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Page 1: La Colline du 30 novembre 2014

La Colline – 65e législature 1

«C’est dommage, de s’habituer à ça...». Le regard en arrière en quittant l’Hôtel du Parlement, un participant de l’année

dernière jetait les yeux vers les statues et orne-ments, qui s’éloignaient alors que nous mar-chions dans la neige. La beauté et tout son sens disparaissent à force de les voir, m’expli-quait-il, une pointe de regret dans la voix.

Cette remarque n’a rien à voir avec les débats qui vont nous occuper pendant cinq jours. Rien à voir avec les amendements, les procédures, les discours des uns et des autres. La beauté de l’Assemblée nationale, le poids de l’histoire qu’elle soutient, son caractère puissamment symbolique dans la démocratie québécoise doit nous inciter à mieux con-naître ces lieux que nous investissons. Ce n’est pas une visite guidée qui fera l’affaire, ou bien la lecture d’un article sur Wikipédia.

Le Salon Bleu lui-même, notamment, revêt une importance capitale en ce qu’il englobe d’un point de vue artistique toute l’Histoire de la nation québécoise. Pour-quoi? Quand vous y serez, regardez en l’air.

De l’Histoire ancienne à l’Histoire récenteLe plafond de l’Assemblée natio-

nale fut peint par Charles Huot, de 1914 à 1920. Six années de labeur, inspirées par la devise «Je me souviens» pour réaliser cette ode picturale, évocation grandiose de la lutte

pour la vie en cette nouvelle province. Avec justesse, précision, intelligence, Huot a re-transcrit les trois grandes époques de notre histoire nationale.

Au centre trône une femme, fille des dieux, allégorie de la nation. Elle tend aux grands personnages de l’Histoire du Qué-bec une couronne de laurier, contemplant en rêve le firmament d’où s’éveille la première étape de la vie québécoise : les caravelles de Jacques Cartier, le Découvreur, et de Sam-uel de Champlain, fondateur de Québec. Sur son cheval blanc nuage, le bras enlevé dans une harangue, vous verrez le marquis de Montcalm, quelques instants sans doute avant qu’il ne tombe sur les Plaines d’Abra-ham. Il y en aura d’autres encore, et c’est après eux, martyrs et héros, que «notre vieux drapeau, trempé de pleurs amers, ferma son aile blanche et repassa les mers».

Le second chapitre s’ouvre avec le nouveau régime, vous remarquerez à gauche le premier gouverneur militaire, le général Murray, tendant la main sous sa perruque blanche. Il est aux côtés de Mgr Plessis, l’évêque héroïque, autour duquel se rallie une population touchée par la guerre. C’est un peu plus tard, à cette même époque, que commenceront les grandes batailles consti-tutionnelles qui succédèrent aux luttes con-tre l’envahisseur anglais.

Enfin la troisième phase de notre his-toire commence avec la Confédération, en 1867. En prêtant attention, vous verrez que les traits des personnages sont plus fine-ment dessinés, leurs contours plus précis, leurs habits plus modernes. C’est une épo-que plus proche de la nôtre, elle nous parle des écrivains, des militaires, des légistes bâ-tisseurs. Ce sont George-Étienne Cartier, Louis-Joseph Papineau ou encore Octave Crémazie. Ce sont le cardinal Taschereau, Honoré Mercier, Wilfrid Laurier et une cohue de précurseurs.

De l’Histoire récente à «la quatrième phase»

Ce sont 19 personnages identifiés, en tout, régiment de visionnaires, artistes et littérateurs, glorifiés dans ce panthéon pour que personne n’oublie, qu’ils ont fait la nation et que nous sommes là grâce à eux. Certains des noms écrits ici ne vous disent pas grand-chose? Vous avez buté sur d’autres, essayant de vous remémorer quelque cours d’histoire enfoui dans les souvenirs de l’école secon-daire? Voilà pourquoi, aujourd’hui, nous devons lever la tête et regarder le plafond. Pour se souvenir et se tourner vers l’avenir. L’œuvre de Huot était faite pour cela. Car sous les nuages translucides, sous l’horizon diaphane des soldats et défricheurs, il y a

d’autres figures encore, vous regarderez bien. Dans une sorte de préfiguration de l’avenir, tout au bas de la fresque, animant la pénom-bre d’un futur incertain, le peintre a ébauché les silhouettes de ceux qui feront notre épo-que  : nos bâtisseurs et nos pionniers. Ces figures-là sont celles d’une quatrième phase, peut-être, du XXe et du XXIe siècle qu’il n’a pas pu connaître.

Ces figures-là sont celles qui siègent et qui siégeront à l’Assemblée nationale, en regardant dans un moment de lassitude les époques qui ont précédé la leur, comme pour y retrouver de la force et de l’inspira-tion. Ces figures-là peuvent être un ministre ou un voisin de pupitre, un adversaire ou un coéquipier. Ces figures, aussi, pourront être vous. LC

Grimper au plafondRené Le Bertre | Chroniqueur

Pour inaugurer cette deuxième édi-tion de la Colline de la 65e légis-lature du Parlement jeunesse du

Québec, je partagerai un peu d’humour parlementaire. Dans une équipe de journa-listes, il est fort probable de rencontrer des amoureux de la langue française. Comme vous devrez l’utiliser pour construire vos discours pertinents, pourquoi ne pas en faire un sujet d’article? Il est même pos-sible que vous gardiez cet article en tout temps pour éviter la sortie de termes non parlementaires...

Le 23 septembre dernier, Beno-ît Melançon, professeur à l’Université de Montréal, publiait dans Le Devoir un ar-ticle mettant de l’avant plusieurs interdits parlementaires. Je m’en inspire pour vous faire sourire linguistiquement.

Les députés sont soumis à une liste de mots et d’expressions qu’ils ne peu-vent utiliser en Chambre. Arrêtez-vous quelques instants et faites une liste mentale

de mots que vous n’oseriez pas dire dans un discours à l’Assemblée nationale. C’est fait?

Tout d’abord, il faut faire attention à la façon dont on qualifie l’institution dans laquelle nous sommes. Toute référence an-imalière est donc prohibée. La cacopho-nie pouvant découler de débats houleux a amené certains députés à qualifier le Salon bleu de poulailler et de basse-cour. Toute comparaison de ce genre n’est plus accept-able. Si jamais un député tente de contourn-er cette norme en comparant un collègue à un être du règne animal, il devra aussi retirer ses paroles. Les « petits pitous », les « chiens de poche », les « cochons » et les « moutons » ne sont pas les bienvenus. Si jamais l’envie de faire référence au travail de ferme, comme le « pelletage de fumier », vous n’êtes donc pas à la bonne place.

Ensuite, il est évident que les insult-es claires sont inacceptables. Toutefois, la créativité parlementaire étant sans limites, quelques qualifications en apparence banales

se sont retrouvées à l’index. Les « bandits », les « pickpockets », les « sauvages » ou les « justic-iers de bas étage » ne sont pas bienvenus.

Nous arrivons maintenant à ma sec-tion préférée. La grammaire. Deux adjectifs sont particulièrement délicats. « Crasse » et « petit » pourraient vous amener en terrain nébuleux. «  Un petit gouvernement  », «  le parc des petits amis  » ou «  un petit min-istre  » sont des exemples de combinaisons adjectivales dangereuses. Il vaut donc mieux les éviter et les remplacer par d’autres – vive Antidote et ses synonymes! Quant à « crasse », il ne peut qualifier positivement et respectueusement un nom commun.

Continuons avec l’humour lin-guistique pour en arriver à l’utilisation de langues étrangères dans le Salon bleu. La liste d’expressions à l’index est un indicateur de la proéminence de la langue française chez les députés, ce qui est une bonne chose. Comme il est possible de s’exprimer en anglais dans la Chambre, quelques expres-

sions ont toutefois été écartées à travers le temps. « Cheap », «  loser » et « Yes man » en font partie. Un seul mot dans une langue étrangère a été capturé au passage : « omer-ta » en italien qui représente la loi du silence.

Petit aparté concernant la phonétique. L’allitération – suite de sons de consonnes – n’a pas fait bonne figure avec le temps. Les  «  fin finaud  » et les «  fligne-flagne  » ne passent pas. Par contre, ce style lan-gagier peut donner de très beaux résultats. Amusez-vous à jouer avec les sons de cette merveilleuse langue pour composer des dis-cours poétiques.

Chères députées et chers députés, vous avez sûrement compris que la rédac-trice en chef sera prête à attraper toute pir-ouette langagière, que ce soit pour les saluer ou pour les dénoncer avec bonne volonté. Ne contraignez pas vos propos au détriment du contenu de vos discours. L’art oratoire n’est-il pas également l’art d’amuser son au-ditoire avec la beauté du langage? LC

Jouer avec le langageCatherine Drouin | Rédactrice en Chef

La Colline – Équipe éditorialeRédactrice en chef : Catherine Drouin Rédactrice en chef adjointe au coutenu écrit : Coppélia LaRoche-Francoeur Rédactrice en chef adjointe au contenu vidéo : Mathilde Michaud Coordonateur de production : Nicolas Nadeau-Fredette

Éditorialiste : René Le Bertre

Resp. dossier : Maxime Maheu Moisan Photographes :Resp. dossier : Gabrielle Denoncourt Louis-Philippe Cloutier Resp. dossier : Nina Nguyen Laurie CardinalResp. dossier : Chloé Poirier-Richard Journalistes : Journaliste Vidéo : William Gagné Miriam Sbih Sandrine Jouis

CHRONIQUE

ÉDITORIAL

La Colline 30NOVEMBRE

2014

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La Colline – 65e législature2

À notre époque, les enfants sont de plus en plus ciblés au niveau so-cial et légal. Il y a déjà des lois

et organismes qui protègent les enfants des abus physiques et psychologiques. Le système n’étant pas parfait, la min-istre de la Famille, Sarah Ménard April, a développé un projet de loi sur l’intérêt de l’enfant en situation de compromis-sion. Pour comprendre ce projet de loi, on définit une situation de compro-mission lorsqu’un enfant est abandon-né, négligé, maltraité physiquement ou moralement par ses parents ou tuteurs. Pour le moment lorsque le Directeur de la Protection de la Jeunesse retire un en-fant de son milieu familial, les moyens utilisés pour minimiser les traumatismes ne sont pas très efficaces. Certes, comme dit un peu plus haut, l’enfant a un statut de plus en plus défini. Le projet viserait à redéfinir l’intérêt supérieur de l’enfant et à prioriser la sécurité et le dévelop-pement d’un enfant en tenant compte du lien biologique qu’entretient l’enfant avec ses parents d’origines.

La ministre de la Famille mettrait en œuvre un nouvel organisme du nom de Protecteur de l’Intérêt de l’Enfant (PIE) qui aurait pour seul but de cher-cher un nouveau milieu où l’enfant qui a été pris en charge par le Directeur de la Protection de la Jeunesse se sentirait bien et en sécurité. Le PIE se chargerait

des dossiers de ces enfants, de choisir et d’évaluer les familles d’accueil et les familles d’adoption nationale et d’agir comme le tuteur légal jusqu’à la majorité ou l’adoption de l’enfant. Ces mesures seraient exécutées par des travailleurs sociaux qui sont les plus aptes pour ces interventions.

La DPJ aurait encore comme rôle de recevoir les signalements de situa-tion de compromission, d’appliquer les mesures volontaires et les mesures de protection immédiates. Elle aurait pour tâche de décider de retirer un enfant de son milieu d’origine.

Il y aurait aussi création d’un pro-gramme d’adoption qui amenuiserait les traumatismes de l’enfant, car en ce jour, ce sont des familles d’accueil et des cen-tres jeunesse qui recueillent ces enfants. Malheureusement, lorsqu’un enfant est mis dans une famille d’accueil ou un centre, c’est bien souvent temporaire et il se retrouve séparé et transféré d’un en-droit à un autre.

Il y a deux catégories d’adoption; l’adoption précoce qui sont les enfants de 0 à 5 ans et l’adoption mature qui touche les enfants de 6 à 18 ans. Pour l’article du projet de loi sur l’adoption précoce, il permet au PIE, qui a reçu un signale-ment de la DPJ, de placer un enfant en situation de compromission qui n’est pas encore né et viable dans une famille

d’adoption. Lorsqu’une famille d’accueil a la garde d’un enfant de plus de 6 ans et désire adopter, elle devra garder l’enfant durant 2 ans. Par contre, si l’enfant a plus de 14 ans, l’adoption devra se faire avec le consentement de celui-ci. Les familles ne souhaitant pas adopter auraient com-me choix de prendre la garde d’un enfant de plus de 14 ans.

Le projet de loi veut favoriser l’adoption nationale et, pour cela, a mis quelques éléments en places. Une famille qui veut adopter en dehors du Québec devra prouver qu’elle a fait une demande d’adoption d’un enfant québécois qui est en situation de maltraitance pour une période de cinq ans. Cet article du pro-jet concerne aussi les familles qui sou-haitent concevoir un enfant in vitro. Si les familles qui souhaitent adopter ne suivent pas cette loi, ils peuvent recev-

oir une amende déterminée par le revenu familial des individus fautifs. Grâce à cette section du projet de loi, ce ne se-rait plus des organismes ou institutions qui seraient responsables de l’avenir des enfants, mais bien les individus qui for-ment notre société.

Le projet de loi ne se préoccupe pas du facteur biologique ou d’origine pour savoir ce qui est dans l’intérêt de l’enfant. Pour le moment, on peut penser que la DPJ pense avant tout aux parents et non aux enfants qui sont victimes. Par contre, si le Protecteur de l’Intérêt de l’Enfant croit qu’un membre de la famille ayant un lien biologique qui n’a pas de lien avec le signalement peut être meilleur pour l’intérêt de l’enfant, il peut lui confier la garde.

Le projet de loi sur l’intérêt de l’en-fant en situation de compromission est un bon point de départ pour améliorer les tâches du Directeur de la Protection de la Jeunesse. Il est intéressant de voir que la ministre, par ce projet, favorise l’adoption d’enfants qui vivent au Qué-bec. En effet, depuis qu’on a ouvert les frontières pour l’adoption internationale, nous semblons oublier que, dans notre propre province, des enfants ont besoin de protection, d’affection et d’une fa-mille. Par contre, dans notre société, la DPJ a mauvaise réputation. Ce projet pourrait-il redorer son blason ? LC

L’enfant au coeur de notre sociétéGabrielle Denoncourt | Resp. dossier

PROTECTION DE LA JEUNESSE

D’ordinaire un ministère peu en-clin à provoquer d’âpres débats, l’équipe de la ministre Bouch-

er s’apprête aujourd’hui à remettre en question les fondements mêmes de la société québécoise. En effet, tout sem-ble indiquer que le ministère de la Cul-ture prépare un coup d’éclat pour la prochaine session parlementaire, un re-maniement aux hypothèses audacieuses et aux conséquences imprévisibles. Titré provisoirement la loi sur l’accessibilité et la promotion de l’art, le projet s’attaque à plusieurs enjeux culturels, et ce, avec force et confiance.

Selon le document obtenu par La Colline, le projet de loi organise ses provisions autour de deux questions cul-turelles distinctes  : quel apport le gou-vernement du Québec doit-il avoir dans la création de l’art, et quelle place l’art créé localement doit-il avoir dans la sphère publique? Les réponses fournies par la ministre Boucher, si l’on se fie au texte du projet, sont  : «beaucoup» et «beaucoup».

Prenons d’abord l’apport du gou-vernement dans la création de l’art. Comme dans toute question de sub-

vention, il faut initialement se doter de moyens. Il est évident que le ministère de la Culture n’est pas actuellement la plus coûteuse des branches du gouvernement. Les compressions budgétaires y passent sans occasionner de manifestation dans les rues de la capitale.

Ce projet de loi change la donne; c’est le moins qu’on puisse dire.

Afin de financer de nombreus-es nouvelles subventions, la ministre Boucher – avec l’appui de son gouver-nement – lève de nouvelles taxes sur les entreprises québécoises, à raison de 1 % de leurs revenus bruts annuels. Pour ne citer que ce chiffre, l’entreprise SNC-La-valin a déclaré 7,9 milliards de dollars en revenus bruts pendant son exercice de 2013. Si la loi était déjà en vigueur, le Ministère pourrait compter, avec cette seule entreprise, sur une contribution de 79 millions de dollars. À titre indicatif, le budget total du Ministère, pour l’an-née 2013-2014, est de… 635 662,30 $.

Beaucoup de moyens, donc, pour beaucoup de contributions. Pour acheminer tout cet argent vers les ar-tistes, le Ministère compte créer une «  Table régionale de concertation sur l’art » pour chaque région administrative de la province. Chaque table, composée de citoyens, d’artistes et de dirigeants d’entreprise, évaluera les demandes de subventions qu’elles recevront de la part des artistes. Les demandes qui seront jugées intéressantes (selon une liste de

critères mandatés par le gouvernement) seront ensuite présentées à cette Table régionale qui sera responsable d’octroyer des bourses aux artistes recommandés.

Une explosion des moyens qui mènera vraisemblablement à une ex-plosion de créations. Et c’est ici que les provisions de promotion de l’art sont pertinentes. Non seulement le projet de loi envisage-t-il l’établissement de «  journées de la culture » où l’accès aux musées est gratuit, non seulement oblige-t-il les artistes à rendre leurs œuvres di-sponibles pour de vastes segments de la population; il légifère pour contraindre tout consommateur d’art à consommer local. En effet, le projet de loi contient plusieurs articles qui empêchent carré-

ment les Québécois de privilégier l’art créé à l’étranger  : chaque achat d’une œuvre provenant d’ailleurs (un album de musique américaine par exemple) doit être accompagné d’un achat d’une œuvre québécoise de valeur égale, sans excep-tion. L’art étranger coûtera deux fois plus cher.

Il va sans dire que les mesures avancées par la ministre Boucher se-ront controversées et que la députation peut conséquemment s’attendre à un dé-bat explosif en chambre. Nous sommes d’opinion que le projet de loi représente un tour de force et ne devrait pas être évalué strictement selon le mérite de ses articles : après tout, il transformerait l’un des plus chétifs ministères en l’un des plus riches et puissants. Ce n’est pas qu’une question d’argent; un débat de fond s’impose. La vision présentée ici est que la culture et l’art créés au Québec sont d’importance cruciale à la santé du peuple québécois – si cruciale en fait que le gouvernement envisage de profondes réformes pour en assurer la qualité, la variété et la pérennité. Toutefois, nous émettrons de sérieuses réserves à propos du texte que nous avons sous la main  : il est ambitieux, certes, et il nous invite à réfléchir sur l’importance de l’art dans notre société, absolument; mais il dote également l’organe exécutif de pouvoirs titanesques.

Et la concentration des pouvoirs, comme vous pouvez vous en douter, n’enchante que très peu les journaux. LC

L’art pour tous; l’art envers et contre tousAdam Mongrain | Resp. dossier

CULTURE

«La DPJ aurait encore com-me rôle de recevoir les sig-nalements de situation de compromission, d’appliquer les mesures volontaires et les mesures de protection im-médiates.»

«La ministre de la Culture dévoilera bientôt un pro-jet de loi ambitieux, auda-cieux… et litigieux» «Si la loi était déjà en vi-

gueur, le Ministère pour-rait compter, avec cette seule entreprise, sur une contribution de 79 mil-lions de dollars. À titre indicatif, le budget total du Ministère, pour l’an-née  2013-2014, est de… 635 662,30 $.»

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La Colline – 65e législature 3

Pendant que la légalisation du can-nabis continue à faire parler de soi, on ou-blie que certaines drogues avaient soulevé le même tollé dans les siècles précédents. Ainsi, la cigarette et l’alcool, des drogues désormais socialement acceptables, sont régulièrement consommés par le grand public à la lumière du jour. Toutefois, vu les avancées récentes de la science ayant révélé les effets nocifs d’une consommation à long terme pour soi et pour autrui, plusieurs mouvements citoyens ont pris naissance à travers le monde afin d’en réduire l’accès aux populations à risque.

Les méfaits de la consommation d’alcool à court et à long terme, bien que connus par le grand public, continuent à faire des ravages malgré les présentes me-sures visant à en restreindre l’accès, comme l’âge légal de consommation et les points de vente désignés. Le projet de loi sur la santé publique en matière d’alcool, proposé par le ministre de la Santé Alexandre Gauvreau, s’inscrit donc dans cette même démarche de bienfaisance. Ces nouvelles mesures ten-tent donc de pallier les lacunes du système actuel en identifiant de façon précoce les adultes à risque afin de les aider à diminuer — si problématique — leur consommation d’alcool.

L’évaluation de l’indice de risqueDésormais, tout individu de 18 ans et

plus doit se munir, afin de réaliser tout ach-at d’alcool et de produits alcoolisés, d’une

carte à puce liée à son profil individuel de membre (PIM), un dossier électronique sécurisé comprenant plusieurs données sociodémographiques sur l’usager ou l’us-agère, telles que le statut civil, l’emploi, la possession d’un permis d’armes à feu et les antécédents criminels, permettant d’établir un profil juste de risque. Ce sont ces mêmes données, auxquelles on attribuera des val-eurs numériques, qui serviront de base à l’établissement d’un indice de risque, variant de 1 (le plus faible) à 10, propre à chacun-e.

Outre l’indice de risque personnel, d’autres facteurs servent à établir un por-trait exact de la consommation individuelle, le plus important étant le volume d’achat. Toute transaction incluant de l’alcool n’est alors que possible sur présentation et ba-layage électronique d’une carte à puce liée au PIM de l’acheteur ou de l’acheteuse. Si les produits alcoolisés sont achetés pour des tiers, ces derniers sont invités, si présents, à balayer leur propre carte à puce afin de répartir à parts égales le volume d’alcool acheté. Sinon, l’acheteur ou l’acheteuse dis-pose d’un délai de 15 jours suivant l’achat afin de faire une requête auprès d’autres usagers et usagères désirant consommer ces produits pour répartir ledit volume d’alcool.

La limite fixe d’achat de 200  mL d’alcool (100  % alcool/volume) par heure pourrait en dissuader plusieurs d’être trop généreux et d’approvisionner, par exemple, des mineurs. Grâce à l’enregistrement de ces transactions, un rang centile est attribué à

chaque individu afin de situer sa consom-mation trimestrielle d’alcool par rapport à l’ensemble de la population détenant un PIM. C’est ce même rang centile qui, lor-sque multiplié par l’indice de risque dé-terminé au préalable, permet d’obtenir le rang modulé, utilisé par le ministère de la Santé publique afin d’identifier objective-ment la population à risque. Ainsi, tous les adhérent-es constituant le 0,25 % supérieur de la totalité des rangs modulés de la prov-ince se voient attribuer une mention « ris-que critique  » à leur PIM, les identifiant alors pour des interventions préventives subséquentes.

Des mesures restrictives pour le bien col-lectif

L’attribution d’une mention « risque critique » à un PIM est également accom-pagnée de la prise de contact par un ou une agent-e de la santé publique, qui convie alors l’individu à une rencontre obligatoire dans un CLSC de son secteur. Cette ren-contre, menée par un ou une intervenant-e de la santé, sert d’entrevue motivationnelle afin de fixer des objectifs de réduction de consommation qui se doivent d’être at-teints après un trimestre. Sinon, le nom de l’individu à risque est inscrit au Registre des individus en situation de dépendance (RISD) du ministère de la Santé et des services sociaux (MSSS) pour une durée de six mois, ce qui implique la perte tem-poraire de plusieurs privilèges. Le droit

d’achat d’alcool est désormais limité à cinq consommations hebdomadaires, en plus de restrictions particulières s’appliquant à la conduite automobile et des inspections à domicile par les travailleurs sociaux de la santé publique.

Se soustraire aux mesures restrictives entraînées par l’obtention d’un rang mod-ulé inquiétant est passible d’une désactiva-tion la carte à puce du PIM, freinant ainsi tout achat d’alcool. Cependant, avec les présentes mesures proposées par le projet de loi, il ne serait pas compliqué, pour les contrevenants et les contrevenantes, d’obte-nir des produits alcoolisés via d’autres indi-vidus en possession d’un PIM mais n’ayant pas une consommation aussi élevée.

Plusieurs mesures concernant la taxation supplémentaire de publicités de produits alcoolisés, ainsi que des investisse-ments dans des services complémentaires d’aide et de référence pour les individus désireux d’adresser leurs habitudes prob-lématiques de consommation, complètent également ce projet de loi qui réussit à in-clure des interventions autant sur les plans autant individuel que sociétal, tous deux possiblement ravagés par les conséquences de l’alcool. Malgré tout, plusieurs doutes subsistent quant à la faisabilité des mesures proposées, étant donné que ce projet est en grande majorité basé sur la bonne volonté des individus à enregistrer docilement leurs achats d’alcool. Le feront-ils? On peut en douter. LC

Combattre l’ivresse par l’honnêtetéNina Nguyen | Resp. Dossier

L’équipe de La Colline a reçu en exclusivité un aperçu du projet de loi que le ministre des Commu-

nications, M. Xavier Phaneuf-Jolicoeur, prévoit présenter à l’Assemblée natio-nale lors de la 65e législature du Parlem-ent Jeunesse du Québec. Dans l’optique d’outiller les député-e-s en prévision des débats et travaux à venir, voici une brève présentation du projet de loi intitulé «Loi sur le droit collectif à l’information».

Un projet pour établir le droit à l’infor-mation

L’objectif de ce projet de loi est présenté ainsi: « restaurer et assurer la portée collective du droit à l ’informa-tion qui appartient aux citoyens d’une société libre et démocratique ». Dans le contexte actuel, ce droit se traduit plutôt par la nécessité d’avoir accès à de l ’information de qualité. La question de l ’accès n’étant pas problématique dans l ’ère numérique, le projet de loi cherche plutôt à établir des standards à la pro-duction et au contenu de l ’information. Afin d’obtenir ces standards, le projet de loi vise la création de l ’Ordre des journalistes, d’un Conseil de l ’informa-tion et d’un Fonds de l ’information.

Tout d’abord, le projet de loi en-cadre l ’accès à la profession de journal-iste et l ’exercice du métier en établissant

un ordre professionnel, l ’Ordre des jour-nalistes, et en adoptant un Code de dé-ontologie des journalistes. Pour adhérer à la profession, il sera nécessaire de pos-séder l ’équivalent d’un baccalauréat et de suivre un programme de formation suivi d’un stage auprès d’un journal-iste. Le journaliste sera aussi tenu de respecter des principes tels que d’agir dans l ’intérêt des citoyens, d’adopter une démarche journalistique rigoureuse et de demeurer indépendant. En con-trepartie, l ’Ordre assurera aux journal-istes l ’exclusivité sur leur titre ainsi que certains privilèges dont un accès facilité aux tribunes de presse, aux plumitifs ju-diciaires et aux données des ministères et organismes gouvernementaux.

Le rôle du Conseil de l ’informa-tion, quant à lui, est de permettre la distinction des médias respectant ses standards, d’instaurer des mesures qui assureront leur pérennité et de faciliter l ’accès des citoyens à l ’information dif-fusée par ceux-ci. Il remplit ces mandats par l ’accréditation des « médias agréés », l ’imposition d’une taxe aux autres entre-prises médiatiques et en assurant la ges-tion du placement des publicités dans les médias agréés. De plus, afin de s’assurer que les médias accrédités respectent les conditions de leur statut et de leur f i-nancement, le Conseil forme un comité

de vérif ication.Finalement, le projet de loi vise la

mise en place du Fonds de l ’informa-tion. Ce dernier est géré par le Conseil de l ’information et provient d’une par-tie des revenus des médias agréés, de la vente d’espaces publicitaires, des re-cettes de la taxe imposée aux entrepris-es médiatiques non-agréées, d’amendes et des subventions gouvernementales. Par celui-ci, les médias agréés reçoivent un financement proportionnel au pourcentage de contenu journalistique qu’ils diffusent. Il est à noter qu’un média agréé qui présente 90% de con-tenu journalistique (par opposition au contenu de divertissement et aux es-paces publicitaires) est complètement f inancé par le Fonds. Certaines mesures sont aussi mises en place afin d’assurer l ’impartialité du Conseil de l ’informa-tion dans l ’attribution du financement, de protéger l ’intérêt des citoyens et de rendre ardue la rétraction ou la diminu-tion de la contribution du gouvernement au Fonds de l ’information.

Un projet ambitieuxLe projet de loi du ministre

Phaneuf-Jolicoeur s’adresse au prob-lème structurel que subissent présente-ment les entreprises de presse (pour plus d’information, voir l’article concernant

la crise de l’information dans l’édition précédente de La Colline). Mais le fait-il réellement? Le ministre a choisi de palier les conséquences de la crise plutôt que d’intervenir sur ses fondements, sur les éléments la causant. Le projet de loi proposé ne semble pas considérer le désintéressement du marché publicitaire envers l’information d’intérêt général ni la désuétude du modèle journalistique à l’ère numérique. Le type d’intervention prôné par le ministre des Communica-tions a toutefois l’avantage d’être direct et plus concret que l’adoption de mesures générales cherchant à effacer la crise même. Cela est d’autant plus vrai qu’une alternative au présent modèle journalis-tique demeure encore à être développée.

La question qui risque d’être om-niprésente lors des débats de l ’Assem-blée et lors des travaux en commission est donc la suivante: est-ce que cette approche est suffisante pour garantir au citoyen un accès à une information de qualité? Loin d’être simple, cette ques-tion nécessitera que les député-e-s se positionnent sur de nombreux thèmes. Ils devront notamment débattre sur la nature de la qualité de l ’information dans une société démocratique, sur ce qui caractérise l ’indépendance et la lib-erté journalistique ainsi que sur l ’avenir de l ’industrie médiatique. LC

Le ministre Phaneuf-Jolicoeur dé-posera un projet sur l’information

RÉGLEMENTATION DE LA CONSOMMATION

ENCADREMENT DE L’INFORMATION

Maxime Maheu-Moisan | Resp. Dossier

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Siéger à l’Assemblée Nationale sera, pour plusieurs d’entre vous, une première  : comme toute institution

respectable, un minimum de décorum est nécessaire. Outre une conduite irréproch-able dans l’enceinte de la plus haute in-stance gouvernementale de la province, un accoutrement vestimentaire approprié doit également être de mise.

Ainsi, comment s’habille-t-on pour se présenter dans la Salon bleu le 26 décembre prochain ?

Femmes :Si les traditionnelles valeurs sûres

tailleur-jupe ou tailleur-pantalon ne vous semblent pas attirantes, malgré les « pow-er suits » portés dernièrement par votre célébrité chouchou, il est toujours possi-ble de s’habiller de façon professionnelle si les classiques ne vous conviennent pas. Ainsi, de multiples combinaisons possi-bles s’offrent à vous, que vous optiez pour un veston ou un cardigan, un chemisier ou une blouse et une jupe ou un pantalon. Vous décidez d’opter pour une combinai-son haut-bas, assurez-vous que ce soit un chemisier et non une chemise, sexisme institutionnalisé oblige. La différence en-tre un chemisier et une chemise  ? Outre le prix, le boutonnage est également dif-férent  : les boutons d’un chemisier sont situés sur la côté gauche de la boutonnière, de sorte que le tissu du côté droit passe par-dessus le côté gauche une fois bou-tonné. Aussi, les manches ont également un poignet double, mais entre vous et moi, si vous décidez de porter une chemise, on n’y verra que du feu, tant que vous affichez le col à l’extérieur de votre veston ou de votre cardigan.

Si vous portez une jupe ou une robe, des précautions supplémentaires s’imposent. La longueur de votre vêtement se doit d’être appropriée selon les conventions sociales toujours aussi sexistes. Le point de repère qu’on donne habituellement est « une main au-dessus du genou  », mais chaque per-sonne ayant des proportions corporelles dif-férentes, faites confiance à votre jugement. Également, vous vous devez de porter des collants, peu importe le type (bas collants, bas de nylon, collants), mais l’important est de s’assurer qu’ils ne soient pas troués. Petit conseil  : amenez-vous plus de paires qu’il n’en faut, et du vernis à ongles transparent pour réparer les petits accrochages.

L’éternelle question des souliers : tal-ons hauts ou pas  ? Le choix vous revient, tant que vous serez confortables  ! Aussi, vous aurez de la place pour changer vos souliers d’hiver à l’Assemblée nationale  : amenez un petit sac pour transporter vos souliers « propres ».

Maquillage ou pas ? À votre conve-nance, tant que vous apparaissez présent-ables. Le Parlement jeunesse du Québec vous veut pour vos idées, non pour vos beaux airs.

Hommes :Peu d’options s’offrent à vous: soit

vous portez un complet, soit vous por-tez un veston avec un pantalon de ville. Cependant, vous pouvez vous permettre d’être plus créatifs avec vos chemises et vos cravates ou nœuds papillons, si désiré.

Il n’y pas de restrictions par rapport aux couleurs et aux motifs de la chemise, à condition que le tout reste dans le domaine du décent. N’oubliez pas de boutonner vos collets et de les faire sortir de vos vestons.

Si vous décidez de complémenter votre attirail avec une cravate, les mêmes règles s’imposent que pour la chemise quant à son apparence. Si vous usez d’une « clip » de cravate pour la tenir à l’intérieur de votre veston, faites en sorte qu’elle ne soit pas visible : ne la positionnez donc pas trop haut, mais ni trop bas. Ajustez égale-ment le nœud de façon à ce qu’on ne voit pas le haut de votre chemise.

Si vous complémentez avec une montre et une ceinture, gardez-le tout dis-cret  : les classiques sont les plus adéquats pour un endroit aussi solennel que l’As-semblée nationale.

Souliers de ville obligatoires  : quel que soit le modèle, tant que ce ne sont pas des souliers de course ou des souliers de détente, c’est adéquat. Vous aurez de la place pour changer vos souliers d’hiver: amenez un petit sac pour transporter vos souliers « propres ».

C’est beau, toutes ces recommanda-tions, mais est-ce que ça coûte cher, s’ha-biller pour l’Assemblée nationale  ? Oui, du moins pour un budget étudiant. Outre les magasins habituellement recommandés pour s’habiller de façon professionnelle, voici quelques endroits où vous pourrez vous permettre d’avoir l’air présentable à petit prix.

Magasins à grande surfaceOn le reconnaît, s’habiller chez Sears,

Wal-Mart, La Baie ou Target n’a rien de très glamour, mais votre budget étudi-ant vous en sera très reconnaissant. Bien que certains de ces magasins vendent des marques plus dispendieuses, ils offrent toujours leurs produits maison, beaucoup moins dispendieux.

Boutiques de mode rapideLes boutiques de fast fashion com-

me Zara, H&M, Forever21 et Simons ne sont pas nécessairement les premiers en-droits auxquels on pense lorsqu’on veut paraître professionnel, mais ces compag-nies offrent de plus en plus de pièces de vêtements professionnels destinés à leur clientèle composée d’adultes dans la ving-taine et la trentaine. Les prix sont récon-fortants, mais la qualité laisse très souvent à désirer. Comment contourner l’usure prématurée  ? Avoir recours au nettoyage à sec ou sécher sur le rack à linge, le but ultime étant d’éviter la chaleur dommage-able de la sécheuse.

Friperies Le classique, évidemment ! Entre les

nombreuses succursales de Renaissance de l’Armée du Salut et du Village des valeurs, vous aurez l’embarras du choix. Puisqu’il est le siège social de la chaîne et qu’il reçoit des surplus directement des manufacturiers, Le Renaissance St-Laurent (7250, boul. St-Laurent) est particulièrement intéres-sant. Des friperies dites « haut de gamme », un peu plus chères, comme La Gaillarde, Citizen Vintage, Eva B et Annex Vintage, constituent aussi des options intéressantes, surtout pour la mode féminine. Si vous avez envie de faire une bonne action tout en magasinant, vous pouvez également vous rendre dans des friperies appartenant à des organismes à but non lucratif, com-me les Petits Frères des Pauvres (1380, rue Gilford à Montréal, mais présents ailleurs au Québec).

Bon magasinage  ! Surtout, n’oubliez pas de profiter de vos rabais étudiants en tout temps et de surveiller les soldes. LC

Les habits de l’empereur?MODE

Nina Nguyen | Resp. Dossier

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Francois-Philippe Cham-pagne a 44 ans, baignant dans une vie professionnelle

bien remplie, il est aujourd’hui candidat du Parti libéral du Cana-da en vue des prochaines élections fédérales. Vingt-cinq ans plus tôt, il se rendait à Québec tous les hiv-ers, l’espace de cinq jours passés à débattre avec ses collègues du PJQ.

Tour à tour député, minis-tre, leader, chef de l’opposition, il devient en 1993 président du Par-lement jeunesse, à l’occasion de la 44ème législature de la simulation. La nostalgie en bandoulière, tan-dis qu’il pioche dans ses souvenirs, il parle de l’expérience avec une touche de poésie, débordant en-core de passion.

Au tournant de la décennie 90, il n’y avait pas encore les ren-dez-vous estivaux dans les chalets aux bords des lacs, pas encore des pluies de photos après chaque législature, où chacun pouvait se retrouver bras en l’air, au milieu d’un discours enflammé. Mais déjà, le PJQ était une belle école

de vie, l’on apprenait les principes démocratiques, les facettes mul-tiples du débat d’idées et la pas-sion de l’engagement qui naissait de ces échanges, depuis toujours non-partisans.

La non-partisanerie, just-ement. Pour Francois-Philippe, homme engagé en politique et donc nécessairement partisan, la neutralité politique du PJQ est justement sa force. C’est elle qui permet de nouer des liens entre les participants quelle que soit l’opin-ion qu’ils expriment, et surtout de grandir ses propres réflexions, pour se guider ensuite dans une vie politique où le parti pris est de mise. C’est ainsi que l’on s’élève, explique-t-il  : en débattant libre-ment.

Les liens d’amitié ainsi créés ont incité Francois-Philippe à s’impliquer dans sa région, la Mauricie, où il a créé un parle-ment jeunesse régional. Encore aujourd’hui, il revoit des amis ren-contrés au PJQ, tels que l’historien Éric Bédard, Premier ministre de la 41ème législature. À l’époque,

ils avaient même été reçus par le Premier ministre Robert Bouras-sa, tandis que les médias relayaient les débats innovants portés par la simulation. Les années 1990 étaient celles des débats à saveur éthique, précurseurs : on évoquait, par exemple, la décriminalisation de l’euthanasie (1992) et les ma-nipulations génétiques (1996).

J’ai bien de la peine au cours de notre entretien à arracher à no-tre illustre ancien une critique du Parlement jeunesse, tant il semble en garder des souvenirs oniriques. J’ai beau me faire l’avocat du dia-ble, évoquant le manque de mix-ité sociale ou géographique parmi les participants (la plupart étant des étudiants, juristes, venus de Québec ou de Montréal), il bat en brèche cette analyse. Les années 90, dit-il, étaient riches d’une vo-lonté de régionalisation du PJQ. Il y avait chez les participants cette prise de conscience de l’évolution de la société. L’idée de l’expansion régionale était dans les têtes, l’on se faisait un devoir de faire parler de la simulation partout au Québec et

dans toutes les sphères d’études ou de professions. J’embraye alors sur la coupure parfois constatée entre les participants les plus anciens, et les nouveaux, qui ont tendance à rester à l’écart. Il répond que cette problématique était déjà centrale à la fin des années 80. Ainsi, en plus des traditionnelles réunions entre nouveaux participants, il ex-istait des badges de couleur qu’on leur octroyait pour mieux les dis-tinguer! De la même manière, les anciens étaient exhortés pendant la simulation à briser les barrières avec les nouveaux députés.

Sur son site internet de can-didat PLC pour Saint-Maurice Champlain, Francois-Philippe fait dûment mention de son ex-périence pjquiste. Il a à cœur de faire savoir ce qu’il y a gagné. «Il faut continuer à innover. Garder les bases et essayer d’en constru-ire de nouvelles. Être à l’affût des grandes questions, ne jamais cesser de rechercher le meilleur.» C’est ça, pour lui, l’autre force du PJQ, le refus de la stagnation, la quête de l’excellence. LC

Le PJQ dans les yeux d’un ancienRené Le Bertre | Archiviste

Une délégation du Par-lement Jeunesse du Québec rencontrant le Premier minis-tre Robert Bourassa, en 1991

De gauche à droite  : Éric Whildaber, Éric Bédard, Robert Bourassa, Jean-Pierre Couture, François-Philippe Champagne

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