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LA FISCALITE DE LA TRANSMISSION DES ENTREPRISES

Auteurs

Faez CHOYAKH

Associé EY en charge de la fiscalité

Expert-comptable, titulaire du mastère spécialisé en droit fiscal (Université de Carthage) et du diplôme international de droit fiscal européen (Université de Bourgogne)

Mohamed KOSSENTINI

Maître de Conférences Agrégé à la Faculté de Droit de Sfax

Juin 2019

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A B R E V I A T I O N S CII -------------------------------------- Code d’incitations aux investissements CIRPPIS ------------------------------- Code de l'impôt sur le revenu des personnes physiques et de l'impôt sur les sociétés CCP ------------------------------------ Code de la comptabilité publique CDPF ---------------------------------- Code des droits et procédures fiscaux CNSS ---------------------------------- Caisse Nationale de Sécurité Sociale COC ------------------------------------ Code des Obligations et des Contrats CSC ------------------------------------ Code des Sociétés Commerciales CTVA ---------------------------------- Code de la taxe sur la valeur ajoutée DC -------------------------------------- Droit de Consommation DGAFF -------------------------------- Direction Générale des Avantages Fiscaux DGELF --------------------------------- Direction Générale des Etudes et de la Législation Fiscale DGI ------------------------------------- Direction Générale des Impôts DT -------------------------------------- Dinar tunisien FCPR ---------------------------------- Fonds Commun de Placement à Risque FOPROLOS -------------------------- Fonds de Promotion de Logement au profit des Salariés IRPP ----------------------------------- Impôt sur le Revenu des Personnes Physiques IS --------------------------------------- Impôt sur les sociétés JORT ---------------------------------- Journal Officiel de la République Tunisienne LDI ------------------------------------- Loi n° 2016-71 du 30 septembre 2016, portant loi de

l’investissement LRDAF -------------------------------- Loi n° 2017-8 du 14 février 2017, portant refonte du

dispositif des avantages fiscaux N° -------------------------------------- Numéro OCDE ---------------------------------- Organisation de Coopération et de Développement Économiques SICAR --------------------------------- Société d’investissement à capital risque TCL ------------------------------------ Taxe sur les établissements à caractère industriel,

commercial ou professionnel TFP------------------------------------- Taxe de Formation Professionnelle TIB ------------------------------------- Taxe sur les Immeubles Bâtis TPI ------------------------------------- Tribunal de Première Instance TVA ------------------------------------ TVA V. --------------------------------------- Voir

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S O M M A I R E Abréviations _______________________________________ 5

Sommaire _________________________________________ 7

I. Chapitre introductif _______________________________ 9

II. Le régime fiscal du droit commun des transmissions d’entreprises ________________________________________ 15 La fiscalité de la transmission de l'entreprise individuelle 16 La fiscalité de la transmission de l’entreprise sociétaire _ 19 Le formalisme fiscal lié à la cession d’entreprises ou à la cessation d’activité ______________________________________ 21

III. Les régimes spécifiques dédiés à la transmission des entreprises __________________________________________ 23 La suppression des avantages fiscaux suite à l’atteinte par le dirigeant de la retraite, ou suite à son incapacité _________ 23 Les régimes de faveur dédiés à la transmission familiale de l'entreprise _____________________________________________ 29 Le régime de faveur dédié à la transmission des entreprises en difficultés ___________________________________________ 34 Le régime de faveur dédié à la transmission des startups 42

IV. L’incitation fiscale aux restructurations d’enreprises 45 Le régime de faveur de la fusion de sociétés ___________ 45 Le régime de faveur de la scission de sociétés _________ 54 Le régime de faveur pour l'apport d'entreprise individuelle en société ______________________________________________ 59 Le régime de faveur pour l’introduction en bourse _____ 67

V. Autres considérations fiscales liées à la transmission _ ________________________________________________ 70 Le régime de faveur dédié aux plus-values à long terme _ 70 Le régime fiscal des marchands de biens ______________ 71 La transmissions d’entreprises sous l’égide de la nouvelle législation régissant l’investissement et les avantages fiscaux 73 La pénalisation des abus de droit et des transmissions effectuées dans le but de ne pas acquitter les dettes fiscales _ 77

VI. Conclusion et propositions ________________________ 82

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I. CHAPITRE INTRODUCTIF

Dans un environnement économique mondialisé, hautement concurrentiel et traversé par une crise probablement sans précédant, la transmission de l’entreprise, condition de sa pérennisation, ne peut être conçue comme un simple fait générateur d’impôts.

Elle doit être au centre d’une politique fiscale qui se doit de concilier entre deux soucis contradictoires : le souci de rentabilité financière pour le Trésor qui traverse, lui aussi, une crise financière conséquente à la crise économique mondiale et à la révolution du 14 janvier 2011 et le souci de la croissance et de la pérennisation de l’entreprise, créatrice de valeurs, d’emplois et de richesses ; souci qui exige une rationalisation du coût fiscal de sa transmission, par le truchement de la mise en place d’avantages fiscaux et financiers, aussi bien pour le cédant que pour le cessionnaire1.

Une fiscalisation poussée de la transmission des entreprises pourrait sérieusement être contreproductive, y compris pour l’administration fiscale, puisqu’elle peut, soit décourager la mobilité des capitaux, soit encourager la fraude à travers la tentation de la dissimulation de la matière imposable2.

Même s’il n’existe pas réellement, à l’exception de la bourse, un « marché » organisé des entreprises3, le problème de la transmission des entreprises a occupé ces dernières années le devant de la scène économique et juridique en raison non seulement du vieillissement d’une frange non négligeable de la population des entrepreneurs ayant fondé leurs entreprises au lendemain de l’indépendance de la Tunisie, mais aussi des effets pervers des crises économiques, qui se sont succédées ces dernières années, sur la compétitivité et la pérennité des entreprises augmentant corrélativement l’offre des entreprises à transmettre.

Sur le plan strictement fiscal, l’amplification du phénomène de la transmission des entreprises s’est traduite par une certaine « agitation législative », puisque tous les ans ou presque durant cette dernière décennie, le législateur n’a pas cessé d’apporter des modifications et des réaménagements au traitement fiscal de la transmission des entreprises. C’est dire que le coût fiscal de la transmission des entreprises constitue, aussi bien aux yeux des opérateurs économiques, que dans l’esprit du législateur, un rouage complexe duquel pourrait dépendre tant le succès que l’échec de l’opération de transmission.

Cependant, l’identification de la rationalité qui commande la politique fiscale de l’Etat en matière de transmission des entreprises n’est pas une sinécure. Elle est obscurcie par le caractère insaisissable et ambivalent de l’opération de

1 Voir, P. SERLOOTEN, Fiscalité de la transmission des entreprises, Economica, Paris, 1994, p. 1. 2 Voir, N. BACCOUCHE, Droit fiscal général, Novaprint, 2008, n° 6 et 7, p. 5 et 6. 3 Voir J. PARC et Ph. PEYRAMAURE « Les incidents liés à la transmission », Revue de Jurisprudence Commerciale, n°4, 2001, p. 73.

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transmission des entreprises, qui, incontestablement, constitue, une réalité juridique et économique extrêmement complexe.

Souvent qualifié comme « un droit dérivé »4 ou encore comme « un droit de réception » des notions et institutions baptisées par les autres branches du droit public et privé, le droit fiscal n’a pas pu puiser dans les autres disciplines auxquelles il se greffe, un cadre juridique homogène, uniforme et circonscris régissant la transmission des entreprises. Ceci étant, la transmission des entreprises ne constitue pas une zone de non droit. Quelques textes juridiques, souvent éparpillés, relevant des disciplines juridiques les plus variées traitent de quelques aspects de la transmission des entreprises. Le droit civil5, le droit de la succession6, le droit du fonds de commerce7, le droit des sociétés8, le droit du marché financier9, le droit des entreprises en difficultés10, le droit des entreprises publiques11, le droit de la concurrence12, le droit du travail13 et bien d’autres compartiments du droit fournissent, chacun suivant la logique juridique qui lui est propre, quelques solutions et techniques juridiques liées au problème de la transmission des entreprises.

Cet état des lieux est dû moins à une volonté législative délibérée qu’à une impossibilité14 de régler de manière uniforme le problème de la transmission des entreprises. Pourquoi ? Parce que l’expression « transmission des entreprises » associe deux notions génériques, à géométrie variable couvrant des situations infiniment variées et complexe : D’un côté, la notion d’entreprise et d’un autre côté, la notion de transmission.

La notion d’entreprise, objet de l’opération de transmission, relève de la famille des notions économiques qui ont eu du mal à être transposées sur le terrain juridique. En effet, contrairement à l’apparence créée par le langage écrit des

4 J. SCHMIDT « L’influence du droit fiscal sur le droit des sociétés », Revue Trimestrielle de Droit Commercial, 1957, p. 561. 5 Voir à titre d’exemple les règles régissant la vente en général figurant dans les articles 563 et suivants du Code des Obligations et des Contrats ou encore les règles régissant la donation en général figurant dans les articles 200 et suivants du Code du Statut Personnel. 6 Voir les règles régissant la succession figurant dans les articles 85 et suivants du Code du Statut Personnel. 7 Voir les articles 190 et suivants du Code de Commerce régissant la vente, l’apport en société et la location gérance du fonds de commerce. 8 Voir à titre d’exemple le « Livre cinq » du Code des Sociétés Commerciales : « Des fusions, scissions, transformations et groupements de sociétés ». 9 Voir à titre d’exemple les règles régissant la cession d’un bloc de contrôle figurant dans les articles 5 à 16 de la loi n° 94-117 du 14 novembre 1994 portant réorganisation du marché financier. 10 Voir les dispositions de la loi n° 2016-36 du 29 avril 2016 relative aux procédures collectives et plus particulièrement les règles relatives au redressement des entreprises en difficultés économiques régissant la cession de l’entreprise et la location ou la location gérance de l’entreprise. 11 Voir les dispositions de la loi n° 89-9 du premier février 1989 relative aux participations et entreprises publiques. 12 Voir les dispositions de la loi du 15 septembre 2015 relative à la concurrence et aux prix et notamment ses règles relatives à la concentration des entreprises. 13 Voir à titre d’exemple l’article 15 du Code du Travail prévoyant que « Le contrat de travail subsiste entre le travailleur et l’employeur en cas de modification de la situation juridique de ce dernier, notamment par succession, vente, fusion, transformation de fonds et mise en société ». 14 C’est d’ailleurs la position du professeur J. PAILLUSSEAU qui écrivait que « il semble assez difficile sinon impossible de régler par des textes la transmission des entreprises ». H. LE NABASQUE, F. BOUSSIER et F. RICHEN, La transmission de l’entreprise familiale, préface de J. PAILLUSSEAU, Dalloz, Paris, 1992, Préface.

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lois, comme de la littérature sociale ou économique, où l’entreprise est toujours évoquée comme une personne qui agit, qui s’engage ou qui stipule à son profit, cette « entreprise », si vivace, reste dépourvue de la personnalité juridique15. Il est vrai que le doyen DESPAX a qualifié l’entreprise comme un « sujet de droit naissant »16. Mais, son œuvre est restée dissidente si bien que, tout au plus, la majorité des juristes ne conçoivent l’entreprise que comme « une réalité juridique »17 définie comme étant « un ensemble de moyens techniques, financiers, humains réunis et organisés en vue de l’exercice d’une activité économique, c'est-à-dire d’une activité de création et de mise sur le marché de valeur ajoutée »18. Cette définition décrit l’entreprise comme « une réalité multiforme d’une immense diversité de taille, de forme, de mode d’organisation et de fonctionnement »19. La pluralité des formes juridiques de l’entreprise (individuelle ou sociétaire) conjuguée avec la diversité des activités économiques exercées dans le cadre des entreprises (entreprises commerciales, financières, industrielles, libérales, agricoles, artisanales…) dévoilent la complexité de la notion d’entreprise objet de l’opération de transmission et expliquent l’inaptitude du droit, y compris le droit fiscal, à régir de manière uniforme cette entité d’origine économique. Il n’est toutefois pas inutile de souligner l’effort entrepris par la loi n° 2016-71 du 30 septembre 2016, portant loi de l’investissement, qui entend par entreprise, toute unité qui a pour but de produire des biens ou de fournir des services et qui prend la forme d’une société ou d’une entreprise individuelle conformément à la législation tunisienne, importe peu que l’entreprise soit publique ou privée20.

Par ailleurs, la notion de transmission n’est pas moins générique que celle de l’entreprise. Elle peut être définie comme un « terme générique désignant toute opération par laquelle les droits ou les obligations d’une personne sont transférés à une autre, soit par la volonté de l’homme (transmission conventionnelle ou testamentaire), soit en vertu de la loi (transmission successorale) ; soit entre vifs, soit à cause de mort ; soit à titre onéreux, soit à titre gratuit ; soit à titre particulier, soit à titre universel »21. Plus qu’une définition, il s’agit plus exactement d’une présentation d’une notion à contenu

15 C’est ainsi que le doyen RIPERT affirme que « Nous n’avons pas de droit de l’entreprise… L’entreprise est restée cachée sous la propriété. Jusqu’ici, le droit n’a pas jugé utile de la faire apparaître parce que la propriété lui suffisait ». G. RIPERT, Aspects juridiques du capitalisme moderne, Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence, Paris, 1946, p. 262, n° 120. Voir aussi, J. DE LA MORANDIERE « Rapport sur la notion juridique d’entreprise », in. Journées de l’Association H. CAPITANT, Tome III, 1547, p. 157. Voir également J.F. RICARD « Rapport sur la notion juridique d’entreprise », in. Journées de l’Association H. CAPITANT, Tome III, 1547, p. 162. 16 Voir M. DESPAX, L’entreprise et le droit, Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence, Paris, 1957, n° 292. L’auteur écrivait que « … l’entreprise est un sujet de droit naissant qui ne peut jouir encore de tous les attributs de la personnalité juridique ». 17 B. MERCADAL « La notion d’entreprise », in.Les activités et les biens de l’entreprise, Mélanges offerts à Jean DERRUPPE, éd. GLN, JOLY, Paris, 1991, p. 12. 18 R. PERCEROU « Exposé introductif », Colloque de Deauville organisé les 11 et 12 juin 1988 portant sur « la transmission des entreprises », Revue de Jurisprudence Commerciale, n° 11, 1988, p. 15. 19 H. LE NABASQUE, F. BOUSSIER et F. RICHEN, op. cit., p. 8. 20On notera toutefois, à partir de cette définition l’entreprise que la loi de l’investissement semble exclure les sociétés étrangères qui s’installent en Tunisie en y créant une branche. D’autre part, l’exigence de la conformité à la législation tunisienne permet de restreindre le bénéfice des avantages fiscaux aux entreprises de droit tunisien. 21 G. CORNU, Vocabulaire juridique, Association Henri CAPITANT, Puf, Delta, Paris, 1987, p. 817.

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foisonnant couvrant des hypothèses extrêmement variées. Elle embrasse une pluralité de procédés juridiques pouvant être montés à l’occasion de la transmission d’une entreprise. La vente ou la cession, l’apport en société, la location-gérance, la donation, la succession, la fusion et la scission de sociétés ne constituent que des exemples concrets des divers procédés juridiques de transmission des entreprises que la liberté contractuelle est en mesure d’enrichir au point qu’une véritable ingénierie « fiscalo-juridico-financière » très sophistiquée, s'est développée et n’a jamais cessé de l'être à l’occasion de la transmission des entreprises22.

Quoiqu’il en soit de ces considérations, la transmission des entreprises n’est généralement pas le fruit d’un hasard de circonstances. Des considérations économiques complexes expliquent la décision soit de transmettre son entreprise, côté cédant, soit d’acquérir une entreprise, côté preneur23. Même s’il est difficile de dresser un catalogue des mobiles animant la décision de vendre ou d’acheter une entreprise, force est de constater que la pratique des affaires révèle un nombre récurrent de comportements qui permet de dresser une liste des principales motivations des cédants et des preneurs d’entreprises.

Du côté du cédant, la décision de transmettre son entreprise peut être motivée tantôt par une stratégie de croissance interne de son entreprise en la transformant de la forme individuelle à une forme sociétaire24 ou en cherchant une fusion intéressante25, tantôt par une volonté de se retirer de son entreprise, soit parce qu’il a atteint l’âge de la retraite26, soit parce que les temps deviennent trop durs en se débarrassant de son entreprise avant que la continuité de l’exploitation ne soit compromise, tantôt enfin pour des considérations spéculatives, et l'on songe ici aux marchands de biens qui ont pour profession d'acquérir en vue de revendre les fonds de commerce. La transmission de l’entreprise peut même parfois être indépendante de la volonté du cédant, notamment en cas de cession judiciaire d’une entreprise en difficultés économiques en phase de règlement judiciaire27.

Du côté du preneur, la décision d’acquisition s’inscrit généralement dans une stratégie de croissance externe de l’entreprise ou du groupe en poursuivant à titre d’exemple soit une augmentation de part de marché en achetant une entreprise concurrente, soit un accroissement du potentiel de production, soit la diversification des activités. Ceci étant, la reprise d’une entreprise peut dans

22 P. BRUNO et T. CHOWELON, Ingénierie fiscale du patrimoine. Guide d’optimisation fiscale, EFE, Paris, 1998, p. 121. 23 J. PAILLUSSEAU, J.J.CAUSSAIN, H. LAZARSKI, P. PEYRAMAURE, La cession d’entreprise, 3ème Ed., Dalloz, Paris, 1993, p. 15. 24 Un auteur écrivait à ce titre : « La croissance économique de l’entreprise impose bien souvent son évolution juridique : de l’entreprise individuelle à la société », P. SERLOOTEN, Droit fiscal des affaires, Dalloz, Paris, 2001, n° 272, p. 199. 25 Voir, J.P. BERTREL et M. JEANTIN, Acquisitions et fusions de sociétés commerciales, Litec, Paris, 1989, p.4. 26 Voir, O. GELINIER et A. GAULTIER, L’avenir des entreprises personnelles et familiales, Ed., Hommes et techniques, Paris, 1979, p.2. 27 Voir, H. CHRIQUI « La cession de l’entreprise en difficulté – La reprise sous procédure judiciaire », Revue de Jurisprudence Commerciale, n°4, 2001, p. 97. Voir aussi, H. LE NABASQUE « La cession d’entreprise en redressement judiciaire », La Semaine Juridique (JCP), Ed., Entreprise., 1990, n° 15770.

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certaines hypothèses être indépendante de la volonté du preneur notamment en cas de succession d’une entreprise à cause de mort28.

Quel que soit le mobile qui anime la décision d'acquérir ou de céder une entreprise, cette décision n'est pas économiquement facile à mettre en œuvre tant du côté du cédant que du côté du cessionnaire. Pour le cédant, l'un des plus grands défis rencontrés est de trouver un cessionnaire, notamment dans les pays en voie de développement où il n'existe pas un marché transparent et organisé de la transmission des entreprises et où les bases de données sur la transmission par secteur, par forme juridique ou par caractéristiques des entrepreneurs cédants sont quasiment inexistantes. Pour le cessionnaire, l'un des plus grands défis rencontrés est de trouver les sources de financement de l'acquisition d'une entreprise. Le secteur financier d'un Etat, banques et capital-risqueurs, commande, selon qu'il propose ou non une gamme de prêts mezzanines ou subordonnés aux preneurs, la faisabilité de la transmission des entreprises.

Ces différentes considérations économiques expliquant et handicapant, parfois, le phénomène de la transmission des entreprises ne doivent-elles pas être intériorisées par la législation fiscale ? La législation fiscale peut-elle demeurer indifférente quant au motif économique de la transmission de l’entreprise ? Faut-il fiscalement traiter de la même manière la transmission de l’entreprise in bonis et celle en difficultés ? Faut-il appliquer la fiscalité de droit commun de la cession des biens isolés, que l’on a qualifié de « prohibitive », à toute opération de transmission d’entreprise quel qu’en soit le motif ?

On a souvent pu lire dans la littérature fiscale que l’impôt est une technique plurifonctionnelle. Ayant initialement une simple fonction financière, conçu, initialement aussi, comme un simple pourvoyeur des caisses de l’Etat, l’impôt a été doté, notamment à l’issue de la 2ème guerre mondiale, de nouvelles fonctions. Au nom de l’équité et de l’impératif de développement économique, l’impôt est devenu un instrument de politique sociale, économique et même culturelle. A « l’impôt réponse » s’est progressivement substitué un « impôt projet » écrivait le Doyen VEDEL29. A la neutralité fiscale se juxtapose un interventionnisme fiscal plus ou moins poussé selon les besoins de développement de chaque Etat.

En matière de fiscalité de la transmission des entreprises, l’équation que le législateur se doit de résoudre est l’une des plus complexes. On peut, au risque d’utiliser une formule réductrice, la ramener à l’interrogation suivante : le législateur tunisien a-t-il réussi, à travers une législation en gestation, à rationaliser la transmission des entreprises, phénomène juridique et économique complexe, par sa fiscalisation, sans affecter un Trésor public en crise financière et sans hypothéquer la croissance et la pérennité des entreprises tunisiennes, généralement des PME de type familial ?

En réalité, le législateur tunisien n'est pas resté insensible à l'exigence de pérenniser et de favoriser la croissance des entreprises par leur transmission.

28 Voir A. GAULTIER, Les holdings familiales. Pérennité et succession, Ed. D’Organisation, Paris, 1988. 29 G. VEDEL « Présentation de la Revue Française de Finances Publiques », Revue Française de Finances Publiques, n° 1, 1983, p.2.

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Il s'est montré particulièrement actif en la matière puisque, au cours des deux dernières décennies, il intervient tous les ans ou presque pour aménager le régime fiscal de la transmission des entreprises en instaurant au coup par coup des corps bâtards de régimes de faveur encourageant sélectivement certaines opérations de transmission. Même si l'on peut penser que le législateur tunisien aurait pu assainir la fiscalité de droit commun de la transmission des entreprises au lieu de dédoubler la fiscalité « prohibitive » de droit commun par une fiscalité dérogatoire sélective, la politique fiscale poursuivie en la matière par les législations comparées adopte la même démarche que celle du législateur tunisien. En France, en Allemagne et même dans les pays anglo-saxons, des avantages fiscaux sont, en effet, concédés sélectivement à certaines transmissions d’entreprises30.

L’examen de la législation fiscale actuellement en vigueur permet de constater que les transmissions sélectivement encouragées et soustraites de l’application de la fiscalité prohibitive de droit commun, sont celles qui sont motivées soit par des considérations de croissance de l’entreprise, soit par des considérations de sauvetage de l’entreprise d’une éventuelle disparition imminente.

Avant d’exposer les avantages fiscaux spécifiquement dédiés aux transmissions d’entreprises et de ceux dédiés aux opérations de croissance externe et aux restructurations et groupements, nous analyserons les principales conséquences fiscales des opérations de transmission.

30 J.M. TIRARD, La fiscalité des sociétés dans l’Union Européenne, Groupe Revue Fiduciaire, Paris, 2000.

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II. LE REGIME FISCAL DU DROIT COMMUN DES

TRANSMISSIONS D’ENTREPRISES

La complexité de l’appréhension juridique des notions d’entreprises et de transmission met à mal une législation fiscale gouvernée par le principe de la légalité qui implique une définition minutieuse et stricte de la matière imposable. Parfois, le législateur fiscal se trouve dans l’impossibilité de prévoir un traitement fiscal spécifique pour chaque procédé de transmission en raison de l’ingéniosité grandissante des opérateurs économiques et du caractère intrinsèquement polyforme et volatil et des procédés de transmission et des entreprises à transmettre. Qu’a-t-on fait pour fiscaliser une opération qui ne doit pas rester à l’abri de l’emprise du fisc compte tenu de l’importance des transferts de biens occasionnés par la transmission des entreprises ?

A priori, le législateur fiscal a choisi la voie la moins pénible lors de la fiscalisation de l’opération de transmission des entreprises, celle de l’indifférence. Aucun texte fiscal de portée générale ne fiscalise la transmission des entreprises. Faudrait-il sous-entendre que la transmission des entreprises est une opération non fiscalisée ?

La réponse est indiscutablement négative. L’indifférence n’est pas synonyme de non fiscalisation. L’indifférence signifie que le législateur fiscal s’est contenté d’appliquer à la transmission des entreprises la fiscalité de droit commun de la transmission des biens.

Que l’on transmette un bien isolé ou la totalité des biens de l’entreprise, que l’on procède par un tel mécanisme juridique ou par un autre, la solution fiscale est bien souvent la même : la fiscalisation par indifférence qui s'est traduite par l’application du régime fiscal associé aux opérations de cessions. La définition extensive de la cession adoptée par la doctrine administrative illustre parfaitement ce constat. Ainsi, la note commune n° 34 de l’année de l’année 1998 avait-t-elle prévu que la cession est toute opération qui a pour effet de soustraire des éléments de l'actif de l'entreprise, que la cession est matérialisée le plus souvent par une vente et qu’il peut s'agir également de tout évènement produisant les mêmes effets tels que les donations, échanges, apports en société, voire même les retraits d'éléments d'actif au profit du patrimoine privé de l'exploitant.

Un constat primaire est toujours patent : la loi fiscale est là chaque fois qu’il y a un transfert de biens, d’un patrimoine à un autre, à titre gratuit ou à titre onéreux, d’une entreprise individuelle ou sociétaire. Aucune transmission d’entreprise n’échappe à la loi fiscale. Est-ce un mal ? Faut-il s’en plaindre ? A priori, il n’y a aucun mal lorsque la loi fiscale est là où il y a de la matière imposable. Au contraire, la fiscalisation intégrale des divers procédés de transmission est à la fois un indice d’exhaustivité de la législation fiscale et un

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indice d’un certain niveau de développement économique du pays31. Parfois, elle empêche que l’ingénierie « fiscalo-juridico-financière » n’entraîne la résurgence à la surface fiscale d’un montage de transmission non fiscalisé, synonyme d’échappatoire fiscale ou de fuite d’assiette fiscale.

Cependant, s’il est vrai que l’application de la fiscalité de droit commun de la transmission des biens isolés à la transmission des entreprises présente l’avantage d’embrasser fiscalement n’importe quelle transmission, il est autant vrai que cette solution conduit à un alourdissement notoire du coût fiscal de la transmission au point que l’on puisse parler d’une fiscalité prohibitive de la transmission des entreprises.

En effet, étant donné que la fiscalité de la transmission des entreprises n'est qu'une application particulière de la fiscalité de la cession des biens, la TVA, les droits d'enregistrement et l'impôt sur les bénéfices trouvent dans la transmission de l'entreprise leurs faits générateurs respectifs conduisant à une taxation particulièrement rentable pour l’administration fiscale d’autant plus que la transmission des entreprises se traduit par un flux parfois considérable d’éléments d’actifs. Même si la matière imposable qu’ils embrassent n’est pas en principe la même, les trois impôts susvisés peuvent parfois, en matière de transmission des entreprises, se transposer la même assiette conduisant à des superpositions d’impôts particulièrement dissuasives pour les opérations de transmission des entreprises et mettant à mal leur croissance et leur pérennité. Dans certaines hypothèses particulières, notamment lorsque les éléments d’actif à transmettre comportent des immeubles ou des fonds de commerce ayant affiché une plus-value latente importante, la transmission de l’entreprise convertira ces plus-values latentes en plus-values réalisées et par conséquent imposables selon des taux parfois excessifs32.

Il ne s'agit pas dans cette étude de retracer la fiscalité de droit commun de la transmission des entreprises qui n'est du reste qu'une application particulière de la fiscalité de transmission des biens isolés. L'on se contentera d'exposer les grands traits de cette fiscalité "coûteuse" liée à la transmission d'entreprises selon que cette transmission concerne l'entreprise individuelle ou l'entreprise sociétaire.

LA FISCALITE DE LA TRANSMISSION DE L'ENTREPRISE INDIVIDUELLE

Le coût fiscal de la transmission d'une entreprise individuelle varie selon les modalités juridiques de la réalisation de la transmission et selon les caractéristiques de l'entreprise à transmettre. L'on distinguera entre la transmission onéreuse et la transmission gratuite.

31 Un auteur écrivait à ce titre « On ne peut pas s’empêcher de constater que les sociétés fiscalisées, c'est-à-dire les sociétés organisées, sont plutôt paisible alors qu’un grand nombre de pays dont le tissu socio-économique n’est pas encore traversé par l’impôt, notamment en Afrique et en Asie, sont à la fois loin d’être homogènes et loin d’être stables », N. BACCOUCHE, Droit fiscal général, op. cit., n°22, p. 16. 32 M. COZIAN « La fiscalité des transmissions d’entreprises », Revue de Jurisprudence Commerciale, n°1, 1988, p. 141.

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La transmission à titre onéreux

Cette transmission peut être réalisée selon plusieurs modalités juridiques : vente, échange, apport en société... Si l'on prend l'exemple de la vente, le coût fiscal de l'opération sera supporté tant par le cédant que par le cessionnaire.

Du côté du cédant, l'opération de cession onéreuse de l'entreprise individuelle entraine principalement les deux impositions suivantes :

- Le paiement de l'impôt sur le revenu selon le barème progressif dont les taux peuvent atteindre les 35%, et de la contribution sociale de solidarité au taux de 1%, et ce, au titre de la plus-value réalisée à l'occasion de la cession. Lorsque la cession porte sur un fonds de commerce créé par l'entrepreneur, la plus-value correspondra au prix de cession. Il importe peu que le fonds de commerce cédé soit soumis au régime réel ou au régime forfaitaire33.

- La régularisation de la TVA : Selon le paragraphe IV. 2) de l’article 9 du CTVA, en cas de cession, apport en société, changement d'affectation de ces biens et en cas de cessation ou d'abandon du régime d'assujetti, il doit être opéré un reversement égal au montant de la TVA déduite ou qui aurait dû être payée ou ayant fait l'objet de remboursement, diminué d'un cinquième par année civile ou fraction d'année civile de détention s'il s'agit de biens d'équipement ou de matériel, et d'un dixième par année civile ou fraction d'année civile de détention s'il s'agit de bâtiment. Les dispositions prévues par le paragraphe IV. 2) de l’article 9 du CTVA se sont limitées à traiter le cas du reversement de la TVA récupérée sur un bâtiment. Pour les terrains et face au silence du texte, la DGELF a opté pour le reversement de la TVA initialement déduite. Si, au moment de l’acquisition aucune taxe n’a été récupérée, la vente du terrain n’entraine aucun reversement, à condition que l’opération soit occasionnelle34.

33 En cas de cession par les personnes soumises au régime forfaitaire du fonds de commerce, la plus-value est déterminée sur la base de la différence entre les recettes et les dépenses relatives à l’année concernée, augmentée de la plus-value de cession du fonds de commerce. Dans le cas du fonds de commerce acquis, la plus-value de cession dudit fonds est égale à la différence entre, d'une part, le prix de cession déclaré ou celui révisé suite aux opérations de vérification fiscale selon les procédures applicables en matière de droits d'enregistrement et d'autre part, le prix d'acquisition du fonds en question. Dans le cas du fonds de commerce constitué, la plus-value de cession est égale à la totalité de son prix de cession. Aucune déduction n'est admise à quelque titre que ce soit. Dans le cas où le cédant du fonds de commerce est le propriétaire de l'immeuble objet de l'exploitation dudit fonds, et que l'opération de cession comprend aussi bien le fonds de commerce que les murs, il y a lieu de distinguer entre le prix de la cession du fonds en question et celui de l'immeuble, Dans ce cas, le cédant réalise une plus-value de cession du fonds de commerce qui sera rapportée aux résultats de l'exploitation de l'exercice de la cession et une plus-value immobilière au titre de la cession de l'immeuble imposable à I’IRPP dans la catégorie des revenus fonciers. L’imposition est calculée sur la base du barème progressif de l’IR, sans que l’impôt dû sur cette base ne soit inférieur à l’impôt forfaitaire dû selon le chiffre d’affaires. 34 Prise de position DGELF n° 1684 du 7 août 2013

" على ثمن بيع قطعة األرض، فإنها تبقى .اء على القيمة المضافة الذي وظفته شركة "." طرح األد..وجوابا، يشرفني إعالمكم أنه إذا تولت شركة "ممن م أ ق م بدفع مبلغ األداء الذي تّم طرحه، والتنصيص على مبلغ األداء على القيمة المضافة موضوع التعديل على 9مطالبة وفقا ألحكام الفصل

رض موضوع السؤال.وثيقة البيع وذلك مهما كانت قيمة إحالة قطعة األ وفي خالف ذلك إذا إنحصر األمر في عملية بيع قطعة أرض بصفة عرضية، فإّن العملية المذكورة ال تخضع لألداء على القيمة المضافة.

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Du côté du cessionnaire, il est redevable des droits de mutation lorsque la transmission de l'entreprise porte sur les biens suivants :

- Pour les biens immeubles : 5% au titre des droits d'enregistrement, calculés sur la base du prix de cession, majorés du droit de 1% exigible au titre du droit d’inscription foncière ou au titre du droit de mutation et de partage des immeubles non immatriculés, selon le cas et majorés éventuellement de 3% pour défaut d'origine. Dans des hypothèses très particulières (ex. acquisition par une personne physique non soumise au régime réel), le droit complémentaire de 2% ou de 4%, récemment introduit par la loi de finances pour l’année 2017 peut également s’appliquer aux immeubles transmis35.

- Pour les fonds de commerce : 2,5% du prix de cession.

La transmission à titre gratuit

Cette transmission peut être réalisée par décès ou par donation du vivant de l'entrepreneur.

S'agissant de la transmission de l'entreprise individuelle par décès, qu'elle soit ab intestat ou par testament, elle est soumise aux droits de succession sur la base de la valeur des biens relevant de l'entreprise transmise déduction faite du passif successoral et des abattements et ce selon des taux qui varient selon le degré de parenté de l'héritier par rapport au défunt :

- Entre ascendants et descendants et entre époux : 2,5%,

- Entre frères et sœur : 5%,

- Entre oncles ou tantes, neveux et nièces, grands oncles et grandes tantes et petits neveux ou petites nièces et entre cousins : 25%,

- Entre parents au-delà du quatrième degré et entre personnes non parentes :35%.

En outre, les successions sont soumises au droit proportionnel de 1% exigible au titre du droit d’inscription foncière ou au titre du droit de mutation et de partage des immeubles non immatriculés, selon le cas.

S'agissant par ailleurs de la transmission de l'entreprise individuelle par donation du vivant de l'entrepreneur, elle est soumise en principe aux mêmes taux applicables pour les droits de succession.

En cas de démembrement de la propriété, pour la liquidation des droits d'enregistrement sur les donations et les successions, la valeur de la nue-propriété et de l'usufruit est déterminée par une quotité de la valeur de la propriété entière, conformément au barème ci-après :

Age de l'usufruitier Valeur de l'usufruit Valeur de la nue-propriété

35 Ajoutant au tarif des droits proportionnels et progressifs d’enregistrement prévu par l’article 20 du CDET un nouveau numéro 10 bis, l’article 29 de la loi de finances pour l’année 2017 a soumis les actes notariés ou sous seing privé et les jugements et arrêts portant mutation à titre onéreux de propriété, de nue-propriété ou d’usufruit d’immeubles, ou donation portant sur ces mêmes biens au droit complémentaire suivant : la valeur allantde 500.000 DT à 1.000.000 DT : 2% ; la valeur est supérieure à 1.000.000 DT : 4% Le même article 29 a exonéré du droit complémentaire les ventes et les donations d’immeubles à usage professionnel réalisées au profit des entreprises soumises à l’IR selon le régime réel ou au profit des personnes morales (ex. sociétés, associations, GIE, mutuelles…),

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Moins de 20 ans révolus 7/10 3/10

Moins de 30 ans révolus 6/10 4/10

Moins de 40 ans révolus 5/10 5/10

Moins de 50 ans révolus 4/10 6/10

Moins de 60 ans révolus 3/10 7/10

Moins de 70 ans révolus 2/10 8/10

Plus de 70 ans révolus 1/10 9/10

LA FISCALITE DE LA TRANSMISSION DE L’ENTREPRISE SOCIETAIRE

Les modalités juridiques de la transmission de l'entreprise sociétaire sont nombreuses.

Il peut s'agir d'un côté, d'une cession d'actifs de la société à une autre société, que cette cession soit totale ou partielle portant sur une branche d'activité. Dans ce cas, le régime fiscal applicable à la cession onéreuse de l'entreprise individuelle est en principe transposable à la cession de l'entreprise sociétaire.

Il peut s'agir d'un autre côté de la transmission des titres formant le capital de l'entreprise sociétaire dont le régime fiscal varie selon que cette transmission soit onéreuse ou gratuite.

En matière d’impôts directs, la transmission à titre onéreux des titres conduit à l'imposition du cédant au titre de la plus-value de cession.

Quand le cédant est soumis à l’IS, la plus-value de cession des titres est soumise à l’IS au taux de l’IS de ce cédant. Elle est également soumise à la contribution sociale de solidarité au taux de 1%.

Quand le cédant est une personne physique, le régime fiscal de cette plus-value varie selon que les titres transmis sont inscrits ou non à l'actif d'une entreprise.

- Lorsque les titres sont inscrits à l'actif d'une entreprise individuelle, leur cession entraine l'imposition de la plus-value réalisée selon le barème progressif de l'IR qui peut atteindre les 35% au cas où la plus-value dépasserait les 50.000 DT. La contribution sociale de solidarité est également due sur la plus-value au taux de 1%.

- Lorsque les titres transmis ne sont pas inscrits à l'actif du bilan d'une entreprise et qu'ils relèvent du patrimoine privé du cédant, la plus-value de cession de ces titres est soumise à un impôt libératoire de l'impôt sur le revenu global selon le taux proportionnel de 10% avec un abattement de 10.000 DT appliqué à l'assiette de l'impôt sur ladite plus-value.

Pour les non-résidents, l’impôt dû sur les cessions de titres ou de droits y afférents est prélevé par voie de retenue libératoire au taux de :

- 10% au titre de la plus-value réalisée de la cession ou de la rétrocession des titres ou des droits y relatifs pour les personnes physiques sans que le montant exigible ne dépasse une limite déterminée sur la base du taux de 2,5% du prix de cession ou de rétrocession desdits titres ou desdits droits, et ;

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- 25% au titre de la plus-value réalisée de la cession ou de la rétrocession des titres ou des droits y relatifs pour les personnes morales sans que le montant exigible ne dépasse une limite déterminée sur la base du taux de 5% du prix de cession ou de rétrocession desdits titres ou desdits droits.

Il importe de constater que l’article 19 de la loi de finances pour 201636a élargi le champ d’application de l’IR aux plus-values réalisées par les personnes physiques au titre de la cession de leurs droits dans :

- Les sociétés en nom collectif,

- Les sociétés de fait,

- Les sociétés en commandite simple,

- Les sociétés en participation,

- Les groupements d'intérêt économique et, - Les sociétés civiles qui ne revêtent pas en fait les caractéristiques

des sociétés de capitaux.

Hormis le cas des sociétés immobilières, avec l’article 19 de la loi de finances pour 2016, le résultat de la cession des droits sociaux est intégré dans le revenu catégoriel y afférent et sera passible de l’IR selon le barème.

Notons au passage que le législateur a instauré certaines exonérations de la plus-value de cession des titres peu importe que ladite cession entraine ou non corrélativement la transmission de l'entreprise sociétaire. Il s'agit là d'un avantage fiscal qui n'est pas dédié spécifiquement à la transmission de l'entreprise sociétaire, mais qui la concerne.

La transmission à titre onéreux des titres conduit en outre à une imposition plus ou moins légère du cessionnaire. En effet, lorsque les titres transmis sont des parts sociales détenues dans des SARL, l'opération est soumise aux droits d'enregistrement selon le droit fixe des actes innommés de 25 DT par page.

En revanche, lorsque les titres transmis sont des actions détenues dans des sociétés anonymes, l'opération n'est pas soumise aux droits d’enregistrement ; elle est plutôt soumise aux diverses redevances et commissions sur les transactions boursières37.

Soulignons aussi que l’article 29 du CDET prévoit que les cessions d'actions, de parts de fondateurs ou de parts d'intérêts dans les sociétés dont le capital n'est pas divisé en actions effectuées pendant les deux ans qui suivent la réalisation de l'apport fait à la société, ainsi que les cessions d'actions ou de parts conférant à leurs possesseurs un droit de jouissance ou de propriété d'immeubles ou fractions d'immeubles sont réputées avoir pour objet les cessions des biens représentés par ces titres et il est fait application, pour la perception du droit d'enregistrement sur lesdites cessions, de toutes les règles relatives à la vente de ces biens.

36 Les dispositions susvisées s’appliquent aux opérations de cession réalisées à partir du 1er janvier 2016. 37 Voir l'arrêté du ministre des finances du 27 mars 1996, tel que modifié é par les arrêtés du ministre des finances du 12 décembre 1998, du 15 juin 2001, du 29 juin 2006, du 02 mars 2009, du 1er avril 2009 et du 28 juin 2016.

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Quant à la transmission à titre gratuit par une personne physique des titres formant le capital des sociétés, elle est en principe soumise au même régime exposé ci-haut concernant les donations.

Enfin, lorsque les titres sont détenus par une personne morale, la transmission à titre gratuit demeure, le plus souvent, théorique, et ce, en raison de la non-déductibilité fiscale de la perte induite par la passation en charge de la valeur comptable des titres (acte anormal de gestion), ainsi que des contraintes liées au droit pénal des affaires (abus de bien sociaux).

LE FORMALISME FISCAL LIE A LA CESSION D’ENTREPRISES OU A LA CESSATION D’ACTIVITE

En application des dispositions du paragraphe I de l’article 58 du CIRPPIS et dans le cas de cession ou de cessation totale d'une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou d'une exploitation non commerciale, les bénéfices réalisés dans l'exploitation faisant l'objet de la cession ou de la cessation et qui n'ont pas été imposés, ainsi que les provisions non encore employées devront l'être au vu d'une déclaration à déposer dans les 15 jours de la cession ou de la fermeture définitive de l'établissement lorsqu'il s'agit de cessation.

En cas de cession, qu'elle ait lieu à titre onéreux ou à titre gratuit, ajoute le paragraphe II de cet article 58 du CIRPPIS, le cessionnaire est responsable, à concurrence du prix de cession du paiement des droits dus au titre de l'exploitation cédée, solidairement avec le cédant pendant 20 jours, à compter de la date de souscription par ce dernier de la déclaration susvisée sauf si le cessionnaire informe par écrit l'administration fiscale de l'opération dans les mêmes délais impartis au cédant.

Aussi, selon, le paragraphe IV de l’article 60 du CIRPPIS, en cas de décès, la déclaration de l’IRPP doit être déposée par les ayants-droit du défunt dans les 6 mois de la date du décès et ne peut donner lieu à un impôt excédant la moitié de l'actif net successoral avant paiement des droits de mutation par décès.

Pour la doctrine administrative, le décès de l’exploitant individuel implique la continuation de l’exploitation dans l’indivision par ses héritiers, et ce, dans le cadre d’une société de personnes38.Pour le cas particulier de la transformation en SARL d’une société de personnes résultant du décès d’un exploitant individuel, la DGELF exige le dépôt d’une demande auprès du bureau de contrôle des impôts. La demande doit être accompagnée des pièces justifiant la transformation conformément à l’article 57 du CIRPPIS. Une déclaration de cessation de l’activité doit être également déposée dans les quinze jours de la

38 Prise de position DGELF n° 692 du 15 mai 2014

اص وما وبالنسبة للفترة الموالية لتاريخ الوفاة، يتم مواصلة النشاط على الشياع في إطار شركة فعلية تكون خاضعة للنظام الجبائي لشركة األشخ شابهها.

شريع الجبائي الجاري به العمل وخاصة منها مسك وتكون الشركة المذكورة خاضعة لجميع الواجبات الجبائية والمحاسبية المنصوص عليها بالت محاسبة مطابقة للتشريع المحاسبي للمؤسسات ودفع كل األداءات والضرائب المستوجبة بإستثناء الضريبة على الشركات.

والضريبة على الشركات، مكرر من مجلة الضريبة على دخل األشخاص الطبيعيين 51وتبقى الشركة الفعلية المذكورة مطالبة، طبقا ألحكام الفصل من األرباح المحققة بعنوان السنة السابقة. %25بدفع تسبقة بنسبة

المذكورة، كما تبقى الضريبة على األرباح التي تحققها الشركة المذكورة مستوجبة على الورثة في صنف المداخيل المتأتية من النشاط األصلي للشركة كل على أساس نصيبه في األرباح.

المشار إليها أعاله من الضريبة المستوجبة الحقا على الورثة كل حسب منابه في الشركة. %25لتسبقة التي دفعتها الشركة بنسبة وتطرح ا

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date de transformation. La SARL doit déposer une déclaration d’existence, conformément à l’article 56 du CIRPPIS39.

Par ailleurs, l’article 92 de loi n° 2013-54 du 30 décembre 2013, portant loi de finances pour l’année 2014 a introduit deux mesures visant à améliorer le recouvrement de l’impôt sur les plus-values de cession effectuées par des personnes non-résidents non-établies en Tunisie.

En ce qui concerne les opérations de cession ou de rétrocession réalisées entre des personnes non-résidentes, les sociétés émettrices des titres objet de la cession ou de la rétrocession, ainsi que les gestionnaires des fonds prévus par la législation les régissant sont tenus de demander au nouvel acquéreur des titres, des parts ou des droits y relatifs de présenter une attestation délivrée par les services des impôts compétents attestant le paiement par le cédant de l’impôt dû au titre de la plus-value de la cession ou de leur rétrocession, ou attestant sa non exigibilité, et ce, avant de lui permettre de se prévaloir de sa part dans les bénéfices ou revenus distribués. La DGELF a d’ailleurs recommandé l’information du nouvel acquéreur de la nouvelle disposition de la loi de finances pour 2014, afin qu’il prenne les précautions nécessaires qui lui garantissent l’encaissement des revenus distribués par la société dont les titres ont été acquis40.

En outre, pour la cession des immeubles, l’enregistrement des actes portant cession des immeubles par une personne morale non-résidente non établie en Tunisie à une autre personne non-résidente a été subordonné à la présentation de l’acquéreur d’une attestation délivrée par les services des impôts compétents justifiant le paiement par le cédant de l’impôt dû au titre de la plus-value réalisée à ce titre.

39 Prise de position DGELF n° 692 du 15 mai 2014

جبائية. ال ينجّر عن تغيير الشكل القانوني للشركة من شركة فعلية إلى شركة ذات مسؤولية محدودة أية تبعاتكة غير أنه وبإعتبار أن تغيير الشكل القانوني للمؤسسة المذكورة عن طريق إستيعاب الشركة المحدثة للشركة الفعلية سيؤدي إلى إنقطاع الشر

جميع الوثائق موضوع التغيير عن النشاط، فإنها تبقى مطالبة بإيداع، لدى مكتب مراقبة األداءات الراجعة له بالنظر، مطلبا في الغرض وإرفاقه بمن مجلة الضريبة على دخل األشخاص الطبيعيين والضريبة على الشركات، وتصريحا باإلنقطاع عن 57التي تثبت التغيير طبقا ألحكام الفصل

من نفس المجلة. 58النشاط خالل الخمسة عشر يوما من تاريخ تغيير الشكل القانوني للمؤسسة طبقا ألحكام الفصل

المزمع إحداثها إلى واجب إيداع تصريح في الوجود لدى مكتب مراقبة األداءات الراجعة له بالنظر وذلك طبقا ألحكام الفصل هذا، وتخضع الشركة من مجلة الضريبة على دخل األشخاص الطبيعيين والضريبة على الشركات. 56

ائي.مع العلم أن القيمة الزائدة المتأتية من عملية اإلستيعاب ال تنفع بأي إمتياز جب40 Prise de position DGELF n° 64 du 17 janvier 2014

، يتعين على الشركة الصادرة عنها األسهم موضوع التفويت مطالبة المقتني الجديد 2014من قانون المالية لسنة 92هذا، وطبقا ألحكام الفصل يبة المستوجبة بعنوان القيمة الزائدة المذكورة، أو عدم إستحقاقها باإلدالء بشهادة مسلمة من قبل مصالح األداءات المختصة تثبت دفع المفوت للضر

وذلك قبل تمكينه من حصته في األرباح أو المداخيل الموزعة.المذكور أعاله وذلك ليأخذ اإلحتياطات الالزمة حتى يتسنى له الحصول 92وعلى هذا األساس، يتجه الرأي إلى إعالم المقتني الجديد بأحكام الفصل

ا على مستحقاته من األرباح الموزعة.الحق

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III. LES REGIMES SPECIFIQUES DEDIES A LA TRANSMIS SION

DES ENTREPRISES

Partant du fait que la lourdeur du coût fiscal de droit commun peut constituer une entrave à la réalisation d’opérations de transmissions motivées par des considérations de sauvetage de l’entreprise d’une éventuelle disparition imminente, le législateur a mis en place des régimes fiscaux de faveur destinés spécifiquement à faciliter sa transmission entre les mains d’un nouvel entrepreneur capable de lui assurer le développement et parfois la survie.

Ces régimes spécifiques concernent la transmission familiale de l'entreprise, la transmission des entreprises en difficultés, le cas particulier des startups.

Signalons qu'un autre régime de faveur a été mis en place par la loi de finances pour l'année 2007 dédié à la transmission des entreprises dont l'entrepreneur ou dirigeant a atteint l'âge de la retraite ou est devenu incapable de poursuivre la gestion de l'entreprise. Ce régime de faveur a été récemment supprimé par la loi du 14 février 2017 portant refonte du dispositif des avantages fiscaux. Aussi, convient-il d'exposer ce régime de faveur et les raisons de sa suppression avant de s'attarder sur les trois autres régimes de faveur spécifiques.

LA SUPPRESSION DES AVANTAGES FISCAUXSUITE A L’ATTEINTE PAR LE DIRIGEANT DE LA RETRAITE, OU

SUITE A SON INCAPACITE

Vu qu’ « une grande majorité des entreprises industrielles privées tunisiennes ont été fondées pendant les années 60 et 70 »41 et que « la durée moyenne d’un mandat de chef d’entreprise familiale oscille entre 25 et 30 ans »42, nombreux sont les entrepreneurs tunisiens qui ont atteint actuellement l’âge de la retraite et qui sont devenus incapables de poursuivre de manière optimale, la gestion de leur entreprise. Etant donné que l’arrivée à l’âge de la retraite et la dégradation de l’état de santé du chef d’entreprise menacent la survie de l’entreprise, le législateur tunisien a mis en place, à travers la loi de finances pour l’année 2007, un régime fiscal de faveur destiné à faciliter la transmission de l’entreprise suite à l’atteinte de l’entrepreneur de l’âge de la retraite ou à son incapacité de poursuivre la gestion de son entreprise.

41 M. ZARGOUNI « La transmission de l’entreprise familiale », communication présentée dans une journée d’études organisée le 2 février 2006 portant sur « L’entreprise familiale à l’heure de sa transmission ». 42 Idem.

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Bien que sa mise en place soit justifiée, comme exposé ci-haut, ce régime de faveur, généreusement accordé, a été rapidement supprimé puisqu'il n'a survécu que dix ans.

Générosité du régime de faveur supprimé

Instauré par la loi de finances pour l'année 2007, le régime de faveur dédié à la cession de l’entreprise suite à l’atteinte de l’entrepreneur de l’âge de la retraite ou à son incapacité de poursuivre la gestion de son entreprise était tellement généreux qu'il concerne aussi bien la cession d'une entreprise individuelle que la cession d'une entreprise sociétaire. Nous exposerons ci-après l’étendue de ces incitations :

La déduction de la plus-value de cession des éléments d’actifs constituant une unité économique indépendante et autonome suite à l’atteinte du propriétaire de l’entreprise de l’âge de la retraite ou l’incapacité du propriétaire de l’entreprise de poursuivre la gestion de l’entreprise

La loi de finances pour la gestion de l’année 2007 a prévu la déduction des plus-values provenant de la cession totale des éléments de l’actif et les plus-values provenant de la cession partielle des éléments des actifs constituant une unité économique indépendante et autonome43, et ce, lorsque les opérations de cession interviennent suite à l’atteinte du propriétaire de l’entreprise de l’âge de la retraite ou l’incapacité du propriétaire de l’entreprise de poursuivre la gestion de l’entreprise au sens du décret n° 2007-934 du 16 avril 200744. Le bénéfice de cette déduction est notamment subordonné à la condition d’inscription des actifs cédés au bilan à la date de la cession.

Le bénéfice de cette déduction est subordonné à la satisfaction des conditions suivantes :

- Les actifs cédés doivent être inscrits au bilan à la date de la cession ;

- La production, à l’appui de la déclaration annuelle de l’impôt de l’année de la déduction, d’un état comportant les actifs cédés

43 Selon la note commune n° 33 de l’année 2007 (Texte DGI 2007/68), est considéré « unité économique indépendante et autonome », l’ensemble des actifs et passifs d’une partie d’une entreprise qui représente, au niveau de sa structure une exploitation pouvant poursuivre l’activité de façon indépendante et par ses propres moyens. 44 Selon le décret n° 2007-934 du 16 avril 2007, sont considérés des cas d'incapacité de poursuivre la gestion de l'entreprise, au sens des articles 12, 13, 16, 18 et 20 de la loi n° 2006-85 du 25 décembre 2006, portant loi de finances pour l'année 2007 : - les cas d'invalidité résultant de maladies ou d’accidents de la vie courante permettant l'octroi d'une pension d'invalidité conformément à la législation en vigueur dans le cadre des régimes de sécurité sociale dans le secteur privé ; - les cas d'invalidité résultant de l'usure de l'organisme permettant l'octroi d'une pension de préretraite suite à l'usure de l'organisme résultant des conditions de travail conformément à la législation en vigueur dans le cadre des régimes de sécurité sociale dans le secteur privé ; - les cas d'invalidité résultant des accidents de travail et des maladies professionnelles permettant l'octroi d'une pension dans le cadre du régime de réparation des préjudices résultant des accidents de travail et des maladies professionnelles dans le secteur privé et qui sont de nature à empêcher le propriétaire de l'entreprise de poursuivre sa gestion ; - les cas d'invalidité justifiés par un rapport motivé et délivré par deux médecins hospitalo-universitaires qui exercent leur activité dans le secteur de la santé publique et qui confirment l'incapacité du propriétaire de l'entreprise de poursuivre sa gestion.

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mentionnant la VCN des actifs, la valeur de cession et la plus-value ou la moins-value enregistrée ;

- La poursuite par l’entreprise cessionnaire de l’exploitation de l’entreprise ou de l’unité acquise pour une période de 3 ans au moins, à compter du premier janvier de l’année qui suit celle de l’acquisition45.

Le non-respect de la condition de poursuite de l’exploitation entraîne le paiement par le bénéficiaire de la déduction de l’impôt non acquitté au titre de la plus-value déduite, majoré des pénalités de retard exigibles conformément à la législation en vigueur. Ces dispositions ne s’appliquent pas en cas de non-respect de cette condition pour des motifs n’incombant pas à l’entreprise cessionnaire fixés par le décret n° 2007-1266 du 21 mai 200746.

L’exonération de la plus-value de cession totale des actions ou des parts sociales suite à l’atteinte par le dirigeant de l’âge de la retraite, ou suite à son incapacité de poursuivre la gestion de la société

La loi de finances pour l’année 2007 a exonéré de l’IRPP, la plus-value provenant de la cession totale des actions ou des parts sociales propriété d’un dirigeant dans le capital de la société qu’il dirige suite à l’atteinte par ce dernier de l’âge de la retraite, ou suite à son incapacité de poursuivre la gestion de la société. Les cas d’incapacité de poursuivre la gestion sont fixés par le décret n° 2007-934 du 16 avril 2007.

Le bénéfice de cette exonération est subordonné à :

- La possession par le dirigeant de participations supérieures à 50% du capital de la société qu’il dirige. Pour la détermination de cette participation, sont prises en considération les participations

45 Selon la note commune n° 33 de l’année 2007, la poursuite de l’exploitation suppose selon l’hypothèse sous-jacente prévue par le cadre conceptuel de la comptabilité relative à la continuité de l’exploitation, que l’entreprise n’ait ni l’intention ni l’obligation de mettre fin à ses activités ou de réduire le volume de ses opérations de façon notoire. Sur la base de ce qui précède la cessation de l’activité pour une période limitée pour des motifs dictés par l’exploitation optimale de l’entreprise comme, par exemple, l’arrêt pour des réparations ou des améliorations n’est pas considéré comme non-respect de la condition relative à la poursuite de l’activité. Toutefois, la réduction du volume de l’activité de façon notoire et volontaire ou la prise de décisions concrètes portant préjudice à la continuité de l’entreprise et conduisant à l’arrêt futur de son activité est considérée comme arrêt implicite de l’activité. Par ailleurs, est considérée comme arrêt de l’exploitation, la cession de l’entreprise ou de l’unité économique acquise avant l’expiration de la période de 3 ans précitée. 46 En application des dispositions du décret n° 2007-1266 du 21 mai 2007 relatif à la fixation des motifs de l’arrêt de l’activité non imputables à l’entreprise, sont considérés des motifs non imputables à l’entreprise de nature à l’empêcher de poursuivre son activité : 1. la cession de l’entreprise à un tiers dans le cadre du règlement judiciaire, au sens de la loi n° 95-34 du 17 avril 1995 relative au redressement des entreprises en difficultés économiques, telle que modifiée et complétée par les textes subséquents. 2. les cas de force majeure indépendante des faits de l’entreprise prouvés conformément à la loi et qui empêchent l’entreprise de poursuivre son activité. 3. l’union des créanciers et le concordat par abandon d’actif par le failli dans le cadre de la faillite conformément aux dispositions du CC, à l’exception des cas de banqueroutes.

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directes et indirectes du dirigeant de la société et de ses enfants non émancipés47 ;

- La poursuite de l’exploitation de la société pendant une période de 3 ans au moins, à compter du premier janvier de l’année qui suit celle de la cession.

En cas de non-respect de la condition de poursuite de l’exploitation, le bénéficiaire de l’exonération est tenu du paiement de l’impôt non acquitté au titre de la plus-value exonérée, majoré des pénalités de retard exigibles conformément à la législation en vigueur. Ces dispositions ne s’appliquent pas en cas de non-respect de cette condition pour des motifs qui n’incombent pas à la société et qui sont fixés par le décret n° 2007-1266 du 21 mai 2007.

Le dégrèvement financier au titre de l’acquisition des titres auprès d’un dirigeant suite à l’atteinte par ce dernier de l’âge de la retraite ou pour son incapacité de poursuivre la gestion de la société

La loi de finances pour l’année 2007 a prévu la déduction des revenus et bénéfices réinvestis dans l’acquisition d’actions ou de parts sociales de sociétés exerçant dans les secteurs prévus par l’ancien CII et effectuées auprès d’un dirigeant dans le capital de la société qu’il dirige, suite à l’atteinte par ce dernier de l’âge de la retraite ou pour son incapacité de poursuivre la gestion de la société.

La déduction est accordée sur décision du Ministre des Finances ou de toute personne déléguée par le Ministre des Finances à cet effet.

Le bénéfice de la déduction est subordonné à :

- La tenue d’une comptabilité conforme à la législation comptable des entreprises pour les personnes physiques réalisant des revenus dans la catégorie des BIC ou dans la catégorie des bénéfices des professions non commerciales ;

- La production, à l’appui de la déclaration annuelle de l’impôt de l’année de la déduction, d’un état des actions ou des parts sociales acquises comportant notamment la valeur d’acquisition et d’une copie de la décision du Ministre des Finances précitée.

Le bénéficiaire de la déduction est tenu du paiement de l’impôt non acquitté au titre des montants réinvestis, majoré des pénalités de retard exigibles conformément à la législation en vigueur, et ce, en cas d’arrêt de l’exploitation de l’entreprise acquise avant l’expiration des 3 années suivant celle de la déduction. Ces dispositions ne s’appliquent pas en cas d’arrêt de l’exploitation pour des motifs n’incombant pas à la société, tels que fixés par le décret n° 2007-1266 du 21 mai 2007.

47 Selon la note commune n° 33 de l’année 2007 (Texte DGI 2007/68) : - Les participations indirectes au capital de la société sont celles qui résultent de la participation au capital de sociétés détenant à leur tour des participations dans le capital de la société concernée. - Le dirigeant est toute personne responsable des actes de gestion dans l’entreprise et des résultats de ces actes, il s’agit, par exemple, du gérant de la SARL et de la société unipersonnelle à responsabilité limitée et du PDG pour les sociétés anonymes.

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Le dégrèvement physique au titre des acquisitions des actifs d’entreprises en difficultés ou lorsque ces acquisitions interviennent suite à l’atteinte du propriétaire de l’entreprise de l’âge de la retraite ou suite à l’incapacité du propriétaire de l’entreprise de poursuivre la gestion de l’entreprise

La loi de finances pour l’année 2007 a prévu la déduction des revenus et bénéfices réinvestis dans le cadre des opérations suivantes :

- Acquisition totale des éléments de l’actif ou acquisition partielle des éléments des actifs constituant une unité économique indépendante et autonome lorsque ces acquisitions interviennent suite à l’atteinte du propriétaire de l’entreprise de l’âge de la retraite ou suite à l’incapacité du propriétaire de l’entreprise de poursuivre la gestion de l’entreprise ;

- Acquisition des entreprises en difficultés économiques dans le cadre du règlement judiciaire ou acquisition d’une branche d’activité ou d’un ensemble de branches complémentaires de l’entreprise en difficultés.

La déduction est accordée sur la base d’une décision du Ministre des Finances ou de toute personne déléguée par le Ministre des Finances à cet effet.

Le bénéfice de la déduction est également subordonné à :

- L’exercice par l’entreprise cédée de son activité dans des secteurs prévus par le CII,

- La poursuite de l’exploitation de l’entreprise cédée par l’entreprise cessionnaire pendant une période de 3 ans au moins, à compter du premier janvier de l’année qui suit celle de l’acquisition,

- La tenue d’une comptabilité conforme à la législation comptable des entreprises pour les personnes physiques réalisant des revenus dans la catégorie des BIC ou dans la catégorie des bénéfices des professions non commerciales,

- L’enregistrement des actifs de l’entreprise acquis au bilan de l’entreprise cessionnaire de l’année concernée par la déduction,

- La production, à l’appui de la déclaration annuelle de l’impôt de l’année de la déduction, d’un état des éléments acquis comportant notamment la valeur d’acquisition et d’une copie de la décision du Ministre des Finances précitée.

Le bénéficiaire de la déduction est tenu du paiement de l’impôt non acquitté au titre des montants réinvestis, majoré des pénalités de retard exigibles conformément à la législation en vigueur, et ce, en cas d’arrêt de l’exploitation de l’entreprise acquise avant l’expiration des 3 années suivant celle de la déduction. Ces dispositions ne s’appliquent pas en cas d’arrêt de l’exploitation pour des motifs n’incombant pas au bénéficiaire de la déduction, motifs fixés par le décret n° 2007-1266 du 21 mai 2007.

L’enregistrement au droit fixe de la transmission de la totalité de l’entreprise suite à l’atteinte du propriétaire de l’entreprise

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de l’âge de la retraite ou à son incapacité de poursuivre la gestion de l’entreprise

Est soumise au droit fixe d’enregistrement de 150 DT, la transmission des biens dans le cadre de la transmission des entreprises à titre onéreux48.

Le bénéfice de l’enregistrement au droit fixe est subordonné à la satisfaction des conditions suivantes :

- L’entreprise transmise doit avoir déposé une déclaration d’existence et entamé effectivement son activité à la date de sa transmission,

- L’entreprise transmise doit être soumise à l’IS ou à l’IRPP selon le régime réel,

- Les biens cédés doivent être inscrits au bilan à la date de la transmission,

- L’écrit de transmission doit contenir l’engagement de continuer l’exploitation, durant une période de 3 ans au moins, à compter du premier janvier de l’année qui suit l’année de la transmission.

Les justifications de la suppression du régime de faveur

Après une durée très courte de survie de 10 ans, le régime de faveur dédié par la loi de finances pour l'année 2007 à la cession de l'entreprise suite à l'atteinte par l'entrepreneur ou le dirigeant associé de l’âge de la retraite ou suite à son incapacité de poursuivre la gestion de l'entreprise, vient d'être supprimé par l'article 15-6)de la loi n° 8 du 14 février 2017 portant refonte du dispositif des avantages fiscaux. Selon cet article "Sont abrogées, les dispositions du paragraphe I de l’article 11 bis, les dispositions du numéro 19 de l’article 38, les dispositions du paragraphe II de l’article 39 quater et les dispositions du paragraphe II de l’article 48 quater du code de l’impôt sur le revenu des personnes physiques et de l'impôt sur les sociétés".

Quelles sont les raisons de la suppression de l'intégralité de ce régime de faveur ? Est-ce que notre tissu économique ne souffre plus du vieillissement d'une partie de la population des entrepreneurs, raison qui avait en 2007 justifié la mise en place de ce régime ? La réponse est assurément négative puisque les départs à retraite des entrepreneurs vont en crescendo.

L'exposé des motifs du projet de la loi portant refonte du dispositif des avantages fiscaux apporte cependant quelques éléments de réponse quant aux raisons de la suppression de ce régime de faveur. L'on a pu lire en effet que « les opérations de cession d'entreprises qui ont bénéficié des avantages fiscaux n'ont concerné que les secteurs non productifs et non générateurs de valeur ajoutée ». L'exposé des motifs ajoute que les opérations de cession d'entreprises ayant bénéficié des avantages « ont concerné exclusivement les entreprises commerciales et plus particulièrement des pharmacies ; ce qui va

48 La transmission visée par la mesure concerne la totalité de l’entreprise ou d’une partie qui constitue une entité économique indépendante et autonome et qui s’effectue suite à l’atteinte du propriétaire de l’entreprise de l’âge de la retraite ou à son incapacité de poursuivre la gestion de l’entreprise. Les cas d’incapacité de poursuivre la gestion de l’entreprise sont fixés par le décret n° 2007-934 du 16 avril 2007.

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à l'encontre des objectifs pour lesquels les avantages sont octroyés à savoir, la préservation de la pérennité des entreprises et des postes d'emploi ».

Or, aussi fondées qu'elles soient, les explications avancées auraient commandé non pas de supprimer purement et simplement le régime de faveur, mais de rétrécir son champ d'application aux entreprises industrielles par exemple.

En tous cas, il existe une sorte d'inadéquation entre le diagnostic opéré par les pouvoirs publics et la solution adoptée. Si l'objectif du régime de faveur institué en 2007 était la pérennisation de l'entreprise dans les secteurs productifs, à valeur ajoutée et la préservation des postes d'emploi, nul ne peut affirmer le contraire en 2017. Au lieu de sa suppression, le régime de faveur aurait dû être maintenu sous réserve de quelques modifications liées à son champ d'application.

LES REGIMES DE FAVEUR DEDIES A LA TRANSMISSION FAMILIALE DE L'ENTREPRISE

Le problème de la transmission familiale ou intergénérationnelle de l'entreprise est devenu ces dernières années l'une des préoccupations majeures des pouvoirs publics pour plus qu'une raison.

La première est que la majorité écrasante des entreprises tunisiennes sont des entreprises familiales. Selon les chiffres avancés par l'INS (RNE 2016), sur un total de 740054 entreprises en activité, 591796 sont des entreprises individuelles, 110850 sont des SARL, 26724 sont des SUARL. Le résultat de ces statistiques est que 99% des entreprises tunisiennes sont des PME, généralement de type familial.

La deuxième est que ces 99% des entreprises procurent environ 800.000 emplois salariés.

La troisième est qu'un nombre non négligeable des entrepreneurs a atteint l'âge de la retraite, et notamment les entrepreneurs ayant fondé des entreprises au cours des années 1970 et 1980.

Partant de ces données, les pouvoirs publics ne peuvent rester les mains croisées face au phénomène de vieillissement d'une bonne partie de la population des entrepreneurs ayant fondé des entreprises de type familial et doivent aménager un terrain favorable à la transmission intergénérationnelle desdites entreprises afin de les pérenniser et de sauver les emplois générés. La transmission intergénérationnelle de l'entreprise devrait, dans l'intérêt de tous, être stratégiquement planifiée et ne pas être le fruit de la fatalité.

C'est pourquoi, le législateur a mis en place quelques mesures levant les obstacles fiscaux liés à la transmission intergénérationnelle des entreprises ; lesquelles mesures se sont traduites par des régimes fiscaux de faveur concernant :

- La transmission gratuite par voie de donation de l'entreprise du vivant du dirigeant ;

- La transmission successorale de l'entreprise.

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Le régime de faveur lié à la transmission gratuite par voie de donation de l'entreprise du vivant du dirigeant

Qualifiée par un auteur comme "le scénario type"49 de la transmission de l'entreprise familiale, la donation permet à l'entrepreneur d'assurer, de son vivant, le transfert de propriété de son entreprise à ses descendants, futurs successeurs.

Le législateur a institué un régime de faveur pour les donations à travers la loi n° 2006-69 du 28 octobre 2006 relative à l'exonération des donations entre ascendants et descendants et entre époux du droit d'enregistrement proportionnel. Certes, cette loi n'est pas spécifiquement dédiée à la transmission des entreprises en ligne directe et entre époux. Mais, du fait qu'elle est dédiée de manière plus générale à toute donation de biens meubles et immeubles, elle couvre les donations d'entreprises.

Ainsi, la loi n°2006-69 du 28 octobre 2006 a-t-elle prévu un régime de faveur pour les donations entre ascendants et descendants et entre époux, et ce par :

- L’exonération des donations de biens entre ascendants et descendants et entre époux du droit d’enregistrement proportionnel ;

- L’exonération des donations relatives aux immeubles entre ascendants et descendants et entre époux du droit proportionnel fixé à 1% exigible selon les cas au titre du droit d’inscription foncière ou au titre du droit de mutation et de partage des immeubles non immatriculés, et leur soumission à un droit fixe de 100 DT et ;

- L’exception des donations du champ d’application des droits dus pour défaut d’origine de la propriété fixé à 3%50.

Soulignons aussi qu’en application de l’article 34 de la loi de finances pour l’année 2018, le régime de faveur d’enregistrement des donations entre ascendants et descendants et entre époux est accordé une seule fois tous les cinq ans, au titre de chaque droit réel relatif à un même immeuble51.

En revanche, le droit pour défaut d’origine de la propriété de 3% demeure, dans tous les cas, non exigible sur les donations.

49 Fayçal DERBEL "Les régimes fiscaux de la transmission d'entreprises", Revue Comptable et Financière, n° 80, 2008, p. 38. 50 Avec la loi n°2006-69 du 28 octobre 2006, les actes de donation sont devenus nonobstant le degré de parenté entre le donateur et le donataire hors champs d’application des droits dus pour défaut d’origine de la propriété. 51 Il s’ensuit qu’en cas de nouvelle donation entre ascendants et descendants et entre époux

intervenue avant l’expiration du délai de 5 ans à compter d’une première donation ayant bénéficié du régime de faveur, la nouvelle donation s’enregistre avec : - le droit d’enregistrement proportionnel fixé à 2,5% de la valeur du droit réel avec un minimum de perception de 40 DT ; - le droit d’enregistrement complémentaire dû sur les actes notariés au taux de 2 % pour les immeubles dont la valeur varie de 500.000 DT à un million de DT et au taux de 4 % pour les immeubles dont la valeur est supérieure à un million de DT ; - le droit d’inscription foncière ou au titre du droit de mutation et de partage des immeubles non immatriculés fixé à 1% de la valeur du droit réel avec un minimum de perception de 5 DT ; - le droit de timbre de 5 DT par feuille dû sur les actes soumis à un droit d’enregistrement proportionnel.

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Le régime de faveur lié à la transmission successorale de l’entreprise

Outre le régime de faveur accordé à la donation d'entreprises du vivant de l'entrepreneur, le législateur a, à travers la loi de finances pour l'année 2007, instauré deux régimes de faveur dédiés à la transmission successorale de l'entreprise. Ainsi, même lorsque le chef d’entreprise meurt avant de transmettre son entreprise, et afin d’empêcher que l’enterrement du chef d’entreprise n’entraîne l’enterrement de l’entreprise, le législateur a enterré les droits d’enregistrement dus sur les héritiers à l’occasion de la transmission par décès de l’entreprise52.

Les deux régimes de faveur concernent d'une part, la succession d'une entreprise individuelle et d'autre part, la succession de participations dans des entreprises sociétaires.

Le régime de faveur dédié à la succession de l'entreprise individuelle

En principe, et en application du régime de droit commun de la succession, le décès de l’exploitant d’une entreprise individuelle constitue un évènement fiscalement coûteux pour les héritiers53.

Afin d’alléger le poids des impôts frappant la succession d’une entreprise individuelle, la loi de finances pour l’année 2007 a institué une exonération des droits de succession au titre de « la transmission par décès de la totalité des immeubles et des meubles corporels et incorporels exploités au sein d’une entreprise ou d’une partie qui constitue une unité économique indépendante et autonome »54. L’application de cette exonération est cependant subordonnée à deux conditions qui limitent sensiblement sa portée.

La première condition est que les éléments d’actifs transmis soient « inscrits à l’actif du bilan de l’entreprise à la date du décès ». Cette condition limite le champ de l’exonération à la seule succession d’entreprises soumises au régime réel à la date du décès de l’exploitant. La succession d’entreprises soumises à l’un des régimes forfaitaires d’impôt (pour les BIC) et d’assiette (pour les BNC et les BAP) n’ouvre donc pas droit au bénéfice de l’exonération. Ce qui exclut

52 Voir, A. SVEICHEN « Faut-il enterrer les impôts de succession ? », Dr. Fisc., Supplément au n° 25, juin 2007, p. 2. 53Au cas où les héritiers auraient décidé de poursuivre l’exploitation de l’entreprise héritée, ils sont

amenés à supporter les deux impôts suivants : - l’impôt sur le revenu au titre des bénéfices de l’exploitation réalisés par le défunt. Le montant de l’IR ne peut excéder la moitié de l’actif net successoral avant paiement des droits de succession ; - les droits de succession frappant la totalité de l’actif meuble et immeuble de l’entreprise transmise par décès après déduction du passif successoral. Au cas où les héritiers auraient décidé de céder ou de cesser l’exploitation de l’entreprise héritée, ils sont amenés à supporter, outre les impôts ci-dessus visés, les impositions suivantes : - les droits d’enregistrement au titre du partage de l’actif de l’entreprise héritée au cas où les héritiers auraient décidé de cesser l’exploitation tout en copartageant les éléments de l’actif de l’entreprise. - l’impôt sur le revenu au titre de la plus-value réalisée sur les éléments de l’actif immobilisé de l’entreprise au cas où les héritiers auraient décidé soit de cesser l’exploitation de l’entreprise héritée, soit de céder la totalité de ses éléments de l’actif. - la régularisation de la TVA initialement déduite par le défunt au titre des acquisitions par l’entreprise héritée des biens d’équipement ou de bâtiments et ce en cas de cession ou de cessation de l’exploitation de l’entreprise par les héritiers. 54 Article 52 bis du CDET tel qu’ajouté par l’article 19 de la loi de finances pour l’année 2007.

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du champ de l’exonération un nombre fort important de successions d’entreprises compte tenu de la prévalence pratique des régimes forfaitaires sur le régime réel.

La seconde condition est que les héritiers et légataires doivent s’engager « à continuer l’exploitation de l’entreprise pour une période de trois ans au moins à compter du premier janvier de l’année qui suit l’année du décès ». A travers cette condition, le législateur a limité le domaine de l’exonération aux héritiers qui ont décidé de poursuivre l’exploitation de l’entreprise à l’exclusion des héritiers qui ont décidé de cesser ou de céder l’exploitation de l’entreprise.

Outre le fait que l’exposé de motifs de l’article 19 de la loi de finances pour l’année 2007 ne comporte aucune allusion quant au bien-fondé de cette condition, l’exigence de la poursuite de l’exploitation par les héritiers est discutable pour plusieurs raisons.

D’abord, si le bien-fondé de l’exigence de la poursuite de l’exploitation de l’entreprise par les héritiers était d’assurer la survie de l’entreprise en tant qu’opérateur économique et source d’emploi, pourquoi limiter l’exonération au seul cas de poursuite de l’exploitation par les héritiers ? Il est vrai que par cette mesure, le législateur a voulu éviter la cessation de l'activité de l’entreprise, mais, n’était-il pas plus judicieux d’étendre cette exonération au cas de la cession de l’entreprise par les héritiers à un tiers cessionnaire qui assurera la survie de l’entreprise ? D’ailleurs, le législateur peut dans ce cas exiger du cessionnaire de ne pas céder l’entreprise acquise pendant trois ans.

Ensuite, l’exigence de la poursuite de l’exploitation de l’entreprise par les héritiers pendant trois ans peut amener les héritiers, afin de bénéficier de l’exonération, à maintenir artificiellement l’exploitation de l’entreprise en la mettant en veilleuse ou à retarder sa cession ou sa cessation jusqu’à l’expiration de la durée exigée par la loi. Les échappatoires fiscales ne manqueront donc pas d’apparaître sur le plan pratique. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle, l'administration fiscale a interprété de manière assez restrictive la condition de la poursuite de l'exploitation par les héritiers en précisant qu'elle "suppose que l’entreprise n’ait ni l’intention ni l’obligation de mettre fin à ses activités ou de réduire le volume de ces opérations de façon notoire". L'administration ajoute que "Sur la base de ce qui précède la cessation de l’activité pour une période limitée pour des motifs dictés par l’exploitation optimale de l’entreprise comme par exemple l’arrêt pour des réparations ou des améliorations n’est pas considéré comme non-respect de la condition relative à la poursuite de l’activité. Toutefois, la réduction du volume de l’activité de façon notoire et volontaire ou la prise de décisions concrètes portant préjudice à la continuité de l’entreprise et conduisant à l’arrêt futur de son activité est considérée comme arrêt implicite de l’activité"55.

En outre, l’exigence de la poursuite de l’exploitation de l’entreprise par les héritiers peut aboutir à des distorsions et à des discriminations peu justifiables. Parfois, il est pratiquement impossible que les héritiers puissent poursuivre l’exploitation de l’entreprise héritée. Tel est le cas des héritiers exerçant dans le secteur de la fonction publique et pour lesquels il est interdit d’exercer un

55 Note commune n° 33/2007.

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emploi de cumul. Dans ce cas, les héritiers risquent de violer le statut de la fonction publique en poursuivant l’exploitation de l’entreprise héritée. Tel est également le cas des héritiers d’une entreprise libérale (le défunt exploitait un cabinet médical, un cabinet d’avocat ou un cabinet d’huissier). Les héritiers peuvent ne pas avoir les diplômes nécessaires pour poursuivre l’exploitation de l’entreprise libérale et ne peuvent par conséquent pas bénéficier de l’exonération des droits de succession.

En plus, tout en prévoyant que «les héritiers s’engagent à poursuivre l’exploitation », est-ce que le législateur exige, pour bénéficier de l’exonération, que l’exploitation soit poursuivie en commun par tous les héritiers ? Est-ce que le bénéfice de l’exonération nécessite que les héritiers demeurent dans l’indivision jusqu’à l’expiration du délai de trois ans exigé pour l’application de l’exonération ? Est-ce que les héritiers sont en droit de réclamer le bénéfice de l’exonération alors même que l’exploitation de l’entreprise héritée est assurée, pour une raison ou une autre, par un seul héritier et non pas d’une manière conjointe ?

Enfin, l’exonération instituée par l’article 52 bis du CDET tel qu’ajouté par l’article 19 de la loi de finances pour l’année 2007 risque de rendre inutile une autre exonération, celle prévue par l’article 52 du CDET. En effet, en vertu de l’article 52 du CDET, l’héritage d’immeubles agricoles est exonéré des droits de succession à condition que les héritiers « produisent un engagement stipulant le maintien de ladite propriété agricole en copropriété et son exploitation d’une manière collective durant une période de 15 ans au moins ». Or, et suite à l’adoption de l’exonération prévue par l’article 52 bis du CDET par la loi de finances pour l’année 2007, les héritiers d’une entreprise agricole auront intérêt à réclamer l’application de cette nouvelle exonération qui va leur permettre un double avantage par rapport à la première exonération. D’une part, alors que l’exonération prévue par l’article 52 du CDET ne s’applique qu’aux immeubles agricoles, l’exonération prévue par l’article 52 bis du CDET s’applique non seulement à l’actif immeuble de l’entreprise, mais aussi à son actif meuble. D’autre part, alors que l’exonération prévue par l’article 52 du CDET exige la poursuite commune de l’exploitation des immeubles pendant 15 ans, l’exonération prévue par l’article 52 bis du CDET n’exige la poursuite de l’exploitation commune de l’entreprise que pendant trois ans. Que reste-t-il alors de l’exonération prévue par l’article 52 du CDET ? Tout au plus, on peut penser que cette exonération n’a d’intérêt que lorsque l’entreprise agricole héritée est soumise au régime du forfait d’assiette.

En tout état de cause, et abstraction faite des innombrables imperfections de l’exonération instituée par l’article 52 bis du CDET, les héritiers seront déchus du bénéfice de l’exonération en cas d’arrêt de l’exploitation avant l’expiration de trois ans à compter du premier janvier de l’année qui suit l’année du décès. Dans ce cas, les héritiers seront tenus de payer les droits proportionnels exigibles sur les successions majorés des pénalités de retard. Cette déchéance ne s’applique pas en cas d’arrêt de l’exploitation pour des raisons qui ne sont pas imputables aux héritiers et qui sont fixées par le décret n° 2007-1266 du 21 mai 2007.

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Le régime de faveur dédié à la succession de participations dans des entreprises sociétaires

Corrélativement à l’exonération des droits de succession dus au titre de la transmission aux héritiers d’une entreprise individuelle, la loi de finances pour l’année 2007 a institué une autre exonération des droits de succession dus au titre de la transmission des actions ou parts sociales détenues par le défunt. L’application de cette exonération est cependant subordonnée à plusieurs conditions.

La première condition est relative aux titres objets de l’exonération des droits de succession qui doivent être des actions ou parts sociales, c'est-à-dire des participations dans des sociétés anonymes, en commandite par actions ou à responsabilité limitée. Est exclue du champ de l’exonération, la succession de tout titre autre que les actions et parts sociales. Tel est le cas des droits sociaux détenus par le défunt dans une société en nom collectif ou en commandite simple.

La seconde condition est relative au statut juridique du défunt qui doit avoir été à la fois associé majoritaire et dirigeant de la société émettrice des actions ou parts sociales objets de l’exonération. Le défunt doit en effet posséder des « participations supérieures à 50 % au capital de la société qu’il dirigeait à la date du décès. Sont prises en considération pour le calcul de ce taux, les participations directes et indirectes du dirigeant de l’entreprise et de ses enfants non émancipés ».

La troisième condition consiste dans l’exigence d’un « engagement par les héritiers et légataires de continuer l’exploitation durant une période de trois ans au moins à compter du premier janvier de l’année qui suit l’année du décès ».

LE REGIME DE FAVEUR DEDIE A LA TRANSMISSION DES ENTREPRISES EN DIFFICULTES

Outre l’effort fiscal de prévention de la disparition des entreprises familiales, le législateur a institué à travers la loi de finances pour l’année 2007 un régime fiscal de faveur dédié aux transmissions judiciaires des entreprises en difficultés économiques objet d’une procédure de règlement judiciaire au sens de la loi du 17 avril 1995 (remplacée aujourd'hui par la loi n° 36 du 29 avril 2016 relative aux procédures collectives)56. Par ce régime de faveur, la législation fiscale rejoint, bien que tardivement, la législation privée dans son objectif de sauvetage de l’entreprise en difficultés en supprimant les entraves fiscales au traitement curatif des entreprises en difficultés objets d’un plan de cession. Le législateur fiscal ne peut plus en effet se permettre le luxe de traiter l’entreprise en difficultés au même titre que l’entreprise in bonis et de continuer à manger les œufs d’une poule qui périt57.

56 Voir les articles 12 à 20 de la loi n° 2006-85 du 25 décembre 2006 portant loi de finances pour l’année 2007. 57 P. SERLOOTEN, Défaillance de l’entreprise, aspects fiscaux, Dalloz, Paris, 1997, p. 185.

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Ce régime de faveur doit cependant être précisé quant à ses conditions et sa portée en ce qui concerne chacun des impôts susceptibles de frapper l’opération de transmission de l'entreprise en difficultés, à savoir l’impôt sur les bénéfices, les droits d’enregistrement et la TVA.

Le régime de faveur en matière d'impôt sur les bénéfices

En matière d'imposition des bénéfices, la transmission de l'entreprise en difficulté ouvre droit à l'application d'un régime de faveur non seulement du côté de l'entreprise cédée, mais aussi du côté du preneur.

Pour l'entreprise en difficultés cédée

L’article 11 bis II du CIRPPIS tel qu’ajouté par l’article 12 de la loi de finances pour l’année 2007 dispose que « est déductible du bénéfice imposable la plus-value provenant de la cession des entreprises en difficultés économiques dans le cadre du règlement judiciaire prévu par la réglementation relative au redressement des entreprises en difficultés économiques ou de la cession d’une branche de son activité ou d’un ensemble de branches complémentaires ». Permettant d’alléger la charge fiscale de l’entreprise en difficultés, l’exonération de la plus-value provenant de la cession de ladite entreprise est subordonnée à deux conditions.

La première condition est relative à la nature de l’opération de cession exonérée qui doit en principe être une cession intervenant dans le cadre du règlement judiciaire. En se référant aux dispositions du Code de Commerce relatives au règlement judiciaire, telles qu'ajoutées par la loi n°36 du 29 avril 2016 relative aux procédures collectives, force est de constater que les cessions d'entreprises en difficultés en phase du règlement judiciaire peuvent intervenir dans deux hypothèses.

La première hypothèse est celle de la cession globale intervenant à l'occasion de l'élaboration d'un plan de cession de l'entreprise en difficultés au sens des articles 461 à 465 du Code de Commerce.

La seconde hypothèse est celle de la cession partielle intervenant à l'occasion de l'élaboration d'un plan de continuation de l'entreprise en difficultés au sens des articles 455 à 459 du Code de Commerce.

Si l'exonération de la plus-value de cession de l'entreprise en difficultés s'applique sans aucun problème particulier pour la première hypothèse, elle ne s'applique pour la seconde hypothèse que lorsque la cession partielle intervenant lors de l'élaboration d'un plan de continuation, concerne une branche d'activité de l'entreprise en difficultés. Par branche d’activité il faut entendre « l’ensemble des éléments d’actif investis dans une division qui constitue du point de vue technique, une exploitation autonome, c'est-à-dire un ensemble capable de fonctionner d’après ses propres moyens »58.

Ainsi, lorsque la cession partielle, intervenant lors de l'élaboration d'un plan de continuation, concerne des biens isolés, non constitutifs d'une branche

58 P. SERLOOTEN, Droit fiscal des affaires, op. cit., n° 273, p. 201.

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d'activité, la plus-value éventuellement dégagée ne bénéficie pas de l’exonération prévue par l’article 11 bis II du CIRPPIS.

La deuxième condition consiste dans la présentation par l’entreprise en difficultés d’un « état des actifs cédés mentionnant les références de la décision de cession, les références du journal officiel de la République Tunisienne comportant publication de la décision de la cession, la valeur comptable nette des actifs, la valeur de cession et la plus-value ou la moins-value enregistrée »59. Cet état doit être joint à la déclaration de l’IR ou de l’IS de l’année de la déduction de la plus-value réalisée.

Pour le preneur de l'entreprise en difficultés

L’un des problèmes majeurs rencontrés lors de la transmission des entreprises en difficultés, est celui de trouver un preneur disposant des capitaux nécessaires pour acquérir l’entreprise. Or, en l’absence d’un preneur, les avantages fiscaux concédés par le législateur au profit de l’entreprise en difficultés cédée restent insuffisants pour dynamiser le marché desdites entreprises. Encore faut-il que des aides fiscales à l’acquisition d’entreprises en difficultés soient consenties aux preneurs.

C'est la raison pour laquelle, et conformément à la législation actuellement en vigueur, le législateur a concédé au preneur d'une entreprise en difficultés deux avantages fiscaux. Le premier consiste dans le dégrèvement des bénéfices réinvestis par le preneur dans l'acquisition de l'entreprise en difficultés ; le second consiste dans l'octroi des exonérations de démarrage aux entreprises en difficultés acquises et ce, au même titre que les entreprises nouvellement créées.

▪ Le dégrèvement pour réinvestissement physique

Utilisée par le législateur tunisien depuis 1962, la technique du dégrèvement pour réinvestissement n’était conçue que pour encourager la création ou l’augmentation du capital des entreprises. La loi de finances pour l’année 2007 a instrumentalisé la technique du dégrèvement pour réinvestissement dans un autre objectif, celui de faciliter la transmission des entreprises en difficultés. Désormais et en vertu des articles 39 quater et 48 quater du CIRPPIS, tels qu'ajoutés par l’article 14 de la loi de finances pour l’année 200760 et modifiés par l'article 15 de la loi n° 8 du 14 février 2017 portant refonte du dispositif des avantages fiscaux, l’acquéreur d’une entreprise en difficultés, qu’il soit une personne physique soumise à l’IR ou personne morale soumise à l’IS, est en droit de bénéficier du dégrèvement de la totalité des bénéfices réinvestis61 dans l’acquisition de ladite entreprise et ce, dans la limite des bénéfices soumis à l'IR ou à l'IS au titre de l'année d'acquisition.

59 Article 11 bis II du CIR. 60 Cet article a ajouté au CIRPPIS un article 39 quater applicable aux preneurs personnes physiques soumis à l'IR et un article 48 quater applicable aux preneurs personnes morales soumises à l’IS. 61 Initialement, et avant leur modification par l'article 15 de la loi n°8 du 14 février 2017, le plafond de la déduction des bénéfices réinvestis était fixé à 35% des bénéfices réalisés au titre de l'année d'acquisition.

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Cependant, le dégrèvement pour réinvestissement n’est pas accordé systématiquement. Son octroi est subordonné à plusieurs conditions de forme et de fond.

Pour bénéficier du dégrèvement, l’acquéreur doit respecter trois conditions de forme.

La première condition réside dans l’agrément du dégrèvement par le ministre des finances. En effet, selon les articles 39 quater et 48 quater du CIRPPIS « la déduction est accordée sur décision du Ministre des finances ou toute personne déléguée par le Ministre des finances à cet effet ».

La seconde condition réside dans l’enregistrement des actifs acquis au bilan de l’entreprise cessionnaire de l’année concernée par le dégrèvement et ce, pour le preneur personne physique.

La troisième condition réside dans la production à l’appui de la déclaration annuelle de l’IR ou de l’IS de l’année du dégrèvement d’un état des éléments acquis comportant notamment la valeur d’acquisition et d’une copie de la décision du ministre des finances susvisée.

Pour bénéficier du dégrèvement, l’acquéreur doit respecter quatre conditions de fond.

La première condition est relative à l’activité exercée par l’entreprise objet de la cession. En effet, selon les article 39 quater et 48 quater du CIRPPIS « le bénéfice de la déduction est subordonné à :…l’exercice, par l’entreprise cédée, de son activité dans des secteurs prévus par le chapitre IV du présent code ». Il s'ensuit que le dégrèvement pour réinvestissement n'est octroyé que lorsque l'entreprise en difficultés cédée exerce son activité dans :

- Le secteur du développement régional ; - Le secteur du développement agricole ;

- Le secteur des activités de soutien et de lutte contre la pollution ;

- Les secteurs relevant du domaine des avantages accordés aux entreprises nouvellement créées. Ces secteurs sont définis de manière résiduelle, couvrant tous les secteurs d'activités possibles à l'exception du secteur financier, des secteurs de l'énergie (sauf énergies renouvelables), des mines, de la promotion immobilière, de la consommation sur place, du commerce et des opérateurs de télécommunication.

Notons au demeurant que le dégrèvement pour réinvestissement concernait aussi jusqu'au 31 décembre 2018 (date de l'entrée en vigueur des dispositions de l'article 37 de la loi de finances pour l'année 2019), les acquisitions des entreprises en difficultés exerçant dans le secteur de l'exportation. Mais, puisque ce secteur ne figure plus dans le chapitre IV du CIRPPIS à partir du 1er janvier 2019, le dégrèvement pour réinvestissement ne sera plus attribué aux acquisitions des entreprises en difficultés exerçant dans le secteur de l'exportation.

La deuxième condition réside dans le statut fiscal de l’acquéreur. En effet, lorsque l’acquéreur est une personne physique, le bénéfice du dégrèvement est subordonné à la « tenue d’une comptabilité conforme à la législation comptable

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des entreprises pour les personnes physiques réalisant des revenus dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ou dans la catégorie des bénéfices des professions non commerciales ». Deux conséquences découlent de ces dispositions.

D’une part, lorsque l’acquéreur est une personne physique soumise à l’IR au titre des BIC ou des BNC, il ne peut bénéficier du dégrèvement que lorsqu’il est soumis au régime réel. La soumission de l’acquéreur au régime du forfait d’impôt (s’il réalise des BIC) ou au régime du forfait d’assiette (s’il réalise des BNC) le prive du bénéfice du dégrèvement.

D’autre part, lorsque l’acquéreur est une personne physique soumise à l’IR au titre des catégories de revenus autres que les BIC et les BNC, il bénéficie du dégrèvement pour réinvestissement peu importe qu’il tienne ou non une comptabilité, c'est-à-dire quel que soit son statut fiscal.

La troisième condition réside dans l’obligation à la charge de l’acquéreur de poursuivre l’exploitation de l’entreprise cédée « pendant une période de 3 ans au moins à compter du premier janvier de l’année qui suit celle de l’acquisition ». Cette condition est justifiée par le fait que l’avantage fiscal est conçu pour pérenniser et sauver l’entreprise en difficultés en tant qu’opérateur économique et source d’emploi, par sa transmission à un nouvel entrepreneur. Il faut par ailleurs empêcher que l’avantage fiscal se transforme en une échappatoire fiscale permettant à l’acquéreur d’éluder sa charge fiscale en réinvestissant les bénéfices qu’il réalise dans l’acquisition d’une entreprise dans le seul but de bénéficier du dégrèvement et sans avoir l’intention de poursuivre l’exploitation de l’entreprise acquise.

D’ailleurs, au cas où l’acquéreur bénéficiaire du dégrèvement ne poursuit pas l’exploitation de l’entreprise pendant les trois ans suivant l’année de l’acquisition, il sera déchu du bénéfice du dégrèvement et sera obligé de payer l’IR ou l’IS non acquitté au titre des montants réinvestis, majoré des pénalités de retard exigibles conformément à la législation en vigueur. Cette déchéance ne s’applique pas au cas où l’arrêt de l’exploitation pendant la période de trois ans est justifié par des motifs qui ne sont pas imputables à l’acquéreur. Ces motifs sont fixés par le décret n° 2007-1266 du 21 mai 2007.

La quatrième condition a été récemment ajoutée par l'article 37 de la loi de finances pour l'année 2018. Elle réside dans le fait que le dégrèvement pour réinvestissement n'est pas octroyé "aux opérations de souscription destinées à l'acquisition de terrains". La formule utilisée par le législateur est malencontreuse, puisque lors de l'acquisition d'une entreprise en difficultés, il n'y a pas d'opération de souscription. Le dégrèvement est accordé à l'acquisition des éléments d'actif des entreprises en difficultés et non à la souscription au capital desdites entreprises. En tout état de cause, l'application de cette condition à l'acquisition d'une entreprise en difficultés aura pour conséquence de priver le preneur du dégrèvement pour réinvestissement s'agissant des terrains acquis dans le cadre de la transmission de ladite entreprise.

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▪ Les avantages de démarrage

Outre le bénéfice du dégrèvement pour réinvestissement, le preneur d'une entreprise en difficultés bénéficie d'un autre avantage fiscal postérieurement à la reprise et consistant dans le bénéfice des exonérations de démarrage au même titre qu'une entreprise nouvellement créée et ce conformément à l'article 71 du CIRPPIS tel qu'ajouté par la loi n°8 du 14 février 2017 portant refonte du dispositif des avantages fiscaux.

En effet, selon cet article, les entreprises nouvellement créées dans tous les secteurs (à l'exception du secteur financier, des secteurs de l'énergie (sauf énergies renouvelables), des mines, de la promotion immobilière, de la consommation sur place, du commerce et des opérateurs de télécommunication), bénéficient d'une déduction d'une quote-part de leur bénéfice ou revenu provenant de l'exploitation ainsi que de leur bénéfice exceptionnel durant les quatre premières années d'activité et ce, comme suit:

- 100% pour la première année ;

- 75% pour la deuxième année ;

- 50% pour la troisième année ;

- 25% pour la quatrième année.

Le même article ajoute dans son alinéa 3 que le même avantage fiscal est accordé pour les entreprises en difficultés transmises dans le cadre du paragraphe II de l'article 11 bis du CIRPPIS et ce, pour les bénéfices ou revenus provenant de l'exploitation uniquement (à l'exclusion des bénéfices exceptionnels) durant les quatre premières années à partir de la date de la transmission. Ainsi, le preneur d'une entreprise en difficultés est fiscalement traité tout comme un nouvel entrepreneur qui démarre à partir de néant.

L'octroi de cet avantage est toutefois subordonné au respect des conditions visées à l'article 39 quater du CIRPPIS, c'est à dire les conditions exposées ci-dessus s'agissant du dégrèvement pour réinvestissement ainsi qu'à la condition d'obtenir une décision spécifique du ministre chargé des finances ou de la personne déléguée par ce dernier.

Notons enfin que lorsqu’une entreprise en difficultés économiques réalise des gains exceptionnels suite au bénéfice de l’abandon des créances, loi de finances pour l’année 2010 lui a permis de déduire les déficits enregistrés depuis plus de 5 années, et ce, dans la limite des revenus exceptionnels réalisés. Dans ce cas, la déduction s’effectue dans la limite des déficits enregistrés depuis une période qui n’excède pas 10 années à l’année de la déduction. Dans ce cas particulier, la déduction par l’entreprise bénéficiaire de l’abandon des déficits enregistrés depuis 10 ans est subordonnée à la satisfaction des conditions suivantes :

- Les revenus exceptionnels ayant été utilisés pour résorber les déficits doivent avoir été réalisés dans le cadre des opérations d’abandon qui ouvrent droit à la déduction des créances abandonnées par les entreprises qui abandonnent leurs créances, conformément aux dispositions du paragraphe VII terdecies de l’article 48 du CIRPPIS,

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- Les comptes des exercices ayant enregistré des déficits doivent avoir été certifiés par un commissaire aux comptes et sans que la certification comporte des réserves ayant une incidence sur l’assiette de l’impôt,

- La production, à l’appui de la déclaration annuelle de l’IS de l’exercice de la déduction des déficits enregistrés depuis plus de 5 ans, d’un état détaillé indiquant le montant des déficits qui n’ont pas été déduits des résultats des exercices antérieurs, l’exercice de leur enregistrement, le montant des créances abandonnées et l’année de bénéfice de l’abandon.

Le régime de faveur en matière des droits d'enregistrement

Lorsque la transmission des biens passibles des droits d’enregistrement est effectuée dans le cadre de la transmission d’une entreprise en difficultés, l’acquéreur n’est plus soumis au paiement des droits proportionnels d’enregistrement au titre des biens transmis. L’article 23 n° 20 ter du CDET tel qu’ajouté par l’article 17 de la loi de finances pour l’année 2007 a remplacé les droits proportionnels par un droit fixe de 150 DT par acte.

Cependant, il convient de signaler que les dispositions de l'article 23 n° 20 ter du CDET n'avaient pas précisé, contrairement à l'article 11 bis II du CIRPPIS, si ce régime de faveur est applicable à la cession partielle d'une branche complète d'activité de l'entreprise en difficultés. Cette imprécision est de taille, puisqu'elle conduit à l'exclusion de l'application du régime de faveur les transmissions d'une branche complète d'activité de l'entreprise en difficultés et ce, en vertu du principe de l'interprétation restrictive des dispositions fiscales dérogatoires.

La doctrine administrative a néanmoins précisé, à titre de tolérance fiscale, que le droit fixe s'applique aussi bien aux cessions totales qu'aux cessions d'une branche complète d'activité de l'entreprise en difficultés62.

L’application du droit fixe est subordonnée à la condition que l’acquéreur poursuive l’exploitation de l’entreprise transmise durant une période de trois ans au moins à compter du premier janvier de l’année qui suit celle de la transmission. En cas d’arrêt de l’exploitation avant l’expiration de cette période, l’acquéreur serait déchu du bénéfice du droit fixe et devrait payer les droits proportionnels d’enregistrement normalement dus majorés des pénalités de retard. Cette déchéance ne s’applique pas en cas d’arrêt de l’exploitation pour des raisons qui ne sont pas imputables à l’acquéreur et qui sont fixées par le décret n° 2007-1266 du 21 mai 2007.

Le régime de faveur en matière de TVA

Conformément à l’article 9 IV 2) du CTVA tel que complété par l’article 20 de la loi de finances pour l’année 2007, l'opération de cession d'une entreprise en difficultés en phase de règlement judiciaire est dispensée du reversement de la TVA initialement déduite au titre de ses acquisitions d’immobilisations. Seule la cession totale des éléments de l’actif d’une entreprise en difficultés en phase

62 Voir la note commune n° 33/2007.

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de règlement judiciaire ouvre droit au bénéfice de la dispense du reversement de la TVA initialement déduite. Ainsi, sont exclues de la dispense les opérations suivantes :

- La cession des éléments de l’actif immobilisé d’une entreprise en difficultés, mais qui est en phase de règlement amiable ;

- La cession partielle des éléments de l’actif immobilisé d’une entreprise en difficultés en phase de règlement judiciaire. Il importe peu que cette cession partielle porte sur un bien immobilisé isolément ou sur une branche complète d’activité. L’exclusion de la cession d’une branche complète d’activité d’une entreprise en difficultés du bénéfice de l’avantage fiscal en matière de TVA est discutable dans la mesure où elle entraîne une incohérence entre les dispositions du CTVA et celles du CIRPPIS. En effet, en matière d’IR et d'IS, la cession des entreprises en difficultés en phase de règlement judiciaire ouvre droit au bénéfice de l’exonération de la plus-value de cession peu importe que la cession de l’entreprise soit totale ou porte sur une branche complète d’activité. En revanche, en matière de TVA, la dispense du reversement de la TVA ne concerne que la cession totale de l’entreprise en difficultés à l’exclusion de la cession d’une branche complète d’activité.

La doctrine administrative a néanmoins précisé, à titre de tolérance fiscale, que la dispense de l'obligation de régularisation de la TVA s'applique aussi bien aux cessions totales qu'aux cessions d'une branche complète d'activité de l'entreprise en difficultés63.

Pour bénéficier de la dispense du reversement de la TVA initialement déduite, l’article 9 IV 2) du CTVA exige que « l’entreprise objet de la cession doit communiquer au bureau de contrôle des impôts compétent pendant le mois qui suit celui au cours duquel la cession a eu lieu, un état comportant notamment les mentions suivantes :

- La désignation des bâtiments, équipements et matériels objet de la cession,

- La date de leur acquisition,

- Le prix d’acquisition hors taxe sur la valeur ajoutée,

- Le taux et le montant de la taxe sur la valeur ajoutée ayant fait l’objet de déduction ou de suspension au titre desdits biens,

- Le pourcentage de déduction pour les entreprises partiellement soumises à la taxe sur la valeur ajoutée ».

Outre cette condition, la doctrine administrative a ajouté, en toute illégalité, deux conditions supplémentaires du côté de l'entreprise cessionnaire de l'entreprise en difficultés. En effet, selon la note commune n°33/2007, "L’entreprise cessionnaire des équipements, matériels ou bâtiments doit être assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée et il faut :

- Que les bâtiments, équipements ou matériels objet de la cession soient utilisés dans la réalisation d’une activité soumise à la TVA,

63 Voir la note commune n° 33/2007.

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- Que lesdits bâtiments, équipements ou matériels soient nécessaires à l’activité de l’entreprise cessionnaire".

Au total, le régime fiscal de faveur dédié par la législation tunisienne à la reprise des entreprises en difficultés soulève deux observations terminales.

La première est que ce régime n'est dédié qu'aux transferts d'actifs des entreprises en difficultés. Les transmissions opérées par transfert des droits sociaux ne bénéficient d'aucun régime de faveur. Or, sous l'empire du CII, l'on avait ajouté à l'article 7 un paragraphe 3 prévoyant un régime de faveur sous forme de dégrèvement pour réinvestissement dans l'acquisition d’actions ou parts qui aboutissent à la détention de 50 % au moins du capital dans le cadre d’une transmission d’une entreprise en difficulté, que cette transmission soit opérée dans le cadre d'un plan de cession ou dans le cadre d'un plan de continuation. L'abrogation du CII, suite à l'entrée en vigueur, le 1er avril 2017, de la loi n° 71 du 30 septembre 2016 portant loi de l'investissement, a entrainé la suppression de cet avantage fiscal ; si bien qu'aujourd'hui, seules les transmissions d'actifs des entreprises en difficultés sont éligibles au régime de faveur.

La seconde est que le régime fiscal de faveur dédié par la législation tunisienne à la reprise des entreprises en difficultés parait généreux si on le compare avec l'état des lieux dans les législations comparées64.

LE REGIME DE FAVEUR DEDIE A LA TRANSMISSION DES STARTUPS

L'article 14 de la loi n° 2018-20 du 17 avril 2018 relative aux start-ups, prévoit que "sont exonérés de l'impôt sur la plus-value, les gains provenant de la cession des titres de participation au capital des start-up"65.

Rappelons que l’article 2 du Startup Act considère comme Startup, toute société commerciale66,constituée conformément à la législation en vigueur, ayant obtenu le label Startup conformément aux conditions prévues par le Startup Act.

64Ainsi, et à notre connaissance, il n'existe pas un régime de faveur ou d'aide fiscale à la reprise des

entreprises en difficultés dans les législations marocaine et algérienne. En France, les aides fiscales consenties à la reprise des entreprises en difficultés ne concernent que l'IS et certains impôts locaux. En matière d'IS par exemple, l'entreprise cessionnaire bénéficie d'une exonération de l'IS pendant les deux années suivants la transmission et sous réserve de respecter de nombreuses conditions (la société cessionnaire doit être créée spécialement pour les besoins de la reprise de l'entreprise en difficultés, l'exonération ne concerne que les reprises d'entreprises dans le secteur industriel avec des exclusions.....) et ce, conformément à l'article 44 septies du Code Général des Impôts. 65 Ce texte est très mal formulé car l'on ne sait si cette exonération concerne uniquement la plus-value de cession des titres non inscrits au bilan d'une entreprise, c'est à dire relevant du patrimoine privé de l'associé ou si elle concerne aussi la plus-value de cession des titres inscrits à l'actif du bilan d'une entreprise. 66 Selon l’article 7 du CSC, la société est commerciale soit par sa forme, soit par son objet. Sont commerciales par la forme et quel que soit l'objet de leur activité, les sociétés en commandite par actions, les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés anonymes. Toute société commerciale quel que soit son objet est soumise aux lois et usages en matière commerciale.

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Ne peuvent pas donc pas être considérées comme Startups :

- Les entreprises individuelles,

- Les sociétés non commerciales (ex. sociétés civiles),

- Les groupements,

- Les sociétés n’ayant pas obtenu le label Startup conformément aux conditions prévues par le Startup Act.

Par ailleurs, selon l’article 3 du Startup Act, le label Startup est octroyé à la société qui remplit les conditions suivantes :

1. Son existence juridique ne dépasse pas huit (08) ans à compter de la date de sa constitution,

2. Ses ressources humaines, son total bilan et son chiffre d’affaires annuel ne dépassent pas des plafonds fixés par décret gouvernemental (v. l’article 3 du décret gouvernemental n° 2018-840 du 11 octobre 2018).

3. Son capital est détenu à plus de deux-tiers (2/3) par des personnes physiques, des SICAR, des FCPR, des fonds d’amorçage et de tout autre organisme d’investissement selon la législation en vigueur ou par des Startups étrangères,

4. Son modèle économique est à forte dimension innovante notamment technologique,

5. Son activité est à fort potentiel de croissance économique.

D’après l’article 3 du décret gouvernemental n° 2018-840 du 11 octobre 2018, les plafonds relatifs à l’effectif, au total bilan et au chiffre d’affaires annuel pour la société souhaitant obtenir le label startup sont fixés comme suit :

- Un effectif ne dépassant pas cent (100) salariés,

- Un total bilan ne dépassant pas quinze (15) millions de DT,

- Un chiffre d’affaires annuel ne dépassant pas quinze (15) millions de DT.

L’article 6 du Startup Act prévoit que, dans le cas de la société qui dépose une demande d’obtention du label Startup tout en satisfaisant les conditions 1, 2 et 3 de l’article 3 et qui réussit à réaliser une levée de fonds auprès de SICAR, de FCPR, de fonds d’amorçage ou de tout autre organisme d’investissement selon la législation en vigueur ayant conclu des conventions à cet effet avec le ministère en charge de l’économie numérique, ladite société est réputée vérifier les conditions 4 et 5 de l’article 3 précité sans requérir l’avis dudit comité. Le cas échéant, le ministre chargé de l’économie numérique prend la décision de lui attribuer le label Startup.

Dans le même ordre d’idées, l’article 7 du décret gouvernemental n° 2018-840 du 11 octobre 2018 prévoit que, nonobstant les dispositions de l’article 5 du même décret, le ministre chargé de l’économie numérique octroie le label startup, dans un délai de trois (3) jours, à la société vérifiant les conditions des points 1, 2 et 3 de l’article 3 du Startup Act et ayant réussi à lever des fonds auprès de SICAR, de FCPR, de fonds d’amorçage ou de tout autre organisme d’investissement selon la législation en vigueur et ce conformément aux dispositions de l’article 6 du Startup Act.

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IV. L’INCITATION FISCALE AUX RESTRUCTURATIONS

D’ENREPRISES

Partant du fait que la lourdeur du coût fiscal de droit commun peut constituer une entrave à la réalisation d’opérations de transmissions motivées par une stratégie de croissance de l’entreprise, le législateur a mis en place des régimes fiscaux de faveur pour inciter la réalisation d’opérations de regroupement d’entreprises, ou de spécialisation d'entreprises combien indispensables pour lever le défi de la compétitivité des entreprises tunisiennes dans un contexte économique mondialisé et hautement concurrentiel.

Les régimes de faveur instaurés pour les fins de la croissance externe des entreprises, et qui englobent souvent des opérations de transmission d’entreprises, sont les suivants :

- Un régime de faveur pour la fusion des sociétés ;

- Un régime de faveur pour la scission des sociétés ;

- Un régime de faveur pour l'apport d'entreprise individuelle en société ;

- Un régime de faveur pour l’introduction en bourse.

LE REGIME DE FAVEUR DE LA FUSION DE SOCIETES

La fusion de sociétés, qui constitue un mécanisme irremplaçable de restructuration des entreprises et de concentration des capitaux, a suscité au cours de ces dernières années une agitation législative. Outre la mise en place d’un régime juridique spécifique à l’opération de fusion dans le cadre du Code des Sociétés Commerciales67, le législateur a procédé à maintes reprises, au réaménagement du régime fiscal de la fusion de sociétés à travers les lois de finances pour les années 199868, 200169, 200370, 200471 et 200572.

Technique du droit des sociétés, la fusion de sociétés est « l’opération par laquelle deux ou plusieurs sociétés réunissent leur patrimoine pour n’en former plus qu’une seule »73. Cette réunion peut être effectuée selon deux modalités différentes, celle de l’absorption d’une ou plusieurs sociétés par une société

67 Voir les articles 411 et suivants du CSC promulgué par la loi n° 2000-93 du 3 novembre 2000. 68 Voir l’article 50 de la loi n° 97-88 du 29 décembre 1997 portant loi de finances pour la gestion 1998. 69 Voir l’article 59 de la loi n° 2000-98 du 25 Décembre 2000 portant loi de finances pour la gestion 2001. 70 Voir l’article 30 de la loi n° 2002-101 du 17 Décembre 2002 portant loi de finances pour la gestion 2003. 71 Voir les articles 23 et 24 de la loi n° 2003-80 du 29 décembre 2003 portant loi de finances pour la gestion 2004. 72 Voir les articles 36, 37 et 38 de la loi n° 2004-90 du 31 décembre 2004 portant loi de finances pour la gestion 2005. 73 Patrick SERLOOTEN « Droit fiscal des affaires », 2ème éd. Dalloz, Paris, 2001, n° 704, p. 459.

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existante ou celle de la création d’une société nouvelle à laquelle deux ou plusieurs sociétés lui transfèrent leur patrimoine.

En principe, l’opération de fusion qui implique sur le plan juridique la « dissolution des sociétés fusionnées ou absorbées »74 suivie d’un apport de la totalité de leur actif à la société absorbante ou fusionnante, devrait conduire, si on lui applique la fiscalité de droit commun, à une imposition « très onéreuse »75 des trois intervenants dans le cadre de l’opération de fusion : la société absorbée ou fusionnée, la société absorbante ou fusionnante et leurs associés.

De telles solutions, qui font de la fusion de sociétés une opération fiscalement coûteuse et qui risquent par conséquent d’entraver la restructuration des entreprises, cadrent mal avec la réalité économique de l’entreprise aujourd’hui. L’économie tunisienne, composée essentiellement par des petites et moyennes entreprises de type familial, risque d’être fragilisée davantage si l'on n'encourage pas la concentration des capitaux et la création de champions internationaux capables d'être compétitifs dans un contexte de mondialisation économique.

C'est pourquoi le législateur a mis en place un régime fiscal de faveur, qui concerne tous les impôts susceptibles de frapper l’opération de fusion (impôt sur les sociétés, droits d’enregistrement et TVA). Ce régime de faveur, qui permet d’alléger le coût fiscal de l’opération de fusion part du principe dit de « la succession dans la plénitude des droits »76, appelé encore le principe du « caractère intercalaire de la fusion »77, lequel principe signifie que la société absorbante ou fusionnante continue, d’un point de vue fiscal, l’existence des sociétés absorbées ou fusionnées. Tout se passe comme si les sociétés absorbées ou fusionnées n’avaient pas été dissoutes et poursuivaient leur activité dans le cadre de la société absorbante ou fusionnante de sorte que l’opération de fusion ne doit donner lieu à aucune imposition.

Le principe du caractère intercalaire de la fusion est fondé sur les dispositions de l’article 411 du CSC qui prévoit dans ses alinéas 2 et 3 que « la fusion entraîne la dissolution des sociétés fusionnées ou absorbées et la transmission universelle de leur patrimoine à la société nouvelle ou à la société absorbante.

La fusion s’effectue sans liquidation des sociétés fusionnées ou absorbées ».

Le caractère universel de la transmission du patrimoine des sociétés fusionnées ainsi que la dissolution sans liquidation desdites sociétés font de la fusion une opération intercalaire et posent le principe selon lequel la société absorbante ou fusionnante continue, d’un point de vue juridique, l’existence des sociétés absorbées ou fusionnées.

Le principe du caractère intercalaire de la fusion, qui est à la base du régime fiscal de faveur accordé à l’opération de fusion, doit cependant être précisé

74 Article 411, alinéa 2, du CSC. 75 Lucien MEHL et Pierre BELTRAME « Techniques, politiques et institutions fiscales comparées » PUF, Paris, 1993, p. 257. 76 Lucien MEHL et pierre BELTRAME « Techniques, politiques et institutions fiscales comparées », op.cit., p. 257. 77 Patrick SERLOOTEN « Droit fiscal des affaires », op.cit., n° 709, p. 462.

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quant à ses conditions et sa portée en ce qui concerne chacun des impôts susceptibles de frapper l’opération de fusion, à savoir l’impôt sur les bénéfices, les droits d’enregistrement et la TVA.

Le régime de faveur en matière d'impôt sur les bénéfices

Le régime fiscal de faveur réservé aux bénéfices découlant de l’opération de fusion a un champ d'application précis et varie selon que l’on se place du côté de la société absorbée ou fusionnée ou du côté de la société absorbante ou fusionnante.

En matière d'impôt sur les bénéfices, le régime de faveur réservé à l'opération de fusion des sociétés est déterminé par l'article 49 decies du CIRPPIS; lequel article prévoit dans son paragraphe IV bis que " Les dispositions du présent article s'appliquent aux opérations de fusion...de sociétés qui ont eu lieu conformément aux dispositions du code des sociétés commerciales et à condition que les sociétés concernées soient légalement soumises à l'audit d'un commissaire aux comptes et que leurs comptes au titre du dernier exercice clôturé à la date de la fusion...des sociétés soient certifiés".

Il découle de ces dispositions que le champ d'application du régime de faveur en matière d'impôt sur les bénéfices ne s'étend pas à toute opération de fusion. Encore faut-il que :

- La fusion concerne des sociétés passibles de l'impôt sur les sociétés ; cette restriction découle de l'emplacement même de l'article 49 decies régissant la fusion des sociétés ; lequel article est inséré sous le "chapitre II" du CIRPPIS intitulé "Impôt sur les sociétés". Il s'ensuit que le régime de faveur n'a pas vocation à être appliqué aux fusions concernant des sociétés non passibles de l'impôt sur les sociétés. Tel est le cas des fusions des sociétés visées à l'article 4 du CIRPPIS, à savoir les sociétés en nom collectif, les sociétés en commandite simple et les sociétés civiles. Lorsque la fusion concerne l'une de ces dernières sociétés, elle sera régie par la fiscalité de droit commun et ne bénéficie donc pas du régime de faveur.

- La fusion soit effectuée conformément au code des sociétés commerciales ; cette condition formulée de manière assez générique peut conduire à refuser l'application du régime de faveur chaque fois que la fusion ne se conforme pas aux dispositions du code des sociétés commerciales. De même, étant donné que l'article 412, dernier alinéa, du CSC dispose que "la fusion d'une ou plusieurs sociétés étrangères avec une ou plusieurs sociétés tunisiennes doit aboutir à la constitution d'une société dont la majorité du capital doit être détenu par des personnes physiques ou morales tunisiennes", le régime de faveur n'a pas vocation à être appliqué aux fusions internationales qui aboutissent à la détention de la majorité du capital de la société fusionnante par des personnes étrangères. Ces fusions seront par conséquent régies par la fiscalité de droit commun que l'on a qualifié de "coûteuse".

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- La fusion concerne des sociétés soumises légalement à l'audit d'un commissaire aux comptes ; cette condition entraine l'exclusion du domaine d'application du régime de faveur les fusions concernant les sociétés non soumises légalement à l'audit d'un commissaire aux comptes, c'est à dire les sociétés de petite taille qui ne remplissent pas deux des trois limites chiffrées relatives au total du bilan, au total des produits hors taxes et au nombre moyen des salariés. Selon la doctrine de l’administration, la dernière condition n’est pas remplie et la fusion ne bénéficie pas du régime de faveur si l’une des sociétés fusionnées n’est pas légalement soumise à l'audit d'un commissaire aux comptes, c'est-à-dire ne remplit pas les critères de désignation obligatoire prévus par l’article 13 du CSC, mais procède à la nomination d’un commissaire aux comptes conformément aux dispositions des articles 123 et 124 du CSC78.

En principe, étant donné que l’opération de fusion a, au regard de la société absorbée ou fusionnée les mêmes effets qu’une cessation d’activité, les bénéfices réalisés par ladite société avant la fusion seront immédiatement imposables. La société absorbée ou fusionnée doit en effet déposer une déclaration de cessation d’activité permettant d’imposer les bénéfices réalisés avant la fusion et ce dans un délai ne dépassant pas la fin du troisième mois à compter de la date de la tenue de la dernière assemblée générale extraordinaire ayant approuvé l’opération de fusion79.

Le caractère intercalaire de la fusion qui signifie que la société absorbante ou fusionnante va continuer l’activité de la société absorbée, a amené le législateur à exempter certains bénéfices réalisés par la société absorbée ou fusionnée de l’impôt sur les sociétés.

- La première exemption concerne la plus-value d’apport de l’actif immobilisé de la société absorbée ou fusionnée au patrimoine de la société absorbante ou fusionnante. En effet, conformément à l’article 49 decies I du CIRPPIS « Pour la détermination du bénéfice imposable, est admise en déduction la plus-value d’apport dans le cadre d’une opération de fusion de sociétés… des éléments de l’actif autres que les marchandises, les biens et valeurs faisant l’objet de l’exploitation ».

78 Prise de position DGELF n° 1314 du 8 décembre 2011

ة هيكلتهما لقد ذكرتم بمقتضى مكتوبكم المشار إليه بالمرجع أعاله أن شركتين ذات مسؤولية محدودة تعتزمان القيام بعملية إندماج ذلك بمناسبة إعادشروط وأن إحدى الشركتين )التي سيتم إستيعابها( غير خاضعة قانونا لتدقيق مراقب حسابات بإعتبارها ال تستجيب إلى شرطين من بين الثالث

من مجلة الشركات التجارية. 13الواردة بالفصل

مراقب وعلى هذا األساس وبإعتبار أن النظام الجبائي لعمليات إندماج وإنقسام الشركات يستوجب أن تكون الشركات المعنية خاضعة قانونا لتدقيق ورة يستوجب إحترام الشركتين المذكورتين للشروط الواردة بالفصل حسابات، طلبتم معرفة هل أّن اإلنتفاع بالنظام الجبائي التفاضلي للعمليات المذك

من نفس المجلة الذين ينصان على شروط 124و 123من مجلة الشركات التجارية، أم أنه يمكن تعيين مراقبي الحسابات وفقا ألحكام الفصلين 13 أخرى لتعيين مراقبي الحسابات بالشركات ذات المسؤولية المحدودة.

نية يشرفني إعالمكم أن اإلنتفاع بالنظام الجبائي التفاضلي لعمليات اإلندماج واإلنقسام الكلي للشركات يستوجب خاصة أن تكون الشركات المعجوابا،

تها باباإلندماج أو باإلنقسام الكلي خاضعة قانونا لتدقيق مراقب حسابات على معنى مجلة الشركات التجارية وأن تكون قد تمت المصادقة على حسا بعنوان آخر سنة مالية مختومة في تاريخ اإلندماج أو اإلنقسام الكلي للشركات.

وعلى هذا األساس، ال يمكن لعملية إندماج الشركتين موضوع مكتوبكم اإلنتفاع بأي نظام جبائي خاص.79 Article 49 decies II et IV du CIR.

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- La deuxième exemption concerne les provisions constatées dans les écritures comptables de la société absorbée ou fusionnée qui ne donneront pas lieu à réintégration dans le bénéfice dégagé par ladite société lors de la déclaration de cessation d’activité. En effet, conformément à l’article 49 decies II du CIRPPIS «En cas de fusion… les provisions déduites conformément aux dispositions des paragraphes I, I bis et I ter de l’article 48 du présent code et n’ayant pas perdu leur objet ne sont pas réintégrées aux résultats de la société absorbée… à condition que lesdites provisions soient inscrites aux bilans des sociétés ayant reçu les actifs objet de provisions dans le cadre de l’opération de fusion… ». A travers ces dispositions, le législateur a consacré le principe du caractère intercalaire de la fusion dans la mesure où la société absorbante ou fusionnante succède aux sociétés absorbées ou fusionnées concernant la gestion fiscale des provisions. La cessation de l’activité de la société absorbée ou fusionnée n’entraîne donc pas la réintégration des provisions dans son bénéfice imposable. Cette réintégration se fera au niveau de la société absorbante ou fusionnante et sera ainsi reportée jusqu’à ce que les provisions deviennent sans objet.

En principe, étant donné que les sociétés absorbées ou fusionnées sont juridiquement dissoutes, la détermination du bénéfice fiscal réalisé par la société absorbante ou fusionnante à l’issue de l’opération de fusion ne doit en aucune manière être affectée par le résultat fiscal des sociétés absorbées ou fusionnées. Cependant et compte tenu du caractère intercalaire de l’opération de fusion, le législateur a été amené à poser certaines règles qui marquent une sorte de « rebondissement » du résultat fiscal des sociétés absorbées ou fusionnées lors de la détermination du résultat fiscal de la société absorbante ou fusionnante :

- La première règle tient à obliger la société absorbante ou fusionnante à reprendre à son actif les provisions constituées et déduites par la société absorbée ou fusionnée. Ces provisions, qui ne donnent pas lieu à réintégration dans le bénéfice fiscal de la société absorbée ou fusionnée, seront plutôt réintégrées dans le bénéfice fiscal de la société absorbante ou fusionnante dès qu’elles deviennent sans objet80.

- La deuxième règle tient à exiger de la société absorbante ou fusionnante de réintégrer dans son bénéfice imposable une fraction de la plus-value d’apport de l’actif immobilisé de la société absorbée ou fusionnée. En effet, à partir de la loi de finances pour la gestion 2001, même si la plus-value d’apport de l’actif immobilisé de la société absorbée ou fusionnée est exonérée de l’IS au niveau de ladite société, cette plus-value doit être imposée au niveau de la société absorbante ou fusionnante « … dans la limite de 50 % de son montant et ce à raison du cinquième par année à compter de l’année

80 Article 49 décies II du CIR.

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de la fusion »81. Ainsi, et à partir de l’exercice 2001, la plus-value de fusion de sociétés ne bénéficie plus d’une immunité fiscale totale. Cette mesure qui s’inscrit, selon les pouvoirs publics, « dans le cadre de la rationalisation de l’avantage fiscal accordé à l’opération de fusion »82, a été justifiée selon l’administration par l’«excès » des avantages fiscaux liés à l’opération de fusion. En effet, outre l’exonération totale de la plus-value de fusion, qui correspond à la différence entre la valeur comptable nette des éléments de l’actif et leur valeur au jour de l’apport, l’opération de fusion permet à la société absorbante d’amortir les éléments de l’actif apportés non sur la base de leur valeur comptable nette, mais sur la base de la valeur d’apport. Ainsi, à l’exonération de la plus-value de fusion s’ajoute une base d’amortissement consistante comprenant entre autres, la plus-value d’apport83.

En réalité, l’argument évoqué par l’administration fiscale est loin d’être convaincant dans la mesure où il présuppose que tous les éléments apportés à la société fusionnante sont amortissables. Or, il va sans dire que même si le principe de la déduction des amortissements est admis par la législation fiscale84, le législateur en a excepté expressément certains biens pour lesquels la déduction des amortissements est refusée85. Il en est ainsi des terrains et des fonds de commerce. En cas d’apport de l’un des éléments non amortissables, l’opération de fusion ne conduit pas à un double privilège fiscal. L’exonération de la plus-value de fusion ne s’accompagnera pas par la déduction des amortissements.

Aussi est-il souhaitable que le législateur modifie encore une fois, le régime fiscal de la plus-value de fusion afin de ne réduire l’exonération à 50 % du montant de la plus-value de fusion qu’en cas d’apport d’éléments amortissables et de réinstaurer corrélativement une exonération totale de la plus-value de fusion en cas d’apport d’éléments non amortissables. D’ailleurs, en droit fiscal français et luxembourgeois, la société fusionnante ne réintègre la plus-value de fusion dans son bénéfice soumis à l’impôt sur les sociétés qu’en cas d’apport d’éléments amortissables86.

Par ailleurs, le bénéfice du régime fiscal de faveur accordé à la plus-value de fusion reste subordonné au respect des conditions suivantes :

81 Article 48 VII septies du CIRPPIS tel que modifié par l’article 59 de la loi de finances pour la gestion 2001. Signalons que cet article a été abrogé par l’article 24 de la loi n° 2003-80 du 29 décembre 2003 portant loi de finances pour la gestion 2004. Cependant, les dispositions de l’article 48 VII septies ont été reconduites dans le cadre de l’article 49 decies du CIRPPIS ajouté par l’article 23 de la loi de finances pour la gestion 2004. 82 Voir l’exposé des motifs de l’article 59 de la loi de finances pour l’année 2001. 83 Dans l’exposé de motifs de l’article 59 de la loi definances pour la gestion 2001, on peut lire :

.تطرح من قاعدة الضريبة على مستوى الشركة المدمجة ...أن القيمة الزائدة الناتجة عن اإلسهام بعناصر األصول في حالة دمج الشركات ..."

.العناصر المذكورة القابلة للطرح على مستوى الشركة الدّامجة على أساس قيمة اإلسهام هذاوتحتسب االستهالكات بعنوان

يقترح)...(". ...ولتفاديهذااالمتياز المزدوج بالنسبة لنفس العناصر القابلة لالستهالك84 Voir l’article 12 du CIR. 85 Voir l’article 15 du CIR. 86 Voir MEHL et BELTRAME « Techniques, politiques et institutions fiscales comparées », op. cit., p. 258.

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Première condition : afin de bénéficier de l’étalement de l’imposition de la fraction imposable de la plus-value de fusion, la société fusionnante ne doit pas procéder à la cession des éléments de l’actif qui lui sont apportés par les sociétés fusionnées pendant cinq ans à compter de l’année de fusion. La société fusionnante peut être déchue du bénéfice de l'exonération à moitié de la plus-value et de l’étalement de l’imposition étant donné que l’alinéa 3 de l’article 49 decies du CIRPPIS dispose que « en cas de cession desdits éléments avant l’expiration de la cinquième année à compter de l’année de fusion…, la fraction de la plus-value non encore imposée est réintégrée aux résultats de l’année de la cession ».

Deuxième condition : afin de bénéficier à la fois de l’exonération de la moitié de la plus-value de fusion et de l’étalement de l’imposition de l’autre moitié sur cinq ans, la société fusionnante ne doit pas être scindée au cours de la période de trois ans à compter de l’année de fusion. La société fusionnante peut être déchue du bénéfice de ces deux avantages étant donné que l’article 49 V decies du CIRPPIS dispose que « les sociétés ayant reçu les éléments de l’actif dans le cadre de l’opération de fusion… et ayant bénéficier des dispositions du présent article, sont tenues en cas de réalisation d’opérations de scission avant la fin d’une période de trois ans à compter du 1er janvier de l’année qui suit celle de la fusion…de payer l’impôt sur les sociétés non acquitté en application des dispositions du présent article ainsi que les pénalités exigibles conformément à la législation en vigueur ».

La troisième règle qui marque le rebondissement du résultat fiscal de la société absorbée ou fusionnée lors de la détermination du bénéfice imposable de la société absorbante ou fusionnante tient à permettre à la société absorbante ou fusionnante de déduire de son bénéfice imposable « les déficits enregistrés au niveau de la société absorbée… et qui n’ont pas pu être déduits des résultats de l’année de la fusion »87. Ainsi, lorsque la société absorbée ou fusionnée est déficitaire, la société absorbante doit pouvoir imputer le déficit sur ses propres résultats, ce qui diminuera d’autant son bénéfice imposable. A défaut d’imputation, la société absorbante ou fusionnante est autorisée à reporter la déduction du déficit sur les résultats des exercices ultérieurs et ce dans la limite de la période de quatre ans à partir de l’année de la réalisation du déficit par la société absorbée ou fusionnée88.

La quatrième règle qui marque l’influence du résultat fiscal de la société absorbée ou fusionnée sur la détermination du bénéfice imposable de la société absorbante ou fusionnante tient à autoriser la société absorbante ou fusionnante à déduire de son bénéfice imposable les amortissements réputés différés en période déficitaires constatés dans les écritures comptables de la société absorbée ou fusionnée. En matière d’amortissement le législateur n’a donc pas choisi d’appliquer pleinement le principe du caractère intercalaire de la fusion. La société absorbante ou fusionnante ne continue pas de pratiquer les amortissements déjà commencés par la société absorbée ou fusionnée. En matière d’amortissement, la société absorbante ou fusionnante ne continue

87 Article 49 decies II bis ajouté par l’article 36 de la loi n° 2004-90 du 31 d décembre 2004 portant loi de finances pour l’année 2005. 88 Article 49 decies II bis, alinéa 2 du CIR.

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l’existence de la société absorbée ou fusionnée qu’en ce qui concerne les amortissements réputés différés en période déficitaire.

Le régime de faveur en matière de droits d’enregistrement

Impliquant la dissolution des sociétés absorbées ou fusionnées et l’apport de leurs éléments de l’actif à la société absorbante ou fusionnante, l’opération de fusion risque en principe d’être coûteuse au regard des droits d’enregistrement notamment lorsqu'elle comporte un apport à titre onéreux d'immeubles ou de fonds de commerce.

L’application de la fiscalité de droit commun concernant les droits d’enregistrement pourrait dissuader les entreprises de procéder à l’opération de fusion. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le législateur a institué, sur la base du principe du caractère intercalaire de la fusion, un régime de faveur concernant les droits d’enregistrement dus sur l’opération de fusion de sociétés. Ce régime de faveur consiste à enregistrer selon le tarif fixe de 150 DT « la prise en charge du passif grevant les apports dans le cadre des opérations de fusion »89. L’application de ce régime de faveur est toutefois subordonnée à trois conditions.

La première condition consiste à ce que « les sociétés qui participent à des opérations de fusion… ou qui sont créées dans le cadre de ces opérations doivent être passibles de l’impôt sur les sociétés »90. Cette condition conduit à exclure l’application du régime fiscal de faveur et à appliquer par conséquent le régime de droit commun des droits d’enregistrement lorsque l’une des sociétés absorbées ou fusionnées91 est hors champ d’application de l’IS. Il s’agit à titre d’exemple des sociétés visées à l’article 4 du CIRPPIS telles que les sociétés civiles, les sociétés en nom collectif, les sociétés en commandite simple…

La deuxième condition consiste à ce que « les comptes des sociétés concernées par l’opération de fusion… ou bénéficiaires de l’apport doivent être soumis légalement à l’audit d’un commissaire aux comptes et leurs comptes au titre de l’année comptable précédant l’année de réalisation de la fusion… ou de l’apport doivent avoir été certifiés »92.

La note commune n° 19 de l’année 2005 prévoit que la certification avec réserve des comptes de l'une des sociétés précitées permet le bénéfice du régime de faveur.

La troisième condition tient à ce que la société absorbante ou fusionnante ne procède pas à la cession des éléments d’actif apportés et ayant bénéficié du droit d’enregistrement selon le tarif fixe durant les trois années suivant l’année

89 Article 23 n° 21 du CDET tel que modifié par l’article 37 de la loi de finances pour la gestion 2005. 90 Article 23 V du CDET ajouté par l’article 38 de la loi de finances pour la gestion 2005. 91 Notons que la société absorbante ou fusionnante ne peut en aucune manière être une société hors champ d’application de l’IS. En effet, conformément à l’article 412 alinéa 2 du CSC, la fusion de sociétés « … doit dans tous les cas aboutir à la constitution d’une société anonyme, d’une société à responsabilité limitée ou d’unesociété en commandite par action ». Ces trois formes juridiques possibles de la société absorbante ou fusionnante font partie du champ d’application de l’IS et ce conformément à l’article 45 I du CIR. 92 Article 23 V 2) du CDET ajoute par l’article 38 de la loi de finances pour la gestion 2005.

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de la fusion. La cession de l’un de ces éléments au cours de la période sus indiquée entraîne la déchéance du droit fixe ayant frappé l’opération de fusion et l’exigibilité du droit proportionnel applicable aux mutations ainsi que les pénalités de retard93. La société absorbante ou fusionnante ne sera toutefois pas déchue du droit fixe au cas où la cession des éléments de l’actif apportés serait effectuée dans le cadre d’une nouvelle opération de fusion ou dans le cadre de la cession globale de la société94.

Le régime de faveur en matière de TVA

En matière de TVA, la fusion de sociétés qui emporte juridiquement dissolution des sociétés absorbées ou fusionnées, devrait en principe entraîner l’application des conséquences fiscales de la cessation d’activité.

D’une part, la cessation d’activité de la société absorbée ou fusionnée entraîne en principe l’obligation de régularisation de la TVA déduite par ladite société au titre de ses acquisitions des biens immobilisés95. Cette régularisation est opérée en procédant à « un reversement égal au montant de la taxe sur la valeur ajoutée déduite… diminué d’un cinquième par année civile ou fraction d’année civile de détention s’il s’agit de biens d’équipement ou de matériel, et d’un dixième par année civile ou fraction d’année civile de détention s’il s’agit de bâtiment »96.

D’autre part, la cessation d’activité de la société absorbée ou fusionnée ouvre droit à ladite société de demander la restitution, s’il y a lieu, du crédit de TVA qui n’a pas pu être imputé97.

Ces conséquences ont été cependant écartées par le législateur qui, tout en consacrant le principe du caractère intercalaire de la fusion, a prévu dans l’article 9 IV n° 4 du CTVA qu’ « en cas de concentration, fusion… la taxe ou le reliquat de la taxe sur la valeur ajoutée réglée au titre des biens et valeurs ouvrant droit à déduction, est transféré sur la nouvelle entreprise »98. Deux conséquences découlent de ces dispositions.

La première tient à ce que la société absorbée ou fusionnée sera dispensée de procéder à la régularisation, c'est-à-dire, au reversement de la TVA déduite au titre de ses acquisitions d’immobilisations. Au regard de la TVA, la fusion de société ne constitue donc pas l’un des cas de remise en cause de la déduction de la TVA du fait que la société absorbante ou fusionnante est censée continuer l’existence de la société absorbée ou fusionnée. Il appartient dès lors à la société absorbante ou fusionnante de procéder, s’il y a lieu, à la régularisation

93 Article 23 V n° 3 du CDET ajouté par l’article 38 de la loi de finances pour la gestion 2005. 94 Idem. 95 Conformément à l’article 9 IV n° 2 du CTVA, la cessation d’activité constitue l’un des cas entraînant la régularisation de la TVA initialement déduite. 96 Article 9 IV n° 2 du CTVA. 97 Article 15 n° 5 du CTVA. 98 Prise de position DGELF n° 944 du 28 juin 2012

األداء وعلى هذا األساس، فإن فائض األداء على القيمة المضافة الذي قد تفرزه في تاريخ اإلدماج الوضعية الجبائية للشركة المدمجة وكذلك مبلغ .على القيمة المضافة القابل للطرح بعنوان الشراءات المنجزة من قبلها والذي لم يقع طرحه يحال إلى الشركة الدامجة

شركة الدامجة ترسيم مجموع فائض األداء الذي أحيل إليها بمقتضى عملية اإلدماج في حساباتها وإبرازه بأّول تصريح لألداء على كما أنه يحّق للكما يحّق لها طرح مبلغ فائض األداء المذكور من مبلغ األداء الموظف على مبلغ فائض األداء المذكور من مبلغ .القيمة المضافة تتولى إيداعه

.ى رقم معامالتها الشهريالموظف عل

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de la TVA initialement déduite par la société absorbée ou fusionnée et ce en cas de survenance de l’un des évènements entraînant obligation de reversement de ladite TVA.

La deuxième conséquence réside dans le fait que le crédit de TVA, que la société absorbée ou fusionnée n’avait pas pu déduire, est simplement transféré à la société absorbante ou fusionnante. La fusion de société n’étant pas fiscalement analysée comme une cessation d’activité, ne constitue pas l’un des cas visés à l’article 15 du CTVA et ouvrant droit à la demande de restitution du crédit de TVA.

LE REGIME DE FAVEUR DE LA SCISSION DE SOCIETES

Généralement définie comme étant l’opération par laquelle la société scindée procède au partage de son patrimoine entre plusieurs sociétés existantes ou par la création de nouvelles sociétés99, la scission de sociétés constitue l’une des modalités de la transmission d'entreprises commandée par des considérations économiques de restructuration de l'entreprise à des fins de croissance par la spécialisation d'activités.

Après avoir longtemps omis d'encadrer juridiquement cette opération, le législateur a fini, suite à l'adoption du Code des Sociétés Commerciales, par consacrer un régime juridique fourni à la scission des sociétés. Le législateur fiscal a, vite, pris conscience de la nécessité de traiter de manière différentielle l'opération de scission des sociétés en lui réservant un régime fiscal de faveur qui est calqué de manière presque parfaite au régime de faveur de la fusion des sociétés.

L’extension du régime fiscal de faveur de la fusion à la scission s’explique, selon l’administration fiscale par deux arguments. D’un côté, puisque l’opération de scission vise, tout comme l’opération de fusion, la restructuration des entreprises tunisiennes afin de les rendre beaucoup plus compétitives dans un ordre économique international hautement concurrentiel, il serait judicieux d’octroyer à l’opération de scission les mêmes avantages fiscaux concédés à l’opération de fusion100. D’un autre côté, étant donné que le Code des Sociétés Commerciales a réservé aux opérations de fusion et de scission de sociétés un régime juridique uniforme, il serait cohérent de réserver à ces deux opérations un régime fiscal uniforme101.

Cependant, il est nécessaire de préciser que l'extension du régime de faveur de la fusion à la scission des sociétés ne concerne que la scission totale. Lorsque

99 Voir article 428 du code des sociétés commerciales. 100 Dans l’exposé de motif de l’article 23 de la loi de finances pour la gestion 2004 (Voir annexe II, p. 399), l’administration fiscale a affirmé que :

ادة الهيكلة التي تتم سواء عن طريق االندماج أو عن طريق االنقسام تهدف إلى دعم النجاعة االقتصادية للمؤسسات و باعتبار أن عمليات إع ..."من مجلة الشركات التجارية الذي ينص على أن عمليات اندماج و عمليات انقسام الشركات تتم خاصة لمسايرة التغيرات االقتصادية 409طبقا للفصل

يقترح توحيد النظام الجبائي ..و الخارجي و تطوير أساليب العمل و التسويق و كسب قدرة اكبر على التصدير و المنافسة.على الصعيدين الداخلي ات".لعمليات إعادة هيكلة المؤسسات و ذلك بسحب النظام الجبائي التفاضلي الحالي لعمليات اندماج الشركات على عمليات االنقسام الكلي للشرك

101 Dans l’exposé de motif de l’article 23 de la loi de finances pour la gestion 2004 (Voir annexe II, p. 399), l’administration fiscale a affirmé que :

و ذلك بسحب يقترح توحيد النظام الجبائي لعمليات إعادة هيكلة المؤسسات ..تبعا لإلطار التشريعي الموحد بمقتضى مجلة الشركات التجارية...." النظام الجبائي التفاضلي الحالي لعمليات اندماج الشركات على عمليات االنقسام الكلي للشركات".

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la scission de la société est partielle, elle se traduit par un apport partiel des éléments d'actif de la société scindée qui n'est éligible à aucun avantage fiscal. La scission partielle reste par conséquent soumise au régime fiscal de droit commun de la transmission des entreprises et risque d'être fiscalement coûteuse.

En revanche, étant donné que la scission totale de la société entraine « obligatoirement une dissolution sans liquidation de la société scindée »102, elle relève des opérations de transmission universelle du patrimoine de la société scindée, au même titre que l'opération de fusion de sociétés, et elle est éligible au régime fiscal de faveur instauré par la loi de finances pour l'année 2004. Aussi convient-il de préciser ce régime de faveur qui concerne, tout comme la fusion, l'impôt sur les bénéfices et les droits d'enregistrement. Mais, à la différence de la fusion, aucun régime de faveur en matière de TVA n'a été concédé à l'opération de scission totale. C'est ce qu'a d'ailleurs affirmé, à juste titre, l'administration fiscale dans sa note commune n° 14/2015 en précisant que " l'opération de scission totale ne bénéficie d'aucune particularité en matière de régularisation de la TVA initialement déduite ou suspendue. De ce fait, l'opération de scission totale entraine la régularisation de la TVA conformément au paragraphe IV-2 de l'article 9 du code de la TVA".

Le régime de faveur en matière d'impôt sur les bénéfices

Le régime fiscal de faveur réservé aux bénéfices découlant de l’opération de scission a un champ d'application précis et varie selon que l’on se place du côté de la société scindée ou du côté des sociétés créées pour les besoins de la scission totale.

En matière d'impôt sur les bénéfices, le régime de faveur réservé à l'opération de scission totale des sociétés est déterminé par l'article 49 decies du CIR; lequel article prévoit dans son paragraphe IV bis que " Les dispositions du présent article s'appliquent aux opérations de...scission totale de sociétés qui ont eu lieu conformément aux dispositions du code des sociétés commerciales et à condition que les sociétés concernées soient légalement soumises à l'audit d'un commissaire aux comptes et que leurs comptes au titre du dernier exercice clôturé à la date de la fusion...des sociétés soient certifiés".

Il découle de ces dispositions que le champ d'application du régime de faveur en matière d'impôt sur les bénéfices ne s'étend pas à toute opération de scission totale. Encore faut-il que :

- La scission concerne des sociétés passibles de l'impôt sur les sociétés ; cette restriction découle de l'emplacement même de l'article 49 decies régissant la scission des sociétés ; lequel article est inséré sous le "chapitre II" du CIRPPIS intitulé "Impôt sur les sociétés". Il s'ensuit que le régime de faveur n'a pas vocation à être appliqué aux scissions concernant des sociétés non passibles de l'impôt sur les sociétés. Tel est le cas des scissions des sociétés visées à l'article 4 du CIRPPIS, à savoir les sociétés en nom collectif, les sociétés en commandite simple et les sociétés civiles. Lorsque la

102 Voir article 428 du CSC.

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scission concerne l'une de ces dernières sociétés, elle sera régie par la fiscalité de droit commun et ne bénéficie donc pas du régime de faveur. D'ailleurs, même en droit des sociétés, il est prévu par l'alinéa 2 de l'article 428 du CSC que " ne peuvent se scinder que les sociétés anonymes, les sociétés en commandite par actions et les sociétés à responsabilité limitée » ; lesquelles sociétés sont celles passibles de l'impôt sur les sociétés conformément à l'article 45 du CIRPPIS.

- La scission soit effectuée conformément au code des sociétés commerciales ; cette condition formulée de manière assez générique peut conduire à refuser l'application du régime de faveur chaque fois que la scission totale ne se conforme pas aux dispositions du code des sociétés commerciales.

- La scission concerne des sociétés soumises légalement à l'audit d'un commissaire aux comptes ; cette condition entraine l'exclusion du domaine d'application du régime de faveur les scissions concernant les sociétés non soumises légalement à l'audit d'un commissaire aux comptes, c'est à dire les sociétés de petite taille qui ne remplissent pas deux des trois limites chiffrées relatives au total du bilan, au total des produits hors taxes et au nombre moyen des salariés.

En principe, étant donné que l’opération de scission totale a, au regard de la société scindée les mêmes effets qu’une cessation d’activité, les bénéfices réalisés par ladite société avant la scission seront immédiatement imposables. La société scindée doit en effet déposer une déclaration de cessation d’activité permettant d’imposer les bénéfices réalisés avant la scission et ce dans un délai ne dépassant pas la fin du troisième mois à compter de la date de la tenue de la dernière assemblée générale extraordinaire ayant approuvé l’opération de scission103.

Le caractère intercalaire de la scission totale qui signifie que les sociétés créées pour les besoins de la scission vont continuer l’activité de la société scindée, a amené le législateur à exempter certains bénéfices réalisés par la société scindée de l’impôt sur les sociétés.

La première exemption concerne la plus-value d’apport de l’actif immobilisé de la société scindée au patrimoine des sociétés créées pour les besoins de la scission. En effet, conformément à l’article 49 decies I du CIRPPIS « Pour la détermination du bénéfice imposable, est admise en déduction la plus-value d’apport dans le cadre d’une opération de...scission totale de sociétés… des éléments de l’actif autres que les marchandises, les biens et valeurs faisant l’objet de l’exploitation ».

La deuxième exemption concerne les provisions constatées dans les écritures comptables de la société scindée qui ne donneront pas lieu à réintégration dans le bénéfice dégagé par ladite société lors de la déclaration de cessation d’activité. En effet, conformément à l’article 49 decies II du CIRPPIS «En cas de...scission totale de sociétés, les provisions déduites conformément aux

103 Article 49 decies II et IV du CIR.

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dispositions des paragraphes I, I bis et I ter de l’article 48 du présent code et n’ayant pas perdu leur objet ne sont pas réintégrées aux résultats de la société...scindée à condition que lesdites provisions soient inscrites aux bilans des sociétés ayant reçu les actifs objet de provisions dans le cadre…de l’opération de scission ». A travers ces dispositions, le législateur a consacré le principe du caractère intercalaire de la scission dans la mesure où les sociétés créées pour les besoins de la scission succèdent la société scindée concernant la gestion fiscale des provisions. La cessation de l’activité de la société scindée n’entraîne donc pas la réintégration des provisions dans son bénéfice imposable. Cette réintégration se fera au niveau des sociétés créées pour les besoins de la scission et sera ainsi reportée jusqu’à ce que les provisions deviennent sans objet.

Par ailleurs, étant donné que la société scindée est juridiquement dissoute, la détermination du bénéfice fiscal réalisé par les sociétés créées pour les besoins de la scission ne doit en aucune manière être affectée par le résultat fiscal de la société scindée.

Cependant et compte tenu du caractère intercalaire de l’opération de scission totale, le législateur a été amené à poser certaines règles qui marquent une sorte de « rebondissement » du résultat fiscal delà société scindée lors de la détermination du résultat fiscal des sociétés créées pour les besoins de la scission.

La première règle tient à obliger les sociétés créées pour les besoins de la scission à reprendre à leur actif les provisions constituées et déduites par la société scindée. Ces provisions, qui ne donnent pas lieu à réintégration dans le bénéfice fiscal de la société scindée, seront plutôt réintégrées dans le bénéfice fiscal des sociétés créées pour les besoins de la scission dès qu’elles deviennent sans objet104.

La deuxième règle tient à exiger des sociétés créées pour les besoins de la scission de réintégrer dans leur bénéfice imposable une fraction de la plus-value d’apport de l’actif immobilisé de la société scindée. En effet, même si la plus-value d’apport de l’actif immobilisé de la société scindée est exonérée de l’IS au niveau de ladite société, cette plus-value doit être imposée au niveau des sociétés créées pour les besoins de la scission « … dans la limite de 50 % de son montant et ce à raison du cinquième par année à compter de l’année de la scission »105.

Par ailleurs, le bénéfice du régime fiscal de faveur accordé à la plus-value de scission reste subordonné aux mêmes trois conditions, ci-dessus exposées lors de l'analyse de l'opération de fusion106.

La troisième règle qui marque le rebondissement du résultat fiscal de la société scindée lors de la détermination du bénéfice imposable des sociétés créées

104 Article 49 décies II du CIR. 105 Article 48 VII septies du CIRPPIS tel que modifié par l’article 59 de la loi de finances pour la gestion 2001. Signalons que cet article a été abrogé par l’article 24 de la loi n° 2003-80 du 29 décembre 2003 portant loi de finances pour la gestion 2004. Cependant, les dispositions de l’article 48 VII septies ont été reconduites dans le cadre de l’article 49 decies du CIRPPIS ajouté par l’article 23 de la loi de finances pour la gestion 2004. 106 Voir supra.

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pour les besoins de la scission tient à permettre à ces dernières de déduire de leur bénéfice imposable « les déficits enregistrés au niveau de la société …scindée et qui n’ont pas pu être déduits des résultats de l’année de la scission »107. Ainsi, lorsque la société scindée est déficitaire, les sociétés créées pour les besoins de la scission doivent pouvoir imputer le déficit sur leurs propres résultats, ce qui diminuera d’autant leurs bénéfices imposables. A défaut d’imputation, les sociétés créées pour les besoins de la scission sont autorisées à reporter la déduction du déficit sur les résultats des exercices ultérieurs et ce dans la limite de la période de quatre ans à partir de l’année de la réalisation du déficit par la société scindée108.

Le régime de faveur en matière de droits d’enregistrement

Impliquant la dissolution de la société scindée et l’apport de ses éléments d’actif aux sociétés créées pour les besoins de la scission, l’opération de scission risque en principe d’être coûteuse au regard des droits d’enregistrement notamment lorsqu'elle comporte un apport à titre onéreux d'immeubles ou de fonds de commerce.

L’application de la fiscalité de droit commun concernant les droits d’enregistrement pourrait dissuader les entreprises de procéder à l’opération de scission totale. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le législateur a institué, sur la base du principe du caractère intercalaire de la scission totale, un régime de faveur concernant les droits d’enregistrement dus sur l’opération de scission de sociétés. Ce régime de faveur consiste à enregistrer selon le tarif fixe de 150 DT « la prise en charge du passif grevant les apports dans le cadre des opérations de scission totale »109. L’application de ce régime de faveur est toutefois subordonnée à trois conditions.

La première condition consiste à ce que « les sociétés qui participent à des opérations de … scission ou qui sont créées dans le cadre de ces opérations doivent être passibles de l’impôt sur les sociétés »110. Cette condition conduit à exclure l’application du régime fiscal de faveur et à appliquer par conséquent le régime de droit commun des droits d’enregistrement lorsque les sociétés scindées et créées pour les besoins de la scission111 sont hors champ d’application de l’IS. Il s’agit à titre d’exemple des sociétés visées à l’article 4 du CIRPPIS telles que les sociétés civiles, les sociétés en nom collectif, les sociétés en commandite simple…

La deuxième condition consiste à ce que « les comptes des sociétés concernées par l’opération de …scission totale ou bénéficiaires de l’apport

107 Article 49 decies II bis ajouté par l’article 36 de la loi n° 2004-90 du 31 d décembre 2004 portant loi de finances pour l’année 2005. 108 Article 49 decies II bis, alinéa 2 du CIR. 109 Article 23 n° 21 du CDET tel que modifié par l’article 37 de la loi de finances pour la gestion 2005. 110 Article 23 V du CDET ajouté par l’article 38 de la loi de finances pour la gestion 2005. 111 Notons que la société absorbante ou fusionnante ne peut en aucune manière être une société hors champ d’application de l’IS. En effet, conformément à l’article 412 alinéa 2 du CSC, la fusion de sociétés « … doit dans tous les cas aboutir à la constitution d’une société anonyme, d’une société à responsabilité limitée ou d’unesociété en commandite par action ». Ces trois formes juridiques possibles de la société absorbante ou fusionnante font partie du champ d’application de l’IS et ce conformément à l’article 45 I du CIR.

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doivent être soumis légalement à l’audit d’un commissaire aux comptes et leurs comptes au titre de l’année comptable précédant l’année de réalisation de … la scission totale ou de l’apport doivent avoir été certifiés »112.

La troisième condition tient à ce que les sociétés créées pour les besoins de la scission ne procèdent pas à la cession des éléments d’actif apportés et ayant bénéficié du droit d’enregistrement selon le tarif fixe durant les trois années suivant l’année de la scission. La cession de l’un de ces éléments au cours de la période sus indiquée entraîne la déchéance du droit fixe ayant frappé l’opération de scission et l’exigibilité du droit proportionnel applicable aux mutations ainsi que les pénalités de retard113. Les sociétés créées pour les besoins de la scission ne seront toutefois pas déchues du droit fixe au cas où la cession des éléments de l’actif apportés serait effectuée dans le cadre d’une opération de fusion ou dans le cadre de la cession globale de la société114.

Signalons en conclusion concernant les régimes de faveur concédés pour les fusions et scissions des sociétés, qu'en matière d'impôts sur les bénéfices, toutes les législations comparées que l'on a pu consulter adoptent la même approche et concèdent presque les mêmes avantages fiscaux et ce, sur la base du principe du caractère intercalaire des deux opérations de transmission115.

LE REGIME DE FAVEUR POUR L'APPORT D'ENTREPRISE INDIVIDUELLE EN SOCIETE

« La croissance économique de l’entreprise impose bien souvent son évolution juridique : de l’entreprise individuelle à la société »116. Or, cette évolution risque d’être fiscalement lourde. Au coût fiscal de liquidation de l’entreprise individuelle s’ajoute un autre coût, celui inhérent aux impôts frappant la transmission par voie d’apport en société de l’entreprise individuelle. Le coût fiscal relativement élevé de l’opération d’apport en société d’une entreprise individuelle constitue un obstacle financier à la concentration des capitaux et à la création d’unités économiques puissantes capables de résister à une concurrence étrangère sans frontières douanières.

112 Article 23 V 2) du CDET ajoute par l’article 38 de la loi de finances pour la gestion 2005. 113 Article 23 V n° 3 du CDET ajouté par l’article 38 de la loi de finances pour la gestion 2005. 114 Idem. 115Tel est le cas de la législation des pays relevant de l'Union Européenne. La directive 2009/133/CE

du Conseil du 19 octobre 2009 concernant le régime fiscal commun applicable entre autres aux fusions et scissions, impose aux Etats membres de concéder les mêmes avantages que ceux octroyés en Tunisie en matière d'imposition des bénéfices: - exonération de la plus-value d'apport (article 4), - non réintégration des provisions (article 5), - reprise des déficits (article 6).... Il en va de même dans la législation marocaine où la similitude avec le régime de faveur institué en Tunisie est presque parfaite s'agissant de tous les impôts: - exonération de la plus-value d'apport (article 162 du CGI marocain). Sur ce point la législation tunisienne est plus généreuse puisque la réintégration de la plus-value d'apport au résultat imposable de la société bénéficiaire de l'apport est totale au Maroc alors qu'elle est exonérée à moitié en Tunisie, - non réintégration des provisions(article 162 du CGI marocain), - dispense de la régularisation de la TVA initialement déduite (article 105 du CGI marocain), - exonération des droits d'enregistrement (article 129 du CGI marocain). 116 P. SERLOOTEN, Droit fiscal des affaires, Dalloz, Paris, 2001, n° 272, p. 199.

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Conscient de la vulnérabilité de l’économie tunisienne composée essentiellement par des petites entreprises peu compétitives, le législateur a institué, à partir du 1er janvier 2007, un régime de faveur concernant l'opération d’apport en société d’une entreprise individuelle.

Ce régime de faveur concerne l'impôt sur les bénéfices, les droits d'enregistrement et la TVA.

Le régime de faveur en matière d'impôt sur les bénéfices

Ce régime de faveur concerne exclusivement la plus-value d'apport des éléments de l'actif de l'entreprise individuelle en société. En effet, conformément à l’article 11 bis III du CIRPPIS tel qu’ajouté par l’article 12 de la loi de finances pour l’année 2007 « les dispositions de l’article 49 decies du présent code relatives à la plus-value d’apport s’appliquent aux opérations d’apport des entreprises individuelles dans le capital de sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés ». En application de ces dispositions, le législateur a étendu le régime fiscal de faveur réservé à la plus-value d’apport dans le cadre des opérations de fusion ou de scission de sociétés aux opérations d’apport en sociétés des entreprises individuelles. Ce régime de faveur qui repose sur l’idée de la continuation de l’entreprise individuelle par la société et sur le principe du caractère intercalaire de l’opération d’apport117 est cependant subordonné à certaines conditions.

L’application du régime de faveur de la plus-value d’apport dans le cadre des opérations de fusion ou de scission de sociétés aux opérations d’apport en sociétés d’entreprises individuelles aboutit à deux conséquences fiscales.

D’une part, la plus-value d’apport des éléments de l’actif immobilisé de l’entreprise individuelle sera totalement exonérée de l’impôt sur le revenu entre les mains de l’entreprise apporteuse.

D’autre part, la plus-value d’apport des éléments de l’actif immobilisé de l’entreprise individuelle sera réintégrée dans le bénéfice imposable de la société bénéficiaire de l’apport pour la moitié de son montant et ce à raison du cinquième par année à compter de l’année d’apport.

La plus-value d’apport ne bénéficie donc pas d’une franchise fiscale totale. L’imposition de la moitié de la plus-value d’apport entre les mains de la société bénéficiaire de l’apport n’est pas démunie de justification. En effet, au cas où la plus-value d’apport était totalement exonérée, elle bénéficierait d’un double privilège fiscal. Outre son exonération totale de l’IR entre les mains de l’entreprise apporteuse, la plus-value d’apport fera partie du prix de revient servant de base au calcul des amortissements et sera par conséquent, déduite encore une fois au titre des amortissements entre les mains de la société bénéficiaire de l’apport. Afin d’éviter l’attribution de ce double privilège à la plus-value d’apport, le législateur a prévu l’imposition de la moitié de la plus-value d’apport entre les mains de la société bénéficiaire de l’apport.

L’application du régime de faveur réservé à la plus-value d’apport en société d’une entreprise individuelle est subordonnée à plusieurs conditions. Certaines

117 P. SERLOOTEN, Droit fiscal des affaires, op. cit., n° 272, p. 199.

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de ces conditions sont relatives à l’entreprise apporteuse ; d’autres conditions sont relatives à la société bénéficiaire de l’apport.

Du côté de l’entreprise apporteuse, deux conditions sont exigées par l’article 11 bis III du CIRPPIS. La première condition est relative au statut fiscal de l’entreprise apporteuse. Aux termes de l’article 11 bis III du CIRPPIS « l’entreprise individuelle doit être soumise à l’impôt sur le revenu selon le régime réel ». Cette condition qui entraîne l’exclusion du bénéfice du régime de faveur des entreprises individuelles soumises à l’IR selon l’un des régimes forfaitaires d’assiette ou d’impôt, nous parait superflue dans la mesure où le régime de faveur, et de par son emplacement dans l’article 11 bis III du CIRPPIS, ne s’applique que dans le cadre du régime réel.

La seconde condition est relative aux éléments de l’actif objet de l’apport qui, aux termes de l’article 11 bis III du CIRPPIS, doivent « être inscrits au bilan à la date de l’apport ». Il ne suffit donc pas que l’élément apporté soit affecté par nature à l’exploitation pour bénéficier du régime de faveur de la plus-value d’apport. Encore faut-il que les éléments apportés soient inscrits à l’actif du bilan de l’entreprise individuelle à la date de l’apport. Cette condition peut paraître assez rigoureuse dans la mesure où elle entraîne l’exclusion du régime de faveur de certains biens et éléments qui ne peuvent pas, en application de la législation comptable des entreprises, être inscrits à l’actif du bilan. Tel est notamment le cas du fonds de commerce créé par l’entrepreneur individuel. Ne pouvant pas être inscrits à l’actif du bilan et n’ayant pas une valeur comptable, le fonds de commerce créé par l’entrepreneur individuel ne peut bénéficier lors son apport en société du régime de faveur réservé à la plus-value d’apport. La plus-value d’apport du fonds de commerce qui correspond intégralement à la valeur d’apport qui lui a été attribuée, sera par conséquent inévitablement imposable.

Cependant, dans son commentaire de cette condition, l’administration fiscale a précisé que « cette condition est considérée remplie pour le cas d’un fonds de commerce constitué »118. Il s’agit là d’une tolérance fiscale concédée par l’administration en violation des dispositions légales qui exigent l’inscription à l’actif comme condition de bénéfice des avantages fiscaux et financiers liés à la transmission des entreprises.

Du côté de la société bénéficiaire de l’apport, l’application du régime de faveur réservé à la plus-value d’apport est subordonnée à deux conditions posées par l’article 11 bis III du CIRPPIS.

La première condition est que la société bénéficiaire de l’apport doit être une société soumise à l’IS, c'est-à-dire, une société anonyme, en commandite par actions ou à responsabilité limitée119. Sont exclues du régime de faveur et demeurent par conséquent imposables, les plus-values d’apport d’une entreprise individuelle au capital d’une société non soumise à l’IS. Tel est le cas de la plus-value d’apport d’une entreprise individuelle au capital d’une société

118 Note commune n° 33/2007, texte n° DGI 2007/68 commentant les dispositions des articles 12 à 20 de la loi n°2006-85 du 25 décembre 2006, portant loi de finances pour l’année 2007 relatives à l’encouragement de la transmission des entreprises. 119 Voir l’article 45 du CIRPPIS qui comporte une énumération limitative des sociétés soumises à l’IS.

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en nom collectif, d’une société en commandite simple ou d’une société civile, lesquelles sociétés sont fiscalement qualifiées de « sociétés transparentes » du fait qu’elles ne sont pas soumises à l’IS.

La seconde condition est que « la société bénéficiaire de l’apport doit poursuivre l’exploitation de l’entreprise objet de l’apport pendant une période de trois ans au moins à compter du premier janvier de l’année qui suit celle de l’apport »120. Cette condition peut paraître a priori justifiable. En effet, il va sans dire que l’exonération de la plus-value d’apport a pour raison d’être d’encourager la concentration des capitaux en assurant la poursuite de l’exploitation de l’entreprise individuelle dans un cadre social plus institutionnalisé et plus favorable à l’épanouissement de l’entreprise. C’est pourquoi le législateur a exigé que la société bénéficiaire de l’apport poursuive l’exploitation de l’entreprise objet de l’apport pendant une période minimale de trois ans à compter du 1er janvier de l’année qui suit celle de l’apport. D’ailleurs et conformément à l’article 11 bis III du CIRPPIS « le non-respect de cette condition entraîne le paiement par le bénéficiaire de la déduction de l’impôt non acquitté conformément aux dispositions de ce paragraphe majoré des pénalités de retard exigibles conformément à la législation en vigueur ». Cette disposition qui pose la règle de la déchéance de l’avantage fiscal en cas de non poursuite de l’exploitation de l’entreprise apportée pendant la période de trois ans par la société bénéficiaire de l’apport, peut paraître discutable pour deux raisons.

D’une part, bien que la cause de la déchéance soit imputable à la société bénéficiaire de l’apport qui n’a pas respecté la condition de la poursuite de l’exploitation de l’entreprise apportée pendant trois ans, c’est l’apporteur qui supporte les conséquences de la déchéance en procédant au paiement de l’impôt frappant la plus-value d’apport initialement déduite ainsi que des pénalités de retard. Le législateur n’aurait-il pas dû faire peser les conséquences de la déchéance sur la société bénéficiaire de l’apport puisque la cause de la déchéance lui est imputable ?

D’autre part, tout en rattachant la déchéance de l’exonération de la plus-value d’apport au non-respect de la condition de poursuite de l’exploitation de l’entreprise apportée par la société bénéficiaire de l’apport pendant trois ans, le législateur a ouvert la voie à une échappatoire fiscale au profit de l’entrepreneur individuel souhaitant vendre son entreprise. En effet, étant donné que la plus-value de vente de la totalité des éléments de l’actif d’une entreprise individuelle est en principe imposable selon le barème progressif de l’IR, l’entrepreneur individuel peut réaliser des économies d’impôt en procédant aux deux opérations suivantes. Dans un premier temps, et au lieu de vendre les éléments d’actif de son entreprise, l’entrepreneur procède à l’apport desdits éléments en société. Par cette opération, l’entrepreneur bénéficie de la déduction de la plus-value d’apport conformément à l’article 11 bis III du CIRPPIS. Dans un second temps, et devenant associé dans la société bénéficiaire de l’apport, l’entrepreneur procède à la vente de ses parts sociales ou actions en profitant du régime préférentiel d’imposition de la plus-value de

120 Article 11 bis III du CIR.

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cession des actions et parts sociales prévu pour les particuliers : outre l’abattement de 10.000 DT121, la plus-value de cession des actions ou parts sociales est imposable selon le taux préférentiel de 10 %122.

Bien évidemment, un tel montage peut présenter de graves risques fiscaux associés aux abus de droit, quand il est dénué de toute essence économique et qu’il vise uniquement à éluder les impôts.

Le législateur tunisien aurait pu éviter cette échappatoire fiscale en subordonnant la déduction de la plus-value d’apport en société d’une entreprise individuelle, non pas à la condition de poursuite de l’exploitation de l’entreprise apportée pendant trois ans, mais plutôt à la condition d’incessibilité des parts sociales ou actions reçues en contrepartie de l’apport pendant trois ans. D’ailleurs, en cas de non-respect de cette condition, il serait logique que la déchéance de l’avantage fiscal pèse sur l’apporteur étant donné que la cause de la déchéance lui sera imputable.

En tout état de cause, même si le législateur a rattaché la déduction de la plus-value d’apport à la condition de la poursuite de l’exploitation de l’entreprise apportée par la société bénéficiaire de l’apport, le non-respect de cette condition n’entraîne pas forcément la déchéance de l’avantage fiscal. En effet, conformément à l’article 11 bis III du CIRPPIS, l’apporteur ne sera pas déchu du bénéfice de la déduction de la plus-value au cas où le non-respect de la condition de poursuite de l’activité serait dû à « des motifs qui ne sont pas imputables à l’entreprise bénéficiaire de l’apport. Ces motifs sont fixés par décret ». En application de ces dispositions, le décret n° 2007-1266 du 21 mai 2007 a énuméré limitativement les motifs de non poursuite de l’exploitation de l’entreprise par la société bénéficiaire de l’apport n’entraînant pas la déchéance de la déduction de la plus-value réalisée par l’apporteur. Il s’agit des motifs suivants :

1-« la cession de l’entreprise à un tiers dans le cadre du règlement judiciaire au sens de la réglementation relative au redressement des entreprises en difficultés économiques (remplacée par la loi n° 36 du 29 avril 2016 relative aux procédures collectives) telle que modifiée et complétée par les textes subséquents,

2-les cas de force majeure indépendante des faits de l’entreprise prouvés conformément à la loi et qui empêchent l’entreprise de poursuivre son activité,

3-l’union des créanciers et le concordat par abandon d’actif par le failli dans le cadre de la faillite conformément aux dispositions du code de commerce, à l’exception des cas de banqueroutes ».

Le régime de faveur en matière de droits d'enregistrement

Lorsque l’entreprise individuelle objet de l'apport en société comporte dans son actif des biens immobiliers ou autres biens soumis à la formalité de l’enregistrement, l’opération de transmission par voie d'apport en société peut être fiscalement coûteuse pour la société bénéficiaire de l'apport dans la

121 Voir l’article 38 n° 17 du CIR. 122 Voir l’article 44 III du CIR.

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mesure où elle sera obligé de payer les droits proportionnels d’enregistrement au titre des biens apportés à titre onéreux, c'est à dire, au cas où il y a prise en charge du passif grevant les biens apportés, tels qu'une hypothèque grevant l'immeuble apporté ou un nantissement grevant le fonds de commerce apporté..

Afin de ne pas freiner les transmissions d’entreprises individuelles par voie d'apport en société, le législateur a institué à travers la loi de finances pour l’année 2005123 un droit fixe de 150 DT par acte au titre de "la prise en charge du passif grevant les apports des personnes physiques d’entreprises individuelles au capital des personnes morales passibles de l’impôt sur les sociétés".

Cependant, conformément aux dispositions de l’article 23 VI du CDET, le bénéfice du régime de faveur exige le respect de certaines conditions tenant à la fois au propriétaire de l’entreprise individuelle et à la société bénéficiaire de l’apport.

Le paragraphe VI de l’article 23 du CDET a prévu l’obligation de répondre aux conditions suivantes relatives au propriétaire de l’entreprise individuelle objet de l’apport à savoir :

- Le propriétaire de l’entreprise individuelle doit avoir déposé une déclaration d’existence au titre de l’activité de son entreprise qui doit avoir entamé effectivement son activité à la date de l’apport.

- La personne physique propriétaire de l’entreprise individuelle objet de l’apport doit être soumise à l’impôt sur le revenu selon le régime réel, en conséquence de quoi, sont exclus du bénéfice du régime de faveur susvisé les apports d’entreprises individuelles soumises à l'un des régimes forfaitaires d'impôt (catégorie des bénéfices industriels et commerciaux) ou d'assiette (catégories des bénéfices des professions non commerciales et des bénéfices agricoles et de pêche).

- Les immeubles et les fonds de commerce objet de l’apport doivent être inscrits à l’actif du bilan de l’entreprise individuelle. Cependant, dans son commentaire de cette condition, l’administration fiscale a précisé que « puisque le fonds de commerce peut être créé par le propriétaire de l’entreprise individuelle ou par voie d’acquisition et vu que le fonds de commerce créé par le propriétaire de l’entreprise individuelle n’est pas inscrit à l’actif d’un bilan, cette condition ne s’applique que pour les fonds de commerce acquis »124. Il s’agit là d’une tolérance fiscale concédée par l’administration en violation des dispositions légales qui exigent l’inscription à l’actif comme condition de bénéfice des avantages fiscaux liés à l'apport de

123 Article 23 n° 21 bis du Code des Droits d'Enregistrement et de Timbre ajouté par l'article 39 de la loi de finances n° 2004-90 du 31 décembre 2004 et modifié par la loi de finances n°2012-27 du 29 décembre 2012. 124 Note commune n° 21/ 2005 portant commentaire des dispositions des articles 39 et 40 de la loi n°2004-90 du 31 décembre 2004 portant loi de finances pour l’année 2005 relatives à l’encouragement de l’apport d’entreprises individuelles au capital des sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés.

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l'entreprise individuelle en société. Sur cette base, bénéficient du régime de faveur la prise en charge de passifs grevant les fonds de commerce acquis et les immeubles inscrits à l’actif du bilan de l’entreprise individuelle ainsi que la prise en charge de passifs grevant le fonds de commerce créé par le propriétaire de l’entreprise individuelle.

Le paragraphe VI de l’article 23 du CDET a prévu l’obligation de répondre aux conditions suivantes relatives à la société bénéficiaire de l’apport :

- La société bénéficiaire de l’apport doit être soumise à l’audit légal d’un commissaire aux comptes.

- Les comptes de la société bénéficiaire de l’apport doivent être effectivement certifiés par un commissaire aux comptes au titre de l’exercice comptable précédant l’année de réalisation de l’apport. Cette condition risque de ne pas pouvoir être satisfaite lorsque l'apport de l'entreprise individuelle s'effectue au capital d'une SARL nouvellement créée ; laquelle société est dispensée conformément à l'article 13 du CSC de l'obligation de désigner un commissaire aux comptes au titre de la première année d'activité. C'est la raison pour laquelle, l'administration fiscale a concédé une autre tolérance fiscale en précisant dans une note commune que "Il est à noter à ce titre que cette condition ne s’applique pas aux sociétés créées à l’occasion de la réalisation de l’apport".

- La non cession des biens bénéficiant de l’enregistrement au droit fixe au cours des trois années suivant l’année de réalisation des opérations d’apports susvisées. On vise par les biens bénéficiant du régime de faveur, les immeubles et les fonds de commerce grevés de dettes ou de certains privilèges et qui ont fait l’objet d’apport au capital d’une personne morale soumise à l’impôt sur les sociétés. Dans le cas de cession de ces biens, les droits non payés en vertu de l’application du régime de faveur sont exigibles en sus des pénalités de retard calculées à partir de l’expiration du délai de l’accomplissement de la formalité de l’enregistrement de l’opération de l’apport. Toutefois, les mutations des biens susvisés, réalisées dans le cadre de fusion ou dans le cadre de la cession globale de la société, n’aboutissent pas à la déchéance du droit au bénéfice du régime de faveur.

Le régime de faveur en matière de TVA

En principe et conformément à l’article 9 IV-2 du CTVA, l'opération d'apport en société d’une entreprise individuelle assujettie à la TVA entraîne le reversement de la TVA initialement déduite au titre des acquisitions des immobilisations diminuée d’un cinquième par année civile ou fraction d’année civile de détention s’il s’agit de biens d’équipement ou de matériels ou d’un dixième par année civile ou fraction d’année civile de détention s’il s’agit de bâtiments.

Cependant, afin de faciliter la croissance économique de l’entreprise qui impose bien souvent son évolution juridique de l’entreprise individuelle à la

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société et partant du fait que cette opération a un caractère intercalaire puisque l’entreprise individuelle poursuivra son activité sous la forme sociétaire, le législateur a dispensé l'apporteur de procéder à l’opération de la régularisation de la TVA initialement déduite. En effet, conformément à l’article 9 IV-2 (alinéa 2, deuxième tiret) du CTVA tel que complété par l’article 20 de la loi de finances pour l’année 2007, l’entrepreneur apporteur est dispensé du reversement de la TVA initialement déduite au titre de ses acquisitions d’immobilisations. Sur ce point, les dispositions du CTVA ne sont pas cohérentes avec les dispositions du CIRPPIS et du CDET. En effet, en matière d’IR et de droits d'enregistrement, l’apport d’une entreprise individuelle en société n’ouvre droit au bénéfice du régime de faveur que lorsque la société bénéficiaire de l’apport est soumise à l’IS. En revanche, en matière de TVA, le domaine de l’avantage fiscal semble être plus large dans la mesure où la dispense du reversement de la TVA est accordée peu importe que la société bénéficiaire de l’apport soit ou non soumise à l’IS. Il semble qu'il s'agit là d'une omission plutôt qu'une mesure voulue.

Pour bénéficier de la dispense du reversement de la TVA initialement déduite, l’entrepreneur apporteur doit communiquer au bureau de contrôle des impôts compétent pendant le mois qui suit celui au cours duquel l'apport a eu lieu, un état comportant notamment les mentions suivantes :

- La désignation des bâtiments, équipements et matériels objet de la cession,

- La date de leur acquisition,

- Le prix d’acquisition hors taxe sur la valeur ajoutée,

- Le taux et le montant de la taxe sur la valeur ajoutée ayant fait l’objet de déduction ou de suspension au titre desdits biens,

- Le pourcentage de déduction pour les entreprises partiellement soumises à la taxe sur la valeur ajoutée.

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LE REGIME DE FAVEUR POUR L’INTRODUCTION EN BOURSE

Le droit fiscal tunisien regorge d’incitations en faveur des sociétés cotées en bourse125 et de leurs actionnaires126. Il existe deux incitations fiscales majeures qui dans certains cas de figure, peuvent être intiment liées à la transmission des entreprises : La défiscalisation de la plus-value d’apport des actions et parts sociales dans le capital de la société mère ou de la société holding et la défiscalisation de la plus-value de cession des actions dans le cadre d'une opération d'introduction en bourse.

La défiscalisation de la plus-value d’apport des actions et parts sociales dans le capital de la société mère ou de la société holding

L’article 31 de la loi de finances pour l’année 2007 a prévu la déduction du bénéfice imposable de la plus-value provenant de l’apport en actions et parts sociales dans le capital de la société mère ou de la société holding127. L’article 32 de la même loi a exonéré cette plus-value d’apport de l’IRPP.

Le bénéfice de la déduction est subordonné aux conditions suivantes :

- L’engagement de la société mère ou holding à introduire ses actions à la bourse des valeurs mobilières de Tunis au plus tard la fin de l’année suivant celle de la déduction. Ce délai peut être prorogé

125Conformément aux dispositions de l’article 1er de la loi n° 2010-29 du 7 juin 2010, relative à

l’encouragement des entreprises à l’admission de leurs actions à la bourse, le taux de l’IS, estréduit à 20% pour les sociétés qui procèdent à l’admission de leurs actions ordinaires à la cote de la BVMT,à condition que le taux d’ouverture du capital au public soit au moins égal à 30%, et ce, pendant cinq ans à compter de l’année de l’admission.Cette réduction est accordée aux sociétés qui procèdent à l’admission de leurs actions ordinaires à la cote de la BVMT au cours de la période allant du 1er janvier 2010 au 31 décembre2019. Ces dispositions de faveur ne s’appliquent pas aux opérateurs de réseaux des télécommunications, sociétés de services dans le secteur des hydrocarbures prêtant leurs services au profit de sociétés exerçant dans le cadre de la législation relative aux hydrocarbures, entreprises exerçant dans les secteurs de production et de transport des hydrocarbures et soumises à un régime fiscal dans le cadre des conventions particulières, entreprises de transport des produits pétroliers par pipe-line et,entreprises exerçant dans le secteur de raffinage et de vente des produits pétroliers en gros. L’article 12 de la loi de finances pour l’année 2017 a ajouté à l’article premier de la loi n° 2010-29 du 7 juin 2010, relative à l’encouragement des entreprises à l’admission de leurs actions à la bourse un paragraphe prévoyant que le taux de 20% est réduit à 15% pour les sociétés soumises à l’IS au taux de 25% et qui procèdent à l’admission de leurs actions ordinaires à la cote de la BVMT à compter du 1er janvier 2017. Le taux de faveur s’applique pendant cinq ans à compter de l’année de l’admission. 126 La plus-value provenant de la cession d’actions cotées à la BVMT acquises ou souscrites à partir

du 1erjanvier 2011 et cédées avant l’expiration de l’année suivant celle de leur acquisition ou de leur

souscription est soumise à l’IRPP ou à l’IS. Ainsi, est déductible, pour la détermination du résultat fiscal, la plus-value provenant de la cession d’actions cotées à la BVMT, dans le cas où cette plus-value provient de la cession des actions

acquises ou souscrites avant le 1erjanvier 2011 et desactions acquises ou souscrites à partir du

1erjanvier 2011 et cédées après l’expiration de l’année suivant celle de leur acquisition ou de leur

souscription. 127 En vertu des dispositions de l’article 463 du CSC, la société mère est dite holding lorsqu'elle n'exerce aucune activité industrielle ou commerciale et que son activité se limite à la détention et à la gestion des participations dans les autres sociétés.

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d’une seule année par arrêté du Ministre des Finances sur la base d’un rapport motivé du CMF.

- Le dépôt, à l’appui de la déclaration annuelle de l’impôt de l’année de la déduction, dudit engagement visé par le CMF.

- Le dépôt, par le bénéficiaire de la déduction ou de l’exonération, au centre ou au BCI compétent, d’une attestation prouvant l’introduction de la société mère ou de la société holding ayant bénéficié de l’apport à la bourse des valeurs mobilières de Tunis dans un délai ne dépassant pas le troisième mois de la deuxième année suivant celle de la déduction ou de l’exonération, ou de la troisième année suivant celle de la déduction ou de l’exonération en cas de prorogation128.

D’un point de vue économique, et cela a été avéré en pratique, la déduction facilite les opérations de restructuration des sociétés et vise plus précisément à éliminer les entraves fiscales à la formation des groupes de sociétés. En effet, lorsqu’une personne détient des actions ou parts sociales dans une société et que cette société veut s’intégrer, en tant que filiale, dans un groupe de sociétés, l’associé procèdera à l’apport de ses actions ou parts sociales à la société mère ou holding qui prendra la place de l’apporteur en tant qu’associé dans la société filiale. Par cette opération d’apport, une triple modification des prises de participation est opérée.

Du côté de l’apporteur, l’opération d’apport de ses actions ou parts sociales entraîne la perte de la qualité d’associé dans la société « future filiale », tout en devenant associé dans la société mère ou holding.

Du côté de la société bénéficiaire de l’apport, c'est-à-dire de la société mère ou holding, l’opération d’apport des actions ou parts sociales à son capital lui permet de prendre des participations au capital de la société filiale et d’exercer par conséquent un contrôle de fait ou de droit sur cette société devenue membre du groupe.

Du côté de la société « future filiale », l’opération d’apport entraîne la modification des associés qui la composent. L’associé apporteur quittera la société « future filiale » tout en laissant sa place à la société mère ou holding.

Notons enfin que les entreprises ayant bénéficié de la déduction seront tenues au paiement de l’impôt non acquitté au titre de la plus-value déduite, majoré des pénalités de retard exigibles conformément à la législation en vigueur, en cas de non dépôt, au centre ou au bureau de contrôle compétent, d’une attestation prouvant l’introduction de la société mère ou la société holding ayant bénéficié de l’apport, à la BVMT dans un délai ne dépassant pas le troisième mois suivant l’expiration du délai susvisé. Les pénalités de retard ne seront pas exigibles en cas de présentation d’une attestation délivrée par le CMF prouvant que la non-introduction de la société mère ou de la société holding à la BVMT est due à des motifs qui ne leur incombent pas.

128 Note commune n° 37 de l’année 2007 (Texte n° DGI 2007/81)

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La défiscalisation de la plus-value de cession des actions dans le cadre d'une opération d'introduction en bourse

Est déductible, pour la détermination de l'assiette soumise à l’IRPP ou à l'IS, de la plus-value provenant de la cession des actions dans le cadre d'une opération d'introduction à la BVMT.

La plus-value déductible au titre des opérations de cession d'actions dans le cadre d'une opération d'introduction en bourse, est égale, à la différence entre leur valeur d'introduction en bourse et leur valeur d'acquisition ou de souscription.

L’introduction peut être faite soit au marché principal soit dans le marché alternatif129.

129 Prise de position DGELF n° 1729 du 3 septembre 2015

نابات اإلجتماعية تبعا لمكتوبكم المشار إليه بالمرجع أعاله والمتضمن طلبكم معرفة هل يطبق إعفاء القيمة الزائدة المتأتية من اإلسهام باألسهم أو بالم

وق البديلة، يشرفني في رأس مال الشركة األم أو الشركة القابضة التي تلتزم بإدراج أسهمها ببورصة األوراق المالية بتونس إذا تم اإلدراج بالس

ل التي إعالمكم أن اإلعفاء يطبق في صورة إستجابة الشركة األم أو الشركة القابضة لشرط إدراج أسهمها ببورصة األوراق المالية بتونس في اآلجا

حددها القانون لذلك وبصرف النظر إن تم اإلدراج بالسوق البديلة أو بالسوق الرئيسية.

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V. AUTRES CONSIDERATIONS FISCALES LIEES A LA

TRANSMISSION

Le système fiscal tunisien a longtemps brillé par l’absence d’un régime d’imposition spécifiques aux plus-values à long terme. Déjà, depuis 1996, cette proposition a été formulée par le professeur Habib AYADI qui, tout en mettant l’accent sur l’inadéquation du régime fiscal de la plus-value réalisée par les entreprises avec le nouvel ordre économique mondialisé, écrivait « ne serait-il pas plus judicieux d’imposer à un taux réduit les plus-values à long terme réalisées sur la cession d’actifs nécessaires à l’exploitation, et au taux de droit commun les plus-values à court terme sur cession des autres éléments d’actifs »130131. Il aura fallu attendre la loi de finances pour 2019 pour qu’il introduise une défiscalisation de la moitié des plus-values provenant de la cession de certains éléments d'actif détenus depuis au moins 5 ans. Si, en principe, un tel régime peut profiter à la transmission d’une branche d’activité, les conditions de bénéfice de l’avantage sont tellement sévères qu’elles risquent de limiter son application pratique.

Par ailleurs, le législateur fiscal a été particulièrement prohibitif lorsque la transmission d'entreprises revêt un caractère spéculatif. Le régime fiscal des marchands de biens en est l'illustration la plus remarquable.

Aussi, il convient de signaler, en relation avec la nouvelle législation relative à l'investissement et aux avantages fiscaux que le législateur a exclu certaines transmissions d’entreprises des avantages fiscaux.

Enfin, quand il s’agit d’opérations effectuées dans le seul but d’éluder l’impôt ou de soustraire au paiement des dettes fiscales, les transmissions d’entreprises peuvent sanctionnées pénalement.

LE REGIME DE FAVEUR DEDIE AUX PLUS-VALUES A LONG TERME

Selon l’article 24 de la loi de finances pour 2019, les entreprises, autres que celles exerçant dans le secteur financier, les secteurs de l’énergie à l’exception des énergies renouvelables, des mines, de la promotion immobilière, de la consommation sur place, du commerce et des opérateurs de télécommunication, déduisent pour la détermination du revenu ou bénéfice net

130H. AYADI, Droit fiscal. Impôt sur le revenu des personnes physiques et impôt sur les sociétés, CPU, Tunis, 1996., n° 53, p. 32. 131 La distinction entre les plus-values à court terme soumises aux taux de droit commun de l’IR ou de l’IS et les plus-values à long terme soumises à des taux réduits constitue un système qui n’a cessé de faire des ravages partout dans le monde, comme l’a affirmé le Comité des Affaires Fiscales de l’OCDE. Voir, Rapport du comité des Affaires Fiscales de l’OCDE sur, L’imposition des personnes physiques sur la fortune, les mutations et les gains en capital, OCDE, Paris, 1979, p. 104.

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imposable la plus-value provenant de la cession des éléments d'actif immobilisé corporel, tel que défini par la législation comptable des entreprises (ce qui inclut les immeubles), et affectés à leur activité principale, dans la limite de 50%, et ce, lorsque :

- L’opération de cession a lieu après 5 ans à compter de la date de possession et lorsque ;

- La plus-value n'est pas soumise à un régime fiscal plus favorable conformément à la législation fiscale en vigueur. Il devra s’agir des plus-values réalisées par les entreprises bénéficiaires de l’exonération de l’IR ou de l’IS (entreprises nouvellement créées en 2013, 2014, 2016, 2018 et 2019) ou de la déduction des revenus et bénéfices provenant de l’exploitation (développement régional ou agricole, entreprises exportatrices n’ayant pas épuisé la période de déduction intégrale des revenus ou bénéfices provenant de l’export, entreprises individuelles bénéficiant de la déduction des deux-tiers de leurs revenus).

Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à :

- L’affectation de la totalité de ladite plus-value pour l'acquisition de matériel et d’équipements destinés à l’exploitation ;

- L’affectation de la totalité de ladite plus-value dans un compte de réserve spéciale pour l’investissement au passif du bilan avant l'expiration du délai de dépôt de la déclaration définitive de l'impôt au titre des bénéfices de l'année du bénéfice de la déduction ;

- La réalisation de l'investissement et l'incorporation de la réserve constituée au capital au plus tard à la fin de la deuxième année suivant celle de la constitution de la réserve ;

- La non-réduction du capital pendant une période de 5 ans suivant la date de l'incorporation sauf en cas de réduction pour résorption des pertes ;

- La présentation, à l’appui de la déclaration annuelle de l’impôt de l'année au titre de laquelle la déduction de la plus-value a eu lieu, d'une attestation de dépôt de déclaration de l’investissement à réaliser délivrée par les services concernés par le secteur d’activité conformément à la règlementation en vigueur et de l’engagement des bénéficiaires de la déduction de réaliser l'investissement au plus tard à la fin de la deuxième année suivant celle de la constitution de la réserve.

Selon l’article 24 de la loi de finances pour 2019, ces dispositions s’appliquent aux opérations de cession ayant lieu au cours de la période allant du 1er janvier 2019 jusqu’au 31 décembre 2021.

LE REGIME FISCAL DES MARCHANDS DE BIENS

En dépit de l’absence d’un cadre juridique spécifique aux marchands de biens, le droit fiscal a réservé un statut fiscal particulier à cette catégorie d’activité. Il est vrai que le législateur fiscal n’a pas employé le vocable « marchand de biens ». Mais, la doctrine administrative enseigne, dans le cadre de sa mission

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pédagogique, que « les personnes qui habituellement achètent des immeubles ou des fonds de commerce en vue de les revendre »132, ne sont rien d’autres que des « marchands de biens »133. Il s'ensuit que les marchands de biens sont des spéculateurs entre autres de fonds de commerce et par conséquent sont des spéculateurs dans les transmissions d'entreprises individuelles constitutives de fonds de commerce.

Le régime fiscal réservé par le législateur à ces professionnels est particulièrement lourd. En effet, partant du fait que le marchand de biens n’achète pas le fonds de commerce pour le l'exploiter, mais pour le revendre et qu'ainsi, le fonds de commerce acquis constitue pour le marchand de biens « une marchandise », le législateur a soumis le marchand de biens au titre de son activité aux impositions suivantes :

- Il est soumis aux droits d’enregistrement lors de l'acquisition des fonds de commerce au taux de 2,5% sur la base du « prix de vente de la clientèle, de l’achalandage, de la cession du droit au bail et des objets mobiliers ou autres servant à l’exploitation du fonds de commerce »134.

- Il est soumis à la TVA lors de la revente du fonds de commerce selon le taux de droit commun de 19% « sur la base de la différence entre le prix de vente et le prix d’achat, tous frais et taxes inclus à l’exclusion de la taxe sur la valeur ajoutée ». La TVA n’est donc pas assise sur le prix de vente du fonds de commerce, mais plutôt sur la base du « profit brut » découlant de la différence entre d’une part le prix de vente et d’autre part le prix de revient.

Remarquons à ce niveau de l'analyse que le législateur tunisien a réservé un traitement fiscal lourd des marchands de biens notamment comparativement aux autres législations comparées135. En droit fiscal tunisien, le marchand de biens doit en effet payer non seulement les droits d’enregistrement lors de l’acquisition de fonds de commerce, mais aussi la TVA sur les opérations de revente desdits biens.

- Il est soumis à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des BIC au titre des plus-values réalisées suite à la cession des fonds de commerce acquis et ce, selon le barème progressif qui peut atteindre 35% du revenu réalisé. Il est également soumis à la contribution sociale de solidarité au taux de 1%.

132 Article premier II- 7) du Code de la TVA. 133 Précis de la taxe sur la valeur ajoutée, Direction Générale des Impôts, 1989, p.27. Dans la note commune n° 40/99 (Texte n° DGI 99/78), l’administration fiscale a affirmé concernant son précis de TVA que « …ledit document n’a plus cours en attendant sa mise à jour ». 134 Voir l’article 28 du CDET. 135 A titre d’exemple, en droit fiscal français, étant donné que le fonds de commerce acquis constitue

pour le marchand de biens « une marchandise », le législateur a, tout en soumettant les reventes effectuées par les marchands de biens à la TVA (Voir l’article 257 n°6 du CGI français), dispensé les opérations d’acquisitions de fonds de commerce effectuées par les personnes susvisées des droits d’enregistrement (Voir l’article 1115 du CGI français). La perception des droits d’enregistrement est en quelque sorte « mise en sommeil » jusqu’à ce que le marchand de biens procède à la revente, auquel cas, les droits d’enregistrement seront dus par le nouvel acquéreur. Tout se passe comme si le fonds de commerce n’était pas entré dans le patrimoine du marchand de biens qui constitue au regard des droits d’enregistrement une entité transparente.

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- Il risque d’être en situation de crédit d’impôt chronique, du fait que ses ventes d’immeubles et de fonds de commerce peuvent faire l’objet de retenues à la source au taux de 2,5%.

- Il est soumis à la TCL au taux de 0,2% sur la base du chiffre d'affaires réalisé composé des prix de cession des fonds de commerce.

- Il est obligé en vertu l’article 94 du CDET, de tenir deux répertoires, l’un est affecté aux opérations d’intermédiaire, l’autre aux opérations d’achat revente.

- Il doit tenir une comptabilité conforme au système comptable des entreprises. Il n’est pas pratiquement en mesure de bénéficier du forfait d’impôt en matière d’IR et ce compte tenu de l’importance du chiffre d’affaires au titre de cette activité.

La lourdeur ainsi que la rigueur du régime fiscal des marchands de biens expliquent, selon M. YAICH, le nombre très infime des marchands de biens patentés136. Le marchand de biens préfèrera peut-être, ne pas exercer la profession de « marchand de biens ». Il s’estimera plus heureux en exerçant l’activité d’achat revente de fonds de commerce à titre non professionnel sans déclaration d’existence ni immatriculation au registre de commerce. Il préfèrera frauder plutôt que d’adhérer à un régime fiscal « suicidaire ». L’assainissement du régime fiscal des marchands de biens est une exigence si les pouvoirs publics souhaitent vraiment que ces contribuables adhèrent à la transparence.

LA TRANSMISSIONS D’ENTREPRISES SOUS L’EGIDE DE LA NOUVELLE LEGISLATION REGISSANT L’INVESTISSEMENT

ET LES AVANTAGES FISCAUX

La loi n° 2016-71 du 30 septembre 2016, portant loi de l’investissement (LDI)137 a abrogé le code d’incitations aux investissements (CII)138 promulgué par la loi n° 93-120 du 27 décembre 1993139, ainsi que toutes les dispositions

136 Abderraouf YAICH, Les impôts en Tunisie, les éd. Raouf YAICH, 2003, p.214. 137 Travaux préparatoires : Discussion et adoption par l’assemblée des représentants du peuple dans sa séance du 17 septembre 2016. 138D’après l’article 27 de la LDI, sous réserve des dispositions des articles 28 à 32 de la présente loi, est abrogé le CII promulgué par la loi n° 93-120 du 27 décembre 1993, à l’exception de ses articles 14 et 36, et ce, à compter de la date d’entrée en vigueur de la loi de l’investissement. Paradoxalement, certaines dispositions de ce dernier code ont été maintenues impliquant davantage une complexité des avantages fiscaux pour les investisseurs tunisiens et étrangers. Le CII a ainsi été abrogé à l’exception de ses articles 14 (traitant du régime du non-résident en matière de change pour les entreprises totalement exportatrices) et de l’article 36 (traitant des prêts fonciers). 139 En article 23 de la loi n° 2017-8 du 14 février 2017, portant refonte du dispositif des avantages fiscaux (LRDAF) dispose que sous réserve des dispositions de la LRDAF, sont remplacées à partir du 1er avril 2017, les expressions « CII » et « CII promulgué par la loi n° 93-120 du 27 décembre 1993 », ainsi que les renvois aux articles dudit code où ils se trouvent dans les textes en vigueur, par l’expression « législation fiscale en vigueur », et ce, sous réserve des différences dans l’expression.

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qui lui sont contraires140, et ce, à compter de la date d’entrée en vigueur de ladite loi de l’investissement, à savoir le 1er avril 2017141.

De même, la loi n° 2017-8 du 14 février 2017, portant refonte du dispositif des avantages fiscaux (LRDAF)142 prévoit que les dispositions de cette loi s’appliquent à partir du 1er avril 2017 sous réserve des dispositions transitoires.

La nouvelle législation régissant l’investissement et les avantages fiscaux, qui souhaite couvrir la majorité des secteurs de l’économie, a été essentiellement motivée par la complexité des lois et des procédures administratives, la multitude des structures intervenant dans l’appui et le soutien aux investisseurs, la multiplicité et la dispersion des lois régissant les avantages fiscaux, ainsi que la faiblesse des infrastructures. Elle se veut ambitieuse en se fixant de nouveaux objectifs orientés vers le développement régional, la création d’emploi, l’augmentation de la valeur ajoutée, de la compétitivité, et du contenu technologique, l’augmentation des exportations et le développement durable.

Cette nouvelle législation a subordonné le bénéfice de la plupart des avantages fiscaux et financiers à la réalisation d’investissement directs. Un investissement direct englobe toute création d’un projet nouveau et autonome en vue de produire des biens ou de fournir des services ou toute opération d’extension ou de renouvellement réalisée par une entreprise existante dans le cadre du même projet permettant d’augmenter sa capacité productive, technologique ou sa compétitivité.

L’opération d’investissement direct doit obligatoirement prendre la forme d’une création d’un projet ou bien d’une opération d’extension ou de renouvellement réalisée par une entreprise existante dans le cadre du même projet. Avec, cette définition, il devient clair que les opérations de réaménagement ou transformation d'activité, auparavant citées par le CII143,

140L’article 36 a abrogé, à compter de la date d’entrée en vigueur de la LDI, toutes les dispositions antérieures contraires à la LDI. 141D’après son article 26, les dispositions de la LDI entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2017. Néanmoins, la loi de finances complémentaire pour 2016 a reporté l’entrée en vigueur de LDI jusqu’au 1er avril 2017. 142 Travaux préparatoires : Discussion et adoption par l’assemblée des représentants du peuple dans sa séance du 1er février 2017. 143Les dispositions du CII s'appliquent, selon son article 5, aux opérations d'investissement relatives à la création, extension, renouvellement, réaménagement ou transformation d'activité. Le CII n’a pas défini des opérations d’investissement. La doctrine administrative, aux travers des dispositions de la note commune n° 26 de l’année 1994, qui a commenté les avantages prévus en faveur des activités concourant au développement agricole, entend par opération d'investissement toute opération de création de projet, d'extension, de renouvellement, de réaménagement ou de transformation effectuée par toute personne physique ou morale, résidente ou non résidente, tunisienne ou étrangère. Création : Toute opération de création d'une unité d'exploitation autonome et destinée à produire un ou plusieurs produits. Extension : Tout investissement promu par la même personne, dans la même exploitation et ce en vue d'augmenter le volume d'investissement déjà existant et d'accroître la production. Renouvellement : Il s'agit d'opérations de renouvellement total ou partiel du matériel, du cheptel et de tout bien mobilier amorti.

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n’ont pas été reprises par la définition de l’investissement direct retenue par la LDI et ne sont plus éligibles à la plupart des avantages fiscaux et financiers. Or, de telles opérations peuvent être nécessaires pour préparer une transmission d’entreprises dans les meilleures conditions. On peut aussi nous interroger si la cession de l’entreprise dans le cadre du règlement judiciaire n’est plus considérée comme une opération d’investissement144 ?

Par ailleurs, la nouvelle loi sur l’investissement a introduit une définition spécifique pour l’opération d’investissement par participation. Il s’agit de la participation en numéraire ou en nature dans le capital de sociétés établies en Tunisie, et ce, lors de leur constitution ou de l’augmentation de leurs capitaux sociaux ou de l’acquisition d’une participation à leurs capitaux. Une telle définition, qui cohabite avec celle de l’investissement direct peut être problématique. Quelle différence en effet entre une opération d’investissement par participation et une opération d’investissement direct ? Sous l’égide du CII, une extension suppose généralement l’augmentation du capital de la société exploitant l’investissement. Avec la LDI, une augmentation du capital relève, selon une lecture ad litteram de l’article 3 de la LDI, d’une opération d’investissement par participation. Or, la distinction entre opérations d’investissement direct et opérations d’investissement par participation peut revêtir une importance capitale, étant donné que la LRDAF réserve la majeure partie des avantages fiscaux (déduction des revenus et bénéfices, exonération des droits de douane, suspension des impôts indirects, etc.) et financiers (octroi des primes, crédits fonciers, etc.) aux seules opérations d’investissement direct. Seuls les dégrèvements financiers peuvent profiter aux opérations d’investissement par participation, par la souscription au capital initial ou à l’augmentation du capital des sociétés opérant dans les secteurs visés par les articles 73 à 75 du CIRPPIS (ajoutés au CIRPPIS par l’article 1er de la LRDAF).

Par ailleurs, apportant sa pierre à l’édifice de l’incertitude, la doctrine administrative, qui, non seulement, n’a pas apporté des réponses à ces interrogations, a fait susciter d’autres nouvelles problématiques145. La doctrine ne considère pas comme « opérations d'extension ou de renouvellement », les opérations qui n'entrainent pas une augmentation de la capacité productive, technologique ou de la compétitivité d'une entreprise. Aussi, la doctrine administrative a estimé qu’une entreprise existante est tenue de réaliser ses investissements d'extension ou de renouvellement dans le

Réaménagement : Toute opération de génie civil, de préparation du sol, d'arrachage et de plantation d'arbres ou de toute autre opération qui touche aux biens immobiliers qui vise l'intensification de la production. Transformation : Toute opération engendrant le changement d'activité au sein des branches couvertes par le CII. 144L’article 465 du code de commerce a repris les dispositions de l'article 52 de la loi n° 95-34 du 17 avril 1995 relative au redressement des entreprises en difficultés économiques considérant que cession de l’entreprise (dans le cadre du règlement judiciaire) est considérée comme une opération de réaménagement au sens de l’article 5 du CII promulgué par la loi n° 93-120 du 27 décembre1993. L’article 36 de la LDI a abrogé l’article 465 du code de commerce. 145Note commune n° 19 de l’année 2017, ayant pour objet le commentaire des dispositions de la loi n° 2017-8 du 14 février 2017 relatives aux avantages fiscaux au titre du développement régional – Note commune n° 24 de l’année 2017 ayant pour objet de clarifier le régime fiscal de l'exportation suite à la promulgation de la LRDAF

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cadre du même projet et par conséquent la création d'une nouvelle entreprise ou d'un nouveau projet pour la production de biens ou la prestation de services nouveaux autres que les biens et services initiaux de l'entreprise n'est pas considérée une opération d'extension ou de renouvellement146.

Toutes ces ambiguïtés sèment le doute sur l’éligibilité de certaines opérations de restructuration et de reprise des entreprises aux avantages fiscaux.

Parfois, le législateur est catégorique sur l’exclusion des transmissions d’entreprises du champ d’application des avantages fiscaux.

Ainsi, en dehors de la transmission des entreprises en difficultés économiques, toute création d’une nouvelle entreprise dans le cadre des opérations de transmission se trouve exclue des avantages relatifs à la défiscalisation des revenus ou bénéfices réalisés dans les zones de développement régional ou dans le secteur de l’agriculture et de la pêche, au régime fiscal de faveur pour les revenus et bénéfices provenant de la lutte contre la pollution et des activités de soutien et au régime fiscal de faveur pour les revenus et bénéfices réalisés par les entreprises nouvellement créées.

Par ailleurs, sous l'empire de l'ancienne législation, à savoir le CII, l'article 53 dudit code a aménagé un terrain favorable à la transmission des entreprises bénéficiaires d'avantages fiscaux et financiers, en permettant au cessionnaire desdites entreprises de se subroger au cédant et de continuer à bénéficier des avantages pour la période restante147. Suite à la promulgation de la loi n°71 du 30 septembre 2016 portant loi de l'investissement, qui a abrogé le CII, y compris son article 53, le législateur n'a pas prévu de dispositions similaires à celles de l'ancien article 53 du CII; si bien que, conformément à cette nouvelle législation, la transmission d'une entreprise bénéficiaire d'avantages fiscaux et

146 Prise de position DGAFF n° 1062 du 26 décembre 2017

شاط لقد بينتم بمقتضى مكتوبيكما المشار إليهما بالمرجع أعاله وضعية مؤسسة يتمثل نشاطها األساسي في صناعة الزيوت والمواد الدسمة ولها ن

ملية لعثانوي يتمثل في صناعة السكر، كما بينتم أن الشركاء يعتزمون إحداث وحدة لصناعة مواد لتعليب الزيوت. وتتساءلون عن كيفية تصنيف هذه ا كتوسعة للنشاط األصلي أو كعملية إحداث وعن اإلمتيازات الجبائية المخولة لها.

، تعتبر توسعة 2016سبتمبر 30المؤرخ في 2016لسنة 71من القانون عدد 3جوابا على ذلك، يشرفني إحاطتكم علما بأنه طبقا ألحكام الفصل ات المشروع من شأنها الرفع من قدرتها اإلنتاجية أو التكنولوجية أو التنافسية.لمشروع، العملية التي تقوم بها مؤسسة قائمة في إطار ذ

وسعة وبناء عليه إحداث وحدة جديدة لصناعة مواد لتعليب الزيوت بالنسبة لمؤسسة يتمثل نشاطها األساسي في صناعة الزيوت يندرج ضمن مفهوم الت 14المؤرخ في 2017لسنة 8بائية المسندة إلستثمارات التوسعة المنصوص عليها بالقانون عدد المبين أعاله وتخول بالتالي اإلنتفاع باإلمتيازات الج

2017لسنة 389لألمر عدد 1وذلك حسب مكان إنتصاب المشروع داخل مناطق التنمية الجهوية التي تم ضبطها بالملحق عدد 2017فيفري ما إذا كان نشاط المؤسسة موجه كليا للتصدير أو للتسوق المحلية وذلك مع ضرورة أو خارج هذه المناطق وكذلك حسب 2017مارس 9المؤرخ في

المذكور أعاله لإلنتفاع باإلميازات المبنية أعاله. 2017لسنة 8اإلستجابة للشروط المستوجبة والمنصوص عليها بالقانون عدد 147 L'article 53 du CII disposait dans ses alinéas 2 et 3 que "... en cas de cession d’une entreprise bénéficiaire d’avantages fiscaux et financiers ou de cession d’une partie d’ une entreprise constituant une unité économique indépendante et autonome, le cessionnaire peut continuer à bénéficier des avantages relatifs à la phase d’exploitation pour la période restante et se subroger au cédant en ce qui concerne les avantages financiers liés à la phase d’investissement, à condition de s’engager à poursuivre l’exploitation pour la période restante de dix ans à compter de la date d’entrée de l’investissement en production effective tant que la législation en vigueur n’a pas prévu une période différente et ce, selon les mêmes conditions d’octroi des avantages au profit de l’entreprise cédée. Une déclaration à cet effet doit être déposée par le cessionnaire auprès des services concernés par le secteur d’activité, accompagnée de l’engagement susvisé. Nonobstant les dispositions de l’article 65 du présent code, ne sont pas retirés les avantages dont a bénéficié l’entreprise ou les participants à son capital en vertu du présent code, en cas de cession de l’entreprise conformément aux dispositions du présent article. Toutefois, en ce qui concerne les primes liées à la qualité du promoteur, les bénéficiaires desdites primes sont tenus de les rembourser conformément aux dispositions du présent code et ce, dans le cas où le cessionnaire ne remplit pas les conditions requises pour bénéficier de ces primes conformément à la législation en vigueur".

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financiers risque, en théorie, de priver le cessionnaire desdites entreprises de se subroger au cédant et de continuer à bénéficier des avantages pour la période restante. Pire encore, la transmission desdites entreprises risque d'être qualifiée comme un cas de déchéance des avantages fiscaux et financiers entrainant le retrait desdits avantages au sens de l'article 21 alinéa 3 de la loi n°71 susvisée148.

LA PENALISATION DES ABUS DE DROIT ET DES TRANSMISSIONS EFFECTUEES DANS LE BUT DE NE PAS

ACQUITTER LES DETTES FISCALES

Certains montages juridiques réalisés dans le cadre des opérations de transmission d’entreprises risquent d’être qualifiés d’abusifs et de tomber sous le coup des sanctions de l’article 101 du CDPF qui pénalise l’abus de droit sous forme de simulation ou de fraude à la loi, ainsi que la transmission de biens à autrui dans le but de ne pas acquitter les dettes fiscales.

En effet et en droit fiscal tunisien, l’abus de droit, sans faire l’objet d’une définition particulière, est pénalisé par l’article 101 du CDPF qui punit d’un emprisonnement de 16 jours à 3 ans et d’une amende de 1.000 DT à 50.000 DT toute personne qui :

- A simulé des situations juridiques, produit des documents, des factures ou des notes d’honoraires falsifiés ou dissimulé la véritable nature juridique d’un acte ou d’une convention dans le but de bénéficier d’avantages fiscaux, de la minoration de l’impôt exigible ou de sa restitution149 ou ;

- A accompli des opérations emportant transmission de biens à autrui dans le but de ne pas acquitter les dettes fiscales.

L’abus de droit sous forme de simulation ou de fraude à la loi

Qualifié de « péché des surdoués de la fiscalité150 », l’abus de droit prend deux formes possibles : soit une simulation (mensonge juridique tendant à tromper le fisc), soit une fraude à la loi (montage juridique artificiel ne pouvant être expliqué que par la volonté de contourner une règle fiscale contraignante).

Selon le professeur COZIAN, « la simulation juridique provient, soit d'actes fictifs, soit de l'interposition de personnes, soit enfin d'actes déguisés ; c'est dans cette dernière forme que le droit des affaires excelle. Les formes prises en pareil cas résultent, d'une part, du rapprochement dans le temps d'actes

148 Selon cet article 21 " Les incitations sont retirées de leurs bénéficiaires dans les cas suivants : - le non respect des dispositions de la présente loi ou de ses textes d’application...". 149 Le fait que ces actes soient constitutifs de l’abus de droit a été, d’ailleurs, confirmé lors les débats parlementaires ayant précédé l’adoption du CDPF. v. JORT, Débats de la Chambre des Députés, Session 1999-2000, n° 39, Page 1986

في مطته األولى على معاقبة المخالفة المتمثلة في افتعال وضعيات قانونية غير حقيقية قصد التنقيص من األداء المستوجب أو 101ينص الفصل عين االنتفاع بامتيازات جبائية. والمقصود ب "وضعيات قانونية" هي الوضعيات التي تستند على استغالل التشريعات القانونية المنظمة لنشاط م

والتشجيعات المتعلقة به أو لشروط منح امتياز جبائي معين قصد التواجد ضمن مجال تطبيقها وهذه الوضعيات هي وضعيات وهمية باعتبار أن دف األساسي من افتعالها هو االنتفاع باالمتيازات التي تنجر عنها.اله

Délit d’abus de droit وتجدر اإلشارة إلى أن هذه المخالفة منصوص عليها بالمجلة الجنائية وبالتشريع المقارن ويعبر عنها بالفرنسية ب150 M. COZIAN, Précis de fiscalité des entreprises, Éditions LITEC, 1995, p. 168

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masquant un acte d'une autre nature, actes fréquents en matière de droits d'enregistrement ou, d'autre part, de rapprochement dans l'espace d'acte masquant un acte d'une autre nature151 ».

En matière de dissimulation de la nature juridique d'un acte ou d'une convention et à titre d’illustration, la note commune n° 38 de l’année 2002 commentant les infractions fiscales pénales objets des articles 89 à 105 du CDPF précise ce qui suit « Les éléments constitutifs de l'infraction consistent en l'insertion de modifications sur une situation précise et sa présentation au sein d'un acte ou d'une convention sous une forme différente de sa réalité pour des buts à caractère fiscal qui consistent à se soustraire totalement ou partiellement au paiement de l'impôt, à bénéficier d'avantages fiscaux ou à la restitution de l'impôt » et cite l’exemple classique du déguisement des donations en vente : « Supposons qu'une personne physique ait conclu un contrat de vente d'un immeuble avec son cousin qui, en réalité, dissimulait un acte de donation afin de réduire les droits d'enregistrement exigibles en payant 5 % du prix de la vente, au lieu de 25 % de la valeur réelle de l'immeuble (acte de donation) ».

La fraude à la loi consiste à mettre en place des montages juridiques qui, quoique exempts de toute fictivité, dissimulation ou trucage, n’ont qu’un seul objectif celui d’éluder la charge fiscale. Il s’agit généralement d’artifices juridiques ou d’actes factices qui n’ont pas de finalité autre que celle de contourner les règles du droit fiscal. Les actes effectivement passés « inter partes » sont différents de ce que laissent transparaître des montages « pro fisco » exhibés aux tiers et en particulier à l’administration fiscale. Lesdits montages consistent en « un ensemble d’actes, dont l’existence de chacun ne peut être contestée et dont le résultat est une situation équivalente, pas forcément strictement identique, à celle qu’on aurait pu obtenir de manière plus naturelle et qui aurait eu des conséquences fiscales plus lourdes152 ». La différence entre la simulation et la fraude à la loi réside dans le fait que, dans la simulation, un acte ne correspond pas à la véritable nature des relations qui gouvernent les parties audit acte, alors que dans la fraude à la loi, l’acte existe, et est exécuté en tant que tel, mais vise l’unique objectif d’éviter le paiement de l’impôt.

Les exemples de montage ne sauraient être recensés et l’imagination des contribuables et de leurs conseillers est souvent bien développée dans ce domaine. A titre d’illustration, une prise de position de la DGELF datée du 29 octobre 2015 assimile à un abus de droit le montage qui consiste pour un salarié à créer une SUARL bénéficiant d’avantages fiscaux en vue de facturer ses salaires à son employeur153. De même, la note commune n° 38 de l’année

151 R. CHOTIN, Le fisc, la petite entreprise et l’expert-comptable : Jeux d’acteurs et stratégies judicieuses, Éditions LGDJ, 1994, p. 110 152 F. PIERRUGUES, La gestion fiscale et l’abus de droit, Revue française de comptabilité, n° 229, décembre 1991, p. 20 153 Prise de position DGELF n° 2631 du 29 octobre 2015

وأن الشريك Mلقد ذكرتم بمكتوبكم المشار إليهما بالمرجع أعاله أن شركة شخص واحد ذات مسؤولية محدودة تحقق رقم معامالتها أساسا مع شركة وقد إستقال منها قبل إحداث شركة الشخص Mكان يعمل كأجير لدى شركة الوحيد في شركة الشخص الواحد المذكورة هو نفسه الوكيل مبينين أنه

على إسداء خدمات المناولة لفائدتها وتوفر له في هذا اإلطار خّط Mالواحد ذات المسؤولية المحدودة حيث تقتصر معامالت هذا األخير مع شركة هاتف ومكتب مستقر لديها كما تتحمل مصاريف تنقله إلى الخارج.

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2002 donne l’exemple suivant de « simulation de situation juridique » : « Soit une société qui a été constituée par une personne et les membres de sa famille pour la réalisation d'un projet dans un secteur bénéficiant des dispositions du CII, les souscripteurs au capital de la société ont bénéficié du dégrèvement au titre des revenus et bénéfices réinvestis de la base soumise à l'impôt exigible sur leur revenu. Cependant, suite à une opération de contrôle fiscal, il s'est avéré que les promoteurs n'ont entamé aucune procédure pour la réalisation du projet, même après l'expiration de la période prévue par le CII, et que les souscripteurs ont retiré les fonds souscrits au capital de la société. A la convocation des intéressés par les services de l'administration fiscale pour connaître la réalité de la situation, aucun motif raisonnable justifiant la non-réalisation du projet n'a été apporté. Dans ce cas, il est possible de constater une infraction fiscale pénale contre les intéressés consistant en la simulation de situation juridique fictive afin de bénéficier des avantages fiscaux et de minorer l'impôt exigible ». Dans le cas d’espèce, la société bénéficiaire semble être régulièrement constituée et les actionnaires ont vraisemblablement respecté les conditions de bénéfice des dégrèvements financiers. Toutefois, l’ensemble du montage juridique est inspiré par un seul motif, à savoir le bénéfice d’avantages fiscaux. Ces éléments qui sont caractéristiques de la fraude à la loi relèvent, selon la doctrine administrative, du délit de l’abus de droit.

La transmission de biens à autrui dans le but de ne pas acquitter les dettes fiscales

L’article 101 du CDPF réprime le contribuable ayant « accompli des opérations emportant transmission de biens à autrui dans le but de ne pas acquitter les dettes fiscales »154.

La note commune n° 38 de l’année 2002 considère que « les éléments constitutifs de l'infraction sont réalisés, lorsque le redevable de dettes fiscales procède sciemment à la transmission de ses biens, leur apport ou leur transfert à autrui suite à un acte de donation ou de cession, d'une façon concomitante avec l'exigibilité de la dette fiscale, afin de détourner ces biens vers une société ou un projet et d'échapper ainsi à tout acte d'exécution en guise de paiement des dettes fiscales155 ». L’exemple donné par cette doctrine administrative obéit à cette logique : « Supposons qu'une personne physique exerçant dans le secteur des travaux publics et contre qui des dettes fiscales ont été constatées

19م على هذا األساس، معرفة هل يمكن للوكيل المذكور إحداث شركة شخص واحد ذات مسؤولية محدودة تنتفع حسب الحالة بأحكام الفصل وطلبت

من مجلة الحقوق 101. أم أن هذه العملية تندرج في إطار الفصل 2013من قانون المالية لسنة 17أو بأحكام الفصل 2011من قانون المالية لسنة اءات الجبائية.واإلجر

من مجلة الحقوق واإلجراءات الجبائية. 101جوابا، يشرفني إعالمكم أن الحالة موضوع مكتوبكم تندرج في إطار الفصل 154 Il y a lieu de remarquer qu’au-delà de la notion de l’abus de droit, certains montages juridiques qui emportent transmission d’entreprises ou de titres sont carrément interdis par la loi. Ainsi, En droit commercial, l’article 409 du CSC, interdit purement et simplement toutes opérations de fusion, de scission, de transformation ou de regroupement lorsqu'elles visent une fraude fiscale. Par ailleurs, l’article 464 du CSC dispose que : « le groupe de sociétés ne peut avoir de finalité contraire à la loi, telle que celle d’éluder l’impôt ». 155 Par dette fiscale, il faut entendre selon la note commune n° 38 de l’année 2002, toute dette constatée à la charge du contribuable dans les comptes du receveur des finances ou toute dette au titre de laquelle le redevable a signé une reconnaissance de dette ou pour laquelle un arrêté de taxation d'office a été émis, même si son exécution a été suspendue, ainsi que toute dette au titre de laquelle une décision de justice a été prononcée.

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au profit du Trésor, ait procédé sciemment au gel de son activité en tant que personne physique et ait constitué une SARL avec ses enfants en sauvegardant la même activité, ce qui a engendré la transmission des éléments d'actifs à la société constituée afin d'échapper au paiement des dettes fiscales constatées à sa charge au profit du Trésor en tant que personne physique, ce qui lui permettra de participer à la réalisation de marchés publics au nom de la société constituée, ce qui a empêché le recouvrement des dettes fiscales à la charge de la personne concernée. Dans ce cas, la cession des éléments d'actifs au profit de la société d'une façon concomitante avec l'existence d'une dette fiscale et sans l'existence d'une raison objective est considérée comme une opération de fraude fiscale ».

Il reste à souligner qu’au-delà du deuxième alinéa de l’article 101 du CDPF, la loi de finances complémentaire pour l’année 2012 a prévu une autre sanction à l’encontre des dirigeants qui veulent se soustraire au paiement de leurs dettes publiques. En cas d’accomplissement d’opérations engendrant le transfert de biens de la personne morale à autrui, l’article 51 de ladite loi a permis aux agents publics de poursuivre le recouvrement de l’impôt auprès des dirigeants.

Ce dispositif concerne les créances revenant à l’Etat, aux collectivités locales et aux établissements publics dont le budget et la gestion financière et comptable sont régis par les dispositions de la loi organique du budget et par celles du CCP et dues par une personne morale. En effet, lorsque le recouvrement des dettes publiques d’une personne morale s'avère impossible par suite de manœuvres accomplies par son ou ses dirigeants dans le but de ne pas acquitter ces dettes, lesdits dirigeants peuvent être rendus solidairement responsables du paiement desdites dettes. Cette solidarité est prononcée en vertu d'un jugement rendu sur la base d'une action en justice assignée par le comptable public en charge du recouvrement auprès du TPI dont le siège se trouve dans sa circonscription, et ce, conformément aux dispositions du CPCC.

L’action en justice est introduite suite au déclenchement de l'opération de contrôle ou de vérification fiscale ou suite au déclenchement des procédures de recouvrement, et lorsqu’il s'il s'avère que le ou les dirigeants ont procédé dans le but d’éluder le paiement des dettes publiques à l'une ou à quelques-unes des opérations suivantes :

- La modification intentionnelle de la raison sociale de la personne morale ou de son siège sans aviser préalablement les services de l’administration fiscale,

- L’accomplissement d’opérations engendrant le transfert de biens de la personne morale à autrui,

- L’accomplissement de situations juridiques non réelles.

Toutefois, le comptable public peut en vue d’assurer le recouvrement des créances susvisées, prendre des mesures conservatoires sur les biens du ou des dirigeants de la personne morale, et ce, sur autorisation du Président du

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tribunal chargé de l’affaire, conformément à l'article 322 du CPCC156. Ces mesures ne perdent leurs effets que si l’action en justice assignée par le comptable public est rejetée en vertu d’un jugement qui passe en la force de la chose jugée, ou en cas de paiement des créances dues par la personne morale.

Les dispositions de la loi n° 2012-1 du 16 mai 2012, portant loi des finances complémentaire pour l’année 2012, ne sont pas applicables au dirigeant ou aux dirigeants tenus, personnellement et de plein droit en application du CSC (ex. associés d’une société en nom collectif…), ou en vertu d'un jugement prononce à leur encontre, du paiement des dettes dues par la personne morale (loi n° 2009-16 du 16 mars 2009)157.

156 Selon l’article 322 du CPCC, sauf dans les cas prévus aux articles 287 et 290, il ne peut être procédé à une saisie conservatoire que sur permission du juge cantonal ou du Président du tribunal de première instance du lieu du domicile du débiteur, chacun dans la limite de sa compétence. La saisie conservatoire peut être autorisée pour sûreté de toute créance paraissant fondée en son principe et dont le recouvrement est en péril, même s'il s'agit d'une créance à terme ou conditionnelle. L'ordonnance autorisant la saisie conservatoire doit énoncer la somme pour laquelle elle est accordée. 157 L’exposé des motifs de la loi des finances complémentaire pour l’année 2012 admet que le droit commun prévoit des mécanismes énonçant la solidarité du dirigeant avec les dettes fiscales de sa société, mais considère que ces mécanismes restent insuffisants. Il cite comme exemples de manœuvres frauduleuses, la cession des biens de la société durant la période de contrôle ou à la suite du déclenchement des opérations de recouvrement, les donations aux parents du dirigeant, la dissolution ou la mise en veilleuse de la société suivies de la création d’une nouvelle société ayant le même objet

ن استقاللية الشركات عن شخصية مسيّريها أو مؤسّسيها و غيرهم من األشخاص الذين ساهموا في إحداثها، غالبا ما تجعل من استخالص الديونإالمستحقة ديون العمومية المتخلّدة بذمتها أمرا صعبا، ألنه إذا ما تبين أن أصولها، أي الجانب االيجابي من ذمتها المالية، غير كافية لتغطية كّل ال

حاسب عليها لفــائدة الدولة أو جماعة محلية أو مؤسسة عمومية خاضعة ألحكام مجلة المحاسبة العمومية فإن استقالليته تحول دون أن يواصل الم العمومي إجراءات استخالص تلك الديون ضدّ مسيّريها أو مؤّسسيها أو الشركاء فيها.

ركات بصفة صورية ليكونوا بمثابة ستار يخفي إّما مؤسسات فردية، يحرص مسيّروها، قبل كل شيء، هذا وتبين أنه يتم في بعض األحيان إحداث شة على وضع مكاسبهم في منأى عن تتبعات دائنيهم، أو أنشطة تديرها شركات أخرى تمثل، بالرغم من الشكل الذي تتخذه، تجزئة للشركات المذكور

ف. في المقام األول وتساهم في إنجاز نفس األهدا هذا باإلضافة إلى األعمال التي يلجأ إليها مسيّرو الشركات لتنظيم إعسارها أو الزيادة فيه، نذكر منها بالخصوص :

وذلك بيع مكاسب الشركات إلى الغير خالل فترة المراجعة الجبائية أو فور انطالق التتبعات األولى الرامية إلى استخالص الدين الموظف عليها - بسرعة؛

مال تسهل عقلته و استبداله بآخر يسهل إخفاؤه؛ بيع - هبة مال إلى أحد أقرباء مسيّر الشركة؛ - ( يليه إحداث شركة أخرى بين نفس الشركاء، أو البعض منهم، لها نفس الموضوع.mise en veilleuseحّل الشركة أو تخفيف نشاطها ) -

هدف التملّص من الوفاء بالتزاماتهم تجاه الهيئات العمومية الخاضعة إلى مجلة المحاسبة وفي مثل هذه الحاالت تصبح الشركة أداة ممتازة للتحيّل ب العمومية.

هذا وبالرغم من أن التشريع الجاري به العمل، و خاصة منه التشريع التجاري، أقر في بعض الوضعيات الخاصة تحميل ديون الشخص المعنوي

القانون، كما هو الشأن بالنسبة للشركاء في شركات المفاوضة والشركاء المقارضين بالعمل في شركات على الشركاء فيه أو مسيّره، وذلك إما بحكمها القضائية المقارضة البسيطة أو في شركات المقارضة باألسهم، أو قضائيا كما هو الحال بالنسبة إلى مسيّري الشركات إذا ما أبرز تفليسها أو تسويت

يل الشركاء أو مسيّري الشركات مثل هذه المسؤولية يبقى منحصرا في صور خاصة، األمر الذي يحول دون أن عجزا في أصولها، إالّ أن تحم تتصدى الخزينة في جميع الحاالت ألعمال التحيّل التي يقدم عليها مسيّرو الشركات تهربّا من الوفاء بالتزاماتها.

زائري والمغـربـي، فإنه يقترح، لمجابهة هذه الظاهرة، تحميل مسيّري الشركات لذلك واستئناسا بالتشريع المقارن وخاصة منه الفرنسي والجتضى حكم المسؤوليةالتضامنية عن تسديد الديـون العمومية المستحقة عليها إذا مـا تعذر استخالصها من مكاسبها من جّراء أعمال تحيّل، و ذلك بمق

قبل المحاسب العمومي المكلف باالستخالص مع إمكانية أخذ تدابير تحفظية على مكاسبهم صادر عن المحكمة اإلبتدائية بناءا على دعوى مرفوعة منفي اتجاه ضمان استخالص الديون وذلك على أساس ترخيص مسبق من رئيس المحكمة اإلبتدائية المختصة. كما يقترح التنصيص على أن هذه

ائي برفض طلب المحاسب باتا أو إذا تم خالص الديون المستحقة على الشخص المعنوي. التدابير التحفظية ال تفقد آثارها إال إذا أصبح القرار القض

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VI. CONCLUSION ET PROPOSITIONS

En conclusion de cette étude, on tentera de proposer quelques pistes de réflexions afin d'améliorer le régime fiscal en vigueur de la transmission des entreprises et ce, aussi bien pour la fiscalité de droit commun que pour la fiscalité dérogatoire.

S'agissant de la fiscalité de droit commun, on proposera les recommandations suivantes :

- Eviter le cumul de la TVA et des droits d'enregistrement lors de la transmission d'entreprises. Il en est ainsi des bâtiments transmis qui sont soumis à la fois aux droits d'enregistrement et à la régularisation de la TVA initialement déduite lors de leur acquisition. Il en va de même pour le matériel relevant du fonds de commerce transmis. Concrètement, la mesure proposée consiste dans la dispense de la régularisation de la TVA avec la condition que le cessionnaire continue l'exploitation de l'entreprise transmise pour une période déterminée.

- Améliorer les conditions de déductions des plus-values à long terme récemment introduit par la loi de finances pour 2019 en élargissant son champ d’application aux immeubles et aux fonds de commerce constituant une unité économique indépendante. Aussi, convient-il d’alléger les conditions de bénéfice de la déduction fiscale et de codifier l’avantage fiscal pour garantir son application au-delà du 31 décembre 2021.

- Harmoniser en matière d'imposition de la plus-value de transmission d'entreprises sociétaires par voie de transmission des droits sociaux (actions et parts sociales), entre le régime fiscal de la plus-value des particuliers, c'est à dire réalisée sur des titres non-inscrits à l'actif d'un bilan qui est imposable selon le taux de 10% uniquement et celui de la plus-value des entreprises, c'est à dire réalisée sur des titres inscrits à l'actif d'un bilan d'une entreprise individuelle, auquel cas elle est soumise à une fiscalité directe pouvant atteindre les 36% ou d'une entreprise sociétaire, auquel cas, elle est soumise au taux de droit commun de l'IS. Cette harmonisation devrait conduire à une imposition modérée pour toute transmission de droits sociaux aboutissant à la transmission de l'entreprise sociétaire.

- Harmoniser le régime fiscal des plus-values de cession des titres non rattachés à un actif professionnel en mettant fin à la distinction entre sociétés de capitaux (10%) et sociétés de personnes (barème).

- Alléger la lourdeur du traitement fiscal des marchands de biens, qui sont certes des spéculateurs de fonds de commerce entre autres, mais qui évitent de déposer leur déclaration d'existence en raison justement de la lourdeur de leur traitement fiscal. La mesure proposée consiste à affranchir les acquisitions de fonds de

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commerce par les marchands de biens des droits d'enregistrement en les regardant comme des entités transparentes à ce stade, tout comme en droit fiscal français.

- Revoir les conditions de mise en œuvre de la théorie de l’abus de droit pour les opérations de transmission des entreprises en instaurant une protection convenable et des garanties sérieuses pour le contribuable de bonne foi. En effet, au-delà d’une pénalisation qui renforce inexorablement la puissance administrative, au-delà du flou qui sépare le comportement frauduleux de la simple optimisation fiscale et au-delà de l’imprécision qui entoure l’étendue de la répression des abus et qui est incontestablement incompatible avec le principe de sécurité juridique, le CDPF ne contient pas de mesures qui entourent le recours par le fisc à la procédure de l’abus de droit. Il n’offre pas de garanties procédurales visant la prévention et l’encadrement des redressements basés sur cette procédure. Lorsque l’administration fiscale invoque le caractère fictif d’un acte ou d’un montage, elle n’est point tenue de respecter une procédure spéciale qui, tout en visant la répréhension des abus de droit, sauvegarderait les droits et garanties du contribuable et éviterait la tentation de l’arbitraire. Pour disqualifier les actes d’un contribuable, la procédure que peut suivre le fisc n’est pas exceptionnelle. Elle n’exige ni son utilisation au niveau hiérarchique élevé, ni son examen au niveau d’une instance spéciale. Pour le vérificateur chargé du contrôle, il suffit de disqualifier les actes et les montages entrepris par le contribuable et d’en tirer ensuite les conséquences au niveau des résultats de la vérification fiscale.

S'agissant de la fiscalité dérogatoire, on proposera les recommandations suivantes :

- Réinstaurer le régime de faveur lié à la transmission des entreprises par suite d'atteinte par l'entrepreneur de l'âge de la retraite du moins ou son incapacité de poursuivre la gestion, en le subordonnant à la condition que l'entreprise transmise opère dans les secteurs productifs. Les explications avancées dans l'exposé des motifs de la suppression de ce régime de faveur, et suivant lesquelles seules les entreprises opérant dans le secteur commercial ont pu bénéficier de ce régime, auraient commandé non pas de supprimer purement et simplement le régime de faveur, mais de rétrécir son champ d'application aux entreprises industrielles par exemple.

- Lever les ambigüités relatives à la définition des opérations d’investissement éligibles aux avantages fiscaux et réinstaurer dans le cadre de la loi de l'investissement une protection similaire à celle de l'ancien article 53 du CII en aménageant un terrain favorable à la transmission des entreprises bénéficiaires d'avantages fiscaux et financiers et en permettant au cessionnaire desdites entreprises de se subroger au cédant et de continuer à bénéficier des avantages pour la période restante.

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- Etendre le régime de faveur de la fusion et de la scission des sociétés aux opérations d'apport partiel d'actif constitutif d'une branche d'activité indépendante.

- Etendre le régime de faveur dédié à l'apport d'entreprise individuelle en société aux entreprises forfaitaires. Cette extension permettra d'encourager d'une autre façon, à part la solution consistant dans la mise en place du régime réel simplifié qui a démontré ses limites, à passer du forfait au réel et de réduire éventuellement l'ampleur du recours au forfait, synonyme de gestion "artisanale" des entreprises.

- Etendre le régime de faveur dédié à la succession des entreprises individuelles soumises au régime réel, à la succession des entreprises forfaitaires, en subordonnant l'exonération des droits de succession à la migration par les héritiers vers le régime réel, soit en restant dans l'indivision, soit en apportant l'entreprise individuelle forfaitaire en société.

- Réinstaurer le dégrèvement pour réinvestissement dans l'acquisition d’actions ou parts qui aboutissent à la détention de 50% au moins du capital dans le cadre d’une transmission d’une entreprise en difficulté, que cette transmission soit opérée dans le cadre d'un plan de cession ou dans le cadre d'un plan de continuation et qui figurait dans l'article 7 du CII abrogé, afin que la fiscalité soit neutre concernant les modes de transmission desdites entreprises décidés par les tribunaux.

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Achevé d’impression en juin 2019 sous les presses de NOVAPRINT

Cette publication constitue un support de formation et n’est pas destinée à la vente.

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