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Place actuelle de la chirurgie vidéo-assistéedans le traitement de l’hyperparathyroïdie primaire

Video-assisted parathyroidectomyin the management of patients with primary hyperparathyroidism

J.-F. Henry *, F. Sebag, S. Maweja, J. Hubbard, C. Misso, V. Da Costa, L. Tardivet

Service de chirurgie générale et endocrinienne, hôpital de la Timone, 264, rue Saint-Pierre, 13385 Marseille cedex 05, France

Résumé

Introduction . –Au cours de ces dernières années, plusieurs techniques de parathyroïdectomie mini-invasive ont été rapportées. Cette étuderétrospective a pour but de préciser la place actuelle de la parathyroïdectomie vidéo-assistée (PVA) dans notre pratique de la chirurgie del’hyperparathyroïdisme primaire (HPT I).

Patients et méthodes. – En 5 ans (1998-2002), 528 patients porteurs d’un HPT I ont été opérés dans le service. Une PVA a été proposée àtous les patients présentant un HPT I sporadique, sans goitre associé et sans antécédent de chirurgie thyroparathyroïdienne, et chez qui uneéchographie et une scintigraphie Mibi systématiquement pratiquées en préopératoire, étaient en faveur d’une lésion unique. La PVA a étépratiquée par voie latérocervicale avec insufflation lorsque l’imagerie était en faveur d’une lésion rétrothyroïdienne ou par voie médiane sansinsufflation lorsque la lésion était en situation cervicale antérieure. Chez tous les patients, la radicalité de l’exérèse parathyroïdienne a étévérifiée par des dosages rapides de PTH (rPTH). En postopératoire, la calcémie, la phosphorémie et les taux de PTH ont été évalués à j1, j8 puis1 mois plus tard et 1 an plus tard. Tous les patients ont eu un contrôle de la mobilité de leurs cordes vocales en pré et postopératoire.

Résultats. – La parathyroïdectomie a été pratiquée par cervicotomie transverse conventionnelle chez 228 patients (43 %) et par un abordvidéo-assisté chez 300 patients (57 %). Les 228 patientes opérés par cervicotomie transverse présentaient une contre-indication à une PVA :goitre nodulaire associé nécessitant éventuellement une thyroïdectomie concomitante (99 cas), antécédents de chirurgie cervicale (42 cas),suspicion de lésions multiglandulaires (25 cas), absence de localisation préopératoire (48 cas), causes diverses (14 cas). L’indication d’unePVA a été retenue chez 300 patients présentant un HPT I sporadique : 282 patients ont été opérés par voie latérale, 17 par voie centrale et unpar thoracoscopie. La durée opératoire médiane a été de 50 min (20-130 min). Chez 42 patients (14 %), une conversion en cervicotomietransverse a été nécessaire : 11 adénomes non trouvés, difficultés de dissection en rapport avec des adénomes volumineux ou adhérents auxstructures voisines chez 7 patients, faux positifs de l’imagerie dans 11 cas, non observation d’une décroissance de plus de 50 % des taux derPTH chez 13 patients. Chez 10 de ces 13 patients, la conversion a confirmé l’existence de lésions multiglandulaires, mais chez les 3 autres, ils’agissait d’un faux négatif de la rPTH. La mortalité a été nulle. Un patient a présenté une paralysie récurrentielle définitive. Un patientprésente un HPT I persistant et un autre un probable HPT I récidivant.

Conclusion. – Une PVA peut être proposée à plus de la moitié des patients présentant une HTP I. Dans notre expérience, parathyroïdec-tomie conventionnelle et PVA sont devenues complémentaires. À condition de sélectionner rigoureusement les patients, les résultats précocesde la PVA sont comparables à ceux de la chirurgie conventionnelle. Le risque réel d’HPT I récidivant ne pourra être évalué qu’après plusieursannées de suivi.

© 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Abstract

Introduction. – In recent years, different minimally invasive techniques of parathyroidectomy have been described. We performed aretrospective study to evaluate the indications and results of video-assisted parathyroidectomy (Vap) in the management of our patients withprimary hyperparathyroidism (PHPT).

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (J.-F. Henry).

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www.elsevier.com/locate/annchi

© 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.doi:10.1016/S0003-3944(03)00110-X

Materials and methods. – During the last 5 years (1998-2002), we operated on 528 patients with PHPT. Vap was proposed for patients withsporadic PHPT, without associated goiter and without previous neck surgery, in whom a single adenoma was localized by means ofsonography and/or sestamibi scanning. Vap was performed by lateral approach with insufflation for patients with adenoma located deeply inthe neck and by gasless midline approach for patients with adenoma located anteriorly. A quick parathyroid (qPTH) assay was used during thesurgical procedures. Calcemia, phosphoremia and PTH were systematically evaluated in patients on days 1 and 8, 1 month and 1 year aftersurgery. All patients underwent pre-operative and postoperative investigations of vocal cord movements.

Results. – Among 528 patients with PHPT, 228 (43%) were not eligible for Vap: associated nodular goiter (99 cases), previous neck surgery(42 cases), suspicion of multiglandular disease (25 cases), lack of pre-operative localization (48 cases), and miscellaneous causes (14 cases).Vap was performed in 300 patients with sporadic PHPT: 282 lateral access, 17 midline access and 1 thoracoscopy. Median operative time was50 min (20-130min). Conversion to conventional parathyroidectomy was required in 42 patients (14%): missed adenomas (11 cases),difficulties of dissection (7 cases), multiglandular disease correctly predicted by qPTH (10 cases); qPTH assay false negative results (3 cases),sestamibi scan false positive results (10 cases) and 1 sonography false positive result. One patient presented definitive recurrent nerve palsy.One patient had a persistent PHPT and one other patient had a recurrent PHPT.

Conclusion. – Vap can be proposed for more than half of patients with PHPT. In our experience Vap and conventional parathyroidectomyare complementary. Immediate results of Vap are similar to those obtained with conventional parathyroidectomy but no conclusions can bedrawn in terms of influence of Vap on the outcome of the patients operated for PHPT.

© 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Parathyroïdectomie ; Chirurgie mini-invasive ; Vidéo-endoscopie

Keywords: Parathyroidectomy; Minimally invasive surgery; Video-assisted surgery

1. Introduction

En 1925, Felix Mandel de Vienne rapporte le premier casde parathyroïdectomie [1]. Bien que peu pratiquée au coursdes 3 décennies suivantes, le protocole de cette interventionfut rapidement codifié et accepté par la plupart des chirur-giens. Ainsi, par une cervicotomie transverse, un opérateurexpérimenté explorant systématiquement les 4 glandes estassuréde guérir son patient dans plus de 95 % des cas dès lapremière intervention [2]. Les rares échecs de cette chirurgiesont observés chez des patients présentant des lésions multi-glandulaires, des glandes surnuméraires ou en ectopie ma-jeure ou en cas d’exceptionnels cancers parathyroïdiens. Denos jours, la mortalité de cette chirurgie est nulle. La morbi-dité est très faible. La durée d’hospitalisation dépasse rare-ment les 48 h et les résultats cicatriciels sont excellents chezla plupart des patients.

Néanmoins, depuis quelques années, de nouvelles techni-ques de parathyroïdectomie ont étédécrites : abord unilatéral[3–5], chirurgie radioguidée [6,7], chirurgie mini-invasiveouverte [8–10], chirurgie mini-invasive vidéo-assistée ou en-doscopique [11–21]. Toutes ces techniques présentent2 points communs :

• elles sont toutes pratiquées au travers d’ incisions limi-tées et non plus par la classique cervicotomie trans-verse ;

• elles sont ciblées sur une seule glande parathyroïdienne.Dans la plupart des cas, elles ne permettent pas ou nesont pas destinées à explorer les autres sites parathyroï-diens.

Ces interventions mini-invasives sont aujourd’hui conce-vables et réalisables pour 3 raisons principales. En premierlieu, l’ imagerie parathyroïdienne permet de localiser avecprécision la glande pathologique. Deuxièmement, les dosa-

ges rapides peropératoires de parathormone (rPTH) permet-tent de confirmer la radicalité de l’exérèse pratiquée et dis-pensent le chirurgien de l’exploration des autres glandes.Enfin, nous disposons d’un matériel chirurgical de plus enplus adapté et performant notamment dans le domaine de lachirurgie vidéo-assistée. Ajoutons que la chirurgie parathy-roïdienne est un très bon terrain d’application des techniquesmini-invasives : il s’agit d’une chirurgie d’exérèse sanstemps de reconstruction, qui s’adresse à des tumeurs depetites tailles, en règle général bénignes, dont l’abord par lacervicotomie classique soulève parfois quelques réticencesde la part de certaines patientes très exigeantes.

Depuis 1998, nous proposons à certains de nos patientsprésentant un hyperparathyroïdisme primaire (HPT I) uneparathyroïdectomie vidéo-assistée (PVA).

Cette étude rétrospective a pour but de préciser la placeactuelle de la PVA dans notre pratique de la chirurgie del’HPT I.

2. Patients et méthodes

En 5 ans (1998-2002), 528 patients porteurs d’un HPT Iont étéopérés dans le service. Une PVA a étéproposée à tousles patients présentant un HPT I sporadique, sans goitreassocié et sans antécédent de chirurgie thyroparathyroï-dienne, et chez qui une échographie et une scintigraphieMibi, systématiquement pratiquées en préopératoire, avaientmis en évidence une lésion unique.

Deux abords cervicaux vidéo-assistés ont été utilisés :l’abord latéral [22] et l’abord central [23].

L’abord latéral a étépratiquépar l’ installation de 3 trocartssur le bord antérieur du muscle sternocléidomastoïdien enpassant dans le plan de clivage entre la gaine jugulocaroti-dienne en dehors et le bord postérieur de la sangle des

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muscles préthyroïdiens en dedans. Le trocart principal reçoitun endoscope de 10 mm à0°. Les 2 autres trocarts de 2,5 mmde section laissent passer des instruments de dissection de2 mm. L’exploration vidéo-assistée avec insufflation à faiblepression (8 mmHg) permet l’ identification du nerf récurrentet des 2 parathyroïdes homolatérales. L’extraction de l’adé-nome est faite après ablation du trocart principal directementau travers de son orifice cutané. Cet abord, initialementproposé àtous nos patients, a été ensuite réservé àceux quiétaient porteurs d’un adénome localisé en arrière du lobethyroïdien.

L’abord central a été réservé aux patients porteurs d’unadénome localiséau niveau des ligaments thyrothymiques oudans le thymus lui-même. Il a été pratiqué par une incisioncervicale transverse de 15 mm au niveau du creux sus-sternal. L’accès aux gîtes parathyroïdiens inférieurs se faitcomme en chirurgie conventionnelle, par dissociation desmuscles sous-hyoïdiens. Tous les instruments (écarteurs, pin-ces et ciseaux, endoscopes de 5 mm à0 ou 30°) sont directe-ment introduits au travers de l’ incision. La dissection estdonc pratiquée à ciel ouvert, sans insufflation. Cette dissec-tion intéresse la partie antérieure du pôle inférieur du lobethyroïdien, le ligament thyrothymique ou le thymus lui-même. Elle reste donc très antérieure, prétrachéale, et nenécessite pas l’ identification du nerf récurrent qui est beau-coup plus postérieur.

Chez tous les patients ayant bénéficiéd’une PVA, la radi-calité de l’exérèse parathyroïdienne a été évaluée par desdosages rPTH. Les taux de rPTH ont été contrôlés au mo-ment de l’ intubation, de l’ incision, à l’ablation de la glandepathologique puis 5 et 15 min après cette ablation. Une chutede plus de 50 % du taux de rPTH le plus élevé avant l’exci-sion a été considérée comme significative d’une exérèseefficace.

En postopératoire la calcémie, la phosphorémie et les tauxde PTH ont été évalués à j1, j8, puis 1 mois plus tard et 1 anplus tard. Tous les patients ont eu un contrôle de la mobilitéde leurs cordes vocales en pré et postopératoire.

3. Résultats

La parathyroïdectomie a été pratiquée par cervicotomietransverse conventionnelle chez 228 patients (43 %) et par unabord vidéo-assisté chez 300 patients (57 %).

Les 228 patients opérés par cervicotomie transverse pré-sentaient une contre-indication à une PVA : goitre nodulaireassocié nécessitant éventuellement une thyroïdectomieconcomitante (99 cas), antécédents de chirurgie cervicale(42 cas), suspicion de lésions multiglandulaires (25 cas),absence de localisation préopératoire (48 cas), causes diver-ses (14 cas) (Tableau 1).

L’ indication d’une PVA a été retenue chez 300 patients(233 femmes et 67 hommes) d’un âge médian de 60 ans. Tousprésentaient un HPT I sporadique : 282 ont été opérés parvoie latérale, 17 par voie centrale et un par thoracoscopiepour un adénome très bas situédans le médiastin antérieur et

inaccessible par voie cervicale. Deux des 17 patients opéréspar voie centrale ont bénéficié d’une lobectomie thyroï-dienne concomitante. La durée opératoire médiane a été de50 min (20-130 min) et de 41 min pour les 100 derniersopérés. En cas d’abord latéral le nerf récurrent a été identifiédans 94,6 % des cas et la parathyroïde homolatérale, bien quenon systématiquement recherchée, dans 63,8 % des cas.Chez 5 patients, l’abord a été bilatéral (4 faux positifs del’ imagerie et 1 double adénome).

Contrairement aux données de l’ imagerie préopératoire,11 patients ont présenté une pathologie multiglandulaire(4 doubles adénomes et 7 hyperplasies) ayant justifié 10conversions et un abord vidéo-assistébilatéral. Parmi les 289lésions uniglandulaires d’un poids moyen de 1087 mg (extrê-mes 100-7080 mg), 4 adénomes étaient atypiques et 3 tu-meurs ont été classées malignes. Ces 7 lésions ont motivé 5conversions immédiates et une reprise en chirurgie ouverte 3mois plus tard.

Chez 42 patients (14 %), une conversion en cervicotomietransverse a été nécessaire (Tableau 2) : adénomes non trou-vés après 2 h d’ intervention dans 11 cas, difficultés de dis-section en rapport avec des adénomes volumineux ou adhé-rents aux structures voisines chez 7 patients, faux positifs del’ imagerie dans 11 cas, non observation d’une décroissancede plus de 50 % des taux de rPTH chez 13 patients. Chez 10de ces 13 patients, la conversion a confirmé l’existence delésions multiglandulaires, mais chez les 3 autres patients ils’agissait d’un faux négatif de la rPTH.

La mortalitéa éténulle. Les complications sont représen-tées par 2 hématomes dans le muscle sternocléidomastoï-dien, une paralysie récurrentielle définitive et 5 ruptures de lacapsule de l’adénome en cours de dissection dont une amotivé une conversion. Le poids moyen de ces 5 adénomes

Tableau 1Contre-indications a une chirurgie vidéo-assistée des 228 hyperparathyroï-dies primaires

Goitre associé 99Antécédents de chirurgie cervicale 42Absence de localisation préopératoire 48Suspicion de lésions multiglandulaires 25Hyperparathyroïdisme aigu 4Tumeur volumineuse 4Anesthésie locale 3Ectopie majeure 2Hématome cervical 1

Tableau 2Causes des 42 conversions au cours des 300 parathyroïdectomies vidéo-assistées

Adénomes non trouvés 11Difficultés de dissection 7Lésions multiglandulaires 10*

Faux négatifs de rPTH 3Faux positifs du Mibi 10Faux positifs de l’échographie 1

* diagnostiqués par rPTH

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était de 4200 mg (extrêmes 750-6800 mg). Aujourd’hui lespatients sortent du service le lendemain de leur intervention.

Deux patientes sont restées hypercalcémiques. L’uneaprès ablation d’un adénome de 280 mg, présente une autrecause d’hypercalcémie modérée : calcémie 2,75 mmol/l (N :2,20-2,60), PTH : 12 pg/ml (N : 10-55). L’autre, après abla-tion d’un adénome de 450 mg, présente probablement unHPT I persistant : calcémie 2,78 mmol/l, PTH : 60 pg/ml.Avec un recul médian de 20,5 mois sur 150 patients revus, unpatient présente un probable HPT I récidivant : (Ca : 2,68mmol/l ; PTH : 64 pg/ml) après ablation d’un adénome de600 mg et 15 mois de normocalcémie postopératoire.

4. Discussion

Sous le terme de parathyroïdectomie endoscopique ouvidéo-assistée, il nous paraît logique de regrouper toutes lesinterventions parathyroïdiennes au cours desquelles le chi-rurgien fait appel àun endoscope ; l’endoscope pouvant êtreutilisédurant toute ou une partie seulement de l’ intervention.

L’exérèse d’adénomes médiastinaux par thoracoscopie futla première démonstration de l’application des techniquesendoscopiques àla chirurgie parathyroïdienne [24]. Dans cesrares cas d’adénomes en ectopie médiastinale majeure, lebénéfice pour le patient n’est pas discutable. Ce bénéficereste en revanche, plus difficile à établir à l’étage cervical.Deux études ont démontré que, comparées à la chirurgieparathyroïdienne conventionnelle, les techniques endoscopi-ques s’accompagnent d’une diminution de la douleur posto-pératoire et d’un meilleur résultat cicatriciel [25,26]. Cesrésultats demandent à être confirmés par d’autres étudesprospectives randomisées.

L’utilisation d’un endoscope au cours d’une parathryoï-dectomie mini-invasive reste discutée. À notre sens, l’endos-cope procure à l’opérateur une vision agrandie et parfaite-ment éclairée des structures anatomiques cervicales,permettant ainsi une dissection aussi précise et aussi sûre quecelle qui peut être faite en chirurgie ouverte conventionnelle.Ces conditions optimales d’exploration nous paraissent enrevanche, beaucoup plus difficiles àobtenir par vision directeau travers de mini-incisions, même si le chirurgien dispose delunettes agrandissantes et d’une lampe frontale pour amélio-rer l’éclairage de son champ opératoire. Parmi nos complica-tions nous déplorons une paralysie récurrentielle définitive.Le nerf avait étéparfaitement visualiséau cours de la dissec-tion endoscopique mais le pédicule de l’adénome avait été àtort insuffisamment disséqué et isolé du nerf. C’est précisé-ment après avoir retiré l’endoscope et au cours des manœu-vres d’extraction de l’adénome au travers de l’orifice dutrocart principal, donc en vision directe, que l’accident estsurvenu.

Tous les patients présentant un HPT I ne sont pas candi-dats à une PVA. Les contre-indications sont essentiellementen rapport avec l’existence d’un goitre, des antécédents dechirurgie thyroparathyroïdienne, la suspicion de lésions mul-tiglandulaires ou l’absence de localisation préopératoire.

Toutefois, en fonction de l’expérience de l’opérateur et de latechnique utilisée, ces contre-indications ne sont pas abso-lues.

Ainsi, l’utilisation d’un abord central, permettant éven-tuellement une exploration bilatérale, explique que certainschirurgiens aient pu proposer une PVA àdes patients chez quila localisation et le caractère unique d’un adénome n’avaientpas été clairement établis en préopératoire. Ainsi, pour cer-taines autres équipes, plus de 60 % des patients présentant unHPT I peuvent se voir proposer une PVA [27,28]. L’abordlatérocervical peut en revanche, être proposé àcertains pa-tients ayant déjà subi une cervicotomie basse. Dans cettesérie, 7 de nos patients ont pu être réopérés sans difficultéparticulière, 5 après chirurgie thyroïdienne controlatérale etisthmique, et 2 après trachéotomie.

L’exérèse de volumineux adénomes (> 3 cm) n’est pas nonplus formellement contre-indiquée, notamment lorsque cesadénomes sont àdéveloppement postérieur vers le médiastinpostérosupérieur. La dissection de leur pédicule au niveau dutronc ou des branches de l’artère thyroïdienne inférieuren’est pas gênée par leur masse et leur forme longilignepermet une extraction relativement facile au travers de l’ori-fice du trocart principal. Le grand volume de certains adéno-mes peut néanmoins représenter une difficulté lors de ladissection si l’opérateur manque d’expérience, le principaldanger étant alors la rupture capsulaire et les risques d’unensemencement locorégional. En cas d’effraction majeure,une conversion nous paraît souhaitable. Les 5 patients chezqui nous déplorons une rupture capsulaire sont étroitementsurveillés et actuellement indemnes de toute récidive.

L’existence d’un volumineux goitre et la suspicion d’uncancer parathyroïdien devant une tumeur palpable et clini-quement suspecte restent pour nous les 2 contre-indicationsabsolues àun abord mini-invasif vidéo-assistéquelle que soitla technique utilisée et l’expérience de l’opérateur.

Au fil de notre expérience, le pourcentage de patientscandidats à une PVA est resté relativement stable : 56,7 %pour les 166 premiers opérés [29], 57 % pour l’ensemble dela série.

L’abord latérocervical est pour nous l’abord de choix dansla plupart des cas. En passant en arrière de la sangle desmuscles préthyroïdiens, il procure un accès direct à la facepostérieure des lobes thyroïdiens. L’espace de dissection estcréé dans un plan anatomique qui se clive aisément et levolume de la chambre de dissection est facilement maintenupar une insufflation à faible pression (8 mmHg). Nousn’avons jamais observé d’emphysème sous-cutané, ni depneumomédiastin. L’abord latéral permet une explorationcomplète de tous les éléments anatomiques de la régionrétrothyroïdienne, depuis le pédicule thyroïdien supérieurjusque dans le médiastin postérosupérieur. C’est doncl’abord que nous préconisons pour toutes les glandes para-thyroïdes en situation postérieure, c’est-à-dire en premierlieu pour toutes les parathyroïdes supérieures qui, lorsqu’el-les sont pathologiques, ont tendance à migrer en arrière etéventuellement à descendre dans le médiastin postérosupé-

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rieur en glissant contre le plan prévertébral, le long du bordlatéral de l’œsophage. Cet abord est également parfaitementadapté aux dissections endoscopiques des parathyroïdes in-férieures situées sur le versant postérieur des pôles inférieursdes lobes thyroïdiens. Dans la plupart des cas, ces glandespathologiques en situation postérieure sont très proches oumême au contact du nerf récurrent. La vue latérale queprocure cet abord cervical permet d’ identifier facilement lenerf et de disséquer l’adénome en toute sécurité. En revan-che, l’exploration endoscopique des coulées thyrothymiqueset des thymus, sièges de certains adénomes inférieurs, nousparaît préférable par voie centrale. Ces glandes étant relati-vement antérieures, leur accès est plus direct par une courteincision cervicale transverse sus-sternale et en passant entreles muscles sous-hyoïdiens. Si pour ces glandes thyrothymi-ques la voie latérale est possible, elle perd néanmoins de sonintérêt et peut même s’avérer inadaptée. Ainsi 6 des 11adénomes non retrouvés étaient localisés dans les couléesthyrothymiques. Tous les 6 ont étéabordés, à tort au début denotre expérience, par voie latérale.

Le rôle de l’ imagerie préopératoire est donc devenu déter-minant dans le choix de l’ intervention que nous proposons ànos patients. En respectant les contre-indications précédem-ment mentionnées, tout patient présentant un HPT I sporadi-que est un candidat potentiel àune PVA. Le choix entre abordvidéo-assisté ou chirurgie ouverte d’une part, et le choix dutype de l’abord vidéo-assisté, latéral ou central d’autre part,va dépendre de l’ imagerie préopératoire. Si les résultats del’échographie et de la scintigraphie au Mibi ne sont pas enfaveur d’une lésion unique ou ne sont pas concluants, c’estune cervicotomie transverse classique qui sera pratiquée. Enrevanche, si une lésion unique est mise en évidence c’est laconfrontation des images scintigraphiques, si possible com-plétées par des tomoscintigraphies, avec les images échogra-phiques qui permettra de déterminer la localisation posté-rieure ou antérieure de la glande pathologique et donc dedécider de la voie d’abord, latérale ou centrale.

Dans cette série de 300 PVA, la sensibilité respective del’échographie et de la scintigraphie Mibi ont étéde 60,2 et de89,3 %. Si les résultats de l’échographie ont été très dépen-dants de l’opérateur, il convient de remarquer que les excel-lents résultats de la scintigraphie Mibi s’expliquent en partiepar le fait que les patients étaient déjà présélectionnés parl’ imagerie pour une PVA. Globalement, la mise en défaut del’ imagerie préopératoire fut responsable de la moitié desconversions (21/42) : 10 lésions multiglandulaires non détec-tées, 10 faux positifs de la scintigraphie Mibi et 1 faux positifde l’échographie (Tableau 2). Le risque de méconnaître deslésions multiglandulaires est quasi-nul si l’échographie et lascintigraphie sont toutes les deux positives et concordantes,en faveur d’une lésion unique. Nous avons pu évaluer que cerisque passe à 3,6 % lorsqu’une seule des explorations estpositive et à 31,6 % lorsque les 2 examens sont négatifs.

Si le risque de méconnaître une maladie multiglandulaireest d’autant plus faible que l’ imagerie est performante, cerisque justifie néanmoins l’utilisation peropératoire des dosa-

ges de rPTH. Dans cette série, 11 lésions multiglandulairesnon suspectées par l’ imagerie furent correctement identifiéespar l’absence de chute significative des taux de rPTH aprèsablation d’une première glande pathologique. La rPTH n’estcependant pas l’arme absolue puisque l’une de nos patientesprésente un HPT I récidivant et qu’une autre récemmentopérée, est suspectée de présenter un HPT I persistant. Chezces 2 patientes, les taux de rPTH avaient pourtant chuté deplus de 50 %. De plus, l’ interprétation des taux de rPTH n’estpas toujours évidente, notamment chez les patients présen-tant une insuffisance rénale, même modérée. Trois de nosconversions ont étémotivées par des faux négatifs de la rPTHcomme l’ont confirméla normalitédes 3 autres parathyroïdesà l’exploration cervicale ouverte et le retour à la normale desconstantes biologiques en postopératoire.

Dans cette série de 528 HPT I opérés, les résultats des 300PVA ne peuvent pas être comparés à ceux des 228 patientsopérés par chirurgie conventionnelle car les 2 techniques nese sont pas adressées aux mêmes groupes de patients. Lesrésultats actuels de nos patients opérés par PVA sont tout àfait comparables à ceux que nous avions obtenus par chirur-gie conventionnelle avant l’avènement des techniques mini-invasives [30]. Il est certainement encore trop tôt pour éva-luer le risque d’HPT I récidivant, risque qui après chirurgieconventionnelle est très faible toutes lésions confondues ettout à fait exceptionnel chez les patients opérés pour maladieuniglandulaire.

5. Conclusion

Alors que la chirurgie parathyroïdienne conventionnellene demande qu’un opérateur expérimenté pour être couron-née de succès dans plus de 95 % des cas, la chirurgie vidéo-assistée repose sur des impératifs techniques : instrumenta-tion chirurgicale adaptée, imagerie préopératoireperformante, dosages de rPTH peropératoires. Le coût de cesexamens devra être pris en compte dans l’évaluation prospec-tive de ces nouvelles techniques.

Au sein des techniques de chirurgie parathyroïdiennemini-invasive, la PVA a le principal avantage d’offrir auchirurgien, par l’ intermédiaire de l’endoscope, une visionparfaitement adaptée aux règles d’une dissection anatomiqueminutieuse et sans risque.

Une PVA peut être proposée à plus de la moitié despatients présentant un HPT I. Dans notre expérience, para-thyroïdectomie conventionnelle et parathyroïdectomievidéo-assistée sont devenues complémentaires. À conditionde sélectionner rigoureusement les patients, les résultats pré-coces de la PVA sont comparables à ceux de la chirurgieconventionnelle. Le risque réel d’HPT I récidivant ne pourraêtre évalué qu’après plusieurs années de suivi.

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