mer » au nord. En cause, une exploitation excessive de ses ressources hydrologiques, jointe à des conditions

climatiques défavorables.

Un désastre écologique, social et économique

La mer d'Aral est alimentée par deux fleuves, l'Amour-Daria et le Syr-Daria. Les prélèvements qu'ils ont subi

dès les années 1920 ont considérablement réduit leur débit. En cumulant l'un et l'autre, on passe de 60 km3 en

1950 à 1,3 km3 en 1986. L'eau détournée était destinée à alimenter des champs de coton et de riz en plein

désert ! O3

Conséquence, l'équilibre hydrique de la région se rompt. L'évaporation diminue, les précipitations aussi, et

une sécheresse persistante s'abat sur tout le secteur. La salinité de l'eau s'accentue : la concentration de sel a

triplé en moins de quarante ans, éliminant la quasi-totalité des espèces de poissons qui y frayaient. Au fur et

à mesure que la mer se retire, ce sel est prélevé du sol par les vents et répandus sur les terres alentour,

accentuant leur stérilité. Un véritable cercle vicieux aux retombées désastreuses pour l'activité humaine.

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Dès lors, les côtes vont reculer de plusieurs dizaines de kilomètres, jusqu'à 80 km par endroit. Aralsk et

Muniak, les deux grands ports de la région, perdent tout lieu d'être. Vous avez peut-être déjà vu ces images

surréalistes d'embarcations rouillant, abandonnées, au milieu du désert, et d'immenses installations

désaffectées.

L'activité agricole plonge aussi, car les nappes phréatiques sont épuisées ou empoisonnées des suites d'une

utilisation abusive de pesticides pour doper la croissance du coton. L'économie de la région se désintègre : on

y compte 60% de chômeurs. Des pathologies lourdes, tels les cancers ou la tuberculose, y atteignent des

proportions inquiétantes. Le retour de la peste a même été signalé...

Et si tout n'était pas perdu ?

Tableau apocalyptique, digne des plus sombres paraboles du cinéma de science-fiction. Pourtant, l'engrenage

annoncé par les spécialistes dans les années 1980, et qui semblait devoir déboucher sur une complète

disparition de la mer d'Aral, n'a pas eu lieu. Mieux, celle-ci reprend peu à peu du terrain : le niveau de la

petite mer est aujourd'hui remonté de 30 à 38 mètres, alors que les hydrologues estiment qu'elle sera viable à

partir de 42 mètres. En quelques années, elle a déjà regagné 30% de sa superficie.

On croirait à un miracle... mais celui-ci est le fruit de décisions humaines. Et des grands travaux entrepris

afin de tenter d'enrayer la fatalité. En effet, le maire d'Aralsk, alerté par les associations locales, a fait

construire en 1995 un barrage à l'embouchure du Syr-Daria. Celui-ci a permis une première reconquête avant

de rompre du fait d'une tempête en 1999. Le président kazakh s'est alors emparé du dossier, finançant une

digue gigantesque grâce aux revenus du pétrole et au soutien de la Banque mondiale.

Mais si la petite mer semble pouvoir revivre, il n'en va pas de même de la grande mer. En effet, les digues

successives détournent le fleuve de sa partie sud, provoquant l'indignation des autorités ouzbeks. Il est vrai

que celles-ci peuvent aussi être incriminées pour leur gestion désastreuse des ressources hydriques à leur

disposition : aucune remise en cause du mode de culture du coton, auquel la grande mer semble avoir été

littéralement sacrifiée. Un cas d'école qui prête à réflexion sur les manières de faire face à d'éventuels futurs

désastres écologiques...

Bernard Rastoin