TOUSTOUSTOUSBANQUIERS !BANQUIERS !BANQUIERS !
LA REVUE DES SOCIÉTAIRES DU CRÉDIT COOPÉRATIF #04 JANVIER 2015
Les territoires réinventent la coopération
EFFET DE LEVIER P. 10
Les entreprises jouent en réseau
EN ACTIONS P. 12
Les biens communs numériques
UTOPISTES ASSOCIÉS P. 14
Coopération territoriale ou numérique, mutualisation de services, consommation collaborative… l’empathie fait bouger l’économie.
POUR AGIRL’empathie
SPÉCIAL
34e
Rencontrenationale
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04 LA BANQUE EN SCOOPRetour sur l’événement
06 DOSSIER Tout le monde dit « empathie »
10 EFFET DE LEVIERLes territoires réinventent la coopération
12 EN ACTIONSLes entreprises jouent en réseau
14 UTOPISTES ASSOCIÉS Biens communs numériques : tous bénéfi ciaires !
16 ET AILLEURS ?L’ESS se développe en Europe
#04 JANVIER 2015 Dans ce numéro
96%
LE CHIFFRE DE L’ACTU
des personnes ayant testé leur empathie le jourdes personnes ayant testé leur empathie le jourde la Rencontre nationale pos sèdent le sens de la Rencontre nationale pos sèdent le sens de l’obs ervation nécessaire à une bonne de l’obs ervation nécessaire à une bonne compréhension de l’autre.compréhension de l’autre.
Certains participants à la Rencontre nationale
ont en effet pu tester leur sensibilité aux
signaux non verbaux grâce à un outil
d’évaluation développé à l’Université de
Cambridge en Angleterre par le professeur
Simon Baron-Cohen, spécialiste de l’autisme.
Rien d’étonnant dans ces résultats
pour les acteurs d’un secteur économique
où l’empathie est un moteur fondamental !
Pour tester vous aussi votre niveau
d’empathie, rendez-vous sur
www.cygnifi cation.com/test-d-empathie/
2 CRÉDIT COOPÉRATIF TOUS BANQUIERS !
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Pour nous, au Crédit Coopératif, les utopies ne sont pas des chimères et nous savons que certaines valeurs peuvent conduire des individus à se dépasser et à les faire bouger ensemble. Lors de la dernière Rencontre nationale qui s’est tenue en novembre dernier, nous avons décidé de mettre en évidence le rôle crucial joué par l’empathie, y compris dans le champ économique. Pour partager avec tous nos sociétaires la richesse des échanges qui ont eu lieu lors de cette matinée de débats, votre revue Tous banquiers ! est également consacrée à ce thème de réfl exion.
En guise d’introduction, j’aimerais rappeler que l’économie sociale et solidaire est animée par la conviction que l’Homme est un animal social qui ne peut pas progresser dans un égoïsme récessif. Et je suis convaincu que l’ESS, c’est-à-dire chacun de ceux qui s’y engagent, quel que soit son statut : adhérent, militant, collaborateur, a le devoir de traduire en actes le dernier terme du triptyque républicain : liberté, égalité, fraternité. Ce doit être le fi l conducteur de notre relation à l’autre. Le militant de l’ESS que je suis reste convaincu que nous pouvons démontrer à nos concitoyens, à nos responsables politiques que nous sommes une partie de la solution. Tous les jours, j’ai la preuve que, mises en œuvre, nos valeurs sont d’une insolente effi cacité pour bâtir un monde meilleur.
L’EMPATHIE JOUE UN RÔLE CRUCIAL DANS LE CHAMP ÉCONOMIQUE
JEAN-LOUIS BANCELPrésident du Crédit Coopératif
L’ÉDITO
Manifeste
Faites-nous part de vos réactions à l’adresse [email protected]
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34e Rencontre nationale :
RETOUR SUR L’ÉVÉNEMENT
LA RENCONTRE NATIONALE EN IMAGES
700 participants Plus de 700 partenaires, clients du Crédit Coopératif et acteurs de l’ESS se sont mobilisés pour ce grand rendez-vous organisé chaque année afi n de prendre le temps de réfl échir aux évolutions du monde dans lequel chacun d’entre nous est amené à agir. Le thème de cette année : « l’empathie pour agir ».
13 Coop’Labs (ateliers interactifs et participatifs), des animations et une table ronde pour mettre en lumière les évolutions structurante des secteurs de l’ESS et partager l’expérience d’acteurs qui ont su intégrer le changement dans leurs modes de pensée et d’intervention.
Retrouv ez le bilan de la Rencontre nationale en images, vidéos , interviews sur le site :
http://rencontre-nationale.blogspot.fr
Pôles territoriaux de coopération économique, RSE, nouveaux enjeux du numérique, entrepreneuriat social, partenariats… Les acteurs de l’ESS ont échangé pour mieux comprendre
les opportunités qui se développent sur les territoires.
scoopBanque en
scoopBanque en
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Pour en savoir plus sur les actions des structures récompensées :
www.credit-cooperatif.coop/fondation
• Le Trophée 2014 : ESP’errance (PACA)L’association ESP‘errance a créé « Pose ton sac d’abord », une bagagerie qui propose aux sans-abri des casiers gratuits et sécurisés.
• Trophée 30 ans : Association L.I.E.N (Basse-Normandie)
L’association L.I.E.N propose des cohabitations intergénérationnelles en milieu rural entre personnes âgées et jeunes travailleurs ou apprentis.
• 2e Prix : Coopérer pour entreprendre (Bretagne)
L’idée des CJS (coopératives jeunesse de services) est de proposer à une quinzaine de jeunes de réaliser leur job d’été autrement en montant ensemble une coopérative éphémère.
• 3e Prix : Th éâtre inutile (Picardie)
Compagnie au pied du lit est un spectacle créé pour des enfants hospitalisés, intégrant différentes techniques de marionnettes.
• 4e Prix : Agri Court (Rhône-Alpes)
L’association Agri Court organise une fi lière locale d’alimentation dans la Vallée de la Drôme et le bassin de Montélimar. Le but est de faciliter l’accès des produits locaux à la restauration collective et aux habitants du territoire.
• Prix Spécial du jury : Soleil Rom (Pays de la Loire)
Favoriser l’insertion sociale, citoyenne et professionnelle d’une dizaine de familles roms : tel est l’objectif poursuivi par l’association Soleil Rom créée par les habitants de la commune de Sainte-Luce.
• Mention spéciale du jury : la CIAP (Pays de la Loire)
La Coopérative d’installation en agriculture paysanne (CIAP), située dans la région des Pays de la Loire, a développé des actions pour aider des jeunes agriculteurs à s’installer.
Trophées de la Fondation
LE PALMARÈSSept projets ont été récompensés par la Fondation du Crédit Coopératif cette année, dans le cadre du concours des Prix et Trophées de l’initiative en économie sociale. Quand l’empathie est en marche.
@habsinn :« Nous avons décidé de faire partie d’un réseau d’entreprises responsables qui veut créer de la valeur via la RSE. »
@openizer : RT @credit_coop_: « Soyons tous résistants individuellement et nous changerons le monde collectivement. »
@JulieHazebroucq : « Le futur c’est notre présent. Faire de l’empathie le moteur de l’action collective. » @yxblan#RNcreditcoop
@MeguellatiSoso : @christelprado :« Cette crise est une chance, pour cocréer la société de demain. »@credit_coop_#RNcreditcoop
@uniscite : L’#empathie selon F. Chérèque : « Écouter pour comprendre, comprendre pour reconnaître, reconnaître pour agir. »#RNcreditcoop@ServiceCivique
LA RENCONTRE NATIONALE
SUR TWITTER
Un fi l de conversation autour du hashtag#RNCreditCoop a rassemblé :
1 501 tweets, soit
300 tweetos participants et actifs ont été recensés.
le quatrième fi l de discussions le plus suivi ce jour-là !
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Une question ? Un commentaire ? Écrivez-nous ! À chaque numéro, nos experts vous répondent.Réagissez à l’adresse : [email protected]
L’empathie, cette capacité à se mettre à la place de l’autre n’est-elle pas plus présente qu’on ne croit dans notre société et peut-elle créer de la valeur économique ? C’est à ces questions que les acteurs de l’économie sociale et solidaire, lors de la 34e Rencontre nationale du Crédit Coopératif, ont répondu. Sans hésitation, ils ont dit oui.
«empathie»TOUT LE MONDE DIT
Parlons
DOSSIER
Le
DOSSIER
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Certains ont prédit que le XXIe siècle
serait religieux. Peut-être, mais ils n’ont
pas senti arriver la vague : l’empathie,
cette façon si particulière d’être à
l’autre et au monde. Soyons indulgents, le mot
n’existait pas en français il y a 60 ans. Alors,
de quoi parle-t-on ? De son étymologie, on
retient que « en- », signifi e « dedans », et pathos,
« ce que l’on ressent ». C’est la faculté intuitive de
percevoir et de comprendre les sentiments d’au-
trui, de se mettre à la place de l’autre tout en
conservant une certaine objectivité. « Plus exac-tement, précise le sociologue Omar Zanna, c’est avoir une représentation des émotions d’autrui, car on ne peut pas se mettre à sa place. C’est accepter l’autre comme une version possible de soi-même. C’est le préalable pour pouvoir l’aider. »
Un « avatar » de notre société mobileD’abord utilisée en psychologie, puis en sociolo-
gie, la notion l’est aujourd’hui dans tous les
domaines des sciences humaines. Pourquoi un
tel succès ? Selon Yannick Blanc, préfet du Vau-
cluse et président de la Fonda, un laboratoire
d’idées au service des associations, la notion
d’empathie est bien le marqueur d’une société en
mouvement, qui a perdu ses repères traditionnels
où chacun avait une place et un statut clairs.
« Nous vivons dans une société où la place des individus n’est plus défi nie par l’ordre symbolique. En face d’une personne, il est diffi cile de savoir si elle est amie ou ennemie. Pour surmonter “l’étrangeté de l’étranger”, pour établir une rela-tion avec autrui, il faut avoir la capacité de se mettre à sa place, ce qui déterminera de facto la nôtre. De même, l’individu, pour se construire lui-même dans cette société de l’incertitude et de la mobilité, se doit d’être attentif à l’autre pour défi -nir sa place par rapport à l’ensemble. C’est bien la transformation de la société qui génère ce besoin. »
Dans votre parcours de sociologue, comment avez-vous commencé à travailler sur l’empathie ?Mes premiers travaux ont porté sur la délinquance juvénile. Je tentais alors de comprendre comment on devenait délinquant. Les mineurs délinquants que j’interrogeais acceptaient leur sanction, mais étaient dans le déni du dommage causé à autrui. Par la suite, j’ai développé des programmes de restauration de l’empathie**. Puis, il m’est apparu plus intéressant de prévenir et d’éduquer à l’empathie.
Vous militez pour que l’empathie soit enseignée à l’école. L’empathie ça s’apprend ? L’empathie n’a rien de naturel ! Selon certaines théories, nous serions tous porteurs d’un capital d’empathie qu’il faut développer. Il y a un siècle, cela s’apprenait au sein des familles qui comptaient des fratries plus larges et où les relations quotidiennes de face à face étaient plus fréquentes. Aujourd’hui, les vis-à-vis sont moins nombreux, les enfants sont souvent seuls face à un écran. Parce qu’elle s’adresse à tous, l’école représente un espace privilégié d’éducation à l’empathie.
Vous avez mené deux expériences,l’une en primaire, l’autre au collège. Quels enseignements en tirez-vous ? Les programmes menés à l’école et dans les collèges ont été évalués. Les résultats montrent une évolution positive des comportements des élèves. Par exemple, sur 450 élèves du primaire, les garçons ont rattrapé les fi lles sur leur capacité d’empathie. La proportion d’élèves victimes de harcèlement a diminué de plus de la moitié (de 15 % à 6 %), et leurs enseignants ont tous enregistré un enrichissement net de leur vocabulaire dans l’expression des émotions notamment.
* À paraître : Le corps dans la relation aux autres, Presses universitaires de Rennes.
** Restaurer l’empathie chez les mineurs délinquants, Paris, Dunod, 2010.
Omar Zanna, sociologue, Maître de conférence à l’Université du Maine*
« L’empathie n’a rien de naturel !»
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ment. C’est le cas de l’essayiste américain Jérémy
Rifkin qui parle d’une « civilisation de l’empathie** ». Selon lui, cette empathie, apparue avec le « vil-lage planétaire » et le développement des
réseaux sociaux, marque l’avènement d’une « civi-lisation interdépendante, où chaque pays apprend à s’écouter et développe des actions d’entraide, se déploie à tous les niveaux de l’activité humaine » . Une tendance moteur d’action.
« L’écoute est le premier ressort pour agir aujourd’hui avec autorité, note Yannick Blanc. Et le geste de mettre en commun devient le modèle de toute action collective. » Une façon d’agir bien
réelle qui se déploie au niveau mondial, selon
Antonella Noya, analyste en politique publique à
l’OCDE. « L’économie sociale et solidaire repose sur cette capacité d’empathie et d’écoute qui cherche à repérer les besoins de transformation collective de la société. C’est une réalité concrète dans toute l’Europe. » Les initiatives de coopéra-
tion qui se développent dans les territoires, les
nouveaux services qui apparaissent à partir de
structures horizontales et de communautés sont
là pour rappeler que cette utopie est déjà en
marche. Consommation collaborative, finance
participative, une économie se construit grâce à
l’empathie qui existe au sein des communautés.
« Cette nouvelle économie collaborative peut fournir des outils à l’économie sociale et solidaire pour construire son avenir », note Flore Berlingen,
cofondatrice de OuiShare, un think tank qui
promeut et aide les porteurs de projet de cette
nouvelle économie. De nouvelles façons d’entre-
prendre qui doivent conserver une part d’utopie
pour être facteur de changements sociaux (voir
l’interview de François Chérèque).
* Union nationale des associations de parents et amis de personnes handicapées mentales.
** Une nouvelle conscience pour un monde en crise. Civilisation de l’empathie, Les liens qui libèrent, 2011.
L’empathie, nouvelle compétence du XXIe siècle ? D’après les études en neurobiologie, nous aurions tous un gène de l’empathie. L’éthologue Franz de Waal a démontré l ’existence de « neurones-miroirs » chez les primates, qui expliquent la spontanéité de comportements d ’ imi tat ion . Et pourtant r ien de moins naturel que cette compétence qui suppose d’instaurer un climat de confiance. Christel Prado, présidente de l’Unapei* et membre du Comité économique, social et environnemental, parle même de « nouvelles compétences sociales » nécessaires aujourd’hui à la vie en société, « où nous sommes conscients de notre interdépendance ». Comme toute compétence, l’empathie devrait donc s’apprendre. Or l’école en est seulement aux prémices de cet apprentissage (voir l’entretien avec Omar Zanna).
Une utopie bien réelle Aujourd’hui, les penseurs s’appuient sur cette
valeur pour en faire un modèle de développe-
Parlons
DOSSIER
Le
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COMMENT METTRE EN ŒUVRE L’EMPATHIE DANS NOTRE SOCIÉTÉ ? L’empathie commence par l’écoute, pour comprendre l’autre et dialoguer. Or dans notre société du court terme, nous n’avons plus le temps de l’écoute, considéré comme un luxe. On refuse le dialogue jugé comme du temps perdu. L’empathie est un levier pour comprendre mais aussi pour agir.
COMMENT DÉFINISSEZ-VOUS L’EMPATHIE QUI AGIT ? Il y a trois façons de décider d’agir : par la force ou la peur,
3 questions à François Chérèque, ex-secrétaire général de la CFDT, inspecteur général des Affaires sociales, rapporteur du « Rapport sur l’évaluation du plan de lutte contre la pauvreté » et président de l’Agence de service civique.
FRANÇOIS CHÉRÈQUE
ce qui n’est pas recommandé ; à la place de… ou par empathie. C’est parfois, en effet, la limite de nos actions de faire les choses à la place des autres plutôt que pour les autres. Je le vois dans le cadre de ma mission d’évaluation du plan de lutte contre la pauvreté : il est nécessaire de faire participer les personnes en situation de pauvreté. Ce qui se heurte souvent à notre réfl exe de nier aux autres la capacité de savoir pour eux-mêmes. L’empathie doit nous aider à agir pour mais surtout avec.
EN QUOI L’EMPATHIE PEUT-ELLE ÊTRE FORCE DE CHANGEMENT ? C’est une façon d’être qui sert à réformer la société à partir du réel. La crise que nous traver-sons doit être envisagée comme une chance pour engager des réformes en profondeur. Nous ne pouvons pas revenir à notre fonctionnement d’avant. L’économie sociale et solidaire utilise l’empathie pour écouter, comprendre et agir. C’est déjà une réalité, mais l’ESS ne doit pas renoncer à l’utopie qui est force de mobilisation et de changement.
La compassionLa sympathie
J’arrive ! Attrape !Courage !Je suis avec toi mon pauvre…
L’empathie
Sympathie, compassion, empathie : quelle différence ?
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Les formes de coopération s’inventent et se multiplient pour accompagner l’entrepreneuriat à l’échelle locale.
Défi nitions et exemples gagnants.
LES TERRITOIRES RÉINVENTENT LA COOPÉRATION
CAE : une coopérative d’activités et d’emploi
rassemble des professionnels qui souhaitent
développer un projet entrepreneurial tout en évo-
luant dans un cadre collectif et en bénéfi ciant d’un
statut de salarié. La CAE peut être multimétier ou
spécialisée dans un même secteur d’activité.
Circuit court : se dit d’un circuit de distribution
dans lequel intervient au maximum un intermédiaire
entre le producteur et le consommateur.
Coopération : fait de travailler, de fonctionner
ensemble. La coopération a des applications très
larges, mais repose sur quatre notions : elle valorise
le collectif sur l’individuel, s’oppose par défi nition à la
concurrence, suppose un rapport d’équité et vise à
donner à chacun les ressources pour améliorer son
autonomie.
Co-working : désigne à l’origine un espace de
travail partagé par des indépendants qui veulent
rompre l’isolement. Par extension, c’est une
organisation de travail en réseau de travailleurs
encourageant l’échange et l’ouverture. À ce titre,
le co-working est l’une des pratiques de l’écono-
mie collaborative.
EFFET DE LEVIER
CCOMME...
Agroalimentaire : un partenariat gagnant
Terrena, groupe coopératif, acteur majeur de l’agriculture et de l’agroalimentaire a noué un partenariat avec la coopérative Système U pour la production de produits sous la Marque U. Habituellement basées sur des rapports de force entre les différents maillons de la chaîne, les relations commerciales entre les agriculteurs, l’industriel et le distributeur reposeront désormais sur de vraies relations partenariales. Les agriculteurs s’engagent sur un cahier des charges précis, gage de qualité de leur fi lière porc, Terrena s’occupe de la découpe et du conditionnement et Système U commercialise les produits. Le distributeur s’engage à contractualiser, sur trois ans, les conditions fi nancières négociées. Cette relation entre le monde agricole et la grande distribution ouvre la voie d’une évolution des modèles au bénéfi ce de l’ensemble des acteurs de cette fi lière.
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I COMME...
Incubateur d’entreprises : structure qui
aide à lancer les jeunes projets de création
d’entreprises avec une aide en matière d’hé-
bergement, de conseil et de fi nancement.
M COMME...
Mutualisation : pionnières, les mutuelles
d’assurances se sont créées sur le principe de
partager le risque pour en optimiser le coût.
Aujourd’hui, les initiatives de mutualisation
permettent de mettre en commun des compé-
tences et des ressources. En facilitant cette
transition de la propriété individuelle à l’usage
ou à la propriété collective, elle est à la base
de nombreux projets de consommation colla-
borative (exemple : le covoiturage).
P COMME...
PTCE : un pôle territorial de coopération éco-
nomique (PTCE) est un regroupement sur un
territoire donné d’entreprises de l’économie
sociale et solidaire associées à des collectivités
locales, des centres de recherche et organismes
de formation, qui met en œuvre une stratégie
commune au service de projets économiques
PTCE : la Maison de l’économie solidaire du Pays de Bray
« La Maison de l’économie solidaire du Pays de Bray, qui regroupe plus de 50 sociétaires, expérimente depuis trois ans le travail d’un PTCE », raconte Rachid Cherfaoui, son responsable. « Aujourd’hui, nous avons défi ni trois axes de projets prioritaires pour le territoire : le développement des services à la personne pour répondre au vieillissement de la population, la valorisation des éco-métiers et la formation des professionnels, et l’accompagnement de la mise en place de la réforme des rythmes scolaires. » À chaque fois, la méthode, inspirée de la recherche et développement, a consisté à identifi er les besoins du territoire, vérifi er la validité de la question avec un Centre de recherche associé, faire une étude de marché, suivie d’une étude de faisabilité pour fi nir par lancer une expérimentation d’un projet. « Pour développer ces pratiques d’innovation sociale sur un territoire donné, il faut accepter de changer sa façon de penser et décloisonner l’activité économique. »
innovants pour un développement local durable.
Le Labo de l’ESS a été le promoteur en 2008
de ce mode de regroupement qui repose sur
l’adhésion et la coopération. En 2014, après la
loi-cadre sur l’ESS, les PTCE bénéfi cient d’une
reconnaissance législative.
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La mise en réseau des entreprises n’est pas une pratique nouvelle, mais les innovations numériques, la nécessité de peser sur les politiques publiques leur donnent une importance renouvelée. Et quand les entreprises mutualisent leurs ressources, échangent et partagent leurs expériences, elles grandissent ensemble. Exemples avec quatre réseaux d’entreprises qui innovent.
En actionsEn actions
LE CRÉDIT
COOPÉRATIF
Comment engager son organisation dans une démarche de progrès en RSE et faire face à la complexité des normes, des parties prenantes, des actions à mettre en marche ? Au-delà de sa mission de labellisation des entreprises engagées en RSE, le Label LUCIE propose d’accompagner celles-ci dans leur démarche de progrès au travers de sa communauté. Fédérant fi n 2014 près de 130 entreprises et associations, c’est le premier réseau français d’organisations engagées dans une démarche pérenne et vérifi ée de progrès en RSE. Les outils et activités de la communauté permettent notamment aux labellisés et aux « labellisables » de profi ter d’échanges d’expériences, de bénéfi cier d’une dynamique de groupe et de jouir de la visibilité d’un réseau structuré et reconnu. Trois facteurs de réussite !
LUCIE S’engager pour le développement durable
L’échange interentreprises ou Barter est un mode de commerce qui prend la forme d’échanges de marchandises ou de services, de façon multilatérale, au sein d’une communauté sans échange de trésorerie. Ainsi une entreprise peut trouver des clients, les facturer, obtenir des Barters, une unité de compte interne au réseau, et avec ses Barters acheter des prestations ou services auprès des autres entreprises membres de cette plateforme coopérative.
FRANCE BARTER, Le troc entre entreprises
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LES ENTREPRISES JOUENT EN RÉSEAU
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Environnement
Responsabilité
sociétale
Solidarité
Culture
Technologie
PARTAGEZ AVEC NOUS VOS PROJETS À L’ADRESSE :
Selon le principe que l’union fait la force naît le Plan d’export des éco-entreprises (PEXE) en 2012, en partenariat avec l’Ademe et Ubifrance. Il s’agit de mutualiser les ressources pour créer des initiatives collectives à l’export. Devenu l’Association pour la promotion et le développement des éco-entreprises de France, le réseau regroupe aujourd’hui près de 5 000 éco-entreprises (soit la moitié des entreprises de la filière), des associations professionnelles, des clusters, des pôles de compétitivité pour développer cette fi lière en France et à l’étranger. Un hyper réseau où chacun profi te de l’expertise de l’autre pour augmenter ses performances.
LE PEXEDévelopper la fi lière
des éco-entreprises
Le réseau Alliance a 20 ans d’expérience e t ra s s e m b l e a u j o u rd ’ h u i p l u s d e 300 entreprises de la région Nord-Pas-de-Calais qui s’engagent dans une démarche de responsabilité sociétale. Les entreprises adhérentes bénéficient de l’expertise du réseau, de programmes de formation et de diagnostics pour faire progresser leur démarche de responsabilité. Une base de données des bonnes pratiques « Bipiz » est également mise à leur disposition. En utilisant ces ressources et en participant aux événements organisés par le Réseau, en particulier les Trophées de l’économie responsable et le World Forum à Lille, elles s e c r é e n t d e s o p p o r t u n i t é s d e développement.
RÉSEAU ALLIANCES Un réseau ex perten Nord-Pas-de-Calais
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assoc iésassoc iés
Les biens communs de la connaissance sont nés… avec le numérique. Ni privés, ni publics, à quoi correspondent ces nouvelles ressources
mises à la disposition de chacun ?
TOUS BÉNÉFICIAIRES !
Biens communs numériques
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«On peut parler de révolution numérique : l’ancien pouvoir capturait la valeur, le nou-veau la distribue. » Au-delà
de la provocation, Matthieu Lerondeau, directeur
associé de La Netscouade, une agence de
communication digitale, résume les
nouveaux enjeux soulevés par la
révolution numérique : comment
pérenniser et partager les « biens
communs » de la connaissance ? La
théorie des communs, mise à jour
par l’économiste, prix Nobel, Elinor
Ostrom*, a une origine médiévale
anglaise : « les communs »**. À l’ère
numérique, le concept s’est étendu. Ni bien
privé ni bien public, ces ressources numériques
sont accessibles à tous, partageables par tous,
et non concurrentielles dans leur pratique, c’est-
à-dire qu’elles sont réemployables et réexploi-
tables à volonté.
Ouverture, partage et coconstructionOn distingue deux types de biens communs numé-
riques. D’une part des informations numériques
et des connaissances transmises en mode
ouvert et réutilisables par le plus grand
nombre. Wikipedia par exemple, site le
plus consulté au monde, présente
des données encyclopédiques très
bien référencées, enrichies par des
millions de contributeurs. Autre
exemple, l’open data (données libres, publiques) qui désigne ces
masses de données récoltées et réu-
tilisables par tous, pour tous, et qui font
désormais partie intégrante des politiques
publiques ; ou encore les œuvres créatives
mises à disposition de chacun sous licence
ouverte (« Creative common »). D’autre part,
des logiciels libres mettent à disposition leur
code source (« open source »), comme le navi-
gateur Firefox, ou les logiciels Open offi ce. Un
modèle d’intelligence collective fondé sur le
principe d’ouverture, de partage et de
coconstruction, selon Matthieu Lerondeau.
Mais où, pour Charles Népote de la FING***,
l’enjeu est de lutter contre la tentation de pri-
vatisation, qu’elle soit marchande ou due à la
complexifi cation des règles techniques. « En effet, si l’homme ordinaire ne peut plus se saisir de ce bien par manque de culture numérique, le modèle du partage et de la coconstruction trouvera ses limites. »* Prix Nobel des sciences économiques, 2009. Auteur de La gouvernance des biens communs : pour une nouvelle approche des ressources naturelles, De Boeck, 2010, et avec Charlotte Hess (dir.), Understanding Knowledge As a Commons : From Theory to Practice, MIT Press, janvier 2007, 381 pages.
** Le premier débat apparaît au XIIIe siècle quand les pauvres des campagnes anglaises se révoltent contre les enclosures, une nouvelle loi qui permet aux propriétaires de clôturer leurs terrains. Les communs (« commons »), ces droits coutumiers qui leur permettaient d’avoir accès à la récolte du miel, au bois de chauffe et aux produits de la cueillette, disparaissent.
*** Fondation Internet nouvelle génération.
Open data :
Données publiques
et réutilisables
par tous.
MOOC : un levier pour changer le monde Les MOOCs*, ces formations en ligne ouverte à tous, sont une nouvelle façon de partager le savoir jusqu’ici dispensé à un nombre limité, dans des lieux physiques fermés. Mais, s’ils offrent des cours sur le web, en réel en groupe ou au travers d’une mise en réseaux d’indépendants sur une plateforme spécialisée, pour les chercheurs universitaires, Stéphane Amiard, vice-président de l’Université d’Angers, et Dominique Boullier, professeur de sociologie à Sciences Po : « On assiste bien à un changement de paradigme. Le numérique est devenu un acteur majeur de la transmission des savoirs. » Reste à déterminer sa valeur : suivre un cursus de MOOC équivaut-il à un diplôme obtenu par la voix classique ? Loin de relever tous les défi s (voire les mythes) qui leur ont été conférés, les MOOCs bousculent néanmoins les préceptes passés et participent à une nouvelle dynamique de la formation.Découvrez les formations disponibles sur la plateforme www.france-universite-numerique-mooc.fr* De l’anglais « Massive Online Open Course », en français « cours en ligne ouverts à tous ».
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Rencontre avec Antonella Noya*, analyste des politiques publiques à l’OCDE**, à propos du développement de l’économie sociale et solidaire en Europe.
L’ÉCONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRESE DÉVELOPPE EN EUROPE
Que représente l’économie sociale et solidaire (ESS)en Europe ?Avec 6,5 % de l’emploi en Europe en 2010 et 15 millions de travailleurs, l’ESS est bien une réalité en Europe. On retrouve cette dynamique en France où elle a créé 440 000 emplois nouveaux en dix ans, soit une croissance de 23 %. Une performance quand l’ensemble de l’emploi privé n’augmentait que de 7 %.
Quels sont les pays où l’économie sociale et solidaire est la plus dynamique ?On assiste à un foisonnement d’initiatives dans presque tous les pays européens avec de
nombreuses sources d’inspiration. Les différences résident dans l’articulation avec les systèmes d’aides sociales. En Italie, en France et en Angleterre, l’ESS y est pleinement reconnue et intégrée. À cela plusieurs raisons : un secteur coopératif et associatif bien développé, des réseaux de solidarité,des capacités entrepreneuriales et, plus largement, une reconnaissance publique de sa contribution à l’économie.
Comment développer cette économie par des politiques publiques d’envergure ?Si l’écosystème « parfait » transposable d’un pays à l’autre n’existe pas, certains pays
accompagnent mieux que d’autres la capacité de la société civile à s’organiser : l’Italie, l’Espagne, la France, le Portugal et la Grèce. En Italie, les coopératives sociales existaient bien avant leur loi-cadre tandis qu’en Angleterre l’essor des entreprises sociales est le résultat de la volonté politique. Il faudrait que se multiplient les politiques publiques « empathiques » envers l’ESS, qui reconnaissent sa contribution à nos économies et à nos sociétés.
* Antonella Noya a publié un rapport de l’OCDE en 2013 sur la « Création d’emplois dans l’économie sociale et l’entrepreneuriat social ».
** Organisation de coopération et de développement économiques.
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L’économie sociale et solidaire, ça se passe comment à l’international ?
Et ailleurs ?Et ailleurs ?
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