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    Quelle dmographie ?

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    Table des matires

    5 Prface

    9 RETROSPECTIVE (1960-2006) ET DETERMINANTSSOCIO-ECONOMIQUES

    9 A. Mouvement de la population9 1. Rtrospective gnrale

    10 2. Mortalit

    14 3. Fcondit22 4. Mobilit internationale23 5. Urbanisation et mobilit interne25 6. Rpartition spatiale de la population

    26 B. Structures de la population27 1. Inversion progressive de la pyramide des ges29 2. Mnages et familles31 3. Condition fminine34 4. Pauvret et transition fconde

    37 PROSPECTIVE

    37 A. Les principaux facteurs de l'volution dmographique future

    39 B. Les scnarios alternatifs39 1. Mortalit40 2. Fcondit43 3. Migration internationale

    45 C. Effectifs de population45 1. Effectifs migration nette nulle47 2. Effectifs avec migration

    49 D. Composition de la population

    49 1. Age et emploi61 2. Age et protection sociale62 3. Lillusion du bonus dmographique 64 4. Amnagement urbain66 5. Ecologie, ressources67 6. Les filires dinstruction69 7. Degr de prsence trangre

    69 E. Lexploration de lavenir post-transitionnel et les grands dfis69 1. Lavenir post-transitionnel70 2. Les grands dfis

    73 Bibliographie

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    Prface

    Conduite sous le Haut Patronage de Sa Majest le Roi par le Haut-Commissariat au Plan,la rflexion prospective Maroc 2030 sest dploye dans le cadre de forums, sminaires,ateliers et sest appuye sur des tudes, enqutes et diffrents travaux raliss par ce dpartement.

    Avec les trois tudes prospectives sectorielles (lnergie, lagriculture, le tourisme) et celle surles options de croissance et de dveloppement humain moyen terme 2007-2015, la prsentetude, qui porte sur la thmatique de la transition dmographique, a contribu alimenterles scnarios globaux sur le systme Maroc et, au-del, les dbats sur les grands enjeuxdavenir de notre pays.

    La dmographie, rfrence incontournable pour dfinir des besoins aussi fondamentaux quelducation, la sant, lemploi, les systmes de prvoyance sociale, est lune des tendances lourdesdont le poids, par ailleurs dterminant sur lvolution conomique, sociale et culturelle dunpays, peut tre, en raison de linertie de ses phnomnes, cerne dans la dure avec une relativeprcision. Elle a, en outre, et aujourdhui plus que jamais, un impact de grande ampleur sur

    les rapports conomiques et politiques internationaux dont les manifestations se dploient,dores et dj, sous nos yeux dans la configuration gostratgique actuelle du monde. Rappelonssimplement, cet gard, que la population mondiale est passe de 1 milliard dhabitants en1900 2 milliards en 1950, avant datteindre 6,5 milliards en 2005 et que, si elle est appele se stabiliser au-del de 2030, elle nen est pas moins appele atteindre 8,3 milliards cethorizon, soit un crot dmographique de 1,8 milliard de personnes dont, fait remarquable,97,5% proviendrait des rgions en dveloppement. Les taux de croissance relativement faibleset en dclin des pays dvelopps allis un dynamisme dmographique vigoureux, bien quemoins rapide que par le pass, dans les pays en dveloppement sont, ainsi, de toute vidence, lorigine dune disparit internationale des ressources humaines et, terme, du potentielde comptitivit dont les effets sur la stabilit gopolitique du monde daujourdhui et de

    demain pourraient avoir des consquences redoutables.De par sa situation gographique, le Maroc est au cur de cette problmatiquequaffronteront ces deux mondes volutions dmographiques contrastes. Dun ct, lEuropedevrait connatre une stagnation, voire un dclin de sa population qui verrait, par ailleurs,son esprance de vie la naissance progresser de 74 ans en 2005 79 ans en 2030 et sa fconditcontinuer voluer au-dessous du niveau de remplacement des gnrations, ce qui devraitaccentuer le vieillissement de sa population. Aussi et pour assurer leur comptitivit, lesconomies europennes auront-elles besoin dune migration de plus en plus importante. Elleest, titre dexemple, estime pour quatre pays, savoir lAllemagne, la France, lAngleterreet lItalie, 700 000 migrants annuellement au lieu de 230 000 aujourdhui.

    De lautre ct, la frontire sud du Maroc, lAfrique subsaharienne devrait voir sa populationaugmenter pour passer de prs de 0,77 1,31 milliard, soit lquivalent de la Chine actuelle.

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    Ce crot est concomitant une masse de population en ge de travailler qui va samplifier un rythme de plus en plus rapide, do une exacerbation de la pression sur les pays de la rivesud de la Mditerrane comme lieu de passage oblig vers lEurope.

    Tout en subissant les effets dune situation rgionale contraignante, savoir une Europevieillissante en perte deffectifs, porte de plus en plus privilgier une politique dimmigrationslective, dune part, et une Afrique pauvre et en explosion dmographique, dautre part, leMaroc continuerait subir le poids du comportement historique de sa population, malgrle long chemin quil aurait parcouru sur la voie de sa transition dmographique. Ainsi, selonles tendances dgages par les projections dmographiques ralises par le Haut Commissariatau Plan, une variante moyenne indique que la population du Maroc passerait de 30 millionsdhabitants en 2005 38 millions en 2030, ce qui quivaut une croissance additionnellemoyenne de 300 000 habitants par an, soit lquivalent dune grande ville. Leffectif de lapopulation rurale restant quasi stable autour de 13,5 millions, lvolution dmographique

    marocaine serait principalement urbaine, en raison essentiellement de lexode rural et delurbanisation de zones rurales. Ainsi, les villes marocaines abriteraient en 2030 64% deshabitants du pays au lieu de 55 % en 2004, soit 24,4 millions contre 16,4 millions, do lerisque dune pauvret urbaine plus accentue.

    Cette volution saccompagne de lamorce dune inversion de la pyramide des ges impliquantune poursuite de la forte pression sur le march de lemploi. La population en ge de travailler(les 18-59 ans) verrait ses effectifs passer de 16,7 millions en 2005 22,6 millions en 2030,soit une volution annuelle de 236 000 personnes. Ce potentiel dactifs est en grande partiedj n, vivant en majorit en milieu urbain et a, en partie, dj reu la formation qui luipermettra ou non de sinsrer dans lconomie de demain qui reste si proche.

    Simultanment, et comme consquence de lamlioration du niveau de lesprance de vie quipasserait de prs de 72 ans en 2004 77 ans en 2030, le vieillissement de la populationsaccentuerait. Leffectif des personnes ges de 60 ans et plus passerait de 2,4 millions en2004 5,8 millions en 2030 (de 8 % 15,4 %), et le ratio personnes ges par actif potentiel,qui tait de 1,6 pour 10 en 2005, serait de 3 pour 10 en 2030. Cette tendance peut tresource de prcarit et de pauvret, particulirement pour les personnes ges et non couvertespar un systme de protection sociale.

    Toutefois, le Maroc pourrait bnficier dune aubaine de sa transition dmographique due la baisse de la part des jeunes dans sa population. Ainsi, leffectif des jeunes (0 15 ans)baisserait de 8 millions en 2005 prs de 7 millions en 2030, et leur poids dmographique

    diminuerait de 30 % environ 21 %. Il en est de mme pour la proportion de la populationpotentiellement scolarisable du prscolaire au suprieur (3-22 ans) qui passerait de 42 % en2005 28,6 % en 2030, ce qui pourrait constituer une opportunit saisir pour repenser lesystme dducation et de formation.

    Ces tendances pourront cependant se raliser avec plus ou moins dacuit si les trajectoiresdes dterminants de la dynamique dmographique, principalement la fcondit et la migration,scartent de ceux de la variante tendancielle. Cest ce que ltude Prospective Maroc 2030:quelle dmographie ? , objet de ce rapport, essaie de dmontrer en sinscrivant dans unedmarche de perspective dmographique volontariste base, essentiellement, sur lvolutionfuture de la fcondit et de la migration internationale et sur une approche de benchmarking

    , c'est--dire sur ltude du rservoir dexpriences historiques et internationales, selon lalogique de la transition dmographique et sa drive la transition migratoire .

    Introduction Dmographie

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    La prsente tude qui a, par ailleurs, tent de dgager les grands dfis davenir de la transitiondmographique, a t labore sur la base des rsultats des oprations de terrain ralises auMaroc, notamment ceux conduits dans le cadre du recensement gnral de la population et

    de lhabitat de 2004, les diffrents travaux de prospective du Maroc 2030 mens au sein duHaut Commissariat au Plan ainsi que les tudes sociodmographiques ralises par le Centredtudes et de recherches dmographiques. Elle est le fruit defforts fournis par des dmographes,statisticiens et conomistes de ces institutions et a bnfici de lappui de M. J.C. Chesnais,dmographe spcialiste en matire de transition dmographique dont la contribution nousa t dun grand profit, notamment en matire de benchmarking . Quil me soit permisde fliciter les premiers pour leur mobilisation et leur comptence et le second pour toutelamiti et la sympathie quil a, au cours de sa collaboration avec nos services, manifestes lgard de notre pays et de nos activits. Je saisis galement cette occasion pour prsentermes remerciements au PNUD ainsi qu lUNFPA pour le concours financier quils ont bienvoulu apporter cette tude dans le cadre dun partenariat multiple et toujours de qualit

    que nous avons su entretenir avec bonheur.

    Ahmed LAHLIMI ALAMI

    Haut Commissaire au Plan

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    Rtrospective (1960-2006)et dterminants socio-conomiques

    A. Mouvement de la population

    1. Rtrospective gnrale

    Dans le pass, lvolution dmographique a t marque par une forte croissance partir desannes soixante, ce qui na pas manqu de se traduire en contraintes structurelles limitantles effets escompts du processus de dveloppement. Pourtant, le flchissement de la croissancedmographique nest plus illustrer.

    Retraons dabord le cheminement de la population du Maroc depuis le dbut du sicle dernier(les estimations antrieures sont peu fiables).

    Tableau 1Evolution rtrospective de la population marocaine

    et de son flux annuel moyen daccroissement, 1936-2006

    Anne Population (en millions)Accroissement annuel moyen correspondant (en %)

    Priode Taux

    1900 5,00

    1912 5,40 1900-1912 0,6

    1936 7,04 1912-1936 1,1

    1952 8,95 1936-1952 1,5

    1960 11,63 1952-1960 3,3

    1971 15,38 1960-1971 2,6

    1982 20,42 1971-1982 2,6

    1994 26,02 1982-1994 2,0

    2004 29,84 1994-2004 1,4

    2007 30,84 2004-2006 1,1

    Sources: HCP, CERED (1997). Situation et perspectives dmographiques. RGPH de 1960, 1971, 1994 et 2004 ; etprojections de la population pour 2007.

    Ainsi, en 1900, le Maroc tait peupl de prs de 5 millions dhabitants seulement ; le capdes 10 millions a t franchi au milieu des annes cinquante, celui des 20 millions en 1981,

    enfin, ltape actuelle, celle des 30 millions, en 2005. Le profil de transition dmographiqueest assez classique.

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    Rtrospective (1960-2006) etdterminants socio-conomiques Dmographie

    La phase dacclration a dabord t lente, jusquau milieu du XXe sicle, avant de devenirexplosive dans les annes cinquante ; le pic de croissance maximale a atteint 3,3 % par anentre 1952 et 1960, ce qui classe le Maroc dans la catgorie des pays transition haute,

    au ct du Brsil, de lEgypte ou du Mexique.Le record mondial durant la priode 1950-1970 est celui du Mexique, avec un taux annuelmoyen de croissance dmographique de 3,5 % en moyenne par an, ce qui correspond untemps de doublement en 20 ans seulement. Malgr le dynamisme de lconomie, la crationdemplois ne pouvait faire face une telle contrainte dmographique ; le gouvernement napas tard modifier la Constitution pour instaurer la planification familiale (le principe desparation de lEglise et de lEtat, acquis ds le dbut du sicle, a faci lit le basculement).

    Au Maroc, la phase de dclration a dabord t hsitante, avant de sacclrer partir de1994. En premire approximation, aujourdhui, le freinage a t tel que le taux est de 1,1% ;il serait donc revenu la vitesse enregistre durant la priode 1912-1936, ceci malgr la jeunesse

    de la structure par ges. Ce phnomne semble li la conjonction de trois facteurs :lextraordinaire rapidit de la baisse de la fcondit, un ventuel ralentissement des progrsde lesprance de vie ; enfin, un solde migratoire ngatif avec ltranger.

    Mais il convient de garder lesprit leffet de llan dmographique incorpor dans la pyramidedes ges ; la forte fcondit un moment donn multiplie le nombre de futurs parents potentiels25 35 ans plus tard et gonfle le flux des candidats potentiels lentre sur le march dutravail une vingtaine dannes aprs.

    Llan de la croissance dmographique tant antrieure que rcente et limpact de la transitiondmographique ont conduit la progression parallle de la population en ge dactivit et

    des personnes ges en termes absolus et relatifs. La hausse des proportions de ces catgoriesde la population se poursuivra dans les annes venir en raison notamment du recul de lapart des jeunes due essentiellement la baisse de la fcondit. Ces changements vont serpercuter fortement, dune part, sur le march du travail et, dautre part, sur le systme deprotection sociale. Ainsi, la matrise relative de la dmographie marocaine nexclut pas lapersistance de la pression dmographique.

    Au vu de ltroitesse du systme conomique rsorber le chmage et tant donn le caractrestructurel de ce dernier, lascension de la part des adultes risquerait daccentuer les tensionssociales. En outre, bien que le vieillissement de la structure par ge se fait un rythme lent,lvolution rapide de leffectif de la population ge risquerait daggraver tant lquilibre financier

    fragile des systmes de retraite et de protection sociale que les charges du systme de sant.La pression sur le march du travail est dautant plus forte que les flux potentiels des entressont largement suprieurs ceux des sortants, que, par ailleurs, la quasi-absence de rgimesdes retraites nincite pas la cessation dfinitive dactivit, enfin, quil ny a pas adquationentres les secteurs concerns par les dparts (activits traditionnelles) et ceux concerns parles entres (activits mergentes).

    2. Mortalit

    Faute dun enregistrement suffisant des dcs actuellement et, a fortiori, par le pass, on ignorele cours de la mortalit. On ne peut que se livrer des supputations, grce des techniques

    destimation indirectes, ou, plus simplement, en observant lacclration du rythme de lacroissance dmographique.

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    Les rcits existants font tat de priodes de scheresse, de famines et de graves pidmies depeste et de maladies infectieuses et parasitaires rcurrentes telles que le cholra(1). Ds lors,il nest pas interdit de penser quen moyenne, en prenant en considration les annes de

    catastrophes, la dure de vie courante du fait de leffroyable mortalit des enfants lpoque pr-transitionnelle devait avoisiner les 25 ans (2).

    La progression marocaine, 1950-2006, de 40 72 ans de vie moyenne

    Au Maroc, vers 1950, lesprance de vie la naissance est value environ 40 ans. Ce quisignifie quun gros progrs a dj t accompli par rapport aux conditions historiques quiavaient toujours prvalu pour les gnrations prcdentes. Depuis 1950, la condition sanitairena cess de samliorer de dcennie en dcennie. Particulirement, la baisse de la mortalitsest surtout opre depuis le dbut des annes 60, avec un gain en esprance de vie de prsde vingt-cinq ans (47 ans en 1962 versus 72 ans en 2004, figure 1). Ce gain en nombre dannesde vie moyenne indique que non seulement plus de personnes survivent pour atteindre lgede la vieillesse, mais ceux qui latteignent vivent plus longtemps quauparavant. Par consquent,les familles comportant trois gnrations deviennent de plus en plus frquentes, largissantles possibilits de cohabitation des personnes ges avec les diffrents membres de la famille.Toutefois, les transformations conomiques et sociales, dont la mobilit gographique des

    jeunes, etc., agissent sur plusieurs aspects de la vie de famille, y compris sur des traditionsfavorisant la co-rsidence des parents et des enfants. Ces changements pourraient sintensifieret affecter les structures traditionnelles de la famille.

    Shining India

    Grce la qualit des archives coloniales britanniques, lexemple de lInde est assez loquent.Du fait de la malnutrition endmique et de la rptition des pidmies et des famines et en raisongalement du caractre extrme des ingalits sociales (systme des castes), lesprance de vie lanaissance tait, au XIXe sicle, de 20 ans seulement. Il a fallu attendre la mise en place du Codede la famille pour quun premier signe de changement, fragile et presque imperceptible, se manifeste ;mais cest vritablement partir des annes 20, que se place le tournant dcisif.

    En 2006, en Inde, la vie moyenne a tripl par rapport sa norme historique (62 ans aulieu de 20 ans), le taux de mortalit est valu 58 dcs pour 1 000 bbs de moins dunan (au lieu de prs de 400 pour mille dans les Indes millnaires). Le retard par rapport auMaroc diminue rapidement : il nest plus que de lordre dune dizaine dannes ; or lInde,

    rappelons-le, est la vritable locomotive de la croissance mondiale. En dautres termes, la ralitdpasse la fiction ; il faut repenser notre vision du monde ; on assiste la renaissance de lavieille civilisation indo-europenne.

    (1) Tabutin. D., Vilquin. E., et Biraben J.N., Lhistoire de la population de lAfrique du Nord pendant le deuximemillnaire, communication prsente la confrence The History of World Population in the Second Millennium .Florence, 28-30 juin 2001, UIESP.Noin D., 1970, la Population rurale du Maroc, PUF, Paris, t. 1, p. 239.(2) En France, o les registres paroissiaux ont t mis en place au XVI e sicle, et remplacs par les registres dtat civil descommunes la Rvolution, la baisse de la mortalit na commenc se manifester quavec llimination progressive de lapeste au dbut du XVIIIe sicle et avec la cessation des guerres permanentes que menait Louis XIV, qui domina lEurope et

    gouverna jusqu sa mort, en 1715. Daprs les travaux de dmographie historique, vers 1750, la vie moyenne ntait encoreque de 25 ans.

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    Lamlioration des chances de survie est due principalement la lutte contre la mortalit desenfants en bas-ge. Selon les rsultats du RGPH 2004 (figure 1), la mortalit infantile a beaucoupbaiss, passant de 149 au dbut des annes 60 48 en 2004. Ces progrs sont le reflet

    des campagnes de vaccination menes par le Royaume, ciblant particulirement la lutte contreles maladies qui touchent les enfants en bas-ge et rsultent galement de lamlioration de lacouverture sanitaire dune manire gnrale. En effet, le nombre dhabitants par mdecin sestnettement amlior, passant de 12 120 habitants par mdecin en 1967 1780 habitants parmdecin en 2004. En mme temps, le nombre dhabitants par lit a augment de 638 1 144.Cette volution est due aussi au dveloppement de ltat nutritionnel et laccs leau potable.

    Figure 1

    Evolution de lesprance de vie au Maroc entre 1950 et 2004

    0

    10

    20

    30

    40

    50

    60

    70

    80

    1950-1955 1962 1967 1980 1987 2004

    42,9 47,0 48,2

    59,1 65,0 71,7

    Cependant, le Maroc continue daccuser des retards dans ce domaine, notamment en ce quiconcerne la survie de lenfant et celle de la mre, qui restent encore prcaires par rapport auxpays de niveau de dveloppement comparable. Ainsi, le taux de mortalit maternelle est de227 dcs pour 100 000 naissances (figure 2) lors de la priode 1994-2003. Ce taux est encoreplus lev en milieu rural quen milieu urbain en raison des carences en soins prnataux et la faible proportion des accouchements en milieu surveill.

    Figure 2

    Taux de mortalit maternelle (pour 100 000 nouveau-ns)

    0

    10

    20

    30

    40

    50

    60

    70

    1972 1978-1984 1985-1991 1993-1997 1994-2003

    631

    359 332 228 227

    Il nen reste pas moins que le gain desprance de vie est trs net, sans toutefois tre exceptionnel ;

    il faut avoir lesprit la performance sanitaire du Japon pour relativiser celle des autres paysdu monde.

    Rtrospective (1960-2006) etdterminants socio-conomiques Dmographie

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    Le champion japonais

    Victime de la dfaite militaire, occup par les troupes amricaines, au lendemain de lacapitulation (septembre 1945), sous la houlette du Gnral Mc Arthur, le pays doit entreprendrede profondes rformes institutionnelles.

    En 1946, il accuse un retard profond ; il est en ruines et au bord de la famine ; son esprancede vie est la plus basse de lO.C.D.E. ; vers 1980, il est pass en tte de peloton, et son avancene cesse de se creuser, puisque, en 2005, la dure de vie moyenne atteint 82 ans (et mme85 ans pour le sexe fminin, biologiquement plus fort). Quant la mortalit infantile (avant le premier anniversaire), elle est la plus basse du monde : 3 dcs pour 1 000 naissancesvivantes ; autant dire quelle est dj presque nulle ; au Maroc, en revanche, elle serait delordre de 48 pour mille, soit plus de 16 fois suprieure.

    Autres repres

    Le Maroc accuserait ainsi un lger retard par rapport son voisin algrien et serait largementdistanc par la Tunisie (tableau 2), o le taux serait deux fois moindre, en partie en raisondes diffrences des taux de couverture mdicale. Sa position actuelle serait analogue cellede lEspagne, encore patriarcale, de 1959. Mais ce dernier pays ne tardera pas combler sonhandicap, puisque, en 1974, le niveau de mortalit infantile a recul de moiti, pour atteindre20 dcs avant lge de 1 an pour 1000 naissances vivantes (niveau actuel de la Tunisie etniveau de la France cinq ans plus tt, en 1969).

    Tableau 2Mortalit infantile dans quelques pays et taux de couverture mdicale

    PaysProportion () de nouveau-ns Mdecins par Personnel infirmier

    mourant avant 1 an (2005) 1 000 habitants * par 1 000 habitants

    Islande 2 3,62 13,63

    Japon 3 1,98 7,79

    France 4 3,37 7,24

    Etats-Unis 7 2,56 9,37

    Russie 12 4,25 8,05

    Roumanie 17 1,90 3,89

    Vietnam 18 0,53 0,56

    Tunisie 21 1,34 2,87

    Mexique 24 1,98 0,90

    Chine 27 1,06 1,05

    Algrie 37 1,13 2,21

    Turquie 38 1,35 1,70

    Maroc (2004) 48 0,56 0,90**

    Sources: www.ined.fr/fr/tout_savoir_population/fiches_pedagogiques/la_mortalite_infantile_dans_le_monde/ et RGPH2004. Pour lAlgrie enqute EASF 2002.

    * OMS, Rapport mondial de la sant de 2006 ; HCP,Annuaire statistique du Maroc 2006.** Pour le cas du Maroc, il sagit du personnel paramdical public, le taux de personnel infirmier, selon lOMS est de 0,56.

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    3. Fcondit

    En une trentaine dannes seulement, du milieu des annes 1970 2004, la fcondit estpasse dun niveau exceptionnellement fort, 7 enfants par femme au dbut des annes soixante,au seuil de remplacement des gnrations : un peu plus de 2 (voir figure 3).

    Les premiers signaux de baisse de la fcondit ont t dtects au milieu des annes soixante-dix selon les donnes de lhistoire gnsique des femmes de lEnqute nationale sur la fconditet la planification familiale en 1979-1980 (ENFPF) qui a permis destimer lindice synthtiquede fcondit 5,9 enfants par femme. Dans une premire phase, ce dcrochage a t brutal,puis on a observ un ralentissement du rythme de la baisse suivi, enfin, durant la priodercente, dune brusque acclration.

    Ce flchissement de la fcondit et sa baisse acclre par la suite ont marqu lentre dfinitivedu Maroc dans sa deuxime phase de transition dmographique caractrise par une baissede la mortalit suivie de celle de la fcondit.

    Mais ce dclenchement de la deuxime phase de la transition dmographique ne sest paseffectu la mme poque dans les deux milieux de rsidence (urbain et rural). Ainsi, si cephnomne chez les citadines sest manifest ds la fin des annes 60, chez les femmes rurales cette poque, la fcondit se maintenait un niveau trs lev, et il faut attendre les annes80 pour que le taux de fcondit rurale flchisse.

    Figure 3

    Evolution de lindice synthtique de fcondit par milieu de rsidence

    Nombredenfantsparfemme

    0

    1

    2

    3

    4

    5

    6

    7

    8

    1962 1972 1977 1982 1985 1986 1987 1990 1991 1994 1997 2004

    Urbain

    Ensemble

    Rural

    Aujourdhui, lindice synthtique de fcondit se situe aux alentours de 2,5 enfants par femmeavec une distinction du milieu urbain par un niveau relativement faible de sa fcondit(2,1 contre 3,1 pour le rural).

    Cette baisse importante de la fcondit, qui na t possible que suite la baisse de la mortalitqui constitue un pralable la baisse de la fcondit, ne peut sexpliquer que par le changementdans le calendrier de la nuptialit et, dans une grande mesure, par le recours de plus en plusmassif la contraception.

    Le dcalage temporel de lamorce de la baisse de la fcondit selon le milieu de rsidencesuggre que les causes profondes dterminant la transition fconde au Maroc sont complexes

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    et ne peuvent tre rduites un seul facteur, notamment en raison des disparits tant spatiales,sociales quconomiques. Deux hypothses dexplication peuvent tre formules cet gard :dune part, une transition de modernisation touchant les populations ayant bnfici de

    la scolarisation de masse, des infrastructures sociales et soumises aux f lux informationnels travers les mass mdias et le dveloppement des moyens de communication : dautre part,une transition de crise ou de pauvret affectant les catgories de la population nayantpas ou peu bnfici de ces investissements sociaux. En effet, dans le contexte de crise(lajustement structurel et ses consquences notamment en matire demploi, daccs aux secteurssociaux), les familles adoptent un malthusianisme de pauvret et simposent un ajustement de la fcondit en raison de la dtrioration du niveau de vie et de laugmentation du cotde lenfant. Lvolution de la fcondit revt ainsi un caractre dual.

    La transition dmographique

    La thorie de la transition dmographique est une loi historique universelle, dont les fondementsont t tablis entre 1929 et 1953. Elle a la fois une dimension descriptive et une autreexplicative. La face descriptive peut se rsumer en lexistence de deux grandes phases historiques,la premire dacclration (baisse de la mortalit) et la seconde de dclration dmographique,lorsque la natalit sajuste et se met diminuer plus vite que la mortalit. La courbe de croissancede la population dcrit donc un profil en cloche ; selon que la transition dmographique est

    prcoce ou tardive, on peut donc lui associer un multiplicateur de population, qui est le rapportentre la population initiale (celle qui prcde labaissement sculaire de la mortalit) etla population finale (celle qui se caractrise par le retour un taux de croissance

    dmographique trs bas).Avec la modernisation sculaire, la mortalit de crise sattnue et la mortalit ordinaire recule, do une dilatation dmographique sans prcdent qui, au bout dun temps de raction

    plus ou moins long, entrane une adaptation (rgulation) de la fcondit : la procration najamais t illimite; ce que les couples cherchent, cest se prolonger par leur descendance. Sicelle-ci est dcime ds lenfance, alors il convient de se prmunir par le choix dune plus grandetaille de famille, mais ds que la mortalit prmature cde du terrain, limpratif de survie

    par la famille nombreuse se justifie de moins en moins. Cest alors que se dclenche la baissesculaire de la fcondit ; le rythme dmographique ralentit au fil des dcennies, pour revenir un quasi-quilibre bas.

    La dimension explicative de la transition dmographique est, en revanche, trs complexe etcomporte de multiples facettes donnant lieu des dbats contradictoires. En sappuyant surles travaux ayant la fois une grande profondeur historique et gographique, trois lmentssemblent se dgager :

    le rle de la modernisation/dveloppement, entendus au sens large, dont lun des piliers estla lente disparition du risque quotidien de dcs ;

    le modle diffusionniste, dj voqu chez les classiques, mais dont la puissance est dmultipliepar la mondialisation des esprits; enfin, dans le prolongement de travaux acadmiques et deproccupations sociales sur la longue dure ;

    la prise de conscience et la volont politique, lchelle mondiale, dabolir les

    discriminations les plus criantes lencontre des femmes.

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    En effet, diverses tudes ont montr que les reprsentations relatives une descendancenombreuse sont en train de changer en fonction des cots de lducation des enfants qui necessent daugmenter. Ceci un moment o les flux montaires intergnrationnels se modifient

    de plus en plus. Avec une diffusion plus ou moins large de lcole, le volume des transfertsdes parents vers leurs enfants saccrot, tandis que ceux en provenance des enfants se font deplus en plus prcaires. Une tude (3) sur la perception par les parents des cots et bnficesdes enfants au Maroc a montr que le maintien de la fcondit rurale des niveaux relativementlevs par rapport lurbain trouve son explication, entre autres, dans les bnfices que lonpeut attendre de la procration ( court terme, le travail des enfants et, long terme, la scuritdans la vieillesse) et des cots quelle engage (scolarisation, sant, logement, consommationalimentaire et vestimentaire des enfants).

    Le rythme de la baisse de la fcondit est dautant plus saisissant que prs de la moiti de lapopulation marocaine vit encore en zone rurale. Une telle volution porte penser que lemouvement ne sarrtera pas, comme par magie, la ligne de renouvellement des gnrationset que, si lon ny prend pas garde, lexcs de fcondit se transformera vite en dficit. Lescas sont sans cesse plus nombreux (Canada, Europe, Asie orientale, Turquie occidentale, Tunisie,Iran central, sans compter les grandes mtropoles du tiers-monde ) ; il sagit dune tendancede fond, apparemment irrversible, sauf l o ont t mises en place des politiques de conciliationentre la vie professionnelle et la vie familiale, comme dans lEurope atlantique (hors Pninsuleibrique).

    Ne nous attardons pas sur les causes de cette rvolution fconde. Contentons-nous dementionner quelques points cruciaux ; les facteurs de la transition sanitaire et ceux de latransition reproductive sont largement communs.

    Pour la chute de la fcondit, ils sont lis des lments historiques connus, commelurbanisation (contraintes despace, de temps, donc de cot de lenfant) ; llvation delinstruction fminine, avec son cortge de consquences en termes daspirationprofessionnelles, de statut priv, dmancipation financire et de satisfaction matrielle ; ladiffusion dun nouveau modle de style de vie plantaire ; lirruption des techniques mdicalisesde limitation des naissances (contraception moderne, avortement par aspiration, notamment).

    L encore, il sagit dun mouvement transnational : ainsi, entre 1960 et 2005, les courbesde fcondit de lAsie et de lAmrique latine, dune part, et celles de lEurope et du Japon,dautre part, se confondent, aussi bien en niveaux quen tendances. Tout se passe comme siun processus de convergence inluctable, li aux forces de modernisation et de haussecorrlative du cot de lenfant, se mettait en mouvement. La recherche de facteurs dvolution

    proprement internes savre donc dlicate, surtout dans des socits ouvertes, soumises linfluence des ides et des styles de vie extrieurs ; ceci semble valoir surtout pour les femmes,dont le souci dmancipation est devenu une priorit politique internationale.

    Le retardement du mariage, devenu moins universel, et le recours, sans doute plus subi quechoisi, larme contraceptive expliquent la baisse de la fcondit marocaine. LEuropeoccidentale et lAsie dExtrme-Orient, forte densit de peuplement par rapport aux terrescultivables, avaient connu ce premier mcanisme dajustement la pousse dmographiqueinduite par les premiers flchissements de la mortalit. Mais il y a une singularit marocaine :

    (3) CERED, (1996), Perception par les parents des cots et bnfices des enfants , in Famille au Maroc, les rseaux desolidarit familiale, Rabat, Maroc.

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    lampleur, la vitesse et la porte de lapplication de cette contrainte morale , pour reprendrelexpression du Pasteur Malthus.

    Une nuptialit qui devient de plus en plus tardiveSur le plan de la nuptialit, le recul de lge au premier mariage durant les dernires dcenniesfigure parmi les changements les plus remarquables dans la socit marocaine. Les femmeset les hommes se marient des ges de plus en plus tardifs. Ce recul est apparu la faveurde la modernisation de la socit engendre par la scolarisation et lurbanisation, maisaussi de leffet des difficults dinsertion sociale et conomique (emploi, logement).

    Ainsi, en 1960 prdominait la tradition du mariage prcoce, universel, le plus souvent arrangds lpoque de la pubert, voire ds lenfance. Ainsi, lge de 20-24 ans, 94 % des femmestaient dj maries, et dans la tranche dge suivante (25-29 ans), le pourcentage approchaitles 98 %. Au-del de 30 ans, le clibat ne touchait quune infime minorit de femmes : environ

    1,5 % seulement.La mutation samorce avec une grande nettet, ds les annes 60, puisque la proportion desadolescentes de 15 19 ans dj maries chute de moiti : 6 sur 10 en 1960, 3 sur 10 en 1971 ;puis elle devient marginale ds la fin des annes 80 (1 sur 10 environ). La tendance retarderle mariage se propage ensuite, et trs vite, aprs la vingtaine : au sein de la classe dge 20-24ans en 1960, la proportion de clibataires chez les femmes tait infime : 6 % ; au recensementde 1982, elle atteint 40 % avant de devenir majoritaire vers 1985 et de se stabiliser lgrementau-dessus de 60 % depuis 1997 (et mme au-dessus des 2/3 pour les citadines).

    De lexamen de lvolution des proportions des clibataires 20-24 ans pour les femmes et 25-29 ans pour les hommes, on constate combien sont importants les changements qui

    ont affect la primo-nuptialit des deux sexes. Pour diverses raisons, ces proportions ontsensiblement augment (scolarisation plus intense notamment chez les filles, entre sur lemarch du travail, aspiration un autre style de vie, difficults conomiques, etc.). Dansla tranche dge 25-29 ans, le glissement est profond ; en effet, la proportion des femmesnon clibataires passe de 98 % en 1960 83 % en 1982 avant de tomber autour de 60 %en 2004.

    Figure 4

    Evolution de la part des femmes clibatairesselon l'ge entre 1994 et 2004 (en %)

    0

    10

    20

    30

    40

    50

    60

    70

    80

    90

    15-19 20-24 25-29 30-34 35-39 40-44 45-49

    1994

    2004

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    Tableau 3

    Proportion (en %) des femmes maries selon lge en 1994 et 2004

    Age 1994 200415-19 ans 12,1 10,7

    20-24 ans 41,4 37,0

    25-29 ans 60,3 55,7

    30-34 ans 75,1 67,5

    35-39 ans 82,0 74,5

    40-44 ans 83,6 78,7

    45-49 ans 82,5 78,2

    Source: HCP, RGPH 1994 et 2004.

    Prenons maintenant comme repre lge de 30 ans. A cet ge, dans la socit agraire traditionnelle,seulement une femme sur cinquante tait encore clibataire ; au recensement de 2004, en milieurural, elles sont quinze sur cinquante (35,8 % de clibataire de 25-29 ans). A titre de comparaison,parmi les citadines, le pourcentage correspondant slve prs de vingt sur cinquante (40,7 %).

    Autrement dit, le mariage prcoce nest plus la norme, loin sen faut.

    Bien plus, cest linstitution mme du mariage qui est branle ; il sagit de plus en plus duneunion fonde davantage sur les sentiments du couple que sur les rgles de la coutume familiale(mariages consanguins, avec souci de conservation du patrimoine) ; surtout, le clibat dfinitif,choisi ou subi, notamment par les femmes diplmes, saffirme de plus en plus. En moyenne,dans la socit patriarcale du pass, le clibat dfinitif des femmes, tous niveaux dinstructionconfondus, tait rarissime (1 %) ; de nos jours, pour les femmes nes dans les annes 50, ilest proche de 10 %, avec une forte progression selon le niveau dinstruction parmi les nouvellesgnrations.

    Prenons le cas des femmes nes vers le milieu des annes 1960 : 40 ans, parmi les plus instruites(niveau suprieur), un quart ne se sont pas maries ; pour celles, plus nombreuses, nayantaucune instruction, les murs ont galement beaucoup chang, puisque un bon dixime dentreelles sont restes clibataires, au lieu d peine 2% pour leurs anes des annes 1940.

    Venons-en maintenant aux classes dges les plus nombreuses, nes vers 1975, victimes dela saturation dmographique (crise du logement et de lemploi), atteignant aujourdhui lapetite trentaine ; faute dtre pleinement accueillies dans lappareil socio-conomique (marchdu travail, logement, infrastructure scolaire et universitaire, accs aux revenus et lautonomiepersonnelle), elles sont confines dans une situation de clibat prolong.

    Sagissant de la catgorie des femmes diplmes, daprs les premires indications fourniespar le recensement de 2004, un bon tiers devrait rester clibataire, soit parce que leur statutconomique demeure insatisfaisant par rapport leurs aspirations, soit parce quelles redoutentde ne pas trouver un mari rpondant leur souhait de travail hors domicile, dgalit dansla vie domestique et dmancipation personnelle.

    Ces changements sont corrobors par lvolution de lge moyen au premier mariage qui aenregistr pour sa part une hausse remarquable. En 2004, lge moyen au premier mariage

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    des femmes tait de 26,3 ans (31,2 ans pour les hommes), alors quen 1960 il ne dpassaitgure 17 ans (24 ans pour les hommes). Ainsi, si le recul de lge au mariage reflte leschangements profonds de la socit marocaine, force est de constater galement quil demeure

    lun des facteurs ayant rduit sensiblement les niveaux de la fcondit au Maroc. Laugmentationde lge au premier mariage des femmes a rduit de manire significative la dure potentielledexposition au risque de conception et donc le nombre total denfants que pourrait avoirune femme durant sa vie gnsique.

    Tableau 4Age au premier mariage (en annes) en 1994 et 2004

    selon le sexe, par milieu de rsidence

    Milieu de rsidence 1960 1971 1982 1994 2004

    Masculin Urbain 24,6 26,7 28,5 30,9 32,2 Rural 23,9 24,8 25,6 28,1 29,5

    Fminin Urbain 17,5 20,8 23,7 26,4 27,1 Rural 17,2 18,7 20,8 23,7 25,5

    Sources: HCP, RGPH 1960, 1971, 1982, 1994 et 2004.

    Figure 5

    Age moyen au premier mariage de la population fminine

    15

    20

    25

    30

    1960

    1971

    1982

    1994

    2004

    26,9

    24,2

    25,8

    17,2

    17,5

    Urbain

    Rural

    Total

    Compte tenu de la misre et des dficiences nutritionnelles, le mariage ne suivait que de peulapparition des premires rgles, donc de la possibilit denfanter ; aujourdhui, les premiresrgles sont bien plus prcoces, vraisemblablement 12 ou 13 ans ; du fait, par ailleurs, de laquasi-inexistence de naissances hors mariage (statistiquement oui, mais dans la ralit il nya pas de raison quil ny en ait pas), on peut considrer que cette rgulation par le retard des

    mariages exerce un effet trs puissant sur la fcondit : ainsi, la dure de la vie reproductivede la femme marocaine est ampute dune quinzaine dannes (27 12 = 15).

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    Or, les annes concernes par le report des mariages (entre 17 et 27 ans) sont prcisment celleso la fertilit est encore sa valeur maximale ; si, maintenant, on prend galement en considrationla monte du clibat dfinitif, on en conclut, en premire approximation, que, dans les conditions

    actuelles, la moiti de la baisse de la fcondit serait imputable la matrise de la nuptialit.

    Un recours accru aux moyens contraceptifs

    Si lge au premier mariage constitue une des variables-cls du dclenchement de la baissede la fcondit, son effet diminue progressivement au profit de la diffusion progressive desmoyens de limitation volontaire des naissances. Dautant plus que se produit une valorisationprogressive de limage dune famille rduite (mdias, manuels scolaires, aspirations sociales).La politique de planification familiale mise en uvre depuis 1966 a jou elle aussi un rlenon ngligeable dans la rduction de la fcondit. Il est noter que la disponibilit de lacontraception pour ceux et celles qui le dsirent est le rsultat de la mise en uvre dunimportant programme de planification familiale, dont les visites domicile de motivationsystmatique (VDMS) dveloppes dans les annes 80.

    Ngligeable dans les annes 60, o seulement 8 % des femmes utilisaient une mthodecontraceptive (figure 6), la prvalence contraceptive dpasse aujourdhui les 63 % (4), elle estplus leve en milieu urbain quen milieu rural (65,5 % contre 59,7 %).

    La prvalence contraceptive a gagn 23 points entre 1980 et 1992, passant de 19 % 42 % et16 points entre 1992 et 1997, passant de 42 % 58 %. On note que, selon le milieu de rsidence,le recours la contraception est plus lev en milieu urbain quen milieu rural, mais les diffrencesne sont pas importantes (65,5 % pour lurbain et 59,7 % pour le rural). Il en est de mme parniveau dinstruction o lon ne constate que des carts relativement modestes.

    Figure 6

    Evolution de la prvalence contraceptive selon le milieu de rsidence

    Urbain Rural Ensemble

    1987

    1992

    1995

    1997

    2003-2004

    0

    5

    10

    15

    20

    25

    30

    35

    40

    45

    50

    55

    60

    65

    70

    Une amlioration du statut de la femme comme facteur-cl de la transition fconde

    Le recul de lge au mariage et le recours de plus en plus massif la contraception ne sontpas indissociables de lamlioration des conditions des femmes au Maroc. Ces changementspeuvent tre apprcis travers les indicateurs dalphabtisation des femmes et de leur entresur le march du travail. Cest ainsi que les dernires dcennies ont t marques par une

    (8) Enqute sur la population et la sant familiale, EPSF, 2003-2004.

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    certaine amlioration tant au niveau de la scolarisation, notamment des filles, quau niveaude lalphabtisation des femmes. Lanalphabtisme fminin est pass de 96 % en 1960 55 %en 2004, soit une baisse de 41 points en 44 ans, en raison essentiellement de la diffusion de

    la scolarisation parmi les jeunes gnrations. En effet, le taux de scolarisation des filles dansle primaire a atteint 77,5 % en 2004.

    Cette amlioration du capital scolaire des femmes au Maroc a permis la remise en cause decertaines normes qui font de la femme un simple agent de reproduction. La prolongationdes tudes jusqu un niveau relativement lev a ouvert aux femmes de nouvelles perspectivesquant leur autonomie et leur insertion professionnelle, engendrant ainsi un nouveau regardport sur lenfant. Cette scolarisation qualifie de dot scolaire va aussi peser dans leurs stratgiesmatrimoniales, dans la mesure o la dtention dun diplme inciterait les femmes privilgierune stratgie individuelle de dveloppement et exercer une activit professionnelle, laquellepourrait avoir une influence sur leur comportement procrateur.

    Tableau 5Indice synthtique de fcondit selon le niveau scolaire

    Source Anne Aucun Primaire Secondaire et plus Total

    ENFPF 1979-1980 1975-1980 6,36 4,63 4,15 5,91

    ENPS-I 1987 1981-1983 5,84 3,83 2,24 5,24

    ENPS-I 1987 1984-1987 5,20 3,15 2,34 4,58

    ENPS-II 1992 1990-1992 4,86 2,36 2,03 4,04

    PANEL 1995 1993-1995 4,04 2,36 1,89 3,31

    ENSME 1997 1996-1997 3,7 2,3 1,9 3,1

    EPSF 2003-2004 2003-2004 3,0 2,3 1,8 2,5

    Par ailleurs, lactivit de la femme constitue un facteur discriminant de la fcondit. Ainsi,la participation fminine lactivit conomique (au sens de la comptabilit nationale) necesse de progresser, notamment en milieu urbain. Les femmes sont de plus en plus prsentesdans les activits conomiques en dehors de leur foyer. Leur volont grandissante datteindreune meilleure intgration sociale, le dveloppement de lconomie de march, le besoin accrdune main-duvre fminine, en particulier dans le secteur tertiaire, la modernisation de

    la socit et lvolution des attitudes lgard de la participation de la femme la vie activeconstituent autant de facteurs qui les inciteraient sortir de la sphre familiale pour rejoindreles rangs de la population active. Cette participation la vie professionnelle rmunre leurpermet de sortir de lespace familial traditionnel, daspirer un nouveau mode de vie et dedisposer dans leur entourage dun pouvoir de dcision produisant de nouveaux rles dans lafamille. Cest ainsi que leffet de lactivit fminine sur la fcondit a t largement dmontrdans la littrature dmographique. Lexercice dune activit conomique engendre uncomportement favorable une descendance rduite, notamment dans les zones urbaines. Lesfemmes qui travaillent ont davantage doccasions de contact avec le monde extrieur et sontde ce fait mieux mme dadopter des attitudes rationnelles par rapport leur descendanceet lespacement des naissances. En 1982 dj, alors que la transition de la fcondit tait

    encore timide, lactivit fminine sest affirme comme un critre discriminant majeur de lafcondit au Maroc. Lindice synthtique de fcondit dclinait de 6,06 pour les femmes

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    inactives 3,60 pour les celles qui exeraient une activit conomique. Cette diffrence estencore plus accentue en milieu urbain o sexercent les activits fminines les plus rmunreset les plus qualifies (5,01 enfants chez les femmes inactives, contre 2,4 chez les femmes actives).

    Le RGPH de 2004 confirme ce constat : les inactives ont mis au monde, en moyenne,3,1 enfants par femme contre 1,1 pour les actives (2,8 versus 0,8 respectivement en milieuurbain et 3,5 versus 1,8 respectivement en milieu rural).

    4. Mobilit internationale

    La migration internationale marocaine a connu une volution importante, que ce soit dansson ampleur ou dans sa complexit. Lorigine gographique et la nature des flux changent,de nouvelles modalits de circulation mergent. Simultanment, on observe un largissementdes zones dorigine et une diversification des populations candidates au dpart. Les lieux dela migration et les stratgies migratoires se multiplient. Les relations des pays daccueil avecle Maroc, pays de dpart, se densifient et se complexifient, et de nouvelles ralits socialesde lmigration marocaine se dessinent.

    Jusquau milieu du 20e sicle, le flux migratoire des Marocains vers ltranger est rest faible,et cest au lendemain de la Seconde guerre et particulirement au dbut des annes 60 quelmigration des ressortissants marocains sest accentue suite au dficit dmographique delEurope conjugu aux exigences dune croissance conomique rapide donnant lieu unedemande considrable de main-duvre.

    Leffectif des Marocains rsidant ltranger (MRE) est ainsi pass de 160 000 en 1968 680 000en 1982, puis 1 943 000 en 1991 pour atteindre en 2004 un effectif global de 3 089 000 rpartisentre lEurope (2 616 871), les pays arabes (282 772), lAsie et lOcanie (5 167), lAfrique(5 366) et les Amriques (178 914)(5).

    Par ailleurs, il y a lieu de noter que le phnomne de la migration internationale devraitcontribuer considrablement au rythme de baisse de laccroissement de la population. Rienque pour les entres lgales dans les principaux pays dmigration en Europe, un total de101 100 Marocains est entr dans ces pays en 2002 (6). Ne sont pas donc pris en compte lesmigrants illgaux et les destinations dAmrique du Nord (Canada et Etats-Unis). Lesinterceptions de migrants clandestins au large des ctes espagnoles et marocaines se font parmilliers annuellement. Bien entendu, un nombre important de migrants russissent rejoindrelautre rive de la Mditerrane.

    Le Maroc nchappe pas au phnomne mondial dexplosion de la mobilit par lextinctiondes terroirs lie aux gains de productivit dans lagriculture (le progrs technique chasse lhommedes champs) et la naissance dune conomie immatrielle, centre sur le secteur des services.

    La pression dmographique dpassant les capacits dabsorption internes de lconomiemarocaine, des flux importants de personnes en qute dopportunits partent ltranger,allgeant ainsi le fardeau du pays ; le phnomne est, par essence, dlicat mesurer. Mais ilsuffit de sen remettre un ordre de grandeur ; la prsence marocaine ltranger aurait tripldepuis 1980, passant denviron 1 million trois millions de personnes. Ce qui correspond un dixime de la population rsidente (30 millions).

    (5) Selon la Direction des Affaires consulaires et sociales (DACS) du ministre des Affaires trangres et de la Coopration.Statistiques issues des missions diplomatiques et postes consulaires marocains dans diffrents pays.

    (6) Selon les statistiques du SOPEMI/OCDE, il y avait, en 2002, 40 200 entres lgales de Marocains en Espagne, 26100en Italie, 21400 en France, 8500 en Belgique et 4900 aux Pays-Bas.

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    Surtout, au cours du dernier quart de sicle, prs dun cinquime de laccroissement naturela t pong par lmigration ; or, il faut tenir compte de la slectivit du profil des migrantsselon le sexe et lge ; dans ces conditions, il se peut que le nombre de naissances prsent et

    venir soit allg et surtout que les tensions sur le march du travail soient nettement attnues(au sein du groupe dge 15-34 ans, le taux de chmage enregistr en 2005 est voisin de 47 %).

    Le Maroc nest plus uniquement un pays dmigration. Il est devenu aussi un lieu dimmigrationet de transit vers lEurope. Ainsi, la migration internationale restera, pour le Maroc, un enjeude tout premier plan dans les dcennies venir. En particulier, vu limportance des effectifset de la composition des MRE et vu le volume des transferts quils effectuent, on peut prvoirque leur rle dans les transformations sociales et conomiques du pays pourrait prendre delampleur, et leur poids et leur participation dans la vie politique du Maroc tendraient saffirmer.

    Demble, travers la globalisation et les accords du libre-change, les pays dvelopps cherchent

    substituer aux flux migratoires des flux de biens et de capitaux. Cependant, la questionqui se pose pour le Maroc cet gard est de savoir si les processus de globalisation russiraient freiner les flux migratoires et les supprimer par la suite. Ou inversement, en vertu deseffets pervers de la restructuration de lappareil productif quexige la globalisation, sur lquilibredu tissu social, si fragile soit-il, ils conduiraient intensifier la propension migrer vers lespays daccueil. Dans ce dernier cas, il semble que cest la population la plus qualifie qui serala plus concerne par les flux dmigration, ce qui nest pas sans dpouiller le capital humainmarocain de ces meilleures potentialits.

    5. Urbanisation et mobilit interne

    La dynamique dmographique du Maroc ne sest pas opre dune manire uniforme surlensemble du territoire. La seule distinction urbain/rural en est un exemple loquent. Lesrecensements marocains de 1960 2004 ont dmontr que la croissance dmographique toucheplus le milieu urbain.

    Cette distanciation des rythmes daccroissement explique lvolution de lurbanisation au Maroc.Ainsi, le milieu urbain, qui abritait 29,2 % de la population marocaine en 1960, en regroupe55,1 %, en 2004. La population urbaine a ainsi t multiplie presque par 5 contre seulement1,6 pour la population rurale durant la priode 1960-2004. Cette urbanisation acclresaccompagne dune expansion des banlieues par extension des primtres urbains des grandesvilles, ce qui ncessite un amnagement urbain adquat mme de lutter contre le manquedespaces verts, le surpeuplement rsidentiel, lisolation sociale et dassurer convenablement

    la protection civile.

    En termes de migration, le solde migratoire moyen annuel de lurbain tait de 67 000 entre1960 et 1971. Sur la dcennie 1970, il tait de 113 000. Il a atteint le maximum de193 000 dparts annuels nets entre 1982 et 1994 et environ 102 000 entre 1994 et 2004 (7).

    La contribution de lexode rural dans laccroissement dmographique urbain, estimeapproximativement, tait de 38 % entre 1960 et 1971, 43 % entre 1971 et 1982, 40 % entre1982 et 1994 et 35 % entre 1994 et 2004, soit une baisse du poids de lexode rural dans lepeuplement des villes.

    (7) Selon une estimation indirecte et approximative de S. Chahoua sur la base des premiers rsultats du RGPH-2004(les Cahiers du Plann 5, novembre-dcembre 2005) rviser selon les donnes directes du RGPH 2004.

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    Tableau 6Population par milieu de rsidence, 1960-2004

    AnneUrbain Rural Proportion de

    Effectifs Taux d accroissement Effectifs Taux d accroissement citadins (%)(en millions) annuel moyen (%) (en millions) annuel moyen (%)

    1960 3,4 8,2 29

    1971 5,4 4,3 10,0 1,8 35

    1982 8,7 4,5 11,7 1,4 43

    1994 13,4 3,6 12,7 0,7 51

    2004 16,5 2,1 13,4 0,6 55

    Sources : HCP, RGPH 1960, 1971, 1982, 1994 et 2004.

    Des raisons structurelles et conjoncturelles telles que la scheresse qui a svi au cours desannes 80 nont pas permis la rtention des ruraux sur leur lieu de naissance. La baisse durythme durbanisation observe aprs 1994 pourrait tre explique par la rtention relativeexerce par la campagne sur ses populations grce aux efforts de dveloppement du monderural, notamment dans les domaines de llectrification, de lalimentation en eau potable,de la construction des coles et du dsenclavement par le dveloppement du rseau routier.

    En outre, le dveloppement des moyens de communication et de transport et la diffusionde linformation vhicule par les mdias (tlvision par satellite, radio, tlphone) sont

    devenus des facteurs importants de rtention des ruraux dans les campagnes, agissant linversede lattractivit sculaire des villes.

    Ceci tant, le milieu urbain continue de gagner de plus en plus despace au dpens du milieurural travers la multiplication du nombre de villes et e centres urbains et du fait de lextensionde leurs primtres.

    Notons que les mouvements migratoires internes, constitus principalement, jusqu prsent,des flux de lexode rural, concernent de plus en plus des flux interurbains.

    Autant de facteurs qui peuvent, cependant, tre contrebalancs par leffet de la mondialisationqui peut induire des changements au niveau de lconomie agricole et tre lorigine de lexoderural, en particulier des petits agriculteurs contraints quitter la campagne.

    La diversification des mouvements migratoires et le changement de leur importance ne sontpas les seules mutations qui caractriseraient la mobilit spatiale et la dynamique dmographiquemarocaine. La composition par sexe des migrants internes connat galement dimportantesmutations dans le sens dune fminisation accrue. Cest ainsi que la femme participe la migration plusieurs titres. Dabord sur sa propre initiative, dans le cadre dune migration autonome, la recherche de conditions de vie meilleures. Ensuite, comme accompagnatrice de lhomme, entant que conjointe ou membre de la famille ou encore comme responsable dun mnage.

    La fminisation accrue des flux migratoires internes, de par lampleur quelle a acquise (8),les changements quelle voque et les mutations dont elle saccompagne au niveau du statut

    (8) Voir ce titre, CERED (1996) Famille au Maroc. Les rseaux de solidarit familiale, p. 151-152.

    Rtrospective (1960-2006) etdterminants socio-conomiques Dmographie

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    et de la condition de la femme marocaine, nest pas sans donner lieu une relative modernisationdes comportements dmographiques de celle-ci.

    6. Rpartition spatiale de la populationLa population du Maroc se caractrise par des disparits gographiques croissantes depeuplement. Par rgion, elle est ingalement rpartie. Trois rgions en abritent un tiers (32,9 %) :le Grand Casablanca (12,2 %), Souss Massa-Dra (10,4 %) et Marrakech-Tensift-Al Haouz(10,4 %). En revanche, moins de trois habitants sur cent (2,7) rsident dans les trois rgionsde Guelmim-Es-Semara, Laayoune-Boujdour et Oued Ed-Dahab Lagouira (respectivement1,5 % ; 0,9 % et 0,3 %). Entre ces deux extrmes se positionnent les autres rgions du Royaume,avec des pourcentages variant de 4,8% 8,3 %. Par rapport 1994, ce classement est rest,grosso modo, inchang. Il nempche que certaines rgions connaissent un fort dynamismedmographique, alors que dautres sont marques par des rythmes daccroissement

    relativement modrs faible.La premire catgorie de rgions taux daccroissement lev comprend la fois celles dontle poids dmographique est faible comme la rgion de Oued Ed-Dahab Lagouira, avec letaux le plus lev (10,5 %), suivi par Laayoune-Boujdour (3,8 %), Guelmim-Es-Semara (1,8 %),ainsi que des rgions poids dmographique assez important : Tanger Ttouan (2 %) quiest la quatrime rgion de par son poids dmographique (8,3 %), Rabat-Sal-Zemmour-Zaret Fs-Boulemane avec 1,8 % chacune.

    La deuxime catgorie de rgions rythme modr dvolution de la population, suprieur 1% mais infrieur 1,8%, regroupe des rgions ayant un poids dmographique important :la rgion du Souss Massa-Dra (1,7 %), le Grand Casablanca (1,5%), le Gharb Chrarda Beni-

    Hsen (1,4 %), Marrakech-Tensift Al Haouz (1,3 %), et Mekns-Tafilalet (1,2 %).La troisime catgorie de rgions ayant enregistr un taux daccroissement annuel moyen nedpassant pas lunit pourcentage comprend, par ordre dimportance : Taza-Al Hoceima-Taounate avec le taux le plus faible de 0,5 %, suivie par lOriental (0,8 %), Chaouia-Ouardighaet Tadla-Azilal (0,9 % chacune), Doukkala-Abda (1,0 %). Ce sont galement des rgionsrelativement peu urbanises.

    En somme, si la politique de rgionalisation suggre que les rgions du Sud du Maroc sontappeles connatre un accroissement dmographique soutenu, il nest pas certain que lesrgions dont le poids dmographique est le plus lev connaissent un ralentissement de leurcrot dmographique plus ou moins long terme. Les politiques durbanisation visant la

    construction de nouvelles villes proximit des grandes villes de ces rgions sont des lmentssuggrant une telle conclusion.

    Le dsquilibre de la rpartition de la population nest pas seulement rgional ; il lest aussientre les zones ctires et celles de lintrieur du Maroc. En fait, la dynamique spatiale encours peut tre qualifie de thalassotropisme (attraction de la mer), encourage par lescontrastes du relief et du climat, do des dsquilibres de peuplement de plus en plus accussentre la cte et lintrieur du pays.

    Casablanca, en forte croissance depuis linstauration du protectorat franais (1912), estaujourdhui une mtropole macrocphale de prs de 4 millions dhabitants, loin devant levieux complexe historique de Rabat-Sal (1,8 million). Elle tire avantage de sa position centrale

    sur le littoral atlantique en constituant de loin le premier ple conomique du Royaume eten drainant, elle seule, un huitime de la population.

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    Tableau 7Classification des rgions du Maroc selon

    limportance de la population

    Rgion1994 2004 Taux

    Population % Population % daccroissement

    Grand Casablanca 3 126 785 11,99 3 631 061 12,15 1,5

    Souss-Massa-Dra 2 635 522 10,11 3 113 653 10,42 1,7

    Marrakech-Tensift-Al Haouz 2 724 204 10,45 3 102 652 10,38 1,3

    Tanger-Ttouan 2 036 032 7,81 2 470 372 8,26 2,0

    Rabat-Sala-Zemmour-Zar 1 985 602 7,62 2 366 494 7,92 1,8

    Mekns-Tafilalet 1 903 790 7,30 2 141 527 7,16 1,2Doukkala-Abda 1 793 458 6,88 1 984 039 6,64 1,0

    Oriental 1 768 691 6,78 1 918 094 6,42 0,8

    Gharb Chrarda-Beni-Hsen 1 625 082 6,23 1 859 540 6,22 1,4

    Taza-Al Hoceima-Taounate 1 719 844 6,60 1 807 113 6,05 0,5

    Chaouia-Ouardigha 1 509 077 5,79 1 655 660 5,54 0,9

    Fs-Boulemane 1 322 473 5,07 1 573 055 5,26 1,8

    Tadla-Azilal 1 324 662 5,08 1 450 519 4,85 0,9

    Guelmim-Es-Semara 386 075 1,48 462 410 1,55 1,8

    Laayoune-Boujdour 175 669 0,67 256 152 0,86 3,8

    Oued Ed-Dahab Lagouira 36 751 0,14 99 367 0,33 10,5

    Total Maroc 26 073 717 100,00 29 891 708 100,00 1,4

    Source: HCP, RGPH 1994 et 2004.

    Mais, de faon plus gnrale, la bande ctire, sur une largeur de 15 20 kilomtres, exerceun magntisme croissant excessif, accaparant prs des deux tiers du potentiel humain, alors

    que sa dimension territoriale ne couvre que 10 15% de lensemble. Cette volution est assezanarchique et lourde de risques en matire de prservation de lenvironnement naturel(grignotage des espaces verts, prolifration dsordonne des tablissements humains, btonnagede la cte, perte de biodiversit, mauvaise affectation des ressources naturelles, etc.).

    B. Structures de la population

    La transition dmographique marocaine travers les rythmes de ses diffrentes phases et sescomposantes (mortalit, natalit et mouvements migratoires) a progressivement modifi lastructure par ge de la population. Etant encore non acheve, elle continuera la faonner

    et engendrer des effets ressentis aux niveaux du nombre moyen de personnes par mnage,de lhabitat et des quipements sociaux, de la scolarisation, de lemploi

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    1. Inversion progressive de la pyramide des ges

    La jeunesse de la population marocaine est une caractristique saillante de sa structuredmographique. Cependant, le recul du poids des jeunes dans la population totale est palpableau fil des annes. En effet, en se limitant aux moins de 15 ans, la part de cette sous-populationna cess de rgresser : elle est passe de 44,4 % en 1960 37,0 % en 1994, puis 31,3%en 2004 (28,4 % en ville versus 34,8 % dans le milieu rural).

    La transition dmographique commence donc se rpercuter remarquablement sur la formede la pyramide des ges. De forme triangulaire, elle est passe progressivement une formeen cloche, o la population en activit reprsente la partie prpondrante.

    Figure 7

    Pyramide des ges (en volume) du Maroc, 1960, 2004

    En effet, en 2004, six personnes sur dix avaient entre 15 et 59 ans (61,6 %). Cest donc latranche des personnes en ge dactivit qui devrait tre le point de mire des pouvoirs publics.On assiste actuellement larrive sur le march du travail de jeunes adultes, souvent avecune formation diplmante, un rythme rapide en raison dune fcondit passe assez leve.

    Lautre aspect que rvle la pyramide des ges du Maroc est le vieillissement. Le poids relatif

    de la tranche dge des 60 ans et plus , qui avait dabord lgrement baiss, sous le doubleeffet de laugmentation transitoire de la fcondit (baisse de la morbidit, amlioration delalimentation et de lhygine de vie, etc.) et de la chute de la mortalit infanto-juvnile, semet crotre depuis 1982, amorant ainsi le processus dit de vieillissement dmographiquesculaire, en fait, plus exactement dinversion de la pyramide des ges et, surtout, de pertede jeunesse, autrement dit, de djuvnisation .

    Ainsi, le changement qui porte le plus consquences est le basculement progressif de la structuredes ges qui se poursuit, du reste, bien aprs lre de la transition dmographique, cest--dire, pour le Maroc, au-del de lhorizon 2030.

    Pyramide des ges pour le Maroc (1960) Pyramide des ges pour le Maroc (2004)

    1500 1000 500 0 500 1000 1500

    Milliers

    05

    10

    15

    20

    25

    30

    35

    40

    45

    50

    55

    60

    65

    70

    75+

    20002000

    Hommes Femmes

    05

    10

    15

    20

    25

    30

    35

    40

    45

    50

    55

    60

    65

    70

    75+Hommes Femmes

    1500 1000 500 0 500 1000 1500

    Milliers

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    Tableau 8Rpartition (en %) de la population par

    grands groupes dge fonctionnels

    Anne 0-14 ans 15-59 ans 60 ans et plus

    1960 44,4 48,4 7,2

    1971 46,9 46,9 7,2

    1982 42,1 51,5 6,4

    1994 37,0 56,0 7,0

    2004 31,3 60,6 8,1

    Sources : HCP, RGPH 1960, 1971, 1982, 1994 et 2004.

    Et cest bien l le phnomne le plus porteur davenir, qui changera la face de la socit : lajeunesse deviendra minoritaire.

    En dpit de la baisse tendancielle du rythme dmographique, la croissance future de la populationdes diffrents groupes dge aura des rpercussions importantes sur les besoins socioconomiques.Le dveloppement du pays dpendra de la faon dont on rpondra ces besoins.

    Ainsi, le nombre de jeunes, y compris les jeunes filles, entrant sur le march du travail continuera tre la principale consquence de lvolution dmographique dans les annes venir, dautantplus que le niveau scolaire de cette catgorie de la population est en amlioration constante.Le pays a connu un baby-boom la fois trs long et trs puissant ; en effet, de 1960 2007,

    autrement dit pendant prs dun demi-sicle, le nombre annuel des naissances dpasse 600 000,avec un pic voisin de 640 000 vers la fin des annes 90.

    Ce bourrelet se traduit, une vingtaine dannes plus tard, par une saturation de loffre detravail, lie au surplus relatif de jeunes et renforce par le dsir des nouvelles gnrationsfminines dentrer leur tour sur le march du travail. Nous sommes prcisment encore aucur de la priode dencombrement dmographique maximal ; la part des jeunes de 15 25 ans se maintient autour de 20 21 % depuis 1980, alors quaujourdhui elle est peuprs deux fois moindre chez le voisin espagnol.

    Certes, la population active occupe a tripl entre 1971 et 2005, passant de 3,4 10,2 millions.Il nempche que le taux demploi (rapport du nombre de personnes ayant un travail au nombre

    total dhabitants) est trs bas : 34 % seulement. Ceci alors mme que la population d ge actif (15 59 ans) est son maximum historique (61,6 %) ; la diffrence (61,6 34 = 27,6 %, ou8,3 millions de personnes) souligne le volume du gisement de capital humain non exploit.

    Mais la comparaison ne doit pas sarrter l. Force est de constater que si lvolution du ratioentre le nombre de candidats potentiels lentre et celui des sortants (ou retraits) potentielsbaisse (9), la taille moyenne de la gnration susceptible de se prsenter chaque anne sur lemarch du travail, choisie ici, arbitrairement, comme un dixime de la population de15 25 ans, ntait encore que de 163 000 personnes, elle serait de 682 000 en 2006, soitprs de quatre fois plus.

    (9) Ce rapport est mesur ici en divisant le nombre de jeunes de 15 25 ans par celui de la population ayant 65 ans et plus.Au Maroc, ce ratio tait de 4,5 en 1960, il est pass 4,1 en 2004 pour atteindre 3,9 en 2006.

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    La conclusion stipulant que pour une gnration ou deux il y aura encore trop de mondesur le march du travail par rapport ce que lconomie moderne peut absorber et donc unecontinuation du secteur informel et de la pauvret, avec son impact sur les conditions de

    vie (10) pourrait galement sappliquer au Maroc, moins que de grands progrs ne soientraliss.

    En deuxime lieu, la pression dmographique des jeunes de moins de 15 ans sattnueralgrement. Mais le souci de gnraliser la scolarisation conjugue lamlioration de la qualitdu rendement des systmes scolaires compensera largement cette baisse de la pressiondmographique en termes dinvestissement.

    La troisime implication de la transformation de la rpartition par ge de la population dcouledu processus de vieillissement de la population. Celle-ci pourrait avoir des consquences surla viabilit financire des systmes de retraite et de protection sociale. Si en termes relatifs,la proportion de la population ge natteindra les niveaux observs en Europe quau-del

    de 2030, en termes absolus, lvolution rapide de leur effectif exercerait une pression lourdesur les systmes de sant et de retraite accompagne dune transition pidmiologique setraduisant par lapparition plus importante de causes de dcs lies la vieillesse, dont lecot est souvent exorbitant (maladies chroniques et dgnratives). Ceci survient alors quele pays est encore sous la menace des maladies des pays en dveloppement, en plus des maladiesmergeantes.

    Certes, le processus de vieillissement dmographique ne devrait pas faire tomber dansl gisme , dmobilisateur : les personnes ges de 2006 sont en bien meilleure sant queleurs homologues de 1960 qui ont vcu leur enfance au sicle prcdent et prmaturmentuses par les maladies (non soignes) rptition, la sous-nutrition chronique, les deuils, un

    labeur physique dur et incessantCeci tant, les enfants, qui sont ns dans le nouveau bain technologique, sont, videmment,les plus familiers des nouvelles technologies de linformation et de la communication (NTIC) ;et les plus perdus sont les plus gs, volontiers considrs comme des dinosaures par leurspropres petits-enfants. En ce sens, le foss entre les gnrations na jamais t aussi grand.Economiquement, scientifiquement, lge prend une importance nouvelle, en particulier dansles domaines de pointe : les gnrations de capital humain deviennent plus importantes queles gnrations de capital physique ou financier.

    2. Mnages et familles

    Avec la chute spectaculaire de la fcondit, la taille des mnages est appele se rduirefortement, surtout en milieu urbain. Comme dans le reste du monde, la famille, soumise la triple influence de lallongement de la dure de vie, de la diminution du nombre denfantset du dsir dindpendance des couples, connatra une profonde mutation, la fois par nuclarisation (resserrement autour de la cellule parents/enfants) et par verticalisation (survie des enfants, des parents, des grands-parents, parfois mme des arrire-grands-parents,autrement dit, de trois ou quatre gnrations unies par les liens du mariage et de la filiation).Mais, au lieu de vivre le plus souvent sous le mme toit, la famille est de plus en plus dispersesur le territoire, voire ltranger.

    (10) Rochefort, M. Le dfi urbain dans les pays du Sud in Institut de recherche sur le Maghreb contemporain,Correspondancesn 68, 2001.

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    Ainsi, lexamen des donnes statistiques fait ressortir deux traits saillants qui caractrisentla dynamique familiale. En premier lieu, les changements affectant la structure familialeconvergent vers la rupture avec le mode familial traditionnel incarn par le type de famille

    complexe. La part des familles nuclaires (prs de 6 mnages sur 10 (11)) est devenue dominanteau dtriment des familles complexes. Les familles monoparentales, quoique peu nombreusesencore, ne reprsentent pas moins de 7,8 % des mnages, avec une prsence plus importanteen milieu urbain (8,7 %) quen milieu rural (6,6 %). Toutefois, il faut signaler que la partdes familles complexes revt une importance significative, qui atteint 38,8 % en 1998-1999(39,1 en milieu urbain et 38,2 en milieu rural).

    En second lieu, une rupture apparat dans lvolution des taux daccroissement annuel dela population et des mnages. Durant les deux premires priodes intercensitaires, le tauxdaccroissement des mnages tait manifestement infrieur celui de la population, soitrespectivement 1,10 % contre 2,52 % entre 1960 et 1971, et 1,02 contre 2,54 entre 1982

    et 1971. A partir de 1982, une volution dans le sens oppos est observe, le tauxdaccroissement des mnages dpasse celui de la population. Ce revirement sest manifestpar une baisse confirme de la taille des mnages : 5,9 en 1982 contre 5,25 en 2004.

    Tableau 9

    Taux daccroissement annuel moyen des mnageset de la population (en %)

    Priode 1960-1971 1971-1982 1982-1994 1994-2004

    Milieu urbain Mnages 2,25 4,11 3,93 3,12

    Population 4,34 4,45 3,64 2,07

    Milieu rural Mnages 0,50 0,56 0,40 1,51

    Population 1,75 1,46 0,67 0,59

    Ensemble Mnages 1,11 2,03 2,21 2,45

    Population 2,58 2,61 2,06 1,38

    Sources: HCP, RGPH 1960, 1971, 1982, 1994 et 2004.

    Le nombre de personnes par mnage a, ainsi, enregistr une augmentation non ngligeabledurant les quarante annes passes. En effet, il est pass de 4,8 personnes par mnage en1960 5,3 personnes par mnage en 2004, avec un pic observ pendant les annes 80(5,9 personnes par mnage).

    (11) HCP, CERED, Population et dveloppement au Maroc : dix ans aprs la CIPD(Le Caire, 1994). CSP : 2004.

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    Tableau 10Evolution du nombre de mnages (en milliers)

    et leur taille moyenne

    Milieu de rsidence 1960 1971 1982 1994 2004

    Nombre de mnages Urbain 802 1 024 1 594 2 531 3 440 Rural 1 625 1 716 1 825 1 915 2 225 Ensemble 2 427 2 740 3 419 4 446 5 665

    Taille moyenne des mnages Urbain 4,3 5,3 5,5 5,3 4,8 Rural 5,1 5,8 6,3 6,6 6,0 Ensemble 4,8 5,6 5,9 5,9 5,3

    Sources: HCP, RGPH 1960, 1971, 1982, 1994 et 2004.

    Par milieu de rsidence, la taille moyenne des mnages est toujours plus importante en milieurural quen milieu urbain. Dans le rural, 5,1 personnes vivaient sous le mme toit en 1960.Quarante quatre ans plus tard, en 2004, elles sont 6,0 personnes. Par contre, dans le milieuurbain, ce nombre est pass de 4,3 en 1960 5,5 personnes en 1982 pour enregistrer unebaisse de 5,3 en 1994 et de 4,8 personnes en 2004.

    Une telle situation se traduira par une forte demande des logements et des quipements. Or,tant donn que le problme de logement pse lourdement sur la gestion de la politique delhabitat, les pouvoirs publics devront faire face une demande additionnelle plus importante

    de logements. La croissance du nombre de mnages est nettement plus forte que celle de lapopulation ; il en rsulte un besoin urgent dagrandir le parc de logements et quipements(automobiles, mobilier, audio-visuel, lectromnager, etc.).

    3. Condition fminine

    La condition fminine est un facteur-cl de la transition fconde. La place des femmes dansla socit peut se mesurer aussi laune de trois critres progressifs, interdpendants : le savoir,le valoir et le pouvoir.

    Le savoir

    Lamlioration du capital scolaire des femmes au Maroc a eu un impact non ngligeable surleur comportement procrateur, et limpact diffrentiel quexerce linstruction ressort de faonvidente des diffrentes enqutes ralises au Maroc (12). La scolarisation remet en cause certainesnormes qui rduisent la femme un simple agent de reproduction, et la prolongation destudes, jusqu un niveau relativement lev, ouvre aux femmes de nouvelles perspectives quant leur autonomie et leur insertion professionnelle. Par ailleurs, la dot scolaire peut peserdans les stratgies matrimoniales, dans la mesure o elle inciterait les femmes privilgierune stratgie individuelle de dveloppement et exercer une activit professionnelle.

    (12) Lindice synthtique de fcondit varie selon le niveau dinstruction de la femme. En 2003-2004, les femmes illettres

    ont un nombre moyen denfants relativement lev (3,0) par rapport aux femmes ayant frquent lcole (2,3 et 1,8respectivement pour le niveau primaire et secondaire ou plus).

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    Un bref aperu de lvolution de certains indicateurs fminins montre les efforts consentispour combler les dficits entre hommes et femmes. La question de la condition de la femmeest dsormais une priorit politique et stratgique pour le Maroc. Cette amlioration passe

    inluctablement par la gnralisation de lducation fminine, levier du dveloppementsocioconomique et du bientre de lindividu.

    Au Maroc, force de constater quen 2004, 55 % des femmes sont analphabtes il est vraicontre 96 % en 1960. Lanalphabtisme est plus important en milieu rural (74,8 %) quenmilieu urbain (39,5 %). Entre 1994 et 2004, les gains, sont ingaux selon lge. Ainsi on observeune baisse de 63 % pour les 10-14 ans contre 27 % et 21% pour les 15-24 ans et 25-34 ans.

    Cette diffrence dans le rythme de la baisse sexplique par les efforts entrepris en matire descolarisation des jeunes filles en particulier. La scolarisation dans le cycle primaire des enfantsen ge dtre scolariss a enregistr un taux de 87 % en 2003-2004 contre 60,2 % au coursde lanne 1993-1994. Les filles en ont t les principales bnficiaires avec respectivement

    84,2 % et 51,9 %. En milieu urbain les filles ont dsormais la mme chance dtre scolarisesque les garons (90 %). Tandis que la scolarisation est encore faible dans le monde rural.Cependant, le taux a connu une forte progression, il passe de 43,2 % 83,6 % entre 1994et 2004 ; la progression a t plus nette parmi les filles pour qui le taux de scolarisation estpass de 30,1 % 78,5 % (respectivement, 55,7 % et 88,5 % pour les garons).

    Figure 8

    Evolution du taux danalphabtisme (en %) par sexe de 1960 2004

    0

    2

    4

    6

    8

    10

    12

    1960 1971 1982 1994 2004

    78 96 87 63 87 75

    51 78 65 41 67 55

    31 55 43

    MasculinFminin

    Ensemble

    Sagissant du savoir, le vhicule essentiel, quoique de moins en moins exclusif, est lcole ;or parmi les filles des gnrations les plus jeunes, la parit est en bonne voie puisque la quasi-totalit des fillettes accdent lcole primaire et auront ainsi la chance de sextraire du flaude lanalphabtisme et dtre mieux armes contre les discriminations lgues par la tradition.

    Leurs grand-mres, nes au milieu du XXe sicle, en grande majorit dans le rural, navaientpas connu lcole. Ainsi, une coupure radicale existe au sein-mme des familles entre lesgnrations successives. Le Maroc accuse un grand retard dans ce domaine puisque, pour lesfemmes nes en 1980, il se situe derrire lEgypte et lInde et trs loin de lIran ou de la Turquie.

    Or, lcole est le principal laboratoire de transformation de la personnalit individuelle etde la modernisation sociale (encore faut-il quelle vhicule des valeurs dgalit) ; sa vocation

    est non seulement dinstruire, mais dduquer, cest--dire dlever, de faire progresser lensemblede la personnalit, de prparer aux responsabilits de la vie. Sa fonction ultime est de donner

    Rtrospective (1960-2006) etdterminants socio-conomiques Quelle dmographie ?

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    laptitude savoir se servir de son cerveau, donc de pouvoir apprendre et surtout dapprendre apprendre ; la connaissance se renouvelle une vitesse sans prcdent.

    Cest donc sur les nouvelles gnrations, porteuses des qualifications les plus rcentes et des

    savoirs utiles lavancement de lconomie que reposent le potentiel dinnovation, la capacit rattraper le retard technique ou institutionnel, faire voluer les mentalits, en sorte quela mondialisation soit plus une opportunit quune effrayante fatalit.

    Il suffit de rappeler un fait, relatif aux femmes nes dans la premire moiti du XXe sicle :la gnration fminine corenne ne en 1900 tait presque totalement analphabte (90 %) ;la gnration fminine corenne ne en 1950 tait dote du bagage scolaire minimal, du vade-mecumindispensable pour mener une vie digne, hors du besoin : son taux danalphabtismetait tomb 0 %. Quels sont les autres pays de lex-Tiers-Monde, dont les gnrationsfminines nes au milieu du XXe sicle ont t intgralement arraches au malheur delanalphabtisme ? Il ny en a aucun.

    Le valoir

    Le valoir, ou la valorisation des femmes dans la vie conomique, tient la fois, dune part,au redploiement sectoriel en dfaveur des activits physiques (agriculture et industrie), eten faveur du tertiaire (services), selon la loi de Fisher mise en vidence ds les annes 1930et, dautre part, la mutation du statut fminin (rvolution contraceptive, progression delinstruction). Ayant pass leur jeunesse investir en formation, les jeunes filles sont dsireusesdutiliser leurs comptences et dacqurir une autonomie que jamais les gnrations prcdentesnavaient os esprer.

    Ainsi, la participation fminine lactivit conomique (au sens de la comptabilit nationale)

    ne cesse de progresser, surtout parmi les citadines. Les femmes sont de plus en plus prsentesdans les activits conomiques en dehors de leur foyer. Dautant plus que le dveloppementde lconomie de march, en particulier dans le secteur tertiaire, a engendr un besoin accrudune main-duvre fminine.

    En 2004, les femmes reprsentent 27,1 % de lensemble de la population active, avec un tauxdactivit des 15 ans et plus de 27,9 % (76,9 % pour les hommes). Selon le milieu, cetteparticipation fminine lactivit conomique est trs diffrencie. Ainsi, le taux dactivitdes femmes rurales atteint 39,0 % contre seulement 20,4 % pour les citadines. Cet cart expliquebien videmment le taux dactivit relativement lev (61,7 %) enregistr en milieu rural,alors quil ne dpasse pas les 45,2 % en milieu urbain.

    Cette population active fminine est relativement plus jeune que la population active masculine,avec des parts des jeunes de moins de 35 ans qui slvent respectivement 59,0 % et 55,8 %.Le constat est observ en milieu urbain. En effet, ces deux proportions sont respectivementde 60,9 % et de 49,9 %.

    Malgr les transformations sociales, la division sexuelle du travail persiste. La structure delemploi rvle que le statut daide-familiale reste prdominant chez la femme.

    En premire approximation, au Maroc, la population active occupe en 2006 avoisineraitles 11 millions. La contribution effective des femmes est dlicate valuer, du fait des difficultsde mesure de lemploi effectif des femmes dans lagriculture ou dans les petites entreprisesfamiliales indpendantes (artisanat, commerce) ; peut-on raisonnablement admettre, sans

    sinterroger, que le secteur agricole, qui englobe encore plus de 40 % du volume de lemploi,compte deux fois plus dhommes que de femmes ?

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    Globalement, au vu des statistiques existantes, en raison de la gravit du chmage urbainqui pousse donner la primeur aux hommes en fonction de la division traditionnelle desrles entre femmes et hommes, la part des femmes dans la population active occupe serait

    peine suprieure au quart du total.Il y a tout lieu de penser que le travail fminin est nettement sous-valu comme partoutdans le monde en raison du fait quil est peu visible (saisonnier, dappoint, domicile, prcaire,temporaire ou temps partiel, etc.).

    Le pouvoir

    La notion de pouvoir est plus apparente que celle de linfluence, qui, pourtant, importedavantage. Il est dusage, par exemple, dutiliser, pour lvaluation de la position de pouvoirdes femmes dans un pays, de se rfrer au pourcentage de femmes parlementaires (11 % auMaroc) ou ministres (7,7 % en 2002) ; ceci a valeur de symbole, de premire approximation ;

    mais il faut aller au-del, en analysant les responsabilits effectives confies ces femmes. Ilexiste des positions darbitrage, de commande, de type rgalien, nobles (finances, intrieur,affaires trangres) les autres positions restent, sauf exception, lapanage des hommes. Lesactivits sociales (ducation, sant) ou relationnelles (communication, presse) restentdvolues aux femmes.

    Bien quelles constituent un peu plus de la moiti de llectorat, les Marocaines noccupentquune place restreinte parmi lensemble des lus tant au niveau national quau niveau local.Leur prsence est symbolique au niveau des instances politiques (partis, collectivits locales,parlement, hirarchie administrative). Alors mme que la constitution leur reconnat enla matire les mmes droits que les hommes.

    Si la Moudawana marocaine, ne de lIndpendance, a consacr lingalit et la prminencede lhomme au sein de la famille, la proclamation du nouveau Code de la famille a introduitde vritables avances.

    4. Pauvret et transition fconde

    Les travaux rcemment raliss par le HCP sur les conditions de vie (13) montrent que la pauvretne se rduit pas un simple dficit des revenus et des aptitudes humaines dune fraction dela population, mais elle sinscrit, au-del de la fracture sociale quelle creuse, parmi lesfacteurs dchec des transitions ducative, dmographique et conomique (14).

    Ses cots sexpriment, aujourdhui, travers lincapacit des groupes sociaux pauvres et

    vulnrables matriser leur fcondit et, de ce fait, investir dans les aptitudes humaines etprofessionnelles dun nombre lev de descendants et sintgrer dans le segment, le pluslucratif, du march de travail.

    Les femmes relevant des mnages pauvres et vulnrables enregistraient en 1999 les indicessynthtiques de fcondit (resp. 4,6 et 3,9) atteints par lensemble du pays dans les annes 80.Ces niveaux de fcondit font que les groupes sociaux pauvres et vulnrables sont surreprsents

    (13) HCP (2006) : Prospective Maroc 2030, thme : ingalit, pauvret et exclusion sociale.(14) Le taux de pauvret a t rduit de 16,5 % en 1994, 16,3 % en 1998, puis 15,3 % en 2001 et 14,2 % en 2004.Le taux de vulnrabilit est la proportion de la population qui nest pas pauvre, mais qui court un grand risque de pauvret

    (niveau de vie entre le seuil de pauvret et 1,5 fois ce seuil). Le taux de vulnrabilit tait de 17,3 % en 2004 contre 22,7 %en 2001 et 24,1 en 1985.

    Rtrospective (1960-2006) etdterminants socio-conomiques Quelle dmographie ?

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    dans la rpartition des naissances. En 1999, ils reprsentaient les 2/5 de la population totale,mais ils donnaient lieu prs dune naissante vivante sur deux (48,0 %) (15).

    Tableau 11Indices synthtique de fcondit (ISF) et structure

    de la population selon le niveau de vie

    Groupe de ISF enSituation en 1998-1999 Situation en 2000-2001

    niveau de vie 1998-1999 % des moins % des 60 ans % des moins % des 60 ansde 15 ans et plus de 15 ans et plus

    Pauvres 4,61 44,3 4,8 41,9 5,7

    Vulnrables 3,86 3