“SPORT TO WEB” & “WEB TO SPORT ” Digital et événements sportifs,
on transforme l’essai ?
Thèse MBAMCI Part Time 2015
MBA spécialisé Marketing et Commerce sur Internet
RÉSUMÉ
La notion de grand événement sportif tel qu’on le pratique aujourd’hui existe depuis
l’Antiquité. Nécessaires dans toutes les civilisations, ces spectacles sportifs subliment les
sociétés en réunissant les citoyens sous leur drapeau pour porter au plus haut l’héroïsme
de leurs athlètes.
Si aujourd’hui rien, ou presque, n’a changé dans l’approche sportive proposée,
l’etransformation en revanche a opéré. L’écosystème de l’industrie du sport ne peut que
se féliciter de l’arrivée massive de nombreux outils digitaux, allant du stade connecté à
la réalité virtuelle, en passant par les plateformes web, les médias sociaux, la robotique,
etc. Ces outils font figure de manne par les opportunités qu’ils génèrent : le
développement de l’expérience fan, que ce soit au stade ou à distance, notamment via le
second écran, la collecte de données menant à un CRM de plus en plus personnalisé, ou
encore l’accès direct aux sportifs, intouchables héros d’hier, individus connectés
d’aujourd’hui.
Mais si les opportunités sont innombrables, elles ont fait naître de nouvelles contraintes
qui résonnent comme des condamnations à perpétuité : celle de produire toujours plus
de contenu, toujours plus innovant, toujours plus visible, de développer sans relâche le
niveau d’engagement des fans, de veiller en permanence à l’eréputation d’un
événement ou de ses acteurs ou encore d’accompagner avec pertinence et discernement
la mutation des disciplines pour leur permettre d’entrer dans ce nouveau cadre
numérique.
Certains ne connaissent pas ces problèmes d’adaptation. Pure players du sport, les
acteurs de l’esport réalisent une percée phénoménale, entraînant dans leur sillage un
intérêt de plus en plus vif de la part des acteurs traditionnels. Au point qu’à défaut de se
mettre d’accord sur la définition du “sport”, des ponts sont jetés d’une rive à l’autre pour
développer (et profiter) de cette nouvelle opportunité économique.
Et demain ? Qu’estce que nos acquis d’aujourd’hui, notre modèle de pensée toujours
plus disruptif, notre insatiable appétit de développement et notre appétence pour la
chose numérique nous préparent en matière d’événements sportifs ? L’humanité
vatelle “s’augmenter” pour proposer un spectacle encore plus sensationnel ?
Voudronsnous et sauronsnous relever les défis lancés par les robots ?
Cette thèse propose une promenade spatiotemporelle autour d’un univers auquel j’ai
consacré 20 ans de ma vie professionnelle. Et c’est sur cette expérience, couplée à mes
recherches et à 14 mois de formation digitale au MBAMCI à l’Institut Léonard de Vinci,
que je me suis appuyée pour produire des recommandations à destination des acteurs
de l’industrie du sport sur les outils à investir, les compétences RH à rechercher ou
encore les bases de données à anticiper.
A vos marques, prêts... bonne lecture !
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EXECUTIVE SUMMARY
Largescale sports events have been gathering people and nations since Antiquity, giving
them the opportunity to hold high the banner of their nation and glorify their athletes.
Despite the fact that things haven’t really changed in sport itself, digitalization has
transformed sports business rules over the last years. One cannot ignore web, social
media, CRM, data science, connected stadiums, virtual reality, and calculation tools have
deeply impacted the sports events industry. These tools have revealed numerous
opportunities. It is now possible to considerably increase supporters experience through
many tools like ‘second screen’, wether fans are in a stadium or at home, to enhance
and personalize CRM via a better data collection or to have direct access to champions,
who have become highly connected individuals.
However, the downside is that these opportunities have generated new perpetual
constraints: it is essential to produce more content, more innovation, more visibility, to
enhance experience, to engage support and monitor event ereputation. Disciplines are
following different paths to enter this digital world, and this must be governed with
accuracy and vision. Some have no trouble adapting : sport pureplayers, esport actors,
are leading the sports economy with no apparent effort, getting more and more attention
from traditional stakeholders.
But what will it be like tomorrow? How will digitalization change sports events? How our
growing knowledge, our disruptive way of thinking, our love for digital thing, will lead the
transformation of sport events ? Will humanity make the choice of ‘self augmentation’ to
perform better and propose significantly improved sport shows ? Will we accept to fight
against bots ?
The aim of this thesis is to have a walk in this big industry of sport events, those of
yesterday, today and tomorrow, and to make recommendations to sports industry
stakeholders, enlightening them on what tools they should invest on or how they can
anticipate databases or human ressources.
It is the result of a 20 years’ relevant professional experience, personal researches and a
14months digital training programme at MBAMCI at the Leonard de Vinci Institute.
Ready, steady, enjoy the reading !
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REMERCIEMENTS Je remercie les nombreux professionnels qui ont accepté de partager leur vision lors
d’interviews aussi riches que sympathiques qui ont nourri mes réflexions et dont
certaines retranscriptions sont visibles dans cette thèse.
Je remercie également très, très chaleureusement Alexandre Stopnicki et Vincent Montet
qui ont su me transmettre cette joie de la transformation numérique.
Et enfin, un big hug à toute la promotion Part Time 2015 du MBA MCI, mes amis
#Geektamere, sans qui cette aventure n’aurait pas eu la même saveur.
Antoine Aubour Deputy Marketing Director ASO
Lilian Baudard Guillot Head of Marketing & Communications Eurosport
Théo Bayssat Business Development Project Manager ASO
Robin Cassuto Business Development Manager ASO
Matthieu Dallon Cofondateur et directeur d’Oxent, fondateur de
l’ESWC (coupe du monde de esport)
Olivier DenisMassé Directeur délégué Fédération Française de Golf
Veronica Grandi Responsable du Pôle Digital Fédération Française de Tennis
Boris Helleu Enseignant Chercheur Université de Caen Basse Normandie
Stéphane Hourcq International Senior Sales Manager Netco Sports
Yann Lemort SEO Consultant & Formateur agréé
Frédéric Lohnert Consultant Stratégie Senior Freelance ex Directeur Conseil
chez Monsieur White, Commercial chez TBWA/TEQUILA
Michel Mimran Directeur Marketing du Paris Saint Germain
Eric Novel DG Panasonic France
Stéphane Rakoto Responsable de la Communication Digitale
Stade Français Paris
Samir Sirat Chargé de Communication et Emarketing
et enseignant ESG Management School,
Office de Tourisme Rouen vallée de Seine
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SOMMAIRE
PARTIE 1 ÉCOSYSTÈME DU SPORT ÉVÉNEMENTIEL
1.1. Définitions
1.2. Histoire
1.3. Contexte
1.4. Cible et acteurs
1.5. Financement
1.6. Retombées économiques
1.7. Retransmission TV
1.8. Tendance générale
PARTIE 2 ETRANSFORMATION DES GRANDS ÉVÉNEMENTS SPORTIFS
« SPORT TO WEB & WEB TO SPORT »
2.1. Un nouveau mode de communication
2.2. De nouveaux outils
2.2.1. Stades connectés
2.2.2. Plateformes
2.2.3. Médias sociaux
2.2.4. Applications mobiles
2.2.5. Objets connectés
2.2.6. Live streaming
2.2.7. Réalité virtuelle
2.2.8. Drones
2.2.9. Robots
2.3. De nouvelles opportunités
2.3.1. Fan expérience
2.3.2. Phénomène du “second écran”
2.3.3. Explosion de l’audience
2.3.4. Big data
2.3.5. Accès aux sportif / “sport réalité”
2.4. De nouvelles contraintes
2.4.1. Engagement
2.4.2. Création de contenu
2.4.3. Mutations de la discipline sportive
2.4.4. Eréputation
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PARTIE 3 ESPORT : LES PURES PLAYERS DU SPORT DIGITAL
3.1. Définitions Présentation
3.2. Ampleur du phénomène
3.3. Cible
3.4. Passerelles entre esport et sport traditionnel
3.5. Evolution à 10 ans
PARTIE 4 QUELLE ÉVOLUTION D’ICI 10 ANS ?
4.1. Retransmission
4.1.1 Live streaming
4.1.2 Multiscreen
4.1.3 Technologies 4K et 8K
4.1.4 Réalité virtuelle / Technologie 360°
4.2. Stades et arenas
4.3. Quelle utilisation du Big Data ?
4.4. Objets connectés / Wearables
4.5. Robotique
4.6. Humanité augmentée
4.7. Réalité virtuelle / augmentée
4.8. Drones
4.9. Hologrammes
4.10. Participation des fans
4.11. Commerce
4.12. Billetterie
PARTIE 5 RECOMMANDATIONS
5.1. Anticipation
5.2. Comment mettre en oeuvre sa stratégie digitale ?
5.3. Comment etransformer ses équipes ?
5.4. Outils à investir ?
5.5. Quelles bases de donnée anticiper ?
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INTRODUCTION
Quoi de plus immuable, traditionnel et mûrement répété que les Jeux
Olympiques ?Et pourtant, bien plus que les disciplines sportives ellesmêmes, si
l’organisation de cet événement est une machine bien rodée elle est également
bien vivante. Et comme toute entité vivante, elle évolue. Une démonstration ?
Quoi de plus différent que les Jeux tels qu’ils se sont organisés à Olympie il y a
3000 ans et les Jeux tels qu’ils se préparent à Rio en 2016 ?
Objets connectés, big data, applications mobiles, seconds écrans, réseaux
sociaux, réalité virtuelle, autant d’outils que les grecs, mêmes aidés des dieux
n’auraient jamais pu imaginer. Les perspectives offertes par le digital au
business du sport sont vastes mais vers où nous conduisentelles ?
Cette thèse se propose de répondre à une question : “quelles sont les mutations
déjà opérées et celles à attendre de l’utilisation croissante des leviers digitaux
sur les grands événements sportifs ?”
Et, de façon sousjacente, sommesnous en train de sacrifier l’âme de nos
événements sur l’autel de l’innovation ?
Si la digitalisation est croissante dans tous les domaines, on peut parler d’une
digitalisation galopante des événements sportifs. Ceci s’explique notamment par
le besoin qu’ont les communautés de fans de partager leurs émotions.
Et cette digitalisation s’inscrit dans un secteur en forte progression. Selon une
étude réalisée par le cabinet Deloitte
en décembre 2015, plus de 70
millions de billets pour des
événements sportifs ont été vendus
en 2015 en Angleterre, soit une
augmentation de 5% par rapport à
2014. Ceci place l’année 2015 en
2ème place derrière l’année record
de 2012 avec les JO qui avaient accueilli 75 millions de spectateurs.
Pour tenter d’apporter une réponse à la question, un état des lieux est
nécessaire : quels sont les nouveaux outils, pour quelles opportunités et quelles
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contraintes ? Empreints de cette réalité, et déjà “etransformés”, à quoi
ressemblent vraiment nos événements sportifs aujourd’hui ? Le esport atil la
légitimité pour s’asseoir à la table des grands ? Et surtout, quelles évolutions
allonsnous voir surgir d’ici 10 ans ? Allonsnous voir nos événements perdre
leur âme ou leurs traditions pour répondre aux impératifs de partage,
d’immédiateté et de contenus générés par le digital ?
Enfin, comment communiquer sur ces grands spectacles en exploitant au mieux
des outils en constante évolution ? Comment concevoir et mettre en oeuvre une
stratégie digitale ? Quelles compétences RH intégrer afin de coller à la courbe de
ce virage numérique ? Comment aborder le Big Data, et quelles bases de
données anticiper ?
Un florilège de questions qui permettent de poser les bases d’une réflexion. Les
bases seulement car tout ceci n’étant valable que le temps d’une tendance, les
évolutions s’enchaînent et induisent un état de veille permanent. Mais les
contours de demain sont de moins en moins flous, allonsy avec gourmandise !
Cette thèse est un travail d’investigation et de réflexion, compilant de
nombreux exemples, permettant une compréhension des enjeux ouverts
par le digital et une vision de l’avenir dans l’univers des grands
événements sportifs.
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PARTIE 1 ÉCOSYSTÈME DU SPORT ÉVÉNEMENTIEL
1.1. DÉFINITIONS
Selon le Petit Robert, le sport est une “activité physique exercée dans le sens du
jeu, de la lutte et de l’effort et dont la pratique suppose un entraînement
méthodique, le respect de certaines règles et disciplines”.
Définition du sport établie par la Charte Européenne du Sport:
“On entend par “sport” toutes formes d’activités physiques et sportives qui, à
travers une participation organisée ou non, ont pour objectif l’expression ou
l’amélioration de la condition physique et psychique, le développement des
relations sociales ou l’obtention de résultats en compétition de tous niveaux”.
L’introduction de ce sujet a été confiée à une référence mondiale de
l’organisation d’événements sportifs, ASO, par l’intermédiaire d’Antoine Aubour,
Deputy Marketing Director à qui il a été demandé sa définition d’un grand
événement sportif : “Un grand événement sportif, c’est un événement qui
répond à des critères restrictifs. C’est un mix d’indicateurs qui peuvent dire d’un
événement si c’est un “grand événement sportif” : quelles sont les diffusions (en
local ou dans le monde entier) et les audiences, quelle est la capacité à engager
des fans sur les volets digitaux, combien de spectateurs ? On mixe ces
indicateurs et on matche avec l’image de la Marque événement.”
Les grands événements sportifs tels que définis par Antoine Aubour sont par
exemple le Super Bowl, La FIFA World Cup, les Jeux Olympiques, la Ryder Cup
ou le Tour de France.
Pour bien comprendre les enjeux de ces grands événements, voici le top 3 des
chiffres d’audience TV relevés :
1. FIFA World Cup Moyenne d’audience : 3,5 milliards
2. Tour de France Moyenne d’audience : 2,6 milliards
3. JO d’été Moyenne d’audience : 2 milliards
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Moyenne des sources (aux variables parfois importantes) relevées.
Cette définition place d’emblée le sujet dans une importante thématique
business, avant même d’aborder les notions de performances et d’émotions.
Notre périmètre d’étude sera plus vaste bien que globalement basé sur les
mêmes critères.
Sera considéré ici comme grand événement sportif tout événement sportif
retransmis en TV et/ou sur internet (garantie de popularité de l’événement),
faisant intervenir des spectateurs, et ayant un branding fort.
Dans ce périmètre, on distingue deux types d’événements :
Les événements principalement destinés aux amateurs : athlètes
amateurs (d’où les professionnels ne sont toutefois pas exclus, c’est le cas
des marathons notamment)
Les événements réservés aux professionnels : athlètes professionnels (où
sont également conviés un petit nombre d’amateurs invités par
l’organisation par l’intermédiaire de wild cards comme c’est le cas au golf
ou sur le Tour de France).
Qu’estce qui fait le succès d’un grand événements sportif ? C’est avant tout la
notion de sport spectacle. On vient au stade, au match, sur les routes du Tour
du France, pour se divertir, voir des athlètes parfois (souvent ?) considérés
comme des héros, approcher au plus près du mythe, et dire “j’y étais” voire “j’y
suis” grâce aux outils digitaux. Et plus le mix performances/popularité du
spectacle sera important, plus le public sera au rendezvous et par conséquent
les médias et donc les sponsors.
Ce business s’appuie sur une tradition bien ancrée (le peuple ne demandaitil
pas dans l’Antiquité “du pain et des jeux” ?) et peut désormais compter sur un
courant hygiéniste qui voit le nombre de pratiquants exploser depuis quelques
années dans les classes sociales les plus aisées. Courant bien suivi et fortement
encouragé par tous les fabriquants d’objets connectés, alimentant le fantasme
d’un bienêtre issu d’une pratique sportive régulière. Mais si la partie aisée de la
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population s’adonne de plus en plus au sport, la pratique est globalement en
baisse en France. Selon une enquête Eurobaromètre parue en mars 2014, 48%
des individus de plus de 15 ans déclaraient faire du sport au moins une fois par
semaine en 2009 et ils n’étaient plus que 43% en 2014. Audessus toutefois de
la moyenne européenne qui restait stable à 41%. Malgré cette baisse, les
spectateurs sont toujours aussi nombreux (la moitié de la population mondiale
regarde la FIFA World Cup à la télévision !) et l’identification aux sportifs
professionnels est forte et renforce encore davantage la notion de mythe
lorsqu’on assiste à des épreuves qui impliquent un profond dépassement de soi.
1.2. HISTOIRE
Préhistoire
Les rivalités de clan à clan
constituèrent vraisemblablement le
contexte originel dans lequel une
activité physique préfigurant le sport
a pu naître.
Dans les premiers temps, le “sport”
n’est pas un exercice physique mais
est la conséquence de la réponse à
des besoins vitaux comme chasser
pour se nourrir ou se battre pour se
défendre. Ensuite, peu à peu, les premiers loisirs du chasseur apparaissent, la
notion de sport est établie : courir, franchir des obstacles naturels sans que le
hasard ni la nécessité l’y forçat.
Vers 3500 avant J.C. : des basreliefs de la vallée du Nil représentent des
hommes effectuant des exercices de course et de saut et pratiquant la natation
et l'équitation.
Antiquité
La pratique du sport est l'une des caractéristiques majeures de la civilisation
grecque antique.
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Historiquement, les Jeux sont instaurés afin de donner une unité au monde
hellénique, alors fragmenté en citésétats, constamment en guerre. La
mythologie se mêle à l’histoire, et on explique souvent les événements vécus à
cette époque comme des conséquences de l’intervention des dieux. Ces Jeux ont
lieu tous les quatre ans. Cette période de quatre années prend le nom d’
“Olympiade” et sert même de système de datation: le temps ne se compte pas
en années, mais en Olympiades. C’est dire l’importance des jeux. Importance qui
ne se dément pas aujourd’hui.
Moyenâge
La plupart des sports médiévaux, conçus comme un entraînement à la guerre,
étaient violents. On voit ainsi s’ajouter à la chasse le tir à l’arc, les joutes, Les
jeux de balle, et bien sûr les tournois.
Renaissance
La Renaissance redécouvre les vertus éducatives du sport et, de Montaigne à
Rabelais en passant par Girolamo Mercuriale, tous les auteurs à la base du
mouvement humaniste intègrent le sport dans l'éducation (par exemple
Gargantua). C’est la grande époque des joutes équestres et du jeu de paume.
XVIII et XIXèmes siècles
Le XVIIIe siècle voit le déclin du jeu de paume et l'arrivée, ou plutôt le retour,
des courses hippiques qui s'imposent comme le sport roi des XVIIIe et XIXe
siècles.
Depuis le XXème siècle
Le XXe siècle est devenu le siècle du spectacle sportif de masse et de la
démocratisation des loisirs sportifs.
Le football devient ensuite et reste encore aujourd'hui l'incontestable sport
“numéro un” sur la planète.
Audelà de ce tableau général coexistent des nuances régionales parfois très
marquées.
Ainsi, le football tient une place secondaire dans les pays de l'ancien empire
britannique. En revanche, ils cultivent les autres sports que soutenait jadis la
bonne société anglaise, du tennis au hockey sur gazon en passant par le rugby
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et le cricket. Le cricket a ainsi un statut national dans
des pays comme l'Inde ou le Pakistan.
De même, l'Amérique du Nord a donné naissance à
plusieurs sports, le hockey sur glace et le basketball
au Canada, le baseball et le football américain aux
ÉtatsUnis, parvenant ainsi à échapper à la vague du
football.
1.3. CONTEXTE
La croissance par an du marché mondial du sport,
prévue par PwC, était de +3,7% et le CA prévu était
de 145,3 milliards de dollars pour l’année 2015.
Une belle croissance pour un gigantesque marché,
dont la France sait tirer un bon profit compte tenu du
nombre d’événements qu’elle accueille. Les 3 années
à venir vont voir se dérouler pas moins de 14
événements d’envergure internationale, sans
compter tous les événements de récurrence annuelle.
L’infographie cicontre recense ces événements
“gagnés” qui sont autant de dossiers de candidatures
portés, financés et réussis pour l’hexagone.
L’excellence de ses organisations couplée aux
arguments touristiques font historiquement de la
France une terre d’accueil du sport universellement
reconnue.
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1.4. CIBLE ET ACTEURS
On distingue deux catégories de cibles, chacune d’elles ayant des ramifications
importantes. Les messages à transmettre sont donc à destinataires multiples et
doivent être portés sur les canaux adéquats. Ceci suppose une réflexion
approfondie et anticipée de la stratégie.
la cible “business” (BtB et BtC)
Sponsors
Médias
Collectivités
Participants (inscriptions)
Fédérations
Equipementiers
la cible spectateurs, BtC
Téléspectateurs
Internautes
Spectateurs (payants ou non)
Cette cible spectateurs est généralement bien segmentée, aujourd’hui souvent
au moyen de personas afin d’adapter et d’affiner les messages.
Un événement sportif est aussi un écosystème requérant de nombreux acteurs :
les sportifs
les clubs, les équipes, les fédérations
les organisateurs d’événement
les sponsors
les médias
le public
Tous les intérêts sportifs et financiers sont liés.
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1.5. FINANCEMENT
Selon qu’on parle d’un événement grand public ou d’un événement
professionnel, il y a deux business model principaux :
Evénement grand public : les recettes sont principalement basées sur les
inscriptions et le sponsoring
Evénement professionnel : les recettes sont principalement basées sur les
droits versés par les collectivités accueillant des étapes (Dakar, Tour de
France), le sponsoring, la billetterie et les droits média et, dans certains
cas les frais d’inscription des athlètes ou équipes.
Ceci étant dit, chaque événement a son business model bien à lui.
Le modèle économique du Dakar par exemple comporte 3 entrées principales :
Inscriptions des concurrents : 50%
Participation des pays et collectivités : 40%
Sponsoring : 10%
Le Tour de France quant à lui possède un modèle économique unique (un des
rares événements sportifs sans billetterie), principalement axé sur la cession des
doits TV (estimation 55% des recettes), le sponsoring (estimation 35% des
recettes), et les droits d’entrée des villesétapes (estimation 10% des recettes).
En revanche, le Marathon de Paris repose davantage sur la vente des dossards
que sur le sponsoring.
A ceci s’ajoutent des recettes d’ “hospitalité” (restauration et merchandising) et
de produits dérivés pour la plupart des événements.
Les principaux financeurs des grands événements sportifs sont donc les médias,
les Marques, les collectivités et les participants inscrits.
14
1.6. RETOMBÉES ÉCONOMIQUES
Les retombées économiques des grands événements sportifs ont de nombreuses
origines et expliquent la course aux candidatures que se livrent les pays ou les
collectivités.
Mais les retombées économiques prévues peinent parfois à équilibrer les
dépenses dont les seuils fixés explosent dans bien des cas. Selon l’article du
Figaro.fr “Paris 2024 : l'organisation des JO estelle rentable ?” paru le
23.06.15: “pour les JO de 2012, Londres avait avancé 4,8 milliards de budget
initial qui s'étaient transformés en 11 milliards. Pékin, quatre ans plus tôt, avait
vu sa prévision de 2,6 milliards d'euros s'envoler à 32 milliards…” et le Figaro
d’ajouter : “Pourtant, en juillet 2013, Londres annonçait être gagnante
économiquement avec 11,5 milliards d'euros de retombées économiques, un an
après les Jeux olympiques de 2012”
Il est reconnu que les JO s’avèrent peu rentables et sont souvent suivis par des 1
problèmes liés aux infrastructures. Que faire en effet d’une piste olympique de
bobsleigh (le débat a été sanglant autour de ce problème à Albertville) ou d’un
stade si vaste qu’il est impossible de le remplir (le Nid d’oiseau à Pékin qui peine
à occuper ses 99 000 sièges) ? Mais audelà des problèmes de rentabilité
mesurée, les JO restent une magnifique vitrine pour le pays organisateur et ce
point fait se multiplier les candidatures. En réalité, les retombées, qui sont
difficilement mesurables, perdurent des années après l’événement, notamment
dans le secteur du tourisme. De plus, c’est le savoirfaire et la crédibilité
technique (voire technologique) locaux qui sont mis en avant, et là encore, il est
peu aisé d’en estimer les retombées.
La coupe du monde de rugby, quant à elle, fait partie des événements
communément reconnus comme étant rentables. Il y a plusieurs explications. La
première est d’ordre idéologique. Le rugby possède des valeurs très fortes à
laquelle sponsors et (télé)spectateurs n’ont aucun mal à s’identifier. La dernière
édition qui s’est jouée en septembre au Royaume Uni est trop proche pour que
les calculs soient terminés. Mais les prévisions étaient au vert. Courrier
International, dans son article “La Coupe du monde de rugby, plus rentable que
les Jeux olympiques ?” avait sorti la calculette pour annoncer le 17.09.15 : “Le
1 Paris 2024 : L’organisation des JO estelle rentable ? http://www.lefigaro.fr/ Maxime Brigand 23.06.15
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tournoi devrait rapporter 650 millions de livres [889 millions d’euros] de recettes
dont les deux tiers proviennent des droits de diffusion, explique le journal
économique. De plus, l’impact économique pour le pays est estimé à 2,2
milliards de livres [3 milliards d’euros], dont 1,1 milliard de livres [1,5 milliard
d’euros] profitera au secteur du tourisme et du voyage dans le pays.”
Les grands événements sportifs sont donc aussi synonymes de gros sous et les
retombées, bien que différentes d’un événement à l’autre peuvent impliquer les
institutions suivantes :
Collectivités :
création d’emplois
travaux (constructions, réhabilitation de structures sportives)
Fédérations : création de licenciés (engouement)
Médias : vente d’espace publicitaire (4,5 millions de dollars le spot de 30
secondes pendant le Super Bowl…)
Equipementiers sportifs
Structures sportives (augmentation de la fréquentation)
Créateurs / organisateurs / propriétaires d’événements
Sportifs (contrats publicitaires notamment)
Agents de sportifs
...
1.7. RETRANSMISSION TV
La nouvelle technologie ne rendra pas les technologies existantes (TV, radio)
obsolètes, c’est un choix supplémentaire pour le consommateur.
Frédéric Vaulpré, directeur d’Eurodata TV Worldwide, note que : “la saison
2014/2015 démontre que, même sans JO ni Coupe du Monde de Football, la
télévision reste le support principal pour suivre en direct les grands rendezvous
sportifs. Les autres écrans servent davantage à compléter et enrichir
l'expérience TV. Le sport ne cesse de battre des records d’audiences et l’offre se
diversifie : le football se conjugue au féminin et les sports locaux se font une
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place parmi les compétitions internationales. De bon augure à l'aube des Jeux
Olympiques de Rio !”. Non, la télé n’est pas morte !
Dans son blog Hell Of Sport, Boris Helleu, Enseignant Chercheur à l’Université de
Caen Basse Normandie a listé les chiffres marquants d’audience de l’année
2015:
“Eurdodata TV Worldwide a révélé en novembre 2015 les principales données du
Yearly Sport Key Facts. Que fautil retenir de cette année 2015 ?
Extraits du communiqué :
Le football est toujours le sport le plus suivi : dans 20 des 46 pays
étudiés, un match de foot est en tête des audiences.
La finale de la Coupe du Monde féminine (EtatsUnis Japon) a été suivie
par 22,6 millions d’Américains (23,6% de PDA) sur Fox et par 3,7 millions
de Japonais dans la région de Kanto sur Fuji TV (38,7% de PDA)
En France, le quart de finale FranceAllemagne a réuni 4,1 millions de
téléspectateurs sur W9 (25,3% de PDA). C'est un record d’audience
historique en France pour une chaîne de la TNT tous programmes
confondus.
Rugby : la finale des All Blacks face à l’Australie a réalisé une part
d'audience de 96,9 % sur Prime et Sky Sports 1.
Le Super Bowl est à nouveau l'évènement sportif le plus suivi de l’année
aux EtatsUnis : 115 millions de téléspectateurs sur NBC.
Boxe: le "combat du siècle" Pacquiao / Mayweather, a réuni le 3 mai
dernier 8,9 millions de Philippins, réalisant plus de 85% de PDA (diffusion
en simultané sur 4 chaînes).
Le volley féminin en Thaïlande : le match Chine / Thaïlande, comptant
pour le Grand Prix Mondial de Volley, a rassemblé 8,7 millions de
téléspectateurs (43,4% de PDA) le 16 juillet sur Channel 7.
En Irlande, les sports gaéliques représentent 33% de l’offre sportive
télévisuelle et 48% de la consommation.”
Le sport ne peut s’envisager qu’en direct et la télévision reste le média le plus
populaire et le plus évident pour suivre une compétition.
L’infographie cidessous donne la mesure des niveaux d’audiences mondiales sur
les plus grands événements sportifs. Elle est à consulter comme une évaluation
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basée sur des fourchettes d’audiences
moyennes relevées (avec parfois
d’importantes variables selon les
sources) mais son approche reste
représentative de la réalité. Attention,
certains événements ne durent que
quelques heures et d’autres plusieurs
semaines, c’est une donnée à prendre
en considération : il convient d’ajouter
à la popularité de l’événement sa
durée pour appréhender ces chiffres.
A cela s’ajoute toute la panoplie
digitale qui sera détaillées dans les
chapitres suivants.
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1.8. TENDANCE GÉNÉRALE
Plusieurs tendances accompagnent les grands événements sportifs :
Spectacle
Plus qu’une tendance, c’est une réalité pour bon nombre de grands événements,
le spectacle (autre que celui de la compétition) a pris une place importante.
Celuici s’exprime par les cérémonies d’ouverture ou de fermeture des Jeux
Olympiques, des coupes du monde de football, ou les concerts accompagnant le
Super Bowl, etc. Un événements sportif populaire est une grande fête, très
attendue, qu’il convient d’accueillir dignement.
Bienêtre de la population
Une autre tendance est dictée par le contexte économique général qui pousse à
consommer davantage de spectacles populaires. Le bienêtre de la population
est même régulièrement mesurée par certains indices quand elle gagne une
coupe du monde ! La notion de “vivre ensemble” est toujours mieux notée après
une victoire, la population étant réunie sous un même drapeau porté par des
icônes victorieuses. La réussite sportive populaire a donc un impact politique et
social important. Mais l’organisation des événements aussi a son importance
politiquement et c’est une autre des raisons qui poussent les villes ou les pays à
être candidats.
Dans l’intimité des athlètes
Les événements proposent aux spectateurs d’être de plus en plus voyeuristes
(présence des caméras dans les vestiaires après un match de foot). Il faut
surprendre et immerger de plus en plus le spectateur : le sensationnalisme
prévaut et la morosité conjoncturelle fait naître un besoin de sensations fortes.
Le digital a toute sa place dans cette tendance générale, voire c’est par le digital
qu’elle peut exister. Les hashtags officiels des événements, les comptes des
sportifs sur les réseaux sociaux, permettent un accès direct à des informations
et des contenus autrefois inexistants.
19
Héroïsme
La notion d’héroïsme est une composante même du sport, a fortiori d’une
compétition. Si le sportif amateur a besoin de performances pour se reconnaître,
voire être reconnu comme un héros, le sportif professionnel se pose en modèle
dès lors que ses compétences sont reconnues comme supérieures à celles de
celui qui le supporte.
C’est un courant sur lequel surfent Go Pro et Red Bull. “Be a hero” est le slogan
de Go Pro dont les caméras les plus vendues sont la ligne “Hero”. Ils sont
leaders dans la vidéo virale (gopro.com regorge de vidéos contributives). Red
Bull possède même sa chaîne sur Youtube : RedbullTV.
On est dans le partage des expériences, et le nombre de vues potentielles
galvanise les candidats à l’exhibition.
Il y a les buzz orchestrés par les marques (GoPro) et la communication virale qui
échappe aux marques, aux organisateurs ou aux athlètes grâce à tous les outils
de partage actuels. Ceci entraîne de possible problèmes en terme de droits mais
surtout de maîtrise d’image d’un événement.
L’énorme succès des Mud Day, et avant eux les incontournables Spartan Race
surfe sur cette vague d’héroïsme en proposant à ses compétiteurs (amateurs)
des courses d’obstacle qui vont audelà du dépassement de soi. Epreuves de
force, progression dans la boue, kilomètres de running, escalade, le programme
est sévère et attire toujours plus de candidats au très convoité titre de finisher.
Amélioration de l’expérience client
Alors qu’on ne peut repousser les murs d’un stade pour accueillir davantage de
spectateurs, on peut néanmoins progresser encore et toujours dans l’expérience
offerte au client, qu’il soit spectateur physique, téléspectateur ou internaute.
C’est aussi sur son expérience que sera évalué l’événement. Améliorer
l’expérience client est donc une forte tendance actuelle et une des
préoccupations majeures des organisateurs. Par conséquent, organisateurs et
diffuseurs proposent de plus en plus d’expériences propres à satisfaire l’appétit
des spectateurs et mécaniquement, les startups dans le domaine pullulent. C’est
le cas par exemple d’Omnilive qui, par l’installation de 4 caméras, offre la
possibilité au téléspectateur d’être son propre réalisateur en choisissant ses
angles de vue.
20
Cette tendance sera détaillée en partie 2.
Les maîtremots de cette tendance : partage, expérience, participatif,
engagement.
Thématiques
Comme dans tous les domaines, il y a des phénomènes de mode. Et ceci se
vérifie sur les événements destinés aux amateurs qu’il s’agit de séduire, l’offre
étant pléthorique. Et parmi toutes les thématiques actuelles, et pour n’en choisir
qu’une afin d’illustrer ce point, on assiste depuis quelques années à l’émergence
du fun run. Courir, c’est excellent pour la santé, mais c’est aussi pénible,
fastidieux voire lassant. Ce qu’ont parfaitement compris les Marques et les
organisateurs qui, pour élargir leur cible à ces sportifs moins motivés, proposent
de plus en plus d’événements où le plaisir, l’amusement, sont le point central, et
la course à pied n’est plus qu’un moyen d’accéder à ce plaisir. Si une jeunesse
décomplexée veut manifester sa joie de vivre en se faisant arroser de pigments
colorés et finir la fête dans un festival de musique, la Color Run répond à ses
attentes. Si une famille veut se fondre parmi 6000 runners déguisés en Père
Noël, elle aura l’embarras du choix parmi toutes les corridas de Noël. La petite
dernière, à venir le 14 février 2016, la Odlo Cristal Run, proposée par ASO,
proposera un circuit festif à travers Paris avec à l’arrivée le vin chaud et une fête
qui se poursuivra dans l’aprèsmidi.
Et bien sûr, par définition, ces événements “fun” sont une mine à contenus tant
ils sont visuels : photos et vidéos se propagent sur les réseaux, autoalimentant
le phénomène.
Côté BtB, une tendance se confirme depuis plusieurs années sur les événements
de moyenne envergure c’est le “naming”. La vente du nom, de l’identité même
de l’événement à un sponsor. Ce qui donne en lieu et place de l’Open de France
(Golf), l’Alstom Open de France ou encore le Schneider Electric Marathon de
Paris.
Open de France est la marque tandis qu’Alstom Open de France en est devenu le
produit. Un produit à durée de vie aussi limitée que les contrats de sponsoring
qui lient les deux entreprises. En cas de disparition du sponsor, un autre produit
sera lancé avec un nouveau sponsor, un nouveau naming.
21
Cette tendance de naming ne peut pas s’appliquer aux événements majeurs tels
que définis par Antoine Aubour. Les Jeux Olympiques ne pourront jamais
s’appeler les “Red Bull Jeux Olympiques” pour la première et évidente raison qui
est la capitalisation très forte sur le nom, l’identité, l’histoire de l’événement. Le
Tour de France ne pourra jamais s’appeler le Orange Tour de France. Quelle
évidence pourraiton envisager de créer dans les esprits entre Orange et les
images de nos plus lointains souvenirs de la grande boucle ? La “récupération”
risquerait de dégoûter les aficionados. La seconde raison, dans une vision plus
business, est que la place de sponsortitre est enviée par tous les gros sponsors
de la compétition et qu’une marque élue pourrait faire se détourner les autres,
pourtant indispensables à l’existence de tels événements.
Cette notion de naming est aujourd’hui également fortement répandue sur les
stades et arenas.
MA VISION
Existant depuis la nuit des temps, les grands événements sportifs sont
nécessaires à l’équilibre des sociétés et des individualités, nourrissant
autant ceux qui les disputent que ceux qui les soutiennent. Facteurs de
lien social, miroirs d’un bienêtre physique qui s’espère contagieux, ils
constituent avant tout un formidable ressort économique aux
ramifications parfois denses. Si les événements amateurs sont sensibles
aux modes, la plupart des événements sportifs sont ancrés dans une
tradition et une histoire solides. Bien qu’avant tout suivis à la télévision
(la moitié de la planète y suit la FIFA World Cup et à peu près autant y
suit le Tour de France), l’avènement de l’ère digitale a apporté des
solutions permettant de redynamiser des business models jusquelà
centrés sur les médias traditionnels. Et dans la même dynamique,
l’expérience client a été profondément modifiée et ne cesse de
s’améliorer, qu’elle soit dans ou hors enceinte sportive, sur place ou a
distance.
22
PARTIE 2 ETRANSFORMATION DES GRANDS ÉVÉNEMENTS SPORTIFS
“SPORT TO WEB & WEB TO SPORT”
Une tendance générale chez les organisateurs des grands événements sportifs
est l’attachement des mentalités aux modèles traditionnels. Les deux principales
raisons expliquant cette attitude sont le poids des institutions (les fédérations
notamment) portant les valeurs d’un sport qu’elles craignent de malmener en
sortant du sentier habituel, ainsi que l’histoire propre de chaque événement sur
laquelle on souhaite capitaliser et qu’on ne veut pas prendre le risque d’écorner.
Ces risques en revanche ne sont pas à la charge des sponsors qui globalement
montrent une agilité et une créativité digitale bien supérieure à celle des
organisateurs. Ces derniers sont dans l’ensemble conscients de leur retard, et
accélèrent le développement des départements “digitaux” afin d’intégrer et
déployer de nouveaux outils et des profils 3.0.
En face de ces grands événements, il y a deux types de spectateurs : ceux qui
“consomment” l’événement dans son acceptation traditionnelle, c’est à dire un
match, des images retransmises, un score, point final. Et puis il y a les
“consomm’acteurs”, les “spect’acteurs” digitaux convaincus (et pas seulement
les plus jeunes), qui iront chercher tout le contenu supplémentaire avant (le
chiffre d’affaire en billetterie de l’OL réalisé en ligne représente déjà 70% du
chiffre d’affaire en billetterie global) , pendant et après le match, qui échangent
autour de leur passion sur les réseaux. Ces supporters digitaux sont de plus en
plus nombreux (+15% de VU sur le site web de l’OL entre septembre 2014 et
septembre 2015).
Pour ces spectateurs digitaux convaincus, l’image reçue est déjà digitale, celleci
étant un mix de l’événement luimême, des outils qui l’accompagnent et de la
communication des sponsors. Les événements sont donc déjà “etransformés”,
même si ils ont encore une vraie marge de progression, et on s’achemine vers
un modèle “sport to web & web to sport” : l’événement sportif se vit désormais
aussi sur le web, et le web et sa panoplie d’outils ouvre de nouvelles
opportunités qui mènent à l’événement et l’enrichissent. Un cercle vertueux pour
accompagner une croissance économique reposant sur de nouveaux modèles.
23
2.1. UN NOUVEAU MODE DE COMMUNICATION
L’émergence des nouveaux outils digitaux a profondément modifié les liens
unissant toutes les entités de l’industrie du sport et s’accompagne d’une
déferlante d’opportunités qui se traduit souvent par une surexploitation de la
cible consommateur.
24
2.2. DE NOUVEAUX OUTILS
2.2.1. Stades connectés
La question des stades connectés, c’est l’enchantement ou le grand trouble,
selon qu’on regarde d’un côté ou de l’autre de l’Atlantique. Les américains,
comme souvent, donnent la tendance et se posent sans doute moins de
questions que les européens à propos des nouvelles technologies. Ils
investissent donc massivement sur l’avenir et constituent aujourd’hui LA vitrine
des stades connectés.
Leur catalogue est plutôt fourni avec une petite dizaine de stades déjà
opérationnels : Sleep Train Arena (Sacramento), Levi’s Stadium (Santa Clara),
AT&T Stadium (Arlington), Sun Life Stadium (Miami), Everbank Field
(Jacksonville), Barclays Center (Brooklyn), Quicken Loans Arena (Cleveland), et
deux grands stades à venir : MercedezBenz Stadium (Atlanta) en 2017, et le BK
Stadium.
Voir l’infographie réalisée par la Northwestern University’s School of Professional
Studies Team (Annexe 1).
Et la France ? Seulement 2 stades connectés, à Nice (l’Allianz Riviera) et à Lyon
(le Grand Stade), ainsi que le Palais Omnisports de Bercy récemment restauré et
baptisé l’AccorHotels Arena, et une impossibilité de rejoindre un petit 3G au Parc
des Princes ou même au Stade de France ! La raison est simple et exprimée ici
avec une certaine amertume par Boris Helleu :
“En France, il n’y a que 3 ans qu’on a commencé à se poser la question des
stades connectés. J’ai animé une table ronde sur le sport connecté à l’occasion
de la manifestation Sport Numericus, qui réunissait les gros acteurs des stades
en France. La question des stades connectés s'est posée car on savait qu’on
allait accueillir l'Euro 2016. Et à part Lyon, parmi tous les projets, aucun stade
connecté n’était prévu. Qu'estce qu'un stade 2.0 ? C'est un stade qui va
permettre à ses fans de se connecter en wifi ou de bénéficier d’une couverture
3G ou 4G qui tient la route. Et ça veut surtout dire que derrière la technologie
proposée, c’est toute une installation filaire, c'est un spot wifi a implémenter
dans le stade. Et on n’a que l'exemple nord américain pour prendre la mesure
25
de ce qu’est un stade connecté : grâce au MSR (Mobile Sport Report), on connaît
le volume des données générées en To à l'occasion d'un événement sportif. Il y
a parfois des records audelà de 5 To par match ce qui est énorme si on part du
principe qu’une photo Instagram c'est 1 Mo… Avec parfois des pics de
connexions simultanées en wifi de plus de vingt mille personnes. Aux ÉtatsUnis
on est conscient de ça, et on sait que dans le coût d’un nouveau stade le budget
dédié à la techno sera quasiment à 10% du coup du stade. La construction des
stades les plus récents aux ÉtatsUnis ont coûté à peu près un milliard de
dollars. Le BK Stadium par exemple c’est 150 millions de dollars rien que pour la
techno : il faut amener la fibre, mettre les écrans, installer les spots wifi, mettre
les antennes pour les couvertures 3G et 4G et tout ça représente des coûts
importants. Et en France ce qu'il se passe c’est que tout le monde se regarde
dans les yeux pour savoir qui va payer. On sent bien qu'il faut faire quelque
chose qu'il y a une demande mais estce que c'est au propriétaire du stade de
payer ? Au club occupant ? A l'organisateur de l'événement ? Et tout le monde
conclut que ce n’est pas à lui de payer. Le Grand Stade de Lyon sera connecté,
et le Stade de France qui a été raillé pendant des années parce qu’il était
impossible d’envoyer un sms devrait faire des efforts, et voilà à peu près où on
en est. D’ailleurs du point de vue de l'expérience fan c'est un paradoxe ;
maintenant la connectivité totale d'un usager est normale : chez soi, au boulot,
au Starbucks, au McDo sur une petite place publique on a le wifi. Donc on peut
se connecter partout. Partout, sauf dans un stade qui est l’endroit où le fan a le
plus besoin d’être connecté, car un match génère de l’émotion. Et les médias
sociaux c’est le partage de l’émotion. Donc le seul endroit où on ne peut pas
partager son émotion c’est dans un stade car le wifi est inexistant ou insuffisant.
Et c'est surtout consternant par rapport à l'accueil des clients étrangers : un
supporter anglais ou allemand qui a l’habitude du stade connecté, il arrive en
France et on lui dit qu’il n’y a pas de wifi gratuit et que dans le meilleur des cas il
pourra essayer de se connecter sur la 3G ! Et comme il est à l'étranger ça va lui
coûter une fortune donc il ne peut pas twitter ou mettre sa photo sur Instagram.
C'est affolant. Ça s'explique d'une part par la frilosité des acteurs qui ne savent
pas trop comment financer tout ça et d'autre part par les fans français qui selon
plusieurs études seraient les moins actifs sur les réseaux sociaux en terme de
sport. ce qui ne veut pas dire qu'ils ne le soient pas. Ça permet de justifier que
26
la demande n'est pas si forte que ça et ça n’encourage pas les acteurs à équiper
les stades”.
Même constat pour Laurent Colette, directeur marketing et commercial du FC
Barcelone, qui affirme que l’on est encore à “Jurassik Park” en termes de
connectivité des enceintes sportives et que le but est aujourd’hui “de connecter
100 % du stade et des alentours”. Il indique également que “la moitié des gens
au Barça vont au stade et ne consomment aucune boisson ou nourriture,
souvent parce qu’il y a trop de queue. Le but c’est donc aussi de leur permettre
de commander et de consommer sans queue”.
A titre d’exemple, et pour tenter d’imaginer les coûts en jeu, il a fallu au Levi’s
Stadium (70 000 places donc comparable au Stade de France) 650 km de câbles
de fibre optique, et 680 points d’accès wifi, pour permettre aux fans de se
connecter à 40 gigabit par seconde…
La solution donc à ce problème de support des coûts serait donc le naming, à
l’instar du MercedesBenz Stadium (75 000 places) qui ouvrira ses portes à
Atlanta (US) en 2017. L’addition pour Mercedes s’est élevée à 1,2 milliards de
dollars pour un contrat valide jusqu’en 2042 . L’excellence a un coût… 2
Alors qu’estce exactement qu’un stade connecté ? C’est une enceinte sportive
réunissant tous les ingrédients nécessaires à une communication fluide “Web to
Sport” et “Sport to Web”. En d’autres termes, il s’agit d’un lieu de spectacles
offrant une connexion wifi solide et pouvant supporter plusieurs dizaines de
milliers de connexions simultanées, mais aussi des lieux de vie (restaurant,
stores, loges, etc.) 2.0. L’idée d’aujourd’hui est, comme pour les grands centres
commerciaux, d’attirer un public qui restera beaucoup plus longtemps au stade
que pour le seul match.
2 MercedesBenz Stadium: Automaker inks naming rights to Atlanta’s $1.2 billion venue http://www.digitaltrends.com/ Andrew Hard 24.08.15
27
Pour mieux comprendre, voici la liste des équipements prévus dans le futur
MercedesBenz Stadium :
un écran 360° sous le toit rétractable
19 500 m2 d’écrans de scoring
700 points de vente
2000 écrans répartis sur tout le spot
fibre optique
DAS (antenne)
L’équipement technologique a été confié à IBM qui souhaite procurer aux
visiteurs une expérience exceptionnelle, de leur arrivée à leur départ, en
poussant notamment des informations parking à l’arrivée et des notifications de
trafic au moment du départ . Du côté des Falcon, on n’hésite pas à annoncer
qu’avec ce “parcours client” sans couture, le MB Stadium fournira la meilleure
fan expérience au monde.
Certains acteurs de l’industrie du sport à l’inverse de la tendance observée,
redoutent une digitalisation trop complète du supporter et craignent, par une
trop grande connexion, de voir 60 000 spectateurs les yeux dans leur
smartphone et non plus rivés au spectacle sportif.
En France, Veronica Grandi (FFT) nous a confié les questionnements de la
Fédération quant à la connectivité du nouveau stade Roland Garros
«Voulonsnous oui ou non un stade connecté ? Estce que Roland Garros y
perdrait son âme ? Estce qu’on veut que les spectateurs regardent le match ou
qu’ils suivent d’autres matchs ? Le problème existe déjà, dans une autre
mesure, avec les loges. Les spectateurs sont présents dans l’enceinte mais
beaucoup ne sont pas à leur place».
Aux Pays Bas, c’est un tollé des supporters qu’a dû essuyer le PSV Eindhoven
(en août 2014) lors d’un match contre Breda. Le Club avait mis à la disposition
du public du Wifi gratuit, ce qui a attisé la colère des fans au point de brandir
une banderole “Fuck wifi, support the team” ainsi que des sigles wifi barrés de
rouge. Pourquoi cette réaction ? Simplement parce que le football est un sport
populaire, qui se vit avec les tripes, les chants, les palpitations d’un public
envoûté, et qu’envisager la moitié du public dans son smartphone, c’est accepter
28
une part d’embourgeoisement de ce spectacle, ce que les “vrais” fans ne sont
pas prêts à tolérer. Le stade, c’est chez eux et
on y joue selon leurs règles. Et, bien qu’un peu
musclée, la réaction est recevable et en tout
cas comparable à la manière dont est vécue la
multiplication des loges dans les stades, et la
présence de plus en plus prégnante de cadres
en cravate, modérés dans leurs réactions
puisque souvent en représentation business.
Une réaction qui n’inquiète pas Michel Mimran,
Directeur Marketing du Paris Saint Germain :
“Dans les sciences sociales, il faut beaucoup se
méfier des signaux faibles qui sont ceux qu’on a
envie d’écouter en se faisant croire que ce sont des signaux forts. Si aujourd’hui
on faisait un référendum parmi tous les supporters du monde, et notamment en
Europe, pour savoir s’ils veulent la connectivité ou pas, ces quelques supporters
du PSV Endhoven feraient figure d’un petit village d’irréductibles noyés dans une
masse énorme de gens qui n’attendent que ça. Leur réaction n’est pas
représentative. C’est une réaction de certains supporters qui sont toujours
caractérisés par un très grand conservatisme. Le fait que les supporters dans un
Club en Hollande se mobilisent pour dire qu’ils ne veulent pas le wifi c’est Don
Quichotte contre les moulins à vent.”
Ce débat sur la connectivité des enceintes sportives soulève bien d’autres
questions que celles liées au coût et renvoie même à l’expression d’une fracture
sociale s’exprimant dans les prérogatives des classes populaires qui semblent
bafouées sur leur propre terrain.
Si ces interrogations sont légitimes aujourd’hui, qu’en seratil demain lorsque
nos bébés connectés seront devenus des supporters de foot ?
29
2.2.2. Plateformes
Le centre névralgique d’un grand événement sportif est son site web, souvent
présenté comme une “plateforme”. C’est par elle que transitent toutes les
informations, tous les contenus et c’est sur elle que s’articulent les différents
outils. Les organisateurs l’ont bien compris et même si là encore des progrès
sont toujours possibles, les usagers savent très bien où et comment trouver les
informations.
Les questions qui se posent désormais sont de l’ordre de l’optimisation et
concernent les architectures et l’ergonomie :
Comment définir et atteindre les KPI d’audience de son site ?
Quels choix effectuer en effet pour présenter plusieurs produits
(événements) pour un même organisateur ?
Comment organiser la visite d’un site web lorsque les cibles sont multiples
(grand public, équipes professionnelles, sponsors, collectivités, etc.) ?
Comment optimiser son référencement ?
Pour répondre à ces problématiques, la plupart des organisateurs possédant
plusieurs produits ont opté pour une architecture pensée sur plusieurs sites.
Etude de la plateforme ASO et de ses sites satellites :
Il existe 2 sites “généraux” pour ASO et 1 site dédié à chaque événement.
A. un site général BtB
Présentant l’entreprise, ses domaines
d’activité et ses produits, ainsi que les
offres de sponsoring, hospitalité, media et
merchandising : www.ASO.fr
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B. un site général BtC
Dédié aux inscriptions aux événements
grand public, aux entraînements, résultats,
etc. ASO Challenges est également une
plateforme communautaire :
www.asochallenges.com
C. Les sites des événements professionnels
accessibles depuis la plateforme principale, via une page dédiée sur la
plateforme puis un lien sortant.
un site dédié au cyclisme sous la bannière
du Tour de France et regroupant les 17
épreuves de cyclisme :
www.letour.fr
ASO a capitalisé sur la plus grande
compétition du monde pour promouvoir
ses autres courses cyclistes.
un site dédié à l’Alstom Open de France
(Golf)
un site dédié au Lacoste Ladies Open
de France (Golf)
Les 2 compétitions de golf ont des sites
bien distincts, vraisemblablement vis à vis
des sponsors titre.
31
un site dédié au Dakar
un site dédié au Tour de France à la
Voile
D. un site pour chacun des événements “de masse”
32
Les intérêts de ce choix de multiplication des sites sont multiples :
Permet des ambiances personnalisées
Permet de cloisonner les univers, en respectant la segmentation de la
cible. En effet, vouloir faire basculer un fan du Tour de France sur l’Open
de France n’a rien d’induit ?
Permet de mettre en ligne une grande quantité de contenus
D’un point de vue plus technologique, pourquoi autant de sites ?
Permet de doper le référencement naturel en respectant la logique et les
préférences de Google :
thématique unique sur chaque site
liens entrant et sortant pertinents
maillages internes et externes
Cela relève également d’un logique de Marque (produit) qui cherche à éviter la
confusion au milieu d’autres Marques.
On pourrait se poser la question du référencement naturel déjà excellent sur des
marques comme le Tour de France ou le Marathon de Paris. Mais justement
parce que ces marques sont très célèbres, il est essentiel de veiller à sortir
comme le premier résultat de Google. Et si ceci passe par un Quality Score
excellent (résultant d’un bon référencement notamment), il convient aussi de
faire l’achat des bons mots clés. Car outre les informations pratiques, la plupart
de ces sites contiennent aussi des boutiques. Le développement du nombre de
VU est donc essentiel au développement du chiffre d’affaires. Et même les
informations pratiques, dans des cas comme le Tour de France sont essentielles.
En effet, plus l’information sera claire et rapidement disponible, plus facile sera
l’accès sur les routes du Tour, plus nombreux sera le public et plus la caravane
publicitaire sera valorisée…
Mais cet achat de mots clé est souvent lié à la saisonnalité de l’événement.
Pourquoi acheter “cyclisme” en plein hiver pour le Tour de France ?
33
Le cas d’ASO n’est pas isolé. C’est un format que l’on retrouve pour la plupart
des grands événements, y compris chez les médias. Yann Lemort est formel, le
meilleur des exemples en terme de référencement est celui de l’écosystème de
l’Equipe : il salue “une multitude de sites, avec un excellent maillage interne et
externe, un contenu mis à jour quotidiennement” contribuant à un
référencement parfait.
Mais si l’architecture générale est la bonne, ASO souhaiterait faire progresser le
site ASO Challenges. L’UX est pointé du doigt. L’idée est à terme de proposer un
parcours plus simple aux membres de la communauté et par conséquent d’éviter
un grand nombre d’appels téléphoniques de clients perdus. Leurs regards se
tournent vers Njuko.com dont ils aimeraient s’inspirer pour développer une
technologie approchante.
2.2.3. Médias sociaux
Principaux canaux investis par les organisateurs, les clubs, les sportifs, les
médias pour toucher leurs publics, les médias sociaux ont radicalement
transformé la communication des grands événements sportifs. Le champs des
possibles s’est considérablement développé, et l’utilisation qui est faite de ses
réseaux par les professionnels est quotidienne. C’est un fait sans précédent,
permettant une relation suivie et souvent même personnalisée entre une Marque
et un consommateur. Une étude réalisée par Sporting News Media montre que
25% des supporters se servent quotidiennement de Facebook ou Twitter pour
suivre leur sport favori. Les chiffres sont saisissants : Facebook revendique 650
millions d’inscrits fans de sport, quand à Twitter, la nomination de Zidane au
Real Madrid l’a secoué d’1 million de tweets !
Dans une interview donnée à ecofoot.fr en novembre 2015, David Banget, Chief
Digital Officer de l’Olympique Lyonnais a indiqué : “L’objectif principal de nos
réseaux sociaux est de créer un lien privilégié avec nos supporters. C’est
essentiel dans la stratégie du club d’avoir un canal de communication direct,
sans intermédiaire et c’est ce qui est apprécié. L’instantanéité des réseaux
sociaux est un vrai point fort en terme de communication, nous permettant de
34
rebondir à chaud sur l’actualité et de faire rayonner chaque événement en
dehors du stade.”
Et pour chiffrer ses assertions, Stéphane Rakoto, responsable de la
communication digitale du Stade Français, nous livre : “un
post performant sur Facebook fait entre 500 et 1000 likes.
Sur Twitter, c’est 50 RT”.
Pour juger de l’importance de ces audiences digitales, il a
été établi un Top 10 des comptes Twitter des événements
sportifs les plus suivis (source
: SocialBakers) au 11.01.16.
Sans réelle surprise, la FIFA
World Cup y prend deux places
dont la tête du classement,
deux places dont la deuxième
sont occupées par UFC (arts
martiaux libres qui s’appuient
sur une solide stratégie digitale
MMA), le football américain
avec les Collège Game Day
sont à la 6ème place, juste
devant les JO de Londres et le
golf occupe la 10ème place
avec le PGA Tour. Le
savoirfaire français est
doublement présent avec le
Tour de France et Roland
Garros qui occupent
respectivement la troisième et
la huitième place.
35
En revanche plus d’organisateur français dans le top 10 des pages Facebook
mais une très forte présence du football et une confirmation de la deuxième
place pour UFC. Non présents dans le classement Twitter, les X Games (sports
extrêmes) et Spartan Race (courses d’obstacles) ont bien leurs fans sur
Facebook.
Acquérir de telles communautés représente une série d’avantages dont chacun a
sa propre mission dans la stratégie de communication digitale d’un événement
sportif :
Faire du reach sur le(s) site(s) web
Créer une nouvelle audience : ne pas se résoudre aux spectateurs et
téléspectateurs en allant chercher les internautes.
Hypersegmenter sa communication par la collection de données
Permettre de suivre l’événement partout, tout le temps en le rendant
ATAWAD
Créer une communauté et développer un sentiment d’appartenance
Annualiser l’audience d’un événement ponctuel
...
Parmi les techniques d’animation des réseaux, le live tweet est pratiqué sur
Twitter, sans doute le réseau le plus “chaud”, le plus instantané, et qui se prête
le plus à la dimension immédiate d’une compétition sportive. Le live tweet
permet aux fans le partage d’expérience et d’émotions mais aussi de faire
monter le hashtag dans le ranking des tendances et donc de ramener des
téléspectateurs qui étaient ailleurs sur le programme qui “buzze”.
Twitter a ainsi annoncé que les tweets au sujet de la #RWC2015 (coupe du
monde de rugby) ont généré 6,8 milliards d'impressions. Les 3 moments les plus
discutés ont été la victoire de la NouvelleZélande en finale contre l'Australie, la
victoire surprise du Japon contre l'Afrique du Sud et l'élimination de l'Irlande
contre l'Argentine en quarts de finale.
La compétition se déroule également
entre les réseaux sociaux, et
notamment entre Facebook et Twitter.
On attend ainsi l’arrivée prochaine des
36
notifications sportives dans l’appli Messenger de Facebook. Il faut lutter face à
Twitter sur le terrain de l’immédiateté. Un test était déjà en cours en novembre
2015 avec les MLB World Series.
Et pour bien marquer son ambition d’entrer sur les terres de Twitter, Facebook
annoncé en janvier 2016 le lancement de son nouveau service : Sport Stadium.
Cette appli réunira sur une même interface statistiques, commentaires d’experts,
posts des internautes, mais aussi des
clubs, ligues, etc. “Pour débuter, l’appli
Sport Stadium ne sera disponible qu’aux
EtatsUnis, que sur iPhone et
uniquement pour le foot US avant
d’ouvrir au basket, soccer et autres
sports. Pour les européens, il faudra
patienter un peu, même si Facebook a
déjà annoncé que la volonté était de
toucher les Fans de sport du monde
entier (près de 650 millions).”
Sportbuzzbusiness.fr
Audelà de la segmentation naturelle induite par le fonctionnement de chaque
réseau (esthétique pour Instagram, immédiat pour Twitter, contenu plus
informatif pour Facebook, etc.), les Marques jouent sur les cibles d’utilisateurs.
Snapchat par exemple permet de toucher les plus jeunes (la moitié des
utilisateurs de l’application ont entre 13 et 17 ans et 31 % ont entre 18 et 24
ans), et séduit de plus en plus de Marques, y compris dans le sport. C’est ainsi
qu’en janvier 2016, la traditionnelle Premier League britannique a fait frémir à
son tour le petit fantôme en proposant à ses fans de faire leur propre reporting
du match Newcastle United vs Manchester United (d’autres expériences avaient
déjà été menées par d’autres ligues, dont la NFL). Pendant 24 heures, tous les
utilisateurs ont eu l’opportunité de regarder les photos et vidéos de
snapchattersreporters qui étaient au match. L’avant, le pendant et
l’aprèsmatch ont ainsi été dévoilés à ces adolescents supporters. De la bière au
pub jusqu’au pénalty visible selon plusieurs angles selon l’emplacement du
snapchatter, c’est toute une expérience partagée sur le réseau “clanique”.
37
Si les médias sociaux sont un canal privilégié de communication entre une
Marque et ses clients, ils servent également de lien entre les fans, dont les
échanges produisent un contenu riche et au fort ROI. Sur les grandes courses de
running par exemple, les informations de timing sont publiées en temps réel sur
le compte Facebook des participants (UTMB, Marathons, etc.).
Au Marathon de Londres le courant est inversé, ce sont les tweets des followers
des marathoniens qui sont diffusés sur des écrans géants au moment où les
coureurs passent (identifiés par une puce RFID).
Les animations de réseaux ne peuvent s’entendre sans la présence d’un ou
plusieurs community managers, véritables clés de voûte de la communication
digitale. C’est un rôle qui requiert une parfaite connaissance du produit et des
valeurs de la “Marque” (sport, fédération, organisateur), une grande agilité, une
rédaction impeccable, un sens de l’àpropos et de l’humour développés, un
calme olympien, de la culture générale, de la diplomatie, etc. Il s’agit donc d’un
poste clé et exigeant, mais qui repose souvent sur de jeunes profils, prêts à
sacrifier leurs heures de sommeil et de vie privée pour pouvoir répondre et
animer leur communauté à tout moment.
2.2.4. Applications mobiles
Le contexte du mobile
Il existe différentes qualifications qui définissent l’importance de la stratégie
mobile dans une stratégie digitale : Mobile First, Mobile Only et même Mobile
Best, selon qu’on cherche à développer principalement, exclusivement ou de
façon premium sur le mobile. Il arrive même qu’on puisse être Mobile First et
Mobile Only en parallèle, selon les cibles visées. Les jeunes ne conçoivent les
relations avec une Marque qu’au travers de leur mobile, il est donc important
pour cette cible de développer une stratégie Mobile Only.
Facebook rappelait en 2015 que sur 29 millions d’abonnés français, 22 millions y
ont accès par le mobile. Il paraîtrait même que Marc Zuckerberg refuse de
regarder un projet s’il ne lui est pas présenté dans sa version mobile. C’est dire
si l’enjeu est important. L’entreprise préfère maintenant se présenter comme
une “entreprise mobile” plutôt qu’un “réseau social”.
38
D’une manière générale, on a basculé il y a 4 ans d’un modèle web centric à un
modèle mobile centric.
Constat renforcé par l’analyse les signaux émis par Google : une pénalité de
référencement pour les sites non “mobilefriendly”. Par ailleurs, la firme de
Mountain View a annoncé en 2015 que le seuil de 10 pays dans lesquels la
consultation sur mobile dépassait la consultation sur desktop avait été atteint.
Les trois années à venir vont donc voir se confirmer cette suprématie du mobile.
Les sponsors en général sont déjà des gros utilisateurs des applications mobiles,
davantage que les organisateurs et les clubs. Le discours fréquent est “Nous
travaillons sur une application mobile”. Le soulagement est palpable au Stade
Français et chez ASO, interrogés sur le sujet, heureux de rentrer enfin dans la
course. Mais la logique qui voudrait qu’une application mobile adresse un ou des
besoins existants et identifiés ne semble pas partagée par tous. Le premier
objectif avoué est de créer du service supplémentaire pour l’utilisateur. Gaming,
mesures de performances physique, hub permettant l’interaction et l’échange de
contenus sont les maîtremots. Mais lorsqu’on aborde le sujet de ce que les
applications mobiles peuvent apporter à la Marque ellemême via le Big Data et
la collecte possible d’information au travers des applications, ou, pire, le CRM, le
silence devient gênant… “Malheureusement, nous sommes dans l’immédiateté”
déplore Stéphane Rakoto. “La difficulté souvent rencontrée est de faire s’asseoir
à une table des négociations les services marketing, communication et digital et
évaluer ensemble les objectifs afin de poser des KPI communs”.
Manifestement, le virage est souvent pris assez tard et peut conduire à la
conception d’applis “de surface” susceptible de plaire aux consommateurs mais
pas forcément utiles aux Marques, ce qui peut s’avérer regrettable dans un futur
proche.
Mais d’autres acteurs de l’économie du sport ont pleinement compris les
énormes avantages à retirer d’une bonne appli mobile. C’est le cas notamment
du Grand Stade de Lyon (inauguré le 9 janvier 2016) qui a commandé à
Microsoft et Exakis (société lyonnaise) la conception d’une petite merveille
d’appli multitâche : Parc OL. Prouesse technologique, Parc OL est la première
appli en France à proposer des services aussi variés que le calcul des temps de
39
trajet jusqu’au stade, le guidage
dans les gradins jusqu’à sa place, la
commande de catering, le replay des
temps forts du match, la
dématérialisation des billets,
jusqu’au paiement car elle permet de
recharger la carte MyOL !
Globalement, tous les besoins ont
été adressés et l’application est à la hauteur du 2ème stade connecté français.
Concrètement aujourd’hui, plusieurs technologies associées au mobile comme le
NFC, RFID, la 4G, le QR code ou la géolocalisation et le beacon, permettent
d’améliorer l’expérience vécue par les supporters dans un stade et de renforcer
l’offre de services. L’intérêt du mobile repose également sur la complémentarité
des devices et permet d’éviter la rupture dans le parcours utilisateur. Un
spectacle sportif peut ainsi être préparé depuis son desktop et le parcours peut
se poursuivre sur le mobile dans le stade.
Différents objectifs peuvent être recherchés pour une application mobile :
Objectif d’image :
Le Haka en 360° à l’occasion de la Coupe du Monde de Rugby 2015 est un bel
exemple. Si la technologie 360° inonde les flux Youtube depuis quelques
semaines, l’effet “wahou” était à son maximum en septembre 2015 autour de
cette appli développée par les NeoZélandais. Elle proposait l’immersion au sein
de l’équipe de All Blacks le temps d’un haka. Appli d’expérience (assez fabuleuse
il est vrai), elle remplit un objectif d’image, montrant la puissance et la cohésion
d’un redoutable groupe sportif.
Objectif commercial :
Seaters est une application répondant à un triple objectif : commercialiser toutes
les places d’un stade, même en dernière minute, éviter, vis à vis des sponsors
notamment, les places vides, et tuer le marché noir. Le système remet sur le
40
marché toutes les places non utilisées dans les stades permettant ainsi aux fans
de trouver des billets de dernière minute . 3
Objectif de service :
Schneider Electric Marathon de Paris : ASO a lancé en décembre 2015 une
application “marathon connecté” afin d’aider les coureurs dans leur préparation
au marathon. Toutes leurs données sont enregistrées et récapitulées. Mais,
encore mieux qu’une montre connectée, l’appli permet de comparer ses
performances à celles des autres runneurs et d’éviter le sentiment de solitude,
fréquent, dans cette préparation. Y atil une data collectée pour un usage
ultérieur pour l’organisation ? Interrogé sur le sujet, Théo Bayssat, Business
Development Project Manager chez ASO reconnaît qu’il n’y a pas d’objectif
second lié à cette application.
Objectif d’expérience :
L’avenir se dessine déjà aujourd’hui avec des expériences comme l’Eurosport
Tour qui nous a été expliquée par Lilian Baudard Guillot, Head of Marketing &
Communications : “En partenariat avec Strava, nous avons organisé la plus
grande course de vélo au monde, en captant les informations de sortie des
cyclistes. Les inscriptions ont été très faciles à obtenir, avec 99% des candidats
à la course qui ont commencé l’inscription et qui sont allés au bout. Ce qui
signifie que la cible et le concept sont les bons. Au total, nos fans ont couru 12
millions de km en 3 mois, avec 9000 participants”.
Mais, quel que soit l’objectif visé, il est aujourd’hui essentiel d’anticiper une
récupération de données, en définissant très soigneusement lesquelles. Comme
toujours, il s’agit de poser les KPI dès la conception de l’application : quels
objectifs viseton, quelles données récupérer (trop de données sont pénibles à
fournir pour l’utilisateur et impossibles à traiter pour la Marque), quel nombre de
téléchargements visé, quelle stratégie de communication mettre en place, pour
quel ROI et enfin quel CRM peut être initié à partir des données récupérées.
3 Trailer de Seaters : https://vimeo.com/116765915
41
2.2.5. Objets connectés
Les objets connectés ont envahi tous les secteurs (on estime à 80 milliards le
nombre d’objets connectés dans le monde d’ici 2020) et le sport ne fait pas
exception, loin de là !
Plusieurs utilisations sont possibles mais le grand usage qui intéresse tous les
acteurs de l’industrie du sport est celui fait par les sportifs euxmêmes. Dès lors
que l’athlète est équipé d’un de ces objets, les données circulent et peuvent être
récupérées à des fins diverses :
pour récupérer des informations sur l’état physique de l’individu
En septembre 2015, 10 joueurs du FC Nantes ont ingurgité une gélule connectée
avant un match, mise au point par BodyCap, une startup de Caen. L’objectif
était de monitorer la thermorégulation d’un joueur pendant le match (certains
sont montés à 39° tout de même), ce qui n’avait jamais été fait, et de mesurer
les effets de la cryothérapie, ces bains glacés d’après le match. Ceci permet de
personnaliser et donc d’améliorer les techniques de récupération. Mais ces
données collectées permettront également d’adapter l’intensité des entraînement
et donc d’améliorer les performances.
pour établir des statistiques
Une multitude de techniques existent déjà pour monitorer les performances
sportives. L’une des dernières émane de la startup PIQ qui propose un
minicapteur de 5 mm d’épaisseur et 9 grammes seulement qui se colle
directement sur la peau et non sur la raquette ou le club de golf. Le PIQ
mesurera des données grâce à ses deux accéléromètres, un gyroscope, un
altimètre, un magnétomètre. Véritable coach pour le sportif amateur ou
professionnel, il sera également à la base de la diffusion d’informations destinées
aux fans. On y croit, et les investisseurs aussi car la startup suisse a levé cette
année 5,5 millions de dollars.
Encore plus étonnant, Adidas a lancé un ballon de football connecté : puissance
de tir, trajectoire du ballon, impact du pied, tout est enregistré. Le “miCoach
Smart Ball”, comme son nom l’indique, fait figure de coach objectif et ouvre la
voie à des objets qui serviront à l’amélioration des performances.
42
Une mine donc pour toutes les applications de second écran, friandes de
statistiques et données sportives.
pour aider à l’arbitrage
Après Adidas, Wilson lance lui aussi un ballon de basket connecté : le Wilson X.
Particulièrement utile pour comptabiliser les “paniers” lors des entraînements, il
pourrait préfigurer l’avenir de l’arbitrage dans les sports de balle.
Car nul doute que le ballon de rugby connecté va faire son apparition lui aussi,
avec un avantage énorme : celui de trancher définitivement les discussions
relatives aux essais. Aplati ou pas ? C’est le ballon qui le dira.
pour mesurer des données objectives et déterminantes pour un
entraînement ou une compétition
Quel coureur en compétition n’a pas déjà été équipé d’une puce RFID sur sa
chaussure mesurant son temps de course ? Et maintenant c’est pendant les
entraînements que ces objets prennent toute leur saveur : les montres et
bracelets connectés sont légion sur les poignets des runners, leur permettant un
suivi parfait et un potentiel d’amélioration de performance inégalé.
pour automatiser des tâches
Même les golfeurs pourront s’abstenir de la tâche fastidieuse (et parfois
frauduleuse...) de remplissage de leur carte de score. EGull est une application
fonctionnant avec une montre connectée qui détecte et enregistre tous les
coups, propose un GPS avec les distances au trou, un comparateur de scores,
etc.
2.2.6. Live streaming
Alors que Youtube, le géant de la vidéo sur le web proposait déjà du live
streaming, il y a quelques mois, la Ligue de football professionnel (LFP) menaçait
d’assigner Twitter, qui venait de racheter l’application Vine, en considérant que
la diffusion d’images de matches lui portait préjudice et ne pouvait pas se
justifier par le droit à l’information. Selon la LFP, la transmission via le réseau
social Twitter lui causait un préjudice qu’elle évaluait à 10 millions d’euros
43
(Vanessa Bouchara, avocate) . Au même moment, la Liga annonçait que 4
Youtube diffuserait en direct la totalité des matchs de la Copa del Rey
20152016, à l’exception de la finale. Mais il s’agit là d’une décision entrant dans
le cadre d’un accord transparent.
Les problèmes de droit que rencontre Vine sont les mêmes avec les applications
de live streaming du type Merkaat our Periscope.
Le principal frein du live streaming est donc législatif. Mais il existe sans doute
aussi dans l’utilisation de masse qui est faite par des diffuseurs issus du grand
public. Le tort est fait aux diffuseurs mais ce sont les propriétaires/organisateurs
des événements qui sont responsables de l’exclusivité des images dont ils
vendent les droits. Mais à part faire figurer les interdictions au dos des billets, il
est difficile de faire plus.
Véronica Grandi (FFT) rapporte que Periscope a été utilisé sur l’édition 2015 de
Roland Garros, pendant certains entrainements et que les retours avaient été
satisfaisants : “nous aimerions utiliser davantage cet outil, mais nous sommes
confrontés à 2 problèmes : la connectivité du stade et les droits média”.
Diffuseurs et détenteurs de droits s’accordent à penser que le respect de
l’exclusivité des images incombe aux détenteurs. « Pour nous prévaloir de cette
fraude, l’interdiction de diffuser des images des compétitions est rappelée dans
les conditions générales de vente sur tous les billets vendus et nous pouvons, du
moins aujourd’hui, compter sur les limites naturelles de la connectivité au stade”
notetelle.
Wimbledon a également fait entrer Periscope de manière officielle dans sa
stratégie 2015, à grand renfort de communication.
Pour Eurosport, Periscope représente un nouveau média utilisable pour un
nouveau type de contenus. “Nous l’avons utilisé sur l’US Open pour entrer dans
les coulisses, aller dans le lounge des joueurs et rentrer dans l’intimité de
l’événement” nous indique Lilian Baudard Guillot. On voit ainsi émerger un
nouveau métier, celui de “social media reporter”, qui s’attache à tout rapporter,
hormis le live (dont c’est le métier de la télévision) et qui crée des contenus qui
fonctionnent très bien.
4 Meerkat, Periscope : les droits que vous risquez de piétiner rue89.nouvelobs.com Vanessa Bouchara 08.04.15
44
Mais dans la guerre des réseaux, Periscope a du souci à se faire. Car après avoir
barré la route à Merkaat avec le rachat de Periscope, Twitter risquerait bien de
voir l’aventure se corser avec l’arrivée de live streaming programmée par
Facebook. Le modèle de Periscope est encore fragile avec seulement 10 millions
d’utilisateurs dans le monde, mais certains signes sont en faveur d’une explosion
du live streaming (cf la fameuse flaque d’eau qui a fait le buzz en janvier 2016
dans un parc de Newcastle). Une bataille entre géants qui ne fait qu’augurer une
adoption massive de la part des consommateurs et des Marques du live
streaming.
Maintenant sérieusement, sur la problématique des droits dans le sport,
comment imaginer que ces pratiques puissent représenter une atteinte sérieuse
aux détenteurs de droits de diffusion ? Qui a le goût de suivre la totalité d’un
match sur Periscope ? Et quand bien même il y aurait quelques adeptes, quel
spectateur aura l’envie de sacrifier son plaisir de vivre son match pour
transmettre des informations que l’on peut trouver ailleurs et de meilleure
qualité ? Quelques images pour s’imprégner de l’ambiance, tout au plus…
Et pour les Marques, pour les médias traditionnels, le live streaming représente
une belle occasion d’incarner et d’humaniser le discours, avec des interactions
possibles avec l’auditoire. Le seul réel risque à prendre en compte est que
l’image de la Marque repose en direct sur les seules épaules de celui qui tient le
smartphone. Les dangers du community manager en somme. L’image en plus.
2.2.7. Réalité virtuelle
Parmi tous les outils digitaux disponibles, la réalité virtuelle est sans doute la
plus grande révolution dont peuvent disposer les Marques. Le revers de la
médaille étant qu’il va falloir l’adopter d’urgence face à l’exigence de fans
toujours plus gâtés.
Selon Jean Segura, spécialiste de l’imagerie de synthèse et des usages du
virtuel, la réalité virtuelle peut se définir comme “l’ensemble des techniques et
systèmes qui procurent à l’homme le sentiment de pénétrer dans des univers
synthétiques créés sur internet”. La réalité virtuelle offre donc la possibilité
45
d’effectuer en temps réel certaines actions faisant intervenir certains de nos sens
(visuel, auditif, haptique). Cette technique s’adapte sans problème aux
techniques de captation et de diffusion d’image.
Cette réalité virtuelle peut offrir des expériences infinies à des spectateurs
“virtuels” c’est à dire à distance de l’événement.
Et, bien entendu, à technologie inédite, cadre législatif à inventer.
Voici quelques questions majeures qui gravitent autour de la VR :
Droits de retransmission : qui est le propriétaire des images ?
Estce le diffuseur TV ? Estce le stade ? Estce une nouvelle
catégorie de droits qui doit être négociée et vendue par le
propriétaire ?
Business model sur les droits : estce inclus dans votre abonnement
TV ou devrezvous payer au coup par coup les images que vous
voulez visionner ?
Retransmissions pirate : comment les déjouer ?
La course à la réalité virtuelle est devenue un enjeu de taille avec la mise sur la
marché de caméras 360° d’une part, et de casques de type Oculus Rift ou
faisant intervenir un smartphone comme le Google Cardboard d’autre part.
GoPro, avec toujours sa vision d’avance, et en équipe avec Youtube et Google, a
fait évoluer sa campagne “Be a Hero” avec son fim Tahiti Surf VR réalisé avec la
GoPro Spherical. Le résultat est spectaculaire (près de 6 300 000 vues rien que
sur ce film) et la maturité de la technologie laisse à penser que l’explosion de la
réalité virtuelle n’est plus pour “demain”, mais bel et bien pour 2016.
Du côté des diffuseurs, l’heure est déjà aux tests. Lilian Baudard Guillot nous a
donné la position de la chaîne : “Avec Discovery on est en train de tester
l’expérience virtuelle. Il y a un test qui s’est fait en décembre sur le ski avec
Bode Miller, avec une descente filmée à 360°, qui a été diffusée dans nos
programme et qui est toujours visible sur notre site web 5
5 http://www.eurosport.fr/skialpin/beavercreek/20152016/notreincroyablevideodeskia360bodemillerdescendlabirdsofpreydebeavercreek_sto5014687/story.shtml
46
Nous sommes dans une logique de création de nouveaux contenus comme faire
vivre de nouvelles expériences de plus en plus proches de la réalité de ce qui se
passe sur le terrain ou sur une piste de ski. C’est une logique d’immersion.”
Les clubs s’y mettent aussi. Après les All Blacks, c’est au tour des Jets (NFL) de
jouer le jeu de l’immersion avec une vidéo 360° à faire fondre le plus glacé des
supporters : celle de l’arrivée de l’équipe sur le terrain, dans le cadre de leur
ambitieux programme Digital Sideline . 6
2.2.8. Drones
Innovation majeure des 10 dernières années, le drone a vite su s’imposer dans
le sport, sur différents besoins :
Captation vidéo
Assez couramment utilisés dans la captation d’images sportives, l’enthousiasme
qu’ils provoquaient a été douché le 23 décembre dernier avec l’incroyable crash
d’un drone juste derrière le passage de l’autrichien Marcel Hirscher lors du
slalom de Madonna di Campiglio. Le drone fournissait des images à la société
Infront, détenteur des droits TV pour la coupe du monde de ski alpin. Un premier
communiqué de la Fédération Internationale de Ski a fait savoir que : “la FIS et
le diffuseur hôte vont travailler avec toutes les parties pour comprendre ce qui
s’est passé et s’assurer qu’un tel accident ne se reproduira pas”. Mais
rapidement derrière, la fédération a ajouté que les drones seraient désormais
interdits sur les courses pour des raisons de sécurité.
Coup dur pour les diffuseurs, mais pas partout puisque l’utilisation des drones
pour filmer les compétitions était déjà interdite en Autriche et en Suisse, deux
pays majeurs qui accueillent également des épreuves de la coupe du monde.
Rome ne s’est pas construite en un jour, et il semble évident que les drones
seront de retour, y compris sur les épreuves de ski, dès que les problèmes de
sécurité auront été cernés et résolus.
6 http://digitalsport.co/thenewyorkjetsunveiladigitalsideline
47
Entraînement
Les drones sont aussi devenus des atouts majeurs pour les entraîneurs sportifs,
comme c’est le cas depuis 2014 pour l’ASM, l’équipe de rugby de Clermont
Ferrand. Véritable “3ème oeil” de l’entraîneur, le drone est de sortie dès que la
météo le permet et filme du dessus les séances d’entraînement. Les images sont
ensuite analysées afin de faire progresser l’équipe dans ses placements
notamment.
Pas encore généralisée dans les clubs héxagonaux, l’idée serait toutefois à
l’étude au sein du staff du XV de France.
2.2.9 Robots
Si les robots sont aujourd’hui parfaitement capables de capter et retransmettre
des images (certaines caméras mobiles sont déjà des robots), on les retrouve
sur d’autres tâches :
Entraînement
Plusieurs sports bénéficient de robots pour les entraînements. Les automates
d’entraînement sont déjà anciens au tennis, mais il y a pas mal de petits
nouveaux. C’est le cas du rugby avec les robots de mêlées (utilisé par le XV de
France), du football avec le Footbonaut (machine robot distribuant les ballons et
indiquant les points d’envoi) ou du robot qui a rendu fou Lionel Messi au cours
d’une inénarrable séance de tirs au but, ou du football américain avec le Dummy
(mannequin d’entraînement destiné à éviter les commotions des joueurs
pendant les phases d’entraînement). Ces robots en apportant de nouvelles
techniques d’entraînement contribuent à l’amélioration des performances et donc
du spectacle sportif.
Robots supporters
Et même dans les tribunes, les robots
sont déjà là ! La Corée du Sud, qui n’en
est plus à son round d’essai en matière
d’innovation technologique, a conçu les
Fanbots, les premiers robots
supporters. Ils sont au nombre de 24
48
dans le stade de la ville de Daejeon dont l'équipe de baseball cumule les
défaites. Le résultat c’est un stade qui ne se remplit plus, pourtant les
internautes sont encore nombreux à notifier leur soutien à l’équipe. D’où cette
idée de créer ces Fanbots, sortes d’avatars des supporters absents, qui revêtent
la photo et brandissent le message des fans à la demande . Une désincarnation 7
un peu triste et qui, pour le coup, ne s’inscrit pas dans les tendances générales
qui attirent de plus en plus de monde dans les stades pour vivre de plus en plus
d’émotions. Sans doute estce à mettre sur le compte d’une fin d’histoire pour ce
malheureux club...
2.3. DE NOUVELLES OPPORTUNITÉS
Tous ces nouveaux outils ouvrent la voie à des opportunités business
importantes.
2.3.1. Fan experience
Comme souvent, en matière de digital, c’est du côté des Etats Unis qu’il faut
aller chercher les tendances. Et, en la matière, la NBA donne le “la”.
"Ce qui intéresse la NBA, c'est le fan engagement, c'est d'aller chercher la
relation avec le supporter. Le fan peut demander au système de montrer
comment ce dernier arrive à calculer chaque indicateur en particulier. Comme
l'analyse est basée sur des séquences vidéo des phases de matchs, le supporter
peut revoir chacune d'elles. Le classique des fans, et surtout aux ÉtatsUnis,
c'est de partager les informations avec son réseau. Chacune de ces séquences
inclut alors les boutons de partage. Les fans peuvent également revoir des
moments importants en utilisant une resimulation (un replay complet à la fois
de deux équipes)", illustre Frédéric Puche, executive briefing center director de
SAP (présente dans le le Big Data et les statistiques sportives).
7 https://www.youtube.com/watch?v=BBiRLYu8Wjo
49
Parmi les statistiques qui émoustillent les fans, celles générées par la startup
PIQ n’ont pas fini de faire parler d’elles. Citons les capteurs installés sur les
chevaux lors des compétitions et qui fournissent le “air time” à chaque saut
d’obstacle, ou encore la vitesse d’accélération en escrime. "Ce que nous
fournissons, ce ne sont pas des stats, mais la performance physique de ce qui se
passe sur le terrain. Si les statistiques procurent des informations, la
performance de mesure des objets connectés donne de la réalité”, nous livre
Cédric Mangaud, cofondateur de Piq. “Quand un spectateur regarde un match
de rugby dans son canapé et que deux joueurs se confrontent en plaquage, il
peut se dire : "wow, il a tapé à 350 kg". Les gens cherchent du réel plus que des
stats, car ils préfèrent savoir ce que cela fait vraiment. Je pense que les
marques sont également plus intéressées, parce qu'il y a plus d'authenticité
dans ce que les athlètes font sur le terrain, dans la réalité."
Autre exemple d’engagement : les tickets de la finale FA Cup (mai 2016)
comporteront une photo prise par un fan pendant la saison 2015/2016 et
partagée sur Instagram. Cette très belle opération permet d’engager le public
tout en mesurant la présence des fans sur les réseaux pendant une période
longue.
On pourrait également citer l’exemple d’Orange avec #Le12emeGone qui
affichera les twittos tirés au sort sur la manche du maillot de l’Olympique
Lyonnais. Nul doute que ce genre de relais en compétition d’une opération
digitale n’en est qu’à ses débuts, à chaque club et sponsors de trouver le levier
d’activation idéal.
Certains événements grand public font de leurs inscrits des clients et des fans en
même temps. S’appuyant sur le sentiment de fierté et d’appartenance à une
manifestation aussi incontournable que réservée à une élite entraînée, les
organisateurs poussent leur public à liker et commenter. Chaque sportif est un
ambassadeur potentiel. Mais estil toujours utilisé comme tel ? Rien n’est moins
sûr et il s’agit là d’un axe majeur de progression. Mais ils soignent aussi
l’expérience de ces fansclients au travers de services toujours plus digitaux du
type de l’appli “marathon connecté” présentée plus haut.
50
Et puis il y a le fan qui ne s’intéresse qu’au sport.
“Nous devons offrir aux fans le contenu qu’ils souhaitent, où ils le veulent et
quand ils le veulent. Nous devons améliorer l’expérience utilisateur et choisir des
outils qui correspondent à des objectifs précis en rapport avec les habitudes des
fans” Voici comment la stratégie de la NBA sur le web fut résumée par Bryan
Perez de NBA DIGITAL dès 2010.
Les Jets de New York (NFL), dans un ambiteux plan “Digital Sideline” proposent
à leurs fans des expériences immersives jamais menées. Grâce à la vidéo 360
(type Go Pro Spherical), ils permettent de toucher les émotions de l’équipe et de
vivre ce qu’aucun spectateur n’avait jamais vécu : l’arrivée sur le terrain en
compagnie de l’équipe. Idéalement le film se visionne avec l’Oculus Rift, mais
même en visionnage basique sur Youtube, en cliquant et glissant l’image, l’effet
“wahou” est là : http://digitalsport.co/thenewyorkjetsunveiladigitalsideline
2.3.2. Phénomène du “second écran”
Désormais incontournable, le second écran est devenu
l’apanage de toute bonne retransmission d’un événement
sportif. Au point que la question peut se poser de savoir lequel
des deux écrans est le second…
Ce second écran peut répondre à différents objectifs :
communautaire
La fréquentation des médias sociaux pendant le visionnage
d’une compétition sportive à la TV est elle aussi une pratique
de second écran. La toute première en réalité. C’est autour de
cette pratique que les organisateurs (et autres acteurs de
l’industrie du sport) diffusent un hashtag officiel afin de
fédérer les conversations (et au passage mesurer le taux
d’engagement et pratiquer le “social listening”).
51
Selon RadiumOne, 52% des supporters de rugby utilisent leur smartphone
pendant qu’ils suivent un match à la télévision et 44% l’utilisent alors qu’ils sont
au stade. Près d’un quart d’entre eux ont acheté leurs billets ou d’autres produits
relatifs au rugby avec leur smartphone ou leur tablette.
Afin d’accompagner ce phénomène, Manchester City a un partenariat digital avec
SAP, tandis que le Real Madrid en a un avec IBM.
Quant au club du Manchester United, il réunit 100 millions (sur ses 659 millions
estimés) de fans sur les réseaux, avec plus de 66 millions de likes sur sa page
Facebook, 6 millions de followers sur Twitter et 100 000 utilisateurs de son
application mobile.
Les clubs et les sportifs peuvent donc compter sur les milliards de fans de sport
et utilisateurs des médias sociaux à travers le monde pour que vive cette
pratique qui représente une manne pour les Marques comme le démontre
l’exemple Oreo cidessous.
Publicitaire
Le second écran est également le relais
indispensable de la pub TV. C’est l’histoire
de l’incroyable tweet d’Oreo pendant le
Super Bowl 2013 : Oreo était annonceur
pendant le SuperBowl et toute l’équipe de
360i (agence d’Oreo) était réunie pour
animer les medias sociaux. Et là, c’est des
ténèbres qu’est venu le coup de maître :
une miraculeuse (pour Oreo) coupure de
courant de 34 minutes a plongé le stade
dans l’obscurité et donc interrompu le
match. Rapidement les créatifs de 360i se
mettent au travail pour sortir ce tweet de
légende : “Plus de courant ? Pas de
problème, vous pouvez toujours tremper
(votre Oreo) dans le noir”, retweeté plus
de 15 000 fois, et récoltant 20 000 likes
sur Facebook . Parti d’une blague, d’un bon mot, ce pépiement prouve "La 8
8 How Oreo Won the Marketing Super Bowl With a Timely Blackout Ad on Twitter http://www.wired.com/ Angela Watercutter 02.04.13
52
supériorité du pouvoir de l'ingéniosité par rapport à l'argent et des médias
sociaux par rapport aux médias traditionnels" selon le Wall Street Journal.
Rappelons qu’un spot TV de 30 secondes pendant le Super Bowl coûte près de 4
millions de dollars.
Gaming
Evian a mis en place une Opération “Tweet The
Ball” à l’occasion de l’Evian Championship
2014. Il s’agissait d’une bataille navale dont
l’objectif était de retrouver les balles perdues
par les joueuses en proposant des
emplacements croisés sur une carte interactive
transformée en grille. Assez malin, s’agissant
d’une compétition de golf et donc pouvant comporter quelques longueurs (et
c’est une golfeuse qui le dit !), pour conserver les téléspectateurs.
Informatif
Il existe maintenant quantité d’applications mobiles qui poussent des
informations sportives et statistiques pendant une rencontre. Impossible
d’ignorer le nombre de kilomètres parcourus par Nadal depuis le début de son
match (et même ceux parcourus par les ramasseurs de balles !) ou les
probabilités de réussite d’une séance de tirs au but.
L’application de second écran devient un super journaliste sportif, capable de
tenir un dicours prédictif et fiable. Finalement, ne regardeton pas aussi le
match juste pour le plaisir de vérifier que les statistiques ne s’y sont pas
trompées ?
Contenu exclusif
La question de l’utilisation du second écran a été posée à Lilian Baudard Guillot :
“Les grands événements sportifs se vivront toujours en TV, quoi qu’il arrive. Le
sport est le seul spectacle qui ne supporte pas la rediffusion. Le second écran est
un gros sujet mais qui ne se vit pas de la même manière partout. Apporter du
contenu additionnel c’est bien, noyer les internautes de statistiques, un peu
comme ça se fait aux US, ce n’est pas ce qu’on veut culturellement en Europe.
L’enjeu c’est d’apporter du bon contenu au bon moment (c’est ce qu’on fait avec
53
le player pour tout revoir et ne rien rater avec des notifications d’alerte). Le
second écran doit vraiment être là, mais en complément et pour apporter des
informations supplémentaires et pour permettre les interactions entre les fans.
Et notamment faire vivre les avantmatchs et les aprèsmatchs avec des
informations qui ne se trouvent pas ailleurs. Je pense que c’est la vocation du
second écran. Pour Eurosport, le second écran c’est le Player
(http://www.eurosportplayer.fr/) avec l’offre multiscreen, des données
additionnelles, le flux Twitter intégré, des popups d’alerte, etc.”
Le cocorico du second écran est poussé par Netco Sports, startup parisienne
acquise en 2015 par Euro Media Group (prestataire technique et de services
audiovisuels). Netco annonce qu’il sera le fournisseur de second écran mobile
pour toutes les chaînes de télévision qui vont retransmettre l’Euro 2016, après
avoir déjà été sélectionnée par la FIFA en 2014 pour toute une série
d’applications de second écran ! Le chiffre d’affaire attendu de la société pour
l’année 2015 était de 10 millions d’euros contre 5 millions en 2014. Un vrai
nouveau métier donc, avec un bel avenir compte tenu du fait qu’aujourd’hui,
plus aucun événement sportif ne se conçoit sans second voire troisième écran.
2.3.3. Explosion de l’audience
Un des corollaires à l’émergence des outils digitaux dans le sport est l’ubiquité
des événements. On avait autrefois une audience sur place (les spectateurs) et
une audience à distance par l’intermédiaire de la radio ou de la télévision (les
auditeurs et téléspectateurs).
Nous sommes aujourd’hui face à une audience bigarrée, faite de spectateurs
(lesquels sont aussi de plus en plus diffuseurs de contenus), d’internautes
(récepteurs de contenus et d’images émanant de diffuseurs officiels ou non,
mais aussi commentateurs via les médias sociaux), et de téléspectateurs (agiles
avec l’utilisation de 2 écrans et également commentateurs sur les réseaux). A
ceci s’ajoutent les technologies de plus en plus pointues de diffusion d’images
(360° par exemple), ainsi que des services de diffusion “à la carte” permettant
de choisir et de switcher à volonté entre différentes rencontres.
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Le résultat est une explosion de l’audience et une qualité de suivi à distance
d’une rencontre sportive qui devient exceptionnelle. L’ambiance “réelle” en
moins. Mais l’ambiance est palpable néanmoins, même de chez soi, grâce aux
Periscope et autres Vine soucieux de faire vivre à leurs usagers des expériences
immersives.
Au milieu de ces changements de comportements, il reste une vérité qui nous
est donnée par Olivier Denis Massé :
“La nouvelle technologie ne rendra pas les technologies existantes (TV, radio)
obsolètes, c’est un choix supplémentaire pour le consommateur.”
Mais le paradoxe c’est que les spectateurs risquent d’être de moins en moins
nombreux dans les stades grâce aux technologies de plus en plus alléchantes
permettant de suivre les événements conjointement à la TV, et sur un second
écran susceptible de faire jaillir l’ambiance d’un stade dans son salon ! Les
stades doivent surveiller de près cette réalité et tout faire pour améliorer le
parcours et l’expérience client en proposant des technologies et des expériences
encore plus alléchantes que celle de vivre ces moments depuis son canapé.
Sasha Victorine (Sporting Innovations) a bien posé le problème : “Les fans se
demandent : vaisje avoir accès à un contenu que je ne peux pas obtenir de
chez moi ? Si c’est le cas, alors c’est un bénéfice pour moi d’aller au stade”.
Une vérité comprise et adressée par les New England Patriots qui prévoient pour
les fans présents des caméras à diffusion exclusive in situ, notamment une
caméra uniquement pointée sur Tom Brady. Ils promettent également de donner
l’accès aux communications radio entre le coach et le quaterback. Des contenus
uniquement accessibles aux spectateurs présents . 9
Des décisions qui viendront équilibrer les expériences consistant à faire vivre
l’ambiance du stade à l’extérieur. L’opération #Feelwimbledon (menée avec
Jaguar en 2015) a été l’une des pionnières dans la délocalisation de l’ambiance
d’une enceinte sportive. Des bracelets connectés ont été remis à un certain
nombre de spectateurs de Wimbledon permettant de capter leurs mouvements
corporels et battements de coeur afin de transmettre une couleur d’émotion
collective au travers du site web de Wimbledon. Ce procédé très visuel et très
9 The future of Sports Attention Span Media Septembre 2015
55
réussi a permis à des
millions d’internautes à
travers le monde de “vivre”
Wimbledon en suivant les
évolutions d’anneaux de
couleur (qui s’intensifiaient
selon les émotions) et non
plus seulement de suivre le
jeu à l’écran.
Ce procédé novateur ouvre
une perspective d’audience importante. Jusqu’à maintenant on était face à deux
cibles très distinctes : les spectateurs et les téléspectateurs. Aujourd’hui, ce
partage d’émotion (qui est le coeur d’un spectacle sportif et la motivation
principale pour y assister) est possible et fait exploser les limites de l’enceinte
sportive.
Egalement dans l’émotion, Eurosport propose le service “multicanal 360”. Lilian
Baudard Guillot nous en a expliqué le principe : “L’offre 360 permet d’enrichir
l’expérience du téléspectateur. A la base il s’agit d’une logique multi screen. A
Roland Garros par exemple, on couvrait 17 cours et on donnait la possibilité à
n’importe quel européen, sous réserve que son opérateur achète et propose
l’offre 360, de suivre son “local hero". C’est notre angle maintenant. On s’ancre
de plus en plus sur une logique qu’Eurosport est une chaîne nationale dans tous
les pays où nous sommes présents. On est passé d’un modèle « pan euro »
avec un seul feed, à un modèle ou on est de plus en plus local. Par ailleurs,
demain on devra faire vivre le spectacle sportif d’une autre façon et cette
nécessité s’articule autour de plusieurs technologies : cameras onboard (utilisées
sur les 24h du mans), les multicaméras, les replays, etc. On n’est plus
seulement sur des caméras autour d’un terrain. On veut rentrer dans le sport.”
56
2.3.4. Big Data
“La Data est la nouvelle ressource naturelle et ce que vous en faites est vraiment
important” Noah Syken, vice president of global sponsorships at IBM
La Data, le graal : la grande tendance c’est l’analyse technique du jeu, du
comportement des joueurs, et la transmission aux fans de toutes ces données.
Mais c’est sous la même dénomination (le Big Data prend alors des allures de
grande kermesse) qu’on retrouve toutes les données relatives aux utilisateurs,
aux consommateurs, et donc la base du CRM.
Analyses techniques
Comme il a été vu plus haut, les données sportives collectées sont distillées sur
les applications de second écran pour satisfaire l’appétit d’information des fans.
L’autre enjeu, plus physique celuici, est l’amélioration de la performance
sportive. IBM a mis sa technologie au service du tennis avec IBM Slam Tracker
afin de tracker le nombre de kilomètres parcourus, la vitesse des services, les
points gagnés et toutes les statistiques permettant d’avoir une vision claire du
jeu. Il propose même une solution d’analyse prédictive ! Et la transmission de
ces datas se fait en temps réel. Outre la satisfaction des aficionados, ce sont les
sportifs et les coachs qui sont visés par ces données. Reçues compilées et prêtes
à lire 30 minutes après la fin d’un match, elles sont désormais le support du
débriefing sportif. On peut ainsi établir un ratio entre le nombre de kilomètres
parcourus et le nombre de points marqués. Les chiffres qui illustrent cette
tendance de l’analyse prédictive nous viennent des USA, où 97% des équipes de
baseball et 80% des équipes de basketball utilisent l’analyse de données dans
leur stratégie...
En 2007, Daryl Morey opère une réelle révolution statistique en utilisant le data
mining, stratégie payante car depuis les Houston Rockets c’est 66% de victoires.
Dans le golf, c’est la PGA qui a introduit le Data visualizer. Celuici permet, en
temps réel, de mesurer les performances des golfeurs : le scoring bien sûr, mais
également la direction du drive, et le nombre de greens pris en régulation.
57
Audelà de l’intérêt pour les fans (sur et hors terrain), ces relevés permettent
une anticipation prédictive sur l’issue des matchs et viennent donc agrémenter la
fan experience.
CRM
Le Big Data, comme dans tous les autres secteurs de l’économie résonne comme
un enjeu majeur. Où en eston aujourd’hui ? La question a été posée à plusieurs
acteurs de l’industrie du sport, et les réponses sont assez semblables.
Globalement, un certain nombre de données sont collectées mais surtout dans
un but d’amélioration d’expérience client. Il y a très peu d’arrièrepensée
commerciale.
Chez ASO, on assume que la nouvelle appli dédiée aux marathoniens est avant
tout censée procurer du service à ses clients en leur offrant de rejoindre une
communauté afin de ne plus vivre seul les préparations à la course. Mais, du
moins pour l’instant, les données sportives d’entraînement (circuits, dénivelés,
faiblesses habituelles, pouls, fréquence d’entraînement etc.) ne pourront pas
être traitées et travaillées afin par exemple d’affiner le circuit, proposer des
points de ravitaillement à des endroits encore plus pertinents, et surtout
comprendre les attentes physiologiques de leurs clients pour développer des
produits en phase et donc vendre plus et mieux. ASO possède aujourd’hui une
base de données de 700 000 noms et annonce un objectif d’un million d’ici fin
2017. Cette base est néanmoins exploitée avec des proposition de services et et
des promotions sur des produits mais la progression est possible sur l’animation
des communautés.
Du côté des clubs, c’est le Stade Français, par la voix de Stéphane Rakoto qui
déplore : “On n’exploite pas suffisamment le profil de nos utilisateurs en ligne.
On fait pour l’instant très peu de CRM, hormis sur les accréditations. Notre frein
provient essentiellement de nos ressources humaines. Mais nous travaillons sur
une application qui devrait être opérationnelle début 2016 et qui devrait
concentrer toutes les informations, du gaming, des interactions avec un vrai rôle
58
de hub, et qui nous permettra de récolter des informations précises sur les
utilisateurs.”
2.3.5. Accès aux sportifs / “sport réalité”
Il n’y a rien à faire, les supporters y ont goûté, ils ne reculeront plus. Les icônes
d’hier inaccessibles ont laissé la place à des individus de chair et d’esprit et la
distance entre ces stars et leur public semble tous les jours un peu plus petite.
Les comptes des sportifs sur les réseaux sociaux atteignent des chiffres affolants
(40 millions de followers sur Twitter pour Cristiano Ronaldo !), chiffres
entretenus par la diffusion méthodique et généralement maîtrisée d’un contenu
plus marketing que personnel mais propre à satisfaire la curiosité des fans.
On se souvient des selfies des équipes partant à la Coupe du Monde brésilienne
l’été dernier, mais aussi les photos “inside” de tous les grands événements de
l’année, tous sports confondus.
Cette proximité est même au coeur de grandes stratégies digitales. La US Soccer
team (qui, entre nous soit dit, a bien de la chance de compter des athlètes
disposés à se prêter au jeu) a ainsi mis en scène la vie de ses 23 joueuses,
racontées par ellesmêmes, dans des vidéos de 2 minutes. On y apprend tout,
depuis leur enfance, jusqu’à leurs problèmes à l’adolescence. Orchestration de
mauvais goût d’un exhibitionnisme mercantile ? Peutêtre. N’empêche que
l’affaire a fonctionné et que même Obama s’est fendu d’un tweet
d’encouragement. Et bien sûr, comme dans les super productions, à la fin c’est
l’Amérique qui a gagné. L’équipe étoilée s’est imposée au Canada.
2.4. DE NOUVELLES CONTRAINTES
2.4.1. Engagement
L’engagement des fans (ou des consommateurs) est devenu un passage obligé
pour les marques. Les réseaux sociaux sont des miroirs qu’on allume et dans
59
lesquels on doit impérativement mettre une image pour qu’ils aient une
signification et une utilité. Si pour un consommateur il est essentiel, avant tout,
que la Marque s’incarne derrière un community manager, il est aussi essentiel
pour une Marque que le consommateur interagisse.
Le web et les réseaux constituent le terrain de jeu des blogueurs dont les
organisateurs d’événement ont compris la valeur. Traités comme les influenceurs
chers aux Marques, ils sont le relais “objectif” d’une communication très ciblée et
qui recherche la viralité.
ASO a une utilisation assumée et stratégique de ces blogueurs influenceurs. Pour
le Mud day de Séville l’organisateur a envoyé la carte de l’événement à une
dizaine de blogueurs 10 jours avant la course (13 km, 22 obstacles) avec
l’autorisation de communiquer dessus avant tout le monde. Un échange
magnifiquement pensé : un scoop (contenu ô combien vénéré du bogueur)
contre du buzz…
Boris Helleu apporte une explication claire de ce changement de paradigme sur
l’engagement des fans : “un événement sportif c’est quelque chose qui a lieu à
un endroit précis et une date précise. On a donc ce paradoxe d'un événement
mondial qui s'adresse directement aux personnes qui sont en mesure d'accéder
au stade ou à l'Arena. La première réponse technologique qu'on a trouvée à ce
problème a été consommation à distance avec la télévision. Et depuis le début
des années 2000, on est entré dans une nouvelle ère qu'on pourrait appeler l’ère
du postdigital. On considère que l'avènement des nouvelles technologies et des
médias sociaux et a déjà été digéré par la société. Et donc on peut se poser la
question de savoir comment les médias sociaux et la technologie modifient les
modalités de consommation du sport spectacle d'un côté et les modalités
d'organisation de l'événement sportif d'un autre côté. Et la tendance lourde de
ces dernières années c'est la façon dont les événements n’existent plus
seulement dans le stade où à la télévision mais sur le second écran, les
terminaux et les médias sociaux. Cela signifie qu'il y a du contenu en lien avec
un événement qui est généré par les fans qui tissent des conversations sur des
volumes importants. Ce qui veut dire qu'on change totalement de paradigme
c'estàdire qu'on passe d'une consommation Top Down (un média qui diffuse un
flux d’images à un spectateur assez passif pendant sa consommation du
60
spectacle), à quelque chose de beaucoup plus participatif et interactif où
l'événement sportif est propice à l'organisation de communauté qui peuvent
être éphémères et où le fan va être en mesure de converser, partager du
contenu, faire des bons mots, etc. Donc en fin de compte le changement majeur
est qu’on est passé dans ce qu’on appelle en marketing expérientiel, d'un
consommateur à un “consomm’acteur. C'estàdire que le fan agit à l'intérieur de
ces modalités de consommation, il n'est plus simplement passif il est actif et les
organisateurs de spectacles sportifs ont bien compris que le spectacle digitalisé,
c'estàdire la façon dont il est vécu sur les médias sociaux, est capital”.
Les agences rivalisent d’imagination pour monter des événements digitaux
susceptibles d’engager les fans.
A l’occasion du choc OMPSG du 5 avril 2015,
Swelly, agence spécialisée dans le
développement de solutions digitales
innovantes, a conçu pour Eurosport une
activation digitale très interactive: le match des
supporters, disputé avant le match. En temps
réel, l’implication digitale des fan était mesurée
et mise en opposition avec l’équipe adverse. Un
excellent moyen pour faire monter la température (et l’engagement) avant le
match.
Les médias aussi prennent leur part du gâteau. L’equipe.fr a ainsi orchestré
l’opération “Quels joueurs à la coupe du monde en 2015” engageant les
internautes à proposer leur propre sélection des 36 et à la partager sur Facebook
et Twitter.
Mais l’engagement des fans peut aller encore audelà : l’AS Roma va jusqu’à
crowdsourcer les idées de ses fans pour son futur site web. Le community
manager du club a lancé un appel à ses fans pour connaître leurs attentes et
suggestions. L’engagement est direct et total puisque le supporter accède à un
rôle actif et capital.
61
2.4.2. Création de contenu
Une des grandes problématiques des stratégies digitales réside dans la création
et la diffusion de contenu.
Quoi envoyer ? A qui ? Quand ?
sont les trois questions récurrentes. Car communiquer, oui, mais autour de quels
messages ? Tout le monde a bien compris l’enjeu même si les efforts et les
résultats sont inégaux.
Il y a trois cas de figure :
les bons contenus mal relayés : mauvaise stratégie (ou absence de
stratégie)
les mauvais contenus et bonne stratégie digitale (sur le papier car à
mauvais contenu mauvais retour)
bon contenu et bonne stratégie digitale
On s’abstiendra ici de commenter les 2 premiers cas.
Pour le 3ème cas (bon contenu, bonne stratégie digitale) revenons sur le cas de
l’US Soccer team lors de la FIFA Women World Cup de juillet 2015. Outre leur
victoire, leur stratégie de contenu (calquée sur celle de l’équipe masculine) a été
très efficace et mériterait d’être copiée. Elle reposait sur 5 piliers :
la préparation de nombreux visuels, anticipant les scénarios les plus
improbables, prêts à être postés
une approche backstage des joueuses avec une contenu d’ordre plus
personnel (retour à l’hôtel, temps libre, aprèsmatchs, etc.) qui
n’appartient qu’à l’équipe et auquel les médias n’ont pas accès.
la recherche d’influenceurs et l’engagement des fans (y compris le
président Obama !)
les histoires personnelles des joueuses avec une web série intitulée “one
nation, one team, 23 stories”
échanges et remerciements aux fans
Outre leur victoire finale, ces jeunes femmes sont devenues l’équipe féminine la
plus suivie et regardée, tous sports confondus...
62
Une autre excellente stratégie de contenu est celle du Paris Saint Germain. Le
club prépare avant chaque match des beaux visuels de tous les joueurs,
comportant, outre la photo du joueur, la mention de la minute (donc une image
pour chaque minute) et du but marqué. Et ceci dans les 3 couleurs du maillot
(étant donné que l’annonce de la couleur du maillot se fait souvent
tardivement). Cette banque d’image étant prête à être utilisée, c’est quasiment
en temps réel que le club annonce ses buts, d’une manière qui lui est propre et
qu’aucun média ne peut lui ravir. De l’esthétique donc, en contenu
complémentaire à l’annonce brute diffusée partout. (Interview French Web de
Michel Mimran le 26.06.15).
Autre exemple, pendant la coupe du monde de rugby 2015, et avant chaque
match du XV de France, le club activait sa “fabrique” à maillots, dans le cadre de
l’opération #soutiensleXV. Il
suffisait d’envoyer le numéro de
poste choisi avec le # pour
recevoir quasi instantanément la
photo de son maillot à son nom.
Photo évidemment partageable à
l’infini et aux conséquences
virales chez les aficionados.
Les sponsors ont eux aussi bien compris l’importance de la création de contenu
et l’utilisent avec beaucoup d’habilité. Cela a été le cas notamment de la “Cuisine
des Cavernes” avec Sébastien Chabal pendant la coupe du monde de rugby : il
s’agissait d’une série de 4 épisodes (seulement, hélas) totalement décalés, pour
le compte (discret) de la marque de casques audio Beats By Dre. Cette
minisérie a totalisé près de 4 millions et demi de vues sur Youtube et mérite
absolument un détour. 10
10 https://www.youtube.com/watch?v=CgeTvf3pShQ
63
2.4.3. Mutations de la discipline sportive
Y atil une mutation des disciplines sportives à redouter ou espérer avec cette
arrivée massive du digital dans les grands événements ?
La télévision (et ses impératifs publicitaires), en son temps, a fait modifier les
règles de nombre de disciplines. Ce fut le cas sur le Super Bowl qui a vu ses
périodes de jeu raccourcies pour répondre à des impératifs économiques de
vente d’espace publicitaire. Si la retransmission live est la clé de voûte d’un
événement sportif, doiton craindre pour l’intégrité des disciplines ?
Olivier Denis Massé, Directeur délégué à la Fédération Française de Golf livrait
ses impressions sur le sujet au cours d’une interview réalisée en septembre
2015 par La Face Cachée du Sport :
“Ce phénomène existe bel et bien. Le basket c'était 2 mitemps, maintenant
c'est des 1/4 temps pour rajouter des écrans publicitaires. Mais le plus bel
exemple que je connaisse reste le cricket. Un test match de cricket traditionnel à
l’anglaise, ça durait 3 jours puisqu'il fallait sortir tous les batteurs d'une équipe
avant qu’une autre ne rentre. En Inde c'est le sport national, au point que
certaines chaînes ne diffusent que du cricket. Les diffuseurs ont constaté des
pertes d’audience liées notamment à la trop longue durée de ces phases de jeu.
Ils ont donc inventé un format qui s'appelle le 20/20. Cela ne dure plus qu’une
heure et demie, les stades sont pleins, les audiences TV sont au top, le
championnat d'Inde est devenu une référence (n’oublions pas qu’on parle d’un
pays de plus d’un milliard d’habitants), et bien sûr ils ont retrouvé les
annonceurs.
La Face Cachée du Sport :
Donc la concentration du format a permis de faire exploser le business model ?
Olivier Denis Massé :
Bien sûr ! Et le modèle du golf aussi ! Un grand chelem c'est bien parce qu'il y a
du suspens, c'est les 60 meilleurs joueurs du monde, et il n’y en a que 4 par an.
Pour le reste des tournois, c’est très difficile d’avoir des audiences et de l’intérêt,
sans compter qu’un parcours de golf pour un professionnel dure 5 heures et que
les départs s’échelonnent de 8h00 à 12h00. Donc on peut passer 9 heures
64
devant la télévision à regarder des coups de golf de joueurs qui ne sont pas
forcément des stars. C’est pour ça qu’on été créés la Race to Dubaï ou les Fedex
Final aux Etats Unis : pour avoir 5 derniers tournois dans l’année. On ne garde
que les 60 à 80 meilleurs joueurs, il y a du suspense et beaucoup d’argent. Les
chaînes de télévision asiatiques réfléchissent même à des formats de tournois de
golf qui seraient une espèce de “rush golf”, sur des tours de 2 heures de golf
avec peu de joueurs et peu de trous. Pourquoi ne feraiton pas des trous
extrêmement difficiles avec 24 joueurs qui pourraient disputer des tournois sur 6
trous, complètement à l’attaque. Pourquoi pas ?
Mais ceci impliquerait de toucher aux très saintes règles de golf édictées à Saint
Andrews, qui stipulent qu’un match ou un tour doit se dérouler sur 18 trous au
moins. Et rien n’est moins certain que les télévisions y parviennent…
Avec un public ultrasollicité tant par la télévision que par le web, les contenus
sont de plus en plus courts (y compris hors sport). La lassitude étant le pire des
maux et l’abandon de lecture ou de visionnage l’un des fléaux d’internet, il
convient de proposer des formats immédiatement percutants, courts,
rapidement identifiables, et très bien référencés pour les trouver facilement.
Aux mutations des disciplines s’ajoutent l’arrivée de nouvelles disciplines comme
les MMA. Impactantes, c’est le moins que l’on puisse dire (il s’agit de sports de
combat extrêmement violents), ces disciplines se prêtent formidablement bien
aux stratégies digitales.
2.4.4. Eréputation
La réputation et l’eréputation d’un événement sportif sont des enjeux majeurs.
Comment appréhender un bad buzz généré par le comportement ou les propos
d’un athlète, des problèmes de dopage, une erreur grossière d’arbitrage, un
scandale, la triche et répondre de manière pertinente et efficace aux critiques
sur le net par exemple ? La Marque est une promesse et la réputation est la
perception de la promesse (cf Marketing du Sport p.14).
65
Les exemples d’incidents ou de dérapages
sont nombreux, et tous nuisent à
l’événement, au club ou à la Fédération.
En octobre 2014, c’est le community
manager des Girondins de Bordeaux qui a
confondu pertinence et élégance en
retweetant à la veille d’une rencontre
avec le Paris Saint Germain un message
qui comparait Thiago Silva à un
transexuel. Le Paris Saint Germain n’a
évidemment pas apprécié et le club
bordelais s’est fendu d’un tweet
d’excuses.
Le lendemain, toujours très en
forme, le CM des Girondins a
souhaité un bon anniversaire à l’un
de ses joueurs, Henri Saivet… mais
ce n’était pas le bon jour. Et le
joueur l’a manifestement mal pris si
l’on en juge d’après sa réponse :
66
Un mois plus tard, c’est un tweet parti
trop tôt (20 minutes avant la fin du
match quand même !) qui annonçait un
nul entre la Tunisie et l’Egypte alors que
les tunisiens marquaient 10 minutes
plus tard pour une victoire 10.
L’histoire ne dit pas si le CM des Girondins est encore en poste, mais l’image de
sérieux du Club en a pris un sacré coup...
Mais les scandales viennent parfois de beaucoup plus haut et sont difficiles à
gommer. Certains bad buzz confinent à l’incident diplomatique. Les JO de Sotchi
ont été le terrain d’une partie d’intimidation au cours de laquelle la Russie a
défié l’Ukraine : sur les fiches de présentations des athlètes ukrainiens, il était
(entre autres informations) indiqué leurs villes de naissance, suivies de la
mention “Russie” et non pas “Ukraine”. Pire, dans certains cas, l’Ukraine était
bien mentionnée comme lieu de naissance et suivie de la mention “région” (de la
Russie). Un affront que les athlètes n’ont pas laissé passer. La blague n’a pas
non plus amusé les autorités ukrainiennes comme le montre le tweet lapidaire
du ministre ukrainien des affaires étrangères Kostiantyn Grychtchenko : “Le mot
région est clairement de trop”.
Michel Mimran (PSG) est très clair sur la liberté d’expression des joueurs dans
l’interview qu’il a donnée à French Web en juin 2015 : “Les joueurs sont
absolument libres de leurs propos sur leurs comptes et aucune consigne n’est
donnée par le club. Nous ne gérons pas, à de rares exceptions près, les comptes
des joueurs, ils savent gérer leurs comptes tous seuls (...). Certains joueurs
pour certains posts nous laissent la main, mais globalement pour nous, c’est une
opération transparente. On se fait parfois le relais de certains posts de nos
joueurs mais il n’y a pas dans les contrats quelque chose qui stipule qu’on doit
avoir la main dessus. Leur prise de parole sur les réseaux sociaux répond à
l’impératif éthique qui est le leur dans leur contrat : porter très haut les valeurs
de la Marque, avoir un comportement irréprochable, etc.” Excellents
ambassadeurs de la Marque, les joueurs doivent rester libres pour offrir des
67
contenus authentiques à leurs fans, c’est ainsi que Michel Mimran définit l’équipe
du Paris Saint Germain.
Selon Stéphane Rakoto du Stade Français, “le club laisse libre parole a ses
joueurs sur les réseaux sociaux. Il n’interagit pas et aucune modération n’est
faite, sauf si le joueur parle directement du Club. Le Club garde quand même un
oeil (sur une journée , je passe 5 à 6 heures à lire les médias sociaux) mais ils
sont très libres. Cela dit, l’audience sur Twitter étant très importante il va falloir
mettre en place une modération plus officielle avec l’utilisation d’outils de
lecture, un social wall pour rassembler tous les comptes des joueurs et avoir une
vision rapide et efficace”.
Equilibre difficile à tenir donc que celui de la réputation d’un grand événement
sportif compte tenu du nombre d’acteurs et de l’énormité des contenus générés.
Bien que le danger soit bien présent, dans l’ensemble cette capacité numérique
ne semble pas nuire aux images de marque des événements. Même mieux, elle
permet un niveau de transparence appréciable et souhaité. Chacun a su prendre
sa place et assumer son rôle, en toute responsabilité.
MA VISION
Si les enjeux sont comparables, le poids des conservatismes et le
respect des traditions ne mettent pas toujours sur un pied d’égalité les
acteurs de l’industrie du sport face au digital. Cependant, une prise de
conscience généralisée, bien que tardive, a déjà largement contribué à
modifier le visage des événements.
Il reste un point à prendre en considération d’urgence : la connectivité
des enceintes sportives. Stades, arenas, mais aussi parcours de golf,
hippodromes, etc. doivent proposer la connexion à leurs usagers. Et
devant l’imbroglio financier que cela représente, il est juste de penser
que c’est une responsabilité qui incombe au propriétaire des lieux. On
ne peut décemment louer un logement sans eau courante, non ? Ceci
permettrait de laisser cette naissance au digital s’opérer pleinement, et
68
offrirait autant d’opportunités aux sponsors et donc une perspective de
croissance non négligeable.
Attention toutefois, à force de vouloir exister, de ne pas noyer les
consommateurs sous un flot de contenus. L’avenir appartiendra à ceux
qui sauront être différenciants et respectueux de leurs fans. Fréquence
de posts proche du harcèlement, multiplicité des applications mobiles, le
consommateur est de plus en plus au centre d’une attention trop
présente ou jugée trop envahissante.
Un respect qu’il conviendrait aussi d’apprendre à manifester dans la
jungle des réseaux sociaux, terrain de jeux favori de millions
d’internautes. A quand l’organisation d’une vraie compétition de
fairplay sur le net ? Sur le million de tweets qui ont salué la nomination
de Zidane au Real Madrid, combien contenaient des insultes ? L’objectif
principal des Marques sur les réseaux est de créer du lien en
“personnifiant” l’entreprise, il faut tout mettre en oeuvre pour apporter
de l’unité dans ces relations. Mais il faudrait aussi prendre en
considération l’énorme difficulté à être un bon community manager.
Souvent payé au lancepierre, parfois même stagiaire, souvent très
jeune, corvéable à merci, on attend de lui qu’il soit le visage, la voix, les
yeux de son entreprise, et tout cela sans faille, sans dérapage. Et
souvent de jour comme de nuit... Mouton à cinq pattes ? Sûrement. Mais
en prendre conscience est déjà capital. C’est souvent lui aussi d’ailleurs
qui se retrouve en première ligne avec les applications de
livestreaming.
Ah le livestreaming ! Mon outil préféré… Chaîne de télévision
interactive en direct ou replay, réseau social, web radio, mouchard
impudique distribuant ses alertes pour ne rien rater de ses
abonnements, s’il est bien un outil à intégrer à sa stratégie, c’est
celuilà !
Les opportunités ouvertes par cette nouvelle manière de communiquer
sont énormes mais ne sont pas toutes saisies de manière égale. Par
exemple, au cours de mes interviews, j’ai très fréquemment entendu
mes interlocuteurs reconnaître le fait qu’ils ne s’intéressaient pas au Big
Data. Il s’agit pourtant d’une ressource naturelle inépuisable qu’il faut
juste se donner les moyens d’aller cueillir et transformer pour en retirer
69
tous les bénéfices. Et même si on n’a pas en tête toutes les activations
possibles, il faut préparer ses munitions pour l’avenir.
70
PARTIE 3 ESPORT : LES PUREPLAYERS DU SPORT DIGITAL
Il était impensable dans une thèse sur les événements sportifs et le digital de
faire l’impasse sur les pureplayers que sont les acteurs de l’industrie du esport.
Si la définition est délicate à poser et suscite de nombreux débats (peuton
vraiment parler de sport ?), les composantes du esport en compétition sont
rigoureusement les mêmes que celles du sport dit traditionnel. A ce titre, et bien
que des éclaircissements s’imposent (n’est pas gamer qui veut), cette discipline
a toute sa place dans cette réflexion.
L’essentiel de cette partie est fondée sur une conversation avec Matthieu Dallon,
une icône du esport dans sa dimension organisationnelle. Cofondateur et
dirigeant d’Oxent, dont l’activité principale est le développement d’une
plateforme dédiée à l’organisation de tournois de jeux vidéos, il est aussi à
l’origine de l’ESWC (Electronic Sports World Cup), référence mondiale depuis
2003.
3.1. DÉFINITIONS ET PRÉSENTATION
Avant de définir l’esport, voici pour poser le sujet un extrait du Rapport 2015 du
SELL (Syndicat des Editeurs de Logiciels de Loisirs) :
L’histoire du jeu vidéo en France remonte aux années 80 : ces vingt dernières
années ont particulièrement vu l’industrie et ses pratiques de consommation
évoluer. Aujourd’hui 2e industrie culturelle en France derrière le livre, le jeu
vidéo s’est peu à peu démocratisé entrant dans tous les foyers français. À l’aube
des années 2000, seuls 20% de la population française se déclaraient joueurs,
avec une forte proportion d’hommes âgés en moyenne de 21 ans. 15 ans après,
et cela se vérifie depuis quelques années, un français sur deux déclare
désormais jouer aux jeux vidéo, avec une parité quasi parfaite, et une moyenne
d’âge ayant très largement dépassé les 30 ans.
Reprenons la définition du sport proposée par le Robert : “Activité physique
(c’est là que le débat commence) exercée dans le sens du jeu, de la lutte et de
71
l’effort, et dont la pratique suppose un entraînement méthodique, le respect de
certaines règles et disciplines.” La dimension physique mise à part (bien que ce
soit discutable au vu de l’énergie dépensée par les gamers), cette définition sied
exactement à l’esport. “Que requiert une partie de jeux vidéos pour être un
champion ? De l’acuité visuelle, la gestion du stress, des mouvements du corps
etc. Le débat sur le statut de sport ou non du esport est lié à la jeunesse de
cette pratique. Dans quelques années, les mentalités auront évolué.” nous dit
Matthieu Dallon. Et il suffit de voir les images des grandes compétitions d’esport
pour prendre la mesure du jeu, de la lutte, de l’effort, de la concentration et
même de la transpiration des concurrents. Quant aux règles, elles sont le
fondement même de tout jeu vidéo. Question entraînement, et là, c’est sans
doute dans les foyers que le débat fait le plus de bruit, il faut savoir qu’un pro
gamer passe 35 à 50 heures par semaine à peaufiner sa maîtrise… “C’est du
sport 2.0” affine Matthieu Dallon “Je pense que c’est autre chose que du sport.
Et puis dire que c’est du sport passe difficilement auprès des institutions,
notamment en France. La mission d’un Ministère des Sports est que les gens se
dépensent physiquement. Ce qui nous ramène à ce débat sur la comparaison
existant depuis des années, mais pas si essentiel.”
Finalement et très simplement, le sport électronique (en anglais esport ou
esport pour “electronic sport”) désigne la pratique sur internet ou en LANparty
d'un jeu vidéo obligatoirement multijoueurs, par le biais d'un ordinateur et/ou
d’une console.
Ce mot et cette notion d’esport existent depuis 25 ans. Mais dans les faits, les
compétitions de jeux vidéos sont bien plus anciennes et remontent aux années
80 avec les premières consoles et les premiers jeux d’Arcane. Sur nos consoles
Atari, nous étions déjà des gamers et étions déjà des pratiquants de esport,
même si Pacman était plus pacifiste que les personnages de Call of Duty. “On a
parlé de sport électronique, de sport virtuel, d’egaming, puis au fil des années,
l’appellation “esport” s’est imposée” ajoute Matthieu Dallon.
Les meilleurs acteurs mondiaux du sport électronique se rencontrent lors de
tournois tels que le World Championship League of Legends, l'ESWC, la Major
72
League Gaming (MLG), la Cyberathlete Professional League (CPL) ou encore
l'Evolution Championship Series (EVO).
Concrètement, comment ça fonctionne ? Les gamers prometteurs sont repérés
et intègrent des équipes, comme au football. Pour cela, ils reçoivent de l’argent.
La plupart des championnats se jouent d’abord sur internet (entraînement,
sélection des joueurs) mais les phases finales nécessitent, pour un contrôle
optimal, de réunir les joueurs dans un même lieu. Lieu qui peut accueillir du
public. C’est ainsi que l’on voit des arenas comme Bercy ou Wembley remplis de
spectateurs pour acclamer leurs idoles. Les phases finales sont bien sûr diffusées
sur internet. Et pour que la fête soit complète, de plus en plus de spectateurs
sont des cosplayers (contraction de “costume” et “player”) c’est à dire fans des
personnages de jeux vidéo au point de se déguiser pour assister aux tournois.
Ce dernier phénomène montre la tendance fortement “way of life” des gamers.
Nous sommes donc face à des événements “sportifs” à fort potentiel de
spectacle et amplement diffusés sur internet.
Le sport électronique à haut niveau est souvent financé par les sponsors et par
les revenus générés par la diffusion en streaming.
3.2. AMPLEUR DU PHÉNOMÈNE
Quelques chiffres pour bien comprendre.
Les experts du marché de l’esport tels que Newzoo et Superdata estiment que
l’audience globale du esport en 2015 a atteint les 188 millions de personnes
(elle était estimée à 72 millions en 2013). En Asie, le phénomène agite les foules
: les 40 000 places du Seoul World Cup Stadium (plus grand stade de football
d’Asie) ont été vendues pour la finale de la saison 4 de League of Legends . 11
En France, l’industrie du jeu vidéo pèse 2,7 milliards d’euros par an, deux fois
plus que l’industrie du cinéma… C’est la première industrie culturelle au monde.
11 The future of sports Attention Span Media Septembre 2015
73
On estime à 1,2 milliards le nombre de joueurs dans le monde, et parmi eux, un
millier de progamers touchant plus de 100 000 dollars par an si on additionne
les gains de compétitions, les droits et le sponsoring. “60 millions de dollars ont
été distribués sur le circuit professionnel en 2015” selon Matthieu Dallon. Et
parmi ces 1000 progamers, on recense un centaine de joueurs stars, c’est à
dire reconnus dans la rue, sollicités pour des autographes, exactement comme
un Ronaldo ou un Messi. Quel est l’avenir de ces joueurs professionnels ? “On n’a
pas encore le recul pour répondre à cette question. Mais on suppose qu’ils ont
devant eux 20 à 25 ans de vie professionnelle” répond Matthieu Dallon. Il n’est
pas rare de voir des jeunes gens gagner 5000 euros par mois grâce aux
tournois, sponsors, etc. C’est le cas d’une icône française, Gotaga , qui totalise 12
en outre plus d’un million d’abonnés sur sa chaîne Youtube (tarif habituel pour
ces pro gamers stars).
Du côté des diffuseurs, citons le rachat de la plateforme Twich TV (spécialisée
dans la diffusion de game stream) par Amazon pour 1 milliard de dollars. Un
marché tellement prometteur que Youtube a lancé Youtube Gaming en août
2015, proposant le double service de diffusion en direct et d’archivage de vidéos.
Enfin, et c’est une première en France, la chaîne l’Equipe 21 a diffusé le vendredi
22 janvier 2016, en prime time, l’efootball league, sa première émission dédiée
à l’esport. Les chiffres fournis par Lefigaro.fr annoncent 120 000 spectateurs
avec un pic à 194 000, alors qu’habituellement les audiences de cette case sont
de l’ordre de 90 000 personnes.
3.3. CIBLE
Le tour d’horizon est vite fait concernant les cibles. Il faut comprendre que si la
moyenne d’âge aujourd’hui est à 35 ans (en France), elle ne cesse d’augmenter.
Car un joueur reste joueur même en vieillissant.
12 https://www.youtube.com/watch?v=7GJsvTLcwEA
74
En revanche, l’audience des
compétitions reste une audience assez
jeune. Sans doute peuton comparer
cela aux spectacles musicaux live. Un
quinquagénaire continue à écouter U2
sans pour autant avoir autant envie
d’aller les écouter au Stade de France.
La segmentation est faite à la source,
par les éditeurs de jeux (lesquels jeux
comportent des recommandations d’âge Call of Duty est, en principe, interdit
aux moins de 18 ans).
L’infographie cidessus est empruntée au Rapport 2015 du SELL.
3.4. PASSERELLES ENTRE ESPORT ET SPORT TRADITIONNEL
“Beaucoup des acteurs du sport traditionnel (sauf les institutions) s’intéressent
au esport” précise Matthieu Dallon. “Jusqu’au groupe Infront Sports & Media.
Tout le monde a compris qu’il y avait un intérêt, notamment d’atteindre une
cible de jeunes, difficiles à toucher. ESPN aux US s’y intéresse, beaucoup
d’acteurs de la NBA investissent également directement dans le esport. Le
monde du sport et le monde du esport sont deux mondes qui cohabitent bien.”
Alors quelles sont les passerelles existantes entre esport et sport traditionnel ?
Stratégie de jeu
C’est Boris Helleu qui nous donne un premier élément de réponse : “Il y a un
enjeu de taille, c’est le pont qu’on va faire entre les jeux vidéo et le Big Data.
Par exemple, Football Manager, apporte des statistiques qui sont assez pointues
et on a vu des petits clubs utiliser ce jeu comme un outil de prospection.
D’autres éditeurs de jeux vidéo ont proposé leurs services à des clubs pour de
l’expertise tactique : IA Sport avait passé un contrat avec un club anglais pour
faire de l’analyse vidéo à partir de ses propres jeux.”
75
Business
Il y a un business commun déjà en place, à l’instar du NBA Europe Live
Presented by EA Sports (éditeur de jeux vidéos) qui consiste en un match entre
deux clubs NBA au Palais Omnisport de Paris Bercy.
Et Boris Helleu le souligne aussi en parlant de “l’articulation entre les vrais
joueurs et les joueurs de PES. Ce qui est amusant, c’est que de plus en plus les
marques utilisent des véritables sportifs pour faire la promotion de leurs
produits, ce qui pose d’ailleurs des questions quasiment anthropologiques.”
Des questions que ne se posent plus les dirigeants du Paris Saint Germain. Le
Club est bien décidé à franchir le pas, et ce à courte échéance (d’ici un an).
Michel Mimran précise : “On investigue. On est en retard, on devrait déjà y être.
Je pense qu’il faut qu’il y ait des équipes du Paris Saint Germain dans des
compétitions de esport, il faut qu’on suscite des vocations, qu’on organise
nousmêmes nos propres compétitions.”
Et la compétition en esport, ce sont des opportunités de diffusion phénoménales
et donc des perspectives de reventes de droits de retransmission considérables,
sans parler des contrats de sponsoring. S’il est bien un business à ne pas rater,
c’est celuilà. Plus qu’un morceau de beurre dans les épinards, ce secteur
pourrait bien représenter une part non négligeable des revenus engendrés par
un club, un organisateur, une fédération ou tout acteur décidé à jouer le jeu.
Marketing
D’autres types de passerelles plus marketing sont également déjà en place.
Nissan a innové avec un concept plutôt surprenant : Partenaire majeur de l’UEFA
Champions League, le constructeur a conçu un système permettant de jouer à
Pro Evolution Soccer 2016 depuis un Qashqai. Le projet s’appelle Project
Controller, driving football. Toutes les commandes de la voiture sont utilisées
pour mettre en action les joueurs dans l’écran disposé devant le véhicule, depuis
les essuieglaces jusqu’à la commande bluetooth du téléphone… Le résultat, pas
si absurde car il souligne le souci et la mise en oeuvre d’une grande précision
technique chez le constructeur, est assez spectaculaire comme en témoignent
76
les images visibles sur ce lien :
https://www.youtube.com/watch?v=4nQV1XTugs
Autre exemple récent, le jeu ’”Eurosport Ski Challenge” qui n’est ni plus ni moins
qu’on jeu vidéo de ski. L’idée, pour Lilian Baudard Guillot, c’est d’être reconnu
comme LA chaîne du ski. Développé par le studio Greentube Internet
Entertainment Solutions, ce jeu propose d’entreprendre une carrière dans le ski
et offre à l’agilité de ses joueurs 11 pistes de descente légendaires (dont la Face
de Bellevarde, cocorico !). Et sur chacune des pistes, le sponsor présent sur les
banderoles n’est autre qu’Eurosport. “On s’est associé au jeu Ski Challenge pour
obtenir le naming et la visibilité onsite. C’est un jeu de ski alpin basé sur la
capitalisation de l’expérience, où le joueur suit la saison de ski. Notre but est
clairement de faire l’association “ski” égale “Eurosport”. On va s’ouvrir à des
gamers qui sont plus jeunes, et c’est aussi ce qu’on cherche. Notre audience
n’est pas très jeune sur le ski. Donc on attire cette audience par un côté ludique
pour la transformer en téléspectateurs ou consommateurs.” explique Lilian
Baudard Guillot. Exemple assez probant, il suffit de se laisser tenter par
l’expérience du Eurosport Ski Challenge pour vite devenir addict de ces
descentes sans danger autre que celui d’avoir envie de se connecter à Eurosport
pour suivre du “vrai” ski.
En revanche pour l’instant, il n’est pas dans les prévisions d’Eurosport de diffuser
du esport.
Matthieu Dallon conclut en insistant sur les opportunités offertes par ces
passerelles : “Les opportunités marketing sont considérables. On peut tabler sur
des métiers communs, des profils d’experts communs, des business model
communs (sponsoring, droit, merchandising, exploitation des fans...), etc. Visa
ou Coca Cola l’ont déjà bien compris et sponsorisent les Championnats du Monde
de League of Legend. Le talent nécessaire au jeu vidéo est reconnu et c’est sur
cette valeur que construisent les marques aujourd’hui et sur les nouvelles idoles
que sont les progamers.”
Il existe déjà des disciplines aux confins du esport qui s’expriment dans le
monde réel, comme les championnats de pilotage de drones. On dirait des
images issues de Star Wars : les compétiteurs, qui pilotent en immersion
77
(caméra embarquée sur le drone et lunettes vidéo sur les yeux), sont réunis soit
en pleine forêt en s’affrontent sur un circuit dangereux, soit sur un stade ou
dans un champs pour des courses de vitesse. Le spectacle est époustouflant, et,
par l’immersion et le pilotage par joystick ou manettes, fait intervenir des talents
très proches de ceux des gamers. Le danger étant de réduire en miette un beau
jouet, et la concentration des pilotes se rapproche de celle d’un sportif qui doit
gérer à la fois une performance et un danger réel.
3.5. EVOLUTION À 10 ANS
Peuton imaginer qu’à l’avenir le jeu vidéo mènera à la réalité ? Maintenant que
Yamaha sait faire piloter ses motos par des robots, verronsnous fleurir des
grands prix de motos pilotées par des robots, euxmêmes pilotés à distance par
des joueurs ou programmés par des joueursprogrammeurs ?
La réponse de Boris Helleu est moins enthousiaste : « je serais un peu plus
mesuré làdessus. Peutêtre qu’une des caractéristiques majeures du spectacle
sportif reste encore la mise en scène corporelle : c’est le côté immanent, les
corps, les cris, la sueur, le sang, les risques de blessure, la fatigue, etc. Une des
caractéristiques fondamentales du spectacle sportif c’est l’identification qu’on
peur avoir avec des personnes qui sont sur le terrain. ».
En revanche, faire un parcours de golf sur console et depuis son salon en
affrontant Mc Irloy en temps réel et trou par trou semble tout à fait réalisable…
Ou Froom sur un contrelamontre depuis son vélo d’appartement. Pas du sport
ça ? Allons !
De façon plus prosaïque, on peut être prédictif sur l’engagement en se basant
sur le chiffre connu de 1,2 milliard de joueurs dans le monde en 2015. Ceci
représente un potentiel de marché énorme si ces joueurs (en augmentation
permanente) devenaient des spectateurs. Ceci modifierait considérablement les
rapports qu’ont les organisateurs avec les sponsors, les salaires des joueurs, et
surtout l’intérêt porté les diffuseurs traditionnels (TV) et le web. Toute cette
économie ne demande qu’à exploser en somme. Et pas d’inquiétude sur la
78
segmentation, nous l’avons vu, à chaque jeu son public et sa moyenne d’âge, il
devrait y en avoir pour contenter tous les publics.
Sur les jeux en euxmêmes, plusieurs changements vont possiblement intervenir
dans les années qui viennent :
tout d’abord ils seront sans doute conçus, dès le départ, pour un double
usage. “Ils seront aussi créés pour être regardés,” pense Matthieu Dallon
“alors qu’aujourd’hui on est obligé de créer des plugins pour transformer
l’image et la rendre visible à un public”
Ils seront également conçus pour toucher des publics non éduqués.
Aujourd’hui, il faut être initié pour suivre une partie de League of Legend,
demain la lecture en sera plus simple pour ne pas rebuter un éventuel
public néophyte. Ce qui permettra de confiner à la puissance, par son
universalité, du sport.
“les schémas violents devraient faire davantage de place à des jeux tous
plublics, mais très puissants en terme de gameplay, qui vont faire
exploser l’audience du esport” ajoute Matthieu Dallon.
D’autres grands changements devraient intervenir poussés par la maturité de
certaines technologies comme la VR. Selon Matthieu Dallon, “La réalité virtuelle
sera intéressante pour révolutionner l’expérience spectateur, davantage que
pour les joueurs. Les fans pourront se projeter dans une partie en choisissant
son point de vue, en faisant sa propre réalisation. Il y a beaucoup plus de
spectateurs que de joueurs, c’est comme le shéma de la Formule 1 ou du
tennis.”
Du reste, la 1ère coupe du monde de VR a été organisée et a donné lieu à des
expériences intéressantes. Deux tournois ont été disputés, avec les mêmes
joueurs. Le premier tournoi se jouait avec l’interface classique, tandis que le
second imposait le port d’un casque 3D et des chaises à vérins rotatifs à 720°.
Les sensations et la maîtrise du jeu devenant totalement différentes, ce ne sont
pas les mêmes joueurs qui ont gagné les deux tournois… On se rapproche
encore plus du sport traditionnel avec l’acquisition de sensations et d’émotions
réelles.
79
La réalité augmentée n’en est qu’à ses prémices, mais elle sera sans aucun
doute le sel du monde du jeu vidéo sous peu. le film Pixels (Chris Columbus)
sorti en juillet 2015 permet de toucher du doigt l’avenir du jeu vidéo dans cette
dimension “augmentée”, grâce à des combats surréalistes entre des gamers
d’élite (héros du film) et des personnages et objets mythiques des grands jeux
d’arcane des années 80 90 (Pac Man, Space Invadors, etc.). Outre l’intrusion
dans le décors réel de ces échappés des consoles, ce qu’on note au visionnage
de ce film, c’est que les héros qui sauvent la planète sont des anciens champions
du monde de jeux vidéo, des joueurs exceptionnels, et que leur talent est
reconnu au même titre que n’importe quel talent sportif ou physique.
Anecdotique bien entendu car s’agissant d’un film, mais l’anecdote démontre que
les mentalités évoluent à l’égard du gamer et que l’on peut, quel que soit le
public, reconnaître et admirer les compétences exceptionnelles, fussentelles en
jeu vidéo…
La startup Magic Leap développe des applications stupéfiantes pour lunettes 3D
qui seront demain, sans aucun doute, la base du contenu des jeux vidéos (et
autres applications) . 13
La robotique devrait occuper une place de choix dans l’esport du futur. Les
compétitions hommerobot devraient logiquement voir le jour, au même titre
que les compétitions entre robots. Le talent se trouverait donc reporté sur les
développeurs capables de créer les algorithmes gagnants.
Enfin, le développement des interfaces devraient à l’avenir aller vers des
capteurs de plus en plus fins, biométriques, permettant la mise en synergie de
multiples fonctionnalité simultanément, et permettant au joueur d’exprimer son
talent tant physique que mental. “Rétine, mouvements du corps, battements de
coeur seront des contrôleurs d’action dans le jeu. Ce sera captivant, tant que ça
peut être retranscrit pour les spectateurs” ajoute Matthieu Dallon.
Pour conclure, il y a une vraie possibilité pour que les business models évoluent
dans les années à venir. On a appris le rachat en janvier 2016 de la Major
League Gaming aux US pour une bouchée de pain. “C’est la confirmation que les
marques indépendantes et organisatrices de compétition se font manger par les
13 https://www.youtube.com/watch?v=kw0JRa9n94
80
éditeurs de jeux. La question majeure reste la question des droits. En sport,
courir ou faire du ski n’appartient à personne. Mais en gaming, tout ce qui crée
la performance passe par une image protégée par un copyright qui appartient au
créateur du jeu ou au possesseur des droits. Les acteurs et aujourd’hui les
éditeurs de jeux s’aperçoivent que tout ça leur appartient. Tous les plus grands
tournois sont donc organisés par les éditeurs de jeux ce qui contribue à
déprécier la valeur des leagues ou des organisateurs.” Ajoute Matthieu Dallon.
Et en effet, Microsoft vient de lancer sa propre compétition, un grand
championnat réservé aux joueurs français, sur plusieurs jeux Xbox One dont
Halo 5. Il a débuté le 17 novembre 2015, et sera doté de 100.000 euros pour sa
première saison.
La reconnaissance suprême de l’esport sera les Jeux Olympiques. Absurde ? Pas
pour tout le monde ! Korea eSports Association et le Comité Olympique coréen
semblent conjuguer leurs efforts pour que l’esport soit reconnu comme sport
olympique, soit au même niveau que les échecs… Vu comme ça, et compte tenu
des sommes en jeu, il y a fort à parier sur une réalisation de cette ambition.
81
MA VISION
Le terme “esport” n’est pas qu’une dénomination hypocrite pour une
activité qui sème la discorde dans nos foyers. Oui, nos enfants jouent
aux jeux vidéo ! Mais avonsnous seulement cherché à comprendre et
reconnaître leur talent ? Si nous ne l’avons pas fait, d’autres que nous,
moins soucieux d’éducation que de business, en ont compris le
formidable potentiel et le commercialisent. Car on ne joue pas
seulement au jeu, on le regarde aussi. Et les spectateurs, de plus en plus
nombreux sur internet, remplissent désormais des stades, et les chaînes
de TV rentrent dans la partie !
Certaines Marques ont déjà compris les intérêts :
Les sponsors sur les grandes compétitions, comme
Coca Cola et la League of Legend
Les développeurs de leurs propres jeux, comme
Eurosport dans le but d’accroître et de rajeunir une
cible de téléspectateurs sur l’offre ski.
Par ailleurs, les passerelles s’établissent progressivement entre sport
traditionnel et esport, mettant en jeu des athlètes contre des gamers.
Et en regardant vers l’avenir, il est évident que les compétences vont
s’entrecroiser et que les performances sportives se mesureront en ligne
via des applications de gaming.
Que les sponsors se rassurent, on ne parle pas seulement d’adolescents,
il s’agit d’une cible qui vieillit progressivement. Le jeune gamer devient
un jeune adulte gamer qui devient un senior gamer. 50% de la
population française déclare jouer à des jeux vidéos…
Alors ? On regarde passer le train ou on monte dedans ?
82
PARTIE 4 QUELLE ÉVOLUTION D’ICI 10 ANS ?
Et dans 10 ans ? A quoi ressembleront les grands événements sportifs ?
Dans 10 ans la France accueillera peutêtre les JO (2024). Et si la réception des
Jeux n’est pas encore gagnée, notre “portecandidature” tricolore, Tony
Estanguet, l’annonce d’ores et déjà : “Nous plaçons l’innovation et le digital au
coeur de notre projet”. Une promesse réjouissante à ce stade de la compétition
pour l’accueil.
Développement durable
Une chose semble acquise : les événements seront de plus en plus propres. Ce
qui aura des conséquences directes sur le format de certains événements. Par
exemple dans l’hypothèse ou le Dakar devrait ne se courir qu’avec des véhicules
électriques, les étapes seraient sans doute raccourcies.
La tendance “verte” des événements se généralise au point que certaines
agences spécialisées proposent aux organisateurs un label d’événement propre.
Un audit est réalisé afin de cerner les points d’amélioration (récupération des
déchets, CO2, etc.) et des solutions alternatives sont proposées et mises en
place. Il peut même être proposé des actions de compensation des émissions de
gaz à effet de serre. Dans le cas d’un événement créant X quantité de CO2,
l’organisateur peut choisir de payer pour la mise aux normes d’une usine dans
un pays émergent, laquelle mise aux normes permettra de réduire d’autant
l’émission de ces gaz à effet de serre. Une manière donc d’atteindre une
neutralité CO2. Ce service est proposé par l’agence Love the World notamment.
Travail collaboratif
Pour préparer l’avenir, “Amaury Lab” recrute des start ups du sport. Cette
seconde promotion qui s’intitule “Données et informations pour le sport et ses
communautés” se concentrera sur trois axes principaux :
Comment mieux exploiter la donnée sportive pour fournir une information
enrichie et inédite ?
Quels formats collaboratifs autour des évènements sportifs ?
Nouvelles écritures enrichies pour comprendre et partager le sport.
83
C’est en 2014 que le groupe Amaury qui détient notamment l’Équipe, a créé
“Amaury Lab”, le premier incubateur d’un groupe de presse en France; l’objectif
étant de favoriser des passerelles entre ces jeunes entreprises et l’ensemble des
acteurs du groupe Amaury.
Soutien des institutions
Les institutions ne sont pas en reste puisque sous l’impulsion de la Mairie de
Paris et Paris & Co, le “Tremplin” a été créé. Il s’agit d’une plateforme
d’innovation pour le sport. En plus d’être un incubateur de startups dont l’objet
est de pousser à l’innovation, il héberge, accompagne, coache, les 200 startups
élues. Le Tremplin va s’installer en mai 2016 au stade Jean Bouin à Paris et
constitue une première mondiale : c’est le seul écosystème créé autour du sport.
Retard dans la prise de conscience
Si l’ensemble des acteurs de l’industrie du sport s’entend à accélérer leurs
acquisitions en matière de numérique (ressources humaines et outils
technologiques notamment), il n’en reste pas moins vrai que majoritairement
cette prise de conscience a été tardive (à quelques exceptions près). Dès lors
nous sommes aujourd’hui face à une exigence d’immédiateté qui laisse peu de
place et de temps à une réflexion sur le long terme et au prédictif.
Maturité des spectateurs
La deuxième problématique est la maturité des spectateurs, et notamment en
France. Le supporter français n’est pas un geek, ne nous en déplaise. Le
supporter d’aujourd’hui va au match comme il va au spectacle et son attention
est toute acquise à ce qui se passe sur la pelouse.
Mais demain ? Les acteurs de l’industrie du sport ont à coeur de proposer, par
l’innovation, toujours plus de service clients. Jusqu’à maintenant ce service
s’exprime surtout par l’entertainment. Mais lorsque tous les points de friction
auront été étudiés et adressés, des solutions facilitant la vie des usagers seront
proposées en masse, et ce avant, pendant et après les exhibitions sportives et
nul doute que ces nouveaux outils sauront trouver leur public.
84
Connectivité des stades
Enfin, la grande inconnue et sans doute la problématique majeure est la
connectivité des stades et arenas. Pourronsnous vraiment compter sur une
connexion totale et partout rendant ATAWAD notre consommation d’événements
sportifs ? A ce jour les débats sont nombreux. Et si le problème du coût n’était
que la partie émergée de l’iceberg ? Si en fait, la réflexion, bien plus profonde,
était : quelle expérience voulonsnous proposer aux fans ? Les interrogations
sont nombreuses autour de la “présence” des supporters si le match est mis en
concurrence avec un contenu toujours plus riche, accessible sur les
smartphones. La pertinence de ce questionnement est contrebalancée par la
promesse d’une génération à venir, 100% digitale native, qui acquiert de façon
inexorable un don d’ubiquité. Ces enfants d’aujourd’hui seront les fans de
demain, parfaitement capables (et sans doute bien incapables de faire
autrement) de suivre un match tout en jonglant avec d’autres informations. Il
sera indispensable, contrairement à aujourd’hui, de proposer à ces
consommateurs cet essentiel dont ils ne sauraient comprendre l’absence.
Michel Mimran se veut rassurant sur la potentielle perte d’attention des
spectateurs pendant un spectacle sportif : “Je ne me pose pas cette question de
savoir si nous voulons à tout prix que les gens regardent le match. Ils ont
acheté leur place, ce sont des hommes libres, et s’il y a une personne qui n’a
pas envie de regarder le match, pour moi c’est assez neutre. Dans une foule de
50 000 personnes, ça ne se verra pas tellement. Mais je doute très fortement
qu’il y ait 50 000 personnes qui ne regardent pas le match qui est sous leurs
yeux. Tout simplement parce que je ne crois pas que nous allons délivrer
quelque chose de plus beau que ce qu’il y a sur le terrain. Nous allons
développer quelque chose de complémentaire, mais ce serait avoir très peu de
confiance en Zlatan Ibrahimovic et toutes nos stars et beaucoup trop de
confiance en nous que de croire que ce que nous allons produire va davantage
intéresser les spectateurs que le match.”
Maintenant, si tout repose sur la connectivité, il faudra être vigilant et prévoir
des solutions de secours en cas de défaillance technique. Citons l’aventure
malheureuse vécue pendant un match de la NFL en janvier 2016, indûment
imputée aux tablettes Microsoft utilisées par les coachs : pendant 20 minutes,
85
coachs et joueurs se sont retrouvés privés de leur outil stratégique. Ce bug était
en réalité causé par un problème de connexion.
4.1. RETRANSMISSION
La réflexion autour de la retransmission d’images est cruciale. Une part non
négligeable des recettes générées provient des diffuseurs à l’acquisition des
images, et les montants ne font qu’augmenter (cf graphique cidessus émanant
du rapport “The future of sport”) : augmentation des droits TV perçus par la NFL,
multipliés par 10 en 30 ans ). Ceci impose une anticipation des menaces et des 14
challenges liés à l’utilisation des nouvelles technologies.
4.1.1. Live streaming
Les problématiques liées au livestreaming et aux droits de diffusion d’image que
l’on connaît aujourd’hui seront sans doute de l’histoire ancienne dans les années
à venir. La situation en 2016 est très claire : les droits n’appartiennent qu’à
celui qui les a achetés, à savoir au diffuseur. L’organisateur et/ou propriétaire de
l’événement n’en est plus propriétaire dès lors qu’il les a cédés. Tout juste
peutil, dans certains cas, négocier quelques minutes par jour de live streaming
(c’est le cas pour Roland Garros et la grande responsabilité est de bien choisir
les 15 minutes cumulées d’images qui peuvent être distribuées sur le site web
14 The future of sports Attention Span Media Septembre 2015
86
en direct). Car si les images peuvent être librement utilisées le lendemain, en
matière de sport, le direct est la seule vérité.
Dans ce rapport BtB, le respect des termes du contrat est relativement aisé à
mettre en oeuvre.
En revanche, qu’en estil du public ? Comment imaginer qu’avec l’avènement
des outils de live streaming, gratuits, et la connectivité des enceintes sportives,
on peut empêcher le public de partager ce qu’il voit ? Un public qui a pour
habitude de partager les plus insignifiants des détails de sa vie, comment peutil
passer, seulement parce que c’est interdit, à côté de l’opportunité de diffuser
une balle de match NadalFederrer ? Et comment les propriétaires d’événements
et détenteurs de droits peuventils, autrement qu’en débranchant la prise, faire
respecter cette interdiction ?
Sûrement pas, comme c’est le cas aujourd’hui, en stipulant au dos des billets
que la diffusion d’images est interdite.
Il va vraisemblablement se passer la même chose qu’avec la musique, à savoir
un accès illimité à ce type de données, moyennant sans doute un abonnement (à
terme). Payable par le diffuseur ou le destinataire ? Et à qui et comment
pourraient être reversées ces redevances ? Sûrement y atil là un nouveau
modèle à inventer.
4.1.2. Multiscreen
Si cet outil permet de choisir de ne suivre qu’un joueur au golf (par
exemple) le risque est l’utrasegmentation des spectateurs : soit ils sont
passionnés du tournoi et suivront l’ensemble du tournoi, soit ils sont
davantage fans d’un joueur précis, et ils ne regarderont pas les autres
compétiteurs. Cela peut bouleverser la perception globale d’un
événement.
Et ce bouleversement peut aussi impacter les contrats publicitaires. Pour
rester dans le golf, si les téléspectateurs et internautes choisissent de ne
regarder que McIlroy, non seulement ses sponsors devront le payer
davantage, mais surtout, comment calculer les droits d’engagement des
sponsors de l’événement ? Sur le nombre de vues, comme sur un site
web?
87
Mais le plus gros bouleversement viendra peutêtre des partenaires
commerciaux des gros événements, comme l’annonce Michel Mimran : “Le
digital fait déjà beaucoup évoluer les contrats de sponsoring. Il y a 56
ans ils ne concernaient que la visibilité à la fois autour du stade et du
maillot. Aujourd’hui, les contrats intègrent énormément d’activation
digitale, la visibilité de la Marque sur les réseaux sociaux, les mesures de
cette visibilité et de l’engagement des fans sur des contenus digitaux qui
intègrent les Marques partenaires, etc. Autant d’éléments qui n’existaient
pas avant. On ne va plus voir un partenaire aujourd’hui en lui proposant
uniquement de la pub dans le stade et sur le maillot.”
4.1.3. Technologies 4K et 8K
D’un point de vue technologique, la 4K (ultra HD) devrait devenir rapidement la
norme. Pour se convaincre de sa supériorité sur les technologies traditionnelles,
il suffit de regarder la vidéo :
https://www.youtube.com/watch?v=0vrdgDdPApQ.
Le match de NBA entre les Toronto Raptors et l’Orlando Magic a été le premier
match au monde a avoir été diffusé, en janvier 2016, en 4K.
Mais pour devenir une réalité, encore faudraitil équiper tous les acteurs de la
chaîne de valeur. Depuis le broadcaster, en passant par le diffuseur et bien sûr,
l’utilisateur final. Le bilan est dressé par Eric Novel, DG Panasonic France :
“La diffusion des JO de 2020 à Tokyo (Panasonic est partenaire officiel des JO
NDLR) sera intégralement faite en 4K, avec la chaîne japonaise qui diffusera les
images dans le monde entier. Mais cela ne veut pas dire que tous les pays
diffuseront en 4K, tout dépendra de leur capacité vidéo. Le retard vient des
diffuseurs. Une chaîne comme France 3 en journée ne diffuse toujours pas en
Full HD, ses équipements ne lui permettent pas de le faire. Et pour les ménages
en France, pour recevoir de la 4K ils doivent obligatoirement être en fibre
optique et le taux d’équipement est encore faible. Donc pour le moment, la
population n’a pas la possibilité de recevoir ces contenus en 4K. Chez Panasonic,
on produit des technologies qui mettent quelques années à être embarquées sur
les diffuseurs. Car il faut changer tout un parc de caméras professionnelles, en
principe changées tous les 7 ans.”
88
Mais on va aussi voir arriver les écrans 8K. Eric Novel nous a confié qu’ils
devraient commencer à être commercialisés d’ici 4 à 5 ans. Outre leur très haute
définition, la tendance des écrans de demain, ce sera leur grande taille
(tendance déjà amorcée aujourd’hui et confirmée par les présentations au CES
2016). Donc nos écrans demain auront une résolution 2 fois supérieure à celle
proposée aujourd’hui et leur taille sera plus importante, notamment pour
permettre la diffusion multiscreen. Les différents contenus pourront vivre
ensemble sur un même écran.
4.1.4. Réalité virtuelle / Technologie 360°
Que ce soit avec le live streaming, en multi screen et/ou avec les technologies
4K et 8K, ce qui va vraiment changer la perception des événements, c’est bien
l’immersion rendue possible grâce à la vidéo 360°. Le casque de réalité virtuelle
sera sans doute un basique dans les foyers d’ici 10 ans. (cf chapitre 4.7)
4.2. STADES ET ARENAS
Les progrès à faire en matière de stades connectés, on l’a vu, sont
considérables. Et les équipements ne surgiront pas par magie pour combler les
manques d’ici 10 ans. Les mentalités doivent d’abord évoluer. Et ce n’est pas
l’actualité du 21 janvier 2016 qui va nous rassurer sur ce point. La loi Macron sur
le numérique, baptisée Noé (pour Nouvelles Opportunités Economiques) a été
retoquée et ses différents éléments devraient être éparpillés en amendements et
insérés dans d’autres textes de loi non exclusifs sur le numérique. C’est dire
l’enthousiasme et la confiance du gouvernement sur le sujet...
En attendant, le stade tel qu’on le connaît en 2016 va sans doute devoir
partager la vedette avec un petit frère plus virtuel. C’est en tout cas ce que
semble annoncer l’ouverture récente du Future Arena d’Adidas à quelques
foulées du Stade de France. L’idée, très simple, est de couvrir les murs d’une
89
salle avec des écrans restituant les images d’un public réagissant aux actions se
déroulant sur le “terrain”. La
superficie de celuici permet
des matchs de foot à 5. 10
régisseurs tirent les ficelles de
50 000 marionnettes digitales
pour offrir aux joueurs
engagés une expérience de
match international des grands
soirs . Si l’expérience 15
aujourd’hui semble manquer
de chaleur, il y a fort à parier
qu’avec les techniques que nous évoquerons dans les points suivants, l’idée
s’enrichisse au point de devenir une enceinte sportive incontournable. Par
ailleurs, d’une expérience immersive pour les joueurs, le concept pourrait bien
évoluer vers quelque chose de très interactif, les 50 000 spectateurs virtuels
pouvant très bien être 50 000 individus filmés chez eux et réagissant en direct.
L’évolution possible de ce concept pourrait aussi être d’installer des écrans dans
les “vrais” stades pour combler, le cas échéant, le manque de spectateurs réels.
Nos stades ont des pelouses chauffées mais qu’apporteraient des pelouses
connectées ?
Une meilleure connaissance de son hygrométrie et donc l’optimisation de
l’arrosage qui pourrait être déclenché automatiquement et interrompu dès
l’objectif atteint
Une connaissance précise de sa température ce qui permettrait de réguler
au plus juste le chauffage
une appréhension précise des points de sollicitations principaux sur le
terrain en vue de remplacements optimisés (morcelés)
Des avantages essentiellement développement durable donc.
15 Future Arena by Adidas : https://www.youtube.com/watch?v=_nQScl5REnI
90
Tant qu’à réfléchir développement durable, les stades pourraient tout aussi bien
être couverts de panneaux solaires, fournissant ainsi l’énergie nécessaire à faire
fonctionner la connectivité intérieure.
Et, dans le même esprit, l’énergie déployée par 80 000 spectateurs pourrait bien
être captée et transformée pour l’éclairage, sur le modèle de ce qui se fait dans
certaines boîtes de nuit.
Les stades du futur s’adapteront probablement à l’accueil d’un plus grand
nombre de spectateurs qui pourront goûter à l’ambiance sans être autour du
terrain. Il est vraisemblable que des espaces additionnels, munis d’écrans
géants, soient créés, proposant des billets moins chers, mais garantissant les
frissons liés au partage d’émotions entre des centaines de supporters . Le 16
match au pub, mais en mieux.
4.3. QUELLE UTILISATION DU BIG DATA ?
Principaux freins : collecte / traitement / éthique
L’explosion des wearables et autres pilules connectées font prendre au sport un
virage sans précédent. A l’heure ou économie et performances sont étroitement
liées, il est essentiel pour un club de faire les bonnes acquisitions. Quoi de plus
performant qu’un savant algorithme pour prédire une harmonisation dans une
équipe entre différents talents ? Quoi de plus parlant que les données mesurées
en rythme cardiaque, récupération, température, respiration d’un sportif avant
de songer à l’intégrer à son équipe ? C’est tout un business model qui reposera
sur la data. Le magazine Forbes a estimé que le Real Madrid pesait 3,26 milliards
en 2015, le plaçant donc en tête des clubs les plus riches du monde.
“Au regard des sommes grandissantes mises en jeu, l’enjeu sportif n’en prend
que plus d’importance. Une nonqualification en Ligue des Champions entraîne
de lourdes conséquences sportives, mais aussi et surtout économiques.
L’Olympique de Marseille a vu son budget 2015 baisser de 16 % soit 20 millions
d’euros, alors que la compétition reverse chaque année un peu plus de 1,2
16 The future of sport Attention span media Septembre 2015
91
milliard d’euros aux clubs participants.” écrit Max Metral dans son article Quand
la data dope l'économie du sport le 1er décembre 2015 dans lesechos.fr. A
l’instar des grandes entreprises, la recherche de talents reste donc un enjeu de
taille, mais les outils changent. D’un recrutement sur CV, nous passons à un
recrutement sur qualités physiques. C’est donc la promesse de performance qui
primerait sur la performance réelle. Jusqu’à quel point un dirigeant et un
entraîneur peuventils faire progresser un sportif dans le respect de sa santé ?
La data devrait répondre.
Analyse prédictive
Et le Big Data ouvre l’ère de l’analyse prédictive, sur la base de 3 enjeux
majeurs :
améliorer le jeu, notamment par la composition des équipes
optimiser les performances sur le terrain en temps réel
prévenir, calculer et anticiper les risques physiques
L’utilisation de l’analyse prédictive permet de pousser à leur maximum les
limites physiques des athlètes, et d’offrir le spectacle sportif le plus extrême aux
spectateurs.
Remplissage des stades
Si la recherche de talents et l’excellence du spectacle sportif sont primordiaux,
l’enjeu majeur pour les clubs sportifs reste le remplissage des stades et la
consommation dans et hors stade afin de ne plus dépendre que des résultats
sportifs et s’assurer une stabilité financière. “Les clubs se dotent de services
marketing importants afin de booster leur merchandising et donner envie aux
supporters de venir aux matchs. L’analyse de données prend alors tout son sens
dans sa faculté à préciser et analyser les informations disponibles sur les fans
afin de mieux répondre à leurs besoins et leur proposer une expérience
personnalisée avant, pendant et après l’événement sportif.” décrypte Max
Metral.
Le même constat est fait du côté de Stéphane Rakoto du Stade Français même
s’il reconnaît avoir à ce jour peu de moyens pour un CRM de bonne qualité.
“Le remplissage moyen du stade est de 12 000 spectateurs, pour un capacité
totale de 20 000 sièges. On aimerait atteindre un objectif de 15 000 à 16 000
supporters en moyenne”.
92
Mais dans 10 ans, pour le coup, on peut tabler sur le fait que ces pratiques de
communication “one to one” seront beaucoup plus maîtrisées.
4.4. OBJETS CONNECTÉS / WEARABLES
Principal frein : éthique
Wilson, qui fournit le ballon officiel de la NFL travaille actuellement sur un projet
de ballon connecté. Si la technique choisie n’est pas encore précisée (RFID,
Bluetooth ?), l’idée est simple : offrir à l’arbitrage des données infaillibles. Ceci
soulève des questions chez les amateurs de sport : quid de l’esprit du jeu ?
Quand un arbitre au rugby, conscient de la beauté d’une action, laisse glisser un
petit “enavant” pour ne pas interrompre le jeu, faudratil accepter le rappel à
l’ordre de la machine ? Is Big Brother playing rugby ? Certes, l’image peut faire
frémir. Cela dit, on avait eu les mêmes réserves à l’arrivée de la vidéo et
maintenant, qui songerait à s’en passer ?
PIQ, la startup suisse créée par le français Cédric Managua, a levé en mai 2015
5,5 millions de dollars auprès d’investisseurs étrangers. Il s’agit de capteurs
étanches de 5mm d’épaisseur qui se collent à la peau. Ce ne sont pas des
“Addon” que l’on colle à une raquette ou un club de golf, pour ne pas perturber
le joueur. Dans le cas du golf, le Piq mesure l’accélération et la force de l’impact.
Le Piq compte séduire les marques de sport afin qu’elles ne développent pas
ellesmêmes d’objets connectés et lui confient les adaptations dont elles auraient
besoin. Initialement développé pour un usage personnel en vue d’amélioration
de sa pratique d’un sport, ce type d’objets pourra, à l’avenir, être au coeur d’un
événement sportif. Pourquoi ne pas imaginer que des points pourraient être
ajoutés ou retranchés en fonction de la force d’un coup ? Et si la transformation
d’un essai valait davantage que 2 points audelà d’une certaine puissance de tir
? Dans quelle mesure ces analyses rendues possibles n’impacteraientelles pas
les règles du jeu ?
93
Une voiture autonome estelle considérée comme un objet connecté ?
“Pas de voiture sans pilote sur le Dakar” assureton chez ASO, son
organisateur. “Le rallye est avant tout une course d’hommes. La seule solution
serait de créer une catégorie à part”.
Mais vu sous l’angle des expériences fans au stade, la voiture autonome sera un
jour un avantage énorme de gestion des flux et sur la gestion des parkings. Les
fans se feront déposer devant le stade par leur voiture qui ira se garer plus
loin...
Le dossard sur les compétitions de running pourront avantageusement être
remplacés par des bracelets connectés. L’avantage est la simplification d’une
étape laborieuse : aller chercher son dossard la veille de la course, trouver les
épingles à nourrice pour le fixer et surtout, trouver le bon endroit sur sa tenue
pour ne pas trop endommager sa tenue high tech avec les épingles. A quoi sert
aujourd’hui un dossard ? “A deux choses” répond Théo Bayssat d’ASO
“l’identification rendue possible grâce au dossard sert à attribuer les photos
prises pendant la course et à identifier le coureur en cas de malaise et de soins
médicaux à prodiguer”. Demain, on imagine aisément qu’un coureur aura son
bracelet (personnel ou remis par l’organisateur), à l’aide duquel il fera
directement parvenir son certificat médical et les instructions du médecin
traitant si besoin, mais également qui sera détecté par les appareils photos afin
que le photos lui soient directement envoyées, en temps réel.
Le même bracelet connecté pourra être utilisé en moyen de paiement sans
contact sur les villages des organisations. C’est un sujet actuellement en
réflexion chez ASO. Réduction d’un problème pour le coureur (transporter un
moyen de paiement), et explosion des possibilités commerciales pour les
organisateurs et sponsors. L’ère du merchandising et de la restauration par
exemple pourront basculer vers quelque chose de beaucoup plus conséquent, et
les business models seront repensés. Ceci s’inscrit logiquement dans la
prolongation de la tendance actuelle qui tend à retenir les sportifs à l’issue des
compétitions pour prolonger la fête et donc développer la consommation.
94
Ce bracelet connecté pourra avoir été porté pendant toute la durée de
l’entraînement, soit plusieurs mois avant la course, fournissant ainsi à
l’organisateur des données de performance essentielles pouvant l’orienter dans
sa gestion des flux, problème majeur des grandes rencontres. Comment en effet
compter sur une performance de 4h annoncée par un marathonien postulant
lorsque ses données d’entraînement indiquent qu’il lui faudra 4h30 ? Les tracés,
d’une année sur l’autre, pourront être affinés en fonction des données relevées
les éditions précédentes. De même, les points de ravitaillement ainsi que les
animations (musicales ou autres) pourront être installés en des points toujours
mieux ciblés, en tenant compte des faiblesses physiques ou psychologiques
mesurées les années précédentes.
4.5. ROBOTIQUE
Il est difficile d’avancer dans le prédictif sur ce thème tant c’est toute l’histoire
de l’humanité qui pourrait être modifiée avec l’émergence de la robotique. Ceci
signifie qu’elle sera partout, dans nos foyers, au sein de nos institutions, de nos
écoles, dans nos blocs opératoires, dans nos vies professionnelles, jusque dans
nos organismes !
La RoboCup (coupe du monde
de football de la robotique)
existe depuis 1996. La
dernière édition a eu lieu du
19 au 23 juillet 2015, à Hefei,
dans l'ouest de la Chine. Les
équipes nationales s’affrontent
avec des robots qui
fonctionnent de façon
totalement autonome dans
différentes catégories,
essentiellement basées sur la taille des robot : ligue humanoïde, ligue de taille
moyenne, ligue de petite taille et ligue standart). La ligue standart est une
95
catégorie commune à toutes les délégations et le modèle actuellement utilisé est
le robot Nao (Aldebaran Robotics). Les progrès en robotique de ces dernières
années étant spectaculaires, il a déjà été annoncé que les robots défieront les
champions du monde humains en 2050. FranceTVinfo.fr l’a publié le 18.07.15 :
“L'idée de la RoboCup est de développer d'ici à 2050 une équipe de robots
humanoïdes capables, sans aucune intervention extérieure, de battre les
champions du monde en titre, bien humains ceuxlà. Mais si marcher, tacler ou
tirer peut sembler facile pour un amateur de football, cela devient un défi
considérable pour un robot bipède autonome.”
“Aujourd’hui une équipe de robots ne peut pas battre les joueurs” nous dit
Michel Mimran, “car pour l’instant, tel que ce sport est fait, il suppose une
rapidité de mouvement, de l’intelligence, etc. Mais il n’est pas faux de penser
que dans 35 ans les robots iront plus vite que les hommes, leur intelligence
artificielle sera plus rapide que l’intelligence authentique et qu’à la fin
effectivement ils peuvent très bien gagner le match. Ça ne coûte rien de
l’affirmer ! Ce qui est intéressant c’est de se dire que demain, des matchs entre
robots seront aussi peutêtre aussi passionnants que des matchs entre des
hommes. Mais des robots contre les hommes, ça n’a aucun intérêt. Si j’étais en
charge de ce projet, la vraie question que je me poserais ce serait : combien je
vais vendre les droits de la coupe du monde des robots. Quand tous les robots
joueront super bien, pas question de savoir s’ils joueront mieux ou moins bien
que les hommes ! Ce sera un autre plaisir ! Ce sera autre chose.”
Mais à ce jour, tout n’es pas encore mature au royaume des robots : “Avec leurs
petits calculateurs embarqués, ils doivent travailler dans un environnement dont
ils n'ont qu'une vision partielle, brouillée. Il faut prendre une décision fondée
uniquement sur des probabilités", explique Olivier Ly, chercheur français, à
FranceTVInfo.fr, “les robots sont beaucoup moins intelligents qu'on ne le croit.
Ils ne sont pas toujours capables de reconnaître l'adversaire et ça tourne
souvent à la mêlée de rugby".
Pas encore non plus beaucoup de sensations fortes ou d’émotions compte tenu
de la faible vitesse de déplacement de la plupart des robots, même si dans la
catégorie “petite taille”, certains specimens, non humanoïdes sont beaucoup plus
rapides. Mais le spectateur non averti aura davantage de difficulté à ressentir
96
des émotions dans ces catégories non humanoïdes. Question d’entraînement
sans doute...
La prochaine édition sera disputée à Leipzig en Allemagne, en juillet 2016.
Vidéo de la finale RoboCup 2015 (Ligue standart : Nao) :
https://www.youtube.com/watch?v=iNLcGqbhGcc
Les matchs humains vs robots sont déjà préfigurés par quelques initiatives, dont
celle ayant opposé le quintuple ballon d’or Lionel Messi à un robot, RobotKeeper
dans une édifiante séance de tirs au but . Le robot, capable d’analyser 90 17
images à la seconde, a une accélération 17 fois supérieure à celle d’une Formule
1 ce qui ne le met que très rarement en position d’échec. Meilleur joueur du
monde oblige, Messi parviendra tout de même à égaliser à 2 partout en
découvrant rapidement la lucarne possible.
Ce que les robots peuvent apporter au sport ? Sans doute une mutation possible
des disciplines.
“Je pense que la coupe du monde de robots nécessitera peutêtre des
aménagements des règles. Donc ce sera un sport différent mais qui suscitera
peutêtre énormément d’intérêt. Il y aura peutêtre un milliard de spectateurs
ou un milliard de robots qui regarderont la coupe du monde ?” nous dit Michel
Mimran “ Je pense que ça peut être un bon cobaye. Si demain, parce qu’on le
met en test sur des compétitions de robots, on se rendait compte que les
touches jouées au pied créent plus d’actions de buts que les touches jouées à la
main, peutêtre qu’on se dirait que ce n’est pas bête ? Ce sont des tests qu’on
n’ose pas faire sur des compétitions d’hommes.”
Autre révolution qui semble sur le point de voir le jour, il s’agit de la Formule 1
sans pilote. La voiture autonome étant au coeur des préoccupations et le CES
2016 l’a largement relayé, ce nouveau championnat pourrait se dérouler en
parallèle de la Formule E de la FIA, le Grand Prix de monoplaces électriques. Si
toutes les équipes participantes concourront avec le même véhicule, elles
devront, en revanche, développer leurs propres algorithmes d’intelligence
artificielle pour se distinguer. Si les écuries traditionnelles ne semblent pour
l’instant par pressées d’entrer dans la course, la Roborace pourrait bien être un
17 https://www.youtube.com/watch?v=GOOVdIe8lts
97
terrain d’explication entre Google, Uber, Continental ou Bosch, toutes
entreprises travaillant actuellement sur les voitures autonomes.
Moins spectaculaire, mais chargée de promesses, la première course
internationale de moléculesvoiture sera
organisée en 2016 à Toulouse : la Nanocar Race.
Dans les tubes à essai des laboratoires depuis la
fin des années 90, ces nanovoitures visent à
limiter, à l’avenir, l’utilisation de matières
premières en leur préférant un assemblage
d’atomes. Cette technologie pourrait impacter
l’industrie de l’événementiel sportif avec l’arrivée
de moléculeséquipements. Ceci pourrait affecter la pratique et peutêtre même
modifier les règles. Quel poids final en effet pour des moléculeschaussures de
running par exemple ?
4.6. HUMANITÉ AUGMENTÉE
Vers l’homme bionique ?
Oscar Pistorius a affolé la Fédération Internationale d’Athlétisme en 2008 et
2009. Les rapports à son sujet se sont succédés, cherchant à démontrer ou
infirmer l’avantage procuré par
l’utilisation de ses prothèses en
carbones face aux valides.
Cette histoire n’est vraisemblablement
que le prélude à une notion
d’humanité augmentée qui risque fort
de marquer notre futur.
D’ici 10 ans, le statut d’handicapé sera
probablement revu au profit de celui
d’homme augmenté. Et donc de performer. Et la performance ne sera plus
seulement humaine mais également technologique. Or l’audience étant corrélée
au spectacle de la performance, il est tout à fait probable que les Jeux
98
Olympiques intègrent les Jeux Olympique des humains augmentés dans le même
spectacle. Exit les jeux paralympiques organisés et diffusés dans une coupable
discrétion quelques jours après la grande fête. L’année 2016 verra la première
édition des jeux bioniques, baptisés le Cybathlon. Il s’agit d’une compétition
sportive internationale organisée par ETH Zurich pour les athlètes handicapés
utilisant une technologie d’assistante bionique, comme les prothèses robotisées,
les interfaces d’ordinateurs cérébraux, les exosquelettes connectés, etc. Ce sera
la toute première compétition professionnelle et internationale du genre.
Le niveau des prothèse ne cesse de monter. La prothèse bionique n’est plus un
fantasme et la prothèse de demain pourrait bien faire exploser les performances
au point que de nouvelles épreuves verront certainement le jour.
Le danger (ou pas ?) réside bel et bien dans les “vocations” que ces possibilités
bioniques pourraient faire naître chez des individus valides. Choisir d’opter pour
un bras bionique lorsqu’on possède deux bras en bon état de marche seratil
admis, coupable, banalisé ? La liberté de disposer de son propre corps seratelle
poussée dans cette extrémité ?
Une hypothèse jugée tout à fait probable par Michel Mimran qui ajoute :
“J’espère juste qu’il y aura des conseils de l’éthique et que l’ordre des médecins
sera toujours là, car il y aura peutêtre un fou qui sera prêt à faire ça”.
Augmentation des performances
On connaît déjà les gélules connectées permettant, après absorption de
transmettre des données, notamment thermiques à un entraîneur. Mais les
années qui viennent pourraient bien proposer des gélules visant à augmenter les
performances des sportifs. La libération prolongée de sucre, voire activée à
distance par un entraîneur en fonction des taux de glucides relevés en temps
réel ? Le futur procédé Bepo d’administration de substance en souscutané par
libération prolongée développé par le français Medincell pourrait être un point de
départ à cette réflexion. Les nanorobots de Google actuellement en cours de
réflexion (développement ?) pourraient tout aussi bien servir de passeplat à des
molécules améliorant l’acuité visuelle au moment opportun, ralentir le rythme
cardiaque d’un biathlète au moment des tirs, libérer une dose d’endorphine au
99
moment de démarrer l’action qui pourrait mener un rugbyman à l’essai, etc.
L’idée générale serait de garder l’individu tel qu’il est, en l’augmentant de
superpouvoirs ponctuels.
4.7. RÉALITÉ VIRTUELLE / AUGMENTÉE
La question n’est plus de savoir si la réalité virtuelle va “prendre” ou pas. C’est
incontestablement un outil avec lequel il faudra compter et dont l’utilisation sera
massive. Non, la question dans le sujet des spectacles sportifs se pose avant
tout sur les droits. Qui détient les droits ? La réalité virtuelle estelle une
extension des droits de diffusion (auquel cas le diffuseur détient les droits) ?
Estelle une extension de l’expérience spectateur (auquel cas le club pourrait
détenir les droits) ? Ou estce une nouvelle catégorie autour de laquelle il faudra
légiférer ?
Les mêmes questions se posent également autour du business model.
L’utilisation de cette VR seratelle incluse dans votre abonnement TV ou un
paiement par vue seratil la bonne réponse ? Estce qu’on sera dans une vente
des droits par territoire ou mondiale ? Etc. Les questions sont encore
nombreuses.
Quels sont les freins ?
D’un point de vue purement technologique, il n’y a en pour ainsi dire pas. Il y a
déjà une quantité de caméras existantes proposant une prise de vue à 360°, de
la vidéo sphérique en HD, des caméras 3D, etc. Même chose du côté des
casques. On peut maintenant en trouver chez beaucoup de constructeurs, à des
prix raisonnables et la plupart d’entre eux peuvent se connecter à un
smartphone, un PC ou une console de jeux.
Le vrai frein reste le droit. Et tant que cette question n’aura pas été débattue et
tranchée, la VR n’inondera pas le spectacle sportif.
Quels sont les impacts sur l’industrie du sport ?
Du point de vue du consommateur cette technologie représentera une solution
supplémentaire et ne devrait pas remplacer une solution existante. La TV ne
100
devrait pas devenir obsolète, au même titre que son apparition n’avait pas rendu
la radio obsolète. Et le smartphone n’a pas rendu le PC obsolète…
Du point de vue des diffuseurs, l’impact dépendra vraiment de la réponse à la
question des droits.
C’est probablement pour les détenteurs des droits que l’impact sera le plus
important. Il y aura une vraie différence selon que la VR soit inclue dans la
structure existante des droits ou traitée à part. La question intéressante qu’on
peut se poser c’est : cette technologie suivratelle la même tendance, initiée
avec internet, où les détenteurs de droits vendent directement aux
consommateurs, sans intermédiaire ?
La technologie était déjà mature pour les images différées, et le CES2016 a
révélé qu’elle l’était également pour le direct. Le live streaming en 360° est donc
pour bientôt pour tout le monde. Next VR a annoncé travailler en collaboration
avec Qualcomm pour développer un logiciel pouvant délivrer des live en réalité
virtuelle 360° sur les devices mobiles.
Et pourquoi ne pas imaginer que les techniques d’écrans 3D fusionnent avec le
360° et les casques de réalité virtuelle ?
Ce qui peut arriver :
Certaines disciplines sportives pourraient être modifiées. Le ski par exemple. On
peut tout à fait imaginer un super G avec un casque de VR sur la tête, déroulant
exactement tout le parcours. L’intérêt premier serait d’offrir des conditions de
visibilité identiques à tous les slalomeurs.
De nouvelles disciplines sportives verront probablement le jour. Dans la veine
des Mud Days, des défis d’adresse requérant de grandes capacités sportives
pourront être créés. Le sportif chaussera un casque de VR dans lequel s’animera
le décor réel du Grand Canyon par exemple. Il devra réaliser un parcours
chronométré en enchaînant des passages et des sauts très dangereux. Le public
aura plusieurs écrans : le paysage tel que le voit le sportif, la représentation du
sportif dans le dit paysage, ainsi que l’image du sportif dans l’enceinte sportive.
101
Ces disciplines ne sont pas destinées à remplacer le sport que l’on connaît
aujourd’hui, mais plutôt à proposer d’aller vers plus de spectacle sans
augmenter la dangerosité.
4.8. DRONES
Freins principaux : législatif, sécurité
Autonomie : encore faible en 2016
Il y a deux possibilités d’introduction des drones
dans les grands événements sportifs :
Aide à l’organisation
Partie prenante des compétitions. Ceci
suppose la création d’un nouveau type
d’épreuves ou l’aménagement des épreuves
existantes.
En 2016 existent déjà les drones suiveurs. Lily (et bien d’autres déjà) a été
conçu pour suivre son propriétaire à la trace, dans le but de le filmer ou le
prendre en photo pendant ses exploits sportifs. Ceuxci peuvent devenir des
éléments à part entière dans une compétition. Prenons l’exemple du ski : le
skieur, équipé de lunettes vidéo, n’est plus
suivi mais précédé par son drone qui lui
envoie avec quelques dizièmes de secondes
d’avance, les images de la piste. Avec ces
microsecondes d’anticipation, il pourrait
mieux appréhender sa course et peutêtre
accélérer davantage, offrant encore plus
d’émotions au public. Mais surtout, audelà
des images, le drone pourrait fournir des
indications sur l’état de la piste et la qualité
102
de la neige en temps réel avec l’intégration d’une caméra thermique,
informations capitale pour le skieur.
Et pendant un marathon ? Un des gros problèmes des organisateurs est la
gestion des flux. Pourquoi ne pas imaginer des drones capables de détecter les
coureurs en perte de rythme et de faire le “lièvre” pour les ramener dans le
peloton de leur sas de départ ? Ils seraient des coachs personnels le temps
nécessaire, ayant accès à toutes les données du coureur pris en charge (données
instantanées et celles collectées durant les entraînements) et donc connaissant
ses capacités d’accélération voire les risques d’abandon. Positionné audessus du
coureur les minutes nécessaires à sa remise en selle, il pourrait interagir en lui
parlant (encouragements, distance/temps restant avant le prochain
ravitaillement, rythme cardiaque, etc.). Ce drone répondrait au double objectif
d’améliorer les performances individuelles et mieux gérer les flux pour
l’organisateur.
4.9. HOLOGRAMMES
Freins principaux : législatif (droits d’image notamment), maturité du
procédé
Une retransmission télévisuelle d’un événement sportif passé
est prévue dans notre droit, mais fabriquer et faire parler un
hologramme d’une personne ayant existé ne l’est pas encore.
Bien que la technique ne soit pas encore totalement mature
(ce qu’on appelle hologramme aujourd’hui est une image
projetée sur un support), il est au coeur de tous les
fantasmes technologiques depuis la 1ère apparition de Maître
Yoda en 1977. En 40 ans, on est passé d’un procédé relevant de la science
fiction à un procédé partiellement maîtrisé (Yoda ne sort pas encore de notre
smartphone…). Les démonstrations et exhibitions publiques s’enchaînent
néanmoins (comme le fameux concert au cours duquel le rappeur Tupac,
pourtant décédé, était apparu), laissant entrevoir certaines des futures
103
utilisations de l’hologramme. Et lorsque la technique sera totalement aboutie,
c’est à dire quand on sera capable de faire jaillir un hologramme d’un
“diffuseur”, sans écran, quelle pourra être sa valeur ajoutée dans le sport ?
Utilisations possible en compétition
Il peut y avoir une vraie valeur ajoutée dans une compétition sportive à
intégrer des hologrammes. Il ne s’agira plus d’incrustation d’images
fantômes uniquement à l’écran, mais bien d’images visibles également sur
le terrain. Outre une amélioration de l’expérience spectateur ou
téléspectateur, le procédé peut faire évoluer le principe de la compétition.
Dans le cas du Tour de France par exemple, on pourrait incruster dans le
peloton, au cours d’une étape mythique (dans les lacets de l’Alpe d’Huez),
des apparitions de Bernard Hinault ou Eddy Merckx ? Ou mettre
systématiquement en compétition l’hologramme du vainqueur des
contrelamontre des années précédentes sur chaque tracé identique ? Il
pourrait même y avoir des points supplémentaires, voire un classement
entier, dédiés à ces affrontements multitemporels.
Même chose dans les meetings d’athlétisme : pourquoi ne pas intégrer
l’hologramme d’Usain Bolt sur chaque départ du 100 mètres ? Chaque
tenant du titre sur chaque épreuve pourrait être présent de façon
holographique. Dans le demifond et le fond, la présence d’un
“hologramme lièvre” peut être une aide précieuse à un athlète pour lui
donner le rythme de la course.
Il est vraisemblable également que soient projetés des replays
holographiques sur le terrain, à destination des fans présents . 18
Les hologrammes n’en finissent pas d’alimenter les fantasmes. Michel Mimran se
projette déjà : “J’adorerais m’en servir plutôt sur l’événementiel qui précède les
matchs. En marketing, je pourrais faire des choses magnifiques.”
18 The future of Sport Attention Span Media Septembre 2015
104
On attend avec impatience l’hologramme qui sera projeté par un drone,
directement audessus du lieu de l’action...
4.10. PARTICIPATION DES FANS
L’avenir du sport est aussi entre les mains des fans !
Partiesprenantes dans les clubs
Si les grands clubs de football ont des actionnaires solides, il en est de plus
petits qui peinent à acquérir des joueurs. C’est sur la base de ce constat que
Give in Sport a été créée. Cette startup française ouvre la voie en France au
“fanfunding”. Il s’agit d’une collecte de dons, auprès des fans d’un club sportif,
mais sans contrepartie pour le donneur (à la différence du crowdfunding). Boris
Bergerot, cocréateur de Give in Sport reconnaît toutefois réfléchir à
récompenser les gros donateurs. Lancée en novembre 2015, l’idée a déjà séduit
l’AC Ajaccio qui lançait sa campagne dès le mois de décembre.
User generated content
Pour l’instant, ces contenus sont généralement appelés et encadrés. Il est très
fréquent de demander à ses followers d’envoyer des photos qui constitueront le
socle d’une opération d’image. Ainsi, le Paris Saint Germain a orchestré une belle
opération intitulée “Jour du Maillot”, encourageant les fans à poster des photos
d’eux portant le maillot du club. L’opération a été un gros succès et les
contributions sont arrivées du monde entier.
Mais en parallèle, on assiste à une montée de contenus illégaux, comme ceux
générés avec le live streaming. Ces contenus sont susceptibles de faire du tort
notamment aux diffuseurs qui ont acquis les droits.
Plutôt que de lutter contre cette vague de création de contenus illégaux et du
coup de perdre cette authenticité et cette fraîcheur des contenus “DIY”, pourquoi
ne pas créer des plateformes qui “aspireraient” ces contenus user generated ? Le
fan pourrait en faire un second écran un peu croustillant et le tout pourrait
ressortir depuis l’écosystème du diffuseur par exemple. Une manière de
récupérer les images “volées” mais sans les interdire puisqu’elles proposent ce
105
qu’aucun diffuseur ne peut proposer : la vision d’un fan avec ses émotions
brutes.
Partiesprenantes sur les compétitions
Les fans sont déjà mis à contribution pour choisir le nom de leur stade
(l’expérience a été menée à Bordeaux en septembre 2015), les socios du FC
Barcelone ont voté en octobre pour choisir le nom de leur futur sponsor
principal, d’autres tentatives ont été menées pour intégrer les fans dans des
processus de décision. Demain, les fans pourraient voter pour le choix de
certaines étapes du Tour de France mais aussi en live, pour l’attribution d’un
carton rouge (ou son retrait), les outils digitaux rendant le processus possible.
Là encore, cette composante pourrait être de nature à modifier quelques
règlements.
4.11. COMMERCE
L’un des axes majeurs des années à venir sur les grands événements sportifs est
le développement commercial.
Enceintes sportives :
il faudra capter le consommateur sur une durée plus longue que celle du
simple spectacle sportif. Les Etats Unis nous donnent une idée précise de
ce qui arrivera en Europe.
Les enceintes sportives en construction aux US sont conçues comme de
véritables centres commerciaux. L’idée est de proposer toute une gamme
de services et de produits de nature à satisfaire les attentes voire
anticiper les besoins des consommateurs. Venir avant le match ou rester
après pour prendre un repas ou faire du shopping, aller au cinéma, fera
partie de l’expérience client du futur.
La France commence à en comprendre les enjeux. Le Stade des Lumières
à Lyon propose notamment une solution de paiement mobile pour tous les
achats effectués dans l’enceinte du stade et ASO réfléchit à sa propre
106
solution de paiement avec l’objectif de faire rester et consommer leurs
clients à la suite des compétitions.
Ecommerce :
Sans réelle surprise, la vente en ligne devrait dépasser la vente en
boutique. C’est du moins ce qu’a prédit Michel Mimran lors de son
intervention aux “Mardis du Marketing” du 26 janvier dernier.
Il est donc important de veiller à la visibilté (référencement, UX
notamment) des sites ecommerce au sein des plateformes des
événements. Sur le modèle d’Amazon, la livraison dans l’heure devrait à
l’avenir permettre à un supporter de l’OM de recevoir son écharpe avant
de partir pour le stade. Et le click & collect offrira l’avantage du retrait de
l’écharpe à son arrivée au stade, voire, grâce au beacon et à la
microgéolocalisation, l’écharpe sera sous le siège (dans un coffre
accessible par un code généré lors du paiement) du spectateur à son
arrivée.
Le parcours client sera donc “web to sport”.
Impression 3D
Et bien sûr, on va aller vers un merchandising de plus en plus
personnalisé. Cette écharpe de l’OM que le supporter a acheté sur internet
et va récupérer sous son siège à son arrivée au stade, aura une
personnalisation. Et ceci pourra être fait dans l’heure, entre sa commande
et son arrivée, grâce à l’impression 3D.
4.12. BILLETTERIE
Remplir le stade est un des objectifs majeurs pour tout événement sportif. Pour
y répondre, il faut bien marketer le produit, certes, mais d’autres techniques se
développent :
La startup parisienne Tech’4’Team propose l’application des schémas du « yield
management » à la billetterie sportive. Derrière cette expression marketing se
107
cache le système en vigueur pour les réservations de billets d’avion, de train ou
de nuitées d’hôtel, avec une tarification flexible selon la période d’achat. Selon
Benjamin Carlier (responsable du Tremplin à Paris), “l’objectif, pour
l’organisateur, est de rentabiliser davantage sa billetterie et de mieux travailler
sur le remplissage de l’enceinte en jouant sur le timing et les prix.” Ceci a
comme conséquence de faire progresser de façon considérable les recettes en
billetterie.
A Roland Garros, on expérimente, outre la revente légale des places inutilisées
sur un site dédié, les places dites “Visiteurs du Soir”. Ces places sont remises en
vente au fur et à mesure du départ des spectateurs. Ainsi, un même siège peut
accueillir différentes personnes au cours d’une même journée. C’est une
technique assez innovante dans l’univers du sport, et qui rentre dans une
logique d’optimisation, très prisée par les nouveaux paradigmes économiques.
Nul doute que ce phénomène ira en s’amplifiant dans les années à venir.
De façon plus prosaïque, sur la vente ellemême, les réseaux sociaux ont
commencé à montrer leur intérêt. Twitter a ouvert le bal en avril 2015 en
mettant en vente des billets pour le match de NBA Toronto Raptors vs Atlanta
Hawks. Ces derniers ont envoyé un tweet proposant l’achat de billets et
comportant un bouton “buy”. L’intérêt pour Twitter est de conserver ses
utilisateurs sur sa timeline et l’intérêt pour le club est de monétiser son
importante communauté social media. Facebook quant à lui est un phase de test
pour un bouton “buy ticket” inséré aux pages événements.
Ce futur des grands événements sportifs se prépare en laboratoire, dans les
incubateurs de startups, dans les esprits des développeurs les plus débridés,
dans les recherches sur la santé, la mobilité, et se nourrissent des avancées
technologiques spectaculaires et exponentielles dont nous sommes les témoins
des prémices.
108
MA VISION
Plus qu’une vision, je souhaite clôturer ce chapitre par une
recommandation : n’ayons pas peur !
Les nouvelles technologies appliquées au sport ont pour conséquence
une mutation progressive des modèles de communication et on va
assister de façon certaine à l’émergence de nouvelles disciplines. Des
propositions nouvelles qui viendront dans un premier temps
s’additionner aux disciplines en place. Et l’appétence du public, le choix
des sportifs, la confiance des sponsors, les capacités technologiques
décideront de leur pérennité.
Après tout, on a bien décidé un jour d’abandonner les jeux du cirque, les
courses de char, et les corridas aujourd’hui sont controversées… Tout
n’est pas fait pour durer éternellement et il faut savoir accueillir avec
confiance et gourmandise la promesse de l’évolution et du changement.
Outre les mutations des disciplines sportives, il va nous falloir nous
adapter à de nouvelles manières de vivre le sport. Une multitude d’outils
viennent enrichir les expériences, comme les outils d’analyse prédictive,
ou encore les outils d’aide à la stratégie.
Mais, plus encore que l’amélioration de l’expérience fan, c’est toute une
machine commerciale qui va trouver un second souffle. Les sites
ecommerce des événements, des clubs, devraient s’envoler en
proposant des services à la pointe de la technologie. C’est ce
qu’attendent les spectateurs ! Avoir le choix, avoir un produit unique,
l’avoir dans l’heure et pouvoir exhiber fièrement leur appartenance à un
club ET un parcours client magique. Inévitablement générateur de
recettes...
109
PARTIE 5 RECOMMANDATIONS
On ne peut pas globalement parler de “retard” digital dans cette industrie des
grands événements sportifs. En revanche la “marge de progression” est
importante, et avant tout dans les mentalités.
Concrètement, et pour résumer, les principaux points à bien prendre en compte
pour progresser sont les suivants :
Ecriture de stratégies digitales vs stratégies d’intuition
Digitalisation des équipes développement, marketing et communication
chez tous les acteurs
Remise en question des traditions
Veille et anticipation sur les innovations
Analyser et compiler toutes les retombées
Collecte et traitement d’une donnée pertinente
110
Réflexion autour de nouveaux formats de compétitions
Affiner le CRM
Analyse et monétisation des audiences internet vis à vis des sponsors
Moderniser la partie ecommerce
Et, plus généralement :
Connectivité progressive des stades
Tout en gardant toujours à l’esprit que dans ce nouvel écosystème, le
consommateur est bombardé d’informations et qu’il est de plus en plus essentiel
d’être différenciant et pertinent.
5.1. ANTICIPATION
Il y a deux recommandations principales pour adresser les besoins sans cesse
plus exigeants de fans habitués à des spectacles de plus en plus sensationnels :
Continuer à faire vivre avec force et conviction les valeurs de nos
disciplines au coeur de tout manifestation
Etre dans l’anticipation. Mesurer le chemin parcouru depuis un
demisiècle, prendre en compte les outils d’aujourd’hui, surveiller l’arrivée
111
des outils de demain et être dans l’empathie : avec l’arrivée à maturité
des nouveaux outils, quelles seront les attentes de nos fans ? Il ne faut
pas avoir peur d’induire des changements, même majeurs. Séduire les
fans est une nécessité, et bien qu’ils ne soient pas décisionnaires, leur
satisfaction est essentielle.
Il y a donc un équilibre subtil à trouver entre ce qu’attendent les fans, ce qu’on
peut leur proposer et ce qu’on veut leur proposer.
Et un événement, qu’il ait déjà une histoire ou qu’il soit une nouvelle
proposition, devra s’appuyer sur :
une stratégie digitale
une digitalisation des équipes organisatrices
une intégration des nouveaux outils
une anticipation des relationsclients avec la collecte de données
5.2. COMMENT METTRE EN OEUVRE SA STRATÉGIE DIGITALE ?
Que l’on soit organisateur d’événement, club, fédération, sponsor, institution,
équipementier, sportif ou tout autre acteur d’un événement sportif, il est
indispensable d’avoir en permanence à l’esprit qu’une stratégie digitale est :
tout sauf une seule intuition
un exercice pointu de marketing qui nécessite une vraie compréhension et
connaissance de l’environnement digital.
Des questions doivent se poser en préambule à toute réflexion :
Quels objectifs cherchonsnous à atteindre ?
Qui voulonsnous toucher ? Définition précise des cibles, segmentation
Quels KPIs poser sur les différentes activations ?
Combien voulonsnous investir, et comment ventiler le budget ?
Quel délai accordonsnous à notre stratégie pour réussir ?
Avonsnous les ressources humaines nécessaires en interne et/ou
devronsnous soustraiter ?
112
Avonsnous identifié les leaders d’opinion/blogueurs ?
Voici deux exemples de communication digitale brillante, celle de la NBA et celle
du Paris Saint Germain :
Analyse de la communication digitale de la NBA.
Bien que n’étant que le 5ème sport préféré des américain, le basket et la NBA
ont une notoriété mondiale. Ses dirigeants avaient très vite compris qu’il n’y
aurait pas de salut sans développement. C’est donc une stratégie à l’américaine
(c’est à dire à la conquête du monde), qui est mise en place. Les questions
sociales sont au coeur des contenus. Puis en 1992, à l’occasion des JO de
Barcelone, le taulier, Michael Jordan, sort de l’ombre, entraînant dans son sillage
l’image du basket américain. Rapidement, des événements internationaux sont
organisés, comme le Adidas NBA 5 United Tour sur le parvis de l’hôtel de ville de
Paris ou le NBA Europe Live Presented by EA Sports à Bercy. Et tout ceci
s’articule autour de la fan experience, fer de lance de l’arsenal digital de la ligue.
Au coeur, il y a le site web, dont les contenus sont traduits en plus de 10
langues. Et au coeur du coeur, il y a la grande idée de la NBA : le NBA League
Pass, permettant (moyennant 200 dollars par an pour le full pack), de regarder
tous les matches, sur votre écran de TV mais aussi d’ordinateur, tablette et
mobile, où que vous soyez. Vous pouvez aussi choisir de n’acheter qu’un match
ou ne de suivre qu’une équipe. Un abonnement à la carte donc qui fait du basket
l’un des sports les plus faciles à acheter au monde. Evidemment, l’appli mobile
NBA Game Time vient compléter ce dispositif,
vous offrant un accès illimité à toutes les
infos, statistiques et interviews relatives à la
NBA.
Les médias sociaux prennent le relais et
affichent des résultats spectaculaires. La page
Facebook qui retrace l’histoire de la NBA
truste 27 millions de fans, tandis que le
compte Twitter a su en séduire 13 millions
avec notamment ses live. Instagram n’est pas
en reste avec 4,7 millions d’Instagramers à
qui on propose les images des coulisses de la
113
NBA. A ceci s’ajoutent les comptes Tumblr et Pinterest, avec pour le premier des
photos inédites et pour le second une démarche plus commerciale qui met en
avant le merchandising NBA. Et enfin Google+ et Vine viennent achever
l’inventaire.
Et tout ceci a un impact fort, mesurable et consultable par les fans. Car oui, quoi
de plus enthousiasmant que de constater qu’on fait partie d’une communauté
qui bat des records d’audience ? Cela donne le NBA Pulse, directement accessible
depuis le site Web, qui mesure en temps réel le ranking social des joueurs et la
pénétration des hashtags trendy. De quoi donner envie de partager toujours plus
pour faire toujours plus monter les records car les comptes Spotlite et Pulse sont
consultables par tous.
Exemples d’activations digitales du Paris Saint Germain
On peut comparer le terreau du Paris Saint Germain et
celui, originel, de la NBA. Le club parisien ne peut pas tout
miser sur ses titres, comme il ne peut pas s’appuyer sur
une histoire et une tradition anciennes (45 ans
d’existence). Il lui faut donc s’inventer une image et briller
autour de cette image (image et logo qui ont été liftés en
2013).
La stratégie digitale du club est présentée comme “la pointe du diamant” de tout
le marketing par son Directeur Marketing, Michel Mimran.
Pour répondre à ses quatre objectifs : brander, promouvoir, conquérir,
internationaliser, le club parisien s’appuie sur :
4 sites web (en 7 langues)
12 pages Facebook
9 comptes Twitter
comptes Google+, Instagram, LinkedIn, Dailymotion, Youtube, Sina Weib
La thématique principale de la communication du club est “Paris”, et le contenu
en est l’outil.
114
Le service marketing, épaulé par des agences digitales, produit une très grande
quantité de contenus (de grande qualité), tout au long de l’année, collant à
l’actualité du Club.
Il faut bien nourrir les millions de fans et followers…
Voici quelques exemples de ce qui a contribué et contribue quotidiennement au
rayonnement du Paris Saint Germain sur internet :
“Tout Paris rêve avec nous”
A l'occasion des quartsdefinale 2014 de la UEFA Champions League opposant le
Paris SaintGermain et Chelsea Campagne social media (et print)
115
“Game of Trônes”
Parodie de 2015
dévoilant le championnat
français et symbolisant le
fait que le Paris Saint
Germain part en guerre
pour le Trône, lors de
cette bataille finale de
Ligue 1.
La parodie va jusqu’à la vidéo : http://www.dailymotion.com/video/x2na0jo
On le voit, Paris est au coeur de la stratégie de Marque. Elle est même la
Marque, le story telling et la base de tout le contenu. Une Marque extrêmement
affutée au marketing qui est allée jusqu’à créer un comité de Brand Content,
chargé de produire 2 à 3 films par mois (50 films sur la saison) avec un objectif
moyen de 700 000 vues.
A l’évidence, le Paris Saint Germain a fait sienne cette maxime : “Content is
King”.
L’importance du story telling
A l’instar de la stratégie du Paris Saint Germain, une bonne stratégie digitale
repose sur une histoire, un concept. Chaque action mise en oeuvre devrait être
un élément de cette histoire, chaque contenu devrait avoir un sens, comme
autant de pièces d’un puzzle qui, une fois assemblé, révèle la beauté,
l’originalité, la saveur de votre histoire.
L’effet “wahou” n’a de sens que s’il est vraiment en lien avec votre concept.
Et, par souci de cohérence, cette histoire s’écrit avant toute autre chose, comme
une ligne éditoriale.
116
Le story telling est un passage désormais obligé, d’autant plus pour un
événement. Un événement doit forcément avoir une histoire à raconter, sinon il
est vide de sens et il ne saurait faire vibrer le consommateur en accédant à ses
émotions. Dans une interview accordée à La Face Cachée du Sport, Frédéric
Lohnert, Consultant Stratégie Senior Freelance (anciennement Directeur Conseil
chez Monsieur White et Commercial chez TBWA/TEQUILA) revient sur le cas
Gatorade :
“Un des plus beaux exemples de story telling dans l’événementiel sportif nous
vient d’une Marque. C’est le cas Gatorade. Ils ont créé avec TBWA un concept
très fort : le replay. Leur idée a été de reprendre un match universitaire de
Hockey sur glace ou de Football Américain qui avait passionné l’Amérique. On
prend les mêmes joueurs, 20 ou 30 ans après, on les réentraîne et on les fait
rejouer. Ils avaient vieilli, pris du poids, mais tout le monde a joué le jeu. C’était
une deuxième chance et tout le monde s’est impliqué. Il y a eu énormément de
contenu diffusé, notamment sous la forme d’épisodes sur Youtube qui
permettaient de suivre la progression des sportifs. Et ça a tellement cartonné
que Gatorade décide de rajouter 1 million de dollars et de louer un plus grand
stade. En 20 minutes, toutes les places ont été vendues. Le résultat de
l’opération, c’est 220 millions de dollars de retombées médiatiques pour 2
millions investis. Et en plus, la campagne a été primée au Cannes Lions 2010
Advertisements.
Ce qu’il faut avoir à l’esprit, c’est que le story telling est un réflexe peu coûteux
mais qui donne un affect qui permet d’accentuer la relation avec l’annonceur.
Les marques font plus facilement le story telling que les organisateurs qui sont
plus concentrés sur la valeur du sport et moins sur ce qu’il y a autour. Ce qui est
dommageable en terme d’engagement. Par exemple, je ne m’intéresse pas à la
Coupe du Monde de Rugby car ce sport ne m’intéresse pas. Mais si on me
racontait une histoire, ça m’intéresserait.”
Il conviendrait donc de bien anticiper l’angle d’attaque sur lequel on va
communiquer. Et cela dès le départ. C’est facile pour un nouvel événement. Pour
un événement ayant déjà une histoire, il faut trouver un angle dans son histoire
pour raconter quelque chose susceptible de créer de l’engagement.
117
Une évidence que partage Antoine Aubour qui s’intéresse de près au Brand
Management avec des questions précises qui peuvent être la base d’un mode
d’emploi :
Une épreuve atelle un potentiel de Marque ?
Quel positionnement choisir afin de mettre en place un story telling de
qualité ? Le semimarathon par exemple se court dans l’est parisien et à
ce titre accroche une cible bien particulière. Il s’agit de donner un
positionnement, une identité de la Marque avant tout, dès le démarrage.
Comment l’expérience de Marque peut s’exprimer à partir de là ?
Comment la Marque peut être traitée par les médias ?
Quelle expérience de Marque proposeton aux spectateurs ?
Et en BtoB que proposer aux invités dans l’espace d’hospitalité ?
Les partenaires sontils des médias qui doivent relayer une expérience de
Marque ?
Veronica Grandi (FFT) quant à elle, tout en acceptant pleinement l’idée du story
telling, appelle au bon sens. Avant tout, il est essentiel pour elle que soient
respectées les valeurs du sport, de sa Fédération, de la Marque (en l’occurrence
Roland Garros) et surtout l’espace de chacun. Par exemple, elle rappelle que
chaque acteur a sa mission : “Roland Garros n’est pas là pour apprendre à jouer
au tennis. Ça c’est du ressort de la Fédération Française de Tennis”. Pas question
donc de puiser dans le thème de l’apprentissage pour bâtir le story telling.
Jouer collectif
Afin de respecter la Marque, son histoire, les prérogatives et missions d’une
fédération sportive, et face à la créativité digitale souvent débridée des
sponsors, il est fondamental de faire s’asseoir autour d’une même table tous les
acteurs d’un événement sportif. C’est l’occasion d’écrire ensemble le story telling
de l’événement. C’est une manière simple de garantir une cohérence à
l’événement, d’éviter les doublons dans les contenus et surtout, de voir plus
large, plus collectif et de penser au consommateur, bombardé d’informations qui
n’ont pas toujours du sens pour lui. Une vraie marge de créativité doit être
laissée à chacun mais il est essentiel d’aller dans le même sens. La Coupe du
Monde de Rugby a ainsi vu s’affronter sur le terrain du digital des sponsors plus
créatifs les uns que les autres, tandis que l’organisation même de la compétition
118
semblait comme trop absorbée par la mise en oeuvre de l’événement pour
exister réellement sur internet.
Branding
Dans la veine du story telling, il est important de saisir le concept de branding.
Le branding est une logique d’action marketing cherchant à positionner une
Marque dans l’esprit des consommateurs par le moyen d’effets publicitaires
qualitatifs autour de l’attitude, la notoriété, l’image etc. Bien définir le branding
d’un événement, c’est planter le décor dans lequel pourra s’écrire le story telling,
notamment. Et la difficulté dans le sport, c’est que la Marque (le tournoi ou le
championnat) ne peut fonctionner sans les autres acteurs : les sportifs, les
clubs, les fédérations, les sponsors, etc. Il faut donc parvenir à exister en
respectant les autres acteurs, mais en étant différenciant. Et il convient
d’anticiper les attentes des consommateurs. Par exemple, qu’estce qu’un
internaute vient chercher sur le site de Roland Garros ? “Roland Garros, ce n’est
pas que du sport.” analyse Veronica Grandi (FFT) “C’est une Marque. Comment
faire l’équilibre entre les valeurs de la marque, les joueurs et le contenu
purement sportif ? Comment différencier ? Tout ne peut pas tourner qu’autour
des joueurs. Et en même temps, si un internaute est là pour savoir si Nadal est
en train de gagner, il n’est pas du tout intéressé à ce momentlà par des
informations sur la Marque.”
Content strategy (à l’instar de l’US social team)
On ne le répétera jamais assez, attention à ne pas noyer une audience sous un
bombardement de contenus. Il est essentiel de bien définir une stratégie de
contenus en se censurant sur le fond (quels contenus sont vraiment pertinents
et vont intéresser ma cible) et sur la forme (fréquence des posts). Ne pas
basculer dans l’infobésité en gardant en tête ce chiffre terrifiant : 90% des
données circulant sur internet ont été conçues ces deux dernières années. Un
phénomène galopant et dangereux si l’on souhaite se démarquer. La pertinence
plus que la fréquence devrait être la base de la réflexion de la stratégie.
119
Leaders d’opinion (KOL)
Aucune Marque ne devrait se passer de ce relais de
communication 3.0. Les leaders d’opinion peuvent être des
blogueurs, des Youtubeurs, des médias, mais aussi des
sportifs promouvant les produits de leurs sponsors. Passer
par ces influenceurs permet de toucher une audience
énorme (qui se calcule sur la base du nombre de followers,
abonnés, VU, etc.), à moindre frais, mais surtout en
gagnant directement la confiance du consommateur
puisque “recommandés” par une personnalité. Cette
relation peut se monétiser, bien sûr, mais pas toujours.
Attention au fauxpas qui consiste à vouloir
systématiquement acheter les recommandations. Un
blogueur est maître chez lui et il s’agit avant tout de le
convaincre du bienfondé de votre démarche.
5.3. COMMENT ETRANSFORMER SES ÉQUIPES ?
Un maîtremot : désiloter !!!
Nombreux sont encore les acteurs de l’industrie du sport à
avoir un “service digital”. Ce qui sousentend que les
services marketing et communication séparés dudit
service digital, ne sont pas digitaux. La résultante est une
divergence des visions entre des populations que ne
parlent tout simplement pas le même langage.
Or on n’exige pas d’un salarié que subitement, et tout
seul, il apprenne l’anglais. On le forme. Pour le digital,
l’enjeu est au moins aussi important que l’apprentissage
d’une langue, et l’approche se doit d’être la même : la
formation.
120
Il y a plusieurs attitudes possibles :
Organisation transversale
Un “service digital” ne devrait exister que de façon provisoire et devrait, à
l’instar des CDO, s’attacher à évangéliser les autres services afin, à
(court) terme, de s’effacer, n’ayant plus de raison d’être, les équipes étant
toutes devenues digitales. Ce service devrait contribuer à organiser le
travail de façon transversale. Ceci permet de transmettre une “vision”
propre aux professionnels du digital, tout en s’imprégnant de la “vision”
professionnelle des autres services. Mais cette nouvelle manière de
travailler en groupes est l’opportunité de former progressivement à
l’utilisation des outils 3.0., toutes le forces vives de l’entreprise
La Fédération Française de Tennis a bien compris les enjeux de la
préparation de l’avenir et planche actuellement sur le projet “Roland
Garros 2020”. Il s’agit d’une réflexion sur l’avenir de la Marque Roland
Garros, entamée dès 2013 et menée en transversal, par petits groupes.
Tout le monde est impliqué. Ceci rejoint la tendance actuelle de
l’économie participative et démontre qu’une fédération sportive peut
rester fidèle à ses valeurs et traditions en optant pour des méthodes
résolument modernes.
Renforcement des équipes
Et oui, recruter. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, pour faire
tourner la machine digitale, il faut des femmes et des hommes. Et faire
entrer une personne “sachante” dans chaque équipe est une vraie
solution. C’est en tout cas celle choisie par ASO. Selon Théo Bayssat,
Business Development Project Manager : “un département digital s’est
créé et il y a une personne “digitale” dans chaque service”.
Mais attention, il est indispensable de prévoir qu’aùdelà de la charge
salariale, il y a un budget de fonctionnement à anticiper (variable selon les
enjeux et objectifs). Car internet n’est pas gratuit, tous les outils ont un
coût, le référencement a un coût, l’analytics a un coût et un artisan sans
outil ne peut forger…
121
Aujourd’hui une entreprise innovante est nécessairement 3.0., c’est à dire
collaborative. Le décloisonnement et les supports partagés sont autant
des pistes de réflexion à accueillir sans attendre.
5.4. OUTILS À INVESTIR
Il y a plusieurs familles d’outils, fonctionnant plus en moins
en cascade les uns avec les autres :
Logiciels
La tendance aujourd’hui n’est plus à développer chacun sa
technologie. L’efficacité et le retour sur investissement
imposent l’achat ou la location d’outils existants. Pourquoi en effet vouloir faire
développer une plateforme alors qu’une startup l’a nécessairement déjà (bien)
fait et peut vous la vendre après vous l’avoir personnalisée ? A chacun ses
compétences.
Outils de veille
Pas de bonne stratégie si on ne connaît pas les tendances. Et pour connaître (et
lancer !) les tendances, il est indispensable de consacrer du temps à la veille. Il
existe une grande quantité d’outils permettant notamment d’entrer des flux RSS
à suivre.
Exemple : Feedly
Outils de curation
Une fois la veille lancée, il est essentiel de pouvoir conserver, dans l’optique d’un
partage les articles trouvés. C’est également une occasion pour vous d’exister de
façon moins institutionnelle sur internet.
Exemple : Scoopit
Outils d’analyse
Lancer une stratégie d’accord mais il faut pouvoir mesurer sa portée et son ROI
Exemple : Google Analytics
122
Réseaux sociaux
On pourrait écrire une thèse sur le sujet. Bien sûr que vous devez avoir des
comptes personnels ET des comtpes au nom de la marque sur les principaux
réseaux !
Youtube
A minima.
Outils de travail collaboratif
Là encore, les bonnes idées se bousculent et les startups pullulent. Comme vous
aurez une bonne veille, vous découvrirez ces pépites facilement.
En attendant, Google drive est un excellent début.
Outils de partage
Autant que vous le sachiez, tout peut se programmer. Vos posts de la semaine
peuvent être optimisés en fonction des jours et des heures. Et vous gagnerez
beaucoup en temps et en efficacité en les programmant, par réseau et sur une
même plateforme.
Exemple : Hootsuite
Outils de contenu
Et puis il y a toute la panoplie d’outils d’image, de vidéos, de gaming, etc. qui
permettent de sublimer les contenus.
Idéesoutils d’innovation
Intégrer un incubateur de startup dans son domaine est une idée adoptée par
ASO, en partenariat avec Paris & Co. Pour la deuxième année consécutive, les
jeunes pousses souhaitant proposer des solutions autour du thème : “Données
et informations pour le sport et ses communautés” sont sélectionnées et
accompagnées. Une façon pour ASO d’être du bon côté de la réflexion, c’est à
dire du côté où les tendances se fabriquent, et au coeur d’un échange winwin.
123
La FIFA, la PGA, le CIO, mais aussi les fédérations, les diffuseurs, pourraient
aussi décider d’entrer dans cette démarche et s’adjoindre, à moindres frais, les
cerveaux bouillonnant de jeunes startupers.
Toutes ces pistes d’outils constituent une boîte à outils de base, à utiliser
quotidiennement. Mais attention toutefois à ne pas tomber dans le piège du Do
It Yourself systématique. L’évidence reste de savoir faire intervenir les agences.
Chaque entreprise doit avoir, plus qu’un développeur que l’on chargera de
refondre un site web ou d’ébaucher une appli mobile, mais plutôt un chef
d’orchestre capable de diriger et de composer avec les agences externes. Chez
Compagnie des Alpes (Parcs d’attraction et stations de ski), ce ne sont pas
moins de 70 agences qui travaillent ensemble. Des agences qui ne sont pas
mises en concurrence et qui se partagent les compétences à un niveau très
élevé de spécialisation et donc de résultat.
5.5. QUELLES BASES DE DONNÉE ANTICIPER ?
Le mieux est l’ennemi du bien. Toute donnée collectée doit être utile et
pertinente.
Avant de vous lancer dans la collecte de datas destinées au CRM, posezvous les
bonnes questions :
quel usage faire de ces données (fidélisation, vente, etc.)
quelles sont les données minimum à collecter (adresse mail, données de
segmentation par âge, sexe, etc.)
combien de champs votre consommateur vatil accepter de remplir,
quelle est sa limite de tolérance ?
quelle est la meilleure méthode pour collecter (landing page)
doiton offrir quelquechose en échange des données ?
avonsnous les outils et ressources humaines pour traiter cette donnée ?
Il faut également bien anticiper vos besoins à moyen terme afin de posséder les
bonnes informations.
124
CONCLUSION
L’idée n’est plus de savoir si entrer dans
le numérique et admettre que la
connexion WiFi est au bas de la pyramide
de Maslow pourrait mettre en péril l’âme
d’un événement sportif ou les valeurs
d’un sport. Le numérique est une langue
universelle, un média, un champs des
possibles qui renouvelle et propose des
cultures différentes jour après jour (et
par conséquent qui nécessite un état de
veille permanente). Et il n’est plus une option. Offrir la possibilité d’être connecté
c’est offrir de l’eau à quelqu’un qui pourrait avoir soif. C’est mettre en oeuvre un
principe de précaution contre une éventuelle pénurie d’information. C’est
prendre part à un mouvement qui fait vaciller nos principes conservateurs et qui
nous pousse à nous renouveler, à remettre en perspective tous nos acquis.
Oui, les choses ont changé, et oui, nous n’en sommes qu’au début de la
mutation. Mais connecter une enceinte sportive, c’est accepter qu’hier n’était pas
forcément plus riche, plus juste, plus sain ou plus beau, sans pour autant
préjuger d’un lendemain plus brillant. C’est juste différent. Et cette différence de
langage n’entache pas les valeurs car ce qui reste au coeur de toutes nos
préoccupations, professionnels de l’événementiel sportif, c’est bien le sport, avec
ses valeurs d’effort, de performance, de fairplay, de spectacle, de plaisir et de
partage.
Les disciplines sportives, comme bien d’autres choses dans notre monde, sont
amenées à évoluer, s’adapter, changer. Qu’estce que l’histoire du football sur
l’échelle de l’histoire de l’humanité ? Qu’estce qu’un changement de règles
(voire même une disparition de la discipline au profit d’une nouvelle discipline !)
peut bien faire ? Aujourd’hui on ne souhaite plus voir s’affronter à mort des
gladiateurs. Mais qu’auraient pensé nos ancêtres si on leur avait annoncé la
future disparition de leur hobby ? De la même manière, l’explosion de la
125
technologie numérique ouvre des voies qu’il nous faut emprunter, avec
confiance. Un spectacle sportif relève du plaisir, ne le gâchons pas en nous
trompant de débat.
Les changements déjà mesurables aujourd’hui relèvent essentiellement de la
communication. Et ceci a une conséquence positive : celle d’engager beaucoup
plus largement le public. Et un public présent, ce sont des sponsors solides et
c’est une économie qui fonctionne, permettant d’offrir toujours plus de
spectacles sportifs. Et un beau spectacle sportif est une gourmandise offerte à
une société. La définition parfaite d’un cercle d’autant plus vertueux qu’il est
auréolé de valeurs fortes.
Demain, selon toute vraisemblance, l’offre va s’étoffer avec l’arrivée de
nouvelles disciplines, notamment issues du digital. Nous en connaissons les
prémices avec le formidable essor de l’esport. Ce qui ne sonne pas le glas pour
les événements existants ! La cohabitation est possible.
Et nul doute que les performances humaines continueront à être poussées à leur
paroxysme, encouragées par un arsenal d’outils et de techniques de préparation
en perpétuelle innovation, sans parler du matériel. Mais n’estce pas une
évolution naturelle et admise depuis toujours que l’intelligence humaine se
mettant au service de la performance permet de repousser toujours plus les
limites ? Que se diraient, si on les mettait face à face Emile Allais et Bode Miller ?
Comment Usein Bolt expliqueraitil ses performances à Jesse Owens ? Que
penserait Jacques Anquetil des résultats de Christopher Froome ? Ben Hogan
partageraitil notre admiration pour Rory McIlroy ? L’avenir nous offrira
peutêtre ces “explications” grâce aux hologrammes. Et ce que nous
découvrirons nous surprendra sans doute : des hommes de toutes les époques,
sachant repousser les limites de leur courage, capables de tous les sacrifices
pour s’entraîner et gagner, et, oui, avec l’aide technologique de leur époque. Ni
plus, ni moins.
Et s’il plaît un jour aux robots d’organiser leurs propres Jeux Olympiques et
même si le spectacle séduit le public, ça ne signifie pas forcément que les lacets
de l’Alpe d’Huez seront délaissés par les coureurs du Tour de France. On ne peut
126
remplacer une cathédrale que par une autre cathédrale… Ce qui ne signifie pas
que c’est impossible !
Mais on aura toujours besoin de sportifs, d’organisateurs de compétitions, de
diffuseurs et de sponsors pour faire tourner la machine, car l’espèce humaine
aura toujours besoin de ce divertissement qui consiste à comparer ses
performances, physiques ou intellectuelles.
Les puristes peuvent se tranquilliser, toute la digitalisation du monde et toutes
les nouvelles expériences qu’elle nous apportera, ne modifieront de toute façon
pas cette très sainte définition du sport : “activité physique exercée dans le sens
du jeu, de la lutte et de l’effort et dont la pratique suppose un entraînement
méthodique, le respect de certaines règles et disciplines”.
Violaine Vaubourgoin
@tweetpouic
https://fr.linkedin.com/in/violainevaubourgoin
127
SOURCES
OUVRAGE
Marketing du sport et événementiel sportif Lionel Maltese Jean Philippe
Danglade
PRESSE
Acteurs du Sport Novembre 2015
VIDÉOS
Future Arena by Adidas : https://www.youtube.com/watch?v=_nQScl5REnI
#feelwimbledon : https://www.youtube.com/watch?v=0C4ujBBlqFM
MercedesBenz Stadium : https://www.youtube.com/watch?v=8qoGP1NNJwY
La Cuisine des Cavernes de Sébastien Chabal
https://www.youtube.com/watch?v=CgeTvf3pShQ
Salon des Entrepreneurs Marseille Provence 2015 Interview Boris Pourreau,
cofondateur de running heroes
https://www.youtube.com/watch?v=_Xv8OjYMQA&feature=youtu.be
Mark Lichtenhein, head of television, digital media and technology for golf’s PGA
European Tour : <script height="349px" width="620px"
src="http://player.ooyala.com/iframe.js#pbid=7dfd98005dba40baacc82277f292
e522&ec=Fzb2V5djq6cZKS8eGqe_oEe7TOYbWJ3B"></script>
Be a Hero GoPro Spherical
http://digitalsport.co/thetopdigitalsportstoriesof2015
Nissan Projet Controller : driving football
https://www.youtube.com/watch?v=4nQV1XTugs
Comment le PSG veut jouer en première division dans le marketing et
l’ebusiness Interview Michel Mimran, Directeur Marketing du PSG :
http://www.frenchweb.fr/commentlepsgveutjouerenpremieredivisiondans
lemarketingetlebusiness/218790
128
Démo Magic Leap Réalité virtuelle
https://www.youtube.com/watch?v=kw0JRa9n94
Conférence “Mobile First” Sport Numericus Juin 2015
http://www.dailymotion.com/video/x2vey9s_conference1sn2015bienvenueda
nsleredumobilefirst_tech
7D Hologram Technology Show in Dubai
https://www.youtube.com/watch?v=5CqUYBopWLs
vidéo de la finale RoboCup 2015
https://www.youtube.com/watch?v=iNLcGqbhGcc
Vidéo RoboCup 2015 ligue de taille moyenne :
https://www.youtube.com/watch?v=0Eun4YpLiNg
Expérience immersive proposée aux fans par les Jets (NFL) http://digitalsport.co/thenewyorkjetsunveiladigitalsideline Lionel Messi vs Robotkeeper https://www.youtube.com/watch?v=GOOVdIe8lts
Fanbots coréens : https://www.youtube.com/watch?v=BBiRLYu8Wjo
ETUDES
Les Jeux Olympiques de l’Antiquité Le Musée Olympique
The future of sports Attention Span Media 2015
RAPPORTS
Rapport 2015 du SELL (Syndicat des Editeurs de Logiciels de Loisirs) :
http://www.essentieljeuvideo.fr/media/pdf/EJV_01_2015_FR.pdf
BLOGS / SITES WEB
Janvier 2016
L’appli maline du Parc OL rmcsport.bfmtv.com 12.01.16
129
Décembre 2015
Connect with the fans for fun and profit http://www.telegraph.co.uk/ Andrew Cave and Alex Miller 15.12.15
Novembre 2015
Interview – Boris Bergerot, Directeur Général de Give in Sport, plateforme de
“Fanfunding” sportbuzzbusiness.fr Alexandre Bailleul 17.11.15
Adidas ouvre les portes de FUTURE ARENA, le Stade Digital de 50 000
spectateurs virtuels sportbuzzbusiness.fr Alexandre Bailleur 13.11.15
FA to leave Cup Final design up to ‘Instagrammers’ digitalsport.co Matt
Tewhatu 10.11.15
Les notifications sportives dans l’application Messenger sportdigital.fr
Thibault Cavrois 02.11.15
The NFL could switch to precise tech tracking with Wilson's sensorstudded
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Esport, the ermergence of a new sponsorship plateform
http://strivesponsorship.com/ 24.11.15
Toulouse concocte la première course internationale de moléculesvoitures
www.Industrietechno.com JULIETTE RAYNAL 25.11.15
Cybathlon 2016, trailer offciel https://www.youtube.com/watch?v=Rx9I_hYqQcM
Octobre 2015
Médias sociaux : dans la peau du CM de l'Olympique de Marseille influencia.net
Eric Espinosa 02.10.15
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10 ways stadiums & venues are using technology to delight fans & keep them
coming back umbel.com Trips Reddy 29.09.15
La Start Up PIQ lève 5,5 millions de dollars sessionsport.com Maxime Franck
IBM is bringing sports into the digital age, starting with the U.S. Open
www.digitaltrends.com Lulu Chang 02.09.15
Euro Media Group s’offre Netco Sports pour accélérer sur le second écran
frenchweb.fr jeanne Dussueil 10.09.15
Rugby. La Coupe du monde de rugby, plus rentable que les Jeux olympiques ?
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venue http://www.digitaltrends.com/ Andrew Hard 24.08.15
La Start Up PIQ lève 5,5 millions de dollars sessionsport.com Maxime Franck
Juillet 2015
#FeelWimbledon: Sharing crowd biometrics to Social Media digital sport.co
Matt Tewhatu 03.07.15
Tony Estanguet (JO Paris 2024): « Nous plaçons l’innovation et le digital au
cœur de notre projet » magazinedécideurs.com Thomas Bastin 27.07.05
Le big data enrichit l'expérience des fans emarketing.fr Alina Kitaran
13.07.15
CASE STUDY: 5 sports marketing takeaways from the US Soccer team! promoovertime.com Marijan Palić 20.07.15
Juin 2015
Virtual Reality for Sports – The Next Big Thing? deltatre.com Thomas
Robertsson 29.06.15
Paris 2024 : L’organisation des JO estelle rentable ? http://www.lefigaro.fr/
Maxime Brigand 23.06.15
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Le sport, nouvelle figure de la robotique http://www.veberavocats.com/
Philippe Veber 01.05.15
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Meerkat, Periscope : les droits que vous risquez de piétiner
rue89.nouvelobs.com Vanessa Bouchara 08.04.15
OMPSG : Eurosport lance la bataille digitale des supporters cdusport.com
Cyrille Gandolfo 01.04.15
131
Février 2015
New stadium to feature IBM technology atlantafalcons.com 19.02.15
Hell of a Sport
Août 2014
Pourquoi des supporters de foot se plaignent du wifi gratuit
rue89.nouvelobs.com Imanol Corcostegui 19.08.14
Avril 2013
How Oreo Won the Marketing Super Bowl With a Timely Blackout Ad on Twitter
http://www.wired.com/ Angela Watercutter 02.04.13
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