De l'Heritage Des Cathares

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I Autant dire journellement, nous recevons des demandes de renseignements sur les sujets suivants, pleines d'intérêt devant la «poussée spirituelle", dans un monde perturbé de tous côtés: ' „Qu'est le Catharisme et qu'a-t-il été?" „Parlez-nous du Saint-Graal!" „Donnez-nous des explications sur la Gnose et les Gnostiques!" „Qu'entend-on par le Manéisme d'Aquitaine?" (et non le Manichéisme!). „Cathares, Rose-Croix, Templiers, la Fraternité Universelle ... que de belles choses ignorées ..." Nous avons décidé, au moyen de fascicules que nous tâcherons de rendre „francais", c'est-à-dire clairs, nets et précis, de donner les explications utiles nour la compréhension de ces questions vastes, complexes, prenantes. Il nous est impossible de répondre individuellement à chaque demande; au moyen de ces fascicules, nous traiterons toutes les questions ci-dessus posées. Que les amis lecteurs nous suivent patiemment; nous avons la prétention de les satisfaire entièrement. Nous commençons, et c'est, nous croyons, la base de notre travail, par la doctrine, que nous ferons suivre par l'histoire et les origines du Catharisme pyrénéen. „Enfants, Dieu est Amour!", répétait constamment à ses élèves, à ses disciples, le Maître des Parfaits, des Purs, des Bonshommes 1 , dans les antres des Eglises d'initiation d'Ornolac et de Bouan, (Eglises d'Ussat, d'Ornolac et de Bouan, Cathédrale de Lombrives). Et les jeunes, avides d'apprendre, posaient questions sur questions. — Qui est Celui qui est monté aux Cieux et qui en est descendu? Qui tient l'ouragan dans ses mains, et l'Océan dans son manteau? Qui a dressé les bornes de la terre? Quel est son nom et le nom de son Fils, si tu le connais? Maître, explique-nous le symbole: Qu'est-ce que Dieu? — Le Maître: Une Lumière infinie. Il est Un et Tout; et cependant, nous l'adorons sous la triple appellation du Père, du Fils et du Saint-Esprit; ou, comme parlent les Grecs: Hagnostos, Demiourgos, Paracletos. — Parle-nous du Père! — Il est l'Etre absolu. C'est le Dieu inconnu, invisible, inconcevable, incommunicable. Les anges ne l'adorent qu'en se voilant la face de leurs ailes. Gomment les hommes pourraient-ils le définir? „Montre-nous le Père", disaient les Apôtres au Christ. Et le Christ répondit: „Vous me voyez!" L'homme ne peut voir le Père que dans le Fils, dans l'Homme-Dieu, Figure de sa substance, et splendeur de sa gloire. Le Père, c'est Dieu voilé dans l'éternité; le Fils, c'est Dieu visible dans le temps; l'Esprit, c'est Dieu sensible dans le coeur! — Mais si, Maître, sous cette triple invocation, Dieu est uni Esprit infini, Il est donc absolument unique; et comment peut-on nous accuser de soutenir que Dieu a deux Fils, et que nous adorons deux Dieux?2 — C'est une calomnie, une odieuse absurdité, eu une impiété horrible. Dieu a un Fils, puis qu'il est Père; mais ce Fils, consubstantiel, coéternel, est nécessairement unique; et, cependant subordonné, car il est le Fils. Nous reconnaissons, il est vrai, deux principes

1 C'est ainsi qu'on appelait les Prêtres Cathares et Rose-Croix. „Catharos", ce qui veut dire: pur. 2 Allusion au dualisme du Manichéisme. Il n'y avait pas de dualisme dans l'Empire d'Amour. Les Pères de l'Eglise, aux-mêmes. l'ont reconnu!

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en Dieu. Mais ces principes sont secondaires, et, loin d'être deux Dieux, ne sont que deux „modes", deux „agents" de la création. Encore, le second est-il négatif, un fantôme et l'ombre du „Non-Etre", le rayonnement obscur du „Néant"! Dieu n'est pas soumis à „la règle du meilleur, qui ne souffre en lui ni exception, ni dispense". Quelque bien que Dieu fasse, il peut toujours faire mieux. Il est impossible qu'il y ait jamais un fini, qu'il ne puisse surpasser. La puissance divine ne peut être épuisée par un effet fini! „Le Mal n'est contraire ni à la bonté, ni à la toute-puissance de Dieu: il y aura un temps ou tout rentrera dans l'ordre. Dieu est Amour!" (Tertullien). „Par leur repentir, les âmes participent au bienfait de la Rédemption Universelle, dont la Bonté divine n'exclut même pas Lucibel." (Origène, le Diamantin). Lucibel, lui-même, sera ramené au Père par notre Eglise. Donc, pas de Principe négatif! — En effet, Maître, un principe négatif n'est pas un principe: c'est un non-sens, comme le hasard ou le Néant. Dieu est Amour! „Soyez parfait comme votre Père céleste est parfait!" C'est le Divin Maître qui parle ainsi... Parle-nous donc du Fils, le Dieu Visible. — L'apôtre l'a dit: „I1 est le Verbe, il est en Dieu, et il est Dieu!" Il est le Dieu Créateur, car tout a été fait par lui. Il est aussi le Dieu Rédempteur, car le Verbe est devenu chair. Le Rédempteur est le même que le Créateur, car pour refaire un monde, il faut d'abord l'avoir fait. — Mais l'Apôtre ne dit-il pas: „Le salut vient des Juifs!" — C'est plus que l'Apôtre, c'est Jésus qui dit cela. La Judée, en effet, a produit Jésus; mais la Grèce et l'Orient ont enfanté le Christ. Encore plus que Moïse, Platon est son prophète et son précurseur3. La Judée a crucifié le Christ et proscrit l'Evangile. Le grec est la Langue sainte; l'Evangile est le patrimoine divin de la Grèce. Par Jean et Platon, le Catharisme est issu du Christ; et voilà pourqoi il monte si haut dans l'idéal. — Le Christ est-il né de la Vierge Marie? — Luc et Matthieu le disent; Marc garde le silence. Jean le fait naître dans le sein du Père. Matthieu rattache sa généalogie à Abraham; Luc, se généalogie humaine à Adam; Jean, sa généalogie céleste à Dieu. Jean, seul, a vu Son origine éternelle. Comme la sagesse hellénique, Il est sorti du Cerveau divin; il a jailli comme l'Aurore. Il est venu, „non vulva, sed valva aurea coeli!"4. Dans les langues orientales, l'Esprit est un ..principe féminin". L'Eglise chrétienne idéalisait la maternité de Marie dans le sens Cathare. „Introivit per aurem et exivit per aurem, portam labium. Lux ... mundi"5. Augustin, évêque d'Hippona, a dit: „Deus per Angelum loquebatur, et Virgo auribus impregnabatur!"6. Et chez Proclus, Patriarche de Constantinople, Grégoire le Thaumaturge, l'Eglise Orientale avant le Concile de Nicée, la Mère du Christ n'est point humaine, mais céleste! Elle ne s'appelait point Marie, mais Mani, Mens7... Il est descendu avec la beauté d'un immortel. l'Eclat de l'Orient d'en Haut! — Et alors, la Crèche, l'étable, tout ce drame agreste et pastoral de Bethléem? — C'est un magnifique symbolisme terrestre. Ce n'est pas une réalité historique et scientifique.

3 Nous aborderons les détails sur Platon et les Mystères égyptiens dans l'étude détaillée de la Gnose. 4 Il n'est pas né de la femme; il est venu par la Porte d'Or du Ciel. 5 Il a pénétré, revêtu du manteau d'or, par la porte de la dégradation, et Il l'a de même quitté revêtu du manteau d'or, Lui, Lumière du Monde. 6 Dieu parla par Son Ange, et la Vierge fut pénétrée de Sa Parole par l'ouïe. 7 Penseur.

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Mais, Jean ne dit-il pas que le Verbe a été fait chair? — Assurément: mais la chair n'est qu'un voile, et la matière une ombre. D'ailleurs, la chair du Christ devait nécessairement différer du corps humain. Crée d'une Vierge par un „rayon de l'Esprit", son corps devait être spirituel; ce corps qui jeûnait quarante jours; qui glissait comme un nuage parmi les foules; passait à travers les portes fermées comme un souffle d'air; qui marchait sur la mer comme sur un marbre; et flottait comme un duvet dans la splendeur du Thabor, était plus éthéré qu'un corps humain. C'était un corps sidéral, psychique, angélique, fantastique, en un mot: Le Bethléem du Christ, c'est le Ciel; sa Crèche, le Taberbacle de Dieu! — Et la Vierge Marie? — Bethléem, les Mages, la Vierge Marie, Noël, Noël!... : C'est l'anniversaire de la naissance de l'humanité! Emmanuel! Dieu vivant avec nous! Dieu vivant dans l'humanité! L'humanité divine, l'humanité humaine, voilà ce que nous révèle cette journée bénie; et les hommes n'ont su tirer encore de cela qu'une religion inhumaine et une humanité damnée. PETITE PAGE D'HISTOIRE Limosus Nègre, cathare de Saint-Paul-de Fenouillet (Aude), pris par l'Inquisition, répondit à l'Evêque d'Alet: „Dieu, le souverain Créateur, fit et créa tout d'abord les Archanges, qui sont vraiment les Fils de Dieu. Ceux-ci, par une puissance qu'ils tenaient de Dieu, leur Père et leur Créateur, créèrent à leur tour des Anges, d'une vertu et d'une valeur moindres. Ces anges de second ordre s'appellent tous „Vierge-Marie";et, de leur côté, ils ont crée l'abstinence et la chasteté, qui vivent au-dessus du Soleil et de la Lune!" Raymonde Bézerza, brûlée en 1270 a proclamé: „Le Christ n'a pas eu un vrai corps humaine, ni une vraie chair humaine. La „Vierge Marie" n'a pas été vraiment la mère du Christ et même une „femme réelle". C'est l'Eglise Cathare qui est la „Vraie Vierge Marie": vraie pénitence, chaste et vierge, qui met au Monde des Fils de Dieu!" (Collection Doat: 15, p.57). Bernard Gui, Grand Inquisiteur en Sabartez8, définit à peu près de la même manière cet article de la doctrine des Parfaits, Cathares et Rose-Croix, du Sabartez (Practica inquisitionis: p. 238), en se rappelant ses nombreux et serrés interrogatoires: „Quant à l'Incarnation de Notre Seigneur, Jésus-Christ, au sein de la bienheureuse Marie, toujours vierge, ils la nient...". „Ils prétendent que le Christ n'a pas eu un vrai corps humain, ni une vraie chair humaine, comme tous les autres hommes". „Ils nient que la Vierge Marie ait été vraiment la Mère de notre Seigneur Jésus-Christ, et même une femme réelle". „Ils disent que c'est leur propre secte qui est la Vierge-Marie, c'est-à-dire cette vraie pénitence, chaste et vierge, qui met au monde des Fils de Dieu!" 8 La Sabartez est une ancienne Viguerie de Charlemagne, dans le Haute Ariège.

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II

BETHLEEM — LA VIERGE MARIE (suite) Les Mages venus pour adorer le Christ, guidés par l'Etoile-Pentacle divine, sont de vrais Initiés: Baltassard offre de l'encens au nouveau-né de l'humanité nouvelle; c'est l'homme de la Paix profonde. Melchior, prince de la Lumière, offre de l'Or. Gaspard présente la myrrhe, figure de la Transformation et de l'Immortalité. l'Etoile de l'Epiphanie, que les Mages ont vue en Orient, les conduit à Bethléem, à la haute raison de l'humilité du dogme, et de l'élévation des humbles et des laborieux au partage du Pain symbolique, sacrement d'Amour et de Vérité. Bethléem, Mystère de l'Homme-Esprit! Sacrifice suprême de l'Homme-Matière! Les noms de Marie, en hébreu, sont: Miriam ou Mariah. Ces deux noms sont tout le symbolisme de la femme et de la mère: le premier signifie la Mort qui engendre et la Vie qui fait mourir; le second signifie: mort et résurrection de Dieu. L'Etoile de Bethléem comprend: Le Christ, Marie, et les trois Mages. Cinq branches: c'est le Pentagramme de la Transformation. Marie est la personnification humaine de la Sagesse divine, ou de la Lumière manifestée par reflet. Elle est le côté féminin du Verbe fait chair, et participe, par assomption, à toutes les gloires de Jésus-Christ. La Vierge Marie est donc la mère de l'Eglise Cathare, comme Jean en est le délégué de Christ sur la terre. „Femme, voilà ton fils; Fils, voilà ta mère", a-t-Il dit sur la croix. — Maître, si le Christ avait un corps éthéré, Il n'a donc pas souffert, Il n'est pas mort sur la croix?— — Il a souffert en esprit; Il a eu les tortures de l'âme, l'agonie de Gethsémani. Mais Il n'est pas mort: un Dieu ne peut pas mourir. „L'Agneau", dit l'Apocalypse, „est comme mis à mort sur l'Autel céleste!" — Maître, qu'est-ce que Lucibel?— — Son nom le définit: „Celui qui lance l'aurore. Le plus illustre, le plus glorieux des anges. Une créature de Dieu, mais la plus éminente, puisque le Fils est éternel. Comment est-il tombé? Orgueil et rébellion; ambition démesurée; désirs immodérés. C'est un esprit moins coupable, sans doute, qu'infortuné; le chef des âmes exilées qui l'ont volontairement accompagné dans sa ruine. Job, Zacharie, Pierre et Jude nous apprennent qu'il n'est point absolument maudit, et qu'il reparaît parfois dans les Conseils de Dieu. Dieu est Amour-----Nous devons donc espérer que l'Ange déchu reprendra le rang qu'il occupait parmi ses frères du Ciel. —9 — Maître, n'est-il donc pas le créateur de l'Univers? — — Le Christ, seul, est le Créateur, puisqu'il est Dieu. Mais Lucibel est un pouvoir contingent: le prince de la division, de la guerre et des orages. Il est imitateur et non créateur; il reproduit, il essaye de modifier les idées du Christ. En ce sens, il a, non pas créé, mais transformé le monde, image grossière et terrestre du Monde parfait et céleste. Chef des esprits exilés, il s'est construit, sur ce globe, avec des ombres et des nuages, un

9 Ce que Victor Hugo a immortalisé par les beaux vers suivants: Et Jésus, se penchant sur Bélial qui pleure, lui dira: C'est donc toi?" Et vers Dieu, par la main, Il conduira ce frère!

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empire fantastique, ce monde de douleur et d'expiation, dont il est le monarque attristé, puisqu'il lui rappelle les Cieux. — — Maître, tous les esprits seront- ils sauvés? — — Tous! Après de longues épreuves et diverses purifications, après les durs exercices pour atteindre la Perfection, ils remonteront dans l'Azur. Voyez cet Océan de l'Ether_Il est semé d'îles de feu, d'archipels de lumière. Ce sont les stations de l'âme dans l'espace, les stalles diverses dont parle le Christ. Elles remonteront d'astre en astre, de Constellation en Constellation, jusque dans le sein de Dieu. Christ, remonté au Ciel, a décrit à la Mère de l'Eglise Cathare le voyage de l'âme au travers des Six Planètes (Evangile de Marie). — Maître, et Satan? — Pourquoi serait-il uniquement exclu du Salut? Dieu est Amour .... Le Christ ramènera dans le Ciel le grand proscrit, consolé. — Satan n'est donc pas le Mal? Mais le mal absolu, substantiel, existe-t-il? — Où serait-il, Dieu étant le Bien absolu, substantiel, infini?— — Maître, il n'y a donc pas de châtiments éternels, pas de douleurs éternelles, pas d'Enfer? — — Oh, Fils bien-aimé___, la Terre est un purgatoire immense, l'hospice du genre humain malade. Dieu étant l'Eternel Amour, où serait l'Enfer? Les Sages, qui connaissaient bien les hiéroglyphes sacrés de l'Egypte, nous ont enseigné que Dieu, après le crime de Typhon, qui rend Isis veuve, a donné à l'homme un oeil intérieur pour contempler la Vérité. Cet oeil prévient l'homme, pour éviter le Mal. Dès lors, comme nous le dit Origène, le Diamantin: „L'Enfer, c'est le remords de la Conscience." — — Maître, parle-nous du Paraclet. — — Le Paraclet, vous le savez: c'est le Consolateur promis par le Christ, le dernier et définitif Révélateur, le Créateur céleste de la Perfection, le Régénérateur du monde, jusqu'à la fin des siècles. Il est le Fondateur de l'Eglise du Paraclet, de l'Esprit. La source de la pureté, de la sainteté, du Céleste Amour. Son peuple est cette „rosée, sortie du sein de l'Aurore, des Purs, des Saints, des Consolés, des Amis de Dieu." — — Maître, notre Père, notre Patriarche apostolique? — -- C'est Jean, le fils de Zébadia. Jean, le Bien-Aimé de Jésus, qui reposa sur son coeur et connaît tout le mystère de ce coeur divin. Jean, le candide adolescent, le blanc et souriant vieillard, l'Apôtre vierge de l'Amour, l'Aigle de la Théologie mystique, le Prophète de Patmos, le Platon de l'Evangile et l'Homère de l'Apocalypse. Pas de Pontife dans l'Eglise du Paraclet. Simplement Grand-Maître de la Gnose! — — Et nos Frères dans l'Eglise primitive?— — Les Sages Druides n'avaient pas trop de choses à apprendre des Sages des Ecoles égyptiennes; ces derniers étaient aussi initiés que les Sages de l'Inde. „L'Esprit souffle où il doit . . . .". Les Triades druidiques sentent la profondeur des Mystères de l'Egypte. Orphée, Moîse, Pythagore, Platon, Origène, en avaient retiré le plus beau de leurs doctrines. Les explications de Lysis, élève de Pythagore, sur la Préparation, la Purification, la Perfection, complètent les Triades. (Nous aurons à revenir là-dessus ). Et nous plaçons en tête de cette brève énumération, Hermès le Trismégiste, le Grand Fondateur de tous les Mystères. Les Sept Eglises d'Asie, tous les Grecs d'Orient, sont nos Frères: Grégoire de Naziance, le noble Synosios et, avant eux, Origène le Diamantin, ce „Nil de la Doctrine, qui tombe du Ciel, féconde le désert et se jette par sept bouches, dans la Mer Humaine"; parfois,

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Tertullien, ce grand Africain, bizarre, farouche, escarpé, emporté; les Gnostiques orientaux, frères chrétiens des Mages de l'Euphrate et des Brames de l'Inde. „Nous sommes les derniers enfants du Mani, l'épuration suprême de la Gnose. Notre Eglise est un paon de l'Inde qui, s'éloignant des régions de l'Aurore, a perdu son diadème étoile, et dont les splendeurs orientales se sont éteintes dans les forêts slaves et dans les brumes de l'Occident!" (Napoléon Peyrat, surnommé avec juste raison: le Clairon de l'Aquitaine). Nous avons, pour soulager l'âme qui souffre, „les Belles Consolations de Bethléem". Il faut, au nom de Jésus, que tout genou fléchisse dans le Ciel et sur la Terre. En Son nom, entendez-vous? De par Lui, et moyennant Lui. Mais, devant Dieu seul. Jésus a dit: „Tout ce que vous demanderez à Mon Père, en Mon nom, vous l'obtiendrez". Et le Consolateur ne ménage pas son aide. Toute faute doit être réparée, c'est l'évidence même. Mais Dieu, seul, a le droit de juger; Dieu, seul, a le pouvoir de pardonner. Jésus-Christ nous a donné le Pouvoir de demander le Pardon au Père, par son intermédiaire, mais, avec le Pouvoir, il nous donne le Devoir de consoler le fautif, et de le recommander au Dieu d'Amour. Ce n'est jamais en vain que nous remplissons ce devoir, Amour suprême de notre Divin Maître. Quel sort nous est réservé? Le sort du Christ. L'Eternel Amour ne peut périr, mais il est bon de se préparer à l'Endoura. Endurer les douleurs, avoir le courage de ne pas les combattre, être patient, être fort dans les épreuves! Eviter l'orgueil, l'ambition, les désirs immodérés, c'est-à-dire le Mal! C'est prendre la route de la Perfection qui conduit sûrement au Chemin des Etoiles. (à suivre) PETITE PAGE D'HISTOIRE Saint-Jean, Apôtre et Evangéliste, était de la ville de Bethsaîda, en Galilée: fils de Zébédée et de Salomé, frère de Saint-Jacques le majeur. Etant encore jeune, il fut appelé par Jésus-Christ à l'apostolat. Saint-Jérôme dit qu'il était vierge, qu'il demeura toujours dans cet état saint, et que ce fût pour cette raison qu'il devint le disciple bien-aimé du Sauveur. Il est mort le dernier des Apôtres, et a écrit son Evangile soixante-cinq ans après la mort du Seigneur. Eusèbe et Saint-Jérôme nous apprennent que Saint-Jean, ayant remarqué que les trois autres évangélistes avaient omis plusieurs des actions, des miracles et des discours de Jésus-Christ, et aussi ce qui s'était passé avant que Saint-Jean-Baptiste fût mis en prison, résolut d'écrire son évangile, pour suppléer à leur défaut, pour réfuter les erreurs de son temps, et pour établir la Divinité de Jésus-Christ. Il est nommé le théologien par excellence, à cause des vérités sublimes qu'il enseigna. Son évangile est appelé par Saint-Clément d'Alexandrie: ,,1'Evangile spirituel". Il s'applique à rappeler les vérités les plus spirituelles de la Gnose, comme le Mystère de la Sainte Trinité, l'égalité des personnes, la gloire de la vie future, les beautés sublimes du pur Esprit. Saint-Jean mourut à Ephèse, âge de près de cent ans. LA GNOSE Nous employons le mot Gnose. Nous donnerons toutes les explications nécessaires pour

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entrer dans l'origine et l'histoire de la Gnose. Contentons-nous de la définition pour aujourd'hui: La Gnose est la Haute Connaissance de la Théologie vivante, de la Philosophie née à la période de la naissance de notre ère, de la synthèse des philosophies universelles. Les Gnostiques, dans le Sauveur Jésus, voient avant tout Dieu; Jésus est le Verbe divin manifesté à nous comme un homme: unissant l'essence divine et la nature humaine, sous les apparences d'un individu humain. C'est l'exposé de la doctrine ésotérique traditionnelle envisagée sous le point de vue de la Rédemption, tant dans son accomplissement que dans ses origines et ses conséquences. Le noyau de la Gnose est le Verbe Rédempteur, qui nous a fait retrouver la Parole perdue, et fait comprendre, par Elle, un des aspects du Mystère de la Croix.

III LE CATHARISME PYRENEEN

— Maître ...., et le Culte? — L'éloquent Faustus de Carthage 10 répondit à Augustin qui lui demandait „s'il recevait l'Evangile": „Vous me demandez si je reçois l'Evangile? Est-ce une question à poser à des hommes qui observent tous les Commandements? J'ai quitté père, mère, enfants; j'ai renoncé à tout ce que l'Evangile ordonne d'abandonner ... Et vous me demandez si je reçois l'Evangile." , Je vois bien que vous ne savez pas seulement en quoi consiste l'Evangile, qui n'est autre que la prédication et les Commandements de Jésus-Christ. J'ai renoncé à l'or, à l'argent; j'ai cessé d'en porter dans ma bourse. Je me contente de la nourriture de chaque jour. Je ne suis point en peine si j'aurai demain de quoi me nourrir et me vêtir". „Vous voyez en moi ces béautitudes que Jésus-Christ a prêchées et qui composent l'Evangile. Vous me voyez pauvre, doux, pacifique, ayant le coeur pur. Vous me voyez dans les larmes, souffrir la faim, la soif, la persécution et la haine du monde à cause de la justice. Et vous doutez encore si je reçois l'Evangile?". Et à l'opinion d'Augustin le traitant de „paîen schismatique": „Les païens servent Dieu par des temples, des victimes, des parfums", lui répondit Faustus. „Pour moi, je le sers tout autrement et j'ai une tout autre opinion du Culte qui lui est agréable. C'est moi-même qui, si j'en suis digne, suis le temple raisonnable de Dieu. Jésus-Christ, Son Fils, est le simulacre vivant d'une majesté vivante. Une âme instruite de la vérité est son autel. Et à l'égard des honneurs qu'il faut lui rendre, des sacrifices qu'il faut lui offrir, ils consistent uniquement en de simples et pures prières. Comment donc pouvez-vous dire que je suis un schismatique séparé du Corps des païens?". Le Culte Cathare est absolument le Culte de l'Eglise Apostolique. Sa simplicité est une preuve qu'il est antérieur à l'amalgame du Christianisme et du paganisme, accompli au IVème siècle! Point de cités saintes, comme Rome, La Mecque, Bénarès. Point de simulacres d'hommes divinisés; point d'autel, point de sacrifices, point de parfum. Nos temples?---- C'est la voûte du Ciel, ou un toit quelconque pour s'abriter en cas de pluie. Une pierre plate, dehors, ou, dans la salle nue, un pupitre revêtu d'un linge de lin pur, pour recevoir 10 Célèbre gnostique, évêque Cathare de Carthage. Proscrit par Augustin, qui avait été Cathare!

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l'Evangile de Saint-Jean, le volume du Bien-Aimé! Pas de prédication proprement dite; simplement une instruction morale, à l'exemple du Sauveur. Homélie, avec l'invocation initiale, confession des péchés, oraison dominicale, bénédiction finale, génuflexions pieuses, composent tout le Culte Cathare. Beaucoup de silence, de méditations, de prières, beaucoup de génuflexions, car avait dit Loup de Foix: „I1 faut se prosterner devant le Très-Haut, avant d'entrer dans son Temple".11 Le Baiser de Paix termine le „sermon", nom du Culte 12. Il faut y joindre deux sacrements: la Bénédiction du Pain et le Consolament, ou Consolamentum. La Bénédiction du Pain ne se célébrait pas dans le Temple, mais dans les maisons, à chaque repas. Il en était de même du vin en petite quantité, car le Manéisme occidental admettait un peu de vin, pour rappeler „les agapes primitives du Christianisme apostolique". Les Cathares, comme les premiers Chrétiens, s'envoyaient ce pain consacré qu'ils gardaient longtemps, surtout pendant les persécutions. Mais, le principal Sacrement Cathare, c'était „le baptême de l'Esprit ou de la Lumière", qui est le vrai baptême du Christ: c'était le Conort ou Consolament. Il ne pouvait être donné qu'à l'âge adulte, ou à des personnes possédant „tous leurs sens". Nous avons Tout conservé! Le Consolament, ou Consolamentum est le signe de l'Initiation des Parfaits, et de la Consécration des Diacres et des Evêques, comme le baptême des premiers temps. Vivant, il introduit l'adepte dans le Sacerdoce; mourant, il l'introduit au Ciel. C'est la Réformation et la Transformation!13 Nous n'admettons qu'un seul cas: celui des guerriers blessés à mort. D'ordinaire, nous préparons les chevaliers par ,,1'Appareillement", préliminaire demandé avant les batailles. Du Paraclet, son Chef céleste, l'Eglise cathare prend le nom d'Eglise de la Consolation. Elle a les vertus du Paraclet (Saint Esprit): elle est pure et purificatrice, sainte et sanctifiante, consolante et consolée dans l'exil du monde. Elle est la Consolation de l'Univers: elle dédaigne le monde, abhorre le sang, éteint l'Enfer, convertit Satan, proclame le salut universel. Le Souffle, l'Amour, qui unit le Père et le Fils dans le Ciel, opère la fusion des âmes dans le Monde. Il est descendu à la Pentecôte sur les Apôtres, et principalement sur le Bien-Aimé. Jean a fondé notre Eglise; Jean est notre Patriarche; Pathmos est notre berceau; l'Apocalypse est notre Genèse! Nous avons encore, et déjà depuis l'an 140, d'autres chefs spirituels: puis, le grand Origène, Marc de Memphis (dès l'an 300), Priscillien d'Avila, Félix de Urgel, Pablos d'Arménie, Erigène d'Irlande, Lisois d'Orléans, et aussi Nicétas de Constantinople, venu pour organiser le Catharisme Pyrénéen en face des persécutions 14. : Christ est venu rétablir la Vérité méconnue. Il reste vainqueur du péché, de la mort, du sépulcre. Il est tout Amour, tout Esprit, car le Père est Esprit et Amour! — L'Eternel Amour ne peut périr! Les „Roumious", les Pèlerins de l'Amour divin, les faidits, les exilés, les Fidèles du Messianisme, n'ont pas oublié les lieux ou les pauvres Cathares, Rose-Croix, Templiers, Parfaits gardiens du „Temple de l'Esprit", de la belle Fraternité Universelle, ont lutté,

11 Loup de Foix, prince de la Maison Comtale de Foix-Sabartez. devenu Parfait à Bethléem, en 1213. Réformé par Guilhabert de Castres, évêque Cathare, pour recevoir le Consolamentum. 12 Le Baiser de Paix, d'homme à homme, et de femme à femme. 13 Nous étudierons spécialement ce magnifique sujet de la Transformation. 14 Nous donnerons des détails sur l'origine et la venue du Catharisme pyrénéen.

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ont souffert, ont été martyrisés. „Acos la pacuro Joanna", disent-ils. — „Ici repose l'Eglise de l'Esprit". Cependant, ils savent que: „Sul noyer de las Gleysos I a un aousélou..... Touto la néït canto Per bous, et per ioy....." „Sur le noyer des Eglises Il y a toujours la Colombe, un gentil oiseau. II prie toute la nuit Pour vous ... et pour moi". La Colombe, symbole divin de l'Esprit: éternelles et belles Consolations de Bethléem. Nous ajoutons les lignes suivantes, prophétie magnifique, s'appliquant aux Cathares, Purs, Parfaits, lignes écrites par Paul aux Hébreux, chapitre XI: 35 — Les uns ont été cruellement tourmentés, ne voulant point acheter leur vie présente, afin d'en trouver une meilleure dans la Résurrection. 36 — Les autres ont souffert les moqueries et les fouets, les chaînes et les prisons. 37 — Ils ont été lapidés, ils ont été brûlés (sciés!); ils ont été éprouvés en toute manière; ils sont morts par le tranchant de l'épée; ils étaient vagabonds, couverts de peaux de brebis et de peaux de chèvres, étant abandonnés, affligés, persécutés; 38 — eux, dont le Monde n'était pas digne; et ils ont passé leur vie errant dans les déserts et dans les montagnes, et se retirant dans les antres et dans les cavernes de la terre... — Ce sont, prévus, les Croisades, l'Inquisition et ses hideux Tribunaux, Innocent III, Benoît XII. Histoire lugubre que nous présenterons en son temps, depuis Léon I, décrétant, déjà, en 447, la peine de mort pour les „hérétiques"! — Oh! Sage Paul! Oh! sublime Jean! PETITE PAGE D'HISTOIRE

Le culte Comme le Divin Maître: Jésus se levait pour lire; le hazzan (lecteur attitré), lui tendait le „livre". — Il le déroulait pour la parascha ou la haphtara du jour;— puis midresch ou commentaire. Explications, conseils, exhortations d'une grande simplicité. Les funérailles La Mort est un appel du Monde spirituel. La Mort est un baiser de Dieu. Passage de l'Homme matériel (chenille) au monde spirituel (chrysalide); — pour se transformer en corps astral (insecte parfait). Hymne d'actions de grâces et d'espérance. ,Je suis l'Alpha et l'Oméga!" Le Commencement et la Fin .... Le Consolamentum était l'enterrement de la matière, et l'entrée dans le monde spirituel. Lorsque nous étudierons la Gnose, et la même origine gnostique des Cathares, Rose-Croix et Templiers, nous prouverons que la Religion de l'Esprit Consolateur et Purificateur remonte aux premiers jours du Monde. Avant le Christ dont il fut comme l'Aurore, le Catharisme a projeté ses rayons dans les Brames de l'Inde, les Mages de Perse, les Esséniens de Judée, chez les Grecs dans Pythagore et dans Platon.

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Il est Alexandrin d'inspiration, et a puisé, dans les Mystères égyptiens et Hermès le Trismégiste, une bonne partie de la Science sacrée et de la Sagesse. Le lin pur: rites égyptiens Le Grand-Prêtre entra dans le sanctuaire. Il était vêtu d'une robe de lin, d'une finesse d'une légèreté et d'une blancheur incomparables. L'usage des étoffes de laine était interdit aux Prêtres, car la laine, le poil, le crin, provenant d'un animal, étaient de source impure, tandis que le lin naît de la terre immortelle. Eau lustrale „A son bras était passé un seau „d'eau lustrale"... Les seaux d'eau lustrale, ou seaux à libations, jouent un grand rôle, dans la religion égyptienne. Ils étaient généralement en bronze, fort ornés, et parfois de grandes dimensions. „Chapokhmis, prêtre, scribe d'Ammon et d'Osiris, fils de Psammétichus, reçoit les Honneurs funèbres rendus par son fils, prêtre d'Ammon, lequel offre l'encens à son père, lui fait des libations, avec l'eau lustrale, et récite une prière ..." Ces seaux à eau lustrale portent assez souvent un arbre sacré, le perséa, du haut duquel la déesse du Ciel verse à l'âme du mort l'eau lustrale régénératrice! L'eau lustrale, pure, était pour les Parfaits l'eau tombant des stalactites, dans les grottes. Voilà pourquoi Joanna — nom de l'Eglise cathare — avant de mourir, recommande: «Quand serai morta, répond-mé, Al pus priou de la cava, Metmé los pes a la pared, Lo cap jos la canela. Tots les Romius que passaran Prendran aîga lustrada___" „Promets-moi, quand je serai morte, De me porter au plus profond de la Grotte. Tu me placeras les pieds contre la roche, La tête sous une stalactite (qui laisse tomber l'eau lustrale). Tous les visiteurs (pèlerins de l'Amour divin, faidits, proscrits, pourchassés) Prendront de l'eau lustrale ..." (Mort de Joanna) Le beptême d'eau „Et qui croira et sera baptisé sera sauvé; mais qui ne croira pas sera condamné". (Saint-Marc) „En vérité, en vérité, je te dis qu'aucun homme n'entrera dans le royaume de Dieu s'il n'a été ..régénéré" par l'Eau et le Saint-Esprit". Jésus-Christ à Nicodème. (Saint-Jean) Guilhem Guari, Diacre de Lautrec, poursuivi par l'Inquisition, fut fait prisonnier par le Chevalier Matfred. Guilhem convertit ce seigneur. Il lui prépara un bain. Matfred lui dit: „Bénis-moi et fais de moi un bon chrétien!" „Le Baptême de l'eau fut suivi du Baptême de l'Esprit!" (Archives de Carcassonne, Doat : XXIV — 110)

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IV LE CATHARISME PYRENEEN LA GNOSE — LES GNOSTIQUES

Nous avons dit, déjà, que la Gnose est la Connaissance de tout ce qui touche à Dieu, à Jésus-Christ, à la synthèse chrétienne des philosophies éparses dans le monde avant la venue du Christ. Comme toutes les traditions, le Gnosticisme considère le monde comme une illusion: la seule réalité est Dieu. Sans Dieu, le monde n'existerait pas. Echapper à la matière pour se rapprocher de Dieu, considérer les souffrances comme une base de Purification, suivre, sans se lasser, le chemin de la Perfection, c'est, en résumé, essayer de se rapprocher le plus possible de la pureté de Jésus-Christ, le divin Maître. Pour se délivrer de la matière, il faut briser les liens qui nous rattachent au monde sensible; et c'est seulement lorsque nous sommes entièrement détachés du monde, que nous pouvons spirituellement y revenir, et oeuvrer pour sa Rédemption, car alors il n'a plus aucune prise sur nous. C'était l'oeuvre de l'initiation des Parfaits, Purs ou Bonshommes, prêtres Cathares ou Rose-Croix. Mais, pour cela, le seul moyen est de renoncer à l'instinct de possessivité, renoncer à tout, même, et surtout, à soi-même, ne plus rien avoir à soi. C'est, proprement, la pauvreté spirituelle. Echapper à la matière et au mal, ne signifie nullement qu'il y un Dieu Mauvais: Dieu est Amour! Les Gnostiques, Cathares, Rose-Croix, Templiers, ne sont pas, et ne peuvent pas être dualistes, ou, plus exactement, dithéistes. Les Pères de l'Eglise l'ont reconnu, un peu trop tard ...! Les Gnostiques reconnaissent Jésus comme le Verbe Rédempteur, le Messie promis, qui nous délivra en nous enseignant la Bonne Parole, souffrit et mourut pour nos péchés, puis ressuscita. On avait pris l'habitude de grouper, sous le nom de Gnostiques, quantité de sectes dissemblables, parfois même ennemies, pour avoir ainsi un motif de les combattre, de les exterminer, de les calomnier surtout. On a vu ainsi des ..Manichéens", des .Albigeois", déclencher des Croisades et les pires excès, sur un mot impropre. Aujourd'hui, ces erreurs tendent à disparaître. Le Gnosticisme a ses racines dans la secte juive; il est né parmi les Judéo-Samaritains; et c'est dans la Palestine, plus particulièrement dans la Sama-rie, qu'il faut chercher son berceau. Les Esséniens sont les plus intéressants des Juifs qui se séparèrent nettement de leurs compatriotes. Ils étaient distingués par une grande pureté des moeurs; ils approuvaient le mariage, nécessaire pour la conservation du genre humain, mais ne suivaient pas les voluptés de la chair; ils priaient sur une montagne; ils condamnaient les jurements et la propriété des biens, ainsi que les serments; ils soignaient les malades, d'où leur nom de ..Thérapeutes", mot grec qui signifie „homme appliqué à guérir". Ils vivaient, dans un parfait détachement de tous les biens de la terre, pour leurs parents, pour leur patrie. En raison de leur façon de vivre comme les premiers chrétiens, Eusèbe, Snt Epiphane, Snt Jérôme, et d'autres historiens de l'Eglise, les ont traités comme des chrétiens apostoliques.- Dosithée, Juif, d'une piété austère, forma la secte des Dosithéens. Ils vivaient au temps de Jésus-Christ et adoptèrent les mêmes pratiques que les Esséniens, sauf celle qui ne croit pas à „la résurrection de la chair". — „Il n'est pas permis de manger de tout ce qui était animal: ni chair, ni poisson; il ne faut se nourrir que des fruits de la terre; les secondes noces doivent être condamnées; la virginité est nécessaire pour le Sacrifice de la matière". — Ils vivaient dans des grottes ou cavernes. Dosithéenia: la résurrection des corps; la destruction future du Monde;

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le jugement dernier; l'existence des Anges, et ne voulut admettre d'autres démons que les idoles des païens. Les Dosithéens furent les disciples de Jean-le-Baptiste, connus également sous le nom de Sabiens ou Soubbas. Ce nom veut dire Baptiseur. Ils se disaient bien disciples de Jean. Ils considéraient Jean-le-Baptiste comme le Vrai Messie, comme la Vie et la Munière. C'est contre eux, et contre les Cérinthiens qu'est fait le prologue de l'Evangile de Jean, et non contre les Gnostiques. Les Esséniens se fondirent avec le Dosthanisme. Nous reprendrons, plus tard, la suite historique de cette secte; nous verrons que le fameux Simon le Magicien n'est que „Simon obéissant", ou Shema qu'on prononce Shimô. Le Messie Shimô n'est autre que Christ-Jésus qui eut des disciples parmi les Dosthani. Ces disciples sont les premiers Gnostiques. Leur Maître, qu'ils appelent Shimô, Dieu, n'est autre que Jésus. En un mot, ils ont reconnu le Christ-Jésus comme Shimô, comme Dieu. Sous la plume ingénue d'Irénée, c'est devenu l'étonnante histoire de Simon Cyrénéen, substitué à Jésus et crucifié à sa place. Pour comble de mensonge, cette invention a été mise au compte de Basilide. L'Ecole d'Alexandrie doit être considérée comme une période de refonte des principales philosophies de l'antiquité. C'est comme un creuset gigantesque où les religions et les philosophies du Monde venaient se mélanger. L'Hellénisme, en particulier, y dévoile l'auguste Sagesse des Mystères, puisée à la source commune: l'Egypte; car c'est elle qui opère ce rapprochement magnifique d'un Philon et d'un Platon. Trois Centres d'Etudes rivalisent avec de l'Esprit: les Disciples de Philon sont des Juifs hellénisants; les Gnostiques sont surtout Orientaux; les Néo-Platoniciens sont des Grecs. Ammonius-Saccas, fondateur de la doctrine néo-platonicienne, devint bientôt une lumière: païens et chrétiens, chose admirable, se réclamaient de lui. Clément d'Alexandrie, Origène, chrétiens, se recontraient chez lui avec des „païens" comme Plotin et Porphyre. Les Gnostiques travaillaient à démêler l'écheveau de la philosophie, science sacrée, ils abordaient auda-cieusement la Gnose, les plus grands problèmes, et prétendaient les résoudre. Ce qui explique que la plupart des Pères, grecs, nourris de Gnose Alexandrine, aient gardé cette empreinte de Haute Spiritualité: Snt Clément d'Alexandrie, Snt Jean, Chrysostome, Snt Justin, Origène. Un siècle avant Snt Augustin, d'abord Cathare, puis Manichéen, avant d'être chrétien Catholique, Snt Athanase, évêque d'Alexandrie, professait une doctrine de l'âme digne d'un vrai gnostique. Tertullien, comme Montan, fondateur de la première secte Cathare, en 140; comme Novat, évêque Cathare à Carthage; comme Noatien, devenu Pape, et resté Pape (en 250) pendant vingt ans? En vérité, de Rama, l'Archidruide, à Hermès, le Trismégiste; d'Hermès à Pythagore;de Pythagore à Virgile, de Virgile à Dante, c'est le même courant spirituel et séculaire qui circule. Celtisme et Phythagorisme sont frères; Druidisme et Christianisme se complètent, et ce n'est point par pur hasard! L'essentiel de la doctrine des Druides est chrétien en ses purs fondements, bien qu'élaborés avant le Christ. „Ce qu'on appelle aujourd'hui religion chrétienne", a écrit Snt Augustin", n'a jamais cessé d'exister depuis l'origine du genre humain." „Les diverses Cosmogonies des peuples anciens", dit à son tour l'Abbé Moreux, „procèdient d'une source commune antérieure, sur laquelle nous ne savons rien. Un fait demeure: C'est qu'elle dure et que chaque époque en reçoit, d'une façon plus ou moins apparente, une dispensation nouvelle". Gnosis. La Gnose.

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Egypte, Inde, Grèce de Périclès, Grèce, Alexandrine, Pythagore, Platon, Jésus, Dante, Gnose sarrazine, pour revenir définitivement en Europe — avec les Cathares, les Rose-Croix, les Templiers - il y a là toute une chaîne, toute une série de maillons à souder les uns aux autres. C'est toujours la même Pensée au travail, une Pensée religieuse identique, qu'on retrouve et qui s'est continuée sous des symboles différents. Le Temple de l'Esprit. Gnosis. La Fraternité Universelle. Nous venons de la voir, la Mystère enveloppe toutes les origines: celle du Monde, celle du Christianisme, celle de l'Homme, Le Christ, lui-même, opère dans un „nuage lumineux"; et, lorsqu'il a profondément enraciné le trône divin, on en voit surgir, à travers une confuse végétation, trois grandes tiges-mères: la branche Juive et traditionelle de Saint-Pierre; la branche grecque et dogmatique de Saint-Paul; la branche orientale, platonicienne et mystique de Saint-Jean. Auquel de ces trois rameaux primitifs se rattachent les Cathares, Rose-Croix, et Templiers, le Catharisme pyrénéen, avec le Manéisme Aquitain? Evidemment au dernier, à Jean, fils de Zébédée, au Disciple Bien-aimé du Seigneur. Moïse descendit des nuées tonnantes du Sinai, tenant les Tables de la Loi; le Christ, remontant dans la gloire, ne laisse que son Verbe au Monde. Le Verbe se condense dans un Evangile primordial. Ce Protévangile hébreu se fragmente en quatre Evangiles grecs qui se pulvérisent en une multitude de légendes évangéliques rédigées dans tout les idiomes de l'Orient. Chaque nation possède sa biographie de Jésus; chaque secte modifie à son idée l'image du Christ. Les Juifs le proclament „fils d'Abraham"; Les Grecs le déclarent „Fils de l'Homme" et font remonter ses origines jusqu'à Adam; Les Orientaux suppriment toute généalogie humaine, et ne voient en lui que le Verbe, Fils de Dieu. Le Christ a aussi sa mythologie. L'Eglise rejette cette folle et stérile végétation de légendes apocryphes: elle ne conserve que les quatre Evangiles: à l'homme, au lion, au taureau, à l'aigle. Le concile de Nicée les déclare „seuls orthodoxes". Mais la source de ces quatre fleuves, l'Exemplaire unique et originel, le Protévangile, a disparu! ..Matthieu", dit Grégoire de Naziance, évêque du IVème siècle, „a écrit pour les Hébreux; Marc, pour les Romains; Luc, pour les Hellènes; Jean, pour tous les peuples de l'Univers." On voit, par ces paroles, dans quelle estime était tenu l'Evangile de Jean. Mais Grégoire de Naziance s'exprime comme un Grec asiatique, comme un Patriarche de Constantinople, qui reconnaissait Jean pour patron, Apôtre de l'Orient, et dont la basilique métropolitaine était consacrée à ,,l'Agia Sophia", de Sagesse Eternelle. Les Cathares partageaient là-dessus, «en les dépassant, toutes les idées de Grégoire de Naziance. Seulement, au lieu du Verbe, ils invoquaient le Paraclet. Ils accordaient une suprématie immense au Fils de Zébédée. Ses écrits formaient, à peu près, toute leur Bible: l'Evangile Johannite commençait leur histoire, et l'Apocalypse de Pathmos ouvrait leur épopée. Leur génie avait le tempérament de l'Aigle, symbole du Boanerge, et ils étaient véritablement les enfants du Tonnerre, du Soleil, des Nuées. Par l'Apôtre Jean, ,,1'Ami du Sauveur", et par son Evangile, „la Perle de la Bible", les Cathares étaient non-seulement de la plus pure lignée évangélique, mais encore de la plus haute origine orthodoxe. Et pourtant, ils sortent de l'orthodoxie par un raffinement superbe, et par un élan éperdu vers l'idéal chrétien. Non-contents d'avoir l'Evangile spirituel, ils l'interprétaient dans le sens de la plus haute mysticité. Ils n'étaient pas seulement Mystiques, ils étaient encore Gnostiques.

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Leur Christianisme était „une Gnose", c'est-a-dire „une Connaissance"; une prédication, et non un sacrifice. Leur chef était le Verbe enseignant, et non l'Homme-Dieu souffrant. Comme le Dieu-Sauveur de Platon, il sauvait par la Vérité, non par l'expiation et le martyre. Le Catharisme, au fond, supprimait la Croix, dérobait le Crucifié, voilait d'un nuage le Calvaire. Les Gnostiques avaient été conduits à cette négation par leur conception philosophique de l'origine des choses. La raison n'a jamais pu s'expliquer la coexistence simultanée de l'infini et du fini, de Dieu et du Monde. Si l'Esprit est l'Etre, la Matière est le Néant; si l'Esprit est le Bien, la Matière est le Mal, c'est-à-dire le Non-Etre. Dieu, donc, étant l'Etre infini, la chair n'est qu'une ombre, le Monde qu'un fantôme, la Destinée qu'un drame lugubre, mais fantasmagorique. De là, des conséquences qui modifiaient profondément la théologie, la Morale, le Culte. Il nous suffit de signaler: que le Christ Cathare n'était point homme; que Son corps était lumineux et éthéré; qu'il n'a point physiquement souffert sur la Croix; qu'il n'a pas été plus réellement crucifié sur le gibet du Calvaire que l'Agneau n'est réellement immolé sur l'Autel céleste de l'Apocalypse. (à suivre)

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V LE CATHARISME PYRENEEN LA GNOSE — LES GNOSTIQUES (suite)

Il y avait des Gnostiques Juifs et des Gnostiques grecs-syriens. A laquelle de ces deux branches se rattachaient les Cathares pyrénéens? Ils avaient horreur de tout ce qui était hébraïque; - ils repoussaient le Jéhova hébreu, le Jésus Galiléen, la Bible mosaïque, les Evangiles judaïsants, et éludaient tout ce que Jean conserve d'israélite. Ils étaient donc Grecs-Orientaux. Dieu est Amour. Mais ils ne se rattachaient ni à Bardesane, ni a Basilide, ni à Valentin 1er; ils se rattachaient à Montan, a Marcion, les premiers Cathares (140 à 199), a Novat, à Novatien, le Pape Cathare (ainsi que nous l'avons déjà vu précédemment). On pourrait dire d'eux qu'ils étaient des „ultra-chrétiens". Ils n'étaient pas des Manichéens, sectateurs de Manès, (fin du 3ème siècle, 4ème siècle). Ils adoraient „le Mani", ou le Saint-Esprit. Manéisme n'a jamais voulu dire Manichéisme. Et cependant, que d'erreurs tragiques a causé cette confusion voulue. C'est tout le drame Cathare. Etaient-ils chrétiens? - Ils étaient les disciples de Saint-Jean et les descendants des Sept Eglises d'Asie, auxquelles le prophète de Pathmos adresse son Apocalypse (Synode de Caraman: 1167). Ils prétendaient donc être de la plus haute race évangélique, de la plus docte et lumineuse filiation chrétienne. C'est ce qu'exprime le mot „gnostique", orthodoxe encore au 2ème siècle, du moins à Alexandrie et en Orient, et synonyme d'un Christianisme spéculatif et transcendant, opposé au Christianisme vulgaire traditionnel et catholique (Clément d'Alexandrie). Les Gnostiques élaguèrent largement les Evangiles judaïsants, et ne conservèrent d'intacts que les écrits johannites; leur interprétation est toute mystique. Leur théorie est émaillée de pensées d'Origène, de Grégoire de Naziance, de Synésius, des plus pures fleurs de l'Orient. Le Gnosticisme aquitain pourrait même être aisément réduit à une sorte d'Origénisme plus éthéré. Pensée du Christ, brûlée sur l'autel alexandrin de Platon, le Catharisme formait une espèce de théosophie qui s'échappait des Evangiles, comme un parfum, par le haut, par l'idéal, par l'infini. Sous ce point de vue, le Manéisme aquitain (baptisé plus tard, a dessein, Albigéisme), peut être considéré, et a dû se considérer lui-même, avec raison, comme une évolution nouvelle du Christianisme et comme son épanouissement définitif, son épavoration, sa volatilisation suprême et céleste. La Trine- Unité de l'essence divine a produit un triple développement correspondant, une triple manifestation corrélative, de la forme religieuse. Si le Mosaîsme est la religion du Père (de Jéhova), si le Christianisme est la religion du Fils (de Jésus), le Catharisme est la religion de l'Esprit (du Paraclet). Comme le Christianisme se dégage du Mosaîsme par le Verbe, le Catharisme se dégage du Christianisme ecclésiastique par le Paraclet. Le Mosaîsme représente la puissance; le Christianisme représente l'intelligence; le Catharisme représente l'Amour de Dieu. Le Catharisme, qui revendiquait sa mère, l'Eglise chrétienne, méconnaissait la synagogue juive. Celle-ci avait expulsé l'Eglise chrétienne comme trop intellectuelle; celle-ci, à son tour, expulsait l'Eglise Cathare comme trop spirituelle, trop idéale .... De sorte que l'Eglise Cathare, qui prétendait encore légitimement au titre de chrétienne, devrait plutôt, après cette évolution, porter plus exactement le nom de „Paraclétienne".

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Par cette évolution hardie, le Catharisme, qui, sous bien des rapports, n'est qu'un christianisme plus éthéré, peut être considéré comme une nouvelle religion qui s'échappe de l'Eglise comme le papillon de sa chrysalide. Cette transformation, qui fut son infortune éclatante dans le Passé, doit être dans l'Avenir sa gloire funèbre. Le genre humain, selon le christianisme est sauvé par le Fils, et non par l'Esprit; par le Verbe et non par l'Amour. Selon le Catharisme, le salut procède du Paraclet, du Consolateur; il a la grâce mystique, le charme céleste. De l'Esprit, „qui vole comme le vent dans l'Espace", dit l'Evangile, il aura la mobilité, la viabilité mystérieuse, le besoin de l'Infini, comme l'ange. Les premiers „Amis de Dieu" était une secte égalitaire, professant le sacerdoce universel. Plus tard, la lutte amena l'organisation; trois degrés se formèrent dans l'égalité primitive: le Noviciat, la Perfection, le Sacerdoce. Le diaconat monta en épiscopat, et l'épiscopat s'épanouit en patriarcat. Là, s'arrêta sa hiérarchie qui, désormais, conserva le monopole du patriarcat. Cette aristocratie patriarcale ne se montra, jamais, monarchie théocratique. Elle ne versa, a aucun moment, dans le rêve de Manès, qui enveloppait le monde entier dans son projet de théocratie universelle. Le Catharisme pyrénéen fut, de son essence, trop spiritualiste, pour incarner le Paraclet „dans un homme": son Pape, c'est l'Esprit; son Vatican, c'est le Ciel. Pas de verbe scellé dans la Bible; pas d'Ecriture enchaînée dans le Temple; pas de Dieu captif dans le Tabernacle; pas de prêtre geôlier de Dieu; pas de Pape concierge du Ciel et de l'Enfer; pas de servitude et de mort de l'Esprit. Dieu a sauvé deux fois le Monde de ce matérialisme et de la corruption, par la Révolte immense de la Gnose: les mystiques, les gnos-tiques, les solitaires des déserts, les grands penseurs des Cavernes. Il insurgea les Cathares, les Léonistes, les Spirituels de Narbonne et de Calabre contre la Foi et le Dogme non raisonnes: c'étaient les Eglises proscrites de Saint-Jean et de Saint-Paul; c'étaient les Rose-Croix et les Templiers, frères de la Fraternité Universelle, avec les Cathares, qui élevèrent le Temple de l'Esprit; c'était la grande Mani d'Aquitaine, le Manéisme (non le Manichéisme). Pyrénéen, qui sut conserver la Croix du Grand-Maître du Temple (non des Templiers). Et quelle Croix: la Barque d'Isis; la Colonne de la Lune, (symbole ardent de l'Esprit); la Colonne du Soleil, (symbole de Christ); la Colonne Christique, en un mot, le divin Chemin des Etoiles, le Graal magique avec son dur Sentier de la Perfection. Le Catharisme, arrivé en Occident, sous sa forme pure, avec Marcos de Memphis, avant l'an 350; répandu, par son élève favori, Priscillien d'Avila, dans toute l'Espagne, toute la Gaule, l'Angleterre, la Belgique, la Suisse, la Hollande, l'Allemagne, jusqu'en 382, date ou il fut décapité à Trêves (Allemagne); par les grands disciples Elipand, Archevêque de Tolède, et Félix, Evêque de Urgel, (Andorre et Sabartez), qu'on retrouve sur les mêmes chemins de Priscillien (de 788 a 800) à Narbonne, à Ratisbonne, à Francfort, à Aix-la-Chapelle; avec Joachim de Flore et Nicétas; le Catharisme, disons-nous, était l'expression de l'hellénisme platonicien et johannite, se répandant sur le monde latin. C'est dans le vaste cirque compris entre les Alpes, la Méditerranée, les Pyrénées et l'Océan, qu'est le sol sacré et tragique de l'épopée romane, d'abord; puis, du Martyrologe Albigeois. La religion de l'Esprit Consolateur et Purificateur, aussi ancienne que la douleur et le mal, dont elle veut guérir les blessures, remonte aux premiers jours du monde. Avant le Christ, dont il fut comme l'aurore, le Catharisme a projeté ses rayons dans les Brames de l'Inde, les Mages de Perse, les Essé-niens de Judée; chez les Grecs, dans Pythagore et

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dans Platon. Après le Christ, ainsi que tous les Gnostiques, c'est de Platon qu'il procède, pour la Pensée, et de Pythagore, pour la Morale, conservant, dans l'Orient d'en Haut, son rayon vierge: rayon céleste et lampe grecque. Indo-Grec de génie, il repousse le Judaïsme, les livres hébreux, les violences de Moïse, les tonnerres de Jéhova; — Alexandrin d'inspiration, il se distingue du Néo-Platonisme en rejetant toutes les mythologies, les traditions orphiques, homériques, olympiennes, pour se rattacher, par Saint-Jean, au Christ; — Gnostique, il se sépare des autres gnostiques en rejetant les Eons, les Abracas, les diagrammes, les nombres cabalistiques; — il se sépare nettement du Manichéisme persan, en repoussant son Dualisme de l'Esprit et de la Matière, son Eternité du Mal, ses restes du Mazdéisme. Zoroastre lui est aussi antipathique que Moïse; — Chrétien, et antérieur du Christianisme de Nicée, il n'accepte ni les livres juifs, ni les Evangiles judaïsants, ni les symboles de l'Eglise impériale, ni les pompes païennes de la théocratie romaine; — il se détache du tronc chrétien par la branche mère de Saint-Jean, et forme comme un Néo-Christianisme par le dogme générateur du Paraclet; — il diffère du Mysticisme de Calabre en ce qu'il n'admet point l'Evangile éternel de Joachim de Flore, et que l'Evangile de Jean est, pour lui, „le Volume porté par l'ange au Zénith du Ciel"; — il se sépare de François d'Assise, comme de Joachim de Flore, par sa dogmatique alexandrine, et son invincible horreur de Rome, les hideuses procédures de l'Inquisition, la mort des hérétiques proclamée dès Léon 1er en 447, la honteuse condamnation de la pensée libre par les grands théologiens catholiques, dont le modèle, net et clair, nous est fourni par Saint-Thomas-d'Aquin, 1225 - 1274 (voir ci-après); — contemporain et compagnon d'oeuvre du Léonisme, il s'en éloigne par sa hiérarchie, sa théologie platonicienne, son génie oriental. Dieu est Amour. Nous avons employé, ci-dessus, l'expression: „son invincible horreur de Rome"; il y a de quoi, en effet, éprouver ce sentiment, sans y ajouter la moindre idée de vengeance, contraire à tout esprit Cathare. Sans nous attarder sur ce sujet, hélas! inépuisable, contentons-nous de glaner dans l'histoire: Saint-Thomas d'Aquin a écrit: „L'hérésie est un péché par lequel on mérite, non-seulement d'être séparé de l'Eglise par l'excommunication, mais encore exclu du monde par la Mort". „Si l'hérétique s'obstine dans son erreur, l'Eglise, désespérant de son salut, doit pourvoir au salut des autres hommes, en le retranchant de son sein par une sentence d'excommunication". „Pour le reste, elle l'abandonne au bras séculier, afin de le bannir de ce monde par la Mort!". Le Glaive?... Non: le bras séculier... Horrible hypocrisie----Poursuivons: Mgr. Vidal, dans son travail „Le Tribunal d'Inquisition de Pamiers", fondé en 1318 par Jacques Fournier, évêque de Pamiers, devenu le pape Benoît XII), nous dit, s'appuyant sur le manuscrit 4030 du Vatican: „Cinq prévenus examinés par le Tribunal de Pamiers sont livrés au bras séculier. L'obstination dans l'erreur, et la récidive, étaient des crimes irrémissibles. En les punissant du dernier supplice, l'Inquisition vengeait la Foi. Le châtiment était exclusivement vindicatif, la conversion ne sauvait pas la vie au relaps. Pénitent, ou non, il était brûlé". Le bûcher était réservé au bras séculier; mais personne ne se laissait prendre à la formule platonique derrière laquelle le juge essayait d'abriter sa conscience.

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„Te relinquimus Curiae saeculari" - „Nous t'abandonnons à la „Cour séculière", la suppliant affectueusement, comme l'Exigent les saints Canons, que par sa sentence, elle t'épargne „la Mort et la Mutilation". Suprême horreur .... Puisque, elause purement illusoire; l'impénitent était toujours exécuté. Sans doute, la peine de mort aurait pu être commuée si l'hérétique faisait sa soumission; mais, justement, il avait été remis au bras séculier parce qu'il n'avait pas voulu se soumettre. C'était de l'hypocrisie: l'Inquisition en avait usé ainsi à l'égard de Pierre Autier, l'Evêque des Eglises de Bouan, centre initiatique d'Ussat-Ornolac. Elle savait qu'il n'y avait rien a faire avec ce Parfait. Complétons ce sinistre tableau. Contre les hérétiques et leurs croyants morts dans l'impénitence, et a la mémoire duquel un procès avait été intenté, l'Inquisition de Pamiers (Jacques Fournier, Evêque), prononçait la confiscation des biens, l'exhumation et l'incinération des ossements_Bûchers pour squelettes___ Une observation s'impose, qui préside a l'histoire de toutes les guerres religieuses qui suivirent: Lorsque Jacques Fournier fonda son Tribunal, 1318, les poursuivis sont devenus rares: pendant plus de cent ans, ils avaient été exterminés. Le Sabar-tez (Haute- Ariège), à peu près seul, survivait a ces jours sombres des luttes médiévales. (Le „ils", ci-dessus, désigne les Cathares). L'éveque trouva, de l'ouvrage et déploya une énergie peu commune a traquer les derniers fidèles, (de l'Eglise d'Amour). Il trouva sa récompense dans le chapeau rouge et la tiare. Nous voulons bien croire que ses excès dans la répression de l'hérésie en Sabartez lui soient imputés comme l'accomplissement d'un devoir. Mais alors, une question se pose: appliquant la procédure dans toute sa rigueur, de 1318 à 1325, et même 1329, à une époque bu l'Eglise elle-même-submergée par le sang des Croisades et par les cendres des bûchers, jamais éteints -recommandait - l'indulgence, quel juge eût-il été au temps de la poursuite intense de l'hérésie?___On tremble rien que d'y penser. Ce qu'un historien de l'Eglise traduit ainsi: „Dès lors, les Albigeois, privés de toute protection, furent aisément détruits". Après avoir dit dans une autre page: „Les Manichéens avaient abandonné le dogme fondamental de leur secte: l'hypothèse des deux principes. Ils ne parlaient plus du mauvais principe que comme nous parlons du démon, et ils faisaient remarquer l'empire de celui-ci par la multitude des désordres qui régnaient dans le monde". Manichéens, Albigeois, Cathares. Quel déluge de mots pour étouffer la vérité. Les Manichéens sans le Dualisme, n'étaient donc pas des Manichéens; — les „Albigeois' n'ont jamais existé à Albi, en secte proprement dite; mot inventé pour détruire le Manéisme, c'est-a-dire Cathares, Rose-Croix, Templiers (menace directe pour ces derniers); — les Cathares n'étaient ni Manichéens, ni Albigeois, ce que nous pouvons aisément déterminer par l'historien de l'Eglise, Abbé Guyot, entre autres: „Ce nom Albigeois désigne, en histoire, une Confédération d'hérétiques du Xllème siècle: Pétrobrusiens, Henriciens, Arnaudistes, Vaudois, Cathares, Manichéens (qui avaient cependant modifié le système de Manès)". Et le Concile général de Latran ajoute: ..Brabançons, Aragonnais, Navarrois, Basques, Cottereaux et Triaverdins". Est-ce suffisant? La Croisade contre les Albigeois, après la Croisade du légat Henri d'Albano, en 1181, (d'une cruauté sans pareille!), c'était la Croisade contre le Catha-risme pyrénéen,

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l'Empire d'Amour de la belle Occitanie. Le mot Albigeois, comme jadis le mot Manichéens, cachait la sanglante et honteuse expédition ordonnée par Innocent III, sous le nom: Croisade des Albigeois. Comprenez-vous, maintenant, ce que nous voulions dire par ces mots: „son invincible horreur de Rome?" Et encore ne connaissez-vous pas l'agonie du Catharisme pyrénéen précipitée par le Tribunal d'Inquisition de Pamiers fondé en 1318. Pour les Cathares, le mot „haine" n'existe pas: Dieu est Amour. Purs Chrétiens, dont Christ est le Divin Maître; Messianistes de toujours, ils ont conservé, et conservent, leur divine origine: Adveniat regnum tuum! Que ton règne arrive! Le Marianisme, que Dominique d'Osma a installé pendant la Croisade des Albigeois, n'est pas la ..transformation" voulue par le pape Léon III: Formation, Réformation, Transformation! Nous en reparlerons!

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VI

LE GRAAL DANS LES PYRENEES Le Graal est le plus mystérieux secret du Moyen-Age que l'on retrouve en plusiers lieux: Pays de Galles (le Gladstornburg), à Fécamp, à Bruges, sur le Rhin et dans le pays légendaire de l'Est. On le retrouve, surtout, dans les Pyrénées et le Languedoc, dans le Nord de l'Espagne. Le mot „Graal" est de langue d'Oc: c'est le mot „grasal", désignant un vase moyen, en terre, en général, et une coupe assez grande en particulier; son féminin est „grasalo", ou grande terrine. Ce mot est encore assez courant dans les villages des montagnes ariègeoises. Les Templiers désignaient le Graal par le „Sant-Grêsal", ou le „Sant- Gréai". Les plus anciennes versions de la légende sont: le „Percecal le Gallois", de Chrestien de Troyes (1150-1191); Le „Parzival" et „Titurel", de Wolfram von Eschenbach (1170-1220). C'est dans ce dernier que Wagner prit „le gros" pour son Parzival; et elle diffère grandement de la légende de Galaad qui fut adaptée par Mallory et Tennyson. Wolfram von Eschenbach nous dit qu'il a puisé dans l'oeuvre de Chrestien de Troyes, mais que c'était le plus ancien Perceval dont Chrestien aurait fait une adaptation très libre. Cet „ancien Perceval", ainsi que le dit Wolfram, était l'oeuvre d'un poète-troubadour appelé Kyot ou Guyot, (de Provins, avec la prononciation Provence?). Il blâme Chrestien pour ses innovations et déclare que lui-même suivra le Graal de Kyot. (Chrestien de Troyes écrit vers la fin du Xllème siècle; la date de Titurel est fixée à 1210; celle de Wolfram ne peut être exactement fixée; la date de l'original de Kyot doit précéder, naturellement, la mort de Chrestien, en 1191). „Si, de Troyes, Maistre Chrestien „A ce récit a fait tort, „Kyot, à bon droit, s'en peut irriter, „Qui nous transmit les récits véridiques. „De Provence (Provins?), en pays allemand „La vrai récit nous fut envoyé, „Et l'aventure parvint a bon port". Wolfram von Eschenbach nous donne quelques traces du plus ancien Parceval de Kyot. Il nous dit: „Un païen, il avait nom Flêgêtanis, „Dont on vantait le riche savoir, „Elu de la race de Salomon, „Issu de la souche d'Israël, „Met, le premier, sur la trace du Graal... .....Dans la poussière de Tolède, „Guyot, le Maître de grand renom, „Trouva, en écriture païenne enchevêtrée „La légende qui atteint la source première des légendes ...". L'histoire peut nous fournir quelques renseignements: Alaric, roi des Wisigoths, emporta „le Trésor de Salomon", de Rome à Carcassonne, en 410. Procope affirme que „les objets du Trésor" avaient bien appartenu à Salomon, et avaient été apportés par les Romains de Jérusalem. Thêodoric en transporta une grande partie à Ravenne; Bélisaire la transporta a Bysance. Les Wisigoths furent écrasés par les Arabes a la bataille de Jerez de la Frontera, en 711. Le „Trêsor de Salomon" tomba à Tolède entre les mains des Musulmans: mais, „la

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Table de Salomon" n'y figurait pas. Les Arabes traversèrent les Pyrénées en 718. De vieilles romances espagnoles veulent que le „Table de Salomon", qu'ils appelent aussi „écrin", ait été conservée dans „la grotte magique d'Hercule". Le roi des Goths, Rodéric, aurait pénétré dans „la grotte d'Hercule" et aurait découvert, dans un coin sombre, cet „êcrin" et, dans l'êcrin, trois coupes. La „Grotte magique d'Hercule" c'est la grotte de Lombrives, la Cathédrale des Albigeois; c'est la grotte où Hercule Tyrien a laissé la légende de Pyrène, marraine des Pyrénées. Le poète latin Silius Italicus nous l'a transmise il y a déjà près de vingt siècles! En outre, détail troublant, c'est là que l'évêque Cathare Amiel Aicard, par ordre, avait transporté „le Trésor Sacré des Cathares" dans la nuit de la reddition de la forteresse de Montsêgur, en 1244! Nous verrons, par la suite, Parzival, de rendant au Château du Graal, le Gralsburg des Templiers Mount Salvatge, Montréal, et s'arrêtant chez un ermite, le Parfait Trëvrizent. Celui-ci fait entrer Parzival dans sa cellule, conduit le cheval dans une première grotte, Fontane-la-Salvatge, et conduit le Chevalier dans une deuxième grotte ou se trouvait, découvert, l'Autel: „La-bas, se dressait aussi, selon fus du jour, „L'autel découvert; au milieu „Etait cet êcrin ...", Nous sommes bien, comme on le voit, au centre du pays du Graal! L'Ariège, affluent de la Garonne, prend sa source dans les Pyrénées, a la limite-frontière de l'Andorre, et se jette dans la Garonne un peu avant Toulouse. Elle traverse le département qui lui doit son nom, l'Ariège, du Sud au Nord. Ce département formait le Comté de Foix qui avait englobé la Viguerie du Sabartez établie par Charlemagne. Environ 22 siècles avant Jésus Christ, les Ibères, venus d'Asie, avaient occupé l'Espagne et toute l'Aquitaine. Plus tard, les Celtes s'infiltrèrent chez les Ibères et formèrent les Celtibères. L'Ariège était occupée par la tribu Celtibêrienne des Sotiates, dont une partie venait des bords de la mer Egée. Ces Egèens s'étaient concentrés autour des nombreuses grottes de la région d'Ussat, et formaient, dans la Haute-Ariège, le pays des Taruskes (Taruskonienses de Pline), avec Tarusko (Tarascon) pour capitale. Chose curieuse! Ces Taruskes avaient des frères sur les bords du Rhône, près de Massilia, (Marseille). C'est chez les Taruskes Rhodaniens que vint habiter Marie Madeleine et sa nombreuse suite, dans une balme, bien entendu. (Balme, baum, une grotte; du Gaulois: béer, baour, puits). Les Taruskes pyrénéens avaient plus de cinquante grottes dans leur centre. Or, le Graal de Marie Madeleine, chez les Taruskes Rhodaniens, ne le cédait en rien spirituellement, au Graal pyrénéen! Un grand courant était établi! L'Ariège reçoit à Tarascon une rivière, le Vie de Sos, du nom de l'ancien oppidum des Sotiates appelé Vicus Sotiatum. Cette rivière traverse une bien jolie bourgade, appelée, elle aussi, Vie de Sos. Entouré par de hautes montagnes, dont la partie sud forme le Massif du Montcalm, un des géants des Pyrénées (3141m), Vie de Sos est dominé a l'est par un immense rocher à pic, gigantesque quille posée au bord du bourg et de la rivière. Cette masse portait un des châteaux les plus puissants du pays des Taruskes, plus tard le Sabartez. Ce château, Montrêal-de-Sos, (Montrêalp), juché a 1240 mètres d'altitude, ne possède plus que des ruines. Richelieu le fit démanteler; le temps et les hommes ont fait le reste. Seuls, restent quelques pans de mur, et une grotte a double issue, une grottelle d'initiation! C'est dans cette grotte à double, et, même, triple issue — j'insiste sur cette dénomination, que nous expliquerons plus tard— que se trouve un tableaux en trois couleurs, blanc, noir et rouge: dessin se rapportant directement au Perceval le Gallois,

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de Chrestien de Troyes. On y voit, sur la paroi rocheuse, de belle taille, mais, légèrement détériorés par les inteméries: des croix rouges, une êpée brisée, une lance, un taillover décoré portant cinq gouttes dé sang, et, au centre, le Graal en forme de soleil resplendissant. Dessin unique au monde: un coup d'oeil, et tout le livre de Perceval défile instantanément devant vous! Voici: Au château du roi Peschor, roi du Graal. „En cette salle, il y avait si grande lumière du feu, des chandelles, des torches et des flambeaux, qu'il semblait véritablement que les étoiles, qui errent aux Cieux, rendent si grande clarté! Et pendant que les uns et les autres devisent ensemble de divers propos, un chevalier sortit d'une chambre portant une blanche lance en sa main ...". 10 La lance „Elle était en bois ... du fer ... Le fer est blanc comme la neige. — Du fer de la lance sortait une goutte de sang qui coulait jusque sur la main du chevalier qui le portait. — Puis, dans la salle, entrèrent deux êcuyers portant chacun en sa main un fort beau chandelier d'or. Ces êcuyers étaient richement parés. Sur chaque chandelier il y avait au moins dix chandelles. — Après entra une fort belle demoiselle, suivant les deux êcuyers, laquelle, entre ses mains, portait un Graal". 20 Le Graal „Et quand, dans la salle, elle fut entrée, une si grande clarté apparut du Graal qu'on ne percevait plus la clarté des torches ou chandelles allumées, pas plus celle des étoiles, ou du soleil et de la lune quand ils luisent. — Et, après elle, entra encore une autre demoiselle qui la suivait, tenant un tail-lover d'argent en sa main". (Taillover, mot ancien désignant un plateau). 30 La taillover (tailloir = plateau) „Autor du Graal étaient des pierres précieuses très chères, de plusieurs sortes et de diverses natures, lesquelles dépassaient en valeur toutes les autres pierres de la mer ou de la terre. — Cinq gouttes de sang sont tombées sur le taillover. — Des signes, des symboles se rapportent au Christ! — Gauvain est un brillant seigneur, qui croit avoir parcouru „la queste du Graal", c'est-a-dire le chemin du Bien, de telle façon qu'il puisse être reconnu „Parfait Chevalier", digne de recevoir le Saint-Graal. C'est devant lui que défilent les diverses parties dont se compose le Graal. — La procession continue. 40 L'épée brisée „La porte d'une chambre s'ouvrit. Le seigneur entra tenant en mains une épée faite et trempée de financier. C'était l'épée d'un chevalier qui gisait dans la bière ..." — Dans la pièce à côté: „Le roi fait lever Gauvain et le conduit auprès de la bière. Il tire l'épée du fourreau. Elle était brisée et n'en tenait que la moitié: l'autre moitié était sur le mort. — „Beau sire chevalier", dit le roi, cette épée, s'il plaît à Dieu, sera soudée par vous! Si les deux morceaux se resoudent, tenez pour sûr et certain, et il n'en faut point douter, que vous êtes le meilleur Chevalier du Monde!" — Gauvain tire l'êpêe ... l'épée ne se ressoude pas! 50 Les cinq gouttes de sang Elles correspondent aux cinq blessures reçues par le Christ: une goutte de chaque blessure. Elles correspondent aux cinq états de la Perfection, indispensables pour atteindre, si cela était possible, à la Perfection du Christ! 60 Les croix rouges Les croix rouges, bordant le dessin, six a droite, six a gauche, se rapportent aux douze gardiens du Saint-Graal. Au centre, une treizième croix est réservée au Christ, toujours absent, mais toujours présidant les „Assemblées sacrées!" Perceval, comme Gauvain, avait échoué, une première fois, sa queste étant imcomplète: c'est-a-dire, qu'il n'avait pas encore atteint la Perfection. Le „Chemin du Saint-Graal",

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de la Perfection, est si long et si dur a parcourir! a sa deuxième queste, après cinq nouvelles années passées a se perfectionner, Perceval, revenant au Château du roi Peschor (le Gralsburg), a la bonne idée de revoir l'ermite Trêvrizent. Nous l'avons déjà vu, dans sa cellule, Parfait, pieux anachorète occupé dans la grotte de Fontane-la-Salvatge et dans une deuxième grotte, „la grotte magique d'Hercule"! „I1 combattait la puissance du diable „En souffrant la peine du jeûne. „Dieu lui avait donné de tels sentiments „Qu'il ne vivait que pour préparer „Le temps où il planerait dans le Ciel ...". Les sages conseils de Trêvrizent, ses belles causeries, apporfondies, vivantes, achevèrent d'aplanir, pour Perceval, le dernier tronçon de sa queste! Il revient au Château du roi Peschor. La procession du Saint-Graal passe de nouveau devant lui... Une demoiselle, plus blanche que la fleur de lys, d'une chambre sortit, tenant le Saint-Graal dans la main, et passa. Une autre demoiselle vint après, vêtue d'une pourpre bien fine, portant „la lance dont le fer saigne goutte à goutte". Et puis venait un êcuyer, „lequel, en ses mains, tenait une êpêe rompue par le milieu", qu'il coucha sur la table a côté du roi. Ce dernier invita Perceval a tenter un sublime effort. Perceval prend l'êpêe qui se ressoude! C'est le „Chevalier Parfait", le „Meilleur Chevalier du Monde"! Avant de se retirer pour un repos bien mérité, avant d'installer Perceval a sa place, le roi Peschor donne à Perceval les explications qui suivent: „ ... Quand Jésus fut en croix, glorieusement pendu, ou son précieux côté fut percé, depuis que la lance en fut ôtée, le sang jusques aux pieds courut, et Joseph d'Abarimathie, qui était des disciples du Christ, assista a sa Passion, considérant par inspiration ce tant divin mystère. Pour la révérence de notre Dieu, il rejut en un vaisseau ce sang sacré. „Le sang tomba dans ce vaisseau". „Le tailloir", ce fut celui qui recouvrit le Saint-Graal quand le sacré sang y tomba. Et de cela, je suis bien certain ... „L'épêe que vous avez soudée est celle du roi Gondesert, mon frère. Il fut assiégé dans le château de Quinqueneau par Espinègres. Sur le chef de mon frère, il en donna un grand coup qui le pourfendit jusqu'à l'arcon de la selle ... L'êpée fut brisée en deux. „Le félon, c'est Pertinans, ou Pertinel, seigneur de la Rouge-Tour". Pertinel, par la suite, est vaincu par Perceval qui apporte sa tête à Peschor. Il a vaincu le Mal! Parmi les questions posées par Perceval à Peschor se trouve celle-ci: „Comment, en cette contrée, le Saint-Graal parvint?" A quoi le roi répond: „Quand Jésus fut pendu en croix, Joseph d'Abarimathie le descendit de cette croix accompagné de Nicodêmus. Pour cette cause, Joseph fut mis, par les Juifs, en chartre obscure, où ils voulaient le laisser mourir de faim et d'autre pauvreté. Il fut, pendant quarante ans, sans boire, ni manger. „Mais Notre-Seigneur lui envoyait le Saint-Graal pour le servir, deux ou trois fois par jour; il lui servait une nourriture plus douce que la manne du Ciel. Et tant que Joseph resta enfermé, il n'endura aucune douleur, ni aucune peine, à cause de la visitation du Graal et de la sainteté de celui-ci. Quand Titus et Vespasien vinrent en pays de Judée, ils ôtèrent Joseph de la chartre et l'emmenèrent avec eux à Rome. Joseph emporta la précieuse lance, et après le Saint-Graal revint par la permission de Dieu. ..Quelque temps après, quand les disciples de Jésus se dispersèrent, Joseph vint en cette terre. Il édifia ce manoir, devint le roi du pays; je suis de la progénie et de son lignage. „Quand il rendit son âme à Dieu, les précieuses reliques, le tailloir, le Graal, la lance furent conservées; depuis elles ne sont point parties, et, Dieu aidant, ne partiront jamais!"

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Le roi Peschor meurt. Perceval vint se faire couronner à sa place. Le roi Artus assista aux fêtes du couronnement. C'était le Saint-Graal qui servait: „ ... Ils virent par un huis le Saint-Graal a découvert qu'une demoiselle apportait, et qui fit trois tours devant les tables. Les tables furent alors garnies de mets précieux et délectables ..." Perceval demeura sept ans, puis alla finir ses jours dans un ermitage. — Le Graal,' la sainte lance, divinement le suivirent, avec le saint taillor d'argent. — au bout de cinq ans, l'ermite avec qui vivait Perceval, le fait prêtre le jour de la Nativité de Saint-Jehan. — Perceval vécut encore dix ans, pendant lesquels il ne but et ne mangea. Mount- Salvatge (Mont Sauvage), était le Château du Graal, le Gralsburg de Wagner. Les Templiers veillaient sur la précieuse relique; le symbole de ces „Chevaliers du Temple" était la lance, signe de préparation au combat. „Car elle était bien veilêe et surveillée „Par des Chevaliers, cette contrée; „En sorte que oncques on ne peut ..Traverser la forêt par dol et artifice". Contrée âpre et sauvage, oui; quant au château lui-même: „Seul, un château se dresse tout fier: „Suprême récompense du désir terrestre. ..Quiconque, avec prudence et zèle „Le veut chercher, hélas! ne la trouvera jamais ..." Wolfram promène Parzival dans des coins et des recoins perdus dans la montagne et les forêts, dont il a bien retenu les noms, et qu'il semble avoir visités, tant les détails paraissent, minutieusement, d'une exactitude frappante: „Â la Fontane-de-la-Salvatge on alla, „A un ermitage perdu dans les rochers, „Que Trêvrizent s'était élu pour résidence,. „Près de lui, Parzival apprend „De secrètes nouvelles du Graal ... „A une grotte, l'hôte te conduisit!..." De nombreuses relations existent aussi entre „la Chanson d'Esclarmonde", cycle de Huon, et les poëms du Graal: couronne, lance, hanap magique, le bocage, le pêcheur, le lac, le château. Or, l'auteur de la chanson nous dit: „Seigneur, cette cité, Terrascone a ce nom". Terrascone, Tarascon, le vieux Taruske du temps des Romains, gardien des Vallées du Saint-Graal: route de Montrêal-de-Sos, route des Grottes D'Ussat-Ornolac (les Trois Eglises, la Cathédrale des Albigeois, Fontane-la-Salvatge, Bethléem). „Les parois des grottes de Tarascon sont comme les pages d'un livre saint oh les initiés pouvaient y lire leur doctrine. (Ibères, Euskes, Bébrykes, Sotiates, Taruskonienses, Wisigoths ... ont fait le lit du Sabartez!) Mythe solaire, mythe de la Grande Déesse Mère, mythe de Ram et de l'AUM, Christianisme primitif, Catharisme pyrénéen, Empire d'Amour, Chevalerie, ont laissé, peu ou prou, des traces de leur passage à travers les siècles: soleil cerclé de rouge, croissant de lune, serpents blancs, animaux rouges ou gravés, déesse jaune, inscriptions magiques, déesses gravées, objets sacrés des Mystères égyptiens, torture- sirène des Egéens, théologie des Purs gravés. Les millénaires sont passés, les siècles ont continué leur ronde vertigineuse dans le Temps. La Bible de l'Humanité est restée toute grande ouverte pour le chercheur! L'Esprit souffle sur la matière qui s'anime et qui chante la Gloire de son Créateur!". „Il est des lieux où souffle l'Esprit!", a pu écrire Maurice Barrés. On peut désigner Ussat comme un de ces hauts lieux oh l'Esprit a soufflé depuis de nombreux millénaires. Les grottes de cette région privilégiée ont servi de culte aux sorciers magdaléniens, aux prêtres néolithiques, a ceux de l'âge du Bronze et du Fer, enfin aux Sages des sectes albigeoises (les Cathares!), qui ont encore leurs adeptes!" (A. Glory: „A la recherche des hommes préhistoriques").

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VII

LE GRAAL PYRENEEN (suite) Théodoric I, roi des Wisigoths établis dans les Pyrénées, fut tué en 451 aux Champs Catalauniques contre Attila (419 à 451). II avait confié à son fils, Théodoric II (451 à 466), la „Garde des Marches d'Espagne". Ces marches comprenaient les voies d'accès au Montcalm et Col de Lartigue, les voies d'accès aux ports, ou cols, de Siguer, celles d'Aston-Andorre, celles de l'Hospitalet: c'est-à-dire les vallées de l'Ariège et de ses affluents, toutes voisines du cours de la Sègre qui coule à Urgel, voies de pénétration directe de l'Ibérie-Espagne. En raison de l'importance de la région, après le refoulement des Arabes en Espagne (778), Charlemagne et Louis, son fils, fondèrent la Viguerie du Sabartez, pour les Marches d'Espagne, et lui octroyèrent des institutions, en tous points semblables à celles d l'Andorre. Les Taruskes, Taruskonienses de Pline, indépendants avant la conquête de César, restèrent indépendants, après la soumission des Gaules, dans la Gaule d'Auguste. Et le Sabartez, qui n'était exactement que le pays des vieux Taruskes, ou, plutôt, les seigneurs souverains du Sabartez, devinrent vassaux directs de la Couronne. Bien mieux: lorsque le Sabartez sera englobé dans le Comté par la Maison de Foix, il conservera son indépendance, ses franchises; il se maintiendra en „pays d'état". En effet, les Comptes de Foix relevaient directement du roi de France en ce qui concerne le Sabartez (1075). Il est donc facile de comprendre, pourquoi les nombreuses grottes de la région étaient des habitats sûrs; — pourqoui certaines servirent de lieux d'initiation; — pourquoi les seigneurs, véritables roitelets à peu près indépendants et jaloux de leurs rochers, devinrent les défenseurs de ces domaines mystérieux. Les châteaux-forts, nombreux, dominant toutes les vallées, gardaient, en même temps, les „Marches d'Espagne". Le 20 octobre 1136, Roger III, Comte de Foix-Sabartez, et sa femme, donnèrent aux Chevaliers du Temple le lieu de la Nogarède, situé sur la droite de l'Ariège, à une petite distance en aval de Pamiers. Ils affranchirent les nouveaux seigneurs et les habitants de leurs droits de leude sur ces domaines. Arnaud de Bedos et Raymond de Gaures reçurent, au nom de leur Ordre, cette donation faite entre les mains d'Amélius, évêque de Toulouse. Le Comte voulut que le nom de la Nogarède fût changé en celui de la Ville Dieu. (Après l'anéantissement des Templiers, ce domaine passa aux Chevaliers de Malte, jusqu'à la Révolution. Il fut simplement appelé „La Cavalerie"). Les Templiers furent désignés pour la garde des Marches d'Espagne, face aux Arabes d'Espagne. Ils eurent un manse de repos à Capuleyo (Capoulet) près de Montréal-de-Sos, qu'ils gardèrent inviolé, même après leur condamnation. La vallée de Vic-de-Sos, la vallée de la Haute Ariège, étaient riches en souvenirs spirituels: les Druides étaient aussi venus occuper les jolis coins de la Nature qu'ils affectionnaient. Tout naturellement, les Cathares, les Rose-Croix, d'abord; les Templiers ensuite, s'installèrent sur les emplacements druidiques, marqués, entre autres, par le dolmen de Sem; les Croix d'Eden des Rose-Croix; le dolmen de Lapège avec ses inscriptions; les Cercles d'Ussat, d'Ornolac, de Soulombrié avec son menhir de 78 m de hauteur; les Vierges noires, etc. Tous trois, gnostiques de la même source, fondateurs du „Temple de l'Esprit" se retrouvèrent pour animer l'Occitanie du plus pur Amour de la Fraternité Universelle. Dieu est Amour! On a dit, on a écrit beaucoup de faussetés sur les Templiers et les Cathares: frères de Gnose, voisins immédiats, ils attirèrent les foudres de Jacques Fournier, évêque de

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Pamiers. Ce dernier, pour mieux établir une surveillance constante, fit construire un manoir juste à la rencontre des deux vallées de l'Ariège et du Vic-de-Sos: cette construction qui a jadis fait partie des biens de la famille Garrigou, le Patriarche du Sabartez, est encore appelée „Manoir de Fournier", situé en face le Manoir de Florac, construit, à la même époque, par les Chevaliers de Snt Jean de Jérusalem, protecteurs des Cathares. Mais, depuis longtemps, les Vallées de l'Ariège et de Sos communiquaient entre elles, à volonté: les grottes de Lombrives et de Niaux traversaient toute la montagne de séparation. En sorte, qu'en toute sécurité, secrètement, Cathares, Rose-Croix et Templiers, avaient entre eux une voie de communication. Que de voies encore cachées dans les entraillles du Sabartez. Le Graal, le Sang du Christ, c'est la Pureté, la Perfection. Le chemin du Saint-Graal, c'est le travail de chaque jour pour éviter le Mal, pour rester dans le Bien; c'est le symbole qui doit nous guider dans nos efforts pour suivre ce chemin. On a dit à ce propos: „De toute façon, le Graal était un symbole matériel de la foi chrétienne. Ce n'est pas en harmonie avec les croyances du Catharisme pyrénéen, puisque „les hérétiques" repoussaient tous les symboles matériels, et se limitaient aux formes les plus simples du Culte. Le ritualisme du Château du Graal aurait été contraire à la manifestation de leurs croyances".

Non, les Cathares, qui ne prenaient jamais d'armes, n'étaient pas les gardiens „du Graal Sang du Christ!" La lettre tue, l'Esprit vivifie! Le mot ..symbole" doit être pris dans son sens ésotérique. Il ne peut venir à la pensée de personne que le sang de Jésus-Christ ait pu se conserver pendant des siècles. Nous poserons la question de Perceval: „Par qui et comment?" Non, le mot ..symbole" doit être remplacé par le mot „Calice", qui, d'ailleurs, convient à toutes les religions, soit au sens exotérique, soit au sens ésotérique. Wolfram von Eschenbach a été longtemps méconnu; on lui reprochait de rechercher l'obscurité verbale et de conter des fables! On ne peut nier, aujourd'hui, qu'il a mêlé, dans ses narrations, des rêveries, dont le mysticisme correspond, non-seulement à

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certaines institutions religieuses créées par la spiritualité du temps, et aussi une conception nouvelle, des Mystères chrétiens!... La mention des Templiers, gardiens d'un sol sacré, où nul profane ne peut se risquer, n'est pas l'effet du hasard. Sol sacré, également, du Catharisme! Et ce qui a encore plus de prix, ce sont les enseignements de Trevrizent, ce Parfait Ermite, introduits par l'auteur de façon intentionellement mystérieuse, et où il est facile de trouver le reflet d'une doctrine secrète. Nous y trouverons des allusions évidentes au Néo-Platonisme; comme nous l'avons déjà vu, la religion du Temple de l'Esprit, Cathares, Rose-Croix et Templiers, Alexandrine d'inspiration, se distingue même du Néo-Platonisme pour se rattacher, par Saint-Jean, au Christ! Kyot et Wolfram connaissaient, certainement, le Lévitikon, l'Initiation des Parfaits et Templiers, la Fraternité Universelle. On peut ajouter que Wagner, grand Initié, lui aussi, a su affirmer, en même temps que son génie, la valeur spirituelle de Wolfram von Eschenbach! Revenons à Parzival que, dorénavant, nous appellerons Perceval, mot français. Perceval arpente le sentier, c'est sa deuxième queste du Graal, qui le conduit à Fontane-la-Saîvatge: il y trouva, dans sa cellule, le sage Trevrizent. C'est un vendredi saint, ce qui fait dire à l'Ermite: „Hélas, Seigneur, que vous est-il arrivé en ce saint jour? La passion des aventures vous a-t-elle mis en route pour gagner le prix de l'amour? Alors, attachez-vous à l'Amour parfait, que nous célébrons en ce jour!" Il ajoute, dans le courant de la conversation: „Croyez-moi, les ours ou les cerfs m'inquiètent plus que les hommes. Je ne fus ni pleutre, ni ennemi des femmes. Comme vous, je fus chevalier et tendis au Haut Amour. Il y a longtemps que j'y ai renoncé!" Trevrizent installe son hôte — nous l'avons déjà indiqué — dans un second souterrain contenant le livre et un autel de pierre, nu, comme l'exigent les rites. La conversation s'engage: „Vous aspirez à la possession du Graal? Je dois plaindre votre inexpérience. En effet, nul n'y peut prétendre à moins d'y être prédestiné par le Ciel, qui le connaît bien. Si je dois parler ainsi du Graal c'est parce que je l'ai vu. Je le connais bien. Il est défendu, à Montsal-vatge,' par de braves et nombreux chevaliers: ce sont des Templiers, qui forment une troupe redoutable. Une pierre les alimente, dont la nature est incorruptible, et qui se nomme: Lapis ex Coelis, Pierre du Ciel". Point de malade, si désespéré, que la vue de cette pierre ne préserve du trépas- n'importe quel jour il la voie, et cela pour toute le semaine. Celui qui la voit fût-ce deux siècles durant, ne verra pas ses cheveux blanchir. Elle lui communique une telle vigueur que les os et la chair gardent à jamais la jeunesse!" Cette pierre se nomme aussi le Graal. Aujourd'hui, vendredi saint, elle reçoit un message que l'on peut observer et duquel dépend sa souveraine vertu Une Colombe, d'une blancheur immaculée, descend du Ciel tenant au bec une petite „hostie" blanche; elle la dépose sur la pierre, puis reprend son vol vers les Cieux. Chaque vendredi saint, elle apporte ce présent d'où la pier.re tire la force de prodiguer, comme si c'était une faveur du Paradis, les mets, les boissons les plus exquises, j'entends les produits de la terre" (Parzival - Traduction Wilmote). Trevrizent donne l'origine de la pierre: ,Tandis que Lucifer, ambitieux, orgueilleux, assailli de désirs immodérés, fut précipité hors du Ciel, il écorna une étoile, en tombant: ces débris de l'étoile roulèrent dans l'espace et furent arrêtés par la Terre. Pierre du Ciel, pierre pure, pierre parfaite puisque tombant du Ciel, ce fut le Lapis ex Coelis du Graal! Les anges, pourtant justes et bons, qui s'abstinrent dans la lutte de Lucifer contre la Trinité, furent relégués sur la terre, à la garde de la pierre, dont la pureté est inacces-sible. Dieu les a retirés d'ici-bas. Depuis lors, la garde est confiée à ceux que Dieu choisit!" Complétons les renseignements sur l'origine du Graal:

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Guyot (Kyot!), l'illustre maître, découvrit à Tolède le manuscrit qui contenait la première source de son récit. C'est un païen renommé pour sa science, physicien, descendant de Salomon qui en a parlé le premier, Flégétanis. Il aperçut de ses yeux, dans les constellations, des signes mystérieux dont il ne parla qu'avec crainte, et affirma l'existence d'un prodige dont le nom, le Graal, lui apparut clairement écrit dans le ciel. Une légion d'anges le déposa sur la terre, puis remonta au plus haut du firmament. Confié à un pêcheur, il disparaîtrait; il a donc fallu désormais, pour le garder, une race pure. Il n'admet en sa présence que ceux qui en sont dignes! La pureté, la Perfection, toujours! Le Saint-Graal, „Sangdu Christ", le Saint-Graal, lapis ex coelis, sont, l'un et l'autre, l'image de la Perfection du Divin Maître; c'est, par la queste du Graal, le sentier qui doit conduire à la pureté. Bien mieux, pour le Templier comme pour le Parfait, Cathare ou Rose-Croix, c'est le but suprême de l'Initiation. Le Chemin du Saint-Graal était long, plus de quatre années passées dans le Centre; il était sévère, dur, les grottes et cavernes n'offrant que leur silence, la méditation, la prière, et les aspérités de la roche. Patience, Courage:„Enduro le mal, supporte le mal"! C'est ce que Tennyson a voulu expliquer dans sa belle „Légende de Per-civale", en appuyant sur les moments de doute ou de découragement que l'on doit surmonter pour atteindre le but de toute queste vraiment sérieuse. „Quand Galaad fut installé sur le siègle périlleux, il y eut aussitôt comme un coup de foudre; et un rayon de lumière, sept fois plus brillant que le jour, illumina la salle. Sur ce rayon vint le Saint-Graal, mais couvert d'un nuage lumineux, et personne ne pouvait voir qui le portait". „Alors les Chevaliers firent serment d'aller trouver le Graal et de ne pas abandonner la queste, pendant un an et un jour". „Quand le roi Arthur, qui était à la chasse, fut revenu à Caerleon, il fut très fâché d'apprendre cette nouvelle; et il avisa ses chevaliers, en termes justes, qu'ils ne connaissaient pas les malheurs dans lesquels leur voeu téméraire pourrait les entraîner ..., que la plupart d'entre eux ne suivraient que „des feux errants". Avant le départ, eut lieu un grand tournoi dans lequel Galaad et Percivale remportèrent les prix. Le lendemain, ils partirent. Caerleon tout entier était venu les saluer; les belles femmes jetaient des fleurs sur la route, les recom-mendant à Dieu dans leurs prières!" „Percivale, en voyant tout cela, et en se souvenant de ses triomphes au tournoi, se sentait fier dans son coeur: jamais le ciel ne lui sembla si bleu, ni la terre si douce, et il était certain qu'il trouverait le Saint-Graal!" Oh. Percivale: orgueil, ambition ont gagné ton coeur. — Atttention! „Percivale se souvenait de ce que le roi avait dit; alors, chaque mauvais mot, chaque mauvaise pensée, chaque maivaise action de sa vie s'éveilla en lui et lui cria: „La Queste n'est pas pour toi!" Et de suite, il se trouva dans un désert où il n'y avait que du sable, et il avait une soif intense ..." la Queste n'est pas pour toi" (orgueilleux, ambitieux!)". „Mais il continua son chemin. Et quand il se sentit prêt à mourir de soif, il aperçut un beau jardin, avec un ruisseau, des arbres chargés de beaux fruits. Il se dit: Je ne suis pas digne de la Queste: je me reposerai ici". Oh! Percivale: le découragement, le manque de courage!... „Quand il se mit à manger les fruits et à boire l'eau, le jardin, les fruits et l'eau, tout ne fut que poussière, et sa soif lui resta. Une belle dame se présenta à lui; pleine de pitié, elle lui ouvrait ses bras, en lui disant: „Repose-toi avec moi!" Mais, dès qu'il se jeta dans ses bras, elle tomba en poussière ... Désillusion!" „Alors, arriva un chevalier gigantesque, vêtu d'or, couronné d'un casque de gemmes: il lui sembla voir le seigneur de toute la terre. Percivale eut l'impression d'être écrasé.

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L'être resplendissant lui ouvrit les bras, et quand Percivale le toucha, le géant tomba en poussière ... Désillusion!" „I1 trouva une cité puissante, belle et riche, où tout le monde lui criait: „Bienvenu, Percivale, le plus grand, le plus pur des Chevaliers!" Quand il fut entré dans la cité, il ne trouva que des ruines, et un vieillard qui tomba en poussière quand il voulut l'interroger ... Mirage!" „Et Percivale restait seul... Dans la douleur de som âme il cria: „Si je trouvais même le Saint-Graal, il tomberait en poussière quand je le toucherais!". Oh!, Percivale: le doute ... Douter du Saint-Graal... Le doute affreux! „I1 était devenu maigre et faible par suite de ses épreuves et aucune vision ne lui apparut. Il parvint à une jolie ville où de belles et douces jeunes filles lui ôtèrent som armure et le conduisirent devant leur reine. Cette reine n'était autre que la bien-aimée de Percivale en sa jeunesse. Elle avait épousé le roi de cette riche ville: il était mort. Toutes ses terres, toutes ses richesses appartenaient à la reine veuve. L'amour de Percivale se raviva: de son côté, la reine sentit son amour se raviver également. Tous les habitants applaudirent à cet amour en disant: „Epouse notre reine, ô Percivale; règne sur nous: tu seras comme Arthur dans notre royaume!". Il était très content". „Mais, un jour, son voeu de Caerleon lui donna des remords. Il s'enfuit. Il trouva un ermite à qui il raconta son histoire. „0 Fils!" lui dit le saint homme, „tu n'a pas la vraie humilité, la robe que portait le Seigneur de Tout! Tu n'a pas perdu toi-même pour te trouver, comme Galaad!". Juste à ce moment parut Galaad. Tous les deux suivirent le service de l'ermite, pendant laquelle Galaad, seul, vit le Graal". „L'heure est venue", dit alors Galaad à Percivale. Je partirai d'ici-bas. Je ceindrai une couronne, loin, dans la Cité Spirituelle. Viens avec moi, car tu verras la vision quand ja partirai". „Ils grimpèrent sur une montagne. De toutes parts, l'orage et la mort les entourent. Un vaste marais, noir, puant, jonché d'ossements humains s'étend loin, bien loin. On ne peut le traverser que par un pont étroit. Galaad le franchit comme un éclair!... Le pont disparaît en flammes aussitôt franchi,.." „ Percivale ne peut suivre Galaad. Il voit le Ciel s'ouvrir, il étend le tonnerre roulant comme les acclamations des Fils de Dieu. A l'horizon, il distingue „la Cité Spirituelle" dans sa gloire, comme une perle fine et pure. Et le Saint-Graal lui apparaît enfin, comme une Rose au-dessus de la tête de Galaad". Le Graal se confond avec l'Etoile qui jette sa lumière glorieuse sur les tours de la Cité!... Il nous faut revenir à la partie historique de toutes ces diverses questions spirituelles et troublantes. En 1244, Montségur, le refuge du Sacerdoce Albigeois, tombe, et les deux cent cinq Parfaits et Parfaites qui s'y étaient réfugiés, sont brûlés au „Camp des Crémats". La Chevalerie est à Carcassonne dans la „Mura de l'Inquisition". Tous les châtelains du Sabartez sont complètement spoliés. Ramon Sanche de Rabat, gendre de Raymond de Péreille, les deux grands défenseurs et victimes de l'Inquisition, a deux fils, prisonniers aussi. Mais leur château-fort de Miramont, au centre même du vieux Tarascon, se rebâtissait; à tel point que les Inquisiteurs virent une reconstruction de Montségur. En 1247, ils ordonnèrent la démolition de Miramont! Nouveau coup porté au Catharisme renaissant. 1247: Les Templiers envoyèrent à Henri III d'Angleterre un „Vas Vetustissimum" ayant l'apparence de cristal, qui était censé contenir le Sang précieux de Jésus-Christ. Il fut envoyé par le „Magister Templi" et garanti être authentique par le Patriarche de Jérusalem et par certains Abbés et autres Seigneurs de la Terre Sainte. Il était appelé „le San Gréai" et on dit qu'il appartenait jadis à Nicodème et à Joseph d'Arimathie.

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C'est juste en cette année 1247, où l'Inquisition se montre terrible en Sabartez, que le Magister Templi a envoyé le San-Gréal à Henri III, roi d'Angleterre! Troublant! Malheureusement, personne n'a plus jamais entendu parler de ce San-Gréal. Il en est de même du Saint-Graal de Perceval: „Et le jour même de son trépas, à la propre heure qu'il mourut, le Graal, la Sainte Lance et le digne Tailloir d'argent, tout en appert voyant les assistants, furent aux Saints Cieux ravis et emportés. Et depuis n'ont pas nul en terre été vus, que, Perceval, son âme à Dieu rendit. Et sur son épitaphe on grava: „Ci-gît Perceval le Gallois, Qui du Saint-Graal les aventures acheva!"

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VIII

SUR LE CHEMIN DU SAINT-GRAAL EXTRATS D'UNE LETTRE A L'AUTEUR, DONNANT DES IMPRESSIONS D'UNE VISITE FAITE PAR UN COUPLE QUI CHERCHAIT DES LIEUX AIMES .. .ET JAMAIS VUS! J'ai comme une nostalgie de ces chemins piereux qui montent à l'assaut des murailles cyclopéennes vers des astres impressionnants. Combien de fois n'avons-nous pas évoqué, ma femme et moi, ces sentiers connus de vous qui serpentent à travers les figuiers et les buis, les térébinthes et le persil sauvage, „sel de la pierre" vers Beth-oe-loïm, Bethléem, sa dalle sainte de granit, son „mystique pentacle" et son échappée vers les étoiles. Je me demande s'il arrive à beaucoup de visiteurs d'être impressionnés comme cela arrive pour moi. Je ne crois pas. On eût dit qu'un je ne sais quoi d'impondérable m'attendait. Peut-être ce qu'une dame, auprès de nous nomma „des Formes-Pensées"? Un trouble qui touchait au coeur et à l'esprit nous gagna, au fur et à mesure de notre excursion à vos côtés: ma femme trouvait là „le Chef-lieu Spirituel de la Région pyrénéenne', région qu'elle aime tant; et, pour moi, ce fut comme un réveil, une sorte de remembrance, un ressouvenir atavique lointain, l'impression nébleuse de retrouver des lieux connus par d'autres que moi, mais qui tenaient à moi par un lien ...! Déjà, mon attention avait été attirée très vivement par cette voie mégalithique, à caractère préhistorique, que tracent, tout au long de la ligne du chemin de fer venant de Foix, d'énormes blocs de granit: blocs erratiques placés avec un espacement qui me parut régulier, et non roulés là au hasard de quelque phénomène glaciaire. Ou plutôt, les deux à la fois, la première action ayant suivi la deuxième énoncée. Et ces blocs, que l'on retrouvait coincés dans les diaclases de Lombrives, la Cathédrale, semblaient jalonner je na sais quel chemin effrayant de l'âbime vers un monde inférieur; un Aghartha, vers les eaux essentielles, vers quelque royaume etonnier des ères primitives que des générations révolues connurant peut-être? J'ai beaucoup réfléchi à ce que peut être un plus lointain passé Cathare, Pour moi, à mon très humble avis, la question ne laisse aucun doute: de telles ruines, à côté de telles grottes et de tels abîmes, ne peuvent être que des sanctuaires d'une prodigieuse antiquité, séminaire druidique, centre initiateur de la spiritualité celtique et de son irradiation dès les âges les plus lointains de l'Humanité. Des spécialistes des questions d'hérésies ont écrit et écriront pour fixer des dates à l'apparation du Catharisme, pour établier des liaisons avec l'Orient. Maurice Magre, avec beaucoup d'imagination, suppose des messagers venus de l'Inde au cours des siècles, en vertu ou par l'effet d'un système qui se développe vers 1840, et qui, par la théorie aryenne, fit venir toute la lumière des Indes. La race celtique serait le produit d'une colonisation asiatique dans l'antériorité des Temps. Que fait l'Asiatique, spirituellement parlant? Il est comme une veuilleuse qui maintient une lumière à peu près invariable. Peut-on dire que c'est une des formes de sa Sagesse? Le génie apostolique du vrai Celte a toujours éprouvé un besoin impulsif de coloniser, d'éclairer, d'élever! Les peuples civilisateurs ne vont pas de l'Est à l'Ouest, et les plus vénérables traditions placent à l'Occident le lieu des origines, au moins spirituelles. Le Jardin des Hespérides est, étymologiquement, au Couchant de l'Ancien Monde. La Col-chide ne peut être que la terre du Couchant, „le coule" de nos vieux compoix cadastraux qui désigne l'Ouest.

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Les Anciens plaçaient les Enfers à l'extrémité Ouest du Continent, et ces Enfers avaient un caractère sacré que la religion romaine a complètement défiguré. D'après Homère, l'Elysée n'était pas une partie du Royaume des Morts; il place ces lieux à l'Ouest de la Terre, près de l'Océan, et les décrit comme une région heureuse, au climat agréable. L'inhumation, la mise d'un mort sous une dalle ou dans un sarcophage de pierre, n'est-ce pas une simplification d'un retour dans les grottes ances-trales? Et l'ensevelissement dans certaines cavernes, n'était-il pas comme le retour de l'homme à la Terre dont il était sorti, pourrait-on dire, vers la fin de l'époque tertiaire? La momie dans l'hypogée, l'homme de la Chancelade ficelé dans sa „balme", le chrétien sous la pierre près de l'église, ne sont-ils pas traités comme des larves, devant se muer en chrysalides, avant de redevenir papillons? Mais tout cela n'est-il pas un reflet de la métaphysique des Druides et des mystères de la vieille Egypte? Forte Loi, que cette Loi druidique, que cette Loi d'Hermès, qui n'acceptait de monument que de pierre brute, qui proscrivait l'usage de l'écriture. Quelle haute Sagesse cela révèle! On dirait que leurs prêtres, savants d'expériences millénaires sur l'âme humaine, savaient tout le mal que pouvaient amener les fausses interprétations des doctrines, le danger des divulgations erronées, de l'abandon de la simplicité, les risques produits par la richesse, et ceux rendus possibles par des initiations trop hâtives! Une série de traditions nous rapportent qu'après les faits évangéliques, les principaux personnages du drame viennent en Gaule. Il y a les Saintes-Mariés, qui remontèrent jusqu'à un Tarascon, en liaison spirituelle avec l'autre Tarascon, il y a Zacchée de Saint-Amdour; il y a longin, qui se dirige vers le pays de Gex; il y a Pilate, qui va en Dauphiné; il y a même Judas, que l'on retrouve dans la légende irlandaise de Saint-Brandam, venu expier sa trahison dans quelque île de l'Océan ... Et il y a, aussi, Joseph d'Arimathie portant, ou plutôt cherchant le Saint-Graal. Quelle base, ou quelle raison, a pu motiver ces récits? Combien il est surprenant de constater l'assimilation du Nouveau Testament par l'élément Celtique! Ce serait le cas de dire: „I1 le reconnaissait comme s'il l'avait fait". Une religion qui semble issue de chez les Juifs, qui ne réussit pas chez eux, et qui est absorbée par l'Occident! Tout semble s'être passé comme si Jésus et Jean étaient venus, d'ailleurs que de la Palestine, prêcher au milieu de tribus dissidentes! Il faut convenir qu'en ce monde un grand nombre de faits ont été faussés, transormés, retournés, effacés, tant à l'historique qu'au religieux. Songez-vous quelquefois à cet état de choses moderne qui fait que nous sommes environnés de lieux dont les noms, neuf fois sur dix, sont incompréhensibles? En d'autres termes, que les lieux au milieu desquels nous vivons eurent une histoire que le nom raconte en partie parce qu'il en a gardé un reflet dans chacune de ses lettres? Mais, ils nous parlent une langue inconnue, souvent plus vieille que le vieux français, souvent antérieure au latin et au grec. Peut-être l'ibère ou le celte? Probablement, l'ibère et le celte! J'ai été un moment surpris d'entendre de votre bouche, ce terme ariêgois désigner une grotte: Ramploco, Ramplocos, ensemble des grottes du même centre (pluriel). Ram — Ploco Ram — Ploque Restituant un son voyelle syncopé, j'en ai fait: P (ae) loco, P (ae) loque, a = a, e, i- i = y ou = u, suivant les dialectes. Donc: Paeloco, Paelouco, Paelouco, Paelounco, de même que Palauqui, Paelaunghae, Paelounqae, etc.

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Nous avons, en langue doc, le Pélencas, le Pélenguie, les Pélinques, Pélenc, Plancartié, la Plancarie, le Plancas, lieux qui désignent des grottes. Nous voici bien près de Spélunca, à la première lettre près. Spélunca a donné spoulga, grotte fortifiée du Centre Spirituel d'Ussat-Arnoulac. Ainsi: Pael — oun — ca, Spael — oun — ca, Spoul — ga, PI — o — quo, sont des formes variées, plus ou moins reconnaissables d'un mot qui, suivant Virgile ou Vittruve, désignait: caverne, antre, grotte, repaire, conduit souterrain, cavité spacieuse. Si les Latins tenaient „spelunca" des Grecs, nous trouverions cette combinaison dans la langue d'Homère; mais les Grecs n'ont que „Spelaion" avec le sens indentique. N'y aurait-il pas quelques raisons pour que „Spelaion" et „Spélunca" de chez nous aient un sens supplémentaire, profond? Or, le latin nous donne „Sepilio" qui signifie ordinairement inhumer, mettre dans le „oum", enterrer, ensevelir, brûler un cadavre, endormir. Nous trouvons déjà une idée de „sépulture" qui n'est pas absolument liée à l'idée du lieu. Mais il y a aussi „espéli": Espéli (langue d'oc), éclore, naître, sortir de l'oeuf, de la coque, en parlant des oiseaux, des insectes; commencer à sortir, en parlant des fleurs. C'est la renaissance d'un principe de vie qui, durant un certain temps, a été endormi dans une enveloppe. Ne trouvez-vous pas que le sens de ce terme de chez nous, forme exacte de „sépélio", „sépélis", est, si je puis dire „le sens Cathare de la mort"? Si, pour le profane, la sépulture est une simple mise en terre, pour d'autres elle est le point de départ d'une renaissance. Le cadavre est comme une larve, et son attente dans la terre est comme le sommeil de la chrysalide, avant la métamorphose nouvelle et la résurrection! Voici plus concluant, plus touchant, la spélunca des Patriarches: Abraham, Genèse XXIII, verset 9: „ .. .afin qu'il me donne sa caverne de Macpelah qui est à l'extrémité de son champ" (traduction Osterwald). „.... afin qu'il me donne sa caverne double qu'il a à l'extrémité de son champ,, (Le Maîte de Sacy). „Abraham déposa le corps de sa femme Sara dans la caverne double du champ qui regarde Mambré" (verset 19). A la mort d'Abraham, ses fils, à leur tour, l'apportent à la „caverne double" de Macpelah: „Et Isaac et Ismaël, ses fils, l'enterrèrent en la (caverne de Macpelah, au champ d'Héphron, qui est vis-à-vis de Mambré" (traduction Osterwald). „Isaac et Ismaël, ses enfants, le portèrent en la caverne double située dans le champ d'Héphron, vis-à-vis de Mambré" (traduction Le Maître de Sacy). Ha Macpelah, de Ma Cpelah, caverne double — Ma, pronom démonstratif: ce qui, ce que — Képhael: chose double, le double — Kâphal, (Japhaul: replier, doubler — Terminaison: ah, féminin. Cette caverne d'Héphron aurait eu donc un nom signifiant: celle qui est double. Sens physique, matériel: double quant à ses ouvertures, double quant à sa disposition, double dans une caverne à deux issues. Sens symbolique: l'adepte est reçu dans la grotte, meurt de sa vie matérielle, abandonne la vie sensible, et ressort par une autre extrémité, complètement changé, transformé, plein d'une nouvelle vie: la vie spirituelle. ,Je suis l'Alpha et l'Oméga", a dit Jésus-Christ: „le Commencement et la Fin". J'ai devant les yeux cette galerie monumentale d'Arnolac, (Arn, roche; ol, creuse, grotte; ac, sainte, sacrée!) taillée, semble-t-il, de main d'homme pour les besoins d'une cause, garnie d'alvéoles pour un luminaire de fête, Eglise (Capella), où l'adepte était reçu sur le granit, „mourait" à la vie matérielle, et ressortait par l'autre extrémité de la voûte à une nouvelle via, spirituelle.

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On trouve dans ,,1'Antre des Nymphes", de Porphyre, un commentaire précieux d'un passage d'Homère sur l'antre d'Itaké, où Ulysse termine son temps d'initiation et passe par l'Eglise: Circée - Kirke, église: „A la tête du port croît un olivier au large feuillage. „Pres de lui s'ouvre l'Antre aimable et ténébreux „Consacré aux nymphes que l'on appelle naïades. „Au-dedans il y a des cratères et des amphores. „De pierre, où les abeilles construisent leurs rayons. „I1 y a aussi de longs métiers de pierre, sur lesquels les nymphes. „Tissent des étoffes teintes de pourpre merveilleuses à voir. „Là encore coulent des sources intarissables, et il y a „deux entrées": „L'une, vers le Boréas, laisse descendre les hommes; „Mais l'autre, vers le Notos, est pour les Dieux. „Et jamais par elles les hommes n'entrent: „Mais, c'est là route des Immortels!...". (Odyssée: Chant XIII) „Dans le pays d'Ithaque est le port de Pharcyne. Là, sont des rochers escarpés s'avançant des deux côtés du Port. Ils abritent les flots des vents qui viennent de la haute mer; à l'intérieur, les vaisseaux restent immobiles, sans aucuns liens, lorqu'ils sont entrés dans cette enceinte". „A l'extrémité du port s'élève un laurier (olivier), aux feuilles allongées; tout près de cet arbre est „un antre agréable et profond", retraite sacrée des nymphes qui sont appelées „las Naïades". Là, sont des urnes et des amphores de pierre; les abeilles y viennent déposer leur miel. Là, sont aussi de grands métiers en marbre, où les nymphes ourdissent une toile éclatante de pourpre, ouvrage admirable à voir; dans l'intérieur coule sans cesse une eau limpide". „Cette grotte a deux portes: l'une, qui regarde Borée, c'est l'entrée destinée aux hommes: l'autre, en face de Notus, est plus divine: les mortels ne la franchissent jamais! C'est le Chemin des Dieux!" Les Anciens consacraient les antres et les Cavernes au Monde considéré dans son universalité ou dans ses parties: ils prenaient la terre pour symbole de la matière dont est composé le Monde. C'est à cause de la matière que le monde est obscur et ténébreux, mais la forme s'y ajoute et l'ordonne (Cosmos: ordre, parure, monde et par là il devient beau et agréable. C'est au point que l'extérieur et les premiers abords des antres en sont agréables, et que les profondeurs intimes sont ténébreuses. Les Mages de Chaldée, de Perse, pour signifier mystiquement la descente de l'âme et sa régression, donnent le nom de caverne au lieu où s'accomplit l'initiation. On ne regardait pas seulement l'antre comme le symbole du Monde sensible, mais aussi de toutes les énergies cachées: parce que les antres sont obscurs et que l'essence de ces énergies est mystérieuse! Les Egyptiens, les Pythagoriciens, et après eux Platon, appelèrent le Monde un antre et une caverne. Les énergies conductrices des âmes disent: „Nous sommes arrivées dans l'antre caché!" (Empédoklès). Il est dit dans Platon (VIIe: La République): „Voici les hommes comme dans un autre souterrain, et dans une demeure telle qu'une caverne, avec une large entrée pour la lumière dans toute la caverne". „Tu emploies une comparaison inexacte". „II faut donc que je l'adapte à ce que nous avons dit auparavant: la demeure que nous avons sous les yeux ressemble à une prison et le feu que nous y voyons resplendit à l'énergie du soleil".

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L'antre est double: Deux portes ont été établies par les sages des théogonies passées: le Cancer et le Capricorne, que Platon appelle „deux orifices". Et l'on dit que pour le Cancer les âmes descendent. Leur régression se fait par le Capricorne. Le Cancer est situé vers le Boréas, et appropié à la descente; le Capricorne est situé vers le Notos et approprié à la régression. (Boréas, régions boréales, race mortelle, sujette à la naissance; — Notos, régions de la chaleur, race plus divine, Symbole de l'olivier, ou laurier, ou perséa, (chez les Egyptiens) ou térébinthe chez les Cathares pyrénéens). L'arbre toujours vert indique la désignation mystérieuse de l'antre! Devant l'antre, image du Monde, est planté l'arbre toujours vert, Signe de la Sagesse divine. Il a donc une propriété qui convient fort bien aux changements des âmes dans ce monde, et l'on sait que l'antre est consacré aux âmes! Dans cet antre, dit Homère: il faut laisser tout ce qu'on apporte du dehors; se dépouiller; revêtir l'habit des suppliants; se meurtrir le corps; rejeter tout le superflu; écarter même les sens ... N'est-ce point les règles fondamentales de toute Initation? Ne voit-on pas là les diverses épreuves à franchir, pour suivre dignement le Chemin du Saint-Graal? Je ne puis mieux finir ces réflexions qu'en répétant ce que, jadis, vous nous avez si bien expliqué sur place: L'Eglise spoulga d'Ornolac, où le pieux Loup de Foix (1) s'était converti au consolateur, frappe par l'ensemble de ses murs en ruines: enceintes, portes, remparts ... Mais la Capelle de Bethléem est bien conservée. Ah, si elle pouvait parler, et répéter ce qu'elle a entendu; si nous pouvions connaître les questions colossales traitées à l'abri de la roche: Dieu, l'Univers, la Création, la Chute, le Salut par le Christ, l'Eternité des peines, la Conversion de Satan, l'Extinction de l'Enfer, le Purgatoire sidéral, la Migration des âmes d'Astre en Astre - si nous étions au courant des Méditations dont la plate-forme fut si longtemps et si souvent témoin! Les Montagnes! Le Sabartez! N'oublions pas que Jésus a particulièrement aimé les montagnes: les actes les plus importants de sa carrière divine se passent sur les montagnes. Les Parfaits, les Purs, comme le Christ, leur divinne Maître, trouvaient ici Beth-phagé, Gethsémani, le Mont des Oliviers; et, comme Lui, pouvaient se livrer à leur aise à la contemplation, à la prière, à la méditation, car ils appliquaient à la lettre la parole de Jésus: „Ne soyez pas inquiets de l'aliment que vous aurez pour soutenir votre vie, ni des vêtements que vous aurez pour couvrir votre corps. Ni dites donc pas avec anxiété: „Que mangerous-nous? Que boirons-nous? De quoi serons-nous vêtus?" Ce sont lès païens qui se préoccupent de toutes ces choses; votre Père céleste sait que vous en avez besoin. Mais cherchez premièrement le royaume de Dieu, et tout le reste vous sera donné par surcroît". Pauvre, simple, et cependant grandiose, Chapelle de Bethléem! Lieux vénérables où résonna souvent ce divin et doux ordre du Maître: ,Je vous donne un commandement nouveau: c'est que vous vous aimiez les uns les autres comme je vous au aimés!" — „Le signe auquel on connaîtra que vous êtes mes disciples sera que vous vous aimiez les uns les autres!". Oui, nous pouvons, après Albert le Grand, Archevêque de Ratisbonne, nous écrier: „Ici sont cachés des trésors inappréciables, et nul ne les connaît... sinon ceux à qui Dieu veut les révéler!".

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IX SUR LE CHEMIN DU SAINT-GRAAL (suite)

Dans le 8ème fascicule de notre travail spirituel, nous avons donné les impressions d'un des nombreux visiteurs du Vieux Centre d'Ussat-Arnoulac, centre des sages gnostiques, Cathares, Rose-Croix, Templiers, qui attirèrent sur eux les foudres terribles de Rome et du bras séculier, L'Empire d'Amour! Il nous paraît utile de compléter ces données par quelques données supplémentaires. Le mirage oriental! — Soyons profondément respectueux de toute tradition authentique: chacune a sa valeur et sa raison d'être. Aimons les théocrates fondateurs des religions antiques et gardons pour Lao-Tseu la place qui lui revient: ni envoyé du démon, ni roi du Monde, ni prince de ce Monde, mais, philosophe^ averti, Maître des foules, gardien fidèle de l'Esprit! Nous ne convertirons jamais au christianisme les foules hindoues ou chinoises, malgré l'ardeur et la foi de nos missionnaires occidentaux. Nous ne pouvons croire davantage au mirage oriental, à la panacée universelle de la philosophie hindoue exotérique. Cette philosophie peut elle enrayer l'anarchie qui ronge le monde oriental? Les sagesses orientales peuvent-elles guérir ce désarroi général, vide spirituel qui manque à l'Orient, vide propice à la révolte et à la misère? Sans doute, l'Occident n'est guère brillant non plus: constatons „que le microbe nous vient d'Orient". „La charité de beaucoup s'est déjà refroidie", nous annonce l'Evangile. — „Quand le Fils de l'Homme reviendra, croyez-vous qu'il trouve encore de la foi sur la Terre?" Douloureuse question et plus douloureuse encore réponse! „Le Messianisme" se meurt. Le Christ possède beaucoup d'églises; mais peu de coeurs sont fidèles à son exemple! L'Esprit a été persécuté; Pierre a voulu opprimer Jean. Le Marianisme est né de Satan et des démons du moyen-âge. Le Messianisme, combattu inconsidérément par ceux qui devaient le servir, attend toujours son heure! — Que ton règne arrive! La Vérité n'est pas d'Orient ou d'Occident, pas plus du Thibet que de Rome. La Vérité, c'est le Verbe, et le Verbe, c'est la Vie. Non pas seulement le Verbe cosmique, que révèrent autant, et parfois mieux que nous, les hauts dignitaires des antiques religions de l'Asie; mais aussi le Verbe incarné, ce Jésus, dont Pascal a dit qu'il serait en agonie jusqu'à la fin des temps. C'est ici que nous nous séparons nettement des théories orientales sur Jésus, et plus nettement encore de ceux qui trahissent l'Esprit, en nous offrant des vulgarisations fétichistes! La vénérable Asie est sans progrès depuis plus de deux mille ans. Cette lumière du „Verbe fait chair", nous ne prétendons pas la lui imposer. Voler une âme est une action monstrueuse: l'âme orientale est libre, comme sa soeur d'Occident. Ce n'est pas le rite qui fait le chrétien, mais bien la Charité, l'Humilité, la présence du Christ vivant en lui. L'assentiment intellectuel à une des formes du Christianisme n'est pas suffisant pour faire un chrétien; de même que la connaissance de toute la littérature ésotérique hindoue, et l'assentiment intellectuel à cette forme du Savoir, ne sont pas suffisants pour faire un Délivré! Notre Initiateur est venu, non pour abolir la Loi, mais pour la parachever; non pour en supprimer une partie, mais pour la couronner par un Commandement nouveau qui constitue, pour les Chrétiens, avec la foi en lui et en ses paroles, l'unique nécessaire: ,Je vous donne un commandement nouveau: Aimez-vous les uns, les autres; comme je vous ai aimés, vous aussi, aimez-vous les uns, les autres". — „A ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous avez de l'amour les uns pour les autres!"

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Commandement aimé et suivi, ainsi que le désirait le divin Maître, dans les spoulgas et cavernes des Parfaits du Sabartez! Dieu est Amour! Et l'Empire d'Amour était né! Les Anciens avaient essayé déjà: Le temple de la déesse Kali était creusé en pleine montagne, au milieu d'une épaisse forêt: c'était une „immense caverne" dont personne ne connaissait le fond. A l'entrée de la Caverne poussait un arbe vert, arrosé par une source limpide: c'était l'Arbre de Vie! La Vierge Dévaki conçut Krishna, l'enfant divin. Krishna fit construire le Temple des Initiés. Ce temple était creusé dans la roche, en majeure partie caché. De même en Egypte pour le Temple d'Osiris, lieu connu seulement des grands Initiés: avenue taillée dans le roc, grande salle ouvrant les cryptes souterraines, gouffre impressionnant, sanctuaire occulte et noir, sans issue visible, silence complet! Les sages Esséniens se réunissaient dans une grotte taillée dans l'intérieur de la montagne: grande salle souterraine avec une table et des sièges de pierre. Deux entrées: l'une pour les Initiés, l'autre pour le Chef de l'Ordre seul. Nul ne peut franchir cette porte sacrée! La plaine de Phrygie fut autrefois conquise par les Gaulois: 280 avant Jésus-Christ. Ces Gallo-Phrygiens s'empressèrent d'embrasser le Christianisme, dès qu'ils entendirent la voix de l'Apôtre Paul. La Galatie a été un des premiers et des plus ardents foyers du Culte Catholique. Les sept Eglises d'Asie devinrent le Centre, le noyau d'où rayonna, de toutes parts, la civilisation chrétienne. Paul choisit un rocher, près de Smyrne. Il fit aménager ce rocher en une mystérieuse cité: lieux secrets de réunion. Les Catéchumènes pénétraient par une entrée, généralement basse. Ils entraient dans la salle de réception: ils devenaient „fidèles". L'autre entrée était réservée absolument au Chef de l'Ordre, Chef spirituel, qui avait, seul, le droit de la faire franchir, une seule fois, au nouvel initié. C'était la réception dans le Grand Sacrifice Commun! Dans Huon de Bordeaux, Obéron, roi des Fées, meurt après avoir couronné Huon et Esclarmonde. Sa dépouille mortelle est ensevelie dans une grande caverne double, (Caverne mystique d'Hercule et de Pyrène: Lombrives, la Cathédrale des Albigeois!). Petite entrée, immense sortie. Nous avons déjà parlé de Loup de Foix. Ce Prince Cathare de la Maison Comtale de Foix-Sabartez, avait été reçu Parfait dans Bethléem-Ornolac, en 1213, par l'Evêque Cathare Guilhabert de Castres. C'est ce dernier qui lui avait fait l'honneur de franchir la Porte du Chef de l'Ordre, dans la Chapelle, pour, après le passage de la Porte Mystique (fin de l'initiation), le rendre à sa nouvelle mission, à travers les villages du Sabartez et de l'Occitanie. C'est lui, Loup de Foix, Prince et Parfait, qui ne cessait de répéter: „I1 faut se prosterner devant le Très-Haut, avant d'entrer dans son Temple!" L'entrée des Parfaits était toujours basse et étroite! Nous terminerons cette partie par les citations de la Genèse faisant suite à l'opuscule précédent: Chap. XLIX: „Avant de mourir, Jacob réunit ses enfants, dont Joseph: il leur fit ce commandement: „Je vais être réuni à mon peuple: ensevelissez-moi avec mes pères dans la caverne double qui est dans le Champ d'Ephron Héthéen, „qui regarde Mambré, au pays de Chanaam et qu'Abraham a acheté d'Ephron Héthéen, avec tout le champ où elle est, pour y avoir son sépulcre". „C'est là qu'il a été enterré avec sa femme, Sara. C'est aussi là où a été enseveli Isaac avec Rebecca, sa femme, et où Lia est encore ensevelie". „Et, ayant porté Jacob au pays de Chanaam, ils l'ensevelirent dans la caverne double qu'Abraham avait achetée d'Ephron Héthéen avec le champ qui regarde Mambré, pour en faire le lieu de sa sépulture".

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L'embaumement du Corps de Jacob prit quarante jours; l'Egypte pleura Jacob durant soixante-dix jours; les funérailles durèrent sept jours. Le „perséa" était l'arbre sacré des Egyptiens pour signaler les lieux d'initiation, dont la Caverne double d'Héphron. Mais au pays de Chanaam le chêne était l'arbre consacré aux grandes actions spirituelles. La pierre, d'un côté, le chêne sacré de l'autre. Le perséa était en voie de disparition, et, effectivement, il a disparu d'Egypte. Pourquoi cette concordance pierre et chêne? Concordance reconnue encore: pierre-térébinthe, dans nos antres sacrés? Le Druidisme a pu, et peut s'adapter à toutes les religions, à tous les symbolisâmes. Ce qui a permis au Christianisme de comprendre immédiatement le Druidisme, et de conquérir l'Occident. Que professaient, en effet, les Druides? Une de leurs triades nous le dira en quelques mots: I — Vénérer la Divinité. II — Travailler au bien de l'Humanité. III — Supporter courageusement les coups du Destin. Les Druides recherchaient: une morale absolument irréprochable; des moeurs d'une pureté parfaite; pour leurs élèves les mêmes moeurs; le Droit à la face du Monde; la Paix entre tous les hommes. Certains passages de la fin de l'Apocalypse nous prouvent que la tradition celtique primitive et la tradition hébraïque sont soeurs. Voyons quelques passages de la Bible relatifs aux Patriarches, à la pierre brute, à l'arbre sacré. Le menhir, chez les Druides, symbolisait le centre universel, le principe mâle et générateur, l'Unité divine. — L'Egypte nous a laissé le Men ou Man, l'obélisque surmonté du disque solaire. C'est le Mana ou Menât des Arabes; le bétyle, abadir, le Père resplendissant des Phéniciens; le bothal pour les Irlandais; le béthel, la Maison de Dieu, pour les Hébreux. Tout nous ramène à la chute des pierres tombées du Ciel. Le bétyle est un aérolithe des régions boréales; le „lapis ex coelis" est la pierre du Ciel, du Graal! Genèse 21 : 33 : „Et Abraham planta une ..chênaie" à Baer-Shéba, et il invoqua, là, le nom de l'Eternel!". Genèse 31 : „Jacob prit une pierre et il la dressa pour monument. Et Jacob dit à ses frères: ..Ramassez des pierres". Et ils prirent des pierres, et ils firent un monceau, et ils mangèrent là sur le monceau. Et Laban dit: „Le monceau que voici est un témoignage entre toi et moi ce jour. Sur ce, on le nomma „le monceau témoin". Exode 20 : 25: „Si tu me fais un autel de pierre, tu ne le tailleras pas. Si tu levais le fer dessus, tu le souillerais". Josué 2: „Josué dressa douze pierres au milieu du Jourdain". Josué 24: „L'Eternel dit à Josué: „Fais-toi des couteaux de pierre". Josué 26:,Josué prit une grosse pierre qu'il dressa, là, sous le chêne qui était dans le lieu consacré à l'Eternel. Voici: „Cette pierre servira de témoin". Juges, 9: „C'est bien un peuple qui descend des hauteurs, Thabor du pays, de même qu'une troupe arrive par le Chemin du Chêne des devins. Et ils proclamèrent roi Abimelek, près „du Chêne planté dans Sichem". Et il tua soixante-dix hommes sur une même pierre". Cantique de Moïse: „Rendez gloire à notre Dieu. Il est le Rocher; ses oeuvres sont parfaites". Relevons, simplement, quelques expressions: le chêne des devins; le chêne sanctuaire; l'élection d'un chef sous un chêne sacré; le monceau de pierres, monceau-témoin; l'usage des couteaux de pierre pour la circoncision; le „cavin" comme témoignage et comme terme; le repas rituel sur un monceau; la pierre sacrificielle.

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Pour les Druides le taureau était l'emblème du Verbe, comme l'arbre était l'emblème de la substance. Pour Moïse l'origine de la matérialisation d'Adam était l'arbre de la connaissance du Bien et du Mal. Aesus, l'être infini en lui-même, l'être fini par rapport au fini, était représenté coupant le chêne sur le chêne lui-même. Allusion au gui, dont le nom signifie „herbe de science", nommé par les Gaulois „remède universel". Le gui, appelé aussi „le rameau d'en haut", était l'emblème et le sujet d'une „Panacée universelle". Ce terme doit être pris au sens figuré: la pierre de la Sagesse, la pierre philosophale, la science divine, la Sapience. Ce qu'en langue d'Oc nous appelons: „Lou Saber!". C'est l'enseignement de cette sagesse essentielle que dispensèrent les Druides, les Gabires d'Ornolac en Sabartez, à ceux qui venaient de fort loin pour gagner l'Initiation, élever leur âme, acquérir la Connaissance, le droit de régner, de conduire les peuples, d'exercer de hautes fonctions sacerdotales et de préparer des adeptes à leur tour. En vérité, rien n'est au-dessus de la Sagesse, telle que l'entendaient les Anciens: „La Sagesse vaut plus que les perles. „La topaze de Chus n'est point son égale, „Et l'or pur n'entre pas en balance avec elle. „Elle ne s'achète pas au poids de l'argent. „Elle ne se pèse pas contre l'or d'Ophir, „Ni contre le précieux onyx, ni contre le saphir. ..Mais la Sagesse, où se trouve-t-elle? „Où est la demeure de l'intelligence? ..L'homme n'en connaît pas le prix: ..Elle ne se trouve pas dans la Terre des Vivants!" (Job: XXVIII) Et nous retombons dans le Chemin du Saint-Graal, Sang du Christ ou Lapis ex Coelis! La queste de Perceval, le Gallois, doit être sans cesse renouvelée. Qui n'a besoin, en ce monde, de soutenir sa vie et de la réconforter? „Et ne crois pas", disait l'Ermite, „qu'il y ait luz, lamproie, carpe, saumon, ni quelque autre poisson qui soit en ce Graal. Mais, si digne et si précieux il est, que par la vertu qui est en lui, seulement en le portant, le roi Peschor, depuis douze ans, soutient sa vie et la réconforte!". Pureté! Perfection!

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X LA REPUBLIQUE TROGLODYTE DU SABARTEZ

Le Sabartez! On nous permettra de parler de nouveau de cette contrée de l'Ariège, située entre Foix, chef-lieu, et les Pyrénées, (Andorre et Espagne). C'est là, nous le répétons, que, en son centre, Ussat-Ornolac, s'ouvrent plus de cinquante grottes. Ces grottes ont servi d'habitats dès les hommes préhistoriques, et de lieux d'initiation dès que l'Esprit s'est manifesté aux populations Egéennes et Celtibériennes. Pour la première fois ce nom paraît dans les écrits du IXème siècle. En 778, l'armée franque de Charlemagne délivra le pays des Marches d'Espagne du joug des Sarrasins. Ceux-ci avaient conquis l'Espagne, les Pyrénées et l'Aquitaine, au sud de la Loire, en 718. Pour commémorer cette délivrance, en 779, la chapelle de Sabart fut relevée, consacrée et mise sous la protection de Notre-Dame-de-la-Victoire. (La Vierge de Sabart était une Vierge Noire, comme les Vierges Noires de Toulouse et de Tarascon, la vieille cité, et appelées Notre-Dame-de-la-Daurade). En 780, le pays des Marches d'Espagne reçut, comme toutes les provinces limitrophes, sa nouvelle organisation politique de Charlemagne lui-même. Ce roi établit, dans chacun des diocèses méridionaux, un ou plusieurs comtés;— dans chaque comté, une ou plusieurs vigueries, vicariats ou vicomtes; — et, dans chaque viguerie, plusieurs ministériats. Nous savons, enfin, qu'il créa des abbayes militaires, destinées principalement à la défense de la frontière; et des vigueries neutres, ou gouvernements indépendants de l'autorité comtale: témoin, la Viguerie d'Andorre. Il y avait à Sabart une viguerie, et, par conséquent, un viguier: vicaria Sabar-tensis. En 867, un certain Athon, un des rejetons des rois Mérovingiens, exerçait une autorité de fait sur le pays. A dater de cette usurpation, prélude de toutes les autres, disparaissent viguier et viguerie, et même toute trace d'un siège quelconque de l'autorité locale. Seul, le titre nominal de Viguerie du Sabartez se maintient par suite de l'habitude: Viguerie du Sabartez; Pays de Sabartez, ou Sabartès; Eglise du Sabartez. Honorius III accorde des privilèges spéciaux à l'église proprement dite de Sabart; jusqu'à nous, on retrouve une dignité sacerdotale: î'Archiprêtré de Sabart! La Viguerie du Sabartez avait reçu de Charlemagne ou de son fils, Louis, l'octroi de privilèges, en tout semblables à ceux de l'Andorre. L'Andorre a conservé les siens, constitution et forme républicaine de son gouvernement; le Sabartez était insensiblement tombé à la merci d'une puissante Maison Comtale. Mais, les Comtes de Foix ne relevaient que du Roi, pour le Sabartez; ils relevaient des Comtes de Toulouse pour le reste du Comté. Le Sabartez comprenait la Vallée de l'Ariège, du Col de Puymaurens au Pas de la Barre, à trois kilomètres en aval de Foix, avec les vallées latérales de Vic-de-Sos (Montréal-de-Sos), et d'Arnave-Lordat. 780 à 867! Période glorieuse, sans doute, mais si courte! Faut-il s'étonner que quelques siècles plus tard l'oubli se soit fait sur le nom de cette terre, située si loin de la Capitale, englobée dans le Comté de Foix? Les Comtes de Foix, glorieux en majorité, couvrent de leurs exploits, et le nom, et la terre du Sabartez: Esclarmonde de Foix, Loup de Foix; le cri: „Foix! Foix!" jeté comme un tonnerre dans les batailles de la Croisade, et la défense des nombreuses vallées du comté.

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Mais, l'Esprit veillait en Sabartez! „I1 faut remarquer avec quelle universalité, et quel élan, le grand mouvement de travail historique s'est déclaré en France, depuis le milieu de la Restauration 1840! Ce genre d'études eut, dans le nord de la France, ses plus illustres représentants: Guizot, Thierry, Fauriel, de Barante, Michelet, Thiers. Le Midi, le Languedoc notamment, marche sur leurs traces. Les origines de la langue suscitaient un essaim de curieux. Les Pyrénées ariègeoises contribuèrent, pour leur part, à ce mouvement scientifique qui devait, entre autres résultats, assurer la réimpression et l'achèvement de l'oeuvre monumentale qui a nom: ..Histoire générale du Languedoc", par dom Vaissette et dom de Vic, oeuvre à laquelle le docte Mr Rosbach travaillait encore en 1880!". Abbé Duclos Nous arrivons donc à l'an 1840. C'est l'époque où Adolphe Garrigou, le savant modeste de Tarascon, commence à jeter ses „Etudes historiques sur le Pays de Foix et le Couserans". Et le Sabartez renaissant, conduit par la main sûre de son Patriarche, relève un peu la tête. Il était temps! Un long temps a passé sur les roches du Thabor et de Montréal-de-Sos, période obscure pour lui, coupée il est vrai, par les guerres de Religion, qui n'avaient pas réussi à soulever le voilé recouvrant les terribles événements des Xllème, XIIIème et XlVème siècles! 1870! Napoléon Péyrat „le Clairon d'Aquitaine", soulève les échos historiques de nos montagnes encore endormis! 1880! L'Abbé Duclos et „L'Histoire générale du Languedoc" suscitent de nombreux chercheurs. 1906! L'Abbé Vidal fait revivre un document de toute première importance, enfoui dans les nombreux rayons de la Vaticane! Document compulsé par quelques mains, encore peu expertes, à se retrouver dans les noms inconnus émaillant l'histoire médiévale, mais que lui seul, enfant du pays, avait, tout jeune déjà, entendu prononcer! Nous aurons à revenir là-dessus dans le courant de cette étude; il était bon, d'ores et déjà, de faire comprendre pourquoi une longue période s'est écoulée avant de pouvoir rattacher à l'histoire régionale et à l'histoire nationale, cette histoire locale se rapportant, en détail, à l'Agonie du Catharisme pyrénéen! Il n'entre pas dans notre intention de donner une histoire de la Croisade des Albigeois; ce travail a été déjà accompli. De même, nous avons déjà expliqué pourquoi ce mot «Albigeois", créé au Concile de Lombers, en 1163, et repris par le Concile général de Latran, a servi à couvrir l'anéantissement des Cathares et Rose-Croix, gnostiques de la première heure. Un historien, l'Abbé Guyot, nous le dit: „Les Albigeois firent de si grands progrès en Languedoc et en Provence, qu'il n'y avait presque pas de ville ou de bourgade où ils ne formassent une société à part, partagés en deux ordres, les Parfaits et les Croyants". — On ne peut être plus clair! Les dernières années du Xllème siècle s'étaient passées en négociations, ambassades, conférences. Les Conciles, les Docteurs de l'Eglise, Saint-Bernard, les Papes, leurs légats s'en étaient mêlés. En 1181, le farouche légat Henri d'Albano, avec une puissante armée, avait ravagé les régions d'Albi à Toulouse, du Gers, des Pyrénées du Val de Garonne, des Pyrénées espagnoles. (Il n'était pas entré dans le Comté de Foix-Sabartez!). Expédition tellement horrible que la royauté envoya un «modérateur". Plus Rome prenait de mesures, plus le Catharisme pyrénéen — ce que l'on a baptisé ,,1'hérésie albigeoise!" — s'étendait de l'Ariège dans le Languedoc et la Provence. Snt Dominique avait participé aux dernières tentatives d'apaisement dans le courant de l'année 1207. Esclarmonde de Foix, Princesse Cathare, avait voulu une entente durant le magnifique Colloque de Pamiers.

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Mais, s'entendre: les Cathares n'admettaient qu'un Pontife, le Christ!; et Rome n'admettait que la soumission au Pape, c'est-à-dire Rome ou la Mort! (Voir St Thomas d'Aquin) (Nous n'avons qu'à ouvrir une Histoire pour nous rendre compte des moyens employés pour anéantir les „sextes rivales": continuation de l'intolérance passée!). Le meurtre du légat Castelnau fut le cruel signal de la guerre, de la prédication de la Croisade, (contre les Albigeois!) ou guerre religieuse. Les événements se précipitent: 1209 — Les Croisés prirent Béziers le 22 juillet, en exterminant la population, catholiques compris. Ils prirent Carcassonne vers la fin d'août. Le Comte de Foix, Raymond-Roger, se jeta dans les hostilités, ce qui amena la guerre dans les montagnes d'Ariège. Simon de Montfort arrive en plein Comté de Foix: il était alors général de la Croisade. 1210 — Congrès de Pamiers: diplomatie illusoire. Simon, repoussé de Foix, se jette sur Puivert (Cour d'Amour de Carcassonne), et sur Montségur, où il échoue. 1211 — Le Comte de Foix, le Vicomte de Couserans, le Comte de Toulouse, avaient fait appel à leurs sujets. Montfort, après le siège de Lavaud, passe la Garonne, prend Auterive, Varilhes et Foix. Il rentre à son quartier général de Pamiers, pour étudier et transporter la Croisade dans le centre du Sabartez. 1212 — Montfort opère dans le Quercy et l'Agenais; Guy, son frère, reprend les hostilités dans le pays de Foix. Il prend Lavalanet, attaque de nouveau Foix, et ravage le Couserans et tout le bas pays, jusqu'aux portes de Toulouse. 1213 — Bataille de Muret, 12 septembre, où Pierre II, roi d'Aragon, est tué. Montfort en Sabartez, par le Col del Bouïch et le Col de Port, mais ne pénètre pas plus avant que le château de Cher ou Quié, en face Tarascon, à l'ouverture des vallées de l'Ariège et du Vie de Sos (Porte des Eglises et de la Cathédrale!). 1214 — Le 8 avril, Raymond-Roger, Comte de Foix, fait la paix. Pierre de Bénévent prend possession du château comtal. 1217 — 8 février: Simon de Montfort sent que le feu couve dans les hautes vallées d'accès difficile. Il entend réduire le haut pays de Foix, le Sabartez. Il prend le château de Montgrenier (Montgaillard), où le Comte s'était réfugié. 1218 — Le 25 juin, Simon de Montfort est tué au siège de Toulouse. Le pays, après tant de combats et de ruines, commençait à respirer et à se relever des désastres de la guerre. Amaury, fils de Simon de Montfort, voulut conserver les conquêtes de son père. En 1222, il fit hommage de ces conquêtes au roi. Mécontentement général, trouble des idées. Pamiers chasse les chanoines de son abbaye et se remet entre les mains du Comte de Foix. 1223 — Mirepoix chasse Gui de Lévis, et reprend ses anciens Maîtres, en mars. — Mort de Philippe-Auguste, mort du vieux Comte de Toulouse. Mort du Comte de Foix: grands changements dans la politique. Le plaid de Montpellier décide la paix et la réconciliation. 1227 — Mais, le Sabartez était toujours indépendant! Gui de Montfort essayant de le soumettre, est tué le 31 janvier 1228 au siège de Varilhes, en aval de Foix. 1229 — Humbert de Beau jeu s'avanç,a vers Pamiers, et ravagea la vallée de l'Ariège, jusqu'au Pas-de-la-Barre, à l'entrée du Sabartez. Le 16 juillet, Roger-Bernard, Comte de Foix fit sa soumission. Cet indomptable Prince montagnard du Sabartez reçut Pierre de Colmieu, vice-légat, à Saint-Jean-de-Verges, juste au fameux Pas-de-la-Barre et répondit comme suit à ses accusations: „Le pape? En quoi l'ai-je offensé? Est-ce par la guerre? Mais, nous avons été attaqués!

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Est-ce par ma religion? Il n'a pas le droit de s'en mêler. Chacun la doit avoir libre!". „Mon père m'a recommandé toujours cette liberté, afin qu'étant en cette posture quand le ciel croulerait, je le pusse regarder d'un oeil ferme et assuré, estimant qu'il ne me pourrait faire du mal!". „Ce n'est pas la Crainte qui me fait branler au gré de vos passions, et qui me contraint de traîner ma volonté par terre, pour en faire comme fumier et litière selon votre appétit". „Mais, poussé de cette crainte bénigne et généreuse de la misère de mes sujets et de la ruine de tout mon pays, désirant n'être censé le mutin, l'écervelé, le boute-feu de l'Aquitaine, je me plie à cette extrémité". .Autrement, je serais une muraille sans brèche et hors d'escalade contre les audaces de mes ennemis!". Oh! les belles et nobles paroles! Cependant, le Catharisme n'était pas mort, et le Sabartez était resté imprenable. L'Inquisition officielle s'étalait partout, devenait de plus en plus agissante. Cette même année 1229, le Comte de Foix s'étant soumis, vit le sacerdoce cathare se réfugier de nouveau à Montségur: en août 1232, il avait gagné la cime douloureuse. 1241 — Trencabel voulut reprendre Carcassonne, fief de son valeureux père. Il échoua. — Le Comte Ramon le Jeune jura, à sa rencontre de Montargis avec le roi, d'abattre le Catharisme pyrénéen et de détruire le château de Montségur. Le château assiégé tomba en 1244. Les chevaliers protecteurs des Cathares furent envoyés dans les prisons de Carcassonne; les 205 Parfaits et Parfaites furent brûlés au Camp des Crémats, à la base de la forteresse. Pendant sept cents ans Montségur s'est éclipsé dans la nuit des temps. Sabartez, Montségur..... Vers 1854 le docte Du Mège reconnaissait que l'histoire de ce pays des Pyrénées ariègeoises était trop peu connue, mais qu'on l'étudiait avec quelque succès aujourd'hui. En 1870, la littérature française s'enrichit d'un livre important, à la fois histoire et épopée, „L'Histoire des Albigeois", par Napoléon Peyrat. Qu'écrivait Napoléon Peyrat lui-même, dès le début de ses recherches dans les collections, oubliées jusque-là, de Doat, à la Bibliothèque Nationale, dans les Archives de l'Inquisition de Toulouse, de Carcassonne etc.: „Montségur! Nul ne sait plus son histoire. Froissard passe dans la plaine, et le chroniqueur flamand, si curieux, ne questionne pas. Montluc, Brantôme, d'Aubigné, du Bartas, Olhagaray, le voient à l'horizon et n'interrogent pas ce grand témoin. Bayle le regarde tous les jours de Carla-le-Comte, et ce jeune et sagace investigateur ne consulte pas le vieux Patriarche! Dom Vaissette prononce le premier son nom!". „Napoléon Peyrat parle avec amour de ce qui regarde les Albigeois: il est un de leurs descendants; il écrit après avoir cherché, fouillé pieusement les tombes de ses ancêtres. Il redresse les bûchers du XlIIème siècle; il raconte les faits, la résistance, les luttes des châtelains, des paysans, des chevaliers ariègeois, en face des Tribunaux de l'Inquisition; tout le mouvement qui eut lieu pendant plus d'un siècle, soit dedans, soit autour de la forteresse où les Albigeois se retranchèrent, Montségur, une de ces cimes des Pyrénées ariègeoises qui vit vingt batailles, qui contempla tant de massacres, qui fut le refuge de tant d'âmes si fortement trempées, où se trouvèrent les plus hautes personnalités du temps: les Esclarmonde de Foix, les Philippa Comtesse de Foix, les Ramon de Péreilha, les Guiraud de Rabat, les évêques Guilhabert de Castres et En- Marti, etc.". (Abbé Duclos) L'on ne peut se défendre d'un sentiment admiratif, lorsqu'on voit l'entrain et le courage avec lequel tous ces guerriers des montagnes soutiennent la cause du Catharisme à

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laquelle ils se sont voués. ,Je vous le dis", avait annoncé Foulques, évêque de Toulouse, en accusant, à Rome, le Comte de Foix Raymond-Roger; ,je vous le dis, c'est dans sa terre d'Ariège que l'hérésie a jeté les plus fortes racines. Je vous dis qu'il a aimé, désiré et agréé les Cathares, et que tout son comté en est plein à regorger!". Il avait raison, le fougueux évêque. Que l'on songe que cette lutte opiniâtre contre l'Empire d'Amour se prolongea encore quatre-vingt -quatre ans après la chute de Montségur, de 1244 à 1329; à la chute des Trois Eglises (Ussat - Bouan - Ornolac) 84 années se sont écoulées, terminées par des hécatombes et des souffrances inimaginables! La Croisade avait duré 129 ans! C'est l'Agonie du Catharisme pyrénéen rendue affreuse par le Tribunal d'Inquisition de Pamiers. La République troglodyte du Sabartez, après la chute de Montségur en 1244, avait conservé tout son Esprit. La Cathédrale, les Trois Eglises, continuaient leur rôle sacré d'initiation. C'est que pendant le siège les vieux évêques Bernard de Blasco et Ramon de Mirepoix s'étaient retirés dans les grottes d'Ussat-Ornolac. Le successeur de l'évêque brûlé à Montségur vint les rejoindre en apportant le „Trésor Sacré". Amiel Aicard fit revivre le Centre spirituel!

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XI

LE TRIBUNAL D'INQUISITION DE PAMIERS Nous avons vu l'ignorance des historiens en ce qui concerne le Sabartez et Montségur; l'histoire de 1244 à 1329 a été complètement étouffée, et, avant 1906, personne ne parlait du rôle des Inquisiteurs en Sabartez, ni du Tribunal d'Inquisition de Pamiers. Fondé en 1318 par Jacques Fournier, évêque de Pamiers, devenu cardinal, et pape sous le nom de Benoît XII, pour traquer les derniers Centres Cathares dans le haut pays de Foix, ce Tribunal hâta l'agonie du Catharisme pyrénéen. Les précurseurs, Adolphe Garrigou, Napoléon Peyrat, avaient ouvert les recherches historiques. Il appartenait à un enfant du pays, autant dire du Centre d'Ussat-Ornolac, d'apporter enfin la lumière dans cette affreuse histoire locale du premier quart du XlVème siècle. L'Abbé Vidal connaît à fond le Sabartez: il l'a parcouru en tous sens. Les villages, les hameaux lui sont familiers; il connaît leur nom en vieille langue d'oc, en latin, en français moyen-âgeux, en langage moderne; ce qu'il faut pour lire les documents, les comprendre, les situer. Il ne brode pas, sa langue est simple: langue d'historien né. En plus, on le suit avec passion, car, prêtre parfait, sans jeu de mots, savant bibliothécaire, il ne ménage personne: il ne voile pas la vérité. On ne peut donc pas mettre en doute ce que l'Abbé Vidal ne cache pas, mais qu'il n'aimerait pas dire. Il y a de cruelles vérités! „Une histoire de l'Inquisition de Pamiers serait, je crois, facile à écrire", nous dit l'Abbé Vidal. Crée pour l'extirpation des derniers adeptes de l'albigéisme, dans le pays de Foix, le Tribunal cessa de fonctionner, s'il ne finit pas tout à fait d'exister, cette besogne accomplie". Huit années de vie très active, 1318 — 1325, durant l'épiscopat de Jacques Fournier, le fondateur et l'âme de l'institution, le futur pape Benoît XII; cinq années employées à liquider la succession judiciaire de ce prélat, 1326 —1330; et puis l'inaction léthargique des tribunaux sans causes. Telle est cette histoire! „Ma tâche s'est bornée", ajoute l'Abbé, „à une étude du «Registre de la procédure de Jacques Fournier" conservé à la Bibliothèque vaticane sous la côte: Ms. latin Vat. 4030, et des volumes XXVII et XXVIII de Doat, Paris, qui ont, avec celui-ci, d'étroits rapports". Limborch (Liber Sententiarum Inquisitionis Tholosanae), reproduit un assez grand nombre de procès relatés dans le Ms. 4030. Mgr. Douais a fait une brève description du Manuscrit du Vatican, et analysé les registres de Doat. Molinier a étudié le registre de Jacques Fournier dans son mémoire: „Etudes sur quelques Manuscrits des Bibliothèques d'Italie, XIIème et XIIIème siècles". Travail léger, incomplet: ignorance totale des lieux! Le registre 4030, conservé à la Bibliothèque du Vatican est le seul qui nous reste des volumes du greffe inquisitorial de Pamiers. Deux autres registres auxquels il est fait allusion dans ce manuscrit même, sont perdus pour nous: l'un contenait les sentences du Tribunal. Il était le complément nécessaire du Registre 4030 qui y fait de fréquents envois. On peut juger de ce qu'il devait être par le „Liber sententiarum", de Bernard Gui, Inquisiteur, qui ne renferme également que des procès-verbaux d'actes de foi; - l'autre, proche parent du manuscrit que nous étudions, y est aussi signalé dans un interrogatoire de 1325. Nous relèverons la mention de deux volumes de l'Inquisition de Pamiers, ayant appartenu à Benoît XII, et que l'on conservait, en 1369, dans la Bibliothèque Pontificale d'Avignon. Quoi qu'il en soit: les registres XXVII et XXVIII de Doat, comme le Liber

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de Gui en témoignent fréquemment, les dossiers de beaucoup d'hérétiques, justiciables de Jacques Fournier, ont complètement disparu. Le document qui reste est de très grande importance et présente un très vif intérêt pour l'histoire du Catharisme qui, au commencement du XlVème siècle, et avant de disparaître, connut quelques années de renouveau, nourrit de suprêmes espérances et tenta un retour offensif! Dès l'an 1308, Geoffroy d'Ablis, Inquisiteur de Carcassonne, et Bernard Gui, Inquisiteur de Toulouse, déciment la Fraternité Universelle, le Temple de l'Esprit, dans les vallées de l'Aude et de l'Ariège, et dans le pays toulousain; „mais ils ne pouvaient suffire à la besogne". (Quel aveu!) „En particulier, le Pays de Foix, sauvage, impraticable, cache dans ses hameaux inaccessibles de nombreux adeptes du Catharisme". C'est contre eux que Jacques Fournier institua son Tribunal. Ils y comparaissent, et le juge sait provoquer leurs confidences. Ils ont tous fréquenté les chefs du Néo-Catharisme; ils les ont suivis dans leurs courses, qu'ils décrivent; ils ont assisté à leurs cérémonies, qu'ils racontent; ils ont entendu leurs catéchèses, qu'ils rapportent fidèlement; ils savent les localités entamées par ,,1'erreur", les familles et les individus qui ont pactisé avec elle! .... C'est un tableau fort vivant de l'état religieux de ce pays qui se déroule dans les longs procès-verbaux du Manuscrit 4030. Remarquons, en passant, que jusqu'à ce jour, il est imparfaitement connu! Il n'est pas moins important par les détails qu'il nous apporte sur la vie et les moeurs de cette époque, dans le milieu des artisans ruraux, des cultivateurs et des pâtres de nos montagnes. Lorsque Jacques Fournier, évêque de Pamiers, d'accord avec l'Inquisiteur de Carcassonne, établit dans son évêché un Tribunal autonome contre les Cathares, il y avait beau temps, que le territoire de ce diocèse était visité par l'Inquisition. Maint district du Pays de Foix n'était pas moins, depuis des centaines d'années, que la terre promise de l'Esprit; et les habitants n'étaient pas des moins résulus à défendre leur Liberté de Pensée! Qu'on se rappelle leur belle résistance à Montségur, et que pour les déloger de ce „nid d'aigle", leur dernier rempart, il avait fallu une expédition en règle, une vraie Croisade meurtrière, et un siège ... qui n'en finissait pas. La chute de la forteresse, mars 1244, nous l'avons vu; la disparition des principaux seigneurs, défenseurs de l'Empire d'Amour, morts dans les luttes ou envoyés à Carcassonne; le sacerdoce terriblement réduit par les bûchers, découragèrent évidemment Cathares et défenseurs; mais n'entraînèrent pas pour autant la ruine de l'Esprit! C'est pourquoi, dès que les armées de la Croisade eurent fait leur oeuvre, celle des Inquisiteurs dominicains commença. Ils s'étaient aventurés dans le pays de Foix en 1241, Guilhem Arnaud et son collègue, Etienne de Snt Thibéry, siègent tantôt à un endroit, tantôt à un autre. A Foix, à Tarascon, cinq familles nobles sont traquées; l'Inquisiteur Ferrier, „à la main de fer", est occupé en 1243 — 1244 à instruire contre quelques fidèles des faidits de Montségur. NOUS NE DONNONS PAS LES NOMS, POUR NE PAS PARAITRE FASTIDIEUX. — (Doat: XXI — XXII — XXIII — XXIV). En 1246 — 1247 la poursuite, dans la vallée de l'Ariège, se poursuit inexorable. Bernard le Caux et Jean de Snt Pierre, successeurs de Pons Garin et de Pierre Durand, traquent, de Pamiers, les suspects du Sabartez: Arnaud de Miglos, Pierre d'Arvigna, Pierre de Garrabet, Raymond de Montlaur, frère de l'Abbé de Pamiers, Arnaud de Rabat, Bernard de Rabat, Brunis-sende de Miglos, Pierre de la Caugne, Arnaud Pons de Vernaux,

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Raymond Azéma, frère du curé de Bédeilhac, tous seigneurs ou notables du pays (Doat XXIV). Le 21 avril 1247, en l'église du Mercadal, de Pamiers, la peine du mur perpétuel fut prononcée contre huit de ces poursuivis. On sait ce qu'étaient les murs, larges ou étroits! (Doat XXXI). C'est cette année 1247 que fut décidée la démolition de Montorgueil, le château des Iretges, de Saurat, et du château de Miramont, des Comtes de Rabat, qui, selon l'Inquisition, se préparait à remplacer Montségur! Ces châteaux étaient situés à 5 kilomètres, à vol d'oiseau, des Eglises d'Ussat-Ornolac. Deux dominicains, l'un était Guilhem Raymond, enquêtent en 1272 —1273, depuis Varilhes: répression intermittente, sans efficacité sérieuse. Le 23 juillet 1295, le diocèse de Pamiers est créé par Boniface VIII; le 21 décembre, Arnaud Déjean, des Frères-Prêcheurs, est nommé Inquisiteur à Pamiers. Le 2 mars 1298, le nouvel Inquisiteur de Pamiers, rassure pleinement les Juifs de ce diocèse sur ses intentions à leur égard. Ils ne seront pas plus tracassés que ne l'ont été, jusqu'à ce jour, leurs coreligionnaires de la province de Narbonne". En 1304, il est nommé prédicateur général. En 1308, Pierre Girard avait annoncé „que tout le pays du Sabartez et de Montaillou (Monte-Alionis, château d'Esclarmonde d'Alion, de la Maison de Foix), qui était peuplé d'hérétiques, en serait purgé cette année même!" (Manuscrit 4030). Geoffroy d'Albis se transporte à Pamiers, à Ax, à Montaillou, au foyer même de l'hérésie. Montaillou fut vidé de ses habitants des deux sexes âgés de plus de quatorze ans. On les conduisit à Carcassonne: ce fut sur le Sabartez „une pluie de citations et de mandats d'amener" (Man. 4030). ,J'ai relevé dans le manuscrit de Jacques Fournier une trentaine de noms de personnes ayant été englobées dans les poursuites; et je suis bien sûr d'être loin de compte, car je m'en suis tenu à l'examen de quelques procès. Aucun de ces prévenus n'a son dossier dans le registre de Geoffroy d'Albis" - (Abbé Vidal). Ils sont de Junac, d'Ax, de Vernaux, de Tarascon, de Lordat, de Quié, d'Ascou, de Montaillou, de Prades, d'Andorre. Environs du Centre, naturellement! Les poursuivis de 1308 — 1309 racontent longuement les allées et venues des derniers ministres Cathares: Pierre Autier et ses compagnons. Pierre Autier, l'évêque de Bouan, fut obligé, en 1295, de se réfuger en Lombardie, pour éviter le bûcher. Cette même année, bien sagement, les ministres Rose-Croix quittèrent définitivement les petits coins du Sabartez devenus dangereux! Pierre Autier revint en 1299, et vécut à Bouan jusqu'en 1309, déjouant la sagacité des soldats de l'Inquisition. Ayant quitté Bouan pour se rendre à Castelnaudary, il fut pris et, naturellement, brûlé à Toulouse! — A ce moment même, les Templiers étaient traqués et martyrisés à leur tour. En 1312, il n'y avait plus un seul prédicant Cathare dans le Sabartez. Le bûcher avait fait son oeuvre; et ceux qu'on n'avait point saisis, le danger les tenait en exil, et ce serait pour longtemps. Les principaux croyants étaient également en lieu sûr, pénitents bon gré, mal gré. Cependant, si le danger (pour Rome, bien entendu!), que l'on avait un instant redouté n'existait plus, et si on avait martyrisé et brûlé la tête du Catharisme en supprimant ses missionnaires, il n'était que trop certain que tout n'était pas fini, car la foi vivait encore dans l'esprit et le coeur de beaucoup de gens. Tant qu'ils ne l'auraient pas extirpée de cet inaccessible refuge, les Inquisiteurs jugeraient leur oeuvre inachevée! Le 19 mars 1317, Jacques Fournier, austère et pieux cistercien, fut promu à l'évêché de Pamiers. Originaire de Saverdun, enfant du pays, il était naturellement au courant de ce qui s'y passait. Il jugea qu'un traitement énergique s'imposait. Le 10 décembre 1318,

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l'Inquisition de Pamiers était constituée. L'évêque était aidé de Jean de Beaune, Inquisiteur de Carcassonne, et de Gaillard de Pomiès, frère-prêcheur du Couvent de Pamiers — (Jacques Fournier, évêque de Pamiers de 1317 à 1326; évêque de Mirepoix en 1326; cardinal en 1327; pape Benoît XII en 1334 — mort en 1342). ,Jacques Fournier n'était pas tendre, il était pointilleux. Voulant prendre ses gens en défaut, il a existé des cas où il a dépassé la mesure, et vu des hérétiques là où il n'y avait que des naïfs, des illettrés et de pauvres gens inoffensifs" - „Hélas! il est vrai aussi que le moine, trop zélé, trop absolu dans la conduite de son oeuvre, a provoqué l'irritation et soulevé des colères. On lui reproche des abus de pouvoir, des injustices, des exactions; on se plaint du régime de ses prisons, des moyens violents dont il use pour obtenir l'aveu et de sa naïveté qui ne soupçonne pas le faux témoignage, ou de sa mauvaise foi qui la tolère" (Abbé Vidal). Jacques Fournier est scrupuleux quant à sa présence dans les interrogatoires, confrontations, citations, etc. Il ne manque que 10 séances, sur un total de 500, réparties en 377 jours en 8 ans. Le registre du Vatican ne nous offre pas, il s'en faut bien, le cycle intégral de sa procédure. En dehors de la perte de plusieurs volumes, issus de son greffe, il existe d'autres preuves de ce fait. Sans parler des actes où on trouve la présence de Jacques Fournier en dehors de son diocèse, on connaît énormément d'affaires „dont les pièces sont perdues"; entre autres: affaires de Bernard Délicieux, du Carme Ricord, morts-vivants dans les prisons épiscopales. Les registres de Doat, à Paris, qui nous dévoilent l'issue de nombre de procès contenus dans le registre 4030, nous renseignent par surcroît sur le sort de pauvres gens jugés à Pamiers: du 7 au 13 août 1924, l'évêque procède à la clôture de 24 causes, réunit trois assemblées consultatives. Des noms manquent au registre 4030, que nous connaissons par ailleurs (Doat XXVIII), 6 individus déposèrent les croix, 37 pénitents des actes de 1329, en outre, 19 autres personnes nous sont connues par d'autres voies. A l'exemple de l'Inquisiteur Bernard Gui, Jacques Fournier fit rechercher les exemplaires du „Talmud" propagés par les Juifs dans son diocèse et les fit brûler! On sait que, personnellement, Jacques Fourniet s'est occupé de 114 personnes, chiffre bien inférieur à la réalité, nous l'avons vu. Il y a sur ce nombre: 6 prêtres de la région de Foix; un diacre vaudois; un sous-diacre de l'ordre franciscain; deux clers; quatre ont des titres de noblesse; un notaire; un juris-consulte; la femme d'un notaire. Les autres prévenus sont des pâtres, des cultivateurs et de très modestes bourgeois, gens peu redoutables, qui seraient inoffensifs, s'ils n'étaient pas Cathares, ou ne l'avaient été. 48 femmes sont inculpées, rayon des 3 Eglises du Centre d'Ussat. La raison de cette proportion n'est pas à chercher ailleurs que dans la foi spirituelle soulevée dans le Sabartez par l'évêque Pierre Autier et ses compagnons. Passons aux témoins: il y en a 142 portés au Ms. 4030; il y en a 124 connus des Eglises de Bouan, Ornolac et Ussat Les autres? - Le délateur n'était point tenu de faire la preuve de ses dires: - le dénonciateur n'a point coutume de remplir son rôle autrement que de vive-voix; - les prévenus devenaient, eux aussi, des accusateurs. Ces singulières manières inquisitoriales nous expliquent le vide immense que représente

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la disparition des deux volumes de Jacques Fournier dont il a été déjà parlé. Et que de morts dans les prisons, attendant le jour de leur parution devant le Tribunal. „I1 vaut mieux ne pas parler des tortures, dont il est bien avéré que l'Inquisition méridionale usait de ce moyen d'aveu!". Quant aux accusés amenés dans les prisons de Carcassonne, avant et après le fonctionnement du Tribunal de Pamiers, le nombre nous est inconnu! Quelques-uns des plus importants nous ont été révélés: Guilhelma Torniera, de Tarascon, brûlée à Carcassonne en 1323; Philippa Peyrata, de Tarscon, immurée à-perpétuité en 1329, et descendante de la précédente, entre autres. Philippa Peyrata, de Trascon, immurée a perpétuité en 1329, et descendante „Les murs de la cité étaient bondés; elle faisait partie du trop-plein, après l'anéantissement des Eglises du Sabartez! - De la tour de Carcassonne où elle se trouvait enfermée, car, impénitente Cathare, elle connaissait le chenin du martyre, elle avait vu brûler, en 1323, sur les graviers de l'Aude, sa parente: Guilhelma Torniera. C'était la femme de Bernard de Tornier, de Tarascon. Elle avait été enfermée à perpétuité dans les tours où venait de mourir, condamné par Jacques Fournier, Bernard Délicios, le défenseur des victimes de l'Inquisition. Les cachots étaient déjà pleins: elle fut relâchée, mais „marquée de la double croix, sur la poitrine et sur le dos". Elle rentra à Tarascon. Son premier soin fut d'arracher les croix; son premier devoir fut de „reprendre la foi maternelle du Paraclet, et de fréquenter les réunions nocturnes de la grotte d'Ornolac. Torniera ne se gêna nullement, pour faire l'éloge des martyrs du Catharisme, surtout de Pierre et Guilhem Autier, suppliciés, qu'elle avait entendus dans leurs prédications aux Eglises et dans le Sabartez; de même, elle montra une grande ardeur à soutenir Guilhem Bélibasta, leur successeur. Elle fut ressaisie comme relapse, ramenée à Carcassonne, et condamnée par l'Inquisiteur Jehan de Prato à être brûlée. Guilhelma Torniera ne sourcilla pas sur le bûcher. Philippa Peyrata, immurée à perpétuité dans les tours de Carcassonne, était une descendante de Braïda de Montservat, brûlée 84 ans auparavant avec les 205 martyrs de Montségur! De ce nombre était également Ermengarde d'Ussat! (Doat: XXVIII) Lente agonie du Catharisme pyrénéen!

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XII LE TRIBUNAL D'INQUISITION DE PAMIERS

(suite) Le Manuscrit du Vatican 4030, dont il a été question dans l'opuscule précédent, nous présente la Convocation d'une Assemblée consultative, pour juger Arnaud Tisseyre. Mais nous trouvons dans Doat: XXVIII, des documents qui complètent, pour une partie des procès, nos informations sur ce point particulier: les 9, 10 et 11 août 1324, entre autres, se tient une assemblée avec 27, et même 39 conseillers: (nous avons les noms des 12 inculpés du premier jour); d'autres assemblées consultatives avaient déjà eu lieu à Pamiers, le 1er mai 1320, quatre condamnés, dont deux brûlés; le 8 mars 1321, avec 21 condamnés, dont 13 à l'emmurement; le 12 août3121, avec 10 condamnés, dont 3 brûlés, 4 envoyés au „mur étroit, 2 emprisonnés à perpétuité; le 5 juillet 1322, avec 10 condamnés, dont 7 emprisonnés à perpétuité, et 2 mortes exhumées et brûlées, bûchers pour squelettes! le 19 juin 1323, avec 11 condamnés, dont 6 au mur étroit, 1 à perpétuité; le 12 août 1324, avec 10 condamnés, dont 9 au mur à perpétuité, et 1 prêtre condamné au bûcher, mais, vu son âge et sa santé, le peine fut commuée au mur très étroit, aux fers, au pain et à l'eau; le 16 janvier 1329, c'est une avalanche de condamnés pris à la suite de l'invasion des Eglises et de la Cathédrale; le nombre est inconnu; plus de 79 noms ont été retrouvés; — 5 condamnés au mur étroit; — pour tous les autres „sentence inconnue". A partir du 13 août 1324, rien ne nous renseigne: Jacques Fournier n'était plus évêque de Pamiers! Ici, nous nous permettons une observation très importante: Nous avons près de 150 extraits des jugements rendus à Pamiers: pas un seul ne fait état de dualisme! Où donc était le manichéisme tant reproché aux Cathares? De leur côté, aucun inquisiteur ne fait état „du crime de deux Dieux, le Dieu bon et le Dieu mauvais"! On se rend compte, à la lumière de ces faits, que les mots ..manichéens", albigeois" n'ont servi qu'à couvrir la volonté de l'Eglise romaine d'être et de rester une théocratie universelle! La Papauté suivait d'un oeil ..paternel" la répression sanglante du Catharisme pyrénéen: témoins les quelques documents pontificaux (le page résidait à Avignon): Avignon, le 21 mars 1325: Jean XXII loue l'évêque de Mirepoix (voisin de Pamiers), d'avoir fait construire des prisons pour les hérétiques, dans sa ville épiscopale. Il l'exhorte à remplir avec zèle sqn rôle d'inquisiteur! Avignon, le 22 février 1326: En récompense des services rendus par Jacques Fournier, évêque de Pamiers, dans la poursuite des hérétiques, Jean XXII lui concède le bénéfice des faveurs spirituelles accordées ordinairement aux inquisiteurs de la foi. Avignon, 12 janvier 1327: Jean XXII confirme pour Jacques Fournier, évêque de Mirepoix, la concession d'indulgences qu'il lui avait faite, tandis qu'il était évêque de Pamiers, en récompense de son zèle contre l'hérésie! Avignon, 8 août 1328: Le pape a cuse réception des dossiers. Il loue le zèle de l'évêque, et l'engage à continuer. Le successeur de Jacques Fournier à Pamiers, Dominique Grima, n'a pas laissé de traces de son action contre les Cathares. C'est à peine si l'on peut dire que les registres

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d'inquisition contiennent les traces d'une initiative quelconque de la part de ce prélat, cependant membre éminent de la famille des inquisiteurs. Hélas! la lonque agonie du Catharisme pyrénéen allait toucher à sa fin. L'année 1328 marqua sa débâcle dans le pauvre Sabartez! De loin en loin, seulement, quelques lignes émergent des ténèbres. „Les mouvements populaires, excités par les luttes qui avaient agité le commencement du XlVème siècle, devenaient communs; l'esprit de révolte, suite des poursuites terribles contre les Bonshommes, ne cessait pas d'être prêché et admis dans le Sabartez „dont les vieux instincts de haute spiritualité et d'indépendance" se réveillent au moindre soufflé. „Les soulèvements contre les tribunaux d'inquisition s'étaient généralisés dans tout le Midi: ils avaient été violents à Albi, à Cordes, à Carcassonne. Les Consuls ne voulaient pas sévir contre leurs compatriotes, car ils étaient de coeur avec eux". (Molinier - De Lahoudès). En 1328, le Sénéchal de Carcassonne reprocha aux Consuls de n'avoir rien tenté contre ces mouvements; il les fit emprisonner et prit le Consulat sous la main du Roi. Il étendit ses poursuites, et vint dans le Sabartez, centre toujours vivant des idées Cathares. Le nettoyage des Eglises et de la Cathédrale, leur démolition, le drame de Lombrives, l'arrestation des derniers débris humains traqués avaient rempli les prisons de Pamiers et de Carcassonne. Dominique, évêque de Pamiers, assisté de Henri de Chamay et Pierre Brun, inquisiteurs de Carcassonne et de Toulouse, prit deux Consultations inqui-sitoriales, les 13 et 14 janvier 1329, suivies de l'acte de foi du 16 janvier 1329, en l'église Notre-Dame-du-Camp à Pamiers; 79 personnes, dont les noms nous sont connues (nous n'avons pas de renseignements sur celles conduites à Carcassonne!), comparurent devant ce tribunal pour y recevoir leur sentence. Elles sont toutes du Sabartez: c'est l'Eglise des grottes d'Ornolac. Nous connaissons quelques sentences: trois morts dans leurs cachots, furent exhumés et brûles; onze condamnés au mur perpétuel ... Quant aux autres!... Si vous prenez une carte du département de l'Ariège, vous vous rendrez compte que les restes de l'Eglise Cathare sont tous, sans en excepter un seul, de l'ensemble des villages du Sabartez! Par exemple, 17 villages ont complètement disparu depuis. Pauvres gens! Pauvre Pays! Nous plaçons ici deux documents se rapportant à cette agonie: Avignon, 24 octobre 1331: Le pape Jean XXII demande aux évêques de Pamiers et de Mirepoix un rapport sur les progrès et les résultats de l'inquisition dans leurs diocèses. Avignon, 6 octobre 1332: Jean XXII reproche vivement à Dominique Grima évêque de Pamiers, sa négligence coupable en ce qui concerne la répression de l'hérésie dans son diocèse. Il ,,1'engage à secouer se torpeur et à remplir son devoir"! Mais, ô triste Vicaire du Christ, où sont les Eglises d'Ornolac et la Cathédrale complètement dévastées? Seul, reste „le Grand Cimetière de Lombrives", vaste et magnifique mausolée de la Foi Cathare. L'IMMENSE NECROPOLE DE LOMBRIVES 1328. Depuis les jours où le pieux Loup de Foix venait prier dans la Cathédrale de Lombrives, cette grotte célèbre, séjour d'un évêque cathare, siège de prédications nocturnes, était devenue, sous l'orage toujours croissant, un refuge prepétuel de faidits des bois. Cinq ou six cents montagnards, fugitifs de leurs hameaux, s'étaient établis, hommes, femmes, enfants, dans ces ténèbres et formaient, autour du pasteur

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cathare, un mélange de colonie mystique et de camp sauvage. Un nouveau Montségur s'était organisé, non plus chevaleresque comme l'autre et perché dans les nuées, mais rustique au contraire, et perdu dans un antre de montagne, un gouffre perforé per un torrent diluvien. L'inquisition plus audacieuse par l'absence des Comtes de Foix qui résidaient dans le Béarn, et par la Conversion des Castelverdun, possesseurs du territoire de Lombrives, résolut de détruire ce repaire de faidits. Le Sénéchal de Toulouse remonta de Foix à Tarascon, et de Tarascon à Ussat. Il se présenta devant la grotte de Lombrives, refoulant dans la roche les proscrits des bois. (Il avait, auparavant, pris et démoli les 3 Eglises: Ussat, Ornolac, Bouan, qui étaient des spoulgas ou grottes fortifiées). Le Sénéchal pénètre sous le vaste porche, force l'étroit goulot intérieur, et croit les envelopper tous d'un coup de filet, comme un nid de bêtes fauves au fond d'une tanière, sous la rotonde sans issue de Loup de Foix. Mais la grotte est double; ou plutôt, le corridor oriental qu'il venait de parcourir, d'une étendue d'un quart de lieue, n'est que le vestibule d'une galerie supérieure, quatre fois plus profonde, et qui forme la Cavernemère. On gravit celle-ci par un escarpement d'une hauteur perpendiculaire de près de quatre-vingts mètres, vertical, mais divisé par cinq ou six ressauts dont les entablements supportent des échelles de bois dressées contre le rocher. Les Cathares, retirant après eux les échelles, furent un instant inexpugnables dans l'obscurité de leur aire souterraine,- L'ost Catholique, qui croyait les acculer dans la Cathédrale, y fut lui-même transpercé, écrasé, foudroyé par un orage de flèches sifflantes, de rocs bondissants, et de hurlements sauvages, roulant de cette gueule sombre qui, jadis, vomit le torrent océanien. Comment, sous cette tempête, tenter l'escalade; et, parvenu sur la haute corniche, comment poursuivre les faidits dans le dédale obscur de la caverne qui s'enfonce encore de plus d'une lieue dans la Montagne de Lombrives? Le Sénéchal recula, ramassa ses morts, mura l'étroit goulot oriental, et scella les Cathares vainqueurs dans leur fort, devenu leur tombeau. Il campa, quelques jours encore, sur les bouches de la caverne également murées; puis, quand il n'entendit plus rien remuer dans les entrailles de la roche, pensant que tout était fini, il redescendit tranquillement et s'en revint à Toulouse. La grotte resta „scellée et scélérée!" maudite et défendue par l'effroi superstitieux, la vague horreur dont l'entourait un indéfinissable mélange de mystère, de crime inexpiable et d'anathème royal et sacerdotal! Cependant, que se passait-il au-dedans? Les faidits essayèrent-ils de renverser les murs? L'exiguité du goulot rendait impossible l'évasion, comme l'invasion du rocher. La résignation était une vertu cathare; ils se soumirent doucement à leur sort, et sourirent tristement à leur tombeau. Frugivores, longs jeûneurs, s'imposant volontiers l'endoura, qu'ils gardaient pour leurs dernières douleurs, comme les Romains réservaient leur poignard fidèle pour les suprêmes nécessités, ils acceptèrent tranquillement ce supplice de la faim, leur suicide habituel et religieux. Dans aucun cas, on ne peut supposer qu'ils s'entredévorèrent dans les ténèbres! Ils ressentaient la plus invincible horreur pour les repas d'Ugolin! Que firent-ils donc? Ils vécurent encore quelque temps; ils avaient des pots d'argile, des amas de légumes dans les creux de rocher, et, non loin de là, un lac d'eau pure. Mais un jour tout leur manqua: vivres, bois, feu, et la lumière si douce, ce reflet visible de la vie. Alors ils se groupèremt, selon leurs familles, dans les divers compartiments, l'époux à côté de l'épouse, la vierge auprès de sa mère défaillante, et le petit enfant sur la mamelle tarie ... Pendant quelques instants, au-dessus du pieux murmure des prières, s'entendit encore la voix de l'évêque confessant la Parole qui était en Dieu, et qui était Dieu; il

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donna aux mourants le baiser de paix, et s'endormit à son tour .. Tous reposaient dans le sommeil: et les gouttes d'eau qui tombaient lentement des voûtes troublèrent seules le silense sépulcral pendant des siècles. Ils étaient pleures par les rochers! La montagne qui, comme une tendre mère, les avait recueillis dans son sein, leur fila religieusement, avec ses larmes, un blanc ossuaire, ensevelit leurs restes sacrés dans les plis lentement tissus de ce linceul calcaire, et sculpta leurs os que ne profana point le ver, un mausolée triomphal de stalagmites, merveilleusement orné d'urnes, de candélabres, et de symboles de la vie. La Caverne de Lombrives, qui reçut un instant le trésor de Montségur, fut, près de cent ans après, comme le dernier Thabor du Catharisme pyrénéen: Thabor rustique, plus farouche et plus sauvage! Le Code pénal de l'Inquisition a été maintes fois exposé: Schmidt — Histoire et doctrines de la secte des Cathares ou Albigeois — Demairon — Le Code pénal de l'Albigéisme, dans le Cabinet historique — Ch. Molinier — L'Inquisition dans le Midi — M. Tanon — Histoire des Tribunaux de l'Inquisition en France — Ch. Léa — Histoire de l'Inquisition au Moyen-Age, etc. Il n'entre donc pas dans cet exposé de traiter de nouveau ce sujet. Néanmoins, il nous paraît intéressant de relever quelques données sur les sanctions infligées „par le Tribunal de Pamiers", puisque le document de la Vaticane nous permet de le faire. Ceci permettra une comparaison avec ce qui se passait ailleurs. Les personnes poursuivies et châtiées par le Tribunal d'Inquisition de Pamiers sont: les hérétiques notoires, les suspects, les diffamés, les protecteurs et les receleurs des hérétiques, les faux témoins et leurs suborneurs, les fugitifs, les relaps et les contumaces. L'excommunication majeure, l'irrégularité canonique, l'infamie, frappent les clercs. L'hérétique est retranché de la société, il devient inapte à accomplir un acte quelconque. On doit distinguer entre les hérétiques convaincus, irréductibles, et ceux qui ont avoué et déploré leur faute. Pour les premiers, „la peine est vindicative"; pour les seconds „la peine est médicinale". Les descendants d'hérétiques sont atteints par la sentence jusqu'à la deuxième génération. On a vu certains de ces malheureux poursuivis par les effets de sentences prononcées depuis quarante, et même soixante-dix années. L'hérésie manifeste entraînait la privation de la sépulture acclésiastique. La sévérité des inquisiteurs poursuivait les coupables jusque dans la tombe, d'où leurs restes étaient retirés pour être jetés au vent, ou être brûles (ce que nous avons appelé „bûchers pour squelettes"). La sentence était suivie d'effets non moins tristes: l'infamie pour sa personne et sa mémoire, dont la famille elle-même n'était pas exempte. Le condamné ne pouvait ester, témoigner en justice, exercer des fonctions et des charges publiques, succéder, acquérir, tester, etc. L'hérétique convaincu se trouvait, pour toujours, dans l'impossibilité d'user de ses droits évanouis. Les peines édictées par la sentence elle-même étaient autrement graves: confiscation de ses biens, de son vivant ou après sa mort; détention perpétuelle;

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supplice du feu „par la remise au bras séculier". Il y a, dans Jacques Fournier, des allusions à des confiscations de biens: c'est pour avoir cette succession que des coquins se livraient à l'espionnage pour le compte de l'inquisition; — de par leur immuration, les condamnés avaient perdu leurs biens; — confiscations prononcées contre les défunts et les suppliciés. Entrons ici dans une exemple écoeurant: la saisie se faisait à Pamiers, au profit du Comte de Foix. Celui-ci, en 1309, avait invoqué une coutume antique, et revendiqué ce privilège sur les hérétiques de ses terres. Il s'agissait précisément de la succession de Jacques Autier, de l'Eglise de Bouan. Les gens du roi répliquèrent que cet hérétique était bien du Sabartez, Comté de Foix, mais qu'il avait exercé sa propagande à Carcassonne, à Limoux, dans le Toulousain, possessions royales. Le Compte de Foix n'en continua pas moins à pratiquer le droit d'encours, aidé par son procureur. La prison était le châtiment le plus fréquemment prononcé. Le registre 4030 contient des allusions à des démolitions de maisons fréquentées par des hérétiques. Ce malheur était redouté! La prison était plutôt pour les coupables venus à récipiscence que pour les hérétiques impénitents, dont la peine était presque toujours le bûcher. Les captifs sont punis du mur large, du mur étroit ou du mur très étroit. Le mur large est toujours temporaire, à régime assez doux, liberté relative de mouvements dans la forteresse ou la maison de réclusion. Le mur étroit, peine à perpétuité, vie dure pour faire parler les malheureux; séquestration dans une cellule exiguë, où l'air et la lumière ne pénétraient que par une lucarne haute; mains et pieds chargés de fers; pain de douleur et eau de tribulation. Nous ne dépeindrons pas l'horreur de ces cachots. Nous savons qu'aux Allemans (prisons de l'évêque de Pamiers), il existait des cachots si infects, si incommodes, qu'on ne les appelait pas „carcer strictus", mais „carcer strictissimus"! Un condamné, Raymond Peyre, reste quarante-cinq jours au mur étroit; il doit être remis dans un mur plus hospitalier. Les murs de Carcassonne étaient encore plus renommés que ceux des Allemans! Inutile de dire que le régime des geôles des inquisiteurs de Pamiers était fatal à pas mal de prévenus: on connaît le nom de quatre décédés dans les murs des Allemans; — deux femmes y meurent également; — trois presonnes, arrivées à bout de souffrances, sont remises en liberté, pour rendre leur dernier soupir à l'air pur. Nous connaissons le nom de cinq prévenus que le Tribunal de Pamiers a livrés „au bras séculier pour être brûlés". Nous avons expliqué précédemment, l'hypocrisie et la honte de cette remise au bras séculier, avec cette prière „qu'elle t'épargne le mort et la mutilation"! Suprême horreur, avons-nous dit, puisque clause purement illusoire: le condamné était toujours exécuté! Jacques Fournier déploya une énergie peu commune à traquer les derniers fidèles de l'Eglise d'Amour en Sabartez. L'évêque trouva sa récompense dans le chapeau rouge et la tiare. Nous voulons bien croire que ses excès dans la répression du Catharisme pyrénéen lui soient imputés comme l'accomplissement d'un devoir!

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XIII L'ETERNEL AMOUR!

Tarascon, le vieux Taruske, Capitale des Taruskonienses de Pline et du Haut Sabartez (à sa fondation en viguerie), resté toujours libre à travers l'histoire, était le protecteur immédiat du Centre initiatique d'Ussat-Ornolac. Ceinturé de remparts de toutes parts, il commandait la route qui conduisait aux Eglises et à la Cathédrale. Il ne faut pas s'étonner si les Comtes de Foix, de leur côté défenseurs valeureux de la foi Cathare, occupaient, à Tarascon, un château quille sur un verdoyant mamelon et situé juste à la vue des Eglises supérieures d'Ussat. „La Torr de Mount Négré, défera la villa de Tarascou, à Mossenhor 1° Comte de Fouîch", porte le dénombrement de 1445, fait par ordre du Comte Gaston IV. (La tour de Moun Négré, en dehors de la ville de Tarascon, à Monseigneur le Comte de Foix). Roger-Bernard le Grand, en 1202, s'était marié à Tarascon avec Ermessinde de Castelbon. Plus tard, obligé de livrer son Château de Foix à Blanche de Castille, il gagna Tarascon. Ermessinde l'y suivit et y mourut (hiver 1230). Elle fut inhumée dans une Eglise et, plus tard, au Monastère de Costoga (Catalogne). Le 13 mars 1231, Tarascon vit le mariage de Roger, fils de Comte de Foix, avec Brunissende de Cardonne; - en même temps, le mariage d'Esclarmonde de Foix (la 3ème Esclarmonde!), sous la protection d'Esclarmonde d'Alion (la 2ème, nièce de la „Colombe du Paraclet", la grande Esclarmonde de Foix!) avec Ramon de Cardonne. Esclarmonde d'alion était la soeur de Loup de Foix, Parfait de Bethléem d'Ornolac, et neveu de la grande Esclarmonde de Foix. Le 10 février 1232, Roger-Bernard épouse à Tarascon Ermengarde de Nar-bonne. Mariage politique, car la charte ajoute: „Les bayles du Comte, qui venaient de traiter avec les Consuls de Tarascon, se rendirent à Montségur". C'était, avec l'aide de Othon-Arnaud-de-Castelverdun, sénéchal de Roger-Bernard, pour permettre à Ramon de Pérelha de recevoir à Montségur sacerdoce Cathare et proscrits. En août 1232, Guilhabert de Castres, évêque Cathare, demanda à entrer dans la forteresse. Une seconde fois, Parfaits et Parfaites étaient établis sur le „Thabor pyrénéen!" Hélas! pour la dernière fuite devant les bourreaux. Les vieux évêques, dès lors, restèrent dans les Eglises d'Ussat; les jeunes élus prirent le Chemin des Cathares à travers le Saint-Barthélémy. Et Tarascon vit le passage de tous les amis encourageant, soutenant et défendant l'héroïque forteresse. Loup de Foix, Esclarmonde d'Alion, les Seigneurs de Rabat, de Castel Verdun, d'Arnave, de Garrabet, de Montgaillard, etc., etc. Après la chute de Montségur, la répression terrible de l'inquisition s'abattit sur le Sabartez. Le 3 mars 1302, Roger-Bernard III, Comte de Foix, mort à Tarascon, fut consolé et assisté, à son lit de mort, de Pierre Autier, évêque Cathare de Bouan, en Sabartez. Ceci ressort de la confession de Sybille, filie Johannis Gouzy, de Larnat, femme de Raymond Peyre, de Bouan- Sinsat livrée au bras séculier. Loup de Foix, nous l'avons déjà vu (neveu de la grande Esclarmonde), reçut le Consolamentum, en 1213, dans l'Eglise d'Ornolac (Guilhabert de Castres, évêque). Belle figure de cette période terrible, nous avons de lui le récit d'une de ses visites à son vieil ami Amiel Aicard, successeur de En Marti, le glorieux évêque de Montségur, réfugié à Lombrives, la Cathédrale des Albigeois. Lombrives était appelée aussi: ,,1'Oratoire de Loup de Foix".

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L'ORATOIRE DE LOUP DE FOIX Le pieux et vaillant bâtard de Foix, le vieux Loup, survécut plus de cinquante ans à son héroïque père, le grand Comte Ramon-Roger (mort en 1225), dont, enfant, il était le compagnon de guerre. Il avait traversé le tourbillon des vingt croisades albigeoises, marché sous le double orage de l'Inquisition et de la „Conquête française", vu périr Montfort, tomber Montségur, agoniser la nationalité romane et s'éteindre la race en qui se personnifiait le Midi, la Maison de Toulouse, et l'indestructible vieillard vivait encore, 1270, toujours fidèle au Paraclet. Le pieux Chevalier, se dérobant aux fêtes guerrières et galantes de la Cour de Foix, se dirigeait furtivement vers la grotte de Lombrives, près de la Spoulga d'Ornolac, où il s'était converti au Consolateur et où s'éteignait alors un vieil évêque Cathare, le vénérable Amiel Aicard. Arrivé, sur le soir, en face d'Ussat, il descendait de son palefroi, et montait péniblement sur la pente de la Montagne, à travers ce chaos de rochers qu'un tremblement de terre a secoués jusque dans le lit de l'Ariège, et au-dessus duquel s'ouvre la bouche de la Cathédrale de Lombrives. L'immense Caverne, dans sa partie méridionale, car elle est double, a la forme d'un sablier renservé, ou d'une courge vineuse, dont un étroit goulot étrangle les deux globes inégaux. La voûte, graduellement rétrécie par les suintements pétrifiés de la roche, semblait se terminer, vers le milieu, en tanière de bête fauve. Là, le noble vieillard qui, comme tous les princes de sa Maison, portait la tête haute et à l'espagnole, et qui, debout sur ses étriers, s'était dressé sur son cheval de guerre dans cinquante champs de bataille, s'abaissait maintenant pour son Dieu, se courbait, rampait sur ses genoux, et se glissait comme un renard dans le Temple du Très-Haut: la Cathédrale. Puis, la voûte, insensiblement, se relevait, et, dans le fond, s'épanouissait en un vaste dôme, éclairé par des torches de sapin qui brûlaient sur des stalagmites découpées en forme d'urnes et de candélabres. Le Prince se mêlait à la foule des pâtres et des bûcherons d'Ussat, d'Ornolac et de Tarascon. Un vieillard était assis dans une chaire de rocher, le vénérable Amiel Aicard, qui avait caché le Trésor de Montségur et qui, maintenant, y conservait un or plus rare. Il lisait dans un livre: „Au commencement était la parole; elle était en Dieu, et elle était Dieu. Toutes choses ont été faites par elle; en elle était la vie, et la vie était la lumière des hommes. Et la lumière luit dans les ténèbres; mais les ténèbres ne l'ont point reçue". Puis, à l'Evangile, l'Evêque mêlait l'oraison funèbre des martyrs. Les pleurs, les sanglots accompagnaient le gémissement de sa voix. Puis, le peuple, à genoux s'écriait: „Bénissez-nous, ô Père!" - „Deus vos benedicat! Que le Seigneur vous bénisse et vous donne une bonne fin!", répondait le vieillard. L'évêque disparaissait dans la roche où il vivait comme un esprit; et le peuple, par l'étroit vestibule, regagnait la bouche de la caverne. Les torches s'éteignaient et toute cette foule s'évanouissait dans l'ombre avant que l'aube blanchît les Cimes de Tarascon. Nous avons vu qu'une Catastrophe mystérieuse fit de la grotte de Lombrives „une immense nécropole". L'image des vaincus restera toujours vivante en Sabartez; Jacques Fournier y laissera des traces de sa main dure et impitoyable; l'agonie de la Religion du Paraclet durera plus de cent ans; elle aura des sursauts, bien longtemps après 1329, en 1357, en 1374, en 1383, en 1400, et même en 1446, avec des répressions sanglantes, individuelles le plus souvent, mais qui prouvent que la cendre des bûchers a du mal à se refroidir. Malgré le feu et le sang,

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„Les cavernes continuent leur oeuvre de maternité. Elles sont la Bible de l'humanité; l'Esprit souffle sur la matière qui s'anime et qui chante la gloire de son Créateur!" (Abbé Glory) Le Château comtal de Foix a été délaissé par les Comtes, pour la Navarre et le Béarn, dont ils sont devenus les rois. Mais les vieux Comtes, les Princesses de la Maison de Foix, veillent toujours sur la forteresse comtale, fièrement quillée sur son roc majestueux. L'ombre du superbe Ramon-Roger, de la grande Esclarmonde, et de la vertueuse Sézélia Trencavel, ses soeurs, raniment le sang des Aïeux dans les veines de leurs successeurs. Et nous arrivons à l'année 1527. Marguerite, soeur de François 1er, était veuve de Charles, duc d'Alençon. Henri d'Albret, Roi de Navarre et Comte de Foix, séduit par ses hautes qualités, en fit sa compagne. Elle devint Marguerite de Navarre, et vint s'établir dans le Comté de Foix. On a fait un grand éloge de l'éloquence, des talents, de l'habileté de Marguerite; aussi, et surtout, d'une bienveillance qu'on ne saurait contester. Elle reçut: Berquin, Etienne Dolet, Pierre Caroli, Roussel, Clément Marot, Brantôme, Erasme, Jean Calvin qui n'était pas encore chef de secte. Sa fille, Jeanne d'Albret, adorée de François 1er, fut élevée à la Cour; puis, mariée à Antoine de Bourbon qui devint, par ce mariage, roi de Navarre et Béarn, Comte de Foix. Jeanne s'installa aussi dans le Comté de Foix, à Pamiers, là où Esclarmonde de Foix avait soutenu la cause Cathare que Rome avait résolu de détruire. Jeanne d'Albret avait une nature absolue, impérieuse qui, aux temps des fermentations intellectuelles, se jettent dans les partis extrêmes. Ce n'est pas le caractère inquiet et hésitant de son mari, le Duc de Vendôme, Antoine de Bourbon, qui l'aurait fait s'arrêter sur cette pente. Elle profita de ce caractère pour ..combattre les excès des catholiques" et adopter les idées de Roussel et de Calvin. Les Novateurs, ainsi les appela-t-on, devinrent „les Huguenots". Le Calvinisme était né à Pamiers, dans le Sabartez, dans le Comté de Foix, et les luttes fratricides allaient recommencer dans cette malheureuse contrée. Les bûchers n'étaient pas éteints. Nous n'entrons pas dans les détails de cette nouvelle guerre. Marguerite et Jeanne furent toute leur vie les protectrices des Novateurs religieux. La première était la grand'mère, la seconde était la mère de Henri de Navarre, Comte de Foix-Sabartez, futur Henri IV, roi de France. Il ne faut donc pas s'étonner si, alors qu'il n'était pas encore roi de France, poussé par le long passé spirituel de ses aïeux, il soit venu à Lombrives, la Cathédrale, dont depuis 250 ans, personne n'osait parler. Loup de Foix, racine profonde des Bourbons par la Maison comtale de Foix-Sabartez, avait dit en se prosternant avant d'entrer dans „son Oratoire": „I1 faut se prosterner devant le Très-Haut avant d'entrer dans son Temple!". C'est juste au-dessus de ce passage rampant que se trouve l'inscription, témoin de la venue de Henri de Navarre à Lombrives: Deo-Rex, Roi de Navarre, Comte de Foix 1578 Trois de ses aides-de-camp ont également laissé leurs noms: Peter Dan, Bermgen, de Boissy. Nous avons prouvé l'authenticité de la visite et des signatures. Nous pouvons ajouter que c'est à l'instigation de trois notables protestants de Tarascon qu'Henri de Navarre avait accompli cette visite, certainement bien chère à son coeur: Teynier, de Séré et Sérou. Voici le compte-rendu de cette visite royale: DR. ROI DE NAVARRE. COMTE DE FOIX 1578

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Jacques de Castelverdun était seigneur de la grotte sinistre de Lombrives scellée depuis deux siècles et demi. Le temps, à cette époque, rouvrit ce grand ossuaire. Les protestants, qui peut-être se cherchaient des ancêtres dans les antres des montagnes, conduits par des vagues et tragiques souvenirs, pénétrèrent dans ses cryptes funéraires. Ils entrent, ils arrivent à l'Oratoire de Loup de Foix, montent, par les échelles encore dressées, à la grotte supérieure, et découvrent, ô prodige effrayant, tout un peuple endormi et couché, presque pétrifié lui-même, comme dans des cercueils de pierre. La montagne, qui pleurait ses enfants depuis deux siècles et demi, leur avait construit de ses larmes congelées, des tombes de stalagmites. Bien plus, elle leur avait élevé comme un monument triomphal, et transformé l'affreuse caverne en une basilique merveilleusement décorée de moulures, de sculptures symboliques. On y voyait une chaire, des candélabres, des urnes; puis des vêtements sacerdotaux, un pallium, une tiare; puis encore des fruits répandus autour de ces morts, des melons, des champignons, emblèmes de la vie; et enfin une cloche de bronze, dont l'énorme capsule, comme tombée de sa voûte, gisait à terre, symbole d'éternel silence, et signe en même temps de la victoire remportée par ces martyrs sur le prince de l'air dont le clairon décorait leur caveau sépulcral! L'immense nécropole de Lombrives était rendue à l'histoire, après 250 ans de complet silence: mais, non d'oubli! Il y a des paroles, il y a des actes qui ne seront jamais frappés d'oubli. Est-ce que "l'oeil d'Osiris" met un voile sur ce qu'il est appelé à voir? Dieu est Amour! - Le chemin du Messianisme, depuis Marcos et Priscillien, les premiers semeurs de la Gnose, est toujours le même. Marqué par des lieux où les bûchers ont inspiré plus de Fraternité, il représente les points où l'Esprit se met à souffler comme jadis: l'immense nécropole des Eglises du Sabartez; l'immense bûcher du Camp des Crémats à Montségur; l'horrible hécatombe de Béziers; les „brasiers" de Minerve, de Lavaur; et alors___Toulouse, Orléans; le Paraclet, le Mont Wimer, Vézélay, les forêts du Poitou, du Mans, de Brocéliande; Erigène et Gérard en Angleterre; puis Anvers, la Lombardie, les Bogomiles, Cologne, Aix-la-Chapelle; Goslar. Voie impériale de l'Esprit, arrosée, tout de son long, par le sang des Fidèles d'Amour, revêtue pieusement de la cendre des bûchers .. „del Cendrum des Martyrs"! O Roumius! Pèlerins du Dieu d'Amour! Impossible de se tromper en prenant le Chemin du Saint-Graal, la sublime voie de la Perfection, que le divin Maître Lui-même avait déjà arrosé de son Précieux Sang! Des pyramides sacrées le jalonnent: Holocauste de Goslar, Columbarium de Montségur, Crypte funéraire de la Cathédrale des Albigeois, en passant par le Paraclet de Champagne. Sentiers glorieux, jadis! Terre brûlée par la haine! Régions oubliées, pour cacher, ensuite, le sang et le feu! „Mais, apretx sept cents ans verdejo lé laurier „Sur Cendrum des Martyrs"! (Mais, après sept cents ans, le laurier reverdit Sur les bûchers des Martyrs!...) (Teulié). La Gnose, „le Messianisme", que nous réclamons tous les jours dans nos prières, demande au Dieu d'Amour de hâter son règne: Adveniam regnum tuum! Que ton Règne arrive!