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Martine Vanhove La langue malt,aise un carrefour linguistique Pendant longtemps les linguistes se sont interrogés sur la disparition de toute trace d'une langue précédente, punique, latine ou grecque, dans la topo- nymie maltaisel. De même, les archéologues se sont étonnés de l'absence de restesde la période arabe à Malte, les plus anciens vestigesremontant à l'époque où les Normands avaient déjà repds l'Archipel aux Arabes. La récente décou- verte de Joseph Brincat (1991) semble enfin lever le voile sur ces mystères : dans l'édition à Beyrouth du dictionnaire géographique (1975 : 520) de al- Himyarî (m. 900/1494) il est en effet mentionné que l'île de Malte fut vidée de sa population à la suite de la conquête arabe et repeuplée seulement par les musulmans et leurs esclaves à partir de 440/1048-49 (J. Brincat, 1991 : 2). Le récit de al-Himyarî apporte de quoi mettre définitivement un terme à toutes les spéculations qui eurent cours jusqu'auXIXe siècle dans le milieu des grammairiens quant à une origine phénicienne, punique ou "cananéenne" de la langue maltaise, et qui a encore aujourd'hui les faveurs d'une grande par- tie de la population maltaise, tant les préjugés contre tout ce qui peut avoir un lien avec la religion musulmane sont fortS dans ce pays profondément catholique. Il paraît possible que l'Archipel ait été repeuplé à partir de la Sicile (J. Brincat, 1991 : 8). Les musulmans2 auraient donc régné sans partage sur l'archipel Maltais pendant 42 ans seulement, jusqu'en 1090, date à laquelle le comte normand Roger reconquit l'île pour la chrétienté. Plus d'un siècle et

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Martine Vanhove

La langue malt,aise

un carrefour linguistique

Pendant longtemps les linguistes se sont interrogés sur la disparition detoute trace d'une langue précédente, punique, latine ou grecque, dans la topo-nymie maltaisel. De même, les archéologues se sont étonnés de l'absence derestesde la période arabe à Malte, les plus anciens vestigesremontant à l'époqueoù les Normands avaient déjà repds l'Archipel aux Arabes. La récente décou-verte de Joseph Brincat (1991) semble enfin lever le voile sur ces mystères :dans l'édition à Beyrouth du dictionnaire géographique (1975 : 520) de al-Himyarî (m. 900/1494) il est en effet mentionné que l'île de Malte fut vidéede sa population à la suite de la conquête arabe et repeuplée seulement par lesmusulmans et leurs esclavesà partir de 440/1048-49 (J. Brincat, 1991 : 2).Le récit de al-Himyarî apporte de quoi mettre définitivement un terme àtoutes les spéculations qui eurent cours jusqu'auXIXe siècledans le milieu desgrammairiens quant à une origine phénicienne, punique ou "cananéenne" dela langue maltaise, et qui a encore aujourd'hui les faveurs d'une grande par-tie de la population maltaise, tant les préjugés contre tout ce qui peut avoirun lien avec la religion musulmane sont fortS dans ce pays profondémentcatholique. Il paraît possible que l'Archipel ait été repeuplé à partir de la Sicile(J.Brincat, 1991 : 8). Les musulmans2 auraient donc régné sans partage surl'archipel Maltais pendant 42 ans seulement, jusqu'en 1090, date à laquellele comte normand Roger reconquit l'île pour la chrétienté. Plus d'un siècle et

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demi plus tard, l'empereur Frédéric II expulsera, en 1249, les derniers musul-mans, peut-être encore majoritaires selon une estimation datant de 1241 (B.Blouet, 1984: 37)3.

Ces deux siècles de présence musulmane ont jté déterminants pour l'his-toire linguistique de Malte, puisque c'est encore une variété d'arabe qui y estparlée, proche vraisemblablement de celle des vieux dialectes citadins de Tuni-sie (D. Cohen, 1988: 106). Lavanœe des études sur l'arabe de Sicilepermettrapeut-être de préciser lesliens linguistiques entre les deux îles méditerranéennes.

Les conditions du mélange linguistique

Pratiquement huit siècles de coupure quasi totale d'avec le monde arabo-musulman au profit de liens étroits avecle monde chrétien voisin (avec encou-ragement à l'émigration des ltaliens4,voireparfois déportations de population5),ont natUrellement ouvert la voie à bien des apports étrangers dans la langue.Celui du sicilien d'abord jusqu'au XVIIesiècle, puis de l'italien toscan, peut-être par l'intermédiaire aussi d'une linf,U1franca6, enfin de l'italien moderneet de l'anglais, mais à une date beaucoup plus récente pour ce dernier, soninfluence réelle sur la langue maltaise datant du milieu du xxe siècle. Le sici-lien, l'italien, et dans une bien moindre mesure l'anglais, ont laissé leurempreinte sur tous lesplans de la langue, tant phonétique que morphologique,lexical ou syntaxique, à des degrés divers, mais pas au point qu'il soit impos-sible de reconnaître immédiatement un dialecte arabe. Par contre, ce quiconfère au maltais un statut particulier, héritage de ces contacts, c'est l'adop-tion d'un alphabet en caractères latins, proposé en 1921 par l'Association desécrivains maltais (/-Ghaqda tal-Kitti~ba Malfin) et officialisé par le gouverne-ment en 19347. De plus, le maltais est devenu la séule langue nationale del'Archipel, cas unique pour un dialecte arabe, ainsi que la langue officielle,conjointement avec l'anglais.

Si les apports siculo-italiens, puis anglais, ont été importants, il n'en restepas moins que le maltais ne s'est pas contenté d'emprunts bruts et qu'il a sou-vent su les adapter à sespropres struCtureslinguistiques héritées de l'arabe. C'esten cela qu'on peut parler de "carrefour". Toutefois il ne faudrait pas négliger,bien qu'il soit extrêmement difficileà évaluer,le rôle conservateur qu'a pu avoirla présence d'esclaves arabo-musulmans en grand nombre sur l'île O. Cassar-Pullicino, 1992 : 68-79). C'est ainsi qu'à la fin du XVIIIesiècle, le grammai-rien et lexicographe maltais M. A. Vassalli(1796 : XVII)pouvait écrire à pro-posdu dialectede LaValetteet desbourgsvoisins:ccl'influencede l'arabe [est]asseznette, à cause peut-être du trop grand nombre de prisonniers musulmans»(traduction G. Puech 1994 : 173). On sait aussi que l'arabe classique futenseigné à Malte dès 1632, d'abord dans les ordres religieux à des fins prosé-lytiques, puis dans le système universitaire et scolaire au cours du XIxesiècleavec des succès inégaux (D. Agius, 1990). On saisit ainsi mieux l'influence de

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l'arabe sur les intellectuels maltais et sur la littérature maltaise dont les débutS,

à la fin du XIXesiècle et au début du ){Xe,ont été fortement marqués par unetendance dite "sémitisante"qui conduisit à la création de nombreux néologismestirés de l'arabe, dont bon nombre sont devenus incompréhensibles. Mais cetteinfluence, limitée et désormais caduque, n'a évidemmènt rien eu à voir avecles effetS actuels de koïnisation qu'exerce l'arabe standard sur les dialectescontemporains.

Mono- et multilinguisme : histoire et état actuel

Si l'on excepte une cantilène de vingt versdatant du xvesiècle (cf. D. Cohenet M. Vanhove, 1991), quelques poèmes et un recueil de sermons entre le XVIIeet le XIXesiècle (M. Vanhove, 1987: 284-5), le maltais est resté pendant dessiècles un moyen de communication oral. Ce sont d'abord le latin et le sici-lien qui servirent de langues administratives; elles furent supplantées dans cerôle par l'italien toscan à partir du XVIesiècle et c'est en italien que les écri-vainsmaltaissexprimentdu XVIIeau début du){Xesiècle,même si, au XIXesiècle,commence à se développer une littérature en l:ingue maltaise. Sous la domi-nation britannique, l'italien restera la langue officielle jusqu'en 1934, date àlaquelle, en raison de la montée du fascisme, maltais et anglais devinrent lesdeux langues officielles de l'Archipel.

Il est difficile de dire dans quelles proportions la population ~altaise a étésoumise à un bilinguisme maltais-italien,mais on sait que l'italien a été la langued'enseignement jusqu'au XIXesiècle et la langue de relation parmi les couchescultivées. Même si l'on peut soupçonner que l'influence du siculo-italien futmoindre sur le parler des habitantS de Gow et des paysans analphabètes vivantà l'écart des grands centres urbains que sur celui des citadins, il est clair quedes liens étroits avec la Sicile ont continué d'avoir cours sous la domination

des chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem et que des administrateurs, com-merçantS, artisans, marins et pêcheurs parlant le sicilien et l'italien ont affluédans les îles Maltaises au m des siècles, relayés au XIXesiècle par l'émigrationdes exiléspolitiques italiens encouragée par les Britanniques. Mais il a certai-nement fallu pour le moins un grand prestige du sicilien et de l'italien, dou-blé d'une bonne dose de bilinguisme, même avec des degrés de maîtrise dif-férentSselon les locuteurs, pour expliquer la part très important~ des élémentSd'origine siculo-italienne en maltais. M. A Vassalli (1796 : XVI-XVII)s'insur-geait déjà à la fin du XVIIIesiècle contre'le snobisme de certains habitantS deLa Valette qui truffaient leurs discours de motSet d'expressions siciliennes, ita-liennes, en les "maltisant".

Actuellement, Malte connaît un bilinguisme maltais-anglais quasi généra-lisé, favorisé par le système scolaire et la presse écrite. Tous les examens, àl'exception du maltais, se déroulent en anglais, mais les élèvesont le choix dela langue pour la religion, l'histoire de Malte et les sciences sociales, et aucune

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règle n'a été édictée quant à la langue à utiliser comme moyen d'instruction,d'où un recours abondant au discours mélangé (A. Camilleri, 1994: 432-3),qù on retrouve souvent en dehors de la classe.Mais pour lesgénérations de plusde 50 ans, et pour toutes dans des hameaux reculés.}la connaissance de l'anglaisest plus limitée, voire extrêmement rudimentaire. Outre une presse en languemaltaise, il existe aussi des quotidiens et hebdomadaires en langue anglaise degrande diffusion et la chaîne de télévision nationale propose de nombreux pro-grammes en anglais.Toutefois, l'empreinte de l'anglais sur le maltais, bien réelle,est pour l'instant sans commune mesure avec les influences siciliennes et ita-liennes.

Par ailleurs, le trilinguisme maltais-anglais-italien est fréquent chez les Mal-tais et une très grande parcie de la population possède encore une bonne maî-trise de l'italien, même si son succès scolaireest moindre que celui de l'anglais.rimpact des chaînes de télévision italiennes qui sont facilement captées dansl'Archipel et très regardées, est considérable.

Pour mémoire, il convient aussi de faire allusion à la tentative d'introduc-tion d'un enseignement obligatoire de l'arabe dès le secondaire et à l'univer-sité par le Gouvernement travailliste. Elle;"est soldée par un échec quasi com-plet, en grande partie à cause des préJugés religieux mentionnés plus haut. Aquelques raresexceptionsprès, le niveauatteint par lesétudiants fut extrêmementfaible,et sa suppression par le Gouvernement nation~iste en 1987 fut accueillieavec soulagement.

Les changements phonétiques

Lorsqu'on dresse le tableau phonologique du maltais actuel, on est frappédès l'abord, au-delà de la constance du nombre de phonèmes par rapport àl'arabe, par la réduction de ceux hérités de l'arabe, compensée par l'acquisi-tion de phonèmes nouveaux. On peut en suivre l'histoire grâce aux diversesattestationsécritesdu maltaisdepuis le xvesiècle(poésies,mais aussitextesjudéo-arabes et actes notariaux, puis travaux des grammairiens et lexicographes desXVIIIeet XlXesiècles,recueilsde textesen caractèresphonétiques par des savantsau début de ce siècle). Certains changements s'expliquent par des empruntsdirects, mais d'autres, tout aussi imputables à des influences étrangères, sontle résultat de transferts de distinctivité. Il est enfin certaines évolutions dont

on retrouve le parallèleexact dans maints dialectes arabes, sans qu'il failley voirla marque d'une action extérieure.

Si l'absence d'interdentales remonte à la période pré-historique du maltais8,par contre, l'existence de consonnes emphatiques aujourd'hui disparues sembleanciennement prouvée par le témoignage des textes judéo-arabes de la fin duxvesiècle (G. Wettinger, 1985: 189). Il n'en existe aucune trace postérieure.Il est probable qu'il faille voir dans la confusion des emphatiques I~/, ItJ, Ic-JI« Ic-JIet I~/) et Irl avec les non-emphatiques correspondantes Isl, hl, Idl et

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La I4ngut maltttÙt. Ullcarrifour /inguÙtiqut / III

Irl un effet du prestige du siculo-italien qui a entraîné une réinterprétation deréalisations phonétiques contextuelles en oppositions phonologiques. Desvariantes vocaliques se sont phonologisées par transfert de distinctivité, etdésormais de nombreux mots s'opposent par le timbre de la voydle et non pluspar la qualité de la consonne: lsayfl (ar. ~ayf) "été".vs.l'f.eyfl (ar. sayf) "sabre",Ibaradl (ar. tun. barad) "limer" ys. Ibiredl (ar. tun. bred) "devenir froid". Laprésence de la voyelle d'arrière lai permet ainsi de restituer une ancienneconsonne emphatique: Ibatall "devenir vacant" < ar. bataJ, Idalaml "s'assom-brir" < ar. ~alam.

Par contrecoup, le nombre des voyelles s'en est trouvé augmenté. Le mal-tais standard contemporain comporte 4 voyellesbrèves (a, e, i, 0) et 6 voyelleslongues il, ê, i, i~9, Ü, 5. En dehors de la perte de l'emphase, plusieurs autresfacteurs ont concouru à accroître l'inventaire des voyelles: l'action de l'imala,qui hors contextes conditionnants (c'est-à-dire anciennes emphatiques etconsonnes d'arrière) a entraîné le passage de il à i~ ; les emprunts massifs ausiculo-italiendont le résultat fut l'introduction des voyelleslongues 5 et ê ; enfinl'évolution bien connue des dialectes maghrébins de a bref vers i mais qui, enmaltais, s'est arrêtée à la voyelleintermédiaire E(~ur des détails, voir D. Cohen,1970: 146).

La disparition des consonnes d'arrière est également due à l'influence dusiculo-italien qui n'en possède pas. La spirante vélaire sourde b s'est confon-

due avecla pharyngale1),lesspirantesvélaireset pharyngalessonoresget ( etla laryngale h ont disparu. On peut suivre l'évolution de ces changementsdepuis le XVIIIesiècle, grâce aux travaux de M. A. Vassalli (1796), L. Bonelli(1897-1907), A. Preca (1904) et H. Srumme (1904), jusqu'à nos jours. Laconfusion de b avec 1), de même que celle de g avec ( n'est attestée au temps

de Vassalliqu'à La Valette et les bourgs environnants, ainsi qu'à Qormi, confu-sions qui vont progressivement se répandre jusqu'à la situation actuelle où gne survit plus sporadiquement que dans qudques villagesde Gozo (G. Puech,1994) et où même l'articulation de ( en tant que pharyngale s'est éteinte1o.

Enfin, quatre consonnes sont directement empruntées au stock phoné-mique siculo-italien : p, v, Cet ts. Là, comme dans les cas ci-dessus, l'intégra-tion ne s'est pas faite dès le départ et bien des emprunts anciens au sicilien com-portant p et v ont une forme correspondante avec b et f, respectivement, enmaltais : Ibd5t1 "pilote" < sic. pidotu, Ibandall "balancer" < sic. pmduliari,ISEnürl "serviteur" < sic. Strvituri. On peut également attribuer à l'italienl'emploi plus large de l'occlusivepostpalatale sonore g. présente antérieurementseulement dans les mots provenant du berbère.

La quasi-généralisation. de l'évolution de l'occlusive uvulaire sourde q versl'occlusive laryngale ) est un phénomène relativement récent en maltais qu'onne peut attribuer à une qudconque pression étrangère. Il reproduit bien plu-tôt un changement très largement attesté dans de nombreux dialectes arabes,

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surtout orientaux d'ailleurs. Vassalli (1796 : XIX)ne le mentionne que pourle village de Zc:bbug, mais chez Stumme (1904) il s'est étendu à tous les dia-lectesdu ce:nneet de l'ouest dans l'île de Malte, et sc:ulementau villagede Gharbà Gozo. Aujourd'hui, on ne trouve plus que quelques réalisations éparses deq comme une uvulaire:(voir G. Puech, 1994: 18).

D'autres phonèmes étrangers semblent être actUellement en voie d'inté-gration, de même que des changements phonétiques se dessinent sous l'influence:de l'anglais. Une consonne affriquée dz, encore très marginale et concurren-cée par une articulation sans affrication z, commence à pénétrer dans le sys-tème p~onologique de la langue (gadzdzetta ou gazzetta "journal"), ainsiqu'une voyc:llebrèveu, pour laquc:lleon trouve quelques pairesminimales,mêmesi u est encore souvent réalisé:>: illustra "illustrer", mais iIl:>stra"cirer". Enfin,en raison du bilinguisme très poussé, et de ce qui est perçu comme un ce:rtainsnobisme, beaucoup d'habitants de la conurbation de Sliema, ont une arti-culation laryngale h de la pharyngale spirante sourde I},alors que cette arti-culation n'est qu'une variante (rare) de la pharyngale 1}chez les autres locu-teurs.

Les changements morphologiques

Le:maltais a hérité de l'arabe un système morphologique fondé en grandepartie sur la dérivation indirecte par le croisement entre une racine et unschème. Il est actuellement moribond, en ce:sens que pratiquement plusaucune création lexicale ne se fait par son intermédiaire. Il rien a pas toujoursété ainsi, le nombre d'emprunts anciens, noms et verbes, qui s'y sont adaptésen portent le témoignage et ce sont eux que nous examinerons d'abord.

Bien des emprunts n'ont en effet eu aucune difficulté à se "naturaliser", carleur structUre syllabique correspondait à des schèmes déjà existants en maltais,ou s'en rapprochait suffisamment pour n'avoir à subir que des modificationsmineureScomme la chute des voyc:llesb*,es finalesou bien l'allongement d'unevoyc:lleinterne:.J. Aquilina (1973: 308-9) recenseseize:schèmesnominaux dontvoici quc:lques exemples :

CI C2ïC3 : Igrïzl "gris" < v.it. griso;ClaC2C3 : IbaS~1"bas" < sic. basciu;

ClaC2C2ïC3: lkattivl "cruel" < it. cattivo.

D'autres mots d'origine siculo-italienne ont été soumis à une restructura-ti<?nsyllabique et phonétique plus importante pour se conformer aux modèlesmaltais:

ClaC2C3üC4: Is~Jtürl "serviteur" < sic. smJitun.

. Le:système de dérivation verbo-nominale par schèmes a peu servi pour lesemprunts. On trouve le schème verbal à 2e consonne radicale géminée, etson correspondant réfléchi-passif à préfixe t- :

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La langut II1llltllÙt. un Cllrrtfour lillguistiqut 1173

IfallatSl "falsifier", Itfallatsl "être falsifié" < sic. falsulkacca! "chasser",ltkacca! "être chassé" < it. caccia".

Mais il convient de préciser que la plupart de cesformes sont aujourd'huiobsolètes.Ainsi lfallatsl (répertorié en 184511)n'est plus ~nnu desjeunes locu-teurs et a été remplacé par liffalsifikal (répertorié en 1936). Les quadrilitèresont eu, semble-t-il, un peu plus de vitalité, tant pour leur fonction dénomi-narive que pour la dérivation verbale:

IrembElI "étaler la pâte au rouleau",ltrembeU "être étalé" < sic. rummulu"rouleau".

Les quelques verbes adaptésau schème CIC2aC3 n'ont plus de réalité quedans lesdictionnaires, et peut-être encore dans le parler de quelques vieillardsde Gozo. .

Le lexique d'origine siculo-italienne a fourni également des schèmes departicipe àpréfixe m-, pour desbasesà2econsonne radicale géminée et lesqua-drilitères :

ImbaS~il "humilié" < baS~"bas"

Imbaccacl "arrondi" < Ibaccacl "rendre rond" < Ibxca! "boule" < sic.

bboccia, it. boccia

Imbandall "balancé"< Ibandall "balancer"< sic.panduliari.Il y a même eu quelques rares casoù un schème de comparatif s'est formé

sur la based'un adjectif d'origine italienne comprenanttrois consonnes:lifreml "plus ferme" < Iferml "ferme" < it. fermo.De telIes formations sont aujourd'hui extrêmement rares, si ce n'est impos-

sibles.

Par contre, les schèmes de pluriel interne, même s'ils sont concurrencés parles formesà suffixes12font preuvede plusde résistance.Dans un articleclairet précis, M. Mifsud (1994b) montre jusqu'à quel point ils continuent d'êtreproductifs dans les termes d'origine étrangère, principalement sicilienne et ita-lienne, mais aussi anglaise. Sur les treize schèmes de pluriel interne qu'ildénombre, six sont très bien représentés dans les termes importés, les deux pfusfréquentS étant: ClvC2C2vC3 (/~sa! "boîte", pl./~seS/; Ifalts! "faux",pl./fJbtSl), et CIC2aC3vC4 (/sEivaggl"sauvage",pl./slavag/; ltapitl "tapis",pl. Irwapetl).

Peut-être plus importantS encor~ pour démontrer la vitalité de ce fonc-tionnement, lesmots empruntés comportant quatre ou cinq consonnesontaussi produit de nouveaux schèmes, sur la base des anciens, grâce à la capacitédu maltais d'accepter les groupementS de consonnes en position iniriale : ainsiCIC2aC3vC4 a pu se développer en CIC2C3aC4vC5 (/skarpanl "cordon-nier", pl./skrapan/) et en CIC2aC3C4vC5 (/praspüral "bêtise", pl./prasparl).De même CIC2vYYvC3 a donné CIC2C3vYYvC4(/skrünl "tournevis",pl.Iskreyyenl < ang. screw).Plus novatrices encore sont les formations hybrides,

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où de longs mots à structure syllabique étrangère au stock arabe ont aussidonné naissanceà des pluriels internes où seulela partie finaledu mot est concer-née, le début restant invariablel3 : IpErsyanal "persienne", pl. IpErsyayyEn/,lumbrEllal "parapluie", pl. lumbrelEl/. Bien qu'assez peu abondantes, cesformesde pluriel ..

"Representan interestingstageof devdopmentin whicha modusvivmdi isde-gandy reached betWeenthe exacting internaI inflexion of Arabie and theconcatenativemorphologyof the borrowedIexeme.This mightweIlbe des-cribedas a newmorphologicalcapaciryof theArabiedialea ofMalta to tacIdepoIysyllabIes,whichmakesuseof the nativemorphologicalstructureswithoutacceptingtheir limitations." (M. Mifsud, 1994b: 104).

D'autres adaptations morphologiques, moins spectaculaires,ont eu lieu. Oncitera pour mémoire l'adjonction du suffixedu duel au mot Ispallal "épaulé",duel/spaltEynl "deux épaules" < it. spalla"dos de siège".

Mais l'adaptation la plus poussée à la morphologie arabe s'est située dansle domaine de la conjugaison verbale. En dehors de quelques verbes discutésplus haut qui se sont fondus avec les verbt$,arabes à trois ou quatre consonnes .!focres, la conjugaison des verbes d'origine étrangère s'est intégrée au modèledes verbes à 3cradicale semi-vocalique, quelle que soit leur StructUre:syllabique.A l'inverse du fonds arabe, la base verbale demeure invariable. De nouveau,nous avons donc affaire à un compromis entre deux langues de structuresdifférentes. La répartition en deux classes à voyelle finale -a ou -i à l'inac-compli s'est effectuée selon des critères étymologiques, un infinitif en -aredonnant -a alorsque celuien -irea donné -i : .

ippublika"publier"< it.pubblicar(accompli inaccompliippublikayt nippublikaippublikayt tippublikaippublika yippublikaippublikat tippublikaippublikayna nippublikawippublikaytu tippublikawippublikaw - yippublikaw

« . » .".sErva servir < It. s(rvzre

accompli inaccomplisErvEyt nSErviSErvEyt iSSErvi14sErva iSErvisErvi~t issErvi

sErvEyna nsErvusErvEytu issErvusErvEw iSErvu

sg. 123m3f123

pl.

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pl.

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Par ricochet, l'apport massif de verbes d'origine siculo-italienne et anglaisen'a pas été sans conséquence s~r le dévdoppement du système hérité de l'arabe.Tout d'abord la dérivation verbale, quoique très transparente dans une partie

. du lexique, est complètement figée (M. Vanhove, 199,3.: 19-37), toute créa-tion lexicale passant par l'emprunt ou l'utilisation de périphrases verbales.Ensuite, l'abondance du type de conjugaison "faible" a entraîné dans sonsillagedes verbes "fons". Elleavait déjà absorbé lesverbes à finale occlusiveglot-tale >,et dans une partie de la conjugaison seulement, les verbes à consonnefinale géminée (les verbes sourds), ainsi que ceux comportant les vélaires fri-catives (et g(voirM. Mifsud, 1994a: 249-256)15.M. Mifsud (1994a: 261-262) note une tendance croissante, bien que condamnée par les gardiens dela pureté de la langue, à faire basculer dans ce type de conjugaison certainescatégories de verbes pour des raisons phonétiques. C'est le cas pour ceux quiont une occlusive suivie d'une fricative comme 2e et 3e radicales, réinterpré-

tées comme une affriquée. Ainsi lfittdl "chercher" fluctue entre lfittistl et!ficcEyt/ "je cherchai", !O~cbs!"plonger" entre !O~d~stlet !O~tstsEyt/"je plon-geai". Il en va de même pour les verbes à 2e radiale semi-vocaliquel6 : IOaml"nager", !Oumtl ou !O~mEyt!"je nageai", IOÊnl"aider", !OEnt!ou IOEnEytl"j'aidai"I?

Ce type de conjugaison, marginal au départ, est devenu majoritaire et le seulqui soit productif (M. Mifsud, 1994a: 263).

Les noms d'emprunts se sont aussi adaptés à l'adstrat arabe par les plurielsexternes qu'ils ont formés. Les suffixes de plurid d'origine arabe se retrouventavec des noms provenant du sicilien, de l'italien ou de l'anglais. -a, spécifiqueà un nombre réduit de schèmes, se trouve dans les emprunts dissyllabiques ou

trisyllabiques à finale -i~r ou -ar O. Aquilina, 1973 : 311-2) : !~wvErsi~ral"contremaîtres" < ang. ov~rs~er,!burdnaral "muletiers" < sic. burdunaru. Lessuffixes de pluriel -i~t et -iyyi~t, réservés aux noms féminins, s'ajoutent aussibien au féminin qu'au masculin dans les mots empruntés. -i~t s'utilise aprèsles noms à finale -a, -iyyi~t après toute autre finale : Ibrtal "papier", pl.Ibrti~tI, masc./v5t1 "vote", pl./~tiyyi~tI, fém./s5ru1 "nonne", pl./~riyyi~tI.

Le mélange de langues de structures morphologiques radicalement différentesn'a pas entraîné que des adaptations à sens unique. D'emprunts dè mor-phèmes à des accommodements de l'arabe au superstrat siculo-itaIien, en pas-sant par des créations originales étrangères aux langues sources, toute la gammedu métissage s'est jouée pour résoudre les conflits struCturaux nés de ces ren-contres.

Dans le domaine des emprunts de morphèmes, ce sont surtout les suffIxes,dont les langues sémitiques en général et l'arabe en particulier ne possèdentqu'un nombre très réduit, qui ont fleuri, permettant ainsi une dérivationdirecte, beaucoup plus transparente sémantiquement que la structure de déri-vation indirecte centrée sur la racine. On signalera :

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·des suffixes de pluriel :

-i d'origine siculo-italienne: lfamilyal "famille", p1./familyi!, Icarl "clair",pl. Icari! ;

-s d'origine anglaise: lfilmsl"films". Selon E.Jenech (1978 : 29), ce suf-fixe est très souvent remplacé par -iyyi~t : Il-isperpartsl ou II-isperpartiyyi~tI"les pièces détachées".

· des suffixes permettant de former des noms dérivés, adjectifs, participes,adverbes, superlatifs (voir par ex. M. Tosco, 1993 : 325). Ils ont souventacquis suffisamment d'autonomie en maltais pour se détacher du calque ser-vile de la forme d'emprunt et permettent de former des mots inconnus de lalangue source (pas toujours enregistrés dans les dictionnaires) :

-ar « infinitif italien -are) sert à former des noms verbaux: Isuppli§§arl"approvisionnement" (it. supplir~),liffilmyarl "tournage d'un film" (ang. fil-minD;

-aryu : Ipartit'âryul "membre d'un parti" (it. m~bro di un partito) ;

-eriyya: Ipriguneriyyal"emprisonnement" (it. priogionia) ;

le suffixe est même passé dans quelqu~ mots d'origine arabe: lI:tbiberiyyal"amitié" ;

-ment: ICErtamentl "certainement" < it. c~rtament~; Izgumbramentl"déménagement" (it. sgombL'T'O);

-üz 1 üs : Ilussüz/ "luxueux" < it. lussuoso.Quelques rares termes arabespeuvent aussi recevoir ce suffixe: Inkeyyüsl "méchant; rancunier" < ar. nili"blesser, outrager" O. Aquilina, 1976: 6) ;

-agg : lreklutaggl "recrutement" (it. r~clutamento);

-at et -Üt : ces suffixesforment la plupart des participes des verbes d'originesiculo-italienne et anglaiseà partir de la baseverbale invariable. En conséquenceils ne sont pas nécessairement les aboutissements directs de la forme siculo-italienne: laddattatl "adapté", Ispellütl "épelé" (ang. to sp~l~.J. Aquilina(1973: 318) mentionne deux verbes d'origine arabe ayant un participe en -Üt:lemmnütl "cru" et Imerütl "contredit" ;

-iz.mu: Isalvagizmul "sauvagissime" (it. l'essereservaggio).On trouve spo-radiquement des mots d'origine arabe comportant ce suffixe: lla°)izmul "ser-vilissime" ;

-nett : ce suffixeest une création du maltais à partir de l'adjectif italien nmo"net, propre". Il fonctionne essentiellement avec des noms, adjectifs, prépo-sitions et numéraux d'origine arabe: lil-bidunew"le tout début", labyadnew"tout blanc", lfu)new "tout en haut", Il-ewwdnett/"tout d'abord" ;

-tstsy5ni : outre son utilisation dans les emprunts italiens, indépendammentou non de l'existence d'une forme similaire, ce suffIXeest productif avec desemprunts anglais à finale -tion : lallegatstsy5nil "allégation" (ang. alkgation,

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La langue maltaise. lm carrefour linguistique / J 77

it. assn"Ziont),lapplikatstsy5nil "requête" (ang. application, it. domanda uffi"-ciak).

La liste n'est pas exhaustive.

Dans le système verbal, on distingue deux couches successivesd'emprunts.Dans la plus ancienne, les verbes étrangers avaient été intégrés soit aux qua-drilitères, soit aux verbes faibles du maltais par réduction (éventuelle) à unestructure bisyllabique, en supprimant une ou plusieurs voyelles (voireconsonne) : Isalval "sauver" < it. salvart, l:Jbdal "obéir" < it. obbtdirt,/pingal"peindre" < it. dtpingtrt. Labondance des verbes empruntés plus récemment,tant à l'italien qu'à l'anglais,a donné naissanceà un modèle qui consiste à redou-bler la consonne initiale du verbe emprunté, sauf dans les formes à groupesconsonantiques initiaux sans élément liquidel8, avec parfois quelques adap-tations phonétiques et syllabiques minimes à l'intérieur du mot: lirrit:Jrnal"retourner" < it. ritornart, lippri:xikal "prêcher" < it. prtdicart, libblakkal"cirer" < ang. to black. Les verbes d'origine anglaise comportent le plus sou-vent, en outre, une semi-voyelley avant la voyelle finale: liccekkyal "vérifier"< ang. to chtck. Ce sont à l'heure actuelle des modèles extrêmement produc-tifS,lesseulsmoyens de création vivants.TémoinS'de la vitalitéde cesformations,ces modèles servent aussi à la création de verbes dénominatifs: liccavEttaI "fer-

mer à clé", sur la base de ICavEttal"clé" < sic. ciavttta (Tosco, 1993: 324)19.

Linvestissement du maltais par des langues étrangères a donc été trop insis-tant et elles étaient d'une strUcture trop hétérogène au maltais pour que celui-ci ait pu complètement et parfaitement intégrer tous les emprunts. Ceux-ci,selon leur origine, leur forme, leur date de naturalisation, ont été l'objet de trai-tements différents. On a vu que beaucoup d'emprunts ont pu, dans la mesureoù leur forme s'y prêtait, être refaits selon des schèmes existants, mais, commele fait remarquer M. Mifsud (1994a), le maltais est en train d'évoluer vers unemorphologie séquentielle et non plus centrée sur la racine.

Les emprunts lexicaux

J. Aquilina(1976: 3-4), sansdonnerde chiffresprécis,estimeque lenombre de lexèmesétrangers dépassecelui des termes arabes, avec une très netteprépondérance pour les éléments siculo-italiens, venus compléter ou rempla-cer ces derniers. Lanalyse des entrées du dictionnaire de J.Aquilina (1987-90)montre aussi une réduction drastique des dérivés d'une même racine par rap-port aux dictionnaires arabes. Toutefois, si l'on regarde la réalité du fonc-tionnement de la langue, on saperçoit que l'usagedu vocabulaire d'origine arabeest encore quantitativement dominant. Les statistiques dresséespar E. Fenech(1978: 132-141) le montrent en effet, mais à des degrés divers. Son échan-tillon littéraire fait apparaître un total de près de 94 % de mots arabes, avecdes variations selon les auteurs allant de 85 à 96 % ; dans la langue parlée la

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proportion descend à près de 86,5 % (les variations sont moindres selon leslocuteurs), pour n'atteindre plus que 73 % dans la presse écrite (avec chute à64 % dans les publicités). Les différences selon les niveaux de langue sont plusgrandes en ce qui concerne les élémentS siculo-italiens et anglais : plus de20 % d'empruntS italiens dans les journaux, mais seulement 8 et 5 % à l'oralet dans la littératurè, respectivement. Mêmes écirts pour l'anglais (plus fai-blement représenté) mais différemment répartis: autour de 4,5 % pour la presseet l'oral, seulement 0,4 % dans la littérature. Il existe au demeurant des dif-

férences qui sont fonction des sujetS traités. Des études intéressantes seraientà mener selon des critères sociaux, de degrés d'instruction et de bilinguismeainsi que de classes d'âge des locuteurs, car l'impression qu'on en a est qu'ilexiste des différences non négligeables.

De ce point de vue, M. Cucciardi (1990) a mené en 1988 une étude socio-linguistique très intéressante, auprès de 200 jeunes élèvesâgés de 12 à 16 ans,concernant les expressions numériques. Il en ressort que leschiffi-esanglais sonttrès rnajoritairement utilisésdans un grand nombre de situations.Ainsi les numé-ros de téléphone, des lignes d'autobus, les prix du ticket, lesdates de naissance,les classes scolaires, les résultats du loto sont, à plus de 85 % (jusqu'à 98 %dans certains cas), exprimés en anglais. Lés numéros des rues, les dépenses dela semaine dépassent les 60 % en anglais. Seuls l'heure et le nombre desmembres de la famille sont encore à plus de 90 % donnés en maltais. Enfin,ce qui n'a rien de surprenant, les chaînes de télévisions (italiennes) sont énon-cées en italien.

Il est également apparu que les filles emploient en moyenne l'anglais légè-rement plus que lesgarçons (avectout de même parfoisdes écartsde 20 à 30 %).Dans un seul domaine, l'écart lié au sexeest considérable: 67 % des filles indi-

quent leur âge en anglais, alors que les garçons ne sont que 20 % à le faire.M. Cucciardi a remarqué enfin que les élèves issus des milieux sociaux lesmoins favorisés emploient un peu plus les chiffres anglais que les autres.

. Ces disparités peuvent être tenues pour quantité négligeable au regard de l'écra-sante utilisation des chiffres anglais. Plusieurs explications sont proposées parM. Cucciardi : le bilinguisme bien sûr, mais aussi l'absence de livresde mathé-matiques en maltais (dans les écoles privées les chiffres maltais ne sont même

.jamais utilisés)ou le fait que le recours à l'anglaisest lié, d'une manière ou d'uneautre, à des nouveautés pour le locuteur maltais, même ~i elles sont posté-

. rieuresà l'indépendancedu pays.Telestlecaspour la numérotationdeslignesd'autobus ou l'introduction du système décimal dans le système monétaire. Lesobservations quotidiennes de l'auteur sur les comportements langagiers de sescompatriotes de tous âges viennent confirmer et renforcer les résultats de cetteenquête. Seulesles générations lesplus âgéesfont un peu plus usagedes chiffresmaltais.Et encore. Canecdoteiapportée à propos d'un vieillardrépétant en anglaisles chiffres maltais utilisés par un conducteur pour indiquer une ligne de bus,montre qu'il est des situations où l'anglais s'est totalement imposé.

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La langue maltaise, un camfour linguistique / 179

Cela nempêche pas les chiffres anglais d'être eux-mêmes soumis aux dureslois de la morphologie arabe. Les noms d~ billets de banque sont en effet plu-ralisés au moyen du sufHxe-iyyi~t : lit-tEniyyi~tI "les billets de dix livres".

Cinvasion du vocabulaire d'origine étrangère, quand elle n'a pas simplementconduit à l'élimination des termes arabes correspondants, a donné naissanceà de nombreux synonymes, parfois simples doublets lexicaux, pour lesquels ilpeut être difficile de saisir les connotations, mais qui souvent aussi se sont spé-cialisés dans des nuances sémantiques ou des emplois syntaxiques particu-liers. On trouve ainsi Ip5plul "peuple" < it. popolo et Ini~sl "gens" < ar. OOs,ldifficlü "difficile, dur" < it. difficiket It>ïU"lourd, enceinte, difHcile, triste"< ar. !aqïl, Idem5nyul "démon, diable" < it. tkmonio et I~iranl "diable, expres-sion de l'irritation" < ar. sa)fiin, lindiritstsâta! < it. indirizzareet ladd.ressatal"adressée"< ang. to addressOedernier terme ne figure pas dans les dictionnaires,mais a été forgé par un enseignant).

Il est évident que les nouveaux apports lexicaux sont à la mesure du mul-tilinguisme qui règne dans l'archipel Maltais. Ils accompagnent aussi, commepartout, les .techniques et les modes de vie conl\Cmporains auxquels le fondsarabe ancien ne pouvait répondre.

Les changements syntaxiques

Ce sont souvent les influences les plus subtiles à déceler du fait des corres-pondances possibles entre des langues différentes.

Mais des calques purs et simples, aisément repérables, existent ep maltais.E. Fenech (1978 : 66) faisait remarquer que, sous l'influence de la syntaxe ita-lienne, les adjectifs avaient de plus en plus tendance à se placer avant le nomau lieu d'après, ce qui se vérifie souvent dans le cas des adjectifs abstraits d'ori-gine italienne, mais aussi parfois arabe: lil-famüz straykl "la célèbre grève",lil-maJ:tbübis'=>ftaGna!"notre évêque bien-aimé".

Un autre calque fréquent est l'utilisation d'une construction périphras-tique pour l'expression du passif. Les formes à préfixe n- ou à infixe + exis-tent encore en maltais, mais, comme on l'a vu, ce système hérité de l'arabe n'estplus productif. Le passif se forme désormais au moyen d'un auxiliaire gi~, desens plein "venir", suivi d'un participe passif, construction calquée de l'italienvenire+ part. pas. : Iyigi ppumpyatl "il est pompé". La tournure a connu untel essor qu'eUe est maintenant couramment utilisée avec des participes d'ori-gine arabe, même lorsque susbsiste une forme verbale dérivée de sens passif:Iyigi miktübl ou Iyinkitebl "il est écrit".

On signalera également la construction exprimant l'habitude dans le passé,lyüzal ("il utilise") + inaccompli, calquée de l'anglais he used toet que seuls lesecclésiastiques utilisent (M. Vanhove, 1993 : 223-4) : lki~nu yuzaw y=>'tlul-mayyiill "ils avaient l'habitude de tuer les porcs".

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1801Martint Vanhovt

Mais les contacts de langues n'ont pas seulement pour conséquences desemprunts, des calques ou des adaptations et métissagesvariés.Il se produit aussides créations originales importantes qui passent souvent inaperçues. Quandun peuple adhère à une culture différente de celle dont sa langue provient,comme ce fut lecaspour lesMaltais,de nouveawrbesoins,de nouvellesnéces-sitéssurgissent.Et c'est souvent au moyen de sesstructures propres qu'une languey répond (voir M. Vanhove, 1994). Nous l'avons vu dans la morphologie despluriels. Tel est aussi le cas pour l'extraordinaire foisonnement des auxiliairesen maltais qui n'en compte pas moins de 45, dont seulement trois calques, faitunique parmi les dialectes arabes (voir M. Vanhove, 1993: 429). Il faut sou-ligner, preuve supplémentaire de l'originalité du maltais, que beaucoup desvaleurs apponées par ces constructions périphrastiques n'ont même pas leuréquivalent dans les langues en contact avec le maltais (cf. M. Vanhove, 1993et 1994).

Au-delà de ces considérations de linguistique générale, il est probable auSsique cenains auxiliaires sont venus pallier la dégénérescence du système verbaldérivatif. Il se trouve, par exemple, que l'une des valeurs, courante en arabe,de la forme à 2e radicale géminée, celle <h:multiplicité-intensivité, est quasi-ment absente en maltais alors qu'elle est présente dans une construction péri-phrastique avec l'auxiliaire l)aOadl, 1~)°:x1l (de sens plein "rester, s'asseoir")exprimant un sous-aspect duratif. Bien sûr, il ne peut être question de l'exis-tence d'un tel sous-aspect en arabe, mais il n'est pas impossible que le déclinde cette valeur dans le système dérivatif du maltais ait pu contribuer à favo-riser l'apparition d'une nouvelle subdivision aspcctiveexpriméeanalytiquement(M. Vanhove, 1994: 291).

Conclusion

La langue maltaise offre un bel exemple de la symbiose qui pe~t se réaliserlorsque des langues de familles génétiquement non apparentées sont soumisesà des contacts intenses et prolongés. Les structures de la langue receveuse, iciun dialecte arabe, s'en trouvent progressivement modifiées sans pour autantentraîner une perte d'identité. Pourtant le travail de siècles de relations a étéla cause d'un changement morphologique radical: le système dérivatif par croi-sement d'une racine et d'un schème est en train de s'affaiblir considérablement

au profit d'une structUre plus séquentielle. Les illustrations de ce métissageauraient pu être multipliées, notamment par les calques de proverbes siciliensou italiens O. Aquilina, 1976: 18,86-7) ou encore les calquesphraséologiquesO. Aquilina, 1976 et E. Fenech, 1978). On retiendra seulement un phéno-mène récent qui montre le jeu des interinfluences des langues prêteuses. Il s'agitdes glissements de sens qui s'opèrent sur les mots d'origine italienne sousl'influence de l'anglais, sans impliquer les mixages morphologiques que nousavons vus. Ainsi lfigüral a pris, en maltais, le sens de "chiffre", à l'imitation

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.. La langue maltais~.un carrtfour 'inguistiqtl~ / Jfil

de l'anglais figur~, alors que le mot italien figura dont il provient signifie"image, forme humaine", ou bien latrendaJ"assister", ang. to attmd, l'italiena~ayant le sens de "attendre" O. Aquilina 1976: 107}. Le maltais estbien un véritable laboratoire vivant pour l'observation des effets des contactsde langues et la pratique du discours mélangé maltais-angtais qui se répand nepourra que continuer à le prouver.

NOTES

1. A l'exception du nom des deux îles principales.

2. Ils étaient minoritaires par rappon au nombre de leurs esclavesO. Brincat, 1991 : 7).

3. Le texte présente des difficultés d'interprétation. Il est possible qu'il faille corriger leschiflTes,ce qui inversetait la proportion entre chrétiens et musulmans (A. Lumell, 1975: 39). Par ailleurs, il est probable que l'expulsion décrétée par Frédéric II se soit soldéeparbon nombre de conversions au christianisme.

4. Cf. D. Cutajar et C. Cassar (1984: 45).

5 .Cf. B. Blouet (1984 : 37).

6. Cf. A. Borg, communication non publiée à la "Conference on Languagesof the Medi-terrancan",Malte 26-29 septembre 1991 : "LinguaFrancaElements in Contemporary Mal-"tese .7. Voici cet alphabet: a, b, ë (= c), d, ~,f, g (= ~), go h (notation étymologique), ta, i,j, k,

4 m, n, /t (= notation étymologique pour' et g), 0,p, q (= '), r, s, t, U, v, w, x(= ~), i (= z),z (= ts).

8. Cf. D. Cohen et M. Vanhove (1991: 179) pour l'explication d'une exception à cetredisparition.

9. Cette diphtongue ouvrante a aussi une variante monophtonguée ï, également accep-table en standard.

10. Pour une survivance de ['] dans un idiolecte, voir Vanhove 1991-2.

11. Ces dates correspondent à celles données par J.AquiIina dans son dictionnaire (1987-90) comme première attestation d'un mot.

12. Parcx./kannal"tuyau" estenregistrédans le dictionnaire avecun pluriel/kanEnl, maisun demesinformateursutilisaitlkannü. .

13. Au demeurant, le phénomène existe pour un mot composé d'origine arabe: Pawsal1a1

"arc-en-ciel" < ar. qaws + 'allah, qui a pour pl. l'awsaleU. .

14. Il Ya eu, pour ce verbe, assimilation du t- du préfixeà la sifflante radicale initiale.

15. Cenains verbesont m~me été adaptés tout au long du paradigme (M. Mifsud 1994a :256).

16. La variation est m~me acceptée pour quelques verbes comme IbiJ}.l"vendre" et Isuii}1"se reposer".

17. La même tendance a été notée pour quelques classes de verbes au Maghreb. VoirM. MifsUd(1994a: 262). .

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1821 Martint Vanhovt

18. L'anglais toskidpar exemple ne connaît pas ce redoublement initial. Il a donné Iskid-

dyal "déraper".

19. Cc verbe csr ressenti comme un "barbarisme" par les informateurs et ne figure pas dansles dictionnaires.

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