JEAN-DANIEL LEMAY
DÉVELOPPEMENT DE BÉTON PROJETÉ À ULTRA-
HAUTE RÉSISTANCE INITIALE
Thèse présentée
à la Faculté des études supérieures et postdoctorales de l’Université Laval
dans le cadre du programme de maîtrise en génie civil
pour l’obtention du grade de maître ès science (M.Sc.)
DÉPARTEMENT DE GÉNIE CIVIL
FACULTÉ DES SCIENCES ET DE GÉNIE
UNIVERSITÉ LAVAL
QUÉBEC
2013
© Jean-Daniel Lemay, 2013
Résumé
La recherche dans le domaine des matrices cimentaires nouvelles est très active aujourd’hui
et elle s’intéresse à divers aspects comme les temps de prises contrôlés, le développement
des résistances mécaniques rapide ou encore la rhéologie adaptée. Des études récentes ont
permis de mettre de l’avant de nouveaux systèmes cimentaires non traditionnels,
incorporant des ciments d’aluminate de calcium, de phosphate de magnésium, de
sulfoaluminate de calcium ou encore un mélange de plusieurs bases cimentaires.
Les matrices à base de ciment Portland (OPC), de ciment d’aluminate de calcium (CAC) et
de sulfate de calcium ( ) ont démontré un développement des résistances mécaniques en
bas âge très rapide. Cependant, ce type de liant mélangé présente des problèmes de
maniabilité rendant ce système difficilement compatible avec le béton coulé en place. Le
premier objectif de ce projet vise à contourner ce problème en utilisant le béton projeté par
voie sèche comme méthode de mise en place. En effet, puisque le contact eau-ciment
survient immédiatement avant la mise en place, le problème de la maniabilité déficiente est
évité. Il faut cependant rester vigilant car les mélanges OPC-CAC- présentent un
comportement expansif incontrôlé s’ils sont mal proportionnés. En parallèle à cet objectif
de hautes résistances mécaniques à jeune âge, un paramètre d’étude additionnel est
l’incorporation de fibres au mélange de béton projeté par voie sèche afin d’atteindre un
comportement en flexion de type écrouissant.
Les résultats obtenus démontrent qu’il est possible de mettre au point un mélange de béton
projeté par voie sèche basé sur une matrice OPC-CAC- qui permet une projection avec un
équipement de projection conventionnel. Un béton projeté ayant une résistance d’environ
10 MPa à 1h, 30 MPa à 3h et atteignant sa résistance finale de 50 MPa en une seule journée
a été produit dans le cadre de ce projet. Cependant, cette étude met également de l’avant la
grande variabilité et sensibilité de ces matrices ternaires. Une variation d’aussi peu que
1,5% de la teneur en sulfate de calcium peut engendrer des variations de résistances en
compression de près de 20 MPa. La mise en place de béton projeté par voie sèche à haut
volume de fibre s’est avérée impossible avec l’équipement utilisé.
iii
Abstract
Research in the field of emerging cementitious materials is very active nowadays and is
focusing on various aspects such as controlled setting time, rapid strength gain and adapted
rheology. Recent studies have brought forward non-traditional cementitious material
systems, incorporation calcium aluminate cement, magnesium phosphate cement, calcium
sulfoaluminate cement or blends of several cements.
Blended cements composed of ordinary Portland cement (OPC), calcium aluminate cement
(CAC) and calcium sulphate ( ) have shown very rapid gain in early mechanical strength.
However, this type of blended binder also exhibits very difficult workability that limits its
use in regular cast in-place concrete applications. The first objective of this research project
is to bypass this problem using dry-mix shotcrete as a placement method. Since the contact
of water-cement occurs immediately before the placement, workability problem are
avoided. However, the use of these binders requires vigilance because the OPC-CAC- mix
may show an uncontrolled expansive behaviour if incorrectly formulated. To complement
this objective of high early-strength, an additional study parameter is the possible
incorporation of fibres in dry-mix shotcrete in order to obtain a flexural strain-hardening
behaviour.
Results show that it is possible to design a dry-mix shotcrete based on OPC-CAC- binder
that allows proper placement with conventional shotcrete equipment. A shotcrete with a
compressive strength of 10 MPa at 1h, 30 MPa at 3h and reaching its final strength of 50
MPa in a single day has been produced in this project. However, this study also brings
forward the variability and sensitivity of this kind of binder. A variation as low as 1,5% of
the calcium sulphate content can create a variation in the compressive strength of nearly 20
MPa. The placement of dry-mix shotcrete containing high volume of fibres was
unfortunately impossible with the equipment used.
Avant-Propos
La réalisation de cette maîtrise a été une grande aventure ponctuée de grands moments de
joie et, parfois, de découragement. Cette expérience a été très enrichissante à la fois sur le
plan humain et sur le plan scientifique. La maîtrise m’a permis de connaître le monde de la
recherche qui au début ne me semblait destiné et que j’ai appris à adorer.
Premièrement, il m’est impossible de ne pas remercier mon directeur de recherche, M.
Marc Jolin. En plus de me fournir soutien financier, logistique et scientifique, Marc m’a
transmis une méthode de travail et une rigueur dans la réalisation de tout travail qui, j’en
suis certain, feront de moi un meilleur ingénieur. Je le remercie aussi de m’avoir permis
d’assister à de nombreuses conférences, tant au Québec qu’à l’étranger, qui m’ont permis
de voir de près l’industrie du béton.
Ce projet de recherche n’aurait pu être réalisé sans l’aide de nombreuses personnes. Pour
commencer, je ne peux passer sous silence l’aide que les trois « bros » Mathieu Durand-
Jézéquel, Éric Bard et Alex Frenette-Tremblay m’ont apportée dans le laboratoire. Malgré
leurs tendances à la folie, ceux-ci m’ont grandement aidé (et diverti) et la vérité est que je
n’aurais pu réaliser ce projet sans leur aide. J’adresse un remerciement particulier à
Mathieu pour avoir prépesé un total de 6 tonnes de matériaux secs pour moi. Je tiens
également à remercier Julien-Pierre Picard-Fortin pour son aide précieuse avec Matlab. Je
remercie également Mathieu Thomassin, responsable du laboratoire, pour son écoute et son
aide avec les nombreux essais et commandes. Son incapacité à être découragé m’a remonté
le moral à de nombreuses reprises et m’a ainsi permis de passer à travers les nombreux bris
et cadenassage d’équipements. Je tiens également à remercier René Malo et Serge
Plamondon de leurs aides dans le laboratoire.
Un des avantages d’une maîtrise en béton projeté est les liens que l’on crée avec les autres
membres de l’équipe. Je tiens donc à remercier tous les membres de l’équipe de béton
projeté que j’ai eu la chance et le privilège de côtoyer, soit Jean-Michel Royer, Sébastien
Girard, Nicolas Ginouse et Patrick Power. Je tiens à remercier plus spécialement les deux
derniers qui m’ont accompagné tout au long de ma maîtrise. Nico m’a diverti tout au long
v
de mon projet avec ses incroyables expressions de son patelin natal tandis que Pat a été
mon compagnon de bureau toutes ces nombreuses soirées/nuits à travailler à l’université.
Je tiens également à remercier tous mes collègues qui ont rendu la vie de bureau si
divertissante. Je pense ici à Dominique Beaulieu, Nicolas Rouleau, François Pépin,
François Pissot, Benoit Cusson, Lucie Charotte et bien d’autres.
Je tiens à remercier ma famille pour son support inconditionnel à tous mes projets. Le
soutien qu’ils m’accordent est d’une grande aide même s’ils n’en ont pas connaissance.
Pour terminer, je tiens à remercier Suzie pour son aide dans la correction de ce mémoire et
pour son support de tous les jours. Sans elle, je n’aurais pu terminer cette maîtrise si
rapidement.
à ma famille qui m’a toujours soutenu dans
tout ce que j’entreprends
Table des matières
Résumé ................................................................................................................................... ii Abstract ................................................................................................................................. iii Avant-Propos ......................................................................................................................... iv Table des matières ............................................................................................................... vii Liste des tableaux .................................................................................................................... x Liste des figures ..................................................................................................................... xi
Chapitre 1 - Introduction ..................................................................................................... 1 1.1 Introduction générale ................................................................................................. 1 1.2 Mise en contexte ........................................................................................................ 2 1.3 Objectif ...................................................................................................................... 3 1.4 Structure du document ............................................................................................... 4
Chapitre 2 - Revue de documentation ................................................................................. 5 2.1 Introduction ................................................................................................................ 5 2.2 Le béton projeté ......................................................................................................... 5
2.2.1 Procédé par voie sèche ........................................................................................ 5 2.2.2 Procédé par voie humide..................................................................................... 7 2.2.3 Particularités du béton projeté ............................................................................ 9
2.3 Les bétons fibrés ...................................................................................................... 10 2.3.1 L’orientation des fibres ..................................................................................... 11 2.3.2 Les différents comportements des bétons fibrés ............................................... 13
2.4 L’hydratation des systèmes cimentaires .................................................................. 15 2.4.1 Hydratation des systèmes traditionnels............................................................. 16 2.4.2 Hydratation des sulfoaluminates de calcium .................................................... 17 2.4.3 Hydratation des systèmes OPC-CAC- ............................................................ 20
2.5 Conclusion ............................................................................................................... 24
Chapitre 3 - Assemblage d’un liant pour béton projeté .................................................... 26 3.1 Introduction .............................................................................................................. 26 3.2 Matériaux ................................................................................................................. 26
3.2.1 Constituants des bétons ..................................................................................... 26 3.2.2 Adjuvant............................................................................................................ 28
3.3 Programme expérimental ......................................................................................... 28 3.3.1 Mortier de béton équivalent (MBE).................................................................. 29 3.3.2 Formulations ..................................................................................................... 30 3.3.3 Procédure de mise en place ............................................................................... 32 3.3.4 Essai de résistance en compression .................................................................. 33 3.3.5 Stabilité volumique ........................................................................................... 33
3.4 Résultats ................................................................................................................... 34 3.4.1 Quantités d’adjuvant ......................................................................................... 34 3.4.2 Résistance en compression et stabilité volumique ............................................ 34
3.5 Analyse des résultats ................................................................................................ 39
viii
3.5.1 Limite expansive ............................................................................................... 39 3.5.2 Résistance en compression ............................................................................... 42 3.5.3 Détermination de la formulation retenue .......................................................... 47
Chapitre 4 - Béton projeté par voie sèche fibré ................................................................ 49 4.1 Introduction .............................................................................................................. 49 4.2 Matériaux et équipement ......................................................................................... 49
4.2.1 Fibres ................................................................................................................ 50 4.2.2 Projection .......................................................................................................... 50
4.3 Essai Phase 2 ........................................................................................................... 54 4.3.1 Préparation des projections ............................................................................... 54 4.3.2 Essais ................................................................................................................ 55
4.4 Résultats Phase 2 ..................................................................................................... 56 4.4.1 Projection .......................................................................................................... 57
4.5 Analyse des résultats ................................................................................................ 59 4.5.1 Projection avec fibres semi-rigides ................................................................... 59 4.5.2 Projection avec fibres souples........................................................................... 60
4.6 Conclusion sur les bétons projetés fibrés par voie sèche ......................................... 61
Chapitre 5 - Béton projeté à ultra haute résistance initiale ............................................... 62 5.1 Introduction .............................................................................................................. 62 5.2 Matériau ................................................................................................................... 63
5.2.1 Les mélanges à base d’OPC-CAC- ................................................................. 65 5.2.2 Le mélange à base de sulfoaluminate de calcium ............................................. 65 5.2.3 Les mélanges à base de ciment Portland accéléré ............................................ 66 5.2.4 Formulations ..................................................................................................... 66
5.3 Projection préliminaire ............................................................................................ 67 5.4 Essais Phase 3 .......................................................................................................... 67
5.4.1 Essai de résistance en compression en jeune âge ............................................. 67 5.4.2 Essai de résistance en compression .................................................................. 68 5.4.3 Essai de résistance au gel-dégel ........................................................................ 68 5.4.4 Essai d’absorption ............................................................................................. 68 5.4.5 Détermination du module élastique .................................................................. 69 5.4.6 Essai de diffraction des rayons X ..................................................................... 69
5.5 Résultats Phase 3 ..................................................................................................... 69 5.5.1 Résultats de résistance en compression ............................................................ 69 5.5.2 Résultats de gel-dégel ....................................................................................... 71 5.5.3 Résultats d’absorption et de vide perméable .................................................... 71 5.5.4 Résultats de module de Young ......................................................................... 72 5.5.5 Résultats de diffraction au rayon X .................................................................. 73
5.6 Analyse des résultats ................................................................................................ 74 5.6.1 Paramètre de projection .................................................................................... 74 5.6.2 Résistance en compression ............................................................................... 74 5.6.3 Gel-dégel ........................................................................................................... 76 5.6.4 Absorption ........................................................................................................ 77 5.6.5 Module de Young ............................................................................................. 80 5.6.6 Diffraction des rayons X ................................................................................... 81
ix
5.7 Conclusion ............................................................................................................... 84
Chapitre 6 - Conclusion .................................................................................................... 86 6.1 Introduction .............................................................................................................. 86 6.2 Conclusions générales .............................................................................................. 86 6.3 Recherches futures ................................................................................................... 88
Bibliographie ........................................................................................................................ 90
Annexe 1 ............................................................................................................................... 94 Annexe 2 ............................................................................................................................. 107 Annexe 3 ............................................................................................................................. 111
Liste des tableaux
Tableau 3.1 : Principaux oxydes du ciment Portland et du Ciment Fondu® utilisés ............ 27
Tableau 3.2 : Formulation du mélange de base testé à la Phase 1 ....................................... 31 Tableau 3.3 : Résultats Phase 1 - Formulation simple ......................................................... 35 Tableau 3.4 : Résultats Phase 1 - Formulation binaire ......................................................... 35 Tableau 3.5 : Résultats Phase 1 - Formulation ternaire avec CaSO4 hémihydrate .............. 36 Tableau 3.6 : Résultats Phase 1 - Formulation ternaire avec CaSO4 anhydre ...................... 37 Tableau 3.7 : Différences d'oxydes entre les études ............................................................. 41 Tableau 3.8 : Résumé des formulations les plus performantes à 3h ..................................... 46 Tableau 3.9 : Composition des principaux composés de deux mélanges ternaires .............. 47 Tableau 4.1 : Caractéristique des fibres utilisées dans le cadre de la Phase 2 ..................... 50 Tableau 4.2 : Dosage en fibre des projections de la Phase 2 ................................................ 57 Tableau 5.1 : Information sur les formulations de la Phase 3 .............................................. 64 Tableau 5.2 : Composition des mélanges produits en laboratoire ........................................ 66 Tableau 5.3 : Résultats de résistance en compression [MPa] ............................................... 70 Tableau 5.4 : Facteur de durabilité des formulations ............................................................ 71 Tableau 5.5 : Résultats d'absorption et de vides perméables ................................................ 71 Tableau 5.6 : Résultats de module élastique ......................................................................... 73 Tableau 5.7 : Importance relative des composés détectés par DRX ..................................... 73 Tableau 5.8 : Critères de qualité de Morgan ......................................................................... 78 Tableau 5.9 : Qualification des mélanges projetés en fonction des critères de Morgan ....... 78 Tableau A.1 : Dosage d’Eucon SPC ................................................................................... 110
Liste des figures
Figure 2.1 : Schématisation du procédé par voie sèche .......................................................... 6 Figure 2.2 : Schématisation du procédé par voie humide ....................................................... 8 Figure 2.3 : Orientations des fibres ....................................................................................... 12 Figure 2.4 : Facteur d'efficacité des fibres en fonction de leur orientation .......................... 12 Figure 2.5 :Comportement possible des bétons fibré ........................................................... 14 Figure 2.6 : Répartition temporelle des constituants durant l'hydratation d'un ciment CSA 19 Figure 2.7 : Diagramme ternaire avec limite expansive approximative ............................... 21 Figure 2.8 : Évolution et expansion à travers le temps de différents composés ................... 23 Figure 3.1 : Schématisation du concept de mortier de béton équivalent (MBE) .................. 30 Figure 3.2 : Pied à coulisse modifié ...................................................................................... 33 Figure 3.3 : Emplacement des formulations ......................................................................... 35 Figure 3.4 : Exemple de formulations expansives à base de sulfate de calcium .................. 36 Figure 3.5 : Formulation expansive à base de CaSO4 anhydre ............................................. 38 Figure 3.6 : Optimisation des formulations à partir de 40/40/20 .......................................... 39 Figure 3.7 : Mélanges expansifs par rapport à la limite expansive ....................................... 40 Figure 3.8 : Prise éclair avec des mélanges d’OPC et de CAC ............................................ 43 Figure 3.9 : Résistance en compression à 3h avec CaSO4 anhydre ...................................... 44 Figure 3.10 : Résistance en compression à 28j avec CaSO4 anhydre ................................... 44 Figure 3.11 : Résistance en compression à 3h avec CaSO4 hémihydrate ............................. 45 Figure 3.12 : Résistance en compression à 28j avec CaSO4 hémihydrate ............................ 45 Figure 3.13 : Emplacement de la formulation choisie .......................................................... 48 Figure 4.1 : Salle de projection ............................................................................................. 51 Figure 4.2 : Canon à béton projeté par voie sèche (à gauche) et lance hydromix (à droite) 52 Figure 4.3 : Schématisation du système d'acquisition .......................................................... 53 Figure 4.4 : Prémalaxage des matériaux secs avant la projection ........................................ 54 Figure 4.5 : Appareillage utilisé pour la réalisation du " End Beam Test" ........................... 55 Figure 4.6 : Bouchon de fibre lors de la projection du mélange Matrix 1% ........................ 58 Figure 4.7 : Amoncèlement de fibres lors de la projection du mélange PVA 2,5% ............. 59 Figure 4.8 : Schématisation des hypothèses responsable des mauvaises projections ........... 61 Figure 5.1 : Expansion observée sur le mélange DRY au cours de l'essai d'absorption ....... 72 Figure A.1 : Dosage d’Eucon SPC utilisé en fonction de la formulation [ml] ................... 110 Figure A.2 : Résultats d’analyse DRX à 3h ........................................................................ 112 Figure A.3 : Résultats d’analyse DRX à 6h ........................................................................ 112 Figure A.4 : Résultats d’analyse DRX à 1j ......................................................................... 113 Figure A.5 : Résultats d’analyse DRX à 7j ......................................................................... 113 Figure A.6 : Résultats d’analyse DRX à 28j ....................................................................... 114 Figure A.7 : Résultats d’analyse DRX à 56j ....................................................................... 114 Figure A.8 : Résultats d’analyse DRX à 90j ....................................................................... 115 Figure A.9 : Résultats d’analyse DRX à 120j ..................................................................... 115
Chapitre 1 - Introduction
1.1 Introduction générale
Le béton est un des plus anciens matériaux de construction manufacturés par l’homme. Des
vestiges découverts en Galilée (Israël) permettent d’affirmer que l’utilisation du béton a
commencé il y a plus de 7000 ans (Kosmatka et coll. 2004). Les premiers
bétons « modernes » à base de ciment Portland ont été développés au début du 19e siècle, et
ont depuis subi de nombreuses modifications, tels que le raffinement des grains de ciment
ou encore le contrôle accru de leurs phases minéralogiques. Ce type de liant hydraulique est
de loin la base cimentaire la plus utilisée dans le monde. C’est un liant très polyvalent et les
cimentiers offrent aujourd’hui plusieurs types de ciment Portland aux propriétés variées
(prise rapide, résistance aux sulfates, etc.). Cependant, les besoins récents de l’industrie se
sont à la fois élargis et raffinés, et le ciment Portland ne peut dorénavant plus répondre à
tous les besoins.
Le béton a fait l’objet de nombreuses recherches qui ont mené au développement de
nouveaux matériaux possédant des caractéristiques très spécifiques. La recherche sur la
phase liante des bétons vise plusieurs aspects, que ce soit le comportement rhéologique, le
temps de prise, la durabilité ou le développement des résistances mécaniques. Ces
nombreux champs de recherches ont tous pour finalité de permettre une meilleure
compréhension du comportement global du béton afin d’en tirer les meilleurs avantages en
tant que matériau de construction. Ces études ont développé l’intérêt porté aux différentes
bases cimentaires comme les ciments d’aluminate de calcium, de phosphates de
magnésium, de sulfoaluminate de calcium ou encore des ciments formés de la combinaison
de plusieurs bases cimentaires.
2
En plus des nombreuses innovations apparues dans le domaine des matériaux constituant le
matériau béton, les techniques de mise en place se sont à la fois raffinées et diversifiées
depuis l’arrivée des bétons modernes. L’une de ces diversifications est le béton projeté;
développé au début du XXe siècle par Carl E. Akeley (Austin et Robins 1995), le béton
projeté se définit comme étant un mortier ou un béton projeté à grande vitesse sur une
surface (ACI-506.R 2005). Cette méthode de mise en place, principalement utilisée pour le
support de terrain, la construction de piscine et le domaine minier, peut également être
utilisée pour la réparation d’ouvrages d’art. Cette technique est particulièrement efficace
lorsqu’utilisée sur des surfaces courbes ou irrégulières. En effet, la capacité du béton
projeté à bien adhérer au substrat permet une mise en place sans coffrage.
1.2 Mise en contexte
Parmi les nouvelles matrices cimentaires récemment étudiées, les matrices ternaires à base
de ciment Portland (OPC), d’aluminates de calcium (CAC) et de sulfate de calcium ( ) ont
montré des comportements mécaniques très intéressants. Ce type de composition
cimentaire permet d’atteindre des résistances en bas âge très élevées (plus de 10 MPa à 1h)
ainsi qu’une certaine compensation du retrait (Evju et Hansen 2001). Responsable de ce
comportement, l’ettringite est l’hydrate principal de ce type de matrice, contrairement au
béton traditionnel à base de ciment Portland qui produit des C-S-H. Cette grande quantité
d’ettringite entraine des temps de prise inférieurs à 10 minutes, ce qui limite l’utilisation de
ce type de système cimentaire à des modes de construction non traditionnels. Les matrices à
base d’OPC-CAC- sont donc bien adaptées à plusieurs réalités de chantiers qui requièrent
un développement rapide des résistances mécaniques, comme le domaine minier, à la
condition qu’une mise en place adéquate puisse être effectuée.
Un mode de construction particulier qui répond à cette condition est le béton projeté par
voie sèche. En effet, puisque le contact eau-ciment se produit que 1/20 à 1/2 seconde avant
la mise en place (Jolin 1999), il est possible de contourner les problèmes de temps de prise
rapides et de perte de maniabilité sans avoir recours à une adjuvantation lourde et
complexe. De plus, les temps de prise très courts sont en fait un avantage potentiel en
permettant une plus grande épaisseur de projection. L’utilisation de ces matrices OPC-
3
CAC- n’est cependant pas sans risque. Une erreur de proportion entre les différents
constituants peut entrainer une expansion incontrôlée de la pâte de ciment menant à la ruine
du matériau (Lamberet 2005). Malgré les nombreux avantages inhérents aux matrices
d’OPC-CAC- , elles demeurent cependant peu résistantes en traction. L’ajout de fibres
pourrait potentiellement combler cette lacune si un volume suffisant était incorporé à la
matrice. Encore une fois, de par la technique de mise en place, le béton projeté par voie
sèche admet l’incorporation d’un haut volume de fibres sans que la perte de maniabilité
normalement rencontrée vienne nécessairement compliquer la mise en place du matériau.
Un comportement de type écrouissant pourrait même être obtenu si un volume de fibres
suffisant était incorporé (Naaman 2008).
Malgré les nombreuses améliorations apportées à la fois aux matériaux et aux méthodes de
mise en place, l’industrie recherche toujours des bétons plus performants afin d’augmenter
leur efficacité et ainsi mieux faire face aux nouvelles réalités de chantier. C’est avec cette
idée à l’esprit que ce projet de recherche a été entamé.
1.3 Objectif
L’objectif principal de ce projet est de développer un mélange de béton projeté par voie
sèche possédant de très hautes résistances initiales et un comportement post-fissuration
optimisé. Pour atteindre cet objectif, quatre objectifs secondaires ont été définis :
1. Déterminer la formulation d’un mortier à base d’OPC-CAC- ayant un
comportement volumique stable et offrant les meilleures résistances en jeune âge
(Phase I);
2. Déterminer le pourcentage de fibres à incorporer au béton projeté afin d’obtenir un
comportement écrouissant en flexion (Phase 2);
3. Procéder à la projection d’un béton à matrice ternaire fibré afin de valider
l’utilisation de l’équipement et des pratiques usuelles du béton projeté (Phase 3);
4. Finalement, caractériser le béton projeté développé (Phase 3).
4
L’étude réalisée dans le cadre de cette maîtrise est de nature exploratoire et cherche à
enquêter sur le potentiel d’utilisation de ce type de liant en béton projeté. La prétention de
ce projet de recherche n’est donc pas de couvrir l’ensemble du domaine des ciments à prise
rapide, mais plutôt de fournir une idée générale du comportement des matrices OPC-CAC-
en béton projeté.
1.4 Structure du document
Au commencement de ce projet, un protocole initial était envisagé. Cependant, selon les
résultats obtenus, le déroulement du projet a toujours été sujet à des changements. De par sa
nature exploratoire, la présentation de ce projet de recherche peut difficilement suivre les
divisions traditionnelles d’un mémoire de maîtrise. Cette étude est donc divisée en trois
phases distinctes. Chacune des phases fait l’objet d’un chapitre et présente les matériaux
utilisés et la méthodologie suivie, les résultats obtenus ainsi que l’analyse y étant associée.
Cette approche permet de bien suivre le déroulement du projet puisque les résultats des
Phases I et II sont à l’origine des choix faits à la Phase 3.
Donc, suivant la présente introduction, le chapitre 2 permettra de mettre en lumière les
aspects théoriques importants à la compréhension de l’ensemble du projet à travers une
revue de la documentation pertinente. Il y sera premièrement question du béton projeté en
tant que méthode de mise en place et comme matériau. Par la suite, les concepts nécessaires
à la compréhension de l’effet des fibres dans le béton sont abordés. La dernière partie de la
revue de la documentation présente l’hydratation des matrices cimentaires menant à la
formation d’ettringite. Le chapitre 3 présente la Phase 1 de ce projet, qui consiste à
identifier la formulation optimale à base d’OPC-CAC- . Le chapitre 4 présente les
projections à haut volume de fibre et la recherche du comportement écrouissant (Phase 2).
Le chapitre 5 présente la projection préliminaire à partir de la formulation retenue au
chapitre 3 ainsi que la caractérisation du mélange ternaire développé (Phase 3). Pour
terminer, le chapitre 6 présente les conclusions générales de ce projet.
Chapitre 2 - Revue de documentation
2.1 Introduction
Ce chapitre présente une revue de documentation permettant de bien saisir les principaux
concepts qui ont servi de base à l’élaboration du projet de recherche réalisé. Cette revue de
documentation est divisée en 3 parties principales qui touchent chacune un élément
incontournable de ce travail. En premier lieu, le béton projeté est présenté en s’attardant
aux méthodes disponibles, puis en présentant les particularités du matériau et de la mise en
place. La deuxième partie présente des éléments théoriques reliés aux fibres et à leur
comportement. Finalement, l’hydratation des matrices cimentaires sera expliquée en
mettant de l’avant les réactions formant de l’ettringite à partir de composés tels que les
C3A, les sulfoaluminates de calcium et les matrices ternaires à base de OPC-CAC- .
2.2 Le béton projeté
Le béton projeté est avant tout une méthode de mise en place, mais il est parfois plus
simple de référer au matériau en tant que béton projeté. Deux méthodes différentes sont
existantes pour mettre en place le béton par projection, le procédé par voie sèche et le
procédé par voie humide. Chacun de ces procédés est décrit dans les sous-sections qui
suivent.
2.2.1 Procédé par voie sèche
Le procédé par voie sèche tire son nom de la méthode de transport des matériaux dans les
canalisations. En effet, l’ensemble des matériaux est sec lors de leur introduction et durant
la majeure partie de leur transport dans les canalisations, qui s’effectue exclusivement à
l’aide d’air comprimé. Un canon (ou machine de projection) reçoit les matériaux puis
6
assure leur insertion dans les canalisations selon différentes méthodes propres au type
d’équipement utilisé (barillet rotatif, bol rotatif, chambre simple ou double) (ACI-506.R
2005). L’eau est introduite tout juste avant la sortie de la lance par l’intermédiaire d’un
anneau de mouillage. La quantité d’eau ajoutée à la lance est fonction de nombreux
paramètres, tel la présence et la grosseur des aciers d’armature, la forme de la surface
réceptrice, etc. C’est lors de la mise en place que le lancier détermine la quantité d’eau
nécessaire en contrôlant une valve placée sur la lance. La figure 2.1 schématise le procédé
par voie sèche.
Figure 2.1 : Schématisation du procédé par voie sèche
L’emplacement de l’anneau de mouillage est variable selon le type de lance utilisé pour la
projection. Lorsqu’une lance de type « hydromix » (ou lance longue) est utilisée, l’anneau
se situe à environ 2-3 mètres avant la sortie de la lance, tandis que lorsqu’une lance courte
est utilisée, l’anneau se situe à même la lance, soit à environ 0,3 mètre de la sortie.
L’expérience du lancier est primordiale dans ce procédé, car il contrôle directement la
teneur en eau du mélange projeté. Il est donc non pertinent de spécifier un rapport eau-
ciment (E/C) pour l’utilisation de ce procédé. Ainsi, lors d’une projection par voie sèche, le
7
lancier vise plutôt une consistance et non un rapport E/C précis. Généralement, la
consistance recherchée est la « wettest stable consistancy » (Jolin 1999), soit la consistance
la plus humide possible sans compromettre l’adhérence et la stabilité du béton à la surface
réceptrice. Cette consistance facilite la mise en place sur une surface réceptrice encombrée
d’armatures, diminue les poussières de projection et le rebond, et facilite en plus la finition.
Les avantages du béton projeté par voie sèche sont nombreux. Un de ceux-ci est qu’il
permet des arrêts/départs faciles et rapides de la projection. En effet, puisque le mélange
transporté ne contient pas d’eau et que les boyaux se vident en quelques secondes, un arrêt
prolongé ne peut entrainer la prise du béton dans les canalisations. De plus, l’ajout de l’eau
quelques instants avant la mise en place permet de contourner les problèmes causés par un
béton à la maniabilité déficiente. Un autre avantage est que l’ajustement de la consistance
du matériau est fonction des conditions de chantier réel. Le matériau est donc parfaitement
adaptable à chaque situation.
Ce procédé présente cependant quelques désavantages. Puisque le lancier ajuste la
consistance durant la projection, un contrôle de la qualité du matériau par le rapport E/C est
difficile à faire. La qualité de la mise en place est liée à l’expérience du lancier. Il est
fortement recommandé que le lancier soit certifié par l’ACI (ACI-C660 2002; ACI-506.R
2005). Il est également important de spécifier que cette technique de mise en place ne
permet pas d’obtenir une production aussi rapide qu’avec le procédé par voie humide.
2.2.2 Procédé par voie humide
Lorsque le procédé par voie humide est utilisé, le béton est en premier lieu gâché selon des
méthodes traditionnelles, tel que dans une bétonnière ou encore dans un malaxeur. Le béton
frais est par la suite pompé à travers des canalisations à l’aide d’une pompe à béton. Tout
juste avant la sortie de la lance, un jet d’air sous pression propulse à haute vitesse le béton
sur la surface réceptrice. La figure 2.2 schématise le procédé par voie humide.
8
Figure 2.2 : Schématisation du procédé par voie humide
Le procédé par voie humide comporte certains avantages très intéressants. Cette technique
de mise en place permet la production d’un débit de béton élevé. Le débit moyen pouvant
être atteint avec cette technique (environ 9 m3/heure) est de loin supérieur à celui obtenu
avec le procédé par voie sèche (environ 4 m3/heure). Un autre avantage de cette technique
est que la composition exacte du béton projeté est connue avant la projection. Le rapport
E/C est donc connu à la sortie de la lance ce qui rend le contrôle de la qualité plus facile.
De plus, puisque le béton est déjà à l’état plastique à l’entrée des canalisations, le procédé
par voie humide a tendance à produire un béton projeté plus homogène qu’avec le béton
projeté par voie sèche. Le procédé humide entraine également en une diminution notable
des poussières de projection et du rebond.
Cependant, puisque le béton frais est pompé et non transporté par de l’air comprimée à
travers les canalisations, la lance est beaucoup plus lourde, ce qui rend son déplacement
difficile. Le procédé par voie humide est plus demandant physiquement pour le lancier.
Également, puisque le béton dans les canalisations est déjà malaxé, donc déjà en contact
avec l’eau, il est risqué d’effectuer des arrêts prolongés sans devoir complètement vider les
canalisations. Il s’ensuit que les arrêts imprévus et prolongés peuvent être plus couteux
9
lorsque le procédé par voie humide est utilisé. Il est également important de noter que
puisque le béton est pompé à travers des boyaux, le béton doit posséder une bonne
maniabilité/pompabilité. Il est donc plus difficile de contourner les problèmes de
maniabilité comme dans le procédé par voie sèche.
2.2.3 Particularités du béton projeté
Le rebond est une des plus grandes particularités du béton projeté et une des plus
importantes différences par rapport au béton coulé traditionnel. Ce phénomène est définit
comme étant la portion grossière du matériau projeté qui frappe le substrat sans y adhérer.
Cette fraction non adhérente entraine des coûts supplémentaires en matériau (davantage de
matériau doit être projeté sur la surface pour obtenir l’épaisseur désirée) et en main d’œuvre
(la portion ayant rebondi doit parfois être évacuée). Les pourcentages de rebonds pour
chaque procédé sont très variables, mais il est généralement admis que le procédé par voie
humide produit moins de rebonds que la voie sèche. Ainsi, le procédé par voie humide
génère des rebonds compris entre 5% à 15% tandis que le procédé par voie sèche présente
des rebonds de l’ordre de 15% à 25% (Jolin et Lacombe 2000).
Le rebond entraine de nombreuses incidences sur le matériau en place. Puisque le rebond
est davantage constitué de granulats que de pâte, le contenu de pâte en place est supérieur à
celui du mélange projeté (Jolin 1999). C’est principalement la pâte qui permet au béton
projeté d’adhérer au substrat. Lorsqu’il n’y a pas suffisamment de pâte, le rebond des
granulats augmente énormément ce qui se traduit par un rebond général plus élevé. Ainsi, la
teneur en pâte du matériau en place s’ajuste automatique, elle subit un « autoajustement »
(Armelin 1997).
Il est donc complexe de diminuer le rebond dû à cet « autoajustement ». Les moyens les
plus efficaces et les plus courants sont l’ajout de fumée de silice (Morgan et coll. 1987) et
le respect des granulométries optimisées, tel que celles proposées par le Guide to Shotcrete
(ACI-506.R 2005). Il existe aussi des règles de bonnes pratiques qui ont pour but de
diminuer le rebond, mais également d’augmenter l’homogénéité et la compaction du
matériau. Les principales règles de bonne pratique sont décrites à la page suivante.
10
Lors d’une projection, la lance doit être positionnée perpendiculairement au
substrat.
La distance adéquate entre la sortie de la lance et le substrat est de 0,9 à 1,2 mètre (3
à 4 pieds).
Les proportions des constituants d’un mélange de béton projeté ne sont pas les
mêmes que celles d’un béton coulé. Une formulation de béton projeté typique
contient environ 410 kg/m3 de ciment, 1000 kg/m
3 de sable et 600 kg/m
3 de pierre.
Lors de l’utilisation du procédé par voie sèche, l’obtention de la « wettest stable
consistency », est atteinte lorsque le béton projeté possède un léger film d’eau en
surface et lorsque les gros granulats pénètrent à une profondeur équivalente à
environ une fois leur diamètre dans le béton frais.
Une quantité importante de poussières de projections est une bonne indication d’un
problème (débit d’air trop faible ou trop fort, consistance trop sèche, etc.).
Le diamètre maximal du gros granulat ne doit pas être supérieur au tiers du diamètre
des canalisations utilisées.
La projection devrait se produire en effectuant des mouvements circulaires avec la
lance afin de faciliter l’homogénéisation du matériau en place.
Ces éléments et plusieurs autres règles de bonne pratique, peuvent facilement être retrouvés
dans la littérature (ACI-506.R 2005; CP-60 2009) . Il est important de noter qu’il ne s’agit
pas d’une liste exhaustive et que la lecture du Guide to Shotcrete et CP-60 se révèle
incontournable pour bien comprendre toutes les ramifications techniques et pratiques de
base du béton projeté.
2.3 Les bétons fibrés
Depuis quelques années, des bétons dits « écrouissants » ou « pseudo écrouissants » sont
apparus dans les laboratoires de recherches. Ces bétons incorporent de hauts volumes de
fibres produisant un matériau très tenace et capable de résister à de grande déformation. Ils
offrent donc un potentiel d’utilisation fort intéressant dans le domaine des réparations ou du
support de terrain (Kim et coll. 2004; Li et coll. 2009).
11
Le but de cette section n’est pas de faire une description exhaustive des propriétés des
fibres et des bétons fibrés, mais plutôt de présenter les propriétés pertinentes à l’usage des
fibres dans le béton projeté. Il sera premièrement question de l’influence de l’orientation
des fibres dans le béton. Par la suite, les deux comportements des bétons fibrés,
adoucissants et écrouissant, sont présentés.
2.3.1 L’orientation des fibres
L’efficacité des fibres est directement reliée à leur capacité à intercepter les fissures.
L’orientation des fibres est donc importante, car les fissures structurales apparaissent à des
endroits et orientations bien précises selon le type de sollicitation. Ainsi, sur une poutre en
béton armé sollicité en flexion positive, les fissures apparaitront à la face inférieure de la
poutre, perpendiculaire au champ de contrainte. L’orientation des fibres peut être contrôlée,
dans une certaine mesure, par les techniques de mise en place. Ainsi, pour un béton
renforcé de fibres, les orientations possibles sont celles représentées par les fibres
discontinues sur la figure 2.3. Il existe plusieurs façons d’obtenir une orientation 2-D.
L’utilisation de béton projeté est l’une de celles-ci. Lors de la projection, les fibres
s’alignent parallèlement au substrat dans un plan en deux dimensions. Dans un béton coulé
et pompé, une survibration dans les ouvrages de masse en béton fibré avec un ratio
longueur de fibres sur épaisseur du composé assez élevé peut également entrainer une
distribution sur un plan 2D (Bentur et Mindess 2007). Dans un béton pompé, il est possible
d’avoir près des coffrages une orientation préférentielle des fibres, tel qu’illustré sur la
figure 2.3. Cependant, dans une coulée bien réalisée, les fibres auront généralement une
orientation sur trois dimensions aléatoire.
12
Figure 2.3 : Orientations des fibres tirées de (Bentur et Mindess 2007) à gauche et de
(Boulekbache et coll. 2009) à droite
Bentur (Bentur et Mindess 2007) présente un facteur d’efficacité des fibres selon leur
orientation. La figure 2.4 montre que le type de distribution des fibres dans un béton
contribue fortement à sa capacité à reprendre des efforts. Il est également possible
d’observer que lorsque l’orientation des fibres passe d’une distribution 3D à 2D, l’efficacité
des fibres augmente d’environ 94%. Il est donc très bénéfique d’orienter les fibres dans le
béton.
Figure 2.4 : Facteur d'efficacité des fibres en fonction de leur orientation (Bentur et
Mindess 2007)
13
2.3.2 Les différents comportements des bétons fibrés
Les bétons fibrés présentent deux comportements structuraux possibles, un comportement
adoucissant ou un comportement écrouissant. Il est important de bien différencier les deux
comportements, puisque le second présente une ténacité bien supérieure au premier. Ces
différents comportements sont directement liés à la quantité de fibres que la matrice
cimentaire incorpore. Ainsi, avec un taux de fibre typique de 0,5% le béton obtenu possède
un comportement adoucissant. Cependant, si un taux de fibres élevé (de 1,4% à 4%) est
incorporé au mélange, il est possible d’obtenir un comportement écrouissant (Naaman
2008).
2.3.2.1 Comportement adoucissant
Le comportement adoucissant est la réponse d’un béton possédant un faible volume de fibre
à une sollicitation externe. Ce comportement implique que la contrainte postfissuration est
inférieure à la contrainte nécessaire à l’apparition de la première fissure. Ainsi, une fois que
l’élément est fissuré, la capacité à reprendre les efforts de la pièce est grandement
diminuée. Une des caractéristiques principales reliées au comportement adoucissant est que
lors de la défaillance de la pièce, une seule macrofissure est présente.
Plusieurs chercheurs (Li 2002; Kim et coll. 2004; Naaman 2008) ont tenté d’augmenter la
résistance postfissuration d’un matériau afin d’améliorer la réponse structurale lors de la
fissuration des ouvrages en béton fibré. C’est dans cette optique que des bétons aux
comportements écrouissant ont été élaborés.
2.3.2.2 Comportement écrouissant
L’idée centrale du comportement écrouissant est que la contrainte reprise en postfissuration
est supérieure à la contrainte nécessaire pour former la première fissure. D’un point de vue
énergétique, ce type de béton possède un potentiel d’absorption d’énergie rehaussé et donc
une ténacité supérieure par rapport au béton fibré traditionnel (à comportement
adoucissant). Dans ce type de matrice, on observe un nombre élevé de fissures
(multifissuration) de la pièce de béton (zone II sur la figure 2.5).
14
Figure 2.5 :Comportement possible des bétons fibré (adapté de (Naaman 2007))
Une fois que le matériau ne peut plus supporter davantage de fissuration, un comportement
adoucissant classique se produit (zone III). À la ruine de l’élément, le béton présente donc
de multiples fissures et d’importantes déformations. C’est l’accumulation des déformations
au droit de ces fissures qui permet au béton d’absorber beaucoup d’énergie. Par exemple,
des déformations de l’ordre de 6 % (tiré de Li, cité dans (Naaman 2008)) ont été observées
sur des bétons écrouissant de type ECC (Engineered Cementitious Composite).
On distingue deux comportements écrouissants, soit écrouissant en tension et écrouissant
en flexion, et chacun est associé à un volume de fibre critique. Bien que le volume critique
varie selon le type de comportement écrouissant recherché, le volume critique en flexion est
toujours inférieur au volume de fibres critique en traction (Naaman 2008). De plus, si le
volume de fibre présent dans la matrice est inférieur au volume de fibre critique, le
matériau présente alors un comportement adoucissant.
Cette valeur du volume de fibre critique est fonction à la fois des fibres utilisées et de la
matrice cimentaire. Du côté des fibres, les principaux facteurs d’influence sont la
dimension des fibres (longueur et diamètre), la résistance en traction de la fibre ainsi que la
friction et l’adhérence que la fibre développe avec la matrice lorsque mise sous contrainte.
Il est possible d’augmenter mécaniquement la friction en modifiant la géométrie des fibres,
par exemple avec la présence de crochet aux extrémités, tandis que l’adhérence peut être
15
augmentée chimiquement à l’aide de fibre spéciale, telle que la fibre PVA qui crée un fort
lien chimique avec la matrice cimentaire (Li 2002). Du côté de la matrice cimentaire, c’est
principalement la résistance en traction ainsi que l’orientation des fibres qui influence le
volume de fibre critique.
Par exemple, dans un cas idéalisé de fibre ronde métallique orienté aléatoirement (3D), le
volume de fibres critiques pour l’obtention d’un comportement écrouissant en flexion est
de 1,41%, et de 3,85% pour le comportement écrouissant en traction (Naaman 2008). Dans
l’exemple précédent, le comportement écrouissant en flexion requiert 63 % moins de fibres
que le comportement écrouissant en traction.
Le calcul du volume de fibre critique comporte plusieurs limitations. Le calcul ne considère
que des cas parfaits idéalisés. Bien que les principaux facteurs géométriques soient faciles à
déterminer, d’autres facteurs tels que l’adhérence et la friction sont difficiles à déterminer.
De plus, certains facteurs (non présentés) peuvent être déterminés uniquement en effectuant
de l’ingénierie inverse sur un mélange possédant déjà un comportement écrouissant. Ce
dernier point implique qu’afin de déterminer le volume de fibre critique pour l’obtention
d’un béton au comportement écrouissant, il est nécessaire de réaliser des essais sur un béton
écrouissant.
Une autre limitation que ce calcul ne considère pas est qu’il n’est pas possible d’ajouter de
hauts volumes de fibres sans grandement affecter la maniabilité. Il est alors nécessaire
d’utiliser une forte adjuvantation afin de permettre la mise en place adéquate du béton selon
les techniques traditionnelles. En combinant le prix élevé des fibres à celui des adjuvants, il
en résulte un béton extrêmement coûteux.
2.4 L’hydratation des systèmes cimentaires
Un moyen efficace d’obtenir des hautes résistances en jeune âge est d’utiliser des matrices
cimentaires produisant une haute teneur en ettringite. La vitesse de formation de ce
composé est très rapide ce qui confère au système cimentaire un gain rapide de résistance
mécanique. Cet hydrate peut cependant créer de l’expansion si sa formation s’effectue
lorsque la matrice cimentaire est durcie (Collepardi 2003). Il est donc important de
16
comprendre comment l’ettringite se forme pour profiter des gains rapides de résistance
qu’il procure tout en empêchant l’expansion nocive. Pour ce faire, l’hydratation de trois
systèmes menant à la formation d’ettringite est présentée. En premier lieu, il sera question
de l’hydratation des C3A dans le ciment Portland et des phénomènes limitant la formation
d’ettringite dans ce type de liant. Par la suite, l’hydratation d’un liant formant beaucoup
d’ettringite lors de son hydratation sera présentée, soit les liants de sulfoaluminate de
calcium. En dernier lieu, l’hydratation de matrices ternaires à base d’OPC-CAC- est
présentée. L’ordre de présentation des différents systèmes est également significative. En
effet, le premier système cimentaire est très étudié et bien compris (bien qu’il subsiste
encore des incertitudes) tandis que le secondaire est beaucoup moins bien compris mais
gagne de plus en plus en popularité. Pour ce qui est de l’hydratation des systèmes OPC-
CAC- , seules quelques publications sont disponibles sur le sujet. Le milieu scientifique est
encore au commencement de la compréhension à propos de ce sujet.
2.4.1 Hydratation des systèmes traditionnels
Dans le ciment à base d’OPC, c’est l’hydratation des C3A qui est à l’origine de la formation
de l’ettringite. L’hydratation des C3A a une influence majeure sur la prise d’un béton à base
de ciment Portland. Sans gypse, source de sulfate de calcium, ajouté volontairement lors du
broyage du clinker, l’hydratation des C3A serait très rapide, ne permettant pas une mise en
place appropriée. En ajoutant un faible pourcentage de sulfate de calcium (≈ 2 à 4%
massique), la cinétique d’hydratation est complètement modifiée. En effet, la présence de
CaSO4 ralentit l’hydratation des C3A (phase dormante) tant que le sulfate n’est pas
complètement épuisé. Sans le sulfate, les C3A serait responsable de la prise du béton
(Neville 2008). Malgré que l’appellation de période dormante soit couramment utilisée
pour désigner l’hydratation en jeune âge des C3A en présence de gypse, il s’agit plutôt
d’une période de faible activité chimique durant laquelle cette phase minéralogique fournit
des ions Al2+
permettant de former de l’ettringite. Une fois que la source de sulfate en
solution s’est tarie (le gypse), la réaction suivante prend place, soit la transformation de
l’ettringite (Aft) en monosulfoaluminate (Afm) (Bullard et coll. 2011):
+ + (2.1) (C3A) (Ettringite) (Eau) (Afm)
17
La formation d’Afm est tout à fait normale dans un béton à base de ciment Portland.
Cependant, cet hydrate peut causer certains problèmes en cas d’attaque sulfatique. Dans les
attaques sulfatique externes, l’Afm se combine à l’eau et au gypse afin de produire de
l’ettringite (qui alors cause de l’expansion). Lors d’une attaque sulfatique interne, l’Afm
peut se dissoudre si la température devient supérieure à 70°C devenant ainsi une source de
sulfate (Collepardi 2003). Les attaques sulfatiques nécessitent plusieurs conditions bien
précises pour se produire et la formation d’Afm n’est généralement pas problématique.
La période dormante des C3A a longtemps été associée à la création d’une barrière à la
diffusion formée par l’ettringite ou par le monosulfoaluminate. Cependant, de récentes
études ont démontré que la diminution de l’activité chimique des C3A est due à l’adsorption
de soluté formé lors de la dissolution de sulfate de calcium (Bullard et coll. 2011). Lorsque
le sulfate en solution est complètement incorporé à l’ettringite, le sulfate adsorbé retourne
en solution pour équilibrer le système. Cela correspond alors à la fin de la période dormante
des C3A. Ce type de réaction se produit cependant seulement lorsque la concentration de
sulfate en solution est faible.
2.4.2 Hydratation des sulfoaluminates de calcium
Les ciments sulfoaluminate de calcium (CSA) ont une formulation bien différente des
ciments Portland traditionnels. Bien que la composition des CSA soit variée, ceux-ci
possèdent généralement plus de 50% massique de Ye’elimite, aussi appelé sel de Klein,
formulé C4A3 . En plus de cette phase majeure, les CSA contiennent plusieurs phases
mineures, telles que des C2S, CA, C4AF, CS et (García-Maté et coll. 2012). Ce type
de ciment est produit en mélangeant d’importantes quantités de sulfates de calcium au
clinker (Juenger et coll. 2011). Les CSA présentent certains avantages non négligeables à la
fabrication par rapport au ciment Portland. De par leur température de cuisson moins élevée
et un broyage facilité dû à leur grande porosité, leur fabrication est moins énergivore
(Bernardo et coll. 2006). D’un point de vue environnemental, les CSA relâchent moins de
CO2 par gramme de phase cimentaire majeure que le ciment Portland (Juenger et coll.
2011). Comme tous les ciments hydrauliques, l’hydratation des CSA dépend
principalement de ses phases minéralogiques. Selon Juenger et coll. (Juenger et coll. 2011),
l’hydratation de la Ye’elimite, de par sa prédominance, contrôle l’hydratation globale et
18
elle est influencée par la proportion de sulfates de calcium et de chaux hydratée présents
dans le système. La Ye’elimite seule réagit avec l’eau selon l’équation 2.2 et forme des
Afm et des hydroxydes d’aluminium :
+ + (2.2)
(Ye’elimite) (Eau) (Afm) (Hydroxyde d’aluminium)
Cette réaction est très lente car l’hydratation de la Ye’elimite s’accompagne d’une période
dormante de plusieurs heures. L’ajout de CaSO4 dihydrate (gypse), hémihydrate ou anhydre
modifie la cinétique de la réaction, qui devient beaucoup plus rapide. Ce comportement est
l’inverse de ce qui a été présenté pour le ciment Portland ou l’ajout de sulfate de calcium
crée une période dormante. Avec un ajout de sulfate de calcium, présenté ici sous forme de
gypse, la réaction 2.3 prend rapidement place pour former de l’ettringite et des hydroxydes
d’aluminium.
+
+
+
(2.3)
(Ye’elimite) (Gypse) (Eau) (Ettringite) (Hydroxyde
d’aluminium)
Si le système est déficient en sulfates, c’est la réaction présentée à l’équation 2.2 qui aura
lieu une fois tous les sulfates consommés. Le rapport stœchiométrique entre le Ye’elimite
et le sulfate de calcium étant de 1:2, il faut donc deux fois plus de sulfates de calcium que
de Ye’elimite pour ne former que de l’ettringite. La Ye’elimite peut également se combiner
aux hydroxydes de calcium pour former de l’ettringite selon l’équation 2.4.
+ + + (2.4) (Ye’elimite) (Gypse) (Chaux) (Eau) (Ettringite)
Comme il a été présenté, les CSA sont composées de nombreuses phases mineures qui
s’hydratent également. Le C2S est la phase mineure la plus communément présente, il est
donc pertinent de présenter sa réaction d’hydratation :
+ + (2.5) (Bélite) (Hydroxyde d’aluminium) (Eau) (Stratlingite)
L’hydratation de ces phases mineures entraine donc des produits de réaction différents de
ceux créés par l’hydratation de la Ye’elimite. Bien qu’en moins grande quantité, il est
difficile de savoir si ces hydrates mineurs demeurent stables dans le temps et si la présence
19
d’un autre composé pourrait venir compromettre sa stabilité. Bien que rien dans la
littérature ne laisse présager une interaction entre les hydrates principaux et les hydrates
secondaires, il est important de garder à l’esprit que les réactions présentées ici sont
simplifiées et que le système réel est beaucoup plus complexe.
Les quatre équations présentées précédemment schématisent la formation de 4 hydrates
principaux de ce type de liant. Leur répartition massique dans le temps est très variable. La
figure 2.6 illustre cette variabilité à travers le temps pour un ciment CSA avec un rapport
E/C de 0,80. La prédominance de l’ettringite tout au long de l’hydratation est bien visible.
Figure 2.6 : Répartition temporelle des constituants durant l'hydratation d'un ciment CSA
(Juenger et coll. 2011)
La figure illustre également la grande vitesse de réaction de ces systèmes. À partir de 50
heures, la vitesse de précipitation de l’ettringite diminue fortement tandis que les phases
mineures continuent de s’hydrater. Ce type de matrice possède des temps de prise de
l’ordre de 30 minutes à 4h (Juenger et coll. 2011). L’ettringite formée après la prise crée
donc des pressions internes qui peuvent être bénéfiques si contrôlées (compensation du
retrait) ou nocives si trop importantes.
20
2.4.3 Hydratation des systèmes OPC-CAC-
L’étude de ce système cimentaire présente de nombreux défis. Une des grandes difficultés
liées à ce type de système provient de sa formulation complexe. En effet, ce liant
cimentaire est produit à partir de 2 types de ciments (OPC et CAC) qui contiennent chacun
plusieurs phases minéralogiques bien distinctes en proportion et en composition. Celles-ci
jouent un rôle clé dans l’hydratation des systèmes OPC-CAC- . Le type de sulfates intégré
au système, sous forme de sulfate de calcium anhydre, hémihydrate ou dihydrate, joue
également un rôle important dans la cinétique des réactions. Ces systèmes peuvent être
classés selon leur composante majeure, soit majoritairement à base de CAC (zone 1 sur la
figure 2.7) ou principalement à base d’OPC (zone 2 sur la figure 2.7). Dans le cadre de
cette revue de la documentation, seule la présentation des systèmes ternaires
majoritairement composés de ciment d’aluminate de calcium est présentée, car ce type de
liant possède des résistances en jeune âge plus élevé.
La figure 2.7 illustre la composition de ces liants à l’aide d’un diagramme ternaire. Ce
diagramme permet d’observer que la stabilité de ce type de mélanges en fonction du dosage
de chacun de ces constituants (adapté de (Lamberet 2005)). Tel que présenté sur la figure,
le dosage en sulfate de calcium menant à une expansion est fonction de la position sur l’axe
CAC-OPC. Plus la formulation se situe à gauche, soit contenant plus de CAC, plus elle
peut incorporer de sulfates de calcium sans démontrer d’expansion. La compréhension de
l’hydratation des mélanges ternaires majoritairement à base de CAC est donc pertinente
afin de comprendre la formation d’ettringite primaire et le gain de résistance en
compression qui lui est associé.
21
Figure 2.7 : Diagramme ternaire avec limite expansive approximative, adapté de
(Lamberet 2005)
Il est important de préciser que les limites entre chaque système ne sont pas clairement
définies. La limite entre les deux systèmes présentés à la figure 2.7 n’est qu’approximative.
Le comportement exact des formulations situées au centre du graphique n’est à ce jour, pas
encore compris.
Un béton composé de ce type de liant ternaire majoritairement à base de CAC (zone 1)
comporte de nombreux avantages par rapport à une composition classique. Les principaux
bénéfices sont un temps de prise rapide et un développement des résistances accéléré (Evju
et Hansen 2001). Ces avantages sont reliés à l’hydratation et sont fonction de la source de
sulfate utilisée (Evju et Hansen 2005). Les sources de sulfate généralement utilisées dans
ces systèmes sont le sulfate de calcium hémihydrate et anhydre.
22
2.4.3.1 Source de sulfate : sulfate de calcium hémihydrate
L’hydratation théorique idéalisée (l’hydratation ne considérant que les principales
réactions) en présence de sulfate de calcium hémihydrate comporte 5 réactions de base qui
sont proposées à partir de l’enthalpie générale du système et des produits formés (Evju et
Hansen 2005). Dès le contact entre l’eau et les liants, deux réactions se produisent
simultanément. La réaction 2.6 mène à la formation de gypse, tandis que la réaction 2.7
forme à la fois de l’ettringite et des C-S-H. Puisqu’il s’agit de cas idéalisés, les formules
utilisent comme simplification que les CACs ne sont constitués que de CA et le ciment
Portland de C3S. Une différence majeure entre ce type de système et un système
traditionnel est que les ions calcium en surplus du ciment Portland ne contribuent pas à la
création de la Portlandite, mais plutôt à la précipitation de l’ettringite.
+
(2.6) (Plâtre de Paris) (Eau) (Gypse)
+
+
+
+
(2.7)
(Eau) (Aluminate
monocalcique) (Plâtre de
Paris) (Alite) (Ettringite) (C-S-H)
Ces réactions se produisent jusqu’à l’épuisement du sulfate de calcium hémihydrate
( ). Par la suite, une réaction similaire à la réaction 2.7 se produit, mais ayant comme
source de sulfate le gypse ( ) créé précédemment :
+
+
+
+
(2.8)
(Eau) (Aluminate
monocalcique) (Gypse) (Alite) (Ettringite) (C-S-H)
Cette réaction se poursuit jusqu’à ce que tout le sulfate disponible soit incorporé à
l’ettringite. La formation de C2AH8, qui s’apparente à une phase d’Afm « aluminate » sans
sulfate, se produit alors et est présenté à l’équation 2.9. Dans cette réaction, les C3S sont
l’agent limitant et lorsque la source est épuisée (lorsqu’il n’y a plus d’OPC), la réaction
2.10 se produit.
+
+
+
(2.9)
(Eau) (Aluminate
monocalcique) (Alite)
(Hydrate
d’aluminate) (C-S-H)
23
+
+
(2.10)
(Eau) (Aluminate
monocalcique)
(Hydrate
d’aluminate)
(Hydroxyde
d’aluminium)
Il est important de noter que l’ettringite formée à partir de ces systèmes est plus stable que
l’ettringite formé avec du ciment Portland. L’ettringite formée par les réactions 2.7 et 2.8
est stable et ne se transforme pas en Afm ou en C2AH8 (Evju et Hansen 2001). Les
réactions précédentes ont été déterminées expérimentalement à l’aide de coulis possédant
un E/C=1 et des proportions massiques de liant de 25% OPC, 50% CAC, 25% .
L’importance relative des phases à travers le temps est illustrée sur la figure 2.8.
Figure 2.8 : Évolution et expansion à travers le temps de différents composés, adapté de
(Evju et Hansen 2001)
Les résultats sur la figure ayant été déterminée par diffraction au rayon X (DRX), il est
impossible de déterminer les phases non cristallines, telles que les C-S-H. L’expansion
associée à ce mélange se produit en deux temps et correspond à deux périodes distinctes de
l’hydratation. La première phase d’expansion se produit jusqu’à la dissolution complète du
, comme présenté précédemment à l’équation 2.6 et 2.7. La deuxième phase
expansive, qui est beaucoup plus importante, commence dès la fin de la première phase et
se termine lorsque le gypse est épuisé, soit l’équation 2.8. Le remplacement du gypse par
une matrice d’ettringite s’accompagne par une expansion importante (figure 2.8).
Il est intéressant de noter que la formulation expansive employée par Evju et Hansen (25%
OPC, 50% CAC, 25% sulfate de calcium) se situe dans la zone non expansive de la figure
24
2.7, mais qu’il obtienne de l’expansion. Au-delà de la formulation adoptée dans leur
protocole, c’est les réactions chimiques qui sont les phénomènes intéressants pour ce projet.
Cette expansion vient rappeler à quel point ces matrices sont sensibles aux matériaux
employés et que la limite expansive doit être réévaluée dès qu’un constituant diffère.
2.4.3.2 Source de sulfate : sulfate de calcium anhydre
L’hydratation en présence de sulfate de calcium anhydre est beaucoup moins bien
comprise. La réaction majeure, basée sur l’enthalpie générale du système, est :
+
+
+
+
(2. 11)
(Eau) (Aluminate
monocalcique) (Anhydrite) (Alite) (Ettringite) (C-S-H)
À l’exception de la source de sulfate, la réaction précédente est identique à l’équation 2.7.
Cependant, des résultats expérimentaux ont démontré que la réaction 2.11 est seulement
valide durant les 6 premières heures de l’hydratation (Evju et Hansen 2005). Par la suite,
une réaction supplémentaire semble se produire, mais celle-ci mène à un hydrate non
cristallin qui ne peut être identifié par DRX. De par les quantités de sulfates fixés à
l’ettringite, l’hydrate inconnu ne peut être de l’Afm et doit être un hydrate ne contenant pas
d’ions SO3-. Selon Evju et Hansen, aucune expansion ne peut survenir lorsqu’un sulfate de
calcium anhydre est utilisé (Evju et Hansen 2005). Selon ces auteurs, puisque l’ettringite se
forme en solution, elle ne peut être expansive. Cependant, cette affirmation est limitée à
l’étude de cette seule formulation et requiert donc plus d’études pour permettre de
généraliser cette hypothèse.
2.5 Conclusion
L’hydratation des systèmes présentés aux sections 2.4.2 et 2.4.3 mène à la formation
d’ettringite. La formation rapide d’ettringite en bas âge, présentée à travers les équations
2.2 à 2.11, permet aux liants à base de CSA et OPC-CAC- de créer, en s’hydratant, des
bétons aux résistances en jeune âge très élevées. Cependant, ce gain de résistance
s’accompagne d’une prise très rapide des mélanges. Il est donc très complexe de mettre en
place ces mélanges sans une adjuvantation importante (superplastifiant, retardateur de prise,
etc.). En effet, les prises rapides de ces liants empêchent une coulée traditionnelle sans
25
adjuvant retardateur de prise. De par la nature très complexe de ces liants, il est difficile de
déterminer si l’ajout d’adjuvants ne déclenchera pas des réactions secondaires non désirées.
De plus, d’un point de vue économique, ce type de mélange est déjà relativement coûteux
et l’ajout d’adjuvants augmente davantage le coût de tels bétons.
Du côté de la stabilité, malgré la possibilité que les matrices produites avec ces liants soient
expansives, il est possible de contrôler ce risque à travers une formulation adéquate. En
contrôlant la proportion de sulfates dans le mélange, la quantité d’ettringite peut être
contrôlée et conséquemment, l’expansion est diminuée.
L’utilisation du béton projeté par voie sèche permettrait l’utilisation de liants OPC-CAC-
sans adjuvant. De par cette technique de mise en place, il devient possible de profiter des
avantages de ce type de liant ternaire tout en contournant les problèmes reliés à la
maniabilité. De plus, l’incorporation d’un haut niveau de fibres pourrait augmenter
significativement la ténacité de ces bétons. Il devient alors possible de créer un béton à gain
rapide de résistance mécanique, stable, tenace et sans adjuvant. L’utilisation du béton
projeté permet donc l’obtention d’un béton aux propriétés extrêmement intéressantes,
difficile à mettre en place en béton coulé traditionnel. C’est donc avec ces idées à l’esprit
que ce projet de recherche a été entamé.
Chapitre 3 - Assemblage d’un liant pour béton projeté
Phase 1
3.1 Introduction
Le chapitre précédent le démontre bien, l’hydratation des matrices OPC-CAC- est
fortement dépendante des matériaux utilisés. Cette variabilité fait en sorte qu’il est risqué
d’utiliser directement les résultats des recherches antérieures sans au préalable identifier
une composition de liant approprié. La Phase 1 de ce projet consiste donc à déterminer la
formulation d’OPC-CAC- incorporant des matériaux localement disponibles et offrant le
développement rapide des résistances mécaniques tout en assurant un matériau au
comportement stable.
3.2 Matériaux
Lors de la sélection des matériaux, la priorité a été accordée aux matériaux offerts
localement. Les différents matériaux utilisés dans le cadre de cette phase peuvent être
divisés en deux catégories, soit les constituants du béton et les adjuvants.
Tous les mélanges étudiés au cours de ce projet de maîtrise ont été fabriqués au laboratoire
du Centre de Recherche sur les Infrastructures en Béton (CRIB) de l’Université Laval.
3.2.1 Constituants des bétons
Les bétons formulés ont nécessité un large éventail de constituants. Ceux-ci peuvent se
classer en 3 sous-catégories, soient les granulats, les ciments et le sulfate de calcium.
27
3.2.1.1 Granulats
Seuls deux types de granulats ont été utilisés dans ce projet. Le premier type de granulats
utilisé est un sable 0-5 mm provenant du lot #L10-201 de Entreprise LT. Le deuxième type
de granulats est une pierre calcaire 2,5-10 mm de Pierre Graymont, lot #L10-301. Les deux
granulats employés sont non réactifs et entreposés à même les installations du CRIB. Des
informations supplémentaires sont disponibles à l’annexe 1.
3.2.1.2 Les ciments
Les ciments utilisés dans le cadre de ce projet sont le ciment Portland et le ciment
d’aluminate de calcium. Avec le sulfate de calcium, ces trois constituants forment la base
des liants ternaires étudiés. Le ciment Portland utilisé est un ciment de type GU fourni par
Lafarge Canada. Le ciment d’aluminate de calcium utilisé est le Ciment Fondu® vendu par
KerneosTM
Aluminate Technologies. Une analyse réalisée par spectrométrie de
fluorescence des rayons X a été faite sur les deux ciments afin de déterminer les
proportions des oxydes majeurs et mineurs. Le tableau 3.1 présente les résultats obtenus.
Tableau 3.1 : Principaux oxydes du ciment Portland et du Ciment Fondu® utilisés
CaO SiO2 Al2O3 Fe2O3 MgO
OPC 63,6% 20,1% 4,6% 2,8% 2,6%
CAC 36,6% 4,5% 40,1% 15,9% 0,6%
Les résultats d’analyse complets sont présentés à l’annexe 1. Les résultats présentés au
tableau 3.1 permettent de vérifier que les principales concentrations d’oxyde des liants
utilisés dans cette recherche respectent les concentrations usuelles (Hewlett et coll. 2004;
Neville 2008).
3.2.1.3 Le sulfate de calcium
Une partie importante de cette phase a été dédiée à la recherche d’une source de sulfates
adéquate pour le projet. La recherche de la source de sulfates de calcium adéquate a été très
complexe. En effet, la majorité du sulfate de calcium vendu sur le marché contient de
nombreux matériaux de remplissage inconnus. Une autre difficulté est que la concentration
de SO3 est difficile à déterminer à l’aide d’essai simple et nécessite des analyses chimiques
28
complexes. La raison première pour laquelle un sulfate d’une grande pureté, soit un produit
composé de SO3 supérieur à 95%, n’est pas incorporé à la matrice cimentaire est le coût
élevé d’un tel produit. Se vendant souvent à près d’un dollar le gramme, il est irréaliste
d’utiliser ce type de produit dans l’industrie du béton. Le sulfate de calcium est donc un
substitut moins couteux. De plus, le deuxième composé incorporé au mélange par l’ajout de
sulfate de calcium, soit l’oxyde de calcium (CaO), est déjà présent en grande quantité dans
le ciment. En effet, tel que présenté au tableau 3.1, le CaO est l’oxyde majeur du ciment
Portland et un des oxydes principaux du ciment d’aluminate de calcium. Son ajout à la
matrice cimentaire ne risque donc pas d’engendrer une réaction d’hydratation inconnue et
non désirée.
Deux produits ont finalement été sélectionnés, soit un sulfate de calcium hémihydrate et un
sulfate de calcium anhydre. Le sulfate de calcium hémihydrate sélectionné est le plâtre
RED TOP® de USG et le sulfate de calcium anhydre est le Snow White
® Filler – F&P
Grade de USG. Malgré la qualification de « Filler » du produit Snow White®, celui-ci est
composé à 98,4% de sulfate de calcium, ce qui en fait le produit le plus pur employé dans
ce projet. La fiche technique du sulfate de calcium anhydre se situe à l’annexe 1.
3.2.2 Adjuvant
Un seul adjuvant est utilisé au cours de cette phase, soit un superplastifiant à base de
polycarboxylate, le Eucon SPC, produit et fournit par Euclid Canada. La fiche technique de
ce produit se retrouve à l’annexe 2. Cet adjuvant est utilisé afin de permettre la mise en
place adéquate des formulations de mortier à l’étude tout en conservant un rapport eau-
ciment constant.
3.3 Programme expérimental
Tel que mentionné précédemment, le but premier de cette phase est de déterminer la
formulation optimale permettant d’obtenir une matrice OPC-CAC- ayant des résistances
en bas âge très élevées, tout en étant volumiquement stable. La difficulté liée à ce
programme expérimental n’est pas le type d’essais impliqués, mais plutôt le nombre
imposant d’essais à effectuer. Afin de déterminer la résistance en compression des
29
mélanges, des cubes de mortiers de béton équivalents (MBE) ont été fabriqués.
L’utilisation de mortier permet de préparer un nombre élevé de mélanges tout en étant peu
coûteux et plus rapide. En effet, la confection d’un cube de mortier de 50 mm (125 cm3)
nécessite beaucoup moins de matériaux que la confection d’un cylindre de 75 mm (663
cm3).
3.3.1 Mortier de béton équivalent (MBE)
Puisqu’un mortier est composé de liants cimentaires et de sable, sa formulation ne
considère donc pas les granulats grossiers (présents plus tard en béton projeté).
Afin d’obtenir des propriétés similaires entre les mortiers et les bétons, les mortiers de
béton équivalent ont été utilisés durant la Phase 1. Le mortier de béton équivalent est une
technique de formulation développée à l’origine pour l’évaluation de mélanges adjuvantés.
Cette technique permet de prendre en compte la surface spécifique totale d’un mélange
standard et de la reporter dans un mortier (Schwartzentruber et Catherine 2000; Martin et
coll. 2008). Ainsi, la surface spécifique totale apportée par la pierre d’une formulation de
béton classique est ajoutée au mortier sous forme de sable. L’utilisation de MBE permet
d’obtenir un mortier se rapprochant davantage au béton visé, puisqu’il possède les mêmes
proportions d’interfaces granulats-liants. La figure 3.1 schématise le concept de MBE.
30
Figure 3.1 : Schématisation du concept de mortier de béton équivalent (MBE)
Les surfaces spécifiques utilisées pour la conversion entre un béton et un MBE sont de
6,084 m2/kg pour le sable et de 0,428 m
2/kg pour la pierre. Ainsi, si la formulation idéale
du béton envisagé comporte 613 kg/m3 de pierre calcaire de 2,5-10 mm, le calcul suivant
permet de trouver la masse de sable à utiliser en remplacement de la pierre dans le MBE :
⁄
⁄ ⁄
⁄ ⁄
On remplace donc 613 kg/m3 de pierre par 43,2 kg/m
3 de sable. Évidemment, le m
3 de
béton doit être revu, mais en procédant ainsi, le MBE et le béton auront tous deux la même
quantité de m2/m
3 apportée par les granulats.
3.3.2 Formulations
Les formulations étudiées au cours de cette phase ont toutes le même ratio massique de pâte
et de granulat. En fixant les proportions initiales pour tous les mélanges, il est plus facile de
31
comparer les résultats des différentes formulations entre elles. Le tableau 3.2 présente les
proportions des mélanges à l’essai.
Tableau 3.2 : Formulation du mélange de base testé à la Phase 1
% Pâte % Granulats
% d'eau % liants % d'air % Sable % Pierre
Proportion
massique 7,7 17,5 --- 48,6 26,2
Proportion
volumique 18,0 13,0 4,0 22,8 42,2
E/C 0,44
La principale différence entre les mélanges est la composition de la phase cimentaire. Les
formulations testées se divisent en deux groupes, soit celles à base de sulfate de calcium
hémihydrate et celle à base de sulfates de calcium anhydre. Pour chacun des deux groupes,
le processus décisionnel menant au choix des formulations est basé sur le même
cheminement. Les premières formulations testées sont formulées à partir de travaux
antérieurs (Lamberet 2005). L’objectif est de définir la limite expansive des matériaux
employés, soit déterminer l’emplacement de la ligne de séparation sur la figure 2.7. Les
formulations subséquentes sont basées sur les résultats de résistance en compression au
jeune âge. Le nombre de formulations n’a pas été fixé au début du projet. De nouvelles
formulations sont explorées jusqu’à ce que le développement des résistances mécaniques de
ces matrices soit bien décrit. En plus des formulations ternaires, des formulations simples,
composées uniquement d’OPC ou de CAC, ainsi que des formulations binaires, composé
d’OPC-CAC, CAC- ou d’OPC- , ont été testées. La réalisation de ces formulations
permet de mieux cerner l’évolution des résistances en fonction de la formulation.
Afin de simplifier la nomenclature des formulations à l’essai, chaque mélange est désigné
selon les proportions de ciment Portland, de ciment d’aluminate de calcium et de sulfates
de calcium que contient sa matrice cimentaire. Ainsi, la formulation 80/10/10 comporte
80% d’OPC, 10% de CAC et 10% de .
32
3.3.3 Procédure de mise en place
Comme il est présenté au chapitre 2, les matrices OPC-CAC- ont des temps de prise très
courts ce qui limite l’utilisation d’un malaxeur conventionnel. Un malaxage manuel a été
fait au cours de cette étude. En raison des grandes différences de composition des
formulations à l’étude et des différents temps de prise qui en résultent, il est impossible de
fixer un temps de malaxage unique. Chaque mélange est donc malaxé jusqu'à l’obtention
d’un mélange homogène et sans agglomérations. La consistance se doit toutefois d’être
suffisamment fluide pour permettre une bonne mise en place. L’ajout d’Eucon SPC, un
adjuvant superplastifiant réducteur d’eau, permet d’obtenir une fluidité suffisante pour
permettre une mise en place efficace du MBE sans modifier le rapport eau-ciment. Pour
déterminer la quantité de superplastifiant nécessaire à chaque formulation, des essais
préliminaires ont été réalisés et ont permis de déterminer la quantité d’adjuvant requise
pour certaines d’entre elles. Par la suite, les quantités nécessaires ont été interpolées selon
les mélanges à l’essai. Lorsque la mise en place est déficiente (consolidation inadéquate),
un nouveau gâchage a lieu et le dosage en adjuvants est ajusté.
Malgré les différences entre les temps de malaxage, la procédure de malaxage est identique
pour chaque formulation. Les matériaux secs sont premièrement malaxés. L’eau est
prépesée et la quantité d’adjuvant totale nécessaire y est incorporée. La moitié de l’eau est
versée dans un bol, puis les matériaux secs y sont incorporés graduellement. L’eau et les
matériaux sont malaxés manuellement au fur et à mesure qu’ils sont incorporés à l’aide
d’une spatule. Lorsque la moitié des matériaux est incorporée, l’eau restante est ajoutée au
mélange. Les matériaux secs restants sont par la suite incorporés graduellement et malaxés
jusqu’à l’obtention d’une homogénéité satisfaisante. Le temps de malaxage total varie de
2½ min à 5 min selon les formulations.
Un total de 15 cubes sont produits pour chaque formulation, soit 12 pour les essais de
résistance en compression et 2 pour le suivi de la stabilité volumique. Le cube restant est
utilisé en remplacement si la mise en place d’un des spécimens est déficiente. Si la mise en
place des 14 premiers cubes est adéquate, le dernier cube est utilisé pour effectuer un
troisième essai de compression à 28j.
33
3.3.4 Essai de résistance en compression
Afin d’obtenir une idée réaliste du développement des résistances mécaniques, de
nombreux essais de résistance en compression sont réalisé à divers moments. Les essais sur
deux cubes de mortier sont à 3h, 6h, 1j, 3j, 7j et 28j. Les spécimens sont confectionnés et
mis à l’essai en suivant les prescriptions de la norme ASTM C 109 (ASTM 2008). Les
formulations les plus résistantes sont démoulées 2 heures après leur mise en place. Pour les
mélanges moins performants, le démoulage est fait lorsque le mélange présente un
durcissement suffisant.
3.3.5 Stabilité volumique
Pour évaluer la stabilité volumique des formulations à l’étude, deux spécimens sont
immergés dans de l’eau de chaux dès leur démoulage. Les dimensions au centre des 6 faces
sont mesurées à l’aide d’un pied à coulisse modifié, présenté sur la figure 3.2. Les mesures
subséquentes s’effectuent aux mêmes pas de temps que ceux des essais de résistance en
compression.
Figure 3.2 : Pied à coulisse modifié
Il est important de spécifier que cette méthode n’est pas normalisée et qu’elle est beaucoup
moins précise que certaines procédures normalisées, tel que l’ASTM C 157 (ASTM 2008).
Cependant, cette méthode est beaucoup plus rapide et simple de réalisation, ce qui facilite
son utilisation sur un nombre élevé de cubes. Également, il est important d’indiquer que
dans le cadre de ce projet, la valeur de l’expansion n’est pas prioritaire. Le but est
seulement de déterminer si la formulation étudiée est expansive ou non. La formulation est
rejetée en présence d’expansion, peu importe l’importance. L’expansion n’est cependant
34
qu’un des deux critères de rejet d’une formulation. Si un cube présente de la
microfissuration en surface, mais aucune expansion, celui-ci est également rejeté. Les
microfissurations sont considérées comme un signe de surdosage en sulfate qui indique que
la formulation est trop près de la limite expansive pour être considérée comme stable
(figure 2.7).
3.4 Résultats
Cette section présente l’ensemble des résultats de résistance en compression et de stabilité
volumique obtenus dans le cadre de la Phase 1 de ce projet.
3.4.1 Quantités d’adjuvant
Les quantités de superplastifiant incorporées dans chaque formulation ne dépendent pas de
la source de sulfate à l’essai. En effet, les résultats ont démontré qu’à formulation égale, le
type de sulfate utilisé ne change pas la quantité de superplastifiant requise pour l’obtention
d’une maniabilité adéquate. Les dosages employés au cours de la Phase 1 sont présenté à
l’annexe 2.
3.4.2 Résistance en compression et stabilité volumique
Les tableaux 3.3 à 3.6 présentent les résultats des essais de résistance en compression de
même que la présence (ou non) d’expansion de l’ensemble des formulations testées.
Lorsque deux essais donnent des résistances ayant une grande variabilité, l’essai est
considéré comme invalide et il est présenté par trois tirets dans les tableaux qui suivent. La
figure 3.3 permet de placer visuellement sur un graphique ternaire l’emplacement des
différents types de formulation.
Tel qu’expliqué à la section 3.3.5, les mesures d’expansion obtenues à l’aide du pied à
coulisse modifié ne se veulent pas quantitatives mais bien comparatives. Seule la présence
(ou non) d’expansion ou de microfissures est d’intérêt dans ce projet. L’expansion observée
est très variable d’une formulation à l’autre, tel qu’il est illustré aux figures 3.4 et 3.5. Par
exemple, l’expansion du spécimen montré sur la figure 3.4-A est légère, alors que les
35
spécimens en B, C et D ont subi une expansion très importante. Un exemple de
microfissuration est présenté à la figure 3.5 D).
Tableau 3.3 : Résultats Phase 1 - Formulation simple
Formulation simple Résistance en compression [MPa] Présence
d'expansion OPC CAC S 3h 6h 1j 3j 7j 28j
100 0 0 0,0 0,0 18,9 30,2 35,1 40,9 ---
0 100 0 0,0 18,1 38,1 37,9 43,9 49,2 ---
Tableau 3.4 : Résultats Phase 1 - Formulation binaire
Figure 3.3 : Emplacement des formulations
36
Tableau 3.5 : Résultats Phase 1 - Formulation ternaire avec CaSO4 hémihydrate
Figure 3.4 : Exemple de formulations expansives à base de sulfate de calcium
hémihydrate
37
Tableau 3.6 : Résultats Phase 1 - Formulation ternaire avec CaSO4 anhydre
38
Figure 3.5 : Formulation expansive à base de CaSO4 anhydre : A) cube seul B) et C)
cubes expansifs comparés à des cubes non expansifs D) microfissuration (35/40/25)
Les tableaux précédents peuvent paraitre inutilement complets et difficiles à suivre, mais il
est important de rappeler que l’étape qui suit est la projection du béton choisi, qui requiert
beaucoup plus d’effort et de matériel que la simple production d’un MBE. À titre
d’exemple, la figure 3.6 illustre bien les efforts d’optimisation réalisée dans cette phase.
Les formulations entourant le mélange possédant la résistance en compression la plus
élevée avec du sulfate de calcium anhydre à 3h, soit la formulation 40/40/20, ont été testées
en variant de 5% la formulation de chacun des constituants afin d’en vérifier la robustesse.
39
Figure 3.6 : Optimisation des formulations à partir de 40/40/20 (losange noir) – résistance
en compression à 3h avec CaSO4 anhydre
3.5 Analyse des résultats
Les trois sous-sections qui suivent traitent des résultats présentés à la section 3.4. Après
avoir discuté des résultats d’expansion et de résistance en compression, le cheminement
ayant conduit au choix de la formulation ternaire utilisé dans la suite de ce projet sera
expliqué et présenté.
Les multiples réactions d’hydratation inhérentes à un système basé sur 2 types de ciments
et un sulfate de calcium sont d’une grande complexité et requièrent encore beaucoup
d’effort de compréhension de la part de la communauté scientifique. L’analyse des résultats
dans le cadre de cette maîtrise ne vise qu’à présenter des pistes d’explications quant aux
mécanismes responsables des phénomènes observés et des résultats obtenus.
3.5.1 Limite expansive
Les formulations à base de sulfate de calcium hémihydrate ont montré un comportement
similaire à celui rapporté dans la littérature. En effet, toutes les formulations expansives
hémihydrates se situent au-delà de la limite expansive identifiée par Lamberet (Lamberet
2005) et présentée à la figure 2.7. Du côté des formulations à base de sulfate anhydre, les
40
formulations ont montré des comportements expansifs (tableau 3.6), ce qui va à l’encontre
de la théorie présentée par Evju et Hansen (section 2.4.3.2, (Evju et Hansen 2005)) selon
laquelle un mélange ternaire à base de sulfate de calcium anhydre ne peut subir
d’expansion. La figure 3.7 schématise graphiquement les résultats expansifs présentés à
travers les tableaux 3.3 à 3.6 ainsi que la limite expansive suggérée par Lamberet.
Figure 3.7 : Mélanges expansifs par rapport à la limite expansive (Lamberet 2005)
La figure 3.7 permet d’observer que certains mélanges à base de sulfate de calcium anhydre
se situent au-dessous de la limite expansive suggérée. Cette condition peut être expliquée
par la sensibilité des matrices à base d’OPC-CAC- . En effet, les variations entre les
différents types de sulfates de calcium et de ciments utilisés dans le cadre de ce projet sont
probablement responsables des variations observées. Le tableau 3.7 met en évidence les
différences d’oxydes entre les matériaux utilisés dans ce projet et ceux employés par
Lamberet.
41
Tableau 3.7 : Différences d'oxydes entre les études
Source CaO SiO2 Al2O3 Fe2O3 MgO SO3 Autres
Ciment
Portland
Cette
étude 63,6% 20,1% 4,6% 2,8% 2,6% 3,8% 2,5%
Lamberet
(2005) 65,5% 20,6% 4,9% 1,8% 1,0% 3,8% 2,4%
Δ 1,9% 0,5% 0,3% 1,0% 1,6% 0,0% 0,1%
Ciment
Aluminate
de calcium*
Cette
étude 36,6% 4,5% 40,1% 15,9% 0,6% < 0,5 2,3%
Lamberet
(2005) 37,4% 4,7% 39,2% 15,5% 0,9% < 0,05 2,3%
Δ 0,8% 0,2% 1,0% 0,4% 0,3% --- 0,0%
Sulfate de
calcium
anhydre
Cette
étude 40,9% 0,1% 0,1% 0,0% 57,5% 1,4%
Lamberet
(2005) 38,3% 0,0% 0,0% 0,0% 0,1% 52,1% 9,4%
Δ 2,6% 0,1% 0,1% 0,1% 0,1% 5,4% 8,1%
* : Seul le Ciment Fondu®
est présenté dans ce tableau
La principale différence provient du sulfate de calcium utilisé. Ainsi, puisque le sulfate
utilisé dans cette étude est plus pur (le degré de pureté fait ici référence à sa teneur en SO3),
il est plausible que pour une même formulation, les mélanges testés contiennent plus de
SO3. Cette augmentation dans l’élément limitant la formation d’ettringite et l’expansion (le
SO3) ferait en sorte que l’expansion se produit avec des formulations contenant
globalement un ratio de sulfates de calcium moindre. Il est donc important de réétablir la
limite expansive pour toute nouvelle combinaison d’OPC-CAC- .
Les formulations expansives obtenues au cours de ce projet suivent la tendance générale
observée dans la littérature. La proportion de sulfates nécessaire à l’expansion du matériau
est proportionnelle et augmente en fonction de la quantité de CAC présent. Ainsi, une
différence importante est observée entre la quantité de sulfates nécessaire pour obtenir de
l’expansion selon que le système soit à prédominance d’OPC ou de CAC. Peu importe la
prédominance du système, la littérature suggère que seule la formation d’ettringite est
considérée responsable de l’expansion.
42
Après la quantité d’ions SO3-, c’est la quantité d’ions Al
2+ qui est l’élément limitatif dans la
formation de l’ettringite. Une hypothèse expliquant le besoin supérieur en sulfate des
mélanges ternaires majoritairement à base de CAC est que la particule fournissant des ions
Al, soit le CA, possède une vitesse de dissolution supérieure à la particule relâchant des
ions Al dans les systèmes majoritairement OPC, soit les C3A. Si le CA se dissout plus
rapidement, il se forme davantage d’ettringite en jeune âge, soit avant que la matrice n’ait
durci. Puisque cette formation d’ettringite survient avant le durcissement de la matrice
cimentaire, l’ettringite alors créé ne causerait pas d’expansion. Ainsi, une proportion
importante de sulfates serait utilisée pour former cette ettringite non expansive. Le système
a donc besoin davantage de sulfates pour que de l’ettringite « secondaire » puisse se former
lorsque la matrice est durcie et donc créer de l’expansion.
Dans le cas des systèmes ternaires à base d’OPC, une hypothèse possible est que la vitesse
de dissolution des C3A serait plus lente que celle des CA et ainsi, lorsque les ions Al sont
finalement disponibles pour former de l’ettringite, la matrice est déjà durcie. La quantité de
sulfates nécessaire pour créer de l’expansion est ainsi moindre, car la majorité de
l’ettringite se forme lorsque la matrice est durcie et contribue directement à l’expansion.
3.5.2 Résistance en compression
Les résistances en compression des nombreuses formulations à l’étude sont très variables.
Avant de mettre en évidence les différences des résistances inhérentes aux différentes
formulations, il est important de discuter de la différence entre une prise rapide et un gain
rapide de résistance mécanique. La prise rapide d’un matériau réfère principalement à sa
perte de maniabilité tandis que le gain des résistances réfère aux propriétés mécaniques du
matériau. Le temps de prise est très important dans l’industrie car il permet de déterminer la
durée de vie utile d’un béton frais. Les deux phénomènes sont directement liés à l’activité
chimique du ciment, mais la prise se produit avant le gain des résistances mécaniques.
Ainsi, un mélange ayant un gain rapide de ses résistances mécaniques possède également
une prise rapide, mais un matériau à prise rapide ne possède pas nécessairement un gain
rapide de ses résistances.
43
Les mélanges binaires produits à partir d’OPC et de CAC sont un exemple de ce deuxième
cas. Ces mélanges démontrent généralement des temps de prise très rapide, mais un
développement des résistances mécaniques plus lent. Ce phénomène est bien connu et se
nomme « prise éclair ». La figure 3.8 présente une schématisation de la variation du temps
de prise en fonction du pourcentage de ciment Portland dans un mélange à base de ciment
d’aluminate de calcium. La variabilité de la zone de prise éclair (présenté sur la figure 3.8
comme étant la zone possédant de 40 à 80% de ciment Portland) ainsi que les temps de
prise présentés sur la figure sont très variables et dépendent fortement des ciments utilisés.
Selon les auteurs, cette zone est plus ou moins variable.
Figure 3.8 : Prise éclair avec des mélanges d’OPC et de CAC (Hewlett et coll. 2004)
L’évolution des résistances en compression des mélanges ternaires est très variable d’une
formulation à l’autre, comme il est illustré aux figures 3.9 à 3.12. Tel que présenté à la
section 2.4.3, les formulations à prédominance CAC ont des résistances à la compression
en jeunes âges supérieures à leur contrepartie majoritairement OPC, et ce peu importe le
type sulfate de calcium employé. De plus, tel que mentionné dans la littérature, les
résistances maximales à 28j jours des formulations à base de sulfates anhydre et
hémihydrate tendent vers les mêmes valeurs.
44
Figure 3.9 : Résistance en compression à 3h avec CaSO4 anhydre
Figure 3.10 : Résistance en compression à 28j avec CaSO4 anhydre
45
Figure 3.11 : Résistance en compression à 3h avec CaSO4 hémihydrate
Figure 3.12 : Résistance en compression à 28j avec CaSO4 hémihydrate
46
Une des nouveautés que cette étude met en évidence est l’emplacement des formulations
les plus performantes en jeune âge, présentées au tableau 3.8.
Tableau 3.8 : Résumé des formulations les plus performantes à 3h
Résistance en
compression [MPa]
Formulations
OPC-CAC-
Type de
sulfate de
calcium
3h 28j
20/50/30 Hémihydrate 27,3 49,2
40/40/20 Anhydre 31,0 46,6
Selon les études précédentes (Lamberet 2005), les formulations à prédominance CAC sont
plus performantes lorsqu’elles sont formulées avec du sulfate de calcium hémihydrate.
Avec les matériaux employés dans cette étude, le type de sulfate de calcium semble jouer
un rôle beaucoup moins prédominant et c’est plutôt la quantité de sulfates de calcium qui
semble gouverner. Le sulfate de calcium anhydre fait plutôt diminuer la quantité de CAC
nécessaire à l’obtention de la formulation la plus performante de 50% à 40% (en proportion
relative de liant total).
La sensibilité intrinsèque aux formulations est également très évidente. Le tableau 3.9
présente la composition des principaux oxydes de deux mélanges ayant une différence de
formulation de 5%. Ce tableau permet de mettre en évidence que les deux mélanges ont des
différences de composition minimes. Cependant, les deux formulations utilisées comme
exemple ont des différences de résistances en compression de l’ordre de 20 MPa à 3h, ce
qui est très important considérant que la plus grande différence dans leurs composés est
d’au plus 1,9%. Ce tableau permet également de repostuler que l’élément limitant dans les
systèmes à base d’ettringite est souvent le sulfate et qu’une différence aussi minime que
1,5% peut avoir un grand impact.
47
Tableau 3.9 : Composition des principaux composés de deux mélanges ternaires
Formulations
fc @
3h
[MPa]
fc @
28j
[MPa]
CaO Al2O3 SO3-
SiO2 Oxydes
mineurs Autres
35/50/15 2,3 34,0 46,7% 21,7% 9,9% 9,3% 12,0% 0,4%
37,5/45/17,5 23,3 44,4 47,5% 19,8% 11,5% 9,6% 11,3% 0,4%
Δ 21,0 10,4 0,8% 1,9% 1,5% 0,3% 0,7% 0,0%
Il est très difficile d’expliquer en détail ces phénomènes. Comme pour l’expansion, ils sont
possiblement liés à la rapidité avec laquelle l’ettringite apparait et à sa qualité.
3.5.3 Détermination de la formulation retenue
Les résultats ont démontré qu’une formulation à base de sulfates de calcium hémihydrate et
une formulation à base de sulfate de calcium anhydre ont toutes deux des résistances en bas
âge très intéressantes. Cependant, une seule formulation doit être sélectionnée pour
l’avancement de ce projet de recherche. Puisqu’il est impossible de choisir une formulation
en se basant uniquement sur les résistances mécaniques, d’autres critères de sélection ont
été suivis afin de déterminer la formulation finale. Trois raisons ont finalement permis de
choisir le sulfate de calcium anhydre par rapport à sa version hémihydrate.
La première est la disponibilité du produit. Le fournisseur du Snow White® Filler –
F&P Grade pouvait fournir facilement et rapidement les quantités nécessaires à ce
projet.
Deuxièmement puisque le sulfate de calcium anhydre est de qualité alimentaire et
pharmaceutique, la qualité du produit est beaucoup plus contrôlée et pure.
Le troisième et dernier point, et également le plus important, est que le sulfate de
calcium anhydre nécessite moins de CAC et plus d’OPC pour obtenir la formulation
la plus efficace. D’un point de vue économique, l’utilisation du sulfate de calcium
anhydre est plus intéressante vu la différence de prix importante entre le ciment
Portland et le Ciment Fondu® (environ 1 : 6).
48
Avec le sulfate de calcium anhydre, la formulation 40/40/20 se situe à proximité de la zone
expansive. Dans l’éventualité d’un malaxage non homogène des matériaux, le risque
d’expansion est considérable. Afin de réduire la possibilité d’un tel évènement et conserver
une certaine marge de sécurité, une formulation décalée de 5% par rapport à la ligne
expansive a donc été sélectionnée en se basant sur le mélange 40/40/20.
Ainsi, la formulation retenue pour la projection sèche (Phase 3) est:
37,5% de ciment Portland
45,0% de ciment d’aluminate de calcium
17,5% de sulfate de calcium Snow White® Filler – F&P Grade
Ce décalage par rapport à la formulation optimale entraine une diminution des résistances
en compression à 3h de 32,9 MPa à 23,2 MPa. Malgré cette diminution de l’ordre de 10
MPa, la formulation présente les deuxièmes meilleures résistances en compression à 3h si
l’on ne considère que les formulations non expansives. De plus, les résistances à 28j des
formulations 40/40/20 et 37,5/45/17,5 sont du même ordre de grandeur.
La figure 3.13 illustre l’emplacement de la formulation.
Figure 3.13 : Emplacement de la formulation choisie
Chapitre 4 - Béton projeté par voie sèche fibré
Phase 2
4.1 Introduction
La projection de béton projeté fibré existe depuis de nombreuses années afin de contrôler le
retrait plastique. Cependant, les teneurs en fibres incorporées aux mélanges ne dépassent
rarement les 0,5% avec des fibres non structurales. Le but de cette phase est de déterminer
s’il est possible d’incorporer suffisamment de fibres à un mélange de béton projeté afin
d’obtenir un comportement écrouissant. Tel que présenté à la sous-section 2.3.2.2, le
comportement écrouissant peut survenir en tension ou en flexion. Le second est priorisé
dans le cadre de cette étude, car le volume de fibre critique requis en flexion est inférieur au
volume de fibre critique requis en tension, ce qui apparait plus réaliste dans le contexte où
cela n’a jamais été fait en béton projeté par voie sèche. De plus, les montages nécessaires à
la détermination d’un comportement écrouissant en flexion sont moins complexes à
construire et à opérer que leurs contreparties en tension.
4.2 Matériaux et équipement
La plupart des matériaux de base utilisés dans la confection des bétons étudiés dans cette
phase sont identiques à ceux utilisés à la phase précédente à l’exception du superplastifiant,
qui n’est plus nécessaire. En effet, tel que mentionné précédemment, la projection par voie
sèche permet de contourner les problèmes de maniabilité en ajoutant l’eau à la lance, soit
immédiatement avant la mise en place du matériau. Les seuls nouveaux matériaux utilisés
dans cette phase sont les fibres.
50
4.2.1 Fibres
Les fibres utilisées dans ce projet proviennent de 3 fournisseurs différents. Les fibres
sélectionnées sont la fibre Tuf-Strand SFTM
fournie par Euclid Chemical Compagny, la
MasterFiberTM
Matrix 470 fournie par BASF Canada ainsi que la fibre PVA RECS-15TM
vendue par la compagnie Nycon. Chacune de ces fibres est vendue en tant que fibres
structurales en opposition à certaines fibres synthétiques destinées aux contrôles de la
fissuration plastique. Les fiches techniques de certaines de ces fibres proposent des dosages
à incorporer au béton projeté par voie humide seulement. Le tableau 4.1 résume les
principales caractéristiques des 3 types de fibres utilisées dans ce projet de recherche. Les
fiches techniques des fibres utilisées se retrouvent à l’annexe 1.
Tableau 4.1 : Caractéristique des fibres utilisées dans le cadre de la Phase 2
Fibres Longueur Rigidité Matériau Dosage maximal
recommandé*
MasterFiber
Matrix 470 48 mm Semi-rigide Polypropylène 0,7 à 0,8 %
TUF-
STRAND SF 51 mm Semi-rigide
Polypropylène
et polyéthylène 0,2 à 1,3 %
PVA
RECS-15 8 mm Souple
Alcool
polyvinylique
(PVA)
Aucune
recommandation
* : En application par voie humide
4.2.2 Projection
La section suivante présente les équipements de béton projeté utilisés ainsi qu’une des
particularités du laboratoire de béton projeté de l’Université Laval, soit le système
d’acquisition de donnée électronique.
4.2.2.1 Équipement
La projection s’effectue à l’intérieur des laboratoires du CRIB de l’Université Laval. Cette
salle de projection permet de projeter du béton dans un environnement contrôlé; les aléas
du climat sont complètement évités.
51
La figure 4.1 présente une vue de la chambre de projection avec les différents moules
utilisés dans le cadre de ce projet de maîtrise.
Figure 4.1 : Salle de projection
Le canon à béton projeté par voie sèche utilisé est une Aliva®-246 (présenté à la figure 4.2).
Le barillet utilisé possède une capacité de 2,0L et 12 entrées circulaires. Une lance longue
(de type « hydromix ») avec des boyaux souples de 38mm (1,5″) de diamètre intérieur est
utilisée dans le cadre de ce projet.
52
Figure 4.2 : Canon à béton projeté par voie sèche (à gauche) et lance hydromix (à droite)
4.2.2.2 Acquisition
Afin de permettre une récupération et une analyse efficace des paramètres de projection, la
salle de projection de l’Université Laval est équipée d’un système d’acquisition
électronique. Ce système permet un affichage et un enregistrement en temps réel des
données de projection telles que le débit d’eau (en litres/min) et le volume d’air (en CFM).
Lors des projections, l’affichage en temps réel permet d’effectuer un contrôle de qualité sur
le matériau projeté. Ainsi, si le débit d’eau et d’air n’est pas constant tout au long de la
projection, l’homogénéité du béton mis en place est déficiente. Dans ce cas, le béton
produit est rejeté, car sa mise en place n’est pas adéquate.
Le rebond peut également être mesuré en couplant au débit d’eau des données
supplémentaires provenant d’une balance sous le canon de projection et d’un moule
métallique suspendu à une cellule de charge. Les données provenant de ces deux
instruments sont également enregistrées par le système d’acquisition de données de la salle.
L’ensemble du système d’acquisition est schématisé à la figure 4.3.
53
Figure 4.3 : Schématisation du système d'acquisition
La procédure permettant de mesurer le rebond est simple. Le canon de projection et les
matériaux secs sont déposés sur une balance qui enregistre en temps réel la masse présente
à sa surface. Pendant la réalisation de l’essai de rebond, rien n’est ajouté ou retiré de la
balance. Il s’ensuit que la perte de masse enregistrée est uniquement due au matériau
sortant. Pendant ce temps, le lancier projette dans un moule d’acier suspendu à une cellule
de charge. La cellule de charge enregistre donc la masse adhérant à sa surface dans le
temps. Une fois couplé à l’enregistrement du débit d’eau, il est possible de déterminer le
pourcentage de matière n’adhérant pas au moule et donc, le rebond. L’équation ci-dessous
récapitule le traitement mathématique à effectuer pour obtenir une valeur de rebond.
(
)
54
4.3 Essai Phase 2
4.3.1 Préparation des projections
Afin d’obtenir suffisamment de matériau pour compléter l’ensemble des essais à réaliser,
les mélanges à l’essai sont prémalaxés pour obtenir environ 750 kg de matériau sec. Afin
d’assurer un prémalaxage adéquat avec l’équipement disponible en laboratoire, chaque
formulation est divisée en huit lots de 94 kg. Chacun des constituants (pierres, sables,
liants, fibres) est pesé individuellement puis malaxé à sec dans un tambour rotatif jusqu’à
l’obtention d’un mélange homogène (figure 4.4).
Une fois mélangés correctement, les matériaux sont remis dans des chaudières qui sont
fermées hermétiquement et entreposés jusqu’à la projection. Afin de minimiser les risques
d’hydratation parasite, les mélanges sont prémalaxés moins de 24h avant la projection.
Figure 4.4 : Prémalaxage des matériaux secs avant la projection
Le nombre de mélanges testés au cours de cette phase est variable et est fonction des
résultats obtenus. Le premier taux de fibre incorporé au mélange est de 1%.
55
4.3.2 Essais
Afin de permettre l’ensemble des essais nécessaires à la réalisation des objectifs, quatre
panneaux de projection conformes à la norme ASTM C 1140 (ASTM 2003) sont projetés,
en plus des moules de jeune âge en acier et d’un moule de rebond (figure 4.1).
4.3.2.1 Essai de résistance en compression en jeune âge
Afin de mesurer la résistance en compression des différents mélanges testés en jeune âge,
une technique nommée « End Beam Test » est utilisée. Cet essai est utilisé afin de
déterminer la résistance en compression du béton projeté traditionnel durant les 24
premières heures suivant le contact eau-ciment, soit lorsque celui-ci ne possède pas une
intégrité suffisante pour effectuer un carottage conventionnel (Heere et Morgan 2002).
Cet essai nécessite la projection de spécimens de béton dans des moules d’acier de 75mm x
75mm x 400mm (3″ x 3″ x 16″). Ces spécimens sont par la suite extraits de leur moule puis
testés à l’aide d’un cadre rigide et d’un piston hydraulique, tel qu’illustré à la figure 4.5.
Chaque extrémité des spécimens est testée, ce qui permet 2 essais par prisme.
Figure 4.5 : Appareillage utilisé pour la réalisation du " End Beam Test"
Cette méthode possède l’avantage premier de déterminer directement et rapidement la
résistance en compression. À l’aide d’une table de conversion entre la pression appliquée
au piston et la pression appliquée sur l’échantillon, il est possible de déterminer la
56
résistance en compression du spécimen dès la rupture de l’échantillon. Pour chaque
mélange à l’essai, 2 moules contenant un total de 5 prismes dédiés à la résistance au jeune
âge sont projetés (voir figure 4.1). La première échéance est testée lorsqu’une prise
suffisante du matériau est observée et deux essais sont réalisés par échéance. Par la suite,
des essais sont faits toutes les heures suivant le premier essai.
4.3.2.2 Essai de résistance en compression
Afin d’obtenir une bonne corrélation entre l’essai « End Beam Test » et un essai de
compression traditionnel sur carotte, le dernier pas de temps testé sur prisme est également
testé sur des carottes. Un carottage à partir d’un moule de projection suivant la norme
ASTM C 1604 (ASTM 2005) est fait dès que l’essai en jeune âge indique une résistance
supérieure à 10 MPa.
Les carottes subissent par la suite une préparation de surface adéquate. Pour les spécimens
n’ayant pas 24 heures de cure, des membranes de néoprène conforme à la norme ASTM C
1231 (ASTM 2009) sont utilisées. Autrement, un surfaçage des spécimens à l’aide d’une
machine à meuler est privilégié. Certains spécimens ont dû être coiffés avec une coiffe de
soufre selon la norme ASTM C 617 (ASTM 2009), car la machine à meuler a connu des
défaillances techniques au cours de ce projet.
Les essais de compressions sont faits sur des carottes de 75 mm (3″) de diamètre suivant la
norme ASTM C 1604 (ASTM 2005) aux pas de temps suivants : 3h, 6h, 1j, 7j et 28j ainsi
qu’au dernier pas de temps sur prisme. Évidemment, la réalisation des premières échéances
est fonction de la possibilité de carotter le matériau projeté.
4.4 Résultats Phase 2
L’incorporation d’un haut volume de fibres dans un mélange de béton projeté par voie
sèche n’a malheureusement pas été couronnée de succès. Non seulement il a été impossible
de produire des bétons écrouissant, mais les mélanges fibrés projetés ont simplement rendu
impossible la production de béton projeté homogène et acceptable. Les preuves et raisons
de cet insuccès sont présentées dans les sections suivantes.
57
4.4.1 Projection
Au total, trois mélanges ont été mis à l’essai. Le tableau 4.2 présente les fibres employées
ainsi que le dosage employé (V/V) dans chacun des mélanges.
Tableau 4.2 : Dosage en fibre des projections de la Phase 2
Fibres
Formulation [kg/m3] [%]
Matrix 9,1 1,0
SF 9,1 1,0
PVA 32,5 2,5
En premier lieu, les projections des mélanges Matrix et SF ont été rejetées puisque les
projections ont produit des bétons non homogènes. Les débits d’air et d’eau enregistrés ont
démontré de nombreux sauts et fluctuations qui étaient directement liés aux nombreux
bouchons observés durant la projection. En effet, afin de produire les panneaux nécessaires
aux essais décrits précédemment, le canon de projection a dû être démonté et nettoyé au
milieu des projections. En plus de produire de grandes quantités de poussière au canon, le
béton à la sortie de la lance ne contenait que très peu de fibres. Des « pulsations » de
matériau importantes ont été ressenties à la lance, ce qui est anormal avec l’équipement
employé. Lors du démontage du canon, un amoncèlement important de fibres a été
découvert à l’entrée des matériaux dans le barillet, comme il est possible de l’observer à la
figure 4.6. Les trous des barillets comportaient également une quantité importante de
granulats compactés et de fibres.
58
Figure 4.6 : Bouchon de fibre lors de la projection du mélange Matrix 1%
Ainsi, puisque les bétons produits avec les mélanges Matrix et SF sont non-homogènes,
ceux-ci ont été déclarés inacceptables et rejetés. Des variabilités de l’ordre de 10 MPa entre
deux résultats de résistances en compression à une même échéance confirment la non-
homogénéité et la nécessité de ne pas considérer ces projections.
À la suite des bouchons de fibres qui sont survenus durant les projections des mélanges
Matrix et SF, un nouveau barillet d’une capacité de 5,6L et possédant des ouvertures
trapézoïdales a été utilisé. Ce barillet comporte des ouvertures plus grandes ce qui, en
principe, facilite l’entrée des fibres. Ce barillet a été prêté à l’Université Laval par Béton
Projeté M.A.H. Inc.
Avec le changement de barillet, la troisième projection contenant de la fibre PVA a été
tentée. Le volume de fibres de ce mélange est supérieur au volume de fibres des mélanges
précédent. Une des raisons expliquant ce choix est que la fibre PVA est beaucoup plus
courte et souple que les fibres précédentes ce qui lui confère normalement une
« pompabilité » supérieure. De plus, il a été démontré avec du béton projeté par voie
humide qu’un pourcentage de 2% V/V de fibre PVA permet l’obtention d’un béton
écrouissant (Li et coll. 2009). Puisqu’une projection par voie sèche produit généralement
davantage de rebonds, le pourcentage de fibres a été augmenté de 0,5%. Cependant, malgré
le nouveau barillet, le mélange à base de fibres PVA a également été impossible à projeter.
Les fibres se sont accumulées à l’entrée du barillet (figure 4.7), rappelant les
amoncèlements de fibres observés lors des projections fibrées précédentes.
59
Figure 4.7 : Amoncèlement de fibres lors de la projection du mélange PVA 2,5%
Cette dernière projection a donc également été rejetée puisqu’aucun panneau de projection
n’a été produit correctement.
4.5 Analyse des résultats
Aucun mélange fibré n’a pu être produit correctement. Les causes les plus probables
expliquant ce revers ont été déterminées lors de discussions avec un lancier d’expérience et
les différents fabricants d’équipements. Ces causes sont la restriction trop importante dans
le système lors des projections avec des fibres semi-rigides et la capacité trop importante du
barillet pour les projections avec fibres souples.
4.5.1 Projection avec fibres semi-rigides
La principale raison responsable de l’échec des projections avec fibres semi-rigides est
reliée à l’équipement utilisé. Afin de diminuer au maximum les pulsations lors des
projections, le canon à projeter utilisé à l’Université Laval est équipé d’un barillet de 2,0L
avec de petites ouvertures circulaires et non d’un barillet à ouverture trapézoïdale. Ceci
permet d’obtenir un débit de matériau sortant plus constant à la sortie de la lance, car le
barillet se vide plus souvent que lorsqu’un barillet trapézoïdal est utilisé. Pour faciliter
davantage la production d’un débit constant, des canalisations petites, soit de 38 mm (1,5″),
60
sont employées au lieu des conduites de 50 mm (2″) (normalement) utilisées. Cependant, le
canon à projeter utilisé à l’Université Laval est pourvu d’une sortie des matériaux de
dimension standard de 50 mm (2″). Un réducteur de 50 mm à 38 mm est donc présent à la
sortie de la machine pour permettre de faire le lien avec les canalisations. Cette réduction
crée une restriction non négligeable dans le système. De plus, la longueur des fibres
(environ 50 mm) entrave l’écoulement des fibres dans le barillet.
Avec toutes ces restrictions, l’incorporation efficace des fibres dans les boyaux a été
impossible. Les fibres ont été incapables d’entrer correctement dans le barillet. Les
nombreux blocages partiels du barillet qui en ont résulté, ont créés des bouchons qui ont
empêché la production d’un béton homogène.
4.5.2 Projection avec fibres souples
Lors de la projection du mélange avec les fibres PVA, le phénomène responsable de l’échec
de la projection n’est pas les restrictions dans le système, mais plutôt la capacité globale du
système. L’utilisation d’un barillet de plus grande capacité semble être la cause des
mauvais résultats obtenus. Le barillet de 5,6L avec ouvertures trapézoïdales possède une
capacité beaucoup trop grande pour des lignes de 38 mm (1,5″). Avec ce type de barillet,
des canalisations de 50 mm auraient dû être employées. Un barillet de capacité
intermédiaire, soit de 3,6L, avec des ouvertures trapézoïdales aurait été nécessaire pour des
canalisations de 38 mm. Cependant, aucun entrepreneur spécialisé ou fournisseur
d’équipement de la région ne possède un barillet de cette capacité et son achat se serait
avéré beaucoup trop dispendieux pour ce seul projet de recherche.
Selon nos observations, le haut pourcentage de fibres employé ne fit que rendre plus
difficile l’écoulement du matériau sec du barillet jusqu’aux canalisations. Puisque la
conduite ne pouvait recevoir autant de matériau, le barillet s’est obstrué très rapidement.
Seule une partie des particules les plus fines, sois en majeure partie les liants, réussit à
traverser les canalisations.
La figure 4.8 schématise notre compréhension de l’ensemble des difficultés encourues
durant la projection des mélanges fibrés.
61
Figure 4.8 : Schématisation des hypothèses responsable des mauvaises projections
4.6 Conclusion sur les bétons projetés fibrés par voie sèche
Bien qu’aucun béton projeté écrouissant n’a été projeté au cours de ce projet de recherche,
l’hypothèse de départ n’est pas pour autant invalide. En effet, il n’a pas été possible de
réussir une projection à haut volume de fibres avec l’équipement disponible à ce moment à
l’Université Laval. L’idée initiale est toujours valide, mais un contrôle très serré de
l’équipement doit être réalisé.
Par exemple, l’utilisation d’un barillet trapézoïdal d’une capacité intermédiaire de 3,6L
ainsi que des canalisations de 50 mm pourrait régler les problèmes rencontrés au cours des
projections et ainsi permettre la production d’un béton projeté par voie sèche écrouissant.
Une autre solution possible serait d’incorporer les fibres juste avant la sortie de la lance.
L’idée est d’incorporer et de distribuer des fibres uniformément dans le jet de projection.
Ainsi, tous les problèmes de transports à travers des boyaux seraient évités. Cependant, ce
type de système serait exploratoire.
Chapitre 5 - Béton projeté à ultra haute résistance
initiale
Phase 3
5.1 Introduction
Le but de cette dernière partie du projet de recherche est de deux ordres :
Déterminer si la projection d’un béton projeté à base de liant ternaire nécessite
d’apporter des modifications aux équipements et aux pratiques usuelles en béton
projeté.
Caractériser le béton projeté basé sur la formulation retenue à la Phase 1 (voir
section 3.5.3).
Évidemment, une attention particulière a été portée à la résistance en compression au jeune
âge. Plusieurs autres aspects mécaniques du béton ternaire projeté ont été vérifiés tels que
le module élastique et l’absorption. Dans une moindre mesure, la durabilité de ce type de
béton a aussi été explorée avec des essais de gel-dégel. Finalement, afin d’obtenir une idée
du développement des différents composés dans ce type de liant, un essai de diffraction des
rayons X a été réalisé. Suite aux résultats obtenus à la Phase 2, la projection de mélanges
fibrés a été abandonnée et n’apparaît pas dans la Phase 3.
Cette phase s’est amorcée avec la projection préliminaire d’un béton à liant ternaire. Le
béton projeté produit s’est facilement projeté avec un équipement standard. Le seul point
notable par rapport à un mélange standard est l’intensité de la chaleur dégagée durant les
premières heures (ce qui n’est pas un problème en soit). La mise en place, les rebonds et la
consistance du matériau sont compatibles avec ceux des mélanges plus traditionnels.
63
Le résultat de cette projection étant concluant, la caractérisation du mélange ternaire a pu
être entamée. Afin d’y parvenir, le mélange ternaire développé a été comparé à des
mélanges à haute résistance initiale vendus sur le marché. L’avantage premier de ce choix
est de permettre de comparer et de situer le mélange développé par rapport à ce qui est
disponible dans l’industrie. Dû aux nombreuses particularités de la méthode de mise en
place utilisée, soit la projection par voie sèche, il est difficile de faire un parallèle entre les
résistances présentées par les fiches techniques des produits commerciaux et le béton
produit en laboratoire. Pour remédier à ce problème, les mélanges commerciaux ont été
projetés en laboratoire. Ainsi, puisque les mélanges sont projetés par le même lancier avec
le même équipement et dans un environnement contrôlé, il est alors possible de faire une
meilleure comparaison avec les différents produits disponibles. Au total, 5 mélanges
commerciaux ont été projetés en laboratoire. Également, suite à l’observation de
l’importante chaleur d’hydratation dégagée lors de la projection préliminaire, un mélange
incorporant de la cendre volante a été projeté.
Un total de 7 mélanges a donc été mis à l’essai dans le cadre de cette dernière phase.
5.2 Matériau
Afin de caractériser le mélange basé sur la formulation choisie à la Phase 1, trois groupes
de mélanges distincts ont été projetés. Le tableau 5.1 présente chacun de ces mélanges. Le
premier groupe est constitué des matrices ternaires et inclut les mélanges DRY, CV-33 et
TERN. Le deuxième groupe est composé du mélange CSA qui est un béton à base de
sulfoaluminate de calcium. Le dernier groupe est composé des bétons à base de ciment
Portland accéléré, soit les mélanges FAST, LIANT et EAU.
64
Tableau 5.1 : Information sur les formulations de la Phase 3
Désignation Type Description du mélange
DRY Produit en
laboratoire
Mélange basé sur la formulation ternaire démontrant
les meilleures propriétés mécaniques (voir section
3.5.3)
CV-33 Produit en
laboratoire Semblable au mélange DRY, mais contient 33% de
cendre volante en taux de remplacement de liant
TERN Produit en
laboratoire
Mélange à base de ciment Portland contenant un ajout
cimentaire sous forme de poudre
L’ajout contient un mélange de CAC et de
Taux de remplacement de 30% du ciment Portland
CSA Prémélangé Mélange commercial à base de sulfoaluminate de
calcium
FAST Prémélangé
Mélange à base de ciment Portland
Mélange commercial accéléré à partir d’adjuvant
accélérateur en poudre
Projection réalisée avec de l’eau contenant un
adjuvant accélérateur
LIANT Prémélangé Mélange commercial accéléré à partir d’adjuvant
accélérateur en poudre
EAU Prémélangé
Mélange à base de ciment Portland commercial
Projection réalisée avec de l’eau contenant un
adjuvant accélérateur
65
5.2.1 Les mélanges à base d’OPC-CAC-
Le premier mélange de ce groupe (DRY) est la formulation développée, soit le mélange que
l’on cherche à comparer et qui a été sélectionné à la Phase 1. Le deuxième mélange (CV-
33) est également basé sur le mélange 37,5/45/17,5, mais contient 33% de cendre volante
de type F en taux de remplacement. La cendre volante employée a été fournie par Lafarge
Canada et la fiche technique de ce produit se trouve à l’annexe 1. Le dernier mélange de ce
groupe à l’essai est un béton projeté à base de ciment Portland prémélangé en laboratoire
dans lequel est ajouté un ajout cimentaire en développement de la gamme Ternal® fourni
par KerneosTM
Advance Technologies. Puisque l’ajout cimentaire est un produit
commercial, la composition exacte de celui-ci est inconnue. Cependant, puisque l’objectif
est de dresser un comparatif des performances obtenues par rapport au mélange développé,
la composition de la phase liante est suffisante pour le projet. La phase liante de l’ajout
cimentaire est composée de ciment d’aluminate de calcium et de sulfate de calcium. Ainsi,
une fois incorporé au ciment Portland, un liant ternaire, tel que celui développé, est obtenu.
La différence majeure entre le mélange ternaire commercial et celui développé est que le
mélange commercial possède une matrice ternaire majoritairement à base d’OPC et non de
CAC. Dans le cadre de ce projet, le mélange obtenu à partir de ce liant est désigné sous
l’appellation TERN (pour faire référence à un mélange ternaire).
Chacun des mélanges de ce groupe a été préparé en laboratoire suivant la procédure définie
à la section 4.3.1.
5.2.2 Le mélange à base de sulfoaluminate de calcium
Le seul mélange de ce groupe est un béton projeté commercial. Puisque la formulation de
ce mélange relève du secret industriel, il est impossible de connaitre la proportion exact de
chacun des constituants. Cependant, tel que présenté, la connaissance de la phase liante est
suffisante pour les besoins de cette étude. Le mélange possède comme liant principale du
ciment à base de sulfoaluminate de calcium.
66
5.2.3 Les mélanges à base de ciment Portland accéléré
Le dernier groupe est composé de trois mélanges de béton projeté commerciaux à base de
ciment Portland accéléré. Le premier mélange est un béton projeté préensaché à base de
ciment Portland contenant un adjuvant accélérateur en poudre. Le deuxième mélange est un
mélange de béton projeté à base de ciment Portland préensaché classique et projeté avec de
l’eau contenant un adjuvant de type accélérateur. Le dernier béton projeté est un
assemblage du deuxième et troisième mélange. Il comprend un accélérateur en poudre dans
le mélange et de l’eau avec un accélérateur est employée durant la projection. Les trois
mélanges ont été fournis par King Packaged Materials et proviennent de leur usine de
Blainville, Québec.
5.2.4 Formulations
Le tableau 5.2 présente la composition des trois mélanges proportionnés en laboratoire.
Puisqu’il est impossible de déterminer avant la projection la quantité d’air et le rapport eau-
liant, un rapport eau-ciment de 0,44 et 4% d’air ont été assumés. Ce tableau présente
également les proportions sèches de chacun des constituants.
Tableau 5.2 : Composition des mélanges produits en laboratoire
Mélanges Liants Sable Pierre
Type kg/m3
% kg/m3
% kg/m3
%
DRY
OPC 153,8 7,1%
1139,3 52,7% 613,5 28,4% CAC 184,5 8,5%
71,8 3,3%
Total 410,1 19,0%
CV-33
OPC 101,5 4,7%
1127,5 52,7% 607,1 28,4%
CAC 121,8 5,7%
S 47,5 2,2%
CV 135,1 6,3%
Total 405,9 19,0%
TERN
OPC 286,5 13,3%
1137,2 52,7% 612,3 28,4% TERN 122,8 5,7%
Total 409,3 19,0%
67
Bien que les proportions des divers constituants des mélanges commerciaux soient
inconnues, il est fort improbable que leurs formulations soient très éloignées de celle
présentée au tableau 5.2. En effet, puisque la plupart des mélanges commerciaux respectent
les règles de bonne pratique concernant la formulation présentée à la section 2.2.3, les
proportions de liants, de sable et de pierre des mélanges commerciaux employés et des
mélanges préparés en laboratoire, doivent s’apparenter.
5.3 Projection préliminaire
Le but de cette projection est de déterminer si des mesures spéciales (équipements et
techniques de projection) doivent être employées lors de la projection d’un mélange à base
d’OPC-CAC- . Les équipements présentés à la section 4.2.2 sont utilisés ainsi que les
techniques usuelles de projection (ACI-506.R 2005). Suivant cette projection préliminaire,
plusieurs carottages ont été réalisés afin de vérifier si le matériau en place est homogène.
De plus, toute différence notable entre cette projection et une projection par voie sèche d’un
mélange traditionnel est notée.
La projection d’un mélange ternaire basée sur la formulation présentée à la section 3.5.3 a
été réalisée avec succès. L’utilisation d’une lance longue s’est avérée efficace et aucun
bouchon n’a été observé. Lors de la projection du mélange ternaire, les poussières de
projection et le rebond s’apparentaient à ce qui est généralement observé lors d’une
projection par voie sèche plus traditionnelle. Les carottages ont permis de confirmer
l’homogénéité du mélange. Vu la facilité avec laquelle le mélange a été projeté, aucune
modification d’équipement n’a été requise. La seule variance observée par rapport à la
projection d’un mélange à base de ciment Portland est que la chaleur d’hydratation des
premières heures suivant le contact eau-ciment est plus importante.
5.4 Essais Phase 3
5.4.1 Essai de résistance en compression en jeune âge
Une méthodologie semblable à celle présentée à la Section 4.3.2.1 est suivie à la Phase 3.
La principale différence est l’échéance des essais. Afin de faciliter la comparaison entre les
68
mélanges, des pas de temps fixes sont utilisés. Ainsi, lorsque les résistances en compression
en jeune âge obtenues sont supérieures à 3 MPa, 3 essais sont faits. Si la résistance est en
deçà de 3 MPa, seuls 1 ou 2 essais sont réalisés. Pour un mélange performant, des essais de
résistance en compression à 1h, 2h et 3h sont faits. Pour les formulations à gain de
résistance moins rapide, un ou deux essais sont réalisés toutes les heures si les résistances
sont faibles et ce, jusqu’à concurrence de 6h.
5.4.2 Essai de résistance en compression
La même méthodologie que celle présentée à la Section 4.3.2.2 est utilisée à l’exception des
pas de temps. Afin de s’assurer que les formulations à l’étude conservent leurs propriétés
dans le temps, des échéances supplémentaires sont ajoutées. Ainsi, les essais de résistance
en compression sont réalisés aux échéances suivantes : 3h, 6h, 1j, 7j, 28j, 56j, 90j et 120j.
Encore une fois, les essais à 3h dépendent de la prise du matériau qui doit permettre le
carottage. La dernière échéance réalisée avec le « End Beam Test » (résistance en
compression ≥ 10MPa) est aussi faite en parallèle sur 3 carottes.
5.4.3 Essai de résistance au gel-dégel
Des essais de résistances au gel-dégel suivant la procédure A de la norme ASTM C 666
(ASTM 2008) sont faits sur chaque formulation à l’essai. Les prismes nécessaires à cet
essai sont coupés à même un panneau de projection. L’essai débute après une cure de 28
jours dans une chambre à environnement contrôlé (100% humidité) situé dans les
laboratoires du CRIB.
5.4.4 Essai d’absorption
L’essai d’absorption est utilisé dans l’industrie du béton projeté comme un indicateur de la
bonne mise en place du matériau. Pour cette raison, un essai d’absorption ASTM C 642
(ASTM 2006) est fait sur chaque mélange. Afin d’obtenir le volume nécessaire à l’essai,
soit 350 cm3, des carottes de 100 mm (4″) de diamètre et de 50 mm (2″) de hauteur sont
extraites des panneaux de projection. Pour chaque formulation, 3 rondelles d’absorption
sont mises à l’essai après 28 jours de cure.
69
5.4.5 Détermination du module élastique
Le module élastique des formulations étudiées est déterminé en suivant la norme ASTM C
469 (ASTM 2002). L’essai se déroule préférentiellement après 28 jours de cure humide.
Deux carottes de 75 mm (3″) de chaque projection sont utilisées pour réaliser l’essai.
5.4.6 Essai de diffraction des rayons X
Afin d’obtenir une meilleure idée de la composition et de l’évolution dans le temps des
composés présents dans le mélange ternaire développé (DRY), une analyse par diffraction
des rayons X a été réalisée. L’essai a été réalisé par M. Jean Frenette du Laboratoire de
microgéologie de l’Université Laval. Afin de simplifier l’analyse, les échantillons fournis
étaient composés uniquement de pâte. L’utilisation d’un mortier aurait nécessairement
introduit d’importants pics de silice due à la présence du sable, ce qui aurait grandement
augmenté la difficulté de l’analyse. Ainsi, la pâte est produite suivant la même méthode
qu’à la Phase 1, mais sans y incorporer de granulat et est coulée dans des cylindres de 50
mm (2″) de diamètre par 100 mm (4″) de hauteur. Aux différentes échéances testées, un
cylindre est comprimé jusqu'à la rupture et des éclats provenant préférablement de
l’intérieur sont récupérés. Ceux-ci sont alors immergés dans l’isopropanol afin de stopper
l’hydratation pour une durée minimum de deux semaines. Par la suite, les morceaux sont
déposés dans un dessiccateur pour une durée minimum d’une semaine. Une fois ces étapes
réalisées, les échantillons sont broyés en une fine poudre à l’aide d’un mortier et d’un pilon.
L’analyse est alors réalisée sur ces poudres. Afin d’obtenir une caractérisation complète,
des essais aux échéances suivants ont été réalisés : 3h, 6h, 1j, 7j, 28j, 56j, 90j et 120j.
5.5 Résultats Phase 3
5.5.1 Résultats de résistance en compression
Le tableau 5.3 présente les moyennes des résistances en compression obtenues sur les
prismes et sur les carottes de tous les mélanges projetés.
Tableau 5.3 : Résultats de résistance en compression [MPa]
Échéance Type
d'échantillon DRY CV-33 TERN CSA FAST LIANT EAU
1h Prisme 12,9 3,9 1,0 1,0 --- --- 0,5
2h Prisme 24,9 16,3 1,3 1,1 1,2 0 5
3h Prisme 29,6 17,2 1,9 11,7 3,5 0,7 12,4
Carotte 35,6 19,5 --- --- --- --- ---
4h Prisme --- --- 4,5 15,0 7,9 1,4 13,1
5h Prisme --- --- 6,5 15,2 12,0 2,6 16,5
Carotte --- --- --- 22,3 --- --- ---
6h Prisme --- --- --- --- 13,7 4,6 19,4
Carotte 47,6 24,3 --- 22,4 23,3 --- 23,1
1j Carotte 54,6 28,1 21,7 30,5 41,7 18,7 32,3
7j Carotte 51,9 30,9 30,7 40,8 59,1 39,8 60,4
28j Carotte 52,1 32,7 39,0 40,7 81,2 57,4 72,6
56j Carotte 51,7* 49,7 55,6 41,5 72,0 48,2 68,7
90j Carotte 42,7* 48,6 55,7 --- 48,0 57,2 68,1
120j Carotte 50,4★ 50,5 57,4 57,9 69,2 --- 69,7
* : mesure réalisée 7 jours après l'échéance prévue
★ : mesure réalisée 61 jours après l'échéance prévue
71
5.5.2 Résultats de gel-dégel
Les résistances au gel-dégel sont très variables d’un mélange à l’autre. Certains spécimens
se désagrègent complètement avant les 300 cycles prescrits par la norme ASTM 666. Le
tableau 5.4 présente le nombre de cycles moyen à l’arrêt de l’essai ainsi que le facteur de
durabilité moyen obtenu pour chaque formulation.
Tableau 5.4 : Facteur de durabilité des formulations
Formulations
DRY CV-33 TERN CSA FAST LIANT EAU
Nombre de
cycles 218 83 306 72 305 --- 304
Facteur de
durabilité [%] 48 11 96 13 77 --- 100
Un manque de matériau a empêché la projection du panneau servant à produire les
spécimens nécessaires à la réalisation des essais de gel-dégel pour la formulation LIANT.
5.5.3 Résultats d’absorption et de vide perméable
Les résultats d’absorptions obtenues à l’aide de la norme ASTM C 642 (ASTM 2006) sont
présentés au tableau 5.5. Tous les essais ont été faits à 28j, à l’exception de la formulation
FAST qui a été réalisée à 120j.
Tableau 5.5 : Résultats d'absorption et de vides perméables
Formulations
DRY CV-33 TERN CSA FAST LIANT EAU
Absorption
(% M/M) --- 7,5% 6,9% 7,8% 7,3% 8,0% 6,7%
Vide
perméable
(% V/V)
--- 16,6% 15,5% 17,2% 15,9% 17,3% 14,9%
Il est à noter que le mélange développé, soit le mélange DRY, n’a pas permis la réalisation
de l’essai d’absorption normalisé. Après avoir été séchées dans une étuve, les éprouvettes
ont subi une expansion importante (plus de 3 mm) durant l’étape d’immersion ne
72
permettant plus la réalisation normalisée de l’essai d’absorption. La figure 5.1 permet
d’observer l’importance de cette expansion.
Figure 5.1 : Expansion observée sur le mélange DRY au cours de l'essai d'absorption
5.5.4 Résultats de module de Young
Le tableau 5.6 présente les modules élastiques des différentes formulations selon la norme
ASTM 469. Il est à noter que l’échéance de 28j a été respectée pour 6 des 7 formulations à
l’étude.
73
Tableau 5.6 : Résultats de module élastique
Formulation Échéance 2e montée
[GPa]
3e montée
[GPa] [GPa]
DRY 97 j 28,4 27,8
28,9 30,0 29,5
CV-33 28 j 30,5 30,7
28,7 24,2 29,2
TERN 28 j 36,8 36,3
35,9 35,6 34,9
CSA 28 j 32,7 32,4
33,5 34,5 34,3
FAST 28 j 35,6 35,2
35,6 36,0 35,7
LIANT 28 j 30,5 30,0
30,5 30,9 30,5
EAU 28 j 34,2 33,8
34,4 34,1 35,3
5.5.5 Résultats de diffraction au rayon X
Les résultats de diffractions des rayons X peuvent être retrouvés à l’annexe 3 (figures A.2 à
A.9). Le tableau 5.7 présente l’importance relative des composés détectés par l’essai par
diffraction des rayons X.
Tableau 5.7 : Importance relative des composés détectés par DRX
Importance
relative
Composés
3h 6h 1j 7j 28j 56j 90j 120j
1 Aft Aft Aft Aft Aft Aft Aft Aft
2 C3S C3S C3S C3S C3S C3S C3S Strat.
3 C3A C3A C3A C3A C3A C3A Strat. C3S
4 CaCO3 CaCO3 CaCO3 CaCO3 CaCO3 CaCO3 CaCO3 CaCO3
5 --- --- --- --- --- Strat. --- ---
Strat. = Stratlingite
Aft = Ettringite
CaCO3 = Calcite
74
5.6 Analyse des résultats
5.6.1 Paramètre de projection
Tel que présenté au chapitre 2, il est impossible de spécifier une quantité d’eau précise lors
d’une projection par voie sèche. Les règles de bonne pratique ont donc prévalu et toutes les
projections se sont faites à la « wettest possible consistency ». Cependant, dû aux
nombreuses variétés de matrices cimentaires projetées et aux différentes granulométries, la
quantité d’eau nécessaire pour l’obtention d’un tel état n’est pas identique d’un mélange à
un autre. Les rapports E/C ne sont donc pas nécessairement les mêmes. De plus, dû à la
prise très rapide des mélanges testés, la technique usuelle pour l’obtention de la
composition en place (essai de décantation et de teneur en eau (Bolduc 2009)) ne peut être
réalisée.
Les débits d’air de chaque projection sont tous similaires et se rapprochent de la valeur
visée initialement, soit de 180 CFM (5,1 m3/min).
5.6.2 Résistance en compression
5.6.2.1 Les mélanges ternaires : DRY, CV-33 et TERN
Le mélange ternaire développé présente les résistances en bas âge les plus élevées de toutes
les formulations testées. Aucun des autres mélanges mis à l’essai au cours de cette phase
n’approche les résistances obtenues de 1h (12,9 MPa) et à 6h (47,6 MPa). La formulation
DRY possède même le double des résistances des autres mélanges à 6h. Ce mélange
acquiert une résistance maximale en 24h avec environ 51 MPa. Une baisse inexpliquée des
capacités mécaniques du mélange est observée à 97j et disparait à 181j. Une possibilité est
que le mélange subit un phénomène semblable à la conversion observé sur les matrices à
base de CAC. Une description détaillée de cette hypothèse est présentée à la section 5.6.6.
Le mélange CV-33 est également un mélange composé d’une base ternaire, mais celle-ci
contient 33% de cendre volante de classe F (remplacement de liant, voir formulation
complète au tableau 5.2). Contrairement au mélange DRY, aucune diminution des
résistances n’est observée. Le remplacement de 33% de liant par de la cendre volante a une
75
grande influence (à la baisse) sur les résistances en compression en bas âge. Malgré la
diminution des résistances observées, cette formulation présente les deuxièmes meilleures
résistances de 1h à 3h. Le développement des résistances est moins rapide que pour son
équivalent sans cendre volante et il semble falloir environ 56 j avant d’atteindre la
résistance maximale. Contrairement au mélange DRY, qui obtient ces résistances finales en
24h, le mélange CV-33 ne possède environ que la moitié de sa résistance finale en 24h.
Bien que la littérature ne présente pas de réaction d’hydratation menant à la formation de
chaux, la formation de C-S-H laisse présager la présence d’un tel composé. Il s’ensuit que
la cendre volante réagira avec la chaux selon une réaction pouzzolanique. Cependant, les C-
S-H n’étant pas l’hydrate majoritaire dans la matrice, la quantité de chaux créée est minime
et ne peut donc pas expliquer que la résistance en compression double entre 28 et 56j.
L’ajout de cendre volante ralentit donc fortement l’hydratation générale du système.
Le développement des résistances en jeune âge du mélange TERN est peu concluant. Le
mélange n’a pas démontré le comportement en jeune âge espéré. Il est possible que le taux
de remplacement suggéré par le fournisseur, soit de 30%, ne soit pas adapté au ciment
employé. Cependant, puisqu’un ciment classique de type GU est employé, cette hypothèse
est peu probable. Le résultat obtenu est cependant conséquent avec les mélanges ternaires
majoritairement à base d’OPC réalisé lors de la Phase 1. Bien que la composition du liant
TERN soit inconnue, les proportions globales du liant produit à partir des recommandations
du fournisseur doivent se situer autours de 70% d’OPC, 20% de CAC et de 10% de sulfate
de calcium. Les résultats obtenus avec le mélange TERN ne sont pas très loin des résultats
obtenus avec la formulation 70/20/10 présentés au tableau 3.6. Les deux mélanges ont tous
deux démontré pratiquement aucune résistance en jeune âge. Les résultats divergents
cependant après 1 journée, le mélange TERN obtient alors des résistances en compression
supérieures. Comme il est présenté dans le chapitre 2, les mélanges ternaires
majoritairement à base de CAC obtiennent des résistances en compression en jeune âge
supérieures à leur contrepartie majoritairement à base d’OPC. Les résultats obtenus
semblent confirmer cette affirmation.
76
5.6.2.2 Le mélange à base de sulfoaluminate : CSA
Le mélange CSA ne démontre des résistances en jeune âge notables qu’à partir de 3h après
la projection. De plus, à l’inverse des matrices ternaires, aucun dégagement de chaleur
significatif n’a été ressenti durant la première heure suivant la projection. Un dégagement
de chaleur a été observé seulement 2h15 après la projection. Une raison possible est que
l’eau employée lors de cette projection était plus froide que l’eau employée lors de la
projection du mélange DRY car projeté en hiver. Cependant, le reste des matériaux
employés était entreposé dans les laboratoires du CRIB à température contrôlée. Ceci laisse
croire que ce mélange est très sensible à la température.
5.6.2.3 Les mélanges commerciaux accélérés à base d’OPC : FAST, LIANT et EAU
Bien que la composition des accélérateurs est inconnue, certains points ressortent de ces
trois mélanges. Les meilleures résistances en jeune âge sont obtenues avec une matrice
cimentaire composée de ciment Portland seul et d’un adjuvant ajouté à l’eau de projection,
soit le mélange EAU. Ceci laisse présager que l’accélérateur dans l’eau est plus efficace sur
le ciment Portland pur. Lorsque le ciment Portland est mélangé à un accélérateur en poudre,
cela nuit au développement des résistances jusqu'à 6h. Les résultats semblent démontrer
qu’en général, l’accélérateur dans l’eau est plus efficace que l’accélérateur en poudre. Le
mélange EAU conserve généralement bien ses résistances en compression dans le temps.
Les mélanges avec accélérateur en poudre ont tous les deux subi des variations marquées de
leurs résistances. La variabilité des résistances du mélange FAST est très importante.
L’ajout des deux accélérateurs semble accentuer la variabilité des résistances observée avec
l’adjuvant en poudre seul. Puisque les projections ont été faciles à réaliser et qu’aucun
problème d’équipement n’est survenu, les raisons de ce phénomène proviennent
possiblement du type d’accélérateur employé et d’une certaine incompatibilité.
5.6.3 Gel-dégel
Selon la norme ASTM C 666, un béton ayant un facteur de durabilité de 60% et plus après
300 cycles est considéré comme résistant aux cycles de gel-dégel. Les deux mélanges
ternaires produits en laboratoire ont démontré une résistance au gel-dégel très faible. De
77
plus, il semble que la cendre volante couplée à une matrice ternaire diminue de beaucoup sa
résistance au gel-dégel.
Le mélange composé uniquement de sulfoaluminates, soit le mélange CSA, a obtenu un
facteur de durabilité de 13%. Ce résultat va à l’encontre de nombreuses études qui ont
démontré le bon comportement au gel-dégel de ce type de liant lorsque coulé (Bernardo et
coll. 2006; Blais 2010; Juenger et coll. 2011). Le deuxième mélange incorporant 30% de
ciment sulfoalumineux a pour sa part démontré un excellent comportement au gel-dégel.
Les mélanges commerciaux préensachés FAST et EAU ont démontré un excellent
comportement au gel-dégel.
Les mélanges DRY, CV-33 et CSA ne sont pas durables au gel dans leur état actuel. Ceci
est probablement dû à la structure interne du mélange qui n’est pas suffisamment de qualité
pour offrir une protection adéquate contre le gel-dégel. Un moyen efficace de contrer ce
problème serait d’utiliser des entraineurs d’air en poudre (Dufour 1996). L’utilisation de cet
adjuvant permet d’obtenir un réseau de bulle d’air efficace qui vient protéger contre les
dommages causés par le gel-dégel. Cependant, en augmentant la porosité dans un mélange
de béton, on diminue la résistance en compression (Neville 2008). Il est donc important de
déterminer si la résistance au gel-dégel est nécessaire avant d’incorporer des adjuvants en
poudre.
5.6.4 Absorption
L’essai d’absorption est couramment utilisé dans l’industrie du béton projeté pour qualifier
la qualité du béton projeté. Une étude réalisée en 1987 (Morgan et coll. 1987) a permis
d’établir des critères de qualité du béton projeté in situ en fonction de l’absorption et des
vides perméables. Le tableau 5.8 présente cette classification tandis que le tableau 5.9
présente le classement des mélanges projetés en fonction des critères de Morgan.
78
Tableau 5.8 : Critères de qualité de Morgan
Qualité Volume de vide perméable
[%]
Absorption
[%]
Excellent < 14 < 6
Bonne 14 - 17 6 - 8
Raisonnable 17 - 19 8 - 9
Marginal > 19 > 9
Tableau 5.9 : Qualification des mélanges projetés en fonction des critères de Morgan
Formulations
DRY CSA CV-33 TERN FAST LIANT EAU
Absorption Bonne Bonne Bonne Bonne Bonne Bonne Bonne
Vide
perméable ---
Raison-
nable Bonne Bonne Bonne
Raison-
nable Bonne
En général, la mise en place des bétons projetés produits est classée comme « Bonne »
selon les résultats d’absorption bouillie et de vide perméable, à l’exception des mélanges
CSA et LIANT. Bien que les résultats de vide perméable des mélanges CSA et LIANT
soient « Raisonnables », la projection de ces mélanges a produit des bétons aux
performances mécaniques adéquates. Il est important de spécifier que bien que les critères
de Morgan soient utilisés comme référence dans l’industrie, ceux-ci ont été développés à
partir de béton projeté à matrice cimentaire classique, soit à base de ciment Portland et à
base de ciment Portland-fumée de silice. Il est donc incertain si ces critères peuvent
également s’appliquer à des bétons projetés à base cimentaire non traditionnelle, telles que
les OPC-CAC- et les sulfoaluminates.
Il a été démontré que l’essai d’absorption ne peut détecter efficacement les vides de
compaction et qu’un essai de résistance en compression est un meilleur indicateur de la
compaction du matériau (Bolduc 2009). Ainsi, avec les résistances en compression
obtenues et avec l’absence d’un nombre important de vides de compaction sur le pourtour
79
des nombreux spécimens carottés, il est possible d’affirmer que le béton projeté a été
produit avec une compaction adéquate.
L’expansion remarquée au cours de l’essai d’absorption sur le mélange DRY présente les
symptômes d’une attaque sulfatique interne, plus connue sous le nom général d’ettringite
différé (DEF). Ce type de problème se manifeste lorsqu’il y a formation hétérogène
d’ettringite dans une matrice cimentaire durcie, ce qui crée une expansion globale du
système. Cette attaque se produit lorsqu’un béton contenant beaucoup de sulfates, présents
sous forme d’ettringite, subit un traitement thermique. L’ettringite est un hydrate stable à
température ambiante, mais se solubilise aux alentours de 70°C (Collepardi 2003). Lors de
la réalisation de l’essai d’absorption, les rondelles sont entreposées dans une étuve à plus de
100°C durant de la phase de séchage. L’ettringite se retrouve donc solubilisée durant
l’essai.
Il s’ensuit que les matrices contenant majoritairement de l’ettringite devraient toutes subir
une expansion qui rend impossible la réalisation de l’essai ASTM C 642. Cependant, les
mélanges CSA, TERN et CV-33 sont tous, en théorie, composés majoritairement
d’ettringite, mais n’ont pas subi d’expansion significative (pas de fissuration). Le mélange
développé doit donc posséder une particularité qui le distingue des autres matrices à base
d’ettringite.
Afin de trouver des pistes de solution à ce phénomène, il est nécessaire de s’attarder plus en
détail à ce qui se produit lors du traitement thermique. Il est démontré que lors de la
solubilisation de l’ettringite, l’ion Al se substituent à d’autres ions dans différents hydrates
présents dans la matrice (Taylor et coll. 2001). Lorsque la température revient à la normale,
la substitution de l’Al subsiste, car le lien créé entre les hydrates et l’ion est très fort.
Malgré la présence de SO3 en solution, l’expansion ne peut survenir, car il n’y a pas assez
d’ions Al disponibles pour créer suffisamment d’ettringite.
Une hypothèse expliquant l’expansion du mélange DRY peut être tirée des résultats de
diffractions des rayons X. Ceux-ci ont montré qu’à 28j, la matrice contient une portion non
négligeable de C3A. Ce composé fournit donc une source d’ion Al2+
qui permet aux ions en
solution de précipiter en ettringite. Dans le cas du mélange CV-33, puisque le tiers de la
80
matrice est remplacée par de la cendre volante, la quantité de C3A présente est grandement
diminuée. Il est possible que les C3A présents ne permettent une précipitation suffisante
pour créer de l’expansion. Dans le cas du mélange CSA, la théorie la plus probable
expliquant que la matrice n’aie pas subi d’expansion durant l’essai d’absorption est encore
le déficit en Al2+
. La quantité de sulfates présents dans le mélange est probablement égale à
la quantité nécessaire pour hydrater l’ensemble de la Ye’elimite. Il ne reste alors plus
d’ions Al facilement accessibles. Pour ce qui est du mélange TERN, les faibles résistances
en jeune âge laissent présager une faible quantité d’ettringite produite. Il est donc possible
que la quantité de sulfates dans le système ne soit tout simplement pas suffisante pour créer
une expansion. Il est important de préciser que ces hypothèses nécessiteraient des analyses
supplémentaires afin de les confirmer ou de les infirmer.
Selon les phénomènes observés, il semble donc impossible de réaliser un essai d’absorption
selon la norme ASTM C 642 sur un échantillon de béton possédant une matrice cimentaire
à base ternaire majoritairement à base de CAC. De par la procédure même, l’essai entraine
une forte expansion qui vient empêcher la réalisation de l’essai. L’expansion importante
qu’ont subie les spécimens ternaires après un traitement thermique permet d’affirmer que
l’utilisation de ce type de béton dans un environnement à haute température pourrait
s’avérer très problématique.
Un moyen d’obtenir une valeur d’absorption en respectant les concepts de la norme serait
de faire la saturation de l’échantillon avant le séchage. La saturation devrait cependant être
réalisée à température ambiante pour ne pas solubiliser l’ettringite. Il serait alors possible
de mesurer l’équivalent de la masse après ébullition et ensuite sécher l’échantillon pour
obtenir la masse sèche. Cette méthodologie devrait cependant être testée avec des matrices
traditionnelles et être comparée à l’essai normalisé pour en déterminer les différences.
5.6.5 Module de Young
Les deux mélanges à base d’OPC-CAC- ont les modules élastiques les plus faibles. Par
comparaison, le mélange TERN, qui a également été réalisé en laboratoire avec les mêmes
granulats, possède un module plus élevé. Il est cependant impossible de faire une
81
comparaison entre les mélanges préensachés et les mélanges réalisés en laboratoire. Ceci
est dû principalement à deux points.
Puisqu’il s’agit de mélanges commerciaux, leur contenu exact en liants ainsi que le
type de liants est inconnu.
Le module élastique des granulats est possiblement différent des granulats utilisés
en laboratoire, puisqu’ils ne proviennent pas de la même source.
Il est prouvé que le ratio granulat-liant ainsi que le module élastique des granulats affectent
le module élastique pour une résistance donnée (Neville 2008). Les ordres de grandeur
observés pour les modules élastiques se situent cependant tous dans une gamme de valeur
usuelle pour le béton.
Le module de Young des matrices ternaires avec cendre volante est identique à celui sans
cendre volante. Ce comportement est différent d’un béton à base de ciment Portland
classique, où l’ajout de cendre volante diminue le module de Young à cure identique
(Siddique 2004). Avec plus de 20 MPa de différence en compression entre les deux
mélanges ternaires, il aurait été logique d’observer une différence dans le module élastique.
Une explication serait l’échéance de l’essai. L’essai sur le mélange DRY a été réalisé à 97j,
soit lorsqu’une diminution des résistances en compression est observée. Le même
phénomène a peut-être fait diminuer le module élastique du mélange DRY en même temps
que ses résistances mécaniques.
5.6.6 Diffraction des rayons X
Ce type d’analyse permet d’obtenir une idée de l’importance de chacun des hydrates
présents dans une poudre. Il est cependant important de mettre en perspective les résultats
obtenus. Le taux minimum de détection d’un composé est de 5 %, les composés mineurs ne
sont pas détectés. Il est également important de noter que l’intensité des pics détectés varie
beaucoup selon le degré de cristallisation d’un composé. Par exemple, le quartz est une
phase très cristallisée qui fait apparaitre de très grands pics, et ce malgré une faible
proportion. Il est possible de comparer dans le temps une même formulation de liant et de
82
suivre l’évolution des pics de détection. Cet essai se prête donc bien à une analyse
comparative. Malgré toutes ces limitations, l’analyse par diffraction des rayons X permet
d’obtenir de précieuses informations, en gardant toutefois à l’esprit les limites présentées.
Les principaux composés détectés sont l’ettringite, les C3S, les C3A, le CaCO3 et la
stratlingite. Tel que prévu par la littérature, la phase la plus importante est l’ettringite, et ce,
peu importe l’échéance observée. Ceci est conséquent avec le développement rapide des
résistances observé. Puisque la présence de calcite est détectée 3h après le contact eau-
ciment et que l’intensité et le nombre de pics observés est constant dans le temps, cela
laisse présager qu’il s’agit d’un composé initialement présent, et non un composé
développé par hydratation (probablement dans le ciment Portland1 (CSA 2008)). On
observe également que l’ettringite semble se former principalement à partir des CA fournis
par les CAC puisqu’aucun CA ne sont détectés.
Le point le plus important présenté par les résultats de DRX est le développement de la
stratlingite, qui est initialement absent de la matrice cimentaire. Après 56j de cure, il est
l’hydrate détecté le moins présent et à 120j il est le deuxième hydrate en importance détecté
dans la matrice cimentaire, tout juste après l’ettringite. L’augmentation relative de la
stratlingite correspond également à la diminution relative des C3S et des C3A présents. Il
semble donc que la formation de stratlingite entraine une consommation d’un ou de ces
deux composées.
Avec les informations fournies par les résultats de DRX, il est possible de formuler une
hypothèse sur la diminution suivie du regain des résistances mécaniques du mélange DRY
basé sur le phénomène de conversion observé dans les CACs. Lors de l’hydratation des
CACs, des hydrates métastables se forment si la température est inférieur à 60°C (Muller
2010). Par la suite, en présence de certains composés en excès ou dus à un traitement
thermique, les hydrates se transforment toujours pour atteindre un état plus stable. Une
température élevée favorise grandement cette transformation en fournissant de l’énergie qui
accélère la conversion des hydrates. Selon la situation, la transformation des hydrates peut
1 Le ciment GU peut contenir 5% de calcaire
83
s’accompagner d’une diminution de volume de 52% (adapté de (Muller 2010). En se
transformant, les hydrates créent une porosité qui fait diminuer la résistance en
compression. Lorsqu’un traitement thermique est appliqué, cette diminution de résistance
mécanique se produit peu de temps après l’atteinte de la résistance maximale (Muller
2010). Puisque les échantillons testés ont été conservés dans une chambre à humidité et
température contrôlée, aucun traitement thermique n’a été appliqué sur les carottes et ne
peut donc être responsable d’un tel phénomène. L’hypothèse du composé en excès est donc
le plus vraisemblable.
Il existe cependant une différence majeure entre les matrices ternaires et celles à base de
CAC en ce qui attrait aux hydrates formés. Dans une matrice ternaire, l’hydrate principal,
soit l’ettringite, est stable. D’après les résultats de DRX, ce n’est pas un hydrate, mais une
phase minéralogique qui se dissout, soit les C3A. Puisque ce composé est au départ
anhydre, il ne contribue pas activement à la résistance en compression du béton en liant les
différents composés. Ceci peut expliquer pourquoi la dissolution n’entraine pas une
diminution aussi marqué des résistances mécaniques comme dans le cas des CAC où c’est
l’hydrate principalement responsable de la résistance qui se dissous.
Ainsi, la dissolution des C3A commence entre 28j et 56j après le début de l’hydratation.
Cependant, cette dissolution n’est alors pas très importante et n’influence pas la résistance
globale du système.
Entre 56 et 90j la dissolution des C3A devient très importante, faisant passer ce composé du
troisième composé d’importance présent à complètement absent. Cette dissolution créerait
de la porosité qui affecterait négativement les résistances en compression du béton. Cette
présence supérieure d’ions en solution permet la formation accrue de stratlingite.
Cependant, ce nouvel hydrate ne permet pas de combler complètement la porosité créée par
la dissolution du C3A.
À 120j, selon l’hypothèse avancée, la stratlingite a complètement comblé la porosité créée
par la dissolution des C3A. En comblant la porosité, la stratlingite permet au béton de
récupérer ses résistances initiales, soit celle d’avant ce phénomène de pseudo-conversion.
Cette augmentation de la quantité de stratlingite le fait passer du troisième composé en
84
importance au deuxième. Encore une fois, il est difficile de déterminer si les C3S se sont
dissous ou si la quantité de stratlingite créée est tout simplement plus importante que la
proportion de C3S initialement présent.
Ainsi, le mélange DRY subirait un processus de dissolution-recristallisation très lent, qui
touche les C3A (et peut-être les C3S) créant ainsi une porosité plus élevée le temps que la
stratlingite se cristallise et vienne combler la porosité.
Il reste cependant de nombreuses questions sans réponse. Une de celles-ci est pourquoi les
C3A, des composés généralement très réactifs, se solubilisent si tard dans l’hydratation. Il
est également difficile de déterminer si les C3S se solubilisent ou encore qu’elle est
l’évolution dans le temps des composés non détectables par DRX. Les essais au DRX et les
essais de compression ont été réalisés à des intervalles relativement longs après les
premiers 28 j. Avec les données générées, il est donc impossible de dire si la baisse de
résistance observée à 97 j est un minimum ou si le mélange est déjà en train de regagner ces
résistances en compression. Une autre question restée sans réponse est l’influence du
rapport E/L sur les résultats de DRX. Puisqu’il est impossible de spécifier un rapport E/L
lorsque le béton projeté par voie sèche est employé, le rapport E/L de la pâte utilisée pour
réaliser l’essai de DRX et le mélange ternaire projeté ont de très grande chance d’être
différent. L’étude de l’hydratation de ce type de matrice est encore très préliminaire, la
variation sur la formation des hydrates du rapport E/L est inconnue.
Ainsi, plusieurs études complémentaires seraient nécessaires afin de trouver les réponses
aux points mentionnés et aux nombreuses interrogations n’ayant pas été citées.
5.7 Conclusion
Le mélange ternaire développé (DRY) présente des résistances en bas âge supérieures aux
mélanges commerciaux. Le développement des résistances du mélange DRY est beaucoup
plus rapide que tous les autres types de systèmes testés dans le cadre de cette maîtrise
(ciment de sulfoaluminate de calcium et ciment Portland). Le mélange ternaire avec cendre
volante (CV-33) possède également des résistances en compression très performant en bas
âge, supplantant largement les mélanges commerciaux de 1h à 3h. Les essais avec un liant
85
ternaire majoritairement à base d’OPC (TERN) ont confirmé les résultats de la Phase 1
selon lesquels les formulations majoritairement à base d’OPC sont moins performante au
jeune âge que leurs contreparties à base de CAC. Ainsi, à partir des résultats obtenus, il est
possible d’affirmer que l’utilisation de liants à base d’OPC-CAC- majoritairement CAC
en béton projeté par voie sèche, produit des bétons aux résistances en jeune âge inégalées
par tout autre type de liants cimentaire facilement disponible sur le marché.
Chapitre 6 - Conclusion
6.1 Introduction
Le projet de recherche entrepris à travers cette maîtrise avait comme objectif de développer
un mélange de béton projeté par voie sèche ayant de très hautes résistances initiales et un
comportement postfissuration optimisé. Pour ce faire, trois phases expérimentales ont été
réalisées. La Phase 1 s’est attardée à la détermination de la formulation optimisée
(résistance en compression et stabilité volumique) d’un liant à base OPC-CAC- sur des
échantillons de mortier. La Phase 2 a porté sur la projection de béton projeté par voie sèche
contenant un haut volume de fibre. Finalement, la Phase 3 s’est concentrée sur la
production de béton projeté à ultra haute résistance initiale.
Ce chapitre présente les conclusions générales de ce projet de recherche. Les principales
questions que ce projet a engendrées ainsi que des pistes de futures recherches y étant
rattachées sont amenées par la suite.
6.2 Conclusions générales
Phase 1 : Assemblage d’un liant pour béton projeté
La première phase de ce projet a été consacrée exclusivement à la formulation de mélange
de mortier équivalent. Les nombreuses formulations à l’essai ont permis d’approfondir le
comportement des liants OPC-CAC- et d’identifier le meilleur candidat pour la phase de
projection de béton par voie sèche. Les principales conclusions de cette phase sont :
La réalisation de plusieurs formulations de mortier OPC-CAC- à partir de deux
types de sulfate de calcium a permis de dresser un tableau général du
développement des résistances mécaniques associé à ces liants, avec des résultats
aussi tôt que 3h après le contact eau-liant.
87
Les résultats démontrent une grande sensibilité des proportions OPC-CAC- sur le
comportement des mortiers produits; cela est d’autant plus vrai que l’on s’approche
de la limite expansive (figure 3.6).
Les formulations non expansives démontrant les meilleures résistances en
compression au jeune âge (3h) sont la 40/40/20 avec sulfate de calcium anhydre et
la 20/50/30 avec sulfate de calcium hémihydrate.
Phase 2 : Béton projeté par voie sèche avec haut volume de fibre
La deuxième phase de ce projet s’est attardée à la production d’un béton projeté par voie
sèche offrant un comportement écrouissant. Pour arriver à produire un béton avec ce
comportement, différents mélanges contenant de hauts volumes de fibres ont été préparés
en laboratoire. Les principales conclusions de cette phase sont les suivantes :
Il est très difficile d’incorporer de haut volume de fibre en utilisant l’équipement du
laboratoire du CRIB de l’Université Laval. La quantité de fibre présente ne peut
simplement pas passer dans le système rotor-boyau.
La projection de haut volume de fibre serait probablement plus facile avec un
équipement adapté ou spécialisé.
Phase 3 : Béton projeté à ultra haute résistance initiale
La troisième phase de ce projet visait la projection d’un béton projeté par voie sèche
possédant de (très) hautes résistances initiales. Les objectifs complétés au cours de cette
phase sont de déterminer si l’équipement et les techniques usuelles de béton projeté
permettent de produire un béton homogène, ainsi que de caractériser le béton projeté à base
d’OPC-CAC- . Afin de caractériser efficacement et valider le béton produit, 5 bétons
projetés commerciaux aux résistances mécaniques élevées en jeune âge ont été projetés
dans le laboratoire, permettant une comparaison entre le béton développé et ce qui est
disponible sur le marché. Les points qui suivent présentent les principales conclusions de la
Phase 3 :
La projection d’un béton projeté par voie sèche à partir de la formulation
déterminée à la Phase 1 a permis de produire un béton homogène avec de
l’équipement conventionnel et suivant les règles de bonne pratique du béton projeté
usuel.
88
Les résistances mécaniques au jeune âge du béton produit sont très supérieures à ce
qui est présentement disponible en pratique; des résistances en compression de 12
MPa à 1h et de 35 MPa à 3h ont été obtenues tandis que la résistance finale de 50
MPa est obtenue après une (1) seule journée.
Le béton produit présente une diminution de ces résistances mécaniques, qui est par
la suite comblée (entre 90j et 150j). Une hypothèse expliquant ce phénomène est
une dissolution très lente du C3A anhydres (principalement de 56 à 90j) ce qui
augmente la porosité de la matrice d’où une perte de résistances mécaniques. Par la
suite, il y aurait une cristallisation de stratlingite qui vient combler la porosité
engendrée par la dissolution du C3A, recouvrant les résistances perdues. Cette
hypothèse est toutefois très préliminaire compte tenu de la complexité du système
étudié.
Le module élastique du béton projeté produit est similaire à un béton projeté
classique à base de ciment Portland.
L’essai d’absorption a permis de démontrer que le béton produit est sensible aux
hautes températures.
Le béton projeté produit est pour le moment non résistant au gel-dégel et doit être
modifié s’il est soumis à ce phénomène.
6.3 Recherches futures
De par sa nature exploratoire, ce projet de recherche a soulevé de nombreuses questions qui
nécessitent des études plus approfondies.
Un premier aspect touche évidemment le béton projeté par voie sèche à haut volume de
fibres. Quelques pistes de solutions ont été mentionnées à la fin du chapitre 4, mais une
étude plus approfondie est nécessaire. Bien que les délais ne le permettaient pas dans le
cadre de cette maîtrise, l’incorporation de fibres directement à la sortie de la lance à l’aide
d’une pièce d’équipement supplémentaire par laquelle le boyau de projection passe est une
avenue très intéressante pour un futur projet. La projection de béton écrouissant aurait de
grands avantages dans de nombreux domaines de construction et des réparations.
89
L’utilisation de liants OPC-CAC- dans le béton projeté a soulevé une myriade de
questions liées à l’hydratation de ces systèmes. En plus des nombreuses hypothèses
présentées dans ce travail qui doivent être confirmées, par exemple le phénomène de «
pseudo conversion », de nombreuses questions persistent avant l’utilisation dans un
contexte réel de ce type de liant en béton projeté. Une des plus importantes est l’influence
de la cure sur les résistances mécaniques obtenues. Dans le milieu minier, il est connu que
la cure du béton projeté est très limitée (ou tout simplement inexistante). Puisque les
molécules d’ettringite incorporent beaucoup d’eau, il serait très intéressant d’explorer et
vérifier l’évolution réelle des résistances mécaniques dans ce un environnement sec. Il est
également incontournable de réaliser une étude approfondie de la durabilité et de la
robustesse de ce type de liant cimentaire avant son utilisation sur le terrain. Bien que peu
important pour le domaine du support de terrain et minier, la durabilité est très importante
dans le domaine des réparations. Une étude plus approfondit du comportement à haute
température de ces matrices est également nécessaire suite à l’expansion observé lors de
l’essai d’absorption.
Avec les résultats obtenus au cours de cette maîtrise, les futures recherches en béton projeté
devront nécessairement tenir compte des liants OPC-CAC- . Ces liants ont démontré un
potentiel qui se doit d’être étudié plus en profondeur afin de permettre de répondre plus
efficacement aux besoins de l’industrie qui sont grandissant.
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Annexe 1
Matériaux
95
: :
: :
: : Rév.
Page 1 de 1
N° d'échantillon : Référence :
N° d'échantillon client : Usage :
Type de matériau : Calibre :
Source première; ville : Classe :
Endroit échantillonné :
Prélevé le :
Par :
:
100
95 - 100
80 - 100
50 - 90
25 - 65
10 - 35
2 - 10
Cu : 3,6 Cc : 1,0 MF : D10 : D30 :
Sable :
% % Silt et argile :
UN ASTÉRISQUE ACCOMPAGNE TOUT RÉSULTAT NON CONFORME
Approuvé par :
Reçu le
Granulats fins
40
10-11-03
BC 80µm-5
19
L10-201
Sable manufacturé
10 100
20
97,20,0
Analyse granulométrique (LC 21-040)
TAMIS (mm)
52
56
Cailloux :
0,208
Proportions selon analyse granulométrique (% )
14
5
19
0,630
0,080
0,160 4
2,5 95
84
98
1,25
0,315
kg/m³
Absorption (LC 21-065) (%)
Masse vol. sèche maximale Humidité optimale
Autres essais
1,9Gravier :
Date :
2,48
Retenu 5 mm
0,9
Densité relative brute S.S.S. (LC 21-065)
Dossier
Rapport n°
Service de laboratoire
; Essais sur granulats (U.L.)Québec
Remarques
EQ-09-IM-229 rév. 00 (06-03)
28
Densité relative brute (LC 21-065)
Essais sur sols, granulats
e t autres matériaux
P018824-0510UNI VERSI TÉ LAVAL - Centre de recherche infrastructures en béton, Pavillon Adrien-Pouliot Client
Projet Réf. client
Endroit
80
TAMISAT (%)
112
EXIGENCES MESURÉ
Échantillonnage
Université Laval
Banc de la voirie;
712262
Spécification n° 2
19
Exigé
0
CCDG
le client
0,394 D60 : 0,744
0,9
Mesuré
2,705
0,50
2,729
2,692
Densité relative apparente (LC 21-065)
Sylvie Hamel, Chef laboratoire Pierre Simard, tech. princ. 10-11-1010-11-09
Préparé par : Date :
Le prélèvement et le transport de l'échantillon ont été effectués par un représentant du client.
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
100
0,01 0,1 1 10 100
Ta
mis
at
(%)
Tamis (mm)
Granulométrie
Fuseau
Silt et argile Sable Gravier
325, rue de l'EspinayQuébec, G1L 2J2Téléphone: (418) 647-1402
96
97
98
99
100
101
TUF-STRAND SFSynthet ic Macr o-Fiber
Descr ipt ion
TUF-STRAND SF
Pr imar y Appl ications
Featur es/ Benefits
Packaging
Shel f Life
Technical Infor mation
FIBER
STU
F-STR
AN
D S
FM
aste
r Form
at #
:
102
103
104
105
106
Annexe 2
Adjuvantation
108
109
110
Figure A.1 : Dosage d’Eucon SPC utilisé en fonction de la formulation [ml]
Tableau A.1 : Dosage d’Eucon SPC
OPC CAC S Eucon [ml] OPC CAC S Eucon [ml]
100 0 0 4 35 40 25 8,5
80 10 10 4 35 45 20 8,5
70 20 10 6 30 50 20 8
60 40 0 9 30 40 30 8
60 30 10 7 30 30 40 9
60 20 20 6 30 60 10 6,5
50 40 10 9 20 80 0 3
50 30 20 7 20 70 10 4
50 20 30 7 20 60 20 6
45 40 15 8,5 20 50 30 7
45 35 20 8,5 20 40 40 7
40 60 0 7 10 80 10 2
40 50 10 8 10 70 20 3,5
40 40 20 9 10 60 30 4
40 30 30 8 0 100 0 1
40 45 15 8,5 0 80 20 1
40 35 25 8,5 0 60 40 3
Annexe 3
Résultat de diffraction aux rayons X
112
Figure A.2 : Résultats d’analyse DRX à 3h
Figure A.3 : Résultats d’analyse DRX à 6h
113
Figure A.4 : Résultats d’analyse DRX à 1j
Figure A.5 : Résultats d’analyse DRX à 7j
114
Figure A.6 : Résultats d’analyse DRX à 28j
Figure A.7 : Résultats d’analyse DRX à 56j
115
Figure A.8 : Résultats d’analyse DRX à 90j
Figure A.9 : Résultats d’analyse DRX à 120j
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