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SOULET Benjamin
DES de Psychiatrie 1e semestre – année 2011-2012
CHS de Sarreguemines – IIIe Secteur
Chef de service : Dr Monique BERTE
Mémoire soutenu le 21 Mai dans le cadre de la validation du :
Séminaire de base de Psychopharmacologie et Séméiologie Psychiatrique
LE TROUBLE BIPOLAIRE DE TYPE I
M. le Professeur J-P. KAHN
M. le Professeur R. SCHWAN
M. le Docteur P. AIM
Mme. le Docteur P. KIEFFER
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Sommaire
1. Introduction / Historique (p.3)
2. Rappels théoriques (p.4)
3. Cas Clinique (p.5)
a. Motif d’hospitalisation / Anamnèse
b. Biographie / Contexte existentiel
c. Histoire de la maladie
d. A l’admission
e. Traitement / Evolution
f. Prise en charge globale
4. Conclusion (p.18)
5. Annexe (p.19)
6. Bibliographie (p.21)
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Introduction et Historique
Depuis quelques années, les troubles bipolaires connaissent un regain d’intérêt de la
part des communautés médicale et scientifique, ceci dans le but de développer une prise en
charge à la fois précoce et adaptée.
En effet, l’hétérogénéité de leurs manifestations cliniques, de leur intensité et de leur
évolution peut parfois entraîner un retard diagnostique. Cette latence s’avère d’autant plus
délétère que les troubles bipolaires impactent de manière importante la vie sociale, familiale
et professionnelle des patients qui en sont atteints.
Pourtant, il ne s’agit pas là d’une maladie récente : des écrits datant d’il y a presque
deux milles ans évoquaient déjà les notions de manie et de dépression. Un médecin romain,
Aretaeus de Cappadoce, pensait que ces troubles de l’humeur faisaient partie intégrante de la
condition humaine. Il décrivait des patients présentant des états de « tristesse et de douleur
morale » alors que ceux-ci apparaissaient aussi parfois comme « extrêmement confiants et
sociables ». En pensant que « la mélancolie représente le commencement de la manie », il est
le premier à mettre en évidence ces variations intenses, non motivées et cycliques de
l’humeur.
Ce n’est pourtant qu’au XIXe siècle que réapparait le concept d’une maladie
regroupant les deux pôles thymiques au sein d’une même entité nosographique. Jean-Pierre
Falret et Jules Baillarger, médecins aliénistes français, posent le diagnostic de maladie
bipolaire, la baptisant respectivement « folie circulaire » et « folie à double forme ».
C’est ensuite un psychiatre allemand, Emil Kraepelin, qui, après avoir observé
l’évolution de nombreux patients, séparera la démence précoce (actuelle schizophrénie) de ce
qu’il dénommera désormais « la folie maniaco-dépressive ».
Depuis lors, nos connaissances sur ce qu’on appelle aujourd’hui la maladie bipolaire
n’ont eu cesse d’évoluer, voire de se complexifier par l’introduction d’autres formes cliniques
(notamment le TBP-II avec Dunner et Goodwin) ou la création du « spectre bipolaire » avec
Akiskal.
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Rappels théoriques
Ce mémoire se devant d’être avant tout une description clinique, il ne s’agit pas ici de
détailler finement l’ensemble des aspects du trouble bipolaire de type I, mais simplement d’en
exposer les fondements.
Selon la définition donnée par le DSM-IV-TR et la CIM-10, les troubles bipolaires
font partie des troubles de l’humeur, au même titre que la dépression et la dysthymie.
Pourtant, le DSM-V devrait voir cette organisation revue, en plaçant la maladie bipolaire à
mi-chemin entre les troubles de l’humeur « vrais » et les psychoses chroniques [1] ; comme
semblait l’indiquer l’ancienne dénomination de « psychose maniaco-dépressive ».
L’OMS indique qu’il s’agit d’une des dix maladies les plus coûteuses sur le plan
mondial [2], celle-ci ayant une prévalence d’environ 1% et étant potentiellement source d’une
invalidité à long terme. Enfin, par son début précoce et son retentissement socioprofessionnel,
la maladie bipolaire apparaît comme un enjeu majeur de santé publique.
Le trouble bipolaire se caractérise donc par l’enchainement d’épisodes dépressifs et
d’exaltation de l’humeur. Son premier type, sujet de ce mémoire, est défini par la présence de
véritables accès maniaques ou par la manifestation d’épisodes mixtes. Il présente ainsi la
symptomatologie la plus bruyante et reste typique de l’image que véhicule la maladie auprès
du grand public. A noter que le trouble bipolaire de type I ne nécessite qu’un unique accès
maniaque caractérisé afin d’être diagnostiqué. De même qu’un état mixte suffit à lui seul pour
faire entrer le patient dans cette catégorie de trouble. Par la suite, pourront s’enchaîner : état
dépressif majeur, mineur, manie, hypomanie ou état mixte.
Sa prise en charge ne sera pas développée ici, mais reste globale, comme souvent en
psychiatrie. Après un traitement curatif rapide, elle repose systématiquement sur une
thymorégulation allopathique obtenue par le Lithium, un anticonvulsivant ou un
antipsychotique. S’y associent fréquemment, les versants psychothérapique et social afin
d’aider au mieux les patients dans leur vécu de la maladie.
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Cas Clinique
Motif d’hospitalisation / Anamnèse Madame S. est admise dans notre service pour décompensation d’une maladie
bipolaire sur un versant maniaque.
Il s’agit d’une patiente de 63 ans connue du service, suivie de longue date au Centre
Médico-Psychologique de Forbach. Avant son hospitalisation au sein de notre pavillon du
Centre Hospitalier Spécialisé de Sarreguemines, Madame S. est stabilisée depuis presque 3
ans, son dernier épisode thymique datant de Juin 2009.
Le 10 Janvier dernier, son psychiatre traitant la voit en consultation au CMP au
décours d’une hospitalisation pour embolie pulmonaire à l’Hôpital Marie Madeleine de
Forbach. La trouvant euthymique sous antipsychotique, il décide d’effectuer une tentative
d’arrêt progressif de son traitement par Acide Valproïque / DEPAKOTE ® 500 mg 2 cp
matin et soir ; molécule qu’elle prend depuis 8 ans.
Deux mois plus tard, le 14 Mars, alors qu’une visite à domicile est prévue, Madame S.
reste injoignable par téléphone. Lorsque les infirmières se présentent, elle apparaît agitée.
Après que Madame S. leur ai ouvert sa porte, l’équipe soignante découvre un appartement
insalubre et sans dessus dessous.
Malgré une certaine irritabilité, Madame S. accompagne les infirmières au CMP afin
d’être évaluée par son psychiatre traitant. Son hospitalisation est alors décidée pour le jour-
même et Madame S l’accepte sans aucun problème…
Son traitement à l’admission comporte alors :
- Olanzapine / ZYPREXA ® velotab 20 mg : 1 cp le soir
- Escitalopram / SEROPLEX ® 10 mg : 1 cp le matin
- Levothyroxine sodique / LEVOTHYROX ® 75 µg : 1 cp le matin
- Fluindione / PREVISCAN ® 20 mg : 0,75 cp le matin
- Lactulose / DUPHALAC ® 10 g/15 mL : 2 sachets le matin
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Biographie / Contexte existentiel Madame S. est née le 12 Novembre 1948 à Stiring Wendel d’un père mineur et d’une
mère couturière. Elle a alors déjà une sœur de 2 ans son aînée. Madame S. dépeint un climat
familial difficile, principalement lié aux problèmes relationnels avec sa mère. Cette dernière
présenterait en effet une tendance à la dysthymie et ne manifesterait à ses filles que peu
d’affection. A contrario, son père apparaît comme un homme aimant et courageux. Il est
d’ailleurs très présent durant nos entretiens. Madame S. se plait à me raconter ses faits de
guerre et de résistance, notamment la fois où il a dû partir plusieurs semaines de la maison
pour se cacher des allemands, et cela sans dire un mot à sa femme afin de la protéger.
Suite à un accident qui amputera sa mère des deux jambes, Madame S passera six
années au pensionnat de Fenêtrange. Les souvenirs qu’elle en garde semblent avoir été
traumatiques, si bien qu’elle ne souhaite pas trop en parler. Tout en gardant une certaine
pudeur, Madame S. me raconte quelques mauvais traitements administrés par la sœur en chef
: elle l’aurait par exemple forcée à finir les assiettes des autres pensionnaires, à nettoyer seule
les communs ainsi qu’à dormir sans couverture en plein hiver.
Sur le plan professionnel, Madame S. est détentrice du certificat d’étude. Son
éducation a été rendue difficile à partir de 16 ans, suite à la déclaration de sa maladie
bipolaire, et elle regrette amèrement aujourd’hui ne pas avoir pu faire des études d’infirmière,
métier qu’elle estime grandement. Elle fera d’ailleurs à toute l’équipe soignante de nombreux
compliments sur son courage et sa dévotion.
Elle a donc un temps aidé à la confection de chapeaux dans un petit magasin de
Forbach avant de partir en Allemagne à l’âge de 21 ans. C’est là qu’elle a travaillé à l’hôpital
du Sonnenberg en tant que « femme de salle », un poste à mi-chemin entre aide soignante et
agent de surface. Une fois de plus, cette année sera pour elle source de souffrances
puisqu’après des mois d’harcèlement moral, un kinésithérapeute finira par la violer à deux
reprises. Elle me confiera que connaître ses premières relations sexuelles dans un tel contexte
l’a rendu « différente d’une femme qui se donne par amour ».
Enfin, elle finira par exercer quelques années comme serveuse avant d’épouser son
mari, Raymond, à l’âge de 23 ans.
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Alors qu’on pourrait s’attendre à une certaine instabilité sur le plan sentimental,
Madame S. n’a toujours été la femme que d’un seul homme. Elle reste très secrète sur les
circonstances de leur rencontre, mais avoue sans mal avoir profondément aimé cet homme
malgré son alcoolisme chronique grandissant au fur et à mesure des années de vie commune.
Leur relation était faite, selon ses dires, « de haut et de bas » et c’est à cause de la pathologie
de son mari qu’aujourd’hui Madame S. n’a pas d’enfant. A son grand désarrois d’ailleurs. Ce
n’est qu’en 2008, quelques mois avant la mort de Raymond d’un cancer de la gorge et après
qu’il lui ai demandé « de trouver quelqu’un de bien », qu’elle se décide à construire une
relation plus saine.
Fin 2009, elle rencontre Bernard, son ancien voisin de pallier. Elle le décrit comme un
homme « exceptionnel » qui lui fait vivre « des choses qu’elle n’aurait jamais cru vivre à son
âge. ».
Aujourd’hui, Madame S. a donc 63 ans. C’est une femme sans enfant. Elle vit à
Forbach dans un appartement avec ses deux perruches Choupette et Coco. Sa relation avec
Bernard est toujours aussi idyllique bien que, fière de son indépendance, elle ne souhaite pas
vivre avec lui. Depuis la mort de son père d’une leucémie, elle s’occupe de sa mère
handicapée et n’a plus aucun contact avec sa sœur aînée. Madame S. s’efforce d’essayer de
prendre du recul par rapport à ces relations complexes. Enfin, elle est très soutenue par son
amie Corinne, qu’elle appelle affectueusement « sa secrétaire personnelle », celle-ci l’aidant
beaucoup dans les tâches administratives. Sur le plan financier, elle ne touche pas de retraite
mais bénéficie de l’APA et l’AAH.
La vie de Madame S. apparaît donc comme difficile, emmaillée de situations traumatiques et
d’un vécu relationnel complexe. Elle reste cependant d’une nature optimiste, gaie,
chaleureuse et confiante avec des réactions tantôt naïves tantôt espiègles. Madame S. semble
donc manifester les critères du tempérament hyperthymique décrit par Akiskal [3].
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Histoire de la maladie Octobre 1965 : à l’âge de 16 ans, Madame S. présente l’accès maniaque inaugural de
sa maladie bipolaire de type I.
Elle participe alors à un bal avec l’insouciance des jeunes filles de son âge. C’est suite
à un traumatisme d’ordre sexuel que se déclencha son premier « pétage de plomb ». Elle
raconte alors : « J’ai peur des hommes. Il y en a un qui m’a frotté une fois. Il fumait la pipe.
Cela s’est passé à Forbach à l’occasion d’une fête. C’était un vieux. Sa pipe sentait fort. ».
Lorsqu’elle est ramenée par l’ambulance au CHS de Sarreguemines, elle est exaltée,
agitée sur le plan psychomoteur, avec une tension interne majeure et présente une logorrhée.
Elle exprime de plus des idées délirantes de type imaginatif et de thématiques principalement
mystique et sexuelle. Elle dira par exemple : « Le diable est à côté de nous. Cette nuit il
soufflait, je l’entendais. Une fois il a mis sur mon corps un liquide froid qui s’écoulait de
partout. » ou « Samedi soir au bal, le trompettiste dirigeait et moi j’étais la musique qu’il
recherchait. ».
Le traitement de l’époque consista en une combinaison de Chlorpromazine /
LARGACTIL ® 50 gttes matin, midi et soir (soit 150 mg) et d’Halopéridol / HALDOL ® 50
gttes matin, midi et soir (soit 15 mg). Cette première hospitalisation s’achèvera en Mars 1966.
Détailler ensuite toutes les hospitalisations ne serait pas forcément très utile ici, Madame S.
ayant présenté dix décompensations thymiques diverses et variées entre 1969 et 1993.
Cependant, quelques points intéressant se dégagent lorsqu’on parcourt son dossier :
- en Novembre 1976, l’observation est évocatrice de son premier état mixte,
le médecin décrivant « un état d’agitation avec phases dépressives ».
- le traitement par TERALITHE ® sera instauré plus tard, en Juin 1980, à la
dose de 250 mg matin, midi et soir.
- Madame S. se présente la quasi-totalité du temps à l’hôpital d’elle-même,
et ne semble donc que rarement anosognosique de son état. De plus, elle
manifeste souvent des idées délirantes, toujours à caractère mystique et
sexuel. Celles-ci étant régulières et n’apparaissant pas congruentes à son
humeur, les psychiatres qui en ont la charge craignent une potentielle
entrée en schizophrénie.
- enfin, aucune notion de tentative de suicide n’est retrouvée.
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En Septembre 1993, Madame S. rentre à nouveau chez elle. Sa maladie bipolaire
restera stabilisée pendant plus de 10 ans, puis…
Août 2004 : Madame S. est prise en charge en hospitalisation libre suite à une
modification de son traitement thymorégulateur. En effet, 4 mois plus tôt, elle présente un
nodule toxique thyroïdien sous TERALITHE ® 250 mg 2 cp matin et soir. Une opération
chirurgicale étant prévue, et bien qu’une hypothyroïdie sous Lithium ne soit pas une contre-
indication à la poursuite du traitement [2], la décision est prise d’un switch vers l’Olanzapine /
ZYPREXA ® 7,5 mg 1 cp le soir.
Elle présente lors de l’admission tous les signes d’une rechute maniaque : une
expansivité de l’humeur, une excitation psychomotrice majeure avec distractibilité et
théâtralisme. L’adaptation thérapeutique consiste d’abord en une augmentation du ZYPREXA
® à 10 mg, auquel s’adjoint une anxiolyse par Lorazepam / TEMESTA ® 1 mg 1 cp matin,
midi et soir. Madame S. étant très agitée et imprévisible, une décision de mise en cellule
d’isolement avec la pose d’entraves s’avère nécessaire.
Devant la majoration des symptômes maniaques avec l’apparition d’idées délirantes,
un second thymorégulateur est prescrit : de l’Acide Valproïque / DEPAKOTE ® 500 mg 1 cp
matin, midi et soir. Aucun dosage biologique n’est retrouvé dans le dossier, mais face à une
sédation trop importante, l’équipe médicale diminue le DEPAKOTE à 1 cp matin et soir.
Madame S. rentre à domicile le 29 Septembre avec l’ordonnance de sortie suivante :
ZYPREXA ® 10 mg 1 cp le soir ; DEPAKOTE ® 500 mg 1 cp matin et soir ;
LEVOTHYROX ® 75 µg 1 cp le matin.
Avril 2005 : Madame S. se présente d’elle-même au pavillon car elle se sent agacée
par son mari qu’elle dit « 100% alcoolique » et qui lui demande « des choses dégoûtantes ».
L’examen psychiatrique dénote une labilité franche de l’humeur, la patiente naviguant d’une
gaieté puérile à une tristesse sans consistance. Le tempo psychomoteur est de nouveau
évocateur d’un état mixte : Madame S. semble ralentie, ressasse à voix basse les histoires
tristes de son passé et manifeste une pauvreté gestuelle. Au contraire, elle apparaît quelques
minutes plus tard agitée, se lève sans raison et présente un discours empreint de coq-à-l’âne.
Aucune intentionnalité suicidaire ni aucune idée délirante ne sont exprimées par ailleurs.
Enfin, il est intéressant de noter que Madame S. a arrêté d’elle même son traitement
par LEVOTHYROX ®, le dosage biologique confirmant ses dires en retrouvant une TSH
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augmentée. Cette anomalie hormonale aurait-elle favorisé la symptomatologie mixte que
présente la patiente, en ajoutant une note dépressive à cette décompensation maniaque ?
Cette hospitalisation nécessitera la majoration des posologies des deux molécules à
visée thymorégulatrice à savoir : ZYPREXA ® 10 mg 2 cp le soir (soit la dose maximale
recommandée) et DEPAKOTE ® 500 mg 1 cp matin, midi et soir (aucun dosage biologique
n’a été retrouvé). Suite à cette adaptation, Madame S évolue peu à peu vers l’euthymie et peut
donc sortir le 08 Juin.
Mai 2007 : Madame S. est hospitalisée pour « état mixte ». Malheureusement, les
observations étant très pauvres, il est impossible de détailler l’expression clinique de celui-ci
ni le déroulement du séjour de la patiente. Cependant, c’est lors de cette hospitalisation qu’a
été mis en place son traitement antidépresseur par Escitalopram / SEROPLEX ® 10 mg 1 cp
le matin, molécule qu’elle gardera ensuite plus de 4 ans, et ce malgré les recommandations de
bonne pratique [3].
Février 2008 : Cette fois, c’est suite à l’environnement conjugal délétère dans lequel
elle évolue que Madame S. est hospitalisée. La situation avec son mari se dégrade : il passe
ses journées à boire et ne souhaite pas être pris en charge médicalement. Cette relation
épuisante fait craindre une décompensation, d’autant que certains affects dépressifs
commencent à apparaître. Madame S. ne présentant pas de dépression caractérisée, et son
séjour étant entrepris dans un but « prophylactique », son traitement reste inchangé. Cette
hospitalisation sera toutefois pour elle l’occasion de prendre la décision de se séparer de
Raymond, suite à quoi elle habitera un temps au Foyer Espoir de Sarreguemines.
Juin 2009 : Nouvelle décompensation sur un versant d’allure mixte, Madame S.
présentant une humeur exaltée contrastant avec un ralentissement psychomoteur. Elle
rapporte une insomnie sans fatigue et semble passer ses nuits en larmes. Enfin, elle exprime
ses habituelles idées délirantes et pense notamment «qu’elle a du sang indien dans les veines
et que les indiens pleurent la nuit. ».
Il n’existe que peu d’éléments probants dans son dossier, mais il semblerait que cet
épisode soit rapidement résolutif après la majoration de son traitement thymorégulateur par
DEPAKOTE ® 500 mg 2 cp matin et soir. L’hospitalisation sera courte est ne durera qu’une
quinzaine de jours.
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A l’admission
Entretien psychiatrique : Lorsqu’elle rentre dans mon bureau, Madame S. se montre
tout de suite exaltée. Elle sourit, ses mimiques sont hyperexpressives, disproportionnées et
elle rigole en me saluant. L’équipe infirmière et moi-même sommes la cible de quelques
boutades et piques sans gravité, Madame S. n’allant jamais jusqu’à l’insulte. Puis elle s’assoie
et lorsque je lui tends la main, elle sursaute sur sa chaise et semble presque offensée. Son
contact est donc familier, mais sa présentation reste sans particularité ; sa tenue est celle d’une
femme de son âge et seul dénote un maquillage légèrement insolite et des bijoux en nombre.
Avant même que je lui demande la raison de sa venue et avant de s’être installée,
Madame S. me raconte qu’elle ne va pas bien, qu’elle a « pété un plomb » puis rajoute
« qu’elle n’est pas malade, qu’elle vient pour une anémie ; la même maladie que Michel
Drucker ». Son discours est extrêmement décousu et par essence presque impossible à
comprendre. Madame S. ne parle pas de manière accélérée mais elle ne termine parfois pas
ces phrases. Elle est incapable de répondre clairement à mes questions. Ses propos, diffluents
et digressifs, perdent inlassablement leur sens d’origine pour s’attacher sans cesse à un autre
sujet. Elle use de jeux de mots, aime à faire des rimes et se met parfois à parler allemand en
plein milieu d’une phrase. Elle m’explique tout de même ne pas dormir ni manger depuis
plusieurs jours et avoir acheté beaucoup de chocolats pour « tous les gens qu’elle aime ».
Chocolats qu’elle a d’ailleurs ramenés avec elle dans le service.
Durant tout l’entretien, son comportement moteur s’avère très imprévisible. Madame
S. ne tient pas en place. Elle se lève à plusieurs reprises, joue avec le câble du téléphone,
regarde brusquement par la fenêtre… Elle est aussi capable de s’agiter de manière inopinée et
sans raison apparente : elle crie et fait de grands gestes pour se calmer aussitôt quelques
secondes plus tard.
Enfin, elle n’exprime aucune idée suicidaire, se disant « heureuse de vivre et d’être à
l’hôpital où elle se sent bien ». Elle ne manifeste pas anxiété. Aucun élément délirant ni aucun
signe de dissociation psychotique ne sont mis en évidence par ailleurs.
L’analyse sémiologique retrouve donc l’ensemble des symptômes d’un état maniaque
caractérisé, en touchant les principaux axes qui sont [4] :
- l’humeur avec une exaltation, une expansivité et une désinhibition.
L’hyperréactivité et la labilité émotionnelles sont aussi patentes. Enfin on
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note une hypersyntonie. Il n’existe cependant pas d’augmentation de
l’estime de soi ni de sentiment de supériorité.
- les processus cognitifs sans franche tachypsychie mais avec un discours
logorrhéique et diffluent. Les coq-à-l’âne sont nombreux, les associations
sont relâchées et la fuite des idées est manifeste. Une certaine familiarité
est de plus présente avec tendance au ludisme. Enfin, des troubles de
l’attention sont mis en évidence à savoir une distractibilité secondaire à une
hypervigilance.
- la composante motrice est marquée par une agitation fluctuante mais bien
réelle sans pour autant atteindre l’agressivité. Cette hyperactivité est
cependant sans but et apparaît donc stérile. De plus, on note une tendance
aux achats pathologiques.
- la modification du contenu des pensées est source d’un franc optimiste.
L’anosognosie n’est cependant pas totale, puisque la patiente est
partiellement consciente de son état (comme depuis toujours, et ce même
en période de décompensation).
- les fonctions instinctuelles sont troublées par une insomnie sans fatigue ;
l’anorexie, elle, ne faisant pas partie en tant que telle du tableau maniaque.
Examen somatique : afin d’éliminer toute pathologie intercurrentes à même
d’expliquer l’épisode actuel et d’évaluer son retentissement sur l’état physique de Madame S.,
un examen somatique est réalisé. Il ne retrouve aucune anomalie :
- sur le plan cardiovasculaire : les bruits du cœurs sont réguliers sans souffle
audible, les pouls périphériques sont perçus et il n’existe aucun signe de
thrombose veineuse profonde.
- sur le plan pulmonaire : le murmure vésiculaire est bilatéral et symétrique
sans bruit surajouté. Il n’existe ni dyspnée, ni toux, ni expectoration.
- sur le plan digestif : l’abdomen est pléthorique, souple, dépressible,
indolore et sans masse palpable. Il existe une constipation chronique
d’ordre iatrogène.
- sur le plan neurologique : aucun déficit sensitivomoteur n’est retrouvé, les
paires crâniennes sont sans particularité et les réflexes présents et
symétriques.
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A noter enfin que les antécédents de Madame S. ne sont dominés que par une embolie
pulmonaire sous anticoagulant, une hypothyroïdie supplémentée et une anémie bien tolérée en
cours de bilan par son médecin traitant. De plus, son tabagisme est sevré depuis une dizaine
d’années.
Examens paracliniques : toujours dans un but d’élimination des différents diagnostics
différentiels, on réalise un bilan biologique standard à la recherche d’un trouble métabolique :
NFS, VS/PCR, INR, glycémie, ionogramme sanguin, bilan rénal et hépatique, TSH, calcémie,
cholestérol total et triglycérides. Aucune anomalie n’est mise en évidence, hormis une anémie
connue à 10,5 g/L.
Aucun bilan toxicologique ni aucune sérologie n’ont été réalisé, Madame S. n’ayant
aucune conduite à risque ni aucune addiction connue. De plus, la dépakinémie n’a pas été
dosée, le traitement ayant été arrêté il y a deux mois le taux sérique aurait de toute façon été
faible. Pour finir, aucun scanner cérébral n’est indiqué étant donné le diagnostic posé de
longue date.
Au total : lors de son admission dans notre service, Madame S. présente un accès
maniaque. Celui-ci décompense sa maladie bipolaire de type I à la suite de l’arrêt de son
traitement thymorégulateur.
La quasi-totalité des diagnostics différentiels ont été éliminés. L’épisode
hypomaniaque ne fait pas sens devant l’intensité des symptômes menant à l’hospitalisation.
Vient ensuite l’épisode maniaque induit par la prise de substance ou par une une affection
médicale générale ; mais l’anamnèse, les antécédents, l’examen clinique et le bilan biologique
ne retrouve ici aucune anomalie significative à même de nous orienter. L’épisode psychotique
aigu, lui, n’est pas évoqué devant l’absence de délire manifeste.
Il ne reste donc que l’état mixte, que Madame S. a déjà présenté par le passé. Mais à
ce moment, aucun élément clinique ne plaide en sa faveur, hormis peut être l’anorexie…
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Traitement / Evolution
Il s’agit d’une urgence thérapeutique. Pour rappel, le traitement de Madame S.
comporte à son arrivée :
- Olanzapine / ZYPREXA ® velotab 20 mg : 1 cp le soir
- Escitalopram / SEROPLEX ® 10 mg : 1 cp le matin
- Levothyroxine sodique / LEVOTHYROX ® 75 µg : 1 cp le matin
- Fluindione / PREVISCAN ® 20 mg : 0,75 cp le matin
- Lactulose / DUPHALAC ® 10 g/15 mL : 2 sachets le matin
La première décision prise fut d’arrêter le traitement par SEROPLEX ®, les
antidépresseurs étant contre-indiqués en cas de symptomatologie maniaque d’une maladie
bipolaire (connue ou non) [5]. De plus, les troubles du sommeil ont motivé la prescription de
Zopiclone / IMOVANE ® 7,5 mg 1 cp au coucher si besoin.
Nous avons aussi réfléchi à la modalité d’hospitalisation. L’anosognosie de Madame
S. nous a posé la question de son maintien en hospitalisation libre. Au vu de la coopération de
la patiente, de son adhérence aux soins et de son histoire clinique, nous n’avons pour le
moment pas modifié cette mesure.
La première nuit fut agitée. Lorsque je vois un autre patient lors de ma garde, Madame
S. chante la marseillaise à moitié nue dans le couloir alors qu’elle s’était endormie en
première partie de nuit. Elle dérange les autres patients mais un rapide recadrage ainsi que la
prise de son hypnotique en si besoin permettent de faire revenir le calme dans le service.
Le lendemain dans la journée, elle manifeste une agitation majeure et une agressivité
verbale envers le personnel qui n’arrive plus à la contenir. Devant le risque d’un passage à
l’acte ou d’une rupture thérapeutique, le PH du service décide donc le 15 Mars d’une mise en
CSI mais ceci sans adjoindre de traitement supplémentaire. Madame S. ne nécessite en effet
pas d’être mise sous entraves et ne manifeste aucune anxiété patente, le cadre de la chambre
d’isolement semblant suffisant pour la calmer. Cependant, la mise en CSI correspondant à une
privation de liberté, et étant strictement interdite pour les patients en hospitalisation libre, une
mise sous le régime des soins sous contrainte à la demande d’un tiers selon l’article L. 3212-1
du Code de Santé Publique est décidée. Son compagnon Bernard est joint par téléphone.
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Après qu’il est reçu l’explication du caractère protecteur et nécessaire d’une telle prise en
charge, il accepte de venir signer le certificat de tiers.
Lorsque je la vois en isolement le lendemain, au matin du 16 Mars, l’état clinique de
Madame S. s’est dégradé : elle reste volcanique sur le plan comportemental et avec un
discours diffluent. Cependant, celui-ci s’avère aujourd’hui ralenti, avec un temps de latence et
des réponses toujours brèves. Madame S. reste figée une partie de l’entretien dans son lit,
cachée sous les couvertures, puis rigole avec moi en me faisant mille compliments. Elle
exprime de surcroit des idées délirantes de type imaginatif, centrées sur la guerre et le
Diable, auxquelles se mêlent des éléments biographiques : « Vous êtes russe ? Parce que les
russes vont revenir pour faire la guerre froide. Papa m’avait dit de faire attention,
maintenant je suis en enfer et le Diable me regarde. ». A noter que Madame S. n’exprime
toujours pas d’idée suicidaire ni de franche anxiété par ailleurs.
Devant cette labilité émotionnelle exacerbée, l’apparition d’un ralentissement
psychomoteur et d’idées délirantes non congruentes à l’humeur, nous réévaluons notre
diagnostic et envisageons la possibilité d’une décompensation sur un mode mixte [6][7]. En
effet, Kraepelin décrivait les épisodes thymiques de manière dimensionnelle sur trois axes :
l’humeur (ou la réactivité émotionnelle), l’activité motrice et la sphère idéique. Il caractérisait
ainsi les états mixtes lorsque ces trois axes n’étaient pas congruents entre eux [3]. Ici,
Madame S. présente une excitation des deux premiers axes, associée à une inhibition du
troisième. Si le concept d’état mixte est encore flou et trop restrictif au regard du DSM, il
paraissait intéressant d’en parler rapidement de manière plus conceptuelle ici, la
symptomatologie de Madame S. n’étant pas typique et se rapprochant d’une « manie avec
pauvreté du discours » [4].
Devant l’évolution défavorable de la symptomatologie en l’espace de deux jours, nous
avons donc réintroduit un traitement par DEPAKOTE ® 500 mg 1 cp matin et soir, cette
molécule ayant été efficace par le passé et son action étant de surcroit meilleure sur les états
mixtes [8]. Un contrôle du taux sérique d’acide valproïque est prescrit 4 jours plus tard.
Durant cette période de 4 jours, la progression des symptômes de Madame S. est
apparu satisfaisante. Le premier élément clinique en faveur d’une régression de sa
symptomatologie fut la récupération d’un sommeil acceptable, d’abord avec la prise
d’IMOVANE puis de manière naturelle avec le temps. Elle est de surcroit moins agitée et ne
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manifeste plus aucun trouble du comportement. Ainsi, le 18 Mars, la mesure d’isolement
passe en séquentielle.
Le 20 Mars, le taux sérique sanguin d’acide valproïque revient à 50 mg/L. Bien qu’à la
limite basse de la fourchette thérapeutique, Madame S. reste hypomane. Nous avons donc
majoré le DEPAKOTE ® à 500 mg matin, midi et soir. De plus, six jours après l’arrêt du
SEROPLEX ®, Madame S. ne manifeste aucun symptômes de sevrage, notamment pas de
vertiges, de paresthésies, de nausées / vomissements ni de rechute sur un versant dépressif.
Son état clinique ne nécessitant plus d’isolement, et Madame S. n’ayant pas présenté de
décompensation suite au passage en isolement séquentiel, elle regagne donc sa chambre le 22
Mars.
Suite à cette seconde adaptation thérapeutique, le taux sanguin est toujours dans la
norme à 80 mg/L et le bilan hépatique prescrit est sans particularité. Par contre, Madame S.
manifeste une sédation après la prise du comprimé à midi. Après avoir appris que le schéma
d’administration du DEPAKOTE ® s’effectuait plutôt en deux doses le matin et le soir [8], la
répartition s’est faite ainsi : DEPAKOTE ® 500 mg 1 cp matin et soir + DEPAKOTE ® 250
mg 1 cp matin et soir. Suite à cette adaptation, Madame S. ne se plaindra plus de somnolence
post prandiale. Aucun autre effet indésirable (gastro-intestinal, tremblements, alopécie) ne
sera mis en évidence.
Sur le plan de la symptomatologie, la deuxième grande avancée consiste en la
disparition des troubles de l’attention et de l’hypervigilance, survenue vers la fin Mars.
Madame S. est plus présente, dans le contact et apparaît moins éparpillée.
Les derniers stigmates de la décompensation de cette maladie bipolaire de type I
porteront sur le discours et l’expression orale de Madame S. Ils mettront environ deux
semaines à s’améliorer. Nos entretiens s’avèreront de plus en plus facile et instructifs le temps
passant. Les échanges avec Madame S. deviennent construits et compréhensibles à mesure
que la diffluence disparaît. Elle fait preuve d’une remarquable prise de recul sur son état en
me disant : « Je suis capable de discuter avec vous et l’on se comprend. C’est que je vais
mieux docteur. », prouvant ainsi la disparition de son anosognosie.
Elle retournera donc à son état d’équilibre aux alentours de la mi-Avril. Les soins à la
demande d’un tiers sont alors levés afin de lui octroyer une permission d’essai. Madame S.
retrouve Bernard, Corinne, Choupette et Coco. Tout se passe très bien à domicile et sa sortie
définitive lui est donc accordée le 23 Avril, son suivi au CMP restant inchangé.
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Seul persiste son tempérament hyperthymique. Madame S. est rigolarde et blagueuse.
Elle s’avère toujours extravertie voire entreprenante envers moi en m’offrant un livre avant
son départ. Ses réactions restent parfaitement adaptées et n’atteignent jamais une intensité
hypomane.
Prise en charge globale
Psycho-éducation : l’hospitalisation aura été l’occasion de renforcer l’alliance
thérapeutique et de rappeler à Madame S. les tenants et les aboutissants de sa pathologie,
même s’il s’est avéré qu’elle était déjà correctement informée. Nous avons insisté sur la
chronicité et l’incurabilité de son trouble, ainsi que la nécessité d’une observance parfaite afin
de prévenir toute décompensation. Ensuite, nous lui avons indiqué quelques mesures hygiéno-
diététiques comme un rythme de vie régulier et l’éviction des substances ou médicaments
maniacogènes (café et corticoïdes par exemple). Enfin nous lui avons appris à reconnaître les
signes annonciateurs d’une décompensation.
Ergothérapie et sorties thérapeutiques : Madame S. a bénéficié d’une prise en charge
ergothérapique dans divers ateliers (agrafes, mosaïque, sport) ce qui semble l’avoir aidé dans
son mieux vivre. De plus, elle a participé à une sortie thérapeutique à Sarreguemines avec
d’autres patients, ce qui lui a beaucoup plus et nous a permis d’envisager la sortie de façon
graduelle.
Versant social : notre assistante sociale a veillé à ce que Madame S. n’ai pas besoin
d’une sauvegarde de justice dans le cadre de dépenses pathologiques. Elle s’est aussi assurée
que l’Allocation pour la Personne Agée et l’Allocation Adulte Handicapé étaient toujours
accessibles à notre patiente.
Suivi somatique : enfin, il a fallu réajuster le traitement anticoagulant de Madame S.
Celui-ci apparaissait surdosé avec une posologie de PREVISCAN ® 20 mg à 0,75 cp le
matin. Son INR s’est ensuite stabilisé dans la norme après avoir adjoint 0,5 cp le matin en
alternance. Aucun autre problème d’ordre somatique n’est venu troubler son séjour par
ailleurs.
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Conclusion
Le cas de cette patiente parait intéressant par la représentation des différents aspects
du trouble bipolaire de type I. Il témoigne tout d’abord du caractère à la fois hétérogène et
typique de la symptomatologie. En effet, Madame S., bien que produisant un tableau atypique
évocateur d’états mixtes à répétition, conserve une certaine « cohérence séméiologique » au
fil des ans. A l’image de ce qui a déclenché sa maladie, ses décompensations sont souvent
secondaires à un événement à caractère sexuel. Et dans ses délires, elle garde des thématiques
qui ont impacté son existence comme la religion, le sexe ou la guerre. Bien que restant peu
étudiés, les évènements de vie stressants, en particulier ceux ayant attrait aux relations
interpersonnelles, semblent avoir une conséquence directe sur la genèse et le développement
de la maladie bipolaire. Ceux-ci étant d’autant plus délétères lorsqu’ils surviennent tôt [10].
De plus, le tempérament de Madame S., bien qu’insolite, décalé et à la limite de l’hypomanie,
s’avère pour elle garant de sa qualité de vie et doit donc être respecté. La situation
existentielle de cette patiente est d’ailleurs porteuse d’espoir, puisqu’après 50 ans de
bipolarité, Madame S. est aujourd’hui heureuse et sereine. Enfin, son anamnèse illustre
l’inutilité de la prescription d’antidépresseur pour soigner un état mixte ainsi que de la
dangerosité potentielle découlant de l’arrêt des thymorégulateurs qui l’avaient stabilisée
pendant plusieurs années.
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Annexe
Critères diagnostiques de l’Episode Maniaque selon le DSM-IV-TR [9] :
A. Une période nettement délimitée durant laquelle l’humeur est élevée de façon
anormale et persistante, pendant au moins une semaine (ou toute durées si une
hospitalisation est nécessaire
B. Au cours de cette période de perturbation de l’humeur, au moins 3 des symptômes
suivants (4 si l’humeur est seulement irritable) ont persisté avec une intensité
suffisante :
1. augmentation de l’estime de soi ou idées de grandeur
2. réduction du besoin de sommeil
3. plus grande communicabilité que d’habitude ou désir de parler constamment
4. fuite des idées ou sensations subjectives que les pensées défilent
5. distractibilité
6. augmentation de l’activité orientée vers un but (social, professionnel, scolaire
ou sexuel) ou agitation psychomotrice
7. engagement excessif dans des activités agréables mais à potentiel élevé de
conséquences dommageables
C. Les symptômes ne répondent pas aux critères d’un Episode Mixte
D. La perturbation de l’humeur est suffisamment sévère pour entraîner une altération
marquée du fonctionnement professionnel, des activités sociales ou des relations
interpersonnelles, ou pour nécessiter l’hospitalisation afin de prévenir des
conséquences dommageables pour le sujet ou pour autrui, ou bien il existe des
caractéristiques psychotiques.
E. Les symptômes ne sont pas dus aux effets physiologiques directs d’une substance ou
d’une affection médicale générale.
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Critères diagnostiques de l’Episode Mixte selon le DSM-IV-TR [9] : A. Les critères sont réunis à la fois pour un Episode Maniaque et pour un Episode
Dépressif Majeur, et cela presque tous les jours pendant une semaine.
B. La perturbation de l’humeur est suffisamment sévère pour entraîner une altération
marquée du fonctionnement professionnel, des activités sociales ou des relations
interpersonnelles, ou pour nécessiter l’hospitalisation afin de prévenir des
conséquences dommageables pour le sujet ou pour autrui, ou bien il existe des
caractéristiques psychotiques.
C. Les symptômes ne sont pas dus aux effets physiologiques directs d’une substance ou
d’une affection médicale générale.
Diagnostics évoqués aux vues du DSM-IV TR [9] :
F31.x [296.4x] Trouble bipolaire I, Episode le plus récent maniaque. F31.6 [296.6x] Trouble bipolaire I, Episode le plus récent mixte.
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Bibliographie
[1] D.J. KUPFER, Update on diagnostic criteria for bipolar disorders, University of
Pittsburgh School of Medicine, Department of Psychiatry, Pittsburgh, PA, USA, 2012
[2] J.D. GUELFI, F. ROUILLON, Manuel de Psychiatrie, Elsevier-Masson, 2007
[3] Dr A. GERARD, Etats mixtes, John Libbey Eurotext, 2009
[4] Dr C. HENRY, Clinique des troubles bipolaires, Les dossiers de l’humeur, 2005
[5] R. DE BEAUREPAIRE, Traitement des troubles bipolaires, l’Information Psychiatrique,
Volume 81, Numéro 10, Décembre 2005
[6] S. MANTELET, Aspects cliniques et nosographiques, Médecine thérapeutique, Volume 3,
Numéro 4, Avril 1997
[7] J.M. LOPEZ-SANTIN et al, Descriptive features of mixed bipolar outpatients, Mental
Health Center Marti i Julia, Consorci Parc de Salut Mar de Barcelona, Santa Coloma de
Gramanet, Spain, 2012
[8] S.M. STAHL, Psychopharmacologie essentielle, le guide du prescripteur, Médecine-
Sciences Flammarion, 2007
[9] J.D. GUELFI, Mini DSM-IV-TR, Masson, 2004
[10] L.N. YATHAM, G.S. MALHI, Bipolar Disorder, Oxford Psychiatry Library, Oxford
University Press, 2011
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