1. 50 petites expriences de psychologie Psychologie du manager
pour mieux russir au travail Algeria-Educ.com Patrick Amar
2. 50 petites expriences Psychologie du manager pour mieux
russir au travail Patrick Amar
3. Illustration de couverture : Laurent Audouin Dessins : Herv
Pinel Dunod, Paris, 2008 ISBN 978-2-10-053620-7
4. Table des matires Introduction . . . . . . . . . . . . . . .
. . . . . . . . . . 3 Chapitre 1 Le manager face lui-mme . . . . .
. . . . . . 9 1 Qui suis-je ? Analyse de la personnalit . . . . . .
. . . . . . . . . . . 11 2 Tout comportement rsulte dun
apprentissage Lapproche comportementaliste . . . . . . . . . . . .
. 19 3 Quand on veut, on peut ? Efcacit personnelle et thorie
socio-cognitive. 26 4 Oh miroir dformant de mon me ! Cognitivisme
et traitement de linformation . . . . 31 5 Agissez sur vos penses
et comportements Lapproche cognitivo-comportementale . . . . . . .
38
5. VI 50 petites expriences de psychologie du manager 6
tes-vous interne ou externe ? Thorie du lieu de contrle . . . . . .
. . . . . . . . . . 44 7 Vous contrlez la situation ? Thorie de
limpuissance acquise . . . . . . . . . . . 50 8 Dans quel tat jerre
? Lanalyse transactionnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . 57 9
Vous vous dfendez comment ? Mcanismes de dfense et coping . . . . .
. . . . . . . 64 10 Ctait tellement mieux avant Deuil et changement
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71 Chapitre 2 Le
manager face au groupe . . . . . . . . . . . . 77 11 Les voies du
dni et de la justication sont impntrables La dissonance cognitive .
. . . . . . . . . . . . . . . . . . 79 12 Pourquoi si je pense que
lautre est un crtin, il a plus de chance de le devenir Self
fullling prophecy ou leffet pygmalion . . . . 87 13 Limportant,
cest dtre aim et de ne pas se faire remarquer Inuence normative et
conformisme . . . . . . . . . . 94 14 Nous avons les moyens de vous
faire cooprer gentiment Thorie de lengagement et pied dans la porte
. 100 15 Euh comment vous dire ? La communication persuasive . . .
. . . . . . . . . . . 108 16 Cest moi qui dcide ! Schmas et
heuristiques de dcision . . . . . . . . . 115
6. Table des matires VII 17 qui la faute ? Lerreur fondamentale
dattribution . . . . . . . . . 124 18 Comment grer les personnalits
difciles ? Les troubles de la personnalit . . . . . . . . . . . . .
. 130 19 Une motion vous ny pensez pas ! Lintelligence motionnelle
. . . . . . . . . . . . . . . . 136 20 Pourquoi les autres ne
sont-ils pas aussi intelligents que moi ? Les styles sociaux . . .
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143 Chapitre 3 Le manager
face lorganisation . . . . . . 151 21 Directif ou participatif ? Le
mouvement des relations humaines . . . . . . . . 153 22 Are you
globish? Diversit et management interculturel . . . . . . . . 158
23 Du compliqu au complexe Lapproche systmique . . . . . . . . . .
. . . . . . . . . . 166 24 Lunion fait la force ? Caractristiques
des quipes performantes . . . . 174 25 Vous grez comment? Le stress
du manager . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182 26 Et si
vous coachiez ? Le manager coach . . . . . . . . . . . . . . . . .
. . . . . . 189 27 Comptition ou coopration ? Le dilemme du
prisonnier . . . . . . . . . . . . . . . . . . 196 28 Quest-ce qui
fait courir ? Thories de la motivation . . . . . . . . . . . . . .
. . . . 203
7. VIII 50 petites expriences de psychologie du manager 29 Qui
cest le chef ? Thories du leadership . . . . . . . . . . . . . . .
. . . . . 210 30 You know I am happy ! Le bonheur du manager . . .
. . . . . . . . . . . . . . . . 217 Index des notions . . . . . . .
. . . . . . . . . . . . 227 Index des auteurs . . . . . . . . . . .
. . . . . . . . 231
8. Monique, Avec qui tout a commenc lisabeth, Avec qui tout
menace de nir
9. Dunod La photocopie non autorise est un dlit. Remerciements
Aux coachs, thrapeutes, consultants dAXIS MUNDI qui ont inspir
certaines de ces rexions et montrent lexemple tous les jours.
Corinne Amar, pour son aide essentielle dans la revue et nalisation
de louvrage ; Pierre et Sylvie Angel, pour mavoir, il y a quelques
annes, tendu la plume et la feuille blanche et mavoir donn envie de
la remplir ; Christian Dupont, pdagogue gnreux et drle des
relations humaines en entreprise ; Laurent Gazet, dle compagnon de
lecture et denvoles parisiennes ; Lidia Mele, pour son amiti
inconditionnelle et ses qualits dtre ; Michel Moral, grand
professionnel pour son aide prcieuse ; Herv Pinel, talentueux
illustrateur de ces pages, Armelle Saint Raymond, pour
lintelligence de ses rexions ; Brigitte Vaudolon, directrice dAXIS
MUNDI, pour son grand professionnalisme et le plaisir que jai
travailler avec elle. Et aussi Philippe Baylet, Davide Mele, Marc
Nahum, Carole et Jean-Marc Zerbib pour ce quils sont et pour avoir
accept dacheter louvrage. Lauteur reconnaissant
10. Introduction Dunod La photocopie non autorise est un dlit.
Lobjectif de cet ouvrage est simple : mettre la disposition de
lhomme et de la femme dentreprise des concepts et des outils issus
du champ de la psychologie pour clairer et enrichir leur pratique
managriale, alimenter leur rexion et ouvrir dautres possibilits
daction. Le dveloppement de la personne passe souvent par une
meilleure connaissance de soi et de son environnement, un processus
facilit par une prise de recul o alterne action et rexion,
ralisation soudaine ou approfondissement graduel. Psychologie et
management sont intimement lis : les thories organisationnelles et
managriales renvoient toujours une certaine conception de lhomme.
Lopposition fondamentale dans la premire moiti du XXe sicle entre
lorganisation scientique du travail, prne par Taylor, Fayol ou Ford
et le mouvement des relations humaines incarn notamment par Mayo,
Lewin ou Maslow est autant managriale que psychologique. Les
tenants du one best way insisteront sur limportance dun management
directif, hirarchique et planicateur qui dessine le prol dun homme
au travail logique et raisonnable, souhaitant tre dirig, vitant les
responsabilits et recherchant avant tout la scurit. Le mouvement
des relations humaines met en avant au contraire une demande chez
lhomme de respon-
11. 4 50 petites expriences de psychologie du manager
sabilisation, dimplication et de ralisation suggrant les avantages
dun management participatif. Les premires annes (voire dcennies !)
dune carrire focalisent et valident souvent le dveloppement
professionnel dune personne sur les aspects essentiellement
techniques dune fonction. Il sagit de dvelopper une expertise
(quelle soit industrielle, nancire, logistique), centre sur la
tche. Cette proccupation sur les hard skills peut laisser au bout
du compte peu de place lhumain, impuret mthodologique dun systme
fortement empreint de cartsianisme, qui privilgie une vision
positiviste et prvisible. Dfaut majeur de lhomme par rapport la
machine ? son imprvisibilit. La mauvaise nouvelle : plus on avance
dans lorganisation, plus on est tributaire denjeux humains pour
lesquels on peut tre insufsamment prpar, qui prennent le pas sur
des enjeux techniques et qui sont de plus en plus dterminants pour
sa performance propre et celle de lorganisation. Vengeance du soft
sur le hard. Et une personne qui ne se peroit pas comptente sur un
sujet a tendance lviter, se coupant ainsi doccasions dapprendre, de
tester de nouvelles choses, de se dvelopper Cercle vicieux o lon
fait plus de ce que lon sait dj faire et moins de ce que lon
pourrait apprendre faire pour se dvelopper. Voil pour la mauvaise
nouvelle. La bonne ? Nous nous sommes engags avec lditeur crire une
histoire qui nit bien donc la voici : si lon suit le postulat
behavioriste que tout comportement rsulte dun apprentissage
(rappelez-vous comment vous avez appris durablement un an ne plus
mettre les doigts dans la prise de courant), il suft dapprendre !
La plupart du temps, on ne nat pas leader ou manager, on le devient
en apprenant, en sentranant, en chassant des penses limitantes, en
mettant en place des comportements nouveaux, en capitalisant sur
des feedbacks positifs qui attestent de changements possibles,
bref, le plus souvent, en le voulant.
12. Introduction 5 Le champ de la psychologie est riche en
enseignements applicables lentreprise. La psychologie traite des
penses, comportements, motions de ltre humain en situation,
cest--dire en relation, avec lui-mme et avec les autres. Nous
convoquerons dans cet ouvrage plusieurs segments du champ
psychologique qui ont leurs intersections puisquils parlent
fondamentalement de la mme chose et qui clairent la pratique
managriale : celui de la psychologie clinique, qui interroge la
constitution humaine et ses dbordements, exercice souvent incertain
entre normalit et pathologie. Nous y discuterons personnalit,
efcacit personnelle, apprentissages, pense positive, mcanismes de
dfense, thorie du lieu de contrle, de limpuissance acquise,
intelligence motionnelle, changement ; Dunod La photocopie non
autorise est un dlit. celui de la psychologie sociale qui sintresse
particulirement aux phnomnes dinuence qui se droulent dans lespace
relationnel entre les personnes. Les notions de dissonance
cognitive, deffet Pygmalion, le besoin de conformisme, les biais
dcisionnels, la communication persuasive, la thorie de lengagement,
la gestion des personnalits difciles, seront voqus avec leurs
implications managriales ; celui, enn, de la psychologie du
travail, qui cherche observer et comprendre ltre humain au travail,
se centrant sur des questions importantes lies au systme
organisationnel, la motivation, au leadership, au travail en quipe,
aux diffrences interculturelles, la performance, au coaching, au
stress du manager. Un certain nombre dlments participe une
importance accrue du facteur humain et de la position du manager.
Citons la tertiarisation de lconomie et une cration de valeur
ajoute qui se fait dsormais plus dans les activits de R&D, de
conception, de matrise de linformation et des
13. 6 50 petites expriences de psychologie du manager savoirs
renforant les enjeux relationnels et motionnels au-del des savoirs
techniques ; la complexication de lenvironnement qui exige une
adaptation rapide des quipes la plasticit du contexte et une plus
grande tolrance lincertitude ; des fonctionnements matriciels ou en
rseaux qui remplacent la logique taylorienne hirarchique et qui
rendent plus complique la tche du manager qui doit diriger
diffremment. Cest dailleurs une des demandes principales que nous
retrouvons dans les coachings de dirigeants AXIS MUNDI : passer
dune logique dexpertise, du faire , une logique managriale, du
faire faire (et faire russir). Ce passage passe souvent par de
nouveaux apprentissages et lactivation dautres ressources : prise
de recul, meilleure comprhension de soi et des autres, entranement
la relation, dveloppement de lempathie, de lintelligence
motionnelle, afrmation de soi, etc. Avec une seule certitude : la
capacit innie et maintes fois dmontre dadaptation de lhomme de
nouvelles rgles du jeu qui, dans ce nouveau village global ,
linvitent paradoxalement un retour sur lui-mme et les autres pour
mieux fonctionner. La vise de cet ouvrage est minemment
pragmatique. Dans la myriade de thories disponibles, nous avons
slectionn et prsentons un petit nombre de concepts et dexpriences
choisis pour leur importance parfois fondatrice dans le champ de la
psychologie et qui, nous pensons, ont une porte clairante parfois
explicative ou prdictive par rapport une pratique managriale. Nous
avons tent de prsenter les concepts de la faon la plus accessible
possible car, fondamentalement, ils sont simples et comprhensibles
pour tous. chaque fois, partir dune exprience ou dun concept, nous
montrons certaines implications ou pistes possibles pour une
pratique managriale. La prsentation de louvrage par thmatique
indpendante, facilitera, nous lesprons, une lecture digeste et
libre en fonction des
14. Introduction 7 besoins ou envies du lecteur. la n de chaque
section, nous indiquons un rsum et quelques repres bibliographiques
pour que celui-ci puisse, sil le dsire, poursuivre sa route sur le
sujet. Nous commenons cet ouvrage par une question assez
inhabituelle en psychologie : qui suis-je ? et nous le nissons par
des rexions sur le bonheur du manager. Lambition de louvrage est,
vous le voyez, pragmatique et modeste.
15. 1 Le manager face lui-mme
16. Sommaire * 1 Qui suis-je ? * 2 * 3 * 4 * 5 * 6 * 7 * 8 * 9
* 10 Analyse de la personnalit . . . . . . . . . . . . . . . . . .
. . . . Tout comportement rsulte dun apprentissage Lapproche
comportementaliste . . . . . . . . . . . . . . . . . . Quand on
veut, on peut ? Efcacit personnelle et thorie socio-cognitive . . .
. . Oh miroir dformant de mon me ! Cognitivisme et traitement de
linformation . . . . . . . . Agissez sur vos penses et
comportements Lapproche cognitivo-comportementale . . . . . . . . .
. . tes-vous interne ou externe ? Thorie du lieu de contrle . . . .
. . . . . . . . . . . . . . . . . Vous contrlez la situation ?
Thorie de limpuissance acquise . . . . . . . . . . . . . . . . Dans
quel tat jerre ? Lanalyse transactionnelle . . . . . . . . . . . .
. . . . . . . . . . Vous vous dfendez comment ? Mcanismes de dfense
et coping . . . . . . . . . . . . . . . . Ctait tellement mieux
avant Deuil et changement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
. . . . . . 11 19 26 31 38 44 50 57 64 71
17. Dunod La photocopie non autorise est un dlit. 1 Qui suis-je
? Analyse de la personnalit Qui suis-je ? La premire question du
triptyque existentiel (que compltent les deux compagnons de route o
vaisje ? et dans quel tat jerre ? ; cf. section 8) est
naturellement une question centrale de psychologie. Que peuton
nanmoins esprer modliser de la diversit et de la complexit de ltre
humain ? Comment apprhender la multitude de fonctionnements
possibles pour soi et parvenir une meilleure comprhension de ce que
je suis et de ce quest lautre ? Le concept de personnalit offre un
clairage sur la question. La personnalit 1 peut se dnir comme une
organisation relativement stable de penses, comportements, motions
qui caractrisent un individu et son mode dtre dans le monde. Elle
exprime ainsi une notion de relative permanence du fonctionnement
de lindividu quelles que soient les situations auxquelles il est,
par ailleurs, confront. Ce concept peut ainsi tre trs utile pour
nous aider mieux comprendre, dcrypter, voire 1. LOrganisation
mondiale de la sant (1993) dnit la personnalit comme les patterns
implants de pense, sentiment et comportement qui caractrisent le
style de vie particulier un individu et son mode dadaptation .
18. 12 50 petites expriences de psychologie du manager prdire
des ractions quil pourra avoir dans certaines situations 1. Des
chelles dvaluation La psychologie clinique et exprimentale sest
intresse lidentication et la classication de types de personnalits
pour mieux comprendre lindividu. La psychanalyse au dbut du XXe
sicle sest ainsi attache expliquer le fonctionnement psychique de
la personne en dgageant diffrentes typologies (organisations
nvrotiques, psychotiques, perverses, compltes plus tard par le
concept dtat limite). Dans une approche psychomtrique, dautres
thoriciens se sont efforcs de dgager de grandes dimensions ou
traits caractriels qui pourraient dcrire toutes les personnalits.
Le psychologue amricain Raymond Cattell, partir de 1950, a dvelopp
un des outils les plus utiliss aujourdhui, lchelle dvaluation dite
16 PF . Pour lui, la personnalit est ce qui permet de prdire ce
quun individu fera dans une situation donne. Un outil dvaluation :
le 16 PF Cattell (1965) commena par rpertorier tous les termes
existants de la langue anglaise dcrivant des traits de caractres.
En liminant les redondances et synonymes, il arriva une liste de
cent soixante et onze termes puis partir danalyses factorielles
(visant liminer des facteurs trs corrls entre eux pour conserver
les facteurs indpendants les plus explicatifs) t merger une liste
de trente-six traits de surface . Il complta cette liste avec dix
traits de la littrature psychiatrique et exprimentale pour arriver
une liste de quarantesix traits dcrivant tout le domaine de la
personnalit. Des 1. Ltymologie renvoie au terme de persona, masque
port par les acteurs du thtre grec grce auquel les spectateurs
devaient pouvoir prdire leur action.
19. Le manager face lui-mme 13 tudes complmentaires rduisirent
cette liste seize facteurs fondamentaux exprims chacun sur deux
polarits, soit trente-deux composantes (par exemple : rserv ou
sociable, stable ou instable, soumis ou dominant, timide ou
dsinhib, pratique ou imaginatif, conservateur ou radical, dcontract
ou tendu). Les tudes psychomtriques plus rcentes (Costa et McCrae,
1990) ont fait merger une synthse dite des Big Five qui est la base
thorique accepte dun grand nombre de modles dvaluation et complte
lapproche du psychologue anglais Hans Eysenck (1975) 1. Ce modle
labor dans les annes quatre-vingt-dix ramne la personnalit cinq
grandes dimensions fondamentales qui peuvent se rsumer par le sigle
OCEAN (ouverture, contrainte, extraversion, altruisme,
neuroticisme) 2 : Dunod La photocopie non autorise est un dlit.
ouverture lexprience (openness) : dimension traduisant le degr
dacceptation chez la personne du nouveau, du changement,
limportance de limagination, la curiosit intellectuelle, etc. ;
contrainte ou conscience (conscientiousness) : dimension traduisant
dans quelle mesure la personne est responsable, able, applique,
loyale, privilgie la ralisation ; extraversion (extroversion) :
traduit le niveau de sociabilit, la gaiet, lenthousiasme,
lassertivit de la personne ; 1. Eysenck (1975) a synthtis les
traits caractriels dans une liste plus rduite de trois
superfacteurs : le degr dextraversion, le neuroticisme et le
psychoticisme (le dernier facteur mesurant lagressivit,
limpulsivit, la crativit, la froideur). 2. Le questionnaire de
personnalit NEO-PI frquemment utilis repose sur cette base thorique
de mme quun certain nombre doutils utiliss en entreprise (D5D,
Golden, Alter Ego, Baron).
20. 14 50 petites expriences de psychologie du manager
altruisme ou amabilit (agreeableness) : dcrit dans quelle mesure la
personne est facile vivre, accommodante, conante, affable,
cooprative ; neuroticisme ou motionnalit (neuroticism) : traduit
dans quelle mesure sont prsents lanxit, la nervosit, la colre, la
dpression et autres affects ngatifs (ou au contraire, la srnit, le
calme, loptimisme). De faon importante, toutes ces tudes se
recoupent trs largement et dessinent quelques grandes dimensions
caractrielles qui capturent lexpression de nos humanits. partir de
ce type de travaux, des centaines doutils (grilles, matrices,
chelles, tests) ont propos des clairages sur le fonctionnement
psychologique dune personne. MBTI et autres outils dvaluation La
psychanalyse (notamment jungienne) a ainsi servi de base thorique
certains des modles trs utiliss comme le MBTITM, la Process
Communication de T. Kahler ou les styles sociaux (cf. section 20
sur les styles sociaux pour une prsentation plus dtaille). Lun des
instruments les plus utiliss au monde pour clairer le mode de
fonctionnement prfrentiel dune personne est lindicateur typologique
de Myers Briggs (MBTITM) labor par Katharine Briggs et Isabel Myers
dans les annes quarante. Il se fonde sur quatre dimensions
bipolaires qui permettent de distinguer seize types de
fonctionnement privilgi : la premire dimension
extraversion/introversion (E/I) mesure lorientation prfrentielle de
lnergie par la personne : vers le monde externe au contact des
personnes (E) ou oriente vers le monde intrieur des ides et des
sentiments (I) ;
21. Le manager face lui-mme 15 la deuxime dimension
sensation/intuition (S/N) renvoie au mode de perception privilgie
du monde : mode factuel et dtaill driv des cinq sens (S) ou
intuition globale et immdiate (N) ; la troisime dimension pense
(thinking)/sentiment (feeling) (T/F) renvoie la faon dont la
personne prend des dcisions : prfrence pour une valuation objective
et analytique (T) ou sur la base de valeurs personnelles et de
convictions subjectives (F) ; la quatrime dimension
jugement/perception indique quelle fonction est privilgie pour
conduire sa vie : style de vie mthodique, organis, contrl (J) ou
plutt exible, adaptable et opportuniste (P). Dunod La photocopie
non autorise est un dlit. Ainsi un type ISTJ aura plutt un mode de
fonctionnement calme, srieux, able, perfectionniste, pratique,
mthodique, rigoureux, loyal. Un type ENFP sera enthousiaste,
chaleureux, imaginatif, afrm, improvisateur, orient vers le
relationnel
22. 16 50 petites expriences de psychologie du manager
Conclusions managriales Les outils dvaluation de la personnalit
sont utiles plusieurs gards pour le manager. Ils permettent une
rexion, une prise de recul et une meilleure comprhension de ses
modes de fonctionnement. De faon surprenante, le manager a nalement
consacr, le plus souvent, assez peu de temps approfondir qui il
est, proccup dvelopper des comptences surtout techniques, des hard
skills qui en disent plus long sur son savoir-faire que son tre. Si
on ne change pas sa personnalit, on peut en revanche modier des
comportements qui sont lis pour plus de exibilit et defcacit. Mieux
se comprendre Un des objectifs de ces outils est donc dacqurir une
meilleure connaissance de soi, de ses zones de confort ainsi que de
proposer des voies de travail possibles sur ses zones de
dveloppement. Le type ISTJ, prcdemment voqu dans la terminologie
MBTI, a une relle aptitude mener des projets de faon able,
organise, responsable dans une dmarche mthodique, respectueuse des
rgles et traditions. Les zones de dveloppement pourront inclure une
approche moins rigide ou bureaucratique, un entranement plus
dempathie ou de crativit et une moindre aversion au changement. Le
type ENFP prsentera un prol oppos : cratif, empathique,
charismatique, orient vers les autres et un travail personnel
pourra sorienter utilement sur le dveloppement de sa capacit mener
bien des projets, tre plus pragmatique et able et mieux sorganiser.
Mieux comprendre lautre Les outils dvaluation permettent aussi de
mieux entrer en relation avec lautre en percevant les diffrences
ventuel-
23. Le manager face lui-mme 17 les comme des sources de
complmentarit et denrichissement plutt que comme des facteurs
dopposition. La polarit extraversion/introversion, largement
reprise par beaucoup de modles peut tre un facteur dincomprhension
: la personnalit introvertie pourra juger lextraverti irrchi,
bavard, peu lcoute, voire hystrique , alors que lextraverti pourra
trouver lintroverti, ennuyeux, froid, inhib voire dpressif. La
prise de conscience des besoins diffrents des personnes permettra
de se focaliser plus utilement sur les complmentarits :
lextraversion apporte aussi un dynamisme, une facilit de contact et
daction, une nergie qui manque lintroverti qui, lui, pourra
apporter la relation sa capacit de concentration, de rexion, son
calme et son attention au processus. Fort de ce recul, lextraverti
donnera plus de temps lintroverti pour conduire sa rexion,
respectera son besoin tre seul, de clarier ses ides avant de
parler, de ne pas socialiser tout prix. Pour sa part, lintroverti
sefforcera de donner des signes dattention et de reconnaissance
lextraverti, reconnatra sa capacit dinitiative et son besoin dtre
avec les autres. Dunod La photocopie non autorise est un dlit.
Utilit et limites Bien utiliss, les outils de personnalit
permettent de reprer des modes de fonctionnement psychique,
cognitif, motionnel, relationnel chez soi ou chez lautre, de tracer
un chemin de dveloppement personnel et de mieux entrer en relation.
Ils ne sont pas pour autant une panace et peuvent mme tre dangereux
: mal utiliss, ils apposent en effet une tiquette arbitraire,
limitante, statique sur une ralit humaine toujours en devenir. Ils
gent la relation lautre dans une prvision auto-ralisatrice (cf.
section sur leffet Pygmalion) ou seuls les comportements conformes
lvaluation sont retenus. Tout le contraire dune dmarche de
dveloppement.
24. 18 50 petites expriences de psychologie du manager Ce quil
faut retenir La personnalit peut se dnir comme un ensemble stable
de penses, comportements, motions qui caractrisent un individu et
sa faon de ragir diffrentes situations. Le modle de synthse, dit
des big ve renvoie cinq grandes dimensions de la personnalit rsumes
sous le sigle OCEAN : ouverture, contrainte, extraversion,
altruisme, neuroticisme. Bien utiliss, les outils dvaluation de la
personnalit permettent de mieux se comprendre et de mieux
comprendre lautre. Ils permettent ainsi de se renforcer et
dapprhender les diffrences avec lautre comme des sources de
complmentarit plutt que comme des facteurs dopposition. Voir aussi
Les styles sociaux Self fullling prophecy Mcanismes de dfense et
coping. Pour aller plus loin ANGEL P., AMAR P., DEVIENNE E., TENC
J. (2007). Dictionnaire des coachings, Paris, Dunod. CATTELL R.B.
(1956). La Personnalit, Paris, PUF. CAUVIN P., CAILLOUX G. (2005).
Les Types de personnalit. Les comprendre et les appliquer avec le
MBTI, Paris, ESF (5e d.).
25. Le manager face lui-mme 2 19 Tout comportement rsulte dun
apprentissage Lapproche comportementaliste Dunod La photocopie non
autorise est un dlit. Le mouvement behavioriste (ou
comportementaliste) est initi au dbut du XXe sicle par le
psychologue amricain J. Watson qui voulait faire de la psychologie
une discipline scientique fonde sur lexprimentation en opposition
aux thses mentalistes prvalentes. Pour lui, la psychologie doit tre
ltude du comportement observable des individus dans leur
interaction avec le milieu et se traduit par ltude de la relation
observable Stimulus Rponse. Dans cette perspective, tout
comportement rsulte dun apprentissage. Certains comportements
inefcaces ou source de difcults pourront donc tre modis ou dsappris
et remplacs par des comportements plus fonctionnels qui permettent
une meilleure adaptation lenvironnement. Pour fonder cette nouvelle
discipline, Watson sappuie sur les travaux sur les chiens du
physiologiste russe Pavlov, pour montrer les mcanismes de
lacquisition de nouveaux comportements. La clbre exprience de
raction conditionnelle de salivation est fondamentale et illustre
le conditionnement dit classique. Une histoire de chiens Pavlov, ds
1890 a conduit un certain nombre dexpriences de conditionnement sur
les scrtions digestives des chiens. Dans un protocole bien connu,
il prsente un chien de la nourriture (ce qui reprsente un stimulus
dit inconditionnel car elle entrane physiologiquement un rexe de
salivation) en associant celle-ci lmission dun son (stimulus dit
conditionnel ou neutre). La rptition de lassociation nourriture/
son a pour consquence que la seule mission du son, sans prsentation
de nourriture, cre la raction conditionnelle de
26. 20 50 petites expriences de psychologie du manager
salivation. Pavlov a ainsi appris un comportement de salivation au
chien (il la conditionn saliver lcoute dun son associ au stimulus
inconditionnel reprsent par la nourriture). Il observe par ailleurs
que si la prsentation du stimulus-son nest pas renforce par dautres
associations avec la nourriture alors la raction de salivation
disparatra progressivement. Cest le phnomne dit dextinction. Ce
conditionnement classique joue un rle important dans lapprentissage
de ractions motionnelles inspires par certaines situations. Une
personne peut par exemple dvelopper une phobie dobjet si celui-ci
est associ dans certaines conditions avec un stimulus anxiogne. La
crainte de parler en public peut se construire comme une
association entre la prise de parole et des consquences dfavorables
pour le sujet (une mauvaise exprience dans le pass). Le
comportement superstitieux peut, dans la mme ide, se concevoir
comme une association initiale dvnements (heureux ou non) et va
dterminer certaines de mes motions et de mes conduites ( chaque
fois que je mets ma cravate pois, cela se passe trs bien en runion
). Lapproche comportementaliste souligne un autre lment essentiel
qui est limportance structurante de lenvironnement qui slectionne
certains comportements en les renforant ou au contraire les
dcourage en les pnalisant. Il sagit du conditionnant dit oprant que
lon peut illustrer avec lexprience suivante du psychologue amricain
E. Thorndike. Une histoire de chats Dans cette exprience trs
simple, Thorndike enferme un chat affam dans une cage comportant
une porte munie dun loquet. Un peu de nourriture est place
lextrieur. Si lanimal manuvre efcacement le loquet, la porte souvre
et il peut atteindre la nourriture. Plac dans cette situation
lani-
27. Le manager face lui-mme 21 Dunod La photocopie non autorise
est un dlit. mal manifeste des comportements de ttonnement
exploratoires puis, par hasard, actionne le loquet ce qui lui donne
accs la nourriture. Lorsquon recommence lexprience, on saperoit que
le temps mis par lanimal pour sortir de la cage dcrot
progressivement. Au bout dun certain nombre dessais, lanimal
parvient ouvrir le loquet ds quil est plac dans la cage. Le chat a
ainsi appris un nouveau comportement grce son environnement qui a
renforc une action particulire (lactionnement du loquet). Cest
lapprentissage par essai et erreur ou la loi de leffet qui font que
ce sont les consquences de laction qui vont dterminer
lapprentissage de certains comportements. Vous avez ainsi pu
apprendre par exemple lintrt davoir des bonnes notes lcole car un
bon carnet tait rcompens par multiples friandises, tlvision
illimite, hamster demeure (autant de renforcements positifs) ou a
minima lvitement de la fesse ou de ces mots paternels dvastateurs :
Tu me dois (renforcements ngatifs). Limportance pdagogique de
lenvironnement est aussi souligne par les travaux du psychologue A.
Bandura sur les apprentissages par observation et modelage. Pour
lui, le comportement humain sexplique par linteraction permanente
et rciproque de laction de la personne, ses croyances et le
feedback de lenvironnement. Lobservation dautres individus aux
prises avec les mmes problmatiques et qui les rsolvent procure une
grande source dapprentissage comportemental et permet de dvelopper
son efcacit personnelle (cf. section 3 sur lefcacit personnelle).
Conclusions managriales Rsumons-nous : le postulat central du
comportementalisme est que tout comportement rsulte dun
apprentissage. Ds lors, il faut remplacer bon nombre de propos
28. 22 50 petites expriences de psychologie du manager dnitifs
et dfaitistes sur le thme de je nai jamais su faire cela , je ny
arriverai jamais , je ne suis pas comptent , par : Je nai pas eu
besoin jusqu prsent de dvelopper cette comptence, comment puis-je
maintenant lacqurir 1 ? Cest ainsi souvent le cas du manager
performant qui lon demande de passer dune situation dexpert, du
faire , une posture organisationnelle plus axe sur le faire faire
qui met en jeu dautres qualits quil na pas eu besoin dutiliser ou
de dvelopper jusqualors : aspects relationnels, dlgation, feedback,
inspiration, management dquipes, etc. Le risque est de se rfugier
dans des stratgies confortables dans un premier temps (elles
rduisent lanxit et la peur qui naissent de lincertitude) :
lvitement, le rejet, la procrastination. Se construit alors un
cercle vicieux : Comportement non appris Non apprentissage de la
nouvelle comptence Absence de feedbacks utiles de l'environnement
Peur de l'incertitude/ de l'incomptence perue Comportements
d'vitement/ stratgies de substitution Une ide : oser ! Une
proposition : oser ! car toute nouvelle comptence est le fruit dun
travail dobservation, de mise en action, 1. On verra dans la
section sur lapproche cognitivo-comportementale lintrt dagir non
seulement sur les comportements mais aussi les penses pour
combattre notamment les anticipations dchec.
29. Le manager face lui-mme 23 dessais et derreurs, qui
salimente du feedback de lenvironnement qui nous permet de nous
perfectionner, de valider ou de corriger certains comportements, ce
qui renforce notre dynamique dapprentissage. Le cercle vertueux
devient alors : Besoin d'apprentissage d'un comportement nouveau
Validation/ajustement du comportement pour maximum d'efficacit
Encouragements/ renforcements par premiers signes de russite
Passage l'action (par modelage, essai/erreur) Mis en marche d'une
dynamique de changement Dunod La photocopie non autorise est un
dlit. Avec comme boussole, une seule certitude : ceux qui nessaient
pas, manquent dy arriver, en moyenne, 100 %. Cette mise en
mouvement doit tre progressive (sessayer quelque chose dirraliste
ou de trop soudain reprsente une conduite dchec) et tre renforce
chaque tape pour encourager le changement comme le montrent les
principes comportementalistes. Soyez smart ! Lapproche
comportementale sappuie souvent sur le dcoupage dune problmatique
complexe en phases plus facilement assimilables et grables.
Lobjectif que lon se donne doit tre SMART pour Spcique (et exprim
en termes positifs), Mesurable, faisant lobjet dun Accord entre les
diffrentes parties, Raliste, et inscrit dans le Temps. Le
dveloppement dune nouvelle comptence peut se faire partir
dobjectifs modestes, plus court
30. 24 50 petites expriences de psychologie du manager terme
qui, russis, permettront avec le renforcement personnel et celui de
lentourage daugmenter son sentiment defcacit personnelle. Ceci est
important pour le manager lui-mme mais aussi pour sa capacit
accompagner ses subordonnes dans leur dveloppement. Prenons
lexemple dune personne nouvellement promue une position qui demande
une plus grande dlgation de responsabilits. Cette situation peut
tre inhabituelle pour une personne habitue matriser lensemble du
travail qui dpend delle et qui doit, prsent, tre davantage dans le
lcher-prise. Il est important de mettre en avant pour lui les
avantages de la dlgation et lencouragement linitiative par ses
subordonnes tout en reconnaissant les difcults lies ce changement.
Il faudra sattacher identier des situations simples ou cette
dlgation peut tre mise en uvre et produire ses premiers bnces
(temps gagn pour des tches plus forte valeur ajoute, plus forte
motivation du subordonn, amlioration du climat relationnel dans
lquipe, etc.) et encourager rgulirement ce nouveau comportement de
dlgation pour le renforcer et le consolider. Rappelez-vous ces
moments forts de votre vie o vous avez su, contre toute attente,
lacer seul votre soulier ou tenir sur votre vlo. Tout comportement
rsulte dun apprentissage Apprenons.
31. Le manager face lui-mme 25 Ce quil faut retenir Pour le
comportementalisme, cole psychologique cre au dbut du XXe sicle,
tout comportement rsulte dun apprentissage. Les comportements
inefcaces peuvent tre remplacs par des comportements plus
fonctionnels qui permettent une meilleure adaptation
lenvironnement. Lenvironnement joue un rle cl en renforant certains
comportements efcaces ou utiles la personne et en en dcourageant
dautres. La mise en action est indispensable pour acqurir et
parfaire de nouvelles comptences et recevoir du feedback
mobilisateur. Elle est facilite par le dcoupage dun objectif, qui
doit tre SMART , en phases simples et par lencouragement vers le
but. Voir aussi Cognitivisme et traitement de linformation Approche
cognitivo-comportementale Efcacit personnelle. Pour aller plus loin
Dunod La photocopie non autorise est un dlit. WATSON J.B. (1913).
Psychology as the behaviorist views it , Psychological Review, 20,
158-177.
32. 26 3 50 petites expriences de psychologie du manager Quand
on veut, on peut ? Efcacit personnelle et thorie socio-cognitive
Tous les jours et tous points de vue, je vais de mieux en mieux
Rptez idalement vingt fois de suite et trois fois par jour. La
posologie du pharmacien mile Cou de La Chtagneraie a-t-elle des
chances de vous faire aller mieux ? Pour les personnes les plus
suggestives, cest trs possible. La mthode Cou a mauvaise rputation
et pourtant mile Cou peut tre considr comme un des prcurseurs des
travaux sur le pouvoir de la pense positive. Pense positive et
auto-efcacit Quelle est une des assertions centrales de cette ligne
de pense ? Que la capacit dune personne entreprendre certaines
actions dpend largement de sa croyance dans cette capacit. Quand on
veut, on peut ? rhabilitation de la mthode Cou ? Partiellement. Le
docteur en psychologie amricain Albert Bandura (1982) a dvelopp le
concept dauto-efcacit ou efcacit personnelle (self efcacy) qui peut
tre dni comme la croyance que possde lindividu en sa capacit
raliser ou non une tche. Plus ce sentiment defcacit personnelle
sera lev, plus il dveloppera des objectifs ambitieux et sera anim
dune motivation forte pour les russir. Pour Bandura, la perception
qua une personne de ses capacits excuter une activit, inuence et
dtermine son niveau de motivation et son comportement. Dans cette
perspective cognitivo-comportementale (cf. section 5), le sentiment
defcacit personnelle de lindividu se construit dans une interaction
triple entre son action, ses croyances et lenvironnement.
Observation et imitation de comportements dont les consquences
sont
33. Le manager face lui-mme 27 positives, et mise en action
avec des encouragements vont tre cls dans un processus
dapprentissage social qui va renforcer le sentiment dauto-efcacit :
schmatiquement, je regarde des personnes que je perois comme
relativement similaires moi, russir un objectif donn ; jimite ces
comportements, renforc par leurs encouragements et leurs
enseignements ce qui me fait passer outre les doutes ou les penses
limitantes sur mes incapacits ; je russis progressivement des
choses que je ne ralisais pas auparavant et je construis une image
plus mobilisatrice (et plus juste !) de mes comptences dans un
domaine donn. Ni auto-suggestion passive, ni atterie injustie Dunod
La photocopie non autorise est un dlit. Le sentiment dauto-efcacit
ne se dveloppe donc pas par lautosuggestion passive (rcitation du
mantra je suis capable sans action) ni par la atterie infonde de
lenvironnement ( comme tu es beau ! ) mais par la mise en action,
aide par lobservation et limitation de comportements adapts, et par
la russite de tches relativement difciles qui augmentent le
sentiment defcacit personnelle. Cette augmentation perue de
lefcacit personnelle a, de faon importante, un impact direct sur la
performance de la personne comme le montre un certain nombre
dexpriences. Un traitement contre la phobie des serpents Dans une
exprience, Bandura, Adams et Beyer (1977) ont test le dveloppement
du sentiment dauto-efcacit de patients atteints dune phobie des
serpents et limpact sur leurs conduites. Un premier groupe contrle
ne subit quune valuation de son trouble sans traitement. Un deuxime
groupe observa simplement le thrapeute grant les serpents alors que
le troisime groupe observa et mit en pratique par modelage du
thrapeute des techniques de gestion de la phobie de serpents. Les
rsultats montrrent que les groupes
34. 28 50 petites expriences de psychologie du manager 2 et 3
enregistrrent de fortes augmentations de leur sentiment defcacit
personnelle vis--vis des serpents (plus prononc encore pour le
groupe 3) par rapport au groupe contrle. De faon plus importante,
ltude montra des corrlations trs fortes entre lvaluation de
lefcacit personnelle des patients et leur capacit effective grer
leur phobie (ils excutrent ainsi avec succs des tches comme entrer
dans une pice contenant des serpents, manipuler un boa, etc.).
Conclusions managriales Ce nest pas parce que cest difcile quon
nose pas. Cest parce quon nose pas que cest difcile. Les travaux
sur lauto-efcacit fournissent une base plus scientique au concept
de pense positive. Un des lments constitutifs du sentiment
dauto-efcacit, comme on la vu, est la croyance que lon a sur soi et
sur lenvironnement. Bandura met par ailleurs laccent sur
limportance de lapprentissage social fait dobservation et de
modelage de pairs en situation de russite ( si dautres y arrivent
en faisant cela, peut-tre puis-je y arriver moi aussi ).
Lenvi-
35. Le manager face lui-mme 29 ronnement contribue ainsi
alimenter notre sentiment defcacit personnelle qui se construit
dans laction. De nombreuses tudes montrent que les gens qui ont un
fort sentiment defcacit personnelle sont plus persvrants, plus
motivs, plus rsistants et quils russissent mieux. Dunod La
photocopie non autorise est un dlit. Double responsabilit
managriale : par rapport aux autres et par rapport soi-mme Le
manager a une responsabilit double : par rapport aux autres et par
rapport lui-mme. Par rapport aux autres, cette responsabilit pointe
sur son rle en tant que modle, inspirateur, dveloppeur de talents
des personnes travaillant avec lui partir de vertus dexemplarit, de
gnrosit et de patience. Il est important pour le manager (en dpit
parfois dune estime de soi dfaillante) de ne pas sous-estimer
limportance quun subordonn va attacher son avis, au temps quil
passera avec lui, aux conseils quil va lui donner, aux
encouragements quil va lui prodiguer. Les actions et les mots du
chef , perus partiellement sur le mode du fantasme, peuvent revtir
en effet une rsonance particulirement forte. Ces actions et ses
mots peuvent aussi tre le support pour le dveloppement du sentiment
defcacit de la personne qui aide et encourage entre dans un cercle
vertueux dans lequel elle ose plus et russit plus. Ce mme cercle
vertueux est lenjeu de la responsabilit du manager par rapport
lui-mme. Oser pour enclencher une dynamique de russite qui sera
alimente par lapprentissage de nouvelles comptences par modelage
dans laction et le feedback positif de lenvironnement, la leve de
penses limitantes prcdemment entretenus par des stratgies dvitement
remplacs par des anticipations de succs, ainsi que les effets de
son action, ce qui contribuera au sentiment defcacit personnelle.
Une des raisons
36. 30 50 petites expriences de psychologie du manager
importantes pour lesquelles les femmes sont moins promues que les
hommes des postes seniors de lorganisation (au-del de toutes les
injustices justement dnonces !) est quelles le demandent beaucoup
moins que leurs pairs masculins. Labsence de modles de russite
fminins mobilisables, combine avec des croyances limitantes
(notamment culturelles) et une mise en action insufsante du fait
danticipations dchec, lexpliquent en grande partie. Ni optimisme
bat, ni pessimisme destructeur, le concept dauto-efcacit suggre que
quand on veut, on peut du moins beaucoup plus souvent quon ne le
croit. Ce quil faut retenir Le concept dauto-efcacit de Bandura
recouvre la croyance que possde lindividu en sa capacit de raliser
ou non un objectif. Le sentiment defcacit personnelle de la
personne est inuenc par son action, ses croyances et son
environnement. Les gens qui ont un fort sentiment defcacit
personnelle sont plus persvrants, plus motivs, plus rsistants et
russissent mieux. Lefcacit personnelle peut se dvelopper dans la
mise en action partir de lobservation et limitation de
comportements de russite de pairs et leurs encouragements Quand on
veut, on peut en tout cas, plus souvent quon ne le croit. Voir
aussi Lapproche comportementaliste Cognitivisme et traitement de
linformation Lieu de contrle.
37. Le manager face lui-mme 31 Pour aller plus loin BANDURA A.
(2007). Auto-efcacit : le sentiment defcacit personnelle, Paris, De
Boeck. 4 Oh miroir dformant de mon me ! Cognitivisme et traitement
de linformation Dunod La photocopie non autorise est un dlit. Vous
avez srement dj vcu une de ces situations o vous vous trouvez avec
un groupe de personnes et vous parlez dune mme situation laquelle
vous avez assist un lm, une runion, un vnement mais dune faon
tellement diffrente que vous vous demandez si vous tiez vraiment
ensemble ou si vous avez vu la mme chose. On mesure quotidiennement
combien chaque personne apprhende la ralit en fonction dun mode
propre de perception de lenvironnement qui renvoie une personnalit
et une histoire de vie. Le Talmud nous rappelle ce titre que tu ne
vois pas le monde tel quil est mais tel que tu es . Vous ntes pas
objectifs ! La psychologie cognitive 1 sintresse aux processus par
lesquels un individu acquiert des informations sur luimme et son
environnement, le traitement de cette information et les
consquences sur ses comportements. Cette approche reprend le cadre
thorique, largement issu des 1. Le terme de cognition (du latin,
savoir ), reprsente lensemble des connaissances, croyances,
reprsentations mentales dune personne sur elle et son
environnement.
38. 32 50 petites expriences de psychologie du manager travaux
du psychiatre Aaron Beck dans les annes soixante. Beck met laccent
sur la notion de schma , processus dencodage et de catgorisation de
linformation qui conditionnent lvaluation que lon fait dune
situation et de sa capacit y faire face. Ces schmas se dveloppent
prcocement partir dexpriences ducationnelles et personnelles. Ils
gnrent des postulats ou des croyances qui peuvent favoriser des
interprtations inexactes ou limitantes de son environnement. Ainsi
un schma dexigence leve pourra prendre la forme de croyances comme
je dois toujours russir , je dois tre le meilleur , si je fais une
erreur, cela prouve que je suis incomptent ; un schma dapprobation
me fera entretenir la croyance quil est vital de ne dcevoir
personne, que ma valeur dpend de la reconnaissance des autres ; un
schma dautonomisation, quil est important de sen sortir seul, de ne
pas demander de laide car cest un signe de faiblesse, etc. On la
compris, ces croyances qui simposent nous de faon automatique avec
la force (tyrannique) de lvidence peuvent dans certains cas, gnrer
une valuation ngative de soi et de son environnement comme le
montrent certains travaux de Beck. Le discours dpressif Beck sest
intress aux patients atteints de dpression 1. Il observe chez ces
sujets un discours intrieur, des reprsentations et des
interprtations mettant en avant de faon systmatique une vision
ngative et pessimiste des choses. Cette vision biaise de soi et
lenvironnement repose sur une triple valuation ngative, quil
appelle la triade cognitive : penses ngative sur soi ( je ne vaux
rien , je ne suis pas la hauteur ), sur lenvironnement ( ce monde
est injuste , les gens sont mauvais ) et sur lavenir ( cela nira
pas mieux , il ny a pas despoir , mon action ne changera 1. Beck
A.T., Rush A., Shaw B., Emery G. (1979). Cognitive Therapy of
Depression, New York, Guilford Press.
39. Le manager face lui-mme 33 rien ). On comprend que cette
valuation, partir de schmas cognitifs errons ou inappropris,
entrane des motions de tristesse et dcouragement et des
comportements de repli, dvitement ou dinaction. Une machine
interprter Nous slectionnons de linformation, lui donnons du sens,
tirons des conclusions en fonction de croyances que nous avons sur
nous et le monde et agissons en consquence. Chris Argyris (1974),
un professeur Harvard rsume trs bien ce processus cognitif par ce
quil appelle lchelle dinfrence 1. Une reprsentation simplie est
propose dans le schma ci-aprs. 5e niveau : Action/ comportements 4e
niveau : Formation/ confirmation de croyances 3e niveau :
Conclusions sur ces donnes Dunod La photocopie non autorise est un
dlit. 2e niveau : Infrence/ interprtation de ces donnes 1er niveau
: Slection de donnes Informations, faits, donnes disponibles sur
son environnement 1. C. Argyris, Savoir pour agir : surmonter les
obstacles lapprentissage organisationnel, Paris , Dunod, nouvelle
dition, 2003.
40. 34 50 petites expriences de psychologie du manager Prenons
un exemple : un manager souffrant dune faible estime de soi se voit
demander par son chef de retravailler certains passages dune
prsentation son comit de direction. Dans un premier temps le
manager peut slectionner un ensemble de faits tonalit ngative : le
ton brusque de son chef, les passages dcients de la prsentation,
une confrontation avec son chef le jour prcdent, une annonce de
restructuration, etc. Dans un second temps, il interprte ces donnes
: Mon chef nest donc pas content de moi , ma relation avec lui se
dtriore , cest un autre avertissement qui mest adress ; Au troisime
niveau, il tire des conclusions : Je ne suis pas comptent , je
risque de ptir du plan social imminent , ce qui, au niveau 4 peut
renforcer une croyance dincomptence, un syndrome de limposteur .
Les actions entreprises (ou pas) pourraient alors tre
insatisfaisantes car excutes sous le mode de lvitement, de la peur
de mal faire, de la non-clarication avec le chef des objectifs,
etc. Ces actions renforceront les croyances dinadquation et ces
croyances impacteront leur tour, linformation slectionne par ce
manager (il aura tendance voir plutt les choses ngatives qui
conrment ces insufsances, attribuera ses succs la chance, des
causes externes). La boucle est boucle. Attention aux distorsions
cognitives ! Lapproche cognitive a mis en vidence un ensemble de
modes errons de traitement de linformation que Beck appelle des
distorsions cognitives. Ces erreurs de logique peuvent contaminer
la pense des personnes, gnrer une vision limitante de son
environnement et tre source de mal-tre. Parmi les principales
distorsions, on peut citer : linfrence arbitraire, qui consiste
tirer des conclusions sans preuves (par exemple : Je nai pas
convaincu puis-
41. Le manager face lui-mme Dunod La photocopie non autorise
est un dlit. 35 que personne dans la runion na avalis le projet
immdiatement ) ; labstraction slective, lorsque le sujet se centre
sur un dtail et ne peroit pas la signication globale de la
situation (par exemple : Lentretien annuel dvaluation sest mal pass
car mon chef a point vers quelques zones de progrs alors quil a par
ailleurs compliment le manager plusieurs reprises sur le travail
accompli) ; la surgnralisation, qui consiste tendre toutes les
situations possibles une exprience malheureuse isole ( Chaque fois
que je prends la parole, cest un chec , se rfrant une situation
prcise, en gnral lointaine) ; la maximalisation et la
minimalisation, qui font attribuer une plus grande valeur aux checs
ou aux vnements ngatifs et, en parallle, dvaloriser les russites et
les situations positives pour la personne ; la personnalisation,
qui consiste surestimer les relations entre les vnements
dfavorables et lindividu ( Cest cause de moi et moi seul que lquipe
a chou ) ; la pense dichotomique o le sujet senferme dans un tout
ou rien qui tolre mal des positions intermdiaires. Ce mode de
raisonnement est particulirement destructeur car il empche
lexploration dalternatives, les stratgies dapprentissage de type
essais/erreurs et linstauration progressive dune dynamique de
changement. Conclusions managriales Lapproche cognitiviste nous
montre limportance des schmas, ltres internes qui orientent et
conditionnent notre faon dapprhender le monde et de fonctionner.
Notre faon de percevoir notre environnement, minemment subjective,
est le fruit de lactivation de ces schmas qui impactent, de faon le
plus souvent inconsciente et
42. 36 50 petites expriences de psychologie du manager
automatique, la slection et le traitement de linformation qui nous
parvient : nous enregistrons ou ignorons de linformation, nous
interprtons et tirons des conclusions de faon trs subjective et
sans questionner ces processus qui nous paraissent vidents. Un
autre monde est possible Une vision trop pessimiste (ou dailleurs,
cest plus rare, trop optimiste) de la ralit cache souvent des
croyances limitantes (ou excessive) sur son potentiel. Il est utile
pour le manager de prendre du recul par rapport ses modes de pense
et les conclusions quils en tirent pour les questionner, vrier leur
condition de validit. Un premier travail est lidentication de ces
penses automatiques, qui simposent nous avec la force de lvidence (
je manque de charisme , je ne sais pas parler en public , je ne
suis pas comptent , etc.) et leur confrontation dautres penses,
toutes aussi plausibles sur moi et mon environnement ( jai une
certaine prsence , dans certaines conditions, je men sors bien en
public , jai vingt ans de carrire qui attestent de ma comptence ,
cest une question dentranement et je nai pas eu encore dvelopper
ces comptences jusqu maintenant ). Cette recherche de penses
alternatives permet ainsi dacqurir une vision plus nuance et plus
juste de son environnement 1. Reprer les distorsions cognitives En
corollaire de ce travail, lidentication des distorsions cognitives
qui conditionnent notre action est importante. Se mer des phrases
qui commencent par chaque fois que , il y a probablement un biais
de surgnralisation ; 1. Cest le travail de restructuration
cognitive dans lequel les modes de penses du sujet sont challengs
la lueur de la ralit.
43. Le manager face lui-mme 37 reprer tant lauto-agellation que
la modestie pathologique, il y a probablement des effets de
maximisation ou de minimisation des actions entreprises ;
questionner un discours trop maill de il faut 1 ou de je dois qui
renvoie des croyances perfectionnistes ( je dois tout moment avoir
la meilleure performance possible ) souvent douloureuses assumer ;
nuancer les fonctionnements sur le mode du tout ou rien ( soit je
suis quelquun qui a tout russi 100 %, soit je suis un rat ) car ils
entretiennent la peur de lchec, empchent les apprentissages,
ncessairement parsems derreurs qui sont nanmoins la condition du
dveloppement. Un autre monde est possible Prfrons-le quand il est
plus mobilisateur pour la personne. Dunod La photocopie non
autorise est un dlit. Ce quil faut retenir La psychologie cognitive
sintresse la manire dont les personnes peroivent leur
environnement, slectionnent et interprtent linformation et les
consquences sur leur action. Les schmas de pense agissent comme des
ltres qui conditionnent, sous la forme de croyances, notre action.
Les distorsions cognitives sont des erreurs de raisonnement qui
gnrent une vision biaise et limitante de notre environnement. Il
est important pour le manager de questionner ses penses
automatiques et de reprer ses distorsions cognitives pour parvenir
une analyse plus mobilisatrice de son action. 1. Qui parle
dailleurs dans ces impratifs catgoriques? le pre ? la mre ? le
professeur ? le chef ? Le plus souvent, cest quelquun dautre, pas
le sujet.
44. 38 50 petites expriences de psychologie du manager Voir
aussi Lapproche comportementaliste Efcacit personnelle Schmas et
heuristiques de dcision. Pour aller plus loin BECK A. (1989).
Cognitive Therapy and the Emotional Disorders, Londres, Penguin,
nouvelle d. COTTRAUX J. (2001). Les Thrapies cognitives. Comment
agir sur nos penses, Paris, Retz. 5 Agissez sur vos penses et
comportements Lapproche cognitivocomportementale Lapproche
cognitivo-comportementale met laccent sur la prise de conscience et
lanalyse par une personne des penses ou croyances qui orientent ses
comportements, qui peuvent tre plus ou moins inefcaces. Cette
approche fusionne les apports des thories comportementale et
cognitive. On rappelle que dans une perspective comportementaliste,
les comportements, tant adapts que problmatiques dun individu sont
le rsultat de mcanismes dapprentissage par conditionnement.
Certains comportements appris, qui peuvent se rvler inadapts
pourront donc tre dsappris et remplacs par des comportements plus
efcaces (cf. section 2). Lapproche cognitiviste met laccent sur les
processus par lesquels un individu acquiert des informations sur
lui-mme et son environnement, le traitement de cette information et
ses consquences sur ses comportements (cf. section 4).
Reconnaissant lintime association
45. Le manager face lui-mme 39 entre penses et comportements,
lapproche cognitivocomportementale associe les deux pratiques. Lien
entre comportement, pense et motion Lapproche
cognitivo-comportementale insiste sur les interactions entre la
pense (P), le comportement (C) ainsi que la dimension motionnelle
(E) qui est essentielle pour la mise en action 1. Ainsi nos penses
alimentent des motions et une attitude que nous avons par rapport
notre action. Rciproquement, notre comportement renforce certaines
croyances que nous avons sur nous et notre environnement et nos
motions nous donnent lenvie ou le courage de faire ou de ne pas
faire certaines choses. Cette interaction constante entre ces trois
facteurs peut tre reprsente sous la forme du triangle ci-dessous :
Dunod La photocopie non autorise est un dlit. P E C Une recherche
demploi Prenons lexemple dune personne qui aprs vingt ans de
carrire a perdu son emploi et qui peine se remobiliser et 1.
motion, du latin movere, mettre en mouvement : Le bon niveau
dmotion est variable mais le plus souvent entre les extrmes : trop
peu dmotion ne donnera pas envie de se mettre en action alors que
trop dmotion pourra submerger la personne et limmobiliser.
46. 40 50 petites expriences de psychologie du manager
sinscrire dans laction. Cette personne nose pas prendre son tlphone
pour activer son rseau de relations. Elle est envahie par des
penses dites automatiques (P) sur le thme de si jappelle, je vais
me faire conduire , on va me plaindre ou se moquer de moi , a ne
sert rien , je ne retrouverai pas demploi , etc. Ces penses
alimentent des motions (E) de tristesse et de dcouragement, ce qui
concourt des comportements (C) dinaction, de procrastination,
dvitement, qui de faon circulaire, conrment la pense automatique
que cela ne sert rien . Une approche de remotivation va consister
challenger les penses automatiques tonalit ngative par la
production de penses alternatives (P) comme par exemple je serais
le premier vouloir aider si on mappelait , je ne demande pas la
charit mais jai des comptences , qui ne tente rien na rien , etc.
Ce travail cognitif va nuancer lintensit initialement ressentie des
motions de tristesse, de honte et de dcouragement et rendre
possible une mobilisation vers laction : appel des connaissances,
pistes qui souvrent, espoir qui renat, ralisation que les penses
automatiques taient fausses ou a minima limitantes grce au feedback
plus positif quanticip de lenvironnement, etc. Une dynamique qui
augmente les chances de succs est ainsi cre. Le modle ABCDE Un
cadre pour r-examiner son action Le psychologue amricain Albert
Ellis (1992), considr comme un des prcurseurs du cognitivisme1
propose le modle ABCDE pour amliorer notre gestion
cognitivo-comportementale des situations auxquelles nous sommes
confronts : A pour antcdent (ou activating event) renvoie une
situation 1. Aprs un dbut de carrire dans les affaires, Albert
Ellis devient docteur en psychologie et invente la thrapie
rationnelle motive qui propose de travailler sur ses penses
irrationnelles ou limitantes pour les substituer par des croyances
rationnelles et ainsi modier son comportement.
47. Le manager face lui-mme 41 laquelle est confronte une
personne qui va lapprhender en activant un certain nombre de
croyances (B pour internal beliefs) qui peuvent tre limitantes (par
exemple la croyance : je ny arriverai pas ) ce qui aura des
consquences (C) sous la forme dmotions (par exemple, peur,
dcouragement) et de comportements ngatifs (inaction, vitement) ; le
D du modle (pour disputing belief) est ce travail cognitif de dbat
contradictoire que la personne doit engager avec elle-mme pour
envisager diffremment la situation et lapprhender de faon plus
constructive : elle va ainsi prendre conscience de cette chane
causale ABC ngative et questionner ses croyances limitantes ou
irrationnelles (elle se dira par exemple : jy suis pourtant arriv
dans des situations similaires dans le pass , essayons, quai-je
perdre ? , dautres pas plus dous que moi y arrivent , etc.) ; elle
pourra alors observer les effets sous la forme de consquences plus
positives sur ses motions (curiosit, apprhension moindre, envie de
faire) et ses comportements (passage laction, succs renforateurs
voire semichecs ddramatiss). Le modle ABCDE est donc un cadre
simple pour rexaminer ses croyances et ses comportements et les
remplacer par des agissements plus rationnels et mobilisateurs par
rapport une situation donne. Dunod La photocopie non autorise est
un dlit. Conclusions managriales Lapproche
cognitivo-comportementale met laccent sur linteraction permanente
entre pense, motion et comportement. Loptimisation de la posture
managriale passe souvent par une analyse de certains comportements
inefcaces qui renvoient des croyances hrites du pass et quil est
bon parfois de questionner pour voir si dautres hypothses sont
possibles. Un exemple : le travail sur lestime de soi Un certain
nombre de problmatiques managriales sont lies de faon directe ou
indirecte des dcits destime de
48. 42 50 petites expriences de psychologie du manager soi :
problmes de leadership, difcults communicationnelles ou
relationnelles, difcults safrmer, se mettre en avant, dire non,
etc. Les postulats de lapproche cognitivo-comportementale
fournissent un cadre et des techniques de travail : identication et
arrt de la critique intrieure (questionnement des penses
automatiques ngatives ou dmobilisatrices) ; passage laction aprs
prparation pour augmenter la probabilit de succs ; augmentation de
lefcacit personnelle qui augmente la motivation et la conance en
soi. Les techniques dafrmation de soi sont importantes pour mieux
grer les situations : entranement lexpression de ses opinions, de
ses dsirs, de ses motions ; relativisation du besoin dapprobation,
identication des biais cognitifs, abandon du perfectionnisme, de
lindcision, etc. Lobservation sur un mode circulaire des
comportements limitants met en vidence les processus
auto-renforateurs en jeu : ainsi le schma suivant inspir par un
dcit destime de soi : Confirmation de l'incapacit Croyance
d'inadquation/ sentiment peru d'inefficacit Penses ngatives/
culpabilisantes Anticipation de l'chec vitement de l'action motions
ngatives Perte d'opportunits d'apprentissage Rduction du sentiment
d'efficacit personnelle Absence de feedback ou feedbacks ngatifs Il
est important de prendre appui sur un ou plusieurs maillons
comportementaux, cognitifs ou motionnels de cette chane pour tester
certaines croyances et envisager de
49. Le manager face lui-mme 43 nouveaux comportements qui vont
briser cette suite dvnements en apparence inluctable. Dunod La
photocopie non autorise est un dlit. Limaginaire, toujours plus
terriant que la ralit Dans ce travail, le manager va examiner et
mettre en doute un certain nombre de penses limitantes, qui ntaient
pas questionnes auparavant. Un des objectifs poursuivis va ainsi
tre lvitement de lvitement en examinant les consquences pratiques
dactions donnes. Prenons par exemple, la peur de ce manager de
prendre la parole en runion car il imagine toutes sortes de
dconvenues, embarras, humiliations qui en rsulteraient
certainement. Le manager (avec laide dun tiers parfois) peut
sinterroger utilement sur ce quil sest pass les fois o il est
intervenu publiquement et constater que les effets nont pas t
toujours aussi nfastes quil limagine, quil existe des exceptions la
rgle, quil a fait preuve de certaines comptences, a rencontr
certains succs, etc. partir de ces exceptions, le manager peut
faire ressortir les conditions de russite (travail en amont,
prparation de lintervention, gestion du stress), les ressources
quil a mises en uvre, la non-pertinence de certaines croyances quil
avait. Lexamen de la ralit, plus objectif, contredit ainsi
directement les penses limitantes prcdemment entretenues. Le rel
est inniment plus facile grer que le possible. Lappui sur ce rel
permet en effet, en matrialisant un seul scnario, de dissiper un
certain nombre de fantasmes sur le mode de et sil se passait cela ,
fantasmes qui ont le redoutable privilge de pouvoir se raliser tous
simultanment laissant la personne en proie ses anticipations
ngatives. La ralit est le plus souvent moins effrayante.
50. 44 50 petites expriences de psychologie du manager Ce quil
faut retenir Lapproche cognitivo-comportementale associe les
apports du comportementalisme et du cognitivisme. Pense, motion et
comportement sont intimement lis et en interaction permanente. Le
modle ABCDE dAlbert Ellis propose un cadre cognitivocomportemental
pour mieux grer certaines situations. Loptimisation de la posture
managriale passe par une analyse et un questionnement de croyances
et de comportements inefcaces pour les ajuster en reconnaissant
limportance des motions. Voir aussi Lapproche comportementaliste
Cognitivisme et traitement de linformation Intelligence motionnelle
Efcacit personnelle. Pour aller plus loin FANGET F. (2003). Oser.
Thrapie de la conance en soi, Paris, Odile Jacob. 6 tes-vous
interne ou externe ? Thorie du lieu de contrle La croyance que nous
avons ou pas un certain contrle sur lissue dune situation donne a
des rpercussions importantes sur notre action et notre motivation,
et de faon gnrale lestime de soi. De nombreuses exprimentations en
psychologie montrent les effets ngatifs (perte de la motivation,
dcouragement, dpression) dune exposition des vnements incontrlables
ou jugs comme tels (cf. section 7 sur limpuissance acquise).
Inversement un sentiment de
51. Le manager face lui-mme 45 contrle rel ou illusoire sur une
situation a des effets positifs et amliore la performance des
personnes. O tes-vous ? le lieu de contrle Le concept de lieu de
contrle dvelopp par Julian Rotter, un psychologue amricain, occupe
une place importante en psychologie. Cette thorie met en avant le
fait que les gens ont une perception diffrente par rapport au
contrle quils estiment avoir sur les vnements de leur vie.
Certaines personnes dites externes ont le sentiment que le rsultat
de leurs actions est inuenc par des forces externes comme le
hasard, la chance, des gens puissants alors que dautres personnes
dites internes sont convaincues que ces vnements sont davantage
sous le contrle de leurs efforts, leurs talents et leur action.
Dunod La photocopie non autorise est un dlit. valuation du lieu de
contrle Rotter (1966) a labor une chelle du lieu de contrle
interne-externe pour mesurer le degr de croyance dun individu dans
sa capacit agir sur les vnements de sa vie (lieu de contrle
interne) ou au contraire la croyance selon laquelle ce qui lui
arrive est le rsultat de facteurs externes chappant son contrle
(lieu de contrle externe). Le questionnaire comporte vingt-neuf
items dans lesquels il faut choisir entre deux afrmations du type :
les gens peuvent tre considrs comme des victimes des circonstances
ou ce qui arrive aux gens est le plus souvent de leur fait ; ce qui
marrive est le plus souvent d la chance ou ce qui marrive est d mon
action ; il est irraliste de penser que je peux inuer sur les
croyances des autres ou quand jai raison, je peux convaincre les
autres ; le citoyen moyen peut inuer sur les dcisions
gouvernementales ou nous sommes gouverns par une poigne de gens
puissants et nous ne pouvons rien y changer, etc.
52. 46 50 petites expriences de psychologie du manager Internes
: 1, externes : 0 Diffrentes tudes ont montr que les sujets
internes sont gnralement plus persvrants, plus conants, plus
indpendants et rsistent mieux lchec que les sujets externes. Par
exemple, des tudes menes sur des entrepreneurs succs (Kuratho,
Hodgetts, 1989) montrent que ceux-ci ont la conviction quils
russiront sils travaillent dur et maintiennent un bon contrle sur
le dveloppement de leur affaire. Ils ne croient pas que le succs ou
lchec de leur socit est d au destin ou la chance. Dautres tudes
(Cooper, Dewe, 2001) ont montr que les personnes internes sont plus
rsistantes au stress que les personnes externes. La conviction des
premiers quils peuvent agir sur les vnements accrot leur conance
dans leur capacit grer la situation stressante, leur permet de
relativiser, de chercher des ressources par rapport aux personnes
externes qui sestiment plus vulnrables par rapport ces situations
et ne dveloppent pas la exibilit pour sadapter aux situations de
stress.
53. Le manager face lui-mme 47 Conclusions managriales Selon la
thorie du lieu de contrle, un sujet interne se sentira davantage
acteur de ce qui lui arrive alors que le sujet externe pourra se
sentir tributaire ou victime dvnements en dehors de son contrle. Ce
lieu de contrle est un lment explicatif important de la personnalit
et du comportement individuel dans les organisations. Ainsi les
personnes internes , davantage convaincues de leur capacit inuer
sur les vnements pourront tre plus laise dans des postes forte
initiative et moindre supervision. Ils seront aussi plus sensibles
que leurs homologues externes des renforcements tels des primes de
performance qui conrmeront leur croyance que ce sont leurs efforts
qui amnent des rcompenses, ce qui les encouragera persvrer. Les
personnes plus externes en revanche saccommoderont mieux de postes
plus structurs avec des hirarchies plus pesantes. Ils pourront
davantage attribuer des primes reues la chance ce qui les
encouragera moins rpter des comportements de performance. Dunod La
photocopie non autorise est un dlit. Lanticipation de russite, une
cl pour laction Rotter insiste sur le fait que le comportement
humain est dtermin non seulement par les rcompenses qui peuvent
suivre immdiatement une action mais de faon tout aussi importante
par les attentes ou anticipations de rcompense quont les personnes.
De fait, les individus internes, plus conants dans leur conviction
dagir sur leur environnement, auront une anticipation de succs plus
grande, seront donc plus persvrants et connatront tendanciellement
plus la russite. Ces rexions suggrent lintrt daugmenter le degr
dinternalit chez certaines personnes. Le dveloppement
54. 48 50 petites expriences de psychologie du manager de
lestime de soi et une vision plus interne de son action peuvent y
contribuer. Dvelopper lestime de soi Lventail des possibilits est
large : identier et challenger ses croyances limitantes, reconnatre
ses succs passs et sen fliciter, mettre en place une dynamique de
changement avec des objectifs modestes et graduels qui dpendent de
soi, sy prparer minutieusement, oser ; russir et sabstenir de
relativiser aussitt la russite en se disant que cela tait la porte
de nimporte qui, accepter les compliments, ne pas cder au
perfectionnisme paralysant, mesurer le chemin parcouru et
continuer, etc. Devenir acteur de sa vie Lenjeu est la prise de
conscience que lon peut tre davantage acteur de sa vie en faisant
des choix, en osant dire non, en risquant le manque dapprobation de
son entourage ; cest aussi se rendre compte de lespace dautonomie
et de choix quil y a toujours mme dans des situations de grande
contrainte ; cest afrmer sa responsabilit ; cest prendre conscience
que lon peut changer et inuer sur les autres, tre responsable pour
son action, reconnatre les effets de ses efforts et de son action
derrire certains succs, ce qui encourage persvrer. Pas trop loin
quand mme dans linternalit ! Comme souvent lexcs peut tre
problmatique : trop dinternalit peut aussi nuire votre sant. Les
tudes suggrent en effet que les personnes extrmement internes sont
en effet souvent trop rigides et ont une difcult problmatique
accepter et grer les vnements incontrlables (et il y en a
ncessairement !) survenant dans leur
55. Le manager face lui-mme 49 vie. Ils risquent alors de cder
une culpabilisation, une auto-agellation, un dcouragement qui les
rend moins capables de grer la situation. Lomnipotence a ses
limites Finalement cest le thologien Reinhold Niebuhr qui le dit le
mieux dans sa prire de la srnit : Mon Dieu, donnez-moi la srnit
daccepter les choses que je ne puis changer, le courage de changer
les choses que je peux changer et la sagesse den connatre la
diffrence 1. Dunod La photocopie non autorise est un dlit. Ce quil
faut retenir La croyance que nous avons ou pas un certain contrle
sur lissue dune situation a des rpercussions importantes sur notre
motivation et notre action. Julian Rotter a dvelopp dans les annes
soixante le concept de lieu de contrle. Les personnes avec un lieu
de contrle externe ont le sentiment que le rsultat de leurs actions
est inuenc par des forces externes comme la chance ou des personnes
puissantes alors que les personnes dites internes sont convaincues
que ces vnements sont sous le contrle de leur action. Diffrentes
tudes ont montr que les sujets internes sont gnralement plus
persvrants, plus conants, plus indpendants et rsistent mieux au
stress et lchec. Une vision interne (sans excs), un travail sur
lestime de soi et une plus grande anticipation de russite dans nos
actions peuvent nous rendre plus performants. 1. God, grant me the
serenity to accept the things I cannot change, the courage to
change the things I can and the wisdom to know the difference.
Prire attribue au docteur Niebuhr dans les annes quarante et
reprise notamment par les Alcooliques Anonymes (AA).
56. 50 50 petites expriences de psychologie du manager Voir
aussi Efcacit personnelle - Thorie de limpuissance acquise Approche
cognitivo-comportementale. Pour aller plus loin ROTTER J.B. (1966).
Generalized expectancies of internal versus external control of
reinforcements , Psychological Monographs, 80. ROTTER J.B. (1982)
The Development and Applications of Social Learning Theory :
Selected Papers, New Jersey, Prentice Hall. 7 Vous contrlez la
situation ? Thorie de limpuissance acquise Le sentiment, justi ou
non, de contrler une situation est un facteur doptimisme et un
puissant motivateur laction. Inversement, lexposition des
situations incontrlables ou juges comme telles, a des rpercussions
ngatives importantes sur la motivation et les comportements des
personnes. Martin Seligman (1967), un psychologue amricain, sest
intress aux modications comportementales induites par lexposition
lincontrlabilit avec une srie dexpriences importantes, conduites
sur des animaux. Dans une exprience, il montre que des chiens
exposs des chocs lectriques invitables se montrent plus passifs
dans des situations postrieures contrlables que des chiens nayant
pas t soumis une situation premire dincontrlabilit. Ces chiens ont
ainsi appris la rsignation. Seligman appellera ce phnomne, la
thorie de limpuissance acquise 1. 1. En anglais Learned
Helplessness, thorie de limpuissance acquise, appele par dautres
auteurs, thorie du dsespoir.
57. Le manager face lui-mme 51 Une histoire de chiens Dunod La
photocopie non autorise est un dlit. Dans lexprience princeps de
Seligman, un premier groupe de chiens, mis dans une cage o ils
reoivent des chocs lectriques, dcouvrent quils peuvent interrompre
ces chocs lectriques en appuyant avec leur museau sur un bouton. Un
second groupe de chiens reoit les mmes chocs lectriques (en nombre
et en dure) sans pouvoir nanmoins avoir un contrle sur leur
occurrence (lappui sur le bouton nest suivi daucun effet). Dans une
deuxime tape, tous les chiens sont placs dans une autre cage do ils
peuvent schapper en sautant une barrire mi-hauteur. Un son est mis,
suivi dix secondes plus tard dun choc lectrique. Les chiens qui
pouvaient contrler dans la premire condition les chocs lectriques
apprennent rapidement viter les chocs en sautant la barrire pour se
mettre labri (ils apprennent mme plus vite que des chiens non
exposs la premire exprimentation). En revanche, les chiens qui dans
la premire exprience ne pouvaient pas contrler les chocs lectriques
supposeront que l encore ils ne peuvent rien faire pour sy
soustraire, et se rsigneront endurer les chocs lectriques sans mme
tenter de schapper. Placs dans une nouvelle situation (celle-ci
contrlable), ces chiens continuent penser quils nont aucun contrle
sur les vnements et subissent passivement leur environnement. Pour
Seligman, lapprentissage dun manque de relation entre ses actions
propres et les vnements entrane chez lanimal une impuissance
acquise qui se manifeste par trois consquences ngatives : une
difcult cognitive concevoir que les vnements dpendent (au moins
partiellement) de son action ; une baisse de la motivation
entreprendre ; enn une augmentation des motions de tristesse et de
dcouragement. Les effets ngatifs de labsence perue de contrle ont t
observs de faon similaire sur dautres animaux comme les rats, les
chats ou les poissons. Une faon dviter ces effets dincontrlabilit
et dimpuis-
58. 52 50 petites expriences de psychologie du manager sance
acquise est dimmuniser lanimal en lexposant pralablement au
contrle. Plus prs de chez nous Des expriences ont montr que le
sentiment de contrle est tout aussi essentiel pour les tres
humains. Une histoire dtres humains Ellen Langer et Judith Rodin
(1976) ont montr dans une exprience conduite dans une maison de
retraite limportance de la matrise personnelle. Beaucoup de
personnes dans ces maisons sont places contre leur gr et ressentent
une impuissance inuer sur leur environnement. Les chercheurs ont
divis le groupe en deux : dans un premier groupe, le directeur de
ltablissement afrmait que lui et son quipe avaient la responsabilit
du bientre de ses pensionnaires, quils ne devaient se soucier de
rien et les traitaient en bnciaires passifs ; dans le second
groupe, le directeur insistait sur le fait que les pensionnaires
pouvaient faire des choix, inuer sur le fonctionnement du centre,
arranger les espaces comme ils le souhaitaient, avoir des
responsabilits, etc. On enregistra dans les semaines qui suivirent,
une augmentation de la vigilance, de lactivit et du bien-tre dans
le second groupe des personnes responsabilises. De faon encore plus
tonnante, dix-huit mois aprs le discours du directeur, on observa
un taux de mortalit de seulement 15 % pour le groupe de personnes
dont on avait encourag la matrise personnelle contre 30 % pour le
premier groupe de retraits passifs. La croyance que nos efforts
sont vains, que nous navons pas ou peu de contrle sur notre
environnement abaissent notre motivation et notre performance, peut
nous rendre
59. Le manager face lui-mme 53 Dunod La photocopie non autorise
est un dlit. passifs, voire dpressifs et nous fragiliser devant le
stress ou la maladie. Conclusions managriales Tout individu a
besoin de croire quil exerce un contrle sur son environnement et
quil volue dans un monde peu prs prvisible. La thorie de
limpuissance acquise, ou thorie du dsespoir, suggre quun sentiment
dincontrlabilit prdispose une baisse motivationnelle, des
comportements de passivit et des motions de dcouragement. La boucle
cognitivo-comportementale peut se dcrire ainsi :
60. 54 50 petites expriences de psychologie du manager
Sentiment d'incontrlabilit Confirmation de son impuissance devant
l'environnement Inaction Baisse motivationnelle* Anticipation
d'chec * quoi a sert de faire quelque chose, puisque cela ne dpend
pas de moi Importance du sentiment de contrle Des tudes suggrent,
inversement, quun sentiment de contrle rel ou illusoire augmente la
motivation laction, dveloppe loptimisme et une meilleure estime de
soi, des lments essentiels pour tre plus heureux. Cest important
pour le manager et cela lest tout autant pour ses subordonns !
Comment augmenter le sentiment de matrise chez eux ? Par la
communication, les explications, lempathie, des attitudes de
dlgation, en leur laissant une certaine latitude dcisionnelle, par
la cohrence (larbitraire est trs dstabilisant) dans les
comportements et dans les feedbacks tant positifs que ngatifs, par
la valorisation de leur travail qui contribue une bonne estime de
soi, et de faon gnrale, par une plus grande lisibilit sur les
conditions de russite de leurs missions. La clef du dsespoir ? des
attributions stables, internes et globales aux checs Il y a au
moins trois faons de rendre un chec pire quil ne doit tre, de
prvenir lenvie de samliorer et dapprendre la rsignation :
61. Le manager face lui-mme 55 attribuer cet chec une cause
stable et durable plutt que ponctuelle (ainsi de ce manager qui
dirait : mon chec renvoie une incapacit structurelle vendre mes
projets plutt par exemple qu un manque de pratique de ce type de
situation qui se travaille) ; associer cet chec une cause interne
plutt quexterne ( cest uniquement ma faute et cela na rien voir
avec le contexte et les contraintes externes du projet ) ; voir,
enn, dans cet chec une raison globale et non spcique ( cette
incapacit vendre mon projet est symptomatique dune incomptence plus
gnrale qui va mhandicaper sur