© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
Supplément réalisé par Christian Laporte
LAGRANDEGUERRE
ÀHAUTEURD’HOMMEQuatrième partie : Charleroi, labataille oubliée et Mons, où lesBritanniques montent au front.
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
Un seul coup de feu : dixhuit millions de morts28 JUIN 1914 L’archiduc FrançoisFerdinand, héritier du trône d’Autriche, est assassiné à Sarajevo parun idéaliste de 19 ans. L’attentat débouche sur un conflit mondial, aussi simplement que s’effondreun jeu de château de cartes. Pour l’expliquer, il faut évoquer l’effritement du grand Empire ottomanau cours du 19e siècle. La Grèce s’en est détachée pour proclamer son indépendance dès 1830. Puisla Bulgarie. Et la Serbie, capitale Belgrade. Ensuite, en 1909, l’Empire autrichien s’empare de la Bosnie,capitale Sarajevo. Impuissant, le gouvernement de Constantinople laisse faire.Les Serbes sont furieux. Le professeur Tixhon, de l’Université deNamur : “Comme tous les États européensde l’époque, la Serbie développe un nationalisme extrême. On y rêve d’une Grande Serbie qui irait jusqu’auxfrontières de la Grèce. De plus, la Bosnie offrirait aux Serbes l’accès à laMéditerranée. Belgrade, en s’appuyantsur les Serbes vivant en Bosnie, alimente une espèce de terrorisme et développe l’agitation et un sentiment antiautrichien. L’assassinat de Sarajevo s’est déroulé dans ce contextelà. L’auteur est un Serbe de Bosnie, membred’un groupe révolutionnaire. Les Autrichiens sont persuadés qu’il a été téléguidé par le gouvernement serbe.”Le professeur Balace, de l’Université de Liège : “L’arme du crime est un pistolet automatique BrowningF1903 provenant d’un lot qui avait été livré par la FN de Herstal à la Serbie deux mois avant l’attentat. C’estce qui a fait penser que Belgrade avait organisé l’assassinat.”D’où l’exigence desAutrichiens : ils entendentaller euxmêmesmener l’enquête àBelgrade. Les Serbes refusent aunomde l’intégrité nationale. LesAllemands incitent les Autrichiens à la plus grande fermeté.
23 JUILLET L’Autriche pose unultimatumet, le 28, elle déclare la guerre à la Serbie. Le 29, la Russie, défenderesse de la Serbie, déclare la guerre à l’Autriche.
28 JUILLET Il y a déjà des bombardements sur Belgrade. C’est le vrai début de la guerre.31 JUILLET ÀParis, Jean Jaurès, prêcheurdupacifisme, est assassiné et, le lendemain, 1er août, l’Allemagnedéclare la guerre à laRussie; la France, alliée des tsars, décrète lamobilisation générale. La Belgique, paysneutremais craignant l’invasion, le fait également.
2 AOÛT L’Allemagne envahit le Luxembourg et exige que la Belgique laisse passer ses troupes.3 AOÛT La Belgique refuse. L’Allemagne déclare la guerre à la France et à la Belgique.4AOÛT À l’aube, lesAllemandspénètrent sur le sol belge. À10h, àThimister, AntoineFonckest le premiersoldat belge tué. Àmidi, discours du roi Albert devant le Parlement. Appel à l’aide des Britanniques, garants de notre neutralité, et des Français. La GrandeBretagne déclare la guerre à l’Allemagne.
5 AOÛT Sur la route de Liège, l’armée belge oppose aux Allemands une résistance inattendue qui provoque en retour une brutalité terrifiante des envahisseurs. Les maisons de Battice sont incendiées le 6et celles de Herve le 8.
6 AOÛT Les Allemands sont à Liège. Ils peuvent prendre à revers les 12 forts censés protéger la ville. Flémalle et Hollogne tiendront jusqu’au 16. Les Allemands entreront dans Bruxelles le 19.Les armées belges se replient vers Anvers.
15 et 16 AOÛTÀDinant, l’armée française subit le baptême du feu.22 AOÛT Cette fois, la guerre éclate. Grandes batailles près de Virton : à Rossignol (plus de 15.000morts),à Éthe, mais aussi à Namur, à Charleroi et à Mons. Les Français perdront, ce jourlà, plus d’hommesqu’en huit ans de guerre d’Algérie. Le 23, ça se bat à Dinant où 674 civils sont abattus. Il y aura d’autrestueries : à Andenne, à Seilles, à Tamines... Vaincus, les Français ont ordre de se replier vers laMarne.
25 AOÛT Première des trois sorties des troupes belges d’Anvers assiégée. Notre armée occupe ainsi150000 soldats allemands alors que se prépare la grande bataille de laMarne.
9 SEPTEMBRE Sur la Marne, les 150000 soldats allemands retenus en Belgique manquent cruellementaux envahisseurs. C’est la victoire française et la retraite générale de l’armée allemandepourqui l’objectif change : contourner Paris par le nord et prendre les ports deDunkerque, deBoulogne et deCalais afinde contrarier les débarquements britanniques. On appellera cela la Course à la Mer. Ainsi, l’Yser etle Nord de la France deviendront les principaux champs de bataille de 1418.
9OCTOBRE L’armée belge quitte Anvers et se replie audelà de l’Yser La Bataille de l’Yser débute le 19.7 MAI 1915 Depuis février, les Allemands ont lancé les premiers sousmarins. Ils torpillent tous les bateaux qui font route vers l’Angleterre, y compris ceux des pays neutres. Ce 7 mai, le Lusitania, un paquebot transatlantique, est coulé : 1.200 morts dont 128 ressortissants américains. Ce fait tragique influence l’entrée en guerre des ÉtatsUnis.
2 AVRIL 1917 Entrée en guerre des ÉtatsUnis. Les premiers corps militaires américains débarquentà Nantes et La Rochelle à partir d’octobre 1917. Mais les troupes n’entrent pas tout de suite dans la bataille. On prend le temps de rassembler deuxmillions d’hommes.
6 JUILLET 1917 Lawrence d’Arabie entre dans Aqaba. Au début de la guerre, l’immense Empire ottomanhésitait. Plusieurs archéologues britanniques, occupés sur des chantiers en Turquie, servirent d’espionsafin de convaincre Constantinople de rejoindre les alliés. Thomas Lawrence était l’un d’eux. Les prétentions françaises en Algérie et anglaises en Égypte, décidèrent le sultan à choisir l’Allemagne. Lawrence,promu colonel, fut envoyé dans les déserts arabes afin de retourner les tribus contre les Turcs. La victoire d’Aqaba précipitait la chute de l’Empire ottoman.
PRINTEMPS 1918 Sur la côte Atlantique, les Américains arrivent à raison de 200.000 hommes par mois.L’Empereur et le haut commandement allemand s’installent à Spa et préparent, avant que ne se metteenmarche l’armée amércaine, une offensive de la dernière chance.
AVRIL 1918 La grande offensive américaine commence. Les Allemands comprennent très vite quela guerre est perdue. Mais l’Empereur sait que la défaite signifie son abdication. Il retarde sa signature.
11NOVEMBRE1918 LesAllemands signent un armistice avant que leur pays ne soit envahi. Bilan : le coupde feu du 28 juin 1914 à Sarajevo aura causé la mort de 18 millions de personnes. En Belgique,42700militaires ou assimilés ont perdu la vie. On compte aussi 24.500 victimes civiles.
2-3 La Grande guerre à hauteur d’homme
La Grande guerre à hauteur d’homme. Supplément gratuit à La Libre Belgique et à La Dernière Heure.Rédaction : Christian Laporte.Conception graphique : Jean-Pierre Lambert. Coordination rédactionnelle : Gilles Milecan.Infographie : Astrid ‘t Sterstevens, Didier Lorge et Etienne Scholasse.Réalisation : IPM Press Print. Administrateur délégué – éditeur responsable : François le Hodey.
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
Un seul coup de feu : dixhuit millions de morts Tout le monde le sait : la Première Guerremondiale trouve ses origines à Sarajevo.Repères.
2-3 La Grande guerre à hauteur d’homme
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
Un seul coup de feu : dixhuit millions de morts28 JUIN 1914 L’archiduc FrançoisFerdinand, héritier du trône d’Autriche, est assassiné à Sarajevo parun idéaliste de 19 ans. L’attentat débouche sur un conflit mondial, aussi simplement que s’effondreun jeu de château de cartes. Pour l’expliquer, il faut évoquer l’effritement du grand Empire ottomanau cours du 19e siècle. La Grèce s’en est détachée pour proclamer son indépendance dès 1830. Puisla Bulgarie. Et la Serbie, capitale Belgrade. Ensuite, en 1909, l’Empire autrichien s’empare de la Bosnie,capitale Sarajevo. Impuissant, le gouvernement de Constantinople laisse faire.Les Serbes sont furieux. Le professeur Tixhon, de l’Université deNamur : “Comme tous les États européensde l’époque, la Serbie développe un nationalisme extrême. On y rêve d’une Grande Serbie qui irait jusqu’auxfrontières de la Grèce. De plus, la Bosnie offrirait aux Serbes l’accès à laMéditerranée. Belgrade, en s’appuyantsur les Serbes vivant en Bosnie, alimente une espèce de terrorisme et développe l’agitation et un sentiment antiautrichien. L’assassinat de Sarajevo s’est déroulé dans ce contextelà. L’auteur est un Serbe de Bosnie, membred’un groupe révolutionnaire. Les Autrichiens sont persuadés qu’il a été téléguidé par le gouvernement serbe.”Le professeur Balace, de l’Université de Liège : “L’arme du crime est un pistolet automatique BrowningF1903 provenant d’un lot qui avait été livré par la FN de Herstal à la Serbie deux mois avant l’attentat. C’estce qui a fait penser que Belgrade avait organisé l’assassinat.”D’où l’exigence desAutrichiens : ils entendentaller euxmêmesmener l’enquête àBelgrade. Les Serbes refusent aunomde l’intégrité nationale. LesAllemands incitent les Autrichiens à la plus grande fermeté.
23 JUILLET L’Autriche pose unultimatumet, le 28, elle déclare la guerre à la Serbie. Le 29, la Russie, défenderesse de la Serbie, déclare la guerre à l’Autriche.
28 JUILLET Il y a déjà des bombardements sur Belgrade. C’est le vrai début de la guerre.31 JUILLET ÀParis, Jean Jaurès, prêcheurdupacifisme, est assassiné et, le lendemain, 1er août, l’Allemagnedéclare la guerre à laRussie; la France, alliée des tsars, décrète lamobilisation générale. La Belgique, paysneutremais craignant l’invasion, le fait également.
2 AOÛT L’Allemagne envahit le Luxembourg et exige que la Belgique laisse passer ses troupes.3 AOÛT La Belgique refuse. L’Allemagne déclare la guerre à la France et à la Belgique.4AOÛT À l’aube, lesAllemandspénètrent sur le sol belge. À10h, àThimister, AntoineFonckest le premiersoldat belge tué. Àmidi, discours du roi Albert devant le Parlement. Appel à l’aide des Britanniques, garants de notre neutralité, et des Français. La GrandeBretagne déclare la guerre à l’Allemagne.
5 AOÛT Sur la route de Liège, l’armée belge oppose aux Allemands une résistance inattendue qui provoque en retour une brutalité terrifiante des envahisseurs. Les maisons de Battice sont incendiées le 6et celles de Herve le 8.
6 AOÛT Les Allemands sont à Liège. Ils peuvent prendre à revers les 12 forts censés protéger la ville. Flémalle et Hollogne tiendront jusqu’au 16. Les Allemands entreront dans Bruxelles le 19.Les armées belges se replient vers Anvers.
15 et 16 AOÛTÀDinant, l’armée française subit le baptême du feu.22 AOÛT Cette fois, la guerre éclate. Grandes batailles près de Virton : à Rossignol (plus de 15.000morts),à Éthe, mais aussi à Namur, à Charleroi et à Mons. Les Français perdront, ce jourlà, plus d’hommesqu’en huit ans de guerre d’Algérie. Le 23, ça se bat à Dinant où 674 civils sont abattus. Il y aura d’autrestueries : à Andenne, à Seilles, à Tamines... Vaincus, les Français ont ordre de se replier vers laMarne.
25 AOÛT Première des trois sorties des troupes belges d’Anvers assiégée. Notre armée occupe ainsi150000 soldats allemands alors que se prépare la grande bataille de laMarne.
9 SEPTEMBRE Sur la Marne, les 150000 soldats allemands retenus en Belgique manquent cruellementaux envahisseurs. C’est la victoire française et la retraite générale de l’armée allemandepourqui l’objectif change : contourner Paris par le nord et prendre les ports deDunkerque, deBoulogne et deCalais afinde contrarier les débarquements britanniques. On appellera cela la Course à la Mer. Ainsi, l’Yser etle Nord de la France deviendront les principaux champs de bataille de 1418.
9OCTOBRE L’armée belge quitte Anvers et se replie audelà de l’Yser La Bataille de l’Yser débute le 19.7 MAI 1915 Depuis février, les Allemands ont lancé les premiers sousmarins. Ils torpillent tous les bateaux qui font route vers l’Angleterre, y compris ceux des pays neutres. Ce 7 mai, le Lusitania, un paquebot transatlantique, est coulé : 1.200 morts dont 128 ressortissants américains. Ce fait tragique influence l’entrée en guerre des ÉtatsUnis.
2 AVRIL 1917 Entrée en guerre des ÉtatsUnis. Les premiers corps militaires américains débarquentà Nantes et La Rochelle à partir d’octobre 1917. Mais les troupes n’entrent pas tout de suite dans la bataille. On prend le temps de rassembler deuxmillions d’hommes.
6 JUILLET 1917 Lawrence d’Arabie entre dans Aqaba. Au début de la guerre, l’immense Empire ottomanhésitait. Plusieurs archéologues britanniques, occupés sur des chantiers en Turquie, servirent d’espionsafin de convaincre Constantinople de rejoindre les alliés. Thomas Lawrence était l’un d’eux. Les prétentions françaises en Algérie et anglaises en Égypte, décidèrent le sultan à choisir l’Allemagne. Lawrence,promu colonel, fut envoyé dans les déserts arabes afin de retourner les tribus contre les Turcs. La victoire d’Aqaba précipitait la chute de l’Empire ottoman.
PRINTEMPS 1918 Sur la côte Atlantique, les Américains arrivent à raison de 200.000 hommes par mois.L’Empereur et le haut commandement allemand s’installent à Spa et préparent, avant que ne se metteenmarche l’armée amércaine, une offensive de la dernière chance.
AVRIL 1918 La grande offensive américaine commence. Les Allemands comprennent très vite quela guerre est perdue. Mais l’Empereur sait que la défaite signifie son abdication. Il retarde sa signature.
11NOVEMBRE1918 LesAllemands signent un armistice avant que leur pays ne soit envahi. Bilan : le coupde feu du 28 juin 1914 à Sarajevo aura causé la mort de 18 millions de personnes. En Belgique,42700militaires ou assimilés ont perdu la vie. On compte aussi 24.500 victimes civiles.
2-3 La Grande guerre à hauteur d’homme
La Grande guerre à hauteur d’homme. Supplément gratuit à La Libre Belgique et à La Dernière Heure.Rédaction : Christian Laporte.Conception graphique : Jean-Pierre Lambert. Coordination rédactionnelle : Gilles Milecan.Infographie : Astrid ‘t Sterstevens, Didier Lorge et Etienne Scholasse.Réalisation : IPM Press Print. Administrateur délégué – éditeur responsable : François le Hodey.
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
Un seul coup de feu : dixhuit millions de morts Tout le monde le sait : la Première Guerremondiale trouve ses origines à Sarajevo.Repères.
2-3 La Grande guerre à hauteur d’homme
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
l Evocation
Architecte-historien
Il y a 20 ans, à l’occasion du 80e anniversaire du début de la PremièreGuerre, le Carolorégien André Balériaux proposait avec “Août 1914, DeSarajevo à Charleroi” un “rétroreportage” sur la manière dont la capitale du Pays Noir a vécu le début du conflit. Cet ouvrage est davantageun livre d’histoires que d’Histoire. Et pourtant une passionnante plongée dans le passé sur base de longues recherchesminutieuses. Architecteurbaniste, spécialisé dans les travaux publics, le vrai hobby d’AndréBalériaux fut cependant l’Histoire Militaire. Outre plus de 250 articlesrelatifs auxdeux guerresmondiales, il a publié plusieurs ouvrages. Dont“LaBelle histoire du2eChasseurs à Pied” (1981), sorte d’hommage à sonpère qui en était.
“Quinze joursaprès lespremiers combatsentre Belgeset Allemands,les Françaisont essuyé leurbaptême du feuà Charleroi”D.Baldin etE. Saint-Fuscien
HISTORIENSAuteurs de “Charleroi2123 août 1914”, Tallandier.
FIN AOÛT
On a été un brin trop optimistes…h La bataille desfrontières touchaaussi le Hainaut.
n Dès le 20 août, Bruxellesavait été envahie par les Allemands de manière très spectaculaire et un peu effrayantepar une “kolossale” démonstration de force. Leur installation dans les lieux les plussymboliques de la capitaleavait frappé les esprits. et toutlaissait penser, contrairementà toutes les prévisions, que leconflit serait long.Les unités belges avaient
certes engrangé quelquessuccès inattendus – en toutcas par les Allemands – maisleur manque de préparationgénérale et surtout d’encadrement matériel était manifeste.Ce n’était sans doute pas le
moment de le dire mais il yavait beaucoup de récriminations dans leurs rangs contre
les décideurs politiques quiauraient dû anticiper le déclenchement d’une guerre.Mais après un départ en flè
che, la fleur au fusil, les premières semaines de la guerretournaientdangereusement au désavantagedes troupesalliées, deceux qui devaient êtreles garantsde la Belgique maisaussi de nospropres soldats.Dans l’est
de l’Hexagone, les Françaistentaient toujours de passer àl’offensive en AlsaceLorraine. L’armée allemandeavait fini par faire tomber laposition fortifiée de Liègepour entamer unmouvementtournant dans les vallées de laSambre et de la Meuse entreDinant et Charleroi et au
nord du sillon Sambre etMeuse.Fin août, le centre des opé
rations sur le front de l’Ouests’est fixé autour de la frontière francobelge. Une nou
velle batailledémarrait,qualifiée àjuste titre de“bataille desfrontières”.En effet, ellese déroulaessentiellement cheznous dansles régionsde Charleroiet de Monsainsi que
dans le Luxembourg (lire notre précédent supplément).Du 21 au 23 août, la 5e ar
mée française, retranchée surles hauteurs de la rive sud dela Sambre, a tenté de bloquerles troupes allemandes. Envain : les Allemands purentfranchir l’obstacle dès le 21 cequi déboucha sur des com
bats acharnés les 22 et23 août dans la zone s’étendant de Namur à Thuin.Le soir du 23 août, les trou
pes de la 5e armée française sevirent même menacées d’encerclement après la défaitedans les Ardennes et le franchissement de la Meuse parles Allemands à Dinant.Le 24 août, l’armée fran
çaise entamait donc un mouvementde recul qui prendraitfin sur les bords de la Marne,300 km plus au sud!Autour de Mons, les unités
du British ExpeditionaryForce s’installèrent à la gauche de l’armée française et visèrent à contenir la pousséeallemande le 22 août le longdu canal MonsCondé.Beaucoup moins nom
breux, les Britanniques résistèrent aux attaques allemandes tout au long de la journéedu 23 août, mais afin de suivre le retrait des troupes françaises dans la région de Charleroi, ils se dirigèrent surMaubeuge et Valenciennes.
Quatre jours de folie patriotique à Charleroi
Charleroi était sous tension dèsl’annonce de la mobilisation générale, le 31 juillet.L’animation se concentrait du côtéde la rue du Ravin, où le 1er régimentdes Chasseurs à pied était casernédepuis 31 ans. Le régiment était, àl’époque, l’un des rares à compter enses rangs unemajorité deWallons, àsavoir des ouvriers et des mineurs deCharleroi, de la région du Centre, deMons et du Borinage. Comme l’adécrit André Balériaux (lire cicontre), c’étaient “des garçons tailles à lahache, rudes, fortes têtes, rouspéteursmais des cœurs d’or qui se révélerontde véritables démons au feu”.Fut appelé là, sous le commandement du colonel Jacquet, un effectifde 35 officiers et 2300 sousofficierset soldats, composé des classes demilice de 1909, 1911 et 1913. Lerégiment allait se dédoubler par un4e Chasseurs des classes de 1906,1908, 1910 et 1912. Avant même dese lancer, celuici dut changer decommandant : le lieutenantcolonelSegers, qui venait d’être désigné,était mort inopinément dans la nuitdu 1er août.Les près de 4000 hommes débordant des casernes, une partie bi
vouaqua au Collège du SacreCoeur.Le soir du 1er août, le tonmonta d’uncran dans les cafés carolos. Après ladéclaration de guerre de l’Allemagneà la Russie, les discussions vivesentre Français et Allemands séjournant à Charleroi ne furent pas loinde dégénérer en pugilats.A partir du 3 août, la ville se remplitde proches des Chasseurs qui, cela
ne faisait pas l’ombre d’un pli, allaient bientôt se mettre enmarche.Dans l’agitation, il se disait que lesresponsables galvaniseraient leurstroupes et rassureraient leurs familles par la mise sur pied d’unsolennel Serment au drapeau sur laPlaine des manœuvres. C’était unerumeur de plus.Lorsqu’il fut décidé de faire embar
quer les troupes à la gare, la population cria son soutien. Mais dès queles convois s’étaient éloignés, unsilencemortel s’est installé.Une certaineméfiance émergeât car,comme dans d’autres villes en situation de préguerre, on se mit à voirdes espions partout.Cela faillit, par exemple, tourner àl’aigre lorsqu’un amateur de scènesrares posa son appareil photographique face à un détachement de Gardes civiques. D’aucuns l’eussent bienjeté dans le canal si ses amisn’étaient pas venus à sa rescousse.Le 4 août, comme les Chasseursavaient entamé leur mouvementvers la province de Liège, d’abordvers Huy puis vers Liège où ils s’illustreraient aux côtés du généralLeman, Charleroi fut confiée à laGarde civique. Sa première missionfut de protéger les Allemands de laville, pris pour cibles par des citoyens de plus en plus désemparés.Certains jeunes gens cherchaientpar ailleurs à faire enrôler. Hélas,certains n’avaient pas quinze ans etfurent rejetés, ce qui les fit pleurerde dépit. Il flottait ainsi un air depatriotisme sincère sur la capitaledu Pays Noir.
h La ville de casernement des Chasseurs à pied a vécu leur mobilisation à l’unisson.
4-5 La Grande guerre à hauteur d’homme
300KILOMÈTRESLemouvement de recul entamé le 24 août par l’arméefrançaise prendra fin sur lesbords de la Marne, 300 kmplus au sud.
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
Les troupes surveillaient les63 ponts sur la Sambre et laMeuse entre Charleroi et Di-nant, dans l’attente de ren-forts.
La configuration deslieux rendait lesgrands déploiementsde forces.
Les Britanniques vont à larencontre des Allemandspour établir la première li-gne de front.
l Affrontement
Une bataille“de rencontre”
n A la veille de la bataille,les combattants se firentface de manière impressionnante. Les troupesfrançaises surveillaient les63 ponts sur la Sambre et laMeuse entre Charleroi etDinant, dans l’attente derenforts. Il fallait tenir24 heures et se porter ensuite vers Binche, pouropérer la liaison avec lesBritanniques. La 1ère et la 2earmée allemandes se dirigeaient vers le sud alorsque la 3e armée avait mis lecap sur Dinant. L’affrontement de Charleroi serait similaire aux autres engagésces jourslà. Il s’agit d’unebataille “de rencontre”.Soit, comme l’a défini JohnKeegan : “un affrontementdéterminé par les actionsmenées par les troupes engagées plutôt que par les ordresémanant des étatsmajors”.
4-5 La Grande guerre à hauteur d’homme
Configuration etboucliers humains
n La configuration du terrain ne se prêtait pas à unmégaaffrontement, lepaysage industriel ne permettant pas des déploiements massifs. Ce n’étaitpas plus favorable dansl’EntreSambre et Meuse:avec ses paysages changeants, c’était, selon l’analyse de Georges Gay dansles années trente, “un maquis impropre aux grandesopérations”.Les combats ont com
mencé le 21, mais les Allemands étaient déjà entrésla veille dans la ville parGilly. Souvent en se protégeant avec des boucliershumains, comme dansbien d’autres villes et villages wallons auparavant. Lamémoire locale retiendracela à l’heure de dresser lebilan des événements.Dans une évocation, l’his
torien Hervé Hasquin, luimême Carolorégien d’origine le rappelait : “la Première Guerre mondiale alaissé des meurtrissures depuis ce 21 août 1914 qui avu se succéder la menace dedestruction de la ville, laprise d’otages et l’imposition,ainsi que sur les communesproches d’énormes contributions de guerre qui pèserontlourdement sur la situationéconomique et financière duPays de Charleroi”.
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l Evocation
Architecte-historien
Il y a 20 ans, à l’occasion du 80e anniversaire du début de la PremièreGuerre, le Carolorégien André Balériaux proposait avec “Août 1914, DeSarajevo à Charleroi” un “rétroreportage” sur la manière dont la capitale du Pays Noir a vécu le début du conflit. Cet ouvrage est davantageun livre d’histoires que d’Histoire. Et pourtant une passionnante plongée dans le passé sur base de longues recherchesminutieuses. Architecteurbaniste, spécialisé dans les travaux publics, le vrai hobby d’AndréBalériaux fut cependant l’Histoire Militaire. Outre plus de 250 articlesrelatifs auxdeux guerresmondiales, il a publié plusieurs ouvrages. Dont“LaBelle histoire du2eChasseurs à Pied” (1981), sorte d’hommage à sonpère qui en était.
“Quinze joursaprès lespremiers combatsentre Belgeset Allemands,les Françaisont essuyé leurbaptême du feuà Charleroi”D.Baldin etE. Saint-Fuscien
HISTORIENSAuteurs de “Charleroi2123 août 1914”, Tallandier.
FIN AOÛT
On a été un brin trop optimistes…h La bataille desfrontières touchaaussi le Hainaut.
n Dès le 20 août, Bruxellesavait été envahie par les Allemands de manière très spectaculaire et un peu effrayantepar une “kolossale” démonstration de force. Leur installation dans les lieux les plussymboliques de la capitaleavait frappé les esprits. et toutlaissait penser, contrairementà toutes les prévisions, que leconflit serait long.Les unités belges avaient
certes engrangé quelquessuccès inattendus – en toutcas par les Allemands – maisleur manque de préparationgénérale et surtout d’encadrement matériel était manifeste.Ce n’était sans doute pas le
moment de le dire mais il yavait beaucoup de récriminations dans leurs rangs contre
les décideurs politiques quiauraient dû anticiper le déclenchement d’une guerre.Mais après un départ en flè
che, la fleur au fusil, les premières semaines de la guerretournaientdangereusement au désavantagedes troupesalliées, deceux qui devaient êtreles garantsde la Belgique maisaussi de nospropres soldats.Dans l’est
de l’Hexagone, les Françaistentaient toujours de passer àl’offensive en AlsaceLorraine. L’armée allemandeavait fini par faire tomber laposition fortifiée de Liègepour entamer unmouvementtournant dans les vallées de laSambre et de la Meuse entreDinant et Charleroi et au
nord du sillon Sambre etMeuse.Fin août, le centre des opé
rations sur le front de l’Ouests’est fixé autour de la frontière francobelge. Une nou
velle batailledémarrait,qualifiée àjuste titre de“bataille desfrontières”.En effet, ellese déroulaessentiellement cheznous dansles régionsde Charleroiet de Monsainsi que
dans le Luxembourg (lire notre précédent supplément).Du 21 au 23 août, la 5e ar
mée française, retranchée surles hauteurs de la rive sud dela Sambre, a tenté de bloquerles troupes allemandes. Envain : les Allemands purentfranchir l’obstacle dès le 21 cequi déboucha sur des com
bats acharnés les 22 et23 août dans la zone s’étendant de Namur à Thuin.Le soir du 23 août, les trou
pes de la 5e armée française sevirent même menacées d’encerclement après la défaitedans les Ardennes et le franchissement de la Meuse parles Allemands à Dinant.Le 24 août, l’armée fran
çaise entamait donc un mouvementde recul qui prendraitfin sur les bords de la Marne,300 km plus au sud!Autour de Mons, les unités
du British ExpeditionaryForce s’installèrent à la gauche de l’armée française et visèrent à contenir la pousséeallemande le 22 août le longdu canal MonsCondé.Beaucoup moins nom
breux, les Britanniques résistèrent aux attaques allemandes tout au long de la journéedu 23 août, mais afin de suivre le retrait des troupes françaises dans la région de Charleroi, ils se dirigèrent surMaubeuge et Valenciennes.
Quatre jours de folie patriotique à Charleroi
Charleroi était sous tension dèsl’annonce de la mobilisation générale, le 31 juillet.L’animation se concentrait du côtéde la rue du Ravin, où le 1er régimentdes Chasseurs à pied était casernédepuis 31 ans. Le régiment était, àl’époque, l’un des rares à compter enses rangs unemajorité deWallons, àsavoir des ouvriers et des mineurs deCharleroi, de la région du Centre, deMons et du Borinage. Comme l’adécrit André Balériaux (lire cicontre), c’étaient “des garçons tailles à lahache, rudes, fortes têtes, rouspéteursmais des cœurs d’or qui se révélerontde véritables démons au feu”.Fut appelé là, sous le commandement du colonel Jacquet, un effectifde 35 officiers et 2300 sousofficierset soldats, composé des classes demilice de 1909, 1911 et 1913. Lerégiment allait se dédoubler par un4e Chasseurs des classes de 1906,1908, 1910 et 1912. Avant même dese lancer, celuici dut changer decommandant : le lieutenantcolonelSegers, qui venait d’être désigné,était mort inopinément dans la nuitdu 1er août.Les près de 4000 hommes débordant des casernes, une partie bi
vouaqua au Collège du SacreCoeur.Le soir du 1er août, le tonmonta d’uncran dans les cafés carolos. Après ladéclaration de guerre de l’Allemagneà la Russie, les discussions vivesentre Français et Allemands séjournant à Charleroi ne furent pas loinde dégénérer en pugilats.A partir du 3 août, la ville se remplitde proches des Chasseurs qui, cela
ne faisait pas l’ombre d’un pli, allaient bientôt se mettre enmarche.Dans l’agitation, il se disait que lesresponsables galvaniseraient leurstroupes et rassureraient leurs familles par la mise sur pied d’unsolennel Serment au drapeau sur laPlaine des manœuvres. C’était unerumeur de plus.Lorsqu’il fut décidé de faire embar
quer les troupes à la gare, la population cria son soutien. Mais dès queles convois s’étaient éloignés, unsilencemortel s’est installé.Une certaineméfiance émergeât car,comme dans d’autres villes en situation de préguerre, on se mit à voirdes espions partout.Cela faillit, par exemple, tourner àl’aigre lorsqu’un amateur de scènesrares posa son appareil photographique face à un détachement de Gardes civiques. D’aucuns l’eussent bienjeté dans le canal si ses amisn’étaient pas venus à sa rescousse.Le 4 août, comme les Chasseursavaient entamé leur mouvementvers la province de Liège, d’abordvers Huy puis vers Liège où ils s’illustreraient aux côtés du généralLeman, Charleroi fut confiée à laGarde civique. Sa première missionfut de protéger les Allemands de laville, pris pour cibles par des citoyens de plus en plus désemparés.Certains jeunes gens cherchaientpar ailleurs à faire enrôler. Hélas,certains n’avaient pas quinze ans etfurent rejetés, ce qui les fit pleurerde dépit. Il flottait ainsi un air depatriotisme sincère sur la capitaledu Pays Noir.
h La ville de casernement des Chasseurs à pied a vécu leur mobilisation à l’unisson.
4-5 La Grande guerre à hauteur d’homme
300KILOMÈTRESLemouvement de recul entamé le 24 août par l’arméefrançaise prendra fin sur lesbords de la Marne, 300 kmplus au sud.
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Les troupes surveillaient les63 ponts sur la Sambre et laMeuse entre Charleroi et Di-nant, dans l’attente de ren-forts.
La configuration deslieux rendait lesgrands déploiementsde forces.
Les Britanniques vont à larencontre des Allemandspour établir la première li-gne de front.
l Affrontement
Une bataille“de rencontre”
n A la veille de la bataille,les combattants se firentface de manière impressionnante. Les troupesfrançaises surveillaient les63 ponts sur la Sambre et laMeuse entre Charleroi etDinant, dans l’attente derenforts. Il fallait tenir24 heures et se porter ensuite vers Binche, pouropérer la liaison avec lesBritanniques. La 1ère et la 2earmée allemandes se dirigeaient vers le sud alorsque la 3e armée avait mis lecap sur Dinant. L’affrontement de Charleroi serait similaire aux autres engagésces jourslà. Il s’agit d’unebataille “de rencontre”.Soit, comme l’a défini JohnKeegan : “un affrontementdéterminé par les actionsmenées par les troupes engagées plutôt que par les ordresémanant des étatsmajors”.
4-5 La Grande guerre à hauteur d’homme
Configuration etboucliers humains
n La configuration du terrain ne se prêtait pas à unmégaaffrontement, lepaysage industriel ne permettant pas des déploiements massifs. Ce n’étaitpas plus favorable dansl’EntreSambre et Meuse:avec ses paysages changeants, c’était, selon l’analyse de Georges Gay dansles années trente, “un maquis impropre aux grandesopérations”.Les combats ont com
mencé le 21, mais les Allemands étaient déjà entrésla veille dans la ville parGilly. Souvent en se protégeant avec des boucliershumains, comme dansbien d’autres villes et villages wallons auparavant. Lamémoire locale retiendracela à l’heure de dresser lebilan des événements.Dans une évocation, l’his
torien Hervé Hasquin, luimême Carolorégien d’origine le rappelait : “la Première Guerre mondiale alaissé des meurtrissures depuis ce 21 août 1914 qui avu se succéder la menace dedestruction de la ville, laprise d’otages et l’imposition,ainsi que sur les communesproches d’énormes contributions de guerre qui pèserontlourdement sur la situationéconomique et financière duPays de Charleroi”.
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Les soldats étant partis pour lefront liégeois, la garde civile assu-rait la défense de Charleroi.
La bataille de Charleroi a vu l’entréedans le conflit de bataillons issus descolonies françaises.
l Tamines
De l’égliseà l’exécutionsur la Sambre
n Le 22 août 1914, la communede Tamines a payé un très lourdécot en victimes civiles. 383 citoyens ont été tués à coups de fusil ou de mitrailleuses. Lorsqueles Allemands n’étaient pas sûrsde leurs exécutions, ils les ontachevés à la baïonnette ou à descoups de crosse. Parmi les villesmartyres, Tamines a pris uneplace exceptionnelle. Car, contrairement à d’autres événements similaires enFlandre et enWallonie, la ville n’est pas mentionnée dans les publications officielles du gouvernement allemand. On peut y voir une reconnaissance implicite du caractèreindéfendable du comportementde l’armée à cet endroit.
6-7 La Grande guerre à hauteur d’homme
Tactique deharcèlement
n Ce n’est pas un hasard si dansleur étude de référence sur lesatrocités allemandes en 1914,John Horne et Alan Kramer y ontconsacré de nombreuses pages.Selon les deux historiens, les
documents belges et français ontsuggéré que la 2e armée allemande y a fait l’objet d’une tactique de harcèlement de l’arméefrançaise que les Allemands ontpris pour des actes de francstireurs. Ils ont aussi eu l’impression que les Belges participaientdirectement aux combats se basant sur les cris lancés lorsqueleurs patrouilles furent prises enembuscade entre les soldats français et une vingtaine d’artilleursde la Garde civique de Charleroi.
Pas d’issue à labarbarie
n Convaincus que les habitantsavaient prêté main forte à leursadversaires, les Allemands incendièrent des maisons et procédèrent à des exécutions alors que lapopulation était rassemblée dansl’église. C’était l’aprèsmidi et lanuit du 21 août. Le lendemain, lelieu du culte était plein à craquer.Le ton monta d’autant plus queles convictions religieuses protestantes des Allemands se heurtaient à la population catholiquelocale dont ils raillèrent la piété etla dévotion. Aux alentours de19 heures, les hommes de Tamines furent sortis de l’église etamenés sur le bord de la Sambrepour y être exécutés. Ceux quitentèrent de se sauver en sautantdans la Sambre n’échappèrentpas non plus à la barbarie.
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l France
Le jour le plus noir
n Le 22 août 1914 fut le jourle plus noir, le plus sanglantde toute l’Histoire militairede la France. Ce jourlà,27000 Français furent tuéssur les fronts de la PremièreGuerremondiale.Soit quatre fois plus qu’à la
bataille de Waterloo etautant que durant les huitannées que dura la guerred’Algérie.Pour l’historien Henri Con
tamine, de 6 à 7000 sontmorts à la seule bataille deCharleroi. Une bataille au bilan encore plus terrible si ony inclut les victimes allemandes et les nombreux civils.Puisque là on évalue les pertes entre 20 et 25000.Précisons qu’on n’a jamais
disposé de chiffres totalement sûrs. Comme le constate l’historien AntoineProst: “les premiers mois de laguerre furent placés sous le signe de l’improvisation. Les régiments qui battent en retraiteaprès Charleroi ont autrechose à faire que de tenir desstatistiques. Aucun effort ultérieur n’y remédiera”.
l Pierre Drieu la Rochelle
Une bien triste comédie
Parmi les récits de la bataille, on épinglera “La comédiede Charleroi” de PierreDrieu LaRochelle. L’écrivain quibalança sans cesse entre le socialisme et l’élitisme maisqui finit par tomber dans le fascisme et dans la collaboration pendant la Seconde Guerre mondiale avait subison baptême du feu à la bataille de Charleroi du côté deNalinnes et participerait aussi aux batailles de Verdun.De lamatièrepour sixnouvelles au tonunpeudésabusédans ce style dégageant un pessimisme certain…Extrait choisi : “L’immense foire en ce moment, au soleil
d’août 1914, sur une aire immense et circulaire autour del’Europe, achevait de rassembler le bétail le plus héroïquement passif qu’ait jamais eu à prendre en compte l’Histoirequi brasse les troupeaux”.
“Une grossemarmite éventre uncheval. Leconducteur estlancé à 5 mètrescouvert de sang.Tout le monde estnez contre terre,s’attendant à êtretué.”Gaston Veaux
INFIRMIER-MÉDECINDans son Journal de guerre, ildécrit la stupeur face auxnouvelles armes.
21 AOUT 1914
Une cacophonie assourdissanteh Le premier bilan de labataille est négatif dans lesdeux camps.
n Les premiers contacts entre des hommes du 6e régiment de chasseurs à chevalfrançais et des éléments d’infanterie etde cavalerie allemands avaient eu lieudans la nuit du 20 au 21 août entre Charleroi et Ham sur Sambre.Dans Charleroi même, il était environ
6h45 lorsque des soldats français ouvrirent le feu sur une patrouille de Uhlans àl’angle des rues du PontNeuf et deMontignies.Un cavalier allemand était tué, deux
autres blessés. Ce furent les seuls coupsde feu entendus ce jourlà au centreville.Le général Lanrezac avait demandé à
ses soldats de rester sur la défensive.Avant de lancer la bataille, il attendaitque son aile gauche assure la liaison avecle Corps expéditionnaire britannique,venant de l’ouest.
Un peu plus tard, Von Bülow préparaun télégramme annonçant une attaqueimminente entre Namur et Charleroi.Mais le général allemand se ravisa aprèsqu’on lui eût dit que la IIIe armée n’étaitpas prête. L’attaque fut donc postposée.Pourtant les officiers à pied d’oeuvre
sur le terrain ne tinrent pas compte de lademande et n’hésitèrent pas à s’engager(lire cidessous). Du reste, il y avait déjàeu des combats acharnés auxponts de Jemeppe et de PontduLoup et à Auvelais,où les deux armées entrèrent en collisionfrontale.Face à face, il y avait la Garde impériale
allemande considérée comme la “crèmede la crème” des soldats d’outreRhin etle IIIe Corps français.L’engagement fut rude. Ce fut un véri
table déluge de feu. Avec des bombardements dont l’horreur apparut soudain.Plus souvent que la mort, on évoquait lepéril d’une “éventration”. Il y eut aussiune poussée de panique. Conséquence :les unités françaises effectuèrent un solide mouvement de repli en quittantAuvelais pour se replier deux kilomètres
au sud.Ce repli permit aux Allemands d’occu
per également Tamines et Arsimont.La contreattaque française fut tout
sauf facile. Les assauts dugénéral Bonnierse heurtant aux mitrailleuses allemandes.En début de soirée, ce fut l’hécatombe
pour un bataillon du 70e régiment, composé de Bretons originaires d’IlleetVillaine. Beaucoup d’hommes s’écroulèrent, d’autres perdaient toute notion dubruit, leur univers sonore étant tout à faitsaturé.En un seul mouvement, les Français
perdaient 170 soldats et 5 officiers. Auson du clairon, ils organisèrent vaille quevaille leur repli. La Garde impérialetriomphait maisavec un sérieux bémol :plusieurs centaines de soldats étaienthors de combat.Un affrontement tout aussi sévère se
déroula à l’ouest de Tamines. La défensedes ponts de la Sambre allait tourner àl’avantage des Allemands. Ces derniersprirent Roselies que les Français quittèrent aussi vite qu’ils le purent.
Communication brouillée et contreattaques ratées
C’est sur le front de la rivesud de la Sambre que sedéroulèrent les combats du22 août 1914. “La” questiondu jour dans les rangs françaisétait de savoir s’il fallait essayer coûte que coûte dereconquérir les ponts ou, aucontraire, prendre un peu derecul. Cette dernière hypothèse avait l’adhésion dugénéral Charles Lanrezac, lecommandant de la 5e armée.Ses subordonnés, eux, voulaient reconquérir la Sambre.Les communications étant cequ’elles étaient, l’ordre deLanrezac ne fut pas exécuté.Au contraire, le général Defforges lui fit part de sonintention de repartir à l’attaque contre l’avis de son supérieur.Ce dernier n’ayant pas répondu, il décida de lancer unecontreoffensive.Il n’avait cependant pastoutes les cartes enmains,puisqu’il ne connaissait pasles positions exactes de l’ennemi.Defforges n’était pas seul àvouloir contreattaquer. Soncollègue Sauret était animé delamême volonté. Mal leur enprit, car les Allemands continuaient à résister à tous leurs
assauts, infligeant des pertesmais parvenant surtout àreprendre l’initiative enfranchissant la Sambre ducôté de Roselies.Aussi têtu que Defforges, legénéral Sauret lança deuxcontreoffensives qui furentautant d’échecs. Et le résultatne fut pas plus brillant pour legénéral Bonnier qui avaitenvoyé un régiment de Zouaves au cassepipe.Il n’y avait rien à faire, les
Français furent acculés à sereplier sur leurs positions dedépart. Cela n’avait paséchappé à Von Bülow quidécida de faire poursuivre lesunités françaises réellementmeurtries par ces échecssuccessifs.Pourtant, les Allemands neparvinrent pas à leurs fins etce fut donc davantage un replifrançais qu’une réelle retraite.Von Bülow ne connaissait pasl’ampleur des effectifs fran
çais et surtout il ignorait quele dispositif avait été renforcésur sa gauche et au centre.Du côté français, on renforçait les lignes de position encreusant des tranchées. Joffre,de son côté, pensait aussilancer la 5e armée vers lenordest, pour épauler la 4e.Mais cette fois encore Lanrezac, beaucoup plus conscientdes réalités de terrain, adoptaun profil un peu plus bas,ordonnant de résister à la IIearmée plutôt que demisersur une attaque anglaise quise faisait attendre.La journée du 23 août fut ellaaussi marquée par une juxtaposition de combats de rencontre. Dans ces divers affrontements, les soldatsfrançais firentmieux que sedéfendremais en fin dejournée les unités furentcependant appelées à décrocher. Un choix tactique.A 21 heures, le général Lanrezac ordonnait la retraite àtout son corps d’armée. Unefois encore, une décision sage,car la 5e armée risquait d’êtreisolée de l’ensemble du dispositif français. Un choix dontil n’avait pas averti le Hautcommandement. Cela s’estensuite retourné contre lui.
hDans les rangs des chefs français, il y eut comme un flottement… qui empêcha le pire !
RUEDE
SAR
CHIVES/REPOR
TERS
6-7 La Grande guerre à hauteur d’homme
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
Les soldats étant partis pour lefront liégeois, la garde civile assu-rait la défense de Charleroi.
La bataille de Charleroi a vu l’entréedans le conflit de bataillons issus descolonies françaises.
l Tamines
De l’égliseà l’exécutionsur la Sambre
n Le 22 août 1914, la communede Tamines a payé un très lourdécot en victimes civiles. 383 citoyens ont été tués à coups de fusil ou de mitrailleuses. Lorsqueles Allemands n’étaient pas sûrsde leurs exécutions, ils les ontachevés à la baïonnette ou à descoups de crosse. Parmi les villesmartyres, Tamines a pris uneplace exceptionnelle. Car, contrairement à d’autres événements similaires enFlandre et enWallonie, la ville n’est pas mentionnée dans les publications officielles du gouvernement allemand. On peut y voir une reconnaissance implicite du caractèreindéfendable du comportementde l’armée à cet endroit.
6-7 La Grande guerre à hauteur d’homme
Tactique deharcèlement
n Ce n’est pas un hasard si dansleur étude de référence sur lesatrocités allemandes en 1914,John Horne et Alan Kramer y ontconsacré de nombreuses pages.Selon les deux historiens, les
documents belges et français ontsuggéré que la 2e armée allemande y a fait l’objet d’une tactique de harcèlement de l’arméefrançaise que les Allemands ontpris pour des actes de francstireurs. Ils ont aussi eu l’impression que les Belges participaientdirectement aux combats se basant sur les cris lancés lorsqueleurs patrouilles furent prises enembuscade entre les soldats français et une vingtaine d’artilleursde la Garde civique de Charleroi.
Pas d’issue à labarbarie
n Convaincus que les habitantsavaient prêté main forte à leursadversaires, les Allemands incendièrent des maisons et procédèrent à des exécutions alors que lapopulation était rassemblée dansl’église. C’était l’aprèsmidi et lanuit du 21 août. Le lendemain, lelieu du culte était plein à craquer.Le ton monta d’autant plus queles convictions religieuses protestantes des Allemands se heurtaient à la population catholiquelocale dont ils raillèrent la piété etla dévotion. Aux alentours de19 heures, les hommes de Tamines furent sortis de l’église etamenés sur le bord de la Sambrepour y être exécutés. Ceux quitentèrent de se sauver en sautantdans la Sambre n’échappèrentpas non plus à la barbarie.
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
l France
Le jour le plus noir
n Le 22 août 1914 fut le jourle plus noir, le plus sanglantde toute l’Histoire militairede la France. Ce jourlà,27000 Français furent tuéssur les fronts de la PremièreGuerremondiale.Soit quatre fois plus qu’à la
bataille de Waterloo etautant que durant les huitannées que dura la guerred’Algérie.Pour l’historien Henri Con
tamine, de 6 à 7000 sontmorts à la seule bataille deCharleroi. Une bataille au bilan encore plus terrible si ony inclut les victimes allemandes et les nombreux civils.Puisque là on évalue les pertes entre 20 et 25000.Précisons qu’on n’a jamais
disposé de chiffres totalement sûrs. Comme le constate l’historien AntoineProst: “les premiers mois de laguerre furent placés sous le signe de l’improvisation. Les régiments qui battent en retraiteaprès Charleroi ont autrechose à faire que de tenir desstatistiques. Aucun effort ultérieur n’y remédiera”.
l Pierre Drieu la Rochelle
Une bien triste comédie
Parmi les récits de la bataille, on épinglera “La comédiede Charleroi” de PierreDrieu LaRochelle. L’écrivain quibalança sans cesse entre le socialisme et l’élitisme maisqui finit par tomber dans le fascisme et dans la collaboration pendant la Seconde Guerre mondiale avait subison baptême du feu à la bataille de Charleroi du côté deNalinnes et participerait aussi aux batailles de Verdun.De lamatièrepour sixnouvelles au tonunpeudésabusédans ce style dégageant un pessimisme certain…Extrait choisi : “L’immense foire en ce moment, au soleil
d’août 1914, sur une aire immense et circulaire autour del’Europe, achevait de rassembler le bétail le plus héroïquement passif qu’ait jamais eu à prendre en compte l’Histoirequi brasse les troupeaux”.
“Une grossemarmite éventre uncheval. Leconducteur estlancé à 5 mètrescouvert de sang.Tout le monde estnez contre terre,s’attendant à êtretué.”Gaston Veaux
INFIRMIER-MÉDECINDans son Journal de guerre, ildécrit la stupeur face auxnouvelles armes.
21 AOUT 1914
Une cacophonie assourdissanteh Le premier bilan de labataille est négatif dans lesdeux camps.
n Les premiers contacts entre des hommes du 6e régiment de chasseurs à chevalfrançais et des éléments d’infanterie etde cavalerie allemands avaient eu lieudans la nuit du 20 au 21 août entre Charleroi et Ham sur Sambre.Dans Charleroi même, il était environ
6h45 lorsque des soldats français ouvrirent le feu sur une patrouille de Uhlans àl’angle des rues du PontNeuf et deMontignies.Un cavalier allemand était tué, deux
autres blessés. Ce furent les seuls coupsde feu entendus ce jourlà au centreville.Le général Lanrezac avait demandé à
ses soldats de rester sur la défensive.Avant de lancer la bataille, il attendaitque son aile gauche assure la liaison avecle Corps expéditionnaire britannique,venant de l’ouest.
Un peu plus tard, Von Bülow préparaun télégramme annonçant une attaqueimminente entre Namur et Charleroi.Mais le général allemand se ravisa aprèsqu’on lui eût dit que la IIIe armée n’étaitpas prête. L’attaque fut donc postposée.Pourtant les officiers à pied d’oeuvre
sur le terrain ne tinrent pas compte de lademande et n’hésitèrent pas à s’engager(lire cidessous). Du reste, il y avait déjàeu des combats acharnés auxponts de Jemeppe et de PontduLoup et à Auvelais,où les deux armées entrèrent en collisionfrontale.Face à face, il y avait la Garde impériale
allemande considérée comme la “crèmede la crème” des soldats d’outreRhin etle IIIe Corps français.L’engagement fut rude. Ce fut un véri
table déluge de feu. Avec des bombardements dont l’horreur apparut soudain.Plus souvent que la mort, on évoquait lepéril d’une “éventration”. Il y eut aussiune poussée de panique. Conséquence :les unités françaises effectuèrent un solide mouvement de repli en quittantAuvelais pour se replier deux kilomètres
au sud.Ce repli permit aux Allemands d’occu
per également Tamines et Arsimont.La contreattaque française fut tout
sauf facile. Les assauts dugénéral Bonnierse heurtant aux mitrailleuses allemandes.En début de soirée, ce fut l’hécatombe
pour un bataillon du 70e régiment, composé de Bretons originaires d’IlleetVillaine. Beaucoup d’hommes s’écroulèrent, d’autres perdaient toute notion dubruit, leur univers sonore étant tout à faitsaturé.En un seul mouvement, les Français
perdaient 170 soldats et 5 officiers. Auson du clairon, ils organisèrent vaille quevaille leur repli. La Garde impérialetriomphait maisavec un sérieux bémol :plusieurs centaines de soldats étaienthors de combat.Un affrontement tout aussi sévère se
déroula à l’ouest de Tamines. La défensedes ponts de la Sambre allait tourner àl’avantage des Allemands. Ces derniersprirent Roselies que les Français quittèrent aussi vite qu’ils le purent.
Communication brouillée et contreattaques ratées
C’est sur le front de la rivesud de la Sambre que sedéroulèrent les combats du22 août 1914. “La” questiondu jour dans les rangs françaisétait de savoir s’il fallait essayer coûte que coûte dereconquérir les ponts ou, aucontraire, prendre un peu derecul. Cette dernière hypothèse avait l’adhésion dugénéral Charles Lanrezac, lecommandant de la 5e armée.Ses subordonnés, eux, voulaient reconquérir la Sambre.Les communications étant cequ’elles étaient, l’ordre deLanrezac ne fut pas exécuté.Au contraire, le général Defforges lui fit part de sonintention de repartir à l’attaque contre l’avis de son supérieur.Ce dernier n’ayant pas répondu, il décida de lancer unecontreoffensive.Il n’avait cependant pastoutes les cartes enmains,puisqu’il ne connaissait pasles positions exactes de l’ennemi.Defforges n’était pas seul àvouloir contreattaquer. Soncollègue Sauret était animé delamême volonté. Mal leur enprit, car les Allemands continuaient à résister à tous leurs
assauts, infligeant des pertesmais parvenant surtout àreprendre l’initiative enfranchissant la Sambre ducôté de Roselies.Aussi têtu que Defforges, legénéral Sauret lança deuxcontreoffensives qui furentautant d’échecs. Et le résultatne fut pas plus brillant pour legénéral Bonnier qui avaitenvoyé un régiment de Zouaves au cassepipe.Il n’y avait rien à faire, les
Français furent acculés à sereplier sur leurs positions dedépart. Cela n’avait paséchappé à Von Bülow quidécida de faire poursuivre lesunités françaises réellementmeurtries par ces échecssuccessifs.Pourtant, les Allemands neparvinrent pas à leurs fins etce fut donc davantage un replifrançais qu’une réelle retraite.Von Bülow ne connaissait pasl’ampleur des effectifs fran
çais et surtout il ignorait quele dispositif avait été renforcésur sa gauche et au centre.Du côté français, on renforçait les lignes de position encreusant des tranchées. Joffre,de son côté, pensait aussilancer la 5e armée vers lenordest, pour épauler la 4e.Mais cette fois encore Lanrezac, beaucoup plus conscientdes réalités de terrain, adoptaun profil un peu plus bas,ordonnant de résister à la IIearmée plutôt que demisersur une attaque anglaise quise faisait attendre.La journée du 23 août fut ellaaussi marquée par une juxtaposition de combats de rencontre. Dans ces divers affrontements, les soldatsfrançais firentmieux que sedéfendremais en fin dejournée les unités furentcependant appelées à décrocher. Un choix tactique.A 21 heures, le général Lanrezac ordonnait la retraite àtout son corps d’armée. Unefois encore, une décision sage,car la 5e armée risquait d’êtreisolée de l’ensemble du dispositif français. Un choix dontil n’avait pas averti le Hautcommandement. Cela s’estensuite retourné contre lui.
hDans les rangs des chefs français, il y eut comme un flottement… qui empêcha le pire !
RUEDE
SAR
CHIVES/REPOR
TERS
6-7 La Grande guerre à hauteur d’homme
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
l Solidarité
Le paradoxe carolo
n La bataille de Charleroiavait pris fin le 23 août maiscomment allaient réagir lesCarolos après tant de barbarie ? Pour André Balériaux, ilsfirent montre, le lendemainde ce qu’on pourrait appelerle “paradoxe carolo”…“Autant ils ont la tête près du
bonnet, autant leur cœur estgénéreux. Livrés sans défense,deux jours plus tôt à la fureurde la barbarie, ils donnentmaintenant l’exemple d’unegénérosité magnifique : portersecours aux infortunées victimes de la guerre, à quelque nationalité qu’elles appartiennent.”
Et de décrire “le grand dévouement” voire “l’abnégationde tant de médecins, infirmières, bonnes sœurs, ambulanciers et bonnes volontés” quis’acharnèrent à panser lesplaies, à sauver des vies maisaussi à aider à mourir dans ladignité.
L’historien militaire carolorégien s’est basé ici sur diverscourriers qui furent adresséspar des soldats allemands àleurs “sauveurs” dans les semaines et les mois quiavaient suivi leur guérison.
Une manière de rappelerque dans la guerre, l’humanitaire a beau être chassé, il revient toujours au galop…
l Traité de Couillet
Carolos très convaincus
Emile Devreux, le bourgmestre de Charleroi pendant la Première Guerre mondiale était un libéralqui se doublait d’un militant wallon.
Au moment de l’éclatement de la Grande Guerre, ildirigeait déjà la ville depuis dix ans. Il avait été à labase avec Jules Destrée de l’Exposition de Charleroiqui avait été une belle vitrine de ce qu’on faisait demieux à l’époque en Wallonie. Très attaché à sa cité,il ne pouvait évidemment pas accepter sa destruction. D’où sa démarche avec son échevin Emile Buisset qui lui succéderait à la tête de la ville en 1921alors qu’il consacra la fin de sa vie à des études historiques sur Charleroi. Leur compagnon de négociation, Paul Dulait était lui l’avocat de la Ville.
“Nous avonsle sentiment queles Allemandsn’ont rien de prêtpar là.”Joseph Joffre
GÉNÉRAL EN CHEFLe 14 août, Charles Lanrezac rencontra JosephJoffre en personne pourlui dire une seconde foissa crainte d’une grosseoffensive. Ce dernier nel’écouta pas. Par contre,lorsque Lanrezac ordonnale repli, Joffre ne putcacher sa colère.
21-23 AOUT 1914
La grande lessive du général Joffreh Un limogeagecollectif pour cacherses propres erreurs ?
n Cruelle destinée que celledu “patron” de la 5e arméefrançaise. Alors qu’il a faitéchapper ses troupes à uneboucherie encore plus cruellependant la “bataille des frontières”, le général CharlesLanrezac est limogé le 3 septembre 1914. On lui reprochait non seulement le replimais aussi son esprit critiqueet sa mésentente avec le maréchal anglais John French.
Il en conçut une amertumecertaine. Meurtri par ce traitement, il a refusé, en 1917, leposte de major général des armées.
Il faut dire que, début sep
tembre 1914, le général enchef Joffre n’avait pas faitdans la dentelle en remplaçant progressivement un tiersdes 400 officiers français.
Entre le 2 et le6 septembre, ilavait ainsi faitsauter deuxcommandantsd’armée dontCharles Lanrezac, pas moinsde neuf commandants decorps d’armée et encore 33commandants de division.Résultat : sur 47 divisionsd’active, la moitié vit leur direction changer.
Joseph Joffre n’aurait pas eule choix : les résultats sur leterrain ne correspondaientpas à ses attentes et les officiers généraux étaient de
bons boucs émissaires.D’autant plus que cela lui permit de couvrir ses propres er
reurs d’appréciation. Car ilpeut lui aussiêtre mis sur lasellette pourson manqued’anticipationdes grandsmouvementsallemands.Pour certainsspécialistes,
Joseph Joffre a trop longtemps douté d’une invasionde la Belgique. Il aurait aussitardé à ordonner à la 5e arméeet au général Lanrezac de seplacer sur la Sambre.
D’autres experts estimentque la faute incombait à Joffrequi n’avait pas écouté lesavertissements de Lanrezacqui était, lui, convaincu que
l’Allemagne passerait par laBelgique sans tenir compte desa neutralité.
Ils ne comprennent pas davantage les reproches de Joffre. Selon eux, Lanrezac nepouvait pas faire autrementque replier ses troupes quirisquaient d’être encerclées.Avec de pires pertes encore.
On opposa aussi les caractères des deux hommes : Joffrevoulait passer à l’offensive enpermanence, avec le risque devoir ses effectifs décimés alorsque Lanrezac était au contraire plus réservé et peu capable de prendre des initiatives. Damien Baldin et Emmanuel SaintFuscien n’ont pastranché, se demandant plutôtsi, avec un âge allant de 59 à67 ans, les officiers générauxfrançais n’étaient pas, avanttout, en décalage avec les nouvelles formes de combat.
Pourquoi Charleroi ne fut pas bombardé
Les canons allemands étaientinstallés sur les terrils étaientprêts à embraser la ville. Dansla nuit du 23 août 1914, lebourgmestre libéral EmileDevreux avait appelé son amil’avocat Me Dulait à la rescousse pour l’épauler.Le bombardement d’artillerieannoncé aurait fait table rasede bien des efforts menéspour valoriser sa bonne cité.Emile Devreux était réaliste :comme les troupes françaisesse repliaient, il fallait que lesautorités civiles tententd’entrer ellesmêmes encontact avec les chefs allemands.Pour les amadouer, il nesuffirait pas de se présenter àleur QG. Avec Albert Dulait, ilprépara une lettre ne manquant pas d’arguments. Lorsd’une catastrophe minièresurvenue outreRhin, Charleroi avait montré son boncoeur. Cela n’avait paséchappé à l’Empereur quil’avait remerciée par l’entremise de son consul. L’échevindes Finances Emile Buisset lesavait rejoints et ils allèrentensemble à la rencontre del’occupant. Ce n’était pas sansdanger dans une ville exposée aux tirs : l’épouse du
bourgmestre confectionna undrapeau blanc alors quel’avocat faisait amener unevoiture.Restait un détail important :Me Dulait n’avait de l’allemand qu’une connaissancerelative. Il fut donc décidé defaire accompagner la délégation par la gouvernante de sesenfants, une Lorraine. Mais ilse ravisa redoutant d’exposerla femme à des dangers inutiles. Ils interpellèrent dès lorsLouis Smeysters, un homme
d’affaires spécialisé dansl’exportation qui maîtrisait lalangue de Goethe. Et voilà ladélégation en route versParentville.La traversée de la ville leurmontra l’ampleur des dégâts,les convaincant encore del’opportunité de leur démarche. La traversée des bivouacsallemands fut tout sauf aiséemais la lettre du consul fut unbon sésame.Après avoir franchi plusieursbarrages dans des conditions
difficiles, les représentants dela ville purent enfin rencontrer le général Max von Barhfeld, le commandant de la 19e
division de réserve.Après un dialogue tendu, ilfinit par monnayer le silencedes canons contre quelquesexigences. Elles furent misessur papier et signées par lesdeux parties. Ce fut ce qu’onappela le traité de Couillet.Les Allemands avaient placéla barre très haut : la Villedevait leur fournir pour lesoir même à 18 h précises :120 tonnes d’avoine, 40tonnes de pain, 20 tonnes deconserves et de viandesfumées, 800 kilos de café, 800kilos de sel, 100 kilos desucre, trois tonnes de benzineet 50 litres de glycérine. Ilsréclamaient aussi cinq automobiles ainsi que les armes etmunitions qui se trouvaienten possession des habitants.Enfin, la ville devait dégagerune somme de 10 millions defrancs. Elle serait fournie encinq versements, un premierde deux millions en espèces,valeurs sûres ou lettres dechange. Les autres devaientêtre faits avec un intervalle de16 à 20 jours jusqu’à ce quetoute la somme ait été payée.
h La détermination et le courage des autorités locales a pu empêcher le pire.
8-9 La Grande guerre à hauteur d’homme
Le général Joffre.RE
PORT
ERS
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
Les autorités carolorégiennes rencontrent officiellement le commandement allemand.
Aux premiers jours de la guerre, les morts et blessés bénéficient encore d’attentions. Malgré de premiers combats extrêmement meur-triers, la véritable boucherie est à venir.
l Eclairage
La bataille oubliéen Comme le relèvent DamienBaldin et Emmanuel SaintFuscien, auteurs de “Charleroi2123 août 1914”: la bataille quis’est livrée autour de la capitaledu Pays noir est “restée absente duchamp mémoriel des combats de1418”.Du côté belge, elle a été éclipsée
par l’héroïque résistance à Liègeet par les terribles massacrescommis dans les villes martyres.Dans lamémoire allemande, on
aplutôt privilégié la victoire remportée sur les Russes à Tannenberg. le 30 août 1914. La VIIIe armée allemande avait pris le dessus sur les 1ère et 2e armées russes.Les troupes impériales effa
çaient ainsi la honte de la première bataille de Tannenberg, en1410, qui vit la victoire des Polonais et des Lituaniens sur les chevaliers teutoniques.Dans la mémoire française en
fin, on préfère ne plus l’évoquercar elle illustre les dysfonctionnements d’une armée qui n’étaitpas prête et dont les chefsn’étaient pas sur la même longueur d’ondes. Le paquet fut missur la bataille suivante, celle de laMarne où les troupes hexagonales reprirent de bonnes couleurs.Fort heureusement, les histo
riens peuvent réparer ces lacuneshistoriques.
8-9 La Grande guerre à hauteur d’homme
Un Prince embauméau Sacré-Coeur
n Alors que le calme revenait enfin sur le Pays Noir, le collège duSacréCoeur de Charleroi apporta sa pierre aux opérationshumanitaires. La grande écoledes Jésuites accueillit en effet lelundi 24 août la dépouille d’unAllemand pas comme les autres :le prince Frédéric de SaxeMeiningen tombé la veille, à 53 ans,entre Nalinnes et Tarcienne.Ayant épousé Adélaïde de LippeBiesterfeld, il avait eu six enfantsdont le quatrième connaîtrait lemême sort que lui àMaubeuge ence début de Grande Guerre.Frédéric de SaxeMeiningen a
participé à la bataille deCharleroicomme générallieutenant etcommandant de la 39e brigaded’infanterie.La dépouille du Prince avait été
embaumée et déposée dans undouble cercueil alors que soncœur, son épée et son casque –symboles de sa valeur guerrière –furent placés dans un coffrescellé. Trois semaines plus tard,son corps a été rapatrié et inhumé àMeiningen.Quelques jours avant Noël, le
recteur du collège du SacréCoeur recevait une lettre de laprincesse exprimant toute sa gratitude et “sa reconnaissance pourtoutes vos peines et vos soins.”
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
l Solidarité
Le paradoxe carolo
n La bataille de Charleroiavait pris fin le 23 août maiscomment allaient réagir lesCarolos après tant de barbarie ? Pour André Balériaux, ilsfirent montre, le lendemainde ce qu’on pourrait appelerle “paradoxe carolo”…“Autant ils ont la tête près du
bonnet, autant leur cœur estgénéreux. Livrés sans défense,deux jours plus tôt à la fureurde la barbarie, ils donnentmaintenant l’exemple d’unegénérosité magnifique : portersecours aux infortunées victimes de la guerre, à quelque nationalité qu’elles appartiennent.”
Et de décrire “le grand dévouement” voire “l’abnégationde tant de médecins, infirmières, bonnes sœurs, ambulanciers et bonnes volontés” quis’acharnèrent à panser lesplaies, à sauver des vies maisaussi à aider à mourir dans ladignité.
L’historien militaire carolorégien s’est basé ici sur diverscourriers qui furent adresséspar des soldats allemands àleurs “sauveurs” dans les semaines et les mois quiavaient suivi leur guérison.
Une manière de rappelerque dans la guerre, l’humanitaire a beau être chassé, il revient toujours au galop…
l Traité de Couillet
Carolos très convaincus
Emile Devreux, le bourgmestre de Charleroi pendant la Première Guerre mondiale était un libéralqui se doublait d’un militant wallon.
Au moment de l’éclatement de la Grande Guerre, ildirigeait déjà la ville depuis dix ans. Il avait été à labase avec Jules Destrée de l’Exposition de Charleroiqui avait été une belle vitrine de ce qu’on faisait demieux à l’époque en Wallonie. Très attaché à sa cité,il ne pouvait évidemment pas accepter sa destruction. D’où sa démarche avec son échevin Emile Buisset qui lui succéderait à la tête de la ville en 1921alors qu’il consacra la fin de sa vie à des études historiques sur Charleroi. Leur compagnon de négociation, Paul Dulait était lui l’avocat de la Ville.
“Nous avonsle sentiment queles Allemandsn’ont rien de prêtpar là.”Joseph Joffre
GÉNÉRAL EN CHEFLe 14 août, Charles Lanrezac rencontra JosephJoffre en personne pourlui dire une seconde foissa crainte d’une grosseoffensive. Ce dernier nel’écouta pas. Par contre,lorsque Lanrezac ordonnale repli, Joffre ne putcacher sa colère.
21-23 AOUT 1914
La grande lessive du général Joffreh Un limogeagecollectif pour cacherses propres erreurs ?
n Cruelle destinée que celledu “patron” de la 5e arméefrançaise. Alors qu’il a faitéchapper ses troupes à uneboucherie encore plus cruellependant la “bataille des frontières”, le général CharlesLanrezac est limogé le 3 septembre 1914. On lui reprochait non seulement le replimais aussi son esprit critiqueet sa mésentente avec le maréchal anglais John French.
Il en conçut une amertumecertaine. Meurtri par ce traitement, il a refusé, en 1917, leposte de major général des armées.
Il faut dire que, début sep
tembre 1914, le général enchef Joffre n’avait pas faitdans la dentelle en remplaçant progressivement un tiersdes 400 officiers français.
Entre le 2 et le6 septembre, ilavait ainsi faitsauter deuxcommandantsd’armée dontCharles Lanrezac, pas moinsde neuf commandants decorps d’armée et encore 33commandants de division.Résultat : sur 47 divisionsd’active, la moitié vit leur direction changer.
Joseph Joffre n’aurait pas eule choix : les résultats sur leterrain ne correspondaientpas à ses attentes et les officiers généraux étaient de
bons boucs émissaires.D’autant plus que cela lui permit de couvrir ses propres er
reurs d’appréciation. Car ilpeut lui aussiêtre mis sur lasellette pourson manqued’anticipationdes grandsmouvementsallemands.Pour certainsspécialistes,
Joseph Joffre a trop longtemps douté d’une invasionde la Belgique. Il aurait aussitardé à ordonner à la 5e arméeet au général Lanrezac de seplacer sur la Sambre.
D’autres experts estimentque la faute incombait à Joffrequi n’avait pas écouté lesavertissements de Lanrezacqui était, lui, convaincu que
l’Allemagne passerait par laBelgique sans tenir compte desa neutralité.
Ils ne comprennent pas davantage les reproches de Joffre. Selon eux, Lanrezac nepouvait pas faire autrementque replier ses troupes quirisquaient d’être encerclées.Avec de pires pertes encore.
On opposa aussi les caractères des deux hommes : Joffrevoulait passer à l’offensive enpermanence, avec le risque devoir ses effectifs décimés alorsque Lanrezac était au contraire plus réservé et peu capable de prendre des initiatives. Damien Baldin et Emmanuel SaintFuscien n’ont pastranché, se demandant plutôtsi, avec un âge allant de 59 à67 ans, les officiers générauxfrançais n’étaient pas, avanttout, en décalage avec les nouvelles formes de combat.
Pourquoi Charleroi ne fut pas bombardé
Les canons allemands étaientinstallés sur les terrils étaientprêts à embraser la ville. Dansla nuit du 23 août 1914, lebourgmestre libéral EmileDevreux avait appelé son amil’avocat Me Dulait à la rescousse pour l’épauler.Le bombardement d’artillerieannoncé aurait fait table rasede bien des efforts menéspour valoriser sa bonne cité.Emile Devreux était réaliste :comme les troupes françaisesse repliaient, il fallait que lesautorités civiles tententd’entrer ellesmêmes encontact avec les chefs allemands.Pour les amadouer, il nesuffirait pas de se présenter àleur QG. Avec Albert Dulait, ilprépara une lettre ne manquant pas d’arguments. Lorsd’une catastrophe minièresurvenue outreRhin, Charleroi avait montré son boncoeur. Cela n’avait paséchappé à l’Empereur quil’avait remerciée par l’entremise de son consul. L’échevindes Finances Emile Buisset lesavait rejoints et ils allèrentensemble à la rencontre del’occupant. Ce n’était pas sansdanger dans une ville exposée aux tirs : l’épouse du
bourgmestre confectionna undrapeau blanc alors quel’avocat faisait amener unevoiture.Restait un détail important :Me Dulait n’avait de l’allemand qu’une connaissancerelative. Il fut donc décidé defaire accompagner la délégation par la gouvernante de sesenfants, une Lorraine. Mais ilse ravisa redoutant d’exposerla femme à des dangers inutiles. Ils interpellèrent dès lorsLouis Smeysters, un homme
d’affaires spécialisé dansl’exportation qui maîtrisait lalangue de Goethe. Et voilà ladélégation en route versParentville.La traversée de la ville leurmontra l’ampleur des dégâts,les convaincant encore del’opportunité de leur démarche. La traversée des bivouacsallemands fut tout sauf aiséemais la lettre du consul fut unbon sésame.Après avoir franchi plusieursbarrages dans des conditions
difficiles, les représentants dela ville purent enfin rencontrer le général Max von Barhfeld, le commandant de la 19e
division de réserve.Après un dialogue tendu, ilfinit par monnayer le silencedes canons contre quelquesexigences. Elles furent misessur papier et signées par lesdeux parties. Ce fut ce qu’onappela le traité de Couillet.Les Allemands avaient placéla barre très haut : la Villedevait leur fournir pour lesoir même à 18 h précises :120 tonnes d’avoine, 40tonnes de pain, 20 tonnes deconserves et de viandesfumées, 800 kilos de café, 800kilos de sel, 100 kilos desucre, trois tonnes de benzineet 50 litres de glycérine. Ilsréclamaient aussi cinq automobiles ainsi que les armes etmunitions qui se trouvaienten possession des habitants.Enfin, la ville devait dégagerune somme de 10 millions defrancs. Elle serait fournie encinq versements, un premierde deux millions en espèces,valeurs sûres ou lettres dechange. Les autres devaientêtre faits avec un intervalle de16 à 20 jours jusqu’à ce quetoute la somme ait été payée.
h La détermination et le courage des autorités locales a pu empêcher le pire.
8-9 La Grande guerre à hauteur d’homme
Le général Joffre.
REPO
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S
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
Les autorités carolorégiennes rencontrent officiellement le commandement allemand.
Aux premiers jours de la guerre, les morts et blessés bénéficient encore d’attentions. Malgré de premiers combats extrêmement meur-triers, la véritable boucherie est à venir.
l Eclairage
La bataille oubliéen Comme le relèvent DamienBaldin et Emmanuel SaintFuscien, auteurs de “Charleroi2123 août 1914”: la bataille quis’est livrée autour de la capitaledu Pays noir est “restée absente duchamp mémoriel des combats de1418”.Du côté belge, elle a été éclipsée
par l’héroïque résistance à Liègeet par les terribles massacrescommis dans les villes martyres.Dans lamémoire allemande, on
aplutôt privilégié la victoire remportée sur les Russes à Tannenberg. le 30 août 1914. La VIIIe armée allemande avait pris le dessus sur les 1ère et 2e armées russes.Les troupes impériales effa
çaient ainsi la honte de la première bataille de Tannenberg, en1410, qui vit la victoire des Polonais et des Lituaniens sur les chevaliers teutoniques.Dans la mémoire française en
fin, on préfère ne plus l’évoquercar elle illustre les dysfonctionnements d’une armée qui n’étaitpas prête et dont les chefsn’étaient pas sur la même longueur d’ondes. Le paquet fut missur la bataille suivante, celle de laMarne où les troupes hexagonales reprirent de bonnes couleurs.Fort heureusement, les histo
riens peuvent réparer ces lacuneshistoriques.
8-9 La Grande guerre à hauteur d’homme
Un Prince embauméau Sacré-Coeur
n Alors que le calme revenait enfin sur le Pays Noir, le collège duSacréCoeur de Charleroi apporta sa pierre aux opérationshumanitaires. La grande écoledes Jésuites accueillit en effet lelundi 24 août la dépouille d’unAllemand pas comme les autres :le prince Frédéric de SaxeMeiningen tombé la veille, à 53 ans,entre Nalinnes et Tarcienne.Ayant épousé Adélaïde de LippeBiesterfeld, il avait eu six enfantsdont le quatrième connaîtrait lemême sort que lui àMaubeuge ence début de Grande Guerre.Frédéric de SaxeMeiningen a
participé à la bataille deCharleroicomme générallieutenant etcommandant de la 39e brigaded’infanterie.La dépouille du Prince avait été
embaumée et déposée dans undouble cercueil alors que soncœur, son épée et son casque –symboles de sa valeur guerrière –furent placés dans un coffrescellé. Trois semaines plus tard,son corps a été rapatrié et inhumé àMeiningen.Quelques jours avant Noël, le
recteur du collège du SacréCoeur recevait une lettre de laprincesse exprimant toute sa gratitude et “sa reconnaissance pourtoutes vos peines et vos soins.”
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
l Distinctions
La Mons Star
Sans nul doute, la VictoriaCross fut la plus prestigieusedécoration militaire duRoyaumeUni. Comme sonnom l’indique c’est la reineVictoria qui l’a créée en 1856afin de mettre en exergue “lesactes de bravoure extraordinaire face à l’ennemi”. Entre 1914 et 1918, elle fut attribuée à 627 reprises. Les septpremières Victoria Cross sontallées à des membres de laBritish Expeditionary Forcequi se sont conduits de manière héroïque lors de la bataille de Mons. Mais en mêmetemps la 1914 Star, une autredistinction avait un lien directavec les premiers engagements sur le continent.Comme elle fut attribuée à ungrand nombre de combattants de la première heure,elle fut aussi appelée la MonsStar. On l’attribua aux soldatsdu BEF mais aussi à des médecins et des infirmières présents sur le front.
Elle a été généreusement attribuée puisqu’on évalue lenombre de ses bénéficiaires à378000 personnes. Parmi elles, la bellesœur de WinstonChurchill, Nelly Hozier quifut nurse dans un hôpital decampagne dès le début duconflit.
l Portrait
John French comte d’Ypres
John Denton Pinkstone French fut le premier commandant du Corps expéditionnaire britannique. Engagédans la Royal Navy en 1866, il passa à l’armée de terreen 1874. French prit part à l’expédition du Soudan dansles années 1880 et à la deuxième Guerre des Boers, de1899 à 1902. Promu général en 1907; il devint chefd’étatmajor de l’armée britannique puis de l’Empirebritannique en 1912. En 1915, il refuse de coopéreravec les Français, après les attaques manquées d’AubersRidge et de Loos, qui mirent un terme aux offensivesbritanniques. Il retourna en Angleterre, où il est nommécommandant des forces britanniques de l’intérieur.Pour l’ensemble de sa carrière et services rendus à la patrie, il fut élevé au titre de comte d’Ypres en 1922.
Les 6 divisionsde ce corpsconstitueront unsérieux facteurde succès.”CommandantStirnRapport de 1911 sur lapréparation de la BritishExpeditionary Force.
21-24 AOUT 1914
L’entente cordiale monte au fronth Et voilà l’arméebritannique enrenfort comme prévu
n Si les troupes françaisesavaient déjà connu des sortsdivers lors des premiers affrontements de la “batailledes frontières”, on attendait,non sans une certaine impatience les renforts annoncésd’outreManche.
Dix ans avant le début dela guerre, la GrandeBretagne et la France envisageaient des ramificationspratiques de leur Ententecordiale. La planification militaire commune y prenaitune place certaine. Il s’agissait de déterminer les conditions d’une intervention militaire britannique sur lecontinent. Le mouvements’était accéléré pendant l’hi
ver 19051906 en réponse àla première crise du Marocoù en guise de réaction à latransformation du Maroc enprotectorat français, l’empereur Guillaume avait débarqué de manière très provocante à Tanger chez le sultan.
Ce qui furent dans un premier temps des discussionsurgentes d’étatmajor menagraduellement à des arrangements logistiques beaucoup plus conséquents.
Comme l’hypothèse de lamobilisation et de l’envoi rapide d’une British Expeditionary Force (BEF) enFrance en cas de guerre contre l’Allemagne.
En 1914, la GrandeBretagne pouvait aligner six divisions d’infanterie et une division de cavalerie bienéquipées pour une guerresur le continent. Selon lesspécialistes, cette force était
“la crème de la crème” del’armée britannique.
Elle était soutenue par uneforce territoriale et le potentiel militaire de l’Empire britannique qui était alors encore organisé d’une manièreprovisoire.
L’Etatmajor français suivait avec intérêt cette approche nouvelle de son “allié”.Pour évaluer l’armée britannique, les Français se focalisèrent sur plusieurs éléments. Ainsi comment secomporteraitelle dans uneguerre continentale, quellesétaient sa vitesse de mobilisation et de déploiement,quelles étaient les capacitésde sa réserve et d’expansion ? Autre question : oùpourraitelle intervenir demanière rapide et efficace siune guerre se déclenchait.
De l’autre côté de la Manche, les autorités militairesse réjouirent de ces préoccu
pations françaises. Cet intérêt fut vivement encouragé àLondres comme une alternative aux stratégies maritimes traditionnelles. Au plushaut niveau puisqu’il fut encouragé par Henry HughesWilson, le directeur des opérations militaires et pard’autres officiers supérieurscomme John French, qui allait commander la BEF.
La British ExpeditionaryForce devait se positionner àgauche des troupes françaises et participer aussi auxgrandes offensives.
Durant l’été de 1914, laBEF n’était pas de grandetaille mais était non seulement bien entraînée maisaussi équipée. L’invasion dela Belgique, le 4 août 1914,fit accélérer son transfert surle continent. Les premièrestroupes de la BEF débarquaient dès le 7 août à Boulogne, au Havre et à Rouen.
Une confrontation sur le pire champ de bataille
Elles sont forcément exceptionnelles les batailles qui sedérouleraient dans desconditions optimales pourles deux camps en présence.Pour celle de Mons, on peutcarrément affirmer qu’elle aeu lieu dans des circonstances absolument étrangèresaux volontés de chacune destroupes en lice.C’est l’avis d’Yves Bourdon,grand connaisseur de labataille de Mons, qui vient depublier “Le premier choc. LaBataille de Mons” chez l’éditeur De Krijger.Pour l’auteur du “Guide duchamp de bataille” les Britanniques et les Allemands“ne voulaient ou n’auraientdû se rencontrer en cet endroit car il s’agit du pirechamp de bataille qu’onpuisse imaginer”.Les Britanniques ne comptaient s’y arrêter que poursouffler avant de lancer unegrande offensive. Mais la 5e
armée française avait dû sereplier et cela força le maréchal French à rester sur sesbases.Reste que le terrain étaittotalement inadéquat pourdes opérations de défense,
malgré une longue lignedroite du canal de Mons àCondé. Mais ce terrain demeurait difficile “parce qu’ily avait trop de ponts et d’écluses à défendre”. Autant depoints de passage possibles.Mal choisi aussi pour moultautres raisons : les champs detir étaient trop réduits tantpour l’infanterie que pourl’artillerie; les villages au
bord du canal regorgeaientde petites rues et ruelles où ilétait difficile de manœuvrer;plusieurs terrils qui se dominaient les uns les autresceinturaient l’endroit; parceque la configuration nepermettait pas d’engagerbeaucoup de troupes dans unespace exposé de tous côtés.Plus surprenant encore :C’est presque en dernière
minute que les Allemands serendirent compte qu’ilsallaient se heurter aux Britanniques. L’Etatmajorallemand était évidemmentinformé de l’arrivée de forcesbritanniques sur le continentet plus particulièrement enBelgique mais pas nécessairement de ce côtélà. Ils lesvoyaient se diriger plutôtvers Anvers ou vers la côte.La veille de la bataille, ilsconstatèrent leur proximitésuite à la chute d’un avionbritannique à Marcq (Enghien), abattu par une patrouille allemande. Il y avaiteu aussi la charge de Casteauoù des éléments du 4e Dragon Guards se heurtèrent à lacavalerie allemande. QuatreAllemands avaient été tués ettrois autres fait prisonniers.Les jours suivants à Mons, lecorps expéditionnaire dutaussi en partie son salut auxmauvais calculs des générauxallemands. Par orgueil, vonKluck commit une fauted’évaluation dans sa conquête de Paris alors que VonBulow avait à tort retardé satraversée de la Sambre d’unjour. French avait de la sorteeu le temps de se retourner.
h Brittaniques et Allemands se sont rencontrés sur un très mauvais terrain…
REPO
RTER
S
10-11 La Grande guerre à hauteur d’homme
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
A Jemappes, une unité britannique bivouaque. Les combats ne sont pas encore engagés.
©VILLEDE
MON
S
C’est avec fierté que les Ecossais posent avant de se rendre en Belgique pour défendre la neutralité de la Belgique.
VILLEDE
MON
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La Victoria cross
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PORT
ERS
La Mons Star
l Symbole
Ville de mémoireet de pèlerinagebritannique
n Dans l’histoire de la PremièreGuerre mondiale, la bataille deMons occupe une place centralepour les ressortissants duRoyaume Uni et du Commonwealth. C’est là que les Britanniques ont écrit les premièrespages glorieuses de “leur” Première Guerre mondiale. Dès quela neutralité belge avait été violée, l’on prépara le grand transbordement outreManche.Pendant une dizaine de jours,
une trentaine de bateaux partirent de Southampton vers lesports du Nord de la France. Abord 70000 militaires, des centaines de canons et d’armes modernes mais aussi plusieurs tonnes de vivres.
10-11 La Grande guerre à hauteur d’homme
Jusqu’au-boutismeet sang-froid
n La bataille de Mons du 22 au24 août marqua les esprits. Aupoint que toute la région des exploits de la BEF (British Expeditionary Force) devint un lieu dusouvenir voire de pèlerinage.Cela avait failli mal tourner : la
poussée massive des soldats allemands, supérieurs en nombre,couplée au retrait de la 5° arméefrançaise sur son flanc droitavait aussi contraint Sir JohnFrench à organiser la retraite.La cause semblait perdue.Mais
le jusqu’auboutisme et le sangfroid britannique avaient retardé la percée ennemie. Ducoup, la BEF a pu organiser sadéfense et permis aux Françaisde se reprendre pour préparer labataille de la Marne. Une situation nouvelle qui n’intervint cependant qu’après d’autres combats, notamment à Le Cateau(26 août), à Etreux (27 août), àNéry (01 septembre) où la résistance britannique permit de retarder la progression allemande.Mais Mons signifia bien da
vantage encore pour leRoyaumeUni. C’est là que le Private Parr et le Private Ellison furent tués, devenant à tout jamaisles premier et dernier Britanniques tombés lors du conflit.Très vite après le conflit, la cité
du Doudou accueillit des milliers de Britanniques venus serendre compte des lieux où lesleurs s’étaient battus. Ce n’estpas un hasard que ce lundi4 août, les Britanniques aienttenu à organiser immédiatement une solennelle cérémonied’hommage au cimetière de StSymphorien où reposent aussi“le premier et le dernier” enprésence de la relève de la famille royale britannique.
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
l Distinctions
La Mons Star
Sans nul doute, la VictoriaCross fut la plus prestigieusedécoration militaire duRoyaumeUni. Comme sonnom l’indique c’est la reineVictoria qui l’a créée en 1856afin de mettre en exergue “lesactes de bravoure extraordinaire face à l’ennemi”. Entre 1914 et 1918, elle fut attribuée à 627 reprises. Les septpremières Victoria Cross sontallées à des membres de laBritish Expeditionary Forcequi se sont conduits de manière héroïque lors de la bataille de Mons. Mais en mêmetemps la 1914 Star, une autredistinction avait un lien directavec les premiers engagements sur le continent.Comme elle fut attribuée à ungrand nombre de combattants de la première heure,elle fut aussi appelée la MonsStar. On l’attribua aux soldatsdu BEF mais aussi à des médecins et des infirmières présents sur le front.
Elle a été généreusement attribuée puisqu’on évalue lenombre de ses bénéficiaires à378000 personnes. Parmi elles, la bellesœur de WinstonChurchill, Nelly Hozier quifut nurse dans un hôpital decampagne dès le début duconflit.
l Portrait
John French comte d’Ypres
John Denton Pinkstone French fut le premier commandant du Corps expéditionnaire britannique. Engagédans la Royal Navy en 1866, il passa à l’armée de terreen 1874. French prit part à l’expédition du Soudan dansles années 1880 et à la deuxième Guerre des Boers, de1899 à 1902. Promu général en 1907; il devint chefd’étatmajor de l’armée britannique puis de l’Empirebritannique en 1912. En 1915, il refuse de coopéreravec les Français, après les attaques manquées d’AubersRidge et de Loos, qui mirent un terme aux offensivesbritanniques. Il retourna en Angleterre, où il est nommécommandant des forces britanniques de l’intérieur.Pour l’ensemble de sa carrière et services rendus à la patrie, il fut élevé au titre de comte d’Ypres en 1922.
Les 6 divisionsde ce corpsconstitueront unsérieux facteurde succès.”CommandantStirnRapport de 1911 sur lapréparation de la BritishExpeditionary Force.
21-24 AOUT 1914
L’entente cordiale monte au fronth Et voilà l’arméebritannique enrenfort comme prévu
n Si les troupes françaisesavaient déjà connu des sortsdivers lors des premiers affrontements de la “batailledes frontières”, on attendait,non sans une certaine impatience les renforts annoncésd’outreManche.
Dix ans avant le début dela guerre, la GrandeBretagne et la France envisageaient des ramificationspratiques de leur Ententecordiale. La planification militaire commune y prenaitune place certaine. Il s’agissait de déterminer les conditions d’une intervention militaire britannique sur lecontinent. Le mouvements’était accéléré pendant l’hi
ver 19051906 en réponse àla première crise du Marocoù en guise de réaction à latransformation du Maroc enprotectorat français, l’empereur Guillaume avait débarqué de manière très provocante à Tanger chez le sultan.
Ce qui furent dans un premier temps des discussionsurgentes d’étatmajor menagraduellement à des arrangements logistiques beaucoup plus conséquents.
Comme l’hypothèse de lamobilisation et de l’envoi rapide d’une British Expeditionary Force (BEF) enFrance en cas de guerre contre l’Allemagne.
En 1914, la GrandeBretagne pouvait aligner six divisions d’infanterie et une division de cavalerie bienéquipées pour une guerresur le continent. Selon lesspécialistes, cette force était
“la crème de la crème” del’armée britannique.
Elle était soutenue par uneforce territoriale et le potentiel militaire de l’Empire britannique qui était alors encore organisé d’une manièreprovisoire.
L’Etatmajor français suivait avec intérêt cette approche nouvelle de son “allié”.Pour évaluer l’armée britannique, les Français se focalisèrent sur plusieurs éléments. Ainsi comment secomporteraitelle dans uneguerre continentale, quellesétaient sa vitesse de mobilisation et de déploiement,quelles étaient les capacitésde sa réserve et d’expansion ? Autre question : oùpourraitelle intervenir demanière rapide et efficace siune guerre se déclenchait.
De l’autre côté de la Manche, les autorités militairesse réjouirent de ces préoccu
pations françaises. Cet intérêt fut vivement encouragé àLondres comme une alternative aux stratégies maritimes traditionnelles. Au plushaut niveau puisqu’il fut encouragé par Henry HughesWilson, le directeur des opérations militaires et pard’autres officiers supérieurscomme John French, qui allait commander la BEF.
La British ExpeditionaryForce devait se positionner àgauche des troupes françaises et participer aussi auxgrandes offensives.
Durant l’été de 1914, laBEF n’était pas de grandetaille mais était non seulement bien entraînée maisaussi équipée. L’invasion dela Belgique, le 4 août 1914,fit accélérer son transfert surle continent. Les premièrestroupes de la BEF débarquaient dès le 7 août à Boulogne, au Havre et à Rouen.
Une confrontation sur le pire champ de bataille
Elles sont forcément exceptionnelles les batailles qui sedérouleraient dans desconditions optimales pourles deux camps en présence.Pour celle de Mons, on peutcarrément affirmer qu’elle aeu lieu dans des circonstances absolument étrangèresaux volontés de chacune destroupes en lice.C’est l’avis d’Yves Bourdon,grand connaisseur de labataille de Mons, qui vient depublier “Le premier choc. LaBataille de Mons” chez l’éditeur De Krijger.Pour l’auteur du “Guide duchamp de bataille” les Britanniques et les Allemands“ne voulaient ou n’auraientdû se rencontrer en cet endroit car il s’agit du pirechamp de bataille qu’onpuisse imaginer”.Les Britanniques ne comptaient s’y arrêter que poursouffler avant de lancer unegrande offensive. Mais la 5e
armée française avait dû sereplier et cela força le maréchal French à rester sur sesbases.Reste que le terrain étaittotalement inadéquat pourdes opérations de défense,
malgré une longue lignedroite du canal de Mons àCondé. Mais ce terrain demeurait difficile “parce qu’ily avait trop de ponts et d’écluses à défendre”. Autant depoints de passage possibles.Mal choisi aussi pour moultautres raisons : les champs detir étaient trop réduits tantpour l’infanterie que pourl’artillerie; les villages au
bord du canal regorgeaientde petites rues et ruelles où ilétait difficile de manœuvrer;plusieurs terrils qui se dominaient les uns les autresceinturaient l’endroit; parceque la configuration nepermettait pas d’engagerbeaucoup de troupes dans unespace exposé de tous côtés.Plus surprenant encore :C’est presque en dernière
minute que les Allemands serendirent compte qu’ilsallaient se heurter aux Britanniques. L’Etatmajorallemand était évidemmentinformé de l’arrivée de forcesbritanniques sur le continentet plus particulièrement enBelgique mais pas nécessairement de ce côtélà. Ils lesvoyaient se diriger plutôtvers Anvers ou vers la côte.La veille de la bataille, ilsconstatèrent leur proximitésuite à la chute d’un avionbritannique à Marcq (Enghien), abattu par une patrouille allemande. Il y avaiteu aussi la charge de Casteauoù des éléments du 4e Dragon Guards se heurtèrent à lacavalerie allemande. QuatreAllemands avaient été tués ettrois autres fait prisonniers.Les jours suivants à Mons, lecorps expéditionnaire dutaussi en partie son salut auxmauvais calculs des générauxallemands. Par orgueil, vonKluck commit une fauted’évaluation dans sa conquête de Paris alors que VonBulow avait à tort retardé satraversée de la Sambre d’unjour. French avait de la sorteeu le temps de se retourner.
h Brittaniques et Allemands se sont rencontrés sur un très mauvais terrain…
REPO
RTER
S
10-11 La Grande guerre à hauteur d’homme
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
A Jemappes, une unité britannique bivouaque. Les combats ne sont pas encore engagés.
©VILLEDE
MON
S
C’est avec fierté que les Ecossais posent avant de se rendre en Belgique pour défendre la neutralité de la Belgique.
VILLEDE
MON
S
La Victoria cross
MAR
YEV
ANS/RE
PORT
ERS
La Mons Star
l Symbole
Ville de mémoireet de pèlerinagebritannique
n Dans l’histoire de la PremièreGuerre mondiale, la bataille deMons occupe une place centralepour les ressortissants duRoyaume Uni et du Commonwealth. C’est là que les Britanniques ont écrit les premièrespages glorieuses de “leur” Première Guerre mondiale. Dès quela neutralité belge avait été violée, l’on prépara le grand transbordement outreManche.Pendant une dizaine de jours,
une trentaine de bateaux partirent de Southampton vers lesports du Nord de la France. Abord 70000 militaires, des centaines de canons et d’armes modernes mais aussi plusieurs tonnes de vivres.
10-11 La Grande guerre à hauteur d’homme
Jusqu’au-boutismeet sang-froid
n La bataille de Mons du 22 au24 août marqua les esprits. Aupoint que toute la région des exploits de la BEF (British Expeditionary Force) devint un lieu dusouvenir voire de pèlerinage.Cela avait failli mal tourner : la
poussée massive des soldats allemands, supérieurs en nombre,couplée au retrait de la 5° arméefrançaise sur son flanc droitavait aussi contraint Sir JohnFrench à organiser la retraite.La cause semblait perdue.Mais
le jusqu’auboutisme et le sangfroid britannique avaient retardé la percée ennemie. Ducoup, la BEF a pu organiser sadéfense et permis aux Françaisde se reprendre pour préparer labataille de la Marne. Une situation nouvelle qui n’intervint cependant qu’après d’autres combats, notamment à Le Cateau(26 août), à Etreux (27 août), àNéry (01 septembre) où la résistance britannique permit de retarder la progression allemande.Mais Mons signifia bien da
vantage encore pour leRoyaumeUni. C’est là que le Private Parr et le Private Ellison furent tués, devenant à tout jamaisles premier et dernier Britanniques tombés lors du conflit.Très vite après le conflit, la cité
du Doudou accueillit des milliers de Britanniques venus serendre compte des lieux où lesleurs s’étaient battus. Ce n’estpas un hasard que ce lundi4 août, les Britanniques aienttenu à organiser immédiatement une solennelle cérémonied’hommage au cimetière de StSymphorien où reposent aussi“le premier et le dernier” enprésence de la relève de la famille royale britannique.
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
Bombardementsvirulents etboucliers humainsn A Mons, que l’Etatmajoranglais avait quitté, les bombardements se firent virulents, amenant les habitantsà se calfeutrer chez eux. Lapanique grimpa d’un cranlorsque le bruit se répanditque les Allemands étaientaux abords de la ville. S’attendant à se faire tirer dessuspar des soldats britanniquesembusqués lors de leur entrée dans la cité par la rue deNimy, les Allemands s’emparèrent de civils. Ils obligèrentces boucliers humains, dontle bourgmestre Jean Lescarts,à marcher devant le peloton.Vers 16h10, le groupe se
retrouve auprès du TrouOudart dans le haut de la ruede Bertaimont. C’est làqu’éclata une fusillade avecles Anglais. Les otages belgesont tenté de s’abriter maisn’ont pu échapper aux ballesallemandes. Bilan : plusieursmorts mais aussi de blessés.Le bourgmestre Lescarts a puen sortir vivant.Dès le lendemain de la
guerre, le Trou Oudart devint la place des Martyrsmais elle fut vraiment inaugurée en grande pompe le10 juillet 1927 en présencede la reine Elisabeth.
l Bouclier humain
Maïeur en première ligne
Les troupes allemandes en arrivant dans le centre historique deMons craignant de voir le nombre de perteshumaines et matérielles augmenter encore firentcomme dans bien d’autres communes : ils s’emparèrent de boucliers humains.A l’hôtel de ville, ils emmenèrent ainsi le bourgmes
tre Jean Lescarts qui dirigeait la cité duDoudoudepuis1905 et qui devait y ceindre l’écharpe maïorale jusqu’en 1925.Le bourgmestre sortit vivant de la fusillade au Trou
Oudart contrairement à cinq autres otages qui y trouvèrent la mort alors que d’autres encore étaient blessés. AMons, Jean Lescarts avait toujours veillé à lamiseen exergue des traditions locales.
“O Père céleste,rendez laBelgiqueaux Belges.Et aux Belgesrendez leurleur bon Roi !”
Père Ephrem
DISCOURSPATRIOTIQUELe 19mars 1915, cecapucin tint un discoursqui se voulait aussi religieux à l’occasion de lafête de StJoseph, pas pourrien le patron de la Belgique… Un pied de nez àl’occupant allemand…
22 ET 23 AOUT 1914
Une ville sous haute tensionh Là aussi, les pertesfurentmilitairesmais aussi civiles.
n Les premiers combats enHainaut furent assez particuliers de par la proximité entreles populations locales et lestroupes venues à leur secourspour contrer les Allemands. Siles Français furent accueillisavec beaucoup d’enthousiasme à Charleroi, il en alla demême à Mons pour les Britanniques où ils furent rapidement épaulés pardeshabitantspour le creusement de tranchées.Dès le 22 août, il y avait eu
quelques escarmouches entreMaisières et Casteau. Pour lapetite histoire, l’endroit où futéchangé le premier coup de fusil ce jourlà se situait juste en
face de celui où auraient lieuquatre ans plus tard les derniers à être échanges.Lorsque le matin du 23 août,
les troupes allemandes arriventen masse à Obourg, elles fontd’emblée connaissance avec lapuissance de feu britannique.Un soldat britannique, positionné sur le toit de la gared’Obourg avait permis à tousses compagnons d’armes debattre en retraite en continuantà tirer sur les ennemis.Reste que les soldats ennemis
étaient deux fois plus nombreux et cela amena les Britanniques a redoubler d’ardeur, allant jusqu’à tirer 15 cartouchespar minute; ce qu’on appela la“Mad Minute”. Cette organisation allait leur permettre de tenir.Une tactique utilisée égale
ment à Nimy mais à un moment les soldats de la BEF se retrouvèrent en infériorité et
leurs adversaires firent appelà l’artillerie. Ce qui les amenaà battre en retraite.Les vrais premiers coups de
feu de la bataille de Mons furent échangés à Nimy, le23 août à 8h30, entre le 4e
Royal Fusiliers Anglais et lestroupes allemandes. La toutepremière confrontation de laguerre entre les deux arméesennemies.L’infanterie allemande avait
tenté un premier assaut enmatinée à hauteur du pont dechemin de fer. L’autre pont deNimy, le pont route avait déjàété coupé par les Britanniques.Une compagnie du 4e royal
Fusiliers et une mitrailleusedu lieutenant Dease défendaient seules ce passage. Lefeu nourri des Anglais, particulièrement puissant, occasionna de nombreuses pertesallemandes.Mais au pont de Nimy, le
lieutenant Dease voulutpoursuivre les tirs malgré sesblessures. Touché à plusieursreprises, il fut évacué au centre de soins du bataillon où ildécéda. Au pont de Ghlin, lesoldat Sydney Godley, surune autre mitrailleuse, tintbon toute la journéemais dutfinir par se rendre après avoirdémonté sa mitrailleuse etjeté les pièces dans le canal.Ces deux soldats sont recevront la Victoria Cross.Vers 14h30, face au poids
des attaques allemandes, lesBritanniques constatent queles positions sont devenuesintenables. Les pertes étaientlourdes et ils battirent en retraite versMons.Nimy avait déjà subi de
nombreuses destructions.Entrés dans le village, les Allemands furieux ont massacré 22 civils et ont brûlé 108maisons.
Un vainqueur tactique et un vainqueur militaire
Qui a remporté la batailledeMons ? Le 24 août, leCorps expéditionnairebritannique se retirait versLe Cateau en directionduquel un grand nombre decivils montois se repliaientaussi dans son sillage pourespérer échapper à l’envahisseur allemand.Une vision qui fut difficile àadmettre pour le maréchalJohn French qui rencontrale général de cavalerie français André Sordet à Avesnesavant d’aller rejoindre sonPC improvisé dans la mairiede Bavay.L’heure de tirer les conclusions de ce entra dans l’Histoire comme la bataille deMons…Tant dans les rangs britanniques qu’Allemands onrevendiqua la victoire ! Enfait, on peut parler d’unsuccès tactique pour lesBritanniques qui ont failliperdre bien plus d’hommesencore alors que les responsables allemands n’hésitaient pas à se considérercomme les vainqueurs…militaires !Une double précision quiapporte quandmême undouble bémol à de doublebulletin de victoire : on n’a
jamais disposé de bilanscomplets de la bataille.Mais on peut quandmêmeestimer que les Britanniques ont perdu quelque4200 hommes. Les Allemands de leur côté ontbrillé par unmutisme total :ni pendant le conflit, niaprès celuici ils ont livré dechiffres de leur côté. Il nefallait pas porter atteinte aumoral des soldats de l’Empire mais les Allemands
s’efforçaient aussi de cacherleurs morts aux populationsoccupées. Certains témoinslocauxmais aussi des rapports allemands ont ainsirapporté que le soir du 23août à Mons, des fourgonsfermés venaient récupérerles corps des militairesallemands pour les ramenerà l’arrière du front.A la décharge des uns et desautres, il faut dire qu’on sesituait encore au tout début
du conflit et les Hauts commandements ont certainement été effarés par lestémoignages sur les combats. Pas évident à accepterpour Lord Kitchener, l’alorsencore frais émouluministre de la Guerre qui avaitplaidé pour que l’on fasse lemoins possible couler dusang britannique.Selon Yves Bourdon, lespertes allemandes pouvaient être estimées à 7500hommes.On conclura cependant engénéral avec le spécialiste dela bataille que “le bilan deces deux jours de combatétait lourd”.Mais d’y apporter quandmême un correctif : dans lespertes subies par les Britanniques il n’y avait pas seulement les victimes, les blessés et les disparus maiségalement les prisonniers.Par contre, le Corps expéditionnaire britannique neput guère faire de prisonniers, ayant euxmêmes dûsubir des assauts répétésavant de se replier. Lesprisonniers allemands nefurent dès lors pas emmenés dans la retraite maisabandonnés à la garde deleurs blessés.
hBritanniques comme Allemands estimèrent l’avoir emporté à Mons.
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S
12-13 La Grande guerre à hauteur d’homme
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
Après trois jours de combats? les Allemands entrent dans Mons et paradent devant l’hôtel de ville.
©VILLEDE
MON
S
Aux abords de Mons, Nimy a particulièrement souffert des destructions de bâtiments civils.
F
Sur la Grand’ Place deMons, les Allemands défilent au son des fi-fres et des tambours.
©VILLEDE
MON
S
Avant l’arrivée des Allemands, les autorités avaient réquisi-tionné les automobiles.
©VILLEDE
MON
S
l Memorial Museum
Mémoire civile,mémoire militaire
nMons aune grandeplacedans lecœur des Britanniques depuis laGrandeGuerremais ces pages glorieuses sont indissociablesd’autres grands chapitres écritsdans ce qui fut de tout temps uneplace forte militaire. Une cité quicompta plus de 20 casernes, descasemates, un manège et dont lebeffroi ne fut pas ici synonyme delibertés communalesmais de tourde guet ! Combien savent qu’en1691 Louis XIV a assiégé la ville ?Ou qu’au XVIIIe siècle, un hommesur cinq y avait un lien avec la viemilitaire ?Le Mons Memorial Museum qui
ouvrira ses portes en 2015 pourl’année culturelle européenne sefocalisera sur ces dimensions. Ils’installera dans l’ancienne Machine à eau le long du boulevardDolez dans un beau bâtiment debriques, d’acier et de verre, construit par l’architecte montois Joseph Hubert en 18701871 pouralimenter le réseau d’eau potablede la ville.Le nouvel espace invitera à s’in
terroger sur les réalités des phénomènes guerriers. Avec une expositionpermanentequi confrontera le public aux événements dumonde à partir de l’histoire singulière de Mons. À travers le destind’hommes et de femmes qui ontpu témoigner des événements, duvécu quotidien des soldats et descivils en période de guerre.
12-13 La Grande guerre à hauteur d’homme
Réflexion
n La réflexion fondamentale surles rapports entre population civile et militaire prendra corpsdans un parcours conduisant levisiteur du Moyen Âge, en passant par l’Ancien Régime, jusqu’aux deux guerres mondiales.Avec en sus une salle d’exposition temporaire qui proposeraun focus sur un sujet d’histoiremilitaire.Les collections revivront tout
en marquant une rupture parune scénographie radicalementdifférente qui réponde aux attentes contemporaines. Lemuséed’Histoire fera dès lors aussi appel aux nouvelles technologies.
5000 objets
n On y mettra en exergue unesélection des quelque 5000 objets des collections d’histoiremilitaire de la ville. Un premierlieu muséal du genre avait étécréé en1930. Parmi ces “trésors”épinglons la plus belle collectionde piècesmilitaires britanniquessur le continent dont 7 tambours de la bataille d’août 1914.
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
Bombardementsvirulents etboucliers humainsn A Mons, que l’Etatmajoranglais avait quitté, les bombardements se firent virulents, amenant les habitantsà se calfeutrer chez eux. Lapanique grimpa d’un cranlorsque le bruit se répanditque les Allemands étaientaux abords de la ville. S’attendant à se faire tirer dessuspar des soldats britanniquesembusqués lors de leur entrée dans la cité par la rue deNimy, les Allemands s’emparèrent de civils. Ils obligèrentces boucliers humains, dontle bourgmestre Jean Lescarts,à marcher devant le peloton.Vers 16h10, le groupe se
retrouve auprès du TrouOudart dans le haut de la ruede Bertaimont. C’est làqu’éclata une fusillade avecles Anglais. Les otages belgesont tenté de s’abriter maisn’ont pu échapper aux ballesallemandes. Bilan : plusieursmorts mais aussi de blessés.Le bourgmestre Lescarts a puen sortir vivant.Dès le lendemain de la
guerre, le Trou Oudart devint la place des Martyrsmais elle fut vraiment inaugurée en grande pompe le10 juillet 1927 en présencede la reine Elisabeth.
l Bouclier humain
Maïeur en première ligne
Les troupes allemandes en arrivant dans le centre historique deMons craignant de voir le nombre de perteshumaines et matérielles augmenter encore firentcomme dans bien d’autres communes : ils s’emparèrent de boucliers humains.A l’hôtel de ville, ils emmenèrent ainsi le bourgmes
tre Jean Lescarts qui dirigeait la cité duDoudoudepuis1905 et qui devait y ceindre l’écharpe maïorale jusqu’en 1925.Le bourgmestre sortit vivant de la fusillade au Trou
Oudart contrairement à cinq autres otages qui y trouvèrent la mort alors que d’autres encore étaient blessés. AMons, Jean Lescarts avait toujours veillé à lamiseen exergue des traditions locales.
“O Père céleste,rendez laBelgiqueaux Belges.Et aux Belgesrendez leurleur bon Roi !”
Père Ephrem
DISCOURSPATRIOTIQUELe 19mars 1915, cecapucin tint un discoursqui se voulait aussi religieux à l’occasion de lafête de StJoseph, pas pourrien le patron de la Belgique… Un pied de nez àl’occupant allemand…
22 ET 23 AOUT 1914
Une ville sous haute tensionh Là aussi, les pertesfurentmilitairesmais aussi civiles.
n Les premiers combats enHainaut furent assez particuliers de par la proximité entreles populations locales et lestroupes venues à leur secourspour contrer les Allemands. Siles Français furent accueillisavec beaucoup d’enthousiasme à Charleroi, il en alla demême à Mons pour les Britanniques où ils furent rapidement épaulés pardeshabitantspour le creusement de tranchées.Dès le 22 août, il y avait eu
quelques escarmouches entreMaisières et Casteau. Pour lapetite histoire, l’endroit où futéchangé le premier coup de fusil ce jourlà se situait juste en
face de celui où auraient lieuquatre ans plus tard les derniers à être échanges.Lorsque le matin du 23 août,
les troupes allemandes arriventen masse à Obourg, elles fontd’emblée connaissance avec lapuissance de feu britannique.Un soldat britannique, positionné sur le toit de la gared’Obourg avait permis à tousses compagnons d’armes debattre en retraite en continuantà tirer sur les ennemis.Reste que les soldats ennemis
étaient deux fois plus nombreux et cela amena les Britanniques a redoubler d’ardeur, allant jusqu’à tirer 15 cartouchespar minute; ce qu’on appela la“Mad Minute”. Cette organisation allait leur permettre de tenir.Une tactique utilisée égale
ment à Nimy mais à un moment les soldats de la BEF se retrouvèrent en infériorité et
leurs adversaires firent appelà l’artillerie. Ce qui les amenaà battre en retraite.Les vrais premiers coups de
feu de la bataille de Mons furent échangés à Nimy, le23 août à 8h30, entre le 4e
Royal Fusiliers Anglais et lestroupes allemandes. La toutepremière confrontation de laguerre entre les deux arméesennemies.L’infanterie allemande avait
tenté un premier assaut enmatinée à hauteur du pont dechemin de fer. L’autre pont deNimy, le pont route avait déjàété coupé par les Britanniques.Une compagnie du 4e royal
Fusiliers et une mitrailleusedu lieutenant Dease défendaient seules ce passage. Lefeu nourri des Anglais, particulièrement puissant, occasionna de nombreuses pertesallemandes.Mais au pont de Nimy, le
lieutenant Dease voulutpoursuivre les tirs malgré sesblessures. Touché à plusieursreprises, il fut évacué au centre de soins du bataillon où ildécéda. Au pont de Ghlin, lesoldat Sydney Godley, surune autre mitrailleuse, tintbon toute la journéemais dutfinir par se rendre après avoirdémonté sa mitrailleuse etjeté les pièces dans le canal.Ces deux soldats sont recevront la Victoria Cross.Vers 14h30, face au poids
des attaques allemandes, lesBritanniques constatent queles positions sont devenuesintenables. Les pertes étaientlourdes et ils battirent en retraite versMons.Nimy avait déjà subi de
nombreuses destructions.Entrés dans le village, les Allemands furieux ont massacré 22 civils et ont brûlé 108maisons.
Un vainqueur tactique et un vainqueur militaire
Qui a remporté la batailledeMons ? Le 24 août, leCorps expéditionnairebritannique se retirait versLe Cateau en directionduquel un grand nombre decivils montois se repliaientaussi dans son sillage pourespérer échapper à l’envahisseur allemand.Une vision qui fut difficile àadmettre pour le maréchalJohn French qui rencontrale général de cavalerie français André Sordet à Avesnesavant d’aller rejoindre sonPC improvisé dans la mairiede Bavay.L’heure de tirer les conclusions de ce entra dans l’Histoire comme la bataille deMons…Tant dans les rangs britanniques qu’Allemands onrevendiqua la victoire ! Enfait, on peut parler d’unsuccès tactique pour lesBritanniques qui ont failliperdre bien plus d’hommesencore alors que les responsables allemands n’hésitaient pas à se considérercomme les vainqueurs…militaires !Une double précision quiapporte quandmême undouble bémol à de doublebulletin de victoire : on n’a
jamais disposé de bilanscomplets de la bataille.Mais on peut quandmêmeestimer que les Britanniques ont perdu quelque4200 hommes. Les Allemands de leur côté ontbrillé par unmutisme total :ni pendant le conflit, niaprès celuici ils ont livré dechiffres de leur côté. Il nefallait pas porter atteinte aumoral des soldats de l’Empire mais les Allemands
s’efforçaient aussi de cacherleurs morts aux populationsoccupées. Certains témoinslocauxmais aussi des rapports allemands ont ainsirapporté que le soir du 23août à Mons, des fourgonsfermés venaient récupérerles corps des militairesallemands pour les ramenerà l’arrière du front.A la décharge des uns et desautres, il faut dire qu’on sesituait encore au tout début
du conflit et les Hauts commandements ont certainement été effarés par lestémoignages sur les combats. Pas évident à accepterpour Lord Kitchener, l’alorsencore frais émouluministre de la Guerre qui avaitplaidé pour que l’on fasse lemoins possible couler dusang britannique.Selon Yves Bourdon, lespertes allemandes pouvaient être estimées à 7500hommes.On conclura cependant engénéral avec le spécialiste dela bataille que “le bilan deces deux jours de combatétait lourd”.Mais d’y apporter quandmême un correctif : dans lespertes subies par les Britanniques il n’y avait pas seulement les victimes, les blessés et les disparus maiségalement les prisonniers.Par contre, le Corps expéditionnaire britannique neput guère faire de prisonniers, ayant euxmêmes dûsubir des assauts répétésavant de se replier. Lesprisonniers allemands nefurent dès lors pas emmenés dans la retraite maisabandonnés à la garde deleurs blessés.
hBritanniques comme Allemands estimèrent l’avoir emporté à Mons.
REPO
RTER
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12-13 La Grande guerre à hauteur d’homme
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
Après trois jours de combats? les Allemands entrent dans Mons et paradent devant l’hôtel de ville.
©VILLEDE
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Aux abords de Mons, Nimy a particulièrement souffert des destructions de bâtiments civils.
F
Sur la Grand’ Place deMons, les Allemands défilent au son des fi-fres et des tambours.
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Avant l’arrivée des Allemands, les autorités avaient réquisi-tionné les automobiles.
©VILLEDE
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l Memorial Museum
Mémoire civile,mémoire militaire
nMons aune grandeplacedans lecœur des Britanniques depuis laGrandeGuerremais ces pages glorieuses sont indissociablesd’autres grands chapitres écritsdans ce qui fut de tout temps uneplace forte militaire. Une cité quicompta plus de 20 casernes, descasemates, un manège et dont lebeffroi ne fut pas ici synonyme delibertés communalesmais de tourde guet ! Combien savent qu’en1691 Louis XIV a assiégé la ville ?Ou qu’au XVIIIe siècle, un hommesur cinq y avait un lien avec la viemilitaire ?Le Mons Memorial Museum qui
ouvrira ses portes en 2015 pourl’année culturelle européenne sefocalisera sur ces dimensions. Ils’installera dans l’ancienne Machine à eau le long du boulevardDolez dans un beau bâtiment debriques, d’acier et de verre, construit par l’architecte montois Joseph Hubert en 18701871 pouralimenter le réseau d’eau potablede la ville.Le nouvel espace invitera à s’in
terroger sur les réalités des phénomènes guerriers. Avec une expositionpermanentequi confrontera le public aux événements dumonde à partir de l’histoire singulière de Mons. À travers le destind’hommes et de femmes qui ontpu témoigner des événements, duvécu quotidien des soldats et descivils en période de guerre.
12-13 La Grande guerre à hauteur d’homme
Réflexion
n La réflexion fondamentale surles rapports entre population civile et militaire prendra corpsdans un parcours conduisant levisiteur du Moyen Âge, en passant par l’Ancien Régime, jusqu’aux deux guerres mondiales.Avec en sus une salle d’exposition temporaire qui proposeraun focus sur un sujet d’histoiremilitaire.Les collections revivront tout
en marquant une rupture parune scénographie radicalementdifférente qui réponde aux attentes contemporaines. Lemuséed’Histoire fera dès lors aussi appel aux nouvelles technologies.
5000 objets
n On y mettra en exergue unesélection des quelque 5000 objets des collections d’histoiremilitaire de la ville. Un premierlieu muséal du genre avait étécréé en1930. Parmi ces “trésors”épinglons la plus belle collectionde piècesmilitaires britanniquessur le continent dont 7 tambours de la bataille d’août 1914.
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
l Analyse
Un cas magistralde désinformation
N A Mons, cent après, la légende des anges continue à turlupiner les esprits.Guillaume Blondeau, le conservateur duMons Memorial Museum et CorentinRousman, l’archiviste de la ville deMons se sont intéressés eux aussi à la légende des anges et à la manière dont lesautorités britanniques l’ont laissé se développer. Lors d’une conférence commune donnée en avril 2012, CorentinRousman a constaté que “non seulementles autorités britanniques n’ont jamais réfuté la légende alors qu’elles auraient puagir au niveau de la censure mais toutlaisse penser qu’elles ont secrètement encouragé sa propagation”. Et d’en déduirequ’“on peut donc la considérer comme unexemple magistral et durable de désinformation et de propagande”.
D’autres rumeurs invraisemblables serépandirent encore : les deux historiensévoquent ainsi, celle, très tenace autourde l’arrivée des renforts russes en Angleterre : beaucoup de Londoniens crurent dur comme fer l’assertion selon laquelle ils étaient arrivés avec de la neigecollée à leurs bottes. Or on était en pleinmois d’août…
l Arthur Machen
Un écrivain fantastique
Arthur Machen, à la base de la légende des Anges de Mons n’avait repiqué au journalisme en 1914 que parce qu’il avait quelques problèmesfinanciers après son second mariage. Auparavant, ce fils d’un prêtre anglican qui avait raté l’examen d’entrée en médecine s’était lancé dansune carrière d’écrivain fantastique qui avait démarré par une approcheassez mystique. Dans cet environnement de ce qu’on appelait “l’horreurgothique” il avait été attiré vers l’alchimie et l’occultisme. En dehors de“The Bowmen” il n’avait pas vraiment réussi à percer mais n’en reste pasmoins considéré comme un écrivain phare du renouveau de la littérature d’horreur à l’époque victorienne, à l’instar de Robert Louis Stevenson ou Bram Stoker.
23-24 AOUT l Légende des anges
Un coup de pouce du Ciel ?h Des archers ailésauraient aidé lesBritanniques.
n Notre monde hyperrationalisteveut expliquer très vite l’inexplicable.Il y a un siècle, même après le triomphe du scientisme et du positivisme,la porte était toujours entreouverte àl’une ou l’autre intervention de forcessupérieures. Comment, par exemple,expliquer que l’armée britannique aitpu organiser sa retraite à Mons alorsqu’elle était dans une situation désespérée ?
La légende veut que la nuit du23 août 1914, des figures ailées, lumineuses, seraient apparues dans le cielmontois afin d’aider les troupes britanniques. Ces anges auraient arrêtél’avancée allemande et donné uncoup de pouce décisif aux Anglaispour organiser leur retraite.
Il était moins une : les 300 membresde la 8e Brigade de la BEF étaient encerclés et n’avaient guère le choixqu’entre l’anéantissement ou la reddition. Et pourtant, les Britanniquesparvinrent à se replier.
Une explication surnaturelle à balayer du revers de la main ? Il s’impose
en tout cas de comprendre commentla légende a surgi.
Ses origines, ses fondements, sontmultiples. En temps de guerre bienplus que de paix, on en appelle souvent au Créateur quand ça tournemal. Et cela dans les deux camps, bienentendu.
D’une façon plus sociologique, l’irruptionrécurrente de la mort etle stress continu nourrissent des rumeurs quideviennent de plus enplus extraordinaires aufil de leur diffusion.D’autant plus lorsque,comme à Mons en août14, les informations sonttrès rares et ne circulentqu’au comptegouttes.
Mons n’aurait pas étéla seule ville “privilégiée” : en différents endroits du front, des combattants auraient bénéficié d’un appui surnaturel. Ici, on évoque despersonnages religieux comme leChrist ou Marie. Là, des personnageslégendaires ou des héros nationaux :SaintGeorges, Jeanne d’Arc, etc. Sipour les premiers, on peut faire unlien avec une recherche de spiritualité, les seconds renvoient à un in
conscient collectif qui se doit de légitimer la guerre.
Un facteur qui peut être avancé,dans le cas des anges de Mons, aprèsl’intervention d’Arthur Machen, journaliste et écrivain fantastique gallois.
Dans le “London Evening News” du29 septembre 1914, ilavait publié une nouvelle sous le titre “TheBowmen” (les Archers)où il racontait qu’un soldat britannique avait invoqué SaintGeorgesface à la situation délicate de la bataille. Lesaint serait venu à la rescousse de la BEF avec desarchers ailés quin’étaient autres que lesfantômes des combattants de la batailled’Azincourt du 25 octobre 1415 où les troupesdu roi d’Angleterre
Henri V avaient pris le dessus sur lachevalerie française. Précision : Azincourt n’est situé qu’à une bonne centaine de kilomètres de Mons.
Toujours estil que le saint patron del’armée britannique bloqua l’arméeallemande. La légende était née etcomme on le lira cidessous ne pouvait plus être arrêtée.
Des anges tombés à pic pour relancer l’effort de guerre
Les archers ailés d’Arthur Machenavaient donc miraculeusementsauvé les soldats britanniques. Lejournaliste et écrivain gallois nemanquait pas de talent pour rendrevraisemblable ce qui était de lafiction. L’auteur eut toutefois beaupréciser après la parution de sanouvelle dans le “London EveningNews” qu’il avait voulu par ce textefantastique soutenir le moral de sescompatriotes, rien n’y fit.En août 1915, “The Bowmen” parutsous forme de livre et, là encore,Machen répéta dans sa préface qu’ilne fallait pas prendre son récit pourparole d’évangile. Mais la fictions’était muée en légende.Entretemps, elle fut nourrie par lestémoignages de soldats qui avaientvécu la Grande Retraite. Commetoujours dans ces caslà, les interprétations furent diverses. Les angesémanaient d’un nuage lumineux,étaient ici des cavaliers là des chevaliers ailés, etc.L’Eglise s’était aussi mêlée au débaten diffusant largement ce qui étaitsans conteste, à ses yeux, une intervention divine.
La légende devint un phénomène desociété, repris par des artistes et descompositeurs.Facteur non négligeable : l’appui dela presse anglicane qui fut à la basede nombreuses réimpressions dulivre de Machen.Autre élément qui a renforcé lalégende : outreManche, on avait faitgrand cas du témoignage de PhylisCampbell, une infirmière qui était
en poste aux abords du champ debataille.Elle prétendit en effet avoir soignédes soldats qui avaient vu les Angeset avait publié un article dans “TheOccult Review”, dont certainesrevues paroissiales reprirent lathématique qui fut dès lors aussi aucoeur de bien des sermons.Suivit ensuite une noria de livresprétendant fournir la preuve de leur
existence.Très vite pourtant, une enquête de laSociety for Psychical Research montra qu’il n’y avait pas de témoinsdirects. Pour cette institution, toutcela n’était que le fruit de rumeurssans l’ombre d’une source sérieuse.Pourquoi dès lors, les convictionsrestèrentelles si fortes ?En pleine guerre, on n’osa pas démentir la présence surnaturelle carelle apportait soidisant la preuveque Dieu avait bel et bien choisi soncamp.Étonnamment, dans les années 60,un historien britannique tint encorepour fiable l’observation.Il faut dire que ce fut le seul faitsurnaturel de la Grande Guerreadmis par les autorités supérieuresbritanniques. Sans cependant jamaisle dire publiquement.A l’évidence, la légende des Anges deMons a permis de “doper” les sentiments patriotiques. C’était pour ainsidire un signe qui ne devait pluslaisser le moindre doute sur l’issuede la guerre. Et, partant, le nombrede volontaires augmentait et ilsavaient le soutien des civils.
h Les autorités britanniques ne se prononcèrent jamais car ils renforcèrent le patriotisme
14-15 La Grande guerre à hauteur d’homme
1923MONUMENTCinq ans après la fin dela guerre, le maréchalFrench avait inauguréunmonument surmonté d’une croixceltique rendant hommage au Royal IrishRegiment dont leshommes avaient ralentil’avance allemande à lafin août en 1914.
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
D.R.
Probablement née de l’imagination du journaliste et écrivain anglais ArthurMachen, la légende des archers ailés a inspiré de nombreuxartistes. Elle galvanisa le moral de troupes qui se rendaient compte que le conflit durerait bien plus longtemps que prévu.
P
l Ombres et lumières
L’art de lamanipulation
n La nouvelle génération d’historiensmontois l’a constaté : le flouentre la rumeur et l’informationvéridique n’a jamais été innocentdans le chef des autorités britanniques. Pour Guillaume Blondeau et Corentin Rousman “la légende des Anges et la rumeur del’arrivée des soldats russes sur lefront ouest furent bénéfiques à lacause alliée”. Aussi les autoritéslaissèrentelles l’information sediffuser alors que l’organe decensure aurait pu l’arrêter.
14-15 La Grande guerre à hauteur d’homme
De là à parlerde coïncidence ?n Cela impliquerait le Renseignement britannique dans lapropagation du mythe.“L’ouvrage de Machen peut avoireu un rôle dans la création dumythe ultérieur mais il semble probable qu’il fut assisté de façon constante par l’Intelligence britannique. Si cela est correct, les Anges deMons peuvent être considéréscomme une pièce intéressante del’histoire sociale et comme unexemple magistral de désinformation et de propagande”, disent leshistoriensmontois.Après la guerre, on sedemanda
si les visions n’avaient pas étédes hallucinations de soldatsépuisés physiquement et mentalement. Ce qui est certain,c’est que le gouvernement britannique devait agir contre cedécouragement alors que laguerre s’enlisait. Il ne contestadonc pas la légende.
Une usine de cadavresn Les historiens s’interrogent surle rôle du général de brigade JohnCharteris. Officier du renseignement, il était présent lors de la retraite de Mons. Si on n’a pas puconfirmer qu’il était dans le couppour la rumeur de l’arrivée destroupes russes sur le front ouest,Charteris a bel et bien jeté les bases d’une autre légende : celle del’usine de cadavres où les Allemands recyclaient les corps dessoldats morts pour faire des munitions ou des aliments pour animaux. La légende fut démentieen 1925. Charteris s’en était alorsexpliqué: afin d’amener la Chineà se ranger aux côtés des Alliés,l’Intelligence britannique l’auraitinventée. Connaissant cette implication, il paraît évident au duode chercheurs montois qu’il ajoué un rôle dans l’expansion del’apparition des Anges. Il auraitmême rédigé l’histoire dans unelettre à son épouse.Mais ce documentn’a pas été retrouvédans lesplus de 1200 pièces adressées àcelleci.
© S.A. IPM 2014. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
l Analyse
Un cas magistralde désinformation
N A Mons, cent après, la légende des anges continue à turlupiner les esprits.Guillaume Blondeau, le conservateur duMons Memorial Museum et CorentinRousman, l’archiviste de la ville deMons se sont intéressés eux aussi à la légende des anges et à la manière dont lesautorités britanniques l’ont laissé se développer. Lors d’une conférence commune donnée en avril 2012, CorentinRousman a constaté que “non seulementles autorités britanniques n’ont jamais réfuté la légende alors qu’elles auraient puagir au niveau de la censure mais toutlaisse penser qu’elles ont secrètement encouragé sa propagation”. Et d’en déduirequ’“on peut donc la considérer comme unexemple magistral et durable de désinformation et de propagande”.
D’autres rumeurs invraisemblables serépandirent encore : les deux historiensévoquent ainsi, celle, très tenace autourde l’arrivée des renforts russes en Angleterre : beaucoup de Londoniens crurent dur comme fer l’assertion selon laquelle ils étaient arrivés avec de la neigecollée à leurs bottes. Or on était en pleinmois d’août…
l Arthur Machen
Un écrivain fantastique
Arthur Machen, à la base de la légende des Anges de Mons n’avait repiqué au journalisme en 1914 que parce qu’il avait quelques problèmesfinanciers après son second mariage. Auparavant, ce fils d’un prêtre anglican qui avait raté l’examen d’entrée en médecine s’était lancé dansune carrière d’écrivain fantastique qui avait démarré par une approcheassez mystique. Dans cet environnement de ce qu’on appelait “l’horreurgothique” il avait été attiré vers l’alchimie et l’occultisme. En dehors de“The Bowmen” il n’avait pas vraiment réussi à percer mais n’en reste pasmoins considéré comme un écrivain phare du renouveau de la littérature d’horreur à l’époque victorienne, à l’instar de Robert Louis Stevenson ou Bram Stoker.
23-24 AOUT l Légende des anges
Un coup de pouce du Ciel ?h Des archers ailésauraient aidé lesBritanniques.
n Notre monde hyperrationalisteveut expliquer très vite l’inexplicable.Il y a un siècle, même après le triomphe du scientisme et du positivisme,la porte était toujours entreouverte àl’une ou l’autre intervention de forcessupérieures. Comment, par exemple,expliquer que l’armée britannique aitpu organiser sa retraite à Mons alorsqu’elle était dans une situation désespérée ?
La légende veut que la nuit du23 août 1914, des figures ailées, lumineuses, seraient apparues dans le cielmontois afin d’aider les troupes britanniques. Ces anges auraient arrêtél’avancée allemande et donné uncoup de pouce décisif aux Anglaispour organiser leur retraite.
Il était moins une : les 300 membresde la 8e Brigade de la BEF étaient encerclés et n’avaient guère le choixqu’entre l’anéantissement ou la reddition. Et pourtant, les Britanniquesparvinrent à se replier.
Une explication surnaturelle à balayer du revers de la main ? Il s’impose
en tout cas de comprendre commentla légende a surgi.
Ses origines, ses fondements, sontmultiples. En temps de guerre bienplus que de paix, on en appelle souvent au Créateur quand ça tournemal. Et cela dans les deux camps, bienentendu.
D’une façon plus sociologique, l’irruptionrécurrente de la mort etle stress continu nourrissent des rumeurs quideviennent de plus enplus extraordinaires aufil de leur diffusion.D’autant plus lorsque,comme à Mons en août14, les informations sonttrès rares et ne circulentqu’au comptegouttes.
Mons n’aurait pas étéla seule ville “privilégiée” : en différents endroits du front, des combattants auraient bénéficié d’un appui surnaturel. Ici, on évoque despersonnages religieux comme leChrist ou Marie. Là, des personnageslégendaires ou des héros nationaux :SaintGeorges, Jeanne d’Arc, etc. Sipour les premiers, on peut faire unlien avec une recherche de spiritualité, les seconds renvoient à un in
conscient collectif qui se doit de légitimer la guerre.
Un facteur qui peut être avancé,dans le cas des anges de Mons, aprèsl’intervention d’Arthur Machen, journaliste et écrivain fantastique gallois.
Dans le “London Evening News” du29 septembre 1914, ilavait publié une nouvelle sous le titre “TheBowmen” (les Archers)où il racontait qu’un soldat britannique avait invoqué SaintGeorgesface à la situation délicate de la bataille. Lesaint serait venu à la rescousse de la BEF avec desarchers ailés quin’étaient autres que lesfantômes des combattants de la batailled’Azincourt du 25 octobre 1415 où les troupesdu roi d’Angleterre
Henri V avaient pris le dessus sur lachevalerie française. Précision : Azincourt n’est situé qu’à une bonne centaine de kilomètres de Mons.
Toujours estil que le saint patron del’armée britannique bloqua l’arméeallemande. La légende était née etcomme on le lira cidessous ne pouvait plus être arrêtée.
Des anges tombés à pic pour relancer l’effort de guerre
Les archers ailés d’Arthur Machenavaient donc miraculeusementsauvé les soldats britanniques. Lejournaliste et écrivain gallois nemanquait pas de talent pour rendrevraisemblable ce qui était de lafiction. L’auteur eut toutefois beaupréciser après la parution de sanouvelle dans le “London EveningNews” qu’il avait voulu par ce textefantastique soutenir le moral de sescompatriotes, rien n’y fit.En août 1915, “The Bowmen” parutsous forme de livre et, là encore,Machen répéta dans sa préface qu’ilne fallait pas prendre son récit pourparole d’évangile. Mais la fictions’était muée en légende.Entretemps, elle fut nourrie par lestémoignages de soldats qui avaientvécu la Grande Retraite. Commetoujours dans ces caslà, les interprétations furent diverses. Les angesémanaient d’un nuage lumineux,étaient ici des cavaliers là des chevaliers ailés, etc.L’Eglise s’était aussi mêlée au débaten diffusant largement ce qui étaitsans conteste, à ses yeux, une intervention divine.
La légende devint un phénomène desociété, repris par des artistes et descompositeurs.Facteur non négligeable : l’appui dela presse anglicane qui fut à la basede nombreuses réimpressions dulivre de Machen.Autre élément qui a renforcé lalégende : outreManche, on avait faitgrand cas du témoignage de PhylisCampbell, une infirmière qui était
en poste aux abords du champ debataille.Elle prétendit en effet avoir soignédes soldats qui avaient vu les Angeset avait publié un article dans “TheOccult Review”, dont certainesrevues paroissiales reprirent lathématique qui fut dès lors aussi aucoeur de bien des sermons.Suivit ensuite une noria de livresprétendant fournir la preuve de leur
existence.Très vite pourtant, une enquête de laSociety for Psychical Research montra qu’il n’y avait pas de témoinsdirects. Pour cette institution, toutcela n’était que le fruit de rumeurssans l’ombre d’une source sérieuse.Pourquoi dès lors, les convictionsrestèrentelles si fortes ?En pleine guerre, on n’osa pas démentir la présence surnaturelle carelle apportait soidisant la preuveque Dieu avait bel et bien choisi soncamp.Étonnamment, dans les années 60,un historien britannique tint encorepour fiable l’observation.Il faut dire que ce fut le seul faitsurnaturel de la Grande Guerreadmis par les autorités supérieuresbritanniques. Sans cependant jamaisle dire publiquement.A l’évidence, la légende des Anges deMons a permis de “doper” les sentiments patriotiques. C’était pour ainsidire un signe qui ne devait pluslaisser le moindre doute sur l’issuede la guerre. Et, partant, le nombrede volontaires augmentait et ilsavaient le soutien des civils.
h Les autorités britanniques ne se prononcèrent jamais car ils renforcèrent le patriotisme
14-15 La Grande guerre à hauteur d’homme
1923MONUMENTCinq ans après la fin dela guerre, le maréchalFrench avait inauguréunmonument surmonté d’une croixceltique rendant hommage au Royal IrishRegiment dont leshommes avaient ralentil’avance allemande à lafin août en 1914.
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Probablement née de l’imagination du journaliste et écrivain anglais ArthurMachen, la légende des archers ailés a inspiré de nombreuxartistes. Elle galvanisa le moral de troupes qui se rendaient compte que le conflit durerait bien plus longtemps que prévu.
P
l Ombres et lumières
L’art de lamanipulation
n La nouvelle génération d’historiensmontois l’a constaté : le flouentre la rumeur et l’informationvéridique n’a jamais été innocentdans le chef des autorités britanniques. Pour Guillaume Blondeau et Corentin Rousman “la légende des Anges et la rumeur del’arrivée des soldats russes sur lefront ouest furent bénéfiques à lacause alliée”. Aussi les autoritéslaissèrentelles l’information sediffuser alors que l’organe decensure aurait pu l’arrêter.
14-15 La Grande guerre à hauteur d’homme
De là à parlerde coïncidence ?n Cela impliquerait le Renseignement britannique dans lapropagation du mythe.“L’ouvrage de Machen peut avoireu un rôle dans la création dumythe ultérieur mais il semble probable qu’il fut assisté de façon constante par l’Intelligence britannique. Si cela est correct, les Anges deMons peuvent être considéréscomme une pièce intéressante del’histoire sociale et comme unexemple magistral de désinformation et de propagande”, disent leshistoriensmontois.Après la guerre, on sedemanda
si les visions n’avaient pas étédes hallucinations de soldatsépuisés physiquement et mentalement. Ce qui est certain,c’est que le gouvernement britannique devait agir contre cedécouragement alors que laguerre s’enlisait. Il ne contestadonc pas la légende.
Une usine de cadavresn Les historiens s’interrogent surle rôle du général de brigade JohnCharteris. Officier du renseignement, il était présent lors de la retraite de Mons. Si on n’a pas puconfirmer qu’il était dans le couppour la rumeur de l’arrivée destroupes russes sur le front ouest,Charteris a bel et bien jeté les bases d’une autre légende : celle del’usine de cadavres où les Allemands recyclaient les corps dessoldats morts pour faire des munitions ou des aliments pour animaux. La légende fut démentieen 1925. Charteris s’en était alorsexpliqué: afin d’amener la Chineà se ranger aux côtés des Alliés,l’Intelligence britannique l’auraitinventée. Connaissant cette implication, il paraît évident au duode chercheurs montois qu’il ajoué un rôle dans l’expansion del’apparition des Anges. Il auraitmême rédigé l’histoire dans unelettre à son épouse.Mais ce documentn’a pas été retrouvédans lesplus de 1200 pièces adressées àcelleci.
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MÉMOIRE | PROGRÈS | CITOYENNETÉProgramme en Province de Liège : expos, commémorations, activités culturelles et touristiques, dossier pédagogique…Participation citoyenne au cœur de Liège les 2, 3 et 4 août.
Un programme riche et varié, à découvrir sur :
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