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supplément au numéro 3372 du 10 avril 2014. ne peut être vendu séparément

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simulation

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éditorial

H ypermédiatisé, le big data est de toutes lesconférences, de tous les programmes derecherche ou industriels. En France, c’est

même la seule technologie qui fasse à la fois l’objetd’un des 34 plans de la Nouvelle France industrielled’ArnaudMontebourg, et d’une des sept ambitions de lacommission Innovation 2030 d’Anne Lauvergeon pourfaire émerger des champions nationaux. Sûrement àraison. Selon les chercheurs du CNRS, le big data a biendes applications industrielles. Il passe par la définitiondemodèles prédictifsmathématiques issus de donnéesréelles, plus fiables que la simulation. Plus fiables, vrai-ment? À voir. Car pour l’instant, le big data est surtoututilisé par les spécialistes dumarketing, qui cherchentà donner du sens à l’avalanche de données que l’on necollectait pas auparavant. Des données numériquesproduites à profusion par les internautes et, demain,par des milliards d’objets connectés. D’où l’idée d’enprévoir le comportement.De la simulation donc? Pastout à fait. Le big data netient pas compte de la phy-sique, mais des données decapteurs, pour extraire descomportements. Ils rempla-cent des modèles préconçuspar ce que l’on observe directement. «On réinvente laphysique», s’enthousiasment les chercheurs. Enfin,presque. «Si le big data permet de prédire ce qui vase passer, il n’explique pas pourquoi», reconnaissentnéanmoins les spécialistes. Plein de promesses pouridentifier les conditions optimales de fonctionnementd’un système complexe (avion en vol, process indus-triels, circulation de véhicules…), le big data ne devraitdonc pas remplacer la simulation. En tout cas, pas cheznos dix champions qui ont fait de cette technologiel’une des compétences clés de leur succès industriel.Ni dans les laboratoires de recherche les plus perfor-mants dumonde qui s’attaquent à des programmes derecherche XXL toujours plus ambitieux et gourmandsen ressources de calcul. Enfin, pas tout de suite... ❚❚

«Si le big data permet de prédire

ce qui va se passer, il n’explique

pas pourquoi.»

En attEndantbig data…

auréliebarbaux

l’usinenouvelle i supplémentaun°3372 i 10 avril 2014 3

Président-directeur général : Christophe CzajkaDirecteur général délégué : Julien ElmalehDirecteur de la rédaction : Thibaut De JaegherDirectrice adjointe de la rédaction : Anne DebrayCoordinatrice éditoriale : Aurélie BarbauxChef d’édition : Guillaume DessaixDirection artistique : Eudes BulardOnt participé à ce numéro : Dorothée Coelho (secrétariatde rédaction) ; Patrick Garcia (maquette) ; Jean-François Prevéraud(rédacteur) et la rédaction de «L’Usine Nouvelle»Supplément de «L’Usine Nouvelle» n° 3372du 10 avril 2014 (commission paritaire n° 0712T81903)Ne peut être vendu séparément.Une publication du groupe Gisi, Antony Parc II -10 place du Général-de-Gaulle - BP20156 - 92186 Antony Cedex.Directeur de publication : Christophe CzajkaImpression : Roto France Impression 77185 LognesPhoto de couverture : Dassault Aviation

entretien• Philippe Vannier, PDG de Bull.....................................P. 4

dossier• Les champions de la simulation....................................P.6

Portfolio• Ces étonnantes images de la natureen équation..................................................................................P. 22

Production• Passer les process au vert..................................................P. 26

recherche•Des projets XXL.......................................................................P. 28

success-story•Optis, l’hyper réaliste............................................................P. 34

bureaud’études•Comment tirer profit du calcul intensif.....................P. 36

outils•Une physique, un logiciel...................................................P. 38

métiers•Une longue chaîne de compétences...........................P. 41

sommaire

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enquêtesspécial simulation

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Seul constructeur européen de supercalculateurs,Bull constitue un maillon essentiel de la filièrede la simulation en France. Philippe Vannier,son PDG, promet la montée de la puissance decalcul pour répondre aux besoins de l’industrie.ProPosrecueillis ParThibauTde Jaegher eTridha loukil

entretien

«lacourseàlapuissancedecalculestdevantnous»

la France compte des champions dans la simulation.Y a-t-il un talent national particulier dans ce domaine?Peu de pays dans le monde concentrent les talents néces-saires à la maîtrise de l’intégralité de la filière de la simula-tion. Ceci passe d’abord par la construction de machines decalcul. Ensuite par les logiciels demodélisation, puis par lesutilisateurs. Seuls quatre pays disposent de l’ensemble de cescompétences: les États-Unis, le Japon, la Chine et la France.Avec sa capacité à développer des composants et à les intégrerdans des systèmes de calcul, Bull joue un rôle essentiel danscet écosystème. Pour être pertinent dans ce domaine, il estimportant d’avoir une proximité forte entre constructeursdemachines, éditeurs de logiciels et utilisateurs. C’est cetteproximité-là qui fait que vous pouvez progresser. Créer unsupercalculateur seul n’a pas de sens. Vous le concevez parrapport à un usage ou à un logiciel de simulation.

doit-on cette position à la qualité de l’école française desmaths?Je pense que la France est un pays qui a toujours innové dansla technologie. Et l’innovation sans modélisation devientquasiment impossible. Nos capacités d’innovation ontcréé un besoin en modélisation, et maintenant les moyensde calcul-simulation créent de l’innovation. La boucle sereferme en quelque sorte. Et comme dans notre pays il y aune forte proximité entre concepteurs d’outils de simulationet utilisateurs, on a un cercle vertueux d’innovation.

les usages suivent-ils lamontée de la puissance de calcul?La puissance brutale de calcul n’a pas d’utilité, si ce n’est dedire que vous avez la machine la plus puissante au monde.La machine doit être calibrée pour répondre aux besoinsde l’utilisateur à l’instant T. Actuellement, les besoinsdes utilisateurs augmentent très vite. Nous poursuivonsla demande en fournissant des machines de plus en pluspuissantes. Dans cette course, nous allons deux fois plusvite que la loi de Moore. Quand on regarde l’évolution de lapuissance des supercalculateurs depuis 1993, on constateunemultiplication par un facteur 8 tous les trois ans, contreun facteur 4 pour la loi de Moore dans les processeurs. Lesbesoins de puissance de calcul sont donc là. Il ne faut pasaller plus vite, car vous ne trouverez pas d’utilisateurs, maisil faut quand même tenir le rythme.

Justement, quels sont les besoins exprimés par les utilisateurs?Les besoins diffèrent selon quatre grands domaines d’uti-lisation: l’industrie, les sciences de la Terre, la médecine,et le traitement d’image. Le pétrole est l’un des plus grosconsommateurs de simulation. À 10 petaflops, on découvredes réservoirs qu’on soupçonne tout juste à 1 petaflops,maisqu’on ne sent pas du tout à 50 téraflops. Or 10 petaflops,c’est la machine la plus puissante en 2013, 1 petaflopscelle du CEA en 2010 et 50 téraflops la machine du CEAen 2005. Un ou deux forages pétroliers suffisent à financerune machine.

cette évolution rapide pousse-t-elle les industriels à reporterleur équipement, comme pour les Pc dans le grand public?Il y a une différence fondamentale entre les usages personnels pa

scalguitte

t

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«créer un supercalculateur seul n’a pas de sens.

vous le concevez par rapport à un usage ou

à un logiciel de simulation.»

et professionnels. Avoir un PC deux fois plus puissant nevous servirait à rien. Vous n’allez pas taper, lire vos e-mails ouécouter lamusique deux fois plus vite. D’ailleurs, est-ce quevous connaissez la puissance du processeur dans votre iPad?Ce n’est pas le sujet. Car la vraie limitation c’est vous. Dansles supercalculateurs, si vous donnez à un industriel unemachine deux fois plus puissante, il l’utilisera. La limitationaujourd’hui réside plutôt dans la capacité de faire dans uneenveloppe donnée de prix. Que ce soit dans l’aéronautique,le pétrole ou les prévisions météo, si l’on peut acheter unemachine deux fois plus puissante pour le même coût, on lefera et on utilisera toute sa capacité.

les logiciels de simulation suivent-ils cette courseà la puissance?Vousmettez le doigt sur un sujet important. Il faut que toutela chaîne avance à lamême vitesse. Si vous avez uniquementla machine qui va deux fois plus vite, cela ne servirait à rien.Il faut que la chaîne logicielle suive. Selon une étude de 2011,plus de la moitié des utilisateurs interrogés disent ne pasutiliser plus de 120 cœurs de processeurs en parallèle. Lalimitation vient de leurs algorithmes de modélisation. C’estlà que l’on voit un gap entre les capacités des machines etcelles des logiciels.

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Qu’est-ce qui freine le plus cette évolution?Côté machines, c’est principalement la consommationd’énergie. Si on avait quelqu’un d’assez riche pour nousacheter unemachine 1000 fois plus puissante que celles quenous livrons aujourd’hui, on saurait la faire. Sauf que l’on nesaurait pas l’alimenter. Un petaflops en 2010 consomme àpeu près 5 MW. Si vous voulez faire une machine de 1 exa-flops, ce qui est l’objectif en 2020 au niveau mondial, vousne pouvez pas faire 1000 fois 5 MW, car cela fait 5 GW, lapuissance de trois centrales nucléaires. Impossible. L’enjeuest de faire un facteur 1000 dans la puissance tout enfaisant un facteur 5 dans la consommation d’énergie. C’estun objectif très compliqué à atteindre. Deuxième sujet: lenombre de cœurs de processeurs à gérer en parallèle. Sur unemachine en 2010, on est dans la classe des 100000 cœursen parallèle. Sur celle en 2020, on sera dans la classe des

100 millions de cœurs en parallèle. Et là, on a un véritableenjeu de logiciel de modélisation.

de quelle puissance de calcul les industriels s’équipent-ilsaujourd’hui?La taille moyenne des machines que nous vendons au-jourd’hui aux industriels fait typiquement une cinquantainede téraflops et coûte quelques millions d’euros. C’est lamachine du CEA en 2005, qui était à l’époque la plus puis-sante en Europe. Les plus gros industriels du CAC 40 telsqu’Airbus ou Total ont des machines de classe petaflopiqueet visent la classe de l’exaflops. Mais une frange importantede sociétés achète desmachines de la génération juste avant.Entre-temps, le prix de ces machines a été divisé par unfacteur 10 à 15. Car quand on fait deux fois plus vite que laloi de Moore, le prix reste le même.

vous avez un projet de calcul dans le cloud. est-ce unmoyende démocratiser le calcul intensif?Nous avons une solution de calcul dans le cloud qui s’appelleExtreme factory. Elle est utilisée par des PME pour tous leursbesoins de simulation et par des grands groupes pour ledélestage des pointes de charge lors, par exemple, du déve-loppement de nouveaux produits. Cette plate-forme se veut

«dans la course à la puissance de calcul,

nous allons deux fois plus vite que la

loi demoore, pour lesmicroprocesseurs.»

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7l’usinenouvelle i supplémentaun° 3372 i 10 avril 2014

«Je suis persuadé que lemade in France,

ou dumoins le conçu en France, est important.»

un modèle d’expérimentation avant de passer à un modèleindustriel avec la création d’une société ad hoc, NumInnov,grâce à la participation de l’État dans le cadre des investis-sements d’avenir. C’est un projet important auquel nouscroyons beaucoup. Il faut juste le lancer au moment où laphase de maturité est atteinte. Pas avant, car les machinesde calcul deviennent très vite obsolètes. Le marché est mûrdans le traitement de données massives, mais pas encoredans la simulation.

vous ne voyez rien qui puisse freiner ce développement?Non. Nous sommes devant un potentiel de développementinfini. Sur les prochaines décennies, les besoins vont croîtrede façon linéaire. Je ne vois pas d’arrêt. De la mise à dispo-sition desmachines et des logiciels viendront des nouveauxusages. J’en suis certain.

le plan de filière sur le calcul intensif vise à développerlemade in France. est-ce possible?Je suis persuadé que le made in France, ou du moins leconçu en France, est important. Prenez l’exemple de notreserveur haut de gamme Bullion. C’est le serveur le pluspuissant au monde. Jusqu’à aujourd’hui, il n’y a pas deproduit concurrent capable de fournir plus de la moitié desa puissance. Quelle est la clé de cette performance? C’estun composant particulier que nous avons développé et quifait toute la différence. Grâce à ce composant, qui sert dechef d’orchestre, on arrive à combiner jusqu’à 16 socketset 128 cœurs de processeurs. Ces serveurs lancés en 2012sont essentiels aux applications de big data, de grossesbases de données et de business intelligence. Vous mettezune couche logicielle dessus et vous obtenez une machinecapable de traiter un volume énorme de données. En 2013,ses ventes ont explosé de 70%. ❚❚

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dassault aviation

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9l’usinenouvelle i supplémentaun° 3372 i 10 avRil 2014

Loin d’être à la traîne dans la course à l’innovation,la France a quelques atouts dans sa manche.Démonstration avec dix de ses grands industriels.paraurélie BarBaux

E t si la simulation numérique était la botte secrètedes grands industriels français ? Ceux qui in-novent, ceux qui réussissent à l’international, ceux

qui sont leaders sur leur marché. Spécialité française, grâcenotamment à la performance de la recherche publique et del’école de mathématiques en France, la modélisation desphénomènes physiques est au cœur des process de R&Dde ces champions. Et ce, dans tous les domaines. Même lesplus inattendus. Car la simulation numérique dépasse deplus en plus souvent ses domaines de prédilection, commela métrologie, la mécanique, les matériaux ou les écoule-ments de fluides, cruciaux en aéronautique par exemple.Elle est partout, de la chimie à la biologie en passant parles réseaux –de télécommunications ou de ressources–, lacirculation d’énergie ou de personnes, jusqu’à l’interactionen temps réel, via la réalité augmentée, avec des modèlesd’opération –militaires ou navals. Ce n’est pas le fruit duhasard si L’Oréal, le numéro un mondial de la cosmétique,

C’est dansle centre deréalité virtuellede Dassault,à saint-Cloud,qu’a été conçuet entièrementsimulé leFalcon 5x.

Dossier

leschampionsdelasimulation

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enquêtesspécial simulation

construire la ville intelligente de demain, à Singapourou à Mexico. Grâce à leur maîtrise de la réalité virtuelleet augmentée, DCNS construit les navires du futur et laDirection générale de l’armement conçoit des systèmesd’arme et d’opération toujours plus sûrs. Sans parler deTotal ou deMétéo France, qui continuent d’investir dans depuissants centres de calcul pour faire tourner des modèlestoujours plus audacieux, mais également toujours plusgourmands en ressources. Des exemples à suivre de prèset à (re)découvrir. ❚❚

est devenu un expert international de la simulation de lapeau et du cheveu, et si Dassault Aviation est sûrement lepremier constructeur aéronautique capable de faire volerdans des conditions réelles… un avion virtuel ! Ou si Alca-tel-Lucent reste parmi les leaders mondiaux des réseaux decommunication très haut débit, et RTE celui des réseauxd’énergie intelligents. Ce n’est pas un hasard non plus si Airliquide est en mesure d’aider ses clients à optimiser leursressources, et si Veolia Environnement réussit à exporterson savoir-faire dans la gestion des réseaux d’eau pour

V ous êtes dans le cockpit, les commandes del’avion à portée de main. En tournant la tête degauche à droite, la piste de décollage se dessine

derrière le pare-brise. Une opération de maintenance dedernière minute avant le vol? Il suffit de tendre les bras, des’emparer de la pièce défectueuse et… de ne pas se cognercontre le mur. Dans le centre de réalité virtuelle immersifde Dassault Aviation, au siège du groupe à Saint-Cloud(Hauts-de-Seine), il n’est pas rare que les utilisateurs de cesimulateur perdent leurs repères. Munis de lunettes 3D etde capteurs demouvement harnachés un peu partout sur lecorps, positionnés face à trois écrans géants, ingénieurs et

Le constructeur aéronautique a été pionnier dansle passage à la simulation numérique. Ses équipesne cessent d’en développer les applications.

aéronautiquedassaultaviation,pilotevirtuel

Fini lesmaquettes ! la conception des avions est 100%numérique. les essais en vol aussi, comme ici avec le décollage virtuel d’un Falcon 5x.

10

dass

ault

aviation

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enquêtesspécial simulation

techniciens vérifient dans une salle confortable l’architec-ture globale d’un avion grandeur nature et l’emplacementde chaque pièce de l’appareil. La scène rappelle le balletgestuel effectué par Tom Cruise dans «Minority Report».Et, à l’instar du héros, Dassault Aviation a une vision trèsprécise de ce qui n’existe pas encore…

unmodèle prédictif fiableAu cœur de ce dispositif : la maquette numérique. Elle per-met de s’affranchir des prototypes physiques et de réaliser desgains de temps substantiels, de la phase de conception à cellede la production. Utilisée depuis 1990 pour le Rafale, puispour le Falcon 2000, le 7X, le Neuron et, aujourd’hui, pour lenouvel avion d’affaires Falcon 5X, elle a transformé le groupeen utilisateur chevronné de la simulation numérique. «Cettemaquette est la définitionmathématique virtuelle exacte del’appareil, explique enthousiaste Jérôme Camps, responsabletechnique au sein du bureau d’études de Dassault Aviation.Elle est la base de données unique qui contient toutes lesinformations nécessaires pour la production d’un avion.»Chez Dassault Aviation, le papier n’est plus à l’ordre du jourdepuis belle lurette. C’est le bizutage des petits nouveaux :leur demander de récupérer les plans de tel ou tel avion.Ce savoir-faire, les 12000 salariés de Dassault Aviation le

doivent à la collaboration étroite entretenue avec une autrefiliale du groupe Dassault Systèmes.Créé en 1981, cet éditeur de logiciels a développé Catia,un programme de conception assistée par ordinateur aufondement de la maquette numérique, qui a conquis despans entiers de l’industrie mondiale, du ferroviaire à l’auto-mobile en passant par les biens de consommation. Depuis sapremière utilisation, Dassault Aviation ne cesse d’améliorercette maquette et d’en étendre les fonctionnalités. Essaisvirtuels d’aérodynamisme via des équationsmathématiquesde l’écoulement de l’air, tests numériques du comportementstructurel de l’avion issus des calculs sur la propagation desforces et des contraintes… «Les vols d’essais permettent deconfirmer les calculs, résume Jérôme Camps. Lamaquette estdevenue unmodèle prédictif fiable.» Un niveau de réalismeinouï alors qu’un avion de combat ou un jet d’affaires com-prennent environ 100000 pièces, 25 kilomètres de câbleset pas moins de 300000 fixations!Un logiciel d’analyse de cycle de vie complète la maquettedepuis le début des années 2000, ouvrant la voie à l’usinenumérique et à l’anticipation, avant assemblage, des pro-cess de production. «Cela divise par deux le temps d’assem-blage du Falcon 7X», assure Jérôme Camps. Autre avantage:le premier avion sorti de chaîne atteint d’emblée le niveau

l’usinenouvelle i supplémentaun° 3372 i 10 avRil 2014 11

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enquêtesspécial simulation

le projetà suivre la simulation globale de l’avion qu’il s’agirade faire voler virtuellement en prenant en compte les interactionsde ces équipements, et ce dans des conditions réelles de vol.

de qualité qui correspondait auparavant au 50e appareilde série construit ! La mise en place d’un plateau virtuel abouleversé l’organisation du bureau d’études: il permet auxpartenaires industriels, pour chaque programme d’avion, departager les données de la maquette depuis leurs bureaux.«C’est l’industrie du XXIe siècle», assure Jérôme Campsqui y voit un avantage concurrentiel crucial pour DassaultAviation face aux autres avionneurs. Prochaine étape ?«Nous nous orientons vers la simulation virtuelle globalede l’avion, répond-il sibyllin. Et les premiers résultats sont

prometteurs.» Il s’agirait de faire voler virtuellement l’avion,en prenant en compte les interactions de ces équipementsdans des conditions réelles de vol. Mais là, impossible d’ensavoir davantage. Si le groupe accorde autant d’importanceà la simulation, c’est que la concurrence mondiale est, elle,bien réelle… ❚❚ olivier james

Le groupe français utilise la simulation depuis prèsde deux décennies pour l’eau et l’assainissement.Aujourd’hui, il s’attaque à la ville intelligente.

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S ingapour, Mexico et Lyon, premières villes intelli-gentes? Peut-être. En tout cas, depuis 2013, ellessont les premières à disposer de ForCity (4CT), le

démonstrateur de modélisation urbaine de Veolia Environ-nement. Il s’agit d’une plate-forme ouverte et évolutive quiinterconnecte les modèles des différentes composantes del’écosystème urbain, c’est-à-dire la mobilité, les services àl’énergie, l’utilisation des sols, l’eau, les déchets, les bâti-ments, les impacts environnementaux et les pénuries deressources. De quoi permettre aux décideurs de comparerplusieurs options de planification urbaine en 3D.À Nice, la gestion énergétique gagne également en intel-

pour optimiser ses réseaux d’eau, veolia utilise le logiciel open source epanet.

veo

lia

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enquêtesspécial simulation

ligence grâce au projet Réflexe (pour «réponse de flexibilitéélectrique»), lancé en 2011 pour une durée de trois ans etdemi. Piloté par Dalkia, filiale de Veolia Environnement, avecun budget de 9 millions d’euros, il modélise sur une ving-taine de sites tertiaires et industriels la production et laconsommation électrique. Ce projet doit évaluer les solutionsde pilotage des systèmes afin d’expérimenter la gestion entemps réel de sites producteurs et consommateurs d’élec-tricité. «L’idée est aussi de récupérer l’énergie pour en fairebénéficier des installations publiques comme une piscinemunicipale», précise-t-on chez Veolia Environnement.

le vrai temps réel pour demainSi le groupe est à la pointe sur ces programmes prospectifs,c’est parce que la simulation est depuis longtemps au cœurde ses processus d’innovation. «L’eau et l’assainissementont rejoint depuis une vingtaine d’années l’ère de lamodéli-sation. Aujourd’hui, on ne signe quasiment plus un contratsans intégrer de la simulation», explique Vincent Parez, leresponsable du pôle réseaux et systèmes chez Veolia Eau.Un savoir-faire reconnu à l’international. Veolia exploite,entre autres, les réseaux chinois de Shenzhen pour l’assainis-sement et de Dong pour l’eau potable, soit plus de 1 millierde kilomètres. «À Prague, nous avons participé à la gestionde crise et au système d’alerte en cas d’inondation. Nousprévenons les autorités en cas de besoin.»Pour les réseaux d’eau potable, Veolia travaille avec Syner-gie et surtout Epanet, un logiciel open source de plus en plusutilisé. Pour l’assainissement, la suite InfoWorks prend lerelais. «Sur la plupart des contrats, nous avons déjà une baseSIG (système d’information géographique). Des passerellesfacilitent la récupération d’informations pour lamodélisationdu descriptif du réseau», ajoute Vincent Parez.Au départ, la simulation était un outil pour mieux définirles besoins du réseau, les raccordements des nouvelles zonesde collecte en eau potable. Aujourd’hui interconnectée avec

la simulation est depuis longtemps au cœur du processus d’innovation,ici depuis la salle de contrôle.

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Intel : le laboratoireExascale ComputingResearch en routevers l’exascale

Le laboratoire Exascale compu-ting research (ECR), créé en 2010avec l’UVSQ, le CEA et Genci, faitpartie des réseaux de rechercheorientés vers l’exascale. L’undes grands défis des prochainesannées pour préparer le passageà des systèmes présentant desmillions de cœurs de calcul restel’optimisation de l’interactionentre les couches applicativeet les couches machine. Ce quiexige, d’une part, de dévelop-per des outils sophistiqués pouranalyser ses effets au niveau ducœur de calcul et du réseau decommunication ; d’autre part detravailler sur des applicationsHPC pour lever les verrous depassage à l’échelle. Le labora-toire héberge ainsi des étudiantsmaster pour les former aux mé-thodologies logicielles ou pourœuvrer sur un algorithme decalcul spécifique.

Pour Intel, il est important d’inté-grer les avancées de la recherchemenée sur du logiciel applicatifà l’ensemble des architectures,de la brique de base (comme lafamille de processeur Intel Xeon)aux systèmes HPC les plus puis-sants constitués de plusieurscentaines, voire milliers denœuds. C’est une manière pournous de préparer demanière col-laborative les usages et les ins-tallations des codes de demain

et de contribuer à faire avancerl’innovation dans le domaine.

Dans le cadre du laboratoire ECRet avec le soutien de Genci, nouscollaborons avec Hydrocean, unePME spécialisée en simulationnumérique. Cette entreprise,chargée d’améliorer les perfor-mances du futur trimaran deFrançois Gabart, le gagnant duVendée Globe 2013, souhaiteoptimiser le code qu’elle a misen place pour la modélisationdynamique de l’interaction entreles vagues et le vent, appelé SPH-Flow. En travaillant avec les ingé-nieurs Intel du laboratoire et avecles outils open source de notrepartenaire universitaire, la PMEpourra faire évoluer son code envue du passage à des systèmesHPC de plus grande taille.

Pour l’heure, le code profilé a faitses preuves sur des processeursde type Xeon E5v2, fonctionnantsur un parallélisme moyen, avecun partage de huit cœurs decalcul sur un socket. À terme,notre collaboration espère ob-server le comportement duditcode sur des machines au paral-lélisme plus élevé, de type XeonPhi, avec un partage de calculd’environ 60 cœurs par socket.Ainsi, via l’optimisation du paral-lélisme, nous espérons apporterdes avancées considérables entermes de compréhension desméthodes SPH (smooth par-ticle hydrodynamics) qui s’ap-pliquent à des secteurs variés(ingénierie navale, design deséoliennes), tant sur les archi-tectures existantes que sur lesfutures. Un premier pas pouratteindre une puissance decalcul exaflopique d’ici quelquesannées...

TRIBUNEDEMARQUE

TRIBUNEDEMARQUEMET EN RELATION L’AUDIENCEDE L’USINE NOUVELLE AVEC SES PARTENAIRES.

©Intel

Coprocesseur Intel® Xeon Phi™

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enquêtesspécial simulation

Q uel est le point commun entre un filtre solaireappliqué sur la peau, capable d’absorber les ultra-violets, et les peintures déposées sur le revêtement

d’un avion pour piéger des ondes électromagnétiques? Lesmêmes équations sont utilisées pour appréhender leur com-plexité et anticiper leur efficacité. Vingt ans après la biologie,le calcul intensif et lamodélisation 3D font aujourd’hui figurede révolution chez L’Oréal. Pour concevoir les innovations dedemain, plus question de se laisser guider par les recherchesen chimie et physico-chimie. «C’est un changement completde paradigme, s’enthousiasme Bernard Querleux, senior

Le numéro un mondial de la beauté accélère sarecherche en nouvelles molécules et veut percerles mystères des tissus humains.

Biotechnologiel’oréalsublimepeauetcheveux

leprojetà suivre lamodélisation va permettre d’affinerl’évaluation de la performance finale des produits et de prédirele rendu de la couleur d’un fond de teint sur la peau.

research associate, responsable du projet calcul intensif ausein de L’Oréal recherche et innovation. Désormais, c’est uncalcul qui oriente la synthèse d’un nouvel actif ou la réali-sation d’une formule physico-chimique. En multipliant lessimulations, nous explorons le jamais vu!»

équipement high-tech externaliséDepuis plusieurs années, le numéro un mondial de labeauté fait la part belle au numérique au sein de sa rechercheavancée. Pas rentables l’achat d’un supercalculateur ou laconstitution d’une équipe d’as du calcul intensif en interne?L’Oréal signe un partenariat avec le CEA pour bénéficierde l’équipement high-tech et de l’expertise de son centrede calcul recherche et technologie. «En reproduisant surordinateur le comportement de la peau et des cheveux,nous pouvons améliorer notre connaissance de ces tissusbiologiques complexes et peu étudiés au niveau mondial»,explique Bernard Querleux. Le français a pris les devants surses principaux concurrents, l’américain Procter&Gambleet l’anglo-néerlandais Unilever, également adeptes de lasimulation.Le comportement de la chevelure, un ensemble de120000 à150000 cheveux, était jusqu’alors jugé trop complexe pourêtre modélisé. À partir d’un ensemble de paramètres perti-nents, L’Oréal et le CNRSmettent alors au point un modèlestatique qui décrit le comportementmécanique d’un cheveu.Puis, le groupe et un laboratoire de l’Inria, spécialisé dansla représentation de scènes complexes comme les champsde blé, planchent sur l’écriture d’équations qui régissentles mouvements du cheveu. En 2006 naît ainsi le premiermodèle de chevelure dynamique et paramétrable. «Cela aouvert un formidable champ d’expérimentation pour noséquipes de recherche dans le développement de nouveauxproduits, car nous comprenions comment, en jouant surun paramètre, l’apparence d’une chevelure pouvait êtremodifiée», ajoute Bernard Querleux. Une innovation utiliséepar le géant de la beauté dans ses gammes de shampooing,pour les rendre plus lissants ou plus coiffants. Mais il faudrapatienter quelques années avant de pouvoir s’appliquer lepremier produit cosmétique entièrement conçu sur ordina-teur. ❚❚ GaëlleFleitour

À droite, une vraiemèche de cheveux. À gauche et au centre sa simulation, créée à partir dupremiermodèle de chevelure dynamique et paramétrable.

l’oRéa

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le projetà suivre À lyon, le démonstrateur ForCity se trouvedans le quartier Gerland. Ce projet est mené par eDF, veoliaenvironnement, Cmnpartners et la start-up the Cosmo Company.

d’autres outils, elle permet de piloter, de diminuer les coûts,de positionner une fuite, demoins saturer les réseaux, d’op-timiser les ressources. Il est également possible d’acheterou de vendre de l’eau à une commune voisine connectée.Pour l’assainissement, c’est un peu plus compliqué. Il fautcapter les éléments pluvieux, éviter les débordements,interfacer le réseau et l’environnement, examiner les cou-rants marins avant que la pollution puisse avoir un impact.«En vingt ans, la puissance de calcul a progressé. Elle est

devenue beaucoup plus rapide. Elle permet de trouver lebon rapport entre les coûts et l’environnement.» L’avenir?«C’est d’avoir davantage de liens avec les SIG et de plus enplus d’informations en temps réel. Mais le vrai temps réel,nous n’y sommes pas encore.» ❚❚ olivier CoGnasse

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De la milliseconde à la décennie, des marchésaux transitoires électromagnétiques…L’opérateur réseaux ne peut plus se passerde ses simulateurs.

réseaux électriquesl’anticipationpourcredochezrte

C hez RTE, la simulation est partout. «Presque toutesles activités de l’entreprise y font appel», résumeDidier Zone, le directeur duCentre national d’exper-

tise réseau de RTE. Le gestionnaire du réseau de transportd’électricité français opère, entretient et développe quelque100000 kilomètres de lignes à haute et très haute tensionponctuées d’environ 2600 postes de transformation. Il estau cœur du système électrique dans un monde de l’énergieen pleine mutation. Sonmétier repose sur l’anticipation. Lasimulation est son atout.Au quotidien, la simulation permet à RTE de garantir lebon fonctionnement d’une machine industrielle complexequi repose sur le synchronisme d’unemultitude demachinestournantes, qui produisent ou consomment l’électricité. Encas d’incident, le risque est de déclencher une réaction enchaîne qui conduise à un effondrement de grande ampleur: leblack-out. Pour l’éviter, des calculateurs d’aide à la conduitedu réseau tournent en continu dans les huit centres deRTE. Ils simulent des incidents (ligne coupée, panne degénérateur…) et vérifient que le réseau restera stable faceà ces incidents. Si ce n’est pas le cas, des outils de simula-tion plus sophistiqués aident les opérateurs à trouver desparades, comme répartir différemment les flux d’électricitéou demander à une centrale d’augmenter sa production.

C’est ainsi qu’est mise en œuvre la règle du N-1, base de lasûreté du réseau: celui-ci doit continuer à fonctionner aprèsla perte d’un équipement.

suite logiciellemaisonCes outils d’aide à la conduite font tourner leurs algorithmessur des modèles physiques d’électrotechnique des réseaux.Ils ont été développés en interne, par EDF puis par RTE.«Nous avons environ 90 experts du système électrique et desmatériels, à Versailles et à la Défense, qui font évoluer nossimulateurs», préciseDidier Zone. L’ensemble formeune suitelogicielle, Convergence, que RTE utilise pour développer leréseau. Simuler l’impact d’une centrale électrique, l’apportd’une ligne haute tension ou d’un poste de transformation…L’installation du réseau passe par l’anticipation, d’autant quela construction des ouvrages, avec les phases de concertationet d’autorisations, prend de sept à dix ans.RTEdispose également de logiciels plus pointus pour étudierla dynamique des réseaux (surtensions, pertes de synchro-nisme…). Les «transitoires» électromagnétiques sont simulésà la milliseconde près par le puissant algorithme d’Euros-tag. Issu d’EDF, ce programme est codéveloppé par RTE etTractebel (GDF-Suez). Pour descendre sous la millisecondeet simuler les transitoires ultrarapides qui peuvent affecterles composants d’électronique de puissance, RTE fait appelà EMTP-RV, mis au point avec Hydro-Québec et Powersys.La simulation ne s’arrête pas à l’électrotechnique: les pré-visionsmétéo sont intégrées dans desmodèles qui calculentla consommation d’électricité et les productions solaire etéolienne. Les simulations des marchés prévoient commentles échanges d’électricité vont influer sur les flux sur lesréseaux… Chez RTE, tout est une question d’anticipation.Donc de simulation. ❚❚ manuelmoraGues

le projetà suivre rte prépare un serious game , sorte de«sim City» du réseau électrique, qui servira à la formation eninterne. il devrait ensuite être diffusé auprès du grand public.

le Centre national d’exploitation du systèmedertegarantit l’équilibre entre production et consommation.

l’usinenouvelle i supplémentaun° 3372 i 10 avRil 2014 15

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I maginez-vous commandant d’un navire de guerreen train de superviser l’opération de débarquementd’un commando. Dans la salle de commandement,

la bonne vieille carte d’état-major a laissé place à une grandetable tactile numérique qui présente dynamiquement lasituation tactique, la position des cibles et celle des moyensdont vous disposez pour atteindre votre objectif. Dans lescénario envisagé, vous voyez la progression de vos troupesembarquées sur leur Zodiac fonçant vers le littoral pourneutraliser une unité logistique ennemie. D’un geste de lamain, en tapotant sur la bonne icône, l’officier affiche dansune petite fenêtre le flux vidéo de la caméra fixée à l’avant

La Direction générale de l’armement misesur ses experts en simulation pour accélérerla conception de futurs systèmes d’arme.

Défenselaguerrecommesivousyétiez

de l’embarcation rapide. En sélectionnant l’icône du dronerattaché à cette zone, ce sont les images capturées du cielqui se mettent à défiler. Bref, tous les flux vidéo pris depuisdifférents endroits du champ de bataille sont intégrés à latable tactique et visibles instantanément. Pour chaque flux,des métadonnées viennent préciser la source des images,l’élément pointé… Si nécessaire, ces informations peuventêtre envoyées par liaison satellitaire au commandementcentral pour valider une décision.

La centralisation des flux pour objectifDepuis quelques mois, tout cela n’est plus du domainede la science-fiction. Un tel prototype a été développé parune poignée d’experts logiciel du laboratoire technico-opéra-tionnel (LTO) de la Direction générale de l’armement (DGA),installé à Arcueil et sur le site duMourillon à Toulon. «Aprèsl’opérationHarmattan en Libye, les forces navales opération-nelles ont exprimé le besoin de mieux exploiter toutes lesinformations vidéo qui étaient à leur disposition. Ils nous ontdemandé un outil capable de centraliser l’ensemble des fluxvidéo pour les aider à prendre plus rapidement les bonnesdécisions», explique Éric Bujon, le responsable simulationà la DGA. Les marins l’ont testé en mer l’été dernier et leurretour d’expérience sera précieux pour disposer, à terme,d’une version industrialisable.Le laboratoire a également été mobilisé pour validerd’autres concepts d’armes, notamment le tir de missilesà partir d’un véhicule blindé sans vue directe de la cible.Les développeurs se sont appuyés sur un «serious game»,qui plonge l’observateur, le décideur et le tireur dansun monde virtuel où ils peuvent tester différents scénariosde tirs. Ces simulations ont permis de définir la meilleurerépartition des rôles entre les opérationnels. Au-delà destraditionnels simulateurs et systèmes d’entraînementcomme celui du Rafale, la DGA exploite donc la simulationcomme un outil d’ingénierie technique. «Pour la définitiond’un nouveau système d’arme, le dialogue entre les opéra-tionnels, les ingénieurs et les industriels s’avère essentiel.Il permet de traduire un besoin opérationnel en un cahierdes charges qui servira de base au contrat avec l’industriel.Un contrat réaliste aussi bien sur le plan des performancesque sur les coûts de développement du futur équipement»,précise le responsable simulation.Utilisatrice intensive des technologies de simulation depuisplus de vingt ans, la DGA peut aujourd’hui compter sur230 experts dans ce domaine, soit trois fois plus qu’il y adix ans. Elle y consacre un budget de plusieurs dizaines demillions d’euros par an. «Malgré la baisse des ressources,la simulation reste une priorité. Nous avons mis en placeun programme de rationalisation de nos activités en 2013.Dans notre mode de fonctionnement, nous devons nousrapprocher de celui d’une société d’ingénierie avec unemeil-leure mutualisation des ressources et des outils», conclutÉric Bujon. ❚❚ HassanMeDDaH

La table tactile numérique, une carte d’état-major version high-tech.

le projetà suivre Réunis au sein de l’association adis,la DGa et ses fournisseurs veulent développer une boîteà outils commune sur les technologies de simulation.d

ga;lauren

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De l’exploration au raffinage en passant parl’exploitation d’un réservoir, le groupe pétroliermodélise son industrie grâce à un supercalculateur.

Énergietotalcarbureauxalgorithmes

Quinze fois plus puissant que son prédécesseur, le calculateur Pangea a coûté 60millions d’euros àTotal.

pour optimiser une exploitation. À une autre échelle, et sur lemême principe, Total reproduit les réactions chimiques, leséchanges de chaleur, les polymérisations au sein des grandsprocédés de raffinage. «C’est ce qu’il y a de plus compliquéen mécanique des fluides multiphysiques», explique Jean-François Minster, directeur scientifique de Total.

Unemaîtrise globale des étudesEnfin, le groupe plonge vers des dimensions bien plusmodestes avec la modélisation de structures devenue indis-pensable à la chimie de spécialités, activité assumée par desfiliales comme Hutchinson. Dans le cadre de réalisation dejoints d’étanchéité pour l’automobile, par exemple, il estnécessaire de reproduire l’ensemble du véhicule et ses vibra-tions sur la route pour mimer le vieillissement du produit.La simulation de structures permet également d’évaluerle coulage de matières composites dans des moules. Lamodélisation pousse jusqu’au niveaumoléculaire. L’objectifétant de déchiffrer des comportements macroscopiques àpartir d’échelles infiniment petites, utile pour l’étude descolles notamment.Environ un tiers de ces recherches est réalisé en internegrâce à des moyens humains et techniques dédiés. Le resteest sous-traité par des sociétés spécialisées ou par desuniversités, selon la complexité et la sensibilité des sujets(risques industriels, impacts environnementaux…). Si Totala choisi d’internaliser une part de ces études, c’est dans lebut de rester maître de sa connaissance. «La simulationest tellement stratégique que nous devons comprendre les

D ans un groupe de la dimension de Total, la réus-site et la précision des simulations numériquesengagent des centaines de milliers, voire des mil-

lions d’euros. Pas étonnant que l’entreprise en ait faitune compétence clé dans toutes ses activités. En premierlieu, il s’agit de transformer les données de propagation d’uneonde sismique dans le sous-sol en une image des couchesgéologiques afin de découvrir des réservoirs d’hydrocarbures.Les volumes d’informations à traiter atteignent des sommetsavec 170 téraoctets pour les plus grandes campagnes.Puis, Total transcrit la dynamique des fluides multi-échelles. Cela consiste à représenter l’évolution d’un réser-voir d’hydrocarbures lors de son exploitation. Exercice diffi-cile, car il s’agit de simuler la migration de l’eau, de l’huileet du gaz dans un milieu complexe et de leurs interactionsavec la roche.Mais exercice indispensable, car de lui dépendla réalisation de forages supplémentaires ou l’injection d’eau

L’UsinenoUveLLe i supplémentaun°3372 i 10 avril 2014

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S ur le site toulousain de Météo France, deux nou-veaux supercalculateurs ont été installés en 2013.Deux machines Bull qui affichent plus de 500 té-

raflops de puissance crête chacune. Soit une puissancetotale vingt fois supérieure à celle des deux ordinateursNec qu’elles remplacent. L’une est consacrée à la prévisionquotidienne, l’autre à des travaux de recherche. Et ce n’estqu’une étape, car les deux calculateurs seront remis à niveauen 2015-2016. Une opération qui devrait quintupler lapuissance crête. Globalement, sur les logiciels qu’il utilise,Météo France s’attend à un gain de performance multipliépar trente environ. Le premier des supercalculateurs Bull estpassé en production en janvier. L’ensemble des nouveauxéquipements de calcul sera opérationnel enmai. Le tout sansaugmenter la consommation d’énergie, grâce à un systèmede refroidissement plus efficace.

L’évolution du climat en questionCette montée en puissance n’a rien de surprenant, car laprévision météorologique est depuis toujours une grandeconsommatrice de moyens de calculs. Mais la migrationentamée en 2013 répond à un programme précis d’amé-lioration des prévisions. Et engage Météo France dansune vaste entreprise de révision de ses codes de calcul.«L’un de nos objectifs est d’améliorer la précision des prévi-sions en réduisant la maille des modèles de l’atmosphère»,indique Alain Beuraud, le chef de projet calcul intensifà Météo France. Ainsi, le modèle le plus fin, Arome, quidonne des informations locales en métropole, fonctionne

Le service météorologique national augmente sapuissance de calcul. Son but? Affiner ses modèlesprédictifs des phénomènes atmosphériques.

ClimatmétéoFranceaFFûtesesprévisions

aujourd’hui avec une maille de 2,5 kilomètres. Elle seraréduite à 1,3 kilomètre. Arome permet notamment de pré-voir des événements potentiellement dangereux, comme lesorages. Et son usage va s’étendre aux Dom-Tom. Arpège,autre modèle de simulation de Météo France, à l’échelledu globe cette fois, utilise une maille de 15 kilomètres quipassera à 7,5 kilomètres. Affiner le maillage des modèlesn’est pas le seul but de la montée en puissance des moyensde calcul. L’idée est également de faire tourner un plusgrand nombre de simulations. Par exemple, faire varier lesconditions initiales sur unmêmemodèle afin de vérifier ouconfirmer un risque de tempête ou d’événement dangereux.Ou encore actualiser toutes les heures les prévisions pourrépondre aux demandes spécifiques des aéroports.Enfin, il ne faut pas oublier que l’un des deux calculateursest dédié à la recherche, et que Météo France est fortement

en réduisant lemaillage de sesmodèles,Météo France veut obtenir des prévisions plus fines.ici, une carte des températures et du vent.

calculs associés. Nous ne pouvons pas nous contenter d’uneanalyse de prestataire», explique Jean-François Minster.Pour y parvenir, le groupe possède plusieurs supercal-culateurs. Mais surtout, depuis mars 2013, les informati-ciens hardwares, les ingénieurs systèmes, les opérateurs,les mathématiciens et les géophysiciens bénéficient de lapuissance de Pangea, le neuvième plus puissant supercal-culateur au monde au moment de son installation. Installédans le centre scientifique et technique Jean-Fréger, à Pau(Pyrénées-Atlantiques), il affiche 2,3 petaflops de puis-sance de calcul et 7 petaoctets de capacité de stockage. Cetinvestissement de 60 millions d’euros a été remboursé enmoins d’un an, tant il réduit la complexité et améliore la

précision des simulations. Un élément clé dans l’industriepétrolière où seuls 15 à 30% des forages sont un succès.L’amélioration du taux de réussite de quelques points suffità économiser des millions de dollars. En outre, le gain detemps est considérable. L’analyse des relevés sismiques duprojet Kaombo, en Angola, a demandé neuf jours de calculà Pangea. Avec l’ancien supercalculateur, il aurait falluquatre mois et demi… ❚❚ LUDoviC DUPin

le projetà suivre La simulationmulti-échelle etmultiphasede polymérisation, lancée en partenariat avec l’académiedes sciences de Chine, à Pékin. Rendu difficile par des phasesde densité très voisines, ce projet est une premièremondiale.

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S ur l’écran courbe de la salle de réalité virtuelle, levisiteur –chaussé de lunettes 3D– plonge au cœurde la frégate FremmAquitaine, premier exemplaire

livré par DCNS à laMarine nationale fin 2012. Plage arrière,poste central d’opérations, passerelle de commandement…«Tous les espaces sont passés au crible avec le client, jusqu’à

Adepte de la réalité virtuelle, DCNS pousse leconcept dans son programme des frégates Fremmet teste la réalité augmentée en production.

Construction navaleDcns,lebâtisseur3D

l’emplacement des prises électriques», explique Yann Bouju,le responsable à Lorient des activités de réalité virtuelle etaugmentée. Un département qui compte une dizaine desalariés pour l’ensemble du groupe.«Depuis 1997, DCNS conçoit et fabrique ses navires avecdes maquettes numériques et de la visualisation 3D. Lestests ont commencé avec le porte-avions nucléaire Charles-de-Gaulle, précise Yann Bouju. Les Fremm et les Barracudasont les programmes où nous avons poussé la logique leplus avant.» Les maquettes numériques sont directementintégrées à Etrave, un systèmePLM (pour «product lifemana-gement»)mis au point en interne pour les besoins spécifiquesde l’entreprise: un navire de guerre ou un sous-marin sontcomplexes à fabriquer avec un nombre de composants quidépasse lemillion. En amont de la construction, lamaquettenumérique permet de vérifier la faisabilité et sert aux étudespréliminaires avec le client. «Nous travaillons en amont surla définition et l’ergonomie des postes de travail, préciseYann Bouju. Lamorphologie d’unmarinmalaisien n’a rien àvoir avec celle d’unmarin français. Nous devons adapter lespostes.» Lors des études détaillées, la réalité virtuelle permetde «dérisquer» bien des bugs. Par exemple, impossible surla frégate Aquitaine de vérifier de visu, depuis la passerellede commande, le flanc arrière du navire où ont lieu desopérations importantes comme la mise à l’eau de Zodiacpour intervention. «Nous avons alors ajouté un aileron surle côté de la passerelle», explique Yann Bouju.

Une excellente rentabilitéÀ côté de la première salle de réalité virtuelle, une secondesalle, dite de «tracking», est dédiée à des réunions de travailplus appliqué: une fois équipé de lunettes surmontées dedrôles de petites antennes et armé d’une sorte de joystick, onpeut manipuler la maquette numérique dans tous les sens.Cherbourg et Toulon sont équipés de salles identiques. «Nousavons aussi un “cave” depuis un an et demi à Cherbourg,avec trois écrans permettant une plus grande immersion»,explique Yann Bouju. Cette salle est à proximité dumontagedes sous-marins nucléaires Barracuda. «Les équipes demontage vont y vérifier le matin la faisabilité des opérations

immersion totale dans cette salle de réalité virtuelle où sont traqués les bugs de conceptiondes navires armés.

impliqué dans l’étude de l’évolution du climat, avec l’un desdeuxmodèles de simulation français (une version d’Arpège)reconnus par le Groupe d’experts intergouvernementalsur l’évolution du climat (Giec). L’ordinateur dédié à larecherche servira à préparer le prochain rapport de cetteinstitution sur le réchauffement climatique. Mais tout cecin’est pas sans poser de sérieux défis informatiques. Chacundes deux supercalculateurs Bull comporte 1000 nœuds decalcul et 24 cœurs de processeurs Intel. Rien de communavec la génération précédente de calculateurs Nec et leursdix nœuds de calcul vectoriel… Une parallélisation mas-sive des codes de calcul s’avère donc nécessaire. «Pourque la maille du modèle Arome soit effectivement réduiteà 1,3 kilomètre, il faudra le faire tourner sur des milliers

de cœurs de processeurs», souligne Alain Beuraud. Autrepoint clé: les entrées-sorties des données avec un ensemblede processeurs qui travaille simultanément… «Ce peut êtreun point bloquant : inutile de rajouter des processeurs sion ne l’a pas résolu», prévient le responsable du calculchez Météo France. De quoi occuper un bon momentles équipes de recherche et de production, associées à larésolution de ces problèmes. Tout en préparant déjà lenouveau saut de puissance –et de parallélisme– annoncépour 2016. ❚❚ THieRRy LUCas

le projetà suivre L’adaptation des programmes de prévisionmétéorologique aux architectures parallèles des nouvellesgénérations de super-ordinateurs.

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I mpossible de rester le numéro un mondial desgaz industriels et médicaux sans faire la partbelle à l’innovation. Chez Air liquide (15,3 mil-

lions d’euros de chiffre d’affaires en 2012), la recherche ahistoriquement fait appel à la simulation numérique. Il y avingt-cinq ans, le groupe comptait déjà des spécialistes ducalcul ou des logiciels capables de modéliser les flammesdes fours de ses clients verriers. Aujourd’hui, «la simulationnumérique et la modélisation font partie des neuf compé-tences clés que nous avons identifiées en R&D, constateRégis Réau, le directeur scientifique senior du groupe.Associées à d’autres compétences comme le génie desprocédés, elles sont devenues un outil quasi indispensabledans le développement de nos projets».

Une productionmoins énergivoreSpécialistes de la dynamique des fluides ou de la modé-lisation moléculaire, pas moins de quarante chercheurs,en Europe et aux États-Unis, simulent à temps plein. Sanscompter une vingtaine de collaborations avec de grandscentres d’excellence à travers le monde, comme la chairesur l’oxycombustion, créée en 2012, avec Centrale Pariset le CNRS. Si la simulation est aussi stratégique pour Airliquide, c’est qu’elle optimise toutes ses activités (santé,industriel marchand, grande industrie et électronique) ettoutes les étapes de sa supply chain: de la production dugaz, en passant par le transport, jusqu’au stockage et à lalivraison des clients. Indispensable face à la globalisation del’industrie et aux contraintes en ressources, identifiées en

Le groupe français met de la simulation dans tousses projets. Et améliore ainsi les performances deses installations comme celles de ses clients.

ChimieairliquiDeoptimiselesressources

décembre par le PDG du groupe, Benoît Potier, comme l’unedes grandes tendances du marché de demain.La simulation est précieuse pour rendre la production degaz moins énergivore. Grâce à la mécanique des fluidesnumériques, les chercheurs ontmodélisé les phases de sépa-ration des gaz de l’air pour mieux contrôler les transferts dematières et turbulences causés par le passage de liquide envapeur. Couplée à un processus d’automatisation, la modé-lisation a réduit de 4% les dépenses d’énergie des usinesconcernées. La même démarche a été appliquée chez sesclients. «Nous apportons de la valeur à nos clients, insisteRégis Réau, en développant des solutions personnaliséesà la pointe de la technologie.» Chez les verriers, auxquelsle groupe fournit de l’oxygène et des brûleurs pour le fonc-tionnement des fours, la simulation permet d’étudier ladistribution des flux thermiques afin d’optimiser leur design.Dans la santé, secteur en forte croissance pour Air liquide, lasimulation booste l’innovation. Il y a quelques années, seschercheurs se sont penchés sur la manière dont les sprayspénètrent la structure bronchique, afin de favoriser la respira-

La simulationdes fours dereformagepermet dediminuer lesdépensesénergétiques.

le projetà suivre L’intégration en production d’outils de réalitéaugmentée à des fins de vérification de chantier.

de la journée», poursuit-il. L’investissement est important,mais DCNS ne communique aucun chiffre. Tout juste saura-t-on que sa rentabilité est excellente, notamment grâce auxéconomies sur les reprises en chantier.DCNS teste également des dispositifs de réalité augmen-tée sur la sixième Fremm en construction. Sur un quai, untronçon de navire. Dans la future buanderie, Brendan LeGallo, analyste métiers, transporte une valise baptiséeRapace. À l’intérieur, un rétroprojecteur couplé à une caméra,tous deux reliés à un ordinateur portable. Celui-ci chargela maquette numérique et projette dans la pièce le plande la buanderie afin de regarder si les pièces soudées surles cloisons sont au bon endroit. La plupart le sont. L’une

d’entre elles est décalée de quelques centimètres. «Lors del’inspection du chantier, le responsable de la productiondécidera s’il faut la déplacer ou si on peut la laisser en l’état.Si c’est le cas, l’idéal serait de pouvoir modifier ensuite lamaquette virtuelle», explique l’analystemétiers. Ce sera peut-être l’une des prochaines étapes. Après celle de convaincreles chefs d’équipe que l’outil fait gagner du temps. «C’estle même mouvement que nous avons opéré quand noussommes passés de la table à dessin à la CAO», se souvientYann Bouju. Une petite révolution. ❚❚ PaTRiCkDÉnieL

airliquide

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P our Alcatel-Lucent, la simulation numérique estune seconde nature. Le groupe la décline sur tousles tons au sein de ses Bell labs. «Près de 80%

de nos travaux passent par la modélisation,» affirme Jean-Luc Beylat, le président d’Alcatel-Lucent Bell Labs France.Alors, Alcatel-Lucent champion de la simulation? Sans aucundoute. L’équipementier télécoms la voit comme un moyend’innover, de réduire les coûts et les cycles d’innovation.Pour commencer, il sait modéliser l’ensemble des couchesd’un réseau de télécommunication (routage IP, transmissionoptique…) et chacun de ses éléments. Indispensable pourétudier le comportement des réseaux, optimiser leur confi-guration, tester les technologies… Ce sont les équipes derecherche des Bell labs, par essence multidisciplinaires, qui

Chez l’équipementier, les chercheurs simulent aussibien les réseaux que la propagation des ondes. Etc’est dans les Bell labs qu’ils conçoivent les logiciels.

RéseauxlamoDélisationaucœurD’alcatel-lucent

développent leurs propres outils demodélisation répondantà leurs besoins spécifiques. Ces labos travaillent autour detrois grands axes: la contrainte de la croissance du trafic etl’optimisation de l’information; l’analyse de l’utilisation deséquipements et du cloud; enfin, les composants, l’informa-tique quantique… C’est à ce type de travaux que les outilsconçus en interne servent en priorité. Mais pas seulement.Ils facilitent le travail des équipes de conception des produits,ou sont vendus à certains clients qui souhaitent pouvoirreconfigurer leur réseau.

Un support de l’innovationPour modéliser le trafic, Alcatel-Lucent injecte dans sescalculs l’imposante quantité de données qui provient del’utilisation de ses équipements. Cela permet de mieuxcerner les réactions des usagers lors de communicationslourdes, comme le visionnage d’une vidéo en streaming. Oud’étudier le comportement de petits capteurs de pressionqui n’envoient qu’une information toutes les heures, parexemple. Avec la croissance permanente du flux de donnéeset lamultiplication des usages, connaître le trafic est devenuun enjeu essentiel des télécoms.La simulation, en tant que support de l’innovation et desdéveloppements, donne parfois un avantage concurrentielà Alcatel-Lucent. Dans le domaine de l’optique, il s’enor-gueillit de sa capacité àmodéliser la propagation des ondes.«Nous ne sommes pas les seuls à travailler sur ce sujet,confie Jean-Luc Beylat, mais c’est grâce à cette compétenceque nous avons été les premiers à proposer du 100 Gbit/scohérent [ndlr : réseau optique très haut débit].» Le françaiss’aventure également du côté de la simulation thermique.«Les équipements de réseau suivent la loi deMoore, rappelleJean-Luc Beylat. Plus ils deviennent puissants, plus ils com-prennent de transistors et plus ils émettent de chaleur.» Or laconsommation d’énergie est une préoccupation majeure detout acteur économique. Et les opérateurs télécoms, clientsprivilégiés d’Alcatel-Lucent, n’échappent pas à la règle…Enfin, à l’instar de nombre d’industriels, l’équipementierapplique la simulation au prototypage et au test. Idéale, parexemple, pour expérimenter ses câbles optiques sous-marinsdestinés à de très longues distances avant de les déployerentre deux continents. ❚❚ eMManUeLLe DeLsoL

Étude de la propagation des ondes du réseau optique dans un quartier.en rouge, les zones où le trafic est le plus rapide.

tion de patients souffrant de problèmes respiratoires. «Nousavons reconstruit numériquement cette structure à partir dedonnées réelles, et essayé de comprendre la trajectoire desparticules de gaz pour simuler leur transport dans les voiesaériennes, raconte Régis Réau. Nous avons découvert quel’utilisation d’unmélange d’oxygène et d’hélium, plus légeret visqueux que l’air, permettait de respirer plus facilement.»Un saut technologique confirmé par des tests in vitro et in

silico. Prochain défi? Le big data. Après s’être doté d’un nou-veau calculateur sur son centre de recherche francilien desLoges-en-Josas, il entend se rapprocher de voisins commele CEA… ❚❚ GaëLLe FLeiToUR

le projetà suivre au cœur du consortiumParis-saclay efficacitéénergétique, air liquide et ses partenaires imaginent les transfertsde flux énergétiques entre l’usine du futur et son écosystème.

le projetà suivre alcatel-Lucent continue de travaillersur la propagation des ondes dans les réseaux optiquespour le très haut débit fixe etmobile.a

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25

L’INNOVATION COMMENCE PAR UNE RENCONTRE

HIG

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www.hightechlabs.fr

Le laboratoire d’idées de Sogeti High Tech.Culture de l’innovation : l’innovation est une valeur essentielle au cœur de la stratégie de Sogeti High Tech. Soutenue par une politiquede propriété intellectuelle, elle permet de répondre aux exigences de performance et de compétitivité des plus grands groupes industriels.

Projets R&D et incubation : sécurisation de plateformes, modélisation de systèmesmulti-agents coopératifs, simulation et réalité virtuelle :les ingénieurs de Sogeti High Tech imaginent et développent des solutions adaptées aux évolutions du marché.

Open-innovation : avec les industriels, les laboratoires, les pôles de compétitivité, les écoles… High Tech Labs suscite et catalyse lesréflexions, régulièrement partagées lors des rencontres Connect’ID de Sogeti High Tech.

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enquêtesspécial simulation

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Trompe-l’œil, les images de la simulation? Pour le néophyte, parfois.Pour l’expert, ces visualisations numériques de phénomènes physiquesou biologiques valent souvent plus de mille mots.paraurélie barbaux

portfolio

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pas si fragilecette enveloppetransparente !il s’agit d’unecapside, coquetrès défensivequi entoure leViH. (Medicalschool ofHarvard)

Finalement, le câblagenerveux du cerveauserait très ordonné.(université del’illinois)

Ceci n’est pas le détail d’un jardinmais des vues d’un liposome, dit «pégylé» et «décoré». (CNrS)

l’uSiNeNouVelle i supplémentaun°3372 i 10 avril 2014

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enquêtesspécial simulation

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Ceci est bien…une étuded’aquaplanagede pneu sur routemouillée. (MSCSoftware)

Ceci n’est pas un plumeau,mais les trajectoires d’électronsdans un champmagnétiquevariable dans l’espace,ou lentille magnétique. (Comsol)

Qu’importe la silhouette, c’est l’analyse comparée des champs de vitesse d’écoulements à proximité de la surfacedes lunettes et des bonnets ancienne et nouvelle générations qui compte. (Speedo/ansys)

Voilà comment se distribuentdans unmoteur électriquela température, produite parle courant alternatif dans labobine de stator, et les courantsinduits dans l’élément d’ancrageet le rotor. (Comsol)

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Ces vaguesd’ondulations, appelées

«corrugations»,correspondent aux vues

internes et externesdu prolongement isométrique

d’un tore carré plat en 3Ddans l’espace ambiant.

on les appelle aussi« fractales lisses». (CNrS)

l’uSiNeNouVelle i supplémentaun°3372 i 10 avril 2014

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La plupart des industriels cherchent désormaisà limiter l’impact environnemental de leurs processde fabrication. Un superbe terrain de jeu pourla simulation numérique.par Jean-François prevérauD

production

passerlesprocessauvert

C ontraints par des réglementations ou des questionsde coûts, les industriels tentent de limiter l’impactenvironnemental de leurs process de fabrication.

Pour utiliser le minimum de matières premières, limiter lesrebuts, réduire les consommations d’énergie et de fluides oulimiter l’usure des outils, en tenant compte de paramètres telsque la climatisation, l’éclairage des locaux ou la dispersiondes odeurs et des poussières, ils se tournent de plus en plusvers la simulation.En commençant au cœur de l’atelier. Là, les outils deManufacturing executive system (MES) permettent de col-lecter les véritables données de production et d’alimenterles modèles numériques servant de base à la simulation.Cela aide à comprendre les process et à expliquer les défautsponctuels. Le fabricant italien Tenaris a ainsi réduit de 15 °Cla température de coulée de ses corps de vannes pétrolières,entraînant une baisse de 15% de sa consommation enénergie de chauffage et en eau.Les logiciels d’usine numériques servent également àréduire la consommation. «L’utilisation de la maquettenumérique d’une ligne de production permet de connaîtrerapidement tous les paramètres du process et de procéder àune simulation permettant une optimisation globale plutôtqu’une juxtaposition ponctuelle d’optimisations», estimeHugues Drion, le responsable de la division manufacturingd’Autodesk France. Un grand constructeur automobileallemand utilise ainsi un logiciel de simulation de lignesrobotisées pour optimiser la consommation de ses lignes

Auto

form

de ferrage. «En ajustant la vitesse des robots pour qu’ilsfinissent tous leur tâche en même temps, nous avons puréduire la vitesse de rotation de la plupart desmoteurs et faireainsi chuter la consommation globale de la ligne de 50%»,explique Hadrien Szigeti, analyste stratégique chez Delmia.

une démarche économique viableDans des domaines comme l’emboutissage, la forge ou lafonderie, la simulation met au point et améliore les processde fabrication enmême temps que les pièces à réaliser. «Pourgarantir leurs objectifs de réduction d’émissions de CO2,tous les constructeurs automobiles allègent leurs véhicules.Mais pour garantir la sécurité, ils utilisent des aciers plusperformants à haute limite d’élasticité (HLE), voire à trèshaute limite d’élasticité (THLE)», constate Vincent Chaillou,le directeur opérationnel d’ESI Group. Et ils profitent de leurshautes caractéristiques pour créer des pièces «hardies».Il faut alors procéder à de l’emboutissage à chaud, ce quichange la nature cristalline dumatériau. «On sort des zonesde travail habituelles et la simulation prédictive est la seulevoie économiquement viable pour comprendre le comporte-ment de lamatière, afin de développer ces nouveaux processde production», avance encore Vincent Chaillou. Notons quel’Europe est en pointe sur ces sujets grâce à des constructeurscomme Peugeot ou Volkswagen.Dans la fonderie, où le taux de rebut sur les pièces les

17%d’allégement,

soit 500grammes.épaisseur1,2 mm

épaisseur1 mm

acier micro-allié

Des gains possibles sur…

● L’énergie● l’éclairage● le chauffage et la ventilation● les fluides (eau, air, gaz…)● lesmatières premières

● les taux de rebutdes pièces finales

● les odeurs et les poussières● la maintenance● le démantèlement

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vers des bâtimentsplus économes

compte du bâtiment où il est installé, car le rayonnementsolaire peut produire des effets indésirables sur celui-ci.«C’est ce qu’a fait AstonMartin grâce aux outils de simula-tion d’Autodesk, afin de garantir une température identiquesur deux panneaux d’aluminium lors de leur soudure,alors qu’ils proviennent de machines différentes», expliqueHugues Drion. Une utilisation de la simulation globalepratiquée par Magna Steyr dans l’usine où il assemble desMini. Son objectif : réduire ses coûts de 1% par an, ce quireprésente 40 millions d’euros. «Les outils de simulationd’emboutissage servent à définir le process idéal pour obtenirla meilleure pièce possible en minimisant les coûts. Maisn’oublions pas que lamatière représente un peu plus de 80%du prix de la pièce, c’est pourquoi les industriels travaillentsur l’optimisation des flans et la réduction des rebuts, avantde songer à réduire le coût énergétique», constate quant à luiVincent Ferragu, le directeur d’AutoFormEngineering France.

optimisation énergétiqueCertes, pour le moment, les outils de simulation dumarché n’intègrent pas directement de fonction d’optimi-sation énergétique. «Mais Comsol Multiphysics comporteun module d’optimisation générique, véritable boîte à outilsque nos clients peuvent utiliser pour faire de l’optimisationénergétique. L’un d’entre eux s’en est notamment servipour augmenter le débit d’un ventilateur sans changer lavitesse de rotation de son moteur, en jouant sur la géomé-trie des pales. Il suffit de maximiser une fonction objectif»,explique Jean-Marc Petit, le responsable de Comsol France.Une approche générique que confirme Jean-Pierre Roux, ledirecteur des ventes d’Altair France: «Nos solutions peuventêtre employées à des fins d’optimisation énergétique desprocess de production, pour peu que les industriels disposentdes bases de données adéquates.» Elles restent malheureu-sement encore trop souvent à construire. ❚❚

allégersansfragiliserpour réduire les émissions de Co2, les constructeursautomobiles allègent leurs véhicules. La simulation les yaide, comme ici pour valider le changement dematériau etd’épaisseur d’un piedmilieu de caisse, ainsi que le processd’emboutissage associé. unmatériau plus résistant pourraêtremoins épais sans pour autant fragiliser la pièce.

plus complexes (culasses, carters demoteur d’hélicoptère…)peut atteindre 15%, la simulation permettrait de ramenerrapidement ce taux à moins de 5%. Une démarche écono-mique et verte. Le recyclage des rebuts entraînant aussi unsurcoût énergétique.La simulation d’usinage par enlèvement de matière estégalement essentielle pour réduire les temps de cycles etgarantir la sécurité de l’usinage. «Mais de plus en plus declients s’intéressent à la réduction de l’énergie nécessaire.C’est d’ailleurs la problématique du projet Angel, que nousportons au sein du pôle Systematic avec l’aide d’industrielscommeAirbus,Messier-Bugatti-Dowty et Snecma», constateGilles Battier, le PDG de Spring Technologies.Les outils de simulation sont aussi au cœur de métierscomme l’emballage. «L’un de nos clients a utilisé la simula-tion pour remplacer le PET de ses bouteilles par un matériaubiodégradable à base d’amidon demaïs. Il a ainsi pu dimen-sionner la bouteille, mais aussi mettre au point le processde soufflage/extrusion garantissant un bon équilibre entrequantité de matières, qualité du produit, durée de vie desmoules, réduction des rebuts et diminution de l’énergienécessaire», explique Antoine Langlois, le directeur tech-nique de MSC Software France.Mais pour tirer lemeilleur parti de lamaquette numérique,c’est tout l’environnement qu’il faut simuler. Il est mêmepréférable de procéder à l’optimisation du process en tenant

acier ultra-hauterésistance

L’usinenouveLLe i supplémentAun°3372 i 10 Avril 2014

Dans le domaine du bâtiment,l’accent est pour lemomentmis sur l’augmentation desperformances énergétiquesdes ouvrages construits. «Celainflue fortement sur nos outilsetméthodologies de travail.l’utilisation de lamaquettenumérique 3D permet d’êtrecohérent et de ne rien oublier,tout en étant capable de fairetravailler tous les intervenantsen parallèle et non plusséquentiellement, explique

l’architecte thierry rampillondu cabinet Cr&on. Cela nouspermet de chiffrer dès le débutle projet en garantissant unniveau de performances et denous y tenir. il est clair que celanous permettra aussi, dansun futur relativement proche,de simuler et d’optimiserle coût environnemental de laconstruction. nousmaîtrisonsdéjàmieux les quantités dematériaux àmettre enœuvre,ce qui limite les déchets. » ❚❚

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Recherche

DesprojetsXXlLa simulation prend une part grandissante dansles grands programmes scientifiques. Qu’il s’agissed’élucider des questions théoriques ou de répondreà des problèmes de santé publique.PaRThieRRy Lucas

O n se demande parfois s’il est indispensable de fairetourner des ordinateurs surpuissants pour savoirs’il pleuvra demain. Mais quand il s’agit de prévoir

le réchauffement climatique, la hausse des températureset ses effets à l’échelle mondiale pour le prochain siècle,alors plus personne, ou presque, n’en conteste l’utilité.L’ampleur et l’enjeu de la tâche justifient que l’on mobilisepour cela les supercalculateurs les plus puissants de laplanète et des centaines de chercheurs. Mais la météo etle climat ne sont plus les seuls domaines emblématiquesdu calcul scientifique massif. De nombreuses disciplinessont consommatrices de supercalcul, souvent parce que lasimulation permet la pratique d’expérimentations virtuellesdifficiles ou impossibles à réaliser autrement. C’est le cas duprojet européenHumain brain, qui compte sur la simulationpour optimiser le traitement des maladies neurologiques.La préparation du futur réacteur de fusion nucléaire Iterexige des physiciens une pratique intensive de la physiquevirtuelle en attendant le prototype. Enfin, les astrophysiciensqui veulent comprendre la structure de l’univers à l’aide de lasimulation ne travaillent pas directement pour notre confortfutur. En revanche, leurs travaux contribuent à définir lessupercalculateurs de demain. ❚❚

C’est le projet de simulation le plus ambitieux jamaislancé. Celui de reproduire, sur ordinateur, la complexitéd’un cerveau humain. Il fait partie d’Humain brain project(HBP), doté de 1 milliard d’euros sur dix ans, et codirigépar l’École polythechnique fédérale de Lausanne (EPFL) etl’université de Heidelberg (Allemagne). Objectif : élucider lefonctionnement de notre cerveau. Avec des retombées atten-dues en neurosciences, enmédecine et en informatique. Lesexpériences «in silico» [ndlr: «dans la silice», soit aumoyendemodèles informatiques] permettront aux neurochercheursd’approfondir leurs connaissances des fonctions cérébrales.

comprenDre l’activitécérébrale

Lesmédecins pourront, eux, utiliser des simulations du cer-veau pour reconstituer desmaladies, rechercher leur origineet définir le bon traitement. Quant à l’informatique, qui joueun rôle clé dans ces études, elle devrait profiter de nouvellesarchitectures d’ordinateurs qui rendraient alors réalisablesdes tâches aujourd’hui impossibles.Pour tous ces bénéfices, le consortiumHBP (80 partenaires)a lancé plusieurs sous-projets en parallèle. Le premierconsiste à construire pas à pas, en intégrant en continu lesdonnées issues de la recherche en biologie, une plate-formelogicielle qui simule la structure et le comportement d’uncerveau, en recourant aux supercalculateurs. Le but estd’identifier les architectures neuronales responsables defonctions spécifiques et de faire le lien entre cesmécanismeset certaines maladies neurologiques ou psychiatriques. LeHBP ne part pas de zéro. Il marche sur les pas du projetBlue brain, mené par l’EPFL, qui a effectué en 2012 une si-mulation portant sur un million de neurones et un milliardde synapses. Soit l’équivalent du cerveau… d’une abeille.Le nouveau programme se fixe pour premier objectif le d

eusco

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Des labosà lapointeInstitute for advanced simulation, Jülich (Allemagne)School of computer science, université deManchester (Royaume-Uni)Kirchhoff-Institut für physik, université de Heidelberg (Allemagne)

un cube de 93milliards d’années-lumière de côté pour voir le big bang.

86milliards !c’est lenombrede neuronesqu’il faudramodéliser pourreproduirele cerveauhumain.

cerveau d’un rat, soit 21 millions de neurones! Quant aucerveau humain, ce sont 86 milliards de neurones qu’ilfaudra modéliser… Dans un premier temps, Le HBP devraitutiliser les supercalculateurs disponibles en Europe, avantde bâtir ses propresmoyens de calcul au centre de recherchede Jülich (Allemagne) : 50 petaflops pour 2017-2018, puisune machine exaflops (soit 1000 petaflops) prévue pour2021-2022. Dernière ambition du projet, la conception et laconstruction de deux ordinateurs dits «neuromorphiques».Des machines dont le fonctionnement ne ressemblera enrien à celui des calculateurs traditionnels, qui sont com-posés de processeurs et de mémoires, car elles tenterontde reproduire physiquement les réseaux de neurones ducerveau humain. ❚❚

Difficile d’aller plus loin. Le Dark energy universe simu-lation-Full universe run (Deus-FUR), projet piloté par lelaboratoire univers et théories (Luth), de l’Observatoire deParis, a simulé tout l’univers observable, du big bang à nosjours. Et les chiffres laissent rêveur. Les simulations réali-sées mettaient en jeu 550 milliards de particules, chacunedotée d’une masse équivalente à celle de notre Galaxie,dans un cube de 93 milliards d’années-lumière de côté. Ceprogramme tente de répondre à une question fondamentalede la cosmologie: pourquoi l’expansion de l’univers est-elleen accélération? Selon cette théorie, 95% de l’univers estconstitué de composants invisibles, la matière et l’énergienoires. Et c’est cette mystérieuse énergie noire qui seraitresponsable de l’expansion accélérée. Comprendre ce qu’elleest permettrait d’appréhender la structure de l’univers (larépartition des galaxies), et inversement.Trois simulations ont été réalisées, selon trois modèlesdifférents, sur le supercalculateur Curie du CEA. Au total,1,5 petaoctet de données a été engendré, qu’il s’agit mainte-nant d’interpréter. Les chercheurs veulent savoir quel est lemeilleur modèle pour la compréhension de l’énergie noire,et quelles seraient les conséquences d’une telle découvertesur la théorie cosmologique. D’autres laboratoires avaientauparavant effectué ce type de simulation, à plus petiteéchelle, notamment au Korea institute for advanced studyet à l’institut Max Planck d’astrophysique (Allemagne). AuxÉtats-Unis, six laboratoires, pilotés par l’Argonne nationallaboratory, ont lancé, en mars 2013, un programme detrois ans qui traque l’énergie noire à l’aide de simulationssur les plus puissants ordinateurs disponibles.

Déchiffrer la structureDe l’univers

L’usinenouveLLe i supplémentaun°3372 i 10 avril 2014

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Le cMiP5 permet de tester et de comparer les logiciels de prévision climatique.

World

clim

ateres

earch

progr

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continents, les océans, la banquise… et, bien sûr, l’humainqui engendre des gaz à effet de serre et des aérosols. Cesmodèles sont ensuite assemblés, couplés, et assistés par dessupercalculateurs pour produire des données sur l’évolutiondes températures, des précipitations… Si le développementdes différents modèles se fait en ordre dispersé (il en existeune quarantaine), les expertsmondiaux se sont en revanchemis d’accord sur la façon de les tester. Ainsi, le programmeCoupled model intercomparison project (CMIP5) a permisde comparer les résultats obtenus par tous ces modèles surles mêmes «exercices» de simulation.Deux systèmes climatiques sont développés en parallèledans l’Hexagone, l’un parMétéo France, l’autre par l’InstitutPierre-Simon Laplace (IPSL). L’objectif général des tests com-paratifs est d’améliorer la fiabilité des résultats de simulationet, à terme, de faire converger les différents modèles. C’estce qui se passe aujourd’hui pour les phénomènes d’écou-lements, régis par les lois de la mécanique des fluides. Lesdifficultés –et les divergences– sont bien plus vives quandil s’agit de modéliser d’autres éléments (transfert radiatif,chimie…) ou pour ce qui se produit à plus petite échelle, endessous du maillage choisi pour les calculs, qui découpel’atmosphère en unités de quelques dizaines de kilomètresde côté. «Les testsmenés dans le cadre du CMIP permettentd’écarter certains modèles jugés non pertinents pour tel outel phénomène, mais pas de définir le meilleur», préciseJean-Louis Dufresne, responsable du centre de modélisa-tion du climat de l’IPSL. Toutes les équipes s’efforcent deréduire l’incertitude qui pèse sur le résultat des simulations,même si la nature chaotique du climat empêche de l’éliminercomplètement. Par ailleurs, les programmes de simulationeux-mêmes doivent être actualisés pour exploiter les nou-velles architectures d’ordinateursmassivement parallèles. ❚❚

Des labosà lapointeInstitut Pierre-Simon Laplace (France)Max Planck institut fürmeteorologie (Allemagne)Hadley centre for climate prediction and research (Royaume-Uni)National center for atmospheric research (États-Unis)Geophysical fluid dynamics laboratory, Princeton (États-Unis)

Toutes les équipes s’efforcent d’optimiser les codes decalcul pour les adapter aux ordinateurs qui vont les exécuter.«Dans des projets comme ceux-là, ce n’est pas seulementun problème de puissance de calcul : il faut simultanémentse préoccuper de la gestion de la mémoire et des données,des entrées-sorties…», explique Jean-Michel Alimi, direc-teur de recherche au CNRS, et responsable de Deus. Mais ildevient très difficile de faire évoluer un code quand on veutchanger la modélisation physique, ou quand il faut adapterle programme aux nouvelles architectures des supercalcu-lateurs. Aujourd’hui, les chercheurs doivent concevoir descodes en prenant garde à bien séparer la modélisation desaspects proprement informatiques. Par ailleurs, les résultats

de ces simulations doivent également servir aux projetsd’observation spatiale, eux aussi en quête de l’énergie noire.Qu’ils soientmenés à partir de télescopes terrestres, commela Dark energy survey, programme international lancé enseptembre 2013 au Chili, ou à partir de satellites, commele projet Euclid de l’Agence spatiale européenne, dont lelancement est prévu en 2020 par une fusée Soyouz. ❚❚

En septembre 2013, le premier volet du cinquième rapportdu Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolutiondu climat (Giec) a confirmé les prévisions sur le réchauffe-ment climatique jusqu’à la fin du siècle. Selon les scénariosenvisagés, la hausse de température pourrait atteindre5 °C, tandis que le niveau des océans monterait de 25 cmà presque 1mètre (pour la vision pessimiste). L’impactsignificatif des activités humaines sur cette évolution a étéconfirmé. Ces conclusions s’appuient sur les mesures etobservations réalisées dans lemonde. Et sur des simulationsnumériques à l’échelle de la planète. Le défi est mondial, etune vingtaine de groupes de recherche tentent de le relever.Les chercheursmettent au point desmodèles physiques desdifférents éléments agissant sur le climat: l’atmosphère, les

prévoir le changementclimatique

Des labosà lapointeLaboratoire univers et théories (Luth), Observatoire de Paris (France)Argonne national laboratory, département de l’Énergie (États-Unis)Max Planck Institut für astrophysik (Allemagne)

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Les modèLes matériaux non Linéairesdans La conception automobile avecZ-set software

Les cycles thermiques appliqués aux culasses des moteurs automobiles génèrent unchamp de déformation plastique qui peut conduire à l’amorçage de fissures.

Renault etmontupet ont coopéré avec Z-set software pour créer des outilsde modélisation robustes, permettant de prévoir leur apparition, le chemin depropagation et l’arrêt éventuel, en présence du chargement thermomécaniquecyclique. Ils sont utilisés au stade de la conception industrielle.

Mieux connaître les efforts et les déformations au sein des pièces critiques est une nécessité pour les équipementierset les constructeurs. Les géants de l’industrie automobilemontupet et Renault ont fait le choix du code Z-set pourleurs applications avancées, lorsque le matériau s’endommage, vieillit ou se fissure.

Le process de “downsizing” conduit à des élévations de température de fonctionnement desmoteurs.

Les systèmes d’échappement deviennent donc des pièces sensibles pour lesquelles il fautmaintenant réaliser des prévisions prenant en compte les déformations plastiques. La duréede vie est estimée à l’aide de modèles spécialisés qui prennent en compte de façon simultanéel’effet des cycles et des temps de maintien.

Les alliages d’aluminium constituant les culasses subissent en fonctionnement destempératures proches de leurs conditions de traitement thermique initial.

Les évolutions de la microstructure qui en résultent se manifestent par desdiminutions très sensibles de la résistance mécanique (jusqu’à 50% de variation).Ce processus est pris en compte dans des modèles thermo-métallurgiques, quiimpactent le comportement mécanique non linéaire.

www.zset-software.com Z-set est développé au centre des matériaux mines paristech et à l’oneRa.

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enquêtesspécial simulation

36

cea;u

iuc

Une avancée dans la recherche contre le sida ! La structurede la capside, la coque qui protège le matériel génétique duvirus et s’ouvre pour le libérer dans une cellule, a pu êtreentièrement reproduite par des chercheurs de l’université del’Illinois à Urbana-Champaign (UIUC). Un assemblage de1300 protéines, représentant 64 millions d’atomes. C’estl’une des plus grandes simulations réalisées au niveau desatomes. De cette capside, on ne connaissait que des parties,observées expérimentalement par tomographie, résonancemagnétique nucléaire… Élucider sa structure complète doitservir àmieux comprendre lesmécanismes d’action du viruset à élaborer de nouvelles techniques pour le combattre.Pour cela, les chercheurs ont dû attendre la génération desupercalculateurs dont la puissance dépasse le petaflops,tel l’ordinateur Blue waters du National center for super-computing applications (NCSA), l’un des plus puissants aumonde. L’équipe américaine a conçu une simulation quis’appuie sur les données expérimentales des composants dela capside pour construire le modèle complet. En effet, lesétudes précédentes avaient révélé que les protéines s’orga-

La structurechimiquede la capsidedu hiv a étédéterminéeà l’aide del’ordinateurBlue waters.

simuler les turbulences du plasma est possible avec le calculateur curie.

Unmélange de noyaux atomiques et d’électrons, dont la tem-pérature atteint 150 millions de degrés au centre et qui estparcouru de tourbillons… Plusieurs équipes dans le mondetravaillent à modéliser le comportement de ce milieu horsnorme, à savoir un plasma, dont l’obtention est nécessairepour déclencher la réaction de fusion entre le deutérium etle tritium, deux isotopes de l’hydrogène. Cette réaction sera

nisaient sous forme d’hexagones et de pentagones. Mais ilrestait à déterminer la structure optimale pour la constructiond’une coque fermée. Aujourd’hui, notamment pour repro-duire des phénomènes dynamiques tels que la formationou le comportement de la capside, les chercheurs vont avoirbesoin d’une plus grande puissance de calcul. Jusqu’ici, ilsn’ont simulé que des périodes de quelques microsecondes,alors que les processus biologiques concernés se déroulentsur plusieurs secondes, voire des minutes… ❚❚

Des labosà lapointeDépartement de physique, université UIUC, (États-Unis)Département de biologie structurale, université de Pittsburgh,avec le National center for supercomputing applications (États-Unis)

Des labosà lapointecea-inria (France)École polytechnique fédérale de Lausanne (Suisse)Max Planck institute für plasmaphysik (Allemagne)

peut-être la source d’une énergie potentiellement infinie àpartir de 2040. Iter, le futur réacteur expérimental de fusionnucléaire, est déjà en construction à Cadarache (Bouches-du-Rhône). Mais les physiciens doivent apprendre à maîtriserle milieu de la réaction. Les expérimentations sur les toka-maks, machines où sont confinés les plasmas, ont permisde progresser. Car la simulation a son rôle à jouer dans ledémarrage d’Iter, dont l’enceinte à plasma sera dix fois plusgrande que celle du plus grand tokamak existant. En 2012,l’équipe française du CEA-Inria, qui utilise le code de calculGysela, a reproduit des turbulences dans le plasma. Un pointclé pour l’efficacité du futur réacteur, car ces turbulencessont responsables des pertes de chaleur entre le cœur et lesbords dumagma. Une première, réalisée au prix de certainessimplifications, et sur un volume de plasma 25 fois inférieurà celui d’Iter ! Les calculs ont été effectués sur l’ordinateurCurie du Très grand centre de calcul du CEA, à Bruyères-le-Châtel. La recherche porte désormais sur lamodélisation dela physique du plasma et sur l’utilisation optimale des archi-tectures parallèles des superordinateurs. But: s’affranchir dessimplifications et modéliser l’ensemble de l’enceinte d’Iter.Des simulations réalisées sur 450000 cœurs de processeurssont déjà programmées. Les machines prévues pour 2020devraient, elles, en aligner plus de 1 million. ❚❚

éluciDer une composanteDu virus hiv

préparer l’énergieDu futur

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37

Platinum Sponsors Gold Sponsors

Silver Sponsors

Inscription/Registration www.teratec.eu

Forum

1&2juillet/july 2014École PolytechniquePalaiseau - France

HPC & SIMULATIONLe rendez-vous international

The International Meeting

2014

SIMULER POUR INNOVERINNOVATION BY SIMULATION

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Le programme Iter [lire page 32]intègre la simulation optique physiquedéveloppée par Optis. Le plasma,qui circule au cœur de l’enceintede confinementmagnétique en formed’anneau, est unmélange de deuxisotopes de l’hydrogène (deutérium ettritium), chauffé à des températures

supérieures à 150millions de degrés.Ce plasma émet une lumière trèsintense, comparable à celle du soleil.Elle est réfléchie par la paroi internepour éviter toute absorption quiengendrerait la fusion de l’enveloppe.Afin de contrôler cette réaction,des caméras optiquesmesurent deux

informations : la lumière émisepar le plasma lui-même, à savoirle signal, et le reflet du plasma dansles parois, appelé « le bruit».La simulation permet de scinderaisément ces deux informationset demieux comprendre quel serale comportement du plasma. ❚❚

Maîtriser l’énergie lumineuse d’Iter

BentleyMotors utilise les logiciels d’Optis dans son centrede réalité virtuelle pour créer en temps réel une chaînede validation du poste de conduite de ses voitures d’exception.

D ans notre société hypermédiatisée, le pouvoir del’image est prépondérant. Une belle image peutfaire basculer la décision en faveur d’un projet et

en condamner un autre, pourtant tout aussi valable. «Encorefaut-il que cette image corresponde à la réalité. Avec noslogiciels, nous ne cherchons pas à faire du beau mais à fairedu vrai», explique JacquesDelacour, le fondateur et présidentd’Optis, éditeur toulonnais spécialisé dans la simulationoptique. Quand nous créons des images de synthèse, nousnous engageons sur le rendu réel desmatériaux choisis dansles conditions d’éclairage fixées. Dans la réalité, on verra lascène telle qu’à l’écran. C’est ce qui fait notre succès.»Ces simulations très proches de la réalité proviennentde près de trois décennies de recherches, initiées parJacques Delacour. Elles s’articulent autour d’un postulatsimple: la lumière, c’est de l’énergie et non une simple propa-gation géométrique de rayons. Pour produire une simulationréaliste, il faut donc prendre en compte la physique, à la foispour la lumière et pour les surfaces des objets qu’elle éclaire.Jacques Delacour a commencé par développer des algo-rithmes dédiés à la simulation de rayonnements par desméthodes de Monte-Carlo [ndlr : le calcul d’une valeurnumérique à l’aide de techniques probabilistes]. Mais ils’est rapidement focalisé sur l’étude de l’énergie lumineuse

OptIs

enquêtes

La PME française conçoit des outils de simulationoptique qui tiennent compte de la physiquede la lumière et de la surface des matériaux.par Jean-FrançOIs prevéraud

success-story

Optis, l’hyperréaliste

dans les systèmes optiques. En termes de rayonnement etde spectre, et en intégrant le comportement des surfacesqui renvoient cette énergie. Pour cela, il s’est appuyé surla fonction de distribution de la réflectance bidirectionnelle(BRDF), qui décrit l’apparence d’un matériau par son inte-raction avec la lumière en chacun des points de sa surface.Une notion d’énergie que les autres éditeurs de simulationn’utilisent pas afin de simplifier les calculs.Cette interaction de la lumière avec la matière a poussé lesingénieurs d’Optis à s’intéresser à la modélisation géomé-trique des objets, donc à la CAO, puis à la création d’imagesde synthèse pour valider les résultats de simulation. C’estainsi que le logiciel Speos a été lancé sur lemarché en 1994.

prédiction par tranches d’âgeL’étude de l’énergie de la lumière a également permis dedévelopper un modèle de la vision humaine. Optis a reprisles abaques d’Yves Le Grand qui prédisent, en fonction de laquantité d’énergie dans un spectre, ce que l’œil humain vavoir et selon quel degré de sensibilité, et y a ajouté une couchede perception visuelle qui donne la luminance spectralede l’image. «L’œil est sensible à cette grandeur. En fonctiondu spectre du pixel dans l’image et de son niveau d’énergie,ainsi que de l’âge du spectateur, vous avez des éblouis-

spécial simulatiOn

Page 39: Les champions de la simulation

39

sements qui modifient la perception d’un objet, expliqueJacques Delacour. Dans l’automobile, par exemple, cela sertà prédire, par tranches d’âge, la visibilité et la lisibilité del’information lumineuse en fonction de sa typographie, desa couleur et de son niveau d’éclairement ou à déterminerla gêne créée par un reflet.»Des technologies qui, depuis 2005, sont au cœur de pro-grammesdeR&Dde l’entreprise en partenariat avec plusieurspôles de compétitivité. Ainsi, Marvest, mené avec Mer Paca,est un simulateur de conduitemultisectoriel hyperréaliste quiévalue les réactions de l’utilisateur face à un éblouissementou à des conditionsmétéorologiques changeantes. Le second,Virtu’Art, soutenu par le pôle Pégase, EADS et Eurocopter,traite –à partir de la maquette numérique– un rendu visuelultraréaliste en temps réel dans un système immersif de réalitévirtuelle. Ces projets ont fait sortir la simulation en temps réelhyperréaliste du laboratoire et ont conduit Optis à développerune plate-forme industrielle fondée sur la technologie d’ani-mation de la start-up SimplySim, acquise en 2011.Cette orientation a boosté le développement de l’entreprise,passée de 40 à 120 personnes en cinq ans, essentiellementdes ingénieurs de R&D. L’industrie automobile représenteaujourd’hui plus de lamoitié de ses ventes. Tous les acteursdu secteur utilisent les logiciels d’Optis pour définir lesphares, les feux et les tableaux de bord de leurs véhicules.Tandis que les constructeurs de voitures haut de gamme s’enservent pour valider la qualité perçue, notamment au niveaudes jeux d’ouvrants sur la carrosserie, qui varie suivant lecoloris de peinture retenu.

du réaliste au réelDans ce domaine, Optis a fait l’acquisition fin 2013 del’éditeur britannique Icona Solutions et de son logicielAesthetica. Celui-ci est spécialisé dans la visualisation 3Dde l’impact des tolérances de fabrication sur la qualité perçuedes assemblages du produit final. Il est utilisé par les plusgrands constructeurs automobiles (Nissan, GM Opel, Fiat,Chrysler, Porsche ou Bentley) pour vérifier, par exemple, lesjeux d’ouvrants de leurs véhicules, facteur déterminant dansla décision d’achat d’une automobile. Grâce à son intégrationdans l’offre d’Optis, la maîtrise du comportement physiquede la lumière et desmatériaux aboutit non pas à des imagesréalistes, mais à des images réelles demodèles 3D bougeanten temps réel dans des environnements complexes.Le secteur de l’électronique est aussi très demandeur. Ceslogiciels permettent une meilleure gestion de l’énergie desrétroéclairages des écrans plats, ou facilitent le passage auxLED. Du côté de l’industrie, l’US Air Force l’utilise pourvalider les lunettes anti-éblouissement de ses pilotes par deslasers parasites. Le CEA, quant à lui, les exploite pour définirce que verra le système de contrôle optique du phénomènede fusion au cœur d’Iter. «Ces applications vont sortir desbureaux d’études pour aller vers les utilisateurs finaux. Grâceà des configurateurs, elles permettront de valider visuelle-ment avec les clients les choix qu’ils auront faits parmi lesmultiples options qui leur sont proposées. Qu’il s’agissed’aéronefs, de voitures ou de salles de commandes», préditJacques Delacour. ❚❚

spécial simulatiOn

enquêtes

Le patron qui meten lumière vos projets

JacquesDelacOur,fondateur, présidentet CEO d’Optis

L’usInenOuveLLe I suppLémEntAun°3372 I 10 AvrIL 2014

Lumineux, rayonnant. Deuxqualificatifs qui décriventparfaitement Jacques Delacourlorsqu’il parle de sa passion, lasimulation optique physique.pourtant, c’est par le hasard desconcours que ce fils d’ingénieur,qui voulait faire supélec, a intégrél’école supérieure d’optique deparis, en 1985. surpris par lapauvreté des logiciels d’optiqueexistants, il conçoit dans sachambre d’étudiant –entre laconstruction de synthétiseurs,de harpes laser et autres tablesdemixage– des algorithmesplus performants pour le suivide la propagation des rayonslumineux dans les lentilles. untravail poursuivi dans le cadred’une junior-entreprise qui étudiepour le compte de Crouzet,un fabricant d’automatismes,le flux lumineux reçu parun capteur à fibre optique avecplusieurs émetteurs et un seulrécepteur. Jacques Delacours’intéresse alors à la photométried’énergie qui quantifie l’énergielumineuse émise par une source,analyse son transport à traversun système optique et évaluele flux collecté par un capteur.Entrepreneur dans l’âme, il crée

Optis dès sa sortie de l’école,en 1989, pour commercialiserle fruit de ses premiers travauxsur l’énergie lumineuse dans lessystèmes optiques. La lumièreinteragissant avec les objets,l’ingénieur franchit rapidementle pas entre le transport dephotons et l’image de synthèsequ’il conçoit comme devant êtrela représentation exacte du refletde la lumière sur un objet en 3D.Et cela en tenant compte à la foisdes caractéristiques physiquesde la lumière (rayonnement,spectre…) et des surfacesqu’elle impacte (réflectance…).Des travaux qui ont aboutiau logiciel de simulationlumineuse speos, en 1994,et à son intégration auxprincipaux outils de CAOdumarché. passionné par larecherche, Jacques Delacourreste au cœur de la technologied’Optis. son charisme, sasimplicité, son ouverture d’espritet les valeurs humaines qu’ilvéhicule lui valent le respect deses équipes. D’autant plus quece passionné d’automobilesanciennes et pilote d’avion à sesheures sait déléguer et faireconfiance à ses collaborateurs. ❚❚

entrepreneur dans l’âme, cet ingénieur a développédes logiciels de calcul photométrique, puis les aintégrés aux outils de la CaO. Ils sont aujourd’huipartout où il faut évaluer la perception et le confortvisuel d’une interface homme–machine.

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L a simulation numérique? Ce n’est pas pour nous!» Pourbeaucoup d’entreprises petites ou moyennes, le calculintensif est synonyme de logiciels trop complexes et de

superordinateurs hors de prix, que seuls les grands groupesont les moyens de se payer et de maîtriser. La simulation,qui permet d’accélérer et d’améliorer la conception d’unproduit, peut pourtant être un outil de compétitivité. Maispour une PME, c’est un engagement stratégique et exigeant.L’initiativeHPC-PME, pilotée par Genci, un organisme natio-nal de soutien au calcul intensif, l’institut de recherche Inria,et Bpifrance (ex-Oséo) pour le financement, veut faciliterl’accès des PME au calcul intensif, le «high performancecomputing» (HPC).

1 Définir sonprojet et iDentifier ses enjeuxDans un domaine souvent méconnu, les PME ont

besoin d’être aidées dans l’identification de leurs besoins ensimulation numérique, et enmoyens financiers, techniqueset humains qu’elles peuvent y engager. C’est la première

La simulation numérique peut être un outil decompétitivité pour les PME. Le passage n’est passimple, mais un réseau d’experts peut les y aider.parthierry Lucas

Bureau d’études

CommenttirerprofitduCaLCuLintensif

mission de l’initiative HPC-PME. «De l’entreprise débutanteà celle qui fait déjà du calcul sur une station de travail, lesprofils sont très variés. Notre rôle est aussi de les aiguillervers les bons interlocuteurs», indique Brigitte Duême, laresponsable à l’Inria d’HPC-PME. La mise en relation desentreprises avec les experts et les chercheurs devrait êtrefacilitée grâce au site web hpc-connexion.org. Même les«initiés» ont besoin de spécifier les enjeux de leur projet.Pour la société d’ingénierie franco-belge GDTech, quiemploie 130 personnes dont une trentaine en France, lasimulation fait déjà partie desmétiers de l’entreprise.Mais laPME veut bâtir une offreHPC indépendante des équipementsde calcul de ses clients (majoritairement dans l’aéronautique),en recourant aux centres de calculs nationaux et régionaux, età sesmoyens propres. L’enjeu stratégique étant de diversifierses activités hors de l’aéronautique. De son côté, HydrOcean,une PME elle-même éditrice d’un logiciel demécanique desfluides, souhaite adapter son code de calcul à des ordina-teurs parallèles à base de processeurs graphiques (GPU).«L’idée est de diviser par cinq ou dix le temps de calcul,et de convaincre ainsi de nouveaux clients, hors de notresecteur maritime d’origine», précise Erwan Jacquin, le pré-sident d’HydrOcean. Le recours au HPC peut aussi être liéà la création même de l’entreprise, comme pour Q-HedgeTechnologies, qui développe un site web de conseil financieret souhaite mettre à la disposition du grand public les outilsd’aide à la décision, jusqu’ici réservés aux spécialistes.

2 trouver Les compétencesLa définition du projet peut déboucher sur la collabora-

tion rémunérée d’un expert. En général, le passage auHPC setraduit par une embauche. Ainsi, Danielson Engineering, quia démarré la simulation depuis des années pour la concep-tion de moteurs d’automobiles, a recruté un informaticienafin, notamment, de créer des interfaces métiers facilementaccessibles aux ingénieurs de la maison. La parallélisationdu logiciel d’HydrOcean, qui compte pourtant 20 ingénieurs,a aussi demandé l’intégration d’un nouvel expert. Certainsfont également jouer le réseau d’HPC-PME. Comme Entares(groupe Nexio), éditeur d’un logiciel de simulation en élec-tromagnétisme (antennes, signature radar…). «HPC-PMEnous a ouvert des portes chez IBM et Fujitsu, pour faire destests sur des machines, chose autrement impossible pourune PME», souligne Frédéric Amoros-Routié, le président deNexio. Acquérir les compétences, c’est bien, les garder c’estencoremieux. «À la différence d’un grand groupe, on ne peutpas se permettre de perdre un ou deux experts !» s’exclameRui Da Silva, le responsable des calculs chez DanielsonEngineering. Alors, que faire? Éviter de concentrer l’expertised’un domaine sur une seule personne… et confier de vraiesresponsabilités aux experts pour qu’ils aient envie de rester.

3 choisir LematérieL et Le LogicieLFaut-il acheter un calculateur «musclé» ou louer de

la puissance? De multiples solutions sont possibles, enfonction des besoins et des moyens de la PME. «Attention, je

an-cla

udech

audy

enquêtesspéCiaL simuLation

Le programmeHpC-pme

Le Genci, l’Inria et Bpifrance(ex-Oséo) ont lancé InitiativeHPC-PME avec les pôlesde compétitivité AerospaceValley, Axelera, Systematic,Minalogic et Cap Digital. But :développer l’accès des PME aucalcul intensif via des projetsd’innovation générateurs decompétitivité, et ce durant

toute la durée de leur recherche.L’enjeu est d’amener les PMEà aborder la question du calculintensif en les aidant à enévaluer la pertinence au regardde leurmodèle de croissance,àmobiliser les acteurs du calculintensif pouvant les épauler et,dans un dernier temps, à bâtirleur programme de R&D.

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le recours à des équipements extérieurs peut être un pro-blème sur des contrats confidentiels. Et certains calculs àdistance peuvent coûter cher en bande passante», signaletout de même Rui Da Silva. Mais le nerf de la guerre, c’estle logiciel, et son coût. «La tarification des grands logiciels,avec un prix de licence qui dépend du nombre de cœurs decalculs utilisés, n’est pas du tout adaptée à une PME quia deux projets de calcul par an», regrette Brigitte Duême,de l’Inria. La solution, ce sont des logiciels accessibles enmode cloud computing, avec une tarification en fonction del’usage. Entares fait partie des petits éditeurs de logicielsqui s’y mettent. Une offre développée avec le Centre decalcul en Midi-Pyrénées (Calmip) doit démarrer en 2014.Mais un utilisateur assidu comme GDTech doit s’accom-moder des licences des grands logiciels, obligatoires pourtravailler avec ses grands donneurs d’ordres. L’entreprisefranco-belge utilise par ailleurs des logiciels open source,mais seulement pour de la R&D, et codéveloppe certainscodes spécialisés.

4 faire DuhpcunoutiL stratégiqueEntrer dans la simulation numérique coûte du temps

et de l’argent : inutile d’y aller pour un projet ponctuel.Pourtant, le calcul peut devenir un véritable outil stratégique.L’offre de calculs diversifiée mise en place par GDTech doitlui permettre de décrocher des contrats d’ingénierie plusglobaux, par transfert de calculs jusqu’ici réalisés par sesclients. Danielson Engineering considère ses compétencesen simulation comme un argument commercial. Et unoutil de développement. «Une nouvelle tâche confiée parun client peut ensuite enrichir notre offre, et nous ouvrird’autres clients. C’est le cas idéal», reconnaît Rui Da Silva.Des réussites plutôt rares dans les PME françaises. Dans sadeuxième phase, lancée en 2013, HPC-PME veut s’appuyersur les grands donneurs d’ordres pour inciter les sous-trai-tants à s’intéresser au calcul intensif, notamment à traversles pôles de compétitivité et autres structures collaboratives.Il est aussi prévu de créer 12 antennes régionales à l’écoutedes besoins des PME. ❚❚

comme pour Danielson engineering, le passage au calcul intensif peut devenir un argument commercial pour conquérir desmarchés.

enquêtesspéCiaL simuLation

L’usinenouveLLe i supplémentaun°3372 i 10 avril 2014

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enquêtesspécial simulation

42

Être au plus près de la réalité impose le respect deslois physiques. Celles-ci étant nombreuses, il existenombre de codes de calcul. Tour d’horizon.par Jean-François prevéraud

outils

unephysique,unlogiciel

sans outil desimulation,

segulaTechnologies

n’aurait jamaispu concevoir

son prototypede véhicule

hybride.

I l est possible de tout simuler, ou presque. Depuisle prédimensionnement en avant-projet jusqu’audémantèlement en fin de vie. Aucun outil ne peut

couvrir à lui seul un tel spectre. C’est ce qui explique lamultitude d’outils et d’acteurs présents sur le marché, avec,comme corollaire, un phénomène de concentration en coursdepuis un certain temps. Pour s’y retrouver, divisons cesoutils en deux grandes familles qui traitent soit des aspectsproduits, soit des aspects process. Chacune d’elles peut fairel’objet d’un classement par grands types de physiques traités.De plus, certains éditeurs couplent des outils de différentsdomaines. On parle alors de simulationmultiphysique. Der-nière catégorie, les logiciels disponibles en open source quifont fureur auprès des universitaires et chercheurs.

le couplage avec la caoTous les grands éditeurs de CAO proposent, avec leuroffre conception, une option de calcul et simulation plus oumoins avancée. Certains modules de prédimensionnementsont directement intégrés dans les outils de conception,les outils de vérification faisant, eux, l’objet de packagesséparés. Ces derniers, très orientés sur la conceptionproduit, se nomment Simulia chez Dassault Systèmes,NX Simulation chez Siemens, Creo Simulate chez PTC,Simulation chez Autodesk ou SolidWorks. On y retrouveles outils de base pour la mécanique des structures ou celledes fluides, les transferts thermiques, les composites. Cesoffres sont en perpétuelle évolution au gré des acquisitionsde technologies.Toutefois, le calcul reste une affaire de spécialistes. Sur cemarché, les acteurs généralistes chevronnés ont étoffé leuroffre pour être présents dans presque tous les domaines.Souvent, ils ont acquis de petits éditeurs spécialisés dontils ont récupéré et intégré la technologie dans leurs propressuites logicielles. Parmi eux, citons Altair, Ansys, Comsol,ESI Group, MSC Software… À leurs côtés se tiennent unemultitude d’éditeurs spécialisés tels AutoForm Engineeringpour l’emboutissage de pièces automobiles ou Cedrat pourla simulation électromagnétique. so

lidworks;bull

les ouTils dédiés aux produiTsDans la famille des outils produits, citons quelques édi-teurs et leurs produits selon les physiques traitées. Lesplus utilisées sont la mécanique des structures (Mechanicald’Ansys; Abaqus de Dassault Systèmes;MSCNastran; CreoSimulate de PTC; NX Simulation de Siemens…), la méca-nique des fluides (Fluent d’Ansys; Star-CD de CD-adapco…),les transferts thermiques (Icepak d’Ansys ; MSC Sinda…), ladynamique (MSC Adams…), l’acoustique et les vibrations(MSC Actran; VA One d’ESI…), l’électrotechnique et l’élec-tromagnétisme (HFSSet Maxwell d’Ansys; Flux 2D/3D deCedrat; CEM Solutions d’ESI…).De nombreux logiciels traitent de physiques spécifiquescomme la combustion (Forté, Energico et Chemkin d’Ansyset de Reaction Design; Fire d’AVL…), l’optique et la visuali-sation (Speos d’Optis…), la fatigue (Castor Fatigue de Cetim;MSC Fatigue…), les systèmes de contrôle et la mécatronique(Scade et Simplorer d’Ansys; LMS Imagine.Lab; MapleSimde MapleSoft ; MatLab et Simulink de MathWorks ; MSCEasy5; MathCAD de PTC…), le crash (Pam-Crash d’ESI…).Coller à la réalité nécessite parfois de coupler différentssolveurs pour étudier, par exemple, les effets de la tempé-rature ou des vibrations sur une structure sous charge. Onexploite alors plusieurs physiques pourmettre en pratique lasimulationmultiphysique. Les environnements leaders de cetype demodélisation s’appellent HyperWorks d’Altair; Mul-tiphysics d’Ansys; ComsolMultiphysics; Abaqus deDassaultSystèmes; Virtual Try-Out Space d’ESI ; SimXpert de MSC.

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les champions de la simulation

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les ouTils dédiés aux processLa seconde famille d’outils concerne les process. Hormisla simulation d’usinage par enlèvement dematière –traitantaussi bien le fraisage que le tournage, le perçage que la rec-tification ou l’électroérosion, de deux à cinq axes voire plus,avec des outils comme NCSimul de Spring ou Vericut chezCGTech–, les process sont l’apanage d’éditeurs spécialisésou de modules spécifiques dans les offres généralistes. Lesdomaines traités sont l’emboutissage et découpage (Stam-ping Adviser d’AutoForm Engineering; Pam-Stamp d’ESI…),la déformation (Pam-Tube d’ESI…), la fonderie (ProCast etQuickCast d’ESI…), la forge (Forge de Transvalor…), le sou-dage (Weld Quality d’ESI…), lesmatériaux composites (Pam-Form et Pam-RTMd’ESI; e-Xstream’s Digimat deMSC…), laplasturgie (MoldFlow d’Autodesk; Simpoe-Mold…).

l’élecTronique eT le BTpLamodélisation dans l’électronique fait appel à des éditeursd’outils de conception qui intègrent une offre de simula-tion analogique, numérique et mixte tels Cadence DesignSystems, Mentor Graphics et Synopsys. On y dénombreégalement une myriade de spécialistes d’outils de niche àla durée de vie souvent éphémère. Enfin, le monde du BTPdispose de ses propres outils de simulation. Ces dernierss’occupent de problématiques spécifiques liées, par exemple,aux descentes de charges entre les étages ou aux matériauxutilisés comme le béton armé. C’est le cas du logiciel AdvanceDesign de Graitec. ❚❚

teratecdiffuselecalcul intensifDans le cadre du plan de reconquête industrielleSupercalculateurs, Teratec entend mettre l’accentsur les PME et les ETI en les aidant à s’approprierle calcul et la simulation haute performance.

A près les grandes entreprises, place aux PME !«Parmi les objectifs de Supercalculateurs – l’un des34 plans de la Nouvelle France industrielle, dont la

responsabilité a été confiée à Gérard Roucairol, le présidentde Teratec–, l’accélération de la diversification des usagesde la simulation, sa diffusion au sein du tissu industriel etla formation appropriée des ingénieurs sont primordiales.Nous allons donc nous retrouver au cœur de la structurationet de l’animation de la communauté des industriels utilisa-teurs, notamment des PME et des ETI, qui sont le tissu del’industrie française», expliqueHervé Mouren, le directeur deTeratec. Cette association anime, depuis sa création en 2003,un écosystème autour du calcul haute performance (HPC).Depuis dix ans, Teratec travaille donc avec les grandsindustriels utilisateurs et les PME technologiques offrantdes solutionsmatérielles, logicielles ou de services. Bref, lesaficionados du HPC. «Le temps est venu de nous adresserégalement aux PME et aux ETI, les entreprises utilisatricesd’aujourd’hui ou de demain», répète Hervé Mouren. Latâche est ambitieuse, car tous les secteurs économiquessont concernés. Les transports, bien évidemment,mais aussil’agroalimentaire, la chimie, la médecine, la cosmétique, lesmatériaux… Teratec entend bien initier ces PME et ETI auHPC, mais aussi les accompagner dans le contexte de leurmétier. Comment? «Nous allons nous appuyer sur les grandsutilisateurs, qui ont tout intérêt à ce que leurs partenairesde filière montent en compétences dans ce domaine. Etnous nous tournerons vers les pôles de compétences et lescentres techniques industriels liés aux grandes filières, quisouhaitent, eux aussi, faire progresser leurs affiliés. De plus,les multiples implantations de ses entités nous permettrontde nous rendre en régions au plus près de ces entreprises.»Cet accompagnement se fera à travers la mise en placede structures de services, pour lesquelles Teratec pourraitalors jouer le rôle de catalyseur d’amorçage, puis de placede marché. ❚❚

le super-calculateur

curie du Tgcc,sur le sitedu cea à

Bruyères-le-châtel, se tient

au servicedes pMe.

l’usinenouvelle i supplémentaun°3372 i 10 avril 2014

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GROWTH FACING SUSTAINABILITY

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Mathématiciens, ingénieurs et informaticiensunissent leur savoir-faire pour concevoir et utiliserles outils de la simulation numérique.par CéCileMaillard

Métiers

unelonguechaînedecompétences

le centre d’innovation de l’université technologique de Compiègne, qui a coûté 13millions d’euros, abrite une salle de réalité virtuelle.

A u commencement était le nombre… «Faire de lasimulation numérique, c’est mettre en équations lecomportement de lamatière, pour l’étudier», définit

François Costes, de l’association Nafems, qui accompagneles industriels dans leur usage de la simulation. Avantqu’une entreprise n’obtienne une réponse à ses questionssur le comportement d’un système, c’est une longue chaînede savoir-faire qui intervient. Mathématiques, physique ouinformatique, ils se succèdent, s’entremêlent, multiplientles allers-retours. «La compétence la plus importante estde savoir mettre ensemble ces différentes compétences»,analyse Georges-Henri Cottet, le directeur d’Amies, un labexporté par le CNRS qui vise à rapprochermaths et entreprises.Première étape: le physicien (biologiste, géologue…) définitses attentes. Veut-il étudier un matériau, la Terre, le cœur?Simuler la fatigue d’une structure ou optimiser le poids d’unobjet? Comme dans un laboratoire, c’est à l’ingénieur ou àun diplômé d’un master de physique, parfois docteur, defournir paramètres et lois physiques.Ses attentes sont alors traduites en équations. Une étapepurement mathématique. Quand cette modélisation estcomplexe, elle est assurée par un mathématicien, titulaired’un master de calcul scientifique ou d’un doctorat, ou par

UTC

l’usinenouvelle i sUpplémenTaUn°3372 i 10 avril 2014

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«Construire grâce à lasimulation estmagique !»

Bilal Bendjeffal,26 ans, ingénieur en calculde structure chez Altair

«C’est en me spécialisanten troisième année d’écoled’ingénieurs (Enivl) quej’ai appris mon métier.Chez Altair, je ne fais paspartie de l’équipe dedéveloppement du logiciel,mais je travaille sur sonutilisation. Avant la vente,j’aide les clients à validerleur projet. Après, je peuxleur donner des précisionss’ils butent sur un obstacle,ou faire légèrement évoluer

le logiciel si besoin. Parfois,il faut réaliser le projetpour le client. Dans monéquipe, nous travaillons surtous les secteurs, mais avecnos spécialités propres. Jesuis expert en optimisation,cherchant, par exemple,quelle forme appliquerà une pièce en fonction detels ou tels contraintes etobjectifs. Grâce aux moyensde calcul de plus en plusfous, ce métier évoluesans arrêt. Voir le produitréel construit grâce à lasimulation restemagique!» ❚❚

trois grandesvoies de formation

● diplôme d’ingénieursles grandes écolesgénéralistes pourleur niveau enmathsetmaths appliquées,ou les écoles spécialiséesenmécanique numériqueou simulation (uTC,eisti, insa lyon, estaca,ensimag, supMeca,enseirb-Matmeca…)

● masterÀ l’université :enmathématiquesappliquées, simulationnumérique, modélisationou calcul scientifique.en école d’ingénieurs :Centrale nantes,uTC, Centrale paris.Formationmixte :université paris-saclay.

● doctoratla simulation estl’un des rares universoù les docteurs sonttrès prisés desentreprises privées.Toutes les écolesd’ingénieurs et touslesmasters spécialisésen simulation proposentde poursuivre en thèse.

un ingénieur spécialisé enmathématiques. Très présent dansles laboratoires publics, le mathématicien pur se rencontremoins dans les entreprises, sauf dans quelques services deR&D de grands groupes.Ensuite seulement intervient le spécialiste en mathéma-tiques appliquées, qui traduit en langage numérique cettedescription mathématique du comportement de la matière.Certains l’appellent ingénieur en calcul scientifique ou ana-lyste numérique. Chez un éditeur, dans une SSII ou un grandgroupe, il est qualifié d’ingénieur de développement quand ilcontinue d’améliorer un logiciel. Il a forcément des compé-tences informatiques, même si, dans les grosses structures,des informaticiens peuvent prendre le relais.

la mécanique, filière reineCes étapes peuvent être réalisées par les éditeurs de logi-ciels. Ils recrutent des ingénieurs en mécanique, des infor-maticiens pour le développement et de raresmathématiciens,experts ponctuellement appelés en renfort. Pierre Eliot estresponsable technico-commercial de Simulia, la gammelogicielle dédiée à la simulation réaliste de Dassault Sys-tèmes. «Pour la construction du logiciel lui-même, nousfaisons appel à des développeurs au profil très théoriqueen informatique et mathématiques, et à des physiciens,souvent docteurs. Pour l’avant- et l’après-vente, en contactavec les clients, nous employons surtout des ingénieursen mécanique. Ce sont plutôt des généralistes, diplômésde grandes écoles. Seuls ceux qui conçoivent une pièce ouvalident un système pour nos clients ont des profils trèstechniques. » Lui-même est diplômé de Centrale Lyon,option mécanique et mathématiques numériques. ChezAltair, éditeur de la suite HyperWorks, «nous avons besoinde personnes qui ont une très bonne compréhension de laphysique, explique le directeur technique Boris Royer. Quandnous recrutons un mathématicien pour le développement, ildoit avoir une forte compétence en physique».L’ingénieriste Sopra Group héberge à Toulouse son entitédédiée à l’aéronautique, qui abrite une forte activité simu-lation. «Avec une spécificité: la modélisation de systèmes,précise François-Marie Lesaffre, le responsable de la simu-lation. Nous cherchons un équilibre entre les ingénieurs

généralistes ; les ingénieurs automaticiens, qui feront dela modélisation; et les ingénieurs aéronautiques pour leurcompréhension des systèmes sous-jacents.» La simulationnécessite d’énormes capacités de calcul. Pour ses ordina-teurs, elle a besoin d’ingénieurs en systèmes informatiques–ou ingénieurs d’études en calcul scientifique– et de chefsde projet en calcul haute performance. Ils administrent lessupercalculateurs, choisissent leur architecture et travaillentpour des projets industriels complexes.Faut-il des compétences particulières pour utiliser ces logi-ciels? «La simulation se démocratise, onpourrait croire qu’ellepeut être confiée à des techniciens. Mais la machine produittoujours des résultats. Il faut des ingénieurs pour les examineravec un regard critique», plaideAlain Rassineux, professeur àl’UTC de Compiègne et responsable de l’équipe «mécaniquenumérique» du laboratoire Roberval (CNRS-UTC). Selon lui,les industriels sont très friands d’ingénieurs mécaniciensayant un solide bagage mathématique, une compétence quileur permet demanipuler les outils de la simulation.Mais lesentreprises ont de plus en plus besoin de physiciens. «Avant,certaines tâches pouvaient être confiées à desmathématiciensou à des informaticiens. Avec la complexification des phéno-mènes physiques étudiés, ce n’est plus possible.»Les chercheurs, de Centrale Nantes notamment, tentent demettre au point desmodèles aux équations simplifiées pourobtenir des réponses en temps réel. On est loin d’avoir faitle tour des comportements des matériaux. Chez DassaultSystèmes, on recrute des ingénieurs sachant coupler diffé-rentes physiques. Autant d’opportunités pour les physiciensforts enmaths. Ou lesmathématiciens forts en physique… ❚❚D

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