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REVUE DE PRESSE HOOLIGANS

  

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"Le flic a dégainé et reculé arme au poing pendant plusieurs dizaines de mètres" le 24.11.06 à 16h20

Retour sur l'incident de cette nuit. L'enquête, ouverte vendredi matin, devra déterminer si le policier a agit en état de légitime défense.

Les premiers éléments de l’enquête permettent de mieux comprendre comment s'est joué le drame de la nuit durant laquelle un policier a tué et blessé deux supporters du PSG. Il est 23h00 au Parc des Princes jeudi soir. Le PSG, dont le début de saison est catastrophique, perd 2-4 face au Hapoël Tel-Aviv. Selon la Licra (Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme), les insultes antisémites et des cris à la gloire de Hitler pleuvent dans les tribunes. (Voir les images).

Révoltés par le score, les supporters du PSG tonnent, comme le raconte à 20Minutes Sacha, un supporter présent au parc. Ils sont rapidement canalisés vers la place de la Porte de Saint-Cloud. Trois supporters du Hapoël Tel-Aviv sont pris à partie par une foule hostile dans une rue à proximité. Deux parviennent à s’échapper. Le troisième, Français de confession juive habitant dans le Val d’Oise (95) est menacé de lynchage par une centaine de personnes. Sur les lieux, un journaliste de L'Express, qui livre sur le site de l'hebdomadaire un premier témoignage.

Antoine Granomort, fonctionnaire en civil de la police des transports d’origine martiniquaise, est présent. Il va se porter au secours du jeune homme, qui est devant l'église de la Porte de Saint-Cloud. Les deux hommes sont les cibles d’insultes racistes et antisémites.

"Le flic a dégainé et reculé, arme au poing pendant plusieurs dizaines de mètres, et s'est retrouvé adossé à un petit bar, à 30 mètres du Mc Donald's de l'avenue de Versailles.

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Interpellations C’est alors que tout s’emballe. Le policier martiniquais, un temps au sol, fait usage d'une bombe lacrymogène afin de se dégager. Il a été frappé à la tempe et au bas ventre, selon Nicolas Sarkozy qui précise que «(le policier) a hurlé à plusieurs reprises qu'il appartenait à la police et il a commencé à asperger les manifestants avec sa bombe lacrymogène», avant de tirer sur la foule, tuant un supporter et en blessant grièvement un autre.

La centaine de supporters du PSG gronde de plus en plus fort, le policier et son protégé se réfugient dans un Mac Donald’s proche. Les renforts policiers, pourtant en position autour du Parc, mettront plusieurs minutes à arriver sur place. Ils n’ont pas cru à un coup de feu mais à l’explosion d’un pétard...

Les jeunes du quartier qui ont assisté à la scène se demandent pourtant pourquoi les renforts ne sont pas intervenus plutôt, "pendant que le policier et son protégé reculaient de l'Eglise au Mc Do?".

La nuit s’achève par l’interpellation de cinq supporters du PSG, pour "injures racistes et antisémites", et la garde à vue du policier impliqué dans les locaux de l’Inspection générale des services (IGS), la police des police.

«L'enquête confiée à l'IGS est ouverte pour homicide volontaire mais pourrait être transformée en coups ayant entraîné la mort sans intention de la donner. Se pose la question de la légitime défense», a indiqué le procureur. Quatre syndicats policiers ont apporté leur soutien vendredi matin à Antoine Granomort. «L’enquête devrait aller assez vite, elle devrait être bouclée d’ici à dimanche,» a assuré un enquêteur. Vendredi midi, l’identité des deux supporters du PSG victimes du coup de feu a été révélée. Le premier, Julien Quemener, 24 ans, membre, selon la police, du "kop" de Boulogne est mort vers 23h30. Il faisait partie des «Indépendants», un des groupes les plus durs, et serait proche des mouvements d’extrême droite.

Le second, âgé de 26 ans, autre membre de ce kop, sans en être pour autant une grande figure, a été grièvement blessé au poumon mais sa vie n'est pas en danger. Selon des témoins, après avoir été blessé il s'est réfugié, en sang, au bar les Trois Obus, qui a appelé le Samu. Il est actuellement hospitalisé à Paris.

Selon le procureur de la République de Paris Jean-Claude Marin, la police envisage qu'une seule balle ait pu atteindre les deux hommes, touchant le blessé au poumon et Julien Quemener au coeur.

Vendredi matin, plusieurs personnalités politiques et sportives ont condamné ces violences, notamment le président du club parisien Alain Cayzac qui a déclaré que c’était «la période la plus sombre du PSG.»

Sandrine Cochard  

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Lundi 8 mars 2010

A la une

Publié le 03/03/2010 à 15:56 Reuters

Le gouvernement se saisit à nouveau du cas des hooligans du PSG

Affrontements entre policiers et supporters du Paris Saint-Germain dimanche soir près du Parc des Princes. Des poursuites judiciaires ont été engagées contre 18 supporters du PSG soupçonnés d'être impliqués dans les violences qui ont suivi dimanche dernier la défaite du club parisien contre Marseille (0-3) en Ligue 1. /Photo prise le 28 février 2010/REUTERS/Gonzalo Fuentes

Le gouvernement français s'est à nouveau saisi du cas des supporters violents du Paris Saint-Germain, qui se sont affrontés avant et après un match face à l'Olympique de Marseille le week-end dernier.

Un homme de 38 ans est dans le coma après avoir été roué de coups dimanche par d'autres supporters du club, dans le cadre des rivalités entre le "virage Auteuil" et le "kop de Boulogne".

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Après la secrétaire d'Etat aux Sports, Rama Yade, qui souhaite que ces actes "sauvages ne (restent) pas impunis", Nicolas Sarkozy a demandé en conseil des ministres que la loi sur les bandes puisse être appliquée aux supporters violents.

Cette loi votée en février crée notamment un délit de participation à une bande violente passible d'un an de prison.

Nicolas Sarkozy, lui-même supporter du Paris Saint-Germain, reste rarement en marge des débats sur la violence dans les stades. En 2003, alors ministre de l'Intérieur, il lançait une "offensive contre la violence dans le football" et incluait ce thème dans sa loi sur la sécurité intérieure.

Un an plus tard, il avait reçu à son ministère le président de l'époque du PSG, Francis Graille, et le président de la Ligue de football professionnel (LFP), Frédéric Thiriez.

En 2005, après les premières violences entre Boulogne et Auteuil, il promettait de "débarrasser nos stades des voyous qui n'ont rien à y faire". Trois ans après, devenu chef de l'Etat, il s'impliquait à nouveau après l'affaire de la banderole "anti-Ch'tis" déployée au Stade de France par des supporters parisiens.

"NIHILISME PARFAIT"

Le ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux, qui a rencontré mardi les dirigeants du PSG et de la LFP, a annoncé des mesures de sécurité concernant le match du club parisien samedi à Lens.

Selon Le Parisien, le ministère serait en outre tenté de dissoudre plusieurs associations de supporters des clubs du PSG, Grenoble, Nice ou Saint-Etienne, dont les membres se sont distingués depuis le début de la saison par des actes violents.

Des poursuites judiciaires ont été engagées contre 18 supporters parisiens soupçonnés d'être impliqués dans les violences en marge du match de dimanche dernier. Aucun n'est toutefois en prison, dit le parquet de Paris.

Deux d'entre eux ont été condamnés mardi à des peines de prison avec sursis et 16 autres ont fait l'objet d'une convocation à une audience ultérieure du tribunal et été placés sous contrôle judiciaire. Ils font également l'objet d'une interdiction de stade, précise un communiqué du procureur.

Toutes ces personnes sont soupçonnées de jet de projectiles, de violences ou encore de port d'armes prohibé.

Aucun suspect des coups portés au supporter dans le coma n'a pu être identifié et l'enquête se poursuit sur ces faits.

Les affrontements de dimanche reposent sur une rivalité entre les deux virages opposés du Parc des Princes.

Des associations du virage Auteuil reprochent principalement à des membres du kop Boulogne d'afficher publiquement leurs idées d'extrême droite.

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Cette rivalité, en sommeil depuis l'autodissolution en 2006 d'un groupe de supporters ultras du virage Auteuil (les Tigris Mystic), a atteint des sommets depuis décembre dernier, lorsque des membres des deux tribunes se sont affrontés à Bordeaux.

Ils se sont depuis battus lors d'autres rencontres à l'extérieur et se sont insultés dimanche d'un virage à l'autre.

Le président du PSG, Robin Leproux, a annoncé mardi que plus aucun billet pour les matches à l'extérieur ne serait vendu aux supporters parisiens jusqu'à nouvel ordre.

L'association des Lutèce Falco, deuxième groupe d'Auteuil par ordre d'importance, a dit qu'elle se mettait "provisoirement en sommeil (...) jusqu'à la normalisation de l'atmosphère".

"La situation des tribunes" tend actuellement "au nihilisme parfait", constate le groupe dans un communiqué.

Thierry Lévêque et Clément Guillou, avec Emmanuel Jarry à l'Elysée, édité par Sophie Louet

 

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  26 octobre 2009 

OM‐PSG : Les hooligans se déchainent 

L’annulation tardive du match de football OM-PSG a déclenché la colère des plus violents des supporters parisiens. Et suscité la riposte de fan de l’OM. Récit d’un dérapage qui a fait plusieurs blessés graves et de nombreux dégâts dans la cité phocéenne. Notre journaliste était à Marseille. Il nous fait le récit des affrontements.

Dimanche, 15 heures, dans le TGV Paris – Marseille. Un message est diffusé dans le train : le match entre l’Olympique de Marseille et le Paris Saint Germain vient d’être reporté. Les supporters parisiens sont invités à descendre au prochain arrêt, pour retourner sur la capitale.

Une heure plus tard, à la gare d’Avignon. Une compagnie de CRS est là pour encadrer les supporters visiteurs. A peine sur le quai, des Parisiens imbibés d’alcool se font remarquer : les insultes fusent en direction des voyageurs restés dans le train. Provocations qui ne sont pas du goût des forces de l’ordre qui interviennent immédiatement en ceinturant ces pseudos supporteurs. Ambiance ! Mais ce n’est rien par rapport à ce qu’il se passe dans la cité phocéenne. Sur le Vieux-Port, des incidents ont éclaté. Deux mille Parisiens étaient attendus. La majorité d’entre eux devaient rejoindre Marseille en bus. Mais la frange obscure des supporters de Paris, les

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plus violents, est venue par ses propres moyens. A l’annonce du report du match, les jets de canettes et de bouteilles ont commencé. La police décide alors d’escorter ces pseudos supporters vers la gare.

Munis de barres de fer et de fusées éclairantes, ils détruisent tout sur leur passage 17 heures, Gare Saint-Charles. La panique s’est emparée de la gare marseillaise. Près de 350 Parisiens sont parqués sur le parvis, en attendant le TGV qui doit les ramener sur la Capitale. Malgré la protection policière, ils se font caillasser par leurs homologues du Sud. La bêtise humaine est apparemment universelle ! En descendant sur la Canebière, on croise des dizaines de minots, à peine âgés d’une vingtaine d’années, qui courent en direction de la gare, prêts à en découdre. Munis de barres de fer et de fusées éclairantes, ils détruisent tout sur leur passage. Vitrines, cabines téléphoniques, voitures, tout y passe…

Les habitants, effarés, courent se réfugier dans les commerces. Pour protéger les visiteurs, gendarmes et CRS répondent aux casseurs par des tirs de flashball et de bombes lacrymogènes. Sur le Vieux-Port, tous les cafés sont fermés. Bris de verre et poubelles enflammées témoignent de la violence des affrontements. Ces scènes de guérilla urbaine se prolongeront jusqu’à 19 heures et le départ des supporteurs parisiens. Résultat : dix blessés, dont deux assez graves et une vingtaine d’interpellations. Ce matin, les rues de Marseille étaient encore dévastées.

Tout le monde cherche un responsable à cette affaire : la Ligue, accusée d’avoir trop tardé à annuler le match qui rejette toute responsabilité lors des affrontements ? Le PSG qui n’aurait pas su prendre la mesure de l’état de santé de ses joueurs? Ou la ville de Marseille dépassée de tels événements ? Le match n’a pas eu lieu, mais il a quand même désigné un perdant : le football, qui a encore donné une image désastreuse de ses supporters. Ou quand le « clasico », se transforme finalement en véritable fiasco…

Clément Vogt - Parismatch.com

 

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TOUS LES JOURS, TOUTE L’INFO

Témoignage

Moi, Fred, hooligan du PSG propos recueillis par Boris Thiolay, publié le 08/05/2003 00:00 - mis à jour le 15/10/2008 10:01:48

Je suis un fan de foot depuis toujours. J'ai commencé à jouer à 8 ans dans un club de la banlieue parisienne. Jusqu'à 11 ans, j'ai vécu en HLM, puis dans un autre immeuble, en zone pavillonnaire. Je viens d'une famille d'ouvriers. Mon grand-père était communiste et mes parents ont toujours voté à gauche. Ils n'ont pas eu une vie facile. Mon père travaillait tard et je le voyais rentrer du boulot épuisé. Jeune, j'étais déjà nerveux. Avec mon cousin, quand on était gamins, on s'est toujours embrouillés avec des Maghrébins. J'avais des copains arabes, mais aussi beaucoup de soucis avec eux. Il y avait tout le temps des problèmes, des mecs qui se faisaient dépouiller.

J'ai découvert le PSG et le Parc des Princes avec mon oncle, en 1981. J'avais 11 ans. A 15-16 ans, j'ai commencé à aller régulièrement au Parc, seul ou avec un copain, sans le dire à mes parents. Sur le trajet, tu finis par rencontrer des gens qui vont au stade: un mec m'a amené dans la tribune Boulogne. Moi, j'y allais pour voir le match. Mais là, j'ai tout de suite rencontré des skins. A Boulogne, il n'y avait quasiment que des nationalistes [militants de l'extrême droite radicale]. A cette époque, je suis devenu raciste et nationaliste à cause de ce que j'avais vécu en banlieue. J'avais la haine. Au Parc, il y avait beaucoup de mecs comme moi, venus de banlieue. En 1988, à 18 ans, pour la présidentielle, j'ai voté Le Pen, direct. Jusqu'en 1995, j'ai voté FN. C'était un truc protestataire. Cela fait des années que je ne vote plus, ça ne m'intéresse pas. Je suis toujours plutôt nationaliste, mais je ne suis pas raciste. Avec pleins de mecs, même des amis, je ne peux pas parler politique. Certains sont néonazis. Moi, je voyage beaucoup et j'aime découvrir d'autres pays, d'autres cultures. Mais je n'aime pas qu'on crache sur la France.

La première fois que j'ai tapé un mec, c'était dans le métro, avant France-Angleterre en 1984 [le premier gros débordement lié au hooliganisme en France]. Des mecs se battaient, un Anglais est tombé par terre, il était déjà esquinté. J'en ai profité, je lui ai tapé dessus. J'ai eu peur. C'est con, mais le lendemain, j'étais tout fier de raconter que j'avais tapé un Anglais... Au départ, j'étais un suiveur.

«Je tapais comme un malade»

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Mon premier déplacement avec les supporters du PSG, c'était à Nancy, en 1986. Que tu sois skin ou simple supporter, se faire insulter en province parce que t'es parisien, ça crée des liens. On formait un bloc quand on allait à l'extérieur. A partir de 1986, j'ai suivi tous les matchs au Parc et je faisais quelques déplacements. J'étais parmi les premiers mecs à attaquer les bus des équipes ou des supporters adverses. On lançait des pierres, mais on n'avait aucune culture hooligan.

Ma première grosse bagarre, c'était à Lens, la même année. On était deux cars de supporters. On est sortis dix minutes après le match: c'est pas comme maintenant où les flics te font attendre une heure avant de te raccompagner au bus. Là, les Lensois nous attendaient sur le parking. Une vingtaine de skins et des suiveurs: 200 mecs en tout. Nous, on était 80. On a eu peur, mais on a chargé. Je me suis lâché. Je me souviens avoir éclaté un skin sur une bagnole: je tapais comme un malade.

Au milieu des années 1980, on a créé le Commando Pirate, un groupe d'une trentaine de mecs et 120 autres qui suivaient. Dans les années 1990, le PSG jouait partout en Europe. Je faisais au moins un déplacement par mois. On a fait tous les grands matchs. J'ai participé à plusieurs dizaines de bagarres, dont une bonne douzaine de grosses. Contre la Juve [la Juventus de Turin] en 1989 et en 1993, Anderlecht, Arsenal, Liverpool, le Celtic de Glasgow, Galatasaray [il énumère les rencontres comme des campagnes napoléoniennes]... C'étaient des bagarres valables. J'ai fait une dizaine de gardes à vue, de Monaco à Glasgow.

Il y a eu aussi PSG-Caen [en 1993, 10 policiers blessés, dont 1 grièvement]. Je n'y étais pas. Heureusement. Tous mes potes sont allés en prison, pour plusieurs mois. Cela a créé des histoires, parce que certains ont cru qu'il y avait eu des balances. Aujourd'hui, notre groupe, c'est une dizaine de mecs de l'époque toujours actifs et une cinquantaine de types arrivés à des moments différents. Avec les anciens, on a de vrais rapports d'amitié. Je sais que mes amis ne me lâcheront pas et que je ne les lâcherai pas. Si je tombe par terre pendant une bagarre, ils resteront avec moi, quitte à en prendre plein la gueule. Pour l'honneur, pour l'amitié. Dans le groupe, je suis un des seuls à avoir toutes mes dents. Beaucoup ont la gueule abîmée: il faut dire qu'ils ont donné!

Cette année, le PSG est vraiment nul en championnat: on ne fait pas beaucoup de déplacements. J'espère que Paris va jouer la Ligue des champions, la saison prochaine, et qu'on aura un bon tirage au sort. Franchement, je n'irais pas à Rosenborg [Norvège]: c'est pas un gros match. Par contre, quand tu tombes dans un groupe avec Manchester ou la Juve, là, t'as un gros match et il y a des hools en face. Tu sais que ça va donner... En championnat, au Parc, c'est presque impossible de se battre: trop de surveillance, trop de caméras, trop de flics. PSG-Marseille, on ne peut pas bouger. Sauf si, de l'autre côté, il y a vraiment un groupe super-motivé. Certains Marseillais, avant le match au Parc, se donnent rendez-vous au Stade de France. Des gars de chez nous y vont et ils se cartonnent là-bas. Mais personne en France ne va venir provoquer 400 hools au kop Boulogne. Les mecs ne sont pas fous.

Le hooliganisme, c'est bizarre. C'est de la délinquance, mais je le ressens comme du plaisir. Le culte du hooliganisme, c'est d'être capable de constituer un groupe avec un peu d'organisation et de défier un autre groupe. Mon truc, c'est de me battre avec les

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poings. Nous, ce qui nous intéresse, c'est de taper sur des mecs comme nous. On appelle ça ?aller au contact?... Moi, je n'ai pas de haine contre le supporter de Bordeaux ou de Lens, sauf le temps du contact. Tous les deux, on est du même monde. On joue à un petit jeu: le jeu du hooliganisme. C'est un vice. La violence, c'est attirant. Mais ça ne nous viendrait pas à l'esprit de taper sur un père de famille. Pour nous, frapper quelqu'un qui n'a rien à voir, c'est une bavure. On a un certain respect, une morale.

«L'idée, c'est d'être dans le Top Ten»

Avec les potes, on repère les bons matchs à l'extérieur. On fait le déplacement avant tout pour se marrer. Parfois, on voyage en avion. On va dans les bars, au resto, en boîte... On s'éclate. Mais l'essentiel, c'est de voir le match. S'il y a une bonne victoire et une petite bagarre, là c'est parfait. Quand le match est moins intéressant, j'ai tendance à regarder dans les tribunes et à chercher un contact.

Paris, c'est la seule ville française où il y a une culture hooligan. Parce que le PSG a rencontré tous les grands clubs européens et qu'on est mal-aimés. Mais la vraie culture hooligan, c'est l'Angleterre, l'Italie, la Belgique et les Pays-Bas. A chaque fois que je vais voir un match en Angleterre, je suis impressionné. Mon rêve, c'est d'avoir un jour en face de nous les mecs de Leeds ou de Chelsea [les hooligans réputés les plus violents d'Angleterre]! En 1996, on s'est battus dans un pub avec des jeunes hools de Leeds. On leur a fait mal. Mais les plus anciens, tatoués de partout, ceux qui n'ont même pas bougé parce qu'ils avaient tous fait de la prison et que c'était trop risqué pour eux de se battre en plein jour, ils étaient vraiment impressionnants. Le jour où il y aura PSG-Leeds, on rentrera dans la légende! L'idée, c'est d'être dans le Top Ten en Europe. Après le match PSG-Galatasaray [46 blessés en 2001], les Headhunters [les Chasseurs de têtes, groupe hooligan de Chelsea] avaient écrit sur leur site Internet qu'on était entrés dans le Top Ten. C'est le genre de réputation qui se défend durement et qu'on peut payer cher...

A côté de ça, il y a les ?fantômes? du hooliganisme: ceux qui ne font que suivre, qui vont taper sur un mec seulement quand il est à terre, se barrer en cas de coup dur. En plus, dans la jeune génération, t'as des vrais dégueulasses. Ils sont prêts à planter quelqu'un [à coups de couteau]. Il y a aussi de plus en plus de gars qui donnent rendez-vous par portable à ceux d'en face pour se battre, n'importe où. Moi, je n'aime pas ça: on va directement devant le stade.

Avant le contact, on boit quelques bières. Le but, c'est d'être chaud, mais pas trop, parce que si t'es bourré, tu te fais éclater! Certains prennent de la coke. Généralement, on est en basket-chemise-jeans, voire pantalon à pinces. Il y a longtemps qu'on a remisé le look bombers et crâne rasé. Comme ça, on passe inaperçus. Les hools anglais sont habillés avec des fringues de marque: la moindre chemise Long Island, ça vaut 500 balles! Plus il y a de monde, plus on se faufile. Quand on se fait contrôler, on ne fait pas d'embrouilles. Le but, c'est de contourner les barrages de flics, d'arriver jusqu'au stade pour retrouver les mecs d'en face.

Le contact, faut le vivre pour le comprendre: t'es dans la rue, en bande. Tu vois les autres arriver en bande. Tu as peur, tu sais qu'ils ont peur. Mais tu te dis que t'as pas le

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droit de reculer, qu'il faut les mettre par terre. Arrivé à quelques mètres, t'as la pression qui monte. Mais l'envie est plus forte. Alors, tu rabats ton bonnet ou tu remontes ta cagoule, t'y vas et tu te défoules. Le challenge, c'est de se faire une bonne bagarre, de "mettre la misère" aux mecs d'en face et de rester debout. De leur prouver que t'es le meilleur. De montrer ta réputation. A Paris, on est les meilleurs: tout le monde le sait. Quand on arrive dans une ville, Paris c'est nous!

Nice-PSG, on y est allés parce qu'on savait qu'il y aurait des mecs en face... Ça se sait dans le milieu. Sur Internet, les Niçois racontaient qu'ils allaient nous massacrer. Ils commençaient à se montrer un peu trop. On avait la ferme intention de les taper. On était 70 à se déplacer en individuels [en dehors des clubs de supporters], dont 10 anciens. On a pris l'avion, d'autres sont venus en train ou en voiture. On s'est donné rendez-vous dans un bar du centre-ville, en s'envoyant des Texto ou en se laissant des messages sur les portables. Quand je suis arrivé, il y avait déjà 40 à 50 mecs. On a attendu en buvant des bières. Pendant ce temps-là, les flics arrêtaient les mecs les plus voyants à la gare. On a décidé d'aller au stade par groupes de 10. Le premier groupe est parti à pied, les flics les ont suivis. Nous, on y est allés en bus. Sur place, on a trouvé une petite rue pour contourner les barrages. On est arrivés à 50, directement devant la tribune des ?ultras? niçois. J'ai dit aux gars: "Il est hors de question de reculer!" On a commencé à chauffer les Niçois en criant: "Hooligans, Paris!" pour les faire venir. Au départ, les mecs nous jetaient des trucs du haut de la tribune, mais ils n'osaient pas venir au contact. Les premiers à s'approcher en ont pris plein la gueule. A un moment, un Niçois a sorti un couteau, genre couteau de boucher. Il a voulu planter un mec. Un jeune de Paris l'a ceinturé. C'est lui qui a pris le coup de couteau. Le type au couteau, on l'a fracassé contre un mur. Des mecs qui tenaient un camion de frites sont arrivés avec une batte de base-ball et une crosse de hockey. Ils ont été désarmés et ont pris des coups. Un Niçois arrivait avec une pelle: il a été fracassé. Les flics se sont mis avec les Niçois. On a reculé, mais les mecs qui nous suivaient continuaient d'en prendre plein la gueule. On avait amené des fusées pour disperser tout le monde en cas de danger, mais on n'a même pas eu besoin de s'en servir. La bagarre a duré quatre ou cinq minutes. Même si un mec de chez nous a pris un coup de couteau, on leur a mis la misère à 50 contre 200. Après, on a assisté au match. A dix minutes de la fin, on a arraché des dizaines de sièges pour les lancer sur les ultras niçois. Après le match, on a attaqué le café où ils étaient regroupés. On en voyait à l'intérieur qui avaient des pansements. C'était un déplacement assez anodin. C'est le seul truc qu'on ait eu à se mettre sous la dent cette saison.

«On s'est demandé si on ne l'avait pas tué»

Tuer quelqu'un? Se faire tuer? On n'y pense pas. Bon, quand tu te réveilles le lendemain matin avec la gueule amochée, tu te repasses le film et tu ne te sens pas très malin. De toute façon, je ne suis pas armé. Mais c'est vrai que, le soir de PSG-Anderlecht (1992), on avait éclaté un mec sur une voiture. On s'est demandé après si on ne l'avait pas tué. Pour PSG-Juve, les Italiens nous avaient donné rendez-vous dès le match aller avec une banderole déployée dans leur stade, à Turin. A 18 heures, on est allés au pont de Sèvres, où les hools de la Juve se rassemblaient. Ils ont été canalisés par les flics, mais on en a retrouvé d'autres au Trocadéro. Là, un de mes potes a fracassé un mec de 100 kilos avec un coup-de-poing américain. Le mec était par terre, il n'avait déjà plus de dents, et l'autre continuait à frapper. Je l'ai arrêté.

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Après, mon pote pensait qu'il avait peut-être tué le gars... Mon cousin qui était skin, il a arrêté en 1992. Il avait peur de tuer quelqu'un. Il était parti dans des trucs de fou.

Pour arrêter le hooliganisme, il faut interdire le football. Comment tu veux arrêter des types qui ont pris le vice du combat de rue? On n'arrête pas de nous dire: ?Il y a moins de hooligans.? C'est faux. Il y en a déjà plusieurs générations. En plus, il y a plein d'anciens hools parisiens qui se sont rangés, mais qui reviendront si un gros match de Coupe d'Europe arrive. De toute façon, même les mecs interdits de stade arrivent à rentrer, par exemple à la mi-temps. Les stewards du PSG nous connaissent, il y a d'anciens hools chez eux. Et, en déplacement, ce sont eux qui nous encadrent au stade. Heureusement, parce que s'ils nous mettaient les stewards de l'autre club, ce serait même pas la peine! Et puis les hooligans, ils font des petits. Depuis cinq ou six années, ça s'étend, avec les Stéphanois et les Bordelais. A Bordeaux, il y a 30 ou 40 types super-motivés. Quand on va à Saint-Etienne, on est 300 parce qu'on sait qu'on aura du monde en face. A Nice, il y avait un jeune mec qui était fasciné. Lui, il va faire partie de la nouvelle génération. Il va se créer une petite bande, il voudra prouver qu'il est là. Les jeunes qui arrivent, ils sont encore plus chauds. Eux, ils ont grandi dans une société où il n'y a pas de cadeaux.

Mes parents savent ce que je fais, ils m'ont déjà vu à la télé. Mon père ne comprend pas. Quand Paris joue en Coupe d'Europe, ma mère m'appelle pour me demander de ne pas y aller. Quand j'ai connu ma femme, elle savait que j'étais hools. En 1997, elle m'a dit: ?Tu t'es bien éclaté. Tu devrais calmer le jeu.? J'ai pensé: ?Il faut que j'arrête.? J'y retourne quand même. Je n'arrive pas à me l'expliquer...

Avec ma femme, on s'aime, mais je ne peux pas quitter mes potes comme ça. Peut-être plus tard. Quand je pars, elle a peur. Elle sait que je fais gaffe. Mais quand t'es dans le truc, tu ne maîtrises pas tout. Et encore, moi, je suis assez sensé. Je suis du genre papa-poule: je passe tous mes mercredis avec mes enfants. Un jour, je leur raconterai ma jeunesse, la banlieue, le stade. Mais je me suis toujours dit: ?Mes gamins n'habiteront jamais en banlieue et je ne les amènerai jamais au match.? Je ferai tout pour qu'ils n'y aillent pas. Moi, j'ai des choses à perdre. Je prends de moins en moins de risques. Mais, dans les stades, il y a beaucoup de gens qui n'ont absolument rien à perdre.

 

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Jeudi 07 octobre 1993

Enquête sur les hooligans du Paris-Saint-Germain

"Cogner jusqu�à tuer..." Les skinheads leur avaient préparé le terrain, mais aujourd'huice sont des jeunes gens bien ordinaires qui se défoulent au Parc des Princes. Le PSG est-il coupable? "Cogner jusqu'à tuer"

Les plus âgés n'ont pas trente ans. Ils sont chômeurs, étudiants, chauffeurs-livreurs, informaticiens, laborantins. Ils aiment le Paris-Saint-Germain. Profil d'employé-modèle, parfois même de fils de famille. Leurs casiers judiciaires sont vierges, comme leurs cerveaux. Le samedi 28 août au Parc des Princes, tous avaient pris place dans la fameuse tribune Boulogne. Pendant que l'équipe parisienne affrontait Caen, eux se jetaient sur une escouade de policiers, pieds, poings et haine en avant, grimaçant, vociférant, rouant de coups le CRS qu'ils avaient réussi à acculer contre une clôture. Un à un, c'est dans le bureau du juge d'instruction Frédéric N'Guyen qu'ils revoient, depuis, les images de cet assaut � filmées par la télévision et les caméras de surveillance du stade. Au spectacle accablant de leur propre déchaînement, ils n'opposent qu'un laconisme embarrassé, une apparence de « normalité ». Sur les gradins du kop (la tribune), ils provoquent jusqu'à l'outrance : le salut nazi est devenu rituel, même chez ceux qui ne fréquentent pas l'extrême-droite. Face au juge, ils n'osent pas se reconnaître. « Certains, confie le magistrat, vont jusqu'à jurer qu'ils ont été entraînés, quand l'image les montre distinctement se ruer en première ligne. » Chez Julien, 18 ans, l'un des premiers, ce soir-là, à avoir agressé le CRS, et l'un des douze hooligans interpellés au cours des jours suivants, les enquêteurs ont découvert un lance-fusées, des albums du PSG, une coupure de presse relatant le raid du 28 août...

« Ils ont agi en état de légitime défense, dit un de ses camarades, fier d'être �passé à travers�. Les flics sont entrés dans notre tribune. Il fallait les chasser. » Le président du PSG, Bernard Brochand, invoque un « concours de circonstance » � le responsable habituel des forces de police au Parc des Princes, Norbert Rouibi, était en congé le jour du match�, mais il admet, navré, que « ce qui devait arriver a fini par arriver ». Chez ces amateurs de football sincères, la violence a fini par prendre le dessus. Ils en parlent avec complaisance. « Je viens au Parc pour voir le match, et aussi pour me battre, lâche simplement Pascal, visage d'adolescent sur une carcasse de colosse. Je sais que je trouverai toujours deux ou trois gars pour cogner avec moi. � Sur qui ? � Ceux qui se présentent : les nègres, les Arabes, les flics. N'importe qui. � Cogner jusqu'où ? � Jusqu'à tuer. J'y ai souvent réfléchi. Jusqu'à tuer. » Julien, Pascal et les autres, hooligans à la française, confondent en une même passion le football et la fureur. Dans leurs albums de souvenirs se mêlent victoires et bagarres, images de buts et actes de guerre. « Les hooligans sont au football ce que les punks sont à la pop music, écrivait en 1986 le sociologue Alain Ehrenberg, observateur attentif du phénomène hooligan(1). Ils ont institué un système de spectacularisation d'eux-mêmes, de dramatisation qui fonctionne plus à la provocation symbolique qu'au passage à l'acte. » Aujourd'hui, les supporters du Paris-Saint-Germain ont pris l'habitude de passer à l'acte. Les premiers incidents remontent au début des années 80. La tribune Boulogne vit alors sous la domination d'un groupe de skinheads. A la fondation du club, en 1973, par le couturier Daniel Hechter, les places y étaient vendues à très bas prix : le PSG cherchait un public populaire. Ainsi les travées de Boulogne deviennent-elles une banlieue en modèle réduit à l'intérieur du stade. Crânes rasés, bombers (blousons) noirs sur le dos, Doc Martens plombées aux pieds, les skins sont à peine quelques dizaines, mais ils s'y imposent rapidement. Leur « palmarès » suit les progrès du club. En 1982 et 1983, le PSG remporte la coupe de France. Les premières

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échauffourées suivent de près. Si bien qu'au lendemain du massacre du Heysel, le 29 mai 1985, les dirigeants du PSG, gênés, écrivent à la Préfecture de Police pour signaler l'existence d'une bande de hooligans... qui n'avait certes pas échappé aux Renseignements généraux. La tribune s'est même trouvée un tribun : Serge Ayoub dit « Batskin » � en raison de son habileté à manier la batte de base-ball. Ayoub se moque du foot. Il ouvre une boutique de tee-shirts, fonde les Jeunesses nationalistes révolutionnaires (JNR), dans la mouvance du libraire néo-fasciste Jean-Gilles Malliarakis. Sur les travées, il joue les sergents-recruteurs. Par faiblesse ou par cynisme, les dirigeants du club, alors conduits par Francis Borelli, laissent faire jusqu'à la complaisance. « Un comble : il fallait que j'insiste des semaines pour faire effacer les graffitis antisémites sur les murs du stade » , se souvient le contrôleur général Norbert Rouibi. Pis : en 1990, c'est bien à la demande d'Ayoub, appuyée par le PSG, que le commissaire Pecquet, antillais d'origine, sera éloigné du Parc des Princes. Les skins tenaient sa présence pour une « provocation »... Deux ans plus tard, pourtant, lorsque Canal+ prend le contrôle du club, l'influence des JNR est en chute libre. Sur les gradins du kop, les crânes rasés ne sont plus légion. Mais le stade est devenu un défouloir. L'Angleterre, mère-patrie du hooliganisme, a montré l'exemple. Aujourd'hui, la violence se camoufle sous de simples joggings, prête à éclater à la première occasion. Les skins cherchent la bagarre. Les « casuals » � de l'anglais « Casual wear », tenue de détente � pratiquent la guérilla. Le hooliganisme camouflé. Conscients de la menace, les nouveaux responsables du club encouragent les associations de supporters � le PSG en compte 17 � « pacifiques » à gagner l'autre tribune populaire, celle d'Auteuil. A Boulogne, même les associations féminines se faisaient régulièrement tabasser... « Il n'a jamais été question pour nous de laisser le champ libre à quelques fanatiques, explique Jean-François Domergue, ancien joueur devenu manager général du PSG. Il fallait éviter la contagion et, surtout, assurer la sécurité des supporters. » Bref, l'apaisement à tout prix. Sans illusions, les dirigeants rédigent une « Charte du supporter ». Au siège de Canal+, ils ouvrent un bureau de placement pour supporters au chômage. Plus discutable : au Parc des Princes, ils vont jusqu'à recommander aux caissiers de ne pas vendre de billets pour Boulogne aux supporters de couleur, ou simplement d'origine étrangère. A la sortie du stade, les « ratonnades » continuent... Le 8 septembre dernier, au cours du procès d'un hooligan parisien accusé d'avoir tabassé plusieurs Maghrébins, les magistrats déploreront cette attitude, allant jusqu'à parler de « purification ethnique » . Un rapport de police, cité à l'audience, indique que « les forces de l'ordre ont laissé la tribune s'autogérer ». C'est un aveu d'impuissance. Mais aucun remède proposé n'est réellement convaincant. La Préfecture souhaiterait un meilleur filtrage et un meilleur encadrement des supporters, le Club réclame à cor et à cri la création d'une « brigade spéciale » . Dialogue de sourds. Au cours d'une réunion au sommet, le préfet de police d'alors, Pierre Verbrugghe, s'emporte et chasse Bernard Brochand de son bureau ! Pour encadrer ses supporters en déplacement, le PSG fait appel à une société de sécurité privée, Challengers. Ayoub a bien tenté de rafler le contrat, mais il est éconduit sans ménagement. Challengers a pris en charge la sécurité du défilé du Bicentenaire, de plusieurs grands concerts de rock. L'envers du décor est moins net : l'un des dirigeants de la société, Pascal Berger, milita aux Faisceaux nationalistes européens, fréquenta longtemps les durs du kop de Boulogne, compta parmi les fidèles des JNR. Au lendemain des graves incidents du match OM-PSG, le 29 mai, le club met fin au contrat de Challengers. Motif officiel : le PSG n'organisera plus de déplacements de supporters ; il n'a donc plus besoin de service de sécurité. Mais le soupçon demeure : Challengers n'offrait-elle pas des extras à quelques ultras ? Amer, Pascal Berger s'estime victime d'une campagne de « calomnies » . « Ne me parlez plus du PSG, dit-il. C'est du passé. » Au Parc des Princes, le passé ne meurt pas. Après Challengers, c'est à Fabian Guyomarch, une autre ancienne figure des skinheads du kop, que le club a fait appel pour « discuter » avec ses insupportables supporters. Il y a dix ans, « Fabian » fréquentait la tribune une écharpe du club londonien de West Ham autour du cou (2). Aujourd'hui, il assiste à tous les matchs avec son fils, dispose d'un bureau au Parc des Princes, organise des rencontres avec les ultras. « Il est un élément parmi d'autres au service du club pour maintenir le calme » , explique Domergue. Face à la montée des « casuals » , les dirigeants parisiens comptent, quoi qu'ils en disent, sur le charisme de celui qui se flatte volontiers d'avoir été « le premier hooligan de Paris ». Même le prochain renforcement des mesures de sécurité, à l'intérieur et aux abords du stade, ne suffit pas à les rassurer. D'autant qu'à l'approche du match France-Israël, le 13 octobre, plusieurs groupuscules néo-nazis ont repris leur travail de propagande là où ils l'avaient interrompu. Chez plusieurs des jeunes gens ordinaires mis en examen par le juge N'Guyen, les policiers ont retrouvé des insignes, des drapeaux et des écrits à la gloire du nazisme. Le PSG s'est presque fait une raison : il faut apprendre à vivre avec ses hooligans. L'extrême-droite la plus violente, elle, n'a peut-être pas renoncé à s'offrir une tribune. HERVÉ GATTEGNO (1) Cf Alain Ehrenberg, « la Rage de paraître », in « L'amour foot », Autrement n° 80, mai 1986. (2) Cf l'ouvrage de référence de Philippe Broussard, « Génération supporter », R. Laffont, 1990.

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PaperBlog

Hooligans PSG, des supporters joyeux du FN Publié le 26 mai 2008 par Richard Kirsch Jean-Marie Le Pen n'en croit ni ses yeux ni ses oreilles, il existe encore de braves

garçons qui croient en ses valeurs. Il était une centaine dans la métro , les supporters du PSG avec les banderloles , les tambours , les sifflets. ils étaient heureux à la station St Michel à Paris et saluaient le bras bien tendu les badauds, les touristes et n'hésitaient à donner une franche tape dans le dos aux Arabes de la rame. Quelle fête ! Cette humeur joyeuse donnait du baume au coeur surtout lorsqu'ils entonnèrent ces merveilleux chants nationalistes d'une autre époque.

Ah la nostalgie.. Quelle jeunesse ! Toujours prête à aider son prochain, à le pousser dans ou sous le métro pour qu'il ne rate pas sa correspondance. Ils sont comme ça les hooligans du PSG, ils aiment leur club , leur pays . Le Pen se faisait des soucis, il a tord car un patriotisme extrêmement droit existe toujours et se manifeste spontanément lors des grandes occasions.  

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SO FOOT.com

Kop of Boulogne, the story

5 mars 2010 à 00:10

Un portrait historique du Kop of Boulogne, rédigé à six mains et qui date donc un peu (2007). Il y manque notamment tous les derniers développements de la rivalité avec Auteuil, ainsi que le rapprochement de plus en plus fusionnelle avec l’extrême-droite radicale, surtout depuis la mort de julien Quemener. Cependant sa relecture peut s’avérer instructive dans le contexte actuel.

Paru dans le So foot n°43 , avril 2007

Kop of Boulogne, the story

par Nicolas Kssis-Martov, Jean Damien Lesay et Philippe Roizès

Calqué au départ sur le modèle anglais, le Kop de Boulogne aura été successivement l’apanage des keupons puis des skinheads

et aujourd’hui d’un mix à dominante blanche et anti-racailles de jeunes branleurs en mal de sensations fortes, de supporters nationalistes, de hooligans tendance dure, d’une petite poignée de nazillons et de quelques brebis égarées. Une biodiversité qui s’explique par l’histoire de la tribune depuis trente ans. Où il est, forcément, question de politique à un moment donné. –

C’était un 18 septembre, année 1976. On les appelait les “jeunes supporters”. Le PSG leur avait créé une carte d’abonnement pas chère, exprès, une sorte d’opération marketing pour attirer la jeunesse de l’époque. Ils étaient cinq cents, massés en tribune K du Parc des Princes, pour encourager leur équipe. Quelques mois plus tard, janvier 1977, lors d’un déplacement de trois cars et de cent cinquante indépendants à Nancy, on parla des premiers débordements, un peu. L’année suivante, les jeunes supporters se sont déplacés en tribune Boulogne devant laquelle, traditionnellement, depuis le premier match du PSG au Parc, les joueurs viennent s’échauffer avant le match. Manu, enfant de La Garenne-Colombes, en banlieue parisienne, a quinze ans. Paris affronte Valenciennes. L’ambiance du stade l’impressionne plus que le match. À 17 ans, il achète la carte de jeune supporter. “Au début, j’allais aux matchs tout seul”.

“500 hooligans qui chargeaient dans les rues”

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Le Kop de Boulogne naît véritablement le 2 août 1978, suite à une modification des tarifs au Parc des Princes. À cette époque, la quasi-totalité du Parc est régulièrement acquise aux équipes adverses. Le Kop part de loin, mais les supporters anglais offrent un modèle qui a de la gueule : manifester son soutien de manière ostentatoire et bordélique ! À la fin des années 70, la frange la plus prolétaire du mouvement punk anglais est une inconditionnelle du stade. Les groupes, Sham 69, Cockney Rejects et Cock Sparrer, chantent leur passion du foot. Mimétisme oblige, quelques punks français s’en inspirent. Comme Manu. “Jimmy Pursey, le chanteur des Sham 69, parlait avec ferveur de l’équipe de West Ham. Alors je suis allé à Londres voir un match. L’énergie dans les tribunes était incroyable. À la sortie du stade, je me suis retrouvé au milieu de 500 hooligans qui se tapaient avec les supporters d’en face, chargeaient dans les rues, renversaient tout sur leur passage. Je n’avais jamais entendu parler des hooligans auparavant et j’étais bouleversé”.

Dès 1980, le Kop de Boulogne déploie une véritable logistique pour mettre l’ambiance : chloratre, corne de brume, fumigènes, drapeaux, bâches, une centaine de chants et de slogans... “Le Parc avec nous” est un cri de guerre destiné aux autres tribunes pour les rallier à la cause. “À cette époque, on était une cinquantaine, des punks, comme ‘Chômeur’ ou le bassiste de Sherwood, mon groupe, des autonomes (tendance voyou, dure et informelle de l’extrême-gauche de l’époque) et des jeunes sans étiquette ni look, à nous manifester bruyamment mais ça restait gentil”, se souvient Manu.

La “fine fleur du macadam”

La naissance du Kop de Boulogne a lieu dans un climat particulier. Le pavé parisien voit se côtoyer et s’affronter différentes bandes : punks, skinheads, mods, teddy boys, fifties… La “fine fleur du macadam”, comme le chantait La Souris Déglinguée, groupe emblématique de cette période. Tous se retrouvent dans les concerts, dans les squats où gravitent les autonomes. Outre La Souris, de nombreux groupes punk et oi (mélange de punks et de skinheads) comptent dans leurs rangs ou dans leur public des habitués du Parc. Fabian, skinhead à l’époque et assidu du Parc, est d’ailleurs roadie de La Souris, à une époque où tous vivent en marge, sans être politisés. Les liens de l’amitié comptent alors davantage que les étiquettes idéologiques. Cet “âge d’or” entre 1979 et 1983, avant que la politique ne vienne casser ou clarifier les choses, selon le point de vue, transpire une atmosphère électrique. Un Paris souterrain plus dur et moins fliqué. La tribune Boulogne, sorte de foutoir anarchisant, constitue un appel d’air bienvenu pour ce petit milieu.

“Voler le képi des flics”

“Lors d’un match contre Bastia, les supporters corses sont venus dans notre tribune, armés de flingues, pour nous bastonner. À partir de là, on a décidé d’aller systématiquement envahir les autres tribunes et de piquer les écharpes, les drapeaux et les casquettes des supporters adverses. Un truc d’ado à la recherche d’une identité ! Les mecs étaient tellement impressionnés qu’ils se laissaient faire”. Rapidement, la tribune Boulogne, préalablement ouverte à tous les supporters, est réservée aux irréductibles parisiens, afin de limiter les affrontements. À l’époque, l’absence de fouilles, ou presque, et la possibilité de se balader dans tout le stade après la mi-temps, ruinent ces efforts. “Au bout d’un moment, il y a eu quelques flics dans la tribune, explique Manu. Ça a renforcé notre idée

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d’être en guerre. Ça nous est arrivé de les charger, de leur voler leur képi. Je trouve finalement qu’on bénéficiait d’une impunité assez grave. Mais on avait quand même un code de l’honneur. Pour mon groupe, Sherwood, j’avais écrit un morceau, P.S.G., qui dit de ne pas s’attaquer aux femmes, aux enfants, aux gens en famille”. Une vision que partage Fabian : “Tu dois respecter certaines règles quand tu es un hooligan. Quel intérêt de s’en prendre s’en prendre aux pères de famille ou aux voitures ? Les vrais hooligans, pour moi, vont au stade pour supporter leurs couleurs et la baston n’est qu’une possibilité. J’ai eu le nez cassé quatre fois… ça fait juste partie du truc”. Les déplacements constituent un autre problème.

Dès 1981, ils deviennent ingérables. Manu se souvient de quelques épisodes. “À Tours, on s’est fait casser la tête par un mélange de supporters, de manouches et de bagarreurs. Au stade, les flics nous provoquaient. Ça a forgé notre identité parisienne contre la France entière. Lorsqu’on est retourné en déplacement à Tours pour un autre match, c’était pour nous venger. On a jeté des fumigènes sur les mecs. Pas mal sont repartis en ambulance. C’est mon premier souvenir de violence extrême. J’ai fait pas mal de déplacements et je me souviens du casse d’une bijouterie à Rennes, d’un grand magasin foutu en l’air sur le chemin entre la gare et le stade à Auxerre, d’un train défoncé et des portes d’entrée du stade forcées à Nancy, parce qu’on ne voulait pas nous laisser rentrer”.

Manu, Chômeur, Crabe et Sniff

En 1982, le KOP de Boulogne atteint entre mille et mille cinq cents supporters. Lors de la coupe de France, le 15 mai, à la suite de la victoire du PSG contre Saint-Étienne, les supporters parisiens envahissent le terrain durant plus d’une heure. Parmi eux, un certain Basile Boli. C’est durant l’été que les premiers skinheads, pas spécialement politisés (la première bande de skinheads en France venait des quartiers populaires de Colombes et était multi-raciale), pour la plupart des anciens punks, commencent à fréquenter le Parc. Quelques mois plus tard, d’autres skinheads qui, eux, commencent à lorgner vers l’extrême-droite, viennent voir, par défi, qui sont les skins supporters du PSG. “Je me souviens de quelques punks, Manu, Chômeur, Crabe, Sniff , confie Fabian. Je suis venu avec des skins des Halles, un peu par hasard. Au début à cinq, puis dix, puis vingt. J’y ai retrouvé des skins de différents quartiers parisiens, Tolbiac, Bonsergent, Luxembourg. On paradait”. Les premiers saluts nazis sont lancés par provocation. Rapidement, les nouveaux arrivants se mettent en tête de faire de la tribune Boulogne leur territoire. “Il était clair qu’à l’époque, il n y avait pas de place pour les punks là où nous étions, confirme Fabian. Avec Manu, on s’est battu. Deux Arabes de ma banlieue m’ont prêté main-forte, ce que Manu ne comprenait pas, puisque j’étais skin et facho. J’ai vécu le Kop de Boulogne comme une cité. C’était chez moi, mon territoire”. De lointains souvenirs, mais Manu n’a pas oublié : “Je portais un cuir au dos duquel était peint un punk en train de massacrer un skin au couteau. Je me suis donc battu avec Fabian, Batskin (chef de fil des skinheads du Luxembourg, on lui doit l’ultra-politisation du mouvement à l’extrême-droite) et d’autres. Je me suis retrouvé par terre, le nez cassé. Je venais avec une chaîne cachée dans une écharpe nouée autour de l’avant-bras. J’avais même prévu du répondant dans ma voiture”.

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Les deux Jimmy, le black et le métis

La situation devient insoutenable. Hier, on convergeait au Parc ; on y règle désormais ses comptes, qui parfois débordent vers les salles de concert. Manu se souvient de ses descentes anti-skin au Rose Bonbon, un club de concerts de l’époque. Deux bad boys hardcore, en roue libre parmi les tribus rock, les deux Jimmy, le black et le métis, viennent également tester les grandes gueules et provoquer les skinheads devant le Parc des Princes. Fabian s’en amuse encore : “Là, bizarrement, ils n’étaient pas légion à vouloir en découdre avec eux. Car on savait pertinemment qu’on les recroiserait à un concert ou ailleurs. Moi j’avais du respect pour eux. On aurait pu se battre, mais quel que soit le gagnant, il y aurait eu vengeance”. Une étrange ambiance quasi-consanguine. “Lorsque je me suis battu avec Manu, ma copine de l’époque m’a fait tout un scandale parce que c’était un de ses potes. Des histoires de famille quoi !” Peu à peu, les punks et les Noirs arrêtent de fréquenter le Parc. “En 1984, il n’y a pas eu un match où je ne me suis pas battu avec les skins, déplore Manu. Je passais mon temps à surveiller si je n’allais pas prendre un siège sur la tête. Une fois, une cinquantaine de skins sont venus taper, non pas les supporters de l’équipe adverse, mais du parisien. C’est ce genre de trucs qui a décidé les supporters historiques du PSG à ne plus venir au Parc. J’ai été chassé, en quelque sorte. ‘Chômeur’, lui, est resté. Il est devenu skin et a rejoint les autres. Je ne l’ai plus jamais revu”.

“La croix celtique, mais pas la croix gammée”

Une nouvelle ère s’ouvre en effet. À la tribune Boulogne, ce sont désormais les plus bruyants qui font la loi ; pas forcément les plus nombreux. Les skinheads, entre cinquante et cent, entreprennent de faire de Boulogne un territoire blanc. Pour beaucoup de supporters, la politique n’est pas importante, mais, clairement, sous la nouvelle impulsion des skinheads, les jeunes insoumis de Boulogne franchissent un nouveau seuil dans l’échelle de la violence. “J’ai contribué à politiser la tribune Boulogne, revendique Fabian. J’avais 22 ans quand j’ai pris ma carte du Front National, en 1984. J’avais plus la haine contre le système qu’envers les immigrés. Et, paradoxalement, je jouais au foot dans une équipe composée de Noirs et d’Arabes. On s’engueulait et on défendait le même maillot en même temps”. Le mouvement skinhead est informel. Même au plus fort de sa politisation, la plupart de ses membres n’étaient pas des idéologues. Les contradictions et les nuances étaient nombreuses. “En tant que militant, je combattais pour mes idées à plein temps, y compris au stade, explique Fabian. J’étais fier d’être Français, d’arborer la croix celtique, mais pas la croix gammée”.

“Je préférais ses chiens aux Anglais”

Le 3 mars 1984 se joue au Parc un match capital. Pourtant, il ne met pas en scène le PSG, mais la France et l’Angleterre. Un tournant. C’est la première fois que Paris est confronté à du vrai hooliganisme, autrement dit de la violence dans le stade et dans la ville suite à un déplacement de supporters. Oubliant les querelles intestines, les diverses bandes de

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skinheads de Paris et de banlieue, décident de faire front à l’envahisseur. Rendez-vous Porte de Saint-Cloud trois heures avant le match. “Grossière erreur, s’exclame Fabian. Les Anglais étaient déjà sur place et ça se battait déjà dans les rues. J’avais ramené des barres de fer, que j’ai distribué à quatre ou cinq potes. Mais les Anglais étaient peut-être trois cents et ont chargé tous ensemble. J’en ai tapé un, et puis je me suis réfugié sous le flipper d’un café. Le patron a menacé de lâcher ses chiens si je ne sortais pas. Je lui ai dit que je préférais ses chiens aux Anglais”.

Au Parc, les Anglais se sont invites dans la tribune Boulogne et les skinheads décident de les virer de la partie haute. “Certains ont fait une expédition en bas et ont pris une correction. Mon frère a pris un coup de hachette sur le crâne. On l’a emmené à l’hôpital. Je n’ai même pas vu le match. Aux urgences, on s’est encore battu avec des Anglais qui venaient se faire soigner. Ensuite, j’ai continué la chasse dehors”. Éparpillés en petits groupes, les skinheads français n’ont jamais pu se retrouver. Mais leur volonté de tenir la tribune Boulogne s’était encore renforcée.

“Risquer de se prendre une fessée par Guy Roux”

Avant le Kop de Boulogne, les médias français ne connaissaient ni ne s’intéressaient au hooliganisme, une spécificité anglaise. Pourtant, avec les images télévisées de bastons dans les tribunes lors du match France-Angleterre, certains prennent conscience du phénomène. À partir de 1986, Philippe Broussard, alors jeune journaliste, supporter du PSG et familier de la scène punk rock, commence à écrire sur le sujet, notamment dans le Matin de Paris. Le magazine Lui publie un reportage photo sur les skinheads et une inévitable plongée dans le Kop de Boulogne. Charles Bietry descend dans la fosse et interroge des skins lors d’un match pour Canal Plus. Images fascisantes et propos violents qui traumatisent l’opinion. “La première fois que l’on a parlé du Kop dans les journaux, raconte Fabian, c’était parce qu’on avait retrouvé, lors d’un déplacement, un graffiti ‘skinhead PSG hooligan’ dans le vestiaire de l’AJA. C’était l’œuvre d’un ou deux mecs qui faisaient parler de la tribune, sans qu’on soit forcément tous d’accord. Ça nous faisait marrer parce qu’on était jeunes et cons, et que ça effrayait le bourgeois. Avec le recul, risquer de se prendre une fessée par Guy Roux pour ça, c’est débile”. L’identité facho de la tribune Boulogne se forge ainsi, tandis que la réalité est à cette époque moins féroce. La frange la plus dure du Kop, comme les médias, y trouve son compte.

“Faire de Boulogne une vraie tribune politique”

Batskin, lui, tente de recruter au sein du Kop pour faire strictement de la politique. “Les gens de son entourage venaient plus souvent au Parc que lui, parce qu’il n’aimait pas trop le foot, rapporte Fabian. Vers 1985-86, il aurait voulu faire de Boulogne une vraie tribune politique, démarche qui ne plaisait pas à la plupart des supporters, même s’ils pouvaient être sensibles à son discours. Nous, on venait pour le foot en revendiquant une sensibilité politique, mais on ne voulait pas transformer le stade en meeting politique”. La vocation initiatique du Kop de Boulogne se poursuit en se sectarisant. Les extrêmes-onctions du

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pavé de la capitale, les jeunes fachos en manque de sensations fortes, viennent se construire une virilité dans l’entre-soi du Kop, comme l’illustre le cas Maxime Brunnerie (auteur de la tentative d’assassinat de Jacques Chirac). Les générations suivantes, composées des casuals et des indépendants, sont, en quelque sorte, plus proches de la démarche d’un Fabian. Loin de la caricature du skinhead nazi, ils gardent cependant une sensibilité nationaliste prononcée. Pas vraiment d’accord avec les ratonnades qui se multiplient aux abords du Parc, lassé par la politique et les embrouilles, Fabian quitte le Front National en 1987 puis délaisse le look skinhead. Mais continue à fréquenter la tribune Boulogne.

Canal arrive

Le PSG commence à mesurer l’ampleur du phénomène hools au début des années 90. Jean-François Domergue arrive dans les valises de Michel Denisot et de Canal, qui reprend le club en 1991. Il a l’intention de “comprendre mais pas d’excuser”, selon les mots de Fabian. Dans le même temps, la police délègue un des siens pour jouer l’interface avec le Kop. Le club décide d’entamer des négociations, y compris avec la composante la plus radicale des supporters. Fabian, qui travaille au magasin London Style, alors point de ralliement pour les indépendants parisiens le samedi avant le match, sert d’intermédiaire. “Les dirigeants voulaient organiser une réunion pour les rencontrer, explique-t-il. Le leader de la nouvelle génération était comme mon petit frère. À cette première réunion, il y avait donc les Commandos Pirates, et puis Batskin et ses amis. Pour les dirigeants du PSG, il était clair qu’il y avait, d’un côté, ceux qui venaient au stade et faisait les déplacements, et de l’autre, ceux qui venaient seulement propager leurs idées au Parc”.

Le PSG recrute des “stewards”, censés encadrer les supporters en déplacement. Et propose à Fabian de s’occuper d’un département supporters, le premier en France, distinct de la sécu, dont le but consistait à maintenir de bonnes relations avec les fans du PSG. “Je n’étais pas en contact qu’avec le Kop de Boulogne, se souvient Fabian, mesurant l’ampleur de la tâche. Je travaillais avec tout le monde. Avec les supporters de la tribune Auteuil aussi, qui montait en force. Je me souviens de leur premier déplacement, à Sochaux en l’occurrence. On arrive dans les gradins et là, embrouille : les mecs de Boulogne ne voulaient pas que ceux d’Auteuil posent leurs banderoles. Je les ai convaincus qu’il fallait leur faire une petite place. Deuxième embrouille : les supporters de Boulogne voulaient lancer les chants en premier. Me voilà obligé d’arbitrer un concours, pour déterminer qui est le meilleur, en matière de chant. J’étais devenu une sorte d’animateur social”.

Les flics insultent le divisionnaire

Avec les policiers, qui voient souvent d’un mauvais œil qu’un ancien du Kop se mêle de leurs affaires, les rapports ne sont pas simples non plus. “Je me souviens d’une fois où, à la tribune de Boulogne, on est venu me chercher parce qu’un couple, pas des hooligans, se faisait insulter par des C.R.S., rapporte Fabian. Je vais discuter avec les flics, qui me

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disent de dégager sous peine de le regretter. Je reviens avec le divisionnaire. Les C.R.S. se mettent alors à gueuler : ‘T’es venu avec ton pote, lui aussi il va s’en prendre plein la gueule !’ Ils ne l’avaient pas reconnu”. La collaboration entre le PSG et Fabian ne dure pas. Selon ce dernier, les dirigeants du club n’ont pas compris qu’on ne pouvait pas traiter des supporters comme des “boîtes de conserve”. “La grosse erreur des dirigeants du club, précise-t-il, c’est de m’avoir pris pour le chef de la tribune Boulogne. Ils pensaient me payer pour que je sois leur pute, voire un auxiliaire des renseignements généraux. Ils avaient oublié que je viens d’une cité et que j’aime sincèrement le foot”.

Shooter les CRS à coups de rangers

28 août 1993. Pour son deuxième match de la saison à domicile, le PSG reçoit Caen. Des vibrations constatées lors de la finale de coupe face à Nantes en tribune haute occasionnent la fermeture provisoire du territoire historique du kop de Boulogne qui, par ailleurs, fait un peu trop parler de lui. La migration à l’étage inférieur va être l’occasion d’une des plus violentes bastons qu’ait connues le Parc. En cette fin d’été, les hools parisiens sont chauds et mettent le wild jusqu’au moment où un supporter saute sur le terrain pour récupérer sa chaussure volante. Les CRS interviennent et les hools se jettent sur eux pour une séance de tirs au but. À coups de rangers dans la tronche, ils explosent les forces de l’ordre qui battent en retraite. La baston, filmée et diffusée en boucle, marque les esprits. Paradoxalement, si l’événement a définitivement assis la réputation du KOB après une saison 92-93 marquée par de très nombreux incidents, il augure aussi d’une transformation notable dont les effets se font encore sentir aujourd’hui. “Avec des peines de prison ferme jusqu’à quinze mois pour dix-huit personnes et de nombreuses interdictions de stade allant de trois à cinq ans, la tribune a été nettoyée”, confie Alain (1), un policier très proche du dossier.

“Les Boys, on leur demande pas leur avis”

Après PSG-Caen de 93 et le “nettoyage” qui s’ensuit, le paysage se redessine. À la réouverture de la partie haute, le kop découvre un saucissonnage en trois parties de la tribune. C’est l’occasion pour chacun de marquer son territoire. À gauche, en B3, les Boulogne Boys sont tiraillés entre culture ultra, minoritaire à Boulogne, et modèle anglais moins exubérant mais plus dur. Avec six cents cartés, les Boys sont souvent mis en avant par les médias. À tort. Non seulement ils ne correspondent pas à l’image du supporter forcément facho et violent qu’on leur accole souvent, mais surtout ils ne tiennent pas la tribune. “Les Boys, on ne leur demande pas leur avis”, tranche Alain. Dénigrés par d’autres groupes pour leur culture ultra et leur incapacité à régler seuls leurs querelles avec les Tigris en 2005-2006, les Boys n’en restent pas moins les grands animateurs de Boulogne.

Au centre, en B2, Rangers, Gavroches et autres petits groupes sont de vrais kopistes à l’anglaise. S’ils préparent des tifos de temps à autre, ils préfèrent utiliser leur fric pour aider un membre en délicatesse avec la justice. Présents en tribune depuis 85, comme les Boys, ils en constituent le noyau historique et l’âme. Philippe Perreira, président des Gavroches, a été adoubé par les plus durs porte-parole de la tribune tout entière. Son

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groupe, qui ne carte plus, représenterait environ trois cents personnes, les Rangers la moitié.

“Baston dans les règles”

À droite, en B1, les casuals ou indépendants –un euphémisme synonyme d’hooligan– ont pris la place des skins dans l’animation violente de la tribune. En 1993, les groupes dominants sont les Commandos Pirates et les restes de l’Army Korps. Inspirés du modèle made in England, ils vivent leur passion pour le foot à travers une culture, notamment vestimentaire (Umbro, Lonsdale, Fred Perry…), qui s’affirme au cours des 90’s et dont la violence est la colonne vertébrale. Dans un fanzine de la première moitié des 90’s, un membre de l’AK déplore ainsi que “la violence dans le foot ne soit pas assez généralisée”. Aujourd’hui, la Casual Firm, apparue après PSG-Caen et rendue célèbre en 1995 par sa banderole anti-Weah ornée d’une croix celtique, reste la plus représentative. Autour d’elle gravitent de nombreux groupes. Leur motivation principale est la baston entre adultes consentants. Jusqu’en Angleterre, on sait que les règles du fight à mains nues sont le plus souvent respectées à Paris. “Quand une baston est faite dans les règles, ça ne donne pas lieu à des règlements de compte derrière”, commente Alain. Mais les quelque trois cents interdictions de stade actuelles obèrent les forces vives des casus parisiens qui, selon la police, n’auraient plus aujourd’hui les moyens d’en découdre. Les rares “contacts” en province ne mobilisent que quelques dizaines de durs. De fait, les dernières vraies bastons, en dehors de la “guerre interne” face aux Tigris (lire So Foot 36) sont celles qui les ont opposés aux Lyonnais en 2006.

“Anti-racailles”

Le crédo politique de Boulogne le mieux partagé est une définition a minima de la tribune comme “territoire blanc” mais surtout “anti-racailles”, notamment par opposition à Auteuil, réputée multiethnique et qui a pris de l’importance depuis 1993. Dans la culture casual qui tend à dominer le KOB, le stade ne doit pas être un lieu de prosélytisme. Être présent à Boulogne est souvent un acte politique en soi et il n’est pas nécessaire d’en faire plus. Pour Bernard (1), un vieil habitué du kop passé par plusieurs associations, “Boulogne est une forme de sécurité, de respect. On a un drapeau et où qu’on aille on veut qu’il soit respecté”. Contrairement aux 90’s où des secteurs étaient interdits de fait aux Noirs et Maghrébins, la différence se ferait donc moins aujourd’hui sur la couleur de peau que sur le respect des valeurs majoritaires de la tribune. “Depuis cinq-six ans il n’y a plus de problèmes avec les blacks et les beurs en tribune s’ils entrent dans le moule”, constate Alain. Pour autant, ils demeurent rares.

Cette façade apolitique a longtemps valu aux casuals d’être en conflit avec les skins fachos dominant des 80’s. “C’est faux de dire que le KOB est une tribune fasciste. Les casus sont à l’extrême droite et à l’extrême gauche, certains sont UMP, décrypte Alain. Il n’y a plus de néonazis, même s’ils restent foncièrement nationalistes”. Les fachos n’ont pas pour autant disparu, et pour tout dire, la frontière entre eux et certains casuals extrémistes reste floue, en témoigne la participation d’indéps à la manif du 9 mai 2006 en mémoire de Sébastien Deyzieu (2) organisée par l’extrême droite radicale.

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“Derrière, c’est dix contre un”

Profitant des événements de PSG-Caen qui avaient vu le kop descendre dans la partie basse de Boulogne, une population borderline s’est définitivement installée en rouge. Avec la sectorisation de cette tribune en 95-96, R1 devient d’abord le repaire des durs puis un lieu de villégiature pour anciens combattants, “des papys” selon Alain. R2 attire un conglomérat d’individualités “incontrôlées et incontrôlables” qui pogotent sur chaque but, ne représentent rien et énervent le reste du kop. Car les casuals ont compris que la période n’est plus à l’extériorisation de certaines opinions qui, selon eux, dénaturent le mouvement. Depuis plus de dix ans, ils tentent ainsi de faire le ménage, comme en 94-95, quand le PNFE, parti d’extrême-droite, est chassé manu militari pour avoir tracté en tribune. Cette lutte interne est l’un des aspects les plus méconnus de la vie du KOB. Et pour cause. Si, comme le reconnaît Alain, “les mecs qui font des saluts nazis sont visés par certains membres de Boulogne”, ce nettoyage ne se fait pas dans la sérénité. Bernard témoigne : “Quand on veut faire le ménage, on se fait rattraper par la justice”. Si lui-même distribue des baffes aux grandes gueules qui se vantent d’une ratonnade ou entrent en tribune en hurlant “white power !”, il ne le crie pas sur les toits. “Les mecs sont assez lâches. Derrière, c’est à dix contre un”.

“À la vie, à la mort”

Outre le prosélytisme politique, les casus reprochent aux fachos de ne pas assurer dans les bastons. Nicolas Hourcade, sociologue et aujourd’hui également journaliste à So Foot, a joué les sous-marins : “Contre Galatasaray, en 96, j’étais avec des durs de Boulogne et j’ai croisé un type d’extrême droite que je connaissais en train de brûler un drapeau turc. Quand ça a tapé, sa bande n’a pas bougé. Peu après, j’étais avec des suiveurs et on s’est fait pourrir par un vrai dur parce qu’on restait en retrait. Le gars nous menaçait de représailles”. Car la solidarité chez les casus, c’est sacré. “Les liens entre eux sont très forts et se renforcent au gré des interpellations. Il n’y a pas de trahison, c’est à la vie à la mort, à moins qu’une histoire de cul ne s’en mêle”, explique Alain.

Une famille, Boulogne sait aussi l’être dans d’autres occasions. En 1993, 450 personnes assistent à l’enterrement du principal leader des Commandos Pirates décédé dans un accident de voiture. Ses parents, membres du PCF, s’étonnent un peu devant ces jeunes gens aux cheveux courts. Mais la consigne passe pour qu’aucun signe politique ne soit visible. Au match suivant, le responsable de la police assure Fabian qu’aucun de ses hommes ne rentrera en tribune ce jour-là, pour les laisser à leur peine. “Avec France-Angleterre et PSG-Caen, ce fut un troisième événement fort vécu au KOB, raconte Fabian. Après ce jour-là, le kop n’a plus jamais été pareil”.

Chutes de tension

Malgré ses conflits internes et une atmosphère parfois tendue, Boulogne reste une tribune où l’amateur d’ambiance est souvent servi. Kop historique au Parc et en France, elle est capable de se surpasser dans les grandes occasions. “À Auteuil, l’ambiance est à peu près la même à tous les matchs, témoigne Nicolas Hourcade. À Boulogne, les mecs poussent avec l’équipe, tu les sens vivre le match, s’engager physiquement avec les joueurs. J’ai fait PSG-Real à Boulogne en 93, la tribune est entrée en fusion alors que pour le PSG-

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Steaua de 97, j’étais à Auteuil et je sentais que c’était un grand match mais pas avec une telle différence”. Seulement, quand les grandes occasions se font rares et que la descente en L2 se profile, Boulogne connaît de sérieuses chutes de tension, du fait même de sa culture. Récemment, face à Auxerre, le capo des Boys abandonne son méga pour haranguer les groupes voisins, muets durant tout le match. Un geste aussi rageur que vain. En faisant du KOB “un lieu où l’on se retrouve plus qu’un lieu où l’on s’exprime”, selon Alain, les indépendants montrent aujourd’hui qu’ils ont gagné la tribune et que le foot reste avant tout pour eux un moyen de se forger une identité et de se payer, de plus en plus rarement, de bonnes bastons. – Tous propos recueillis par JDL, NKM et PR.

(1) Ces prénoms-là ont été changés à la demande des interviewés craignant des représailles pour avoir “parlé”. (2) Militant nationaliste, Sébastien Deyzieu est décédé le 7 mai 94 en tombant d’un toit où la police le pourchassait en marge d’une manifestation d’extrême droite interdite.

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• Supporter tué au Parc des Princes : l'enquête rebondit Jérôme Bouin (lefigaro.fr) 07/05/2009 | Mise à jour : 21:47

Antoine Granomort quitte le restaurant McDonald's situé près du lieu du drame, dans la nuit du 23 au 24 novembre 2006. Crédits photo : AFP

Plus de deux ans après le drame qui avait coûté la vie à un jeune supporter du PSG, un rapport d'expertise remet en cause le déroulement des faits tel que l'a décrit le policier à l'origine du tir mortel.

23 novembre 2006. Au terme du match de coupe d'Europe de football opposant le Paris Saint-Germain au club israélien Hapoël Tel-Aviv, disputé à Paris au Parc des Princes, un policier tue avec son arme un supporter du club parisien, Julien Quemener, 25 ans, et en blesse un autre, Mounir Boujaer, 26 ans. Antoine Granomort, qui a depuis été révoqué de la police pour escroquerie, explique avoir agi en état de légitime défense. Pourtant, selon le quotidien Le Parisien-Aujourd'hui en France, le rapport d'expertise

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balistique et criminalistique daté du 25 mars et remis à la juge d'instruction parisienne Nathalie Dutartre, contredit la version jusqu'ici établie à partir des témoignages de Granomort et d'autres personnes présentes sur place le soir du drame.

Retour sur les faits. À la fin du match PSG/Tel-Aviv ce soir-là, Antoine Granomort, employé à la police régionale des transports, se trouve dans un véhicule de police banalisé. Il intervient alors pour défendre un supporter de confession juive menacé par des ultras du PSG. Selon sa version des faits, après avoir annoncé sa fonction de policier et vidé sa bombe lacrymogène, il aurait été bousculé par un groupe de supporters hostiles. Ce n'est qu'une fois à terre, ayant perdu ses lunettes, qu'il aurait tiré sur «la grosse masse» au-dessus de lui. La balle transperce Mounir Boujaer, grièvement blessé, et atteint mortellement Julien Quemener. Antoine Granomort a été placé sous le statut de témoin assisté dans cette affaire.

La thèse de la légitime défense contestée

Si plusieurs témoignages, dont celui du jeune supporter juif, ont confirmé l'état de légitime défense, Mounir Boujaer conteste cette version et affirme que le policier aurait tiré debout. Les conclusions du rapport révélées jeudi tendraient à prouver que la trajectoire du tir, telle que reconstituée par les experts, ne correspond pas à la version d'Antoine Granomort. Sa version «correspond à un tir effectué nettement de bas en haut, atteignant la victime à l'abdomen. Elle est incompatible avec les constatations médicales, les trajets intracorporels des projectiles dans les corps des victimes, atteintes à la poitrine, étant nettement orientés de haut en bas», expliquent les experts cités par Le Parisien. Autrement dit, au moment du tir, l'arme était située au dessus de l'impact dans le corps des victimes. Si ces dernières étaient debout, le policier devait aussi l'être.

«Ces conclusions permettent de contester la thèse de la légitime défense», explique déjà Me Gilbert Collard, l'avocat de Mounir Boujaer, dans Le Parisien-Aujourd'hui en France. De son côté, l'avocate d'Antoine Granomort, Me Florence Rault, ironise sur le travail des experts : «J'étais à la reconstitution. (Ils) ont travaillé avec une pelote de laine rouge ! Je ne remets pas en cause leur compétence mais je m'interroge sur la fiabilité d'une expertise réalisée avec des moyens dérisoires». Et l'avocate d'annoncer son souhait d'une nouvelle expertise.

 

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04/12/2006 à 00h21

Hommage et dégommages SCHNEIDER Grégory

«Que ceux qui ne veulent pas être filmés se rabattent vers le centre du cortège. Et n'oubliez pas : pas de débordements, ils n'attendent que ça pour vous rentrer dedans.» Deux types sortent leur cagoule. Un autre réajuste le foulard noir qui lui cache le visage. La plupart n'esquissent pas le moindre geste : inutile, ils sont masqués depuis le départ ; 1 500 supporteurs du Paris-SG ont rendu hommage, hier, à Julien Quemener, abattu par un policier le 23 novembre au soir. Entamée devant le siège du club, rue du Commandant-Guilbaud, la marche silencieuse s'est achevée 800 mètres plus loin, place de la Porte-de-Saint-Cloud, dans l'encoignure où leur camarade a pris la balle. Là, il y a de grands bouquets de jonquilles, des écharpes du Paris-SG et quelques messages accrochés au mur : «Pourquoi ?»,«RIP» (pour Rest in peace, «repose en paix»), «Justice pour Julien Quemener».

Cache-cache. L'impression générale est étrange, ambivalente. Avant de mettre genou à terre devant l'autel de fortune pour marquer le recueillement, les supporteurs présents se sont parfois laissés aller à une partie de cache-cache. Un coup dedans à défiler, un coup dehors à filmer avec le portable. Mais qui filme ? «Un flic avec une caméra, là-bas sur ta gauche... Gaffe ! Non, un journaliste... Sale race.» Avant le départ du cortège, la «sale race» avait été invitée à faire bande à part par des policiers en civil. Clairement, la presse n'est pas la bienvenue : «Alors, on est des racistes ? On est des nazis ? Fils de pute ! Tu vas voir si je suis un nazi...» Un grand type avec la boule à zéro se tient bien droit, là où Julien Quemener est tombé. Il ferme les yeux et tient comme ça deux bonnes minutes, écrasé par le respect et l'émotion.

Puis il rentre dans le rang, en montrant son majeur à un photographe : «Va te faire mettre !» D'autres sont d'accord pour parler. Un membre des Boulogne Boys, le groupe de supporteurs qui organisait et encadrait la marche : «La police n'a pas bougé quand Julien a été tué. Elle était là, mais elle n'a pas bougé.» Un familier de la tribune Auteuil, totalement solidaire : «C'est un phénomène politique. A sept mois de l'élection présidentielle, ils essaient d'entrer dans la brèche et de refaire le truc sur la sécurité.» Un autre : «On est dégoûtés.»

«Désinformation». Dégoûtés de quoi ? D'avoir perdu l'un des leurs et de l'écho qui en est fait. Les amis et parents de Julien étaient hier en tête du cortège, juste devant une gigantesque banderole : «Que justice soit faite.» Dans la mêlée, des mots circulent :

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«désinformation», «conditionnement public», «meurtre». La remise en cause du scénario retenu pour la soirée du 23 novembre un policier vole au secours d'un supporteur victime d'une agression antisémite va bon train. Pierre-Louis Dupont, président des Boulogne Boys, se sent d'en remettre une bonne couche. Il va de lui-même chercher les micros et les caméras, devant lesquels il tient salon un gros quart d'heure : «Nous sommes venus rendre son honneur à Julien Quemener, sali par les médias, les autorités et les politiques. Il faut qu'on arrête de faire de lui un fasciste hooligan. Quant à ce qui s'est passé ce soir-là, rien n'a été établi.»

Dupont joue sur du velours. Les supporteurs aussi. La décision de fermer deux sections de la partie basse de la tribune Boulogne lors du match contre Toulouse aurait eu pour effet d'expulser de facto du parc des Princes de nombreux fans du club parisien. Que s'est-il passé ? Tous les supporteurs de la tribune Boulogne ont expliqué qu'ils étaient solidaires et que, partant, ils n'entreraient pas dans l'enceinte. Puis Auteuil s'est aligné. Ce qui signifiait ? 12 000 supporteurs dehors à l'heure du coup d'envoi, dix jours après la mort par balle de l'un des leurs, la perspective d'une véritable guérilla urbaine à la moindre étincelle.

Show. Le report était, dès lors, logique : ni la préfecture de police, ni la Ligue, ni le club, ni même des associations de supporteurs soucieuses de se poser en interlocuteurs valables lors des prochaines négociations n'avaient intérêt à courir un risque pareil. Cette décision aura, de surcroît, remis les groupes de supporteurs parisiens au centre de la carte : ils ont aussi le pouvoir, fût-il de nuisance. Message reçu. A Strasbourg, à Saint-Etienne ou à Auxerre, les banderoles qui ont fleuri ce week-end «RIP Julien», «Justice pour les ultras», «Tolérance zéro pour la désinformation» donnent une juste idée du foot comme il va, par-delà les slogans marketing ou les déclarations d'intention. Les ultras de France et de Navarre ne font qu'un. Et ce football qu'on leur vend tous les jours comme une sorte de show universaliste, presque transparent à force d'être centré sur le ballon et ce que les joueurs en font, n'est définitivement pas le leur.

 

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Pourquoi la guerre des tribunes reprend au PSG 03/03/2010 

décryptage

Un supporteur parisien est entre la vie et la mort après avoir été lynché par des membres d'une tribune rivale. Retour sur la montée de phénomènes racistes et violents entre les tribunes Auteuil et Boulogne au Parc des Princes.

Par SYLVAIN MOUILLARD

Aux abords du Parc des Princes, le 28 février (AFP/LOIC VENANCE)

Une impression de déjà vu. Depuis quelques années, la violence endémique d'une partie des supporteurs du Paris Saint-Germain suscite controverses et oppositions. De la lutte entre groupes de supporteurs durant la saison 2005-2006 à la dissolution des Boulogne Boys en 2008 pour une banderole anti-chtis, en passant par la mort de Julien Quemener en novembre 2006, rien n'a enrayé cette spirale de la violence.

Le dernier épisode remonte à dimanche soir. Des supporteurs parisiens se sont violemment battus entre eux. Un homme, gravement blessé, était toujours mercredi soir entre la vie et la mort.

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«La situation est gravissime, mais ces incidents étaient malheureusement attendus», explique pour Libération Nicolas Hourcade, professeur à l'Ecole centrale de Lyon. Le sociologue, chargé par Rama Yade d'organiser en janvier un congrès sur le sujet, assure que la violence entre supporteurs parisiens montait depuis quelques semaines.

Que s'est-il passé dimanche aux abords du Parc des Princes ?

Quelques heures avant le coup d'envoi du classico PSG-OM, dimanche, des centaines de personnes convergent vers le Parc des Princes.

Exclusivement des supporteurs du club parisien, puisque les fans marseillais ont décidé la veille de boycotter le déplacement. La tension monte. «Certains fans parisiens en profitent pour régler leurs contentieux, relate RMC. Plusieurs dizaines de membres du Kop de Boulogne se présentent au pied du virage Auteuil pour en découdre. Le parvis se transforme en champ de bataille (...).»

Malgré l'impressionnant déploiement de forces de l'ordre (1500 policiers), les échauffourées continuent. Le site Internet de So Foot relate les mêmes scènes de «lynchages», sans «codes» ni «règles». «Il ne s'agissait pas d'une fight organisée, mais bien d'une sorte de guérilla urbaine déclenchée par l'attaque des kobistes [membres du kop de Boulogne, ndlr]».

«Au cours des affrontements, un membre de la tribune Boulogne s'est retrouvé isolé et passé à tabac», poursuit RMC. Ce dernier, qui souffre d'un œdème cérébral, est toujours hospitalisé dans un état critique à l'hôpital Beaujon de Clichy. L'agression a conduit Robin Leproux, président du PSG, à prendre la décision de ne plus vendre «jusqu'à nouvel ordre» de billets à ses supporteurs en déplacement.

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Pourquoi en est-on arrivé là?

Cette violence chez les supporteurs est, selon Nicolas Hourcade, une spécificité parisienne : «Il existe un conflit extrême entre deux tribunes, Auteuil et Boulogne. Ailleurs en France, il peut y avoir des rivalités et des violences entre groupes soutenant un même club mais elles ne prennent pas une telle ampleur.» Pour comprendre cette exception, il faut revenir à l'histoire des kops du PSG.

Boulogne est la tribune historique du club, née dans les années 70. «Elle a une triple tradition: supportrice, violente et nationaliste. Ça ne veut pas dire que tous ses membres sont violents ou racistes, mais il existe une minorité dominante», avance Nicolas Hourcade.

Carine Bloch, vice-présidente de la Licra (Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme) chargée du sport, précise : «Boulogne, c'est la tribune dite “blanche”. Certains empêchent les personnes de couleur d'y pénétrer. Il y a des cris de singe, des autocollants d'extrême droite, des jeunesses identitaires.»

Montée d'Auteuil. Dans les années 90, le club pousse à la mise en place d'une nouvelle tribune, Auteuil. «De tendance ultra, elle est plus cosmopolite», souligne le sociologue. «Auteuil est bien plus colorée, ouverte aux quartiers populaires», ajoute Carine Bloch.

«Au début, les membres d'Auteuil restaient en retrait par rapport à Boulogne. Ils ne répondaient pas aux provocations et ne se battaient pas», reprend Hourcade. Mais au début des années 2000, un groupe d'Auteuil, les Tigris Mystics, gagne en influence. Plus radical, il refuse la domination de Boulogne.

De nombreux incidents violents entre supporteurs du PSG pourrissent la saison 2005-2006. Cet affrontement, symbolisé par la rivalité entre les Tigris et les Boulogne Boys, semble prendre fin avec la dissolution des premiers.

«Mais peu à peu, l'influence d'Auteuil s'est de nouveau étendue. Ses membres sont les plus nombreux en déplacement, ils font davantage d'animation au stade. On remarque aussi que les jeunes y sont plus radicaux et violents qu'auparavant. Ils affichent davantage leur antiracisme», décrypte le sociologue. Carine Bloch appuie : «Le rapport de force entre les deux tribunes semble s'inverser. Boulogne utilisait la violence, Auteuil y a maintenant également recours.»

Les derniers mois ont été émaillés de plusieurs incidents notables entre les deux tribunes, sur fond de racisme et de violences exacerbés, et de résultats sportifs très moyens. «Ça a commencé lors de Bordeaux-PSG (le 5 décembre), quand un membre de Boulogne, qui portait une croix celtique, a été agressé par des supporteurs d'Auteuil. Il y a eu la revanche lors de Lille-PSG [près de 200 membres de Boulogne se sont attaqués à la tribune réservée à Auteuil le 16 janvier dernier, ndlr]», explique la responsable de la Licra. Rien d'étonnant, donc, dans les violents affrontements de dimanche dernier.

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Comment venir à bout de ces problèmes de violences?

«A en croire certaines interventions médiatiques, il y aurait des solutions miracles. Alors que non. Sinon, on l'aurait déjà fait.» Dans une interview à LyonCapitale, Nicolas Hourcade était clair. Le phénomène ultra est complexe, et ce n'est pas pour rien qu'il empoisonne la vie du PSG depuis de nombreuses saisons.

Tout d'abord, la minorité agissante qui pose problème est difficile à appréhender. «On peut estimer qu'il y a environ 100 supporters radicaux dans chaque camp, un nombre qui peut augmenter selon les circonstances», avance Nicolas Hourcade. Leur structure est souvent émiettée, autour de sous-groupes qui ne partagent pas forcément les mêmes motivations.

Existe-t-il des liens entre les membres les plus radicaux de ces tribunes et des mouvements politiques extrémistes ? Pour le sociologue, «il y a historiquement une dissociation entre la scène politique extrémiste parisienne et les tribunes du Parc. Il existe éventuellement des connexions individuelles, mais le mot d'ordre, c'est d'éviter la récupération politique».

Laisser-aller. Mais comme l'explique Carine Bloch, «il y a un renouvellement des générations, on voit arriver des supporters indépendants avec un activisme politique». Pour elle, «si on arrive à des situations aussi radicales, c'est qu'à un moment, on a laissé les choses monter en se cachant. Cela fait quelques semaines qu'on a demandé à la direction du club de nouvelles réunions».

«Les sanctions doivent être plus systématiques, poursuit la responsable de la Licra. On arrive à combattre le problème des fumigènes, mais en se focalisant là-dessus, on se détourne des problèmes de violence et de racisme. Il y a eu un laisser-aller sur ces points.»

Autre exemple, plus ancien: «En 2008, le même jour que la banderole anti-chtis, des personnes de couleur ont été coursées au RER Saint-Michel par des supporters du PSG. Les forces de l'ordre étaient présentes sur les lieux, mais il n'y a eu ce jour-là aucune interpellation.»

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Interdictions de stade, poursuites judiciaires dans les cas les plus graves... l'arsenal législatif français est largement suffisant selon Nicolas Hourcade. «Il faut appliquer les dispositifs existants, mais avec discernement», explique-t-il. Et de préciser: «On ne peut pas éviter des interdictions de stade massives, mais il faut cibler les plus radicaux, pas les éléments modérateurs. Il faut arriver à sanctionner judiciairement les actes graves, mais sans arbitraire.»

Quant à l'éventuelle dissolution de groupes de supporters, les avis sont partagés. Carine Bloch rappelle que «quand des présidents d'association ne sont pas en mesure de tenir leur base, on ne peut plus laisser faire. Si on doit aller jusqu'à la dissolution, allons-y».

Bandes. Une limite toutefois, pointée par Nicolas Hourcade : «Il ne faut pas oublier que les associations ont aussi des dimensions régulatrices. La dissolution des Boulogne Boys en 2008 n'a pas apaisé la situation. L'absence d'association à Boulogne est un problème. Peut-être que les autorités peuvent essayer de dissoudre les bandes violentes mais, a priori, la mesure de dissolution s'applique mieux à des associations qu'à des bandes.»

Du côté du ministère de l'Intérieur, on assure que la loi contre les bandes, publiée ce mercredi au Journal Officiel, permet de lutter contre ce nouveau type de violences. Une circulaire adressée au préfet permet notamment d'allonger la durée des interdictions de stade, la faisant passer «de trois à six mois».

Dans l'immédiat, les annonces de la direction du PSG sont saluées. «A court terme, c'est une bonne décision, qui était indispensable», explique Hourcade. «Mais à moyen terme, il serait sans doute opportun que le PSG repense de manière générale ses relations avec ses supporters pour repartir sur des bases saines».

 

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23.11.2009 Il y a trois ans jour pour jour, Julien Quemener, supporteur du PSG, avait trouvé la mort, tué par un policier; après la victoire de l'Hapoël Tev-Aviv contre le PSG (4-2). Ce lundi soir, plusieurs centaines de Parisiens lui ont rendu hommage dans le calme. Les supporteurs, 500 selon les organisateurs de la tribune Boulogne, 300 selon la police, étaient plus nombreux que l'an passé et se sont rendus du Parc des Princes à la Porte de Saint-Cloud, dans le XVIe arrondissement parisien, là même où le jeune homme de 25 ans avait été tué en 2006. La mémoire du jeune homme avait été douloureusement évoquée vendredi lors du match OM-PSG. Derrière des membres de la famille en pleurs, qui portaient des gerbes de fleurs, plusieurs centaines de personnes marchaient, tenant une banderole à fond noir sur laquelle on pouvait lire «Justice pour Julien». Sous la pluie, le cortège a ensuite déposé les fleurs au sol avant de se recueillir. La mémoire du jeune homme avait été douloureusement évoquée vendredi lors di match OM-PSG.  

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L’affaire Quemener 

Une nouvelle manipulation de l’antiracisme Le 23 novembre dernier, le Paris Saint Germain et l’Hapoel Tel-Aviv s’affrontent au Parc des Princes. C’est une rencontre à haut risque : les deux équipes sont touchées par le fléau du hooliganisme.

Le lendemain, on apprend qu’un policier d’origine antillaise a sauvé la vie d’un supporter de Tel Aviv pourchassé par de nombreux hooligans parisiens. Après s’être interposé entre le supporter du club israélien et ses poursuivants, le policier aurait été frappé à plusieurs reprises et projeté au sol. S’estimant en état de légitime défense, il fait usage de son arme : la balle blesse grièvement l’un des assaillants avant de toucher en plein cœur un autre supporter parisien.

Pendant trois jours, la rampe médiatique éclaire de tous ses feux le comportement héroïque du policier Antoine Granomort, un jeune policier noir qui, face à une meute de néo-nazis du Kop de Boulogne, a risqué sa vie pour sauver celle d’un jeune supporter juif.

Curieusement, la plupart des dépêches et des flashes d’information radiophoniques mentionnent continuellement l’origine du policier. On laisse également entendre que la mort de l’un des supposés agresseurs était pleinement justifiée. Cette attitude n’est pas surprenante : dans une France communautarisée, le racisme est le pire des crimes. À quelques semaines d’une réforme destinée à inscrire l’abolition de la peine de mort dans la constitution, on laisse entendre que le supporter abattu n’a eu que ce qu’il méritait.

Effet Carpentras et réflexes pavloviens

On embraye ensuite sur le problème de la violence endémique dans les stades, on s’en prend au laxisme de la direction du PSG : le fait divers devient débat de société.

Simultanément, une manœuvre politique commence à s’esquisser à la suite des déclarations du procureur Marin. Ce dernier provoque un certain émoi dans certains quotidiens et hebdomadaires bien pensants en déclarant que les agresseurs scandaient des slogans frontistes. Même si elle fait long feu, les médias sont tentés pendant quelques jours de donner un « effet Carpentras » au traitement de cette affaire. Est-ce la publication dans les jours qui ont précédé le drame d’un sondage du CSA créditant Jean-Marie Le Pen de 17 % d’intentions de vote qui conduisent certains titres de presse à éclabousser le Front national ?

Dans le même temps, et bien qu’on ne sache pas grand-chose de cette affaire, les principaux représentants de la classe politique s’expriment haut et fort selon les réflexes pavloviens

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qu’on attendait d’eux en matière d’antiracisme politique. Dans cette logique de l’urgence qui désormais prévaut dans notre démocratie d’opinion, on assiste à une surenchère d’indignation alors que les incertitudes concernant ce fait divers sont nombreuses. Chacun s’empresse d’obtenir des gages en matière de politiquement correct sans aucun mot, sans aucune compassion pour celui qui paye le prix fort dans cette affaire et qui, finalement, en est la véritable victime.

Pendant trois jours on ne connaît d’elle que son nom et son âge. On n’a pas droit aux grands classiques victimaires auxquels les médias nous ont habitués : interview des parents, des membres de sa famille, de ses amis…

De révélations en révélations

Après avoir été traîné dans la boue pendant les trois jours qui ont suivi le drame, sans aucun égard pour ses parents et sa fiancée, le Journal du Dimanche rapporte un certain nombre d’éléments sur Julien Quemener qui tranchent singulièrement avec la dépersonnalisation froide le réduisant à un agresseur qu’un policier avait toutes les raisons d’abattre. Avec cet article du JDD, Julien Quemener retrouve, au propre comme au figuré, un visage humain.

On apprend que c’était un jeune de banlieue, de Savigny-le-Temple (Essonne), que ses amis ne reconnaissent pas dans la version officielle et bien pensante. Son meilleur ami est Antillais. Sa fiancée est d’origine japonaise.

Décrit comme un garçon « gentil » et « serviable », il avait fait part à ses proches de son dégoût de la violence dans les tribunes : écœuré par les bagarres survenues à la suite d’une défaite du PSG contre Bordeaux, il avait hésité à reprendre sa carte de supporter. Ceux qui l’accompagnaient lors des matchs, témoignent ne jamais avoir vu Julien se battre contre d’autres supporters. Selon ses parents, il s’était rasé le crâne non pas par affinité avec les skinheads mais en raison d’une calvitie naissante.

C’était un jeune homme qui ne s’intéressait pas à la politique ; au point de ne pas être inscrit sur les listes électorales. Julien Quemener avait un beau projet : il voulait se marier à l’église. Il envisageait d’entrer en catéchuménat afin d’être baptisé. Nous sommes assez loin de la brute raciste assoiffée de violence décrite dans les premiers jours qui ont suivi sa mort.

Peu de temps après la publication de ces éléments biographiques, l’autre supporter touché par le tir du policier donne sa version des faits. On découvre son identité : il s’appelle Mounir et ne ressemble pas vraiment à un skinhead néo-nazi. Il conteste la légitime défense : selon lui, le policier n’avait pas besoin de tirer. Il précise qu’il n’y a pas eu de sommations. Il déclare également que le policier lui a tiré dessus à bout portant et que ce dernier n’était pas à terre lorsqu’il a fait feu mais debout : ces affirmations viennent d’être confirmées par les expertises balistiques (1).

Qui était ce « policier » ?

L’affaire prend ensuite une direction des plus inattendues : on apprend que le policier qui a tiré va être jugé au mois de juin prochain pour « escroquerie » et « dénonciation d’infractions imaginaires ».

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En 2001, il aurait extorqué 5 400 euros à des dealers qui le retrouvent par hasard deux ans après. Il se voit alors contraint de leur verser 15 000 euros sous peine de représailles. Comme il ne dispose pas d’une telle somme, il vole son beau père qui porte plainte. Il invente alors une histoire pour se justifier : après avoir été victime d’un enlèvement suivi d’une séquestration accompagnée de violences et d’un viol collectif, il aurait été contraint par ses ravisseurs de trouver de l’argent pour payer une rançon (2). Mais, les enquêteurs ne croient pas leur collègue : ils établissent rapidement qu’il s’agit de fausses allégations.

Au moment ou ces faits sont révélés, sa hiérarchie précise qu’Antoine Granomort n’avait pas pour autant été suspendu de ses fonctions : le policier a tout simplement été muté au service régional de police des transports (SRPT). Le 23 novembre dans la soirée, lors du match PSG/Tel-Aviv, il assurait en civil une mission de surveillance de véhicules de police aux abords du Parc des Princes.

Le 16 décembre, la revue Monde et Vie dévoile une information dont l’importance est considérable : au moment où il intervient, Antoine Granomort faisait l’objet d’une suspension administrative définitive lui interdisant d’assumer une quelconque mission (3).

Autre élément troublant révélé le 5 janvier par le quotidien France Soir : le policier a déclaré avoir été frappé violemment à plusieurs reprises jusqu’à perdre son équilibre et se retrouver à terre. Or cette version est contredite par le rapport médico-légal, lequel ne mentionne aucune lésion, à l’exception d’un petit hématome.

Préférence ethnique

Quelques semaines après les faits, le mythe du héros est quelque peu écorné : l’affaire Julien Quemener prend une tournure radicalement différente. Une affaire qui doit être suivie avec grand intérêt car elle est un exemple des procédés dont use l’antiracisme politique par l’entremise de médias qui lui sont acquis dans leur grande majorité.

Cette affaire n’est pas un cas isolé. On retrouve ce parti pris politico-médiatique dans le traitement médiatique de plusieurs affaires. Il se traduit par une préférence ethnique inacceptable concernant les victimes. La mort de Julien Quemener aurait-elle été traitée de la même manière s’il avait été noir ou d’origine maghrébine et si celui qui l’a abattu avait été blanc ? Lorsqu’un jeune d’origine subsaharienne ou maghrébine décède à la suite d’une bavure, il devient automatiquement une victime qui a droit à la formule compassionnelle intégrale de la part des médias et des pouvoirs publics. En ce domaine, nous aurons tout vu : entrevue des proches, couverture de la marche silencieuse, prise de position d’hommes politiques et de responsables associatifs, sans parler du sociologue de service qui va jusqu’à justifier les incendies de voitures, d’équipements publics et les agressions de forces de l’ordre par des « jeunes en colère ». Il en va autrement lorsque vous êtes un « gaulois », un « céfran », ou breton comme Julien Quemener. Comme Jean-Claude Irvoas, tué devant sa femme et sa fille pour avoir photographié un réverbère à Épinay-sur-Seine pendant les émeutes de novembre 2005. Comme Jean-Jacques Le Chenadec, frappé à mort quelques jours plus tard à Stains dans un quartier abandonné aux bandes d’incendiaires, alors qu’en voisin dévoué il protégeait le parking de son immeuble d’éventuelles dégradations.

Ces affaires ont en commun d’avoir été traitées de manière à limiter leur effet politique tandis que d’autres faits divers sont exploités jusqu’à atteindre des sommets d’indécence.

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Tandis que la gauche parisienne inaugure rue Monsieur-le-Prince une plaque à la mémoire de Malik Oussékine vingt ans après le passage à tabac auquel ce jeune dialysé n’a pas survécu, trois jours auront suffi pour oublier le petit Carl mort sous les coups de ses camarades de classe. Mais pour les autorités comme pour les médias, le petit Carl avait un défaut qui excuse ses agresseurs : il avait le cœur fragile.

L’antiracisme, ce « communisme du XXIe siècle » selon le philosophe Alain Finkielkraut, se nourrit d’un recyclage victimaire particulièrement exclusif. C’est l’honneur de l’AGRIF que d’être un recours face à de telles injustices.

David Fontey

1 « Supporteur du PSG tué…un rapport étonnant! » France-Soir - 5 janvier 2007 2 « PSG: le policier rattrapé par la justice » Libération - 30 novembre 2006 3 Revue Monde & Vie, numéro 772 - 16 décembre 2006