Les entreprises familiales
Jean Lorrain
PLS-6008
Psychosociologie des PME
Les entreprises familiales
Dépendant de la définition qu’on leur accorde, entre 70 % et 90 % de toutes les entreprises sont « familiales » .
Aux États-Unis :
80 % des entreprises américaines sont familiales
et elles génèrent entre 40 % et 60 % du PNB américain.
(Daily et Dollinger, 1993)
Au Canada :
Selon Statistique Canada, plus de 180, 000 entreprises sont familiales;
elles représentent 4,7 millions d’emplois à temps plein;
elles créent 75 % des nouveaux emplois;elles répondent de 75 % à 85% des emplois
existants;elles représentent 45 % du PNB.
(La Chaîne, 1998; Les Affaires, 1998; La Presse, 1999)
Au Québec :
Parmi les 300 plus importantes PME du Québec, plus du 2/3 sont des entreprises familiales
(Les Affaires, Répertoire des 300 PME, édition 1998)
En France :Le poids global des entreprises familiales,
dominant dans l’activité des 900 plus grandes entreprises industrielles privées, est en progression de 7,36 %, en compensation quasi symétrique à la réduction du poids global des firmes sous contrôle étranger ou autre.
(Allouche et Amann, 1997)
Définitions
À la suite de l’analyse de 27 articles de différents auteurs, les critères les plus souvent utilisés sont :
La propriété : contrôle familial La direction : gestion familiale La continuité (potentielle ou existante) Autres (culture, traditions, présence de plus
d’un membre de la famille, entreprise non-publique, etc.) (Déry et al., 1993)
Définition de Déry et al. (1993)
Une entreprise familiale est une entreprise sous contrôle réel familial ou individuel, dans laquelle sont engagés au moins deux membres d’une même famille ou deux parents, dont au moins un l’est à titre de participant au contrôle familial ou de détenteur de contrôle individuel, dont au moins un autre l’est à titre d’actionnaire, de dirigeant ou d’employé et où ces deux membres comme tous les autres, peuvent l’être à plus d’un titre.
L’indissociabilité de deux sous-systèmes
La difficulté de l’analyse des entreprises familiales découle principalement du fait que sa dynamique intègre plusieurs sous-systèmes qui la composent : le propriétaire-dirigeant, les individus et leurs aspirations, la vie de famille et ses règles et l’entreprise (Hoy et Verser, 1994; Dyer et Handler, 1994; Riordan et Riordan, 1993)
Famille
Dynamique
Cycle de vieCultureTailleObjectifsFrontières
Acteurs
Membres de la famille
Entreprise
Dynamique
Cycle de vieCultureTailleObjectifsSecteur d ’activités
ActeursC.A.EmployésActionnaires
Environnement externe
PropriétaireDirigeant
Successeur
Le profil des
entreprises familiales
québécoises
(Hugon et Dumas,
1991)
Âge 39 ans
Réseaufamilial
32 % ont des membres de leur famille quipossèdent une entreprise
Générations 62,3 % : deux générations 35,3 % : deux de la même génération 2,4 % : trois générations
CA 60 % ont un conseil d’administration
Secteursd’activités
Manufacturier Commerce de détail
Taille 43,2 % : 1 à 15 employés 33,3 % : 16 à 50 employés 12,5 % : 51 à 100 employés 11,0 % : plus de 100 employés
Chiffred’affaires
20,7 % : moins de 500,000 $ 41,8 % : 1 à 5 millions $ 28,2 % : 5 à 20 millions $ 9,3 % : plus de 20 millions $
Les avantages et les inconvénients des entreprises familiales (Hugron, 1993)
Avantages
ressources familiales lien étroit avec la communauté loyauté et engagement profond
à l’entreprise présence d ’actionnaires
homogènes sensibilité développée à la
responsabilité sociale continuité et intégrité dans les
objectifs et les politiques de l’entreprise
Inconvénients
conflits famille-entreprise gestion à court terme, surtout
dans le cas des entreprises dirigées par le fondateur
népotisme
Dix problèmes particuliers aux entreprises familiales (Hugron,
1993)
La difficulté d’attirer des compétiteurs; la faiblesse de la formation en gestion; les problèmes de succession; les problèmes de motivation; les problèmes de délégation; les problèmes d’organisation (structure); le peu d’utilisation d’expertise externe; le partage des avoirs; le népotisme; l’équité face aux employés et aux cadres externes.
La culture d ’entreprise (Dyer, 1988)
Paternaliste Relations hiérarchiques Climat de non confiance Le fondateur détient la vérité Orientation vers la tâche
Laisser-faire Relations linéaires Climat de confiance Le fondateur et quelques autres détiennent la vérité Orientation vers la tâche
Participative Relations collatérales Climat de confiance Tous détiennent la vérité Orientation sur le devenir des individus
Individualiste Relations individualistes Personne n’est ni bon, ni mauvais La vérité dépend des normes professionnelles Orientation vers la tâche
Sources de conflit famille-entreprise (Dyer et Handler, 1994)
Famille Entreprise
Objectifs Développementindividuel
Profits, revenus…
Relationsinterperson.
Profondémentpersonnelles
Semi ou impersonnelles
Règles Implicites etinformelles
Écrites etFormelles
Évaluation Récompensé pource qu’on est
Conditionnel à laperformance
Succession Décès ou divorce Retraite
L ’implication des membres de la famille
Avantages
Haut niveau d’engagement
Implication sans limite
Demeurent en poste plus longtemps
(Cromie et al., 1995; Allouche et Amann, 1997; Rosenblatt, 1985)
Inconvénients
Népotisme Perception
défavorable Problèmes de
recrutement de personnel cadre
(Dyer, 1988; Covin, 1994)
L’implication du conjoint
Environ 700,000 entreprises américaines sont dirigées par les deux conjoints (Foley et Powell, 1997);
la place de l’homme est différente de celle de la femme (Rosenberg, 1991);
l’interaction travail-famille est plus complexe (Rosenberg, 1991).
L’implication du conjoint (Baines et Wheelock, 1998)
Parmi les 104 propriétaires de micro-entreprises étudiées, 83 % sont mariés et (46 %) de ceux-ci mentionnent que leur conjointe s’implique beaucoup dans l’entreprise :
21 entreprises appartiennent aux deux conjoints et ces derniers disent avoir une part égale de responsabilités;
dans 13 entreprises, le propriétaire emploie sa conjointe; dans 6 entreprises, la conjointe travaille tous les jours sans
être rémunérée en conséquence; dans tous les cas, les femmes voient aux tâches cléricales et
administratives.
L ’implication du conjointLes principaux facteurs de succès
(Foley et Powell, 1997)Harmonie dans la relation de couple;attitude face aux rôles;complémentarité des habiletés et des compétences
des conjoints;équilibre travail-famille;processus de prise de décision;responsabilités parentales; support mutuel;partage de la surtâche travail-famille.
L ’implication du fils
Dyade la plus souvent étudiée dans le cadre des entreprises familiales;
peut prendre entre 2 à 4 ans pour que le fils soit vraiment reconnu par ses pairs (Barach et al., 1988);
importance de l’âge du père et du fils (Davis et Taguiri, 1989);
degré d’habiletés et intérêts pour le domaine (Morris et al., 1997; Handler, 1991).
L ’implication de la fille (Dumas 1989; 1992)
Dyade peu étudiée;peu de fondateurs entrevoient la possibilité de laisser
un poste de décision à leur fille;occupe un poste de direction souvent par accident; triangle père-fille-mère; triangle père-fille- bras droit; tendance à vouloir protéger son père;ne se sent pas importante.
Quelques particularités de la gestion du personnel en contexte d ’entreprises familiales
Motivation plus grande (Covin, 1994);meilleur taux de fidélisation (Covin, 1994;
Allouche et Amann, 1997);deux catégories d’employés (Samson, 1994);problèmes à recruter du personnel qualifié
(Covin, 1994).
Le principal inconvénient de la gestion du personnel en contexte d ’entreprises familiales : le népotisme
Signifie que le fondateur fait preuve d’une grande tolérance envers des membres de la famille qui sont plus ou moins compétents (Dyer, 1988; Kets de Vries, 1993);
perception d’injustice (Covin, 1994);peut être un frein à l’embauche d’un
gestionnaire compétent (Covin, 1994).
La succession
Entre 53 % et 56 % des entreprises familiales vont changer de main d’ici les 10 prochaines années;
parmi celles-ci, 43 %, d’ici les 5 prochaines années; et 1/3 de ces entreprises, ayant à leur tête un dirigeant âgé de 61 ans et plus, n’ont pas de successeur désigné;
en général, entre 70 % et 80 % des entreprises familiales n’ont pas de plan de succession.
(Fenn, 1998; Cliffe, 1998; Les Affaires, 1998; Gauthier 1995)
La recherche sur la succession dans les entreprises familiales de 1953 à
1980 (Hugron, 1993)1953 Christensen La première et seule recherche
Étude de cas auprès de 108 PME
1960 Trow, Gruski,Kriesberg
Approche rigoureuse et quantitative Mesurent les variables taille et
performance sur la fréquence dessuccessions
Calder, Davis,Donneley
Études de cas et entrevues
1970 Longenecker etSchoen,Levinson, Danco,etc.
Études de cas et entrevues
Les principaux champs de recherche sur la succession
Handler (1994)
Recherches sur leprocessus de lasuccession
Identifient certains problèmes en les plaçant surdifférentes étapes du processus
Modèles de jeux de rôles Modèles basés sur les cycles de vie
Recherches faites surle rôle du fondateur
Attribue les facteurs de succès et d’échec auxcaractéristiques personnelles et psychologiques dufondateur
Recherches sur laperception dusuccesseur
Modèles identifiant plusieurs variables directementreliées au successeur : besoins, habiletés, etc.
Analyses systémiques Indissociabilité de deux principaux sous-systèmes : lafamille et l’entreprise
Inclut l’environnement externe
Les recherches sur lesfacteurs de succès
Identifient certains facteurs de succèsincontournables : présence d’un successeur;planification, etc.
La succession est :
•du savoir-faire
•des responsabilités
•du leadership
•de l’autorité
•de la propriété
Le processus dynamique du transfert
à un ou des membres
de la famille
Longenecker et Schoen, 1978; Churchill et Hatten, 1987, Handler, 1989; Hugron et Dumas, 1993
Le processus de la successionmodèle de Handler (1989)
Opérateurunique
Roi Superviseur Consultant
Aucun rôle Assistant Gestionnaire Dirigeant
Propriétaire-dirigeant
Successeur
Propriétaire-dirigeant
Propriétaire-dirigeant
Successeur
Le défi des entreprises familiales de première génération
Les principaux facteurs de succès de la succession
Qualité de la communication, le niveau de confiance et le respect mutuel existant entre les deux principaux acteurs, tant dans l’entreprise qu’au sein de la cellule familiale (Handler, 1991);
qualité des relations existant entre les membres de la famille (Morris et al., 1997);
la planification (Handler et Kram, 1988).
La résistance à la planification de la succession (Handler et Kram, 1988)
Résistancesindividuelles
Résistances provenant du dirigeant :santé, centres d’intérêts, besoins decontrôle, peurs, degré d’identification àl’entreprise, etc.
Résistancesinterpersonnelles
Résistances provenant de la relationentre le dirigeant et le successeur :communication, confiance, respect,conflits familiaux, etc.
Résistancesorganisationnelles
Résistances provenant del’environnement immédiat del’entreprise : culture, employés, etc.
Résistancesenvironnementales
Résistances provenant del’environnement externe : fournisseurs,clients, gouvernements, etc.
Les types d ’interventions (Étude Vinton, 1991)
Family business review, automne 1993
(source : Perreault, 1994)
Planification successorale; interaction entre la famille et l’entreprise; performance de la direction; survie, relance, croissance; planification stratégique; rôles et transitions de rôles; intégration de membres de la famille dans l’entreprise; diagnostic et évaluation des efforts de changement; finances, fiducie et planification du patrimoine.
Les particularités de la consultation auprès des
entreprises familiales (Perreault, 1994)
Surtout trait à la dynamique familiale, aux émotions, aux résolutions de conflit;
plus personnelle;comprend la recherche de l’équilibre entre
les préoccupations familiales et les préoccupations d’affaires (Perreault, 1994).
Les principales critiques quant à la recherche sur les entreprises
familiales
La majorité des écrits sont produits par des consultants (Hugron, 1993; Brockhaus, 1994);
les méthodes de recherche sont peu diversifiées (Handler, 1988; Hugron, 1993);
Les entreprises familiales sont peu définies (Handler, 1988; Brockhaus, 1994; Hugron, 1993; Déry et al., 1993).
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