RENCONTRE-DEBAT ITEEM 2014
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COMPTE-RENDU 31 JANVIER 2014 Cette rencontre est à l’initiative de quatre étudiants en cinquième année à l’Iteem, une formation d’ingénieur de Centrale Lille orientée business et management. L’idée est de confronter les modèles théoriques que nous avons étudiés à la réalité du terrain auprès de décideurs de la région afin d’obtenir un socle solide pour réaliser des « Cartouches de connaissance ». Ces cartouches sont sur les thèmes de la stratégie, du leadership, de l'organisation et de la motivation. Cet évènement est hébergé par l’Iteem et co-‐organisé par le cercle de réflexion BEEZ&CO. Participants
Hervé KNECHT Fondateur d’ALTEREOS, entreprise spécialisée dans la relation client et dont l’une des valeurs principales est le social, avec l’emploi d’une très grande majorité de personnes handicapées.
Thierry FRICHETEAU Directeur adjoint des études et directeur d'Iteem et d'Ig2i après 24 années dans le domaine du conseil en informatique.
Loïc BOULANGER Responsable de la Business Unit ODISO, filiale d’hébergement du groupe Oxygem.
François MERRIAUX Cadre à ARC International dans le domaine de la supply chain, travaille actuellement sur le projet de transformation internationale du groupe.
Pierre DELANNOY Etudiant en 5ème année à l’Iteem, a passé 1 an dans des ONG à travers le monde et 8 mois en tant que stagiaire dans le domaine de la création d’entreprise en Inde.
Caroline VALENT Consultante associée au cabinet de conseil BEEZ et fondatrice du think tank BEEZ&CO.
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Comment la stratégie est-‐elle décidée dans votre entreprise ? D’après M. Knecht, avant de parler de stratégie, il est important de définir la « vision » de l’entreprise. Cette vision correspond au but ultime qui valide l’existence même de la firme. Ainsi, lors de la création d’AlterEos, sa vision était d’employer 150 personnes d’ici 10 ans. Ensuite, il lui a fallu mettre en place une stratégie pour tendre vers cet objectif. L’importance à ce moment est de confronter son avis avec ceux des autres (connaissances, entrepreneurs, cabinet en stratégie) pour la construire et la valider. Par exemple, à un moment donné, son entreprise a développé d’autres secteurs d’activité mais toujours en accord avec la vision. Cette conception est partagée par l’ensemble des participants. « La stratégie, c’est la vision planifiée », M. Knecht Sur ce dernier point, M. Fricheteau, qui fut durant sa carrière « intrapreneur » c’est-‐à-‐dire entrepreneur mais au sein d’un groupe, présente la stratégie comme libre mais très orientée par le cap, par la vision. Malgré son intégrité dans un groupe, il pouvait mettre en place sa propre vision. Elle est la fondation de l’ensemble des projets réalisés. « La vision, c’est le quoi ; la stratégie, le comment », M. Fricheteau M. Merriaux va plus loin en soumettant l’idée que chaque responsable, à son échelle, a sa vision et qu’il est nécessaire qu’elle coïncide avec celle de l’entreprise pour une collaboration fructueuse. Ainsi, dans l’usine où il travaille, il fait en sorte de réaliser des projets qui vont dans le sens du maintien de l’activité sur le site et de son développement alors que la direction générale, avec une vision plus ciblée sur les profits et avec une vue plus globale, n’a pas toujours la même perspective. Et cela est aussi vrai pour les personnes avec moins de responsabilités : il est nécessaire d’impliquer
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l’ensemble des salariés à la vision et à la stratégie de leur entreprise, ce qui passe dans le meilleur des cas à leur participation dans sa définition. Cependant, cela est plus ou moins facile suivant la structure de l’entreprise. Ainsi, M. Boulanger qui travaille dans un environnement du type start-‐up consulte très régulièrement l’ensemble des salariés pour la définition de la stratégie. Il les implique également dans sa vision pour avoir un objectif commun, source de motivation. Selon lui, la vision donne un sens et permet aux collaborateurs de devenir acteur et non exécutant. « La vision, c’est un générateur de motivation », M. Boulanger L’implication des salariés dans la stratégie a ses limites dans le sens où il ne faut pas tout dévoiler à l’ensemble des collaborateurs dans un souci de concurrence, mais juste ce qu’il faut pour mettre en place des objectifs communs, selon M. Merriaux. De plus, pour M. Fricheteau, la vision se reflète dans la culture et les valeurs de l’entreprise. Ainsi, elle doit être obligatoirement partagée par tout le monde pour être synonyme de succès, contrairement à la stratégie.
! La stratégie répond à la vision globale d’une entreprise et permet de définir des objectifs communs, sources de motivation
Ce premier échange est en lien avec les concepts proposés par des gourous du management suivant : Balanced Scorecard de Kaplan & Norton Le balanced scorecard est utilisé par les managers afin de s'assurer que l'action de leur entreprise est conforme aux objectifs fixés sur le long terme. La première phase de cette approche est de définir la vision, les valeurs, la mission et la stratégie de l’entité et de regarder leur cohérence. La stratégie selon Porter La stratégie est une combinaison d'objectifs que s'efforce d'atteindre une firme et les moyens par lesquels elle cherche à les atteindre. La stratégie permet à l'entreprise de se concentrer sur l'essentiel pour vaincre ou survivre dans une situation de concurrence. Elle engage les ressources matérielles, humaines et financières de l'entreprise et leur affectation sur le long terme. Importance de bien cibler son environnement concurrentiel. Transformational Leadership de MacGregor Il s'agit de développer une vision et de faire en sorte que les personnes adhèrent à cette dernière par tous les moyens possibles. Pour cela, il faut que le leader inspire aux autres l'envie de partager ses valeurs et sa vision, qu'il les pousse à trouver par eux-‐mêmes l'envie de le rejoindre.
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Comment la stratégie est-‐elle transmise aux collaborateurs de l’entreprise ? L’implémentation de la stratégie est quelque chose de délicat dans une entreprise. Elle doit être comprise par tous et ce même dans les grandes structures. M. Merriaux insiste sur la nécessité que chaque manager doit impliquer l’équipe avec qui il travaille et cela à tous les niveaux. Parfois, la déclinaison de la stratégie peut amener de très bonnes choses dont de nouvelles idées. M. Knecht résume cela comme étant l’intelligence collective. De plus pour M. Fricheteau, les changements dans la société au cours des dernières décennies ont entraîné une augmentation du niveau de connaissance (plus hauts niveaux d’étude, accès à l’information plus facile avec l’essor d’Internet). Cela incite les salariés à vouloir comprendre davantage la stratégie de leur entreprise. M. Boulanger afin d’insister sur le concept d’intelligence collective a pris l’exemple des logiciels open source qui, étant développés par des milliers de personnes, arrivent à faire aussi bien voire mieux que les logiciels éditeurs.
! La stratégie doit être communiquée et comprise par tous, ce qui est la clef de son implémentation.
! Elle peut être source d’intelligence collective.
Concepts proposés par des gourous du management sur ce thème : Les 7S de McKinsey En amont de la définition de la stratégie, il existe 7 domaines à prendre en compte pour la bonne réalisation du déploiement de la stratégie : les valeurs, les missions et les objectifs ; la stratégie ; la structure ; les systèmes ; le personnel ; le style et les compétences. Si l’on ne fait pas attention à l’un des facteurs, tous les autres peuvent être affectés. Théorie de l’administration de Fayol Un chef d'entreprise accomplit 5 choses qu'il nomme « éléments d'administration » : prévoir, organiser, commander, coordonner, contrôler. Comment est définie la culture de votre entreprise ? Que peut apporter la culture d’entreprise à l’entité ? Dans la suite du débat, le sujet de conversation s’est tourné vers la culture d’entreprise. D’après M. Boulanger, la culture est construite par les fondateurs de l’entreprise, ce sont eux qui donnent le « la ». Elle se base sur leurs valeurs, leur attitude et leur vision. Par exemple, Xavier Niel, le fondateur de Free, a imposé dans son entreprise une culture d’entrepreneur et ainsi l’atmosphère de travail est tournée autour de l’entrepreneuriat et de l’autodidacte. C’est d’abord le fondateur qui impulse la culture mais ensuite c’est l’ensemble des salariés qui la développe. M. Knecht ajoute que la culture ne se décide pas mais qu’elle se vit. C’est l’ensemble des collaborateurs qui contribuent à sa construction. De plus, elle peut être très différente même au sein d’un secteur d’activités. Ainsi, la culture d’entreprise de La Redoute est à l’opposé de celle des 3 Suisses, toutes deux leaders dans la vente par correspondance en
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France. Les 3 Suisses ont une approche plus « ronde », cela se traduit premièrement dans le logo et dans leur démarche pour résoudre les problèmes avec d’abord un soutien des ressources humaines. A l’opposé, La Redoute avec leur logo carré ont une approche plus « stricte » avec une résolution des problèmes difficiles qui se traduit généralement par des grèves. Ainsi, un salarié pour un même poste se plaira dans une entreprise mais pas dans l’autre. « Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise culture », M. Fricheteau C’est pourquoi, d’après M. Fricheteau, c’est une obligation d’employer quelqu’un qui est en relation avec la culture d’entreprise pour que la collaboration soit un succès et qu’elle puisse s’épanouir et donner le meilleur d’elle-‐même. Ainsi, lors d’une fusion entre deux sociétés, la culture d’entreprise peut faire échouer le rapprochement. Pour M. Delannoy, on ne change pas une personnalité ni une culture d’entreprise. L’adaptation est difficile et c’est pourquoi lors d’entretien pour un stage par exemple, l’étudiant et l’entreprise voient très rapidement si la collaboration serait fructueuse. L’enjeu de la culture d’entreprise et de la bonne adéquation des salariés sont de plus en plus importants de nos jours. « Seule l’adéquation de la culture d’entreprise à la personnalité du collaborateur est source de succès », M. Delannoy M. Knecht insiste également sur le fait que la culture d’entreprise doit correspondre non seulement avec la personnalité des salariés mais aussi avec son environnement, les fournisseurs notamment. La culture d’entreprise permet également d’aider à motiver les salariés, tout comme la stratégie vue précédemment. La motivation peut également être engendrée par le mode de management. Ce management, pour M. Boulanger, dépend de la structure de l’entreprise et de sa taille. Le manager est là pour donner l’impulsion à son équipe. L’argent n’est pas la seule source de motivation, ni la première d’après M. Knecht. Sous un certain seuil, il réduit l’implication de la personne. Mais à des niveaux cohérents, il faut aller chercher vers l’ambiance au travail, la reconnaissance et la confiance de l’entreprise envers le salarié. Il ne faut également pas oublier le respect qui est le B.A.-‐BA d’une bonne relation. Les méthodes de management sont rarement efficaces, cela relève principalement de l’instinct. M. Fricheteau conclut la discussion en soulignant que l’argent n’est pas la motivation première des employés et qu’il est préférable de faire des événements de « team building » au lieu d’une prime car cela crée des rapprochements et des souvenirs inoubliables contrairement à l’argent.
! La culture d’entreprise est impulsée par le fondateur dans un premier temps, puis par l’ensemble des collaborateurs avec le développement de la firme.
! Elle est contributrice de succès et de motivation.
! La motivation se trouve à travers des conditions de travail propices comme la reconnaissance, la confiance ou le respect.
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Concepts proposés par des gourous du management sur ce thème : Levels of Culture de Schein Dans son livre en 1985, Edgar Schein a distingué trois niveaux de culture d'entreprise : les artefacts (éléments tangibles comme le code vestimentaire), les valeurs (normes de comportement, etc.) et les présupposés (éléments invisibles et infra-‐conscients). Expectancy Model de Vroom Un individu reçoit deux types de récompenses lorsqu'il accomplit une tâche. La première récompense est intrinsèque, c'est la satisfaction d'avoir pu réaliser cette tâche. La seconde récompense provient de l'extérieur, c'est ce qu'il recevra en échange de la réalisation de cette tâche, comme par exemple une augmentation ou une prime. La perception de la combinaison de ces deux récompenses va influencer énormément la motivation de l'individu. Plus la récompense lui paraîtra juste et attrayante, plus il sera motivé à réaliser la tâche demandée. La théorie des deux facteurs de Herzberg Herzberg différencie deux types de besoins. Les premiers (facteurs d'hygiène) ne sont pas de véritables sources de motivation mais répondent plutôt à des besoins naturels. Les seconds correspondent à ceux internes qui sont à l'origine de la motivation de l'individu. Il faut donc répondre à ces facteurs internes pour motiver un individu (autonomie, autoriser la prise d'initiative, réalisation de projet dans sa globalité, etc.).
Conclusion Cette discussion ciblée sur des problématiques de stratégie, de motivation, de leadership et de culture d’entreprise a été très intéressante et instructive, spécialement pour nous l’équipe organisatrice. En effet, ces grands champs du management sont parmi les plus importants en entreprise et ceux avec qui nous sommes voués à être en contact au cours de notre carrière professionnelle. De plus, au-‐delà du partage d’expérience, cette rencontre nous a permis de confronter ce que nous avons appris durant ces cinq dernières années avec la réalité du terrain. Nous tenons à remercier l’ensemble des décideurs qui ont accepté l’invitation et qui, sans eux, l’événement n’aurait pas été possible. Nous remercions également les différentes personnes qui nous ont aidées à la réalisation de cette discussion et plus particulièrement BEEZ&CO et Mme Valent.
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