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Page 1: Solidarité 2/2011

Numéro 2, mai 2011

Le magazine de

POINT FORTGlobaliserla solidarité

CHINEExploitation dansl’industrie des bijoux

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2 ÉDITORIAL 3

Editeur: Solidar Suisse, Quellenstrasse 31, Postfach 2228, 8031 Zürich Tél. 021 601 21 61, E-mail: [email protected], www.solidar.ch CP 10-14739-9 Lausanne. Membre du réseau européen SolidarRédaction: Katja Schurter (rédactrice responsable), Rosanna Clarelli, Christian Engeli, Alexandre Mariéthoz, Cyrill Rogger

Layout: Atelier Binkert, www.atelierbinkert.chTraduction:Irene Bisang, Ursula Gaillard, Milena Hrdina, Walter RoselliCorrection: Marianne Enckell, Jeannine HorniImpression et expédition: Unionsdruckerei/subito AG, Platz 8, 8201 SchaffhausenParaît quatre fois par an. Tirage 37 000 ex.

Le prix de l’abonnement est compris dans la cotisation (membres individuels 50.– par an minimum, organisations 250.– minimum). Imprimé sur papier recyclé

Page de titre: Les bijoux vendus en Suisse sont fabriqués dans des conditions inhumaines en Chine. Dernière page: Xueying Jiang montre une photo de son mari mort de la silicose (voir page 4). Photos: Ming Pao

ACTUALITÉSolidar s’engage contre l’exploitation en Chine 4 POINT FORTGlobaliser la solidarité pour répondre à une économie mondialisée 6

En quoi Solidar contribue à une globalisation par le bas 8

Des partenariats pour la solidarité: échos en provenance du Sud, de l’Est et du Nord 10

Rating Solidar: les communes doivent assumer une responsabilité globale 13 CHRONIQUE 5 BRÈVES 12

JEU & BAROMÈTRE 14 CULTURELe 1er Mai du Nicaragua au Burkina Faso 15 RÉSEAUNouveaux projets et actualités des OSEO régionales 16 PORTRAITEddie Cottle a lutté pour des conditions de travail décentes lors du dernier Mondial 18

ACTUALITÉ En Chine, Solidar soutient les travailleurs et travailleuses de l’industrie des bijoux dans la défense de leurs droits. 4

CULTURE Comment le 1er Mai est-il célébré dans les pays où Solidar est actif? 15

PORTRAIT Eddie Cottle s’engage pour que le combat en faveur de conditions de travail décentes lors du Mondial de football se poursuive.

18

POINT FORTUn partenariat pour une solidarité globalisée doit se déployer au-delà des frontières: dans les pays du Sud et de l’Est – et en Suisse. 6

IMPRESSUM

L’action de Solidar Suisse

des syndicats et des organisations po-pulaires pour les aider à améliorer leurs conditions de vie.

Dans les pays les plus pauvres d’Afrique et d’Amérique latine, de même que dans les pays émergents comme la Chine et l’Afrique du Sud (voir pages 4 et 18), nous œuvrons pour des conditions de travail plus justes, la démocratie et le res-pect des droits humains. Nous dispen-sons en ou tre une aide humanitaire en cas de catas trophe.

En Europe du Sud-Est aussi, nos pro-grammes visent à améliorer les condi-tions de travail. Dans cette région, nous misons avant tout sur l’instauration d’un véritable partenariat social.

Un développement durable, soit celui qui parvient à éradiquer la pau vreté, l’exploitation et la discrimina tion, n’est possible que si les gens disposent d'un travail et d'un salaire décents, jouissent de leurs droits fondamentaux et parti-cipent démocratiquement aux déci-sions qui les concernent.

L’histoire montre que seuls les princi-paux intéressés sont à même de vaincre la précarité, mais nous pouvons leur ap-porter un précieux soutien. C’est en cela que Solidar Suisse est une partenaire dans le développement: nous nous en-gageons résolument aux côtés des tra-vailleurs et des travailleuses, des per-sonnes au chômage et des sans-terre,

L’éradication de la pauvreté dans le monde passe aussi par un changement d’attitude dans les riches nations indus-trialisées. Par ses campa gnes, Solidar entend infléchir les politiques étrangère et économique de notre pays afin de con-tribuer au respect des droits humains.

Le «Rating Solidar des communes» (voir page 13) va dans ce sens. Grâce à cette évaluation, les communes sont en mesu-re de penser globalement pour agir loca-lement: s’engager dans la politique de développement et n’acheter que des produits équitables. La campagne offre ainsi un appui efficace à notre lutte pour le respect des normes fondamentales du travail dans le monde entier. www.solidar.ch

Chère lectrice, cher lecteur, ABB, Nestlé, Swatch et d’autres entreprises suisses produisent à bon compte en Chine. Lorsque des organisations de défense des droits de la personne humaine, comme notre partenaire Labour Action China (LAC), posent des questions sur les conditions de travail dans les usines locales, les responsables se refusent souvent à tout commentaire.

Solidar Suisse aide la LAC à organiser les travailleuses et les travailleurs en Chine et à défendre leurs droits (voir page 4). La solidarité internationale exige toutefois davantage: «Vous de-vez nous aider pour faire en sorte que produire en Chine ne profite pas seulement aux entreprises suisses, mais aussi à la

main-d’œuvre chinoise», explique Suki Chung, directrice de la LAC. Il nous incombe en fait d’intervenir pour que les droits de la personne humaine et les normes du travail figurent en bonne place dans les accords de libre-échange que la Suisse négocie en ce moment avec la Chine.

Notre collaboration avec la LAC illustre notre notion du déve-loppement, notion qui a évolué depuis la fondation de l’OSEO. Il n’est plus question d’aide, mais de collaboration solidaire avec des partenaires dans les pays émergents et en dévelop-pement. La coopération consiste non seulement à soutenir des projets sur place, mais aussi à promouvoir la justice sociale dans la politique suisse.

Voilà ce que signifie le nouveau nom, Solidar Suisse (voir page 14), que nous nous offrons pour nos 75 ans. Nous vous invitons d’ailleurs cordialement à venir fêter cet anniversaire, le 27 mai à Zurich, en présence de la présidente de la Confédération, Micheline Calmy-Rey, et de la ministre de l’Education du Burki-na Faso, Odile Bonkoungou.

Notre journal «Solidarité» en profite pour évoluer aussi: la mise en page est nouvelle, tout comme la formule du dossier. Le présent numéro est ainsi consacré à la globalisation de la soli-darité. Je vous souhaite une bonne lecture!

Ruth Daellenbach, directrice de Solidar Suisse

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Hans-Jürg FehrPrésident de Solidar Suisse et conseiller national

Solidar défend l’idée que la coopéra-tion doit pouvoir s’appuyer sur une politique étrangère respectant les principes du développement durable. Le Parti socialiste, qui nous soutient, ne cesse de revenir à la charge, au Parlement, pour que les critères so-ciaux et les droits humains soient res-pectés dans les accords écono-miques que la Suisse conclut avec les pays en développement ou émer-gents. Cette action politique de longue haleine a porté ses premiers fruits: la conven tion internationale du cacao comprend un chapitre sur le développement durable: c’est une première. Les Etats signataires s’engagent à «amé lio rer les condi-tions de travail des po pulations tra-vaillant dans le secteur du cacao». La convention contient même des règles pour que le respect des normes fon-damentales de l’Organisation interna-tionale du travail (OIT) soit vraiment garanti; elle franchit donc le pas dé-cisif qui sépare les belles déclarations de principe de leur application. La convention sur le cacao réfute ainsi la position défendue jusqu’ici par le Conseil fédéral, selon laquelle ce sont les pays en développement qui refu-sent ces clauses. Elle définit le mini-mum au-dessous duquel aucun ac-cord commercial ne devrait jamais être conclu. A commencer par l’accord de libre-échange que l’on espère signer avec la Chine. La commission de politique extérieure du Conseil national a chargé le Conseil fédéral de négocier un chapitre consacré au développement durable dans cet ac-cord. C’est encore une petite percée.

CHRONIQUE

Une percée

4 ACTUALITÉ

NI masquE, NI CONTRaT, NI INdEmNIsaTIONNombre des pierres précieuses qui parent les bijoux vendus en Suisse sont travaillées en Chine, dans des conditions désastreuses. Labour Action China aide les ouvrières et les ouvriers à faire valoir leurs droits.Interview: Katja Schurter. Photos: Ming Pao

La Chine affiche certes la plus forte croissance économique, mais elle comp-te aussi le plus grand nombre de pau-vres: 150 millions de personnes, soit 12 pour-cent de la population, vivent avec moins d’un franc par jour. La pauvreté sévissant surtout dans les campagnes, beaucoup d’habitant-e-s partent cher-cher un emploi dans les villes en plein boom. Ils y travaillent le plus souvent dans des conditions déplorables, comme celles que pratique l’industrie de la joaillerie dans la province de Guangdong. Notre partenaire sur place, la Labour Action China (LAC), y soutient depuis 2004 les ouvrières et les ouvriers dans leur lutte. Fin mars, Suki Chung et Hang Tung Chow sont venus en Suisse à l’invitation de Solidar, d’Unia et du Solifonds.

Quels sont les principaux problèmes rencontrés dans l’industrie de la joaillerie?Les risques au poste de travail. Pour se protéger de la poussière, les ouvrières et les ouvriers reçoivent une fois par mois un masque en papier. Ils le lavent, afin de pouvoir le réutiliser. Il n’y pas de ventila-tion dans les ateliers. En deux heures, on est couvert de poussière des pieds à la tête. Les gens doivent en outre travailler à mains nues pour tailler les pierres et les

colorer. Leur santé s’en ressent inévita-blement: silicose (maladie mortelle des poumons), doigts coupés, surdité due au bruit des machines. L’Organisation mon-diale de la santé (OMS) exige que toutes les usines soient inspectées, mais même les chiffres officiels montrent que l’Etat ne parvient à contrôler qu’un pour-cent d’entre elles. Pour les employeurs, le non-respect des prescriptions sur la sé-curité ne porte donc pas à conséquence. La journée de travail compte normale-ment 12 heures, auxquelles s’ajoutent régulièrement des heures supplémen-taires. Plus de 80 % des employé-e-s travaillent sans contrat et les salaires sont très bas.

Que se passe-t-il lorsque quelqu’un développe la silicose?Le plus souvent, la personne en question a déjà été licenciée ou reçoit son congé à l’apparition des premiers symptômes de la maladie. Les malades ignorent qu’ils ont droit à des compensations et retournent chez eux. Sans contrat de tra-vail, il leur est en outre difficile de prouver qu’ils ont travaillé pour l’entreprise, sans parler d’entamer une action en justice. On nous a aussi rapporté que les hôpi-taux du lieu de travail refusent de poser un diagnostic officiel, car ils sont à la

solde de l’employeur. Or un tribunal ne reconnaît pas le diagnostic éta-bli par l’hôpital du lieu d’origine.

Que faudrait-il faire pour améliorer les conditions de travail?Le problème réside dans l’inégalité des rapports de pouvoir entre employeurs et salarié-e-s. Le gouvernement appuie iné-vitablement les employeurs, car il veut stimuler l’économie et doit, pour cela, attirer des investisseurs étrangers. La Chine ne connaît pas la liberté syndicale et le seul syndicat autorisé est l’ACFTU (All China Federation of Trade Unions). Partie intégrante du gouvernement, il sert plutôt à contrôler les travailleurs et les travailleuses, qu’à défendre leurs inté-rêts. Il importe surtout de lever les obsta-cles légaux et institutionnels qui empêchent les ouvrières et les ouvriers de faire valoir leurs droits. Et il faut des mesures de protection dignes de ce nom, qui coûteraient d’ailleurs moins cher que les indemnisations!

Quelle est la stratégie de la LAC?Nous organisons les ouvrières et les ou-vriers, les soutenons quand ils attaquent

leurs employeurs en justice et menons une campagne internationale. La voie des tribunaux est efficace pour faire res-pecter les droits, mais la pression sociale est nécessaire pour que les choses évo-luent. La Chine produit de tout, nombre de sociétés hongkongaises appar-tiennent à l’industrie de la joaillerie et la Suisse compte parmi leurs principaux clients. Nous faisons pression sur ces so ciétés en manifestant devant leur siège. L’une d’entre elles, Lucky Gems, emploie des milliers de personnes en Chine et compte parmi les plus grands exportateurs de pierres semi-précieuses d’Asie.

Grâce à votre campagne, Lucky Gems a été exclue l’an dernier et cette année du Salon mondial de l’horlogerie et de la bijouterie (Baselworld). Comment avez-vous fait?Le succès est venu après cinq années de campagne contre Lucky Gems, menée en parallèle à six procès pour violation de la loi sur la santé au travail (voir page 20).

C’est la première fois qu’une entreprise hongkongaise est exclue d’une foire internationale pour non-respect des normes du travail.Nous avons aussi obtenu une améliora-tion des conditions de travail chez Lucky Gems: ventilation, masques et gants pour les employé-e-s. De plus, on utilise dé-sormais de l’eau lors de la taille des pierres, afin de réduire les émissions de poussière. C’est un grand succès, car la prévention vaut bien mieux que les indemnisations.

Que pouvons-nous faire, ici en Suisse?Vous pouvez faire pression sur les 300 entreprises suisses présentes en Chine et qui ont investi 300 millions de dollars sur place en 2009. Une amélioration des conditions de travail en Chine réduira la concurrence entre travail bon marché chez nous et main-d’œuvre coûteuse en Suisse.

www.lac.org.hk

Hang Tung Chow et Suki Chung , de

Labour Action China, luttent contre les

conditions de travail désastreuses dans l'industrie chinoise

des bijoux.

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PaKIsTaNallEs IsT KaPuTT

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la glObalIsaTION dE la sOlIdaRITéDans un monde à l’économie globalisée, la solidarité doit l’être aussi, afin de mettre un frein à l’exploitation et de promouvoir davantage de justice sociale.Cela n’est possible que si les organisations qui s’engagent pour une société plus juste coopèrent sur le plan international. Com-ment peut se présenter ce partenariat international en faveur du développement durable? À découvrir dans les pages qui suivent!Texte: Zoltan Dòka. Photos: Jürg Gasser (en haut), Alberto Vargas (p. 8), Joachim Merz et Svetlana Dingarac (p. 9)

Au Mozambique, des paysannes voient leur quotidien s'améliorer lorsqu'elles peuvent vendre leurs produits à des prix décents.

POINT FORT 76

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La mondialisation est sur toutes les lèvres depuis le tournant néo-libéral des années quatre-vingt. Le terme s’applique aux mar-chés, au commerce, aux flux de capitaux et aux forces de travail. Sous cet angle, la mon-dialisation produit des effets négatifs dans les pays en développement, mais aussi dans les nations industrialisées.La marginalisation et la précarisation de millions d’individus se sont accélérées sous l’effet de la mondialisation. Les dé-régulations ont provoqué la plus grande crise financière depuis 70 ans, et ce ne sont pas ses acteurs qui en paient le prix.

La spéculation sur les denrées alimen-taires provoque faim et pauvreté. L’exploitation éhontée de l’environne-ment se poursuit à cause de la primauté du rendement. La mondialisation par le haut laisse plus d’un milliard de person-nes dans la pauvreté. L’industrie finan-cière des pays du Nord continue à en-courager la fuite des capitaux des potentats du Sud et prive ainsi de nom-

breux pays des milliards dont ils auraient besoin pour leur propre développement.

La mondialisation par le basMais il y a aussi une mondialisation par le bas, qui n’est pas dictée par les intérêts du pouvoir et de l’argent: quand des pay-san-ne-s et des syndicalistes se mettent ensemble pour agir, quand des organisa-tions de défense des droits humains exi-gent la transparence politique, ou encore quand des travailleuses et des travail-leurs résistent à l’exploitation. Ces exem-ples ont un caractère mondial, car leurs acteurs mettent en place des réseaux par-delà les frontières. L’être humain et ses droits fondamentaux, ainsi que la

POINT FORT 9Ore velit ipsustrud dolobortie et praesecte mincidunt irit praesedIpit ulla amet venim

justice sociale, sont toujours au cœur de leurs actions.

Une coopération d’égal à égalSolidar Suisse est partie prenante de cette mondialisation par le bas. En colla-borant sur le long terme avec des organi-sations partenaires dans les pays du Sud et de l’Est, nous soutenons leur engage-ment quotidien pour un monde solidaire et plus juste. Ce partenariat dépasse lar-gement le financement de leurs projets. Il s’agit d’une action solidaire empreinte de respect mutuel. Il vise l’amélioration des conditions de vie des gens.Le travail des organisations avec qui nous collaborons consiste souvent à for-

mer, à informer, à persévérer dans une action qui ne porte ses fruits que longtemps après, comme chez nous en Suisse, où beaucoup

d’acquis sociaux, obtenus après de longues luttes politiques, doivent tou-jours être défendus avec acharnement.

Notre responsabilitédans les pays du NordDans les campagnes qu’elle mène dans notre pays et en Europe, Solidar Suisse met l’accent sur notre part de responsa-bilité dans la construction d’un monde plus juste et propose des actions concrè-tes. Les parrains de Solidar – les syndi-cats et le Parti socialiste – jouent un rôle important dans ce processus. Avec eux, nous pouvons porter nos préoccupations et nos revendications sur la place pub-lique et sur la scène politique en nous

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appuyant sur une base suffisamment lar-ge. Et au niveau euro péen, le réseau Solidar nous permet de contribuer active-ment à l’articulation d’une politique res-pectueuse de la dignité.Dans les pages qui suivent, des parte-naires de Solidar Suisse montrent, à par-tir de leur propre expérience, pourquoi une solidarité mondiale est absolument nécessaire et ce qu’apporte une coopé-ration avec Solidar.

Au Nicaragua, au Mozambique ou encore en Serbie: Solidar s'engage avec ses organisations partenaires

pour un monde sans violence et sans la moindre exploitation.

La globalisation économique laisse plus d’un milliard de personnes dans la pauvreté.

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POINT FORT 1110 POINT FORT

la ville: désormais, les entreprises impor-tatrices de matériaux de construction venant de pays extra-européens doivent nous fournir un certificat reconnu sur le plan international.Zurich a opté pour le développement durable. Des conditions de travail décen-tes en font partie, car le développement durable a aussi une dimension sociale. Les pouvoirs publics, qui sont des clients importants, ont une influence non négli-geable à cet égard, et celle-ci dépasse largement le cadre local. Merci à Solidar de faire passer le message.

Martin Dahinden Surmonter la pau-vreté est l’objectif central de la coopéra-tion au développement. Pour l’atteindre, il faut que tous les efforts se concentrent sur les gens directement concernés. Mais pour cela, il faut absolument une société civile qui fonctionne. Or, dans bien des pays du Sud, le gouver-nement n’a pas de légitimité démocra-tique. La corruption et la mauvaise ges-tion sont monnaie courante. Des élites s’enrichissent sans vergogne en accapa-rant les richesses. Les pauvres, les grou-pes de population marginalisés, qui for-

Khalid Mahmood Au Pakistan, l’application des programmes du Fonds monétaire international (FMI) a entraîné la suppression des subventions et la pri-vatisation des entreprises d’Etat dès les années quatre-vingt. Ces mesures ont coûté leur poste de travail à deux ou trois millions de travailleurs et travailleuses. Beaucoup ont dû se rabattre sur le secteur informel, où les conditions sont mauvaises et les salaires plus bas. En l’absence d’institutions démocratiques, les droits du travail peinent à être res-pectés. Ainsi, à travail égal, les femmes ga gnent deux fois moins que les hommes et elles ne sont pas libres de travailler à cause de la suprématie masculine. Or elles doivent pouvoir décider de leur vie

ment souvent la majorité, n’en tirent aucun bénéfice. Dans ces conditions, la société civile joue un rôle déterminant, c’est un espace pu-blic où les gens s’organisent et font va loir leurs préoccupations. En bien des en-droits du monde, c’est une force de pro-position pour un changement politique et de société, comme le montrent et le confirment les événements récents dans le monde arabe.Les ONG privées, Solidar Suisse ainsi que la DDC, reconnaissent l’importance de la société civile; cette reconnaissance se fonde sur notre propre expérience historique et la manière dont nous avons instauré une démocratie participative.

Jelena Mijovic Le nombre de pauvres en Serbie augmente à vue d’œil et risque d’y étouffer tout optimisme. Pour lutter contre l’augmentation du chômage et atténuer les effets de la grave crise éco-nomique qui perdure depuis près de vingt ans, il ne reste qu’un outil: le dialogue social favorisant le partenariat social. Le dialogue social conduit des organisa-tions ayant des intérêts antagonistes à se parler, il réunit employeurs, syndicats

et s’organiser. La démocratisation de la société est un des grands buts visés par la Labour Education Foundation (LEF). Notre étroite collaboration avec Solidar après les inondations qui ont dévasté le pays a montré l’importance cruciale des réseaux: des ONG, des partis politiques et des syndicats se sont coordonnés pour aider les victimes. Nos bénévoles y ont largement contribué.Puisque les capitalistes mondialisent leurs activités en fonction de leurs inté-rêts, les travailleuses et travailleurs doi-vent s’organiser à l’échelle mondiale. Ils vivent des situations semblables dans bien des pays du Sud: la dérégulation a modifié les lois du travail et restreint leurs droits. Dans les pays du Nord, les

et autorités politiques autour d’une même table. Les conventions de partenariat social sur des problèmes quotidiens peu-vent favoriser une croissance écono-mique durable.Grâce aux programmes de Solidar en Serbie, nos partenaires prennent cons-cience de l’importance du dialogue so cial. Les formations continues qui leur sont proposées permettent de négocier et de faire valoir leurs préoccupations lorsqu’ils se retrouvent en face de leurs patrons. Car le chômage et la pauvreté qui sévissent en Serbie ne peuvent être résolus qu’en conjuguant les efforts de toutes les parties.Très récemment, Solidar a obtenu des ré-sultats concrets: la première convention de branche dans la construction a été si gnée en décembre 2010, et celle du secteur agricole et de l’industrie alimen-taire en février 2011.

Yolanda Areas Blass et Jose Angel Bermudez Nous vivons dans un monde globalisé, avec un système économique mondialisé. De ce fait, nous devons étendre au monde entier nos droits, notre solidarité, notre espoir de vivre dans la di-gnité. Il s’agit de mondialiser la lutte du plus grand nombre pour un monde sans violence et sans exploitation. Les syndicats sont des acteurs impor-tants de ce combat. Au Nicaragua, Soli-dar encourage l’organisation syndicale des travailleuses et des travailleurs. Grâce à son soutien, l’écart entre les pau-vres et les riches s’est amoindri. Nous cherchons à promouvoir une plus grande égalité sociale, une société qui cherche le bien-être des gens. C’est aussi le but des syndicats suisses, et c’est sur ce point que nous nous rencontrons. Si nous tra-vaillons ensemble de manière solidaire sur le plan international, ce n’est pas par charité. Nous sommes des partenaires égaux qui s’épaulent pour résoudre leurs problèmes et lutter pour des objectifs communs. Seule la solidarité permettra au monde du travail de faire face à la crise mondiale du capitalisme.

sala rié-e-s ont perdu leur emploi, parce que les entreprises sont parties chercher une main-d’œuvre meilleur marché au Sud. Nous avons beaucoup à apprendre les uns des autres. Si nous luttons en-semble pour les mêmes droits, les entre-prises réfléchiront à deux fois avant de déloca liser leur production au Pakistan, et les travailleuses et travailleurs en Suisse ne perdront pas leurs emplois.

Ruth Genner Vivement que cela se sache: la campagne lancée par Solidar a encouragé la ville de Zurich à promouvoir des conditions de travail décentes. Parce qu’elle nous était directement adressée, et parce qu’elle a suscité un débat dans la population, au Parlement et dans les médias, ce qui a renforcé la pression et nous a poussés à aller de l’avant.En 2007, la ville de Zurich s’est mise d’accord sur des critères d’adjudication et de soumission durables. Son modèle comportait toutefois des lacunes dans le domaine social. Le Conseil de Ville l’a complété l’année passée par des directi-ves sociales s’appliquant notamment aux partenaires ayant signé un contrat avec

Martin Dahinden, directeur de la DDC

La société civile – une force de proposition et de changement

Jelena Mijovic, représentante de Solidar Suisse en Serbie

L’indis- pensable partenariat socialRuth Genner, respon-

sable du département des Travaux publics et de l’élimination des déchets de la Ville de Zurich

La campagne Solidar est efficace

LE DESSIN

de Anna Sommer

Khalid Mahmood, Labour Education Foundation, Pakistan

Mêmes droits du travail dans le monde entier

Des voix du Sud, de l’Est et du Nord pour dire l’importance et les contours d’une solidarité mondiale.

l'égalITé dEs dROITs PROFITE au NORd COmmE au sud

Mondialisons l’espoir

Yolanda Areas Blass et Jose Angel Bermudez, syndicalistes nicaraguayens

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Fair Games – Fair Playau BrésilEn avril 2011, l’Internationale des travail-leurs du bâtiment et du bois (IBB) a lancé sa campagne pour des conditions de tra-vail équitables en vue du Mondial de foot-ball 2014 au Brésil. À Rio de Janeiro, des représentant-e-s syndicaux et d’ONG ont demandé à la FIFA et au gouverne-ment brésilien d’instaurer un dialogue quant aux moyens d’assurer des condi-tions de travail dignes lors de la prépara-tion du Mondial. L’IBB et ses syndicats membres au Brésil se battent pour éten-dre les conventions collectives de travail aux entreprises de sous-traitance, pour des salaires équitables, la liberté d’organisation syndicale, la semaine de 40 heures dans le bâtiment, ainsi que pour créer de nouvelles places de travail durables et mettre en place une forma-tion continue professionnelle.La campagne au Brésil se fonde sur les succès obtenus en Afrique du Sud (voir page 18). Ces prochaines années, le Brésil investira quelque 20 milliards de francs dans des infrastructures (stades, transports), une somme quatre fois su-périeure à celle investie en Afrique du Sud. S’y ajoutent cinq milliards de francs pour le tourisme. Comme en Afrique du Sud, il faudra une collaboration étroite entre les syndicats et les ONG afin d’instaurer des conditions de travail équi-tables. La lutte ne fait que commencer. www.solidar.ch/news

Silver Rose pour l’organisation partenaire de Solidar Suisse Cette année, la Silver Rose, la distinc-tion du réseau européen Solidar qui ré-compense une solidarité particulière-ment méritante, a été décernée à trois lauréats.Labour Education Foundation (LEF), avec laquelle Solidar Suisse collabore depuis les inondations survenues au Pakistan (voir page 9), a été honorée

pour son engagement en faveur de conditions de travail équitables. LEF contribue à promouvoir le travail décent au Pakistan, par des campagnes et des formations, ainsi qu’en renforçant les syndicats.Un syndicat lituanien actif dans le do-maine de la santé et Robert Badinter, qui s’était engagé pour faire abolir la peine de mort en France, ont aussi été honorés.www.solidar.org

Fin de l’aide d’urgence à SumatraSolidar a dispensé une aide d’urgence après le tremblement de terre qui a ra-vagé l’ouest de Sumatra en septembre 2009, causant plus de 1000 morts (cf. Solidarité 1/10). Plus de 3000 person-nes ont trouvé refuge dans des loge-ments temporaires, en attendant que leurs maisons soient rebâties. Nous avons soutenu la reconstruction de quelque 200 000 maisons qui avaient été détruites, en formant 113 artisans aux méthodes de la construction anti-sismique. De plus, nous avons construit des toilettes communautaires pour 992 ménages, en collaboration avec la Croix-Rouge suisse, afin d’améliorer durablement la situation sanitaire de la

population. En octobre 2010, Solidar a également aidé les victimes du tsunami aux îles Mentawaï en distribuant no-tamment des denrées alimentaires et des couvertures (cf. Solidarité 1/11).En mai, une fois la reconstruction termi-née, Solidar a fermé son bureau à Pa-dang et a ainsi achevé ses activités en Indonésie.

Y a-t-il matière à célébrer?À l’occasion des 75 ans de Solidar Suisse, Micheline Calmy-Rey, présidente de la Confédération, et Odile Bonkoungou, ministre de l’Enseignement de Base et

de l’Alphabétisation du Burkina Faso, débattront des succès et des limites de la coopération au développement.Christian Levrat, président du PSS, Paul Rechsteiner, président de l’USS, et Joe Weidenholzer, président du réseau euro-péen Solidar, salueront ensuite les 75 ans de Solidar Suisse. Une exposition pré sentera le travail de Solidar Suisse, en présence des coordinateurs et coor-dinatrices de nos bureaux à l’étranger. Un apéritif et un concert de Tremozioni agrémenteront la soirée.Vendredi 27 mai, dès 17h30, au Volks-haus de Zurich. www.solidar.ch/agenda

BRÈVES 13

uN RaTINg POuR davaNTagE dE jusTICE sOCIalESolidar Suisse évalue les communes suisses pour les sensibiliser aux responsabilités qu’elles portent à l’échelle mondiale. Texte: Cédric Wermuth

POINT FORT

Collaborant avec des partenaires locaux, Solidar Suisse mène cinquante projets dans douze pays afin d’y améliorer les conditions de vie. Le travail sur place n’est toutefois que l’un des aspects de la co opération. Pour instaurer une évolu tion durable dans les pays en développe-ment, il importe en effet d’amener tous les acteurs des pays du Nord – Etat, société civile et secteur économique – à revoir leur façon d’agir. Car notre com-portement a un impact direct sur les conditions de vie d’autres personnes: c’est le cas, par exemple, lorsque nous achetons du café du commerce équi ta-ble ou qu’une com mune décider de re-noncer à acheter des pavés fabriqués par des enfants pour réaménager la nou-velle cour de son école.

Penser globalement, agir localementPar ses campagnes, Solidar rappelle leur responsabilité mondiale aux acteurs et aux actrices en Suisse. Les pouvoirs

publics (Confédération, cantons et com-munes) viennent ici en tête, car ils ser-vent de modèles aux consommateurs, aux consommatrices et aux entreprises. Ce rôle, la campagne «Rating Solidar des communes – penser globalement, agir localement» entend le renforcer.

Les moyens d’agir existentSolidar mène une enquête auprès de plus de septante communes de toute la Suisse pour savoir comment autorités et administration assument leur responsa-bilité mondiale. Nous voulons en fait déterminer si les communes achètent équitable et dans quelle mesure elles s’investissent dans la coopération au dé-veloppement. Annoncés ces prochains jours, les premiers résultats de cette enquête révèlent des écarts énormes entre certaines communes, même de taille similaire. Dans nombre de commu-nes plutôt mal notées, les responsa bles tombent des nues: ils sont souvent tota-lement inconscients de l’impact que leur

comportement peut avoir sur la vie de gens vivant à l’autre bout de la planète. C’est là qu’intervient la campagne de Solidar. Les informations collectées ne nous servent pas seulement à évaluer les communes, mais aussi à leur expliquer comment elles peuvent agir de manière plus responsable au quotidien. Les com-munes suisses deviendront ainsi des partenaires de poids dans la mondialisa-tion de la solidarité.

Qu’en est-il de votre commune? Quelle est la commune la plus res-ponsable de Suisse? Pour le savoir, rendez-vous surwww.solidar.ch/ratingdescommunes

La commune la plus équitable

Dépenses pour la coopération au développementMontant en francs par habitant-e et par année (chiffres 2009):

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19.50 Genève9.70 Bâle6.80 Zurich2.50 Berne0.30 Coire

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14 JEU & BAROMÈTRE

Solution:

LE SUDOKU

CULTURE 15

PREmIER maI ICI ET aIllEuRsComment célèbre-t-on la Fête du travail dans nos pays prioritaires et que symbolise-t-elle? Petit tour d’horizon.Texte: Katja Schurter. Photos: FNT, Nicolás Quinteros, Abdoul Karim Sawadogo

Nicaragua: fête des travailleurs et des travailleuses

«Le 1er Mai, c’est la Journée des travail-leurs et des travailleuses, pas le Jour du travail», lâche José Angel Bermudez, se-crétaire général du Frente Nacional de los Trabajadores (FNT), principale union syndicale du Nicaragua et partenaire de Solidar Suisse. Le 1er Mai a été proclamé ''Journée des travailleurs'' en 1889 à Paris. Il marquait alors la fin d’une lutte de dix années pour des conditions et des durées de travail décentes et plus humai-nes, une lutte qui a coûté la vie à beau-coup trop de gens. «Le 1er Mai, le FNT organise des assemblées dans tout le pays, afin que nous réfléchissions en-semble à ce qui a été réalisé, aux objec-tifs à atteindre et aux futurs défis.» Parmi les principaux acquis de ces dernières années figurent l’augmentation des sa-laires minimaux et la signature d’une convention collective avec les maquilas. Outre la réglementation des salaires et la garantie des prestations définies par la législation, cette convention comprend également des soins médicaux et la cons truction de logements sociaux.

Kosovo: «Nous voulons un dia-logue social»Au Kosovo, le 1er Mai est animé par les manifestations pacifiques des syndicalis-tes, auxquels se joignent d’anciens em-ployé-e-s de la fonction publique et des retraité-e-s. Les gens se rassemblent sur la place centrale de Pristina et expriment leurs revendications visant à améliorer les normes du travail: «Des salaires dé-cents!», «Nous voulons un dialogue so-cial!», etc. Ailleurs au Kosovo, on ne cé-lèbre pas le 1er Mai, et les gens en profitent pour aller pique-niquer à la campagne avec leur famille, manger au restaurant ou écouter l’un des nombreux concerts organisés ce jour-là un peu par-tout dans le pays.

Bolivie: le 1er Mai a 105 ans

En Bolivie, on célèbre le 1er Mai depuis 1906. Il y a des décennies que l’union syndicale Central Obrera Boliviana (COB) organise les manifestations de la Fête du travail, aussi bien à La Paz, où entre 15 000 et 20 000 personnes ont défilé en 2010, que dans les chefs-lieux de département. Les normes du travail sont au cœur des revendications. Cette année, les manifestant-e-s ont demandé un relèvement du salaire minimum à

8300 bolivianos (1290 francs), alors que la proposition des autorités plafonne à 815 bolivianos (117 francs). Si le gou-vernement a certes dû renoncer, fin 2010, à relever le prix de l’essence, les autres prix ne cessent d’augmenter. Or, après assainissement de ses finances, la Bolivie dispose de réserves internationa-les de 10 milliards de dollars. Le COB veut que cet argent serve à financer le salaire minimum.

Burkina Faso: la vie chère à l’ordre du jour

Au Burkina Faso, les syndicats relèvent de la tradition. Le 3 janvier 1966, six ans après l’indépendance, c’est en effet une grève générale qui a conduit à la destitu-tion du président Maurice Yaméogo. De-puis lors, le 3 janvier est un jour férié payé. Mais on n’en célèbre pas moins di-gnement le 1er Mai: chaque année, dans la capitale et ailleurs, les travailleuses et les travailleurs descendent dans la rue pour présenter leurs revendications au gouvernement. Cette année, ils ont sur-tout protesté contre des taxes trop éle-vées, les restrictions à la liberté syndicale et la cherté de la vie.

Le prochain numéro de Solidarité sera essentiellement con-sacré au sujet «Du travail digne pour lutter contre la pau vreté». Nous souhaitons savoir ce que signifie, pour vous, un travail digne. Selon vous, quel est le standard minimal pour toutes les personnes dans le monde?

À mon avis, des conditions de travail dignes impliquent:

Un salaire suffisant pour vivre Pas de discrimination La sécurité au travail Une assurance maladie et accidents La protection contre le licenciement La prévoyance vieillesse Pas de travail forcé, ni travail des enfants Un congé maternité payé Une assurance chômage L’égalité de salaire entre hommes et femmes La liberté d’organisation syndicale Cinq semaines de vacances La promotion de la santé Des conventions collectives de travail Le respect des droits humains

Baromètre de la solidarité

ÉVALUATION DU BAROMÈTRE

Le nouveau nom exprime-t-il nos valeurs et objectifs?

Les personnes qui ont répondu favorablement trouvent que le nom Œuvre suisse d’entraide ouvrière OSEO n’est plus d’actualité, tandis que Solidar Suisse est moderne, plus expressif et international. Par ailleurs, ce nouveau nom n’exclut pas les femmes. Des personnes ont trouvé dommage que la connotation de mouvement ouvrier soit perdue et que le nom ne soit pas très parlant. Le souci que l’OSEO perde de la notoriété a aussi été exprimé.

Êtes-vous en faveur du changement de nom de Œuvre suisse d’entraide ouvrière OSEO en Solidar Suisse?

37 oui 36 non 3 pas de réponse claire

Commentaire de Christian Engeli, responsable de la communicationAprès 75 ans d’existence, nous nous sommes donné un nouveau nom, qui renvoie directe-ment à la valeur fondamentale qui sous-tend notre action: la solidarité.Solidar souligne aussi notre approche fondée sur le partenariat. A connotation paternaliste, l’expression «œuvre d’entraide» n’a plus guère cours en coopération au développement. Or, dans ce domaine, nous nous considérons comme un partenaire qui collabore sur place avec des organisations de la société civile, afin de les soutenir dans leur lutte pour le respect des droits fondamentaux et l’amélioration des conditions de vie et de travail. Le nom que nous portions jusqu’ici, Œuvre suisse d’entraide ouvrière, était par trop éloigné de nos activités à l’échelle internationale. Notre nouveau nom dissipe tous les doutes.Si notre nom change, notre objectif demeure: par nos projets et nos campagnes, nous voulons contribuer à rendre le monde plus juste. Notre solidarité vaut son pesant d’or!

33 Solidarité19 Partenariat dans la coopération au développement16 Justice16 Des conditions de travail dignes14 Vaincre la pauvreté et l'exploitation11 Démocratie

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Règles du jeu

Complétez les cases de la grille avec les chiffres de 1 à 9, afin qu'il n'y ait aucune répétition et aucun doublon dans chaque colonne, ligne et carré de 3x3. La solution se trouve dans les cases grises lues horizontalement, selon l'équivalence ci-dessous: 1=B, 2=G, 3=N, 4=L, 5=P, 6=E, 7=A, 8=S, 9=O.

Envoyez la solution à Solidar via le talon-réponse ci-joint, sur une carte postale, ou par e-mail à [email protected], sujet «sudoku». Toutes les réponses correctes participent au tirage au sort.

1er prix Un bon d'achat Gebana d'une valeur de 100 francs2ème et 3ème prix Un bon d’achat Gebana d’une valeur de 50 francs

Les prix nous ont été généreusement offerts par Gebana.

La date limite d’envoi est le 4 juillet 2011. Le nom des gagnant-e-s sera publié dans Solidarité 3/2011. Le concours ne donne lieu à aucune correspondance, ni à aucun recours. Le personnel de Solidar n’a pas le droit d’y participer.

La solution de l’énigme de Solidarité 2/2011 était «Solidar Suisse». Les gagnant-e-s ont été tirés au sort: Christian Steiner, de Seltisberg, a gagné une sacoche; Barbara Wyss Flück, de Soleure, un petit sac en soie; Christoph Meier, de Berne, un étui. Ces prix ont été amicalement offerts par l’atelier de l’OSEO Bâle. Nous remercions l’OSEO Bâle pour ces prix, ainsi que toutes les personnes qui ont participé au jeu.

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L’OSEO Genève renforce sa collaboration avec le Bureau de l’intégration des étrangers (BIE). A la demande du BIE, l’OSEO Genève a été mandatée pour conseiller et accompagner tou-te-s les bénéficiaires d’un permis F et les réfugié-e-s statu-taires permis B dans leurs démarches d’insertion profession-nelle. L’objectif premier étant de proposer des formations qualifiantes qui seront financées par le forfait intégration. Cette subvention fédérale est destinée à financer des mesures d’acquisition linguistique et d’intégration professionnelle et sociale. Elle sert notamment à encourager l’intégration profes-sionnelle et l’acquisition d'une langue officielle.Environ 150 personnes par année bénéficieront de ce nouveau dispositif.www.oseo-ge.ch

OSEO Suisse centrale:palabres féminines 2011Les palabres féminines, du programme Migration Co-Opera, réunissent chaque mois des femmes intéressées au dialogue interculturel. Elles sont organisées par des femmes suisses et immigrées. Le thème de cette année est centré sur le concept «Autres pays, autres mœurs». Les femmes intéressées se ren-contrent à 19 heures au Luzerner Sentitreff pour discuter no-tamment des sujets suivants: le matriarcat en Indonésie (24.05); les rituels des femmes Tamouls – lesquels sont encore possibles en Suisse? (28.06); mère et fille de Turquie – deux histoires d’intégrations différentes (06.09); les rôles des femmes en Somalie – avant et après l’émigration (25.10). www.sah-zs.ch

Placement VivADans le cadre du placement professionnel VivA, l’OSEO Zurich offre des postes fixes à des personnes inscrites à l’assurance-invalidité (AI). Une collaboration étroite et ciblée avec les futurs employeurs permet de proposer des postes adaptés au profil des personnes candidates. Des journées d’essai sont prévues pour mieux prendre connaissance des emplois. Les personnes ayant décroché un travail par l’intermédiaire de VivA sont accompa gnées durant les six premiers mois de service, afin de garantir qu’elles puissent rester dans la vie active. La phase de placement est limitée à six mois. Si une personne ne peut être placée durant cette période, son dossier est renvoyé à l’AI. www.sah-zh.ch

Genève: mandat du Bureau de l’intégration

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Concours de l’OSEO ZurichL’OSEO Zurich organise, dans le cadre du jubilé de l’OSEO, un concours. 75 prix sont à gagner. Tout le monde peut y participer, à l’exception des collaborateurs et collaboratrices de l’OSEO Zurich. Le délai de participation est fixé au 30 novembre 2011.www.sah-zh.ch

RENFORCER lEs OsEOLe réseau des OSEO régionales se développe.Texte: Yves Ecœur, secrétaire national du réseau OSEO

Si nos collègues de l’OSEO International travaillent maintenant sous la bannière Solidar Suisse, les choses bougent égale-ment dans les associations régionales. En effet, le secrétariat national, créé en octobre 2008 afin de coordonner le travail des dix associations régionales, développer de nouveaux pro-grammes nationaux et faire du lobbying pour promouvoir l’OSEO, a été comme prévu renforcé en juillet dernier. Ainsi, après une phase de construction du secrétariat, nous sommes entrés dans un processus de consolidation. Il permet d’intensifier le lobbying en faveur des personnes au chômage et des migrant-e-s. Le secrétaire du réseau, trop accaparé par les tâches administratives, manquait auparavant de temps pour les actions de lobbying. De plus, un certain potentiel demeure sur le plan de l’action politique et du renforcement des liens avec nos partenaires de gauche. Un acteur incontournableActuellement, le réseau national des OSEO peut se targuer d’avoir pu se positionner comme un acteur incontournable de l’insertion en Suisse. L’obtention du projet CT2, qui aide des centaines de jeunes à trouver un emploi à la fin de leur appren-tissage ou de leurs études, illustre cette réussite. Ce program-me est mené par les dix OSEO régionales. D’autres projets sont dans le pipeline. Ils doivent cependant pouvoir s’appuyer sur une structure juridique plus solide. C’est la raison pour la-quelle les associations régionales veulent structurer le réseau OSEO en une association nationale.Le réseau national va aussi renforcer sa communication, afin de mieux faire entendre la voie de la solidarité en Suisse. Il ne suffit pas d’accomplir un travail efficace. Il faut aussi le faire connaître. La nouvelle structure et les moyens supplémen-taires à disposition nous permettront d’améliorer notre commu-nication et de nous positionner plus clairement. Rendre la soli-darité visible, montrer que toutes les personnes ont des ressources et peuvent contribuer au bien commun, est essen-tiel. Cela prouve qu’une société plus humaine et plus juste est possible. Tel est le cœur de notre travail.www.oseo.ch/suisse

Dès mars de cette année, l’Entreprise Sociale d’Insertion (ESI) propose à sa clientèle et à ses partenaires sociaux une nouvelle offre dans le secteur du nettoyage et de la conciergerie.L’ESI est un programme qui entre dans le champ de l’insertion socioprofessionnelle par l’économie, et ceci dans le contexte de l’OSEO-Vaud. L’ESI coache 24 personnes dans leur projet de formation ou d’emploi.Cinq ans après son lancement, l’ESI s’agrandit afin de proposer aux participant-e-s, femmes et hommes de tout âge au bénéfi-ce du revenu d’insertion (RI), des possibilités d’expériences pro-fessionnelles réelles toujours plus diversifiées. Déjà active, dès ses débuts, dans les domaines du bâtiment et du paysagisme, l’ESI veut favoriser l’employabilité de ses participant-e-s en misant sur un secteur du nettoyage en plein essor. www.oseo-vd.ch

Vaud: lancement d’une mesure éducative

Vaud: nouvelle offredans le secteur du nettoyage

L’OSEO Vaud a récemment lancé un nouveau projet: Inizio. Cette mesure éducative spécialisée est destinée à dix adoles-cent-e-s au bénéfice d’une aide du Service cantonal de protec-tion de la jeunesse (SPJ). Sa mission est de permettre la cons-truction et la réalisation durable d’un projet personnel d’insertion socioprofessionnelle. Inizio, qui signifie en italien «début», est une structure d’accueil de jour. Elle a ouvert ses portes début 2011, à Vevey. Son équipe pluridisciplinaire se compose d’une monitrice socioprofes sionnelle, d’un éducateur social et d’une art théra-peute. Elle propose notamment un programme hebdomadaire incluant le travail en atelier et en extérieur, des activités socio-culturelles et une aide à la recherche d’emploi. Son travail prend en compte la réalité des adolescent-e-s en difficultés dans le contexte social actuel. www.oseo-vd.ch

Les évaluations classiques s'adressent à des personnes ayant reçu une formation et compétentes du point de vue linguis-tique. Cette forme de clarification du potentiel et des perspec-tives n’est pas adaptée à un grand groupe cible de l’OSEO Zurich: les personnes sans revenu (de longue date) dès 16 ans et sans formation professionnelle qualifiée. L’OSEO Zurich a donc développé AssesSAH, une évaluation sur mesure pour ce groupe cible, comprenant des méthodes d’évaluation standar-disées et éprouvées, ainsi que le relevé des compétences axé sur l’action. Un processus d’évaluation court (huit heures maxi-mum) est sciemment maintenu. AssesSAH propose des re-commandations concrètes pour l’intégration professionnelle. Il est possible de s’inscrire à des modules individuels ou d’intégrer les programmes existants. www.sah-zh.ch

OSEO Zurich: contrôle du potentiel et des perspectives

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Eddie Cottle aime son travail. «L’engagement pour l’émancipation des travailleurs et des travailleuses fait partie de mon identité.» Dernier-né de huit en-fants dans une famille ouvrière, qui a dû s’exiler dans un township pendant l’apartheid, il a rapidement développé une conscience politique, et celle-ci a in fléchi son parcours scolaire et professionnel. De 2007 à 2010, Eddie a ainsi coordon-né la campagne «Fair Games – Fair Play» en marge de la der nière Coupe du monde de football, qui a eu lieu l’été dernier en Afrique du Sud (voir encadré). Depuis janvier 2011, il travaille à l’Internationale des travailleurs du bâtiment et du bois (IBB) afin de faire bénéficier toute l’Afrique australe des ensei gnements ti-rés lors de cette campagne.

Passer à une autre échelle«Fair Games – Fair Play» a obligé Eddie Cottle à voir les choses en grand: avec ses investissements énormes, la Coupe du monde était un projet complètement démesuré; d’autre part, c’est la première fois que les syndicats ont profité de l’événement pour mener une campagne à l’échelle mondiale. «Sans modèle dont nous inspirer, nous avons dû concevoir toute la campagne de A à Z. Nous avons cependant bénéficié de l’expérience d’autres pays et reçu des appuis autres que financiers», raconte ce pédagogue qui n’a jamais été un élève assidu. Il a par exemple fallu trouver un moyen pour or-ganiser des ouvrières et des ouvriers dont 70 pour-cent n’étaient engagés que pour trois mois. La collaboration avec Unia a toutefois contribué à mettre les échanges internationaux au service de la lutte syndicale: «Unia nous a expliqué ses méthodes pour syndiquer la main-d’œuvre illégale en Suisse. Bien que les problèmes soient différents chez nous, il existe des similitudes. Même sur les chantiers de la Coupe du monde, il y avait beaucoup d’ouvrières et d’ouvriers fort mal lotis et qui n’avaient guère d’alternative.»

Vastes répercussionsLa campagne a dès lors eu des répercus-sions bien au-delà de la Coupe du mon-de: «Auparavant, les syndicats sud-afri-cains se concentraient sur les ouvrières et les ouvriers occupant des postes fixes. Il y a pourtant longtemps que le travail temporaire gagne du terrain, engendrant des licenciements massifs et une grave détérioration des conditions de travail et des rapports sociaux. Notre campagne a incité les syndicats à appréhender leur action différemment.» Cela implique no-tamment de tenir compte des conditions de vie des travailleurs et travailleuses, et de collaborer avec les organisations com-munautaires. Eddie Cottle consacre lui-même une partie de son temps libre à la lutte pour les droits citoyens et pour des logements décents, dans un pays où ces derniers font cruellement défaut.

REvOIR lEs RèglEs du jEu! Eddie Cottle a coordonné toute la campagne pour des conditions de travail décentes en marge du Mondial 2010 de football. Il s’active à présent pour que l’expérience acquise à cette occasion soit utilisée lors d'autres grands chantiers, tant en Afrique australe qu’au Brésil. Texte: Katja Schurter. Photo: Joachim Merz

PORTRAIT18

Menée conjointement par Solidar, Unia et l’IBB, la campagne interna-tionale «Fair Games – Fair Play» a revendiqué des conditions de travail décentes sur les chantiers de la Coupe du monde 2010. Elle a aussi appelé la FIFA à assumer ses res-ponsabilités sociales. La campagne a obtenu une hausse des salaires, évité le dumping salarial causé par la sous-traitance et renforcé les syndi-cats. Même la FIFA a dû défendre publiquement des conditions de tra-vail décentes. Du jamais vu!www.solidar.ch/fairgames

Fair Games – Fair Play

Eddie Cottle, à Johannes-bourg, en mai 2010, lors de la transmission de la

campagne aux syndicats brésiliens en vue du

Mondial 2014.

La campagne a également favorisé la collaboration entre différents syndicats et avec des organismes comme le Labour Research Service (LRS). «Grâce aux étu-des du LRS, par exemple sur le rayon d’action des entreprises impliquées ou la puissance économique de la FIFA, nous sommes devenus la seule voix capable d’offrir une réponse critique aux partisans du Mondial», explique Eddie Cottle. Il n’a pourtant pas été facile de dénoncer les profits générés par le football dans un pays où ce sport est très populaire.

Mondialisation du sportAux yeux d’Eddie, la solidarité internatio-nale joue un rôle décisif face à la mondia-lisation des grands événements sportifs: «La FIFA est un poids lourd de l’économie mondiale: droits de retransmission, vête-ments, articles pour les fans, sans comp-ter les banques et les entreprises impli-quées. Voilà pourquoi l’IBB a décidé d’inclure une campagne mondiale dans ses priorités.» Les expériences acquises lors de la Coupe du Monde seront trans-férées au Brésil, qui accueillera le pro-chain Mondial (voir page 12). Elles seront aussi mises à profit dans le cadre de grands projets en Afrique du Sud, en Zim-babwe, en Zambie et au Mozambique.

Page 11: Solidarité 2/2011

PROCès CONTRE luCKy gEms Xueying Jiang a quitté son emploi en février 2002 pour soigner son mari, atteint de silicose

après avoir travaillé chez Lucky Gems. Il est décédé en 2004 des suites de la maladie. En

janvier 2006, la silicose a également été diagnostiquée chez Xueying Jiang. Elle a toutefois

dû se battre pendant une année pour obtenir un certificat de maladie profes sionnelle. En

janvier 2008, elle a intenté une action contre Lucky Gems devant le tribunal arbitral du dis-

trict de Huizhou. Celui-ci s’est récusé, car la compagnie avait entre-temps déplacé son siège

à Haifeng. Jiang a fait appel. En avril 2009, le tribunal du district a condamné Lucky Gems

à verser 320 000 yuans (env. 40 000 francs). Jiang et son employeur ont tous deux inter-

jeté un recours. En février 2010, le tribunal a condamné Lucky Gems au versement d’une

indemnité de 466 000 yuans (65 000 francs). Enfin, en août 2010, la requête en révision

déposée par la compagnie a été rejetée en dernière instance.