INTRODUCTION A LA PHYLOGEOGRAPHIE
Présentation, Objectifs et Principes
Atelier Phylogéographie comparée, Banyuls 19-21 juin 2006
Phylogéographie: définitions, objectifs
- Terme créé en 1987 par Avise et coll. (Ann. Rev. Ecol. Syst.)
- Objectifs premiers: étudier les relations généalogie des pops d’une espèce et distribution géographique;
déduire les processus historiques ayant mené aux structurations génétiques et géographiques actuelles
- Racines de la discipline: Biogéographie historique, Vicariance, Paléogéographie, Paléo-écologie
Atelier Phylogéographie comparée, Banyuls 19-21 juin 2006
Phylogéographie: discipline en expansion
Interrogation Web of Science par année, mot clé ‘phylogeography’
Progrès récents de la biologie moléculaire (obtention + facile, + rapide, et – coûteuse de séquences; développement de nouveaux marqueurs)
Intérêt de la communauté scientifique
Atelier Phylogéographie comparée, Banyuls 19-21 juin 2006
Phylogéographie: objectifs et méthodes
- But premier: décrire un scénario historique pour une espèce dans un espace géographique (idéalement: son aire de distrib.)
- Echelle de temps: Quelques centaines de milliers à quelques millions d’années (fin Tertiaire – Quaternaire)
- Méthodes: Typage moléculaire (séquences, microsats, AFLP) d’individus récoltés sur l’aire considérée et reconstruction de leurs liens évolutifs
Atelier Phylogéographie comparée, Banyuls 19-21 juin 2006
Phylogéographie: objectifs et méthodes
D’après Avise 1996
Atelier Phylogéographie comparée, Banyuls 19-21 juin 2006
Phylogéographie: élargissement du cadre
- Différentiation des pops et spéciation: souvent à la limite entre structure des pops, différentiation de clades, étude de complexes d’espèces
- Fournit aussi un cadre historique précieux pour études plurispécifiques: évolution de la compétition, relations hôte-parasites ou mutualistes, histoire des communautés
Intérêt croissant pour les analyses comparatives
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Evolution ‘classique’ des espèces en milieu tempéré: paléoclimat et modes d’expansion
Atelier Phylogéographie comparée, Banyuls 19-21 juin 2006
Paléoclimat récent et conditions de vie
Les oscillations climatiques du Quaternaire (depuis 2,5 MA)Cycles de glaciations / interglaciaires (tous les 100 000 ans)
Paléoclimat récent et conditions de vie
Maximum glaciaire
Période actuelle
Paléoclimat récent et conditions de vie
Fluctuations de climat extrêmement rapides (15°C en qq décennies)
Conséquences sur la distribution des espèces et sur la diversitégénétique:
Contractions pendant les glaciations (dans zones favorables)Expansions rapides pendant les interglaciaires (recolonisation
des habitats redevenus favorables)
Paléoclimat récent et conditions de vie
Zones tempérées et espèces tempérées: patrons classiques pendant les oscillations quaternaires
Zones refuges : Péninsule Ibérique, Italie, Balkans;
Maintien de la diversitéancestrale
Recolonisation vers le Nord : RapideImpact des barrières géographiquesImpact des pops issues d’autres refuges
Patrons phylogéographiques en Europe
Espèces tempérées en Europe: de loin les cas les mieux documentés.Synthèses: mise en évidence de patrons classiques de recolonisation
Différentes zones refuges
Existence d’autres zones refuges pour des espèces plus tolérantes au froid:
- Hypothèse Scandinave (Lemmings)
- Hypothèse Europe de l’Est (campagnols, insectes scolytes, limace…)
- Cas particulier des espèces alpines ou péri-arctiques (contractions pendant les interglaciaires, refuges dans les montagnes)
Zones refuges, zones relictes
Deux types de refuges:
- Refuges actifs (souvent proche de la limite Nord de contraction): ont participé à la recolonisation vers le Nord Haplotypes retrouvés dans la zone refuge et dans les zones d’expansion post-glaciaire
- Zones relictes : Maintien d’haplotypes ancestraux mais aucune participation à la recolonisation haplotypes endémiques
Zones refuges, zones relictes
Un exemple: le scolyte Tomicus destruens
- Haplotypes endémiques Est Méditerranéens- Refuges actifs Afrique du Nord, Sud Espagne, Sud Italie
- Haplotypes endémiques sud Italie, sud Potugal-Espagne
Zones de suture (‘hybrides’)
Zones de suture : contact entre lignées issues de zone refuges différentes
Localisation : Autour de barrières naturellesAu point de contact entre routes de colonisation
Taberlet et al. 1998Hewitt 2000
Zones de suture (‘hybrides’)
Zones de suture : souvent des zones de diversité génétique maximale (individus issus de lignées différentes trouvés dans les mêmes pops.), en nb d’haplotypes et en nb de différences entre haplotypes
Scolyte Tomicus piniperda
Diversité maximale ne signifie donc pas zone refuge!!
Modes de recolonisation
Les expansions post-glaciaires ont souvent été rapides (colonisation d’habitats vierges)
Deux modes de recolonisation ‘extrêmes’:1- Par saut de puce (mode pionnier): événements de
colonisation longue distance par un petit nombre d’individus; souventassocié à une perte de diversité génétique dans les zones d’expansion.
Hypothèse pouvant expliquer les patterns de ‘Southern richnessand Northern purity’ observés en Europe
Mais: bon maintien de la diversité possible sous certaines conditions
Exemple de diminution de la diversité génétique vers le Nord (Scolyte Tomicus piniperda)
Modes de recolonisation
Deux modes de recolonisation ‘extrêmes’:2- Par diffusion: expansion progressive des populations. Bonne
conservation de la diversité génétique (contact avec pops d’origine)
Moins classique. Hypothèses évoquées pour les pops des régions sud, ayant pu survivre aux oscillations glaciaires par des mouvements de faible amplitude
Modes de recolonisation
L’histoire des espèces, zones refuges, voies et modes de colonisation dépendent de nombreux facteurs:
- Contraintes écologiques: tolérance au froid, habitat très spécialisé ou non, capacité à se maintenir en petits effectifs…
- Relations interspécifiques: colonisation potentielle d’une aire géographique dépendant de la présence de l’hôte (parasites, insectes phytophages, mutualistes…) facteurs limitants
- Capacités de dispersion: dispersion active/passive, sensibilités différentes aux barrières, couloirs de dispersion obligatoire (rivières)
Quid des autres espèces, biotopes, régions??
Relativement peu de cas documentés en dehors de l’Europe et de l’Amérique du Nord
- Quelques études en zone méditerranéenne
- Espèces des régions froides: réponse originale aux oscillations Quaternaires (colonisation de chaines de montagnes pendant glaciation, zones refuges pendant inter-glaciaires)
- Données paléoclimatiques mal connues dans nombreuses régions
- Zones tropicales: impact en Afrique des barrières géographiques (Rift) et oscillations entre périodes arides et périodes humides (recolonisation des forêts)
Quid des autres espèces, biotopes, régions??
Mise en évidence de 3 clades différentiésImpact du climat et des barrières géographiques
Busseola fusca, Lépidoptère foreur du maïs en Afrique
Intérêt des approches comparatives
- Chercher des patrons communs à des espèces vivant dans une zone géographique donnée (barrières significatives, corridors de dispersion, zones refuges ‘fréquentes’ etc…)
- Comprendre l’histoire de relations hôtes-parasites, ou mutualistes: comparer l’histoire récente des deux espèces, similitudes des zones de diversité maximale, des patrons de différentiation génétique
- Reconstruire l’histoire récente des assemblages de communautés (échelle de temps différente des approches phylogénétiques)
Exemple: comparaison de l’histoire d’un insecte galligène sur chêne et d’un parasitoïde associé
Andricus kollari Megastigmus stigmatizans
Megastigmus stigmatizans
85 000 ans
245 000 ans
Andricus kollari
380 000 ans
1 millionannées
La Phylogéographie: Questions pratiques
Première étape: échantillonnage
- Sur quelle aire géographique?Idéalement sur toute l’aire de distribution (risque de biais d’interprétation)Eventuellement sur un sous-ensemble cohérent (sous-espèce, cladidentifié par ailleurs…
- Combien de populations? Mieux vaut maximiser le nombre de populations, d’habitats (hôtes)… Réfléchir aux paramètres importants pour plan d’échantillonnage
- Combien d’individus? Dépend du marqueur génétique et de son polymorphisme (séquences vs. microsatellites), mais aussi des traits de vie de l’espèce (pop ‘clonale’ vs très variables)
Deuxième étape: Choix du marqueur
- Majorité des études sur données de séquences (ou SSCP, RFLP)
Séquences de gènes mitochondriaux chez les animauxSéquences de gènes chloroplastiques chez les plantes
Intérêts: gènes à taux d’évolution ‘adapté’ aux besoins, méthodes d’analyses nombreuses, comparaisons parfois possibles avec autres études…
Information pertinente à différentes échelles de temps (phylogénie ‘récente’ / phylogéographie)
Limites: Héritabilité monoparentale (histoire d’un seul sexe), polymorphisme parfois limité, risques d’introgression…
Exemple de la Processionnaire du Pin(complexe Thaumetopoea pityocampa / wilkinsoni)
Phylogénie du complexe Répartition des clades
Exemple de la Processionnaire du Pin(complexe Thaumetopoea pityocampa / wilkinsoni)
Phylogéographie intra-clades
Deuxième étape: Choix du marqueur (2)
- Intérêt de trouver des marqueurs nucléaires adaptés
Reconstruction d’une histoire différenteLimite les biais liés au marqueur (si hybridation passée)
- Alternatives possiblesGène nucléaire: pas toujours disponibles, individus hétérozygotes (clonage long et coûteux), risque de sélection (intéressant aussi!)
Microsatellites: pas toujours disponibles, risques d’homoplasie oud’allèles nuls quand appliqués à grande échelle, méthodes d’analyse surtout développés en génétique des pops
AFLP: marqueurs co-dominants, technique a priori adaptable sur divers organismes… Méthodes d’analyse??
Exemple de la processionnaire du pin au Proche-Orient:Histoire contrastée des marqueurs nucléaires et mito
Résultats: marqueurs mitochondriaux
Eastern Turkey
West + North TurkeyCyprus
Israel + Eastern Turkey
Isolement des populations de ChypreForte structuration géographique
Résultats: marqueurs nucléaires
Microsatellites AFLP
CHYPRE
ISRAEL LIBAN
TURQUIE (N&W)
TURQUIE (E)
Indiv. de Chypre proches des pops continentales prochesFlux de gènes mâles et femelles différents
Troisième étape: Typage des individus
Retrousser ses manches ou trouver des esclaves!!
Adapter éventuellement l’échantillonnage ou changer de marqueur en fonction des résultats préliminaires…
Quatrième étape: Analyse et interprétation
Programme des deux prochaines journées:
Comparer les paramètres populationnels: diversité, richesse allélique, distances entre populations
Mesurer les indices de structuration génétique, tester l’existence d’un signal phylogéographique, prendre en compte explicitement la géographie
Reconstruire les liens entre haplotypes, allèles, individus: reconstruction phylogénétique, réseaux d’haplotypes (dépend des divergences observées)
Arbre phylogénétique 3 réseaux correspondantsBusseola fusca en Afrique
Quatrième étape: Analyse et interprétation
Programme des deux prochaines journées:
Comparer les résultats obtenus chez différentes espèces: cophylogénies, méta-analyses
Eviter les biais d’interprétation…
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