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L e vieillissement d'aujourd'hui pour des vieillesses de demain

Impact N ° 153 3 Présentation

Laurence Hugonot-Diener

5 La biologie du vieillissement humain Leonard Hayflick

21 Les maladies cardiaques des personnes âgées : progrès récents de la médecine John Pathy

29 Le rôle du cerveau dans la surpopulation, le vieillissement et la dépendance Ronald D . T. Cape

41 Introduction à une vieillesse nouvelle Robert Hugonot

49 Vieillesse et vieillissement vus par les démographes Paul Paillât

63 Aide formelle et informelle aux personnes âgées. Analyse des structures actuelles et des options futures en Suède Lars Tornstam

71 Le vieillissement : la situation en Amérique latine Luis Miguel Gutiérrez Robledo

89 La longévité de la population biélorussienne. Facteurs socio-sanitaires et hérédité Anatoly Taltchouk, Evgueny Konoplya et Valentina Mossalygo

101 La place des anciens dans la société africaine Amadou Moustapha Diop

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Avis aux lecteurs

Impact : science et société est également publié en anglais, en arabe, en chinois en coréen, en portugais et en russe. Pour obtenir des informations concernant ces éditions, prière de s'adresser à :

Anglais : Taylor & Francis Ltd, Subscriptions Department, Rankine R o a d , Basingstoke, Hampshire R G 2 4 O P R , R o y a u m e - U n i .

Arabe : Unesco Publications Centre in Cairo, 1 Talaat H a r b Street, Le Caire, République arabe d'Egypte.

Chinois : Institute of Policy and M a n a g e m e n t , Chinese A c a d e m y of Sciences,

P . O . B o x 8712, Beijing, République populaire de Chine. Coréen : Commission nationale coréenne pour l'Unesco, P . O . B o x Central 64, Séoul,

République de Corée. Portugais : Publicacôes Europa-América L d a , Est. Lisboa-Sintra k m 14, 2726 M e m

Martins C o d e x , Portugal. Russe : Commission de l ' U R S S pour l'Unesco, 9 Prospekt Kalinina, M o s k v a G - 1 9 ,

URSS.

Les auteurs sont responsables du choix et de la présentation des faits figurant dans leurs articles ainsi que des opinions qui y sont exprimées, lesquelles ne sont pas nécessairement celles de r Unesco et n'engagent pas l'Organisation.

Les textes publiés peuvent être librement reproduits et traduits (sauf lorsque le droit de reproduction ou de traduction est réservé) à condition qu'il soit fait mention de l'auteur et de la source. Un numéro de la revue ne peut être repris intégralement qu'avec l'autorisation de V Unesco.

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Présentation

Consacré au vieillissement, ce numéro a été conçu avec la collaboration de Laurence Hugonot-Diener, directrice du Centre de prévention, d'étude et de recherche sur le vieillissement (CEPEVI), organisme qui se consacre à la recherche clinique en gériatrie. Laurence Hugonot-Diener est également médecin gériatre à Vhôpital Paul-Brousse (Villejuif, France) et responsable de la rubrique gérontologique hebdomadaire du Quotidien du médecin. Elle a reçu sa formation en gérontologie à Grenoble, où elle partageait son temps entre la clinique, l'organisation gérontologique et la recherche. Laurence Hugonot-Diener a écrit, en collaboration avec son père, un Atlas du vieillissement et de la vieillesse, paru récemment aux Éditions Érès, Toulouse. On peut entrer en contact avec elle à l'adresse suivante : CEPEVI, BP 79, 198 bis, boulevard Auguste-Blanqui, 75013 Paris, France.

Le vieillissement peut être défini c o m m e l'ensemble des modifications physiologiques que l'on observe au cours de l'avance en âge.

Parler du vieillissement des h o m m e s dans différents pays pose avant tout le problème du vieillissement différentiel. Cela est vrai a tous les niveaux, de la cellule aux organes et à leurs fonctions en ce qui concerne les individus, des sociétés et des nations en ce qui concerne les peuples. C o m m e il n'est pas possible de faire le tour de la question en un seul numéro de cette revue, nous avons choisi de présenter le point de vue de quelques spécialistes de cette question dans plusieurs disciplines.

Dès la naissance, toutes les cellules qui forment un être humain sont déjà pré­sentes et commencent à vieillir, puis à mourir pour celles qui ne sont pas renouve­lables, telles les cellules nerveuses et musculaires. Alors que certains auteurs, c o m m e A . Carrel ou Ebeling, avaient cru qu'i« vitro la reproduction, donc la vie, de certains fibroblastes pouvait être indéfinie, Leonard Hayflick a démontré, en 1961, que la duplication de ces fibroblastes est limitée et se termine par la mort cellulaire ou par une survie anarcbique sous forme de cancer — et cela lorsqu'on utilise pour cette expérience des fibroblastes de fœtus humain. Il a été l'un des premiers à étudier le vieillissement biologique et à nous apprendre que l'espèce humaine est programmée pour vivre environ cent quinze ans. Anatoly Taltchouk et ses collaborateurs donnent un exemple de populations qui se rapprochent de cette espérance de vie théorique et qui ont une longévité supérieure à la moyenne dans une région d ' U R S S . Ces cente­naires ont en c o m m u n , avec ceux d'autres régions du m o n d e , par exemple les Andes , une vie sans stress, rythmée par le soleil, dans un milieu rural, et une alimentation frugale pauvre en calories.

3 Impact : science et société, a' 153, 3-4

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Présentation

Malheureusement, il existe souvent une pathologie de la vieillesse qui survient après l'âge de 65 ans, observée davantage en Occident et dans les pays industrialisés, en raison d'une espérance de vie plus longue que dans les pays en développement.

John Pathy décrit la pathologie cardio-vasculaire, la cause de morbidité la plus importante après 65 ans; cette pathologie tend actuellement à diminuer, du fait des progrès thérapeutiques réalisés. Il existe beaucoup d'autres pathologies spécifiques à la vieillesse, mais la plus invalidante est la démence, quelle que soit son étiologie. Ronald Cape souligne l'importance de cette maladie, qui pose un problème de santé publique dans les pays « vieux », en raison de la dépendance des malades dans leur vie quotidienne. Le vieillissement cérébral normal et pathologique est, à l'heure actuelle, l'objet d'importants programmes de recherche dans de nombreux pays.

Paul Paillât parle du vieillissement différentiel des populations et des nations, en raison de données démographiques différentes qui tiennent principalement au taux de fécondité et au niveau socioculturel — ce dernier ayant des conséquences directes sur la mortalité infantile. Lars Tornstam, sociologue Scandinave, observe comment un pays c o m m e la Suède, qui avait commencé , il y a trente ans, à entre­prendre une politique de services et de prise en charge lourde des sujets âgés, s'appuie à nouveau sur les familles et sur le réseau des relations.

Robert Hugonot, qui, depuis vingt ans, a mis en place à Grenoble un tissu de services et d'établissements gérontologiques modèles, montre à quel point la popu­lation âgée est en pleine mutation, et c o m m e n t la politique de la vieillesse doit évoluer. Les pays jeunes qui n'ont pas encore à faire face à ce problème doivent tenir compte de l'expérience des pays qui ont vieilli plus vite. Luis Miguel Gutiérrez Robledo présente des problèmes gérontologiques nouveaux pour l'Amérique latine, où les personnes âgées étaient traditionnellement prises en charge par la famille.

A m a d o u Moustapha Diop montre que, m ê m e en Afrique, la place des anciens — autrefois vénérés — est remise en question dans certaines régions.

Loin de penser apporter une réponse par l'ensemble de ces textes, nous espérons stimuler les interrogations et inciter chacun à avoir une pensée dynamique et évolutive en matière de vieillissement. •

Laurence Hugonot-Diener

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L a biologie du vieillissement humain

Leonard Hayflick

Contrairement à ce que l'on croyait autrefois, les cellules normales, même cultivées en laboratoire, ne peuvent se diviser et fonctionner indéfiniment. On pense donc aujourd'hui que Vorigine des altérations liées à l'âge se trouve dans les cellules mêmes. Le vieillissement ne s'observe que chez les humains et chez les animaux protégés par l'homme : il ne saurait donc être le résultat de la sélection naturelle. L'espérance de vie humaine ne cesse d'augmenter, mais la longévité de l'espèce humaine semble être fixe, ne dépassant pas 115 ans.

L e vieillissement a acquis depuis p e u droit de cité en tant q u e d o m a i n e d'étude scientifique. Il y a vingt ans, la recherche fondamentale en gérontologie n'occupait q u e quelques dizaines de personnes, et ceux qui s'aventuraient dans ce c h a m p d'investigation, associé pendant des siècles à la magie noire, n'inspiraient guère le respect dans les milieux scientifiques. Q u a n d , pour les besoins de leurs travaux, ils utilisaient des cultures cellulaires, leur activité apparaissait doublement suspecte, car le t emps n'était pas loin o ù l'on voyait dans la culture de cellules humaines une pratique apparentée à la sorcellerie.

L a gérontologie en tant que discipline scientifique est aujourd'hui en plein essor, m a i s elle est loin d'avoir complè tement perdu cette réputation qui la relie à l'alchimie d u M o y e n A g e , dont l'objet principal était de changer les m é t a u x vils en or. Croire, c o m m e le font b e a u c o u p de gens, q u e le but de la gérontologie est de nous rendre tous immortels est à p e u près aussi fondé que le serait l'idée que la chimie a pour but

Leonard Hayflick est professeur d'anatomie à la Faculté de médecine de l'Université de Californie, à San Francisco. Diplômé de l'Université de Pennsylvanie, il a effectué des recherches à l'Université du Texas, à Galveston, avant de devenir m e m b r e du Wistar Institute de Philadelphie. Il a été n o m m é professeur de microbiologie médicale à la Faculté de médecine de l'Université de Stanford, puis directeur du Centre d'études gérontologiques de l'Université de Floride. Il a mis en évidence le processus du vieillissement cellulaire et décrit la première souche de cellules humaines normales (WI-38), qui allait bientôt servir à préparer la plupart des vaccins antiviraux produits dans le m o n d e . Il a aussi découvert la cause de la maladie appelée « pneumonie primaire atypique », qui est le plus petit micro-organisme libre, le mycroplasma pneumoniae. Rédacteur de la revue Experimental Gerontology, ses travaux lui ont valu quelque vingt récompenses. Le professeur Hayflick est membre fondateur du Council of the National Institute on Aging (NIA) et ancien président de la Gerontological Society of America. O n peut joindre Leonard Hayflick à l'adresse suivante : University of California, San Francisco, Medical School, Cell Biology and Aging Branch (151 E) , 4150 Clement Street, San Francisco, C A , États-Unis d'Amérique.

5 Impact : science et société, n" 153, 5-19

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Leonard Hay flick

de transmuer les éléments. C'est pour avoir été trop longtemps négligée que la gérontologie demeure ainsi l'objet de toutes sortes d'idées fausses, non seulement dans le public, mais parmi les biologistes eux-mêmes.

U n exemple pris dans le règne végétal illustrera bien m o n propos. O n trouve à la frontière entre la Californie et le Nevada des pins (pinus aristatd) qui passent souvent pour être les organismes vivants les plus vieux du monde . Presque tout le m o n d e croit que ces arbres, de m ê m e que les séquoias de Californie, sont âgés de plusieurs milliers d'années. Or, il n'en est rien. Quiconque a dépassé l'âge de 30 ans est en droit de se considérer c o m m e l'aîné du plus vieux de ces pins ou de ces séquoias.

La raison qui m e pousse à pareille affirmation hérétique est que les cellules qui, dans ces arbres, sont censées être vieilles de plusieurs millénaires sont en réalité mortes. Il n'y a de cellules vivantes que dans la couche périphérique du cambium et dans les aiguilles, et celles-là n'ont pas plus de 30 ans. C e qui passe pour être vieux de plusieurs milliers d'années est mort, et c'est une considération erronée quand il s'agit de déterminer l'âge des organismes vivants.

Les cellules vivantes de ces arbres sont certes les descendantes d'une lignée cellulaire très ancienne, mis il n'y a là rien d'exceptionnel. O n peut en dire autant de vous ou de moi. Les séquoias et les pins en question n'ont m ê m e pas besoin de ces cellules mortes pour vivre; en effet, la destruction de ces cellules par le feu n'a pas empêché nombre de ces arbres de survivre, parce que l'anneau formé par le tissu de cambium vivant a été préservé. Il s'agit vraiment, en l'occurrence, d'arbres qui n'ont pas plus de 30 ans, puisque les cellules millénaires ne sont m ê m e plus présentes.

Mais il existe encore d'autres idées fausses, plus importantes.

Notre longévité n'a pas augmenté

L'idée courante que les avancées de la recherche biomédicale ont eu pour effet d'allonger la durée de la vie humaine n'est étayée ni par les statistiques ni par les observations biologiques. Rien ne prouve que la durée maximale de la vie humaine soit différente de ce qu'elle était il y a plusieurs centaines de milliers d'années, et nous ne disposons d'aucun document vraiment digne de foi attestant qu'un être humain ait jamais dépassé l'âge de 115 ans environ.

Les progrès de la médecine au X X e siècle ont simplement permis à un plus grand nombre d'individus d'approcher de ce qui semble être la limite supérieure de la durée de vie humaine. Autrement dit, c'est l'espérance de vie et non la longévité qui a augmenté. Grâce à l'amélioration de la prévention et du traitement de maladies qui autrefois étaient à l'origine de nombreux décès prématurés, les courbes de survie tendent simplement à devenir plus rectangulaires. (Figure 1.)

Toutefois, à l'échelle de l'évolution, on a de bonnes raisons de penser que la longévité humaine a augmenté rapidement jusqu'à il y a environ 100 000 ans, avant de se stabiliser. La preuve en est la remarquable concordance observée lorsqu'on exprime le rapport du poids du cerveau des mammifères adultes au poids de leur corps en fonction de la longévité. Plus le cerveau est lourd par rapport au poids du corps, plus la longévité de l'espèce est grande. L'application de ce critère permet de dire que les premiers hominidés avaient une longévité bien moindre que leurs actuels descendants, car leur cerveau était nettement plus petit que le nôtre par rapport au poids du corps.

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La biologie du vieillissement humain

Figure 1 Courbes de survie humaine de plusieurs pays à des époques diverses. A u x progrès de la médecine et de l'hygiène correspond une diminution des décès de la petite enfance. D u fait de cette évolution, les courbes tendent vers une forme rectangulaire (indiquée par le sens de la flèche). L'élimination de tous les décès actuellement imputables à des maladies ou à des accidents aboutirait à la courbe limite hypothétique tracée sur la figure. Les individus ne mourraient plus alors que des suites de l'affaiblissement des fonctions physiologiques normalement lié à l'âge, c'est-à-dire « de vieillesse ». Presque tous les progrès de la recherche et de la thérapeutique tendent à accroître l'espérance de vie dans le sens de la courbe limite. Mais très peu d'efforts sérieux sont faits actuellement pour augmenter la longévité humaine, en repoussant plus à droite le point de convergence des différentes courbes. Source. D'après A . Comfort, Ageing: The biology of senescence, Holt, Rinehart et Winston Inc., N e w York, 1964.

L'augmentation d u rapport d u poids d u cerveau au poids d u corps s'est consi­dérablement ralentie il y a environ 100 000 ans, date à laquelle la durée maximale de vie humaine est devenue ce qu'elle est aujourd'hui. C e fait est important : o n peut en déduire que la longévité humaine , m ê m e si elle est restée la m ê m e depuis des millénaires, pourrait à nouveau s'accroître à l'avenir.

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Leonard Hay flick

Biologie du vieillissement

O n croit généralement que le vieillissement est le propre de tous les organismes vivants. Or, il n 'en est rien.

Chez certains animaux, le vieillissement ne s'observe que rarement ou n'a m ê m e jamais été mis en évidence. O n ne peut parler de la longévité d'une espèce que dans le cas des animaux dont l'âge de maturation correspond à une taille déterminée. Beaucoup de poissons, d'amphibiens et de reptiles qui ont une taille indéterminée ont aussi une longévité indéterminée. Des animaux c o m m e le requin, l'esturgeon ou la tortue des Galapagos ne vieillissent pas, sans être pour autant immortels. Ils ne subissent pas les atteintes du temps, mais finissent par mourir de maladie ou d'accidents, victimes de prédateurs, suivant une courbe semblable à celle de la décroissance radioactive, qui n'est pas celle du véritable vieillissement.

E n fait, la vieillesse extrême ne s'observe que chez les humains et chez les animaux domestiques et animaux de zoo que nous choisissons de protéger. Chez les animaux sauvages, les manifestations du vieillissement, lorsqu'elles existent, sont de courte durée, car les dégradations physiologiques liées à la sénescence ont tôt fait d'accroître leur vulnérabilité face aux maladies et aux prédateurs. Rares sont ceux qui vivent assez longtemps après la maturation sexuelle pour connaître la vieillesse. Dès qu'ils ne sont plus capables de courir tout à fait aussi vite ou de sauter aussi loin qu'avant, ils sont éliminés par les prédateurs. D e m ê m e , dès que leur système immunitaire commence à faiblir, ils sont à la merci des maladies. O u , le plus souvent, ils seront victimes de prédateurs parce que la maladie aura amoindri, ne serait-ce que légè­rement, leur aptitude à échapper à la capture.

Il est donc très peu probable que la sélection ait joué sur le vieillissement au cours de l'évolution, faute d'un nombre suffisant d'animaux sauvages âgés sur lesquels la pression de sélection aurait pu s'exercer. Le vieillissement ne peut donc pas être considéré c o m m e l'expression d'une adaptation.

Aujourd'hui, dans les pays développés, l ' h o m m e a si bien réussi à éliminer les causes de décès liées à des maladies aiguës contractées dans le jeune âge que le vieillissement a atteint des limites inconcevables chez les animaux sauvages. La civi­lisation a produit des espérances de vie inconnues à l'époque préhistorique, révélant par là m ê m e une multitude de dégradations physiologiques qui peut-être, du point de vue téléologique, n'étaient pas destinées à apparaître au grand jour. Le vieillisse­ment est donc un artefact de la civilisation humaine et de la domestication des animaux.

Le fait de vivre bien au-delà de l'âge de la maturité sexuelle et de l'éducation des petits ne présente aucune valeur sélective pour l'espèce animale. D u point de vue de la stricte survie de l'espèce, il n'y a aucun avantage pour l'être humain à dépasser de beaucoup la trentaine. L'espérance de vie à la naissance depuis les premiers hominidés (australopithèques) jusqu'à l'âge du fer et du bronze n'a jamais dépassé l'âge de 18 ans; l'espèce humaine a donc survécu avec une espérance de vie de 18 ans des millions d'années de plus qu'avec l'actuelle espérance de vie de 75 ans. C e qui revient à dire que l'espèce humaine a survécu pendant toute cette période avec peu ou pas d'individus âgés.

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La biologie du vieillissement humain

Vieillissement et maladie

Il importe de bien distinguer le vieillissement de la maladie. Les altérations dues à l'âge ne sont pas des maladies, mais l'expression d'un affaiblissement naturel des fonctions. L a chute des cheveux ou leur blanchissement, la diminution de la vigueur et de l'endurance physiques, les rides, la ménopause, la diminution de la mémoire à court terme et les centaines d'autres atteintes de l'âge ne sont pas des maladies. Elles ne nous rendent pas plus vulnérables face à la mort. Il existe toutefois certaines atteintes « normales » d'organes vitaux qui ont pour effet d'amoindrir nos défenses face aux modifications pathologiques. Ainsi, la baisse normale des fonctions du système immunitaire augmente notre vulnérabilité à l'égard de maladies qu 'un individu jeune surmonterait facilement. D e m ê m e , il peut arriver que des antigènes qu'un organisme jeune reconnaîtrait pour « siens » soient perçus c o m m e « étrangers » par un système immunitaire vieillissant, phénomène qui est à l'origine de nombreuses maladies auto-immunes chroniques chez les personnes âgées.

L a cause du vieillissement

Quelle est donc la cause du vieillissement? Cette interrogation, fondamentale en gérontologie, est à rapprocher de celle qui concerne la cause du développement. D e m ê m e , la question que l'on entend souvent poser : « C o m m e n t ralentir ou stopper le vieillissement? » revient à se demander c o m m e n t ralentir ou stopper le développement.

Le développement c o m m e le vieillissement doivent être étudiés sur des cellules normales. Étudier des cellules anormales ou cancéreuses pour essayer de comprendre les modifications qui se produisent au cours du développement serait tout aussi absurde que d'étudier des cellules anormales dans l'espoir de comprendre quelque chose au processus du vieillissement.

Pour déterminer si l'origine des altérations liées à l'âge se situe au niveau de la cellule, il faut examiner si les cellules sont ou non capables de fonctionner norma­lement et, en particulier, de se diviser indéfiniment. Autrement dit, les cellules normales sont-elles intrinsèquement immortelles? Si elles le sont lorsqu'elles sont cultivées in vitro, c'est que les modifications liées à l'âge qui affectent l'organisme dans son ensemble ont une cause extérieure à la cellule.

Une controverse vieille de cent ans

Les réponses données à cette question fondamentale ont suscité une controverse qui dure depuis près d 'un siècle. E n 1881, le grand biologiste allemand August Weismann a émis l'idée que les cellules somatiques des animaux supérieurs auraient une faculté de multiplication limitée. Sans apporter aucune preuve expérimentale à l'appui de son hypothèse, Weismann déclarait : « L a mort intervient parce qu 'un tissu usé ne peut se renouveler à l'infini, et parce que la capacité qu'ont les cellules de proliférer en se divisant n'est pas éternelle mais finie. »

Il y a au moins deux façons de déterminer si des cellules normales sont immor ­telles. L a première consiste à réaliser en laboratoire des cultures en série de cellules de vertébrés et la deuxième à transplanter en série sur des animaux de laboratoire des

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Leonard Hay flick

cellules analogues contenant des marqueurs spécifiques, qui permettent de les distinguer des cellules hôtes : dès que l'hôte vieillit, le tissu transplanté est greffé sur un hôte plus jeune, l'opération étant répétée plusieurs fois en succession. L e but de telles études est de répondre à cette question fondamentale : des cellules normales de vertébrés peuvent-elles, quand elles fonctionnent et se reproduisent dans des condi­tions idéales, échapper au vieillissement et à la mort auxquels sont inéluctablement voués les animaux dont elles proviennent ?

Les cellules du cœur sont-elles immortelles?

Parmi les études de cultures cellulaires, il en est une qui a apporté à cette question une réponse demeurée incontestée jusqu'en 1960. A u début de ce siècle, Alexis Carrel, eminent cytologiste et chirurgien français, prix Nobel, a décrit des expériences censées démontrer que des cellules de tissu cardiaque de poulet pouvaient être cultivées en série indéfiniment. Le type de cellule humaine ou animale qui se prête en général le mieux à la culture est le fibroblaste. Cette cellule est présente dans tous les tissus, où elle joue un important rôle cohésif et sécrète des molécules ressemblant à de la colle.

La population de fibroblastes cultivée par Carrel a continué à se diviser pendant trente-quatre ans. Albert Ebeling, qui s'est occupé de la culture pendant la plus grande partie de cette période, y a mis fin en 1946, deux ans après la mort de Carrel, faisant observer que la masse des cellules qu'il aurait été possible d'accumuler depuis le début de l'expérience était supérieure à celle du soleil. E n 1921, le journal The World écrivait que ces cellules auraient pu constituer « un coq [...] assez grand aujourd'hui pour franchir l'Atlantique d'une seule enjambée, [...] si monstrueux que, perché sur le globe terrestre, il eût ressemblé à une girouette ». Le New York World Telegram s'enquérait au début de chaque nouvelle année de la santé des cellules. Il a m ê m e annoncé prématurément leur mort en 1940.

L'expérience Carrel-Ebeling revêtait une importance capitale pour les géron­tologues : si les résultats venaient à être confirmés, cela signifierait que les cellules peuvent, dès lors qu'elles ne sont plus soumises aux facteurs qui commandent leur fonctionnement dans le corps de l'animal, se diviser et fonctionner normalement pendant une durée supérieure à la durée de vie de l'espèce concernée. D e fait, l'inter­prétation des résultats donnait fortement à penser que, les cellules de poulet isolées étant immortelles, le vieillissement ne résultait pas de phénomènes se produisant au niveau de la cellule, mais devait être dû à des interactions entre les tissus et les organes intacts ou encore à des phénomènes extracellulaires tels qu'une modification des substances qui lient les cellules entre elles.

A u cours des années qui suivirent l'interruption de la culture des cellules de poulet prétendument immortelles, des témoignages étayant cette découverte affluèrent de nombreux laboratoires qui firent état de l'étonnante faculté qu'avaient apparemment les cellules de rongeurs et d'humains de se reproduire à l'infini. D e telles cultures « immortelles » furent développées spontanément à partir de toutes sortes de tissus dans des dizaines de laboratoires. Les plus connues sont la lignée cellulaire L , obtenue à partir d 'un tissu de souris en 1940, et la lignée cellulaire humaine Hela, entretenue depuis 1951 dans des laboratoires de cytologie du m o n d e entier. Il existe aujourd'hui des milliers de lignées cellulaires immortelles provenant de centaines d'animaux et de dizaines de tissus et d'organes différents.

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La biologie du vieillissement humain

Toutefois, de nouvelles observations plus fines et l'accumulation d'informations contredisant les précédentes ne tardèrent pas à avoir raison de ce qui, pendant cinquante ans, avait été considéré c o m m e la preuve irréfutable de l'existence de cellules immortelles.

Le vieillissement in vitro

Cela fait presque trente ans maintenant que Paul Moorhead et moi avons découvert que les fibroblastes normaux de l ' h o m m e (donc, peut-on penser, des autres animaux) ne sont pas vraiment immortels et en avons déduit qu'il y a bien vieillissement au niveau cellulaire. N o u s avons prouvé que des cellules normales d'embryon humain cultivées en laboratoire dans les meilleures conditions sont vouées au vieillissement et à la mort après une cinquantaine de dédoublements de la population cellulaire. N o u s avons appelé cela le phénomène de la « Phase III ». Nous avons également montré que, loin d'être due à quelque cause externe banale tenant à la composition du milieu ou aux conditions de culture, la mort était une évolution inhérente aux cellules elles-mêmes, c o m m e si celles-ci possédaient une horloge déterminant le nombre de fois qu'elles devaient se diviser et fonctionner. Notre découverte a été confirmée par des centaines de laboratoires.

A u m o m e n t où nous avons fait cette observation, l'idée prévalait en biologie cellulaire que, si l'on ne parvenait pas à faire proliférer indéfiniment des cellules cultivées in vitro, c'était parce qu'on ne maîtrisait pas 1' « art » requis pour ce faire. C e d o g m e était si solidement ancré que le Journal of Experimental Medicine a rejeté en 1960 notre manuscrit original en déclarant que « le principal constat qui se dégage des cultures tissulaires effectuées au cours des cinquante dernières années est que les cellules qui sont intrinsèquement capables de multiplication se multi­plieront indéfiniment si elles sont cultivées in vitro en u n milieu approprié ». Autant dire qu'il suffirait d'une alimentation appropriée pour que les êtres humains soient eux-mêmes immortels. Ponce de León appelait cette nourriture idéale la « fontaine de Jouvence », mais ceux qui croient que les cellules normales cultivées en laboratoire ne peuvent être qu'immortelles, à condition que l'on trouve le milieu de croissance approprié, en sont encore, tel Ponce de León, à chercher ladite fontaine.

Ayant ainsi montré que les cellules normales sont mortelles, c o m m e n t expliquer l'expérience classique de Carrel? Il y a plusieurs années, nous avons avancé une explication qui a recueilli l'adhésion de nombreux scientifiques connaissant bien les travaux de ce dernier. L a culture de cellules de cœur de poulet prétendument immortelles était alimentée, à l'époque, avec de l'extrait d'embryon de poulet fraîchement préparé. Cette préparation permettait donc un apport quotidien de cellules de poulet neuves. M ê m e si cette explication n'est pas la bonne, il n'en demeure pas moins que personne n 'a jamais réussi à confirmer les résultats de Carrel, ne serait-ce qu'en gardant vivantes deux ou trois ans seulement des cellules normales de poulet continuant à se diviser. A défaut d'une telle confirmation, exigée par la méthode scientifique, force est de dire que les études de Carrel ne sont pas valables. D'autres ont expliqué le prétendu succès de l'expérience de Carrel par des raisons plus déplaisantes.

Dans notre description des souches de cellules diploïdes humaines, nous avons signalé plusieurs caractéristiques intéressantes de ces souches.

Premièrement, si les souches sont dérivées d'embryons humains, la multi­plication cellulaire se poursuit pendant une cinquantaine de générations, soit

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Leonard Hay flick

une production potentielle de cellules évaluée à près de 20 millions de tonnes! Deuxièmement, nous avons établi que les cellules diploïdes humaines se multi­

plient pendant un nombre de générations inversement proportionnel à l'âge du don­neur. E n d'autres termes, plus le donneur est âgé, et plus le nombre de dédoublements cellulaires sera limité. Cette constatation nous a donné à penser que le caractère fini de la faculté de reproduction des cellules normales cultivées était l'expression d'un vieillissement au niveau cellulaire. Cette idée, largement étayée par l'expérimentation au cours des années suivantes, constitue aujourd'hui le fondement de l'étude du vieillissement cellulaire, c h a m p d'étude que nous avons baptisé cytogérontologie.

N o u s avons montré que les souches cellulaires provenant de tissus normaux ont u n nombre normal de chromosomes de forme normale et que, contrairement aux lignées de cellules immortelles telles que Hela, elles ne sont pas capables de se multiplier lorsqu'elles sont en suspension dans un milieu de culture liquide. Les cellules normales ont besoin de s'ancrer, c'est-à-dire de s'accrocher à une surface pour se diviser et fonctionner.

N o u s avons montré aussi que les souches de cellules humaines n'induisent pas la formation de tumeurs lorsqu'elles sont inoculées dans l'abajoue du hamster ou m ê m e directement à des patients atteints de cancer au stade terminal.

N o u s avons montré enfin que ces souches peuvent être conservées dans de l'azote liquide à des températures très basses. Si nous conservons ainsi, après un n o m b r e de dédoublements donné, notre première souche de cellules humaines

Figure 2 A gauche. Souche de cellules humaines normales WI-38 : cellules jeunes dans la phase des premiers dédoublements de la population cellulaire. A droite. Cellules WI-38 âgées (au 50e), en phase III, et dernier dédoublement de population. (Préparations colorées.)

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La biologie du vieillissement humain

normales W I - 3 8 obtenue en 1962, puis la réactivons, le nombre de dédoublements qui se produira ensuite sera égal à 50, moins le nombre de ceux ayant déjà eu lieu avant la conservation. Les cellules ont en effet une mémoire extraordinaire et « se rap­pellent » à quel stade de leur prolifération elles en étaient restées, m ê m e au bout de vingt-sept ans de stockage ininterrompu dans de l'azote liquide. La souche W I - 3 8 a été conservée plus longtemps que n'importe quelle autre population de cellules humaines ou animales normales. (Figure 2.)

Sur la base de cette caractérisation, nous avons suggéré de classer les cultures de cellules animales et humaines en trois groupes.

Premièrement, la culture cellulaire primaire, dérivée d 'un tissu intact et ne subis­sant aucun repiquage. Deuxièmement, la souche cellulaire ayant une capacité de replication limitée n'induisant pas la formation de tumeurs lorsqu'elle est inoculée à des animaux de laboratoire, ayant le nombre et la forme de chromosomes des cellules du tissu d'origine et incapable de se diviser sans ancrage.

Troisièmement, la lignée formée d'une population de cellules immortelles, qui peuvent donner naissance à des tumeurs lorsqu'elles sont inoculées à des animaux de laboratoire, dont les chromosomes sont anormaux tant par le nombre que par la forme et qui sont capables de se multiplier indépendamment de tout ancrage.

Le phénomène par lequel une souche cellulaire normale donne naissance à une lignée de cellules anormales, souvent semblables aux cellules cancéreuses, est appelé « transformation », encore que ce terme ne soit pas toujours employé à bon escient dans la littérature scientifique.

Vaccins

Dans notre premier rapport sur les souches de cellules humaines normales, nous signalions la grande diversité de virus humains dont elles pouvaient être les hôtes et avancions l'idée que les cellules diploïdes humaines constitueraient sans doute un excellent substrat pour la production de vaccins contre ces virus. E n 1962, nous avons produit le premier vaccin préparé à partir de cellules humaines normales et démontré l'efficacité et l'innocuité du vaccin contre la poliomyélite ainsi préparé. N o u s avons fait valoir qu'une souche cellulaire normale offrait plus de garanties que les populations de cellules primaires utilisées à l'époque car, contrairement à ces dernières, elle pouvait être soumise à des contrôles rigoureux avant usage.

D e nombreux vaccins antiviraux agréés sont aujourd'hui produits à partir de la souche W I - 3 8 ou de souches analogues. Citons en particulier des vaccins contre la poliomyélite, l'adénovirus des types 4 et 7, la rubéole, la rougeole et la rage. Ces vaccins ont été inoculés ou administrés à des dizaines de millions de personnes dans le m o n d e entier sans qu'aucun effet indésirable imputable au substrat cellulaire ait jamais été signalé.

Cytogérontologie

Avant nos travaux, les spécialistes pensaient que toutes les cellules cultivées étaient immortelles et que le vieillissement n'avait donc rien à voir avec les événements se produisant au niveau de la cellule. Depuis que nous avons établi de façon irréfutable que les cellules normales sont bel et bien mortelles, les études sur le vieillissement ont

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commencé à s'orienter vers la cellule elle-même, et l'on a vu s'amorcer le déclin de ce qui, pendant soixante ans, avait été un véritable dogme.

Plusieurs observations importantes sont venues étayer l'idée d 'un vieillissement des cellules. E n 1965, nous avons signalé que les fibroblastes humains provenant d'individus d 'un certain âge avaient une faculté de multiplication moindre que ceux qui provenaient d'embryons. D'autres chercheurs, réalisant des cultures avec des cellules prélevées sur des donneurs humains d'âges très divers, depuis l'âge fœtal jusqu'à l'âge de 90 ans, ont observé qu'à chaque année d'âge correspond une perte de 0,2 dans le dédoublement de la population cellulaire.

Depuis lors, une dizaine d'études au moins sont venues confirmer que le nombre de dédoublements des populations de cellules humaines est inversement proportionnel à l'âge du donneur. Toutes sortes de cellules et de tissus humains normaux ont été utilisés : p o u m o n , peau, foie, muscle lisse des artères, endothelium vasculaire, myoblastes du biceps, kératinocytes, melanocytes, cristallin et, tout récemment, lymphocytes T .

Plus de deux cents modifications de l'activité biologique associées au vieillisse­ment ont été mises en évidence dans des fibroblastes humains normaux cultivés in vitro. Fait remarquable, beaucoup de ces modifications sont identiques à celles que l'on estime caractéristiques du vieillissement de l'organisme humain considéré dans sa totalité.

Directions de la recherche gérontologique

Ces considérations amènent inévitablement à s'interroger sur les objectifs de la recherche gérontologique. E n éradiquant les maladies cardio-vasculaires, qui sont actuellement la principale cause de décès aux États-Unis et dans les autres pays développés, on pourrait allonger l'espérance de vie d'environ quatorze ans. (Tableau 1.) Si la deuxième grande cause de décès — le cancer — était éliminée, le gain supplémentaire serait de deux à trois ans. L'augmentation nette de l'espérance de vie à la naissance enregistrée aux États-Unis entre 1900 et 1950 a été de près de vingt ans, ce progrès s'expliquant par la diminution du grand nombre de décès observés précédemment avant l'âge de 65 ans. Mais le gain d'espérance de vie à 65 et à 75 ans n'a été, entre 1900 et 1969, que de 2,9 et 2,2 ans respectivement.

Qu'adviendrait-il maintenant de la longévité humaine si toutes les causes de décès autres que « la vieillesse » étaient totalement éliminées? (Tableau 1.) Le résultat serait l'obtention d'une courbe limite rectangulaire (figure 1) : on vivrait sans craindre de mourir prématurément, mais avec la certitude de voir les dégradations physiologiques normales aboutir à la mort vers l'âge de 100 ans.

Il ressort de ce qui précède qu'en axant ses efforts uniquement sur les maladies, la recherche médicale accroîtra peut-être l'espérance de vie, mais ne pourra guère augmenter la longévité de l'espèce humaine. A supposer qu'un tel allongement de la vie soit souhaitable (et l'on est en droit d'en douter), il faudrait commencer par dissocier les causes de décès liées à la maladie des atteintes physiologiques normales dues à l'âge qui sont à l'origine des manifestations de la vieillesse. Chez les personnes âgées, les maladies ne font que se superposer à ces atteintes physiologiques normales, qu'on doit considérer séparément si l'on veut étudier les moyens d'accroître la durée de vie humaine. Si les atteintes de l'âge affaiblissent certes la capacité de résistance à la maladie, les causes fondamentales de décès ne sont pas les maladies elles-mêmes, mais l'affaiblissement de l'organisme qui en facilite l'installation.

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Tableau 1

Augmentation de l'espérance de vie, à la naissance et à 65 ans, susceptible d'être obtenue par l'élimination de diverses causes de décès, 1978

Cause de décès

Principales maladies cardio­vasculares Cardiopathies Affections cérébro-vasculaires Artériosclérose

Néoplasies malignes* Grippe et pneumonie Diabète sucré Accidents de la circulation Tous accidents, à l'exception des

accidents de la circulation Bronchite, e m p h y s è m e et asthme Cirrhose d u foie Néphrites et nephropathies Maladies infectieuses et parasitaires

Augmentation de l'espérance de

(en années) vie

A la A 65 ans naissance

13,9 7,0 1,1 0,2 3,1 0,4 0,2 0,6

0,6 0,1 0,3 0,1 0,2

14,3 6,6 1,2 0,2 1,9 0,3 0,2 —

0,2 0,1 0,1 — 0,1

* Y compris les cancers des tissus lymphatiques et hématopolétiques. Source. P. Das Gupta, « Cause-of-death analysis of the 1978 mortality data by age, sex and race », U . S . Bureau of the Census, 1981 (manuscrit non publié), et U . S . Public Health Service, National Center for Health Statistics. Également au U . S . Bureau of the Census, Current population reports, Series P-23, n° 138, Demographic and socioeconomic aspects of aging in the United States, U S G P O , Washington, D . C . , 1984.

La recherche médicale a axé ses objectifs presque exclusivement sur les pathologies qui entraînent la mort. Elle s'est peu intéressée aux causes sous-jacentes du vieillisse­ment biologique, c'est-à-dire aux dégradations fonctionnelles qui diminuent la résistance à la maladie. Tant que l'on n'aura pas remédié à cette lacune, ceux d'entre nous qui auront la chance de vivre vieux devront s'attendre à mourir vers l'âge de 100 ans.

Les perspectives d'allongement de la durée de la vie humaine

Pour espérer accroître la durée de la vie humaine au cours des vingt-cinq prochaines années, la recherche biomédicale doit orienter ses efforts dans deux directions. L a première est la réduction ou l'élimination des principales causes de décès. Pour la plupart des pays développés, cela signifie éliminer les maladies cardio-vasculaires et le cancer. Dans les pays en développement (et certaines régions des pays développés), il suffirait pour accroître l'espérance de vie que les instances politiques et écono­miques puissent assurer aux citoyens l'alimentation, les conditions d'hygiène et les soins médicaux nécessaires, qui sont déjà un acquis dans la plupart des pays développés. Dans ces derniers pays, la réduction de l'incidence des maladies qui sont

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des causes de décès mineures n'aurait qu'une portée très limitée. C'est ainsi qu'aux États-Unis, si l'on parvenait à éliminer complètement la grippe et la pneumonie c o m m e causes de décès, le gain en espérance de vie à la naissance serait inférieur à 0,04 an. (Tableau 1.) O n peut donc affirmer que, dans les pays développés, si la recherche biomédicale se fixe pour objectif principal l'augmentation de l'espérance de vie, elle devrait se concentrer exclusivement sur l'élimination des maladies qui sont les deux principales causes de décès. Cette position, qui peut paraître inhumaine et ne trouvera sans doute pas beaucoup d'adeptes, est pourtant la conclusion la plus logique à tirer des tables de mortalité, ainsi que des projections qui figurent au tableau 1.

Le deuxième moyen qu'a la recherche médicale d'améliorer la durée de la vie humaine consiste à s'occuper spécifiquement des atteintes physiologiques normales liées à l'âge qui rendent les individus plus vulnérables face à la maladie et à la mort. Cette approche ne vise donc pas directement à accroître l'espérance de vie, elle a pour but d'augmenter la longévité de l'espèce humaine, apparemment fixe.

Le montant des fonds consacrés par les Etats-Unis d'Amérique aux recherches sur le cancer et les maladies cardio-vasculaires donne la mesure des efforts actuel­lement déployés dans les deux directions : ce montant est vingt fois supérieur à celui qui est consacré à la biogérontologie. La disproportion est sans doute la m ê m e en ce qui concerne le nombre de chercheurs et, par conséquent, l'ampleur de l'effort de recherche dans l'un et l'autre domaine. Toute possibilité d'augmentation signi­ficative de la durée de la vie humaine au cours des vingt-cinq prochaines années suppose donc : 1) une amélioration significative des taux de guérison des maladies cardio-vasculaires ou du cancer ou de ces deux pathologies ; 2) d'importants progrès des connaissances concernant les horloges biologiques qui fixent pour chaque espèce une durée de vie maximale et de notre capacité de les manipuler.

Si l'on mesure les chances de succès des efforts faits dans ces deux domaines aux attitudes et aux priorités actuelles des institutions de recherche biomédicale — aux États-Unis et ailleurs —, il apparaît clairement que l'allongement de la durée de la vie humaine sera plutôt le fait de la recherche sur les moyens de guérir le cancer et les maladies cardio-vasculaires que de la recherche biogérontologique. Mais il faut bien voir qu'en éliminant ces deux maladies, on obtiendra au mieux une espérance de vie supplémentaire de quatorze ans, tandis que les efforts tendant à augmenter la longévité de l'espèce humaine à proprement parler pourraient ouvrir des perspectives illimitées. Par ailleurs, l'élimination des deux principaux facteurs de décès n'aura en aucune façon pour effet d'inverser ou de freiner la dégradation physiologique liée aux atteintes normales de l'âge, alors que les recherches visant à accroître la longévité permettraient peut-être d'y parvenir. Il ne s'agit évidemment pas de renoncer à la recherche sur les maladies cardio-vasculaires et le cancer, mais si l'objectif est vraiment de se donner le m a x i m u m de chances d'augmenter la durée de la vie humaine, l'ordre actuel des priorités témoigne d 'un grave déséquilibre. Tant que ce déséquilibre persistera, ce ne sont pas les résultats des travaux de quelques biogérontologues ne disposant que de maigres subventions qui permettront jamais d'accroître la longévité humaine.

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Origine de la longévité et du vieillissement

E n ce qui concerne l'origine des modifications liées à l'âge, il importe de bien distinguer entre vieillissement et longévité. Il paraît à peu près certain que la longévité est déterminée, au moins indirectement, par des événements génétiques, alors que ce ne semble pas être le cas des modifications liées à l'âge.

Très peu d'animaux sauvages vivant jusqu'à un âge avancé, la sélection naturelle n'a pu favoriser l'apparition d'un processus de vieillissement génétiquement pro­g r a m m é . O n ne peut donc pas considérer le vieillissement c o m m e un phénomène sélectionné au fil de l'évolution. A u cours des deux à trois millions d'années d'exis­tence de l'espèce humaine, les vieillards présents dans chaque génération ont été trop peu nombreux pour constituer, du point de vue de la sélection, un avantage propre à favoriser l'émergence d 'un programme génétique déterminant les modifications liées à l'âge.

E n outre, c o m m e on l'a indiqué plus haut, le fait de vivre au-delà de l'âge de la maturité sexuelle et de l'éducation des petits ne présente pour les espèces animales aucune valeur sélective. Les humains n'ont aucun intérêt, du point de vue de la survie de l'espèce, à vivre au-delà de l'âge de 30 ans environ. Depuis l'apparition des premiers hominidés (australopithèques) jusqu'à Yhomo sapiens à l'âge du fer et du bronze, l'espérance de vie à la naissance n'a jamais excédé 18 ans; ainsi, en ne comptant que très peu, ou pas, d'individus âgés, l'humanité a donc p u survivre pendant une période infiniment plus longue (des millions d'années) qu'elle ne l'a fait avec l'actuelle espérance de vie de 75 ans.

L a principale force indirecte qui détermine la longévité est peut-être l'avantage sélectif accordé aux organismes qui conservent leur vigueur physiologique le plus longtemps possible, afin de garantir le m a x i m u m de succès dans la reproduction de l'espèce.

C'est ainsi que, pour la survie de la progéniture humaine, dont la maturation est lente, le fait que les parents conservent plus longtemps leur vigueur physiologique présente sans doute un avantage sélectif. Cette nécessité de maintenir plus longtemps l'activité des fonctions vitales aurait donc une valeur déterminante du point de vue de la survie.

L'hypothèse fondamentale est que l'apparition et l'évolution des gènes régula­teurs qui maintiennent plus longtemps en activité les processus vitaux constituent un avantage sélectif pour l'espèce. L'évolution du génome pourrait donc rendre compte de la longévité de l'espèce, tout à fait indépendamment de la nécessité d'un programme génétique qui déterminerait les modifications liées à l'âge.

L a longueur de la période de développement chez les mammifères est donc peut-être le résultat d'une sélection tendant à favoriser une période prolongée de performance physiologique. U n e grande baleine qui vit trente fois plus longtemps qu'une souris a un million de fois plus de cellules exposées au risque de vieillissement. Cependant, une cellule de baleine est incomparablement plus stable qu'une cellule correspondante de souris.

Les forces de la sélection naturelle ont doté presque tous les organes des animaux sexuellement matures d'un extraordinaire potentiel de réserve. Ce potentiel, dont l'accumulation est le résultat de la sélection naturelle, garantit que les animaux survivront assez longtemps pour atteindre la maturité sexuelle. U n e fois parvenus à ce stade, ils continueront à fonctionner en puisant dans cette réserve, dont l'ampleur est un des facteurs déterminants de la durée de vie postérieure au développement.

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Ainsi, au cours de révolution, la formation de mécanismes de longévité garantissant que les animaux conserveront leur vigueur jusqu'à la maturation sexuelle détermine peut-être indirectement leur longévité postdéveloppementale.

Par conséquent, les altérations liées à l'âge surviennent et se poursuivent pendant une période où les systèmes des organes fonctionnent en roue libre, en utilisant le potentiel de réserve « fabriqué » en excédent au cours d u développement antérieur. Cette période de fonctionnement « en roue libre », qui correspond à la durée de la vie postdéveloppementale, se caractérise par une modification de l'équilibre éner­gétique, qui accroît le désordre (entropie) des processus biochimiques ordonnés, précédemment responsables du développement et de la maturation de l'organisme.

Conclusion

Depuis dix ans que la biogérontologie a commencé à se développer, les spécialistes de gérontologie expérimentale ne cessent de se poser la question jugée essentielle : « Pourquoi vieillissons-nous? » Mais peut-être n'est-ce pas là la bonne ques­tion. Et peut-être faut-il se demander plutôt : « Pourquoi vivons-nous aussi longtemps? » •

Le présent article est inspiré d'un chapitre de l'ouvrage Advances in cell culture, qui doit être publié sous la direction de Karl Maramorosch, Orlando, Floride, Academic Press, Inc., 1989. © 1988, Leonard Hayflick

Pour approfondir le sujet

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La biologie du vieillissement humain

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Les maladies cardiaques des personnes âgées : progrès récents de la médecine

John Pathy

Les maladies cardiaques comptent parmi les principales causes de décès chez les personnes âgées et sont responsables de bien des souffrances et invalidités. Les progrès accomplis au cours des dix dernières années dans le traitement médicamenteux et chirurgical des cardiopathies coronariennes et valvulaires, ainsi que de l'insuffisance cardiaque, ont été largement profitables aux malades âgés.

Les maladies cardiaques touchent surtout les vieillards et, dans la plupart des pays industrialisés, sont la cause de plus de 70 % des décès d'origine cardio-vasculaire chez les personnes de plus de 65 ans. Si la fréquence des multiples formes de troubles cardiaques qui affectent les personnes âgées est très variable d'un pays à l'autre, ce sont les cardiopathies ischémiques (affections dues au rétrécissement des artères coronaires) et l'hypertension qui prédominent.

E n Europe et en Amérique du N o r d , l'ischémie cardiaque est responsable de 75 % des décès liés à une cardiopathie.

L e vieillissement

L'extrême variété des habitudes et des modes de vie individuels rend difficile toute définition précise des modifications de l'organisme liées à l'âge. O n sait maintenant que bien des changements qui étaient autrefois attribués au vieillissement sont dus à des maladies non décelées. Et s'il est vrai que la sénescence s'accompagne de transformations physiologiques et neurochimiques identifiables, il n'en est pas moins clair que la fonction cardio-vasculaire reste intacte, o u presque, chez les personnes qui conservent une activité sportive jusqu'à un âge avancé.

Des études ont montré que le débit cardiaque (autrement dit, le volume de sang p o m p é par le cœur) diminue après 60 ans chez des personnes apparemment en bonne

Le professeur John Pathy enseigne la gériatrie à la Faculté de médecine de l'Université du pays de Galles, à Cardiff. Il a fait ses études de médecine à Kings College et au Kings College Hospital de Londres, il est m e m b r e du Royal College of Physicians de Londres et d'Edimbourg. U n important manuel de gériatrie a été publié sous sa direction. Parmi ses domaines de recherche figurent les cardiopathies ischémiques et les troubles de la mémoire. O n peut entrer en contact avec John Pathy à l'adresse suivante : Department of Geriatric Medicine, University of Wales College of Medicine, Heath Park, Cardiff C F 4 4 X N , Royaume-Uni .

21 Impact : science et société, n" 153, 21-28

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John Pathy

santé. Mais il ressort de travaux plus récents que cette modification est probablement due à une cardiopathie coronarienne latente non diagnostiquée jusque-là, en l'absence de laquelle elle ne se produit pas. La paroi du ventricule gauche s'épaissit progressivement avec l'âge et l'hypertension accentue cette transformation liée au vieillissement.

Facteurs de risque des cardiopathies

Les populations qui consomment beaucoup de poissons gras, donc de graisses insa­turées (contenant des lipoprotéines de haute densité), ne souffrent pas de cardio­pathie ischémique. L a réduction de la consommation de graisses saturées chez les adultes peut ralentir le progrès des maladies coronariennes; toutefois, le succès sera plus assuré si les habitudes alimentaires sont modifiées dès la petite enfance.

L'absorption de grosses quantités de sel est au Japon un facteur notable de la forte prévalence de l'hypertension et de ses complications — accidents vasculaires cérébraux et affections cardiaques. Il est intéressant de noter que l'hypertension répond mieux à la restriction de la consommation de sel chez les patients âgés que chez les malades jeunes.

Le tabagisme est un facteur majeur de risque de cardiopathie ischémique et son arrêt est bénéfique, m ê m e à un âge avancé.

Les cardiopathies

Depuis dix ans, la compréhension des mécanismes de l'insuffisance cardiaque, son traitement et celui des cardiopathies ischémiques et valvulaires progressent à pas de géant. Des avancées majeures ont été faites. Les patients âgés en ont été les principaux bénéficiaires et ont vu leur qualité de vie s'améliorer considérablement.

L a cardiopathie ischémique

O n l'a dit, la cardiopathie ischémique est de loin la plus c o m m u n e des affections cardiaques chez les personnes âgées dans la plupart des pays industrialisés. Elle peut rester absolument « muette » cliniquement pendant toute la durée de l'existence de celui qui en est atteint, c o m m e elle peut causer sa mort subite; les symptômes auxquels elle donne lieu vont du bénin au catastrophique.

L a douleur précordiale de l'angine de poitrine (ou angor) est l'un de ses symptômes courants, généralement induit par l'effort. A u cours des dernières années, on a pris plus vivement conscience que sa manifestation brutale au repos était un signe d'angor instable ou syndrome de menace, qui exige d'urgence un examen et un traitement propres à prévenir l'évolution vers l'infarctus aigu d u myocarde. L'angine de poitrine stable peut répondre à un traitement simple pendant de longues années. Pour des raisons encore mal connues, elle est moins souvent le révélateur d'une athérosclérose coronarienne latente chez les personnes très âgées. Les accidents ischémiques dits « silencieux » retiennent depuis peu une attention intense. Ils peuvent provoquer des morts subites o u une dégradation progressive de la fonction cardiaque et frappent particulièrement les personnes âgées. L'apparition insidieuse d'insuffisance cardiaque est une forme c o m m u n e de cardiopathie ischémique à cette époque de la vie.

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Les maladies cardiaques des personnes âgées : progrès récents de la médecine

Traitement

Angioplastie transluminale coronarienne percutanée. Cette technique consiste à intro­duire des sondes à ballonnets de diverses tailles dans une artère de l'aine ou, moins souvent, du bras et à la pousser jusqu'aux artères coronaires de la paroi cardiaque. U n e fois la sonde placée dans la zone rétrécie de l'artère, les ballonnets sont gonflés pour dilater celle-ci. Les premières études portant sur cette technique ont montré que la mortalité et la morbidité qui l'accompagnent sont considérablement plus élevées chez les personnes âgées. L a courbe de l'amélioration de la méthode est tou­tefois remarquable, et les établissements qui en ont une bonne pratique obtiennent maintenant chez les vieillards des résultats comparables à ceux obtenus chez des sujets plus jeunes.

Pontage des artères coronariennes. Les extraordinaires progrès de la technique du pontage coronarien ont été particulièrement profitables à certains patients âgés. Alors qu'avant 1974 on signalait une mortalité opératoire supérieure à 20 % chez les malades âgés de plus de 70 ans, les dernières études font apparaître une mortalité de moins de 5 %. L a morbidité consécutive à cette intervention de cardiochirurgie reste toutefois plus élevée chez les vieillards que chez les personnes jeunes, l'infarctus périopératoire du myocarde et les accidents vasculaires cérébraux postopératoires étant particulièrement fréquents.

Infarctus du myocarde

Chez les personnes dans la force de l'âge, l'infarctus du myocarde (ou crise cardiaque) touche surtout les h o m m e s . Sa fréquence s'accroît avec l'âge chez les deux sexes, mais, après 70 ans, il est plus susceptible de frapper les femmes que les h o m m e s . L'inci­dence de l'âge sur les manifestations cliniques de ce trouble a été soulignée vers la fin des années 1960, mais ce n'est que récemment que l'on a pu démontrer plus précisément les effets progressifs du vieillissement sur les symptômes de cette affection par trop c o m m u n e . (Figure 1.)

Traitement

Plusieurs études récentes ont confirmé les bienfaits de l'administration d'un traite­ment thrombolytique au cours des heures qui suivent immédiatement l'infarctus. Aussi efficaces l'un que l'autre, les traitements par l'aspirine et par la streptokinase ont, en association, l'avantage d'être synergiques. U n produit voisin, l ' A P S A C (complexe d'anisyl-streptokinase activateur du plasminogène — heureusement abrégé en anistreplase), semble donner de meilleurs résultats que la streptokinase. L ' u n et l'autre agent sont efficaces dans le traitement de l'infarctus du myocarde chez les patients âgés, lesquels, d'après les données existantes, se trouveraient m ê m e mieux de l'administration de ces médicaments que les malades d'âge moyen. Le problème pratique qu'ils posent tient à ce que le diagnostic très précoce de l'infarctus et son traitement dans les six heures — et m ê m e , si possible, dans les deux heures qui suivent — sont souvent plus difficiles à réaliser chez les vieillards. L'activateur du plasminogène d'origine tissulaire récemment mis au point par des techniques de recombinaison de l ' A D N devrait théoriquement se révéler d 'un emploi plus sûr dans

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John Pathy

Figure 1

Symptômes associés à l'infarctus aigu du myocarde chez 377 personnes âgées hospitalisées : pourcentage de patients dans chaque groupe d'âge présentant le symptôme. Source. Bayer, et al., Journal of the American Geriatrics Society, vol. 34,1986, p . 263-267.

£ 80

60

Douleur dans la poitrine

40 -

20 -

20 r

0 "-

20

2 0 r-

0 L

Groupe d'âges

Essoufflements

40

20

0

Sueurs Vomissements

Syncope Confusion mentale aiguë

Faiblesse Vertiges

TH-T-H Accident vasculaire cérébral

»U1

i oo +

Palpitations

i

T7r. TT1— 00 +

i Ó lO 00 00

le cas des personnes âgées, car les risques d'hémorragie qu'il entraîne sont minimes. U n e vaste étude comparative sur l'utilisation de ces trois médicaments dans le traitement de l'infarctus du myocarde doit démarrer cette année, avec la participation de centres de recherche de plusieurs pays.

Rétrécissement de l'aorte

C'est chez les personnes âgées que les rétrécissements aortiques sévères sont actuel­lement le plus fréquents : ceux qui sont dus à une calcification surviennent surtout chez les plus de 70 ans. Le traitement privilégié des patients qui en manifestent les symptômes consiste à remplacer la valvule aortique. L a mortalité opératoire est de 5 %, mais peut dépasser 30 % lorsque l'intervention est effectuée dans des conditions d'urgence. Les accidents vasculaires cérébraux peuvent constituer une complication

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Les maladies cardiaques des personnes âgées : progrès récents de la médecine

postopératoire. Certains patients âgés présentent aussi parallèlement une affection des artères coronaires qui exige en outre, soit un pontage coronarien, soit une angioplastie transluminale coronarienne percutanée. Lorsque le malade est trop fragile ou trop gravement atteint pour supporter une intervention majeure, la dila­tation de la valvule aortique, au moyen d'une sonde à ballonnets, se révèle utile. Dans ce cas, la sonde à ballonnets est généralement introduite par l'aine dans l'artère fémorale sans qu'une anesthésie générale soit nécessaire. U n e fois le ballonnet placé au siège du rétrécissement de la valvule, il est gonflé pour dilater celle-ci. Cette procédure ne produit pas les effets bénéfiques de longue durée qui sont associés au remplacement de la valvule aortique, mais elle peut améliorer la qualité de l'existence de personnes dont l'espérance de vie est limitée par d'autres affections ou donner à des malades cardiaques en phase aiguë le temps de récupérer suffisamment pour supporter plus tard le remplacement de la valvule.

Atteinte de la valvule mitrale

Depuis la découverte de la pénicilline, la fréquence du rhumatisme articulaire aigu a diminué de façon spectaculaire dans les pays industriels, m ê m e si certains indices récents laissent craindre que cette évolution ne soit pas irréversible. Cette diminution du rhumatisme articulaire aigu s'est accompagnée d'une disparition progressive des cardiopathies rhumatismales chez les personnes jeunes. Aujourd'hui, les valvu-lopathies d'origine rhumatismale sont une affection de la vieillesse. Les patients ont généralement connu dans leur enfance ou dans leur adolescence un épisode bénin de rhumatisme articulaire aigu qui n'a guère ou n'a pas e n d o m m a g é le myocarde. U n muscle cardiaque sain tolère étonnamment bien les rétrécissements valvulaires, dont les symptômes peuvent ne jamais se manifester ou n'apparaître que dans la vieillesse. U n e congestion (œdème) pulmonaire aiguë, de la tachycardie due à une fibrillation auriculaire ou une embolie peuvent être les signes annonciateurs de la maladie.

Le taux de mortalité associé au remplacement de la valvule mitrale est plus élevé, chez les personnes âgées, que celui qui est lié au remplacement de la valvule aortique, mais l'atténuation des symptômes est comparable à celle obtenue chez les malades plus jeunes. Malheureusement, la mortalité reste élevée chez les vieillards lorsqu'il faut remplacer les deux valvules, car les troubles de fonctionnement du muscle cardiaque sont alors plus marqués.

Hypertension

L'hypertension est le principal facteur de risque d'hémorragie cérébrale, accident courant chez les personnes âgées. Des études récentes, en particulier un essai théra­peutique conduit par l ' E W P H E (Groupe de travail européen sur l'hypertension chez les personnes âgées), ont montré que la morbidité et la mortalité par accident vasculaire cérébral sont nettement plus faibles parmi les sujets dont l'hypertension artérielle est traitée activement. Le nombre de personnes très âgées ayant participé à l'essai est trop faible pour qu'on puisse affirmer avec certitude que le traitement est également profitable à cette catégorie de patients; toutefois, il ressort clairement de toutes les études que les avantages du traitement, définis par la réduction de la morbidité et de la mortalité par accident vasculaire cérébral, sont plus importants

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John Pathy

Tableau 1 Age (années) H o m m e s Femmes

Fréquence moyenne des cas d'hypertension 65-74 31,8 49,9 caractérisée dans la 75-79 45,9 41,6 population des États-Unis _ _. , rT „ , w . „ ,„„_ ,, . , , , , / inn L t „ i Source. D'après H . W . Miller, 1973. National health and nutrition (pour 100 habitants) examination surveyy États-Unis d'Amérique, 1971-1973.

Tableau 2 Fréquence moyenne

Fréquence des cas Ä t t (pour 100 habitants) d'hypertension dans le sud-ouest de la France

État 65-69 ans

15,3 7,7 12,1

35,1

70-74 ans

15,6 7,5 17,2

40,3

75-90 ans

14,9 7,7 19,1

41,7

Hypertension caractérisée Hypertension diastolique isolée Hypertension systolique isolée

Total

Source. Caisse régionale d'assurance maladie d'Aquitaine, Bordeaux, 1983.

chez les sujets âgés que chez les plus jeunes. Les accidents cardio-vasculaires liés à une insuffisance cardiaque o u à un infarctus du myocarde sont également moins fréquents chez les personnes âgées traitées pour hypertension, mais la réduction de la mortalité observée dans les diverses expériences est apparue dans ce cas moins uniforme, peut-être en raison de différences entre les traitements administrés. Ces essais thérapeutiques avec groupes témoins récemment consacrés à l'hypertension ont eu pour effet primordial de mettre en évidence les avantages d 'un abaissement d'une pression artérielle trop élevée chez les personnes âgées, en tout cas chez les plus jeunes d'entre elles. (Tableaux 1, 2.)

O n reconnaît maintenant que l'hypertension systolique isolée est une caractéris­tique de la vieillesse, qui est associée à une mortalité et à une morbidité excessives par accident cardio-vasculaire et cérébro-vasculaire. (Figure 2.) O n ne sait pas encore si sa réduction influera sur ces accidents vasculaires. Le P r o g r a m m e S H E P (Pro­g r a m m e pilote sur l'hypertension systolique chez les personnes âgées) a démontré qu'il est en tout cas possible d'amener des personnes âgées présentant cette caracté­ristique à participer à une étude et d'abaisser dans une mesure satisfaisante leur pression artérielle systolique. Il faudra attendre les résultats d'une expérience en cours pour savoir si cette intervention a des effets bénéfiques.

Insuffisance cardiaque

Surtout observé chez les vieillards, ce syndrome est dû c o m m u n é m e n t à une cardio­pathie ischémique latente, à de l'hypertension ou à une cardiopathie valvulaire.

L a connaissance de la pathophysiologie de l'insuffisance cardiaque progresse depuis quelques années par véritables bonds, servant de base à l'élaboration ration­nelle de nouvelles stratégies thérapeutiques.

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Les maladies cardiaques des personnes âgées : progrès récents de la médecine

Figure 2

Probabilité de troubles cardio-vasculaires dans les huit années à venir selon la pression artérielle systolique, par groupe d'âge et par sexe. Source. Kannel et Dawber, Br. J. Hosp. Med., n° 11, 1974, p. 508-523.

Les diurétiques, qui agissent sur les reins en réduisant la surcharge en sel et en eau, restent les premiers médicaments à utiliser. Toutefois, ils n'améliorent pas le débit cardiaque et peuvent m ê m e l'abaisser en diminuant le volume du plasma et la pression auriculaire gauche. O n est maintenant conscient que ces agents stimulent le système rénine-angiotensine, qui accroît la résistance vasculaire et peut par là modérer le débit cardiaque. L'administration d'inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine, qui bloquent la production d'angiotensine II, réduit la résistance vasculaire et augmente le débit cardiaque. Cette nouvelle classe de médicaments permet de mieux maîtriser l'insuffisance cardiaque et de réduire souvent les doses de diurétiques utilisés, améliorant d u m ê m e coup le bien-être des patients. O n a des preuves croissantes que les inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angio­tensine peuvent allonger l'espérance de vie.

Le xamotérol, nouvel agoniste partiel Beta 1, accroît le débit cardiaque ventri-culaire gauche et a des effets bénéfiques sur les insuffisances légères à modérées, en particulier chez les patients âgés, ajoutant ainsi u n autre agent utile à l'arsenal thérapeutique.

Conséquences des cardiopathies de la vieillesse

N o u s l'avons dit, les cardiopathies sont une cause majeure de morbidité et de mortalité chez les personnes âgées. Les invalidités qu'elles entraînent peuvent être considérables et prolongées. C o m m e les autres troubles chroniques invalidants, elles amoindrissent les capacités fonctionnelles générales, mais aussi l'autonomie. U n e cardiopathie a d'énormes conséquences sociales pour le malade, pour sa famille, pour la collectivité. Si, chez les patients plus jeunes, la reprise d u travail constitue u n utile critère du succès du traitement d'une crise cardiaque, chez les personnes âgées, le critère est la capacité d'exécuter les actes de la vie quotidienne et de reprendre les activités sociales antérieures. N o u s avons montré que l'offre de conseils aux malades à la suite d'une crise cardiaque réduit les incapacités d'ordre psycholo-

Probabilité pour 1000 personnes

H o m m e s 300H

200-

100-

Femmes

Tension systolique

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John Pathy

gique et améliore les performances fonctionnelles. Il serait nécessaire de procéder à des enquêtes par sondage sur des populations de personnes âgées pour déterminer le niveau de dépendance lié aux cardiopathies dans la société.

Conclusion

Les maladies cardiaques sont une cause majeure de décès et d'invalidité chez les personnes âgées. Les grands progrès réalisés dans leur traitement ont réussi à améliorer considérablement la qualité de la vie et l'autonomie de nombreuses personnes âgées. Néanmoins, il subsiste vraisemblablement, dans les couches pro­fondes de nos sociétés, une vaste poche non quantifiée d'incapacités fonctionnelles et de souffrances chroniques sur lesquelles ces avancées technologiques spectaculaires n'ont pas eu de prise et dont on n'entend jamais parler. •

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Le rôle du cerveau dans la surpopulation, le vieillissement et la dépendance

Ronald D . T. Cape

A l'aube du XXIe siècle, les personnes âgées seront de plus en plus nombreuses et, à cause des modifications subies par le cerveau au cours du vieillissement, beaucoup d'entre elles auront sans doute besoin d'aide dans la vie quotidienne. Accroître les ressources consacrées à la recherche sur le vieillissement du cerveau pourrait permettre de réduire l'incidence d'affections telles que la maladie d'Alzheimer et constituer sur le plan purement économique un investissement rentable.

Accompagné de l'infirmière des services sociaux, je monte avec précaution les quatre marches usées et m'approche de la porte de la vieille maison à charpente de bois. Elle n'est pas fermée et, par un corridor faiblement éclairé, nous nous avançons jusqu'au fond de la maison, conduits par le son de voix qui nous parviennent par une porte ouverte. A l'intérieur de la petite pièce, rougeoit un radiateur électrique aux résistances incandescentes, spectacle inattendu en ce jour de printemps très doux. U n vieil h o m m e est assis à côté du radiateur, pelotonné tout près de la source de chaleur. Il s'adresse à nous d'un air quelque peu irrité, nous demande qui nous s o m m e s et ce que nous voulons. Il se plaint de ce que son médecin vienne rarement le voir, alors qu'il lui serait facile de jeter un simple coup d'œil en passant. D e l'autre côté de la pièce, une vieille d a m e , silencieuse depuis notre arrivée. O n nous dit qu'elle est sourde; mais en parlant lentement et distinctement nous parvenons à bien nous en faire comprendre. Quatre mois plus tôt, ce vieux couple était encore autonome. La maison est pauvre, mais ils sont habitués à n'avoir qu'un m i n i m u m de confort et s'en satisfont. Le mari a c o m m e n c é à souffrir de rétention urinaire, et, à peu près au m ê m e m o m e n t , sa f e m m e est tombée et s'est fêlé une côte. Pour la première fois de leur vie, ils se trouvent dans l'incapacité de se débrouiller seuls. Il est âgé de 100 ans, elle de 98, et sont mariés depuis soixante-douze ans.

Ronald D . T . Cape, né en Ecosse, est diplômé de l'Université d'Edimbourg. Il a exercé la médecine au R o y a u m e - U n i pendant vingt ans avant de se rendre au Canada en 1975, à l'University of Western Ontario, pour y créer une unité de gériatrie. Il y est resté en qualité de professeur de médecine jusqu'en 1986, date à laquelle il est parti pour Melbourne (Australie). Il est président du comité de l'Institut national (australien) de recherche en gérontologie et en gériatrie. Ronald D . T . Cape est l'auteur à'Aging : Its complex management et codirecteur de publication de Fundamentals of geriatric medicine. Il a écrit de nombreux articles et études sur le sujet du vieillissement. O n peut le contacter à l'adresse suivante : N R I G , M o u n t Royal Hospital, Poplar Road , Parkville, Victoria 3052, Australie.

29 Impact : science et société, n° 153, 29-40

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Ronald D . T. Cape

U n e semaine plus tard, nous rendons visite à un autre couple. Les époux ont dix ans de moins, mais sont mariés depuis soixante-huit ans et restent autonomes, bien que la vieille d a m e , atteinte de démence senile, soit dans l'incapacité de prendre soin d'elle-même. Le vieux monsieur a été obligé d'abandonner son jardin, pendant des années la fierté du voisinage, de se mettre à la cuisine et de s'occuper de sa femme. Il regrette le jardin, mais accepte son sort de bonne grâce.

Tous les quatre ont été adressés au service gériatrique local pour que celui-ci les conseille sur la façon d'organiser désormais leur existence. Il a été décidé de leur fournir une aide supplémentaire à domicile pour leur permettre de continuer à vivre chez eux. N o u s rencontrons de plus en plus de ménages de ce genre à mesure que nous approchons de la dernière décennie du X X e siècle. Toutefois, nombre de vieilles personnes n'ont pas la chance d'avoir encore un compagnon avec qui partager les joies et les peines de la vie. Tous ces cas témoignent de la modification spectacu­laire de la population mondiale au cours de ce siècle.

Cette modification fait suite à une longue évolution dont l'élément clé a été le développement du cerveau. Si c'est à ce facteur que l'humanité doit son rôle domi­nant dans le règne animal, il ne faut pas s'étonner que la défaillance de la fonction cérébrale chez les personnes âgées soit dans leur cas la principale cause de dépen­dance. Nous démontrerons successivement ces deux affirmations.

L'évolution de l'homme

Il y a sur la terre des animaux plus gros, plus forts, plus rapides que l 'homme. Homo sapiens règne néanmoins sans partage sur notre planète et m ê m e au-delà. Il le doit au développement de son cerveau, lequel est sans doute le système infor­matique à la fois le plus complexe et le plus flexible que l'on connaisse. Pour illustrer son efficacité et les raisons de la suprématie de l'être humain sur toutes les autres créatures, il n'est pas inutile de rappeler ce que l'on sait de l 'homme préhistorique et de ses descendants, en mettant ces informations en relation avec le volume et le fonctionnement du cerveau humain.

Il y a deux ou trois millions d'années, les préhominiens qui peuplaient le m o n d e étaient les australopithèques. D e leur apogée jusqu'à l'entrée en scène de l 'homme de Cro-Magnon (il y a environ 35 000 ans), le volume du cerveau humain a triplé. C'est là un changement beaucoup plus considérable que tous ceux qu'a enregistrés notre espèce pendant cette période de plus de deux millions d'années : alors que la taille et la corpulence des êtres humains augmentaient sans doute de 20 à 40 %, la croissance de leur cerveau atteignait 300 %, ce qui permet de penser que le développement de cet organe a été un facteur décisif dans l'évolution de l 'homme.

Le cerveau des animaux peut conserver et enregistrer des informations, puis les associer pour les transformer ultérieurement en performances appropriées, mais seul l 'homme est capable de transmettre ces processus à d'autres individus. Il est probable qu'au cours du développement qu'a connu le cerveau, de l'australopithèque à l 'homme de Cro-Magnon , le langage a été la principale acquisition apportée par l'évolution. La communication est le fondement du travail d'équipe, et celui-ci a sans doute déterminé pour une large part la survie de tels ou tels groupes d ' h o m m e s primitifs dans les combats qu'ils ont livrés pour s'assurer les meilleurs territoires d'habitation. Le triomphe constant des meilleurs communicateurs a dû, sur le plan de l'évolution,

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Le rôle du cerveau dans la surpopulation, le vieillissement et la dépendance

donner un avantage à ceux qui avaient les meilleurs cerveaux, ce qui a pu accélérer le processus de croissance cérébrale.

Avant de développer ce raisonnement, il est bon de rappeler c o m m e n t fonctionne le système nerveux.

Les fonctions du système nerveux central

O n compte dans l'organisme humain 15 à 20 milliards de cellules nerveuses, et pour chacune 10 000 liaisons avec les autres. L'extraordinaire complexité du cerveau et des nerfs explique le large éventail d'activités commandées par le système nerveux central. La substance cérébrale est formée de corps cellulaires entourés d'un entre­lacs de dendrites, longues projections semblables à des tentacules, issues des cellules nerveuses et y conduisant, qui établissent entre elles d'innombrables liaisons, ensemble complexe connu sous le n o m d'espace dendritique.

Les récepteurs transforment des stimuli de toutes sortes en énergie nerveuse, permettant ainsi la transmission des impulsions de la périphérie vers le centre. Le sujet est conscient de certaines de ces impulsions, s'agissant par exemple de percep­tions tactiles, thermiques ou douloureuses, mais non d'autres c o m m e les stimuli proprioceptifs, provenant des muscles et des articulations, qui informent le cerveau de la position des membres dans l'espace et nous permettent de contrôler le fonc­tionnement des membres et du tronc. U n troisième groupe de stimuli est associé aux sens spécialisés de la vue, de l'ouïe, du goût, de l'odorat.

Les effecteurs sont caractérisés par leurs unités motrices. Chaque muscle en comporte un grand nombre, de taille variable selon le type de muscle. Les petits muscles de la main, qui interviennent dans des mouvements délicats et précis, sont dotés de nombreuses unités motrices de petite taille (dix à vingt fibres innervées pour un m ê m e axone), alors que les muscles de la force, par exemple ceux du segment proximal des membres, qui entrent en jeu lorsqu'il n'est pas besoin de mouvements délicats et adroits mais de force brute, sont dotés d'unités motrices moins n o m ­breuses, mais plus grandes, qui peuvent comprendre jusqu'à 1 500 fibres contrôlées par un seul axone. Chaque unité motrice est une entité distincte.

Récepteurs et effecteurs subissent l'influence d'autres parties du système nerveux central. Les messages sensoriels sont transmis par les formations réticulaires de la moelle, du pont de Varóle et du cerveau moyen , avant d'être orientés vers le cortex sensoriel par l'intermédiaire du thalamus. Les impulsions émanant du cortex moteur sont modifiées par les informations transmises par le cervelet, le noyau rouge, la substance noire, les ganglions basaux, le cerveau moyen , les formations réticulaires du pont et de la moelle. Les espaces dendritiques permettent au cerveau d'établir plus facilement une série extrêmement complexe de liaisons entre les parties senso­rielles et motrices du système nerveux, ainsi qu'entre les différents éléments composant chacune d'entre elles.

Le système nerveux autonome règle l'essentiel du fonctionnement des viscères par l'intermédiaire des nerfs sympathiques et parasympathiques. Il c o m m a n d e surtout les activités involontaires, alors que les systèmes moteur et sensoriel concernent plutôt les activités volontaires. L a transmission des stimuli sympathiques joue un rôle important dans la régulation de la pression sanguine, de la température et de la motilité intestinale.

C e système complexe remplit diverses fonctions. Il c o m m a n d e et coordonne notamment l'activité neuromotrice et assure également des liaisons automatiques,

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programmées génétiquement, qui contrôlent des programmes d'action complexes mis en mouvement par des stimuli afférents particuliers. Il analyse et intègre en outre des informations sensorielles pour donner une image du m o n d e extérieur. L'accom­plissement de tâches plus élaborées permet d'enregistrer les événements significatifs et de les grouper en associations appropriées grâce auxquelles l'individu arrive à connaître et à comprendre comment et pourquoi ces événements se produisent. Enfin, la fonction la plus remarquable du cerveau humain est la fonction créatrice de la pensée abstraite, qui se traduit dans le langage, l'art ou la musique. Le pouvoir de communiquer, qui s'est développé lentement pendant toute l'époque préhistorique, a progressé à pas de géant au cours des 30 000 à 40 000 dernières années, depuis les peintures rupestres de l ' h o m m e de C r o - M a g n o n jusqu'à l'invention de l'écriture. Toutes les réalisations de la révolution industrielle, de m ê m e que les progrès techno­logiques plus récents, sont le fruit de la réflexion et de l'imagination du cerveau humain.

L'influence du cerveau humain sur la population mondiale

C e développement considérable du système nerveux central a eu de profondes répercussions non seulement sur l'environnement, mais aussi sur la population mondiale. Celle-ci comptait en l'an 1000 environ 300 millions d 'âmes; neuf siècles

Figure 1 Population totale (en millions de personnes)

La population mondiale 6 0 0 0 ~ entre l'an 1000 et l'an 2000 (estimations).

4 500-

3 000-

1 500-

1000 1200 1400 1600 1800 2000

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Le rôle du cerveau dans la surpopulation, le vieillissement et la dépendance

Figure 2

La population du Royaume-Uni en 1891 et en 1968.

H o m m e s F e m m e s

Millions 2 2 Millions

plus tard, en 1900, elle en comptait 1,5 milliard. D'après les estimations, elle devrait passer à 6 milliards d'ici à l'an 2000; l'accroissement de 4,5 milliards d'individus qui aura ainsi été enregistré au x x e siècle représentera un changement spectaculaire. L a figure 1 illustre cette croissance de la population mondiale.

La deuxième grande modification observée concerne la structure des populations de l'Europe, de l'Amérique du N o r d , de l'Australie et, dans une moindre mesure, de l ' U R S S , qui fait apparaître une augmentation frappante du nombre de personnes âgées. L a figure 2, qui donne les chiffres de l'évolution démographique au R o y a u m e - U n i , illustre cette tendance. La population de ce pays est passée de 35 à 52 millions de personnes entre 1891 et 1968, mais, alors que le nombre déjeunes adultes n'a enre­gistré qu'une modeste hausse de 10 à 20 %, celui des personnes âgées de 45 ans et plus a doublé; celui des plus de 65 ans a triplé.

Ces changements relativement soudains, dans la perspective de l'évolution tout au moins, sont imputables aux découvertes sur la nature des micro-organismes et le rôle du m o n d e invisible de la microbiologie dans la propagation des maladies. Il est désormais possible de prévenir de nombreuses infections auxquelles beaucoup de nos ancêtres succombaient précocement et, grâce à la prévention de certaines maladies et à la guérison de certaines autres, l'espérance de vie, qui était d'environ 55 ans il y a un siècle, est passée à 75 ans en 1988 (un peu plus pour les femmes, un peu moins pour les h o m m e s ) . Le savoir qui a produit cette situation nouvelle est le résultat d'études engendrées, au x v m e et au xixe siècle, par l'imagination créatrice des scientifiques.

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Le cerveau humain a remporté des succès remarquables, mais il a également créé d'énormes problèmes. L'explosion démographique mondiale et, en particulier, l'augmentation massive du nombre de personnes âgées ont bouleversé la vieille croyance selon laquelle l'évolution est déterminée par la survie des plus aptes. A l'orée du xxie siècle, le monde comptera de plus en plus de personnes âgées, dont beaucoup auront besoin d'aide pour pouvoir continuer à vivre.

Les effets do vieillissement

Les systèmes de l'organisme humain se dégradent avec l'âge. Si l'on étudie le vieillissement de l'individu « moyen », on constate que le fonctionnement de tous les systèmes décline progressivement à partir de l'âge de 30 ans. D e nombreuses études dignes de foi sur le fonctionnement du cœur, des poumons , des reins et du cerveau au cours du vieillissement ont été faites sur de grands échantillons représen­tatifs de l'ensemble de la population et sur des groupes longitudinaux soumis à des tests répétés pendant une période donnée. Cela ne veut pas dire que le processus de sénescence soit le m ê m e chez tout le m o n d e : certains individus se comportent c o m m e l'individu « moyen » type; pour différentes raisons — négligence, abus divers ou maladie — d'autres déclinent plus rapidement; d'autres encore, qui ont davantage pris soin de leur personne, ont un patrimoine génétique de meilleure qualité ou simplement parviennent à échapper à la maladie, conservent jusqu'à un âge avancé l'ensemble de leurs systèmes en état de fonctionnement optimal ou quasi optimal. L'effet de l'âge sur les différents systèmes n'est pas uniforme. Chez certains individus, il pourra y avoir détérioration rapide du système cardio-vasculaire; chez d'autres, c'est le système digestif ou le système nerveux central qui sera atteint.

Cette variabilité est liée à trois facteurs : la maladie, l'hérédité, le m o d e de vie. Des maladies c o m m e les infections à répétition des voies respiratoires peuvent entraîner une nette accélération des modifications pulmonaires associées au vieillis­sement; un infarctus du myocarde laissera une cicatrice et une lésion permanente sur le muscle cardiaque et accélérera le vieillissement du système cardio-vasculaire; un accident vasculaire cérébral entraînera une perte de tissu cérébral et aura des conséquences analogues. L'hérédité joue souvent un rôle, et si parents et grands-parents ont vécu jusqu'à un âge avancé, leurs enfants et petits-enfants peuvent s'attendre à vivre eux aussi très vieux. D e la m ê m e manière, d'autres sont héréditai­rement prédisposés à certaines affections telles que l'hypercholestérolémie, le diabète sucré ou le syndrome de D o w n : leur vie s'en trouvera raccourcie, leur vieillissement accéléré. Enfin, les fumeurs ou les gros buveurs, ainsi que les personnes obèses ou anorexiques, ont un m o d e de vie qui leur est préjudiciable.

L'objectif premier des personnes âgées est de rester autonomes. Or , un mauvais état de santé est cause de dépendance. Chez les personnes âgées, la dépendance est le plus souvent liée aux atteintes du système nerveux central, du fait que celui-ci joue un rôle crucial en réglant et en contrôlant les fonctions de l'ensemble de l'orga­nisme. Pour développer davantage ce thème, il est bon de comprendre ce qui arrive au cerveau à mesure qu'il vieillit.

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Le rôle du cerveau dans la surpopulation, le vieillissement et la dépendance

L e vieillissement du cerveau

Il a été rendu compte en 1968 d'une étude pathologique approfondie et méticuleuse portant sur soixante-dix-huit cerveaux de personnes âgées décédées à Newcastle (Royaume-Uni), dont cinquante étaient atteintes de démence senile et vingt-huit ne l'étaient pas. Les caractères pathologiques étudiés comprenaient le nombre de plaques seniles et la présence ou l'absence d'enchevêtrements de neurofibrilles et d'une dégéné­rescence granulovacuolaire. L'étude prenait aussi en considération les diagnostics cliniques. O n s'était particulièrement attaché à différencier les cas de démence senile des psychoses fonctionnelles et des états délirants. Les personnes non atteintes de démence, qui servaient de groupe de contrôle, souffraient de diverses affections physiques. L'étude avait pour objet de déterminer la corrélation entre les données pathologiques, cliniques et psychologiques. Les résultats firent apparaître une liaison étroite entre le nombre de plaques seniles et un diagnostic clinique de démence senile. L 'examen pathologique des cerveaux provenant des vingt-huit sujets non atteints de démence révéla dans la moitié des cas certaines modifications pathologiques, mais beaucoup moins importantes que celles observées dans les cerveaux ayant appartenu à des sujets déments.

U n e autre caractéristique bien connue du vieillissement du cerveau est le lent accroissement de la quantité de granules de pigment qui s'accumulent dans les neurones et dans les cellules névrogliques. La nature précise de ce pigment n'a pas encore été établie, mais il s'agit d'une substance graisseuse, peut-être dérivée des lysosomes et consistant en matériel enzymatique. C e pigment a également été étudié chez les singes rhésus, qui présentent des modifications analogues à celles que l'on observe chez les humains, avec accumulation régulière de lipofucsine dans les cellules cérébrales. O n observe de fins granules de lipofucsine chez 77 % des singes âgés de 19,5 ans, alors qu'on n'en trouve jamais chez les singes nouveau-nés. O n ne connaît pas encore les effets exacts de ce pigment, mais on peut raisonnablement penser que sa présence n'est pas bénéfique pour la cellule, qu'elle pourrait m ê m e lui être nuisible.

Le vieillissement s'accompagne d'altérations importantes de la chimie de la cellule cérébrale. O n en a la confirmation en comparant la chimie générale du cerveau chez les personnes âgées et chez les jeunes. La teneur en eau du cerveau, qui est de 92 % à la naissance, tombe à environ 76 % à 90 ans. D e m ê m e , si la teneur en A D N , en A R N et en protéines triple entre la naissance et l'âge m û r , la quantité de protéines dans le poids sec du cerveau tombe de 140 g à 100 g entre la maturité et l'âge de 90 ans. Il s'agit là de méthodes grossières de mesure d 'un processus extrêmement complexe de modification continue, mais qui confirment une fois de plus que les cellules neuronales et névrogliques subissent une série de changements à mesure que l'individu se développe, atteint la maturité, puis vieillit.

Les caractéristiques électriques du cerveau chez les individus jeunes, mûrs et âgés mettent en évidence le m ê m e phénomène. Les réponses aux stimuli visuels varient avec l'âge du sujet, ce qui indique, là encore, que le fonctionnement électrique du cerveau est modifié par l'âge, confirmant et attestant une fois de plus que le vieillis­sement entraîne une diminution des facultés.

L'affaiblissement et le déclin progressifs de l'aptitude à reconnaître et à traiter un large éventail de stimuli externes ont sans doute des conséquences de la plus haute importance. Si l'on se rappelle que la fonction essentielle du cerveau est la communication, au sens le plus large, il paraît évident que la première étape de ce processus complexe doit être la reconnaissance des messages. Le vieillissement rend

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Ronald D . T. Cape

cette opération de plus en plus difficile en raison de la détérioration ou de la perte de certains récepteurs, de la diminution du nombre de neurones afférents et de la perte de zones correspondantes dans les noyaux et le cortex cérébraux. L'allongement des temps de réponse et le fait que l'inhibition des signaux non pertinents devienne de plus en plus difficile donnent à penser que l'aspect le plus critique est peut-être celui du traitement central de l'information.

Il n'est pas facile de mesurer les performances du cerveau, et peu d'observations directes permettent de déterminer avec précision dans quelle mesure son fonction­nement est satisfaisant. U n e des méthodes les plus évidentes consiste à mesurer la fonction cognitive, le résultat étant exprimé sous la forme d'un quotient intellectuel. Les premiers tests effectués à cet égard ont semblé mettre en évidence une diminution régulière de nos capacités cognitives avec l'âge. Mais ce résultat a été contesté, parce que les études faites portaient sur des échantillons représentatifs de l'ensemble de la population. Lorsqu'on a refait la m ê m e expérience en utilisant des cohortes d'âges différents que l'on a suivies en répétant les tests deux fois en l'espace de quatorze ans, les résultats obtenus ont été tout à fait différents. C'est en effet seulement dans les groupes dont les membres étaient initialement âgés de 53 ans ou plus qu'une baisse de performance a été constatée à mesure du vieillissement. Cela montre qu'il y a toutes chances pour que les tests psychologiques standard fassent apparaître chez l'individu « m o y e n » âgé de 60 ans ou plus une certaine perte d'intelligence.

Le cerveau humain subit donc en vieillissant une détérioration analogue à celle d'autres parties du corps. Est-elle plus grave que, par exemple, celle du cœur? Sans doute, car pour conserver son autonomie il est plus important d'avoir un cerveau en parfait état de fonctionnement. E n effet, si l'on peut compenser un dysfonction­nement cardiaque en modérant son activité, on ne peut pas s'adapter sans l'aide d'autrui à une paralysie ou à la perte d'une fonction cognitive. O n entend par auto­nomie la capacité d'accomplir seul tous les actes nécessaires à la vie quotidienne. C'est le problème auquel sont constamment confrontées les personnes très âgées. Il paraît logique, pour étudier les problèmes qui menacent cette autonomie, d'exa­miner le cas de personnes âgées dont on envisage l'admission dans un établissement de soins de long séjour, dès lors que les troubles dont elles sont affligées sont la cause déterminante de leur perte d'autonomie.

O n trouvera au tableau 1 les résultats d'une étude portant sur une série consé­cutive de cas adressés au département de gériatrie d 'un grand hôpital de Birmingham (Royaume-Uni). Il montre que la perte de mobilité, la confusion mentale et l'inconti­nence sont les trois problèmes les plus courants. O n retrouve les m ê m e s caractéris­tiques, avec la m ê m e fréquence, dans un échantillon de 731 personnes, représentant un tiers de l'ensemble des pensionnaires des établissements pour personnes âgées de London, Ontario (Canada). (Tableau 2.)

U n e troisième étude portant sur deux groupes de patients a été récemment effectuée à Victoria (Australie). Le groupe A était composé de 99 femmes et 61 h o m m e s qui avaient été adressés à deux services gériatriques régionaux pour diagnostic de leur cas et conseil sur les dispositions matérielles à prendre. L'admission dans un établissement de long séjour était envisagée dans tous les cas. Le deuxième groupe (B) était composé d'une cohorte de patients déjà pensionnaires d'un établis­sement de soins de Victoria, beaucoup y séjournant depuis plusieurs mois ou plusieurs années. Les deux groupes étaient divisés chacun en deux catégories : la première comprenait les personnes dont le cas avait fait l'objet d'un diagnostic neurologique — démence senile, attaque ou maladie de Parkinson, par exemple — et/ou celles qui

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Le rôle du cerveau dans la surpopulation, le vieillissement et la dépendance

Tableau 1

Incidence des problèmes les plus courants associés au vieillissement, d'après une enquête réalisée à Birmingham (Royaume- Uni) *

Problème (Nombre de patients observés)

Mobilité (955) Pleinement mobiles Marchant avec difficulté Ayant perdu toute mobilité

Confusion mentale (970) Aucune Légère Sévère

Incontinence urinaire (928) Aucune Intermittente Persistante

Cas observés

Nombre de patients

156 312 487

569 249 152

647 82

199

%

16 33 51

59 26 15

70 9

21

* Personnes âgées de moins de 70 ans : 165; 71-74 ans 75-79 ans : 211 ; 80-84 ans : 275 ; 85 ans et plus : 206.

211;

Tableau 2

Incidence des problèmes les plus courants associés au vieillissement, d'après une enquête réalisée à London, Ontario*

Problème (Nombre de patients observés)

Mobilité (728) Pleinement mobiles Marchant avec difficulté Ayant perdu toute mobilité

Confusion mentale (731) Pas de confusion U n e certaine confusion Incapacité de communiquer

Incontinence urinaire (730) Aucune Intermittente Persistante

* Personnes âgées de moins de 70 ans 75-79 ans : 199; 80-84 ans : 128; 85-89

Cas observés

N o m b r e de patients

407 171 150

469 197 65

451 126 153

: 151 ; 70-74 ans : 149 ; 90 ¡

ans : 78 ; ins et plus

%

56 23 21

64 27 9

62 17 21

:106.

étaient sujettes à des chutes répétées ou qui souffraient d'incontinence; la deuxième comprenait tous les autres patients. La figure 3 illustre la composition par âge des groupes A et B ; elle montre que le second de ces groupes était nettement plus âgé que le premier. U n problème neurologique avait été diagnostiqué chez 33 h o m m e s du groupe A , soit 53 % d'entre eux, alors que 28 en étaient exempts ; les chiffres correspondants pour les 99 femmes du groupe A étaient de 60 contre 39, soit 61 %, de cas neurologiques. Dans le groupe B , ils étaient de 10 contre 4 pour les h o m m e s ,

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Ronald D . T. Cape

36 —i Nombre de personnes examinées

30 -

24 -

18 -

12 -

6 -

0 -Age <60

Groupe A

Groupe B

Figure 3

60-64 65-69 70-74 75-79 80-84 85-89 90-94 95-99

Profils d'âge de 160 patients adressés pour consultation à un service de médecine gériatrique (groupe A ) et d'une cohorte de 80 résidents d'un établissement de long séjour pour personnes âgées (groupe B) , à Victoria (Australie).

soit 71 %; 54 contre 12 pour les femmes, soit 81 %. Ces chiffres, qui font apparaître un pourcentage élevé de troubles affectant le cerveau dans le groupe A et une prépondérance plus grande encore de ce type d'affectations dans le groupe B , confortent tout à fait l'hypothèse selon laquelle le dysfonctionnement neurologique est la principale cause de dépendance chez les personnes âgées.

Les conséquences

Ces faits sont bien connus, ils n'ont rien de nouveau. Diverses pathologies — acci­dents vasculaires cérébraux, maladie de Parkinson, démence, désordres entraînant une atrophie musculaire — peuvent transformer un processus de vieillissement cérébral relativement bénin en une défaillance catastrophique de la fonction céré­brale. Elles sont à l'origine des trois grands problèmes étudiés dans les enquêtes britannique et canadienne : perte de mobilité, confusion mentale et incontinence. Elles sont responsables de la dépendance et montrent bien à quel point celle-ci est imputable à des affections du système nerveux central.

Devant ces affections neurologiques, tout le m o n d e est égal. L a maladie d'Alzheimer et les accidents vasculaires cérébraux frappent aussi bien les riches que les pauvres. D e m ê m e , la dépendance existe dans toutes les classes sociales. Les riches ont sans doute davantage que les pauvres les moyens de se faire aider; mais souvent l'aide qu'ils cherchent à acheter est introuvable ou ne correspond pas à leurs besoins.

La dépendance a d'énormes conséquences économiques à l'échelle mondiale. E n

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Le rôle du cerveau dans la surpopulation, le vieillissement et la dépendance

Australie ou au Canada, un lit en établissement de soins de long séjour coûte (en dollars des États-Unis) de 80 à 120 dollars par jour, soit de 29 000 à 44 000 dollars par an. Des milliards de dollars sont dépensés dans l'ensemble du m o n d e pour les soins dispensés dans ces établissements pour personnes âgées.

E n Australie, 50 % des personnes souffrant de la maladie d'Alzheimer vivent ainsi en maison de santé, et l'on estime que, de 1986 à 2006, l'augmentation du nombre de sujets atteints par cette maladie sera de 78 %. Le nombre de lits supplé­mentaires à prévoir dans ce type d'établissement est donc égal à 39 % de x/2, x correspondant au nombre de lits actuellement disponibles dans le pays. C e nombre étant d'environ 70 000 en 1986, les besoins pour les vingt prochaines années seront donc de 39 % de 70 000/2, soit 13 650 lits supplémentaires. Les coûts de fonction­nement seront de 13 650 x 1 2 0 = 1 638 000 dollars par jour, soit de l'ordre de 600 millions de dollars par an. L a situation est à peu près la m ê m e au Canada et aux États-Unis, pays qui ont à eux deux une population dix-huit fois supérieure à celle de l'Australie, avec un système de soins en établissements de long séjour analogue. D'ici à vingt ans, le coût des soins en établissement devrait donc, rien que pour les atteintes de la maladie d'Alzheimer, augmenter de 10,8 milliards de dollars par an pour les trois pays. Et ce chiffre ne tient pas compte des populations de l'Europe et de l ' U R S S , où le pourcentage de personnes âgées est en constante augmentation. A l'échelle mondiale, la dépense devrait donc être de l'ordre de 50 à 100 milliards de dollars des États-Unis par an.

O r , il devrait être possible de réduire considérablement cette s o m m e énorme. E n effet, la recherche biomédicale fondamentale sur la nature de la maladie d'Alzheimer a permis de faire deux grandes découvertes. L a première est que la maladie est associée à de très faibles taux de choline acétyl-transférase dans certaines parties du cerveau c o m m e l'hippocampe; la seconde est la détermination récente de la structure de la protéine anormale observée dans les plaques seniles. Cette dernière substance est fabriquée par un gène particulier situé sur le chromosome 21. Il est probable que l'on est à la veille de nouvelles découvertes, mais la rapidité avec laquelle elles seront faites dépendra des ressources imparties à la recherche. D'après les éléments dont on dispose, il semble clair qu'en consacrant quelques millions de dollars à des recherches sur le fonctionnement du cerveau et sur les moyens de le maintenir en état de fonctionner plus efficacement jusqu'à un âge très avancé, on devrait pouvoir réduire de façon significative le degré de dépendance des personnes âgées, pour le plus grand bien de l'économie mondiale.

C'est grâce à son cerveau que l ' h o m m e a pu dominer le m o n d e , mais c'est aussi son cerveau qui a engendré des problèmes de surpopulation et favorisé la survie des faibles; il doit à présent l'utiliser pour résoudre ces problèmes. O n ne saurait se résigner à voir dans la défaillance des fonctions cérébrales une infirmité inévitable du grand âge. •

Références et sources

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Ronald D. T. Cape

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Introduction à une vieillesse nouvelle

Robert Hugonot

L'auteur montre à quel point la population âgée est en pleine mutation biologique et sociale. Une nouvelle approche de la population dépendante la plus âgée et de celle des nouveaux retraités débouche ainsi sur une nouvelle politique de la vieillesse.

L e troisième âge n'existe plus. D'autres retraités, d'autres personnes âgées, au compor ­tement biologique et social différent, porteurs d'autres attentes, prêts à commence r une autre vie, mais aussi victimes d'autres risques, d'autres maladies et d'autres dépendances ont insensiblement, en deux décennies, occupé la scène démographique et sociopolitique.

Feu le troisième âge

Depuis que les h o m m e s s'intéressent à leur avance en âge, ils ont tenté de découper leur vie en tranches. Déjà l'Ecclésiaste parle d u troisième âge de la vie. Bien d'autres ensuite ont tronçonné davantage notre parcours en cinq o u six étapes. L'envolée de l'expression « troisième âge » daterait des années 1950. J . -A. Huet , l'un des fondateurs de la gérontologie en France, aimait à raconter qu'il aurait proposé cette expression avec le chanoine Kir, maire de la ville, lors d 'un congrès qui se tenait alors à Dijon. Ces mots , qui ont eu une fortune certaine, ont envahi rapidement le langage social et politique (clubs d u troisième âge, associations d u troisième âge, université du troisième âge, etc.) et conquis la scène internationale. Il ne s'agissait cependant que de réunir sous u n m ê m e vocable ceux qui n'appartenaient plus au m o n d e d u travail : pensionnés, retraités. L a définition d u « troisième âge » était donc surtout économique. Quelque temps après — mais là nous ne savons à

Robert Hugonot est professeur à l'Université médicale et scientifique de Grenoble et chef du service de gérontologie clinique du Centre hospitalier et universitaire. Il est également conseiller scienti­fique du Centre pluridisciplinaire de gérontologie de l'Université des sciences sociales de Grenoble. Administrateur de la Fondation nationale de gérontologie (Paris), il est responsable de son groupe permanent d'études et de recherches sur la démence senile. Depuis 1965, il joue un rôle important dans la mise en place à Grenoble (ville de 150 000 habitants) d'une organisation gérontologique qui a souvent servi de modèle national. Son activité s'oriente actuellement davantage dans ce sens, ainsi que dans celui d'un enseignement tourné vers les pays jeunes aujourd'hui, mais vieillissants, où la gérontologie émerge à son tour. Son adresse est la suivante : Pavillon Élisée-Chatin, C H U de Grenoble, 38700 La Tronche, France.

41 Impact : science et société, n" 153, 41-47

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Robert Hugonot

qui en attribuer la paternité —, l'expression « quatrième âge » est apparue pour désigner les plus âgés et surtout les plus dépendants. Des associations, des congrès ont aussi porté ce titre.

Dans le m ê m e temps, avec la lenteur qui caractérise les processus démographiques et la physiologie humaine, la longévité moyenne progressait dans les pays indus­trialisés, et le grand âge fit rapidement figure de tranche sociale envahissante. Sous l'influence du double phénomène de l'allongement de la durée de la vie et du raccourcissement de celle du travail, le troisième âge s'est élargi, au point de c o m ­porter deux générations d ' h o m m e s et trois de femmes, de regrouper des sexagénaires et des nonagénaires, et de ce fait aussi des valides et des invalides, mêlant maturité et décrépitude. Ainsi le « troisième âge » est devenu une absurdité sémantique. Absurdité biologique aussi, car il y a plus de différence entre les personnes de 65 et 85 ans qu'entre celles de 40 et 60 ans; absurdité sociale ensuite, puisqu'on passe de l'autonomie à la plus complète dépendance.

L a pathologie du grand âge

Les maladies elles-mêmes ont changé de nature et leurs conséquences sont différentes. A u cours de ces dernières années, de nombreux auteurs ont traité de « la mort qui change ». L a conscience qui précédait la mort et qui permettait au laboureur de léguer son champ à ses enfants quelques minutes avant son décès a fait place à une période souvent longue d'inconscience, d'extinction lente et d'hospitalisation. La pneumonie du sommet ou la fracture du col du fémur, autrefois causes quasi inéluctables de décès, sont parfaitement curables. La pathologie arthrosique des membres inférieurs n'entraîne plus aussi fréquemment l'immobilisation. L a vacci­nation a fait diminuer chez le vieillard l'incidence annuelle de la grippe, de la pneumonie et du tétanos, mais on observe davantage de cas de mort lente dans des états de dénutrition, de glissement et de grabatisation qui sont souvent entretenus par les soins dont on entoure ces malades.

L 'âge de la dépendance

L'augmentation de l'invalidité qui résulte de toutes ces maladies, guéries mais non vaincues, est le revers de la médaille. C e phénomène est d'une telle ampleur que le gain en longévité constaté au cours de ces dernières décennies n'est que fort peu un gain de vie autonome. Les incapacités souvent cumulées, somatiques et intellec­tuelles, prennent une allure épidémique. Sans doute faut-il chercher leur cause dans un état pathologique préalable, mais alors l'isolement, Pinconfort de l'habitation, les troubles de l'afférentation (diminution des acuités visuelle et auditive), l'anxiété et la dépression, la pauvreté sont autant de facteurs seconds et intriqués qui vont entraîner le passage d'une vieillesse libre de toute contrainte à une vieillesse dépen­dante de la famille et de la société.

La dépendance intellectuelle

C'est en vieillissant que l ' h o m m e prend la mesure de ce que son cerveau représente, m ê m e dans les actes les plus banals de la vie quotidienne. D e tous ses organes, c'est

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Introduction à une vieillesse nouvelle

désormais le plus important. U n e personne âgée privée de l'usage de ses jambes et utilisant un fauteuil roulant ne sera pas considérée c o m m e dégradée tant que son cerveau restera clair, mais la personne qui, sans trouble somatique, a une mémoire défectueuse et ne maîtrise plus le temps et l'espace, celle-là est senile. Si le capital neuronal de l ' h o m m e est fait pour durer, le système neuronal, lui, est fragile et exposé à de grands risques. Quel extraordinaire destin posthume que celui du professeur Alois Alzheimer, mort d'une endocardite infectieuse peu d'années après avoir décrit ses constatations anatomiques dans quelques cas de démence de la soixantaine, dont le n o m , désormais aussi célèbre que celui de sir James Parkinson, sert maintenant d' « étiquette » à des millions de septua-octogénaires dans le m o n d e !

L a dépendance qui découle de cette maladie est sans doute la plus grave de toutes, parce qu'elle atteint tout ce qui touche à l'humain et aux mille petits signes de reconnaissance qui font que cet h o m m e ou cette f emme âgés ont encore un rôle dans leur famille ou dans leur entourage social. D e toutes les dépendances, c'est celle qui entraîne la plus grande souffrance des autres — ceux qui soignent, ceux qui aident — dans le cycle infernal d'une dépendance mutuelle qui met à rude épreuve l'amour et la tolérance.

La famille

O n juge souvent mieux de l'importance d'une chose, d'une personne ou d'un service lorsqu'ils viennent à manquer que lorsqu'ils existent; s'il n'y avait pas la famille, les institutions d'hébergement des personnes âgées en France compteraient (évaluation très approximative) un million de lits supplémentaires. Le statut familial de la popu­lation âgée institutionnalisée témoigne de cette carence : pas de descendance, pas ou plus de conjoint, des enfants éloignés ou affectivement absents. Q u a n d il y a une famille, sa structure prend une importance majeure : quel est le « tuteur privi­légié »x ? C'est-à-dire, quelle est la personne de la famille qui sera notre interlocuteur principal, qui assurera dans ce soutien familial la fonction dominante? C e n'est pas toujours un fils ou une fille. Ceux-là, sexa-septuagénaires, sont déjà eux-mêmes à l'orée de la vieillesse prochaine et ont parfois du mal à accepter, dans leur conscient ou dans leur inconscient, l'image dégradée que leur aïeul leur en présente. L a petite-fille adulte, f e m m e de cinquante ans, est alors souvent celle qui va exercer cette tutelle informelle. Le conjoint, lui-même fort âgé, ressentira plus qu'un autre le poids de cette dépendance, qui va désormais jalonner le dernier parcours qui ne peut aboutir qu'au veuvage.

Le soutien à domicile

A u fil des plans successifs, la politique française de la vieillesse a affirmé la primauté du soutien à domicile. Le V I e Plan de développement économique et social a abouti à la mise en place d'un « programme finalisé pour le maintien à domicile des personnes âgées », et les autres plans ont suivi la m ê m e voie. Développement des aides m é n a ­gères et amélioration de l'habitat, puis soins à domicile de plusieurs niveaux, repas à domicile, services de dépannage, téléalarme, etc., sont quelques-uns des moyens d'exercer ce soutien.

D e u x analyses préalables sont cependant indispensables. D'abord, celle de l'indi­vidu, avec toutes les composantes de ses handicaps et de la dépendance qui en résulte :

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Robert Hugonot

analyse en termes fonctionnels des possibilités d'accomplir les actes de la vie quoti­dienne, analyse des facultés intellectuelles dont l'intégrité conditionne l'autonomie, analyse des conditions économiques (niveau de ressources), ainsi que des obstacles éventuels à la mobilité dans l'habitat. L a seconde analyse concerne la famille, les membres qui la composent, leur place respective, leurs activités, leur sensibilité, leur disponibilité, leur situation géographique et économique.

Le réseau de proximité perdu et retrouvé

A partir de 1970, les services d'aide à domicile se sont considérablement développés, sous la double impulsion de la prise de conscience des problèmes sociaux liés à l'âge par des municipalités, par des mouvements associatifs et par l'État, qui a alloué des moyens financiers importants pour la réalisation de ces programmes. Avec le recul, nous savons maintenant que ce développement, davantage fonction de l'appréciation subjective des acteurs de terrain et des services, a abouti assez souvent à démobiliser l'action spontanée du voisinage et m ê m e le soutien familial. L a prise de conscience de cette évolution régressive contient en elle-même les moyens de l'améliorer. Ceux qui aident à domicile peuvent en effet jouer, auprès des familles, un rôle d'informa­teurs, d'éducateurs, pour impliquer et revigorer le « réseau de proximité ». N o u s avons proposé la création de « cellules de solidarité de voisinage » pour favoriser les rencontres entre tous les intervenants et sensibiliser l'entourage au développement d'une action concertée.

Entre tous ceux qui vont intervenir auprès d'une personne âgée, une répartition des tâches et des présences permet de couvrir le nycthémère. U n cadran, un tableau auprès d'une pendule et d 'un calendrier permettent de visualiser les passages de chacun : famille, amis, bénévoles, aides, soignants. Ainsi, le domicile, auquel toute personne est d'autant plus attachée qu'elle est plus âgée, peut longtemps encore maintenir autour d'elle les choses qu'elle aime, qui sont des témoins de sa vie passée. Cette permanence de la présence risquerait cependant d'émousser la patience, la tolé­rance, si d'autres mesures ne venaient pas soutenir ceux qui forment ou complètent cet environnement affectif et social.

E n France, quand on parle de « politique familiale », les dirigeants, le législateur ne pensent qu 'à l'enfance, semblant oublier que des « vieux » font aussi partie de la famille, vivant avec elle ou recevant son aide.

U n e politique familiale de la vieillesse

Des associations et des structures se sont cependant spontanément mises en place au fil des années avec l'aide de financements nationaux ou locaux : associations Alzheimer ou de familles de personnes âgées intellectuellement dépendantes, hébergement tempo­raire, hospitalisation « à la carte », centres d'accueil ou hospitalisation de jour, lieux familiaux de vie, tierces personnes complétant les services de soins à domicile... C'est là une liste non exhaustive, sujette à variations d'une ville à une autre, du milieu urbain au milieu rural, d 'un pays à un autre. Mais il existe aussi des facteurs limitants tels que la suppression des aides ménagères quand une personne âgée quitte son domicile personnel pour aller vivre chez ses enfants et l'augmentation sans contre­partie de la charge financière qui en résulte. Loin de contraindre un membre féminin de la famille à quitter totalement ou partiellement son travail pour se consacrer à

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Introduction à une vieillesse nouvelle

l'aïeul dépendant, une politique familiale de la vieillesse devrait au contraire aider cette insertion en proposant des mesures importantes de défiscalisation ou des primes en appui des mesures familiales d'accueil et de soutien. Les associations regroupant les familles, dont nous avons déjà parlé, peuvent former la structure incitative et gestionnaire de ces formules de soutien. L'information des familles et leur formation éventuelle sont une des bases de cette politique.

Les soins à domicile

S'il faut aller plus loin, faire face à la chronicité et à la dépendance, toutes les « alter­natives possibles à l'hospitalisation » doivent être recherchées avant de se résoudre — sauf en cas d'urgence ou si un bilan somato-psycho-biologique est indispensable — à recourir aux services de gériatrie d'un centre hospitalier. Soins à domicile, hospita­lisation à domicile sont les compléments de l'action libérale dans le domaine des soins, qui s'organise de mieux en mieux pour faire face à cette nouvelle demande. Des modalités de formation de plus en plus variées et nombreuses s'offrent au médecin praticien pour lui permettre d'accéder à cette nouvelle fonction qu'est la gériatrie à domicile.

Les limites du soutien à domicile

Famille absente, charge en soins ou fréquence des interventions trop élevées, inconfort extrême, aggravation progressive inexorable sont quelques-uns des facteurs qui vont marquer les limites d'une politique familiale et/ou domiciliaire désormais dépassée. Il faut alors privilégier des structures de petite capacité, réparties dans les différents quartiers d'une ville, qui constituent un réseau d'accueil et de soutien : domiciles collectifs, relais-accueil de quartier, appartements thérapeutiques, sections de cure médicale en maisons de retraite, maisons d'accueil pour personnes âgées dépen­dantes ( M A P A D ) , centres de soins gériatriques et unités psycho-gérontologiques de petit volume regroupant au m a x i m u m quarante à soixante personnes, où l'on tente d'éviter le recours à des systèmes trop contraignants.

L'hôpital décentralisé

Le respect absolu du tissu relationnel des personnes âgées nous oblige à dénoncer les concentrations hospitalières excessives, extérieures et éloignées des lieux habituels de vie. Le « long séjour hospitalier » doit désormais éclater entre des structures ne dépassant pas cinquante à soixante lits, qui tout naturellement viendront, du fait m ê m e de leur répartition géographique, en appui de toutes les autres structures, médicalisées ou non, déjà citées. Chaque structure doit déterminer avec soin les malades qu'elle peut ou non admettre et tenter de prévoir leur évolution. L'ensemble de ces structures dans une zone géographique délimitée peut conduire à une coor­dination avec les structures hospitalières de long séjour, en « secteurs de convivialité ».

L'analyse-évaluation et l'orientation

Chaque cas, chaque sujet en incapacité ou malade, dans son contexte familial, social et psychologique, est un cas particulier. Aucune solution ne peut être proposée qui se baserait sur quelques modèles; chaque cas doit être analysé avec soin. U n e cons-

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Robert Hugonot

traction originale en résulte, qui demandera une longue explication, pour exposer et faire comprendre toutes les modalités, y compris l'évolution éventuelle. U n centre ou un hôpital de jour peuvent jouer ce rôle, une équipe pluridisciplinaire, médicale, soignante, psychologique et sociale, assurant alors une analyse et une évaluation des personnes et de la situation, et proposant la ou les solutions parmi toutes celles qui sont envisageables : parfois, il n'en reste qu'une, le choix est réduit.

U n observatoire des âges

Lorsque, dans une cité ou dans toute autre surface géographique, la réflexion conduit à définir la politique de la vieillesse qu'il faut tenter de promouvoir, il convient de connaître au préalable la population à laquelle on s'adresse, ses « flux » et ses « stocks », sa mobilité, ses changements. L a population âgée n'est pas stable; de nouveaux retraités arrivent, qui seront les âgés de demain, avec des styles de vie et des besoins différents de ceux de leurs aînés. Les trois éléments qui conditionnent une population : natalité, mortalité, migrations doivent être suivis, mesurés, car l'équilibre o u le déséquilibre des âges sont importants à connaître pour prévoir l'évolution. U n e enquête périodique doit permettre de connaître les services rendus, leur répartition entre le spontané, le familial, l'intervention des professions libérales et celle des services publics, ainsi que les besoins ressentis restant à satisfaire. U n « observatoire » des âges regroupant gérontologues et démographes, professionnels de la santé et des sciences sociales, représentants des personnes âgées et des familles doit alors constituer la structure de convergence des diverses associations qui concourent au m ê m e objectif et se mettre au service de tous. Il doit aussi être l'outil d'information, de documentation et de recherche à la disposition de chacun. Enfin, il doit permettre de réfléchir à l'action préventive, dont les retombées sont plus lointaines, qui peut être proposée à la population qui vient d'accéder à la retraite.

Des retraités nouveaux

Dans les années 1960, on proposait une « préparation à la retraite » à ceux qui allaient bientôt quitter le m o n d e du travail; son développement dans les quartiers de nos villes ou dans les entreprises a permis de rassembler des personnes qui se sentaient concernées par une nouvelle vie et par les mutations familiales et sociales qu'elle allait leur imposer. U n certain nombre de ceux qui furent les fondateurs des mouvements dits alors « d u troisième âge » passèrent par cette information et cette sensibilisation à leur vie nouvelle. La préparation à la retraite disparaît peu à peu avec l'avancement de l'âge de la cessation d'activité, alors que la vieillesse est dans le lointain et s'éloigne davantage encore avec le recul de l'âge biologique2. Les retraités des années 1980 ne ressemblent plus à ceux de la génération qui les a précédés; ils sont plus jeunes, mais surtout plus conscients de la nouvelle organisation sociale de la vie. C'est alors de « préparation à la vieillesse » que nous parlons, pour que ne soient pas ignorés, et par conséquent subis à chaud, l'évolution inéluctable de chacun vers u n âge plus avancé et le risque d'une dépendance accrue. Cette prépa­ration à vivre vieux s'accompagne aussi de la réflexion sur le rôle que peuvent jouer dans la cité tous ceux qui recherchent dans cette action le maintien de leur identité sociale.

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Introduction à une vieillesse nouvelle

Cette orientation débouche sur plusieurs propositions : bien se porter pour prévenir les handicaps (vasculaires, articulaires, intellectuels),

qui rétrécissent la vie de beaucoup de personnes dont la vieillesse est prolongée, c'est-à-dire demander des évaluations périodiques de l'état de santé et les conseils qui en découlent;

rechercher près de chez soi, à travers les « cellules de solidarité de voisinage », les personnes qui ont besoin d'aide, de conseils, d ' u n appui permanent ou épisodique;

rechercher plus loin encore, avec les associations multiples dont la variété fait la richesse d u climat social de nos villes, le nouveau rôle social qui prolongera l'activité professionnelle antérieure ou qui marquera le démarrage d'une nouvelle fonction pour une nouvelle tranche de vie.

Conclusion

L a vieillesse n'est pas, c o m m e l'enfance et plus qu'elle peut-être, figée au fil des décen­nies dans une image immuable. C o m m e toute vie dans la société d u m o m e n t , elle subit l'évolution que lui impriment des styles de vie nouveaux quand, d'une géné­ration à l'autre, le travail et les loisirs sont bouleversés. Plus on avance en âge, plus la santé et la vie sont liées, au point que le sanitaire et le social à leur tour ne peuvent être dissociés.

L'organisation locale de la vie, les politiques communales et départementales, tout c o m m e les politiques nationales, doivent prendre en compte cette évolution profonde qui, en raison d u vieillissement des populations des pays industrialisés, conditionnera demain l'équilibre harmonieux entre les générations et sans doute aussi entre les nations. •

Notes

1. J'entends souvent dire que cette expression vient du Québec et elle paraît alors d'une intéressante nouveauté. E n réalité, l'équipe de Grenoble l'a utilisée pour la première fois en 1979 dans un document sur la famille des malades déments.

2. L'âge biologique est l'âge vrai, celui des cellules, des tissus, des organes; il rend compte du vieillissement différentiel, que ne reflète nullement l'âge chronologique.

Bibliographie

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Paris, Maloine, Fondation nationale de gérontologie, 1986, p. 262-265. . U n e nouvelle politique pour une nouvelle vieillesse. Gérontologie 59, juillet 1986, p. 1-2. . Sécurité au domicile des personnes âgées à haut risque. Gérontologie 59, juillet 1986,

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Vieillesse et vieillissement vus par les démographes

Paul Paillât

Après avoir rappelé la définition du vieillissement démographique, cet article passe en revue le déclenchement, Vextension et l'accélération de ce phénomène, tant dans les pays développés que dans les pays en développement. Il présente des facettes parti­culières de ce processus, avant de montrer comment révolution démographique, la rapidité des progrès techniques et les tensions intrafamiliales remettent en question la place et le rôle des personnes âgées et appelle à la valorisation des ressources humaines de tout âge.

P o u r u n individu, vivre c'est vieillir, c'est-à-dire prendre des années, avancer en âge. C e processus naturel c o m m e n c e dès la naissance (certains disent : depuis la concep­tion), mais l'usage courant associe trop facilement le m o t « vieillir » à l'idée d'atteindre u n « âge élevé », notion largement subjective et, en tout cas, dépourvue de toute valeur universelle : tels sont vieux à 50 ans, tels autres le sont à 70 .

P o u r u n e population, vieillir c'est c o m p t e r u n e proportion croissante de personnes âgées, par exemple de 65 ans et plus1. U n e population peut avoir u n n o m b r e de plus en plus important de personnes âgées sans vieillir pour autant, si la population totale a u g m e n t e plus vite que sa fraction âgée : avec 4 0 à 45 millions de « vieux », la Chine reste u n pays « jeune », mais millénaire! Il est essentiel de souligner cette différence entre la proportion et le nombre et, au niveau de son propre pays, d'avoir a u m o i n s u n e idée des deux grandeurs : la première a une incidence é c o n o m i q u e ; l'autre délimite les besoins en équipements et en services2.

Sauver de plus en plus d'enfants et allonger d e ce fait la vie m o y e n n e , c o m m e cela s'est fait depuis la fin de la seconde guerre mondia le , de manière souvent specta­culaire, ne conduit pas à vieillir la population : tout a u contraire, les enfants sauvés renforcent les rangs de la jeunesse et, plus tard, l'âge venu, ils gonfleront les rangs des personnes âgées, mais , entre-temps, la population gardera u n e base large et m ê m e de plus en plus large (la fameuse « p y r a m i d e ») tant que la natalité ne baissera

Ancien chef du Département de démographie sociale à l'Institut national d'études démographiques, Paris, Paul Paillât est conseiller scientifique de la Fondation nationale de gérontologie, Paris, et rédacteur en chef de Gérontologie et société. Directeur de nombreuses enquêtes à l ' INED, puis à la F N G , l'auteur a été expert auprès des Nations Unies, de l'Organisation mondiale de la santé, du Bureau international du travail et du Conseil de l'Europe, en tant que spécialiste des problèmes de vieillesse et de vieillissement. O n peut entrer en contact avec M . Paillât à l'adresse suivante : 25, avenue du Château, 92190 M e u d o n , France.

49 Impact : science et société, n° 153, 49-61

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Paul Paillât

pas. C'est la clé de 1' « explosion démographique » d'après 1945. Dans les pays économiquement développés, la baisse marquée de la mortalité infantile (avant le premier anniversaire) et juvénile a freiné le vieillissement enregistré avant la guerre, sans toutefois aller jusqu'à un rajeunissement, parce que la natalité est restée à un niveau modéré avant de recommencer à baisser.

La démonstration du lien « mécanique » entre la baisse continue de la natalité et le vieillissement de la population a été faite par les démographes des Nations Unies dès 1956s, mais cette démonstration est restée inconnue du grand public jusqu'à une époque récente, en Europe; elle n'est pas encore assimilée dans d'autres pays, à quelques exceptions notables près. Le dilemme « croître ou vieillir », posé par Alfred Sauvy, reste vrai : il exprime un lien arithmétique et non subjectif. E n pesant le pour et le contre, on peut préférer le vieillissement à la natalité, mais alors il faut accepter les conséquences de ce choix et chercher à atténuer les plus mar­quantes. Les inconvénients inverses d'une croissance trop rapide sont suffisamment connus pour que le choix précédent paraisse un moindre mal à certains gouvernements.

Le m o m e n t est venu de présenter les faits, chiffres en main, avant d'en arriver aux commentaires et aux questions.

Déclenchement, extension et accélération du vieillissement des populations

Historique

La France a été la pionnière en ce domaine, du moins parmi les pays où des statis­tiques fiables existent. E n 1901, elle comptait déjà 8 % d'habitants âgés, contre 4 % chez ses principaux partenaires ou rivaux européens. Elle a été la pionnière, parce qu'elle a été la première à réduire sa natalité, et cela depuis la fin du xvnie siècle, minant ainsi sa position dominante en Europe occidentale. Imitée à la fin du xixe siècle, la France est aujourd'hui moins vieille que de nombreux pays d'Europe septentrionale et occidentale.

E n se généralisant, ce phénomène transforme l'ensemble de l'Europe en une presqu'île vieillie, adossée à un continent qui restera jeune encore longtemps à en juger par les chiffres du tableau 3. Exception majeure à bien des titres, le Japon : cas unique, ce pays voit la proportion de sa population âgée tripler en cinquante ans (de 1950 à 2000), c'est-à-dire à vue d ' h o m m e . Ce rythme sera sans doute légèrement dépassé : au vieillissement par la base dû à la chute spectaculaire de la natalité après 1945 commence à s'ajouter un vieillissement par le sommet dû à l'espérance de vie plus longue après 60 ans. Les transformations internes que subit et que subira le Japon sous l'effet de ce processus sans précédent dans son histoire de pays à natalité élevée imposeront des efforts et suscitent déjà une prise de conscience dont n'ont aucune idée les Européens, pourtant plus concernés.

Puisque, initialement, le phénomène du vieillissement s'enclenche quand la natalité baisse et persiste à baisser et que la natalité est devenue de nos jours un phénomène social, on ne doit pas être surpris si ce phénomène s'étend par zones entières à partir d'un modèle de référence, c o m m e ce fut le cas de la France dans l'Europe du xixe siècle. La rapidité avec laquelle l'évolution se renforce en Europe méridionale, pourtant attachée à un système de valeurs traditionnellement centré sur la famille, a de quoi stupéfier.

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Vieillesse et vieillissement vus par les démographes

Avenir

Il sera intéressant de suivre ce qui se passera en Asie si, après le Japon, la Chine, pays le plus peuplé du m o n d e , s'engage dans la voie du vieillissement en maintenant la politique de stricte limitation des naissances pendant les décennies à venir. (Tableau 3.) Lors de l'Assemblée mondiale des Nations Unies sur le vieillissement, qui s'est tenue à Vienne en 1983, la forte délégation chinoise témoignait de l'attention que portent les pouvoirs publics à ce risque majeur d u xxie siècle. M ê m e en doublant, le degré de vieillissement de la population ne créera pas de problèmes insurmontables tant que la Chine restera un pays massivement rural ; il en ira différemment dans les zones très urbanisées, parce que la cohabitation traditionnelle des générations se heurtera d'abord à des obstacles de fait, avant de rencontrer des résistances dues aux changements sociaux.

Parmi d'autres parties du m o n d e atteintes par un vieillissement comparable à celui de l'Europe d'entre les deux guerres, citons les républiques européennes de l'Union soviétique. Avec une amplitude plus modeste, l'Amérique latine tempérée, c'est-à-dire le triangle méridional, fera contraste avec la vitalité parfois exubérante du Brésil et celle d'autres pays de la zone tropicale ou des Caraïbes, voués à la jeunesse en raison de leur forte natalité.

A plus longue échéance, l'Inde n'échappera pas à cette déformation de sa structure démographique si la limitation des naissances finit par faire partie de son code social. Il est vrai que ce pays est si vaste et si hétérogène que le chiffre m o y e n n'aura qu'une signification limitée.

Au-delà des perspectives usuelles, nombreux sont les pays, essentiellement afri­cains, qui résisteront à ce phénomène. Déjà le continent africain est le plus jeune du m o n d e : or, plus une population est jeune, plus il faudra de temps, d'une part, pour freiner la croissance, du moins si les pouvoirs publics et les habitants le souhaitent, et, d'autre part, pour inclure le vieillissement dans ses préoccupations. Répétons-le, ces pays connaissent dès maintenant et connaîtront de plus en plus des problèmes sociaux liés à la présence d'effectifs croissants de personnes âgées et fragiles, pour lesquelles les familles ( m ê m e dans le sens de « famille élargie ») auront de plus en plus de difficultés à maintenir l'aide qui a toujours été la règle dans les sociétés africaines. Les chiffres « attendus » du Nigeria conduisent, à eux seuls, à s'interroger. (Voir tableaux 1, 2, 3.)

Les faits et les chiffres

N o u s empruntons les chiffres (et les découpages géographiques) aux estimations et projections (variante moyenne) des Nations Unies, établies en 19844. Il existe d'autres sources (par exemple, la Banque mondiale), mais s'en tenir à un seul jeu, c'est un gage de cohérence, sans être un signe de révérence aveugle.

Les tableaux 1, 2 et 3 font connaître : 1. la situation en 1985; 2. l'évolution « fiable », 1985-2010; 3. l'évolution « fluide », 2010-2025. A côté des régions, (selon les Nations Unies) figurent quelques pays jugés exemplaires pour le thème traité. L'accent est mis sur les personnes âgées de 65 ans et plus, dont celles de 80 ans et plus, avec des indications du degré de vieillissement de la population (proportion des personnes âgées dans le total). Il est facile de calculer la part des « très âgés » dans la population de 65 ans et plus. L a distinction entre pays développés et pays en

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Tableau 1 Effectifs des personnes âgées en 1985 (en millions et en pourcentages)

M o n d e Total Pays développés Pays en développement

Régions

Afrique dont : A . septentrionale

A . occidentale A . orientale A . centrale A . australe

Amérique latine dont : A . centrale

A . tropicale

Amérique du Nord dont : États-Unis d'Amérique

Asie dont : A . méridionale

A . orientale A . occidentale

Europe dont : E . septentrionale

E . occidentale E . méridionale E . orientale

URSS

Océanie

Cas exemplaires

Afrique dont : Egypte

Nigeria

Amérique latine dont : Mexique

Brésil

Asie dont : Bangladesh

Inde Chine Japon

Europe dont : R é p . féd. d'Allemagne

Source. Organisation des Nations Unies, Global age. The 1984 assessment, N e w York, 1987.

Personnes de 65 ans et plus

Total

286,2 131,6 154,6

16,7 4,5 4,5 4,4 2,2 1,4

18,0 3,6 8,9

30,5 27,7

131,8 60,7 71,1

4,2

61,0 12,3 20,6 16,2 11,9

26,0

2,1

1,9 2,3

5,8 5,8

3,1 32,7 56,1 12,1

8,8

estimates

En%

5,9 11,2 4,2

3,0 3,7 2,7 2,6 3,3 3,9

4,5 3,5 4,0

11,6 11,6

4,7 3,9 5,7 3,7

12,4 14,9 13,4 11,4 10,6

9,3 10,1

4,0 2,4

3,5 4,3

3,1 4,3 5,3

10,0

14,5

Dont personnes de 80 ans et plus

41,7 25,3 16,4

1,6 0,5 0,4 0,4 0,2 0,2

2,6 0,6 1,1 5,9 5,4

14,3 5,9 8,4 0,5

12,4 2,5 4,8 2,9 2,2

4,6 0,3

0,2 0,2

0,5 0,8

0,3 2,9 6,1 2,0

2,0

and projections of population by sex and

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Tableau 2 Évolution « fiable » de la population âgée, en 1985 et en 2010 (en millions et en pourcentages)

M o n d e Total Pays développés Pays en développement

Régions

Afrique dont : A . septentrionale

A . occidentale A . orientale A . centrale A . australe

Amérique latine dont : : A . centrale

A . tropicale

Amérique du Nord dont :

Asie dont :

Europ* dont :

URSS

: États-Unis d ' A m é r i q u e

: A . méridionale A . orientale A . occidentale

e : E . septentrionale

E . occidentale E . méridionale E . orientale

Océanie

C a s exemplaires

Afrique dont : Egypte

Nigeria Amérique latine dont :

Asie dont :

Mexique Brésil

Bangladesh Inde Chine Japon

Europe dont :

Source

Rép. féd. d'Allemagne

. Organisation des Nations Unie!

1985

286,2 131,6 154,6

16,7 4,5 4,5 4,4 2,2 1,4

18,0 3,6 8,9

30,5 27,7

131,8 60,7 71,1 4,2

61,0 12,3 20,6 16,2 11,9

26,0

2,1

1,9 2,3

5,8 5,8

3,1 32,7 56,1 12.1

8,8

¡, op. cit

Personnes de 65 ans et plus

Total

2010

512,9 188,0 324,9

36,3 9,0

10,3 10,2 4,0 2,9

37,8 8,6

20,2

39,4 35,3

274,2 131,9 142,4

9,5

79,6 13,1 26,5 23,3 16,7

42,1

3,3

3,6 5,8

6,5 13,1

5,4 71,7

111,4 24,0

11,5

En%

2010

7,3 14,1 5,7

3,1 4,3 2,7 2,7 3,3 4,2

5,9 4,8 5,7

12,4 12,3

6,9 5,5 9,0 4,5

15,3 15,6 17,2 14,9 13,4

12,5

9,9

4,7 2,5

5,1 6,3

3,1 6,6 8,2

18,0

20,0

Dont

de 80

1985

41,7 25,3 16,4

1,6 0,5 0,4 0,4 0,2 0,2

2,6 0,6 1,1

5,9 5,4

14,3 5,9 8,4 0,5

12.4 2.5 4,8 2,9 2,2

4,6

0,3

0,2 0,2

0,5 0,8

0,3 2,9 6,1 2,0

2,0

personnes

ans et plus

2010

85,9 40 ,5 4 5 , 4

4.0 1,2 1,0 1,0 0,4 0,4

6,4 1,4 3,3

9,3 8,3

39,7 16,5 2 3 , 2

1,2 17,2 3,2 5,8 4,9 3,2

8,7

0,7

0,5 0,6

1,1 2,3

0,5 9,0

17,5 4,7

2,4

53

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Tableau 3 Évolution « fluide » de la population âgée, en 2010 et en 2025 (en millions et en pourcentages)

M o n d e Total

t

Pays développés Pays en développement

Régions

Afrique dont : A . septentrionale

A . occidentale A . orientale A . centrale A . australe

Amérique latine dont : A . centrale

A . tropicale Amérique du Nord dont : Asie dont :

: États-Unis d'Amérique

: A . méridionale A . orientale A . occidentale

Europe dont :

URSS

: E . septentrionale E . occidentale E . méridionale E . orientale

Océanie

Cas exemplaires

Afrique dont : : Egypte

Nigeria

Amérique latine dont :

Asie dont :

Mexique Brésil

Bangladesh Inde Chine Japon

Europe dont :

Source

R é p . féd. d'Allemagne

2010

512,9 188,0 324,9

36,3 9,0

10,3 10,2 4,0 2,9

37,8 8,6

20,2 39,4 35,3

274,2 131,9 142,4

9,5 79,6 13,1 26,5 23,3 16,7 42,1 3,3

3,6 5,8

6,5 13,1

5,4 71,7

111,4 24,0

11,5

. Organisation des Nations Unies, op. cil

Personnes de 65 ans et plus

Total

2025

798,2 242,4 555,8

63,5 17,1 17,5 17,5 6,6 4,8

64,6 15,7 36,0 59,9 53,7

453,9 225,2 228,7

16,6 96,7 15,8 31,4 27,6 21,8 54,6 5,0

7,1 9,8

11,9 22,9

9,4 119,0 189,7 23,8

12,0

En%

2025

9,7 17,4 8,2

3,9 6,6 3,1 3,3 3,9 5,2 8,3 7,1 8,4

17,4 17,2 10,0 8,0

13,3 7,1

18,4 19,0 20,9 17,3 16,6 14,8 13,2

7,8 2,9

7,7 9,3

4,3 9,7

12,9 20,3

22,5

Dont de 80

2010

85,9 40,5 45,4

4,0 1,2 1,0 1,0 0,4 0,4 6,4 1,4 3,3 9,3 8,3

39,7 16,5 23,2 1,2

17,2 3,2 5,8 4,9 3,2 8,7 0,7

0,5 0,6

1,1 2,3

0,5 9,0

17,5 4,7

2,4

personnes ans et plus

2025

122,7 47,6 75,0

7,3 1,9 2,0 2,0 0,8 0,6

10,3 2,5 5,5

10,7 9,5

63,9 29,4 34,5 2,2

19,6 3,4 6,6 5,7 4,0

10,0 0,9

0,8 1.1

1,9 3,7

0,9 16,4 26,4 6,5

2,9

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Vieillesse et vieillissement vus par les démographes

développement ( P V D ) est celle établie par les Nations Unies. Bien des situations seront remises en question ou affinées d'ici 2025. Plus que chaque chiffre, c'est le contexte et l'évolution qui comptent.

Situation en 1985

D'entrée de jeu, on notera qu'il y a plus de personnes âgées dans les pays en développement que dans les pays développés, bien que le degré de vieillissement des premiers soit moins de la moitié de celui des seconds. L'Afrique — et chacune de ses régions — est moins « vieillie » que la moyenne des pays en développement; il en est de m ê m e pour l'Amérique centrale, l'Asie méridionale et l'Asie occidentale. Par contraste, le vieillissement dans les pays européens est supérieur à la moyenne des pays développés, et cette différence est particulièrement sensible dans le cas de l'Europe septentrionale, qui inclut le R o y a u m e - U n i . L 'Union soviétique, un quasi-continent c o m m e les États-Unis, est moins vieillie que la moyenne des pays déve­loppés, mais franchira le cap des 10 % avant la fin de ce siècle.

E n nous tournant vers des pays cités en exemple, nous observons qu'il y a plus de Chinois âgés que d'habitants de la France de tous âges. Plus important est le contraste de structure entre deux voisins, la Chine et le Japon : le vieillissement du second est le double de celui du premier. E n Afrique, le Nigeria est vraiment exemplaire, en ce sens que sa croissance rapide se reflète dans un taux de vieillisse­ment exceptionnellement faible et qui le restera longtemps.

Si les « très âgés » sont la marque des pays développés (la moitié d'entre eux se trouvent en Europe), il faut déjà mentionner que l'Asie en compte plus de 14 millions, dont 6 millions en Chine.

Évolution a fiable », 1985-2010

Si le rapprochement des effectifs de 1985 et de 2010 permet de suivre l'évolution probable (et sans doute minimale) de la population âgée, l'indication du degré de vieillissement illustre les contrastes dans u n peu plus de vingt ans. Le chiffre de 15,3 % de l'Europe (atteignant 17,2 % en Europe septentrionale) est le quintuple du taux de vieillissement de la population africaine. L'Amérique du Nord et l ' U R S S arrivent au m ê m e niveau, par suite d'une augmentation plus rapide de la population âgée de l'Union soviétique : les générations nées après la guerre vont commencer à étoffer les rangs des personnes âgées.

L'ensemble des Asiatiques âgés seront, en 2010, presque aussi nombreux que le total mondial de 1985; à eux seuls, les 111,4 millions de Chinois âgés se rappro­cheront du total de l'Asie en 1985 (131,8 millions). Plus étonnant encore, il pourrait y avoir autant de personnes très âgées en Asie que dans l'ensemble des pays développés : 39,7 millions contre 40,5 millions. C'est dire l'ampleur que vont prendre, dans le m o n d e entier, particulièrement dans les pays en développement, les problèmes liés au grand âge. L a demande risque fort d'excéder les capacités de soutien familial.

Évolution a fluide », 2010-2025

Les pays en développement pourraient compter plus d'un demi-milliard de personnes âgées en 2025, soit plus que l'ensemble d u m o n d e en 2010. Il est vrai que ces pays approcheront le niveau du vieillissement européen de la première moitié du xx e siècle,

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Paul Paillât

avec u n éventail assez ouvert entre la jeune Afrique (moins de 4 %) et l'Asie (10 % ) . M ê m e là où le taux est faible, la croissance des effectifs à elle seule posera problème. Ces effectifs ne vont-ils pas presque quadrupler en Afrique de 1985 à 2025, beaucoup plus que tripler en Asie et en Amérique latine, alors qu'ils n'augmenteront que de moitié en Europe, continent où un habitant sur six aura 65 ans ou plus (un sur cinq en Europe occidentale) ?

Alors qu'en 2010 les « très âgés » commenceront à être un peu plus nombreux dans les pays en développement que dans les pays développés (45,4 millions contre 40,5 millions), cette majorité s'affirmera singulièrement en 2025 : 75 millions contre près de 48 millions. C e n'est pas faire preuve de pessimisme que de s'inquiéter d u sort des premiers.

Des vieillissements spécifiques

Le vieillissement localisé

Sur un territoire de petite superficie et densément peuplé, les différences sociales

existent certes, mais sont peu visibles; dès que le territoire s'étend et que des espaces libres ou peu occupés s'insèrent dans le réseau des agglomérations, il est facile de localiser les diversités, nées bien souvent de la pratique de certaines activités écono­miques ou d 'un style de vie. A cet égard, la dichotomie ville/campagne reste encore vivace dans les pays industrialisés. Les migrations internes vers les zones d'emplois secondaires et tertiaires ont commencé par diminuer l'excédent local de main-d'œuvre avant de puiser dans les jeunes générations d'actifs et, ce faisant, de provo­quer un vieillissement rural très supérieur à la moyenne nationale. Les m ê m e s résultats s'observent dans les zones dont l'activité traditionnelle a fléchi ou a disparu (exemple des bassins miniers et des villes de filatures). Des pans entiers du territoire national comptent alors 20 à 25 % de personnes âgées, auxquelles succèdent de forts contin­gents de quinquagénaires, pendant que les groupes d'âge féconds partent en ville compléter une natalité habituellement faible6. L'Europe, du nord au sud, d'ouest en est, comporte de larges étendues de ce type, aussi bien au pays de Galles qu'en Limousin ou le long des Apennins. Dans ces zones très vieillies, l'infrastructure et les services sont généralement insuffisants pour faire face à la montée des besoins médicaux et sociaux.

Dans de nombreux pays en développement, notamment en Afrique, l'agriculture familiale est menacée par l'exode des jeunes, et la capacité à l'autosubsistance s'affaiblit, à un m o m e n t où la population s'accroît rapidement, tout en étant très inégalement répartie sur le territoire. Les ruraux âgés, coupés d'une partie de leur descendance, peuvent-ils envier le sort de leurs contemporains des villes dont les descendants sont sans emploi ni toit?

La situation dans les villes, m ê m e développées et organisées, n'est pas sans ombres. Ainsi, le cœur historique (les anciennes « cités ») a vieilli : les vieilles pierres abritent les vieilles gens, là où les opérations de rénovation suscitées par la m o d e ou la poussée du tertiaire ne les ont pas chassées. Certes, l'infrastructure existe, mais les médecins, les infirmiers, les travailleurs sociaux, sans oublier les membres de la famille, doivent gravir plusieurs étages à pied pour intervenir dans des loge­ments souvent privés d 'un confort jugé élémentaire. Q u a n d une proportion anormale­ment élevée de personnes âgées, et souvent très âgées, habite au quatrième étage, et m ê m e plus haut, dans des immeubles sans ascenseur, on peut tabler sur un isolement

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Vieillesse et vieillissement vus par les démographes

aussi sévère et aussi risqué que celui d'un rural vivant hors du village. Des îlots ne bénéficiant pas d'une certaine protection liée à un passé historique peuvent être la source de difficultés tenant à la coexistence avec des éléments étrangers mal intégrés.

Le vieillissement interne de la population active

Q u a n d une population compte, disons, 15% ou plus de personnes âgées, c'est toute la structure démographique qui est perturbée, en ce sens que dans le grand groupe d'âge actif (20-59 ou 20-64 ans), l'âge m o y e n s'élève : la fraction âgée de plus de 40 ans devient fréquemment majoritaire. Avant m ê m e que cette situation ne se produise au niveau national, elle s'observe dans les secteurs en déclin écono­mique. E n effet, qui va chercher et trouver un emploi dans un secteur économique en perte de vitesse? N e resteront que les plus anciens et les femmes, moins aptes à une conversion professionnelle et à un changement de zone de résidence. Les statistiques par âge, sexe et secteur économique sont à cet égard éloquentes.

L ' u n des exemples le plus connu, le plus manifeste, est l'agriculture et plus particulièrement l'agriculture familiale, par opposition à la monoculture à haut rendement, dont la main-d'œuvre est rare et mécanisée. Dans les zones vouées de tout temps à la polyculture sur des exploitations petites ou moyennes, le vieillisse­ment se traduit par l'élévation de l'âge m o y e n des exploitants, ainsi que par la proportion croissante d'exploitants qui n'ont pas de successeurs (descendants ou tiers), car les amateurs prêts à s'accommoder d'un m o d e de vie assez rude et d'un faible niveau sont de plus en plus rares. C e ne sont pas les citadins, soucieux d'air pur et de paysages reposants, qui revivifieront les campagnes : eux-mêmes contribueront, s'ils s'installent dans leur résidence secondaire au m o m e n t de leur retraite, au vieillissement de la population locale, sans pour autant être bien intégrés.

Le vieillissement interne de la population âgée

Plutôt que de parler de population âgée, il serait préférable de dire « fraction âgée » de la population, car ce qui la caractérise, en dehors de l'âge, c'est sa diversité. Les trente-cinq à quarante cohortes qui la composent ont vécu de diverses façons, certaines frappées par des événements tragiques (guerres étrangères ou civiles, catastrophes naturelles, etc.), d'autres épargnées. Les plus âgés sont souvent les survivants d'une époque révolue, alors que les plus jeunes viennent de cesser leur activité professionnelle; ils sont aussi les plus fragiles; en tout cas, la proportion des personnes dépendantes en raison d'une invalidité ou d'une incapacité physique ou mentale est nettement plus élevée après 75 ou 80 ans qu'entre 65 et 75 ans. L'allon­gement de la durée de la vie à laquelle nous assistons et dont nous sommes les bénéficiaires directs n'est pas synonyme de prolongation de la bonne santé, m ê m e si l'état physique et psychique des « jeunes-vieux » est incontestablement meilleur que celui de leurs parents au m ê m e âge.

Il convient donc d'accorder une grande attention à l'augmentation des effectifs très âgés, m ê m e dans les pays où l'espérance de vie est encore limitée à 50 ans. C'est la raison pour laquelle nous les avons fait figurer dans les tableaux 1, 2 et 3. C e sont ces personnes âgées qui placent directement leur famille devant des obli­gations sans précédent, d'autant plus que la structure des familles subit elle-même les conséquences de l'augmentation de la longévité. Dans les pays développés vont se multiplier les cas de doubles générations de retraités et pensionnés, à partir d u

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m o m e n t où il ne sera plus exceptionnel d'avoir 85 ou 90 ans; ces doubles générations ne sont pas un problème en soi, mais elles le deviennent si l'aïeul(e) est handicapé(e) et si les enfants, déjà âgés ou vieillissants, ne sont pas en parfaite santé (en supposant qu'ils vivent à proximité). Avec la longévité accrue des adultes handicapés de naissance, il arrivera que des parents très âgés aient à s'occuper, au moins affective-ment, d'une fille ou d'un fils dépendant. Sans aller jusqu'à ces cas extrêmes qui n'existaient pas il y a vingt ans, il convient de mentionner que les doubles générations de retraités font elles-mêmes partie de familles-lignées à quatre générations coexis­tantes, sans être cohabitantes. Seuls les progrès de la contraception limitent la diffusion de la cinquième génération dans les sociétés où les rapports sexuels sont de plus en plus précoces. Le système des valeurs religieuses, morales et civiles qui impose aux plus jeunes de s'occuper de leurs parents âgés sera de plus en plus difficile à respecter en pratique, sinon en parole. Prenons le cas de la f e m m e de 35-40 ans qui a encore ses parents et un grand-parent, tout en étant elle-même mère d'une fille ou de plusieurs enfants : n'appartient-il pas à la société — plus simple­ment, à la communauté locale — de l'aider à tenir le rôle que le code lui assigne?

Le sort des personnes très âgées est aggravé par l'éloignement géographique des enfants et des petits-enfants, notamment dans les zones rurales, par le vieillissement de leur village ou du district administratif (en France, par exemple, le canton limitera les capacités d'entraide, que ce soit pour l'entretien de la maison, les soins d'hygiène, la garde de nuit ou les déplacements). Q u a n d , physiquement ou psycho­logiquement, les limites de l'aide à domicile sont franchies, le recours à une insti­tution semble s'imposer. C'est pourquoi la proportion de personnes âgées vivant en institution est si élevée, et la population de ces établissements si vieille.

Le vieillissement de la population féminine

Dans les pays développés, la différence de longévité selon le sexe conduit les femmes à survivre aux h o m m e s — tout particulièrement à leur conjoint, dans la mesure où l'usage veut que l'épouse soit plus jeune que son mari. Le veuvage est un risque de la vieillesse pour les femmes; on pourrait dire qu'elles paient un prix élevé l'avantage apparent d'une vie plus longue : en effet, la probabilité est grande que les femmes soient à la fois veuves, seules et sans fortune, sinon pauvres. Les systèmes d'allo­cations sociales de vieillesse fonctionnent principalement au bénéfice des femmes, surtout dans les pays c o m m e la France où les pensions sont liées à l'exercice antérieur d'une profession.

Le veuvage fait courir le risque de l'isolement dans les sociétés où se sont développées les familles nucléaires et où, de plus en plus, l'exiguïté des logements urbains rend difficile l'accueil de la mère âgée privée de son époux, pas toujours capable de vivre seule. E n outre, un n o m b r e croissant de femmes ont une activité économique et, de ce fait, ont quelque difficulté à concilier leur vie professionnelle et leur rôle de mère; elles auraient encore plus de problèmes si, à ce double rôle, elles devaient ajouter celui de fille. Le .grand âge venu, c'est, nous l'avons vu, la moindre vigueur de la fille âgée qui l'empêchera de s'occuper seule d'une mère handicapée.

Q u a n d la surmortalité masculine se répandra dans les pays en développement, le problème du veuvage des femmes prendra une autre dimension, surtout là où le statut de veuve n'est pas spécialement bien considéré et protégé.

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Vieillesse et vieillissement vus par les démographes

Remises en question

Place et rôle des personnes âgées

Insidieusement, la poussée du vieillissement dans les pays à faible fécondité et l'aug­mentation numérique des personnes âgées dans les pays plus souvent mentionnés pour leur jeunesse que pour leur vieillesse se conjugueront pour imposer des remises en question, avant m ê m e que l'opinion publique n'en prenne conscience.

Traditionnellement — la rareté faisant la valeur —, l ' h o m m e qui atteignait un grand âge (disons, le double de la vie moyenne) jouissait du respect de la société : il passait pour être protégé des dieux, puisqu'il avait été épargné par la mort précoce qui était la règle générale de son temps. D e plus, sa position de survivant de générations trop vite disparues lui conférait le pouvoir et l'obligation de transmettre les connaissances, là où l'écriture ne permettait pas encore de consigner celles-ci, écriture qui, de toute façon, ne reflétait pas les sons, laissant la langue et les idiomes dériver et se fragmenter excessivement.

Aujourd'hui, l ' h o m m e est dépassé par la technique, fruit du progrès scientifique, avant m ê m e qu'il ait achevé le parcours de sa vie professionnelle : il ne peut plus transmettre que le savoir-faire à ceux qui travaillent à ses côtés, là où l'automatisation des tâches laisse encore place à l'initiative et à l'expérience de l ' h o m m e . Quand les nouveaux venus sur le marché du travail s'engagent dans des secteurs porteurs d'avenir, ils n'y rencontrent pas d'anciens : la communication entre générations n'existe pas, elle est impossible. Q u e surgissent des problèmes économiques sérieux (crise ou mutation), et les premiers à en pâtir sont les plus anciens, réputés inconver­tibles et inadaptables, et c'est ainsi que de nombreux pays occidentaux réduisent leur main-d'œuvre en organisant la cessation anticipée du travail, parfois déguisée en « préretraite ».

Immense progrès social, acquis de haute lutte par les salariés à l'imitation de ce qu'avaient déjà obtenu les agents civils et militaires de l'État, la retraite se trans­forme en outil d'exclusion des plus de 60 ans. Sous le prétexte qu'un niveau de vie décent est assuré, de quoi ces derniers pourraient-ils avoir besoin, notamment dans les pays où la sécurité sociale prend en charge la protection de leur santé ? « L ' h o m m e ne vit pas seulement de pain » (comprendre : de sa retraite), c'est aussi un être social. Or , dans les sociétés développées, la famille, cadre traditionnel de vie, s'est dissoute ou, plus exactement, a pris de nouvelles formes, qui ne permettent pas d'assurer le quotidien ni les lendemains du père et de la mère, l'âge venu. N o m ­breuses sont les personnes âgées qui n'ont pas o u plus d'enfants (facteur démogra­phique) ou dont les enfants sont loin (facteur socio-économique) ; ces derniers ne sont donc pas en mesure de rendre les services que les parents attendaient d'eux.

Dans ces conditions, on serait tenté de dire que, dans les pays développés, les anciens, malgré leur nombre, n'ont qu'une place restreinte; ils n'ont guère d'autre rôle que celui de consommateur — grâce à leurs pensions. Dans les pays en déve­loppement, il serait dangereux d'idéaliser leur situation, si grandes sont les transfor­mations qui s'opèrent parfois sous leurs yeux et qu'accélère l'influence des travailleurs revenus de l'étranger, où ils ont acquis d'autres goûts, d'autres manières, d'autres m œ u r s et souvent une habitude d'indépendance à l'égard des anciens qui est source de conflits. Ces expatriés n'ont-ils pas fréquemment accordé la préférence à leurs propres enfants, au lieu de faire bénéficier leurs parents d'une part substantielle de leurs revenus disponibles ?

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Paul Paillât

L'inégal vieillissement des nations

Des tableaux 1, 2 et 3 se dégage nettement le contraste entre les pays développés, vieillis o u sur le point de l'être, et les pays en développement qui, en 2025, n 'en seront encore qu ' au seuil d u vieillissement, u n fait déjà expérimenté par l'Europe d u xx e siècle. Sans que ce contraste soit nécessairement une cause de fracture, ce devrait être un sujet de préoccupation. Si l'aisance des retraités fait envie aux jeunes chômeurs du m ê m e pays, pourquoi n 'y aurait-il pas des réactions comparables de la part de peuples qui, d u fait d'une poussée démographique incontrôlée ou mal maîtrisée, auront à faire face à des générations de sans-emploi ?

Pour illustrer ce qui précède, prenons un exemple de voisinage de ce type. E n 2010, l'Europe méridionale (Espagne, Grèce, Italie, Portugal et Yougoslavie) devrait compter 150,9 millions d'habitants, dont 23,3 millions d'habitants âgés de 65 ans et plus, tandis que l'Afrique septentrionale (Algérie, Egypte, Libye, M a r o c , Soudan et Tunisie) en comptera 168,7 millions, 9 millions âgés de 65 ans et plus (mais 67,5 millions âgés de moins de 20 ans). E n 2025, on aurait, d 'une part, 159,4 millions d'habitants; d'autre part, 260,6 millions d'habitants. C'est dire que le contraste sera accentué. Or , tout donne à penser que le vieillissement du premier groupe de pays sera encore plus marqué sous le double effet d 'une chute plus nette que prévue de la fécondité et d 'une baisse de la mortalité après 50 ans, tandis que peu d'indices permettent d'attendre u n ralentissement plus rapide de la fécondité des pays au sud de la Méditerranée, mare nostrum des uns et des autres. Pendant les années d'essor économique, des millions de travailleurs d u Sud ont contribué au développement du N o r d par leur travail. D e m a i n , les revenus d u N o r d vieilli contribueront-ils au développement du Sud resté jeune et, c o m m e tel, en quête d'emplois pour sa main-d'œuvre inoccupée? L a réponse est évidemment poli­tique, mais l'inégalité d u vieillissement pourrait être à l'origine de révisions « déchi­rantes », mais positives.

Conclusion

Après des années pendant lesquelles tant d'efforts et d'argent ont été consacrés à alerter le m o n d e devant 1' « explosion démographique », la baisse tant attendue de la fécondité s'est produite, mais davantage dans les pays développés à l'équilibre démographique fragile que dans les pays en développement submergés par une natalité sans cesse croissante.

Aujourd'hui, l'alerte devrait viser, d 'une part, le vieillissement des « vieux » pays; d'autre part, l'expansion du n o m b r e de personnes âgées dans les pays jeunes. L'Assemblée mondiale de 1983 a été le premier témoignage universel d 'une prise de conscience des pouvoirs publics; les premières réticences des nations jeunes en face du projet — sous le prétexte que le vieillissement est typiquement un problème de pays développés — sont tombées, et ces m ê m e s nations ont joué un rôle très actif dans l'élaboration d ' u n Plan mondial d'action contre le vieillissement, riche en idées généreuses, mais pauvre en moyens . O n disposera de ces moyens quand de grands pays, telle la Chine, ou des groupes de pays c o m m e ceux de la C E E auront prouvé leur volonté de traiter les personnes âgées (demain, tout le m o n d e le sera) c o m m e des ressources, n o n c o m m e des charges. Cette volonté sera d'autant plus stimulée que les intéressés eux-mêmes auront effacé les images dévalorisantes de la vieillesse. •

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Vieillesse et vieillissement vus par les démographes

Notes

1. A g e statistique de référence, utilisé par commodité sans signification individuelle. D a n s cet article, nous retenons cet âge : l'abaisser à 60 ans ne modifierait pas les processus que nous allons commenter; en revanche, un tel abaissement peut avoir des incidences directes sur certains aspects de la vie sociale, c o m m e la cessation d'activité ou le versement des pensions de retraite.

2. O n peut contester l'emploi du mot « vieillissement » par les démographes, mais changer de terme ne ferait pas disparaître les problèmes créés par la déformation de la structure de la population.

3. Le vieillissement des populations et ses conséquences économiques et sociales, N e w York , Nations Unies, 1956. (Études démographiques, n° 26.)

4. Global estimates and projections of population by sex and age. The 1984 assessment, N e w York, Nations Unies, 1984. N o u s avons qualifié de « fiable » l'évolution 1985-2010 : les futurs contingents de personnes âgées sont relativement bien connus; en revanche, des baisses de la mortalité pourraient, après 2010, modifier l'évolution que nous appelons « fluide ».

5. C e schéma ne vaut pas pour les villes du Tiers M o n d e où, bien souvent, la fécondité est supérieure à celle des campagnes, par suite d'un moindre respect des règles et des tabous qui ont pour effet de freiner la fécondité spontanée. O n peut s'interroger sur le concept de « ville » appliqué à tout conglomérat humain sans infrastructure.

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Aide formelle et informelle aux personnes âgées Analyse des structures actuelles et des options futures en Suède*

Lars Tornstam

En Suède, comme dans beaucoup d'autres pays développés, la proportion des personnes âgées vivant avec leur famille proche a diminué. Cependant, le système d'assistance informel reste très important, et les contacts entre les personnes âgées et leurs enfants sont plus fréquents qu'on ne le croyait. Cette assistance joue un rôle non négligeable, apportant un complément au système formel qui répond aux exigences d'une dépendance à long terme. Toutefois, on ne peut imposer une charge plus lourde à la famille sans avoir recours à une législation qui la soutiendrait.

L a politique sociale en faveur des personnes âgées en Suède

La Suède fournit l'exemple d'un pays hautement développé où une large part du produit national brut est absorbée par le système de protection sociale : ainsi, en 1981, les dépenses totales de protection sociale ont représenté 34 % du P N B . Dans une société attachée aux valeurs d'indépendance et d'intégrité de la personne, une bonne partie de ces dépenses ont pour objectif d'aider les personnes âgées à mener une vie indépendante. E n pratique, cela signifie que la Suède a un système de retraite développé, dans lequel les retraités reçoivent une pension représentant en moyenne 70 % environ du revenu des membres de la tranche d'âge des 45 à 64 ans.

La pension vieillesse se compose, pour la majeure partie des retraités, de deux éléments : une pension générale, la m ê m e pour tous; une pension complémentaire, calculée sur la base des revenus antérieurs. C e système entraîne donc des différences dans le montant de la pension totale perçue par les retraités. E n outre, le système de la retraite complémentaire étant relativement récent (les premiers versements datent de 1963), les retraités plus âgés touchent moins que les plus jeunes. U n tel

Le sociologue Lars Tornstam a consacré une quinzaine d'années à la recherche dans le domaine de la gérontologie. Il a soutenu sa thèse en Suède en 1973 et, en 1988, est devenu professeur de géron­tologie sociale à l'Université de Copenhague, au Danemark , où il dirige le premier programme d'études universitaires supérieures de gérontologie. Il est également le chef de file d'un premier programme de recherche en gérontologie, à l'échelle nationale, en Suède et participe à un programme de recherche conjoint des pays nordiques dans le m ê m e domaine. Il a publié de nombreuses monographies, des comptes rendus de recherche, des articles sur la gérontologie. O n peut joindre Lars Tornstam à l'adresse suivante : Institute of Social Medicine, University of Copenhagen, P a n u m Institute, Blegdamsvej 3, D K - 2 2 0 0 Kjabenhavn N , Danemark .

63 Impact : science et société, n° 153, 63-70

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Lars Tornstam

système introduit également une différence entre h o m m e s et femmes : percevant des revenus en moyenne moins élevés que les h o m m e s durant leur vie active, ces der­nières ont généralement une pension quelque peu inférieure. Il n'en demeure pas moins qu'en dépit de ces différences la Suède assure à ses retraités des ressources raisonnables, qui les rendent économiquement indépendants.

Pour les retraités dont la pension est relativement faible, un complément de ressources est prévu. Ainsi, 21 % des h o m m e s et 42 % des femmes pensionnés reçoi­vent une aide économique complémentaire qui couvre une partie du loyer de leur appartement ou de leur maison.

Personnes âgées et leur habitat

Divers types de pension et d'aide économique permettent à la quasi-totalité des retraités, en Suède, de continuer à vivre de façon indépendante, soit avec leur conjoint, soit seuls. A cause de leur très grand âge, ou parce qu'elles ne sont plus capables d'accomplir seules les gestes de la vie quotidienne, environ 5 % des personnes âgées de 65 ans ou plus résident dans des institutions d'une sorte ou d'une autre, des maisons de retraite par exemple. Mais l'immense majorité des personnes âgées — 95 % — restent dans leur propre foyer.

O n le voit dans le tableau 1, environ la moitié des retraités, en Suède, vivent avec un conjoint et seulement 6 % avec un enfant ou un autre m e m b r e de la famille, tandis que 36 % vivent seuls et 5 % dans des institutions1. Évidemment, ces chiffres varient selon l'âge de la personne retraitée. Dans la tranche de 80 à 84 ans, les pourcentages des personnes vivant seules et de celles vivant en institution atteignent respectivement 47 % et 15 %.

A u cours des dernières décennies, la proportion de personnes âgées vivant avec un de leurs enfants ou avec d'autres membres de leur famille a considérablement diminué. E n 1954, 27 % des personnes de 65 ans ou plus vivaient avec un enfant, et 16% avec une sœur, un frère ou un autre parent. E n 1975, ces pourcentages n'étaient plus que de 9 et 6 % respectivement. Dans le m ê m e temps, le pourcentage de personnes âgées vivant seules a augmenté. Il ressort qu'en 1980 (tableau 1) 36 % des personnes ayant entre 65 et 84 ans vivaient seules. E n 1954, le pourcentage cor­respondant était de 27 % : c'est que les possibilités offertes aux personnes âgées de mener une existence autonome se sont accrues au cours de la période considérée.

Tableau 1

Répartition des membres de la population suédoise âgés de 65 à 84 ans selon leur habitat, 1980 (en pourcentages)

Age

65-69 70-74 75-79 80-84

vivant

29 33 44 47

Personnes vivant

avec leur conjoint

65 59 44 30

Personnes vivant avec un de leurs

enfants ou un parent proche

5 6 8 8

Personnes vivant

dans une institution

1 2 4

15

Total 36 53 6

Source. S O U , 21, Àldreomsorg i utveckling, 1987.

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Aide formelle et informelle aux personnes âgées

M ê m e à un âge avancé, les personnes âgées ont en Suède d'assez bonnes chances de pouvoir continuer à vivre chez elles, solution pour laquelle elles ont une nette préférence.

Dans la pratique, l'organisation officielle de l'aide à domicile est un des moyens qui rend cette autonomie possible. Depuis les années 1960, cette aide est organisée par les collectivités locales et bénéficie du soutien financier de l'Etat. Le service d'aide à domicile s'est rapidement développé : en 1962, 6 % de la population âgée de 65 ans et plus recevaient une aide de ce type; 21 % en 1983. Les personnes concernées ont bénéficié en moyenne, en 1982, de 205 heures d'aide de ce type.

E n plus du ménage, des courses et des soins d'hygiène personnelle, l'aide à domicile assure la livraison de repas, des soins de pédicurie, des services de coiffure, de sécurité, de déblaiement de la neige, etc.

Assistance formelle et informelle

A en juger par tous les moyens financiers et pratiques ainsi mis à la disposition des personnes âgées pour qu'elles puissent vivre de manière indépendante, on pourrait croire qu'en Suède les vieux sont totalement abandonnés par leurs enfants et leurs proches. E n réalité, c'est l'inverse. L a création d'un système formel d'assistance qui .permet aux personnes âgées de continuer à mener une vie indépendante a du m ê m e coup atténué dans une large mesure les conflits de générations. Plusieurs enquêtes ont montré que les relations entre les générations ne sont pas aussi mauvaises que ce qui est généralement admis : il y a aujourd'hui beaucoup moins de conflits entre générations que du temps où les personnes âgées étaient dépendantes de leurs enfants dans leur vie quotidienne2'8.

Il n'est pas vrai non plus que les enfants n'apportent aucune aide à leurs parents âgés. Le système informel d'assistance demeure important en Suède et fonctionne de manière efficace, du fait sans doute qu'il n'a plus le m ê m e rôle ; il ne fournit plus le plus gros de l'aide quotidienne, son nouveau rôle consistant à organiser et à compléter le système formel d'assistance.

E n fait, une bonne partie des soins prodigués aux personnes âgées dans la Suède d'aujourd'hui l'est par le système d'aide informel, c'est-à-dire par le conjoint, les enfants, les voisins, d'autres proches ou amis. Selon l'enquête nationale menée en Suède sur les conditions de vie en 1980-1981, 51 % des personnes âgées ne vivant pas en institution mais ayant une autonomie réduite recevaient des systèmes d'assis­tance formel ou informel une aide régulière et appropriée, à raison d'au moins une fois par semaine. 8 % recevaient une aide insuffisante par rapport à leurs besoins, 5 % ne recevaient aucune aide, alors qu'ils en auraient eu besoin, et 36 % des répondants ont déclaré pouvoir se passer d'aide.

L'aide, d'une sorte ou d'une autre, dont bénéficient les personnes âgées émane, pour 42 %, exclusivement du système informel d'assistance ; pour 36 %, du seul système formel; les autres personnes reçoivent une aide des deux systèmes. O n estime que le nombre d'heures de travail fourni par le système informel d'assistance est trois fois plus élevé que celui fourni par l'autre système. Le tableau 2 indique le nombre moyen de jours par semaine où des personnes reçoivent une aide d 'un système ou de l'autre4.

O n peut douter qu'il soit possible ou souhaitable d'imposer à l'avenir une charge plus lourde au système d'assistance informel.

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Lars Tornstam

Tableau 2

Nombre moyen de jours par semaine où les personnes âgées reçoivent une aide des systèmes d'assistance formel et informel

Le tableau 2 montre que les personnes âgées vivant avec quelqu'un reçoivent une aide informelle plus grande que celles qui vivent seules, cette aide leur étant en grande partie fournie par la personne avec laquelle elles vivent. C o m m e on pouvait s'y attendre, c'est au contraire le système d'assistance formel qui prévaut lorsqu'il s'agit de personnes âgées vivant seules. Il est à noter cependant que, m ê m e alors, ces personnes reçoivent une aide importante du système informel. L a proportion de personnes âgées vivant seules et incapables de faire leurs courses et de préparer leurs repas elles-mêmes qui ne reçoivent d'aide que du système informel atteint 1 5 % . Mentionnons aussi que ce système bénéficie davantage aux h o m m e s qui vivent avec quelqu'un qu'aux femmes dans la m ê m e situation, mais défavorise au contraire les h o m m e s qui vivent seuls, lesquels représentent la catégorie qui reçoit le moins d'aide du système informel. Les femmes seules bénéficient, en moyenne, d'une aide informelle de 1,13 jour par semaine, alors que, dans le cas des h o m m e s seuls, la fréquence n'est que de 1,06 jour.

L a m ê m e différence entre les sexes apparaît en ce qui concerne la probabilité de recevoir une aide en cas de maladie. D a n s une enquête nationale portant sur les conditions de vie, la question suivante a été posée : Qu'advient-il si vous vous sentez malade et devez rester couché pendant une

semaine ? Avez-vous quelqu'un qui puisse s'occuper de vous tous les jours et vous aider dans diverses tâches — faire les courses, préparer les repas, aller chez le pharmacien, et autres choses de ce genre?

Parmi les personnes âgées n o n hospitalisées, 84 % ont répondu qu'elles ont quelqu'un pour s'occuper d'elles dans une telle situation, 16 % d'entre elles seulement n'ayant personne. L à encore, la différence est sensible entre les personnes vivant seules et celles qui vivent avec quelqu'un, et à nouveau les h o m m e s vivant seuls sont désavan­tagés : 34 % d'entre eux n'ont personne, contre 30 % pour les femmes seules.

U n schéma d'aide réciproque

Il est à noter que l'aide ne fonctionne pas à sens unique. Diverses études ont montré que, de leur côté, les personnes âgées aident beaucoup leurs enfants6' ".

L a situation est la m ê m e en Suède, au Danemark , au R o y a u m e - U n i et aux États-Unis, aujourd'hui c o m m e il y a vingt ans. Les résultats des recherches concordent tout à fait sur ce point, et il est clair que l'aide fonctionne selon le principe de réciprocité, ce qui est très important d 'un point de vue sociopsycho-logique. E n matière de politique sociale, on attache actuellement beaucoup d'impor­tance à ce principe : R . Pinker' affirme que la réciprocité est nécessaire, afin d'éviter à des individus ou à des groupes de tomber dans une totale dépendance vis-à-vis

Personnes Ensemble des Personnes

âgées vivant avec . agfs Personnes quelqu'un v i v a n t s e u I e s

Assistance informelle 5,56 1,11 3,39 Assistance formelle 0,92 3,03 1,94

Source. SOS, Conditions de vie. Rapport 43 : Personnes âgées, 1985.

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Aide formelle et informelle aux personnes âgées

de ceux qui prennent soin d'eux. L'idée de Pinker est que les gens savent parfai­tement qui fournit l'aide, l'assistance sociale, etc., et qui la reçoit. Se contenter de recevoir correspond à une baisse de statut social. Cela est particulièrement pertinent lorsqu'on cherche à maintenir une relation caractérisée par la dignité mutuelle et la liberté de choix individuelle. Si l'on veut créer une situation dans laquelle la liberté de choix et l'indépendance président aux relations entre les générations, il n'est pas judicieux de rendre les personnes âgées dépendantes d'enfants ou de proches.

U n e autre manière d'aborder ce problème est de demander aux personnes âgées à qui elles s'adressent quand elles rencontrent divers problèmes dans leur vie quoti­dienne. Cette approche a été utilisée pour une étude portant sur trois générations6, dans laquelle on demandait, entre autres choses, à 433 f emmes de 65 à 97 ans, d'indi­quer à qui elles préfèrent faire appel lorsqu'elles ont besoin d'aide. (Tableau 3.)

Les résultats obtenus confirment la constatation précédente : les personnes âgées font u n grand usage d u système d'assistance informel. Il est intéressant de noter que la plupart des répondants ont déclaré recourir de préférence à ce système lors­qu'ils se sentent soudainement malades. Il faut néanmoins remarquer que les diverses formes d'aide énumérées dans le tableau 3 correspondent essentiellement à ce qu'on pourrait appeler une aide temporaire. Lorsqu'il s'agit d'une aide à plus long terme ou permanente, le schéma est différent. A la question de savoir à qui ils s'adresseraient s'ils avaient u n accident et avaient besoin d'une aide quotidienne pour leur toilette, plus de la moitié des répondants ont déclaré qu'ils auraient recours au système d'assistance formel. N o u s interprétons ce résultat, d'un point de vue psychologique, c o m m e l'affirmation d'un besoin de ne pas dépendre des enfants ou des proches. D e m a n d e r une aide ponctuelle est une chose ; c'en est une autre que d'être dépendant pendant une période prolongée.

D e m ê m e , on a fait observer8 qu'il ressort de toutes les études modernes que

Tableau 3 Résultats d'une enquête auprès de femmes âgées tendant à déterminer à qui elles font appel lorsqu'elles ont besoin d'aide dans certaines circonstances (en pourcentages)&

A qui vous adressez-vous ._ j i * » de vos dans les cas suivants?

A 1 ' u n membre système A V ° U S M

enfant«! de votre d'assistance personne emants f-m:ii0 f„rm»i P a s

Vous vous sentez soudainement malade 72 16 10 1 1

Vous avez besoin d'aide pour remplir un formulaire 59 22 5 12 2

Vous avez besoin d'aide pour

aller consulter un médecin 49 24 21 5 1

Vous avez besoin de changer une ampoule à votre plafonnier 30 25 8 36 1

Vous avez eu un accident et avez besoin de quelqu'un tous les jours pour vous aider à faire votre toilette 21 17 53 1 8

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Lars Tornstam

les personnes âgées préfèrent de plus en plus recevoir une aide du système d'assistance formel, l'aide de la famille étant un complément9 '10 ' " .

Le système d'aide informel est donc déjà utilisé de manière optimale; demander davantage à la famille n'est pas souhaité par les personnes âgées elles-mêmes, car elles préfèrent garder leur indépendance et une certaine liberté de choix.

Perspectives d'avenir

D e nombreuses études montrent que les contacts entre les personnes âgées et leurs enfants sont beaucoup plus fréquents qu'on ne le pensait : selon le rapport suédois déjà cité, 46 % d'entre elles voient leurs enfants toutes les semaines. Mais ce contact est le plus souvent fondé sur la réciprocité, non sur la dépendance, et l'on ne peut rien en déduire quant à la probabilité de voir les enfants s'occuper de leurs parents. Le plus important à cet égard est la distance géographique qui sépare les personnes âgées de leurs enfants, une distance qui certes s'est accrue, mais moins qu'on ne pourrait le croire.

Il est devenu moins courant de vivre dans la m ê m e maison que ses enfants, un peu plus courant de vivre loin d'eux12. E n 1954, 65 % des personnes âgées avaient un enfant habitant dans un rayon de 15 kilomètres; en 1984, ce pourcentage était de 54 %. En termes de temps de trajet, on a constaté en 1986 que 28 % des personnes âgées avaient un enfant habitant à moins de 15 minutes de chez elles et 56 % à une heure au plus6. Cependant, ce n'est pas parce qu'une bonne partie des personnes âgées ont un enfant habitant à une distance raisonnable de leur domicile que ces enfants peuvent être considérés c o m m e une source potentielle d'aide informelle à leurs parents. Dans la réalité, ce sont surtout les femmes qui apportent cette aide informelle ; il est clair qu'elles jouent au sein de la famille moderne un rôle beaucoup plus important qu'on ne le croit habituellement12. Le tissu social à l'intérieur de la famille est le plus souvent maintenu grâce aux femmes.

Étant donné que, la plupart du temps, ce sont les femmes qui fournissent l'aide informelle aux personnes âgées, il est intéressant de voir quelle a été, et quelle sera probablement à l'avenir, l'évolution du rapport entre le nombre des femmes d'âge moyen et le nombre des personnes âgées. Alors qu'en 1920 on comptait 1 100 femmes d'âge moyen pour 1 000 personnes âgées, le chiffre est en diminution et tombera à 630 d'ici à l'an 200012. L'évolution est encore plus spectaculaire si l'on considère les variations, au cours de la m ê m e période, des chiffres correspondants relatifs au nombre des femmes d'âge m o y e n non mariées : 240 en 1922, 47 en l'an 2000. A cela vient s'ajouter le fait qu'aujourd'hui un plus grand nombre de femmes travaillent. E n 1930, environ 10 % des femmes mariées et 60 % des femmes non mariées travail­laient; les chiffres correspondants seront, en l'an 2000, d'environ 90 %, tant pour les femmes mariées que pour les femmes non mariées.

O n peut évidemment objecter que cette concentration de la charge de l'aide sur les femmes est inéquitable et dépassée, que les choses vont changer à l'avenir.

Dans une analyse théorique et empirique, G . Korremann a fait remarquer13 que le sort des personnes âgées repose en fait sur un fonds d'expérience et de valeurs traditionnelles dont les femmes sont dépositaires. L'organisation et la gestion de l'aide professionnelle sont en revanche fondées sur un autre système de valeurs, qui est plus souvent celui des h o m m e s , ce qui crée dans le domaine de l'aide profession­nelle un type de conflit tout à fait particulier. E n m ê m e temps, il n'est pas possible

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Aide formelle et informelle aux personnes âgées

de faire à nouveau reposer l'aide aux personnes âgées sur la famille; cela supposerait une société dans laquelle les valeurs d'intérêt personnel et de domination cesseraient d'être au premier plan et un autre type de réseau social dont cette aide serait partie intégrante, où les rôles sexuels seraient différents, où les valeurs détenues par les femmes joueraient un rôle important, et où elles ne seraient pas les seules à se sentir responsables de l'aide. Korremann n'envisage pas qu'une évolution rapide en ce sens puisse se produire.

Certains sont néanmoins optimistes quant aux possibilités et aux perspectives du système informel, faisant valoir que, dans les familles, le nombre de personnes encore vivantes est désormais plus élevé et que, de plus, les relations avec les proches sont plus fréquentes qu'auparavant. L'accroissement du nombre des membres de la famille s'explique apparemment par l'augmentation de la durée moyenne de vie et la baisse de la mortalité infantile. Les personnes âgées ont aujourd'hui plus de chances d'avoir leurs enfants en vie : il n'est pas rare de voir des familles de quatre générations. U n modèle de simulation démographique a toutefois été mis au point, dans lequel ont été pris en considération les taux de natalité et de mortalité, mais aussi des paramètres tels que le mariage, le divorce, l'âge au premier mariage, etc.". Les résultats de cette simulation font apparaître que le nombre de personnes âgées sans enfant et vivant seules doublera entre 1983 et 2025; ils montrent également qu'il y aura une diminution du nombre des personnes âgées ayant plus d'un enfant. L'auteur en conclut que les conséquences de l'évolution démographique sont tout à fait claires : les possibilités d'aide informelle, qui reposent sur la famille, sont appelées à devenir de plus en plus restreintes.

Lorsqu'on analyse les faits, force est de conclure qu'on ne peut guère envisager d'accroître à l'avenir la charge qui pèse sur le système d'assistance informel suédois. Pour présenter les choses sur un ton légèrement plus provocateur, le renforcement de ce système d'aide informel exigerait une ou plusieurs des mesures irréalistes suivantes : réduire la mobilité géographique de la société; exclure les femmes de la population active; modifier la démographie du mariage et du divorce; changer le système de valeurs en substituant à l'individualisme et à l'indépendance le collecti­visme et la dépendance.

Si l'on examine les potentialités futures du système d'aide informel aux personnes âgées, il faut être plutôt pessimiste, eu égard à l'évolution de la société. Mais pourquoi limiter ce système informel au seul réseau familial ?

U n important changement est intervenu dans les pays industrialisés : les retraités sont désormais en meilleure santé. La distinction couramment établie de nos jours entre «jeunes vieux » et « vieux vieux » en témoigne. Les «jeunes vieux » représentent une main-d'œuvre qui pourrait être utilisée dans le cadre d'un nouveau type de sys­tème d'assistance, informel ou semi-formel, au sein duquel ils s'occuperaient de ceux qui sont vraiment vieux. C'est là une idée réaliste : les « jeunes vieux » constituent d'ores et déjà une ressource potentielle, alors que les membres plus jeunes de la famille de ceux qui ont besoin d'aide ne sont pas nécessairement disponibles.

Cependant, malgré la situation peu encourageante, les dirigeants politiques et les économistes continuent à espérer que le système d'aide familiale pourra assumer une plus grande part de la charge de l'aide aux personnes âgées. Le Parlement suédois a été saisi de projets de loi qui tendent à mettre en place de nouvelles dispositions destinées à faciliter la tâche, dans ce domaine, aux familles et aux proches : les personnes qui choisiraient de s'occuper de membres de leur famille recevraient

u n soutien du système d'assistance formel;

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Lars Tornstam

les collectivités locales pourraient être autorisées à employer des m e m b r e s de la famille des personnes âgées pour s'occuper de celles-ci ;

u n droit à congé sabbatique serait instauré, qui permettrait de s'absenter de son travail pour s'occuper d'un m e m b r e de sa famille, congé payé par les orga­nismes de sécurité sociale.

E n Suède, contrairement à ce que beaucoup pensent, le système d'aide informel est largement utilisé, mais il est douteux qu'on puisse lui imposer une charge plus lourde. C e que l'on peut faire, c'est aider ceux qui déjà, au niveau familial, s'occupent d'un m e m b r e âgé de leur famille. •

Notes

* Cet article, qui comporte quelques modifications, est extrait du chapitre rédigé par L . Tornstam pour l'ouvrage intitulé Family support to the elderly: The international experience (écrit en collaboration avec H . Kendig, A . Hashimoto et L . Coppard), qui sera publié par l'Organisation mondiale de la santé, Genève. Ce texte est reproduit ici avec l'aimable autorisation de l ' O M S .

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2. S. O . Hansson, Var det battre förr?, Stockholm, Prisma, 1980. 3. D . Gaunt, D e n pensionerade jordbrukaren : Dennes egendom och familjefôrhâllanden

sedan medeltiden : Norra och céntrala Europa, dans : B . Oden, A . Svanborg, L . Tornstam, Âldre i samhâllet-fôrr, nu och iframtiden. Del 2 : Probleminventeringar, Stockholm, Liber, 1983.

4. S O S , Conditions de vie. Rapport 43 : Personnes âgées, Stockholm, Statistiques officielles suédoises, 1985.

5. G . Hammarström, Solidaritetsmônster mellan generationer, Arbetsrapport nr. 27 frân projektet « Âldre i samhâUet-forr, nu och i framtiden », Uppsala, 1986.

6. A C R E , Age care research Europe, Copenhague, University of Copenhagen, 1986. Inter­views faites au Danemark par B . E . Holstein, Institute of Social Medicine.

7. R . Pinker, The idea of welfare, Londres, Heinemann, 1979. 8. M . Platz, Langst muligt i eget hjem, Copenhague, Socialforskningsinstituttets, Publika­

tion nr. 157, 1987. 9. S. O . Daatland, Den offentlige eldreomsorgen i en norsk kommune, Oslo, Norsk Geron-

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13. G . Korremann, Kvinder, mœnd og omsorgsarbejde, Copenhague, A K F ' s forlag, 1987. 14. P. Pikwer et al., Omvârdnaden om âldre — ett perspektiv pà—framtida hemsjukvárd utifrân

en demografisk simuleringsmodell, Lund, Arbetsrapport nr. 19 frân projektet « Âldre i samhâllet-forr, nu och i framtiden », 1984.

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L e vieillissement : la situation en Amérique latine

Luis Miguel Gutiérrez Robledo

Traditionnellement, les personnes atteignant un âge avancé étaient prises en charge au sein de la famille élargie, où elles pouvaient conserver leur rôle et leur statut. Cela n'est plus possible aujourd'hui dans de nombreux cas, en raison de facteurs tels que l'urbanisation et une mobilité sociale accrue. En Amérique latine, la crise économique a entraîné une importante réduction des investissements et des dépenses sociales élémen­taires. Un gros effort s'impose pour l'élaboration de politiques de santé publique qui utilisent au mieux des ressources limitées, en vue d'améliorer la qualité de vie des personnes âgées dans nos sociétés.

Alors q u e certains profanes continuent, à propos des tendances démographiques mondiales, de prédire u n accroissement accéléré de la population d u globe, des signes manifestes de déclin de la fécondité se sont accumulés en A m é r i q u e latine, ces dix dernières années. L a confirmation récente d ' u n effondrement brutal de la fécondité dans des pays tels que la Chine a dissipé tous les doutes sur la réalité d u ralentissement actuel de la croissance démographique mondiale et encouragé les spéculations sur le m o m e n t précis, au cours d u xxie siècle, o ù cette croissance deviendra nulle.

Cette évolution démograph ique aura de profondes répercussions sur la situation des personnes âgées dans le m o n d e entier.

Bien que , dans toutes les sociétés dont l'histoire a gardé la trace, certaines personnes aient atteint u n âge très avancé, celles-ci constituaient u n e exception plutôt q u e la règle. L a possibilité q u ' u n cinquième de la population totale atteigne o u dépasse l'âge de la retraite aurait été jugée impensable au début d u siècle, et m ê m e les efforts de planification sociale les plus récents ne sont pas à la hauteur des besoins d 'une société dans laquelle une personne sur vingt-cinq aura plus de 65 ans et u n e sur cent plus de 85 ans dans m o i n s de dix ans.

Si ce p h é n o m è n e est désormais u n e réalité dans de nombreuses sociétés indus-

Le D r Luis Gutiérrez est un spécialiste de médecine interne et de gériatrie. Il a été l'assistant du pro­fesseur R . Hugonot, au Centre hospitalier universitaire de Grenoble, Service de médecine gériatrique, avant de retourner au Mexique occuper des fonctions de conseiller en gériatrie au sein du Sistema Nacional para el Desarrollo Integral de la Familia (Système national pour le développement intégral de la famille) et un poste de professeur-assistant de médecine gériatrique à l'Université nationale, à Mexico. Le D ' Gutiérrez peut être contacté à l'adresse suivante : Casa Hogar para Ancianos « Arturo Mundet », Av . Revolución 1445, Tlacopac 01040, Mexico D . F . , Mexique.

71 Impact : science et société, n° 153, 71-87

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Luis Miguel Gutiérrez Robledo

trialisées, dans les pays en développement eux-mêmes on peut observer un vieillis­sement rapide des populations, et l'on estime que les personnes ayant aujourd'hui 65 ans représentent le tiers du nombre de personnes ayant atteint cet âge depuis deux mille ans.

D'après des chiffres publiés par l'Organisation des Nations Unies, la population mondiale de 60 ans et plus était d'environ 290 millions en 1970. Si les projections se vérifient, en l'an 2000 elle sera de 585 millions de personnes, soit une croissance de près de 100 % en trente ans.

Le vieillissement des populations constituera donc jusqu'à la fin du X X e siècle le défi social majeur, et d'énormes ressources devront être dégagées pour financer la prise en charge des personnes âgées et les soins qu'il faut leur assurer.

Dans le passé, les personnes, relativement peu nombreuses, qui atteignaient un âge avancé étaient quasiment certaines de pouvoir compter sur le soutien de la famille élargie, au sein de laquelle elles conservaient leur rôle et leur statut. Cela n'est plus possible aujourd'hui pour beaucoup d'entre elles, en raison d'un certain nombre de facteurs. M ê m e dans les régions en développement, les nouvelles technologies ont fait disparaître la transmission du savoir et des compétences d'une génération à l'autre. La mobilité sociale, la nuclearisation de la famille, l'évolution de l'urbani­sation et de la construction ont eu pour effet de plonger un nombre croissant de nos anciens dans l'isolement et la pauvreté.

S'agissant de l'Amérique latine, il faut tenir compte des importantes disparités sociales, géographiques et économiques qui existent entre la cinquantaine de pays et de territoires qui constituent cette région. D ' u n pays à l'autre et à l'intérieur de chaque pays, il existe un grand nombre de patrimoines ethniques et culturels diffé­rents, et les disparités des ressources naturelles et des cadres écologiques ont contribué à façonner des situations économiques différentes d'un pays à l'autre, depuis les économies à prédominance agricole, c o m m e celles du Guatemala ou du Honduras, jusqu'aux économies fortement industrialisées de l'Argentine, du Mexique ou du Brésil par exemple.

E n dépit de cette diversité, les pays de la région ont été soumis tout au long du siècle dernier à un certain nombre de processus c o m m u n s , associés à la moderni­sation, qui ont sans doute affecté indirectement la situation des citoyens les plus âgés. A une longue ère de colonisation a souvent succédé une période de croissance démographique rapide, d'industrialisation et d'urbanisation caractérisée par la nais­sance d'importantes agglomérations. Cela étant, il convient de ne pas oublier que ces processus, s'étant déroulés à une échelle et à un rythme différents selon les pays, n'ont pas forcément abouti partout aux m ê m e s résultats.

Les problèmes liés au vieillissement des populations en Amérique latine se posent dans le contexte du développement et de la crise économique que traverse la région. Dans le concert des nations, le continent latino-américain occupe une position considérée c o m m e « moyenne », en termes de modernisation, de puissance écono­mique, de bien-être social, etc. L a région a connu un grand essor économique après la seconde guerre mondiale, avec une croissance annuelle de près de 10 % entre 1950 et 1965, et m ê m e supérieure par la suite. Cependant, dans les années 1970, le dyna­misme de l'après-guerre n'a plus réussi à masquer l'instabilité et la dépendance vis-à-vis de l'étranger qui caractérisaient cette réussite, et l'échec de ce nouveau style de développement est devenu patent. L a crise économique que traverse actuellement la région est certainement la plus profonde, la plus longue et la plus étendue qu'ait connue l'Amérique latine au cours des cinquante dernières années. Son coût écono-

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Le vieillissement : la situation en Amérique latine

mique et social est énorme; pour faire face au problème difficile de la balance des paiements, la région a été contrainte de procéder à des ajustements économiques pénibles ayant de graves implications sociales. C'est ainsi que le niveau nutritionnel et sanitaire et celui du logement se sont dégradés, dans des proportions parfois considérables, tandis que des investissements et des dépenses à caractère social fondamental étaient sacrifiés, ce qui naturellement réduit la possibilité d'améliorer le niveau de vie des populations. Dans ces conditions, un très gros effort est nécessaire pour mettre en œuvre des programmes d'action destinés à améliorer la qualité de vie des personnes âgées, qui constituent encore une minorité dans la plupart des pays d'Amérique latine; m ê m e en Uruguay, pays d'Amérique latine où leur proportion est la plus élevée, les moins de 15 ans sont deux fois et demie plus nombreux que les plus de 60 ans.

E n période d'austérité financière et de stricte définition des priorités en matière de dépenses publiques, il semble plus réalisable de consacrer les ressources limitées dont on dispose à l'action en faveur des jeunes, qui représentent un plus grand potentiel pour le processus de développement que les personnes âgées.

Vieillissement des populations en Amérique latine : le problème et ses implications

Le contexte démographique

A u cours des trente dernières années, l'intérêt pour la dynamique des populations n'a cessé de croître, non seulement parmi ceux qui sont traditionnellement des spécialistes de ces questions, mais aussi parmi les responsables de l'élaboration, de la mise en œuvre et de l'évaluation des politiques sociales. L'analyse de ces problèmes a connu de profonds changements dans la mesure où l'on ne se borne plus à prendre en compte des taux traditionnels c o m m e les taux de natalité ou de mortalité, mais où l'on étudie aussi les problèmes propres à certaines tranches de la population : situation socio-économique, niveau de bien-être, degré de participation à la vie active, etc. Cet intérêt est beaucoup plus manifeste dans les régions fortement déve­loppées, où les changements associés à la modernisation et à la transition démogra­phique ont eu pour effet d'allonger l'espérance de vie à la naissance.

E n Amérique latine, la prédominance actuelle de la population jeune est la conséquence de l'abaissement de la mortalité enregistré depuis la fin de la seconde guerre mondiale, combiné au maintien de niveaux de fécondité élevés dans la plupart des pays. E n 1980, les taux bruts estimés de natalité étaient supérieurs à 40 °/00 dans sept pays et compris entre 30 et 39 °/00 dans neuf autres pays. (Tableau 1.) Des taux bruts de natalité faibles de 20 °/00 ou moins n'étaient enre­gistrés qu'en Uruguay, à la Barbade, à la Guadeloupe, à C u b a et à la Martinique. A ces taux de natalité sont associés des taux de mortalité généralement faibles; l'espérance de vie à la naissance atteignait 70 ans ou plus dans onze grands pays ; 60 à 69 ans dans treize autres pays et moins de 60 ans dans cinq cas seulement.

C o m m e le montrent les projections, pour l'ensemble de l'Amérique latine, le taux de mortalité devrait tomber de 8,2 à 6,7 °/00 entre 1985 et 2025; le taux de natalité devrait enregistrer une baisse plus accusée encore et passer de 32,1 à 21,6 %o pendant la m ê m e période; enfin, l'espérance de vie à la naissance devrait s'allonger, pour passer de 64,1 à 71,8, cet allongement affectant les quatre sous-régions dans

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Luis Miguel Gutiérrez Robledo

Tableau 1 Taux bruts de mortalité et de natalité et espérance de vie à la naissance estimés et projetés, en Amérique latine et aux Caraïbes, 1980-1985, 1985-2000, 2000-2025"

Amérique latine

Caraïbes Bar bade Cuba République dominicaine Guadeloupe Haïti Jamaïque Martinique Porto Rico Trinité-et-Tobago Iles du Vent'' Autres unités politiques"

Amérique centrale1* Costa Rica El Salvador Guatemala Honduras Mexique Nicaragua Panama

Amérique du Sud tempérée6

Argentine Chili Uruguay

Amérique du Sud tropicale Bolivie Brésil Colombie Equateur Guyana Paraguay Pérou Suriname Venezuela

Taux brut de mortalité (%>o)

1980-1985

8,2

8,1 8,5 6,4 7,9 7,3

14,2 6,4 7,6 5,5 6,0 6,5 6,2

7,4 5,0 8,1 9,3

10,1 6,9

10,6 5,6

8,8 9,0 7,7

10,2

8,5 15,9 8,4 7,7 8,9 5,2 7,2

10,3 6,1 5,6

1985-2000

6,8

7,3 7,7 7,2 6,0 8,1

10,3 6,0 7,8 5,8 6,4 4,4 5,5

5,4 5,1 5,2 6,3 6,3 5,3 6,6 5,5

8,9 9,5 7,2

10,0

7,0 10,0 7,2 6,9 5,6 5,0 6,1 7,5 3,9 4,8

2000-2025

6,7

7,5 8,9 9,9 6,0 9,0 6,5 6,5 6,5 8,9 8,8 5,1 6,9

5,9 6,9 5,2 5,7 4,9 6,0 5,2 7,2

10,1 10,5 9,3 9,7

6,6 6,0 6,9 7,5 5,4 6,9 6,0 5,5 3,3 5,7

Taux brut de natalité (°

1980-1985

32,3

27,0 19,1 16,9 34,0 19,9 41,3 26,3 18,8 21,5 20,7 35,7 28,3

36,8 28,1 40,2 38,4 43,9 36,2 44,6 23,4

21,7 20,6 24,8 19,9

33,1 44,0 31,4 31,0 40,6 27,9 36,0 38,3 41,1 35,2

1985-2000

27,1

24,5 16,9 17,1 27,9 15,9 39,1 19,5 17,3 16,1 16,5 23,2 20,8

28,9 23,8 34,2 33,6 38,0 27,3 38,1 23,9

18,7 18,1 20,0 18,8

28,0 39,6 26,9 24,3 33,5 19,4 29,5 34,4 31,8 27,0

/ . . )

2000-2025

21,6

19,7 13,8 13,9 19,6 13,9 28,8 15,0 14,0 13,8 13,9 16,1 15,5

20,4 19,0 22,9 24,0 25,8 19,1 26,8 18,3

15,6 15,3 16,2 15,7

23,1 28,3 23,4 17,7 25,1 14,9 21,1 27,5 18,9 20,0

Espérance de vie à la naissance

(en années)

1980-1985

64,1

64,1 71,1 73,4 62,6 70,4 52,7 71,2 70,4 73,4 70,0 69,5 70,2

65,1 70,9 64,8 60,7 59,9 66,0 57,6 70,7

69,0 69,9 67,0 70,3

63,0 50,7 63,5 63,6 62,6 70,5 65,1 59,1 68,8 67,8

1985-2000

68,1

67,0 72,9 74,7 68,1 72,6 58,4 72,8 72,6 74,4 72,6 72,9 72,6

69,7 72,8 71,3 68,0 67,8 70,1 64,7 72,8

71,1 71,2 70,6 72,7

67,1 59,4 67,4 66,9 69,0 72,5 67,8 64,4 72,3 70,9

2000-2025

71,8

70,7 75,2 75,1 72,4 75,1 66,0 75,0 75,1 75,7 75,2 75,5 75,2

72,6 73,9 73,1 72,2 72,2 72,7 70,1 73,5

72,1 72,0 71,9 73,6

71,7 67,2 71,9 71,3 71,5 75,0 71,7 71,2 74,9 73,9

a) Données de l'Organisation des Nations Unies, b) Les îles du Vent comprennent : la Dominique, Grenade, Sainte-Lucie, Saint-Vincent et les îles Grenadines, c) Dont : Anguilla, Antigua, les Antilles néerlandaises, les Bahamas, les îles Caimanes, Montserrat, Saint-Kitts et Nevis, les îles Turques et Calques, les îles Vierges américaines, les îles Vierges britanniques, d) Y compris Belize et la zone du canal de Panama. é) Y compris les îles Malouines. / ) Y compris la Guyane française.

Source. Organisation des Nat ions Unies, The world aging situation : Strategies and policies, 1985.

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Le vieillissement : la situation en Amérique latine

une proportion très inférieure à la moyenne en Amérique du Sud tempérée et légè­rement supérieure à celle-ci en Amérique du Sud tropicale.

Il ressort des données du tableau 1 que le vieillissement de la population se fera d'abord sentir dans les pays qui auront, les premiers, enregistré un déclin de la fécondité. Dans la majorité des pays de la région, toutefois, des chutes marquées de la fécondité ne devraient intervenir que vers la fin du xx e siècle, et c'est alors seulement que le vieillissement des populations deviendra manifeste. Dans quelques pays c o m m e la Bolivie, Haïti, le Pérou et El Salvador, où le niveau de fécondité demeurera élevé le plus longtemps, la population restera jeune pendant toute la période couverte par les projections (1985-2025). D a n s le m ê m e temps, les pays caractérisés par un niveau de fécondité élevé durable, associé à une baisse de la mortalité, connaîtront les plus fortes augmentations, en nombre absolu, de personnes âgées pendant cette période, car la conjugaison de taux élevés de natalité et de chances de survie accrues pour tous les groupes d'âge implique automatiquement des effectifs importants de personnes atteignant, quelque soixante ans plus tard, un âge avancé.

L'Amérique latine avait, en 1980, une population de 363,7 millions d'habitants, dont 23,3 millions de personnes âgées (de 60 ans et plus), soit 6,4 %. (Tableau 2.) E n l'an 2000, la population totale devrait atteindre 565,7 millions, soit une augmen­tation de 202 millions par rapport au chiffre de 1980, et le nombre de personnes âgées de 60 ans et plus passer à 41 millions, soit 7,2 % de la population totale. Si l'on allonge de 25 ans la période de projection, on s'aperçoit que la tranche de population âgée de 60 ans et plus représentera environ 93 millions de personnes, ce qui correspond à 10,8 % de la population totale.

Les données présentées dans les sections (A) et (B) du tableau 2 montrent clai­rement que, pendant la période couverte par les projections, on s'attend à ce que le groupe d'âge des 60 ans et plus augmente beaucoup plus rapidement que l'ensemble de la population, et ce dans tous les pays d'Amérique latine. Pour la région dans son ensemble, la population totale devrait être multipliée par 2,4 et le nombre des personnes âgées par 4.

A l'intérieur de la population des personnes âgées, des taux de croissance diffé­rents sont également enregistrés selon les groupes d'âge. E n 1980, au niveau régional, la proportion de personnes âgées de 70 ans et plus représentait, selon les estimations, 40,2 % des plus de 60 ans; d'ici à l'an 2025, cette proportion devrait n'augmenter que faiblement pour passer à 40,5% (tableau 3); en Amérique du Sud tempérée, toutefois, elle devrait augmenter de plusieurs points pendant cette m ê m e période. E n dépit des projections selon lesquelles 60 % environ des personnes âgées conti­nueront d'appartenir au groupe des « jeunes-vieux », on peut s'attendre à une augmentation importante en nombre absolu des personnes âgées de 70 ans et plus. Sur le plan national, c'est au Brésil et au Mexique que le groupe des « vieux-vieux » connaîtra l'augmentation la plus spectaculaire, avec 10,2 et 5,4 millions respectivement.

Les projections relatives à l'évolution démographique de l'Amérique latine laissent prévoir un accroissement substantiel de la population dans son ensemble, et une augmentation constante de la proportion des 60 ans et plus. L'Amérique latine est donc en train de vieillir, mais il semble que ce processus commence à peine. Cette évolution, connue sous le n o m de « transition démographique », s'est amorcée dans les pays développés vers la fin du xviiie siècle. Elle est caractérisée par une mortalité moindre en bas âge et concentrée aux âges moyens et avancés, du fait d'une amélio­ration des conditions de vie dans leur ensemble. C e processus s'accompagne d'une

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Luis Miguel Gutiérrez Robledo

Tableau 2 Population estimée et projetée, tous âges confondus (A) et de 60 ans et plus (B), en Amérique latine et dans les Caraïbes, 1980, 2000 et 2025a

Amérique latine

Caraïbes Bar bade Cuba République dominicaine Guadeloupe Haïti Jamaïque Martinique Porto Rico Trinité-et-Tobago Iles du Vent6

Autres unités politiques"

Amérique centrale* Costa Rica El Salvador Guatemala Honduras Mexique Nicaragua Panama

Amérique du Sud tempérée6

Argentine Chili Uruguay

Amérique du Sud tropicale' Bolivie Brésil Colombie Equateur Guyana Paraguay Pérou Suriname Venezuela

(A) Population totale

1980

363 704

30 648 263

9 732 5 947

329 5 809 2 188

325 3 675 1 168

409 805

92 538 2 213 4 797 7 262 3 691

69,752 2 733 1896

41067 27 036 11 104 2 924

199 452 5 570

122 320 25 794

8 021 883

3 168 17 625

388 15 620

(en milliers)

2000

565 747

43 286 320

11718 9 329

354 9 860 2 872

362 5 312 1483

527 1 149

155 709 3 377 8 708

12 739 6 978

115 659 5 154 2 823

51605 33 222 14 934

3 448

315 146 9 724

187 494 37 999 14 596

1238 5 405

30 703 698

27 207

2025

865 198

61887 381

13 575 14 495

413 18 312

3 764 430

6 463 1789

743 1 523

242 909 4 893

15 048 21717 13 293

173 960 9 752 3 937

61925 39 058 18 758 4108

498 476 19 525

291 252 51718 25 725

1620 8 553

56 036 1097

42 846

(B) Population de 60 ans et plus

1980

23 328

2 391 33

1016 260 31

323 192 32

326 88 30 61

4 684 124 245 326 163

3 590 106 122

4 768 3 437

899 432

11484 290

7 464 1433

424 52

171 925 22

698

(en milliers)

2000

40 990

3 701 34

1 520 526 46

478 247 46

537 146 28 93

8 866 251 485 734 347

6 615 194 224

6 886 4 857 1471

557

21 537 489

13 995 2 589

779 87

303 1 693

34 1564

2025

93 317

8 092 82

2 752 1515

87 1025

551 82

1321 358 96

224

23 431 683

1276 1899

906 17 512

595 530

10 542 6 818 3 038

685

51253 1077

31816 6 606 1935

256 810

4 167 81

4 494

a) Données de l'Organisation des Nations Unies, b) Les îles du Vent comprennent : la Dominique, Grenade, Sainte-Lucie, Saint-Vincent et les îles Grenadines, c) Dont : Anguilla, Antigua, les Antilles néerlandaises, les Bahamas, les îles Caimanes, Montserrat, Saint-Kitts et Nevis, les îles Turques et Caiques, les îles Vierges américaines, les îles Vierges britanniques, d) Y compris Belize et la zone du canal de Panama. e) Y compris les îles Malouines./J Y compris la Guyane française.

Source. Organisation des Nations Unies, The world aging situation : Strategies and policies, 1985.

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Le vieillissement : la situation en Amérique latine

Tableau 3

Amérique latine

Caraïbes Bar bade Cuba République dominicaine Guadeloupe Haïti Jamaïque Martinique Porto Rico Trinité-et-Tobago Iles du Vent* Autres unités politiques"

Amérique centrale* Costa Rica El Salvador Guatemala Honduras Mexique Nicaragua Panama

Amérique du Sud tempéréee

Argentine Chili Uruguay

Amérique du Sud tropicale' Bolivie Brésil Colombie Equateur Guyana Paraguay Pérou Suriname Venezuela

Population estimée et projetée, de 60-69 ans et de 70 ans en Amérique latine et dans les Caraïbes, 1980,

1980

60-69 ans

13 952

1 395 18

567 161 18

205 110 19

188 58 17 36

2 745 75

147 204 107

2 062 68 76

2 742 1971

527 243

7 068 190

4 508 931 252 32

105 579 13

456

70 ans et plus

9 376

996 15

449 99 13

118 82 13

138 30 13 25

1939 49 98

122 56

1 528 38 46

2 026 1466

372 189

4 416 100

2 956 502 172 20 66

346 9

242

Population (er

2000

60-69 ans

23 455

2 086 17

825 314 24

299 129 24

303 82 14 55

5 226 147 280 440 208

3 892 121 129

3 580 2 474

829 276

12 563 311

7 953 1559

466 50

177 1075

18 952

> milliers)

70 ans et plus (

17 535

1 6 1 5 17

695 212 22

179 118 22

234 64 14 38

3 640 104 205 294 139

2 723 73 95

3 306 2 383

642 281

8 974 178

6 042 1030

313 37

126 618 16

612

et plus, 2000 et 2025a

2025

50-69 ans

55 463

4 857 51

1 527 944 55

661 384 56

755 220 68

138

14 200 417 778

1 130 556

10 613 379 309

5 678 3 546 1766

365

30 729 676

18 655 4 1 1 2 1 188

162 501

2 605 66

2 757

70 ans et plus

37 854

3 235 31

1225 571 32

364 167 26

566 138 28 86

9 231 266 498 769 350

6 899 216 221

4 864 3 272 1272

320

20 524 401

13 161 2 494

747 94

309 1562

15 1737

a) Données de l'Organisation des Nations Unies, b) Les îles du Vent comprennent : la Dominique, Grenade, Sainte-Lucie, Saint-Vincent et les îles Grenadines, c) Dont : Anguilla, Antigua, les Antilles néerlandaises, les Bahamas, les îles Caimanes, Montserrat, Saint-Kitts et Nevis, les îles Turques et Caiques, les îles Vierges américaines, les îles Vierges britanniques, d) Y compris Belize et la zone du canal de Panama. é) Y compris les îles Malouines./) Y compris la Guyane française.

Source. Organisation des Nations Unies, The world aging situation : Strategies and policies, 1985.

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chute du taux brut de natalité et d'un allongement substantiel de l'espérance de vie, ce qui se vérifie depuis quelques années dans la région. Tout laisse à penser qu'il se poursuivra au cours des prochaines décennies, à un rythme plus rapide que cela n'a été le cas dans les sociétés postindustrielles, où il est déjà achevé.

Dynamique des populations

E n 1980, dans vingt grands pays d'Amérique latine, le groupe d'âge 0-14 ans repré­sentait, selon les estimations, plus de 35 % de la population totale (tableau 4), conférant à la région un profil jeune que confirmait la proportion généralement faible de personnes âgées de 60 ans et plus — moins de 8 % dans les vingt et un pays les plus importants. D'ici à l'an 2000, l'importance relative du groupe de 0 à 14 ans devrait diminuer sensiblement dans la plus grande partie de la région, du fait du déclin de la fécondité. Actuellement, le processus de vieillissement des populations se fait déjà sentir à travers l'importance croissante que prend le groupe des 15 à 59 ans. Mais c'est au cours de la période 2000-2025 que l'impact de la chute de la fécondité deviendra manifeste, entraînant une augmentation brutale du nombre des personnes âgées.

L'Amérique latine est la région la plus urbanisée du m o n d e , ce qui se reflète également dans la répartition de la population âgée. E n 1980, on estimait à environ 69 % le nombre de personnes de 60 ans et plus vivant dans des zones considérées c o m m e urbaines.

Il est important de noter les disparités entre les sexes pour ce qui est de l'espérance de vie à la naissance. Ces disparités ont d'importantes implications démographiques; les femmes, dans l'ensemble, ont une durée de vie supérieure à celle des h o m m e s , c o m m e cela a été clairement établi dans des pays tels que les États-Unis, où l'on prévoit, entre 1980 et l'an 2000, une augmentation de 81 % du nombre absolu de femmes dans le groupe d'âge de 85 ans et plus, contre 71 % seulement pour les h o m m e s . A l'évidence, les personnes vivant seules ou sans leur conjoint auront davantage besoin d'une forme quelconque de prise en charge à long terme.

Conséquences de la modernisation sur le processus de vieillissement de la population

Industrialisation et urbanisation sont étroitement liées dans l'histoire de l'Amérique latine. Cette région est la plus urbanisée des régions en développement — et l'était déjà au début de ce siècle. La plupart des pays de la région possèdent au moins une grande agglomération urbaine, qui s'est généralement développée en tant que centre d'attraction pour l'industrie, le gouvernement, l'éducation, la culture. D'après un classement des agglomérations urbaines de 2 millions d'habitants ou plus établi par l'Organisation des Nations Unies en 1985, quatre des douze centres urbains les plus importants du m o n d e sont situés en Amérique latine. Bien que la croissance urbaine continue d'être caractérisée par une tendance à la hausse, les taux d'urbani­sation, dans la plupart des pays, tendent à diminuer. L a quasi-totalité des pays de la région étaient à prédominance agricole en 1900, et si certains, c o m m e l'Argentine, le Brésil, le Chili, la Colombie et le Mexique, ont enregistré une certaine croissance industrielle dès le début des années 1900, l'industrialisation à grande échelle des autres n'est intervenue que dans les années postérieures à la Dépression. Tous présentent cependant une caractéristique c o m m u n e : l'absence quasi totale de déve-

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Le vieillissement : la situation en Amérique latine

Tableau 4 Taux estimés et projetés de la population totale répartie en groupes a"âge fonctionnels, en Amérique latine et dans les Caraïbes, 1980, 2000 et 2025 (en pourcentages de la population totale)a

Amérique latine

Caraïbes Bar bade Cuba République dominicaine Guadeloupe Haïti Jamaïque Martinique Porto Rico Trinité-et-Tobago Iles du Vent* Autres unités politiques0

Amérique centrale1* Costa Rica El Salvador Guatemala Honduras Mexique Nicaragua Panama

Amérique du Sud tempérée* Argentine Chili Uruguay

Amérique du Sud tropicale' Bolivie Brésil Colombie Equateur Guyana Paraguay Pérou Suriname Venezuela

0-14 ans

39,8

37,3 28,9 31,3 44,8 31,0 43,6 40,6 33,2 31,2 32,9 43,8 38,0

44,6 37,9 45,2 44,1 47,8 44,6 48,0 39,8

29,1 27,9 32,5 27,2

40,1 43,4 39,2 39,4 44,4 40,2 42,7 42,3 51,3 42,1

1980

15-59 i ans i

53,8

54,9 58,6 58,2 50,8 59,6 50,9 50,6 56,9 59,9 59,6 48,9 54,4

50,3 56,5 49,7 51,4 47,8 50,2 48,1 53,7

59,3 59,4 59,4 58,0

54,1 51,3 54,7 55,0 50,3 53,9 51,9 52,5 43,0 53,4

60 ans et plus

6,4

7,8 12,5 10,4 4,4 9,4 5,6 8,8 9,8 8,9 7,5 7,3 7,6

5,1 5,6 5,1 4,5 4,4 5,1 3,9 6,4

11,6 12,7 8,1

14,8

5,8 5,2 6,1 5,6 5,3 5,9 5,4 5,2 5,7 4,5

0-14 ans

34,7

31,5 24,1 24,1 35,5 23,4 43,4 28,3 24,6 23,9 24,5 33,0 29,7

37,1 31,7 40,7 39,4 42,3 36,3 44,1 31,5

26,2 25,5 28,0 26,1

35,3 43,5 33,9 32,7 41,3 28,3 37,7 40,4 43,8 35,7

2000

15-59 ans

58,1

60,0 65,3 62,9 58,9 63,6 51,8 63,1 62,7 66,0 65,7 61,7 62,2

57,2 60,8 53,8 54,7 52,7 58,0 52,2 60,6

60,4 59,9 62,1 57,8

57,9 51,4 58,6 60,5 53,4 64,7 56,7 54,1 51,3 58,5

60 ans et plus

7,2

8,5 10,6 13,0 5,6

13,0 4,8 8,6

12,7 10,1 9,8 5,3 8,1

5,7 7,4 5,6 5,8 5,0 5,7 3,8 7,9

13,3 14,6 9,9

16,1

6,8 5,0 7,5 6,8 5,3 7,0 5,6 5,5 4,9 5,7

0-14 ans

29,0

27,3 20,2 20,2 28,3 20,3 37,2 21,8 20,0 20,3 20,3 23,1 2,3

28,2 26,3 30,8 31,7 34,1 26,8 35,4 25,2

22,4 22,0 23,1 23,0

30,5 37,5 30,4 24,9 32,9 21,7 29,0 35,2 25,5 27,7

2025

15-59 ans

60,2

59,6 58,3 59,5 61,2 58,6 57,2 63,6 60,9 59,3 59,6 63,9 63,0

62,2 59,7 60,7 59,6 59,1 63,1 58,5 61,3

60,6 60,6 60,7 60,3

59,2 57,0 58,7 62,3 59,5 62,5 61,5 57,4 67,1 61,8

60 ans et plus

10,8

13,1 21,5 20,3 10,4 21,1 5,6

14,6 19,1 20,4 20,0 12,9 14,7

9,6 14,0 8,5 8,7 6,8

10,1 6,1

13,5

17,0 17,4 16,2 16,7

10,3 5,5

10,9 12,8 7,5

15,8 9,5 7,4 7,4

10,5

a) Données de l'Organisation des Nations Unies, ft) Les îles du Vent comprennent : la Dominique, Grenade, Sainte-Lucie, Saint-Vincent et les îles Grenadines, c) Dont : Anguilla, Antigua, les Antilles néerlandaises, les Bahamas, les îles Caimanes, Montserrat, Saint-Kitts et Nevis, les îles Turques et Calques, les îles Vierges américaines, les îles Vierges britanniques, d) Y compris Belize et la zone du canal de Panama. é) Y compris les îles Malouines. f) Y compris la Guyane française.

Source. Organisation des Nations Unies, The world aging situation : Strategies and policies, 1985.

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loppement industriel dans les zones rurales a entraîné une concentration des emplois non agricoles dans les zones urbaines.

Ces processus de modernisation sont intervenus dans nombre de pays d'Amérique latine sur une période relativement courte, par comparaison avec la plupart des autres régions développées. La région offre, de ce fait, un cadre idéal d'analyse des effets de ces processus sur les personnes âgées et leurs relations familiales.

O n associe généralement aux Latino-Américains, c o m m e aux populations de nombreux pays en développement, la notion de relations familiales étroites, offrant traditionnellement u n contexte propice aux personnes âgées, qui bénéficient du soutien de leur parenté et conservent leur place au sein de foyers abritant des familles élargies.

Dans les sociétés traditionnelles, la famille ou la petite communauté joue un rôle économique majeur, fondé sur la propriété et le travail collectif des terres. D a n s ce type de sociétés, une proportion importante d'anciens possèdent ou contrôlent les moyens de production. Leur statut est encore renforcé par une strati­fication légitimée par des croyances, souvent religieuses. Les enfants reprennent les métiers qu'ils ont appris de leurs parents et qu'ils transmettent, à leur tour, à leurs enfants. Ces groupes familiaux se suffisent à eux-mêmes . La continuité des géné­rations est assurée, dans la mesure où les enfants prennent en charge leurs parents devenus vieux. D a n s ce type de contexte, les personnes âgées contribuent aux frais et aux charges de la famille et décident elles-mêmes du m o m e n t où elles choisissent éventuellement de s'arrêter de travailler.

Les changements économiques et sociaux que connaissent les pays en dévelop­pement — industrialisation, mobilité sociale, urbanisation — sont les principales causes d'un incontestable et rapide effondrement des structures sociales tradition­nelles. O n a déjà évoqué les changements affectant la structure des relations familiales qui, en Amérique latine, résultent de l'ensemble du processus de modernisation. Les migrations vers les zones urbaines, par exemple, sont aujourd'hui de plus en plus répandues dans un n o m b r e croissant de pays de la région. D u fait de ces migrations, les familles sont physiquement séparées, ce qui entraîne la fragmentation de la famille élargie. Certaines données concernant des établissements implantés à la péri­phérie de Mexico infirment cette hypothèse et prouvent que la famille élargie demeure la règle, tout au moins chez les migrants de la première génération. Toutefois, la manifestation physique de cette famille élargie est peut-être en train de changer, dans la mesure où de nombreuses familles nucléaires vivent dans des foyers distincts, au sein d'enclaves familiales élargies.

Les changements dans le marché de l'emploi risquent également d'avoir une incidence sur les relations familiales. D e plus en plus, les emplois sont éloignés du contexte familial, et la sécurité de l'emploi pour les personnes âgées se fait plus rare. La proportion de femmes économiquement actives dans l'ensemble de la région est en augmentation depuis 1950, bien que les taux soient généralement peu élevés et que, globalement, selon les estimations, moins de 15 % d'entre elles aient exercé un emploi en 1980. A u x alentours de cette date, toutefois, dans certains pays des Caraïbes, la proportion de femmes actives avoisinait celle des h o m m e s .

D u fait de l'éclatement de la famille élargie au profit de la famille nucléaire, un nombre croissant de personnes âgées risquent d'être appelées à vivre seules ou avec leur seul conjoint. Cette évolution risque de se traduire, pour les personnes âgées, par une prise en charge physique moins automatique et moins constante. Le fait que de plus en plus de femmes travaillent à l'extérieur risque de signifier qu'elles

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Le vieillissement : la situation en Amérique latine

auront moins de temps à consacrer aux personnes âgées. E n outre, dans la mesure où les membres d'une famille sont de plus en plus coupés les uns des autres, physi­quement et émotionnellement, l'obligation morale de subvenir, de quelque manière que ce soit, aux besoins des parents âgés risque de perdre tout ou partie de sa force. Dans le Mexique rural, par exemple, il incombe traditionnellement aux fils de s'occuper d'une mère veuve ou âgée; mais le Mexique est aujourd'hui urbanisé à 70 % et, en milieu urbain, les attitudes envers les parents âgés varient considéra­blement. Confrontés à une forte inflation, à u n chômage généralisé et à la stagnation économique, les jeunes sont de plus en plus réticents à offrir leur soutien, tandis que les personnes âgées hésitent à faire valoir leurs droits et adoptent, à cet égard, une attitude ambivalente.

Le soutien de la famille aux personnes âgées

Dans les pays d'Amérique latine, il est d'usage de penser que les personnes âgées sont entre de bonnes mains, étant donné le rôle protecteur que joue la famille élargie. L a cellule familiale est considérée c o m m e essentielle, tant du point de vue de l'inté­gration que de la prise en charge de ses membres âgés, grâce à la force des liens unissant les générations. Les gouvernements soutiennent souvent que la prise en charge des personnes âgées ne constitue pas un problème dans les pays en déve­loppement, dans la mesure où le modèle de la famille élargie continue d'être largement répandu. O r , des études menées au Népal et au Brésil ont montré que, si les personnes âgées continuent de vivre au sein de familles élargies, les changements socio-économiques ont transformé la nature des relations entre les générations au sein de ces familles, au détriment des personnes âgées. Les contacts entre générations au sein d'un m ê m e foyer peuvent se révéler peu satisfaisants pour les personnes âgées. Pour expliquer ce paradoxe, on invoque le statut socio-économique souvent peu élevé associé aux foyers abritant plusieurs générations. Les individus des classes moyennes abordent la vieillesse avec des ressources supérieures à celles des personnes issues des classes laborieuses, une plus grande sécurité financière et un meilleur état de santé. Mais les personnes âgées issues de milieux moins favorisés semblent mieux entourées, à en juger par le nombre de proches vivant à proximité. L'expérience future des pays en développement dira si le foyer abritant plusieurs générations est une réponse satis­faisante aux problèmes que connaissent les personnes âgées.

Dans ces pays c o m m e dans la plupart des pays industrialisés, la question sera probablement de savoir c o m m e n t aider les familles à répondre aux besoins de leurs membres les plus âgés. Lorsqu'une situation rendue difficile par la précarité de l'emploi, le faible niveau des salaires, les mauvaises conditions de logement, les maladies chroniques et l'éclatement de la famille dû aux migrations, se conjugue à une politique sociale fondée sur le principe que la prise en charge des personnes âgées est une affaire privée, force est de se demander si les familles sont réellement en mesure de s'occuper efficacement de leurs membres âgés.

A toutes fins pratiques, en Amérique latine, on continue d'estimer que c'est à la famille qu'il incombe au premier chef de subvenir aux besoins des personnes âgées.

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L a situation sanitaire des personnes âgées

L'augmentation du nombre des personnes âgées est une question particulièrement préoccupante pour le secteur de la santé en Amérique latine. Les personnes âgées sont, en règle générale, en moins bonne santé que les membres plus jeunes de la société, ils consomment davantage de services de santé et génèrent des coûts plus élevés. Il s'ensuit qu'il faudra dégager des ressources supplémentaires et mieux utiliser les ressources existantes; cependant, étant donné que la santé n'est que l'un des éléments qui concourent au bien-être des individus, des politiques très diverses devront être élaborées et mises en œuvre si l'on veut s'assurer que les personnes âgées pourront vivre leurs dernières années dans la dignité et à un coût abordable.

Bien que les informations disponibles soient généralement fragmentaires, il semble que les principales maladies affectant les personnes âgées de la région soient des maladies chroniques, de caractère dégénératif. A u Paraguay, par exemple, une étude a montré que les principales causes de décès chez les personnes âgées étaient les maladies cérébro-vasculaires, les cardiopathies, les tumeurs malignes, l'hypertension, la grippe et la pneumonie. Le profil épidémiologique de ce groupe d'âge au Mexique, décrit au tableau 5, fait apparaître à la fois des maladies caractéristiques des sociétés postindustrielles, c o m m e celles que nous venons de mentionner, et des maladies infectieuses caractéristiques de zones moins développées. Cela s'explique par la stratification économique de la population, laquelle va de l'extrême pauvreté (environ 15 % de la population du Mexique), associée à un état sanitaire comparable à ce que l'on observe dans les pays véritablement sous-développés, à l'extrême richesse (2 % au m a x i m u m de la population du Mexique), qui s'accompagne d 'un niveau de vie et d'un état sanitaire similaires à ceux des pays pleinement développés.

D u point de vue de la santé publique, plusieurs remarques peuvent être faites : l'allongement de l'espérance de vie et l'amélioration des conditions de vie entraînent le phénomène connu de la compression de la morbidité et de la mortalité, qui se traduit par l'augmentation du taux de mortalité chez les personnes âgées; celui-ci représentait au Mexique 19,8 % de la mortalité totale en 1960 et atteignait 35,9 % en 1984. L'invalidité est difficile à apprécier dans ce pays, mais, d'après les données d'une enquête nationale sur les handicapés réalisée en 1981, 40 % des handicapés au

Tableau 5 Dix grandes causes de décès dans le groupe d'âge de 65 ans et plus, au Mexique, 1981

Causes

Arythmie cardiaque Diabète sucré Infarctus du myocarde Pneumonie Maladies pulmonaires

obstructives chroniques Infections intestinales Cirrhose du foie Syndromes néphrétiques Cancer de l'estomac Cancer du poumon

Nombre de décès

8 535 8 509 7 857 7 685

6167 3 891 3 681 3 660 2 046 1 803

Taux pour 100 000 habitants

12,0 11,9 11,0 10,7

8,6 5,4 5,1 5,1 2,8 2,5

82

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Le vieillissement : la situation en Amérique latine

Mexique seraient âgés de plus de 60 ans. Par ailleurs, au Mexique toujours, l'enquête nationale sur les besoins des personnes âgées, réalisée la m ê m e année, a montré que le pourcentage de personnes âgées de plus de 80 ans souffrant d'invalidité atteignait 40 % et que 2 % des personnes âgées de plus de 60 ans (soit environ 60 000 personnes) étaient dans une dépendance totale pour tous les actes de la vie quotidienne. Il va sans dire que l'invalidité et la dépendance croissantes liées au grand âge alourdissent la charge représentée par les personnes âgées, ce qui contribue peut-être à l'abais­sement du seuil de tolérance et au relâchement des liens et du soutien familial évoqués précédemment.

Incidences économiques des tendances au vieillissement

C o m m e dans d'autres régions en développement, l'analyse des répercussions socio-économique du vieillissement des populations est centrée sur trois phénomènes clés : le déséquilibre croissant entre le nombre de personnes âgées et les effectifs d u groupe d'âge productif compris entre 15 et 59 ans, qui implique une dépendance écono­mique si les personnes âgées ne sont plus actives; le vieillissement accéléré des populations rurales et le déclin de la productivité agricole résultant des migrations internes massives des jeunes; enfin, l'affaiblissement du rôle de la famille élargie traditionnelle dans la prise en charge des personnes âgées, tendance qui pourrait entraîner u n accroissement de la demande de services publics d'assistance coûteux. Les rapports de dépendance économique figurant au tableau 6 donnent une idée de l'énorme fardeau économique qui pèsera sur la population active d'Amérique latine si les projections démographiques se vérifient. Les rapports globaux de dépendance diminueront dans la quasi-totalité des pays de la région au cours de la période couverte par les projections 1980-2025; toutefois, cette baisse résultera presque entièrement de la réduction de la dépendance des jeunes consécutive à la chute du taux de fécondité. A l'inverse, entre les deux dates extrêmes de la période considérée, le taux de dépendance des personnes âgées sera en augmentation dans tous les pays, excepté Haïti et le Suriname. Dans les sous-régions des Caraïbes, de l'Amérique centrale, de l'Amérique du Sud tempérée et de l'Amérique du Sud tropicale, la proportion de personnes âgées économiquement dépendantes augmentera de 57, 60, 40 et 54 % respectivement. Ces hausses énormes feront peser un fardeau financier considérable sur la population active. Cette donnée revêt une importance parti­culière pour les décideurs, qui devraient admettre que le maintien des personnes âgées dans des emplois productifs contribuera à réduire leur dépendance écono­mique, tout en leur permettant de conserver leur place au sein de la collectivité. Des efforts devront donc être faits pour créer des emplois à leur intention, m ê m e s'il est clair que la création d'emplois sera fonction de la mise en place de moyens appro­priés en matière de formation professionnelle et d'éducation permanente.

Le vieillissement des populations : les solutions possibles

Bien que rares soient les pays où la question des personnes âgées est considérée c o m m e prioritaire, on observe une prise de conscience accrue des besoins des personnes âgées et des besoins de demain, auxquels une attention de plus en plus grande est apportée. Les intéressés commencent à se tourner vers ce que l'on pourrait

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Tableau 6

Amérique latine

Caraïbes Barbade Cuba République dominicaine Guadeloupe Haïti Jamaïque Martinique Porto Rico Trini té-et-Tobago Iles du Vent6

Autres unités politiques'

Amérique centrale1* Costa Rica El Salvador Guatemala Honduras Mexique Nicaragua Panama

Amérique du Sud tempérée" Argentine Chili Uruguay

Amérique du Sud tropicale' Bolivie Brésil Colombie Equateur Guyana Paraguay Pérou Suriname Venezuela

Nombre estimé et projeté des personnes dépendantes de 0 à 14 et de 60 (de 15 à

1980

86

82 70 72 97 68 97 97 73 67 68

105 84

99 77

101 95

109 99

108 86

69 68 69 72

85 95 83 82 99 86 92 91

132 87

ans et 59 ans)

Total

2000

72

67 53 59 70 57 93 59 59 51 62 63 61

75 64 86 83 89 73 91 65

65 66 71 73

73 95 71 64 87 55 77 85 95 71

plus pour 100 personnes en âge i ans

de travailler , Amérique latine, 1980, 2000 et 2025a

2025

66

68 72 68 63 71 75 57 64 68 68 56 58

61 67 65 68 70 58 71 63

65 65 65 66

68 76 71 60 68 60 62 74 49 62

0-14 ans

1980

74

68 49 54 88 52 86 80 58 52 55 90 70

89 67 91 86

100 89

100 74

49 47 55 47

74 85 72 72 88 75 82 81

119 79

2000

60

53 37 38 60 37 84 45 39 36 37 54 48

65 52 76 72 80 63 84 52

43 42 45 45

61 85 58 54 77 44 67 75 86 61

2025

48

46 35 34 46 35 65 34 33 34 34 36 35

45 44 51 53 58 42 74 41

37 36 38 38

51 66 52 40 55 35 47 61 38 45

60 ans et plu

1980 2000 :

12

14 21 18 9

16 11 17 17 15 13 15 14

10 10 10 9 9

10 8

12

20 21 14 25

11 10 11 10 11 11 10 10 13 8

12

14 16 21 10 20 9

14 20 15 15 9

13

10 12 10 11 9

10 7

13

22 24 16 28

12 10 13 11 10 11 10 10 9

10

LS

2025

18

22 37 34 17 36 10 23 31 34 34 20 23

16 23 14 25 12 16 10 22

28 29 27 28

17 10 19 20 13 25 15 13 11 17

à) Données de l'Organisation des Nations Unies, b) Les îles du Vent comprennent : la Dominique, Grenade, Sainte-Lucie, Saint-Vincent et les îles Grenadines, c) Dont : Anguilla, Antigua, les Antilles néerlandaises, les Bahamas, les îles Caimanes, Montserrat, Saint-Kitts et Nevis, les îles Turques et Calques, les îles Vierges américaines, les îles Vierges britanniques, d) Y compris Belize et la zone du canal de Panama. é) Y compris les îles Malouines./) Y compris la Guyane française.

Source. Organisation des Nations Unies, The world aging situation : Strategies and policies, 1985.

appeler une « définition prospective des priorités », qui consiste à anticiper sur l'avenir d'une ou deux décennies, à s'interroger sur les questions susceptibles d'être alors prioritaires et à réfléchir aux moyens de les traiter. Par ailleurs, le concept jugé essentiel de soins primaires communautaires, récemment élaboré par l'Organi-

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Le vieillissement : la situation en Amérique latine

sation mondiale de la santé, qui inclut la participation des individus par le biais d'une autoprise en charge et d'une réduction de la dépendance, est au cœur des préoccupations relatives aux personnes âgées.

A u niveau de l'organisation des services, entreprise d'une très grande complexité, il faut avoir conscience de la disparité des besoins, donc des services spécifiques qui leur correspondent. Il est désormais traditionnel de classer les services aux personnes âgées en services destinés aux individus en relative bonne santé, en services permettant d'éviter le placement en institution et en services destinés à ceux dont les besoins risquent de nécessiter une prise en charge de longue durée — en institution ou non. Il est généralement admis, à l'intérieur de ce schéma, que le placement en institution doit intervenir le plus tard possible et que le soutien de la famille et de la communauté doit être encouragé c o m m e étant la solution la plus humaine et la plus efficace.

Jusqu'ici, les décisions en matière de politique de gérontologie se sont fondées, dans la plupart des pays, sur le principe de PÉtat-providence auquel incombait l'action en faveur des familles c o m m e de la personne âgée elle-même. La crise de l'État-providence est aujourd'hui manifeste, en particulier dans les pays en déve­loppement qui, confrontés à des problèmes économiques graves, n'ont plus les moyens d'une politique d'aide sociale.

Les pays développés ont déjà entrepris d'encourager le développement de réseaux informels de solidarité sociale, en vue de réduire la charge qui pèse sur les services sociaux existants. Dans les pays en développement c o m m e ceux d'Amérique latine, les décideurs s'appuient, de façon excessive peut-être, sur la force des liens entre les générations et présument que la famille est prête à supporter le poids supplémen­taire des personnes âgées malades et dépendantes avec un m i n i m u m de soutien médical de type classique et l'aide de services spécialisés quelque peu embryonnaire. Cela s'explique par une quasi-absence de ressources due au fait que les problèmes liés à l'âge continuent d'être considérés c o m m e beaucoup moins cruciaux que ceux liés à la croissance de la population, à l'emploi ou à la santé de la mère et du nouveau-né.

Sachant que les ressources seront nécessairement limitées, il conviendrait d'éla­borer des stratégies visant à mieux utiliser celles dont on dispose.

Il faut tout d'abord, pour pouvoir définir en connaissance de cause des priorités, encourager les recherches visant à déterminer quels sont actuellement la situation des réseaux de soutien institutionnels et autres (en particulier, la famille) et les besoins de la population âgée sur le plan de la santé; ces deux axes de recherche devront avoir pour but de favoriser le développement de services innovateurs fondés sur un diagnostic et un traitement précoces en vue de prévenir les invalidités sociales et médicales.

Deuxièmement (mais cet effort devra être fait simultanément), il faut élaborer des programmes d'éducation et de formation en gériatrie et en gérontologie. Ces programmes devront inclure le recyclage des personnels de santé qui participent aux soins aux personnes âgées et tenir compte de l'élaboration de programmes ultérieurs de gérontologie dans un avenir proche.

Troisièmement, il est urgent d'optimiser les services existants, afin d'éviter que ne soient gaspillées des ressources plus que modestes.

Quatrièmement, il convient d'élaborer une politique éducative visant à conserver ou à redonner au vieillissement et aux personnes âgées une image positive dans nos sociétés.

Cinquièmement, des mesures d'aide aux familles qui prennent en charge leurs parents âgés ou malades doivent être adoptées. S'inspirant des Recommandations 25

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Luis Miguel Gutiérrez Robledo

à 29 de l'Assemblée mondiale sur le vieillissement, ces mesures devront viser à promouvoir la solidarité et les liens familiaux, en associant des représentants des personnes âgées retirées de la vie active à l'élaboration des décisions, et elles devront s'adresser plus particulièrement aux familles ayant de faibles revenus qui prennent en charge des parents très âgés ou malades. Ces mesures pourront prendre la forme d'allocations spéciales, d'exonérations fiscales et/ou d'aide à domicile ou d'hospitali­sation de jour, plus particulièrement d'actions de formation des familles dans des domaines tels que les soins aux patients mentalement déficients ou incontinents et les techniques simples de soins à donner aux personnes âgées lourdement handicapées.

Sixièmement, nous devons nous efforcer de mettre en place un régime équitable de pensions de retraite m i n i m u m , qui prenne en compte la proportion supérieure de femmes au sein de la population âgée.

Septièmement, il faut encourager le développement des organisations bénévoles, afin de renforcer le réseau de soutien non institutionnel qui existe déjà.

Huitièmement, des mesures visant à améliorer les conditions actuelles de logement des foyers qui abritent plusieurs générations doivent être mises en œuvre. Cela pourra se traduire par des prêts à faible taux d'intérêt, par des exonérations fiscales ou par des aides financières directes toutes les fois que cela sera possible.

Enfin et surtout, il nous faut élaborer des mesures visant à aider la personne âgée à retrouver sa place et son rôle dans la société, à travers des expériences éducatives et culturelles, la participation à des tâches bénévoles et à la prise des décisions au sein de la communauté par le biais, par exemple, d'associations c o m m e les conseils d'anciens, qui se sont développés avec succès dans les quartiers périphériques de la ville de Mexico.

Il est évident que, dans chaque pays, les options en matière de politique en faveur des personnes âgées doivent être examinées dans le contexte de la situation socio-économique globale, et que les actions à caractère social entreprises devront s'inscrire harmonieusement dans la stratégie de développement mise en œuvre. Enfin, les mesures en faveur des personnes âgées ne sont pas toutes nécessairement coûteuses. Le succès de nombreux programmes dépend de la créativité, des capacités et des compétences des planificateurs et des administrateurs; l'argent seul ne pourra jamais résoudre les problèmes des personnes âgées. U n e bonne planification et une imagi­nation créative aideront à faire évoluer les mentalités de nos décideurs, pour que les personnes âgées cessent d'être considérées c o m m e un fardeau et pour que s'amorce, au sein de l'opinion, une prise de conscience des potentialités et des aspects positifs de la vieillesse, conçue c o m m e l'aboutissement du développement de la personne humaine. Cette évolution aidera nos décideurs à prendre conscience du fait que le soutien et la prise en charge des personnes âgées sont pour elles un droit, ainsi qu'une nécessité urgente, et qu'il ne s'agit en aucune façon de charité. •

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L a longévité de la population biélorassienne. Facteurs socio-sanitaires et hérédité

Anatoly Taltchouk, Evgueny Konoplya et Valentina Mossalygo

L'espérance de vie et le déclin progressif de la vitalité avec Vâge dépendent de facteurs génétiques et de facteurs liés à Venvironnement. En ce qui concerne ces derniers, des études faites en RSS de Biélorussie montrent qu'un mode de vie régulier, un travail physique intensif mais satisfaisant, la frugalité et la tempérance jouent un rôle dans la longévité.

Aujourd'hui, le grand problème démographique qui se pose à une société c o m m e la nôtre n'est plus celui de l'espérance de vie de la population, mais bien le phénomène socio-biologique de sa longévité, l'un des plus complexes de notre époque. L'espé­rance de vie a en effet franchi le cap des soixante-dix ans ; il y a deux cents ans, elle n'était que de trente-cinq ans. C e changement considérable provient, surtout depuis le début du siècle, des progrès des conditions sociales et de l'hygiène, ainsi que des acquis de la médecine. E n revanche, la durée maximale de la vie humaine ne s'est pas modifiée au cours des siècles. L'histoire nous enseigne que, depuis des temps immémoriaux, certains individus ont atteint un âge avancé et m ê m e très avancé, alors que la majorité d'entre eux mouraient dès leur jeunesse. Mais les cas de longévité enregistrés au cours de l'évolution du m o n d e vivant ne sont pas significatifs de la

Anatoly Taltchouk, ¡candidat en médecine, est attaché à l'Institut pédagogique Gorki. Il est spécia­liste en gérontologie sociale et en génétique médicale. Il est l'auteur d'une soixantaine de publications.

Evgueny Konoplya, docteur en médecine, est m e m b r e correspondant et directeur de l'Institut de radiobiologie de l'Académie des sciences de la R S S de Biélorussie (jusqu'en 1987, il était à la tête du secteur de gérontologie de l'Académie). Il s'intéresse tout particulièrement à la biochimie, notamment à la biochimie médicale du métabolisme dans certains processus physiologiques et pathologiques. Il est l'auteur de quelque cent cinquante travaux, dont trois monographies.

Valentina Mossalygo, collaboratrice scientifique de l'Institut de radiobiologie de l'Académie des sciences de la R S S de Biélorussie (jusqu'en 1987, elle travaillait dans le secteur de gérontologie de l'Académie des sciences de la R S S de Biélorussie). Ses spécialités sont la biochimie du vieillissement et la gérontologie sociale. Elle a à son actif une trentaine de travaux scientifiques.

O n peut entrer en contact avec les auteurs à l'adresse suivante : c/o Délégation permanente de la R S S de Biélorussie auprès de l'Unesco, Maison de l'Unesco, 1, rue Miollis, 75015 Paris, France.

89 Impact : science et société, n° 153, 89-100

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Anatoly Taltchouk, Evgueny Konoplya et Valentina Mossalygo

sélection : s'ils l'étaient, celle-ci, au fil des millénaires, aurait accru la durée de la vie, ce qui n'a pas été le cas.

D e temps à autre, l'hypothèse resurgit que la diminution de la « vitalité » avec l'âge est le produit de transformations pathologiques entraînées par les maladies anciennes. A u début du siècle, Metchnikov supposait qu'on pourrait éviter de nombreux phénomènes indésirables liés à l'âge si l'on pouvait libérer l'organisme des microbes nocifs.

Bien que plus personne ne défende, sous cette forme extrême, l'idée que le vieillis­sement est imputable aux maladies, on ne saurait nier que des maladies, des lésions anciennes doivent jouer u n rôle dans l'augmentation de la probabilité de la mort avec l'âge. Reste à savoir jusqu'à quel point.

A l'heure actuelle, toutes les hypothèses concernant les causes du vieillissement et de la longévité peuvent se ranger dans deux grandes catégories. La première comprend les théories qui expliquent le vieillissement par les changements que subit le génome, par suite de l'accumulation d'atteintes irréparables dues à des processus fortuits (stochastiques). L a seconde regroupe les théories qui font du vieillissement l'accomplissement du p r o g r a m m e génétique de développement.

La théorie immunologique du vieillissement est séduisante. Elle se divise en deux parties, la première liée à l'affaiblissement des réactions immunitaires de l'organisme, la seconde correspondant au renforcement des processus d'auto-immunisation ou d'auto-agression. Il semble que les transformations immunologiques ne soient pas à la base d u vieillissement, encore que le système immunitaire en détermine le « rythme ». L'involution du thymus pourrait constituer la première étape du vieillissement.

La durée de la vie et le déclin progressif de l'activité vitale dont s'accompagne le vieillissement sont soumis à l'interaction de facteurs génétiques et de facteurs liés au milieu. D e plus, l'environnement, entendu au sens le plus large du terme, peut tout aussi bien contribuer à la réalisation de tout le potentiel-vie inscrit dans les gènes qu'abréger la vie. A p p a r e m m e n t , le facteur génétique qui correspond à l'inter­action des programmes de développement collectif et individuel et qui constitue la norme des réactions, voit son rôle s'accroître dans l'âge m û r et dans la vieillesse. Schématiquement, le scénario est le suivant : lorsque c'est la composante collective du développement qui domine dans la vieillesse, il y a longévité. C'est précisément à partir de là qu'on peut partiellement expliquer des phénomènes c o m m e le fait que certains prisonniers de la forteresse de Schlüsselburg ont survécu jusqu'à 90 et 92 ans à des conditions de vie terribles et inhumaines, et non par l'existence de « conditions voulues » à cette fin.

Par rapport au reste de l'Union soviétique, la R S S de Biélorussie fait un peu figure de phénomène sur le plan démographique. Les statistiques indiquent que, de toutes les républiques, c'est elle qui présente les taux de mortalité par âge les plus bas, l'espérance de vie m o y e n n e la plus élevée, l'écart le plus faible de la durée de vie entre les effectifs féminin et masculin de la population et une assez grande longévité, d'où l'intérêt qu'offre la dynamique de ces indicateurs, paramètre important pour apprécier la vitalité de la population biélorussienne. C'est là un phénomène dont on ignore les causes et qui surprend : on aurait pu s'attendre au contraire à ce que les ravages de la seconde guerre mondiale, en particulier, aient une influence négative extrêmement marquée sur tous ces indicateurs.

Pour tenter de faire la lumière sur ce problème, on peut étudier les questions de durée de vie et l'exceptionnelle longévité de la population de Biélorussie.

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La longévité de la population biélorussienne. Facteurs socio-sanitaires et hérédité

L a géographie de la longévité en R S S de Biélorussie

L'ontogenèse comporte une transformation des caractéristiques génétiques, tant au niveau des populations qu'à celui de chaque organisme. O n peut supposer que les ensembles de gènes qui assurent la longévité soit se transmettent tels quels de géné­ration en génération, soit se recombinent chaque fois. La première hypothèse est étayée par des données concernant la longévité observée dans certaines familles pendant plusieurs générations ou, par exemple, par celles qui indiquent un taux plus élevé d'affections cardio-vasculaires chez les parents d'individus à circulation sanguine défectueuse que chez les parents de longévités1. Cela donne à penser qu'il existe au sein de la population des groupes qui se distinguent par une constitution plus ou moins robuste, c'est-à-dire qu'il y a des différences biologiques entre le groupe des longévités et de leurs proches parents, d'une part, et les gens vivant dans le m ê m e milieu mais n'ayant pas de longévités dans leur lignée, d'autre part. E n ce cas, les longévités devraient, aux yeux de la science moderne, être dotés de génotypes présentant une quantité minimale de caractères récessifs défavorables et un système réparateur d ' A D N très solide et très actif. Étant donné que les membres d'un groupe ou d'une population déterminés pourraient bien descendre d 'un nombre limité de « fondateurs », on peut supposer que ces populations doivent comprendre des « foyers » où la longévité s'est fixée, dans le passé, c o m m e un phénomène naturel.

Depuis les siècles les plus reculés, la R S S de Biélorussie a toujours été peuplée de Biélorussiens, à cela près qu'à l'heure actuelle le pourcentage de Russes dans sa population totale est plus élevé qu'auparavant. Cela dit, sur l'effectif âgé d'au moins 100 ans au m o m e n t du recensement de la population en 1979, le pourcentage des Russes et des Ukrainiens réunis n'atteignait que 4,19 %, alors que celui des Biélorussiens s'élevait à 91 % (tableau 1), ce qui montre bien que c'est l'ethnie biélo­russienne qui, en l'occurrence, « produit » l'essentiel des longévités. Il s'ensuit que la vitalité d'une population ne se manifeste pleinement que dans un milieu naturel et dans des circonstances historiques favorables. C'est pourquoi il ne saurait exister de conditions environnementales optimales pour tous les génotypes, tant d'une population donnée que de diverses populations : ces conditions varient selon l'héré­dité, celles qui conviennent au génotype de telle population n'étant pas toujours parfaitement adaptées à celui de telle autre.

Tableau 1 Répartition des différentes nationalités composant la population de la RSS de Biélorussie (en pourcentages)

Nationalité

Biélorussiens Russes Polonais Ukrainiens Juifs Divers

a) Compte tenu

1897

72,2 4,96

2,3 —

13,7 0,9

1926a

80,6 7,7 2,0 0,6 8,2 0,9

1959

81,1 8,2 6,6 1,7 1,2 0,4

des frontières de la R S S de Biélorussie à cette époque. b) Y compris les Ukrainiens.

1979

79,4 11,9 4,2 2,4 1,4 0,7

Effectif âgé d'au moins

100 ans

91,0 4,1 4,8

0,09 0,01

91

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Anatoly Taltchouk, Evgueny Konoplya et Valentina Mossalygo

Incidence de longévité

Zone de grande longévité

Zone de longévité moyenne

Zone à longévité relativement réduite

Figure 1

Carte de la longévité de la population de la R S S de Biélorussie.

Pour fixer le seuil inférieur de longévité de la population (80 ans), nous avons retenu l'âge normal (modal) au décès, c'est-à-dire le plus « typique » (le plus fréquent), lequel se situe dans de nombreux pays économiquement développés entre 76 et 80 ans2.

Le tracé des zones de longévité sur le territoire de la R S S de Biélorussie a été établi suivant le découpage administratif territorial à partir des tables de mortalité et des chiffres de durée moyenne de la vie des six régions administratives territoriales.

L'évaluation intégrée des indices de longévité des tables de survie a permis, en tenant compte de la situation géographique et du développement historique, de regrouper les régions administratives territoriales en trois zones de longévité : la première (à longévité élevée) comprend les régions de G o m e l et de Moghilev; la deuxième (à longévité moyenne), celles de Brest et de Grodno ; la troisième (à longévité relativement faible), celles de Vitebsk et de Minsk. (Figure 1.)

Pour mieux focaliser l'analyse, l'étape suivante a consisté à dresser une carte-schéma plus détaillée des m ê m e s zones de longévité, en vue de distinguer parmi les soviets ruraux ceux qui se trouvent aux deux extrêmes : ils foi ment un polygone de fréquences délimitant un terrain privilégié de recherches socio-sanitaires, génétiques, médicales et autres, peut-être, étant donné que la longévité est un problème pluri­dimensionnel.

Les facteurs socio-sanitaires de la longévité

Conformément aux décisions d'un colloque consacré à l'élaboration d'une n o m e n ­clature du vieillissement et de la vieillesse (Leningrad, 1962) et d 'un séminaire sur la protection de la santé des personnes âgées et des vieillards et la prévention du vieillissement prématuré, organisé par le Bureau régional de l'Europe et l ' O M S (Kiev, 1963), les groupes d'âge retenus sont les suivants : personnes d'âge moyen : de 45 à 59 ans; personnes âgées : de 60 à 74 ans; vieillards : 75 ans et plus. Dans le dernier groupe se distinguent les longévités, âgés d 'au moins 90 ans.

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La longévité de la population biélorussienne. Facteurs socio-sanitaires et hérédité

Le potentiel-vie d'un individu peut, on le sait, se mesurer d'après le nombre des années qu'il a vécues; pour une population, on se fonde sur l'espérance de vie moyenne. E n l'occurrence, nous avons examiné l'influence qu'exercent sur elle les principales causes de mortalité de la population biélorussienne — lésions des systèmes cardio-vasculaire et respiratoire, tumeurs malignes, accidents, empoisonnements et traumas. Abstraction faite de la mortalité due à ces maladies, l'espérance de vie se trouve majorée, à la naissance, de 13,3 et 9,7 ans respectivement pour les effectifs masculin et féminin. Dans la population âgée de 60 ans, l'espérance de vie augmen­terait ainsi de 9,1 ans chez les h o m m e s et de 7,4 ans chez les femmes; dans celle âgée de 80 ans, de 2,8 et 2,3 respectivement. Il est évident, d'après ces résultats, qu'une optimisation de l'état de santé ne permet pas plus automatiquement d'atteindre la longévité maximale de l'espèce que d'assurer la longévité de 1' « individu moyen » et confirme la supposition que les longévités constituent un groupe issu sélectivement d'un certain environnement2. Suivant les théories modernes, le seuil inférieur d'espé­rance moyenne de vie de l'espèce humaine est de l'ordre de 40 à 45 ans, et, selon les dernières données, sa limite maximale est de 99 (± 6 ans) ans chez les h o m m e s et de 98 (± 5 ans) ans chez les femmes3 . Il s'ensuit que les longévités sont, en fait, des individus qui atteignent ou presque les durées de vie extrêmes de l'espèce.

La question de l'espérance de vie maximale, de l'âge chronologique maximal de l 'homme, qui a de tout temps intéressé les savants, est particulièrement importante pour la science contemporaine, car c'est d'elle que dépend la solution de nombreux problèmes théoriques et pratiques.

Les ouvrages soviétiques mentionnent maints « records » de longévité se situant dans une fourchette de 143 à 168 ans, tous dans la R S S d'Azerbaïdjan, dont on suppose à présent qu'ils ont été « gonflés » de quinze à vingt ans, et les auteurs étrangers font aussi état de certains cas de grande longévité, de l'ordre de 120 à 140 ans et m ê m e davantage, mais à l'heure actuelle, la majorité des scientifiques considèrent que le m a x i m u m certain est de 100-113 ans.

E n comparant certaines données individuelles des recensements de 1959 et 1979 de la population de la R S S de Biélorussie, nous avons découvert un nombre relative­ment important de divergences entre les âges attribués aux personnes centenaires et plus âgées, divergences parfois supérieures à dix ans.

En vérifiant l'âge des membres de la cohorte étudiée, nous avons constaté qu'il avait été majoré dans 11,3 % des cas — 7,7 % chez les h o m m e s et 12,5 % chez les femmes — et singulièrement, en comparant les données par groupes d'âge, que les erreurs (dans le sens de l'exagération) augmentaient avec l'âge : ainsi, dans le groupe des personnes âgées d'au moins 100 ans, l'âge était majoré dans 40 % des cas chez les h o m m e s , dans 68,2 % chez les femmes.

Il est extrêmement intéressant de préciser l'âge effectif des « patriarches » de la population biélorussienne. A titre d'exemples, une longévité qui s'était déclarée âgée de 115 ans avait en fait 91 ou 92 ans (vingt-trois ou vingt-quatre ans de moins), un h o m m e soi-disant âgé de 114 ans avait en fait entre 112 et 114 ans, une f e m m e annonçant 113 ans en avait entre 100 et 104 (neuf à treize ans de moins), une autre, qui affichait 110 ans, avait dans les 90 ans.

Notons en passant qu'il est souvent difficile de fixer avec exactitude l'âge des membres très âgés de la population biélorussienne. Les documents d'archives attestant leur année de naissance ont été détruits dans la tourmente des deux guerres mondiales, surtout de la deuxième, qui a coûté la vie au quart de son effectif. Et les longévités eux-mêmes, dans l'ensemble plus ou moins illettrés, ont dans certains cas

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Anatoly Taltchouk, Evgueny Konoplya et Valentina Mossalygo

quelque peu perdu la mémoire de tous les événements, dont ceux de leur vie personnelle. Les dates de naissance inscrites sur le passeport et, dans une moindre mesure, sur le registre du soviet rural ne correspondent pas toujours exactement à la réalité.

Dans la majorité des cas où il n'y a pas d'actes d'état civil, on considère que les données d u passeport n'ont qu'une valeur relative4. O n estime que, par suite de l'affaiblissement de la mémoire, de l'absence de documents confirmant la date de naissance, parfois aussi de la « coquetterie » des vieillards, les recensements livrent toujours des données gonflées sur l'effectif des personnes âgées de 90 ans, et surtout sur celui des centenaires2- *. Ainsi, le « record de longévité » sur le territoire de la R S S de Biélorussie serait de l'ordre de 120 à 124 ans, mais, l'âge des intéressés n'ayant pas été vérifié, la prudence s'impose; par ailleurs, l'impression qui se dégage est que le m a x i m u m ne dépasse pas 115 ans.

Le fait de ne jamais changer de lieu de résidence crée des conditions favorables à l'adaptation à l'environnement, entendu au sens le plus large du terme, ce qui est capital pour la longévité. C'est tout particulièrement vrai de la vie à la campagne, où les conditions et le m o d e de vie, c o m m e les habitudes acquises au fil des ans dans le cadre de l'activité professionnelle — rythme de travail et climat psychologique, comportement et régime alimentaire reposant en règle générale sur des produits d'origine locale —, se modifient lentement et se conservent dans la vieillesse. Ainsi, il était intéressant d'analyser les processus migratoires dans la cohorte considérée. L a population étudiée, âgée d'au moins 80 ans, comprend 89,3 % de campagnards et seulement 10,7 % de citadins. Fait remarquable, 92,2 % des longévités (90 ans et plus) sont originaires de localités rurales, contre 86,3 % du groupe d'âge 80 à 89 ans. Sur l'effectif total, 55,9 % des personnes ont toujours vécu au m ê m e endroit depuis leur naissance, dont 88 % dans le village où elles sont nées, ou un autre très proche, et 12 % en ville, mais l'exode rural est assez largement représenté. Par ailleurs, dans leur écrasante majorité, celles qui n'ont pas vécu en ville plus de cinq ans formulent des plaintes qui témoignent d'une mauvaise insertion sociale.

Près du tiers de ces vieillards, interrogés sur leur enfance et leur adolescence, ont qualifié leur situation matérielle à cette époque-là de « mauvaise » et 23,6 % de « bonne ». Le qualificatif « mauvaise » revenait plus souvent chez les longévités que dans le groupe de 80-89 ans et plus souvent que celui de « bonne » — à raison de 19 % contre 6,9 % dans le groupe d'âge des 80-89 ans.

Il y a là un paradoxe, car les longévités devraient, semble-t-il, se recruter plutôt parmi les gens ayant bénéficié de « bonnes » conditions de vie matérielles que parmi ceux qui se trouvent dans la situation inverse. Seule explication possible : la mortalité différentielle : parmi les pauvres, les processus sélectifs sont beaucoup plus accentués, et ce sont les êtres particulièrement solides et sains qui atteignent des âges plus avancés.

La forme la plus importante d'interaction de l ' h o m m e et de l'environnement est l'activité professionnelle. C'est le travail qui assure le fonctionnement des systèmes physiologiques sur la longue durée et accroît leurs capacités d'adaptation. E n majorité (70,1 %), ces personnes d'âge avancé avaient c o m m e n c é à exercer une activité professionnelle régulière dès leur adolescence; 8,1 % seulement d'entre elles à l'âge de 19 ans ou plus tard.

Pour toutes les personnes interrogées, ou pratiquement, cette activité avait consisté leur vie durant en un travail physique, en général agricole, et pour une faible proportion d'entre elles en travaux ménagers : préparation des repas, soins aux

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La longévité de la population biélorussienne. Facteurs socio-sanitaires et hérédité

enfants et leur éducation, entretien du lopin individuel, soins aux animaux, ménage, lessive, repassage, petits travaux de couture, et ainsi de suite. L a production agricole privée destinée à nourrir la famille occupait une place particulièrement importante.

A leur époque, les horaires du travail agricole dépendaient au plus haut point des conditions climatiques et de l'éclairement, et ils étaient réglés par les soins à prodiguer au bétail et à la volaille. L a durée de la journée de travail dépassait onze heures pour 51 ,4% des personnes interrogées; elle atteignait m ê m e plus de quinze heures pour 23,3 % d'entre elles, mais ce dernier chiffre doit être considéré avec prudence, car, dans l'ensemble, le m o m e n t et le rythme des travaux dépendaient du travailleur lui-même. Dans la population étudiée, il n'y avait pas d'inactifs, parti­cularité déjà remarquée par le médecin allemand Hufeland, qui écrivait en 1853 : « A u c u n paresseux n'a jamais atteint un âge très avancé : tous ceux qui y sont parvenus avaient un m o d e de vie très actif. »

O n peut penser que de longues journées de travail pénible ne pouvaient avoir d'effet salutaire sur la santé des intéressés que s'ils retiraient une satisfaction de ce travail. Rétrospectivement, les membres de la cohorte examinée s'en sont déclarés totalement satisfaits dans 97,2 % des cas (soit 98,8 % chez les h o m m e s et 96,9 % chez les femmes) et partiellement seulement ou globalement mécontents dans les 2,8 % restants, où, d'ailleurs, la journée de travail n'avait généralement pas dépassé six heures. Il ressort des données recueillies dans divers pays que la satisfaction tirée du travail contribue à la longévité et qu'en règle générale les gens satisfaits de leur travail vivent plus longtemps et jouissent d'une meilleure santé6' 6. Pour bon nombre de chercheurs, de tous les facteurs, c'est cette satisfaction qu'il faut consi­dérer c o m m e la condition capitale de la longévité.

A u m o m e n t de l'arrêt de l'activité professionnelle, il importe beaucoup, pour les personnes d'âge m û r ainsi exposées à la « maladie de la retraite », d'avoir une occupation : la désadaptation apparaît surtout chez les individus qui ne se sont pas préparés à leur nouveau rôle. Dans notre cohorte, 86,5 % des gens avaient mis fin à leur activité professionnelle de manière progressive, c'est-à-dire après avoir été admis à la retraite, en conservant une activité physique tant qu'ils s'étaient sentis capables de travailler : le travail quotidien était pour eux, depuis l'enfance, une nécessité vitale.

D'après les travaux de nombreux gérontologues, une vie familiale longue et heureuse est aussi un facteur de longévité. A u m o m e n t de l'enquête, 43,8 % des h o m m e s vivaient encore avec leur épouse; 4,5 % seulement des femmes avec leur époux. A u nombre des causes de dissolution de la famille, les femmes ont cité la mort violente de l'époux pendant la seconde guerre mondiale et, plus rarement, la mort par suite de maladie en temps de paix. A l'heure actuelle, dans les pays économiquement développés, on assiste à un phénomène de vieillissement de la population qui s'accompagne, en raison de la différence d'espérance de vie entre eux (les femmes vivant plus longtemps que les h o m m e s ) , d'une disproportion entre les sexes. Elle se traduit par la solitude dans la vieillesse et son retentissement sur les conditions de vie, le niveau de l'état psychologique, l'accès aux prestations médicales et sociales. Conscients de tous les désagréments que la solitude entraîne, les descendants proches (fils et filles surtout) hébergent leurs parents très âgés en leur offrant à peu près les m ê m e s conditions que celles dans lesquelles ils vivent eux-mêmes : en milieu rural, maisons en bois sans confort — pas d'eau courante, chaude ou froide, toilettes dans la cour, une seule cuisine pour tous les membres de la famille; immeubles ordinaires dans les villes, où il convient de signaler que les

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personnes très âgées peuvent certes bénéficier de services collectifs, mais pâtissent aussi de certains inconvénients : si elles habitent au deuxième, troisième ou quatrième étage d'un immeuble sans ascenseur, par exemple, elles auront des pro­blèmes; si leur santé est affaiblie, elles se trouveront confinées dans l'appartement et devront se contenter de bains de soleil sur le balcon.

Les conditions générales et l'hygiène personnelle jouent, on le sait, un rôle impor­tant dans la prévention des maladies et l'entretien de la santé. D e ce double point de vue, les personnes d'âge très avancé se classent, à près de 70 %, dans la catégorie « bien » : le goût de la propreté leur a été inculqué par leurs parents dès l'enfance, et il faut dire en outre qu'en Biélorussie les cérémonies et fêtes populaires se déroulent dans des conditions d'hygiène exemplaires.

Autre facteur extérieur, l'alimentation influe beaucoup sur la santé, notamment sur le vieillissement. A la suite de nombreuses recherches, on sait aujourd'hui qu'elle agit sur le métabolisme et sur les particularités de la pathologie de l'âge. C'est par son intermédiaire que l'environnement fait constamment sentir ses effets sur le génotype.

Pour évaluer le régime alimentaire des personnes d'âge très avancé, nous l'avons classé en trois catégories : varié, principalement carné et végétarien lacté. D a n s notre cohorte, la première et la troisième catégorie prédominaient, l'alimentation carnée ne l'emportant que dans 7,9 % des cas chez les h o m m e s et 3,3 % chez les femmes . E n milieu rural, ces habitudes alimentaires ne s'étaient modifiées que fort lentement au cours de la vie des intéressés, qui préfèrent toujours la m ê m e nourriture, préparée suivant des méthodes traditionnelles et produite localement, qui est riche en protéines, en acides aminés irremplaçables et remplaçables, en graisses animales et végétales, en acides gras saturés et non saturés, en hydrates de carbone, en vitamines et en éléments minéraux, d'où leur degré très élevé d'adaptation physiologique à ce régime. L a ration de vitamine C est surtout assurée, pendant l'automne, l'hiver et le printemps, par la consommation de p o m m e s de terre, base de toute l'alimen­tation, de lait (frais ou caillé) et de choux fermenté; en été et en automne, cette ration alimentaire quotidienne est complétée par des légumes cultivés sur le lopin individuel, des fruits (surtout des p o m m e s et des baies), des champignons. Les repas, trois par jour en général, sont pris à heures régulières. L e plus souvent, les longévités s'efforcent de consommer peu de sucre, naguère denrée rare, qu'ils remplacent fréquemment par du miel.

Dans leur jeunesse, le m e n u quotidien variait selon les saisons de l'année et les interdits religieux. A u printemps et en été, ils se nourrissaient surtout de produits végétaux, laitiers et farineux, œufs, légumes frais, plantes et fruits et, en petites quantités, de lard en général cru, ainsi que de volaille. Pendant l'automne et l'hiver, c'étaient le lard, la viande, les produits laitiers (aux premiers rangs desquels le fromage blanc et le lait caillé) qui dominaient. Dans l'ensemble, ces vieillards consomment une nourriture peu salée. E n « enfants de leur siècle », ils ont régu­lièrement observé le carême jusque vers l'âge de 65-80 ans, et certains continuent encore; il est vrai que leur carême, de courte durée, n'exclut totalement que la nourriture carnée, ce qui fait qu'il est assimilable à des jours de diète, excellents pour leur état général. E n revanche, ils ne pratiquent pas le jeûne, ne serait-ce que pendant u n ou deux jours. Leur ration calorique ne dépasse pas, en règle générale, leur dépense d'énergie. Avec l'âge, ils la réduisent d'eux-mêmes, si bien que chez certains, qui n'avaient aucun mal à se procurer de la nourriture, elle était m ê m e inférieure à la norme, mais ce « déficit » calorique n'est apparemment qu'une

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La longévité de la population biélorussienne. Facteurs socio-sanitaires et hérédité

particularité rationnelle, ce dont témoigne leur état de santé. Enfin, ce sont des gens qui n'ont jamais souffert d'obésité : ils sont en général de corpulence moyenne.

Dans notre cohorte, il y avait 21 ,9% de consommateurs réguliers de boissons alcoolisées (vodka, vin), contre 57,2 % qui n'en consommaient qu'en quantités extrêmement limitées à l'occasion de noces et autres fêtes, mais aucun cas d'alcoolisme; personne parmi eux ne s'enivrait jamais, et la dose d'alcool absorbée ne faisait qu'améliorer leur humeur et faciliter leurs contacts avec leur entourage.

Ainsi, le trait caractéristique de l'alimentation des Biélorussiens à forte longévité semble bien être une frugalité qui, tout au long de leur vie, les a gardés de la goinfrerie et des excès de nourriture et de boisson, qu'ils condamnaient. Aujourd'hui encore, ils tâchent de conserver les habitudes alimentaires acquises dans leur jeune âge en les adaptant à l'état physiologique de leur organisme et ainsi réduisent eux-mêmes leur ration calorique, qui est inférieure aux normes recommandées par les diététiciens. L a baisse d'énergie qui en résulte se trouve être un processus d'adaptation nécessaire dans la vieillesse. E n m ê m e temps, la dominante végétarienne-lactée de l'alimentation est à notre avis un facteur de santé et de longévité. U n e alimentation à forte pro­portion de produits à base de lait caillé et de cellulose est excellente contre les tumeurs et a un effet favorable sur l'activité du système cardio-vasculaire et sur le métabolisme : ce régime alcalin a pour particularité d'exercer un effet anti-acide et des chercheurs ont montré récemment qu'il y a là un lien direct avec la longévité7.

Les facteurs génétiques de la longévité

Les premières indications d'un rôle de l'hérédité dans la longévité remontent à 1918, lorsque Bell, analysant la durée de vie de 3 000 membres de la tribu des Haldas, démontra que le nombre des descendants ayant atteint l'âge de 80 ans était de deux à quatre fois supérieur à la moyenne observée chez les parents.

Les sujets de la cohorte étudiée ont fait état de parents proches ou éloignés ayant dépassé 80 ans. Il ressort des résultats recueillis que le taux de longévité familiale va chez les h o m m e s de 73,9 % dans la zone de longévité moyenne à 87,5 % dans la zone de longévité très élevée, mais que, chez les femmes, il se situe dans une fourchette de 56,8 % dans la zone de longévité relativement basse, à 75 % dans la zone de longévité élevée. Conclusion : pour atteindre un âge très avancé, les femmes ont besoin d'une « défense héréditaire » moindre2. Chez les h o m m e s , à la différence des femmes, on observe très nettement un accroissement du rôle de la longévité familiale avec l'âge : chez les longévités âgés de 90 ans et plus, la prédisposition héréditaire a une valeur plus élevée que dans le groupe des 80-89 ans, tant dans l'ensemble de la république que dans les différentes zones de longévité. Ces données et celles2 qui confirment qu'elle est de 50 à 60 % chez les personnes atteignant la vieillesse, de 60 à 70 % chez celles qui parviennent à u n âge très avancé, attestent qu'avec l'âge l'influence des facteurs sociaux diminue quelque peu, cependant que celle des facteurs génétiques augmente.

Chez certains longévités de notre cohorte, l'indice individuel global de longévité familiale était très élevé : dans le cas de l'un d'entre eux, par exemple, la longévité s'était manifestée tant du côté de la mère que de celui du père et, dans sa famille, pendant trois générations, on avait en règle générale vécu au moins jusqu'à l'âge de 90 ans.

Si le génotype des sujets à grande longévité est bien le mieux équilibré et le plus

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dépourvu de caractères récessifs défavorables, il faut se demander quel est le taux de mortinatalité parmi eux et s'il se rencontre dans leur descendance des malforma­tions congénitales ou héréditaires telles que gueule-de-loup, bec-de-lièvre, malfor­mations des membres , luxation congénitale de la hanche, surdi-mutité de naissance, ou encore épilepsie ou schizophrénie. Les membres de notre cohorte ont totalement nié l'existence de tels caractères pathologiques chez leurs propres enfants.

Le taux de mortinatalité chez les personnes d'âge très avancé ayant une prédis­position héréditaire à la longévité était certainement plus bas chez celles qui n'avaient pas de « défense héréditaire ». C'est là une loi qui s'observe aussi très nettement chez les longévités. Il est intéressant de constater chez les centenaires que le taux de mortinatalité a tendance à être plus faible que dans le groupe des 90-99 ans et qu'il présente des différences significatives selon que les sujets ont une prédispo­sition héréditaire à la longévité ou n'ont pas de liens de parenté avec des longévités (P < 0,05).

A partir de l'exemple de la population biélorussienne d'âge avancé, nous nous s o m m e s efforcés de mettre en évidence l'influence de l'hétérosis dans le renforcement de la vitalité, en faisant une distinction géographique entre mariages endogamiques et exogamiques. Notre hypothèse est que, jusqu'au début du xx e siècle, il n'y avait en Biélorussie de relations étroites qu'entre habitants de villages peu distants les uns des autres et qu'elles étaient concentrées autour des centres administratifs et des lieux de culte. Par conséquent, en règle générale, le fiancé trouvait sa fiancée dans un rayon de 10 à 20 kilomètres, ce qui correspond à la définition du mariage endoga-mique sur le plan géographique, par opposition à l'exogamique, qui implique une distance d'au moins 50 kilomètres.

Les membres de la cohorte étudiée étaient issus de mariages endogamiques à 86,6 % pour les h o m m e s et 85 % pour les femmes, contre 14 % seulement de mariages exogamiques. L a fréquence des mariages conclus au sein de l'isolât géogra­phique du village retient également l'attention. C'est pourquoi il était intéressant d'analyser aussi la structure du mariage selon la prédisposition héréditaire à la longévité. Les données recueillies indiquent que l'endogamie est à peu près aussi fréquente, en l'occurrence, chez les personnes héréditairement prédisposées à la longévité que chez les autres : 19,6 % des mariages conclus avec un conjoint du m ê m e village chez les h o m m e s et 27,3 % chez les femmes, contre 17,1 % et 18,9 %, respectivement, pour les autres (P < 0,05). O n peut estimer que les ensembles de gènes déterminant la longévité étaient précisément propres au territoire considéré, c'est-à-dire que la longévité était concentrée dans des isolais géographiques. D'après l'indicateur intégré de l'état de santé général établi à l'aide d'un système expert, il y a plus d ' h o m m e s en bonne santé que de femmes. D'autre part, lorsqu'on analyse les groupes d'âge 80-89 et 90 ans et au-delà, il apparaît que l'état de santé considéré c o m m e « bon » pour des âges aussi avancés est plus fréquent (P < 0,05) chez les sujets — h o m m e s ou femmes — héréditairement prédisposés à la longévité et qu'il y a davantage de personnes en mauvaise santé parmi les longévités sans « défense héréditaire ». Il semble bien que les sujets qui présentent cette prédisposition héréditaire à la longévité et sont en bonne santé puissent être considérés c o m m e d'authentiques cas de vieillissement physiologique et qualifiés de « jeunes vieillards », étant donné que leur organisme a moins épuisé son potentiel-vie que celui de leurs contemporains souffrant de maladies.

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La longévité de la population biélorussienne. Facteurs socio-sanitaires et hérédité

Conclusion

La longévité de la population de la R S S de Biélorussie est inégalement répartie sur son territoire et varie dans d'assez fortes proportions, ce qui a permis de délimiter trois zones de longévité et d'y distinguer ensuite des foyers de longévité.

Il est peu probable que cette population dépasse en masse les 90 ans, a fortiori les 100 ans, dans un avenir prévisible. L'allongement très marqué de la durée de la vie intervenu depuis l'instauration du pouvoir soviétique s'analyse c o m m e la substitution d'une longévité d'ordre social à la longévité biologique : la nature biologique de l ' h o m m e n'a pas changé, mais des conditions permettant à un plus grand nombre de réaliser leur potentiel-vie ont été réunies. Il faut commencer par vérifier très soigneusement l'âge des personnes de plus de 100 ans, et l'impression qui se dégage est que la durée maximale de vie de la population biélorussienne ne dépasse pas 115 ans.

E n Biélorussie, dans l'ensemble des facteurs de longévité, l'hérédité intervient à 76,6 %, le reste (moyennant quelques ajustements pour tenir compte du rôle de l'hétérosis) relevant d u milieu extérieur, dans lequel les conditions sociales jouent un rôle déterminant.

Dans la majorité des cas, les longévités sont d'anciens agriculteurs. Ils ne se distinguent pas par une aptitude particulière à la vie; leur comportement n'a pas obéi à des règles complexes et consciemment mises au point. Ils ont mené une vie à tous égards ordinaire. Beaucoup, en outre, ont exercé une activité très pénible et subi de graves privations et de lourdes épreuves. Toutefois, il ne faut pas oublier qu'ils se caractérisent aussi par toute une série d'autres traits : 1. Ils représentent une cohorte à part dans la population. 2. C e sont les individus les plus solides, les plus sains et ayant joui d'une bonne santé pendant toute leur vie qui ont atteint les âges les plus avancés. 3. Le m o d e de vie des longévités peut, du point de vue des connais­sances modernes, être considéré c o m m e « sain », et dans les quelques cas où l'on a constaté de mauvaises habitudes, elles coexistent avec une longévité familiale mani­feste. 4 . Leur alimentation se caractérise par une frugalité et une tempérance cons­tantes tout au long de leur vie passée; l'apport calorique est réduit, mais le régime est dans une large mesure qualitativement complet, surtout chez ceux qui, en règle générale, vivent avec leur famille; une alimentation qui a toujours été rationnelle permet apparemment de limiter sur la longue durée la surcharge du mécanisme de la régulation génétique que les excès alimentaires peuvent occasionner et est bonne pour la santé et la longévité. 5. D e longues journées de travail intensif, mais effectué par chacun à son rythme et procurant une satisfaction totale, contribuent à la longévité de l'être humain. •

Notes

1. I. B . Mankovskyj, Vestnik AMN SSSR (Le messager de l'Académie des sciences médi­cales de l 'URSS), n° 3, 1980, p. 27-32.

2. N . N . Sacuk, Islovija îizni ipoziloj celovek (Les conditions de vie et les personnes âgées), p. 196-260, Moscou, 1978.

3. A . A . Gavrilov et N . S. Gavrilova, Doklady AN SSSR (Rapports de l'Académie des sciences de l 'URSS), vol. 2, 1979, p. 465-469.

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Anatoly Taltchouk, Evgueny Konoplya et Valentina Mossalygo

4. Y u . A . Spasokukotskij, L . I. Borgenko et E . D . Genis, Dolgoletie ifiziologiíeskaja starost' (La longévité et la vieillesse physiologique), Kiev, 1963, 207 p.

5. S. Bennet, How to live to be 100. The life-style of the people of the Caucasus, n° 4, N e w York, 1976, 201 p.

6. V . I. Kozlov et O . D . Komarova, Fenomenon dolgozitelstva (La longévité), p. 30-40, Moscou, 1982.

7. H . R . Massie, T . R . Williams et J. R . Colacicco, Mech. ageing and develop., vol. 16, n° 3, 1981.

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L a place des anciens dans la société africaine

Amadou Moustapha Diop

Contrairement aux idées reçues, les anciens ne sont ni traités ni perçus de la même manière dans toute l'Afrique noire. Source et détenteurs de pouvoir et de savoir, ils sont respectés et vénérés dans certaines sociétés; ailleurs, leur légitimité est contestée. Dans les sociétés régies par le principe de la séniorité, la place des anciens est de plus en plus remise en question, depuis Vintroduction par les États-nations de nouvelles structures technologiques, administratives et économiques.

Images d'Afrique noire. D e vieilles personnes mâchonnent, qui de la chique, qui de la noix de cola, tout en dévidant un écheveau d'histoires anciennes, à l'ombre de l'arbre à palabre.

Images de la société africaine. U n e société traditionnelle, figée dans l'airain du temps; une société dirigée, gouvernée par des gérontocrates, sourcilleux de main­tenir, de perpétuer les coutumes ancestrales, source m ê m e de leur pouvoir.

Images d'Afrique. U n agrégat de sociétés vivant dans l'effroi et le respect de ces vieillards, certes des « bibliothèques vivantes », mais aussi et surtout des personnages plus proches du m o n d e des morts que de celui des vivants et, partant, doués de pouvoirs mystérieux et maléfiques.

Images d'Afrique. U n continent sous-peuplé, mais connaissant en m ê m e temps un accroissement démographique foudroyant; u n continent déjeunes plus que de vieux.

Images d'Afrique. U n e population rurale dans sa quasi-totalité, mais aussi une explosion urbaine sans précédent depuis une trentaine d'années.

Images d'Afrique. Solidarité; pauvreté; tradition; modernité... Dans cette Afrique multiple et une à la fois, c o m m e n t se perçoit, selon les sociétés,

la figure de l'ancien? Existe-t-il un ordre des anciens, contraignant, voire totali­taire? Selon les schemes de développement, l'âge est-il facteur d'inclusion ou d'exclusion? Voilà quelques questions auxquelles cet article, à titre exploratoire, voudrait apporter des débuts de réponse.

A m a d o u Moustapha Diop enseigne à l'Institut national des langues et civilisations orientales. Spécialiste des migrations internationales, il est coordonnateur, au Centre d'études et de recherches internationales (Fondation nationale des sciences politiques), des enquêtes sur les attitudes poli­tiques des musulmans en France. Il est également consultant à l'Unesco. O n peut entrer en contact avec l'auteur à l'adresse suivante : 48, rue Gabrielle-Josserand, 93500 Pantin, France.

101 Impact : science et société, n» 153, 101-107

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Amadou Moustapha Diop

Perception des anciens dans certaines sociétés africaines

Selon R . Lowie, « le facteur âge est véritablement déterminant dans toute vie sociale ». Cette affirmation, certes valable sous tous les cieux, semble garder une forte prégnance en Afrique noire. L'âge détermine le rang, le statut social dans cette Afrique géographiquement et culturellement clivée; dans les sociétés souda­naises, celles du littoral, et dans les sociétés forestières, le principe de la séniorité règne, tandis que, dans d'autres sociétés — de l'Est africain —, c'est le principe de la gérontocratie qui régit les structures traditionnelles. Sous l'appellation se révèle le respect; dans plusieurs langues africaines, l'ancien, c'est le « grand », le « plus âgé », il est mak chez les Wolof du Sénégal, naek chez les Manjak de la Guinée-Bissau, moko koro chez les Bambara du Mali, jarsa chez les Masai du Kenya et de la Tanzanie, yaba chez les Galle d'Ethiopie... Chez d'autres populations — les Haoussa —, l'ancien porte le titre de l'Héritier (magaji), il est le gardien de l'héritage collectif; chez les Oromo-Galle, l'ancien, entre 72 et 80 ans, devient objet de sainteté et de vénération; chez les Bambara, 77 ans, c'est l'âge où 1' « on entre vivant dans le panthéon des ancêtres bambara sous le n o m d ' â m e ardente B 1 .

Depuis l'interpénétration de la tradition et de la modernité, l'ancien est affublé du titre de « vieux » — titre qui, d u reste, ne comporte aucune connotation péjorative, c o m m e c'est le cas dans les sociétés industrielles (l'actuel président ivoirien est affectueusement appelé « le Vieux »).

E n gros, on peut dire que, dans la quasi-majorité des sociétés africaines, l'âge avancé représente plus un signe de bénédiction divine qu'un m o m e n t de déchéance physique et morale. C e qui, s o m m e toute, s'explique pour des populations de tradi­tion orale, longtemps décimées dans la force de l'âge par des fléaux (maladies, famine...). L ' h o m m e ayant résisté à toutes ces péripéties est « aimé des dieux » et doté de pouvoirs lui permettant de dialoguer avec l'empyrée et le m o n d e des vivants.

L'ordre des anciens dans certaines sociétés africaines

Pôle central et ultime du lignage, l'ancien évolue dans des sphères économiques, religieuses, éducatives dont il détient la maîtrise totale. Son âge, selon la hiérarchie de la primogeniture, lui confère un statut et une maturité au sein de la famille étendue ou lignage. A la tête d'un groupe de maisons, il habite, en général, la conces­sion du premier ancêtre, fondateur de la lignée — concession où se trouvent le culte familial et les figurines matérialisant les ancêtres disparus (ba-lugum chez les Manjak).

L'ancien, gestionnaire des biens de la lignée

Responsable du patrimoine de la communauté familiale, il gère le quotidien matériel; chez les Manjak, il s'occupe de la culture du grand c h a m p , aidé par les aînés du lignage paternel; les recettes tirées des récoltes vont servir à acquérir du bétail destiné aux ancêtres, à faire tisser des pagnes pour les enterrements, à offrir aide et assistance aux impécunieux, tels le migrant de retour au bercail, les nouveaux mariés, les familles nombreuses.

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La place des anciens dans la société africaine

Maître du troupeau chez les D o g o n du Mali, il gère pour lui-même et pour ses cadets le troupeau hérité du lignage, ainsi que son propre troupeau : « Il surveille l'état du troupeau et organise la vaccination des bêtes ; avec les ayants droit du lignage, il planifie les mouvements du troupeau familial sur les champs de la famille, et il décide des lieux de pâturage et de la vente des bêtes2. » Chez les Soninké, l'aîné du clan est le maître de la terre; à lui d'exercer les droits y afférents : location, retrait des champs; perception de redevances, distribuées selon son bon vouloir aux autres chefs de famille, rétention de cet avoir pour son usage personnel8.

Continuateur et gardien de l'honneur de la lignée, le « vieux » veille à la circulation des femmes dans et hors de la famille étendue; à lui aussi de veiller à la fécondité du lignage; et c'est autour de lui et des conseillers choisis que se nouent des stratégies d'alliance ou que certaines unions sont évitées.

Dans certaines sociétés, c o m m e les Sénufo de Côte d'Ivoire, c'est le doyen de la famille maternelle — en l'occurrence, l'oncle maternel — qui détient une autorité sans faille sur ses nièces en matière matrimoniale.

L'ancien, officiant du culte des ancêtres

L'ancien représente les ancêtres « morts, mais qui ne sont pas morts » et dont le souffle protège tous les membres du lignage; il remplit le rôle d'intercesseur, de personnage médian entre le monde des vivants et l'empyrée. A diverses occasions, il coiffe le bonnet de prêtre ; au retour du migrant, c'est au naek, le plus âgé (chez les Manjak, par exemple), de le conduire devant l'autel des ancêtres pour exécuter la cérémonie de contact. Le jour où les ancêtres viennent rendre visite à leurs parents, il réunit tous les membres du lignage devant les figurines symbolisant les défunts et partage avec eux les repas sacrificiels, apportés par chaque chef de famille; officiant du génie protecteur et bienfaisant du lignage, il lui consacre un logement adéquat et des cérémonies sacrificielles périodiques; dans le m o n d e invisible des Manjak évoluent les esprits désincarnés des ancêtres ; esprits voyageurs — le temps de péné­trer dans les limbes de la connaissance et d'acquérir des pouvoirs —, ils demandent alors à leur progéniture de « sortir », signifiant leur désir de prendre rang et place au panthéon des ancêtres; une fois les signes reconnus par une série de manifestations (malchance, accident, maladie...), c'est à l'aîné des enfants de s'activer pour les préparations matérielles de la cérémonie, ensuite, après consultation et avis du conseil des anciens, le chef du lignage décide du jour de la plantation du bois — symbolisant le retour d 'un ancien parmi les siens.

L'ancien c o m m e éducateur du lignage

Mémoire et garant de l'histoire du lignage, l'ancien, au cours de cérémonies propi­tiatoires (planter une figurine représentant un ancien) saisit l'occasion pour décliner le n o m de chaque disparu, rafraîchissant ainsi la mémoire de certains membres de la famille étendue et, surtout, initiant les plus jeunes. A u cours du processus de sociali­sation des enfants du lignage, l'ancien et tous les membres de la lignée scandent les éléments de la tradition : sens et sentiment de l'honneur, sociabilité, probité, courage, solidarité, respect des anciens. Dans certaines sociétés non stratifiées, les enfants de 10 à 14 ans se réunissent lors d'une cérémonie secrète et choisissent un ancien qui va

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leur servir de maître, d'initiateur et de gardien jusqu'à leur passage à un autre grade hiérarchique. L'ancien les informe sur les différentes étapes à franchir, les cérémonies à accomplir et les prestations éventuelles à fournir jusqu'à la phase ultime, celle de l'entrée dans le rang des notables. A l'ancien est échu le rôle de les initier sur le m o n d e visible et le m o n d e invisible, de mettre en relief le culte familial, de les accom­pagner lors de l'exécution des sacrifices, de les protéger en cas de maladie, de veiller à la bonne réputation des garçons et des filles placés sous sa responsabilité.

Contestation de l'ordre des anciens

Dans nombre de sociétés africaines, les rapports entre parents et enfants sont fondés sur la réserve; parents et enfants vont jusqu'à s'éviter. Chez les Soninké, plus les liens sont étroits, plus grande est la réserve. « Le fils doit respect et obéissance à son père pendant toute sa vie... Jusqu'à l'âge de 20 ans, il doit se tenir accroupi, et ce n'est que vers l'âge de 40 ans qu'il pourra manger à côté de son père, assis sur une natte ou sur une peau de mouton 4 . » C'est pour briser cette atmosphère étouffante que beaucoup de sociétés africaines ont suscité et créé des interstices de « désordres » à l'intérieur de la sphère familiale : les petits-enfants, à ce titre, deviennent ce tiers dangereux qui bouleverse le bel agencement du principe de séniorité. Entre grands-parents et petits-enfants, les frontières de l'âge s'effondrent : ils sont « égaux »; des relations de familiarité, de plaisanterie s'instaurent.

Dans certaines sociétés, ces rapports privilégiés ne s'instaurent que lors de moments bien spécifiques : chez les Manjak, c'est au cours de la fête de la classe d'âge des 15-20 ans que des scènes de lutte s'organisent entre le grand-père et le petit-fils; tout cela se déroule dans une ambiance explosive où les participants s'épuisent en boissons, mouvements et plaisanteries; les barrières sociales volent, pour un temps, en éclats; l'irrespect règne. E n revanche, chez les Soninké, les rapports entre grands-parents et petits-enfants sont de l'ordre du quotidien, mais ils sont empreints d'une certaine tenue, tandis que, chez les Haoussa, les plaisanteries prennent souvent un tour plutôt cru, voire scatologique ; les relations d'intimité et de plaisanterie s'enche­vêtrent; le grand-père joue souvent le rôle de confident dans les affaires de cœur et de conseiller. « C'est à lui que l'on vient volontiers emprunter de l'argent, demander les secrets et les tours de main du métier d'héritage ou les substances magiques qui donnent au mil que l'on sème toute sa fertilité6. »

A la mort d 'un ancien, ses petits-enfants adoptent une attitude de provocation et de moquerie; mais, selon G . Nicolas, il s'agit là d'un cérémonial absolument codifié6. C e cérémonial codifié chez les Haoussa devient en revanche une contes­tation réelle dans d'autres populations; chez les Dogons, l'âge avancé sans savoir ni dignité est tout à fait vain; les anciens, ignorants et indignes, ne méritent ni respect, ni considération de la part de la société; en conséquence, il ne faut pas se fier aux apparences, car, selon un dicton malinké, « si la barbe pouvait constituer une réfé­rence, le "petit vieux bouc" eût été plus âgé que son propriétaire ».

Des rivalités et des tensions surgissent lorsque les classes proches de celles des anciens estiment être écartées de certaines fonctions par leurs aînés. Ainsi, chez les Masai de Tanzanie et du Kenya, les « cadets » utilisent la stratégie de la déstabili­sation en accusant leurs aînés de malversations, de prévarications; en pays K o n g o , l'ancien qui « dérange » l'équilibre social se voit accusé de sorcellerie et, pour prouver son innocence, il doit passer par l'épreuve du poison. Chez quelques populations

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La place des anciens dans la société africaine

du Cameroun, pour occuper certaines fonctions, la vieillesse est moins un symbole de sagesse qu 'un signe de malheur. U n roi âgé ou faible devient, pour son royaume, une victime qui doit être immolée rituellement et il sera remplacé par un h o m m e plus jeune dont la force, la santé, la vitalité et la puissance vont rejaillir sur tout le royaume. A ce rituel d'inversion sociale, certaines populations opposent une tactique d'un autre niveau et moins sanguinaire : les jeunes Sambura — des pasteurs habitant au nord-ouest du mont Kenya — mettent en cause l'ordre établi et sapent l'autorité des aînés qui constituent une véritable gérontocratie; ces anciens concentrent entre leurs mains tous les pouvoirs (économiques, culturels et religieux) et y veillent jalousement. Gestionnaires de la circulation des femmes, ils adoptent la stratégie du « guichet étroit », favorisant pour eux-mêmes le développement de la polygamie. Pour contrer ce pouvoir abusif, les jeunes Sambura répondent par un autre abus, engendrant un dysfonctionnement de l'ordre social : ils séduisent les jeunes épouses des anciens et ceux-ci, pour se venger, jettent anathèmes et malédictions sur les jeunes Sambura7 .

Place des anciennes dans les sociétés africaines

Selon l'expression de Georges Balandier, la f e m m e en Afrique •— quel que soit son âge — est considérée c o m m e la « moitié dangereuse ». Perçue c o m m e une altérité plus que c o m m e partenaire complémentaire, elle « est fréquemment associée à la contre-société, aux entreprises de la magie agressive et de la sorcellerie, aux forces qui corrodent l'ordre social et la culture établis »8.

Confinée au rôle de productrice et de reproductrice, selon un dicton manjak, la femme n'acquiert un statut véritable qu'après la ménopause. « Purifiée », elle devient visible dans certaines étapes de la vie sociale; devenue une ancienne, elle tisse des relations privilégiées et intimes avec ses petits-enfants. Investie de pouvoirs, elle participe à certaines cérémonies d'ordre cultuel. Chez les Zulu, la divinité de la pluie et de la fécondité — la Princesse du Ciel — ne communique qu'avec les femmes pour leur transmettre des lois nouvelles ou leur annoncer ce qui adviendra du futur. Chez les Mossi du Burkina Faso (ancienne Haute-Volta), les « vieilles » disposent du savoir; elles sont les gardiennes de l'autel des ancêtres, auxquels elles offrent la bière de mil lors des prémices des récoltes; elles sont les seules à entendre les morts venir s'abreuver de bière de mil9. Bien des sociétés soudanaises (Wolof, Bambara, Toucouleur...) reconnaissent — en dépit des réticences du mâle — les anciennes c o m m e les gardiennes discrètes de l'ordre social. Enfin, on les trouve dans les moments les plus marquants de la vie sociale : naissance, mariage; décodeurs des signes et des sens, elles officient pour prédire le caractère d'un nouveau-né ou pour déterminer les caractères qui conviendraient le mieux pour un futur gendre ou une future bru.

Les anciens confrontés aux mutations

Les sociétés traditionnelles, c o m m e d'autres sociétés du reste, subissent les bour­rasques des mutations d'ordre économique, politique, culturel, religieux.

Avec l'introduction de la culture monétaire, bien des pans de l'édifice vacillent ou sont tombés dans mainte société traditionnelle. L'économie, longtemps centrée sur l'autosuffisance, est devenue désarticulée; le système traditionnel, qui repose sur la solidarité — avec, bien sûr, des moments de crise interne — se trouve en

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concurrence avec le modèle initié par les États-nations. Le scheme étatique essen­tiellement orienté vers l'exportation (arachide, café, cacao) introduit de nouvelles structures. A u niveau de l'agriculture, l'outillage moderne n'est pas souvent adapté aux conditions culturales. A u niveau des instruments de la restructuration de l'économie rurale, on assiste ici et là à la constitution d'organismes d'encadrement et d'animation des appareils de production, de commercialisation ou de crédits agri­coles. A u niveau de la réforme administrative, les assemblées régionales — ou ce qui les remplace — prennent le pas sur le conseil des notables; le chef d'arrondissement, fonctionnaire politique, remplace les chefs de canton; les intermédiaires, les chefs de village — handicapés sur le plan linguistique — se trouvent en porte-à-faux avec les institutions administratives et sont ainsi à la merci de moniteurs, de personnel d'encadrement plus soucieux de leur carrière que de dévouement à la cause paysanne. A u niveau de la réforme foncière, des effets néfastes se font sentir; le droit coutumier, qui repose sur l'inaliénabilité des terres, se trouve modifié : au Sénégal, par exemple, les conditions d'affectation et de désaffectation des terres à l'intérieur des c o m m u ­nautés rurales provoquent la marginalisation des anciens et de certains groupes sociaux, tels les pasteurs peul; par ailleurs, dans sa politique de « capitalisme agraire », l'État octroie des terres à des sociétés liées aux multinationales de l'agro-alimentaire.

Amorcée aux alentours des années trente, l'urbanisation connaît une véritable explosion depuis l'indépendance des anciens territoires français, anglais ou portugais. La déstructuration de l'économie traditionnelle, la relative surpopulation des c a m ­pagnes et l'explosion urbaine produisent des effets en cascades : les campagnes se vident au profit des villes; certains villages n'abritent plus que des personnes âgées, des femmes et des enfants; on assiste à l'éclatement du tissu familial; des jeunes moins disposés à subir le contrôle social et l'autorité traditionnelle des anciens et de la famille prennent le chemin des villes, grossissant ainsi le n o m b r e des chômeurs.

Pour lutter « contre l'inertie des gens et leur absence d'esprit d'initiative », de nouvelles dispositions sont mises en application par les États-nations : La démocratisation des institutions locales (abolition du principe de la séniorité

avec l'éligibilité des h o m m e s à partir de 21 ans; compétence réduite du Conseil du village) ;

Le renforcement de la mainmise de l'État sur l'autorité traditionnelle; le conseil des anciens, jadis détenteur d'un pouvoir discrétionnaire, voit son rôle réduit à la nomination du chef de village : ce dernier devient plus le représentant de l'administration — qui peut prendre des sanctions (blâmes, suspension de fonc­tion, révocation) à son encontre — que celui de la c o m m u n a u t é villageoise;

L'implantation de sections du parti au pouvoir dans chaque localité. Les m e m b r e s de ces sections, souvent plus jeunes que ceux du Conseil des notables, détiennent véritablement le pouvoir de décision.

L'autorité des anciens se trouve confrontée à un double défi, celui des jeunes gens et celui des nouveaux responsables politiques des États. Ici et là, on assiste à un affaiblissement certain de l'ordre des anciens; cependant, des alliances objectives se nouent de façon implicite entre les anciens, maîtres des coutumes, et l'adminis­tration de type moderne, détentrice des ressources. Le « conflit des générations » est réel entre jeunes et personnes âgées, mais, m ê m e si la contestation est âpre, les sociétés africaines, dont le fondement est le respect des anciens et des morts, plient sous les coups de l'harmattan, mais ne semblent pas vouloir céder pour autant. Pour combien de temps encore? •

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La place des anciens dans la société africaine

Notes

1. C . Dieterlen et Y . Cissé, « Les fondements de la société d'institution du K o m o », Cahiers de l'homme, nouvelle série « X », Paris/La Haye, Mouton , 1972, p. 21.

2. J. Bouju, Graine de Vhomme, enfant du mil, Paris, Société d'ethnographie, 1984, p. 181. 3. E . Pollet et C . Winter, La société soninké, Bruxelles, Éditions de l'Université de Bruxelles,

1971, p, 322. 4. Ibid., p. 405. 5. C . Raynaut, Structures normatives et relations électives, Paris/La Haye, Mouton, 1972,

p. 94. 6. G . Nicolas, Dynamique sociale et appréhension du monde au sein d'une société haoussa,

Paris, Institut d'ethnologie, 1975, p. 69. 7. B . Bernardi, Age class systems. Social institutions and policies based on age, Cambridge,

Londres, Cambridge University Press, 1985. 8. G . Balandier, Anthropo-logiques, Paris, Presses Universitaires de France, 1974, p. 34. 9. M . Abeles et C . Collard (dir. publ.), Age, pouvoir et société en Afrique noire, Paris,

Karthala-PUM, 1985, p. 25.

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Comisión Guatemalteca de Cooperación con la Unesco, 3.a Avenida 13-30, Zona 1, Apartado postal 244, Guatemala. Commission nationale guinéenne pour l'Unesco, B . P . 964, Conakry. Instituto Nacional do Livro e do Disco, Conselho Nacional da Cultura, Avenida Domingos Ramos n.° 10 - A , B . P . 104, Bissau. Librairie « A la Caravelle », 26, rue Roux, B . P . Ill, Port-au-Prince. Librería Navarro, 2 . a Avenida n.° 201, Comayagüela, Tegucigalpa. Swindon Book C o . , 13-15 Lock Road, Kowloon; Federal Publications ( H K ) Ltd, 2d Freder Centre, 68 Sung W o n g Toi Road, Tokwawan, Kowloon ; H o n g Kong Government Information Services, Publication (Sales) Office, Information Services Dept., N o . 1 Battery Path, Central, Hong Kong . Kultura-Buchimport-Abt., P . O . B . 149, H-1389 Budapest 62. Orient Longman Ltd, Kamani Marg, Ballard Estate, Bombay 400038; 17 Chittaranjan Avenue, Calcutta 700013; 36A Anna Salai, Mount Road, Madras 600002; 80/1 Mahatma Gandhi Road, Bangalore 560001; 5-9-41/1 Bashir Bagh, Hyderabad 500001 (AP); 3-5-820 Hyderguda, Hyderabad 500001. Sous-dépôts : Oxford Book & Stationery C o . , 17 Park Street, Calcutta 700016; Scindia House, N e w Delhi 110001 ; Ministry of Education and Culture, Publication Unit, E v - A F O Hutments, Dr . Rajendra Prasad Road, N e w Delhi 110001; U B S Publishers Distributors Ltd, 5 Ansari Road, P . O . Box 7015, N e w Delhi 110002. Bhratara Publishers and Booksellers, 29, Jl. Oto Iskandardinata III, Jakarta; Indira P . T . , Jl. Dr . Sam Ratulangi 37, Jakarta Pusat. Commission nationale iranienne pour l'Unesco, 1188 Enghelab Avenue, Rostam Give Building, P . O . Box 11365-4498,13158 Téhéran. T D C Publishers, 12 North Frederick Street, Dublin; Educational Company of Ireland Ltd, P . O . Box 43A, Walkinstown, Dublin 12. Snaebjörn Jonsson & C o . , H . F . , The English Bookshop, Hafnarstraeti 9, Reykjavik. Literary Transactions Inc., c/o Steimatzky Ltd, 11, Hakishon Street, P . O . Box 1444, Bneibrak 51114. Licosa (Librería Commissionaria Sansoni S.p.A.), via Lamarmora 45, Casella postale 552, 50121 Firenze, et via Bartolini 29, 20155 Milano; F A O Bookshop, Via délie Terme di Caracalla, 00100 R o m a ; ILO Bookshop, Corso Unità d'Italia 125, Torino. General Establishment for Publishing, Distribution and Advertising, Souf Al Mahmoud i Street, P . O . Box 959, Tripoli. University of the West Indies Bookshop, M o n a , Kingston 7. Eastern Book Service Inc., 37-3 Hongo 3-chome, Bunkyo-ku, Tokyo 113. Jordan Distribution Agency, P . O . Box 375, A m m a n . East African Publishing House, P . O . Box 30571, Nairobi ; Afrika Book Service Ltd, Quran House, Mfangano Street, P . O . Box 45245, Nairobi. The Kuwait Bookshop C o . Ltd, P . O . Box 2942, Kuwait. Mazenod Book Centre, P . O . Mazenod, Maseru. Librairies Antoine A . Naufal et Frères, B . P . 656, Beyrouth. National Bookstore, Mechlin and Carey Streets, P . O . Box 590, Monravia; Cole & Yancy Bookshops Ltd, P . O . Box 286, Monrovia. Librairie Paul Brück, 22, Grande-Rue, Luxembourg. Périodiques : Messageries Paul Kraus, B . P . 1022, Luxembourg. Commission nationale de la République démocratique de Madagascar pour l'Unesco, B . P . 331, Antananarivo. University of Malaya Co-operative Bookshop, Kuala Lumpur 22-11. Malawi Book Service, Head Office, P . O . Box 30044, Chichiri, Blantyre 3. Novelty Printers & Publishers, Male. Librairie populaire du Mali, B . P . 28, Bamako . Sapienzas, 26 Republic Street, Valletta.

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Librairie « A u x belles images », 282, av. M o h a m m e d - V , Rabat; Librairie des Écoles, 12, av. Hassan-II, Casablanca; Société chérifienne de distribution et de presse, S O C H E P R E S S , angle rues de Dinant et Saint-Saëns, B . P . 13683, Casablanca 05. Hatier Martinique, 32, rue Schœlcher, B . P . 188,97202 Fort-de-France. Nalanda C o . Ltd, 30 Bourbon Street, Port-Louis. G R A . L I . C O . M A . , 1, rue du Souk-X, av. Kennedy, Nouakchott; Société nouvelle de diffusion ( S O N O D I ) , B . P . 55, Nouakchott. Librería « El Correo de la Unesco », Actipán 66 (Insurgentes/Manacar), Colonia del Valle, Apartado postal 61-164, 06600 México D . F . ; DILITSA (Distribuidora Literaria S .A. ) , Pomona 30, Apartado postal 24-448, 06700 México D . F . ; Librería Secur, Local 2, Zona C I C O M , Apartado postal n.° 422, 86000 Villahermosa, Tabasco. Instituto Nacional do Disco e do Livro ( INDL), A v . 24 de Julho n.° 1927, r/c, e n.° 1921, 1." andar, Maputo. Sajha Prakashan, Polchowk, Kathmandu. Librería de la Universidad Centroamericana, Apartado 69, Managua. Librairie Mauclert, B . P . 868, Niamey. The University Bookshop of Ife; The University Bookshop of Ibadan, P . O . Box 286, Ibadan; The University Bookshop of Nsukka; The University Bookshop of Lagos; The A h m a d u Bello University Bookshop of Zaria. Tanum-Karl Johan, P . O . Box 1177, Sentrum 0107, Oslo 1 ; Akademika A / S , Universitetsbokhandel, P . O . Box 84, Blindem 0314, Oslo 3; Narvesen Info Center, P . O . Box 6125, Etterstad N 0602, Oslo 6. Government Publishing, P . O . Box 14277, Kilbirnie, Wellington. Retail bookshop, 25 Rutland Street (Mail orders, 85 Beach Road, Private Bag C . P . O . ) , Auckland; Retail, Ward Street (Mail orders, P . O . Box 857), Hamilton; Retail, 159 Hereford Street (Mailorders, Private Bag), Christchurch; Retail, Princes Street (Mailorders, P . O . Box 1104), Dunedin. Uganda Bookshop, P . O . Box 7145, Kampala. Mirza Book Agency, 65 Shahrah Quaid-i-Azam, P . O . Box 729, Lahore 3; Unesco Publications Centre, Regional Office for Book Development in Asia and the Pacific, P . O . Box 8950, Karachi 29. Distribuidora Cultura Internacional, Apartado 7571, Zona 5, Panama. Keesing Boeken B . V . , Hogehilweg 13, P . O . Box 1118, 1000 B C , Amsterdam. Périodiques : Faxon-Europe, Postbus 197, 1000 A D Amsterdam. National Book Store Inc., 701, Rizal Avenue, Manila. Sous-agents : International Book Center (Philippines), 5th floor, Filipinas Life Building, Ayala Ave. , Makati, Metro Manila. Ars Polona-Ruch, Krakowskie Przedmiescie 7, 00-068 Warszawa; O R P A N - I m p o r t , Patac Kultury, 00-901 Warszawa. Dias & Andrade Ltda., Livraria Portugal, rue do Carmo 70-74, 1117 Lisboa. Librairie Sayegh, Immeuble Diab, rue du Parlement, B . P . 704, Damas . Korean National Commission for Unesco, P . O . Box Central 64, Séoul. Buchexport, Leninstrasse 16, 7010 Leipzig.

Librería Blasco, A v . Bolívar n.° 402, esq. Hermanos Deligne, Santo Domingo. Dar es Salaam Bookshop, P . O . Box 9030, Dar es Salaam.

Artexim-Export/Import, Piata Scienteii, no. 1, P . O . Box 33-16, 70005 Bucuresti. H M S O , P . O . Box 276, London S W 8 5 D T . Government Bookshops : London, Belfast, Birmingham, Bristol, Edinburgh, Manchester; Third World Publications, 151 Stratford Road, Birmingham B U 1 R D .

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Pour les cartes scientifiques : McCarta Ltd, 122 King's Cross Road, London W C I X 9 D S . Unesco, Bureau régional pour l'Afrique (BREDA), 12, avenue du Roume, B.P. 3311, Dakar; Librairie Clairafrique, B.P. 2005, Dakar; Librairie des Quatre-Vents, 91, rue Blanchot, B.P. 1820, Dakar; Les Nouvelles Éditions africaines, 10, rue Amadou-Hassan Ndoye, B.P. 260, Dakar. New Service Ltd, Kingsgate House, P .O. Box 131, Mané; National Bookshop, P . O . Box 48, Mané. Chopmen Publishers, 865 Mountbatten Road # 05-28/29, Katong Shopping Centre, Singapore 1543. Périodiques : Righteous Enterprises, P . O . Box 562, Kallang Basin Post Office, Singapore 9133. Modern Book Shop and General, P . O . Box 951, Mogadiscio. Al-Bashir Bookshop, P . O . Box 1118, Khartoum. Lake House Bookshop, Sir Chittampalam Gardiner Mawata , P . O . Box 244, Colombo 2.

A / B C E . Fritzes Kungl. Hovbokhandel, Regeringsgatan 12, Box 16356, S-103 27 Stockholm 16. Pour « Le Courrier de l'Unesco » seulement : Svenska FN-Förbundet, Skolgränd 2, Box 150 50, S-104 65 Stockholm. Tous les périodiques : Wennergren-Williams A B , Nordenflychtsvagen 70, S-104 25 Stockholm; Esselte Tidskirftscentralen, Gamla Brogatan 26, Box 62, 10120 Stockholm. Librairies Payot à Genève, Lausanne, Bâle, Berne, Vevey, Montreux, Neuchâtel, Zürich; Europa Verlag, Ramistrasse 5, C H 8024 Zürich. Suriname National Commission for Unesco, P . O . Box 2943, Para­maribo. Librairie Abssounout, 24 av. Charles-de-Gaulle, B .P . 388, N 'Djamena . S N T L , Spalena 51, 113-02 Praha 1; Artia, V e Smeckach 30, P . O . Box 790, 111-27 Praha. Pour la Slovaquie seulement : Alfa Verlag, Hurbanovo n a m 6, 893-31 Bratislava. Librairie évangélique, B .P . 378, L o m é ; Librairie du Bon-Pasteur, B . P . 1164, L o m é ; Librairie universitaire, B . P . 3481, L o m é ; Les Nouvelles Éditions africaines, 239, bd Circulaire, B . P . 4862, L o m é . National Commission for Unesco, 18, Alexandra Street, St. Clair, Port of Spain (Trinidad). Société tunisienne de diffusion, 5, avenue de Carthage, Tunis. Haset Kitapevi A . S . , Istiklâl Caddesi n° 469, Posta Kutusu 219, Beyoglu, Istanbul. Mezhdunarodnaya Kniga, ul. Dimitrova 39, Moskva 113095. Toutes les publications : Ediciones Trecho S .A . , Maldonado 1090, Montevideo. Livres et cartes scientifiques seulement : Librería Técnica Uruguaya, Colonia n.° 1543, Piso 7, Oficina 702, Casilla de correos 1518, Montevideo; Instituto Nacional del Libro, Ministerio de Educación y Cultura, San José 1116, Montevideo. Librairies de l'Institut : Guayabo 1860, Montevideo; San José 1118, Montevideo, 18 de Julho n.° 1222, Paysandú; A m o r i m 37, Salto.

Librería del Este, A v . Francisco de Miranda 52, Edificio Galipán, Apartado 60337, Caracas 1060-A; Oficina de Coordinación Regional de la Unesco para América Latina y el Caribe, Quinta « ISA », 7. a A v . de Altamira entre 7. a y 8.a Transversal, Apartado 68394, Altamira, Caracas 1062-A. 14th October Corporation, P . O . Box 4227, Aden. Nolit, Terazije 13/VITI, 11000 Beograd; Cancarjeva Zalozba, Zopi-tarjeva n.° 2, 61001 Ljubljana; Mladost, Ilica 30/11, Zagreb. Librairie du C I D E P , B . P . 2307, Kinshasa; Commission nationale zaï­roise pour l'Unesco, Commissariat d'État chargé de l'éducation natio­nale, B .P . 32, Kinshasa. National Educational Distribution C o . of Zambia Ltd, P . O . Box 2664, Lusaka. Textbook Sales (PVT) Ltd, 67 Union Avenue, Harare.

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Saviez-vous que les éducateurs, les chercheurs et les étudiants peuvent utiliser les bons Unesco pour acheter

livres, périodiques, films œuvres d'art, partitions musicales

récepteurs de radio et de télévision

machines à écrire matériel scientifique machines-outils

bandes magnétiques instruments de musique appareils de mesure ?

Les bons Unesco peuvent également être utilisés pour payer des souscriptions à des publications de caractère éducatif, scientifique ou culturel et pour acquitter des droits d'inscription universitaire ou des droits d'auteur

(Des coupons sans valeur nominale peuvent être valorisés pour des sommes de 1 à 99 cents.)

C o m m e n t cela fonctionne-t-il ?

Dans chaque pays utilisateur, un organisme — le plus souvent la commission nationale pour l'Unesco — est responsable de la vente des bons.

Écrire au Service des bons de l'Unesco, 7, place de Fontenoy, 75700 Paris (France) pour obtenir une liste des principaux fournisseurs ayant adhéré au programme ainsi que le n o m et l'adresse du Service de vente des bons Unesco dans votre pays.

Vous payez les bons en monnaie nationale et vous les joignez à la c o m m a n d e que vous envoyez au fournisseur des marchandises que vous désirez acquérir.

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vient de paraître P Robert H U G O N O T D- Laurence H U G O N O T

ATLAS DU VIEILLISSEMENT

ET DE LA VIEILLESSE Regroupé, comparé, expliqué,

un vaste ensemble de documents formant

la synthèse des connaissances actuelles

en gérontologie

L'avancement incessant de la recherche, de l'expé­rience clinique et des pratiques sociales se traduit par une prolifération des connaissances et de leurs sources documentaires, au point qu'il devient de jour en jour plus difficile d'en appréhender les diffé­rentes facettes et d'en extraire l'essentiel.

• C'est à cette nécessité d'une meilleure maîtrise du savoir et du savoir-faire que se trouve consacré l'Atlas du vieillissement et de la vieil­lesse.

• L'accessibilité immédiate des données ainsi propo­sées répondra aux préoccupations quotidiennes du clinicien, de l'enseignant et aussi de l'étudiant D e plus, d'une présentation claire et méthodique, cette synthèse respecte constamment le caractère pluri­disciplinaire cher à la gérontologie d'aujourd'hui et de ce fait intéressera tous les acteurs de la pratique et de la réflexion gérontologiques.

*

Professeur Robert H U G O N O T Chef de service de gérontologie clinique du C H U de Grenoble, administrateur de la Fondation Nationale de gérontologie.

Docteur Laurence H U G O N O T Directrice de la recherche au Centre de Prévention, d'Etudes et de Recherches sur le vieillissement

• Un volume au format 24 x 32, relié pleine toile de 456 pages, illustré de 1118 graphiques, tableaux et schémas, sous Jaquette en couleur.

PRIX: 880 F chez votre librairie ou directement aux

éditions érès 19, rue Gustave Courbet

31400 Toulouse

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IMPACT : SCIENCE ET SOCIÉTÉ, 1988

Index des matières

Activités des jeunes Le Débal public sur la science en Suède.

Dyring, Annagreta. (152) p. 345-356. La Vulgarisation de la science au Danemark et

les femmes. Olesen, Done . (152) p. 391-402, •Dus.

Activités des musées L e Débat public sur la science en Suède .

Dyring, Annagre ta . (152) p . 345-356. Muséologie et culture scientifique. Saunier,

Diane . (152) p . 357-372, illus. Afrique

L'Animation scientifique dans un pays africain. Touré, Saliou. (152) p. 381-390.

La Fièvre de Lassa et autres affections virales hémorragiques. Tomori, Oyewale. (150) p. 119-133, illus.

Peste bovine et peste des petits ruminants: des menaces constantes contre l'élevage dans beaucoup de pays en développement. Diallo, A d a m a . (150) p. 191-204, illus., cartes.

Science, technologie et valeurs africaines. Urevbu, Andrew O . (151) p. 247-257.

Aide internationale Science du Nord, science du Sud: plaidoyer

pour un rapprochement. Faruqui, Akhtar Mahmud. (151) p. 285-296.

Analyse chimique L e Laser, u n outil polyvalent. M e h e n d a l e ,

Shrikant C . Rustagi, Kailash C . (149) p . 51-65, illus.

A r a b e La Presse scientifique arabe: bilan et

perspectives. Mawlawi, Radwan. (152) p. 417-430.

Asie D e s Poulets, des virus et des h o m m e s . Latif

Ibrahim, A b d u l . Ideris, Aini. (150) p . 181-189, illus.

Attitudes Images de la science: sa perception par le

public. (151) p. 213-314. La Science à l'épreuve de la société. Calvora,

Robert G . (151) p. 239-246. La Science, les scientifiques et la société: les

attitudes de l'opinion publique à l'égard de la science et de la technologie. Khan, Rahat Nabi. (151) p. 267-283.

Australie Expliquer la science aux sceptiques. Pockley,

Peter. (151) p . 225-237. Bernai, John Desmond

L a Fonction sociale de la science: cinquante ans plus tard. Kröber , Günte r . (151) p . 259-266.

Biographies L'Héritage scientifique de Vladimir Vernadski.

Yanshine, A . L . Yanshina, F.T. (151) p. 297-311.

Biologie L a Science au service de l'humanité. M a r c h u k ,

G u r i Ivanovich. (149) p . 93-104. Biosphère

L'Héritage scientifique de Vladimir Vernadski. Yanshine, A . L . Yanshina, F.T. (151) p. 297-311.

Biotechnologie Les Matériaux de la vie. Jozefonvicz,

Jacqueline. Jozefowicz, Marcel . (149) p . 41-49 , illus.

Les Viroses végétales et les applications d e la biotechnologie. R o b i n s o n , David J. (150) p . 205-214, illus.

Cancer L e Virus de l'hépatite B . Sonigo, Pierre. (150)

p. 135-141, illus., cartes. Céramiques

Les Céramiques avancées. Juillard, Jacqueline. (149) p. 27-40, illus.

Matériaux sur mesure. W o o d , John V . (149) p. 5-14, illus.

La Supraconductivité: une révolution? Smith, T . Fred. (149) p. 15-25, illus.

Chimie La Science au service de l'humanité. Marchuk,

Guri Ivanovich. (149) p. 93-104. C h i m i e de la surface

Matériaux sur mesure. W o o d , John V . (149) p. 5-14, illus.

Chine Étude et maîtrise des viroses humaines en

Chine. Zhu Ji-ming. (150) p. 143-153, illus., cartes.

Faire en sorte que les scientifiques et le public se comprennent mieux. Zhang Daoyi. (152) p. 373-380, illus.

Choix de technologie Science, technologie et valeurs africaines.

Urevbu, Andrew O . (151) p. 247-257. Chromosomes

Le Séquençage automatique de l ' A D N et le projet de séquençage de génome humain. Labouze, Eric. (149) p. 83-92, illus.

Conductivité électrique L a Supraconductivité: u n e révolution? S m i t h , T .

Fred. (149) p . 15-25, illus. Conseil suédois de planification et de coordination

de la recherche L e Débat public sur la science en Suède .

Dyring, Annagreta . (152) p . 345-356.

- 1

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Index des matières

Coopération internationale Action de l'Unesco contre le S I D A . (150) p.

179-180. L'Éradication de la variole. Fenner, Frank.

(150) p. 155-167, illus. S I D A : une stratégie mondiale pour un défi

mondial. M a n n , Jonathan M . (150) p. 169-177, illus.

Coordination des recherches Les Céramiques avancées. Juillard, Jacqueline.

(149) p. 2 7 ^ 0 , illus. Côte d'Ivoire

L'Animation scientifique dans un pays africain. Touré, Saliou. (152) p. 381-390.

Cultures africaines Science, technologie el valeurs africaines.

Urevbu, A n d r e w O . (151) p. 247-257. Cultures scientifiques

Muséologie et culture scientifique. Saunier, Diane. (152) p. 357-372, illus.

Promotion de la science et culture scientifique. Shortland, Michael. (152)

Danemark La Vulgarisation de la science au D a n e m a r k et

les f e m m e s . Olesen, D o n e . (152) p. 391-402, illus.

Dépenses scientifiques Science du Nord , science du S u d : plaidoyer

pour un rapprochement. Faruqui, Akhtar M a h m u d . (151) p. 285-296.

Dessins humoristiques La Science vue par le dessinateur humoristique.

Harris, Sidney. (152) p. 403^t06, illus. Développement scientifique

La Science au service de l'humanité. Marchuk, Guri Ivanovich. (149) p. 93-104.

Dispositifs optiques U n e Nouvelle génération de microscopes.

Galloway, John W o o d h e a d . (149) p. 67-82, illus.

Données d'enquête La Science, les scientifiques et la société: les

attitudes de l'opinion publique à l'égard de la science et de la technologie. K h a n , Ranal Nabi. (151) p . 267-283.

Education des filles La Vulgarisation de la science au D a n e m a r k et

les f e m m e s . Olesen, D o n e . (152) p. 391-402, illus.

Education sanitaire Action de l'Unesco contre le S I D A . (150) p.

179-180. Énergie nucléaire

L'Héritage scientifique de Vladimir Vernadski. Yanshine, A . L . Yanshina, F . T . (151) p. 297-311.

Epidemiologie La Fièvre de Lassa et autres affections virales

hémorragiques. Tomori, Oyewale. (150) p. 119-133, illus.

S I D A : une stratégie mondiale pour un défi mondial. M a n n , Jonathan M . (150) p. 169-177, illus.

Le Virus de l'hépatite B . Sonigo, Pierre. (150) p. 135-141, illus., cartes.

Esthétique industrielle Matériaux sur mesure. W o o d , John V . (149) p.

5-14, illus. Eureka

Les Céramiques avancées. Juillard, Jacqueline. (149) p. 27-40, illus.

Europe Les Céramiques avancées. Juillard, Jacqueline.

(149) p. 27^M), illus. La Science, les scientifiques et la société: les

attitudes de l'opinion publique à l'égard de la science et de la technologie. K h a n , Rahat Nabi. (151) p. 267-283.

Expérience L a Science à l'épreuve de la société. Calvora,

Robert G . (151) p. 239-246. Facteurs socio-économiques

L a Fièvre de Lassa et autres affections virales hémorragiques. Tomori , Oyewale. (150) p. 119-133, illus.

S I D A : une stratégie mondiale pour un défi mondial. M a n n , Jonathan M . (150) p. 169-177, illus.

Femmes La Vulgarisation de la science au D a n e m a r k et

les femmes. Olesen, D o n e . (152) p. 391-402, illus.

La Vulgarisation scientifique dans un m o n d e qui change. (152) p. 315-430, illus.

France Muséologie et culture scientifique. Saunier,

Diane. (152) p. 357-372, illus. Science et anti-science: une vieille histoire.

Dhombres , Jean. (151) p. 215-223. Gènes

Le Séquençage automatique de l ' A D N et le projet de séquençage de génome h u m a i n . Labouze, Eric. (149) p. 83-92, illus.

Le Virus de l'hépatite B . Sonigo, Pierre. (150) p. 135-141, illus., cartes.

Génétique humaine. Le Séquençage automatique de l ' A D N et le

projet de séquençage de génome h u m a i n . Labouze, Eric. (149) p. 83-92, illus.

Géochimie L'Héritage scientifique de Vladimir Vernadski.

Yanshine, A . L . Yanshina, F . T . (151) p . 297-311.

Grippe Étude et maîtrise des viroses humaines en

Chine. Z h u Ji-ming. (150) p. 143-153, illus., cartes.

Histoire de la science L'Héritage scientifique de Vladimir Vernadski.

Yanshine, A . L . Yanshina, F . T . (151) p . 297-311.

U n e Nouvelle génération de microscopes. Galloway, John W o o d h e a d . (149) p. 67-82, illus.

Science et anti-science: une vieille histoire. Dhombres , Jean. (151) p. 215-223.

Immunologie L'Éradication de la variole. Fenner, Frank.

(150) p. 155-167, illus. Le Virus: un très grand adversaire de l ' h o m m e .

T h é , Hugues de. (150) p. 111-118, illus.

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Index des matières

Industrie aérospatiale Les Céramiques avancées. Juillard, Jacqueline.

(149) p. 27-40, illus. Matériaux sur mesure. W o o d , John V . (149) p.

5-14, illus. Industrie automobile

Les Céramiques avancées. Juillard, Jacqueline. (149) p. 27-40, illus.

Matériaux sur mesure. W o o d , John V . (149) p. 5-14, illus.

Industrie électronique Les Céramiques avancées. Juillard, Jacqueline.

(149) p. 2 7 ^ 0 , illus. Matériaux sur mesure. W o o d , John V . (149) p.

5-14, illus. Industrie technologique

Le Laser, un outil polyvalent. Mehendale, Shrikant C . Ruslagi, Kailash C . (149) p. 51-65, illus.

Information du public Expliquer la science aux sceptiques. Pockley,

Peter. (151) p. 225-237. Images de la science: sa perception par le

public. (151) p. 213-314. Promotion de la science et culture scientifique.

Shortland, Michael. (152) La Vulgarisation scientifique dans un monde

qui change. (152) p. 315^30, illus. Information scientifique

Expliquer la science aux sceptiques. Pockley, Peter. (151) p. 225-237.

Images de la science: sa perception par le public. (151) p. 213-314.

La Vulgarisation scientifique dans un monde qui change. (152) p. 315-430, illus.

Ingénierie aérospatiale La Science au service de l'humanité. Marchuk,

Guri Ivanovich. (149) p. 93-104. Innovations scientifiques

Nouveaux matériaux, nouvelles machines. (149) p. 1-107, illus.

Japon Les Céramiques avancées. Juillard, Jacqueline.

(149) p. 27-40, illus. Journalisme

La Presse scientifique arabe: bilan et perspectives. Mawlawi, Radwan . (152) p. 417-430.

La Vulgarisation scientifique dans un monde qui change. (152) p. 315-430, illus.

Journalistes Expliquer la science aux sceptiques. Pockley,

Peter. (151) p. 225-237. Quelques questions touchant à la vulgarisation

scientifique. Kapitza, Sergei P. (152) p. 333-343.

La Vulgarisation scientifique dans un monde qui change. (152) p. 315-430, illus.

Lasers Le Laser, un outil polyvalent. Mehendale,

Shrikant C . Ruslagi, Kailash C . (149) p. 51-65, illus.

U n e Nouvelle génération de microscopes. Galloway, John Woodhead. (149) p. 67-82, illus.

Lentilles U n e Nouvelle génération de microscopes.

Galloway, John Woodhead. (149) p. 67-82, illus.

Lutte anti-parasite Peste bovine et peste des petits ruminants: des

menaces constantes contre l'élevage dans beaucoup de pays en développement. Diallo, A d a m a . (150) p. 191-204, illus., cartes.

Lutte contre les maladies Action de l'Unesco contre le S I D A . (150) p.

179-180. Des Poulets, des virus et des h o m m e s . Latif

Ibrahim, Abdul. Ideris, Aini. (150) p . 181-189, illus.

L'Éradication de la variole. Fenner, Frank. (150) p. 155-167, illus.

Étude et maîtrise des virases humaines en Chine. Zhu Ji-ming. (150) p. 143-153, illus., cartes.

Étude et maîtrise des virases humaines en Chine. Z h u Ji-ming. (150) p. 143-153, illus., cartes.

La Fièvre de Lassa et autres affections virales hémorragiques. Tomori, Oyewale. (150) p. 119-133, illus.

L ' H o m m e et les virus. (150) p. 109-214, illus., cartes.

Peste bovine et peste des petits ruminants: des menaces constantes contre l'élevage dans beaucoup de pays en développement. Diallo, A d a m a . (150) p. 191-204, illus., cartes.

S I D A : une stratégie mondiale pour un défi mondial. M a n n , Jonathan M . (150) p. 169-177, illus.

Les Virases végétales et les applications de la biotechnologie. Robinson, David J. (150) p. 205-214, illus.

Le Virus: un très grand adversaire de l ' homme. Thé, Hugues de. (150) p. 111-118, illus.

Machines Nouveaux matériaux, nouvelles machines. (149)

p. 1-107, illus. Magnétisme

Matériaux sur mesure. W o o d , John V . (149) p. 5-14, illus.

Maladies animales Des Poulets, des virus et des h o m m e s . Latif

Ibrahim, Abdul. Ideris, Aini. (150) p. 181-189, illus.

Peste bovine et peste des petits ruminants: des menaces constantes contre l'élevage dans beaucoup de pays en développement. Diallo, A d a m a . (150) p. 191-204, illus., cartes.

Maladies des plantes Les Virases végétales et les applications de la

biotechnologie. Robinson, David J. (150) p. 205-214, illus.

Maladies infectieuses Étude et maîtrise des virases humaines en

Chine. Z h u Ji-ming. (150) p. 143-153, illus., cartes.

La Fièvre de Lassa et autres affections virales hémorragiques. Tomori, Oyewale. (150) p. 119-133, illus.

L ' H o m m e et les virus. (150) p. 109-214, illus., cartes.

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Index des matières

S I D A : une stratégie mondiale pour un défi mondial. M a n n , Jonathan M . (150) p. 169-177, illus.

Le Viras de l'hépatite B. Sonigo, Pierre. (150) p. 135-141, illus., cartes.

Le Virus: un très grand adversaire de l 'homme. Thé, Hugues de. (150) p. 111-118, illus.

Maladies tropicales La Fièvre de Lassa et autres affections virales

hémorragiques. Tomori, Oyewale. (150) p. 119-133, illus.

Mala isle Des Poulets, des virus et des h o m m e s . Latif

Ibrahim, Abdul. Ideris, Aini. (150) p. 181-189, illus.

Matériaux composites Les Céramiques avancées. Juillard, Jacqueline.

(149) p. 27-40, illus. Les Matériaux de la vie. Jozefonvicz,

Jacqueline. Jozefowicz, Marcel. (149) p. 41-49, illus.

Matériaux sur mesure. W o o d , John V . (149) p. 5-14, illus.

Nouveaux matériaux, nouvelles machines. (149) p. 1-107, illus.

Mathématiques L'Animation scientifique dans un pays africain.

Touré, Saliou. (152) p. 381-390. La Science au service de l'humanité. Marchuk,

Guri Ivanovich. (149) p. 93-104. Médecine vétérinaire

Peste bovine et peste des petits ruminants: des menaces constantes contre l'élevage dans beaucoup de pays en développement. Diallo, A d a m a . (150) p. 191-204, illus., cartes.

Microscopes électroniques U n e Nouvelle génération de microscopes.

Galloway, John Woodhead. (149) p. 67-82, illus.

Microscopic U n e Nouvelle génération de microscopes.

Galloway, John Woodhead. (149) p. 67-82, illus.

Minéralogie L'Héritage scientifique de Vladimir Vernadski.

Yanshine, A . L . Yanshina, F .T. (151) p. 297-311.

Mise à l'épreuve des matériaux La Supraconductivité: une révolution? Smith, T .

Fred. (149) p. 15-25, illus. Moyens de grande Information

Le Débat public sur la science en Suède. Dyring, Annagreta. (152) p. 345-356.

Expliquer la science aux sceptiques. Pockley, Peter. (151) p. 225-237.

Faire en sorte que les scientifiques et le public se comprennent mieux. Zhang Daoyi. (152) p. 373-380, illus.

Quelques questions touchant à la vulgarisation scientifique. Kapitza, Sergei P. (152) p. 333-343.

La Télévision peut-elle faire de la bonne vulgarisation scientifique? Mosley, Michael. (152) p. 407-416, illus.

Musées de sciences Muséologie et culture scientifique. Saunier,

Diane. (152) p. 357-372, illus.

La Vulgarisation de la science au Danemark et les femmes. Olesen, Dorte. (152) p. 391-402, illus.

Muséologie Muséologie et culture scientifique. Saunier,

Diane. (152) p. 357-372, illus. La Vulgarisation scientifique dans un monde

qui change. (152) p. 315-430, illus. Océanographie

La Science au service de l'humanité. Marchuk, Guri Ivanovich. (149) p. 93-104.

Opinion publique Images de la science: sa perception par le

public. (151) p. 213-314. Promotion de la science et culture scientifique.

Shortland, Michael. (152) Organisations Intergouvemementales

Science du Nord, science du Sud: plaidoyer pour un rapprochement. Faruqui, Akhtar M a h m u d . (151) p. 285-296.

Participation des femmes La Vulgarisation de la science au Danemark et

les femmes. Olesen, D o n e . (152) p. 391-402, illus.

Pays arabes La Presse scientifique arabe: bilan et

perspectives. Mawlawi, Radwan. (152) p. 417-430.

Pays en voie de développement Peste bovine et peste des petits ruminants: des

menaces constantes contre l'élevage dans beaucoup de pays en développement. Diallo, A d a m a . (150) p. 191-204, illus., cartes.

Science du Nord, science du Sud: plaidoyer pour un rapprochement. Faruqui, Akhtar M a h m u d . (151) p. 285-296.

Périodiques scientifiques Quelques questions touchant à la vulgarisation

scientifique. Kapitza, Sergei P. (152) p. 333-343.

Philosophie de la science Science et anti-science: une vieille histoire.

Dhombres, Jean. (151) p. 215-223. Physique

La Science au service de l'humanité. Marchuk, Guri Ivanovich. (149) p. 93-104.

Poliomyélite L'Êradication de la variole. Fenner, Frank.

(150) p. 155-167, illus. Étude et maîtrise des viroses humaines en

Chine. Zhu Ji-ming. (150) p. 143-153, illus., cartes.

Prévision technologique La Science au service de l'humanité. Marchuk,

Guri Ivanovich. (149) p. 93-104. Problème social

Quelques questions touchant à la vulgarisation scientifique. Kapitza, Sergei P. (152) p. 333-343.

La Science à l'épreuve de la société. Calvora, Robert G . (151) p. 239-246.

Programme spécial O M S de lutte contre le S I D A S I D A : une stratégie mondiale pour un défi

mondial. M a n n , Jonathan M . (150) p. 169-177, illus.

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Index des matières

Progrès scientifique La Fonction sociale de la science: cinquante

ans plus tard. Kröber, Günter. (151) p. 259-266.

Science et anti-science: une vieille histoire. D h o m b r e s , Jean. (151) p. 215-223.

Progrès social La Fonction sociale de la science: cinquante

ans plus tard. Kröber, Günter. (151) p. 259-266.

Projet de séquençage de génome humain Le Séquençage automatique de l ' A D N et le

projet de séquençage de g é n o m e humain. Labouze, Eric. (149) p. 83-92, illus.

Publications scientifiques Le Débat public sur la science en Suède.

Dyring, Annagreta. (152) p. 345-356. La Presse scientifique arabe: bilan et

perspectives. Mawlawi, Radwan. (152) p. 417-430.

Recherche biomédicale Les Matériaux de la vie. Jozefonvicz,

Jacqueline. Jozefowicz, Marcel. (149) p. 41-49, illus.

Le Séquençage automatique de l ' A D N et le projet de séquençage de g é n o m e humain. Labouze, Eric. (149) p. 83-92, illus.

Recherche et développement Science du Nord, science du Sud : plaidoyer

pour u n rapprochement. Faruqui, Akhtar M a h m u d . (151) p. 285-296.

Recherche médicale Étude et maîtrise des virases humaines en

Chine. Z h u Ji-ming. (150) p. 143-153, illus., cartes.

L ' H o m m e et les virus. (150) p. 109-214, illus., cartes.

Recherche scientifique L e Débat public sur la science en Suède.

Dyring, Annagreta. (152) p. 345-356. L'Héritage scientifique de Vladimir Vernadski.

Yanshine, A . L . Yanshina, F . T . (151) p. 297-311.

Images de la science: sa perception par le public. (151) p. 213-314.

Le Laser, un outil polyvalent. Mehendale, Shrikant C . Rustagi, Kailash C . (149) p. 51-65, illus.

La Science à l'épreuve de la société. Calvora, Robert G . (151) p. 239-246.

La Science au service de l'humanité. Marchuk, Guri Ivanovich. (149) p. 93-104.

Science du Nord, science du Sud : plaidoyer pour un rapprochement. Faruqui, Akhtar M a h m u d . (151) p. 285-296.

Relations Nord-Sud Science du Nord, science du Sud: plaidoyer

pour un rapprochement. Faruqui, Akhtar M a h m u d . (151) p. 285-296.

Responsabilité sociale La Fonction sociale de la science: cinquante

ans plus tard. Kröber, Günter. (151) p. 259-266.

Ressources naturelles L'Héritage scientifique de Vladimir Vernadski.

Yanshine, A . L . Yanshina, F . T . (151) p. 297-311.

Révolution industrielle Science et anti-science: une vieille histoire.

Dhombres , Jean. (151) p. 215-223. Robots

Le Séquençage automatique de l ' A D N et le projet de séquençage de génome humain . Labouze, Eric. (149) p. 83-92, illus.

Rougeole L'Éradication de la variole. Fenner, Frank.

(150) p. 155-167, illus. Étude et maîtrise des viroses humaines en

Chine. Z h u Ji-ming. (150) p. 143-153, illus., cartes.

Santé La Télévision peut-elle faire de la bonne

vulgarisation scientifique? Mosley, Michael. (152) p. 407-416, illus.

Santé publique Le Virus: un très grand adversaire de l ' h o m m e .

Thé , Hugues de. (150) p. 111-118, illus. Science des matériaux

Les Céramiques avancées. Juillard, Jacqueline. (149) p. 27-40, illus.

Matériaux sur mesure. W o o d , John V . (149) p. 5-14, illus.

Nouveaux matériaux, nouvelles machines. (149) p. 1-107, illus.

Science et technologie Images de la science: sa perception par le

public. (151) p. 213-314. La Science à l'épreuve de la société. Calvora,

Robert G . (151) p. 239-246. Science du Nord, science du Sud: plaidoyer

pour un rapprochement. Faruqui, Akhtar M a h m u d . (151) p. 285-296.

La Science, les scientifiques et la société: les attitudes de l'opinion publique à l'égard de la science et de la technologie. K h a n , Rahat Nabi. (151) p . 267-283.

Science, technologie et valeurs africaines. Urevbu, A n d r e w O . (151) p. 247-257.

Sciences de la terre La Science au service de l'humanité. Marchuk ,

Guri Ivanovich. (149) p. 93-104. Sciences sociales

La Science au service de l'humanité. M a r c h u k , Guri Ivanovich. (149) p. 93-104.

Les Scientifiques La Fonction sociale de la science: cinquante

ans plus tard. Kröber, Günter. (151) p. 259-266.

L'Héritage scientifique de Vladimir Vernadski. Yanshine, A . L . Yanshina, F . T . (151) p . 297-311.

SIDA Action de l'Unesco contre le S I D A . (150) p.

179-180. S I D A : une stratégie mondiale pour un défi

mondial. M a n n , Jonathan M . (150) p. 169-177, illus.

Sociétés traditionnelles Science, technologie et valeurs africaines.

Urevbu, A n d r e w O . (151) p. 247-257. Sociologie de la science

La Fonction sociale de la science: cinquante ans plus tard. Kröber, Günter. (151) p. 259-266.

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Index des matières

La Science à l'épreuve de la société. Calvora, Robert G . (151) p. 239-246.

La Science, les scientifiques et la société: les attitudes de l'opinion publique à l'égard de la science et de la technologie. K h a n , Rahat Nabi. (151) p. 267-283.

Sondages d'opinion publique La Science, les scientifiques et la société: les

attitudes de l'opinion publique à l'égard de la science et de la technologie. K h a n , Rahat Nabi. (151) p. 267-283.

Suède Le Débat public sur la science en Suède.

Dyring, Annagreta. (152) p. 345-356. Technologie de la communication

Le Laser, un outil polyvalent. Mehendale, Shrikant C . Rustagi, Kailash C . (149) p. 51-65, illus.

Technologie de l'information Le Laser, un outil polyvalent. Mehendale,

Shrikant C . Rustagi, Kailash C . (149) p. 51-65, illus.

Technologie médicale Les Matériaux de la vie. Jozefonvicz,

Jacqueline. Jozefowicz, Marcel. (149) p. 41-49, illus.

Matériaux sur mesure. W o o d , John V . (149) p. 5-14, illus.

Technologies nouvelles Les Céramiques avancées. Juillard, Jacqueline.

(149) p. 27^tO, illus. Le Laser, un outil polyvalent. Mehendale,

Shrikant C . Rustagi, Kailash C . (149) p. 51-65, illus.

Nouveaux matériaux, nouvelles machines. (149) p. 1-107, illus.

La Science au service de l'humanité. Marchuk, Guri Ivanovich. (149) p. 93-104.

Le Séquençage automatique de l ' A D N et le projet de séquençage de génome humain. Labouze, Eric. (149) p. 83-92, illus.

Télévision Expliquer la science aux sceptiques. Pockley,

Peter. (151) p. 225-237. Quelques questions touchant à la vulgarisation

scientifique. Kapitza, Sergei P . (152) p. 333-343.

La Télévision peut-elle faire de la bonne vulgarisation scientifique? Mosley, Michael. (152) p. 407-416, illus.

La Vulgarisation de la science au Danemark et les femmes. Olesen, Dorte. (152) p. 391-402, illus.

La Vulgarisation scientifique dans un m o n d e qui change. (152) p. 315-430, illus.

Transfert de technologie Des Poulets, des virus et des h o m m e s . Latif

Ibrahim, Abdul. Ideris, Aini. (150) p. 181-189, illus.

Science, technologie et valeurs africaines. Urevbu, A n d r e w O . (151) p. 247-257.

Transformation de la société La Vulgarisation scientifique dans un m o n d e

qui change. (152) p. 315-430, illus. Transformation technologique

U n e Nouvelle génération de microscopes. Galloway, John Woodhead. (149) p. 67-82,

illus. Unesco-Buts et activités

Action de l'Unesco contre le S I D A . (150) p. 179-180.

Université La Vulgarisation de la science au Danemark et

les femmes. Olesen, Dorte. (152) p. 391-402, illus.

URSS L'Héritage scientifique de Vladimir Vernadski.

Yanshine, A . L . Yanshina, F . T . (151) p. 297-311.

La Science au service de l'humanité. Marchuk, Guri Ivanovich. (149) p. 93-104.

USA Les Céramiques avancées. Juillard, Jacqueline.

(149) p. 27^U), illus. La Science, les scientifiques et la société: les

attitudes de l'opinion publique à l'égard de la science et de la technologie. Khan , Rahat Nabi. (151) p. 267-283.

Vaccination Des Poulets, des virus et des h o m m e s . Latif

Ibrahim, Abdul. Ideris, Aini. (150) p. 181-189, illus.

L'Éradication de la variole. Fenner, Frank. (150) p. 155-167, illus.

Peste bovine et peste des petits ruminants: des menaces constantes contre l'élevage dans beaucoup de pays en développement. Diallo, A d a m a . (150) p. 191-204, illus., cartes.

Le Virus de l'hépatite B . Sonigo, Pierre. (150) p. 135-141, illus., cartes.

Le Virus: un très grand adversaire de l ' h o m m e . Thé , Hugues de. (150) p. 111-118, illus.

Valeurs culturelles Science, technologie et valeurs africaines.

Urevbu, Andrew O . (151) p. 247-257. Variole

L'Éradication de la variole. Fenner, Frank. (150) p. 155-167, illus.

Vernadski, Vladimir Ivanovich L'Héritage scientifique de Vladimir Vernadski.

Yanshine, A . L . Yanshina, F . T . (151) p. 297-311.

Virologie L ' H o m m e et les virus. (150) p. 109-214, illus.,

cartes. Virus

Des Poulets, des virus et des h o m m e s . Latif Ibrahim, Abdul. Ideris, Aini. (150) p. 181-189, illus.

L'Éradication de la variole. Fenner, Frank. (150) p. 155-167, illus.

Étude et maîtrise des viroses humaines en Chine. Z h u Ji-ming. (150) p. 143-153, illus., cartes.

La Fièvre de Lassa et autres affections virales hémorragiques. Tomori, Oyewale. (150) p . 119-133, illus.

L ' H o m m e et les virus. (150) p. 109-214, illus., cartes.

Peste bovine et peste des petits ruminants: des menaces constantes contre l'élevage dans beaucoup de pays en développement. Diallo, A d a m a . (150) p. 191-204, illus., cartes.

S I D A : une stratégie mondiale pour un défi

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Index des matières

mondial. M a n n , Jonathan M . (150) p. 169-177, illus.

Les Viroses végétales et les applications de la biotechnologie. Robinson, David J. (ISO) p. 205-214, illus.

Le Virus de l'hépatite B. Sonigo, Pierre. (150) p. 135-141, illus., cartes.

Le Virus: un très grand adversaire de l 'homme. Thé, Hugues de. (150) p. 111-118, illus.

Volailles Des Poulets, des virus et des h o m m e s . Latif

Ibrahim, Abdul. Ideris, Aini. (150) p. 181-189, illus.

Vulgarisation scientifique L'Animation scientifique dans un pays africain.

Touré, Saliou. (152) p. 381-390. Le Débat public sur la science en Suède.

Dyring, Annagreta. (152) p. 345-356. Expliquer la science aux sceptiques. Pockley,

Peter. (151) p. 225-237. Faire en sorte que les scientifiques et le public

se comprennent mieux. Zhang Daoyi. (152) p. 373-380, illus.

La Presse scientifique arabe: bilan et perspectives. Mawlawi, Radwan . (152) p. 417-430.

Promotion de la science et culture scientifique. Shortland, Michael. (152)

Quelques questions touchant à la vulgarisation scientifique. Kapitza, Sergei P. (152) p. 333-343.

La Science vue par le dessinateur humoristique. Harris, Sidney. (152) p. 403-406, illus.

La Télévision peut-elle faire de la bonne vulgarisation scientifique? Mosley, Michael.

,(152) p. 407^16, illus. La Vulgarisation de la science au Danemark et

les femmes. Olesen, Dorte. (152) p. 391-402, illus.

La Vulgarisation scientifique dans un monde qui change. (152) p. 315-430, illus.

(La Vulgarisation scientifique): présentation. Coppens, Yves. (152) p. 315-318.

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IMPACT : SCIENCE ET SOCIÉTÉ, 1988

Index des auteurs

Calvora, Robert G . La Science à l'épreuve de la société. (151) p.

239-246. Coppens, Yves

(La Vulgarisation scientifique): présentation. (152) p. 315-318.

Dbombres, Jean Science et anti-science: une vieille histoire.

(151) p. 215-223. Diallo, Adama

Peste bovine et peste des petits ruminants: des menaces constantes contre l'élevage dans beaucoup de pays en développement. (150) p. 191-204, illus., cartes.

Dyring, Annagreta Le Débat public sur la science en Suède. (152)

p. 345-356. Faruquf, Akhtar M a h m u d

Science du Nord, science du Sud: plaidoyer pour un rapprochement. (151) p. 285-296.

Fenner, Frank L'Êradication de la variole. (150) p. 155-167,

illus. Calloway, John Woodhead

U n e Nouvelle génération de microscopes. (149) p. 67-82, illus.

Harris, Sidney La Science vue par le dessinateur humoristique.

(152) p. 403^*06, illus. Ideris, Aini

Des Poulets, des virus et des h o m m e s . (150) p. 181-189, illus.

Jozefonvicz, Jacqueline Les Matériaux de la vie. (149) p. 41-49, illus.

Jozefowkz, Marcel Les Matériaux de la vie. (149) p. 41-49, illus.

Julllard, Jacqueline Les Céramiques avancées. (149) p. 27-40, illus.

Kapitza, Sergei P. Quelques questions touchant à la vulgarisation

scientifique. (152) p. 333-343. Khan, Rabat Nabi

La Science, les scientifiques et la société: les attitudes de l'opinion publique à l'égard de la science et de la technologie. (151) p. 267-283.

Kroner, Günter La Fonction sociale de la science: cinquante

ans plus tard. (151) p. 259-266. Labouze, Eric

Le Séquençage automatique de l ' A D N et le projet de séquençage de génome humain. (149) p. 83-92, illus.

Latif Ibrahim, Abdul Des Poulets, des virus et des h o m m e s . (150) p.

181-189, illus.

M a n n , Jonathan M . S I D A : une stratégie mondiale pour un défi

mondial. (150) p. 169-177, illus. Marchât, Gnri Ivanorich

La Science au service de l'humanité. (149) p. 93-104.

Mawlawi, Radwan La Presse scientifique arabe: bilan et

perspectives. (152) p. 417-430. Mehendale, Shrikant C .

Le Laser, un outil polyvalent. (149) p. 51-65, illus.

Mosley, Michael La Télévision peut-elle faire de la bonne

vulgarisation scientifique? (152) p. 407-416, illus.

Olesen, Dorte La Vulgarisation de la science au Danemark et

les femmes. (152) p. 391-402, illus. Pockley, Peter

Expliquer la science aux sceptiques. (151) p. 225-237.

Robinson, David J. Les Viroses végétales et les applications de la

biotechnologie. (150) p. 205-214, illus. Rustagl, Kailash C .

Le Laser, un outil polyvalent. (149) p. 51-65, illus.

Saunier, Diane Muséologie et culture scientifique. (152) p. 357-

372, illus. Sbortland, Michael

Promotion de la science et culture scientifique. (152)

Smith, T . Fred La Supraconductivité: une révolution? (149) p.

15-25, illus. Sonigo, Pierre

Le Virus de l'hépatite B . (150) p. 135-141, illus., cartes.

Thé, Hugues de Le Virus: un très grand adversaire de l 'homme.

(150) p. 111-118, illus. Tomori, Oyewale

La Fièvre de Lassa et autres affections virales hémorragiques. (150) p. 119-133, illus.

Touré, Saliou L'Animation scientifique dans un pays africain.

(152) p. 381-390. Urevbu, Andrew O .

Science, technologie et valeurs africaines. (151) p. 247-257.

W o o d , John V . Matériaux sur mesure. (149) p. 5-14, illus.

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Index des auteurs

Yanshiu, F . T . L'Héritage scientifique de Vladimir Vernadski.

(151) p. 297-311. Yanshiae, A . L .

L'Héritage scientifique de Vladimir Vernadski. (151) p. 297-311.

Zhang Daoyi Faire en sorte que les scientifiques et le public

se comprennent mieux. (152) p. 373-380, illus. Zhu Jl-ming

Étude et maîtrise des viroses humaines en Chine. (150) p. 143-153, illus., cartes.

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IMPACT : SCIENCE ET SOCIÉTÉ, 1988

Index des titres

Action de l'Unesco contre le S I D A (150) p. 179-180.

L'Animation scientifique dans un pays africain Touré, Saliou. (152) p. 381-390.

Les Céramiques avancées Juillard, Jacqueline. (149) p. 27-40, illus.

Le Débat public sur la science en Suède Dyring, Annagrela. (152) p. 345-356.

Des Poulets, des virus et des hommes Latif Ibrahim, Abdul. Ideris, Aini. (150) p. 181-

189, illus. L'Êradication de la variole

Fenner, Frank. (150) p. 155-167, illus. Étude et maîtrise des virases humaines en Chine

Z h u Ji-ming. (150) p. 143-153, illus., cartes. Expliquer la science aux sceptiques

Pockley, Peter. (151) p. 225-237. Faire en sorte que les scientifiques et le public se

comprennent mieux Zhang Daoyi. (152) p. 373-380, illus.

La Fièvre de Lassa et autres affections virales hémorragiques Tomori, Oyewale. (150) p. 119-133, illus.

La Fonction sociale de la science: cinquante ans plus tard Kröber, Günter. (151) p. 259-266.

L'Héritage scientifique de Vladimir Vemadski Yanshine, A . L . Yanshina, F.T. (151) p. 297-311.

L ' H o m m e et les virus (150) p. 109-214, illus., cartes.

Images de la science: sa perception par le public (151) p. 213-314.

Le Laser, un outil polyvalent Mehendale, Shrikant C . Rustagi, Kailash C .

(149) p. 51-65, illus. Les Matériaux de la vie

Jozefonvicz, Jacqueline. Jozefowicz, Marcel. (149) p. 41-49, illus.

Matériaux sur mesure W o o d , John V . (149) p. 5-14, illus.

Muséologie et culture scientifique Saunier, Diane. (152) p. 357-372, illus.

Nouveaux matériaux, nouvelles machines (149) p. 1-107, illus.

Une Nouvelle génération de microscopes Galloway, John Woodhead . (149) p. 67-82, illus.

Peste bovine et peste des petits ruminants: des menaces constantes contre l'élevage dans beaucoup de pays en développement Diallo, A d a m a . (150) p. 191-204, illus., cartes.

La Presse scientifique arabe: bilan et perspectives Mawlawi, Radwan. (152) p. 417-430.

Promotion de la science et culture scientifique Shortland, Michael. (152)

Quelques questions touchant à la vulgarisation scientifique Kapitza, Sergei P. (152) p. 333-343.

La Science à l'épreuve de la société Calvora, Robert G . (151) p. 239-246.

La Science au service de l'humanité Marchuk, Guri Ivanovich. (149) p. 93-104.

Science du Nord, science du Sud: plaidoyer pour un rapprochement Faruqui, Akhtar M a h m u d . (151) p. 285-296.

Science et anti-science: une vieille histoire Dhombres , Jean. (151) p. 215-223.

La Science, les scientifiques et la société: les attitudes de l'opinion publique à l'égard de la science et de la technologie K h a n , Rahat Nabi. (151) p. 267-283.

Science, technologie et valeurs africaines Urevbu, Andrew O . (151) p. 247-257.

La Science vue par le dessinateur humoristique Harris, Sidney. (152) p. 403^06, illus.

Le Séquençage automatique de l ' A D N et le projet de séquençage de génome humain Labouze, Eric. (149) p. 83-92, illus.

S I D A : une stratégie mondiale pour un défi mondial M a n n , Jonathan M . (150) p. 169-177, illus.

La Supraconductivité: une révolution? Smith, T . Fred. (149) p. 15-25, illus.

La Télévision peut-elle faire de la bonne vulgarisation scientifique? Mosley, Michael. (152) p. 407^16, illus.

Les Virases végétales et les applications de la biotechnologie Robinson, David J. (150) p. 205-214, illus.

Le Virus de l'hépatite B Sonigo, Pierre. (150) p. 135-141, illus., cartes.

Le Virus: un très grand adversaire de l'homme Thé, Hugues de. (150) p. 111-118, illus.

La Vulgarisation de la science au Danemark et les femmes Olesen, Dorte. (152) p. 391-402, illus.

La Vulgarisation scientifique dans un monde qui change (152) p. 315-430, illus.

(La Vulgarisation scientifique): présentation Coppens, Yves. (152) p. 315-318.

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E R R A T U M

Impact N ° 153 :

Le vieillissement d'aujourd'hui pour des vieillesses de demain

Page 12, Figure 2

A u cours du stade final de l'impression, les deux illustrations de cette figure ont été inversées. N o u s prions les lecteurs de bien vouloir nous excuser de cette erreur.