ARTS , RUPTURES ET CONTINUITE
Comment les arts peuvent-ils se mêler dans une même création artistique?
THE BIRDS (1963) << Les spectateurs qui considèrent The Birds ( Les Oiseaux ) comme un récit
traditionnel , avec un début , un milieu , et une conclusion nette , sont déçus par la fin du film , que Hunter avait à l'origine , développée davantage , mais que Hitchcock avait décidé de couper . The Birds (Les Oiseaux) s'apprécient peut-
être plus, non pas comme un récit linéaire , mais comme un poème lyrique tragique dont les épisodes sont comme des strophes qui viennent soutenir un
thème unique . Federico Fellini a aussi qualifié ce film de poème, et affirmé que c'est son préféré de toute l'oeuvre d'Hitchcock et l'un des plus grand film de tous
les temps. >>
Donald Spoto : La face cachée d'un génie, la vrai vie d'Alfred Hitchcock .
THE BIRDS (1963) réalisateur : A. HITCHCOCK
Scenario : EVAN HUNTER adapté d'une nouvelle de DAPHNE DU
MAURIER (1952)et d'un article de presse du Santa
Cruz Sentinel du 18 aout 1961
THE BIRDS (1963)musique/bande son :
B.HERRMANN/O.SALA/R.GASSMANN
<< Le tournage fut terminé avant le premier juillet [...]Hitchcock et son
équipe technique entreprirent alors [...]des réunions avec Bernard
Herrmann , Remi Gassmann , et Oskar Sala. Ce trio conçu une bande son sans musique sur laquelle tous les bruits d'oiseaux ont été créés
artificiellement à l'aide d'un instrument électronique appelé
Trautonium , du nom de son inventeur Friedrich Trautwein . Leur
travail donne à la bande son sa puissance exceptionnelle car tous les bruits et effets furent orchestrés et
chaque son filtré et modifié pour souligner le sentiment que Hitchcock
voulait exprimer dans chaque scène.>>
Donald Spoto : La face cachée d'un génie , la vrai vie d'Alfred Hitchcock .
STORY BOARD & influence picturale :R.BOYLE/ A.WITHLOCK/ E.MUNCH : LE CRI
(1893)
1) La genèse du film
Après l'énorme succès de Psychose (1960) et une cinquième nomination à l'Oscar du meilleur réalisateur, Hitchcock va mettre un certain temps à
trouver le sujet qui Lui permettrait de faire mieux encore ,
<< Je sentais que les gens attendaient quelque chose d'encore plus fort >>, avoua-t-il.
Et c'est à cette période qu'il tombe sur un article du Santa Cruz Sentinel relatant l'invasion massive de moineaux à l'intérieur d'une maison de La Jolla en Californie.
Cet étrange événement lui rappelle une nouvelle de Daphné Du Maurier dont il avait acquis les droits à sa publication en 1952.
Déjà adaptée à la radio en 1954, cette nouvelle avait également donnée naissance , l'année suivante , au dernier épisode de Danger , la série diffusée sur CBS.
THE BIRDS •Episode 838 of Lux Radio Theater on July 20, 1953 with Herbert Marshall
THE BIRDS •Episode 217 of Escape on July 10, 1954 with Ben Wright and Virginia Gregg
Après relecture, l'ambiance de la nouvelle, son atmosphère pesante, angoissante, plaît à Hitchcock.
Hitchcock prend alors contact avec l'écrivain Evan Hunter en septembre 1961 pour l'élaboration du scénario. Par ailleurs il fait appel à ses collaborateurs habituels,
Robert Burks pour l'image, George Tomasini pour le montage et Robert Boyle pour les décors. Celui-ci raconta plus tard que la nouvelle de Daphné Du Maurier lui
rappela l'ambiance désespérée et angoissante du tableau
d'Edvard Munh (1863 , 1944 )
Le Cri (1893)
<< Le décor d'ensemble que j'avais conçu pour le film dès le début était inspiré du tableau d'Edvard Munch intitulé Le Cri, qui exprime un sentiment
intérieur de découragement intense et de folie dans un lieu sauvage et solitaire.
C'était exactement ce que voulait Hitch. Il tenait à une approche subjective pour que le public participe aux émotions et aux sentiments des personnages et partage aussi
leur peur des dangers physiques.
Les acteurs ont travaillé presque six mois, mais les techniciens et les équipes de trucage et du département d'optique ont travaillé plus d'un an sur le film. >>
Robert Boyle
STORYBOARD BY ROBERT BOYLE
<< Après avoir lu la nouvelle, j’ai commencé à faire des dessins, et je dois avouer que ce que j’ai projeté a été Le Cri, le tableau d’Edward Munch qui pour moi était le symbole de la terreur que les oiseaux peuvent inspirer à beaucoup de gens .La question qui est venu immédiatement a été ``est-ce que c’est faisable ? ‘’ >> Robert Boyle.
2) Sound effects for The Birds
Avec Les Oiseaux Hitchcock réalise sa bande son la plus révolutionnaire. Le grand paradoxe de ce film consiste en ce qu'il ne comporte apparemment aucune musique
conventionnelle mais au contraire une bande son très audacieuse.
<< Les oiseaux meurtriers ont leur propre musique et n'ont besoin d'aucune autre même pas celle d'Herrmann. >>
D'une façon insidieuse, cette bande son c'est la <<musique>> de la nature , reflet d'un monde en perdition.
Après La Taverne De La Jamaïque en 1939 et Rebecca en 1940, Les Oiseaux sont l'occasion pour Hitchcock d'adapter pour la troisième fois un ouvrage littéraire signé
Daphné Du Maurier.
La Taverne De La Jamaïque (1939) Rebecca (1940)
Evan Hunter, qui a écrit le scénario , conserve intacte la dimension sonore originale présente dans la nouvelle de Daphné Du Maurier:
THE BIRDS (1952) Daphné Du Maurier THE BIRDS (1952) Daphné Du Maurier
“The tapping began at the windows, at the door, the rustling, the jostling, the pushing for position on the
sills, the first thud of the suicide gulls upon the step. . . .The smaller birds were at the windows now. He
recognized the light tap-tapping of their beaks and the soft brush of their wings. The hawks ignored the windows. They concentrated their attack upon the
door. Nat listened to the tearing sound of wood, and wondered how many million years of memory were
stored in those little brains, behind the stabbing beaks, the piercing eyes, now giving them the
instinct to destroy mankind with all the deft precision of machines.”
Le tapotement commença aux fenêtres, à la porte. Le bruissement, la bousculade pour les perchoirs. Les
premières chutes de mouettes suicidées sur le seuil [...] Les plus petits oiseaux étaient à présent devant les
fenêtres. Il reconnut le léger tapotement de leurs becs et le frôlement de leurs ailes. Les éperviers dédaignaient les fenêtres. Ils concentraient leur assaut sur la porte.
Nat écouta le bruit du bois qui se fendait, et se demanda combien de millions d'années d'expérience étaient
accumulées dans ces petites cervelles, derrière ces becs pointus, ces yeux perçants, le dotant aujourd'hui d'un tel
instinct pour détruire l'humanité avec toute l'adroite précision des machines. >>
Evan Hunter voulait obtenir d'Hitchcock un score terrifiant, mais pour cette fois Hitchcock était déterminer à créer un nouveau son au-delà des normes
hollywoodienne.
<< Il y aura deux sortes de fonds sonore , l' un sera fait de sons naturels et l'autre de sons électroniques. Pour l'instant, nous avons l'intention de faire en studio ici les
sons naturels et laisser les sons électroniques pour l'Allemagne. >>
En avril 1962 , Hitchcock reçoit de Berlin la lettre d'un certain Remi Gassmann , compositeur allemand de musique électronique et collaborateur d'Oskar Sala , qui ,
sur les conseils de Saul Bass ( le designer d'Hitchcock qui a travaillé sur Sueurs Froides en 1958 La Mort aux Trousses en 1959 et Psychose en 1960 ) , lui présente un nouvel instrument capable de produire des sons nouveaux , le << trautonium
>> .
Après plusieurs test effectués sous la direction de Bernard Herrmann, son musicien attitré, Hitchcock perçoit le grand atout de cette nouvelle technique. C'est décidé, il n'y aura pas une note de musique dans Les Oiseaux, seulement des bruitages et des
sons parfaitement voulus, contrôlés et travaillés.
Le Trautonium ( 1962 ) Hitchcock & O. Sala
Le Trautonium : Oskar Sala ( Démonstration en 1941 )
Pour le meilleur et pour le pire Hithcock abandonne la riche tradition symphonique qu'il avait lui-même mener à la perfection dans des films tels que Rebecca ,
Notorious , Vertigo , et d'autres encore pour inaugurer une musique électronique. La musique électronique n'était pas tout à fait une nouveauté puisque Hitchcock a lui-
même utilisé le Thérémin (un instrument à clavier électronique) dans Spellbound en (1945) 20 ans plus tôt :
quelque chose de nouveau et d'exotique à cette époque utilisé à bon escient dans des films tels que The Day The Earth Stood Still de Robert Wise en 1951 et
Forbidden Planet de Fred M. Wilcox en 1956 Mais il s'agit ici d'effets sur de courts fragments du film et non sur toute la durée.
The Day The Earth Stood Steel ( 1951 ) Robert Wise & Bernard Herrmann
Forbidden Planet ( 1956 ) Fred M. Wilcox & Louis & Bebe Barron
Avec Les Oiseaux Hitchcock apparait comme un pionnier mais contribue également au déclin de la musique symphonique hollywoodienne.
Toutefois le film comporte << deux musiques conventionnelles >> qui sont en fait
des citations musicales utilisées en tant que musique diégétique.
Scène de l'attaque de l'école : RISSLE-DY Rossle-DY (comptine chantée par les enfants de l'école)
Mélanie joue au piano une pièce musicale de Debussy : "Arabesque No.1" (1888-1891)
3) Analyse musicale
Générique & scène d'ouverture
Le générique comporte des silhouettes d'oiseaux volants, de tailles différentes. Si près qu'ils prennent une forme quasi abstraite .Hitchcock donne des indications très précises sur la texture, le rythme, et la dynamique pour la bande son du générique :
le << modèle musical >> est crescendo-decrescendo.
Le cri des oiseaux augmente en intensité jusqu'à ce que le nom d'Hitchcock apparaisse à l'écran (crescendo) , la bande son du générique utilise des sons
électroniques , combinant des cris de corbeaux et de mouettes ainsi que des bruits d'ailes.
Dans la scène d'ouverture Tippi Hedren, (Mélanie Daniels), croise un tramway de San Francisco dont on entend le cliquetis associé à des petits cris de mouettes :
un contrepoint entre le monde naturel et mécanique préfigurant l'essence du film.
First attack
Cette attaque de Mélanie par une mouette fait basculer le film du simple récit d'une romance (entre Mélanie et Mitch) à la chronique complexe d'une catastrophe
naturelle : La nature se révoltant contre les hommes.
« Pour bien décrire un bruit, il faut imaginer ce que donnerait son équivalent en dialogue. Je voulais obtenir un son qui signifierait la même chose que si les oiseaux disaient à Mélanie : Maintenant nous vous tenons. Et nous arrivons sur vous. Nous n'avons pas besoin de pousser des cris de triomphe, nous n'avons pas besoin de
nous mettre en colère, nous allons commettre un meurtre silencieux. ».
A. HITCHCOCK
Cathy’s party
L'assaut des oiseaux sur les enfants dans la scène : Cathy's Party est une brillante pièce pour percussions, avec des claquements d'ailes, des ballons qui éclatent, des
plats qui se brisent , et les cris perçants des mouettes et des enfants. Hitchcock donne certaines indications concernant les effets sonores de cette scène :
<< Il faudra faire attention à ce que les cris des enfants et ceux des mouettes soient bien différents. A la fin de la scène , les cris des oiseaux disparaissent en même temps que ceux des enfants. Là on termine sur le silence , coupé par les
dialogues des personnages.>>
C'est le mouvement basique de beaucoup de film : la bande son évolue en crescendo vers un climax puis décline vers un silence troublant. Dans tout le film, les oiseaux attaquent, puis disparaissent pour se rassembler à nouveau pour un
autre assaut avec un son unique , dans un modèle musical scrupuleusement planifié.
The Dinner
Pour cette scène Hitchcock souhaite que la bande son << agresse les oreilles du public à un degré presque insupportable. >>
Les moineaux qui attaquent dans cette scène sont des créatures délicates et << le ravage sonore >>qu'ils produisent ne provient pas du volume général mais de la
qualité du timbre :
<< Les sons dans cette séquence doivent signifier la colère stridente, comme si les oiseaux envahissaient, à leur façon, la pièce et hurlaient sur les personnages.[ ... )
Pas besoin d'avoir un haut volume, mais le coté strident doit être aussi fort que si vous grattiez deux pièces l'une contre l'autre. [ ... )
Le son doit commencer dès le début de la scène, afin d'aider à la compréhension. A un moindre degré nous avons, aussi le bruit des battements d'ailes et des
éclaboussures d'oiseaux qui s'écrasent contre les murs et les objets de la pièce. S'ajoutent à cela, les bruits naturels tels que les coups de nappe donnés par Mitch,
le renversement de la table, etc...>>
THE SCHOOL
L'attaque de l'école commence par le bruit de la voiture de Mélanie qui arrive.
On entend ensuite les enfants en <<in>> chanter (musique diégétique) la comptine :
<< RISSLE-DY ROSSLE-DY >>
" Risseldy, Rosseldy "
I married my wife in the month of June,
Risseldy, rosseldy, mow, mow, mow,
I carried her off in a silver spoon,
Chorus:Risseldy, rosseldy, hey
bambassity,Nickety, nackety, retrecal
quality,Willowby, wallowy, mow, mow,
mow.
She combed her hair but once a year,
Risseldy, rosseldy, mow, mow, mow.
With every rake she shed a tear,
Chorus
She swept the floor but once a year
Risseldy, rosseldy, mow, mow, mow.
She swore her broom was much too dear,
Chorus
She churned her butter in Dad's old boot,
Risseldy, rosseldy, mow, mow, mow.
And for a dasher used her foot,
Chorus
The butter came out a grizzly gray,
Risseldy, rosseldy, mow, mow, mow.
The cheese took legs and ran away,
Chorus
Storyboard by Robert Boyle
The crows are gathering behind her on the jungle gym. And I have the kids singing a song. And I asked my kids, what's a... they were about that school age. And I said, "What's a song that you sing in school?" and they gave me "Rissle-dy Rossle-dy." And I looked it up and it was public domain. You
know, it's an old folk tune that goes back forever. And I used it. And I gave them four or five stanzas, whatever, of
the song, the actual song.
Les corbeaux se rassemblent derrière Mélanie dans l'aire de jeu. Et j'ai les enfants de l'école qui chantent une chanson. Et j'ai
donc demandé à mes propres enfants, «Quelle chanson chantiez-vous à l'école à cet âge ?" et ils m'ont répondu "Rissle-
dy Rossle-dy ." Et j'ai vérifié et la chanson appartenait au domaine public. Vous savez, c'est lorsque l'origine d'une mélodie populaire remonte à des temps immémoriaux .
Et je l'ai donc utilisé. Et j'ai donné à apprendre aux enfants
And I got a call, I think it was from Peggy Robertson, Hitch's assistant, and she said, "We need more lyrics for the song." I said, "Why?" She said, "It won't cover the scene on the jungle gym."
So I wrote I don't know how many more stanzas -- enough to cover the whole bird kingdom arriving on that jungle gym. And they used whatever they needed, and the irony of it is that I still get royalties from ASCAP. I had to join the American Society of Composers and -- whatever it's called -- Publishers -- ASCAP -- in order to allow me to use the lyrics in the film. And I still get royalties from ASCAP on “The Birds” for the lyrics I wrote for that scene!
EVAN HUNTER ( 2000 ) Documentary: All About The Birds
quatre ou cinq strophes de la chanson originale. Et j'ai reçu un appel, de Peggy Robertson, l'assistante de Hitch, où elle dit, «Nous avons besoin de plus de paroles pour la chanson." J'ai demandé : "Pourquoi?" Elle répond : «La chanson ne couvrira
pas toute la scène de l'aire de jeu."
Alors j'ai écrit, je ne sais plus combien de strophes - assez pour couvrir toute la durée de cette scène où les oiseaux arrivent sur cette aire de jeu . Et ils ont utilisé tout ce dont ils avaient besoin, et l'ironie de la chose est que je reçois toujours des redevances
de l'ASCAP sur "Les Oiseaux" pour les paroles que j'ai écrites pour la scène!
EVAN HUNTER ( 2000 ) Documentary: All About The Birds
Mélanie entre dans l'école, les chants deviennent plus forts. Quand elle ressort, ils diminuent. Elle va s'asseoir sur le banc, les sons restent au même niveau. On n’entend pas les corbeaux arriver, ce bruit étant couvert par les chants des
enfants .Lorsque Mélanie retourne dans la classe, nous gardons les sons naturels. Les enfants sortent alors de l'école, nous revenons aux corbeaux. Nous devons avoir le silence, avec un ou deux battements d'ailes, car les enfants sortent sans faire de bruit. Tout à coup, on entend les pas des enfants qui courent. Immédiatement, un
terrible battement d'ailes des oiseaux qui s'envolent. Dans un plan d'ensemble, nous voyons les oiseaux qui survolent l'école dans un énorme bruit électronique qui
grandit, pour montrer la colère des corbeaux qui s'abat sur les enfants.
Le son augmente pendant toute la séquence.
Nous entendons les pas des enfants , les cris qui ne doivent pas être recouverts par les croassements mais continus, sans être excessifs , afin de ne pas devenir
monotones.
Cela continue jusqu'à ce que les enfants arrivent au bas de la rue, tandis que Mélanie sauve Michèle et la jette dans la voiture. A l'intérieur, nous entendons les coups violents donnés par les oiseaux autour de la voiture, mais en réduisant le
volume. Finalement, les cris des oiseaux et des enfants s'arrêtent,
C'est le silence total.
... Et si John Williams avait composé la musique de cette scène :
The gas station & the phone booth
L'Attaque du restaurant.
La séquence commence à l'intérieur du restaurant, des gens entrent et sortent. Nous devons entendre des cris de mouettes pour expliquer que l'attaque a commencée. Cela doit continuer jusqu'à l'incendie où nous avons un plan
d'ensemble de haut.
Avant que cette masse de mouettes apparaissent dans ce plan de haut, on les entend en OFF de plus en plus fort. Puis, elles sont dans le plan de plus en plus
nombreuses , jusqu'à remplir l'écran. Tout cela est en bruits électroniques .Les cris des mouettes augmente encore jusqu'au moment où Mélanie entre dans la cabine
téléphonique, là, le son baisse un peu, mais pas trop afin que le public se rende bien compte que Mélanie est piégée dans cette cabine. Quand elle en sort, on garde le même volume, puis il augmente lorsque Mitch la ramène au restaurant, où les cris
d'oiseaux doivent baisser considérablement afin de bien faire sentir que nous sommes coupés du monde extérieur.
Under siege
Ici, les oiseaux sont assimilés à un ensemble de percussions comme en témoigne le
<< picage >> sauvage de l'arrière de la porte: L’intensité s'élève progressivement en un fulgurant crescendo.
Upstairs
_ Avant l'attaque :
Cette scène commence dans le silence, jusqu'au bruit d'un battement d'ailes qui attire l'attention de Mélanie. Bruit simple qui ne semble pas menaçant et ne justifie
pas qu'elle réveille Mitch; Elle est maintenant avec les << inséparables >>, lorsqu'un petit bruit lu parvient de l'escalier.
Elle se lève et se dirige vers lui .Là, un autre bruit ; elle monte. En haut, un autre bruit, pas assez fort encore pour l'inquiéter ; ce qui se vérifie par un demi-tour de sa tête vers l'escalier (ce qui montre que ce n'est pas la peine d'aller chercher Mitch).
_L'attaque :
Lors de cette attaque finale dans le grenier, le volume n'est pas trop fort afin de ne pas réveiller la famille. Le bruit sourd des oiseaux qui frappent Mélanie doit être
assez bas, avec en plus des battements d'ailes. Les voix OFF de la famille commencent dès que Mélanie claque la porte. Ce dialogue OFF comprend la voix de
la mère, les pas de Mitch qui montent l'escalier, son entrée et le sauvetage de Mélanie. Dès que Mitch a réussi à ouvrir la porte, le volume augmente.
The only way out
La séquence finale.
Quand Mélanie est redescendue, le son des battements d'ailes s'éloigne.
A partir de maintenant, nous restons dans le silence avec des sons naturels jusqu'à ce que Mitch ouvre la porte et voit que les oiseaux sont partout, dans tout le
paysage. Tout est recouvert d'un murmure très bas d'oiseaux. On a l'impression qu'une masse qui attend, et qui au moindre bruit peut attaquer. A la fin, le bruit le plus important est naturel : c'est le démarrage de la voiture, qui doit se faire avec beaucoup de précaution. Elle prend de la vitesse lorsqu'elle s'éloigne de la maison. Quand la voiture a disparu de notre vue, nous restons seuls avec le cri strident des
oiseaux, qui dure jusqu'à la fin du film.
Pour la scène finale, lorsque l'on voit pour la première fois les oiseaux à perte de vue, Hitchcock demanda un silence artificiel, "un silence électronique
d'une monotonie qui pouvait évoquer le bruît de la mer entendu très loin".
Comme Elizabeth Weis l'écrit : "Le film fait que nous nous sentons tout aussi vulnérables dans les moments
de calme et de tranquillité, que dans le chaos. C'est une chose de se sentir
menacés en cas d'attaque, c'en est une autre d'avoir peur continuellement, de sentir que la vie est menacée en permanence. Ainsi Hitchcock tout au
long de sa longue carrière nous alerte sur la condition précaire de notre vie quotidienne. "
4) La combinaison des arts dans le cinéma d’Alfred Hitchcock
Nevinson, A Bursting Shell
( l'explosion d'un obus) 1915
D'entre Les Morts ( 1954 ) Boileau &
Narcejac( Living And The Dead )
Musique composée par
Bernard Herrmann
( inspirée du Liebestod de
Richard Wagner )
the Dream Sequence in Vertigo ( 1958 )
L’une des plus apocalyptiques des
peintures de Nevinson. L’explosion d’un obus
(1915) utilise des lignes de forces et le mouvement tourbillonnant afin de recréer l’effet d’une
explosion .Le point fort de convergence du vortex –
avec sa lumière et sa spirale vertigineuse-simule
l’expérience sensorielle déroutant d’une explosion.
Ce livre est l’inspiration du très
célèbre film de Hitchcock (Vertigo en V.O).La célébrité du
film a même amené les éditeurs à utiliser, plutôt que le titre
original du livre, celui de la version française
du film : Sueurs froides.
Mais ne croyez pas lire le scénario du film, Hitchcock s’en est
librement inspiré, il a modifié les lieux,
l’époque et même certains volets de
l’intrigue. Néanmoins, le revirement surprise,
la force du film, provient du livre
Cette musique de Bernard
Herrmann fait aujourd'hui partie des grands chef-d'œuvres de la
musique de film, une musique
immédiatement reconnaissable par son célèbre
motif principal en forme d'arpèges
de quintes augmentées
ascendantes puis descendantes symbolisant le mystère et le
suspense du film, ainsi que la
phobie du vertige qui hante le héros
tout au long du film.
Ancien policier, John «Scottie» Ferguson est détective privé à San Francisco. Il souffre d'une peur pathologique du vide depuis la mort d'un collègue policier, qui
s'est écrasé au sol. Son vertige l'oblige à renoncer à son activité. L'un de ses camarades d'école, Gavin Elster, lui demande de suivre sa femme, Madeleine, en lui précisant que cette dernière, suicidaire, se croit possédée par l'âme d'une ancêtre. Scottie tombe rapidement amoureux de Madeleine, qu'il sauve une première fois de
la noyade, mais que son vertige empêche de préserver d'une chute dans le vide. Ecrasé par la culpabilité, Scottie sombre dans le désespoir, jusqu'à ce qu'il découvre
en Judy Barton, l'employée d'un hôtel, l'hallucinant sosie de Madeleine...
Michel ange, The Deposition, c. 1550
The Lodger ( 1913 ) Marie Belloc-
Lowndes
Musique composée par Ashley Irwin
The Lodger (1927)
L'éminent artiste l'avait projetée et sculptée
pour sa propre tombe qu'il aurait voulu placer à Santa Maria Maggiore
à Rome.C'est une œuvre
hautement tragique, en particulier dans le visage de la Madone et dans le corps inerte de Jésus qui
s'affaisse inexorablement. La tête
de Nicodème est probablement un
autoportrait de Michel Ange. L'œuvre, exécutée entre 1550 et 1553, fut restaurée et terminée
par Tiberio Calcagni, qui
Marie Belloc Lowndes (1868-1947) est une romancière anglaise
qui s’est fait connaître par la publication de The Lodger (1913) :
un thriller intense sur la base de jack
l’éventreur .Une famille londonienne soupçonne que leur locataire à l’étage
d’être un tueur mystérieux connu
sous le nom <<The Avenger>>.Le roman a servi de base pour
quatre adaptations de films.
était élève de Michel Ange.
Le "Vengeur" sème la terreur à Londres en assassinant des jeunes filles blondes. Les rares témoins qui ont pu l'apercevoir décrivent un individu
qui se cache le bas du visage. La nouvelle d'un nouveau meurtre est répandue via les journaux. Non loin de là, Mrs Bunting loue une chambre d'hôte à un mystérieux étranger qui attire immédiatement la suspicion...
Nevinson, La Guerre Aérienne, 1918
Musique composée par Bernard Herrmann
North By Northwest ( 1959 )
Nevinson devint un peintre de guerre en
juillet 1917 et travailla surtout pour les
Britanniques. Les
Hitchcock a de nouveau confié la musique de son
film à son grand complice, Bernard Herrmann, qui
signe là une de ses grandes partitions de film.
North by
marques distinctives de l'avion sont celles du Nieuport 17 de l'as
pilote canadien Billy Bishop. La toile le
montre supposément en pleine action. L'artiste a
inclus trois appareils ennemis au-dessus des
nuages, à travers desquels on peut
percevoir la campagne de la Somme
Northwests'articule autour de deux thèmes, celui de la poursuite, qui rejoint le titre français du film, "la mort aux trousses", puis celui du "love theme",
pour les personnages de C.Grant et de E.Marie
Saint.
Le publiciste Roger Tornhill se retrouve par erreur dans la peau d'un espion. Pris entre une mystérieuse organisation qui cherche à le
supprimer et la police qui le poursuit, Tornhill est dans une situation bien inconfortable. Il fuit à travers les Etats-Unis et part à la recherche d'une
vérité qui se révélera très surprenante.
This house was designed by Robert F. Boyle in the style of Frank Lloyd Wright
Musique composée par Bernard Herrmann
North By Northwest ( 1959 ) A. Hitchcock
Pieta de Michel Ange ( 1499 ) Topaz roman de Léon Uris
( 1967 )
Musique composée par Maurice Jarre
Topaz ( L’Etau ) 1969 d’après un roman de Léon Uris
Boris Kusenov décide de passer à l'Ouest, avec sa femme et sa fille. Son évasion est organisée en échange de cette liberté. Il informe les
Américains sur un trafic d'armes des Russes à Cuba. Un espion français est parachuté à Cuba où il obtient de précieux renseignements.
House by the railroad Edward Hopper, 1925
Psychose ( 1959 ) Robert Bloch
Musique composée par Bernard Herrmann
Psychose ( 1960 ) : The Bates House
L'un des meilleurs exemples d'un objet inanimé porteur d'émotion. La solitude presque féerique de la
maison est obtenue par soustraction, plutôt que par
addition de détails. Une bonne part de la maison réelle a été supprimé ainsi que tout son
environnement, excepté la voie ferrée. La maison devait exister
bien avant l'arrivée du train et se trouve maintenant presque à l'abandon. Pour augmenter
l'émotion, Hopper utilise des ombres pour masquer presque
toute l'entrée avant de la maison, lui donnant une présence foncée et sinistre. La maison ressemble plus à un cercueil, à un endroit
pour mourir qu'à un endroit pour vivre .Le spectateur peut facilement s'identifier à la
situation de la maison s'il a été dans un état semblable de
solitude et d'abandon. Ce tableau est celui de la consécration pour Hopper. L'œuvre entre dans les
collections du Museum of Modern Art dès 1930, grâce à un don du millionnaire Stephen Clark. Les
réalisateurs de film et les réalisateurs de dessins animés ont particulièrement apprécié l'atmosphère de cette maison
féerique, triste ou sinistre. L'exemple le plus célèbre est
sa reconstitution remaniée selon les désirs d'Alfred Hitchcock
pour Psychose. Elle a également inspiré George Steven
pour Geant et différentes versions de cette maison ont été
employées dans des dessins animés de La famille Addams.
La publication, en 1959, du roman de Robert Bloch, Psychose (et de
manière plus décisive encore, la sortie en
salle, un an plus tard, de son adaptation cinématographie
signée Alfred Hitchcock), marque l’avènement d’un nouveau genre : le
thriller psychologique. Aux
éléments d’ambiance et aux ressorts
narratifs hérités du roman noir et du récit
à énigme, ce spécimen parfait du genre, ajoute une innovation qui en
constitue la caractéristique
spécifique : impliquer le point de vue
subjectif du lecteur dans la progression
de l’intrigue.
Bernard Herrmann écrit cette partition culte de PSYCHOSE
pour son fidèle réalisateur Alfred Hitchcock un an après VERTIGO
(1958) et LA MORT AUX TROUSSES
(1959). La partition alterne entre des cordes stridentes et saccadées pour illustrer le meurtre,
et des cordes amples avec un
motif en mouvement pour illustrer la cavale.
Marion Crane, employée modèle,
cède à la tentation et vole une forte somme d'argent. Elle part pour le Texas rejoindre son amant afin de réaliser leurs rêves. Arrivée à
quelques kilomètres de sa destination,
harassée, elle se réfugie dans un motel.
Le propriétaire, Norman Bates, jeune
homme farouche mais courtois, semble
heureux de l'accueillir. Il se laisse aller à des confidences, évoque
sa solitude et son attachement à sa mère infirme et
acariâtre. Marion se retire dans sa
chambre. Alors qu'elle est sous la douche,
une femme écarte le rideau et frappe
Marion
Early Sunday Morning ( 1930 ) E. Hopper
Rear Windows ( 1942 ) William Irish
Musique composée par Franz Waxman
REAR WINDOW ( 1954 ) Alfred Hitchcock
Apartment Houses ( 1923 ) E. Hopper
Room in New York ( 1932 ) ) E. Hopper
Dans Fenêtre sur cour dont le scénario repose sur la
séparation entre intérieur et extérieur constamment
franchie du regard par un <<voyeur>>sans vergogne, les individus vivent dans des
tableaux, chacun le sein, encadrés par des fenêtres à travers lesquelles Jefferies se
laisse aller à regarder. Le suspense et l’ambiance du film
repose évidemment sur les questions que posent ses
tableaux, auxquelles Hitchcock apporte des réponses. Si la
peinture de Hopper est aussi
Pour ce film Hitchcock
souhaitait que l'on suive ,
tout au long du film , la
création d'une chanson
composée par l'un des
voisins. Dans le cinéma
selon Hitchcock , il
déclara à François
Truffaut : << Je voulais
qu'on l'entende
composer la chanson , la
développer et qu à travers
tout le film on entende
l'évolution de cette chanson
jusqu'à la scène finale où elle serait jouée sur un disque;ça n'a
pas
A New York, Greenwich Village, par un été torride, le reporter photographe LB Jefferies se
retrouve immobilisé dans son appartement après un accident. Seul avec le plâtre qui enserre sa jambe et le cloue dans son
fauteuil, il s'ennuie. Pour tuer le temps, il épie ses voisins et
pénètre chaque jour davantage dans leur intimité. C'est ainsi
qu'il s'intéresse de plus en plus à Lars Thorwald, une sombre
brute qu'il a surpris en train de se disputer avec sa femme. Il en
vient à le soupçonner d'avoir
narrative qu’un film, l’artiste est libre en revanche de ne jamais mettre un terme à l’attente et de laisser son
public ressentir l’origine et peut être la suite du conte
dont il nous livre un fragment.
marché.J'aurais dû choisir un
auteur de chansons
populaires.J'ai été très déçu.>>
assassiné la malheureuse. Lisa Fremont, qui visite souvent
Jefferies, auquel elle porte une tendre attention, partage bientôt son obsession...
Décor de la scène du rêve réalisé par S. Dali
The House Of Doctor Edwardes F.
Beeding (1926)
Musique : Miklos Rozsa
Spellbound ( 1945 ) A. Hitchcock
Lorsqu’en 1945 Alfred Hitchcock eut besoin
d’illustrer la séquence du rêve pour son film :
Spellbound ,il se tourne naturellement vers
Salvador Dali le surréaliste qui avait déjà collaboré
avec Bunuel pour Un chien andalou .Dali réalisa cinq peintures, une centaine s’esquisses et un décor
envahi d’yeux menaçants.
Spellbound est la seule musique que Rózsa écrivit pour Hitchcock qui, curieusement, ne l’appréciait pas outre mesure, ce qui d’ailleurs
n’empêcha pas le compositeur de recevoir, grâce à elle, son premier Oscar pour la meilleure partition originale en 1946 . Dans une interview
accordée à David Kraft en septembre 1982 – Soundtrack! n°3 – le compositeur confiait : « Hitchcock n’aimait pas ma partition pour
Spellbound. Mais j’en ai eu connaissance seulement bien des années plus tard. J’ai eu deux réunions avec lui. Lors de la première rencontre,
Hitchcock et Selznick m’ont indiqué qu’ils voulaient un grand thème d’amour et un son étrange pour la paranoïa. Aussi j’ai écrit un thème
d’amour et j’ai dit que je voulais employer le theremin. « Qu’est-ce que c’est ? Cela se mange-t-il ? » Non, cela se joue. « Et comment est le son ?
» Ils n’ont pas été impressionnés. Selznick, qui était un homme très généreux, a dit : « O. K. Pourquoi n’écrivez-vous pas une scène et ne
l’enregistrez-vous pas ? Ainsi nous l’écouterions. Si nous l’aimons, parfait ; sinon, changez-la. » Ainsi j’ai obtenu un grand orchestre, une
scène d’environ trois minutes et demie fut enregistrée (c’était la scène du rasoir) et ce que j’ai su ensuite, c’est qu’ils ont voulu avoir le theremin
partout : au générique du début, dans la scène suivante… »
Constance, médecin dans un asile d'aliénés, tombe amoureuse du nouveau directeur. Cependant, elle s'aperçoit rapidement que l'homme qu'elle aime est
en réalité un malade mental qui se fait passer pour le docteur Edwards. Quand il prend conscience de son amnésie, il croit avoir tué le véritable docteur et s'enfuit de la clinique. Constance le retrouve et le cache chez son vieux
professeur qui va analyser les rêves du malade et trouver l'origine de son déséquilibre.