OMNIVORE HORS SERIE SIRHA 28 JANVIER

12
SPéCIAL SIRHA No.02 27/01/2013

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Magazine Hors série publié durant le Sirha le 28 janvier

Transcript of OMNIVORE HORS SERIE SIRHA 28 JANVIER

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spécial sirha No.02

27/01/2013

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EN vrai, oN NE sait pas quaNd ça a commENcé la cuisiNE. JustE après lE prEmiEr fEu dEs prEmiErs hommEs ?

par hasard, quaNd lE tyraNNosaurE domEstiquE dE la famillE – oui à l’époquE lE chiEN N’Existait pas –

a été poussé daNs lE fEu par cro, lE pEtit dErNiEr turbulENt ? alors pEut-êtrE, lE prEmiEr hommE s’Est-il

apErçu qu’uN t stEak grillé était biEN mEillEur qu’uN tartarE. Et c’Est aiNsi, à causE d’uNE allumEttE Et

d’uN salE gossE, quE lE cuit a rEmplacé lE cru, quE la gastroNomiE a fait iNtrusioN daNs la NourriturE.

quE lE plaisir, lEs habitudEs dE tablE, oNt submErgé lE quotidiEN morosE du mâchEur dE chair fraîchE. dEs

milliErs d’aNNéEs plus tard, lEs sciENtifiquEs, lEs vrais, lisENt daNs lE bol gastriquE commE uNE machiNE

à rEmoNtEr lE tEmps. à lyoN, lE moiNdrE résidu dE bouilli d’avoiNE rEcuEilli daNs l’Estomac d’uN cENturioN

dE lugduNum pErmEt dE rEcoNstituEr s’il achEtait dEs produits frais ou surgElés, s’il rEgardait où NoN

top chEf EN faisaNt la cuisiNE. oN lit daNs lEs ENtraillEs commE à viE ouvErtE. Et oN vous souhaitE uN boN

appétit. dEmaiN, 2E partiE : l’iNvENtioN dE la rEcEttE. Luc Dubanchet

SIRH

AgRA

m

Pho

togr

aphe

: B

oris

Ovi

ni

L ’ A B U S D ’ A L C O O L E S T D A N G E R E U X P O U R L A S A N T É , À C O N S O M M E R A V E C M O D É R A T I O N

w w w. t h i e n o t . c o m

“...Ma vision pour le Champagne Thiénot:qualité, exigence, sélectivité...”

Garance ThiénotViticultrice

L’INAUgURATION DU SIRHA VUE DU FOOD STUDIO OmNIVOREDe la concentration des huiles au moment de la cuisson du burger. Quelques secondes manquantes et voilà le plaisir incomplet, quelques secondes de trop et voilà la bouchée indigeste. Plus que de serrage de louches, tout est question de minutage, saupoudrage savant d’ingrédients à haute teneur gastro-politique. au Sirha, les meilleurs repas se font en arpentant.

OmnivOre a quatre jOurs pOur racOnter tOute l’histOire de la cuisine

1ère partie : du cru au cuit

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Il N’y a pas de recettes sur les peINtures rupestres des grottes de lascaux. la NourrIture sur

patte N’avaIt pas eNcore le statut de préparatIoN à mItoNNer – voIr omNIvore spécIal sIrha No.01.

Il a fallu atteNdre 50 aNs avaNt Jc pour que marcus gavIus apIcIus écrIve le premIer sur les arts

de la table, uNe sorte de NadINe de rotschIld avaNt l’heure, coNNu daNs toute la rome aNtIque

– gavIus, pas NadINe – pour soN raffINemeNt et sa capacIté à mettre les petIts plats daNs les

graNds. maIs le premIer lIvre de recettes, ImprImé eN sérIe avec photos couleurs et “vu sur m6”,

c’est eN allemagNe qu’Il faut aller le chercher au xve sIècle. le KucheNmeIsterey coNNut uNe

telle célébrIté qu’Il fut réédIté 50 foIs saNs compter les téléchargemeNts Illégaux sur ItuNes.

heureusemeNt que guIllaume tIrel, Notre taIlleveNt, avaIt déJà marqué l’hIstoIre de la cuIsINe avec

soN “vIaNdIer”. taIlleveNt, premIer cuIsINIer moderNe quI allaIt faIre Naître boN Nombre de vocatIoNs.

JustemeNt, demaIN, 3e partIe : la NaIssaNce des chefs. Luc Dubanchet

SIRH

AgRA

m

Pho

togr

aphe

: B

oris

Ovi

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L ’ A B U S D ’ A L C O O L E S T D A N G E R E U X P O U R L A S A N T É , À C O N S O M M E R A V E C M O D É R A T I O N

w w w. t h i e n o t . c o m

“...Ma vision pour le Champagne Thiénot:qualité, exigence, sélectivité...”

Garance ThiénotViticultrice

NUIT DE VEILLE SUR LE WORLD CUISINE SUmmITbeau comme une cathédrale d’inox. Le container Omnivore aménagé spécialement en laboratoire sort pour la première fois des ateliers où il a été fabriqué. Dans le hall 6 de la cité Internationale, il éclaire de ses LeD ce qui n’est encore qu’un espace vide. Mais dès demain, 800 mangeurs viendront découvrir les plats de street food réalisés pour l’unexpected Lunch du World cuisine Summit.

OmnivOre a quatre jOurs pOur racOnter tOute l’histOire de la cuisine, apprOximatiOns cOmprises.

2e partie : l’inventiOn de la recette

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CHRISTOpHE HUbERT SUR LA ROUTE DES SAINT-JACQUES

PorTrAiT

L’EffERVESCENT

CHRISTOpHE HUbERT AImE LA mER, L’AmER, ET LA mèRE DE SES ENfANTS. LE CHEf DE L’EffERVESCENCE EST VENU TORTURER LA SAINT-JACQUES EN féROCITé EN L’ACCOUpLANT AVEC UN pOUSSE-pIED ET DES ORANgES AmèRES. ENTRE AUTRES.TexTe Stéphane MéjanèS

Il a ouvert son restaurant le 15 novembre 2011 mais c’est tout sauf un perdreau de l’année. Christophe Hubert a fréquenté les cuisines du Meurice, du Grand Véfour, et surtout, fait corps avec Michel Trama (L’Aubergade, Puymirol) puis Mathieu Viannay (La Mère Brazier, Lyon) et n’avait pas vocation à rester longtemps dans l’anonymat.

en restant à lyon, haut lieu d’une gastronomie codifiée depuis des lustres, le gersois, guerrier ascendant têtu, n’a pas choisi la facilité. Il n’était pas attendu, ou alors au tournant. le virage, lui, il l’a pris résolument l’année un peu folle au cours de laquelle il a été reconnu par ses pairs et par la critique, décrochant au passage quelques jolies breloques. le résultat du travail de fond d’un homme libre, sur lui-même et sur sa cuisine. l’émancipation du cuisinier enfin chez lui n’est pas une vue de l’esprit. christophe a mené en douze mois une petite révolution personnelle, poussé par les uns, scruté par les autres. en débarquant chez lui quelques semaines après son installation, omnivore a joué ce rôle d’aiguillon sans lequel les déclics n’arrivent parfois jamais, christophe le reconnaît avec une vraie émotion dans la voix. sous ses dehors bourrus, le futur papa (sa bouillonnante moitié, ewa, d’origine polonaise, doit accoucher en février de leur deuxième enfant) dissimule une sensibilité que l’on ne soupçonne pas immédiatement mais qui transpirait déjà de ses premières assiettes.

ORpHIE ET CECINAau long d’un menu carte blanche bien dans l’air du temps, il cherchait alors à instiller une dose d’impertinence franchement bienvenue. là où d’autres se la jouent terre-mer à fond les saveurs, il se vautrait dans l’écume et le varech. mer-mer dans le tourteau en tartine inversée avec son aïoli léger. mer-mer encore dans la daurade royale à la plancha chevauchée par deux coques débraillées et ointe de beurre aux algues. on avait un peu oublié ces fumets entêtants, ces goûts puissants d’iode et de chair marine et on y replongeait avec délection. sans oublier la touche d’humour en forme de clin d’œil avec, en dessert, une bugne (plus lyonnais, tu meurs), revue en gaufrette sur une classique crème brûlée.cette voie très personnelle, il l’a prolongée lors d’un dîner à quatre mains avec Jean-

13H45. CUISINE EN fAmILLEchristophe hubert passe la porte du stand omnivore mises en place, son fils victor dans les bras. ewa, sa femme, suit de près, épanouie comme une femme enceinte au bord d’accoucher d’une petite fille. le chef de l’effervescence, avec son beau crâne luisant et sa barbe de quelques jours, est prêt à en découdre. gersois d’origine, lyonnais d’adoption, il sort d’une année dense en émotions. formé à la cuisine “gastro”, il a fait sa révolution de palais, jetant les nappes par-dessus la saône et poussant son goût des saveurs puissantes dans ses propres retranchements. démonstration immédiate avec l’annonce de sa bouchée du jour : saint-Jacques, pousse-pied, orange amère, chou rouge, salicorne, poire.

14H10. pOUSSE-pIEDchristophe et son commis, guilhem, attaque les saint-Jacques par la face nord. ca dépote grave. Ils prélèvent les noix mais ne jettent surtout pas les bardes. rien ne se perd en cuisine. les pousse-pieds, ces coquillages mi-hypnotiques mi-effrayants sont arrachés aux lambeaux de roche où un dernier sursaut d’espoir les retient, lavés, épluchés, et mis à cuire avec leur ongles menaçants. dès qu’ils seront rouges, un passage de 20 minutes au four à 52° (avec les saint-Jacques juste huilées) et on pourra les déshabiller du manchon qui les protège (caoutchouteux) pour ne déguster que le pied moelleux. les bardes de saint-Jacques, lavées à grandes eaux, mijotent dans leur eau. le jus servira plus tard à détendre les pousse-pieds.

14H45. ON pASSEÀ L’ORANgEla compotée d’oranges amères, qui ont cuit à feu doux avec un peu de sucre (trop d’amer tue l’amer), est presque prête. un coup de robot, avec le jus des bardes (les revoilà), et la texture est parfaite. christophe hubert enchaîne les opérations, la tête dans les épaules, devant des spectateurs de plus en plus intéressés. Il raconte sa recette, son refus des modes trop contraignantes, tant au niveau des nouvelles machines en cuisine qu’aux produits incontournables. Il taille la route, rebel without a cause.

15H22. bOUCHéES DOUbLES“quelle heure est-il ?” christophe hubert se retourne, rassuré, on est dans les temps. même pas un coup de feu. tout prend forme, le chou rouge est ciselé, acidulé au vinaigre de xérès. les poires sont épluchées et détaillées en fines lamelles. le public se presse, attendant sa pitance. une noisette de condiment, la saint-Jacques qui a reçu un coup de chalumeau sur la tête, un pousse-pied, quelques salicornes (sorte de haricot vert marin), une lamelle de poire, un trait d’huile d’olive, de la fleur de sel. toute la cuisine de christophe hubert est dans cette assiette, puissance et rectitude.

16H30. fINtroisième et dernier envoi. victor interpelle son papa : “tu fais quoi ?” “Je fais la cuisine !” tout simplement.

michel carrette (aux terrasses, tournus), à l’invitation d’omnivore, grand ordonnateur de dîners 100 % aux grandes tables du 104 (un lieu culturel au nord de paris). ce soir là, stimulé par un carrette malicieux en diable (et invité des “mises en place” ce lundi après-midi), il avait envoyé un plat d’une puissance rarement atteinte : orphie (poisson d’eau de mer serpentiforme et doté d’un long bec armé de fines dents très acérées), cecina (jambon fumé de boeuf), asperges, crème et citron. orphie et cecina, ça ressemble à une tragédie grecque. de fait, c’était d’une beauté formelle assez bluffante, tout en transversalité, l’asperge débordant presque de l’assiette, à la fois brute de fonderie, en apparence, mais d’une incroyable complexité en bouche. fumé, croquant et acide au premier abord, mais aussi onctueux et rond en finale, un très grand plat. Il faut aller voir et complimenter ce cuisinier qui n’a pas baptisé son restaurant par hasard. l’effervescence, c’est tout lui. Stéphane Méjanès

L’EffErVESCEnCE15 rue claudIa - 69002 lyoNwww.restaurant-effervescence.fr

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CHRISTOpHE HUbERT SUR LA ROUTE DES SAINT-JACQUES

PorTrAiT

L’EffERVESCENT

CHRISTOpHE HUbERT AImE LA mER, L’AmER, ET LA mèRE DE SES ENfANTS. LE CHEf DE L’EffERVESCENCE EST VENU TORTURER LA SAINT-JACQUES EN féROCITé EN L’ACCOUpLANT AVEC UN pOUSSE-pIED ET DES ORANgES AmèRES. ENTRE AUTRES.TexTe Stéphane MéjanèS

Il a ouvert son restaurant le 15 novembre 2011 mais c’est tout sauf un perdreau de l’année. Christophe Hubert a fréquenté les cuisines du Meurice, du Grand Véfour, et surtout, fait corps avec Michel Trama (L’Aubergade, Puymirol) puis Mathieu Viannay (La Mère Brazier, Lyon) et n’avait pas vocation à rester longtemps dans l’anonymat.

en restant à lyon, haut lieu d’une gastronomie codifiée depuis des lustres, le gersois, guerrier ascendant têtu, n’a pas choisi la facilité. Il n’était pas attendu, ou alors au tournant. le virage, lui, il l’a pris résolument l’année un peu folle au cours de laquelle il a été reconnu par ses pairs et par la critique, décrochant au passage quelques jolies breloques. le résultat du travail de fond d’un homme libre, sur lui-même et sur sa cuisine. l’émancipation du cuisinier enfin chez lui n’est pas une vue de l’esprit. christophe a mené en douze mois une petite révolution personnelle, poussé par les uns, scruté par les autres. en débarquant chez lui quelques semaines après son installation, omnivore a joué ce rôle d’aiguillon sans lequel les déclics n’arrivent parfois jamais, christophe le reconnaît avec une vraie émotion dans la voix. sous ses dehors bourrus, le futur papa (sa bouillonnante moitié, ewa, d’origine polonaise, doit accoucher en février de leur deuxième enfant) dissimule une sensibilité que l’on ne soupçonne pas immédiatement mais qui transpirait déjà de ses premières assiettes.

ORpHIE ET CECINAau long d’un menu carte blanche bien dans l’air du temps, il cherchait alors à instiller une dose d’impertinence franchement bienvenue. là où d’autres se la jouent terre-mer à fond les saveurs, il se vautrait dans l’écume et le varech. mer-mer dans le tourteau en tartine inversée avec son aïoli léger. mer-mer encore dans la daurade royale à la plancha chevauchée par deux coques débraillées et ointe de beurre aux algues. on avait un peu oublié ces fumets entêtants, ces goûts puissants d’iode et de chair marine et on y replongeait avec délection. sans oublier la touche d’humour en forme de clin d’œil avec, en dessert, une bugne (plus lyonnais, tu meurs), revue en gaufrette sur une classique crème brûlée.cette voie très personnelle, il l’a prolongée lors d’un dîner à quatre mains avec Jean-

13H45. CUISINE EN fAmILLEchristophe hubert passe la porte du stand omnivore mises en place, son fils victor dans les bras. ewa, sa femme, suit de près, épanouie comme une femme enceinte au bord d’accoucher d’une petite fille. le chef de l’effervescence, avec son beau crâne luisant et sa barbe de quelques jours, est prêt à en découdre. gersois d’origine, lyonnais d’adoption, il sort d’une année dense en émotions. formé à la cuisine “gastro”, il a fait sa révolution de palais, jetant les nappes par-dessus la saône et poussant son goût des saveurs puissantes dans ses propres retranchements. démonstration immédiate avec l’annonce de sa bouchée du jour : saint-Jacques, pousse-pied, orange amère, chou rouge, salicorne, poire.

14H10. pOUSSE-pIEDchristophe et son commis, guilhem, attaque les saint-Jacques par la face nord. ca dépote grave. Ils prélèvent les noix mais ne jettent surtout pas les bardes. rien ne se perd en cuisine. les pousse-pieds, ces coquillages mi-hypnotiques mi-effrayants sont arrachés aux lambeaux de roche où un dernier sursaut d’espoir les retient, lavés, épluchés, et mis à cuire avec leur ongles menaçants. dès qu’ils seront rouges, un passage de 20 minutes au four à 52° (avec les saint-Jacques juste huilées) et on pourra les déshabiller du manchon qui les protège (caoutchouteux) pour ne déguster que le pied moelleux. les bardes de saint-Jacques, lavées à grandes eaux, mijotent dans leur eau. le jus servira plus tard à détendre les pousse-pieds.

14H45. ON pASSEÀ L’ORANgEla compotée d’oranges amères, qui ont cuit à feu doux avec un peu de sucre (trop d’amer tue l’amer), est presque prête. un coup de robot, avec le jus des bardes (les revoilà), et la texture est parfaite. christophe hubert enchaîne les opérations, la tête dans les épaules, devant des spectateurs de plus en plus intéressés. Il raconte sa recette, son refus des modes trop contraignantes, tant au niveau des nouvelles machines en cuisine qu’aux produits incontournables. Il taille la route, rebel without a cause.

15H22. bOUCHéES DOUbLES“quelle heure est-il ?” christophe hubert se retourne, rassuré, on est dans les temps. même pas un coup de feu. tout prend forme, le chou rouge est ciselé, acidulé au vinaigre de xérès. les poires sont épluchées et détaillées en fines lamelles. le public se presse, attendant sa pitance. une noisette de condiment, la saint-Jacques qui a reçu un coup de chalumeau sur la tête, un pousse-pied, quelques salicornes (sorte de haricot vert marin), une lamelle de poire, un trait d’huile d’olive, de la fleur de sel. toute la cuisine de christophe hubert est dans cette assiette, puissance et rectitude.

16H30. fINtroisième et dernier envoi. victor interpelle son papa : “tu fais quoi ?” “Je fais la cuisine !” tout simplement.

michel carrette (aux terrasses, tournus), à l’invitation d’omnivore, grand ordonnateur de dîners 100 % aux grandes tables du 104 (un lieu culturel au nord de paris). ce soir là, stimulé par un carrette malicieux en diable (et invité des “mises en place” ce lundi après-midi), il avait envoyé un plat d’une puissance rarement atteinte : orphie (poisson d’eau de mer serpentiforme et doté d’un long bec armé de fines dents très acérées), cecina (jambon fumé de boeuf), asperges, crème et citron. orphie et cecina, ça ressemble à une tragédie grecque. de fait, c’était d’une beauté formelle assez bluffante, tout en transversalité, l’asperge débordant presque de l’assiette, à la fois brute de fonderie, en apparence, mais d’une incroyable complexité en bouche. fumé, croquant et acide au premier abord, mais aussi onctueux et rond en finale, un très grand plat. Il faut aller voir et complimenter ce cuisinier qui n’a pas baptisé son restaurant par hasard. l’effervescence, c’est tout lui. Stéphane Méjanès

L’EffErVESCEnCE15 rue claudIa - 69002 lyoNwww.restaurant-effervescence.fr

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P. 6 2013_hors-série 02 P. 72013_hors-série 02 P. 72013_hors-série 02

L’AmbIANCE EST DOUCE COmmE UN DImANCHE mATIN AU CORNER OmNIVORE. ALAIN pERRILLAT-mERCEROT, CHEf DU RESTAURANT ATmOSpHèRE(S), AU bOURgET DU LAC, SE pRépARE À ENVOyER DANS UN VRAI CALmE. IL A pRéVU DE mETTRE À L’HONNEUR SON LAVARET LOCAL, UN pOISSON ENDémIQUE DU LAC DU bOURgET. TexTe kIM Levy

H-37. fUmOIRun fumet de lavaret fumé exige de fumer le lavaret. dehors, devant son restaurant qui surplombe le plus grand lac naturel de france, alain perrillat-mercerot a installé une vieille jardinière. c’est son fumoir. Il y a bricolé des étages qu’il faut filmer, pour garder les arômes, et y dépose les filets de lavarets sur leur peau sombre et irisée, d’un gris froid. dessous, le bois de hêtre se consume, sur fond de paysage savoyard, du haut de “cette vaste coupe de montagnes tout ébréchée où brille, à sept ou huit cents pieds au-dessus de la méditerranée, une goutte d’eau bleue comme ne l’est aucune eau du monde”, écrivait balzac dans la peau de chagrin.

09H49. VINAIgRETTE trois membres de sa petite brigade d’atmosphère(s), commis apprentis et chef de partie, posent des planches sur leurs torchons. précision, stabilisation.

ALAIN pERRILLAT-mERCEROT

CUISINE D’EAU DOUCEles lames souples des couteaux filet de sole sont affutées au fusil dans un coin. on entre dans le vif lorsqu’ils prélèvent les zestes des citrons jaunes, découpent les suprêmes dans la chair, qu’ils détaillent en brunoise, puis passent le gingembre à la mandoline, le coupe en mini-brunoise, cisèlent les échalotes très finement. autant de nuances d’acidité pour la vinaigrette qui se construit lentement.

10H15. COREgONUSLAVARETUS le fourneau est allumé. sur la plaque, une russe où frémit le fumet de peaux et chairs de lavaret, la fine brunoise de zestes de citron, les échalotes ciselées. alain perrillat-mercerot parle restaurant du haut du lac, typologie lacustre et ses trésors. la carte d’atmosphère(s) n’est pas tout poisson, elle est aussi carnée. on y trouve les diots, les saucisses de savoie, de la pintade fermière ces-temps-ci. mais alain perrillat est attaché à son lac et à une cuisine en phase avec l’actualité brûlante du terroir. la pêche du lavaret a commencé ce week-end sur le lac.en fait, il cuisine ce dimanche matin du lavaret péché dans le lac léman, où les permis sont libérés depuis une quinzaine de jours déjà. “le nom latin du lavaret, c’est coregonus lavaretus. les deux sont des corégones, des poissons à chair blanche très fragile. le nom change juste selon l’endroit où on le pêche. Il faut être vraiment très connaisseur pour goûter une différence. le lavaret serait un peu plus gras que le féra, qu’on pêche au léman et au lac d’annecy”.

10H50. pOUR UN fOIE DE LOTTE...le micro résonne maintenant depuis le corner omnivore. devant la scène, une visiteuse est pendue aux lèvres d’alain perrillat-mercerot, qui énumère de nouveau pour les passants de la place des lumières, les espèces vivant dans le lac du bourget. “et il y a de la lotte aussi ?” “oui, de la lotte de lac. c’est très bon, ça a même inspiré un dicton aux pêcheurs il y a longtemps, qui dit : “pour un foie de lotte, les jeunes filles se déculottent !” petit sourire typique des incompréhensions générationnelles sur le visage de maxime, le chef de partie. Il passe, dans un chinois, le fumet qui a frémi une vingtaine de minutes, et le monte à l’huile d’olive.

11H29. JULIENNEles champignons de paris (“savoyards, eux aussi, et pas polonais comme la majorité de ceux qu’on trouve aujourd’hui en france”) sont émincés en fine julienne. “Il faut assaisonner au dernier moment, avec juste un peu de sel. si on le fait maintenant, le champignon dégorge et ce n’est pas ce qu’on veut. on veut qu’il garde tout son goût”.

12H06. 45°C À CŒURc’est le moment de la cuisson à basse température du lavaret. alain perrillat-mercerot le plonge, en poches sous-vide, dans l’eau à 48°c, pour cuire la chair à 45°c à cœur. une dizaine de minutes plus tard (“on sait que c’est cuit en regardant la chair,

qui change de couleur”), les poches sont ouvertes, la peau décollée et les morceaux qu’on dirait crus, assaisonnés au sel de guérande. un peu plus loin sur le plan de travail, la julienne de champignons est mélangée au fumet et à la mini-brunoise de gingembre, un peu de piment d’espelette et de ciboulette ciselée. les premières bouchées sont dressées. “très fin”, commentent les mangeurs devant la scène.

12H43. fACILE pas besoin de thermo-plongeur ou de machine sous-vide pour tenter la recette d’alain perrillat. “pour le fumoir, c’est du bricolage, et pour la cuisson à basse température, il suffit de trouver un endroit dans sa cuisine où il fait 50°c. au restaurant, j’enfourne le filet posé sur une assiette huilée, thermostat 1. facile.”

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L’AmbIANCE EST DOUCE COmmE UN DImANCHE mATIN AU CORNER OmNIVORE. ALAIN pERRILLAT-mERCEROT, CHEf DU RESTAURANT ATmOSpHèRE(S), AU bOURgET DU LAC, SE pRépARE À ENVOyER DANS UN VRAI CALmE. IL A pRéVU DE mETTRE À L’HONNEUR SON LAVARET LOCAL, UN pOISSON ENDémIQUE DU LAC DU bOURgET. TexTe kIM Levy

H-37. fUmOIRun fumet de lavaret fumé exige de fumer le lavaret. dehors, devant son restaurant qui surplombe le plus grand lac naturel de france, alain perrillat-mercerot a installé une vieille jardinière. c’est son fumoir. Il y a bricolé des étages qu’il faut filmer, pour garder les arômes, et y dépose les filets de lavarets sur leur peau sombre et irisée, d’un gris froid. dessous, le bois de hêtre se consume, sur fond de paysage savoyard, du haut de “cette vaste coupe de montagnes tout ébréchée où brille, à sept ou huit cents pieds au-dessus de la méditerranée, une goutte d’eau bleue comme ne l’est aucune eau du monde”, écrivait balzac dans la peau de chagrin.

09H49. VINAIgRETTE trois membres de sa petite brigade d’atmosphère(s), commis apprentis et chef de partie, posent des planches sur leurs torchons. précision, stabilisation.

ALAIN pERRILLAT-mERCEROT

CUISINE D’EAU DOUCEles lames souples des couteaux filet de sole sont affutées au fusil dans un coin. on entre dans le vif lorsqu’ils prélèvent les zestes des citrons jaunes, découpent les suprêmes dans la chair, qu’ils détaillent en brunoise, puis passent le gingembre à la mandoline, le coupe en mini-brunoise, cisèlent les échalotes très finement. autant de nuances d’acidité pour la vinaigrette qui se construit lentement.

10H15. COREgONUSLAVARETUS le fourneau est allumé. sur la plaque, une russe où frémit le fumet de peaux et chairs de lavaret, la fine brunoise de zestes de citron, les échalotes ciselées. alain perrillat-mercerot parle restaurant du haut du lac, typologie lacustre et ses trésors. la carte d’atmosphère(s) n’est pas tout poisson, elle est aussi carnée. on y trouve les diots, les saucisses de savoie, de la pintade fermière ces-temps-ci. mais alain perrillat est attaché à son lac et à une cuisine en phase avec l’actualité brûlante du terroir. la pêche du lavaret a commencé ce week-end sur le lac.en fait, il cuisine ce dimanche matin du lavaret péché dans le lac léman, où les permis sont libérés depuis une quinzaine de jours déjà. “le nom latin du lavaret, c’est coregonus lavaretus. les deux sont des corégones, des poissons à chair blanche très fragile. le nom change juste selon l’endroit où on le pêche. Il faut être vraiment très connaisseur pour goûter une différence. le lavaret serait un peu plus gras que le féra, qu’on pêche au léman et au lac d’annecy”.

10H50. pOUR UN fOIE DE LOTTE...le micro résonne maintenant depuis le corner omnivore. devant la scène, une visiteuse est pendue aux lèvres d’alain perrillat-mercerot, qui énumère de nouveau pour les passants de la place des lumières, les espèces vivant dans le lac du bourget. “et il y a de la lotte aussi ?” “oui, de la lotte de lac. c’est très bon, ça a même inspiré un dicton aux pêcheurs il y a longtemps, qui dit : “pour un foie de lotte, les jeunes filles se déculottent !” petit sourire typique des incompréhensions générationnelles sur le visage de maxime, le chef de partie. Il passe, dans un chinois, le fumet qui a frémi une vingtaine de minutes, et le monte à l’huile d’olive.

11H29. JULIENNEles champignons de paris (“savoyards, eux aussi, et pas polonais comme la majorité de ceux qu’on trouve aujourd’hui en france”) sont émincés en fine julienne. “Il faut assaisonner au dernier moment, avec juste un peu de sel. si on le fait maintenant, le champignon dégorge et ce n’est pas ce qu’on veut. on veut qu’il garde tout son goût”.

12H06. 45°C À CŒURc’est le moment de la cuisson à basse température du lavaret. alain perrillat-mercerot le plonge, en poches sous-vide, dans l’eau à 48°c, pour cuire la chair à 45°c à cœur. une dizaine de minutes plus tard (“on sait que c’est cuit en regardant la chair,

qui change de couleur”), les poches sont ouvertes, la peau décollée et les morceaux qu’on dirait crus, assaisonnés au sel de guérande. un peu plus loin sur le plan de travail, la julienne de champignons est mélangée au fumet et à la mini-brunoise de gingembre, un peu de piment d’espelette et de ciboulette ciselée. les premières bouchées sont dressées. “très fin”, commentent les mangeurs devant la scène.

12H43. fACILE pas besoin de thermo-plongeur ou de machine sous-vide pour tenter la recette d’alain perrillat. “pour le fumoir, c’est du bricolage, et pour la cuisson à basse température, il suffit de trouver un endroit dans sa cuisine où il fait 50°c. au restaurant, j’enfourne le filet posé sur une assiette huilée, thermostat 1. facile.”

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PorTrAiT

LA pHILOSOpHIE D’ALAINAlain Perrillat-Mercerot, un nom qui fleure bon la Haute-Savoie. Mais attention, ne pas confondre avec la famille de Guy Perrillat. Alain, né à Thônes, est du Grand-Bornand, le champion de ski vient de La Clusaz. Trois kilomètres à vol d’oiseau, un monde. Mais surtout pas de querelles de clocher, le gaillard aux rouflaquettes est d’ailleurs depuis longtemps descendu de sa montagne en cuisinant. Il n’a pas pour autant abandonné l’idée de prendre de la hauteur. Il s’est posé avec sa petit famille en surplomb du lac du Bourget-du-Lac.

le restaurant d’alain perrillat-mercerot s’appelle “atmosphère(s)”, tout un programme. avant cela, il a presque tout appris auprès de son mentor, son ami, laurent petit, chef du clos des sens, à annecy. huit ans de bons et loyaux services avant de s’installer à son compte, il y a 10 ans, sans surtout rompre le lien. un coup de fil une fois par semaine, c’est un minimum entre les deux hommes. depuis qu’il défend en solo une certaine idée de la gastronomie alpine, alain perrillat-mercerot ne cesse de tendre vers l’essentiel. ses dressages en lignes de fuite pointent vers le lac, immense miroir de la belle âme de ce cuisinier fraternel et tout en humilité. du genre à prendre le temps d’aller passer trois jours chez un confrère en apparence loin de son univers, tel alexandre gauthier, pour comprendre sa démarche. du genre à proposer un menu du marché, tous les midis, au rapport qualité-prix imbattable.

COmmE UN pOISSON DANS LE LACon l’écouterait des heures raconter les trésors halieutiques de son garde-manger naturel. perche, truite, sandre, brochet, et surtout lavaret, dont le nom générique est coregonus lavaretus mais que l’on connaît aujourd’hui davantage sous le nom de féra, son sobriquet lorsqu’il est pêché dans les lacs léman et d’annecy avant d’être servi

sur les plus belles tables de la région et jusqu’à la capitale. alain travaille lui avec olivier parpillon, héritier d’une longue lignée de pêcheur professionnel, l’un des huit autorisés (sur neuf permis disponibles) à tendre ses filets dans le lac du bourget. avec tout ça, mais aussi un amour éperdu des coquillages et des légumes, il vous attrape en suavité avec une huître “snackée”, une autre émulsion, les deux déposées sur un carpaccio de veau de lait, ou un filet de cabotte chou rave cru, en purée ou en rondelles rissolées, voire une partouze hivernale de racines, topinambour, crosne, salsifi, cerfeuil tubéreux et navet boule d’or, du crémeux au croquant, avec quelques feuilles d’oxalys pour l’amertume.dans le cadre d’une belle défense de son terroir, alain perrillat-mercerot a aussi

construit avec sa femme la plus belle carte de flacons de l’arc alpin au sud de lutèce. on peut s’offrir, toujours avec modération, un verre de mondeuse rouge vv, non filtrée, de chez louis magnin, et on peut même se laisser tenter par quelques grands millésimes exceptionnels, comme cette roussette altesse de marestel 1988 du divin Noël dupasquier. Il n’est d’ailleurs pas loin de réaliser l’un de ses rêves, une “wine list” entièrement alpine. la boucle sera bouclée et les perrillat pourront se retrouver pour trinquer, au croisement de leurs vallées respectives. Stéphane Méjanès

ATMOSPHÈrE(S)618 route des tourNelles73370 le bourget du lacwww.atmospheres-hotel.com

fRéDéRIC LOEb

“LA CUISINE DU XXIE SIèCLE DOIT SE COmpRENDRE ImméDIATEmENT”

WOR

LD CU

ISIN

E SUm

mIT

300 experts européens de l’alimentation interrogés, deux études de 200 pages sur les tendances de la food mondiale, des dizaines de pistes pour la restauration de demain : telle est la somme recueillie par l’organisation du premier Sirha World Cuisine Summit qui se déroule aujourd’hui à la Cité Internationale. Entretien avec frédéric Loeb, son Directeur général.

Omnivore : Que révèle l’étude publiée à l’occasion du Sirha World Cuisine Summit qui se déroule aujourd’hui ? frédéric Loeb : bien entendu il y a des tas de tendances. mais nous les avons regroupées en trois pôles fondamentaux. le pôle développement durable, ce que les anglais appellent le “sustainability” qui est intraduisible mais qui allie à la fois des notions de durabilité, de santé et de bien être. ce pôle est tiré en tension avec le “healthfulness”, le mieux être, qui lui même est en tension avec l’expérience, le plaisir sensoriel. tout cela étant sous-tendu par l’unicité, c’est-à-dire le fait que chacun d’entre nous est unique, en quête d’une expérience qui lui est propre. pour revenir sur le territoire du restaurant, nous ne sommes plus au niveau mondial dans l’ère du “on s’éclate toujours plus” mais dans l’équilibre général entre santé, divertissement et sensorialité qui représente chacun 30 % du total.

Et en france ? comme souvent, c’est le vrai french paradoxe. Nous qui pensons faire les tendances de la restauration, sommes totalement à côté de la trilogie. la convivialité domine à 60 % et la santé qui, en moyenne est à 50 % dans le monde entier, n’est qu’à 20 % en france.

Quelle conclusion en tirez-vous ? globalement que la france se voile la face, vit toujours dans une grandeur passée qui n’est plus en adéquation avec le monde. on inscrit notre repas au patrimoine mondial de l’humanité, on fait un réseau de cités gastronomique, mais on ne s’intéresse qu’au passé. on vit dans la nostalgie d’un monde qui n’existe plus. certains chefs sont partis ailleurs et ont parfaitement adapté leur offre au pays où ils sont – l’exemple même étant daniel boulud où Jean-georges vongerichten aux états-unis –, d’autres comme yannick alleno ou Jean-françois piège mettent en place leur vision mais globalement la france reste trop dans le traditionalismes, la tradition.

Vous semblez pessimiste pour l’avenir ? Non je reste optimiste car nous avons une formidable capacité à recycler et à rendre meilleur les systèmes qui, ailleurs, sont très fermés. c’est en france par exemple que mc donald a développé l’ancrage dans la culture locale avec les fournisseurs (80 % des ingrédients viennent du local), qu’il a également réformé l’image du quick service en améliorant le service en salle – parce que la culture française les y incitait… dans la “fine cuisine”, toutes les révolutions en cours ont trouvé leur fondement en france. la culture récente de la cuisine nordique sur le local c’est français. l’aspect santé de la cuisine américaine, c’est également français avec michel guérard, l’aspect universel de la cuisine c’est paul bocuse qui l’a initié… la france est donc un creuset formidable mais l’élite doit se secouer, la province arrêter de complexer par rapport à paris et paris arrêter de mépriser la province. Il faut globalement qu’on accepte de regarder ailleurs 5 minutes pour pouvoir rebondir, remettre la machine à digérer les idées en marche pour relancer la créativité. Luc Dubanchet

Pour acheter le rapport et l’étude du Sirha World Cuisine Summit www.sirha-world-cuisine-summit.com/fr

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LA pHILOSOpHIE D’ALAINAlain Perrillat-Mercerot, un nom qui fleure bon la Haute-Savoie. Mais attention, ne pas confondre avec la famille de Guy Perrillat. Alain, né à Thônes, est du Grand-Bornand, le champion de ski vient de La Clusaz. Trois kilomètres à vol d’oiseau, un monde. Mais surtout pas de querelles de clocher, le gaillard aux rouflaquettes est d’ailleurs depuis longtemps descendu de sa montagne en cuisinant. Il n’a pas pour autant abandonné l’idée de prendre de la hauteur. Il s’est posé avec sa petit famille en surplomb du lac du Bourget-du-Lac.

le restaurant d’alain perrillat-mercerot s’appelle “atmosphère(s)”, tout un programme. avant cela, il a presque tout appris auprès de son mentor, son ami, laurent petit, chef du clos des sens, à annecy. huit ans de bons et loyaux services avant de s’installer à son compte, il y a 10 ans, sans surtout rompre le lien. un coup de fil une fois par semaine, c’est un minimum entre les deux hommes. depuis qu’il défend en solo une certaine idée de la gastronomie alpine, alain perrillat-mercerot ne cesse de tendre vers l’essentiel. ses dressages en lignes de fuite pointent vers le lac, immense miroir de la belle âme de ce cuisinier fraternel et tout en humilité. du genre à prendre le temps d’aller passer trois jours chez un confrère en apparence loin de son univers, tel alexandre gauthier, pour comprendre sa démarche. du genre à proposer un menu du marché, tous les midis, au rapport qualité-prix imbattable.

COmmE UN pOISSON DANS LE LACon l’écouterait des heures raconter les trésors halieutiques de son garde-manger naturel. perche, truite, sandre, brochet, et surtout lavaret, dont le nom générique est coregonus lavaretus mais que l’on connaît aujourd’hui davantage sous le nom de féra, son sobriquet lorsqu’il est pêché dans les lacs léman et d’annecy avant d’être servi

sur les plus belles tables de la région et jusqu’à la capitale. alain travaille lui avec olivier parpillon, héritier d’une longue lignée de pêcheur professionnel, l’un des huit autorisés (sur neuf permis disponibles) à tendre ses filets dans le lac du bourget. avec tout ça, mais aussi un amour éperdu des coquillages et des légumes, il vous attrape en suavité avec une huître “snackée”, une autre émulsion, les deux déposées sur un carpaccio de veau de lait, ou un filet de cabotte chou rave cru, en purée ou en rondelles rissolées, voire une partouze hivernale de racines, topinambour, crosne, salsifi, cerfeuil tubéreux et navet boule d’or, du crémeux au croquant, avec quelques feuilles d’oxalys pour l’amertume.dans le cadre d’une belle défense de son terroir, alain perrillat-mercerot a aussi

construit avec sa femme la plus belle carte de flacons de l’arc alpin au sud de lutèce. on peut s’offrir, toujours avec modération, un verre de mondeuse rouge vv, non filtrée, de chez louis magnin, et on peut même se laisser tenter par quelques grands millésimes exceptionnels, comme cette roussette altesse de marestel 1988 du divin Noël dupasquier. Il n’est d’ailleurs pas loin de réaliser l’un de ses rêves, une “wine list” entièrement alpine. la boucle sera bouclée et les perrillat pourront se retrouver pour trinquer, au croisement de leurs vallées respectives. Stéphane Méjanès

ATMOSPHÈrE(S)618 route des tourNelles73370 le bourget du lacwww.atmospheres-hotel.com

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“LA CUISINE DU XXIE SIèCLE DOIT SE COmpRENDRE ImméDIATEmENT”

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300 experts européens de l’alimentation interrogés, deux études de 200 pages sur les tendances de la food mondiale, des dizaines de pistes pour la restauration de demain : telle est la somme recueillie par l’organisation du premier Sirha World Cuisine Summit qui se déroule aujourd’hui à la Cité Internationale. Entretien avec frédéric Loeb, son Directeur général.

Omnivore : Que révèle l’étude publiée à l’occasion du Sirha World Cuisine Summit qui se déroule aujourd’hui ? frédéric Loeb : bien entendu il y a des tas de tendances. mais nous les avons regroupées en trois pôles fondamentaux. le pôle développement durable, ce que les anglais appellent le “sustainability” qui est intraduisible mais qui allie à la fois des notions de durabilité, de santé et de bien être. ce pôle est tiré en tension avec le “healthfulness”, le mieux être, qui lui même est en tension avec l’expérience, le plaisir sensoriel. tout cela étant sous-tendu par l’unicité, c’est-à-dire le fait que chacun d’entre nous est unique, en quête d’une expérience qui lui est propre. pour revenir sur le territoire du restaurant, nous ne sommes plus au niveau mondial dans l’ère du “on s’éclate toujours plus” mais dans l’équilibre général entre santé, divertissement et sensorialité qui représente chacun 30 % du total.

Et en france ? comme souvent, c’est le vrai french paradoxe. Nous qui pensons faire les tendances de la restauration, sommes totalement à côté de la trilogie. la convivialité domine à 60 % et la santé qui, en moyenne est à 50 % dans le monde entier, n’est qu’à 20 % en france.

Quelle conclusion en tirez-vous ? globalement que la france se voile la face, vit toujours dans une grandeur passée qui n’est plus en adéquation avec le monde. on inscrit notre repas au patrimoine mondial de l’humanité, on fait un réseau de cités gastronomique, mais on ne s’intéresse qu’au passé. on vit dans la nostalgie d’un monde qui n’existe plus. certains chefs sont partis ailleurs et ont parfaitement adapté leur offre au pays où ils sont – l’exemple même étant daniel boulud où Jean-georges vongerichten aux états-unis –, d’autres comme yannick alleno ou Jean-françois piège mettent en place leur vision mais globalement la france reste trop dans le traditionalismes, la tradition.

Vous semblez pessimiste pour l’avenir ? Non je reste optimiste car nous avons une formidable capacité à recycler et à rendre meilleur les systèmes qui, ailleurs, sont très fermés. c’est en france par exemple que mc donald a développé l’ancrage dans la culture locale avec les fournisseurs (80 % des ingrédients viennent du local), qu’il a également réformé l’image du quick service en améliorant le service en salle – parce que la culture française les y incitait… dans la “fine cuisine”, toutes les révolutions en cours ont trouvé leur fondement en france. la culture récente de la cuisine nordique sur le local c’est français. l’aspect santé de la cuisine américaine, c’est également français avec michel guérard, l’aspect universel de la cuisine c’est paul bocuse qui l’a initié… la france est donc un creuset formidable mais l’élite doit se secouer, la province arrêter de complexer par rapport à paris et paris arrêter de mépriser la province. Il faut globalement qu’on accepte de regarder ailleurs 5 minutes pour pouvoir rebondir, remettre la machine à digérer les idées en marche pour relancer la créativité. Luc Dubanchet

Pour acheter le rapport et l’étude du Sirha World Cuisine Summit www.sirha-world-cuisine-summit.com/fr

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100 % éTAINun matériau “dans lequel on peut faire des trous”, qu’on peut tordre dans tous les sens et qui a l’avantage d’être conducteur, c’est le nouveau dada de la designer gastronomique Sylvie amar. elle s’est pressée d’achever sa collection de huit pièces – bols et assiettes – pour la présenter en avant-première au Sirha, dans le hall 4. L’idée est venue du japon, quand la fonderie quasi-centenaire nousaku, branchée décoration intérieure et aspirant à l’art de la table, l’a approchée l’année dernière. Depuis, William Ledeuil, kei kobayashi, Sébastien Serveau entre autres ont dressé dans cette vaisselle d’un nouveau genre. “Il y a des contraintes auxquelles il a fallu penser, comme l’empilabilité pour la salle, mais je me suis éclatée. c’est un super matériau qui permet aux chefs une initiative d’auteur sur le support”. La collection a charmé surtout les pâtissiers et les dingues de bouchées. vrai que “du couteau en inox et de l’assiette en étain, c’est le couteau qui gagne”.

AmbIANCE SUCRéEaprès la boulangerie, la pâtisserie. Le grand amphithéâtre du hall paul bocuse est plein à craquer pour accueillir la coupe du monde de pâtisserie qui se déroule jusqu’au lundi 28 janvier. au fond, comme sur scène, onze équipes venues du monde entier, de Malaisie ou de tunisie, de colombie ou du Danemark, de France, bien sûr, mais aussi, nouveauté, d’égypte et de côte d’Ivoire. c’est déjà la 13e édition de cette compétition au goût sucré qui met aux prises 22 équipes au total, composées d’un pâtissier, d’un chocolatier et d’un glacier. en ce premier jour, la compétition est véritablement lancée avec une tribune rouge et blanc pleine de jeunes japonais, la plupart élève de l’école Ritz-escoffier. Ça chante, ça danse, ça crie, ça tape sur des tambours. une joie communicative qui promet une ambiance de stade de foot à l’heure de la finale.

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AIN

zOOm SUR kITCHENAIDDepuis plus de 90 ans, chaque nouveauté kitchenaid, fondé par herbert johnston, ingénieur originaire de l’Ohio et inventeur du premier robot à usage commercial, est attendue avec impatience. c’est dans l’aDn de la marque américaine, véritable labo du robot, à l’instar d’une écurie de F1 pour l’industrie automobile. L’année 2013 ne déroge pas à la règle. un mixeur plongeant sur batterie : beaucoup de cuisiniers fatigués de courir d’un poste à un autre avec un fil à la patte en rêvaient. avec son modèle artisan, couleur “pomme d’amour”, kitchenaid présentera en avril 2013 une vraie girafe à long cou, équipée d’une batterie lithium-ion rechargeable (fourni avec une batterie de rechange) et de toute une gamme d’accessoires (fouet, hachoir et lames). côté robots ménagers, l’innovation est encore plus culinairement responsable. un système de réglette breveté permet de modifier la hauteur de coupe en fonction de l’ingrédient sans avoir à démonter l’appareil à chaque fois. Il offre même la possibilité de découper en lamelles (façon tagliatelles), pas seulement en rondelles et de préparer des brunoises avec des cubes de 8 mm. Le fameux robot sur socle de toute les couleurs qui a fait la renommée de kitchenaid n’est décidément plus seul en cuisine, il a des tas d’amis.

réDacTiONdIrecteur de la rédactIoN LuC DuBAnCHETdIrectIoN artIstIque et photos DIMITrI MAj coordINatIoN ESTELLE HALADjIAn / dImaJ-studIorédactIoN LuC DuBAnCHET, kIM LEVy ET STéPHAnE MéjAnÈSdIrecteur commercIal jEAn-CHrISTOPHE TIrABy - tél. : +33 (0)1 44 31 52 11ImpressIoN fErréOL - 69330 meyzIeu

WWW.OMnIVOrE.COMomnivore magazine est édité par sarl omnivore au capital de 486,40 euros • rcs paris b 450 370 929 directeur de la publication : luc dubanchet

fOODSTuDIO / SIrHA / PLACE DES LuMIÈrES

SAMEDI 26 jAnVIEr10H00–13H00 Le “diner” américain du 21e siècle gita seaton Nouveau palais (montréal)14H00–17H00 Le secret des raviolis Chinois shen hóng, feng shui ying, Wang diao xia, sun dan dan sheng Jia (shanghai)

DIMAnCHE 27 jAnVIEr10H00–13H00 Cuisine d’eau douce alain perrillat-mercerot atmosphères (bourget du lac)14H00–17H00 néo bistrot à la Lyonnaise christophe hubert effervescence (lyon)

LunDI 28 jAnVIEr10H00–13H00 néo bistrot à la Lyonnaise guillaume monjuré le palégrié (lyon)13H30–16H00 Cuisine spontanée Jean-michel carrette aux terrasses (tournus) MArDI 29 jAnVIEr10H00–13H00 Tacos haute couturegaëlle cerf et marc-andré leclerc grumman’78 (montréal)14H00–17H00 La nouvelle cuisine russe Ivan shishkin delicatessen (moscou)

MErCrEDI 30 jAnVIEr10H00–13H00 ABBA les rognonsmathieu rostaing et france gonzalvez

MErCI À nOS PArTEnAIrES

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cOUPE DE FRANcE DE bOULANgERIE11h00, le sirha est inauguré en grandes pompes, littéralement, par des clowns déguisés en chefs – à moins que ce ne soit l’inverse –, montés sur des échasses. “hé, toi ! on t’attend en cuisine !”, c’est la drague, dans les allées, d’une foule naissante. il y a aussi des sortes de derviches-oriflammeurs qui s’agitent dans tous les sens. intrigant. le cortège stoppe net, d’un coup, au fond du hall 4, devant la rangée de jurés de la coupe de france de boulangerie. Jean-yves gauthier, de la confédération nationale de la boulangerie, salue les douze équipes dans leurs six boxes ornés du blason de nos régions. pendant les deux jours d’ouverture du salon, elles se défient à base de “pains, viennoiseries et pièces artistiques” pour remporter le titre, dimanche à l’heure du thé.

à TOmbER DANS LES POmmESça s’appelle Neige, ça vient du canada, c’est du cidre de glace. une invention d’à peine vingt ans, inspirée à quelques québécois malins par les vins de glace. ici, c’est la pomme qui est gelée. c’est de la cryo concentration, un nom barbare pour un résultat civilisé. certaines variétés de pommes (mcintosh et spartan), sont récoltées en octobre et conservées au frais avant les grands froids. il est alors temps de presser et de laisser le jus à l’air libre. l’eau monte en glaçant, le sucre reste au fond. par gravité, on récupère ce nectar et on le fait fermenter. la grande cuvée est même élevée six mois en fûts de chêne. d’autres pommes, plus robustes, sont décrochées déjà cryogénisées. au final, on assemble entre deux et neuf variétés différentes, selon les cuvées, et on y ajoute même parfois une petite liqueur qui transforme le jus en demi-sec très légèrement pétillant. une belle robe jaune lumineuse, de l’acidité mais aussi de la rondeur, des fruits confits, on sert bien froid sur des fromages à pâte ferme (cheddar ou chèvre) ou persillée (bleu). avec modération, tabernacle.neige Première – cidre de Glace, Québecwww.lafacecachee.com

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zOOm SUR POmONASans attendre la déferlante utile et nécessaire du “local”, Pomona s’est engagé depuis de nombreuses années, au travers de sa branche terreazur, dans un travail de fond auprès de producteurs de fruits et légumes sélectionnés partout en France. Ils sont 1350 aujourd’hui. Le Sirha est une bonne occasion de présenter ce travail de terrain sur un stand qui occupe un bel espace au centre du hall 3. Mais pour aller au-delà de la présentation basique des produits, la marque a décidé de les mettre en scène grâce à ses conseillers culinaires. neuf tendances ont été dégagées sous le nom “air du temps”, du bistro du Marché à l’Âge tendre en passant par l’exotic Street Food. Les chefs maison ont élaborés des recettes inspirantes pour leurs collègues qui n’ont pas toujours le temps de lever la tête du piano. De simples queues de crevettes découpées, posées sur de fines lamelles de radis noir, entourées de soja, coriandre, navet blanc, nigelle, échalote et gingembre, juste saisies par la chaleur d’un bouillon de poulet et fumet de poisson. Quelques tranches de homard aux herbes potagères, sur une gelée tremblotante de fenouil et orange. Des plats aériens parce que dans air du temps, il y a surtout air.

réDactiondirEctEur dE la rédactioN LuC DubaNChEtdirEctioN artistiquE DiMitRi MaJ coordiNatioN EStELLE haLaDJiaNrédactioN LuC DubaNChEt, kiM LEvy Et StéPhaNE MéJaNèSphotos DiMitRi MaJimprEssioN fERRéoL - 69330 mEyziEu

www.oMNivoRE.CoMomnivore magazine est édité par sarl omnivore au capital de 486,40 euros • rcs paris b 450 370 929 directeur de la publication : luc dubanchet

fooDStuDio / SiRha / PLaCE DES LuMièRES

SaMEDi 26 JaNviER10h00–13h00 Le “diner” américain du 21e siècle gita seaton Nouveau palais (montréal)14h00–17h00 Le secret des raviolis Chinois shen hóng, feng shui ying, Wang diao xia, sun dan dan sheng Jia (shanghai)

DiMaNChE 27 JaNviER10h00–13h00 Cuisine d’eau douce alain perrillat-mercerot atmosphères (bourget du lac)14h00–17h00 Néo bistrot à la Lyonnaise christophe hubert Effervescence (lyon)

LuNDi 28 JaNviER10h00–13h00 Néo bistrot à la Lyonnaise guillaume monjuré le palégrié (lyon)13h30–16h00 Cuisine spontanée Jean-michel carrette aux terrasses (tournus) MaRDi 29 JaNviER10h00–13h00 tacos haute couturegaëlle cerf et marc-andré leclerc grumman’78 (montréal)14h00–17h00 La nouvelle cuisine russe ivan shishkin delicatessen (moscou)

MERCREDi 30 JaNviER10h00–13h00 abba les rognonsmathieu rostaing et france gonzalvez

MERCi À NoS PaRtENaiRES

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dAvid TouTAin esTsailOr et tuna

LE fEStivaL DE La JEuNE CuiSiNE

PaRiS17-19 MaRS 2013 MAISON De LA MUTUALITÉ

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